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BALADES INSOLITES TOME 1
CURIOSITÉS > SOMME - AISNE - OISE
HORS SÉRIE - JUIN 2017 - 5,90 €
SOYEZ CURIEUX !
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es beaux jours arrivent et avec eux, l’odeur des vacances et l’envie de flâner. Pas besoin de partir loin pour décompresser et faire de belles découvertes. Le Courrier picard vous propose ainsi avec ce magazine d’aller à la rencontre de lieux insolites de la région. Ici la curiosité n’est pas un vilain défaut : notre région ne se résume pas à des champs de céréales à perte de vue, ni à la forêt de Compiègne, ni même à notre littoral. Notre territoire est le témoin de notre riche passé et d’une grande variété d’activités. Héritage industriel comme Hirson et sa tour florentine, héritage cultuel avec les croix de Tuf parsemées dans le Vimeu. Héritage géologique grâce au cordon de galets au Hourdel, ou encore aux maisons troglodytes de Gouvieux. Mais aussi patrimoine d’histoires et de légendes comme nous le dit l’arbre à loques de Senarpont, ou encore le menhir de Doingt-Flamicourt. Bref, les idées de sorties enrichissantes ne manquent pas ! Nous avons donc sélectionné pour vous vingt-cinq lieux insolites, que nous sommes heureux de vous présenter en détail au fil de ces 76 pages. Des curiosités qui sont à chaque fois le point de départ d’une balade et ce, dans les trois départements picards. À pied, en vélo, en famille, et même en voiture, une infographie pour chaque circuit vous permettra de vous laisser guider par les conseils que nos journalistes ont recueillis au printemps pour l’élaboration de ce premier tome dédié aux balades insolites en Picardie. Avant de vous lancer sur les sentiers de l’insolite, bonne lecture, et surtout, soyez curieux. OLIVIER HANQUIER
BALADES INSOLITES - Tome 1 Juin 2017 - Hors-série édité par le Courrier picard Directeur de la publication : Jean-Dominique Lavazais. Coordinateur de la rédaction du hors-série : Olivier Hanquier. Rédaction des textes : Julien Gris avec la participation de Fabrice Julien, Vincent Hery, Denis Girette, Denis Desbleds. Maquette et mise en page : Gérard Garcia. Crédits photos : D. Desbleds, F. Julien, J. Gris, F. Haslin, D. Bossut, V. Hery, D. Girette. Infographie : Idix, Olivier Hanquier, Julien Gris, Thomas Dievart. Coordination : Véronique Villain. Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne pourra être reproduite ni diffusée sous aucune forme ni par aucun moyen électronique, mécanique ou d’autre nature, sans l’autorisation écrite des propriétaires des droits de l’éditeur © 2017 - Courrier picard. Impression : Imprimerie Léonce Deprez. Merci à toutes les personnes rencontrées en chemin pour leur gentillesse et leur disponibilité. Éditions Courrier picard - 29, rue de la République - CS 41 021 - 80010 Amiens Cedex 1 - Tél. 03 22 82 60 00 - Fax. 03 22 82 60 01 - www.courrier-picard.fr
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CURIOSITÉS > SOMME - AISNE - OISE
SOMMAIRE
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L'arbre à loques de Senarpont ................................................................... Pages 7 à 9
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Le cimetière soviétique de Noyers-Saint-Martin ................................... Pages 10 à 11
3
La tour florentine de Buire et la rotonde d’Hirson ................................ Pages 12 à 14
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Le château Mennechet à Chiry-Ourscamp ............................................. Pages 15 à 17
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Les muches de Domqueur............................................................................ Pages 18 à 20
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Le funiculaire du Tréport ............................................................................... Pages 21 à 23
7
Le menhir de Doingt ....................................................................................... Pages 24 à 25
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La chapelle des marins à Saint-Valery-sur-Somme .............................. Pages 26 à 28
9
Les souterrains de Saint-Quentin ............................................................... Pages 29 à 31
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Savignies, le point culminant de l’Oise .................................................... Pages 32 à 33
11
La Hottée du Diable à Coincy ...................................................................... Pages 34 à 35
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La croix de tuf à Fontaine-sur-Somme ..................................................... Pages 36 à 38
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La Demeure du père André-Marie à Croixrault ....................................... Pages 39 à 41
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Le clocher de l’église de Vadencourt......................................................... Pages 42 à 43
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La clairière de l’Armistice à Rethondes..................................................... Pages 44 à 45
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Le cordon de galets du Hourdel.................................................................. Pages 46 à 48
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Les maisons troglodytes à Gouvieux......................................................... Pages 49 à 51
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Beauvais, capitale de la céramique ........................................................... Pages 52 à 53
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Les puits tournants de Fréchencourt......................................................... Pages 54 à 56
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Le labyrinthe de la cathédrale d’Amiens .................................................. Pages 57 à 59
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Les grottes de Naours ................................................................................... Pages 60 à 61
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Le parc du Marquenterre et le blockhaus de Bihen .............................. Pages 62 à 64
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Le cimetière abandonné de Trefcon........................................................... Pages 65 à 67
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Le moulin d’Eaucourt-sur-Somme ............................................................. Pages 68 à 70
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À Quend-Plage, le sable, la mer et les nudistes..................................... Pages 71 à 73
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CURIOSITÉ
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L'ARBRE À LOQUES DE SENARPONT
L’ARBRE À LOQUES, UN TÉMOIGNAGE D’AFFECTIONS Remercier saint Claude à qui l’on prêtait un pouvoir de guérison. Voici pourquoi, depuis des siècles, des vêtements sont déposés sur et autour de quelques arbres, près du village de Senarpont. omme une hallucination. On se frotte les yeux lorsque la route départementale 1015, qui chemine vers le Tréport, plonge vers Senarpont, commune de l’ouest de la Somme, à la limite de la Seine-Maritime. Dans un bois en bord de route, des vêtements, la plupart en très mauvais état, c’est pour ça qu’on parle de loques, « fleurissent » sur des arbres. D’autres textiles jonchent le sol, un bloc de béton, qui fait office de chapelle, complète le décor. Un paysage où tout a un sens, du moins celui que l’histoire locale veut bien lui conférer.
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L’arbre à loques était seul à l’époque, cet orme était lié au culte voué à saint Claude. L’association pour l’église de Senarpont nous éclaire sur son origine. En 1499, une chapelle dédiée à ce moine est construite. Pourquoi lui ? On sait que l’évêque d’Amiens de l’époque était originaire du Jura, tandis que saint Claude est né dans ce même département, à Salins-les-Bains, vers l’an 607. Si la population de Senarpont était si reconnaissante envers saint Claude, c’est qu’une épidémie de peste qui sévissait dans la région allait épargner la commune tandis que Neuville-Coppegueule, à 5 km de là, n’y échappait pas. La forêt séparant les deux villages semble être une explication plus rationnelle à ce barrage sanitaire.
« La personne malade portait sur elle un morceau de tissu durant ces neuf jours avant de venir le déposer. »
Daniel Denis, ancien maire : " C'est davantage une tradition populaire lointaine qui concerne peu Senarpont ".
rapporte l’ancien maire, aujourd’hui président de l’association pour l’église de Senarpont. Il y avait aussi l’arbre qui était classé et puis un jour, une branche maîtresse est tombée sur un cyclomotoriste et il a fallu couper des branches. L’arbre a subi plusieurs incendies avant de disparaître, il y a 25 ans environ. » Certains ne veulent pas que la belle histoire s’efface : une nouvelle chapelle, telle qu’on la voit aujourd’hui, est élevée ; une nouvelle statue de saint Claude y trouve refuge. Sur décision du propriétaire des lieux (le terrain, bien qu’accessible à chacun, est privé), trois ormes sont replantés. Deux ne survivront pas à un nouveau feu malveillant.
Daniel Denis, ancien maire de Senarpont. Quoiqu’il en soit, la chapelle construite en guise de remerciement va disparaître à la Révolution et une statue du saint est accrochée dans un arbre. Une procession annuelle s’y tient avant que la statue de bois ne soit volée en 1960. Daniel Denis s’en souvient : « C’était à mon arrivée et cela suscitait de l’émotion dans le village,
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Reste à décrypter cette coutume de suspendre aux branches de l’orme (et des arbres voisins), ou d’enrouler autour des troncs, toutes sortes de vêtements. « Classiquement, on faisait une neuvaine, c’està-dire neuf jours de prière à saint Claude, raconte Daniel Denis. La personne malade portait sur elle un morceau de tissu durant ces neuf jours avant de venir le déposer.
Au début, cela ne concernait que les maladies de peau, le vêtement était présenté à saint Claude pour obtenir une guérison. » De quoi s’interroger sur les vertus supposées ? « J’ai entendu parler d’un enfant de Senarpont qui avait une maladie de peau et qui a guéri après une neuvaine à saintClaude, témoigne celui qui est aussi l’ancien médecin de la commune. Je suis naturellement sceptique quant aux miracles, si des personnes me disent qu’elles ont guéri, je les crois, mais ce n’est pas grâce à l’arbre. » Selon Daniel Denis, les arbres à l’époque intéressent davantage les visiteurs que les gens du cru : « Je vis ici depuis plus de 40 ans et j’ai très rarement entendu dire que des gens de Senarpont venaient déposer des vêtements. C’est davantage une tradition populaire lointaine qui concerne peu Senarpont. » Une tradition qui est loin de disparaître, à voir la quantité de loques présente sur place, l’œuvre d’anonymes. En quittant les lieux, on se dit qu’ici, c’est toujours la guenille qui redémarre.
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BALADE
DE L’ARBRE À LOQUES AU LARRIS DE SAINT-AUBIN-RIVIÈRE
Ce pont marque le début de la randonnée.
À flanc de colline, vous voilà parti pour une petite escalade dans un environnement plutôt aride mais ô combien reposant, qui donne à ce coin de la Somme des airs de Méditerranée.
Sur les hauteurs du larris, on aperçoit le village en contre-bas.
l est tentant de découvrir le larris d’Inval-Boiron, le panneau d’accueil évoquant des chauves-souris en chemin aiguise la curiosité. « C’est très compliqué de les apercevoir, j’ai déjà essayé d’y emmener mon fils, nous ne les avons pas vues », tempère un riverain. Si cette absence n’aurait sans doute rien ôté à l’intérêt du site, j’opte finalement pour une destination toute
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proche : le larris de Saint-Aubin-Rivière. Pour y accéder, il faut s’éloigner de Senarpont par la D211, traverser Inval-Boiron puis Le Mazis. À votre entrée dans Saint-Aubin-Rivière, tourner à gauche (rue du moulin), juste après l’entreprise Dehan. Il est ensuite préférable de se garer dès que possible car un stationnement plus proche du parcours
vous contraint à empiéter sur la route. Autant anticiper votre marche en poursuivant tout droit pour atteindre le pont turquoise 1 . Si l’heure s’y prête, c’est le moment de déballer le panier repas pour un déjeuner champêtre au pied du moulin 2 qui donne son nom à la rue. Une table de pique-nique est à votre disposition. Si celle-ci est occupée, vous pourrez toujours vous rabattre sur celle
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installée au début de l’ascension du larris, dans quelques minutes, avec l’inconvénient de n'être protégé ni du soleil, ni de la pluie. Le pont franchi, le sentier de randonnée est immédiatement à droite. Premier choix : la boucle du Liger (remonter à gauche) ou le larris (tout droit). Ce sera le larris et rien d’autre ! Rappelons que les larris sont des pentes faites d’herbages secs et d’arbustes. Si les sandwiches viennent d’être avalés, accordez-vous quelques minutes car ça grimpe fort dès le début. L’étroitesse du chemin est sélective : seuls vos pieds vous mèneront plus haut, oubliez les vélos cette fois ! Il serait incorrect de ne pas vous signaler cette hésitation qui m’a valu un immense détour et une première descente sur les fesses, le long de fils barbelés. Non, lorsque le chemin se dégage sur le plateau, il ne faut pas longer la clôture sur votre gauche mais bien poursuivre l’ascension face à vous. Les premiers regards en arrière ne trompaient pas : le panorama n’allait pas me décevoir. 3 Confirmation plus haut en slalomant dans les herbes. Seconde hésitation au dernier totem qui invite à tourner à droite (tout droit, on débouche sur un portail et le chemin n’est ensuite plus praticable). Descendre cette pente abrupte ? Oui, pas d’inquiétude, tout cela est moins compliqué qu’il n’y paraît. Au final, une belle découverte, que ce larris et son côté sauvage. Le site est riche d'une flore exceptionnelle, à l'image de cette orchidée sauvage.
maps4news.com/©HERE
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CURIOSITÉ
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LE FUNICULAIRE DU TRÉPORT
DRÔLES DE CABINES DE PLAGE Il eut deux vies avant d’apparaître sous sa forme actuelle. Le funiculaire du Tréport, à la frontière de la Seine-Maritime et de la Somme, est un outil à la fois pratique et ludique pour se déplacer rapidement entre ville basse et ville haute.
Jérôme et Joby, touristes parisiens n'ont pas manqué l'ascension.
Dans les tunnels creusés dans la falaise, les voûtes en briques datées de 1907 sont toujours là, elles ont simplement été sablées.
n ballet permanent. Ces quatre petites cabines bleues en alignent des kilomètres. Chaque jour, elles montent et descendent les 155 m de rails posés en bas et dans la falaise de craie. Un moyen de locomotion insolite que Jérôme fait découvrir à Joby. Le comble pour ces Parisiens, c’est qu’ils n’ont jamais emprunté le célèbre funiculaire de Montmartre. « Les cabines sont plus grandes, mais il y a trop de monde, ici c’est plus calme », apprécie Madame. Jérôme est donc revenu faire une ascension mécanique après une première expérience « il y a trois-quatre ans ». Il trouve ce transport « sympa avec une vue qui est plutôt agréable ».
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La mer, vous la verrez en vous élevant dans les airs et vous en profiterez davantage au belvédère, où le funiculaire vous dépose. C’est ici que Vincent et Stéphanie Cocuel ont installé leur atelier de souffleur de verre. Il est né à Amiens, elle est originaire de la Vallée de la Bresle,
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À la sortie du tunnel, dans le sens descendant.
et tous deux s’intéressent à l’histoire du funiculaire qui, chaque jour, déverse son lot de visiteurs. « Mon papa a connu l’ancien modèle qui était un téléphérique avec des cabines suspendues, commence la jeune femme. Avec le vent, les cabines bougeaient beaucoup ce qui fait qu’il était peu utilisé (ndlr : l’exploitation a cessé en 1981). » Avant la naissance de ce projet, à la fin des années cinquante, un premier téléphérique avait été créé, il y a plus d’un siècle. « Les travaux ont commencé en 1907 et il n’a fallu que deux mois pour creuser la craie, admire Vincent. Le funiculaire servait à acheminer les clients vers le Trianon, un hôtel de luxe bâti sur ce qu’on appelle Les Terrasses. » « Quand j’étais enfant, c’était toujours une énigme de voir ces trous creusés dans la falaise et cette inscription « Tréport-Terrasse », ajoute Stéphanie (ndlr : le funiculaire, sous sa forme actuelle, a été remis en service en 2006.
Vincent et Stéphanie Cocuel devant les marches du Trianon, ancien hôtel de luxe.
INFOS PRATIQUES : L’utilisation du funiculaire est gratuite. Les cabines fonctionnent de 7h45 à 0h45 du 15 juin au 15 septembre ainsi que les jours fériés. Hors période estivale, le service est assuré de 7h45 à 20h45, du lundi au vendredi et jusqu’à 22h45 le dimanche. Le samedi, les horaires sont les mêmes qu’en période estivale. Il est conseillé de stationner en gare haute, là où les deux parkings, souterrain et en surface, sont moins couteux (2,50€ la journée). Restauration possible en gare haute.
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DU FUNICULAIRE AU BOIS DE CISE Au départ du Tréport, les falaises se découpent vers le bois de Cise sur la commune d'Ault, un écrin végétal parsemé de maisons anciennes et colorées, où le temps semble suspendu. ifficile d’établir un lieu fixe pour localiser vos premiers pas. Tout dépend en fait du temps dont vous disposez, de votre capacité de marche et de votre patience avant de découvrir un lieu précédé de sa réputation. La mienne étant limitée, c’est en voiture que je me rends dans ce bois, entre Mers-les-Bains et Ault, commune à laquelle il est rattaché. Quinze minutes suffisent pour rejoindre le site. Notez que les falaises entrent les 2 communes ne devraient pas être praticables cet été. Si vous préférez marcher au départ de Mers-les-Bains, comptez 1h30 à 2 heures, depuis Ault, une heure devrait suffire. Les offices de tourisme locaux vous indiqueront les déviations.
sentiers aux noms évocateurs (rossignols, fougères, noisettes, violettes...) invitent à se perdre, à monter et descendre les chemins. Pas d’itinéraire convenu ici, chacun laissera libre cours à son envie du moment. Les nombreuses maisons au charme authentique font l’identité de cet élément du littoral picard. « À l’origine, le bois était sauvage, un promoteur a décidé de l’aménager dans le cadre de l’essor des bains de mer. Des lots ont été vendus à de riches aristocrates de l’époque, indique Céline Delahaye, de l’office de tourisme d’Ault. On trouve des références à l’art nouveau avec par exemple des balcons en bois stylisé ou des aisseliers, utilisés pour soutenir la toiture, à tête de cygne ; cette référence à la nature est caractéristique. »
Le bois de Cise, c’est en fait une route qui descend jusqu’à la plage de galets. Selon la saison, il est possible de se garer tout en bas ou de devoir s’arrêter un peu plus haut. Sur place, de nombreuses allées et
Ces maisons, d’une architecture balnéaire, ont été élevées entre 1875 et 1925 ; la plupart au 20e siècle. Devant l’une d’elles, les Coucous (rue des mouettes) 2 , je rencontre François et Jacqueline Adam,
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Cette famille venue de Lorraine pour découvrir le littoral picard n'a pas manqué de faire halte au bois de Cise.
venus du Bas-Rhin. Ce couple de photographes amateurs trouve ici une source d’exploration inépuisable. « Tout nous plaît : les maisons, les mouettes, les sentiers, les fleurs, on les photographie et on cherche leur nom ensuite. On a aussi remarqué la couleur des briques : ici elles sont rouges alors que chez nous, c’est plutôt jaunâtre. » Ils s’intéressent aussi à l’agencement de ces demeures. « Les maisons sont en hauteur, avec la cuisine en bas et le salon-salle à manger au premier étage, c’est le style picard. » Le temps est fort couvert ce jourlà, une aubaine pour ces Alsaciens qui fuient la surexposition pour leurs clichés : « On voit mieux le relief, c’est le temps idéal pour les photos. » Qu’il semble heureux d’habiter ici même si hors-saison, de nombreux volets restent clos. Le bois de Cise est un lieu prisé pour abriter une résidence secondaire. Sylvie, elle, loge à l’année. Elle interrompt ses travaux domestiques pour partager quelques souvenirs. « Nous venons de Normandie, mon mari est arrivé à Eu pour raisons professionnelles et ce sont ses collègues de travail qui lui ont parlé de ce bois, raconte-t-elle. Nous sommes venus nous balader et nous avons trouvé ce coin hyper joli même si pour la baignade, ce n’est pas le top. » À l’en croire, les visiteurs préfèrent la nasse à la brasse : le site attire les pêcheurs de crevettes.
« Tout nous plaît : les maisons, les mouettes, les sentiers, les fleurs, on les photographie et on cherche leur nom ensuite. » François et Jacqueline Adam, touristes alsaciens. Sylvie et son époux ont donc acheté il y a 35 ans et apprécient évidemment « ce paysage naturel et calme » où il fait bon se promener. Comme les riverains, ils tiennent à leur tranquillité et se satisfont du peu d’animation (« il y a bien le feu d’artifice tiré de la plage de galets, Le bois offre des vues plongeantes sur de splendides demeures.
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le 15 août »). Si le lieu reste préservé, des changements ont tout de même été opérés. « Il y a 35 ans, c’était surtout des commerçants qui avaient leur maison ici ; à présent elles sont énormément vendues aux Belges. » Les plaques d’immatriculation fixées devant les portails en témoignent. Étant de passage, je m’interroge sur ce que donne ce lieu au quotidien. « On ne peut pas parler d’une vie locale, au maximum, nous devons être une centaine à vivre ici à l’année, confie-t-elle. Il y a un peu d’activité avec l’hôtel-restaurant Le Cise et pour les commerces, il y avait dans le temps une petite épicerie. Aujourd’hui, nous avons une charcuterie en haut du bois et un boulanger qui passe en camion, si vous avez oublié le sel ou le beurre, vous n’avez plus qu’à retourner faire vos courses à Mers ou à Eu ! »
Sylvie se plaît beaucoup dans cette maison depuis 35 ans.
Laissant Sylvie à ses occupations, je redescends vers la plage pour croiser Damien et Gaëlle. Ces Lorrains sont en séjour avec enfants et amis et ils sont tout occupés à avaler quelques sandwiches, face à un paysage aux antipodes de leur Meurthe-et-Moselle. 3 « Nous logeons au Crotoy et nous allons essayer de marcher le long des falaises jusqu’au Tréport même si c’est compliqué avec l’éboulement qu’il y a eu. » Et que pensent-ils du cadre de leur déjeuner ? « L’endroit est magnifique, voir la mer entre les falaises et puis ces maisons dans les bois, on dirait un décor de cinéma... » Dont vous pouvez devenir l’acteur. Ces touristes alsaciens s'intéressent tout particulièrement à l'architecture des maisons pour leurs photos.
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