Mères à croquer

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n°2

Les nouvelles Mères croquées sont arrivées ! Une impression indélébile, un mouvement intime, une idée fulgurante ou insistante... Ceux qui ont pris la plume nous livrent en un mot, une image, un objet, ce que c’est pour eux que l’être mère. Et pour vous ? Filles et fils du XXIe siècle, nous attendons vos croquis de mères !

La mèRe ! mais Les mèRes ? François Regnault Pour Lacan, La Femme n’existe pas, mais les femmes, oui, elles existent. La formule « La mère reste contaminée la femme pour le petit d’homme » suppose l’existence de La Mère, la mère du petit d’homme, qui n’en a qu’une, en principe. Mais les Mères ? Je ne l’entends guère, (moi peut-être seul ?), que comme une référence mythique au Second Faust de Gœthe (lequel croyait aussi à l’Eternel-Féminin). Méphistophélès envoie Faust chercher la figure de la Femme idéale, Hélène de Troie, pour la ramener à l’Empereur (du Saint-Empire). Et voici donc Méphistophélès précédant Faust dans une « sombre galerie » : « MéPHISToPHéLèS : Des déesses trônent, formidables, dans la solitude, / Autour d’elles il n’est point de lieu, encore moins de temps ; / Pour parler d’elles on ne saurait trouver de mots. / Ce sont les Mères ! FAUST (effrayé) : Les Mères ! MéPHISToPHéLèS : Tu frémis ? FAUST : Les Mères ! Les Mères ! – Cela sonne de manière étrange ! MéPHISToPHéLèS : étrange mystère, en effet. Déesses inconnues… » Méphistophélès lui donne alors la clé qui doit l’y conduire, et Faust s’écrie, frissonnant : « Les Mères ! Cela me pénètre toujours comme l’éclair ! Quel est ce

mot que je ne puis entendre ? » Puis il frappe du pied et disparaît dans l’abîme (Faust, Gœthe, acte I). Ah ! si vous aviez vu la mise en scène de ce passage dans le Faust monté par Giorgio Strehler au Teatro Studio de Milan, en 1988-1991 ! or autour des Mères « planent les images de toute créature, / Elles ne te voient pas, car elles ne voient que des schèmes », les idées et paradigmes de toutes choses, passées et à venir. Mais à quoi tout cela rime-t-il ? Je me dis que si pour Lacan, « femme » n’admet pas le singulier défini La, sauf à le barrer, « mère » en revanche, n’aurait pas de pluriel défini : les Mères n’existent pas. Ce que Gœthe, au fond, laisse dans l’abîme ! Sauf qu’au temps des mères porteuses et depuis le mariage pour tous, et bientôt la PMA, une pluralité de mères s’institue, ainsi qu’avec l’adoption, le fait qu’un enfant puisse avoir deux mères, et s’il a deux pères, pourquoi pas l’un des deux supposé une mère ? En quoi Gœthe se montre prophétique, puisque à ce prix, le futur homunculus, fabriqué, comme celui du Second Faust, in vitro, pourra s’écrier, au-delà – ou en deçà – de l’Œdipe, et à la merci de ce nouveau fantasme de la Multiple Mère : « Les Mères ! Quel est ce mot que je ne puis entendre ? » De là à susciter de nouveau La Femme, mais « contaminée les Mères » ! F. R.

4 4 e Jou r n ée s de l ’ EC F . 15 et 16 novembre 201 4 . Pal ai s de s C on grè s . Pari s


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