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PALAIS DES GLACES
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Bâtisseur atypique, constructeur de décors éphémères, le « set designer » Hervé Sauvage scénographie les campagnes publicitaires de grandes maisons, pose son regard sur les vitrines, et s’exprime partout où le rêve s’invite. Dans son appartement, une ancienne maison close, l’imaginaire, l’impertinence, le goût des fautes de goût et des références culturelles tissent la toile de fond de cet inventeur singulier.
PAR Caroline Clavier PHOTOS Carole Bellaïche
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FAÇON ROCAILLE
PAGE DE GAUCHE Portrait du « set designer » Hervé Sauvage dans l’atelier LFE de Romainville où il met en œuvre l’ensemble de ses décors.
PAGE DE DROITE Sur une idée du directeur artistique, les buffets de style trouvés chez Emmaüs ont été habillés d’un enduit spécifique pour imiter le style rocaille. Lors de la dernière Design Week, ces meubles mettaient en scène les pièces de l’exposition « 1000 Vases » conduite par Francesco Pirrello sous la bannière de Meet My Project, dont la mission est de promouvoir le design contemporain.
EFFET MIROIR
PAGE DE GAUCHE Dans le séjour, la bibliothèque rose dessinée par Hervé Sauvage, et réalisée par l’atelier LFE, accueille deux céramiques couleur de Nathalie Du Pasquier, sur la moquette léopard, collection Madeleine Castaing, Decorasol, une œuvre de Damien Moulierac. Au-dessus du canapé 1940 chiné, recouvert de tissu, Raf Simons, Kvadrat. Au fond, installées sur le miroir, trois toiles d’Eric Corne, et à droite, deux photographies de Valérie Belin.
PAGE DE DROITE Posé sur le mur, au centre, Miroir-scie de Jean-Christophe Vaillant. Totem en céramique d’Ettore Sottsass pour Bitossi, et dessin de Nathalie Du Pasquier. Chaise d’Elizabeth Garouste et Mattia Bonetti, 1987, réalisée pour la maison de couture Christian Lacroix. Tabouret chiné.
ESPRIT BOUDOIR
De gauche à droite, collection de céramiques chinées sur un meuble en orme, Maison Regain, 1960, au-dessus, une photographie de Valérie Belin. Les fenêtres sont habillées de rideaux en velours, Varia France, devant des assises en style rocaille. Sous une photo chinée, table, Thonet, et chaises habillées d’un tissu en bouclette de laine, Marché Paul Bert. Moquette léopard, collection Madeleine Castaing, Decorasol.
JEU DE RÉFLEXION
PAGE DE GAUCHE Sur un meuble en orme, Maison Regain, 1960, une collection de céramiques chinées, et au-dessus, une photographie de Valérie Belin, série China Girls, 2018, se reflètent sur le plateau miroir d’une table, Thonet.
PAGE DE DROITE Les murs recouverts de miroirs, sur toute la hauteur, accueillent une niche. À gauche, petits tableaux d’Éric Corne, et à droite, une photo de Valérie Belin, série Masques, 2004. Lampadaire « LD », 1953, Serge Mouille.
ROUGE ET NOIR
PAGE DE GAUCHE Le coin repas est équipé d’une table, 1990, repeinte en rouge, et de chaises chinées. Lampadaire « Luminator » d’Achille Castiglioni, Flos. Au fond, à droite, Établi de Jean-Christophe Vaillant. Rideau en velours noir « Casino », Varia France.
PAGE DE DROITE 1. Dans le couloir, table de style rocaille, animaux, Design Nature, collection de toiles en canevas illustrant des portraits de reines, Anonyme, et tapisserie de Robert Debieve. 2. À travers le cadre noir de la porte, souligné par une série de portraits en canevas chinés, les placards de la cuisine sont en bois peints vert anglais, panier, Christian Astuguevieille.
1. 2.
Sauvage, son nom lui colle à la peau. Libre, créatif, impertinent, l’enfant bohème du décor invente sans limites, jongle avec les idées, les envies, les songes. Bâtisseur à part, son imaginaire est convoité par de grandes maisons. À vingt-deux ans Hervé Sauvage réalisait déjà les vitrines de Nina Ricci, puis plus tard, celles de Nicolas Ghesquière. Un avant-goût d’une existence dédiée à l’univers du décor tous azimuts. Un talent qu’il consacre à la publicité et aux campagnes de grandes marques. L’objectif : cultiver la désirabilité et porter l’émotion au plus haut. Un instinct qui l’entraîne vers de nombreuses collaborations : Diptyque, Hermès, Christian Lacroix, Roger Vivier, Gucci… Le dernier décor du parfum « Phantom » de Paco Rabanne ou encore celui de Jean Paul Gaultier et les vitrines de Puiforcat depuis février 2022, c’est lui ! L’éphémère, associé à l’illusion, l’émerveillent toujours autant. La magie qui règne dans son appartement en est une autre expression. Un antre comme un refuge qui concentre les histoires, les vies et l’âme sensible de cette figure libre. Denses, intenses, expressifs, volubiles, ses murs sont à l’image de son monde intérieur. Dans cette ancienne maison close aux murs facettés, plongeant sur le boulevard de Sébastopol, Hervé Sauvage a préféré la surenchère à la tempérance. Ce passionné des surréalistes, du mouvement dada et des comédies musicales de Jacques Demy, répond à l’omniprésence de miroirs par la juxtaposition et les points de vue tronqués. Comme il sublime la simplicité de meubles chinés chez Emmaüs par le panache d’un enduit blanc sculpté de style rocaille pour la présentation de l’exposition « 1 000 Vases » lors de la dernière Design Week. Les œuvres de Jean-Christophe Vaillant sèment le trouble, les bibliothèques sur-mesure ont l’air d’architectures miniatures et la désuétude d’une collection de portraits royaux au canevas trône sur les murs. L’ensemble sur fond de moquette panthère, de couleurs poudrées, de velours drapés, de tissus capitonnés et de trouvailles chinées… cultive un sens du décor libre et assumé. Dans ce palais des glaces orchestré comme un labyrinthe de miroirs, on perd aisément le fil des perspectives. À la manière d’un rébus l’espace se décrypte, les messages se déchiffrent sur les meubles, sur les murs, et les pièces soulignées de cernes noirs comme les moulures, ajoutent au mystère ambiant alors que les textiles enveloppent l’atmosphère d’une douceur ouatée. Esprit, humour, poésie se conjuguent. Les époques se croisent, les styles s’apprivoisent et surtout l’enchantement opère.
LES ADRESSES D’HERVÉ SAUVAGE
Pour son choix de mobilier et d’objets intemporels, Eric Fleuret. Pour la mise en œuvre de décors, l’Atelier LFE. Pour ses tissus en grande largeur et ses toiles à peindre XXL, Varia France. Pour ses plâtres antiques et son atelier hors du temps, l’Atelier Lorenzi. Pour son expérience dans la restauration et la création de sièges, la réalisation de décors de fenêtre et de tissu tendu, le tapissier décorateur Créations Mourra. Pour son choix éclairé de mobilier design du XXe siècle, Christine Diegoni. Pour la fantaisie et l’exubérance de ses bouquets, Arôm. Adresses page 192
CHAMBRE TABLEAU
PAGE DE GAUCHE Dans la bibliothèque dessinée par Hervé Sauvage, et réalisée par l’atelier LFE, pêlemêle de livres, de photos de sculptures et d’objets personnels. Bureau de George Nelson, galerie Christine Diegoni, moquette, collection Madeleine Castaing, Decorasol. PAGE DE DROITE Bretonnes, photographie de Charles Fréger, et sur le bureau, lampe portable de Pierre Charpin, coloris Dusty Red, Hay, rideaux en velours moutarde, Varia France.