Fr, Globe 54/55 2012

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THE

WORLD’S CHILDREN’S PRIZE MAGAZINE #54/55 2012

Globen • Le Globe • El Globo • O Globo •

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WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD

PRIX DES ENFANTS DU MONDE POUR LES DROITS DE L’ENFANT

PREMIO DE LOS NIÑOS DEL MUNDO POR LOS DERECHOS DEL NIÑO

PRÊMIO DAS CRIANÇAS DO MUNDO PELOS DIREITOS DA CRIANÇA


WORLD’S CHILDREN’S LE PRIX DES ENFANTS DU MONDE

SUÈDE

CANADA

GRANDE-BRETAGNE

MARIEFRED

ÉTATS-UNIS ISRAËL PALESTINE MEXIQUE

Les personnes apparaissant dans ce numéro du Globe vivent dans les pays suivants:

NIGERIA

CAMEROUN

RD CONGO PÉROU

BRÉSIL

KENYA TANZANIE

MOZAMBIQUE ZIMBABWE AFRIQUE DU SUD

Thanks! Tack! Merci ! ¡Gracias! Obrigado! Les principaux partenaires des droits de l’enfant Svenska Postkodlotteriet, Rädda Barnen (intermédiaire de l’Asdi)

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Sa Majesté la Reine Silvia de Suède Les partenaires des droits de l’enfant Hugo Stenbecks Stiftelse, Survé Family Foundation, Sparbanksstiftelsen Rekarne, Kronprinsessan Margaretas Minnesfond, eWork, Altor et Grupo Positivo

Les parrains des droits de l’enfant PunaMusta, ECPAT Sweden, Ironroad-VMS, Helge Ax:son Johnsons Stiftelse, Dahlströmska Stiftelsen, Walkie-Talkie, Goodmotion, Avisera, ForeSight Group, Cordial, Centas, Mässrestauranger, Twitch Health Capital, SamSari, Boob, Floristen

i Mariefred, Gripsholms Värdshus, Gripsholms Slottsförvaltning, Gripsholmsviken, ICA Torghallen Mariefred, Företagare iMariefred.nu, Eric Ericsonhallen, Carpe Vitam, Open Mind – Peder Wallenberg, Lilla Akademien & tous les particuliers et parrains des enfants


PRIZE pour les droits de l’enfant SOMMAIRE

Qu’est-ce que le Prix des Enfants du Monde......................... 4 Les parrains............................................... 4 Que fait le jury des enfants ?............. 5 Brève présentation du jury..................... 5 Poonam du Népal.................................... 8 David de Grande-Bretagne.................10 Ndale de RD Congo..............................12

AFGHANISTAN PAKISTAN INDE

NÉPAL BANGLADESH BIRMANIE P HILIPPINES

Que sont les droits de l’enfant ? Célèbre les droits de l’enfant..............14 Comment se portent les enfants du monde............................16 Qu’est-ce que le Vote Mondial ?.....18 Au Zimbabwe..........................................19 Au Mozambique.................................... 34 En Suède, Indie et au Brésil................ 45 Au Pakistan.............................................46 Au Nigeria............................................... 48 Quels sont les candidats ?...............49 Anna Mollel, Tanzanie....................50–69 Sakena Yacoobi, Afghanistan.....70–89 Ann Skelton, Afrique du Sud.....90–109 Qu’est-ce que la Conférence de Presse des Enfants du Monde ? .........................................110 La Conférence de Presse au Mexique............................................111 Nouvelle Amie Adulte Honoraire Aung San Suu Kyi, Birmanie..............112 Cérémonie de remise des prix......113

ISSN 1102-8343

Merci également : Au Jury des Enfants, à tous les élèves et professeurs des écoles Amies Universelles, aux Amis Adultes Honoraires et aux parrains, aux Amis Adultes, aux points de contact et aux parte­ naires (voir pages 114-115), à la direction et au conseil consultatif de la World’s Children’s Prize Foundation, ainsi qu’à la direction de Barnens Värld et du World’s Children’s Prize US.

Le Globe est publié avec le soutien de l’Agence suédoise pour le développement international (ASDI), laquelle ne partage pas nécessairement les opinions exprimées dans le magazine. Les rédacteurs en assument l’entière responsabilité. Rédacteur en chef et responsable de publication: Magnus Bergmar Ont collaboré aux numéros 54–55: Andreas Lönn, Tora Mårtens, Johan Bjerke, Jesper Huor, Makan E-Rahmati, Marlene Winberg, Satsiri Winberg, Martin Schibbye, Jonas Gratzer, Britt-Marie Klang, Gunilla Hamne, Sofia Marcetic, Kim Naylor, Jan-Åke Winqvist Traductions: Semantix (anglais, espagnol) Cinzia Guéniat (français) Glenda Kölbrant (portugais), Preeti Shankar (hindi) Graphisme: Fidelity Couverture: Johan Bjerke, Kim Naylor Impression: PunaMusta Oy

World’s Children’s Prize Foundation Box 150, SE-647 24 Mariefred, Suède Tél: +46 (0)159-12900 Fax +46 (0)159-10860 prize@worldschildrensprize.org www.worldschildrensprize.org facebook.com/ worldschildrensprizefoundation


QU’EST-CE QUE LE PRIX DES ENFANTS DU MONDE ? Le but du programme du Prix des Enfants du Monde est la réalisation d’un monde plus humain, où les droits de l’enfant sont respectés par tous. Les élèves de toutes les écoles inscrites comme écoles Amies Universelles peuvent y participer. Il y a à ce jour 57.530 écoles Amies Universelles avec 27 millions d’élèves dans 102 pays. Chaque année, le programme termine par le Vote Mondial, au moyen duquel les enfants élisent le lauréat du Prix des Enfants du Monde pour les Droits de l’Enfant et le lauréat du Prix d’Honneur des Enfants. La participation s’est élevée jusqu’à 7,1 millions d’enfants. Avant la remise du prix, des millions d’enfants ont appris les droits de l’enfant et la démocratie, par les étapes suivantes : 1. L’ouverture du Prix des Enfants du Monde 2012 (page 110) Le signal de départ du Prix des Enfants du Monde est donné par la présentation, faite par les enfants, des trois candidats de l’année, choisis par le Jury des Enfants du Prix des Enfants du Monde. À cette occasion, les enfants parlent également de la façon dont sont respectés les droits de l’enfant là où ils vivent et dans leur pays. Le 25 janvier, il est recommandé soit d’organiser une Conférence de Presse des Enfants du Monde et d’inviter les médias locaux ou, à la date de son choix, prévoir une cérémonie d’ouverture, à l’école, destinée aux enfants uniquement ou encore inviter les parents et/ou les responsables politiques et d’autres personnes à la cérémonie – naturellement ce sera, vous les enfants qui dirigerez la conférence de presse. 2. Les Droits de l’Enfant dans votre vie (pages 14–15) Lisez également les feuilles de données sur la situation des droits de l’enfant dans votre pays (voir sur le web) Est-ce que vos droits et ceux de vos amis sont respectés? À la maison ? À l’école ? Où vous habitez ? Dans votre pays ? Dites comment cela devrait être et préparez une présentation pour vos parents, professeurs, responsables politiques, autres adultes et les médias.

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3. Les Droits de l’Enfant dans le monde (pages 5–13, 16–17, 49–109) Renseignez-vous sur les enfants du jury, sur la situation des enfants du monde et sur les candidats et les enfants pour lesquels ils se battent. 4. Préparation du Vote Mondial (pages 18–48) Lisez les récits des enfants qui participent au Vote Mondial, choisissez une date pour votre Journée du Vote Mondial et préparez tout ce qu’il faut pour un vote démocratique. Invitez les médias, les parents et les responsables politiques à partager ce jour avec vous. 5. La Journée du Vote Mondial Célébrez-la par une fête et des spectacles. Communiquez les voix obtenues par les trois candidats le 15 mai 2012 au plus tard, au moyen de l’urne électronique sur le web ou au représentant de votre pays, s’il en existe un. 6. La grande révélation ! Le même jour, dans le monde entier, sera dévoilé le nom du lauréat du Prix des Enfants du Monde pour les Droits de l’Enfant. Ce jour-là, invitez tous les médias de vote région à la Conférence de Presse des Enfants du Monde. Profitez-en pour indiquer quelles sont les améliorations que vous souhaitez pour le respect des droits de l’enfant. S’il n’est pas possible d’organiser une conférence de presse, vous pouvez organiser une cérémonie pour toute l’école et révéler comment cela s’est passé.

7. La cérémonie de La Reine Silvia et remise des prix et fin de Mandela sont parrains programme (pages 113–115) Trois légendes internationales Le programme du Prix des sont Amis Adultes Honoraires Enfants du Monde se termine et parrains du Prix des Enfants par la cérémonie de remise du Monde ; Nelson Mandela, des prix au château de la combattante de la paix Aung San Suu Kyi de Birmanie Gripsholm à Mariefred en et l’ex combattant de la paix et Suède. Les trois candidats Premier Ministre Xanana reçoivent une somme en Gusmão, du Timor Oriental. argent pour leur travail en Les autres parrains sont la faveur des enfants. En 2012, Reine Silvia de Suède et la somme totale du prix est de Graça Machel (theelders.org) Vous trouverez d’autres par100.000 USD. Les enfants du rains sur worldschildrensjury dirigent la cérémonie et la Reine Silvia les assiste dans la prize.org. remise des prix. Toutes les écoles La Reine Silvia qui font partie du de Suède. Prix des Enfants du Monde peuvent organiser une cérémonie de clôture au cours de laquelle on pourra visionner la vidéo de la cérémonie de remise du prix que l’on aura Nelson Mandela commandée. et Graça Machel.

Limites d’âge po ur

le Prix des Enfa nts du Monde

Le Prix des Enfan ts du Monde s’adresse à vous, si vous avez entre 10 et 18 ans. La limite supérieur e d’âge provient de la Co nvention de l’Enfant de l’ONU , qui dit qu’on est enfant jus qu’à 18 ans accomplis . La limite inférieure d’âge a plusieurs raisons. Trop pénible Pour pouvoir voter , il faut d’abord se renseig ner sur les trois candidats et sur les enfants pour lesqu els ils se battent. Les enfan ts vivent parfois des choses horribles, ce qui peut être

effrayant pour les plus petits. Malheureusement, pour l’instant, nous n’a vons pas la possibilité de prép arer du matériel pour les moins de 10 ans. Parlez à un adul te Les candidats au prix travaillent souvent po ur les enfants qui ont été exposés à des violations trè s graves de leurs droits. Mê me des enfants de plus de 10 ans risquent de trouv er cela pénible. C’est la ra ison pour laquelle il est reco mmandé de parler à un adult e après avoir lu les récits.


Membres du Jury des Enfants 2011 et Jury des Enfants 2012.

QUE FAIT LE JURY DES ENFANTS ? Les membres du Jury des Enfants du Prix des Enfants du Monde sont experts en droits de l’enfant de par leur vécu. Ils peuvent être membres du jury jusqu’à 18 ans. Chaque enfant du jury représente tous les enfants du monde ayant eu les mêmes expériences. Mais ils représentent aussi les enfants de leur pays ou de leur continent. Dans la mesure du possible, le jury aura des représentants de toutes les parties du monde et de toutes les grandes religions. • Les enfants du jury par les récits de leur vie, présentent les violations des droits de l’enfant dont eux-mêmes ont été victimes ou pour lesquels ils se battent. En ce faisant, ils apprennent les droits de l’enfant à des millions d’enfants de par le monde. • Le Jury des Enfants désigne chaque année, les trois candidats pour le Prix des Enfants du Monde pour les Droits de l’Enfant parmi tous ceux qui ont été nominés. • Le Jury des Enfants dirige la grande cérémonie de remise des prix, qui clôture chaque année le programme du Prix des Enfants du Monde.

• Les enfants du jury sont les ambassadeurs du Prix des Enfants du Monde dans leur pays et dans le monde. • Pendant la semaine de la cérémonie des prix, le jury des enfants visite les écoles suédoises et parle de son expérience et des droits de l’enfant. Voici les membres du jury.

Gabatshwane Gumede, 17, AFRIQUE DU SUD

Les parents de Gabatshwane sont morts du sida quand elle était petite. Bien que les tests montraient que Gaba, ellemême n’était pas infectée par le vih et n’avait pas le sida, beaucoup avaient peur d’être contaminés par elle. Elle n’avait pas d’amis et on se moquait d’elle. La plupart des gens où vit Gaba sont chômeurs. Beaucoup sont infectés par le vih et meurent en laissant des orphelins. Les violations des droits de l’enfant sont fréquentes. Mais aujourd’hui, plus personne ne se moque de Gaba. C’est une chanteuse et un défenseur des droits de l’enfant et les enfants l’admirent. Quand elle peut, Gaba achète de la nourriture pour les pauvres et donne des paquets de vivres à ses camarades d’école. – J’exige que les responsables politiques travaillent pour les droits de l’enfant. J’en ai parlé avec le ministre de l’éducation d’Afrique du Sud et avec bien d’autres représentants politiques. Gabatshwane représente les enfants que le sida a rendus orphelins et les enfants qui luttent pour les droits des enfants opprimés.

Hannah Taylor, 16, CANADA À cinq ans Hannah a vu un SDF qui mangeait dans une poubelle. Depuis elle dit aux écoliers, responsables politiques, directeurs et au Premier Ministre du Canada que personne ne doit être SDF. Elle a créé une fondation qui a recueilli des millions d’euros pour un projet en faveur des SDF et un programme pour les écoles. – Nous voulons montrer que chacun peut s’engager et faire la différence pour les SDF et pour les droits de l’enfant. Nous devons partager et nous entraider. Quand je suis allée dans un foyer pour adolescents SDF, je les ai tous embrassés. Un garçon, très réservé, m’a dit : ’J’ai toujours cru que personne ne m’aimait, maintenant je sais que tu m’aimes’. Hannah représente les enfants qui luttent pour les droits de l’enfant, spécialement pour les droits des enfants SDF.

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PHOTO: KIM NAYLOR

Maria Elena Morales Achahui, 16, PÉROU À 12 ans, Maria Elena a quitté son village dans la montagne. Sans rien dire à ses parents. Elle a sept frères et sœurs et savait que la famille avait des difficultés. En plus elle trouvait que l’école du village était mauvaise. À Cusco, elle est devenue bonne chez sa tante. Elle n’avait pas de salaire, rien qu’un peu d’argent de poche. Et elle devait travailler tant qu’elle ne pouvait pas aller à l’école. Si elle protestait, la tante menaçait de la battre. Sa famille lui manquait et un jour Maria Elena est allée lui rendre visite. Quand elle est revenue, sa tante l’a mise à la porte. Maintenant, Maria Elena vit chez l’organisation Caith, va à l’école et fait partie d’un groupe qui défend les droits des bonnes. Maria Elena représente les filles qui travaillent comme bonnes, souvent dans des conditions proches de l’esclavage et se bat pour leurs droits.

Brianna Audinett, 15, ÉTATS-UNIS

Hamoodi Mohamad Elsalameen, 14, PALESTINE

Hamoodi vit dans une famille pauvre au sud de Hebron, en Cisjordanie, une région occupée par Israël. – Une nuit les soldats israéliens sont entrés dans notre village avec des chars d’assaut. Par haut-parleurs, ils ont ordonné à tout le monde d’allumer les lampes et ensuite se sont mis à tirer dans tous les sens. Il y a eu trois morts, dit Hamoodi. À cinq ans, Hamoodi a entendu dire qu’un petit garçon avait été tué et a dit : « Je veux un fusil ! » Mais maintenant, il participe aux pourparlers de paix. Il a des amis juifs avec lesquels il joue au foot plusieurs fois par mois en Israël. – J’aime jouer au foot, mais nous n’avons pas de place au village. On joue sur un terrain loin d’ici, mais quand les soldats israéliens viennent arrêter quelqu’un, ils nous chassent. Ils gâchent tout, dit Hamoodi. Hamoodi représente les enfants dans les zones de conflit et les enfants qui vivent sous l’occupation.

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Brianna avait onze ans quand sa mère a quitté son père, un homme violent. Brianna et ses trois frères se sont retrouvés SDF à Los Angeles. Ils durent de déplacer souvent et vivre dans des motels, bien qu’il ne fût pas autorisé d’occuper une chambre à cinq. Finalement, ils trouvèrent un abri où ils purent rester six mois dans un dortoir à lits superposés avec d’autres SDF. Ils pouvaient à peine jouer

et devaient se taire. Mais, en face de l’abri se trouvait l’organisation School on Wheels, qui donna à Brianna et à ses frères aussi bien un endroit pour jouer, le matériel scolaire et l’aide pour les devoirs. – Plus tard, je serai médecin j’aiderai surtout les SDF. Ils n’ont pas d’argent, mais je les aiderai, dit Brianna qui a finalement obtenu un logement et vit avec sa famille. Brianna représente les enfants qui sont SDF.

Lisa Bonongwe, 16, ZIMBABWE

Lisa avait quatre ans. Son père buvait et battait sa mère presque tous les soirs. Parfois jusqu’à la laisser par terre, sans connaissance. Si Lisa pleurait et lui criait d’arrêter, il la chassait, elle et son grand frère de la maison. – Même en plein hiver, on devait dormir sur la véranda. Il faisait si froid, dit Lisa. Lisa avait sept ans, quand sa mère obligea son père à partir et quand Lisa s’est inscrite au Girl Child Network, un club pour filles à l’école qui les instruit sur leurs droits. – Dans les clubs pour filles, nous parlons de ce qui est important pour nous. Les filles ne sont pas en sécurité au Zimbabwe. On nous maltraite, on nous viole et nous devons faire tout le travail ménager. S’il n’y a pas assez d’argent, c’est toujours les garçons qui vont à l’école. Je participe à l’organisation des manifestations pour les droits des filles » Lisa représente les enfants qui se battent pour les droits des filles.


Mae Segovia, 13, PHILIPPINES

Mae avaient neuf ans lorsqu’elle fut obligée de quitter l’école pour travailler afin d’aider sa famille. Elle dut danser et se déshabiller devant une caméra dans un cybercafé. Les photos étaient envoyées dans le monde entier par internet. Il se passa deux ans avant que la police arrête le propriétaire du café qui exploitait Mae. À présent il est en prison, lui et d’autres personnes qui regardaient les photos. Mais Mae ne put continuer à vivre dans sa famille. Elle risquait de nouveau de se faire exploiter à cause de la misère. Aujourd’hui elle vit dans l’une des maisons sûres pour filles abusées de l’organisation Visayan Forum. Elle va à l’école et se bat pour les autres filles victimes d’abus. – Ma famille me manque, mais j’aime l’école et je me sens mieux ici, dit Mae. Mae représente les enfants victimes du commerce sexuel et les enfants qui se battent pour les droits de l’enfant.

Nuzhat Tabassum Promi,14, BANGLADESH – Si le niveau de la mer monte d’un mètre, la partie sud du Bangladesh, où j’habite, disparaîtra sous l’eau. J’y pense souvent. Le réchauffement planétaire, responsable de la fonte des glaces polaires et dans l’Himalaya, provoque des cyclones et des inondations de plus en plus forts. Sur le chemin de l’école, le jour après le méga cyclone, il y avait des morts et des blessés partout, dit Nuzhat. Elle vit dans la petite ville de Barisal, dans le sud du Bangladesh. Tous les

matins, elle met son uniforme scolaire, arrête un vélo taxi et se fait conduire à l’école. – Tous les ans, des cyclones, des tempêtes très fortes, frappent le Bangladesh. Mais le pays est prêt et a un bon système d’alerte cyclonique. Le pire qui me soit arrivé c’est quand j’ai cru que l’école allait être emportée par le cyclone. Nuzhat représente les enfants dont les droits sont violés à la suite de catastrophes naturelles et de la dégradation de l’environnement, ainsi que les enfants qui exigent le respect des droits des filles.

Mofat Maninga, 15, KENYA – J’aimerais parler avec le président du Kenya et lui dire que les enfants ont des difficultés. Que sa police bat les enfants qui vivent dans la rue et les met en prison. En prison ! Comment peut-on emprisonner un enfant simplement parce qu’il est obligé de vivre dans la rue ? Comment peut-on voler sa liberté à un enfant ? Je dirais au président qu’il devrait plutôt prendre soin des enfants. Leur donner un endroit où vivre, à manger et la possibilité d’aller à l’école. Mofat avait huit ans quand sa mère est morte du sida. – Grand-mère s’était occupée d’elle et n’avait pas dit à quel point maman était mala­ de. C’était un choc. Je me suis senti si seul. Quelques années plus tard, Mofat tomba lui-même mala­ de. Sa grand-mère s’occupa de lui, mais quand elle mourut, les autres membres de la

D'autres membres du jury des enfants

famille, chassèrent Mofat de la maison. Mofat avait 13 ans et dut vivre dans la rue. Mais aujourd’hui, il vit dans un home pour enfants des rues et va de nouveau à l’école. Mofat Maninga représente les enfants séropositifs et les enfants qui vivent dans la rue.

Liv Kjellberg, 13, SUÈDE Au début on se moque de nous à cause de nos vêtements ou parce qu’on est timide ou pour notre physique. Et puis ça continue avec des bousculades et ce genre de choses et cela dégénère de plus en plus, dit Liv. Déjà la première année d’école elle se retrouva à l’extérieur du cercle des filles. Elle mangeait seule à la cafétéria, on la harcelait, on la bousculait et on lui lançait des quolibets. – Les enseignants ne se rendent pas toujours compte de ce qui se passe entre les élèves et quand on est victime de harcèlement, on n’en parle pas forcément. On se dit que demain ce sera mieux et que les autres m’accepteront. Liv prit, elle-même la situation en main, recueillit de l’argent pour que l’organisation Friends, qui travaille contre le mobbing puisse venir à son école. – Maintenant c’est agréable en classe. Plus personne ne me harcèle et je me suis fait sept amis à l’école, dit Liv. Liv représente les enfants qui sont victime de mobbing et les enfants qui se battent contre le mobbing.

Poonam Thapa, 16, NÉPAL Se bat pour et représente les filles victimes de trafic de personnes et qui sont vendues comme esclaves à des maisons closes et toutes les filles victimes d’abus. Pages 8–9 David Pullin, 15,

GRANDE-BRETAGNE

Représente les enfants séparés de leurs parents et pris en charge par la société ainsi que les enfants qui se battent pour les droits de l’enfant. Pages 10–11

Ndale Nyengela, 14, RD CONGO Représente les enfants soldats et les enfants dans les conflits armés. Pages 12–13

Emelda Zamambo, 12,

MOZAMBIQUE

Représente les enfants orphelins et les enfants qui se battent pour les droits de l’enfant. Pages 34–39

s: seront juré i u q ts n Enfa

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L’homme qui a vendu Poonam est arrêté. Le Népal a une nouvelle loi contre le trafic de personnes et il peut être condamné à 20 ans de prison et un dédommagement à Poonam correspondant à cinq ans de salaire.

Poonam

TE X TE: MARTIN SCHIBBYE

PHOTO: JONAS GR AT ZER

a fait arrêter le trafiquant de personnes Poonam Thapa du Népal rencontra un garçon plus âgé qui la trompa et la vendit dans une maison close en Inde. Aujourd´ hui Poonam est libre et membre du jury du Prix des Enfants du Monde. Dernièrement elle put confondre le garçon qui l’avait vendue et le faire arrêter par la police. – Tu m’as poussée à fuir en

me promettant qu’on se marierait, crie Poonam au garçon plus âgé, qu’on a fait asseoir sur un banc de l’organisation Maiti Nepal dans la capitale, Katmandu. Poonam reconnut l’homme lorsque, il y a une semaine, il vint au centre de Maiti pour chercher sa femme qui avait 8

disparu. Elle n’osa rien dire avant qu’il soit parti. Mais quand Poonam raconta que c’était bien le jeune homme qui l’avait vendue, on lui tendit un piège pour qu’il revienne. – Je n’ai jamais vu cette fille et je ne suis jamais allé en Inde, dit le jeune homme. Il ne peut en dire plus car l’indi-

gnation de Poonam explose. – Je sais le nom de ton père, je sais qu’il ne voit pas d’un œil, alors arrête de mentir ! Anuradha Koirala, la fondatrice de Maiti Nepal appelle la police et prie Poonam, qui aujourd’hui a 16 ans, de tout raconter depuis le début. Poonam grandit dans le vil-

lage de Ichtko, au Népal, l’un des pays, les plus pauvres du monde. Les jeunes du village rêvaient d’une autre vie. Les trafiquants de personnes venaient souvent au village pour essayer de flouer les jeunes filles en leur promettant un travail qui n’existait pas. Les parents ne comprenaient pas toujours le danger, ils croyaient que l’offre était une chance magnifique. Une bouche de moins à nourrir et qui plus est, un revenu. Poonam n’avait pas de parents et c’est très jeune qu’elle alla à Shimla, une ville indienne pour cueillir des pommes et des champignons et servir dans un restaurant. C’est là qu’elle rencontra le garçon de quelques années son aîné. Trompée et vendue

À 14 ans, Poonam était revenue dans son village, au Népal quand son grand amour lui proposa de fuir dans la grande ville de Mumbai, en Inde pour se marier et vivre avec lui. – Mais tu dois partir un jour avant moi, pour que personne ne soupçonne que nous sommes partis ensemble. Nous nous verrons en Inde, dit le jeune homme à Poonam. Au terme de plusieurs jours de voyage en voiture et en bus, Poonam arriva dans une sombre ruelle d’une banlieue du Mumbai, une ville de 14 millions d’habitants. Mais il y avait quelque chose d’étrange. La pièce était pleine de filles. Plusieurs plus jeunes qu’elle. Du garçon qui devait la retrouver, aucune trace. – Tu m’as trompée, crie Poonam bouleversée au gars qui l’a vendue à un bordel.


L’une des femmes de la maison dit à Poonam de prendre un bain et de mettre un jupe courte. Ensuite on la maquilla. Les hommes qui entraient l’obligèrent à boire de l'alcool et tout le monde parlait de « clients » – C’est quoi un client ? demanda-t-elle à Mala, une fille plus âgée. – On t’a vendue, ceci est un bordel, répondit Mala. En enfer

Le soir, beaucoup d’hommes vinrent au bordel. Poonam refusa de se laisser toucher. Elle pleura, cria, donna des coups de pied et mordit. On la maîtrisa, fouetta avec des câbles électriques et on la brûla avec des cigarettes jusqu’à ce qu’elle cède. Chaque jour, entre dix et quinze hommes abusèrent de Poonam. Si elle essayait de se sauver, on l’enfermait. Après dix mois, la police indienne, fit un raid dans le bordel. On les avait avertis qu’il y avait des enfants et ils emmenèrent Poonam. C’est ainsi que Poonam

arriva à l’organisation Maiti Nepal, qui reçut le Prix des Enfants du Monde en 2002 pour son travail en faveur des filles victimes de trafic de personnes et de toutes les filles abusées. La police arrive

Le walkie-talkie du commissaire de police grésille quand il fait irruption dans la pièce chez Maiti Nepal où Poonam et le garçon qui l’a vendue attendent. – Oui, oui, j’ai vendu Poonam pour 40.000 roupies indiennes (1.000 USD) mais ça a été la première et la dernière fois que j’ai vendu une fille ! reconnait l’homme que Poonam a désigné.

Le silence se fait dans la pièce. Selon la nouvelle loi du Népal, « Human Trafficking Act » (Loi sur le trafic de personnes) l’homme risque 20 ans de prison et de devoir payer l’équivalent de cinq années de salaires à Poonam. – Tant qu’il y a des personnes qui sont prêtes à vendre des personnes, il est difficile pour nous policiers d’intervenir, dit le policier. Il pense que Poonam est très courageuse. – À la moindre hésitation, il est difficile de confondre quelqu’un, dit-il en emmenant le trafiquant de personnes dans le fourgon de police.

Poonam reste assise dans la pièce complètement lessivée. Malgré tout cela, son avenir se présente mieux. Chez Maiti Nepal, elle et d’autres rescapées, reçoivent de l’aide et une formation professionnelle. Dans le jury du Prix des Enfants du Monde, Poonam représente et se bat pour les filles victimes de trafiquants de personnes et qui sont vendues à des bordels, comme esclaves, et pour toutes les filles victimes d’abus. Poonam offre des fleurs à la reine Silvia, lors de la cérémonie de remise des prix du Prix des Enfants du Monde, au château de Gripsholm, à Mariefred, en Suède

Encore plus d’esclaves de nos jours 200.000 filles et femmes népalaises sont esclaves dans des bordels en Inde. Chaque année, le nombre croît de 12.000 filles, dont beaucoup n’ont pas 16 ans. Il y a environ 1,2 millions d’esclaves sexuels au monde. Le gain provenant de l’esclavage sexuel est estimé entre 9,5 et 32 milliards de USD. Il y a plus de 12,3 millions d’esclaves au monde, à peu près autant que la totalité des esclaves qui furent envoyés d’Europe en Amerique, entre le 15ème et le 19ème siècle. Selons certains il y aurait 27 millions d’esclaves. 9


– Tous les membres du Conseil communal de la commune de Staffordshire ont signé un engagement, The Pledge, dans lequel ils promettent de faire respecter nos droits, dit David.

David se bat pour les enf Le père et la mère de David étaient alcooliques et quand il était petit on le laissait seul toute la journée. Aujourd’hui, il vit dans une famille d’accueil et se bat pour les enfants dans la même situation. David Pullin, 15 ans, de Grande Bretagne est membre du jury du Prix des Enfants du Monde, où il représente les enfants séparés de leurs parents et pris en charge par la société. « Quand j’étais petit , je vivais

avec mon père et ma mère. Ils étaient alcooliques et me laissaient souvent seul dans l’appartement quand ils sortaient pour boire. Parfois j’étais seul toute la journée. Je ne pouvais pas m’en aller parce qu’ils m’enfermaient. Il n’y avait jamais assez à manger, que des chips, biscuits et un peu de pain. Je n’avais pas d’amis et j’allais me coucher tout seul. C’était pénible parce que j’avais peur du noir. Quand j’ai commencé l’école, les enseignants ont compris que quelque chose n’allait pas. J’étais sous-ali10

menté et mes vêtements étaient toujours sales et trop petits. Et comme je n’avais pas l’habitude des autres, j’étais toujours seul, dans un coin. Maman sentait souvent l’alcool quand elle venait me chercher. Papa a fini en prison et mes enseignants ont contacté les services sociaux et leur ont expliqué que je n’étais pas bien à la maison. J’avais sept ans quand on a décidé que je serai placé dans une famille d’accueil. Même si ça ne marchait pas bien à la maison, je voulais quand même vivre avec mes parents et je me faisais beaucoup de

soucis. Est-ce que la nouvelle famille serait gentille et m’aimerait ? La Voix des Enfants

Mais je me suis senti tout de suite en sécurité. Ils m’ont embrassé et m’ont souhaité la bienvenue. Très vite c’était comme ma vraie famille. Et, à l’école, je me suis fait des amis. Mais je me sentais malgré tout un peu seul, car personne n’avait vécu ce que j’avais vécu. Alors mon assistant social m’a parlé de la Voix des Enfants, où les enfants que la société a pris en charge, peuvent se rencontrer et parler de ce qu’ils ont vécu et se soutenir. Je fais partie des la Voix des Enfants depuis trois ans. Au début c’était surtout moi qui avais besoin de soutien, maintenant je m’oc– Mon rêve est que tous les enfants dont s'occupe la société vivent bien et aient des droits, comme tous les autres enfants.

cupe de ceux qui ont besoin de mon aide. Car, même si c’était très dur pour moi quand j’étais petit, j’ai quand même eu beaucoup de chance. J’ai une nouvelle famille fantastique et je suis heureux. Mais je sais que tous les enfants qui ont été pris en charge par la société n’ont pas eu la même chance et je veux me battre pour leurs droits. J’ai participé à la rédaction d’un prospectus d’information en faveur des enfants que chaque enfant placé devrait avoir. Il y a des informations sur les droits de l’enfant, le harcèlement et des numéros de téléphone importants


– Je fais partie de la Voix des Enfants depuis trois ans. Au début c’était surtout moi qui avais besoin de soutien, maintenant je m’occupe de ceux qui ont besoin de mon aide, dit David.

Conseil des enfants

Dans le Staffordshire où je vis, il y un Conseil des enfants où les douze membres sont des enfants assistés. Les autres enfants du projet la Voix des Enfants ont voulu que je fasse partie du Conseil des enfants, ce qui est le cas depuis deux ans. J’ai entre autre contribué à ce que les enfants placés aient plus d’argent de poche. Avec les membres adultes du Conseil communal, je visite des orphelinats pour m’assurer que les enfants y sont bien traités. Si les portes ou les meubles ne sont pas en bon état, si les fenêtres sont sales et si le ménage n’est pas fait, je

fais un rapport au Conseil communal qui fait le nécessaire. Un garçon d’un orphelinat ne recevait que la moitié de l’argent de poche dont il avait droit. Je m’en suis plaint au directeur et au Conseil communal et le jour suivant tout était réparé ! Une autre tâche très importante que j’ai au sein du Conseil des enfants ce sont les interviews que je fais des adultes qui veulent travailler dans la commune avec les enfants assistés. Je cherche des adultes qui mettent toujours le bien des enfants avant tout, qui sont comprehensifs et amusants ! Jusqu’à présent, les adultes ont engagé les personnes que nous avons recommandées ! Les adultes écoutent

Je sens que les autorités ici dans le Staffordshire nous écoutent, nous les enfants qui sommes pris en charge par la société. Ce sont les autorités qui ont été les initiateurs du

projet la Voix des Enfants et le Conseil des enfants, ce qui augmente notre influence à propos des questions qui nous concernent. Dernièrement, tous les membres du Conseil communal ont signé un engagement - The Pledge – présenté par notre Conseil des enfants, où ils promettent de reconnaître nos droits. Entre autre, le droit à des assistants sociaux bien formés, qui s’intéressent à nous. J’en suis très content, car c’est justement pur cela que je me bats. Pour

que l’on nous respecte et pour que nous ayons une voix. Mon rêve est que tous les enfants dont s’occupe la société vivent bien et aient des droits, comme tous les autres enfants. Ma mère ne boit plus et nous nous voyons régulièrement, mais nous avons décidé que je resterai dans ma nouvelle famille jusqu’à ma majorité » David représente les enfants qui ont été séparés de leurs parents et qui sont pris en charge par la société.

Vélo pour tous ! – Les enfants assistés n’ont souvent pas de vélo et ce n’est pas bien, nous voulons nous amuser comme les autres. J’en ai parlé aux autorités et je leur ai dit que tous les enfants qui n’ont pas les moyens d’acheter un vélo ou qui ont une famille d’accueil qui n’a pas les moyens, devraient en recevoir un de la commune. Ils étaient d’accord ! Mais ils ont dit que c’était au Conseil des enfants de lancer le projet. En ce moment, il y a déjà douze enfants qui circulent avec le vélo qu’ils ont reçu de nous ! 11

d’hôpitaux, services sociaux et responsables des droits de l’enfant au sein du gouvernement. Il est important que tous les enfants assistés connaissent leurs droits et sachent vers qui se tourner pour exiger qu’ils soient respectés.

TE X TE: ANDRE AS LÖNN

ants assistés


– C’est ça ta plume, maintenant, dit le soldat en tendant un fusil à Ndale Nyengela, qui à onze ans, a été enlevé sur le chemin de l’école par un groupe armé en RD Congo. Aujourd’hui Ndale a 14 ans, il est libre et membre du jury du Prix des Enfants du Monde. « C’était un jour comme les

autres. Je me suis réveillé au lever du soleil, je me suis lavé et ai mis mon uniforme scolaire. J’ai pris mon cartable avec plume, cahier et règle et

Ndale

a dû échanger la plume contre le fusil je suis allé à la rencontre de mes camarades de classe. Nous étions six, nous courions par moments, car nous étions en retard. Nous avons pris un raccourci à travers la forêt. Soudain, nous avons vu deux soldats armés entre les arbres. Quand ils nous ont appelés, il était trop tard pour rebrousser chemin. – Où allez-vous, les garçons ? a demandé un soldat.

Il a pris nos cartables et les as vidés sur le sol. Ils ont aussi trouvé l’argent que j’avais avec moi pour payer les taxes scolaires et pour acheter des haricots. C’était jour de marché et ma mère m’avait demandé d’acheter deux kilos de haricots bruns. – Vous comprenez, les garçons que dans ce pays, il n’y a pas assez de soldats, alors il est temps que vous nous aidiez, dit l’autre soldat. – Mais, nous devons aller à l’école, j’ai dit. – Écoute bien, toi ! Si tu discutes, on vous tue sur-lechamp. Compris !!? dit-il en Ndale était sur le chemin de l’école quand il a été enlevé et contraint à devenir soldat. Aprés trois ans, il a pu s’enfuir. – Maintenant ma vie a repris son cours, dit-il.

12 12

nous frappant la tête avec une canne. J’avais si peur que j’ai pensé que Dieu m’avait abandonné. Sinon pourquoi est-ce qu’une telle chose me serait arrivée ? J’ai pensé à maman et à papa et à mes frères et sœurs. Le cauchemar était réalité

On a marché trois jours sans manger, ni dormir. On n’avait pas le droit de se parler. Si on marchait trop lentement, ils nous donnaient des coups de pieds en nous injuriant. J’étais fatigué. Un soir, ils ont mis le feu à nos uniformes scolaires. Tout avait l’air d’un cauchemar. Mais tout était réel. Au bout de trois jours, nous sommes arrivés à leur camp. Quand j’ai vu tous les soldats et comment ils vivaient dans des maisons faites de branches et de morceaux de

« Oui à l’école et plus jamais de camps militaires », disent les banderoles. À l’organisation BVES, Ndale et les autres enfants soldats libérés reçoivent l’assistance nécessaire pour dépasser les choses horribles qu’ils ont vécues et pour reprendre l’école. Mais d’abord, ils vont enlever leur uniforme.

plastiques, j’ai pensé : – C’en est fini de moi. Je suis un écolier, qu’est-ce que je fais parmi toutes ces armes ? Un soldat nous a donné des uniformes et des armes. – Voici ta plume, a-t-il dit, en me tendant un fusil. L’uniforme était trop grand pour moi, mais une femme a coupé les manches et les jambes des pantalons. Il y avait d’autres enfants soldats dans le camp. Ils nous ont demandé si nous avions de l’argent. Mais nous n’en avions pas. Le jour suivant on a commencé à s’entraîner à tirer avec le fusil. Je n’arrêtais pas de penser : – Je ne veux pas apprendre à tirer, je suis un écolier. Quand nous avons pu manipuler le fusil, ils nous ont dit que nous allions apprendre à tuer.


– Cet arbre est une personne. Essaie de viser droit au cœur !

La fuite

Je suis resté trois ans dans cette armée. Un jour, un de mes amis, un soldat adulte m’a dit : – Fuyons ensemble ! J’ai entendu à la radio que les troupes de l’ONU et des gens du BVES sont ici pour aider les enfants soldats à se libérer. Son plan était de se procu-

rer des vêtements civils d’un vendeur ambulant qui venait au camp. De mettre les vêtements sous les uniformes et de partir pendant la nuit. Et une nuit, nous sommes partis. Arrivés dans la forêt, nous avons jeté nos armes et enlevé notre uniforme. Nous avons dormi dans la forêt et avons ensuite pu aller dans nos vêtements civils à l’endroit où se trouvaient les libérateurs des enfants soldats. Nous n’avons pas perdu de temps. – Nous avons fui une armée et vous voyez bien que c’est un enfant. Pouvez-vous vous occuper de lui ? dit mon ami à un homme du BVES qui se tenait près d’une grande voiture blanche de l’ONU. – N’aie pas peur, nous nous occuperons de toit, me dit l’homme. J’étais si heureux et ma vie a repris son cours. Ici au BVES, je suis tranquille. Je peux aller à l’école. Ce que j’aime le mieux c’est la musique, l’anglais, la géographie et l’histoire. Quand j’aurai terminé mes études, je veux composer de la musique qui parlera de l’armée et des droits de l’enfant, pour que tout le monde com-

prenne les droits de l’enfant. Je veux faire en sorte qu’on ne transforme pas les enfants en soldats. Les adultes doivent se souvenir qu’ils ont été des enfants. Beaucoup l’oublient. Mais je veux aussi m’occuper de mes parents » Ndale représente les enfants soldats et les enfants dans les conflits armés.

« Oui à l’uniforme scolaire » et « Plus jamais ces tenues pour les enfants » disent les banderoles. Les enfants soldats ont enlevé leur uniforme militaire pour le brûler.

13 13

Cela faisait deux mois que nous étions dans le camp, quand un matin on a entendu des cris : – Les ennemis arrivent pour se venger ! Tous les hommes prêts au combat ! Quelques jours plus tôt, des soldats de notre camp avaient attaqué une autre armée et volé une vache et d’autres choses. L’armée venait pour reprendre ce qui avait été volé. Nous les enfants, devions aller en première ligne. C’était toujours ainsi. Nous nous sommes cachés dans la forêt près d’un chemin. Quelqu’un s’est mis à tirer. Je ne peux pas décrire à quel point j’avais peur. C’était mom premier combat et il faisait presque nuit. Je n’avais aucune idée de ce qui se passait. Des gens qui tombaient, morts à côté de moi. Des gens qui criaient. Tous ces coups de feux. J’étais submergé par la peur. Si j’essayais de me retirer, les autres soldats me poussaient en avant en me disant : – Si ton ami meurt, ne t’en occupe pas, enjambe-le ! C’est ton devoir ! Deux de mes camarades ont été tués dès les premiers jours. Les combats ont duré douze jours. Tout ça pour une vache. Quand je suis revenu au camp, cela faisait des jours que je n’avais ni dormi, ni mangé. Mais quand il aurait été possible de dormir, je ne le pouvais plus à cause de toutes les pensées et des cauchemars à cause de ce que j’avais vécu.

R ACONTÉ Á : GUNILL A HAMNE PHOTO : GUNILL A HAMNE & BO ÖHLÉN

Participe à la guerre


Célèbre les droits  ILLUSTR ATION: LOT TA MELLGREN/ESTER

La Convention de l’ONU sur les Droits de l’Enfant (La Convention de l’Enfant) est composée de 54 articles. Nous en présentons ci-dessous une version abrégée. Tu trouveras le texte intégral de la convention sur www.worldschildrensprize.org Idées générales de la Convention • Tous les enfants ont les mêmes droits et la même valeur. • Tous les enfants ont droit à la satisfaction de leurs besoins fondamentaux. • Tous les enfants ont droit à la protection contre la violence et l’exploitation. • Tous les enfants ont droit à la liberté d’opinion et au respect. Article 1

Tous les enfants du monde de moins de 18 ans jouissent de ces droits. Article 2

Tous les enfants ont la même valeur. Tous les enfants ont les mêmes droits. Personne ne sera discriminé. Tu ne seras pas discriminé à cause de la couleur de ta peau, ton sexe, ta langue, ta religion et tes idées. Article 3

Toutes les décisions qui te concernent doivent prendre en compte ton intérêt. Article 6

Tu as droit à la survie et au développement. Article 7

14

Tu as droit à un nom et à une nationalité.

Article 19

Tu as le droit de vivre avec tes parents, sauf si cela est contraire à ton intérêt. Tu as le droit de grandir chez tes parents, si cela est possible.

Tu as le droit d’être protégé contre toute forme de violence, contre les mauvais traitements ou l’exploitation, que tu sois sous la garde de tes parents ou de toute autre personne.

Article 12–15

Article 20–21

Tous les enfants ont droit à dire ce qu’ils pensent. Tu as le droit de donner ton avis et ceci sera respecté, dans toutes les questions qui te concernent, à la maison, à l’école, avec les autorités et les tribunaux.

Tu as droit à une protection même si tu n’as pas de famille.

Article 9

Article 18

Ton père et ta mère ont la commune responsabilité pour ton éducation et ton développement. Ils doivent toujours penser à ton bien.

Article 22

Si tu as dû quitter ton pays, tu auras les mêmes droits que les autres enfants dans le pays d’accueil. Si tu t’es enfui seul, tu auras un soutien spécial. On est tenu de t’aider à retrouver ta famille. Article 23

Tous les enfants ont droit à une vie décente. Si tu es handi-


Le 20 novembre est un jour à célébrer. Ce jour-là, en 1989, l’ONU a publié la CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DE L’ENFANT. Cette Convention est faite pour toi et pour tous les enfants de moins de 18 ans. On l’appelle aussi la CONVENTION DE L’ENFANT. Tous les pays, à l’exception de la Somalie et des USA , ont ratifié (se sont engagés à respecter) la Convention de l’Enfant. Dès lors, ils penseront d’abord au bien des enfants et seront à leur écoute.

J’exige qu’on respecte les droits de l’enfant !

de l’enfant capé, tu as droit à des soins spéciaux. Article 24

Si tu tombes malade tu as droit à la santé et aux services médicaux. Article 28–29

Tu as droit à aller à l’école et à apprendre ce qui est important, par exemple le respect des droits de l’homme et le respect des autres cultures.

Article 34

On ne t’exposera pas à la violence et on ne t’obligera pas à la prostitution. Tu as droit à l’aide et au soutien en cas de maltraitance. Article 35

Tu as droit à la protection contre la vente ou l’enlèvement. Article 37

Tu ne peux être soumis à une peine cruelle ou dégradante.

Article 30

Article 38

On respectera les idées et croyances de tous les enfants. Toi, qui appartiens à une minorité, tu as le droit à ta langue, ta culture et ta religion.

Tu ne peux pas être enrôlé dans une armée ni participer aux conflits armés.

Article 31

Tu as droit aux loisirs, au repos, au jeu et à vivre dans un environnement propre. Article 32

On ne t’obligera pas à faire un travail dangereux ou qui entrave tes activités scolaires et ta santé.

LA TRIBUNE DES ENFANTS

Article 42

Les États doivent faire connaître le texte de la Convention aussi bien aux adultes qu’aux enfants. Tu as le droit à l’information et à la connaissance concernant tes droits.

POUR LES DROITS DE L’ENFANT

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Comment vont les en Survivre et se développer

2,2 MILLIARDS D’ENFANTS EN DESSOUS DE 18 ANS DANS LE MONDE 82 mllions d’enfants vivent dans les deux pays, la Somalie et les États-Unis qui n’ont pas ratifié les droits de l’enfant. Tous les autres pays ont promis de respecter les droits de l’enfant, mais les violations de ces droits sont courants dans tous les pays.

Nom et nationalité Quand tu viens au monde, tu as droit à être enregistré comme citoyen de ton pays. Chaque année 137 millions d’enfants naissent dans le monde. 51 millions d’entre eux ne sont jamais enregistrés. Il n’y a pas de preuve écrite de leur existence !

Tu as droit à la vie. Les pays qui ont signé les droits de l’enfant feront tout pour que les enfants survivent et se développent. 1 enfant sur 17 dans le monde (1 sur 8 dans les pays pauvres) meurt avant l’âge de cinq ans, la plupart de causes qui auraient pu être évitées.

Santé et Assistance médicale Tu as droit à la nourriture, à l’eau potable et aux soins médicaux. 21.000 enfants de moins de cinq ans meurent chaque jour (7,6 millions par an) de maladies dues au manque de nourriture, d’eau potable, d’hygiène et de soins médicaux. La vaccination contre les maladies infantiles les plus courantes sauve 2,5 millions d’enfants par an. 1 enfant sur 5 n’est jamais vacciné. 2 millions d’enfants meurt chaque année de maladies contre lesquelles on peut se faire vacciner. 4 enfants sur 10 dans les 50 pays les plus pauvres n’ont pas accès à l’eau potable. Chaque année un million de personne, la plupart des enfants, meurt de malaria. Seulement 2 sur 10 enfants malades sont soignés contre la malaria et seulement 2 sur 10 enfants dans les pays les plus pauvres, touchés par la malaria, dorment sous une moustiquaire.

Foyer, vêtements et sécurité Tu as droit à un foyer, à la nourriture, aux vêtements, à la scolarité, aux soins médicaux et à la sécurité. Plus de la moitié des enfants dans le monde vivent en état de pauvreté. Environ 700 millions d’enfants vivent avec moins de 1,25 USD par jour. 500 millions d’autres enfants vivent avec moins de 2 USD par jour. 16

Enfants handicapés Toi qui es handicapé, tu as les mêmes droits que les autres. Tu as droit au soutien qui te permettra de prendre une part active à la vie sociale. Les enfants handicapés sont parmi les plus vulnérables. Dans beaucoup de pays, ils n’ont pas le droit d’aller à l’école. Beaucoup sont traités comme inférieurs et cachés. Il y a 150 millions d’enfants avec des handicaps dans le monde.


Enfants qui vivent dans la rue Tu as droit à vivre dans un milieu sûr. Tous les enfants ont droit à l’instruction, aux soins et à un niveau de vie décent. 60 millions d’enfants ont la rue comme foyer. 90 millions d’autres enfants travaillent et passent leurs journées dans la rue mais ont une famille dans laquelle ils retournent la nuit.

Délits et peines Les enfants ne seront emprisonnés qu’en dernière instance et pour très peu de temps. Aucun enfant ne sera soumis à la torture ou à d’autres sévices. Les enfants qui commettent des délits ont droit à l’aide et aux soins. Les enfants ne seront ni emprisonnés à vie ni soumis à la peine de mort. Au moins 1 million d’enfants sont emprisonnés. Les enfants emprisonnés sont souvent maltraités.

Travail nuisible Tu as droit à la protection contre l’exploitation économique et contre le travail qui nuit à ta santé ou qui t’empêche d’aller à l’école. Les enfants de moins de 12 ans ne doivent pas travailler du tout. Environ 306 millions d’enfants travaillent et pour la plupart d’entre eux, le travail met en péril leur sécurité, leur santé, leur morale ou leur scolarité. 10 millions d’enfants sont exploités à travers les pires formes de travaux, comme esclaves pour dettes, soldats ou prostitués. Au moins 1,2 millions d’enfants est victime de « trafficking » qui est l’esclavage d’aujourd’hui.

Protection contre la violence Tu as droit à la protection contre toutes formes de violence, d’incurie, de maltraitance et d’agression. Chaque année 40 millions d’enfants sont si maltraités qu’ils ont besoin de soins médicaux. 30 pays dans le monde ont interdit toute forme de sévices ce qui fait que seuls 4 enfants sur 100 dans le monde sont protégés contre la violence par la loi. Beaucoup de pays permettent les châtiments corporels à l’école.

Enfants des minorités Les enfants qui appartiennent à des groupes minoritaires ou indigènes ont droit à leur langue, leur culture et leur religion. Indigènes sont par exemple les Indiens d’Amérique, les Aborigènes d’Australie ou les Lapons d’Europe du Nord. Les groupes indigènes ou minoritaires sont souvent désavantagés. Leur langue n’est pas respectée, ils sont molestés ou discriminés. Beaucoup d’enfants n’ont pas accès aux soins médicaux.

Tu as droit à la protection et à l’assistance en temps de guerre ou si tu es en fuite. Les enfants en guerre ou en fuite ont les mêmes droits que les autres. Ces 10 dernières années, au moins 2 millions d’enfants sont morts, victimes de la guerre, 6 millions ont été blessés physiquement. 10 millions ont été blessés psychiquement. Un million a perdu sa famille ou en a été séparé. Des dizaines de milliers d’enfants sont employés comme soldats, transporteurs et détecteurs de mines (chaque année plus de 1.000 enfants sont tués ou rendus invalides par des mines) Au moins 18 millions d’enfants sont en fuite.

École et formation Tu as droit à l’école. L’école primaire doit être gratuite pour tous. Environ 8 enfants sur 10 dans le monde vont à l’école, mais 93 millions ne commencent jamais l’école. 6 sur 10 de ces enfants sont des filles.

FAIS ENTENDRE TA VOIX ! Tu as le droit de dire ce que tu penses à propos de toutes les questions qui te concernent. Les adultes doivent écouter l’avis des enfants avant de prendre une décision, laquelle doit toujours viser le bien de l’enfant.

Est-ce ainsi dans ton pays et dans le monde aujourd’hui? Toi et le reste des enfants du monde le savez mieux que personne ! 17

 TEXTE: SOFIA KLEMMING ILLUSTRATION: LOTTA MELLGREN/ESTER

fants du monde?

Protection en temps de guerre et comme réfugié


Sakena Yacoobi

Ann Skelton

Tous les élèves des écoles Amies Universelles ont le droit de vote au Vote Mondial jusqu’à l’âge de 18 ans. Par le Vote Mondial vous élisez le lauréat du Prix des Enfants du Monde pour les Droits de l’Enfant 2012. Des pages 19 aux pages 48 vous pouvez vous rendre à la Journée du Vote Mondial dans différents pays.

A

près avoir discuté des droits de l’enfant là où vous vivez, lu les récits des enfants du jury, des enfants qui participent au Vote Mondial, des candidats au prix et des enfants pour lesquels ils se battent, il est temps de préparer votre Journée du Vote Mondial. Invitez les médias Dès que vous aurez choisi la date du Vote Mondial, informez-en les médias. Les coupures de presse ci-contre proviennent du Vote Mondial en Suède et en Inde. Vote à bulletin secret Il y a beaucoup à préparer pour que le Vote Mondial soit un vote démocratique, où le secret de ton vote soit garanti. Si tu n’en parles pas toi-même, personne ne saura pour qui tu as voté. Il faudra préparer :

Ann Skelton

Anna Mollel

Le Vote Mondial 2012 Le Vote Mondial 2012

Anna Mollel

• Bulletins électoraux : Utilisez ceux que vous recevez du Prix des Enfants du Monde ou confectionnez-en vous-même. • Isoloirs : Vous pouvez emprunter les isoloirs des votations des adultes ou confectionnez vos propres isoloirs. Vous ne devez entrer qu’un à la fois dans l’isoloir pour que personne ne voie comment vous votez.

Une urne en calebasse pour les droits de l'enfant au Nigeria.

Les enfants du Kenya préparent les urnes électorales et les affiches. Membres du bureau de vote à la School of Science de Ogbomoso, au Nigeria. Dépouillement des voix par les enfants de SOS Villages d'Enfants au Cameroun.

• Urnes électorales : Dans Le Globe vous pouvez voir différentes urnes électorales. On peut les faire en carton, en partant d’une grande boîte en métal ou en feuilles de palmier tressées. • Couleur contre la fraude électorale : Couleur sur le pouce, ongle peint, trait sur la main ou sur le visage, il y a beaucoup de façons de montrer que tu as déjà voté.

Sakena Yacoobi

Ann Skelton

Sakena Yacoobi

• Liste électorale : La liste doit contenir le nom de tous ceux qui ont le droit de vote. Les noms seront ensuite cochés quand les votants auront reçu leur bulletin de vote ou quand ils auront voté.

• Désignez les membres du bureau de vote, Il faut fêter ça ! les contrôleurs électoraux et les scrutateurs. Quand le vote est terminé, on célèbre Les membres du bureau de vote cochent les les droits de l’enfant et la Journée du listes électorales et distribuent les bulletins Vote Mondial par des spectacles, des électoraux. Les contrôleurs électoraux biscuits, du thé et des gâteaux ou des tourtes ou par d’autres moyens. surveillent que l’élection, les marques de couleur Certains organisent une manifestaet les décomptes de voix se fassent selon les tion en faveur des droits de l’enfant. règles. Les scrutateurs comptent les voix et communiquent le résultat. Regardez la vidéo du Vote Mondial sur www.worldschildrensprize.org

Anna Mollel

THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD

Le Vote Mondial 2012 Le Vote Mondial 2012

THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD

Le Vote Mondial 2012 Le Vote Mondial 2012

THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD

Le Vote Mondial 2012 Le Vote Mondial 2012

THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD

Le Vote Mondial 2012

THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD

QU’EST-CE QUE LE VOTE MONDIAL ?

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Leçon de démocratie à l’école Mbizi au Zimbabwe C’est un moment de calme et de solennité quand les enfants déposent leur bulletin de vote dans les pots en terre qui sont les urnes électorales de l’école Mbizi. L’école est située à Harare, la capitale du Zimbabwe. – Ceci est très important pour nous. Le Prix des Enfants du Monde est une leçon de démocratie, dit Vernon Muzorori, 12 ans. Visite les divers locaux de vote du Vote Mondial en vue d’un vote libre et démocratique !

La présidente du Vote Mondial déclare le vote ouvert – Il est 14h18 et je déclare le vote ouvert ! Nous allons d’abord cacheter nos urnes électorales, dit Tinotenda Tongogara, 11 ans, d’une voix forte et assurée en couvrant les pots pour que personne ne puisse ôter ou ajouter des bulletins de vote. Ensuite, les premiers élèves entrent dans le local et le vote peut commencer. – Aujourd’hui, je suis la présidente du Vote Mondial et ma tâche est de vérifier que tout se passe bien dans le local de vote. Et, jusqu’à présent tout va bien ! Tout le monde semble s’être préparé. Avant le vote, nous avons lu Le Globe. Pendant les leçons, ici à l’école mais aussi au club de filles du Girl Child Network, dont je fais partie. Puis nous avons beaucoup parlé de ce que nous avions appris, aussi bien sur les droits des

enfants que sur les candidats. Et nous nous retrouvons dans beaucoup de récits. Par exemple, beaucoup d’enfants au Zimbabwe doivent travailler. Le Globe c’est formidable ! J’adore ce journal, dit Tinotenda.

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L'agent de l'ordre fait entrer les électeurs l'un après l'autre dans le local de vote.

Agents de l’ordre – Bien, tu peux entrer dans le local de vote, dit Panashe Makamba, 12 ans en laissant passer l’élève qui attend son tour dans la très longue queue composée des camarades de classes qui veulent voter. Panashe est l’un des trois agents de l’ordre de la journée et est responsable des entrées. – Nous surveillons les élèves dans les queues pour qu’il n’y ait pas de bagarres et que tout se passe bien. L’ordre c’est important, parce que si tout est détruit, on n’aura pas de résultat. Quand les adultes votent, il y a souvent des bagarres et du désordre. C’est très difficile alors d’obtenir un résultat exact. Mais pas dans notre vote ! dit Panashe. – J’aide si c’est nécessaire à installer les isoloirs et les urnes électorales. Et je vérifie que chacun sache où il doit aller et quoi faire, dit Munyaradzi Mazhangara, 13 ans. – J’indique le chemin du local de vote et je contrôle que ceux qui votent aient la marque à l’encre au doigt, dit Tanaka Murungweni, 12 ans. 20

Panashe Makamba, 12 ans, Munyaradzi Mazhangara, 13 ans et Tanaka Murungweni, 12 ans, sont agents de l’ordre pendant le Vote Mondial.

Scrutateurs 1 – listes électorales – Nous demandons leur nom à tous ceux qui votent et ensuite nous biffons leur nom sur la liste électorale. Si le nom n’existe pas sur la liste, la personne en question ne peut pas voter. Nous demandons le nom aussi pour être sûr que personne ne vote plus d’une fois. C’est important pour que le résultat soit juste et correct, dit Everjoy Dumbu, 11 ans. Pamela Madhibha, 10 ans, Belinda Makawa, 12 ans et Everjoy Dumbu, 11 ans, sont scrutatrices.


Responsable du scanner – Je demande à tous ceux qui votent d’introduire leurs deux mains dans le scanner. Dans un scanner on peut voir s’il y a de l’encre sur les doigts et s’il y en a, la personne en question ne pourra pas voter, parce que cela voudra dire qu’il ou elle a déjà voté. Ce scanner-ci c’est moi qui l’ai fait. D’abord j’ai enlevé la partie supérieure et une des parties latérales d’un emballage de lait. Puis, j’ai bouché le trou sur le côté avec du papier plastifié. Fini ! dit en riant Monica Masvavike, 11 ans.

Rumbidzai Gondora, 11 ans, Chantel Mhembere, 11 ans et Paidamoyo Mukwinya, 11 ans, expliquent comment cocher le nom du candidat pour lequel on vote.

Scrutateurs 3 – bulletins électoraux Tsitsidzashe Chikanga, 11 ans, vérifie que tous ceux qui ont voté trempent leur doigt dans l’encre.

Monica Masvavike, 11 ans, a fait son propre scanner pour déceler les fraudes électorales.

Scrutateur 2 – marquages à l’encre – Je vérifie que tous ceux qui votent, trempent leur doigt dans l’encre, pour que personne ne vote plus d’une fois. En apprenant toutes les étapes dans le Vote Mondial, nous pourrons juger jusqu’à quel point le vote sera libre et démocratique quand nous serons adultes, dit Tsitsidzashe Chikanga, 11 ans.

– Choisis ton candidat et met la croix au bon endroit. Si tu fais plus d’une croix, ton bulletin n’est pas valable ! dit Paidamoyo Mukwinya, 11 ans en tendant le bulletin de vote à un camarade d’école qui fait la queue. – La plupart gèrent déjà tout très bien et sont bien préparés. Et c’est important d’être préparé, savoir pour qui on va voter et pourquoi. Tout ceci nous concerne, il s’agit de nos droits ! Chantel Mhembere, 11 ans.

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Observateurs électoraux Derrière les scrutateurs électoraux, il y a deux filles qui suivent attentivement la procédure de vote. – Nous annotons soigneusement tout ce qui se passe dans le local de vote. Les annotations deviennent le document qui reporte ce qui s’est passé exactement, ici, aujourd’hui. C’est important que quelqu’un soit témoin du vote démocratique, sinon c’est très facile qu’on triche, alors le vote n’est pas juste et le résultat est incorrect, dit Nyaradzo Muduve, 12 ans.

Les observatrices électoraux Kimberly Nhika, 13 ans et Nyaradzo Muduve, 12 ans.

Rutendo James Chakala, 11 ans, Drusilla Tapah, 11 ans et Ashton Masona, 11 ans, représentent les candidats.

Représentants des candidats Les représentants des trois candidats 2011 sont assis à une table dans le local de vote et fournissent les informations de dernière minute aux votants qui hésitent encore. – Je trouve que Monira est fantastique ! Quand on pense à tous ces enfants, agressés à l’acide au Bangladesh qu’elle a aidés. C’est mon héroïne ! dit Drusilla Tapah, 11 ans. – Cecilia est aussi fantastique ! Elle se bat en faveur des enfants victimes de trafficking et contre le travail des enfants. Je veux être comme elle plus tard. Je veux aussi donner aux enfants vulnérables la possibilité d’aller à l’école, la sécurité et l’amour ! explique Rutendo James Chakala, 11 ans. – Murhabazi est un homme qui aide et protège les enfants que l’on oblige à 22

être soldats et esclaves. C’est un homme exceptionnel. Tous les hommes adultes devraient être comme lui. Je veux être comme lui quand je serai adulte, dit Ashton Masona, 11 ans. Drusilla, la représentante de l’« opposition » a l’air satisfait en entendant cela : – C’est bien ! Parce qu'ici aussi, au Zimbabwe, beaucoup d’hommes exploitent les enfants. Les enfants sont victimes de viol et de trafic de personnes. On a vraiment besoin de gars comme Murhabazi ici aussi ! dit Drusilla.


Fête de clôture ! Quand le Vote Mondial est sur le point de se terminer à l’école Mbizi, tout le monde se rassemble dans la cour de l’école pour fêter les droits de l’enfant et parce que tout s’est bien passé. Certains élèves ont pris leur costume de danse et se produisent devant les autres.

Votants

Pour pouvoir sortir du local de vote on doit montrer, aux agents de l’ordre le doigt avec la tache d’encre. Personne avec la tache d’encre n’a le droit de revenir et de voter encore une fois.

TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: JOHAN B JERKE

Impossible de tricher !

– J’ai participé au Vote Mondial aujourd’hui et c’était fantastique de pouvoir voter pour des personnes qui se battent pour nous. Pour tous les enfants vulnérables du monde. En votant on soutient les candidats dans leur travail et c’est comme si on les aidait. Et je trouve que c’est tout à fait normal que nous, les enfants participions et aidions quand il s’agit de choses vraiment importantes ! C’est aussi très important de participer au Vote Mondial pour une autre raison. Maintenant, nous savons, nous les enfants, comment doit se faire un vote démocratique et nous nous en souviendrons quand nous serons adultes. Le Prix des Enfants du Monde est une grande et unique leçon de démocratie ! dit Vernon Muzorori, 12 ans.

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Tanaka rêve d'être candidate au prix – J’ai ressenti quelque chose de spécial, c’était comme un rêve quand j’ai participé au Vote Mondial aujourd’hui. Je me suis vue être un jour la candidate pour qui on voterait car je me battrai pour les enfants vulnérables. Ce rêve, je vais vraiment essayer de le réaliser, dit Tanaka, 15 ans, du Zimbabwe. Elle est orpheline et petite elle a été abusée sexuellement.

T

Maman est morte

J’allais chercher l’eau et lui faisais à manger, mais ça ne servait à rien. Elle était couchée sans forces. J’étais si inquiète que je ne dormais plus. Tanaka avait de la peine à se concentrer pour ses leçons et comme sa mère n’avait plus la force de travailler, elle dut quitter l’école. Les moyens manquaient pour qu’elle puisse continuer. Après quelques mois de maladie, la mère de Tanaka mourut dans son sommeil. – J’étais si triste. Je ne faisais que crier et pleurer. Maman me manquait tellement. Comme grand-maman vieillissait et était trop fatiguée pour travailler, j’ai compris que plus rien ne serait comme avant.

– J’essayais d’aider maman autant que je le pouvais.

Les choses empirèrent

anaka a grandi avec sa mère et sa grand-mère, son père étant mort avant sa naissance. Maman et grand-maman travaillaient dans une plantation de tabac où elles vivaient toutes les trois. Pendant que les adultes travaillaient dans les champs, Tanaka allait à l’école maternelle avec les autres enfants. Puis ce fut l’école et la nourriture ne manquait jamais. - C’était une très bonne vie. Une vie normale. Maman et grand-maman m’aimaient et s’occupaient de moi, dit Tanaka. Mais, sa mère tomba grièvement malade et tout changea. Tanaka n’avait que sept ans.

Tanaka met sa voix dans l’urne du Vote Mondial. Elle veut aider les autres enfants dont les droits ont été violés et rêve d’être un jour candidate au Prix des Enfants du Monde.

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Après l’enterrement, grandmaman réussit à retrouver l’oncle de Tanaka qui avait promis de s’occuper d’elle. – Cela m’a étonnée et inquiétée, parce que mon oncle avait chassé maman de notre maison à la mort de mon père. Pourquoi voulait-il s’occuper de moi ? Je voulais rester chez grand-maman, mais ce n’était pas possible. Au début, la vie chez l’oncle de Tanaka était mieux qu’elle


Ainsi sont violés des droits des filles au Zimbabwe

La liste de Tanaka des violations des droits des filles au Zimbabwe :

Les amies dans le village sûr sont comme une famille. Ici, elles prennent leur petit-déjeuner ensemble.

n’avait espéré. On lui donnait à manger et des vêtements et elle pouvait aller à l’école. Mais cela ne dura pas. – Un jour, on m’a accusée de répandre des mensonges sur la famille. Mon oncle a dit que j’avais raconté aux autres que sa famille était mauvaise et qu’ils ne me traitaient pas bien. Ce n’était pas vrai, mais tout d’un coup il a changé. Il m’a dit que dans la famille on n’avait jamais aimé ma mère

et qu’ils ne m’aimaient pas non plus. On m’a donné moins à manger et on a refusé de payer les taxes scolaires, alors j’ai dû arrêter l’école encore une fois. Les enfants de mon oncle mangeaient bien et allaient à l’école. Je me disais que ce ne pouvait pas être pire ni plus injuste. Mais j’avais tort. – Mon demi-frère de 26 ans avait bu de la bière dans un bar tout le soir et était rentré

Ménage de fin de semaine

saoul à la maison. Je me suis réveillée et l’ai vu dans la chambre où je dormais. Il criait que le repas n’était pas sur la table. Il m’a bâillonnée avec un chiffon et a arraché mes vêtements. Je n’avais que neuf ans et ne comprenais rien. Après, il m’a dit qu’il me tuerait si je disais à qui que ce soit ce qu’il m’avait fait. Le Girl Child Network

Le jour suivant, très tôt, il

Pas d’éducation Si une fille perd ses parents, elle est souvent obligée d’arrêter l’école car il y a rarement quelqu’un qui veuille payer son éducation. Asservissement Les filles orphelines finissent souvent à la rue où elles sont forcées de vendre leur corps pour survivre. Trafic d’êtres humains On trompe les filles pauvres en leur promettant une vie meilleure si elles quittent leur village pour la ville, mais au lieu de cela, elles doivent travailler dur ou se prostituer. Souvent on les conduit dans les pays voisins comme le Botswana ou l’Afrique du Sud. Mariage des enfants Les familles pauvres peuvent gagner de l’argent en vendant une petite fille comme épouse à un homme adulte. Parfois pour seulement deux sacs de maïs.

– Le week-end, nous faisons le ménage dans nos maisons et balayons le jardin. Nous lavons nos vêtements. Mais nous avons surtout le temps de jouer et de nous amuser !

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partit et Tanaka resta seule plusieurs jours. Elle avait très peur, elle priait pour que cela ne se reproduise plus. Mais, cela ne servit à rien. Son demi-frère abusa à nouveau d’elle. Dans un premier temps, Tanaka n’osa rien dire à personne, car elle avait peur pour sa vie. Mais un jour elle rencontra une camarade d’école qui faisait partie du club de filles du Girl Child Network. Sans savoir ce que Tanaka avait enduré, la copine lui raconta qu’une autre fille de l’école avait subi des agressions sexuelles et que le GCN l’avait aidée. – Alors, je n’ai plus pu me retenir et j’ai tout raconté. Je voulais qu'on m'aide aussi. Et comme je n’osais pas le raconter à grand-mère, c’est ma copine qui l’a fait.

« Les autres filles dans le village sûr ont vécu des expériences similaires aux miennes et me comprennent exactement. Elles sont comme mes sœurs et je me sens aimée »

Sa grand-mère se mit d’abord en colère parce que Tanaka avait raconté ce qui lui était arrivé à son amie. Mais quand le bruit se répandit parmi les voisins, grandmère se laissa convaincre d’emmener Tanaka chez le Girl Child Network où elle pourrait être en sécurité. Le GCN s’occupa de Tanaka. D’abord, elle fit un séjour à l’hôpital où on la soigna, ensuite elle intégra un village sûr pour filles violées. Son demi-frère fut arrêté et emprisonné. - C’était si agréable dans le village. Comme si j’avais trouvé un chez moi. Enfin j’étais entourée par des gens qui prenaient soin de moi. Les autres filles avaient vécu des choses semblables et elles me comprenaient très bien. Elles sont devenues mes sœurs et les mamans du village sont devenues mes mamans. Je me sentais aimée. Aime Le Globe

Aime la danse

– J’adore danser ! J’étais si heureuse quand nous avons célébré le Vote Mondial en chantant et en dansant, car nos chansons parlent de nos droits à nous les filles ! dit Tanaka.

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Peu après Tanaka reprit l’école et rejoignit le club de filles du Girl Child Network qui se réunit tous les mercre-

dis après la pause du déjeuner et parle des droits des filles. – Nous lisons souvent le journal Le Globe au club de filles et j’y ai appris que ce qui m’est arrivé, arrive à des enfants partout dans le

Tanaka, 15 AIME : Jouer, faire du volley-ball, danser et chanter. DÉTESTE : Que les filles soient victimes d’abus sexuels. LE MEILLEUR : Que le GCN m’ait sauvée et m’ait permis de vivre dans le village sûr pour filles. LE PIRE : Avoir été abusée sexuellement. VEUT ÊTRE : Médecin, sauver les filles et se battre pour leurs droits. RÊVE : Que toutes les filles puissent vivre bien et aient une chance de faire des choses importantes dans la vie, comme devenir médecin.


Le Vote Mondial

Ce ne sont pas uniquement les récits du Globe qui inspirent Tanaka et lui donnent de la force c’est aussi le fait de participer au Vote Mondial. – En votant aujourd’hui, j’ai senti que je pouvais exprimer librement ce que je pensais. J’ai pu donner entièrement mon avis. Et mon avis est que les droits de l’enfant doivent être respectés sur toute la terre ! Qui plus est, c’était fantastique qu’un jour aussi important pour nous les enfants, comme le Vote Mondial, se déroule ici dans mon village, près de ma maison. C’est presque trop beau pour être vrai ! 

Le Girl Child Network En 2007, Betty Makoni reçut le Prix des Enfants du Monde pour son long combat afin que les filles du Zimbabwe soient protégées contre les agressions sexuelles et bénéficient des mêmes chances que les garçons. À travers l’organisation Girl Child Network (GCN) Betty a construit trois villages sûrs pour filles vulnérables et 500 clubs pour filles avec 30.000 membres, surtout dans les campagnes et dans les bidonvilles. Betty protège les filles contre le travail des enfants, le mariage forcé, la maltraitance, le trafficking et le viol. Elle procure aux filles nourriture, vêtements, soins, un foyer, la possibilité d’aller à l’école et la sécurité. Pardessus tout, elle donne aux filles le courage d’exiger leurs droits. Des milliers de filles ont pu se reconstruire une vie grâce au travail de Betty. Pour en savoir plus : www.worldschildrensprize.org

TE X TE : ANDRE AS LÖNN PHOTO : JOHAN B JERKE

dans le combat en faveur des enfants vulnérables. C’est mon rêve !

monde. C’est très triste. En même temps, en le sachant, je ne me sens plus si seule. Nous nous soutenons entre nous, nous qui vivons dans le village et je ressens la même chose pour tous les enfants victimes de viols dont on parle dans le journal. Le Globe est très important, car c’est une tribune où les enfants peuvent raconter ce qu’ils ont vécu et donner des conseils à d’autres enfants concernant des choses difficiles et importantes. C’est comme si, nous qui lisons, devenions les amis de ceux qui racontent et d’une certaine façon nous nous rendons la vie plus facile. De plus, le récit des candidats me donne la force et l’inspiration pour mieux travailler à l’école, pour ensuite devenir une personne qui s’engage

Pendant le week-end, les filles du village sûr s’amusent bien. Mais elles font aussi du volley-ball et jouent un peu chaque soir.

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06h00 Un jour nouveau commence – Nous nous réveillons presque toujours toutes seules, mais notre maman du village contrôle quand même que tout le monde se lève, comme le fait une mère. Puis nous faisons notre lit, nous lavons et nous brossons les dents.

La journée de

06h15 On prépare la bouillie de maïs –Chaque matin je vais au réfectoire pour préparer le petit-déjeuner pour tout le monde. Généralement, il y a de la bouillie de maïs. Comme je suis la plus âgée, je suis la grande sœur et je m’occupe des autres filles. Quand nous avons fini, chacune lave son assiette. La seule qui ne le fait pas, c’est la plus petite qui n’a que six ans. Elle ne doit pas faire la vaisselle ou à manger, c’est nous qui le faisons pour elle.

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06h45 En chanson, sur le chemin de l’école – Après avoir mis notre uniforme scolaire, nous allons ensemble à l’école. Il faut environ 45 minutes. Souvent on parle et on chante tout le long du chemin pour que le temps passe plus vite !

De 07h30 à 16h00 Leçons – Le Girl Child Network paye nos taxes scolaires, l’uniforme, les livres, tout ! Sans cela je n’aurais pas pu aller à l’école. La première pause est à dix heures, ensuite nous prenons le déjeuner que notre maman du village a préparé le soir précédent. Si on a le temps avant que les leçons reprennent, même deux minutes, je fais du volley-ball ou je joue avec mes camarades de classe ! Pas seulement avec celles qui habitent au village sûr, avec les autres aussi. On me traite exactement comme toutes les autres et ça fait du bien. Je crois que c’est parce que toutes les filles de l’école font partie du club de filles du Girl Child Network. Nous nous rencontrons le mercredi et nous parlons des droits des filles et de ce qui arrive aux filles. Tout le monde comprend ce qui m’est arrivé, à moi et aux autres filles qui vivent au village sûr.

Tanaka dans le village sûr 17h00 Dîner – Quand nous rentrons, nous nous changeons et allons au réfectoire où la maman du village nous attend. Tout est bon ici, mais ce que je préfère c’est la bouillie de maïs sadza avec légumes. – Il y a toujours l’une des deux mamans du village avec nous 24 heures sur 24. Elles sont exactement comme de vraies mamans qui nous demandent comment s’est passé la journée à l’école et comment on se sent et tout ça. Les filles qui vivent ici sont mes sœurs et nous prenons soin les unes des autres. Nous sommes une famille. Même si mon demi-frère est sorti de prison, je me sens en sécurité ici, dit Tanaka.

Aujourd’hui, Tagoma la maman du village, a préparé le sadza avec viande, légumes et riz.

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Tanaka pend avec précaution les bas qu’elle vient de laver. Le fil barbelé est une bonne corde à linge, mais il faut pendre les bas entre les épines.

19h00 Devoirs – Nous allons dans la maison que nous appelons bibliothèque pour faire nos devoirs. Nous ne sommes pas dans la même classe, nos leçons sont donc différentes, mais nous nous entraidons. 18h00 Occupations quotidiennes et jeux – Les filles qui sont de « corvée de vaisselle » font la vaisselle après le repas et celles qui sont de « corvée de sadza » préparent le sadza que nous mangeons ensuite au dîner. Quand nous avons terminé, nous lavons notre uniforme et nos bas pour le jour suivant. Les jours de semaine, nous n’avons pas beaucoup de temps pour jouer, mais nous essayons de faire un peu de volley-ball chaque jour. Pendant le week-end, nous jouons, chantons et dansons et j’adore ça !

21h00 L’heure de se coucher – Nous vivons toutes dans la même maison, sauf la plus petite qui dort avec les mamans du village. Nous parlons longtemps avant de dormir. Nous nous racontons nos secrets et tout ça. Nous nous faisons entièrement confiance. Les filles sont mes sœurs, ma famille. Je les aime ! 30


Le Vote Mondial dans le village sûr pour filles

Isoloirs en caoutchoutier

On a fait les isoloirs !

L

a queue est longue jusqu’à l’isoloir situé sous le l’arbre Mupangara dans le village sûr pour filles à Chihota au Zimbabwe. Il y a quelques jours, Forward et ses amis abattirent deux grands caoutchoutiers et ramassèrent de l’herbe pour confectionner les isoloirs. Quand ils arrivèrent au village sûr pour filles, ils creusèrent de profonds trous dans le sol où ils plantèrent les piliers qu’ils avaient faits avec le caoutchoutier. Ensuite, ils lièrent

l’herbe autour des piliers avec des bandes d’écorce de l’arbre Musasa. Les isoloirs étaient très beaux, mais Forward n’est pas tout à fait satisfait… – C’est bien, mais j’aurais voulu qu’ils soient encore plus beaux. C’est important que tout soit aussi beau que possible quand il s’agit du Vote Mondial, car c’est un jour si important pour nous, les enfants. Tout doit être parfait ! dit Forward Takawira, 16 ans.

De gauche à droite : Misheck Mureverwi, 15 ans, Trymore Munemo, 15 ans, Faith Mudyiwa, 15 ans, Godknows Chinyangu, 16 ans, Forward Tahawira, 16 ans.

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Les garçons votent dans le village des filles « Aujourd’hui, j’ai voté ici dans le village sûr pour filles. Le village est un endroit superbe pour le Vote Mondial. Y a-t-il un meilleur endroit pour voter que là où on défend les droits de l’enfant ? Le Vote Mondial et le club de filles du GCN c’est en quelque sorte la même chose ! Le GCN se bat pour les droits des filles et je soutiens vraiment ce combat. C’est important que filles et garçons aient les mêmes droits. Avant ce n’était pas du tout le cas. La plupart des filles n’allaient pas à l’école. Avant, nous les garçons, nous croyions aussi que nous étions mieux, plus forts et plus intelligents que les filles. Absolument ridicule, puisque ce n’est pas vrai ! Nous avons tous la

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même valeur, que l’on soit un garçon ou une fille. C’est ce que nous pensons moi et tous mes amis. C’est grâce au combat du GCN que les choses se sont améliorées pour les filles au Zimbabwe. Après le vote, nous avons chanté et dansé et avons fêté le Vote Mondial. On doit fêter un jour pareil parce que c’est un jour important. Nous avons pu montrer notre soutien à ceux qui luttent pour nos droits et nos droits c’est ce qu’il y a de plus important. Nous sommes les dirigeants de demain et si on ne nous respecte pas et si on nous maltraite on court aussi le risque d’être de mauvais dirigeants qui maltraiteront les enfants et les adultes. Ce ne serait pas un bel avenir » Anesu Tomondo, 15 ans, école Manyaira

Le club de filles et le Vote « Je fais partie du club de filles de l’école. C’est là que j’ai lu Le Globe et que je me suis préparée pour le Vote Mondial. Le club de filles est un endroit où nous, les filles

pouvons faire entendre notre voix et parler de choses qui sont importantes pour nous. Ce qui peut être difficile dans une classe d’école. Car, ici au Zimbabwe les garçons et les filles ne sont pas égaux. C’est beaucoup plus facile pour les garçons de faire entendre leur voix. On les écoute. Nous, presque personne ne nous écoute. Ce n’est pas juste, puisque nous


les malheurs qui sont arrivés aux filles des villages sûrs, pourraient très bien m’arriver à moi aussi. En lisant Le Globe, je comprends que ce n’est pas seulement ici au Zimbabwe qu’on ne respecte pas les filles. C’est dans le monde entier. Beaucoup sont abusées, ne peuvent pas aller à l'école et on les oblige à se

Mondial donnent du courage ! sommes tous égaux et nous devrions être traités de la même façon. Mais ici, nous n’avons pas les mêmes droits, c’est pour cela que les clubs de filles sont si importants. Les clubs nous apportent les connaissances

et la force de hausser la voix. Même chose avec le journal Le Globe et le Vote Mondial qui donnent aux enfants du monde entier les connaissances, la force et le courage d’exiger le respect des droits de l’enfant ! J’étais si heureuse quand j’ai lu dans Le Globe le récit

de personnes dont les droits ont été violés quand ils étaient enfants, mais qui ont eu le courage de continuer et qui maintenant qu’ils sont adultes, aident les enfants en difficulté. C’est ce que je veux faire quand je serai grande ! » Heather Samuriwo, 14 ans, école Manyaira

Le village de toutes les filles Le samedi, le club des filles tient sa réunion dans le village sûr et près de 100 filles, provenant des écoles et des villages avoisinants, y participent. Ensemble, elles apprennent quels sont leurs droits, jouent au théâtre, écrivent des poèmes qu’ensuite elles lisent à haute voix, jouent au volley-ball, chantent et dansent. – Ce village appartient naturellement aux filles qui y vivent. Mais pas seulement. Il appartient à toutes les filles, parce que c’est un village qui rend les filles plus fortes. C’est notre place, dit Faith Mudyiwa, 15 ans, responsable de la Journée du Vote Mondial ainsi que présidente du club de filles de l’école Manyaira.

TE X TE : ANDRE AS LÖNN PHOTO : JOHAN B JERKE

« Moimême, je n’habite pas dans le village sûr, mais c’est un lieu très important. Ici vivent des filles qui ont vécu les pires choses qu’on puisse imaginer. Elles sont comme mes sœurs. Nous sommes solidaires et nous nous soutenons. Comme les filles sont très exposées ici,

marier bien qu’elles ne soient que des enfants. Cela me met tellement en colère ! Mais je suis aussi heureuse quand je lis Le Globe car je réalise qu’il y a des gens qui luttent pour améliorer la vie des filles. Et je crois qu’un jour cela arrivera. Les récits du Globe me donnent de l’espoir ! Quand je serai grande, je veux devenir animatrice du Girl Child Network et je me battrai principalement pour les filles ici au Zimbabwe ! » Tnokozile Mapfumo, 14 ans, école Manyaira

Les filles sont maltraitées dans le monde entier

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Emelda est enseignante et présidente – Quand je serai grande, je veux être une personne qui ose prendre des risques dans le combat en faveur des enfants en difficulté. Exactement comme les candidats au Prix des Enfants du Monde, dit Emelda Zamambo, une orpheline de 12 ans, de Maputo au Mozambique. Mais Emelda ne se contente pas d’attendre d’être adulte pour se battre pour les droits de l’enfant. Chaque jour, elle tient sa propre école chez elle, dans sa maison pour les enfants qui sans elle, ne pourraient pas aller à l’école. Elle leur apprend à lire, écrire et compter.

1

, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10 !!! Les enfants comptent à haute voix, tous ensemble les chiffres qu’Emelda leur désigne sur le tableau noir. – Bien ! Encore une fois ! dit-elle en recommençant. Il est huit heures et demie du matin et comme tous les autres jours, une dizaine d’enfants sont assis sur le sol devant la maison d’Emelda. Ils regardent gravement leur jeune professeur écrire les neuf chiffres sur un simple panneau de bois, transformé en tableau d’école. Il y aura

Tampon effaceur

Je l’ai acheté avec l’argent de mon déjeuner, à la place de nourriture.

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bientôt une année qu’Emelda a créé son école du matin et, depuis, la plupart des enfants y sont allés. – J’ai toujours aidé mes petits frères et sœurs dans leurs leçons. Nous nous asseyions devant la maison pour les faire. Le bruit a dû courir que nous nous retrouvions là le matin, car tout d’un coup d’autres enfants qui voulaient de l’aide sont arrivés. Au début il n’y en avait que quelques-uns, mais maintenant je fais la leçon à douze enfants par jour. Gratuitement, bien-sûr ! dit Emelda en riant. Certains des élèves d’Emelda sont les enfants des voisins


Les craies

C’est grand-mère qui m’en a fait cadeau parce qu’elle pensait que c’était très bien que j’aide les autres enfants.

du Vote Mondial !

– Aller à l’école c’est ce qu’il y a de plus sérieux. Plus tard, ce sera plus facile de trouver du travail et on pourra s’occuper de sa famille. Si on n’a pas d’éducation, on risque de rester pauvre et d’avoir des difficultés toute la vie. Une des choses les plus importantes qu’on peut apprendre à l’école ce sont les droits de l’enfant. Alors, on peut apprendre à se défendre et à ne pas se laisser exploiter. C’est pour cela que j’utilise Le Globe dans mon école du matin, dit Emelda.

qui ont besoin d’aide pour poursuivre l’école officielle. D’autres sont si pauvres qu’ils n’ont pas les moyens d’aller à l’école. Papa a été abattu

– Je déteste voir les enfants pauvres qui ne vont pas à l’école et à qui l’on ne donne aucune chance. Souvent, ils ont perdu leurs parents et se retrouvent à la rue, car personne ne s’en occupe. Pour survivre, ils sont obligés de fouiller les poubelles et boire de l’eau sale. Beaucoup sont forcés à travailler. C’est si injuste ! dit Emelda. Les injustices la mettent en colère et elle sait très bien

Le Globe à l’école du matin

Le tableau noir

Un vieux panneau en bois que j’ai trouvé dans les environs.

La baguette

Je l’ai eue de mon oncle qui est charpentier.

qu’elle aurait pu être l’un de ces enfants vulnérables. Le père d’Emelda a été tué par des voleurs et seulement quelques mois après, c’est sa mère qui est morte de la malaria. – Tout s’est écroulé. Je ne croyais pas que les choses s’arrangeraient. J’avais très peur

de rester seule et de finir à la rue. Mais malgré tout ce qui m’est arrivé, j’ai eu une chance incroyable. La grand-mère et la famille de l’oncle d’Emelda l’ont accueillie à bras ouverts. On lui a donné à manger, des vêtements et la possibilité d’aller à l’école. 35


Les châtiments corporels sont interdits dans 30 pays Selon l’article 19 de la Convention relative aux Droits de l’Enfant de l’ONU, tu as le droit à la protection contre toute forme de violence, négligence, maltraitance et agression. Tu peux, par conséquent dire que les châtiments corporels sont une violation des droits de l’enfant. Malgré cela, 40 millions d’enfants sont chaque année maltraités au point qu’ils ont besoin de soins médicaux. Seulement 30 pays ont interdit toute forme de punition physique contre les enfants. Ce qui fait que seulement 4 enfants sur 100 dans le monde sont protégés par la loi contre la violence. Le dernier pays en date à interdire les châtiments cor-

Les châtiments corporels interdits dans l’école d’Emelda ! – Je n’utilise la baguette que pour enseigner, jamais pour frapper ! Dans presque toutes les autres écoles du Mozambique, il est courant que les profs frappent les élèves dans le creux de la main ou sur les fesses, avec la baguette. Je trouve que c’est très mal ! Les profs devraient mieux expliquer et mieux montrer, s’il y a quelque chose que nous ne comprenons pas ou si nous ne nous comportons pas comme il faut. Nous apprenons plus facilement si on ne nous bat pas et si nous n’avons pas peur. On apprend mal si on a peur. Et puis, après avoir lu Le Globe, je sais que les châtiments corporels c’est contre nos droits !

La Convention de l’Enfant dans Le Globe – On peut apprendre énormément dans la double page du Globe qui décrit tous les droits des enfants ! Avant, je ne savais pas, par exemple, que, selon la Convention relative aux Droits de l’Enfant de l’ONU, les enfants qui vivent dans la rue ont droit à un foyer, à l’école et à vivre convenablement, dit Emelda. 36

– J’ai surtout eu une famille qui m’aime. Ils m’embrassaient et me répétaient que j’appartenais à leur famille. Qu’ils s’occuperaient de moi et que tout s’arrangerait. Et c’est ce qui est vraiment arrivé. Maintenant je suis la fille de mon oncle et de ma tante et mes cousins sont mes frères et mes sœurs. J’ai eu la chance d’avoir une belle vie et je veux partager cela avec ceux qui en ont besoin. C’est pour cela que j’ai mon école, dit Emelda. Le Globe à l’école

À onze heures, Emelda congédie ses élèves en leur

porels est le Sud-Soudan. Beaucoup de pays autorisent les châtiments corporels à l’école. Au Mozambique, les châtiments corporels sont autorisés aussi bien à la maison qu’à l’école. Et dans ton école, dans ton pays ? Peux-tu dire à ton prof, tes parents, les hommes politiques et les autres adultes que les châtiments corporels constituent une violation des droits de l’enfant ? Raconte ce qui t’arrive à toi et aux autres enfants. Viens nous faire part de tes expériences et de tes pensées sur les châtiments corporels à myrights@worldschildrensprize.org ou www. worldschildrensprize.org.

donnant rendez-vous pour le lendemain. Puis, elle rentre pour mettre son uniforme scolaire. Après le déjeuner, Emelda n’est plus professeur, mais élève. Elle adore aller à l’école et dernièrement cela est devenu encore plus amusant. On s’est préparé pour le Vote Mondial en lisant et relisant le magazine Le Globe. – J’ai tout de suite senti que les récits du Globe parlent de nous, ici, au Mozambique ! Les récits d’enfants pauvres qui ont faim, sont abusés, perdent leurs parents qui meurent du sida et qui à cause de cela finissent dans la rue, sont obligés de travailler, tout


Emelda Zamambo, 12

cela peut très bien se produire ici. Avant je me disais que c’était injuste. Après avoir lu Le Globe, je sais qu’en plus d’être injuste, c’est une violation de nos droits. Emelda était parmi les élèves qui se sont le plus engagés dans le travail du Globe et dans les préparatifs du Vote Mondial de l’école. – Il s’est passé beaucoup de choses en moi pendant que nous travaillions à ce projet. Ça m’a fait beaucoup réfléchir et j’ai même eu des insomnies. La présidente du Vote Mondial

Quelques jours avant le Vote Mondial, Emelda était au lit et lisait Le Gobe. On y parlait

des droits des enfants des rues. Elle se disait que l’école aurait dû faire quelque chose pour tous ces enfants qui n’ont aucune chance de s’instruire. Le lendemain matin, elle était à l’école plus tôt que d’habitude pour présenter ses idées à la directrice. – J’ai expliqué que j’avais lu dans Le Globe que tous les enfants, même les enfants des rues, ont le droit à l’école. Je lui ai proposé que nous, qui étions mieux lotis, pourrions peut-être recueillir un peu d’argent pour que les enfants qui vivent dans la rue puissent payer les uniformes et déjeuner ici. Pour qu’ils puissent manger à leur faim et apprendre tranquillement.

– Quand maman et papa sont morts, j'ai trouvé une famille et de l'amour auprès de ma grandmère et de mon oncle, dit Emelda.

La directrice a écouté Emelda et pris au sérieux ses propositions. Elle ne pouvait rien promettre tout de suite concernant les enfants de la rue, mais elle a tenu à donner une importante tâche à Emelda. – La directrice a dit qu’elle voyait bien que les droits de l’enfant me tenaient à cœur et que cela lui faisait très plaisir. Elle m’a alors demandé si je voulais être la présidente du Vote Mondial et assumer la responsabilité de tout le vote dans notre école. Tout de suite, je me suis sentie nerveuse, mais très vite, très contente. Et comme je trouve les récits du Globe si importants, j’ai trouvé le courage de

Emelda aide grand-mère à faire la vaisselle.

faire un petit discours de bienvenue, malgré les 300 élèves qui s’étaient assemblés à l’école en ce jour si solennel ! Les candidats nous inspirent

Ceux qui ont inspiré du courage à Emelda concernant les droits de l’enfant sont les candidats du Prix des Enfants du Monde. – Je veux devenir enseignante et, comme tous les candidats, je veux être une personne qui ose prendre des risques dans le combat en faveur des enfants vulnérables. Mais il y a encore du chemin avant qu’Emelda puisse commencer sa formation d’enseignante et il y a au moins douze personnes qui en sont contentes. Ses élèves. Demain matin, à huit heures et demie, ils seront là à attendre que l’école d’Emelda commence. Comme d’habitude. 

TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: JOHAN B JERKE

professeur … élève … et avec ses vêtements préférés !

Emelda en…

AIME : La compagnie des autres et les aider. DÉTESTE : Se disputer, la violence et voir qu’il y a des enfants pauvres qui vivent dans la rue. LE MEILLEUR : Avoir une famille qui m’aime. LE PIRE : Quand j’ai perdu maman et papa. VEUT ÊTRE : Médecin et aider les autres. RÊVE : Que tous les enfants soient heureux.

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Partager – J’ai plusieurs camarades d’école qui sont orphelins et qui sont dans une situation difficile. Ils sont pauvres et ont faim. C’est injuste, ça m’énerve et ça me rend triste. Parfois avec mes coupons du déjeuner, j’achète des limonades, des jus, des chips ou du pain à quelqu’un qui en a plus besoin que moi. J’ai eu la chance d’avoir une vie décente et je voudrais être la voix de ceux qui n’ont pas eu cette chance et qui n’ont pas la force de faire valoir leurs droits. Si j’étais à leur place, j’aimerais que quelqu’un se batte pour moi ! dit Emelda.

L'isoloir

Les garçons apportent la dernière touche à la chaise qui sera transformée en isoloir.

La bonne marche du Vote Mondial

– C’est ici qu’on fera la queue au moment de déposer le bulletin dans l’urne électorale. Notre tâche c’est d’expliquer et d’aider tout le monde pour que tout se déroule bien, dit Emelda, en montrant aux autres fonctionnaires électoraux, l’endroit où se tiendra le Vote Mondial, à l’Unité 19 de l’école primaire de Maputo.

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Veulent être comme les nominés !

Les encriers en noix de coco arrêtent la fraude électorale

« C’est très important que le Mozam­ bique participe au travail du Prix des Enfants du Monde. Ça nous donne la possibilité d’apprendre quels sont nos droits et comment on doit être traités. En sachant cela, c’est plus facile de nous protéger des injustices et c’est quelque chose que nous devons vraiment savoir. Ici, tant d’enfants sont si pauvres qu’ils doivent travailler plutôt que d’aller à l’école. Beaucoup d’enfants sont seuls parce que leurs parents sont morts du sida ou de pauvreté. Moi-même, à l’âge de cinq ans, j’ai perdu père et mère à cause du sida. Mais j’ai quand même eu de la chance. Je vis avec mes parents nourriciers qui m’aiment et me traitent exactement comme leurs autres enfants. Je vais

à l’école, j’ai à manger et je suis aimée. Beaucoup d’enfants n’ont pas cette chance. Ils finissent dans la rue et personne ne s’occupe d’eux. Ça fait mal de voir ça. Le gouvernement et les autres adultes ont la responsabilité de prendre soin de ces enfants, de les instruire, de leur donner des vêtements, un foyer, des soins et de l’amour. Il s’agit des droits de l’enfant ! Quand je lis dans Le Globe, le récit des nominés qui se battent pour que tous les enfants vivent bien, je suis très heureuse. Je veux aussi être comme ça. Quand je serai adulte, je me battrai pour les enfants en difficulté » Crescência Eulalia Macave, 15 ans, Unité 19 de l’école primaire de Maputo

Aujourd’hui, ma tâche était de contrôler que personne ne vote plus d’une fois. Tous sont venus vers moi après avoir voté et ont trempé leur doigt dans l’encre. Tous ceux qui ont de l’encre sur le doigt ne peuvent plus voter. C’est important qu’il n’y ait aucune tricherie quand il s’agit de quelque chose d’aussi important que les droits de l’enfant ! dit Crescência. L’encrier est constitué de deux moitiés de noix de coco et d’un bâtonnet.

Dernier contrôle

C’est difficile de choisir, mais le temps est venu de décider pour quel candidat on votera.

Urne électorale

Emelda contrôle que l'urne électorale est bien comme elle doit être avant de la mettre en place.

Le Vote Mondial à Maputo

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Yúmina

a décoré le Vote Mondial « Pour le Vote Mondial, moi et mes amies avons fait un tapis qui représente le drapeau du Mozambique. On a noué des bandes de tissus d’une façon spéciale. On apprend à le faire dans les cours de travaux pratiques. On utilise des vêtements et des tissus usés et on fait du neuf avec. Le drapeau on l’a fait pour que le Vote Mondial soit beau et solennel. J’aime le Mozambique et je Chacun attend son tour et fait la queue pour aller voter. trouve que notre drapeau et très beau. De belles couleurs et un beau dessin. Notre pays aussi est beau, mais malheureusement, les enfants ont beaucoup de problèmes ici. Il y a beaucoup d’enfants abandonnés qui vivent dans la rue. Ils n’ont pas de parents et pas de « ne fois par semaine, tous les foyer. Les enfants des rues n’ont rien. enfants plantent un arbre à l’école. Par la lecture du Globe et en participant J’ai avec moi toutes sortes de graines, au Vote Mondial nous apprenons que prises à la maison que je plante ici. Et à les enfants des rues ont aussi droit à chaque récréation, j’arrose les plantes vivre bien. Nous apprenons aussi à dans le jardin de l’école. C’est-à-dire le nous entraider, à prendre soins les uns matin, pendant le déjeuner et l’aprèsdes autres. Tous ceux qui le peuvent, midi avant de rentrer. J’adore m’occuper doivent aider ceux qui en ont besoin. des plantes et c’est moi qui suis le plus C’est amusant de tisser et j’aimerais souvent dans le jardin de l’école. Pour être artiste quand je serai grande. Mais moi, les arbres et les plantes sont nos j’aime aussi jouer au basket. Je peux amis puisqu’ils nous donnent de l’oxytrès bien m’imaginer devenir profesgène. C’est presqu’aussi amusant sionnelle et jouer au moins aussi bien d’être avec mes amis les arbres qu’avec que Michael Jordan ! » mes autres amis et de jouer au foot et Yúmina Rui Balate, 12 ans, Unité 19 tout ça ! de l’école primaire de Maputo Aujourd’hui, pour le Vote Mondial, nous avons décoré le chemin qui mène aux urnes électorales, avec de petits citronniers qui proviennent du jardin de l’école. Comme c’est une fête en l’honneur des droits de l’enfant, ça doit être beau ! Mais c’est aussi bien d’être entourés d’arbres quand on vote, l’oxygène nous aide à prendre la bonne décision ! Quand je serai grande, je veux être diplomate et vivre à Paris, la capitale de la France. Diplomate est un métier important car on travailler pour la paix » Náid Fi-Yen Bangal Nequice, 11 ans, Unité 19 de l’école primaire de Maputo

Les arbres, amis de Náid,

TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: JOHAN B JERKE

U

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Elles sont orphelines, meilleurs amies et elles votent – Celina est ma meilleure amie et je l’aime. Elle aussi a perdu ses parents, alors nous nous comprenons très bien, dit Alice Zacarias, 13 ans. Aujourd’hui, Alice et Celina ont voté, grâce au Vote Mondial, en faveur des droits de l’enfant à l’Unité 19 de l’école primaire de Maputo. Emelda, à gauche et ses camarades s’occupent des urnes électorales.

au Vote Mondial

J

– ’ai voté pour le bien des enfants. Les personnes pour qui on a voté se battent pour les enfants de différentes façons et c’est formidable de pouvoir y participer. Même ici au Mozambique il y a beaucoup d’enfants en difficulté et qui ont besoin d’aide. Beaucoup sont orphelins comme moi. Ma mère est morte quand j’avais deux ans et mon père est mort l’année dernière. Maintenant je vis avec grand-maman. Je l’aime, mais nous nous en sortons difficilement. On n’a pas assez d’argent pour l’uniforme scolaire et pour manger. Maman et papa me manquent tout le temps. C’est très dur, dit Alice. Elle se sent seule et différente. Mais heureusement, elle a Celina. – Quand nous sommes tristes, nous nous réconfortons. Et on rit toutes les deux ! dit Alice.

Celina Langa, 11 ans, assise près d’elle est d’accord. – J’ai une confiance totale en Alice et je peux tout lui dire. À un an, j’ai perdu mon père et ma mère. J’habite avec ma grand-mère et c’est difficile parce qu’elle est vieille et pauvre. Je suis souvent triste et inquiète quand je suis à l’école, mais hier c’était différent. J’ai participé à décorer les urnes électorales du Vote Mondial. J’étais comme les autres, comme si j’avais une vie normale. Plus tard, j’espère avoir une belle vie. Je voudrais être enseignante ! dit Celina. – Mon rêve est de travailler à l’aéroport de Maputo. Je rêve aussi de découvrir d’autres pays et de rencontrer d’autres gens. Aller au Brésil, par exemple ! Ça doit être très beau là-bas, dit Alice en enlaçant Celina.

Les citronniers ont été dressés à côté des poteaux qui indiquent le chemin du bureau de vote.

Un enfant – Un arbre ! Depuis 2006 toutes les écoles publiques du Mozambique participent au projet « Un enfant – Un arbre » afin de stopper la déforestation, l’érosion et l’avancée du désert dans le pays. Mais aussi pour que les habitants aient de la bonne nourriture et pour que le Mozambique soit encore plus beau. Dans le jardin de l’école de Náid, on cultive des orangers, des citronniers, des papayers, des avocatiers et des manguiers ainsi que des cannes à sucre. Puis, on vend les plantes pour financer les activités scolaires.

Alice Zacarias et Celina Langa ont construit les urnes électorales pour le Vote Mondial.

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TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: JOHAN B JERKE

Sur le chemin du Vote Mondial.

La queue est longue pour arriver à l’isoloir constitué de chaises.

Les droits de l’enfant sont violés –Avant de lire Le Globe, je ne savais pas que le fait de ne pas enregistrer un enfant à la naissance est une violation des droits de l’enfant. Cela se passe tout le temps ici. Et c’est grave, parce que si tu n’es pas enregistré et n’as pas de nom, c’est difficile d’aller à l’école et d’avoir accès aux soins. Je sais que le Mozambique a signé la Convention sur les Droits de l’Enfant, alors nous devons remédier à cela, car dans la pratique, les droits de l’enfant ne sont pas respectés ! dit Cecilia.

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Nous défendons les droits

Tous les enfants devraien Le soleil brille et la mer scintille quand les enfants de l’école Catembe au Mozambique ont leur Vote Mondial sur la plage. Ceux qui ont déjà voté, s’amusent, jouent au ballon ou se jettent dans l’océan Indien. Aujourd’hui c’est le jour des enfants et Cecilia Carlos Magaia, 13 ans, est heureuse : « Quel jour fantastique ! Au Mozambique les adultes n’écoutent pas souvent les enfants. Mais aujourd’hui

c’est différent. En votant nous pouvons influencer les décisions sur des choses importantes. Et en même


Le Vote Mondial sur la plage de Ladislau Ladislau, 15 ans, est sur la plage de Catembe et regarde la mer. Hier, il a voté au Vote Mondial et a célébré les droits de l’enfant avec ses camarades, ici sur cette plage. Mais aujourd’hui, c’est un jour ordinaire. La plage et la mer sont son lieu de travail. Ladislau Militon Nhca est pêcheur.

J

– e suis obligé de pêcher pour pouvoir aller à l’école. Je n’ai pas de parents, je vis chez mon grand-père. Sans la pêche, on n’aurait pas les moyens de payer l’école, dit Ladislau. Les parents de Ladislau vivaient en Afrique du Sud quand ils l’attendaient, car sa mère venait de là. À la naissance de Ladislau, ils

de l’enfant

nt participer ! temps on défend les droits de l’enfant ! C’est pourquoi, tous les enfants devraient voter, pas seulement au Mozambique, dans le monde entier ! Avant de voter on a bien lu le magazine Le Globe à l’école et à la maison. Le Globe parle de nos droits et des problèmes que les enfants

rencontrent partout dans le monde. Avant de lire le magazine, je croyais qu’il n’y avait que nous, les enfants en Afrique, qui avions des difficultés. Maintenant, je sais que c’est ainsi partout et ça me rend très triste. Je veux faire quelque chose pour changer tout ça. Mon rêve est de construire une grande maison où je pourrai donner aux enfants qui ont perdu leurs parents un foyer aimant, de la nourriture, des vêtements et la possibilité d’aller à l’école. C’est en lisant les

étaient fous de joie, mais ils n’eurent pas le temps de vivre leur vie de famille, car le père de Ladislau mourut dans un accident de voiture sur le chemin de la maternité. – Maman était très pauvre et a compris qu’elle ne pourrait pas s’occuper toute seule de moi, alors elle a voulu me confier à un orphelinat. Mais mon grand-père n’a pas

C’est l’heure de voter à l’école primaire de Catembe où le Vote Mondial se tient sur la plage.

récits des candidats dans Le Globe que j’ai senti que je voulais aussi faire quelque chose de bien pour les autres. Les candidats se battent pour le droit de tous les enfants à être aimés et être pris en

accepté et m’a pris chez lui au Mozambique. Il y a très longtemps de cela mais, en y repensant, Ladislau se sent toujours un peu déprimé. – Mes parents me manquent, en même temps, je suis très reconnaissant envers mon grand-père. Maintenant, je veux l’aider, puisqu’il m’a aidé et s’occupe encore de moi. C’est pour cela que je pêche. D’abord l’école

Ladislau se réveille tous les matins à cinq heures pour aller à l’école. Il se lave, mais la plupart des fois ne prend pas de petit-déjeuner, parce qu’il n’y a rien à manger. Puis il va à l’école jusqu’à midi.

charge, ce qui est le travail le plus difficile du monde ! Parce que si on ne s’occupe pas des enfants, qui s’occupera du monde de demain ? Avant d’avoir lu Le Globe, mon idole était Nicki Minaj, une étoile américaine du R&B. Sa musique est super et je l’écoute encore. Mais maintenant ce sont les candidats du Prix des Enfants du Monde mes plus grandes idoles ! Ils sont tous mes héros ! » Cecilia Carlos Magaia, 13 ans, école primaire de Catembe

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– Quand je reviens à la maison, je bois une tasse de thé avec un morceau de pain avant d’aller à la plage. Je joue souvent au foot avec mes copains avant que les pêcheurs reviennent avec la prise du jour. Mon père était un très bon footballeur et moi j’aime aussi jouer au foot. Quand je joue, je me sens entièrement libre. Je joue dans trois équipes différentes et chacune de mes équipes a gagné des trophées quand je jouais avec elles. Dernièrement, j’ai marqué quatre de tous les buts qui nous ont fait gagner. Mais quand les bateaux de pêche reviennent, il n’y plus de temps pour le foot et le jeu. C’est un dur travail qui attend.

Paye les taxes scolaires

Une prise magnifique

Au Mozambique, le poisson a une grande importance et les crevettes sont parmi les produits que l’on exporte le plus.

– Je n’aurais pas pu aller à l’école si je n’avais pas travaillé avec la pêche. Nous n’aurions jamais pu, dit Ladislau.

Le travail des enfants c’est courant

Dur travail

Comme Ladislau, au moins 2 enfants sur 10 au Mozambique doivent travailler.

– J’aide les pêcheurs à nettoyer les filets et à transporter la pêche sur la plage. Le weekend et pendant les vacances scolaires, je pêche tous les jours sur le bateau de grandpère. Nous prenons la mer déjà à quatre heures du matin et revenons vers midi. Mais je n’ai pas de salaire. C’est grand-père qui le reçoit. L’argent c’est pour les taxes scolaires, mais nous n’avons pas les moyens de payer les livres ou la calculatrice. Je suis obligé de les emprunter à

un copain à l’école et je déteste ça. C’est gênant. Personne ne se moque de moi, mais c’est quand même bête de ne pas pouvoir y arriver tout seul. Plus tard, Ladislau aimerait devenir footballeur professionnel et avoir une vie plus facile. Alors, entre l’école et le travail, il va continuer à jouer au foot sur la plage avec ses amis pour pouvoir atteindre son but. Ladislau adore sa plage. Même si c’est aussi un

Aime le foot

endroit où il doit travailler très dur. Et hier la plage avait quelque chose de plus. – Hier, nous avons voté au Vote Mondial ici, sur la plage. Je voulais absolument voter. C’était important de participer et de voter pour des personnes qui aident les enfants, c’était comme si moi aussi j’aidais un peu. Comme si je soutenais les autres enfants dans le monde qui ont des problèmes. 

Ladislau adore le foot et son idole est Elias « Dominguez » Pelembe. « Dominguez » est l’une des étoiles du foot au Mozambique. Il joue dans l’équipe nationale du Mozambique, « Mambas » et dans le grand club sud-africain, les Mamelodi Sundowns.

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Le devoir de tous les adultes « Les droits des enfants, c’est ce qu’il y a de plus important pour tous les enfants du monde, mais ils représentent également un devoir pour tous les adultes. Aucun droit ne marche bien si les adultes ne prennent pas leur part de responsabilité. C’est aussi notre devoir de nous souvenir de nos droits et de nous mobiliser pour nous-mêmes et pour les autres. Nous appartenons tous au même peuple. Si l’on réfléchit bien, la seule différence entre nous c’est l’endroit où on est né et nos parents. Et je suis déterminée à défendre cela à n’importe quel prix. Pour moi, le Prix des Enfants du Monde est un symbole pour tous ces gens courageux qui luttent, chaque jour, pour les droits de l’enfant et ne renoncent jamais. Le WCP permet de nous rendre conscients de nos droits. Pour les enfants qui ne connaissaient pas encore leurs droits, le WCP leur permet de protester si les adultes les maltraitent. Ils ont même la possibilité de participer personnellement et de se battre pour leurs droits et ceux des autres enfants. Ici, en Suède, le Globe et le WCP nous motivent à faire quelque chose pour participer et prendre part aux décisions » María Einarsdóttir, 11, école Vänge, Uppsala, Suède

En Inde, la plus grande école du monde vote La City Montessori School à Lucknow en Inde, la plus grande école du monde, compte plus de 30.000 élèves. Les élèves de plus de 10 ans, participent chaque année au Prix des Enfants du Monde. Ici, quelques-uns d’entre eux votent lors du Vote Mondial.

LE V

NDIA OTE M O

L AU B R

ÉSIL

Nous sommes reconnaissants « C’est très important de participer au Vote Mondial et de montrer notre reconnaissance envers ceux qui font tant pour les générations futures du monde. Même si beaucoup croient que le futur du monde est très compromis, nous devons nourrir l’espoir. Seulement ainsi nous pourrons sauver la planète. Fais ce que tu peux et tu seras récompensé » Pedro Henrique Gibim Fracaro, Colégio Notre Dame de Campinas, Brésil

Le début d’un pays meilleur « Il s’agit d’un projet très important qui marque le début d’un pays meilleur. Tous les gouvernements devraient rejoindre le Prix des Enfants du Monde et aider les enfants. Alors seulement on aura un monde digne, plein d’amour et de respect du prochain » Nikolas Gules Batista, Colégio Positivo Ângelo Sampaio, Curitiba, Brésil

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TE X TE & PHOTO: BRIT T-MARIE KL ANG

Shankolla est commissaire électorale, mais naturellement vote comme tout un chacun.

Le Vote Mondial dans l’école Fin mars 2011. Pendant des semaines les élèves de l’école Ragho Mengwar, dans le désert du Thar au Pakistan, ont attendu leur Journée du Vote Mondial qui se célèbre par une fête où, avant les danses et les jeux, l’on offre du riz à tout le monde. Avant de rentrer on donne du thé et des biscuits aux enfants. En septembre la pluie tombe à verse sur le désert. Beaucoup d’enfants se retrouvent orphelins, car leur maison en terre s’est effondrée. La pluie continue de tomber et le désert est inondé. Quand c’est l’école qui s’écroule, les enfants sont très tristes. Leur famille doit emprunter de l’argent pour survivre et les enfants risquent de se retrouver esclaves pour dettes.

I

Queue pour aller voter.

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l y a un climat d’attente. Des filles donnent le dernier coup de pinceau à l’urne électorale construite à partir d’une boîte vide. Les élèves feuillettent Le Globe et parlent entre eux par petits groupes. Tout le monde est bien peigné et bien habillé. Quelques anciens élèves viennent en visite. Ils ont suivi les pourparlers des deux dernières semaines et savent qu’ils pourront voter s’ils s’informent sur les candidats. Le rassemblement commence et les élèves présentent les récits des candidats et les raisons pour lesquelles ils ont été nominés. Les candidats aux prix sont des héros et au

cours des dernières semaines, les enfants ont parlé de leurs actions. Veut être un héros

– Je rêve aussi d’être un héros, dit Anil. Je veux me battre pour que tout le monde dans notre région puisse aller à l’école. Si leurs parents ne peuvent le faire, au moins nous essaierons de leur apprendre à lire, écrire et compter. Je suis si triste quand je pense aux enfants qui ne peuvent pas aller à l’école. Dans notre village et dans le village voisin, il y a des enfants qui font des tapis. Ce n’est pas juste. – Le Globe, c’est épatant. Il nous parle d’enfants qui ont

de grands problèmes, mais aussi qu’il y a beaucoup de personnes qui se battent pour les droits de l’enfant. Nous apprenons tellement avec Le Globe. Nous savons quels sont les problèmes du Bangladesh. Nous avons appris qu’il y a les mêmes problèmes au Pakistan et si cela arrivait ici, on se battrait aussi. Nous pouvons voter selon nos idées, c’est notre droit, dit Anita qui suit sa septième année d’école. – C’est un jour spécial quand nous votons. Nous apprenons à connaître les héros qui se battent pour les autres. C’est ce que nous ferons aussi. J’aime tout dans Le Globe. Mon rêve est que

Anita


Derniers préparatifs avant le Vote Mondial. Urmula et Anil lisent le Globe.

Des élèves devant l’école Ragho Mengwar, dans le désert du Thar, qui a disparu.

du désert inondé nous ayons l’électricité dans notre village pour pouvoir lire le soir. Hernath, notre enseignant, est un héros dans notre village. Il nous instruit si bien et nous aide si nous avons des problèmes. Tout le monde peut venir à l’école, dit Kevil en septième. Risque l’esclavage

Les grandes inondations à Sindh, où se trouve le désert du Thar, obligèrent cinq millions de personnes à quitter leur maison. Près d’un million de maisons furent détruites ou endommagées. 17.000 vil-

Kevil

lages furent touchés et deux millions d’hectares de terres furent inondées. Des champs et des routes furent détruits et beaucoup de chèvres, vaches et chameaux moururent. Les enfants de l’école Ragho Mengwar appartiennent à des familles pauvres. Quand il ne pleut pas, les gens travaillent chez des propriétaires fonciers ou à la briqueterie. Beaucoup empruntent de l’argent aux propriétaires ou sont endettés auprès des commerçants du village et toute la famille se retrouve esclave pour dettes.

Alima sort de l’isoloir.

Tout le monde est invité à la fête avec du riz.

Les enfants de l’école et des villages avoisinants travaillent aussi en nouant les tapis. À présent que les inondations ont tout détruit, beaucoup de familles doivent faire de nouveaux emprunts et encore plus d’enfants risquent de travailler comme esclaves pour dettes. 

…et on termine avec du thé et des biscuits.

On célèbre le Vote Mondial avec des jeux et des danses…

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DES RIX LE P ANTS DU IG E RIA E N F D E AU N MON

J’ai pleuré en quittant le Club du Prix des Enfants du Monde « Quand j’ai passé mes examens de maturité à la Magongo Secondary School, j’ai pleuré parce que je laissais derrière moi le Club du Prix des Enfants du Monde. Je m’y plaisais tellement et mes parents l’aimaient aussi beaucoup. Il s’agit du club qui a progressé le plus rapidement parmi tous ceux qui ont existé à l’école depuis des décennies. Son fondateur, Nasiru Suleiman, est actuellement le porte-parole du Parlement des Enfants de l’état de Kogi. Il a gagné l’élection sur la base du Club du Prix des Enfants du Monde. Aujourd’hui, si vous dites que vous êtes membre du club du WCP, vous jouissez d’un grand prestige. Parmi toutes les bonnes choses créées par Le Globe dans notre société, il y a la culture de la lecture parmi les élèves ; une

Maman et papa aiment Le Globe

fois qu’on a commencé à lire, on n’arrête plus, on a envie de lire tout le contenu du magazine » Deborah Oluwabusola Taiwo, 17, Magongo, Nigeria

Appelée Miss Prix des Enfants du Monde « À la maison, mes parents m’appellent Miss Prix des Enfants du Monde. À l’école, mes amis m’appellent Miss Globe parce que j’emporte le magazine Le Globe avec moi où que j’aille, à l’école, chez des amis, au marché avec ma mère et ma sœur, même sur les places de jeux, chez le coiffeur, au restaurant. Excepté à l’église, on peut toujours trouver une copie du magazine sur moi. Nous avons créé notre Club du Prix des Enfants du Monde à l’école, il y a trois ans » Ruth Sanni, 10, GRAMP School, Nigeria

Il s’agit de servir l’humanité « Nous avons besoin que le programme du Prix des Enfants du Monde soit enseigné aussi dans les églises du Nigeria et aux enfants des écoles du dimanche, car il s’agit de droits et de justice. Le magazine parle de servir l’humanité. On y prêche l’amour du prochain. On y présente aussi des expériences individuelles d’une façon positive. Depuis 2007, mon église a activement participé au programme du Prix des Enfants du Monde » Joy Akapta, 14, Présidente du Club du WCP, Community Comprehensive High School, Ogori, Nigeria

Mon ami, Le Globe me réconforte « J’ai été président du Club du Prix des Enfants du Monde de l’école. Je ne suis pas né sourd, mais à l’âge de 10 ans, à cause d’une forte fièvre, mes tympans ont été endommagés. Depuis, j’ai perdu l’ouïe. J’ai été obligé d’arrêter l’école, parce qu’ils n’ont pas d’enseignants pour les enfants sourds. Ils ont conseillé à mes parents de 48 48

mettre fin à ma scolarité. J’ai pleuré et leur ai dit que je ne pourrai pas réaliser mon rêve d’être médecin. Le magazine Le Globe est mon réconfort et mon meilleur ami. Tous mes amis m’ont laissé tomber parce que je n’entends pas ce qu’ils disent et mon attitude aussi les a éloignés. Je leur en ai voulu. Le Globe me donne courage et espoir

quand je lis les récits d’autres enfants avec des problèmes plus grands que le mien. Si j’étais président du Nigeria à mon âge, je rendrais les soins médicaux gratuits pour tous les enfants. Je ferais une loi contre la discrimination des personnes handicapées, je leur garantirais des soins spéciaux et je

« J’adore lire Le Globe. En tant que présidente du Club du Prix des Enfants du Monde dans mon école, je travaille avec des élèves et des enseignants afin de promouvoir les droits de l’enfant, avec Le Globe comme outil. Notre directeur soutient à tel point le programme, qu’il exige que chaque jour, lors de la réunion matinale, un élève vienne raconteur à tout le monde ce qu’il a lu dans Le Globe. Mon père et ma mère aiment beaucoup Le Globe. Nous l’étudions ensemble, à la maison, chaque soir avant de nous coucher. Ma mère m’a dit que quiconque aimerait le lire, il serait le bienvenu à la maison. Sa lecture nous apprend et nous touche énormément et personne ne devrait en être privé. Si je suis un jour présidente du Nigeria, je respecterais les droits de tous les enfants. J’abolirais les taxes scolaires pour que les enfants pauvres aussi puissant aller à l’école. Je dirais aussi aux hôpitaux de soigner les enfants gratuitement » Adeola Deborah Nathaniel, 13, Universal Basic Education-JSS RCM Compound, Magongo, Nigeria

ferais en sorte qu’ils soient heureux d’appartenir à notre société » John Oboromeni Olayere, 12, Akpafa Nursery and Primary School, Ogori, Nigeria.


QUELS SONT LES CANDIDATS ? Le jury des enfants du Prix des Enfants du Monde choisit chaque année les trois candidats finalistes pour le Prix des Enfants du Monde pour les Droits de l’Enfant parmi les nominations de l’année. Afin de faire un choix équitable lors du Vote Mondial, il est important que tu en saches autant sur les trois candidats. Tu peux te renseigner en lisant leur histoire dans les pages suivantes. Les deux candidats qui ne recevront pas le Prix des enfants qui votent, recevront le Prix Honoraire des Enfants du Monde. Les trois candidats utiliseront la somme du prix dans leurs activités en faveur des enfants.

Afghanistan

Tanzanie Afrique du Sud

Candidat 1 ANNA MOLLEL Tanzanie Pages 50–69

Candidat 2 SAKEENA YACOOBI Afghanistan Pages 70–89

Candidat 3 ANN SKELTON Afrique du Sud Pages 90–109

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Anna Mollel

POURQUOI ANNA A-T-ELLE ÉTÉ NOMINÉE ?

NO M IN É E • Pages 50–69

Grâce à Anna et à son organisation Huduma ya Walemavu des milliers d’enfants handicapés ont la possibilité de vivre dignement. Ils ont accès aux moyens dont ils ont besoin, tels que soins médicaux, opérations, kinésithérapie, thérapie et fauteuil roulant. Ils ont la possibilité d’aller à l’école et reçoivent sécurité et amour. Anna défend constamment la cause des enfants handicapés en parlant de leurs droits aux autorités, hommes politiques et organisations, mais surtout aux gens des villages perdus dans la campagne. Depuis 1990, 12.500 enfants, surtout Massaïs, ont amélioré leurs conditions de vie, grâce à Anna et à Huduma ya Walemavu. Des enfants qui, sans l’engagement d’Anna, en faveur de leurs droits auraient été négligés et seraient peut-être morts.

TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: TOR A MÅRTENS

Anna Mollel a été nominée au Prix des Enfants du Monde 2012 pour son combat de plus de 20 ans en faveur des enfants handicapés de la campagne pauvre du nord-est de la Tanzanie.

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Ce fut à l’âge de six ans que pour la première fois Anna Mollel comprit les difficultés des enfants handicapés des villages Massaïs du nord de la Tanzanie. Mais, le pire, ce fut bien des années plus tard, quand le combat en faveur des droits des enfants handicapés avait été engagé depuis longtemps. Anna arriva à ce qu’elle croyait être un village inhabité. Mais sur le sol d’une maison elle trouva une fillette de huit ans abandonnée qui ne pouvait pas bouger et serait morte si Anna n’était pas survenue. À la page 55, tu peux lire ce qui est advenu de la fillette, Naimyakwa.

A

nna, qui appartient au groupe ethnique des Massaïs, venait de rentrer de l’école. Elle avait six ans et comme d’habitude, elle aida maman à aller chercher le bois et l’eau, puis courut chez ses camarades dans le village voisin. Ils s’amusaient dans la cour, quand Anna entendit un

bruit provenant de l’une des maisons. – J’ai demandé ce que c’était. Mon amie a baissé les yeux avant de répondre que c’était sa sœur. L’amie d’Anna raconta que sa sœur n’avait pas le droit de sortir, sa mère ne voulait pas montrer qu’elle avait une fille qui n’était pas

« comme elle aurait dû » - Je suis entrée dans la maison pour contrôler. Il y avait en effet une petite fille. Elle était étendue sur le sol et elle a souri en me voyant, se souvient Anna. Anna rencontre Nauri

Anna aida la fille à s’asseoir et joua avec elle. La fille qui s’appelait Nauri, avait le même âge qu’Anna. Elle était heureuse d’avoir enfin de la compagnie. Anna revint le jour suivant, après que la mère de Nauri était partie chercher de l’eau. – Mais nous nous amusions tellement que nous n’avons pas vu le temps passer. La mère de Nauri est entrée comme une furie et m’a frappée avec un bâton. Elle criait que je ne devais plus mettre les pieds dans leur maison. Anna fut obligée de s’en-


fuir, mais elle était déterminée à revenir le jour suivant. – Les autres enfants avaient peur. Des coups de bâton et de jouer avec Nauri, qu’ils trouvaient bizarre. Mais je leur ai dit que tout le monde a besoin d’amis. Et puisque Nauri était l’une de nous, je pensais que c’était normal que nous allions chez elle et restions avec elle aussi. Anna réussit à convaincre ses camarades. On faisait le guet à tour de rôle, quand le gardien criait que maman arrivait, tout le monde se sauvait aussi vite que possible. Après quelques jours, Anna aida Nauri à se mettre debout et l’entraîna à marcher. Bientôt, Nauri put les suivre dans la cour pour jouer. Injuste

Quelques semaines plus tard, la mère de Nauri, vint chez Anna. – Je croyais qu’elle me gronderait, mais au lieu de cela,

elle m’a dit qu’elle savait ce que je faisais et qu’elle voulait que je continue ! Elle m’a dit que Nauri ne s’était jamais sentie si bien et que c’était un miracle qu’elle puisse marcher et courir. Comme la mère de Nauri était si contente, Anna en profita pour demander si Nauri pouvait commencer l’école, mais elle n’accepta pas. – Alors j’allais chez Nauri tous les jours après l’école et lui apprenais ce que j’avais appris pendant la journée. J’étais moi-même petite, mais je suis devenue son enseignante, la seule qu’elle ait jamais eue. J’ai ressenti longtemps un sentiment d’injustice. J’ai pu aller à l’école, mais pas elle, simplement parce qu’elle était handicapée. Elle avait les mêmes droits que moi, mais je ne pouvais pas l’aider plus que cela. Je me suis toujours dit que j’aurais dû faire plus.

Massaïs vulnérables

Est devenue infirmière

Anna fit une formation d’infirmière et commença à travailler. Un jour une femme allemande de l’église catholique d’Arusha vint à l’hôpital. Elle s’appelait Elifrieda et voulait parler à Anna. – Elle savait que j’étais Massaï et elle voulait que je lui dise comment était la situation des enfants Massaïs handicapés dans nos villages. J’ai expliqué qu’auparavant il n’était pas rare qu’on tue ou qu’on abandonne les enfants à la naissance. On croyait que les enfants handicapés étaient une punition de Dieu, parce qu’on avait fait quelque chose de mal. Mais je lui ai expliqué que la raison majeure était que nous, Massaïs sommes un

peuple d’éleveurs, et que pour survivre, nous sommes obligés de parcourir à pied de longues distances dans la savane, à la recherche de pâturages frais pour les bêtes. Un enfant handicapé qui ne pouvait pas se déplacer, était vu comme un fardeau pour tout le groupe. – J’ai expliqué que les droits des enfants handicapés étaient encore violés. Qu’on les cachait, qu’ils ne recevaient pas les soins dont ils avaient besoin, qu’on ne les laissait ni aller à l’école, ni jouer. Huduma ya Walemavu

Elifrieda demanda si Anna voulait participer à la création d’un projet pour les

La fierté des Massaïs

– Je suis Massaï et fière de l’être. Je veux que mon peuple vive bien. C’est pour cela que je me bats pour les droits de nos enfants handicapés, dit Anna.

Les Massaïs sont essentiellement éleveurs. Il existe environ un million de Massaïs, répartis entre la Tanzanie et le Kenya. Depuis le début du XXème siècle, les territoires que les Massaïs utilisaient comme pâturage ont diminué. Les autorités ont mis à la disposition une grande partie du territoire des Massaïs à des personnes et à des entreprises privées pour des cultures, des chasses privées et des parcs nationaux où les touristes peuvent voir des animaux sauvages. Les Massaïs ont été relégués dans des zones moins fertiles. En 2009, des brigades anti-émeutes ont brûlé huit villages Massaïs dans le nord de la Tanzanie pour permettre à une entreprise de chasse privée d’utiliser le terrain. Les touristes payants allaient entreprendre la chasse des grands fauves. Des gens ont été battus et chassés de leur maison. Plus de 3.000 hommes, femmes et enfants se sont retrouvés sans foyer. Les Massaïs qui laissaient leur bétail paître dans leurs zones d’origine, ont été emprisonnés. – Les Massaïs sont déjà les plus pauvres. Si les bêtes n’ont plus d’herbe, elles meurent. Et, comme toujours, les plus durement touchés, ce sont les enfants, dit Anna.

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Retour au village

– Notre but est que les enfants retournent au village et vivent comme le reste de la famille. Qu’ils aillent à l’école avec les autres enfants et fassent part de la société, dit Anna, qui vient de rendre visite au village de Lomniaki.

enfants handicapés dans les villages Massaïs, qui s’appelait Huduma ya Walemavu (Assistance aux handicapés). – J’ai tout de suite accepté. C’était exactement ce que j’attendais ! Enfin, je pouvais faire plus pour les enfants handicapés que je n’avais pu faire pour Nauri quand j’étais petite. En 1990 Anna entreprit de passer dans les villages et d’informer sur les droits des enfants handicapés. En même temps, elle chercha les enfants qui avaient besoin d’aide. L’un des premiers enfants qu’elle rencontra fut Paulina, une jeune orpheline de 15 ans, qui à la suite d’une polio ne pou52

vait pas marcher. Elle était obligée de se traîner sur le sol pour se déplacer. Anna crut que ce serait facile de convaincre les chefs de village qu’avec l’opération adéquate, on pouvait améliorer la vie de Paulina. Qu’ils trouveraient cela bien. Mais Anna se trompait. N’abandonne pas

– Ils ne savaient pas que les enfants handicapés pouvaient être opérés et aller mieux et ils ne me croyaient pas. Comme ils vivaient loin de l’hôpital, ne savaient pas lire et n’avaient pas les moyens de s’acheter une radio, ils n’avaient jamais eu la possibilité de l’apprendre. Et même si cela était vrai, ils pensaient que ce serait de l’argent gaspillé. Ces enfants ne pourraient de toute façon jamais garder le bétail ou aller à l’école. Mais mon plus grand problème était que j’étais une femme. Dans notre société,

les femmes n’ont pas voix au chapitre, ils ne m’ont pas prise au sérieux. Anna n’abandonna pas. Comme elle avait défié la mère de Nauri, elle défia les chefs de village pour aider Paulina. Il fallait quatre heures pour aller au village, mais pendant deux semaines, Anna s’y rendit cinq fois ! À chaque rencontre, elle expliquait les droits de l’enfant et qu’ils pouvaient opérer Paulina gratuitement. Et finalement, elle réussit à convaincre les hommes. – J’étais si heureuse ! Mais le

Bienvenue!

problème n’était pas résolu. J’avais réservé une chambre pour Paulina dans un hôtel de la ville, où elle pouvait résider avant et après l’opération. Mais quand je suis entrée à la réception en portant Paulina, le personnel l’a regardée comme si elle avait été un animal. Et ils ont refusé de la recevoir. La maison d’Anna

Anna était une mère divorcée qui vivait avec ses six enfants dans une petite maison. Mais elle prit Paulina à la maison. Il n’y avait pas d’autres solutions.


– Deux de mes enfants ont dormi dans le même lit pour que Paulina puisse avoir un lit à elle. Les enfants étaient un peu mécontents au début, mais je leur ai expliqué la situation et ils ont compris. J’ai baigné Paulina et lui ai donné de nouveaux vêtements propres. Comme elle ne pouvait pas s’asseoir à table pour manger, nous nous asseyions tous sur le sol pour dîner, pour que Paulina ne se sente pas seule. Après l’opération, Paulina retourna chez Anna. Elle commença à s’entraîner à

Jeux importants !

– Quand j’étais petite, j’ai eu l’amour de mes parents et j’ai pu jouer beaucoup avec mes camarades. Ce qui pour un enfant est très important. Être seul et exclu c’est la pire des choses pour un enfant. C’est pour cela que le jeu et l’affection sont si importants pour nous au centre, dit Anna.

s’asseoir et à se mettre debout. Quelques semaines plus tard, elle commença à s’entraîner à marcher avec des béquilles qu’Anna avait achetées. – Elle était très contente

150 millions d’enfants handicapés Selon la Convention relative aux Droits de l’Enfant de l’ONU, les enfants handicapés ont les mêmes droits que les autres enfants. Ils ont droit à un soutien supplémentaire et le droit d’être aidés afin de bénéficier d’une bonne qualité de vie. Malgré cela, les enfants handicapés sont parmi les plus démunis, pas uniquement parmi les Massaïs et en Tanzanie, mais dans le monde entier. Il y a 150 millions d’enfants handicapés dans le monde, dont deux millions en Tanzanie.

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Anna joue avec les enfants dans son école au village.

et moi aussi ! Quand Paulina est retournée chez elle, trois mois plus tard et est entrée au village sur ses propres jambes, les gens se sont mis à pleurer de joie ! Même si Anna était contente que Paulina puisse marcher, elle savait que Paulina devait avoir un métier pour être indépendante. – Paulina voulait être couturière, alors nous l’avons aidée à commencer une formation. Elle a très bien réussi ! Le centre à Monduli

L’histoire de Paulina se répandit dans les villages. Les gens osèrent parler de leurs enfants handicapés et voulaient qu’on les aide. Anna fit des voyages de plusieurs jours pour atteindre les enfants dans les villages éloignés qui avaient besoin de son aide. À chaque voyage, elle voyait de plus en plus d’enfants. 54

– Mais l’hôtel continuait à refuser les enfants, alors je les prenais chez moi. Mais même avec les matelas par terre et plusieurs enfants dans le même lit, à la fin ce n’était plus tenable. Nous avons écrit à des amis et à des organisations en Tanzanie et en Allemagne que nous avions besoin d’argent pour construire une maison où nous pouvions nous occuper des enfants. Avec les premiers fonds on loua quelques chambres et on logea douze enfants. On put même employer une autre infirmière, et pour la première fois Anna eut un modeste salaire. Auparavant, elle et sa famille vivaient de leur petite culture de légumes. – Il arrivait continuellement de nouveaux enfants et nous avons demandé plus d’argent. L’organisation

Caritas en Allemagne nous a aidés et en 1998 notre centre à Monduli était prêt. On engagea des kinésithérapeutes et des infirmières. Mais aussi des enseignants, car Anna savait que les enfants qu’ils aidaient n’étaient presque jamais allés à l’école. La place prévue était pour trente enfants, mais parfois il y avait 200 enfants en même temps.

Pas seulement les Massaïs

– Au début, nous ne travaillions qu’avec les enfants Massaïs, mais plus maintenant. Nous nous occupons de tous les enfants qui ont besoin de notre aide, quels que soient le groupe ethnique ou la religion. Ici, nous avons des musulmans et des chrétiens, ainsi que des enfants qui ont fui la guerre dans les pays voisins. Le combat pour les droits de l’enfant n’a pas de frontières, dit Anna.

– Même si nous n’avions pas de place, nous prenions tous les enfants. Les familles étaient si pauvres qu’elles ne pouvaient pas payer, mais nous n’avons jamais renvoyé personne.


Naimyakwa – Je n’oublierai jamais le jour où j’ai trouvé la petite Naimyakwa seule dans le village abandonné. Elle avait huit ans et était étendue sur le sol de sa maison. Elle respirait à peine. Ça sentait l’urine, car à cause de son handicap, elle ne pouvait aller nulle part. Je ne croyais pas qu’elle survivrait, dit Anna, qui a les larmes aux yeux en repensant à ce jour, il y a maintenant sept ans.

La nouvelle école

– Je veux être sûre que le travail avec les enfants continuera après moi. C’est pourquoi j’ai confié la responsabilité à une femme fantastique qui s’appelle Kapilima et ai pris ma retraite en 2007, raconte Anna. Après sa retraite, Anna a continué son combat en faveur des enfants vulnérables. Elle a construit une école dans son village pour les enfants qui sans cela ne seraient jamais allés à l’école. Tu peux visiter l’école d’Anna à la plage 68. c

N

«

ous voyagions avec notre clinique mobile dans la région où se trouvait une petite orpheline, atteinte d’IMC. Beaucoup d’enfants handicapés venaient nous voir pendant la journée, mais Naimyakwa n’accompagnait plus ses frères et sœurs adultes et leur famille, comme elle faisait d’habitude.

avaient fait pour l’emmener. Je sentais que je devais aller voir sur place. Pour en avoir le cœur net. Nous avons parqué la jeep sous un arbre et avons fait le dernier bout à pied. Tout

Quand j’ai demandé si quelqu’un savait où elle était, une femme a dit que la famille était partie avec le bétail pour chercher des pâturages frais, car c’était la saison sèche. J’ai eu un mauvais pressentiment. Je savais à quel point Naimyakwa avait de la peine à se mouvoir et je me demandais comment ils 55

TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: TOR A MÅRTENS

Il y a plus de 20 ans qu’Anna a aidé Paulina et depuis la vie de 12.500 enfants handicapés a bénéficié d’une nette amélioration grâce à Huduma ya Walemavu. Aujourd’hui, 30 personnes travaillent pour l’organisation.

Anna a sauvé


La garde-robe de Naimyakwa – J’adore les vêtements ! Quand je serai grande, je serai couturière pour coudre mes vêtements. Je garde mes vêtements, ici dans l’armoire du dortoir.

– Voici mon vêtement de fête. Je l’ai reçu du prêtre. – Une fille du Canada, en visite chez nous, m’a donné cette robe élégante...

était silencieux. Nous n’avons vu personne. Le village était complètement abandonné. Je me disais que la famille avait pu emmener Naimyakwa. Nous venions de nous mettre en route vers la voiture quand j’entendis un gémissement.

…et ces belles chaussures de soie ! C’est une vraie amie !

– Le pullover fleece…

…et les pantalons de training c’est Anna et Huduma ya Walemavu qui me les ont offerts.

Un lion ?

D’abord j’ai cru que c’était un lion. Deux collègues et moimême avons rassemblé tout notre courage et sommes retournés au village. Près d’une des maisons, on a entendu à nouveau le drôle de bruit. J’ai eu peur, mais j’ai guigné à l’intérieur et j’ai

demandé s’il y avait quelqu’un. En guise de réponse, un bruit étouffé. Je ne voyais rien. Petit à petit les yeux se sont habitués à l’obscurité et je n’oublierai jamais ce que j’ai vu. Sur le sol, immobile, se trouvait Naimyakwa et elle respirait à peine. Ça sentait les excréments, car à cause de son handicap, elle ne pouvait pas bouger. À côté d’elle il y avait une calebasse qui avait contenu du lait. Elle était vide, mais je sentais l’odeur de vieux lait. Et il y avait une calebasse avec un très petit reste d’eau.

Paralysie due à une lésion cérébrale L’IMC ou paralysie cérébrale, peut survenir pendant la gestation, lors de l’accouchement ou avant que l’enfant ait atteint l’âge de deux ans. Les causes principales sont le manque d’oxygène et l’hémorragie cérébrale. Certains enfants sont légèrement handicapés tandis que d’autres sont paralysés. Beaucoup d’enfants atteints d’IMC, souffrent en plus des diffi-

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cultés motrices, d’autres infirmités comme épilepsie, troubles de la parole et de la vision. On ne peut pas guérir l’IMC, mais avec la kinésithérapie, l’ergothérapie et de l’entraînement, on peut améliorer considérablement la vie de ceux qui souffrent de l’IMC. - Les troubles de l’IMC sont courantes ici, car cela se produit le plus souvent lors de l’accouchement.

Beaucoup de gens vivent si loin des hôpitaux et des dispensaires que soit, ils n’arrivent pas à temps, soit ils n’ont pas les moyens d’y aller au moment de l’accouchement, dit Anna Mollel. Cours au village sur l’IMC Si un enfant naît avec l’IMC, les parents, voisins et chefs de villages, peuvent venir au centre Huduma ya Walemavu pour

y suivre un cours de deux semaines et apprendre comment s’occuper au mieux de l’enfant. On enseigne des exercices simples et de la gymnastique appropriée au développement de l’enfant. Huduma ya Walemavu veut par ces cours que tout le village s’informe et se sente collectivement responsable de l’enfant.


Naimyakwa était très faible et a remarqué à peine notre présence. Personne ne pouvait dire combien de temps elle était restée ainsi, mais au moins une semaine, car elle était déshydratée et très amaigrie. Est-ce que la famille l’avait vraiment abandonnée ainsi ? Il arrivait souvent que les familles laissent leurs enfants handicapés au centre et nous ne voyions plus les parents. Mais laisser son enfant de cette façon ? C’était des choses d’un autre temps. Naimyakwa est sauvée

Je me suis assise près de Naimyakwa, je me suis penchée près de son oreille et j’ai demandé si elle était seule. Elle a fait oui de la tête. Puis je lui ai demandé si elle voulait que je la prenne avec moi au centre, pour qu’on puisse s’occuper d’elle. Elle a de nouveau fait signe que oui. Elle voulait. Je me suis mise à pleurer. Tous mes collaborateurs de Huduma ya Walemavu pleuraient. En la

soulevant dans mes bras, je me suis dit que si d’autres n’avaient pas donné à Naimyakwa l’amour dont elle avait besoin, je le lui donnerai. J’aimerai cette enfant. Plus tard, il s’est avéré que Naimyakwa n’avait pas compris que sa famille était partie pour un long voyage. Elle attendait qu’ils reviennent, comme d’habitude. Jour après jour. Nuit après nuit. Mais ils ne sont jamais revenus. Pas avant deux mois, quand la pluie s’est mise à tomber, alors ils sont revenus. Si nous n’étions pas venus au village, Naimyakwa serait morte de faim et de soif. L’instant où nous avons trouvé Naimyakwa est parmi les pires que j’ai vécus. En même temps, cela m’a donné une énorme force qui m’a permis de continuer à me battre pour lui apporter à elle et aux autres enfants défavorisés une vie meilleure. Alors, j’ai décidé que jusqu’à ma mort, je continuerai le combat pour leurs droits » 

Le centre abrite 30 enfants. Certains attendent d’être opérés, d’autres ont été opérés et sont en rééducation (kinésithérapie et entraînement). D’autres enfants, en congé de leur internat, séjournent quelques jours au centre. Et il y a des enfants comme Naimyakwa, qui ont le centre pour foyer.

06h00 Bonjour ! Naimyakwa et ses amis sont réveillés par les mamans du centre qui dorment dans les dortoirs avec les enfants. Quand Naimyakwa est arrivée, elle pouvait à peine utiliser ses bras et ses mains. Il lui était impossible de se brosser les dents, de s’habiller et de manger toute seule. Après un long entraînement, sa vie a entièrement changé. Ici, elle se brosse les dents avec ses camarades Modesta, 13 ans et Mdasat, 11 ans.

La journée de Naimyakwa

au centre d’Anna 07h00 Petitdéjeuner Pour le petit-déjeuner, bouille de maïs Uji.

08h00 Rassemblement matinal

Anna n’abandonne personne – Naimyakwa est arrivée ici, il y a sept ans et est restée. Nous ne renvoyons jamais un enfant à la maison si nous n’avons pas la certitude qu’on s’occupera bien de lui. Sinon, nous essayons de trouver une nouvelle famille pour les enfants. Mais c’est difficile de s’occuper d’un enfant handicapé. Rentrer au village avec le fauteuil roulant de Naimyakwa dans le sable, est presque impossible. Suivre les migrations des familles avec le bétail est encore plus difficile, dit Anna.

Le matin, tout le monde se retrouve dans la salle de réunion pour la prière et la gymnastique.

08h30 Ronde matinale Le personnel s’entretient avec chaque enfant pour décider s’ils doivent aller chez le kinésithérapeute, l’infirmière ou directement à l’école du centre. Naimyakwa doit montrer qu’elle peut passer son pull toute seule. Si elle peut le faire, on pourra déterminer quelle kinésithérapie lui conviendra pour que son état s’améliore encore.

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09h00 1: L’école

2: Kinésithérapie

Naimyakwa est aidée par l’enseignante Flora Moses Kiwelu. Quand les enfants ont terminé le traitement, on les aide à soit commencer à l’école du village, soit dans une école spéciale, comme un internat pour enfants malvoyants ou handicapés moteur.

Naimyakwa a une demi-heure de kinésithérapie par jour pour devenir de plus en plus indépendante. Ce sont les kinésithérapeutes du centre, Eva Paul Mush et Anna Njuu (tresses) qui l’aident.

4: Ortho­ pédiste

3: Pavillon des soins

L’orthopédiste Mireille Eusebius Kapilima essaie de nouvelles attelles pour les jambes de Modesta Cryspin, 13 ans. Au centre on fabrique ses propres attelles et prothèses.

L’infirmière Veronica Kirway nettoie la paie de l’opération de Loserian Simanga, 11 ans et refait son pansement.

5: Éducation ménagère Dans la cuisine Neema Mevukori, 11 ans, et quelques camarades, coupent le légume sukuma wiki. Aujourd’hui c’est à elle d’aider à la préparation du repas. – C’est amusant d’apprendre à cuisiner. Comme ça, je pourrai mieux aider ma famille à la maison. Je vais être opérée bientôt et je suis vraiment impatiente. Je veux avoir de jolies jambes et être jolie. Puis, je veux commencer l’école du village. Avant, ça n’aurait pas été possible.

10h00 Pause et jeux ! Les pauses et les jeux c’est important. Les enfants s’amusent et s’entraînent à faire des mouvements différents. Naimyakwa essaie d’attraper le ballon et de le jeter plus loin.

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6: Atelier d’assistance Dans l’atelier d’assistance Kadogo Songura est aidée par Loshilari pour le réglage de ses béquilles. – J’ai eu une infection dans une jambe quand j’étais petite. Quand je suis arrivée ici, ma jambe était si mal en point qu’on a dû l’amputer. Après on m’a donné une prothèse et je me suis entraînée à marcher. C’était très dur, mais maintenant c’est de mieux en mieux, raconte Kadogo.


12h30 Déjeuner – Mon plat préféré c’est riz et haricots. On l’a deux fois par semaine, dit Naimyakwa.

13h30 École et vaisselle

16h00 Loisirs et lessives

Tous les jours, quelques enfants aident à faire la vaisselle avant de retourner en classe. Aujourd’hui, c’est Tuplwa Longorini, 12 ans, Rebeca Peter, 16 ans et Kadogo Songura, 19 ans.

La plupart jouent au foot, se balancent, font des tours de manège ou parlent. Certains lavent leurs vêtements. Au centre, laver les vêtements fait partie du traitement. Les enfants entraînent des mouvements utiles et apprennent à faire des tâches importantes.

20h00 Nouvelles

18h30 Dîner

Tous les soirs, les enfants regardent les nouvelles. Anna et ses collègues de Huduma ya Walemavu pensent que c’est important que les enfants connaissent ce qui se passe en Tanzanie et dans le monde. Mais, bien évidemment, ils peuvent aussi regarder des films et des émissions divertissantes.

21h00 Bonne nuit !

TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: TOR A MÅRTENS

– Dors bien, dit Halima Mkopi, la maman du foyer en tapotant Naimyakwa sur la joue. Halima dort chez les enfants, ainsi elle peut entendre si quelqu’un a besoin d’aide ou de consolation pendant la nuit. Il y a trois dortoirs et dans chacun se trouve une maman du foyer.

Papas, faites attention !

– Je n’aime pas les pères qui n’assument pas leur responsabilité quand ils ont un enfant handicapé. Malheureusement, c’est très courant que les pères abandonnent leurs enfants quand cela arrive. Les mères autant que les pères ensemble doivent prendre soin de ces enfants, qui sont plus vulnérables, dit Martha Lota, maman et cuisinière au foyer. 59


Une clinique sur quatre roues pour 51 villages

Huduma ya Walemavu travaille dans une grande région peu peuplée dans le nord-est de la Tanzanie, une région de savanes, désertique et montagneuse. La plupart des gens ici vivent dans de petits villages sans chemins de liaison. – Les familles sont souvent très pauvres et n’ont pas les moyens de venir chez nous, nous rendons visite aux enfants handicapés dans les villages, dit Anna. Huduma ya Walemavu atteint 51 villages dans son travail. On a une « clinique mobile » dans laquelle les infirmières et les kinésithérapeutes font leurs tournées avec une jeep avec quatre roues motrices afin d’atteindre tous les enfants qui, sans cela, n’auraient jamais d’aide. Il faut plus de deux jours pour arriver au village le plus éloigné. On va dans tous les villages une fois tous les trois mois.

Endeshi n’a pas de langage Dans un petit village, des enfants handicapés et leurs parents sont assis sous un arbre et parlent avec le personnel de Huduma ya Walemavu. Parmi eux, une jeune fille sourde de huit ans du nom d’Endeshi. Elle n’a pas de langage, mais Nailolie Lebahati, sa mère, raconte :

– Esther et Loito, la grande sœur et le grand frère d’Endeshi, sont aussi sourds. Huduma ya Walemavu nous a toujours aidés pour qu’ils puissent aller à l’école pour enfants sourds. Je sais que tous les enfants ont droit à l’école, mais je n’ai pas les moyens de payer moi-même, alors je leur suis très reconnaissante ! – J’aimerais qu’Endeshi aussi aille à l’école et ait une langue. Elle a le droit de parler avec les autres et d’exprimer ses opinions. Et ne pas être isolée comme elle l’est maintenant. Je suis venue aujourd’hui pour demander si Huduma ya Walemavu peut aussi aider Endeshi. Et ils ont dit oui ! Je suis si heureuse ! 60

Rêves d’avenir

Esther, 18 ans, la grande sœur d’Endeshi et Loito, 15 ans, son grand frère, connaissent la langue des signes et expliquent leur rêves d’avenir : – Je veux être infirmière, dit Esther. – Je n’ai pas encore décidé, dit Loito. Nailolie, leur mère se fait un peu de souci en entendant les enfants parler de leur avenir. – Nous n’avons aucune idée à quoi Endeshi rêve. J’espère qu’elle pourra le raconter quand elle aura suivi l’école. Je veux savoir de quoi tu rêves, dit Nailolie en enlaçant Endeshi.


« Sans Anna, nous ne serions jamais allés à l’école. Parce que nous sommes handicapés et parce que venons d’une famille pauvre. Si dans une famille pauvre, il y a deux enfants et l’un des deux est handicapé et si on n’a pas les moyens de les envoyer tous les deux à l’école, c’est toujours l’enfant ‘en bonne santé’ qu’on en enverra. La plupart des gens pensent que ce n’est même pas

On aurait dû mendier – Si Anna ne nous avait pas aidés, notre vie aurait été horrible. Nous aurions été obligés de mendier dans la rue pour manger, dit Loeku.

la peine d’envoyer un enfant handicapé à l’école, car ils ne croient pas que l’enfant réussira. Beaucoup croient que si un enfant ne voit pas ou a d’autres formes de handicap, sa tête est aussi malade. Et alors, ils pensent que l’enfant ne réussira jamais à travailler, à gagner de l’argent et à aider sa famille. C’est pour cela qu’ils se disent que c’est de l’argent jeté par les fenêtres que d’envoyer un enfant handicapé à l’école. C’est ce qui s’est passé pour nous. Les autres enfants allaient à l’école, mais pas nous.

Puis Anna est venue et nous a donné notre chance d’une vraie vie. On nous a bien soignés et nous avons été admis dans une école pour enfants aveugles. Cela fait sept ans que Huduma ya Walemavu nous aide économiquement. Grand-mère et grand-père n’auraient jamais pu le faire. Au centre d’Anna, nous avons appris que ce qui nous est arrivé, comme le fait de ne pas commencer l’école,

c’est de la discrimination et constitue une violation de nos droits. Tous les enfants ont le droit d’aller à l’école. Les enfants comptent tous de la même façon ! Je le dis à tous ceux que je rencontre. J’espère que cela améliorera la vie des handicapés. Que nous serons traités avec respect et nos droits reconnus au même titre que ceux des autres. Plus tard, je veux être président et me battre pour les droits de tous les enfants de Tanzanie ! »

Anna soutient les rêves Tetee, 16 ans et Phillipo, 15 ans sont frères et sœur et rêvent de devenir enseignants quand ils seront grands. – Sans Anna ce rêve ne pourrait jamais se réaliser. Mais comme Huduma ya Walemavu me soutient, je sais que c’est possible, dit Tetee.

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TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: TOR A MÅRTENS

La clinique mobile s’arrête dans le village où vivent Loeku, Tetee et Phillipo, trois enfants aveugles de la même famille. Ils sont orphelins, mais avec l’assistance de Huduma ya Walemavu, ils sont admis dans un internat. D’habitude les trois enfants vivent dans l’école, mais en ce moment, c’est les vacances et Anna veut s’assurer qu’ils soient bien chez leurs grands-parents. Loeku, le plus grand raconte :

Anna m’a donné ma chance

Loeku veut être président


Lomniaki

est tenu caché

Lomniaki naquit avec les jambes tournées du mauvais côté. Il avait de la peine à s’asseoir et ne pouvait pas apprendre à marcher. Son père ne voulait pas que les gens du village le voient et il enferma Lomniaki dans la maison. Il ne put pas jouer avec les autres enfants, ni aller à l’école. – Je ne comptais pas. C’était comme si je n’étais pas vraiment un être humain. Puis Anna Mollel est venue et elle m’a sauvé. Elle m’a donné une nouvelle vie et je l’aime, dit Lomniaki Olmodooni Mdorosi, 15 ans.

Q

uand Lomniaki était petit, on le laissait couché toute la journée dans l’obscurité de la petite maison. En entendant rire et jouer les autres enfants à l’extérieur, il ne souhaitait qu’une chose, y participer. Parfois en fermant les yeux, il s’imaginait être vraiment avec eux. Puis, quand il réalisait qu’il ne pouvait pas utiliser ses jambes et qu’il était étendu là, séparé des autres par une cloison de pierre,

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c’était toujours la même tristesse qui l’envahissait. – Je ne sais pas exactement pourquoi papa ne voulait pas que les autres me voient, mais je crois qu’il avait honte qu’il y ait un enfant handicapé dans la famille. C’est pourquoi il m’interdisait de sortir. Maman ne pensait pas du tout comme ça, mais c’était papa qui décidait. Maman ne pouvait rien dire. Mais parfois quand papa était dehors avec le bétail, elle me faisait sortir en cachette et me couchait un instant sous un arbre du village. C’est là que je voyais comment les autres enfants jouaient. Mais personne ne jouait ni ne parlait avec moi, raconte Lomniaki.

j’aille à l’école puisque je ne pourrai jamais m’occuper du bétail ni trouver un travail et gagner de l’argent pour aider la famille quand il serait

Détestait papa

Quand les autres enfants du village commencèrent l’école, le père de Lomniaki l’en empêcha. – Il a dit que j’étais difforme. Et qu’il ne comprenait pas pourquoi il faudrait que Lomniaki, en tant qu’élève de l’internat en ville...


Les droits des filles – C’est incroyable de constater que le fait que maman veuille que je joue avec les autres enfants et que j’aille à l’école, n’a pas été pris en considération. C’est papa qui décidait. Un point, c’est tout. Les opinions de maman n’avaient aucune importance. Anna Mollel m’a appris que ce n’est pas juste. Garçons et filles comptent de la même façon et doivent par conséquent pouvoir exprimer leurs opinions et être écoutés. Nous avons les mêmes droits. En tant qu’avocat, je me battrai pour les droits des filles.

L’arbre de vie vieux. De plus, il a dit qu’il serait obligé de me porter de l’école à la maison et de la maison à l’école puisque je ne pouvais pas marcher. Je détes-

tais papa à ce moment-là. Je le détestais parce qu’il gâchait ma vie. À la fin, Paulina, sa mère n’en put plus. Elle était si malheureuse de voir que Lomniaki était si mal traité, qu’elle quitta son mari. Un jour, elle prit Lomniaki sur son dos et ils quittèrent le village pour toujours. Paulina marcha dans la savane jusqu’au village de ses parents où ils furent reçus avec chaleur par le grand-père de Lomniaki ainsi que par ses oncles et leur famille. Autant mourir

Au début Lomniaki crut que tout se passait bien. Il n’était plus enfermé dans la maison, il rencontrait d’autres personnes qui étaient gentilles avec lui et qui lui parlaient. Sa mère ou l’un de ses oncles le sortaient le matin et le couchaient sur une peau de bête sous le grand acacia pour qu’il ne se sente pas seul. Mais même s’il se sentait bien, il se … et en tant que berger Massaï dans la savane.

sentait quand même seul sous l’arbre. Et différent. – Puisque je ne pouvais pas courir et jouer comme eux, les autres enfants se fatiguaient vite d’être avec moi. Ils couraient plus loin. Et quand ils allaient à l’école, je restais sous l’arbre. C’était impossible d’y aller pour moi, car l’école se trouvait très loin. Les adultes n’avaient pas non plus de temps à me consacrer. Les hommes étaient dehors avec le bétail et les femmes étaient très occupées à la maison. Lomniaki avait besoin d’aide pour pratiquement tout. S’habiller, se déplacer et aller aux toilettes. – C’était gênant de ne pas pouvoir se débrouiller seul et j’étais de plus en plus déprimé. Je me suis souvent demandé pourquoi mon père avait honte de moi et pourquoi j’étais né comme ça. Petit à petit j’ai réalisé ce que serait ma vie. Je ne pourrai jamais jouer et fréquenter vraiment les autres au village.

Anna Mollel rend visite à Lomniaki. Ils s’installent sous le grand acacia et parlent. Anna veut savoir comment ça va et s’il a besoin de quelque chose. – Avant, cet arbre, était l’arbre de la déception. C’est ici que je me suis retrouvé tout seul, immobile quand les autres jouaient et allaient à l’école. Mais maintenant je le vois comme l’endroit où Anna m’a sauvé et où ma nouvelle et vraie vie a commencé ! dit Lomniaki.

Et je ne pourrai jamais aller à l’école. Je ne trouverai jamais de travail ni ne pourrai m’occuper du bétail de la famille. C’était injuste, je ne

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Protection contre les animaux sauvages

me sentais pas l’égal des autres. J’aurais pu tout aussi bien mourir.

Quand Lomniaki garde le bétail, il a son bâton, son couteau et parfois une massue, dans le cas où il serait obligé de protéger le bétail contre les animaux sauvages.

– Mon nom Lomniaki, signifie « bénédiction », mais je me suis dit qu’il devait y avoir une erreur. Le nom devait s’adresser à un autre garçon. Je n’étais pas une bénédiction. J’étais une malédiction. Mais quelqu’un avait entendu parler de Lomniaki et pensait qu’il avait la même valeur que les autres et n’abandonnerait pas avant d’avoir donné à Lomniaki une vie décente. C’était Anna Mollel. – Je n’oublierai jamais l’après-midi où Anna est venue pour la première fois au village. J’avais presque neuf ans et étais seul sous l’arbre et je dormais. Je me suis réveillé en sursaut en entendant le bruit d’une jeep. Je n’avais jamais vu une voiture et j’ai eu très peur quand je l’ai vue s’approcher. Je criais et je pleurais. Une femme est sortie de la jeep, est venue vers moi et s’est assise à côté de moi. Elle souriait et me caressait gentiment la tête, elle essayait de m’apaiser. Elle m’a dit de ne pas avoir peur et

Lions et hyènes – Les éléphants et les girafes se promènent souvent juste à l’extérieur et les hyènes viennent toutes les nuits. J’aime les animaux sauvages qu’on trouve ici, mais pour empêcher les bêtes de proie affamées de s’attaquer au bétail, nous avons fait une barrière avec des buissons épineux autour du village. Au loin vers les montagnes et les forêts il y a des lions, des guépards et des léopards. Une fois, alors que je gardais le bétail, j’ai vu un lion, j’ai eu très peur et je me suis mis à courir ! Quand je serai plus grand, on me donnera une lance comme les autres guerriers Massaï. Cela me donnera peut-être du courage, dit Lomniaki en riant. Ici, son oncle Simon s’entraîne avec une lance.

Ensemble – Quand je rentre pendant les congés, je peux garder le bétail de mes parents, comme tous les autres garçons du village. Souvent on le fait ensemble. Le bétail, c’est ce qu’il y a de plus important pour nous les Massaï et pouvoir travailler avec les bêtes, me tient très à cœur, dit Lomniaki. Il garde les chèvres avec ses amis Juma (en rouge) et Musa, tous les deux âgés de 16 ans.

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Anna Mollel

qu’elle venait m’aider. C’était Anna. Anna a dit à Paulina, la maman de Lomniaki que son fils pouvait se soumettre à une opération qui lui permettrait de marcher. Elle a aussi dit que c’était tout à fait possible pour Lomniaki de commencer l’école comme tous les autres enfants. – Maman était folle de joie et voulait qu’Anna me prenne avec elle immédiatement. Mais comme mes oncles n’étaient pas à la maison, ce n’était pas possible. Maman devait avoir la permission de ses frères et Anna est partie sans moi. La troisième fois, ce fut la bonne

Anna savait que plus Lomniaki grandissait, plus ce serait difficile de redresser ses jambes. S’il ne se faisait pas opérer très vite, le handicap s’aggraverait et il ne pourrait jamais apprendre à marcher. C’était urgent. Alors plutôt que d’attendre trois mois, le temps que la clinique mobile revienne, comme prévu, au village, elle revint quelques semaines plus tard pour parler avec les oncles. Cela se


passa sous les acacias et Anna expliqua aux oncles et au vieux grand-père comme se déroulerait l’opération et comment se présenterait l’avenir de Lomniaki. Pour Lomniaki c’était quelque chose de complètement nouveau. – Je n’avais jamais vu une femme qui osait parler ainsi à des hommes. Je n’avais jamais vu non plus des hommes qui écoutaient ainsi une femme comme le faisaient mes oncles sous l’arbre. Anna était vraiment différente. La famille de Lomniaki devait payer une petite somme pour couvrir une partie des frais d’entretien au centre. Comme ils n’avaient pas d’argent à ce moment-là, on décida qu’Anna reviendrait trois semaines plus tard pour emmener Lomniaki. En attendant qu’Anna revienne, Lomniaki se prit à espérer que sa vie changerait. Mais cet espoir mourut avant que les trois semaines se soient écoulées. Quand Anna revint la troisième fois, Paulina, la mère de Lomniaki, avoua avec désespoir qu’on n’avait pas réussi à recueillir l’argent nécessaire.

Ils ne pouvaient pas payer. – Je me souviens comment Anna m’a regardé et m’a dit : « Ne t’en fais pas, Lomniaki. Ça va aller. Je ne vais pas te laisser tomber. On va trouver une solution ! » D’abord j’ai pensé qu’elle plaisantait, mais ce n’était pas le cas. L’aprèsmidi, Anna emmena Lomniaki dans la jeep. Le voyage vers une nouvelle vie venait de commencer. Un du groupe

Lomniaki se plut tout de suite et énormément au centre d’Anna. En plus du fait qu’Anna et les mamans du centre faisaient de tout pour qu’il se sente bien, il put enfin commencer l’école et apprendre à lire et à écrire. C’est là qu’il apprit aussi les droits de l’enfant. Et pour la première fois de sa vie, il rencontra d’autres enfants handicapés. – C’était si agréable de rencontrer tout le monde. À la maison j’étais le seul enfant handicapé. J’avais toujours été seul et m’étais senti délaissé. Au centre, j’ai eu, tout d’un coup, des tas de nouveaux amis. Nous pouvions parler de tout, nous nous

comprenions si bien. Et je n’étais pas couché tout le temps comme à la maison. Il y avait toujours un de mes nouveaux amis qui me promenait en fauteuil roulant et je pouvais participer à tout. Pour la première fois de ma vie, je ne me sentais pas différent, mais appartenant à un groupe. C’était un sentiment merveilleux ! Deux semaines plus tard, Lomniaki fut opéré à l’hôpital de la ville. Quand il revint au centre, il entreprit la kinésithérapie et les exercices de marche. – La première semaine, j’avais mal aux jambes et je tombais tout le temps. Mais c’est allé de mieux en mieux et vite j’ai pu marcher avec des béquilles. Après une année de kinésithérapie, j’ai osé lâcher les béquilles et j’ai pu marcher tout seul. Ç’a été le plus beau jour de ma vie ! Veut être avocat

Après encore une année, Lomniaki allait si bien qu’il put quitter le centre. Anna l’aida à commencer l’école. Dans un premier temps, on avait pensé à l’école du village, mais il aurait fallu

Lomniaki Olmodooni Mdorosi, 15 AIME : Lire et apprendre. Géographie et histoire. DÉTESTE : Ne pas être avec les autres. Être seul, ce n’est pas une vie. LE MEILLEUR : Quand Anna m’a donné la possibilité de me faire opérer et d’aller dans une école ordinaire. Être une personne comme tout le monde, une vraie personne. LE PIRE : Que mes droits aient été bafoués quand j’étais petit. On m’a caché et je n’ai pas pu aller à l’école. ADMIRE : Anna Mollel, bien-sûr ! Elle m’a sauvé la vie. VEUT ÊTRE : Avocat et se battre pour tous les enfants qui ont besoin de moi. RÊVE DE : Que tous les enfants handicapés du monde vivent bien et soient heureux.

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marcher très longtemps. – Mes jambes n’étaient pas assez solides pour que j’ose aller et revenir de l’école au milieu du désert, de plus, je n’aurais pas pu me mettre à l’abri des animaux sauvages. Alors, Anna m’a aidé à me faire admettre dans un internat. Je vais au collège et Huduma ya Walemavu continuent de payer tout pour moi. L’uniforme, les livres, tout ! Je leur en suis si reconnaissant ! Sans eux, je n’aurais

jamais eu la chance d’aller à l’école. Lomniaki adore être à la maison, dans le village pour les vacances et maintenant il peut se rendre utile en gardant le bétail avec les garçons de son âge. Mais son rêve est de continuer à étudier et d’être avocat. – Je veux être comme Anna et consacrer ma vie à lutter pour les droits des enfants démunis, comme elle s’est battue pour moi. Elle a fait

trois fois ce long et dur voyage à travers la savane jusqu’à mon village pour me sauver. Elle s’est vraiment donné de la peine pour moi. Je ne l’oublierai jamais. Si Anna avait renoncé et n’était pas revenue, je serais resté couché seul dans la maison ou sous l’arbre sans pouvoir bouger. Au lieu de cela, elle m’a donné une vie digne d’être vécue. 

Informaticienne Naraka, 12 ans, la petite sœur de Lomniaki, va chercher l’eau, trait les vaches et les chèvres et aide, tous les jours, à la préparation des repas. Mais elle va aussi à l’école. – Je vais commencer la septième et plus tard, je veux travailler dans l’informatique, dit Naraka.

Histoires autour du feu Lomniaki est assis en compagne de Karaine, son oncle plus âgé (à gauche) et d’autres hommes autour du feu. Ils font griller une chèvre. – Le soir, toutes les familles sont assises autour du feu et préparent le repas en parlant. Souvent, on se raconte des histoires de bétail et d’animaux sauvages que nous avons vus dans la savane. J’adore ça, dit Lomniaki.

Né avec la fluorose du squelette La maladie des os avec laquelle Lomniaki est né, s’appelle fluorose du squelette et provient d’une trop grande absorption de fluor qui est contenu dans l’eau. Le fluor s’entrepose dans l’ossature et peut provoquer raideurs, douleurs, déformations et paralysies. Cela touche des millions de personnes dans le monde. Une haute teneur naturelle de fluor dans l’eau se trouve souvent au pied de hautes montagnes volcaniques, comme dans la Vallée du Rift en Afrique de l’Est où habite Lomniaki. Beaucoup de zones avec une teneur dangereuse en fluor sont très sèches, ce qui fait que les personnes qui y vivent sont obligées de boire beaucoup d’eau, malgré tout. En Tanzanie 30 % de l’eau potable du pays contient trop de fluor.

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TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: TOR A MÅRTENS

Jolies calebasses

Quand Lomniaki rentre avec le bétail, il s’assied sur le pas de la porte et boit du lait avec sa mère, Paulina et sa petite sœur, Nashipai, 6 ans. Ils boivent dans des calebasses que Paulina a décorées avec de belles perles. – J’aime maman parce qu’elle a osé quitter papa. C’est la preuve qu’elle m’aime et que je compte vraiment pour elle. Je n’ai plus revu papa depuis.

Anna m’a donné l’espoir au quotidien ! – Après l’opération je peux danser avec les gens du village. Les danses c’est très important pour nous Massaï, alors je suis très content. Je n’aurais jamais cru que je pourrai un jour danser comme tout le monde. Jamais ! Mais Anna a rendu cela possible. Ici, Lomniaki danse la danse Longwesi, qui veut dire Jour de semaine. Dans la danse, les garçons se lancent des défis. Celui qui saute le plus haut gagne. Ici, Lomniaki se mesure à son ami Babu.

Jacob veut courir !

N’est pas seul

À l’hôpital Arusha Lutheran Medical Centre, Jacob Loishooki Lazer est étendu dans un lit, les deux jambes dans le plâtre. Il vient de subir la même opération que Lomniaki et il est heureux.

Jacob est à l’hôpital depuis quatre jours et pendant tout ce temps, jour et nuit, Neema, la maman du centre d’Anna, est à ses côtés. – C’est très important que les enfants ne se sentent pas seuls. Je leur raconte des histoires, je leur lis des livres et je les console si c’est nécessaire, dit Neema Eliphas Mollel. – Quand tu partiras d’ici, il faudra bien soigner ta jambe. C’est important que tu sois toujours bien propre, pour qu’il n’y ait pas d’infections dans la plaie, d’accord ? Dans six semaines, tu reviendras. Si tout va bien, on enlève le plâtre et tu peux commencer la kinésithérapie et les exercices de marche au centre, dit Lilian Michael, l’infirmière.

« Au début ça faisait mal, mais c’est de mieux en mieux. Je suis si heureux parce que je pourrai bientôt marcher et alors je pourrai vraiment aider ma famille. Avant de venir ici, j’essayais de garder nos vaches et nos chèvres, mais c’était dur pour moi parce que j’avais si mal aux genoux. Je pourrai bientôt marcher longtemps avec nos bêtes, pendant la saison sèche, quand elles ont besoin de pâturage frais. Et je vais pouvoir jouer avec mes copains. Ce que je désire le plus au monde c’est enlever le plâtre et courir tout de suite avec mes jambes ! »

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Leçons sur les droits de l’enfant Comme tous les lundis matin, Anna rencontre les enfants de la petite école : – Bonjour tout le monde, comment allez-vous ? demande Anna. – Bonjour grand-mère ! Nous allons bien ! répond la classe avec enthousiasme. – Bien ! C’est amusant à l’école ? – Oui, grand-mère !! – Bien ! Vous prenez bien soin les uns des autres ? – Oh oui ! – Bien, c’est très important. Est-ce que quelqu’un peut me dire quels sont vos droits, les enfants ? demande Anna. Les mains des enfants se lèvent. Beaucoup veulent répondre. – Aller à l’école, dit Theresia, 12 ans. – Aller à l’hôpital si on en a besoin, dit Baraka, 9 ans. – Jouer et participer..., répond Violet, 7 ans. – Exactement, ce sont quelquesuns de vos droits. Et qu’en est-il des enfants handicapés ? – C’est la même chose, grandmère, répond Violet. – Exactement. Les enfants handicapés ont exactement les mêmes droits que les autres. Aller à l’école, les soins, jouer et être aimés. Nous sommes tous des créatures de Dieu et devons être traités avec respect. Ne l’oubliez pas ! dit Anna avec un sourire de tout son être en regardant « ses » enfants.

L’école d’Anna pour tous S

ur une petite colline à Moivo, le village natal d’Anna Mollel, se trouve la petite école qu’elle a créée en 2009, après avoir pris sa retraite de Huduma ya Walemavu et être retournée au village. En massaï, l’école s’appelle Engilanget, l’école de lumière. Les 25 enfants sont très pauvres. Beaucoup sont orphelins, certains sont handicapés, d’autres ont le sida. Chez Anna tous les enfants sont les bienvenus. Surtout les enfants dont personne ne veut s’occuper.

TE X TE: ANDRE AS LÖNN PHOTO: TOR A MÅRTENS

« On ne bat pas mes enfants » – Dans mon école c’est interdit de battre les enfants. On ne doit jamais battre un enfant. On ne doit jamais effrayer un enfant. Seulement expliquer et aimer. Un enfant battu, en battra d’autres. Dans les écoles de Tanzanie, les châtiments corporels c’est courant, mais si un enseignant battait un de mes enfants, il serait immédiatement renvoyé ! dit Anna.

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– Je savais que beaucoup d’enfants handicapés n’avaient aucune chance d’aller dans les écoles fréquentées par les autres enfants. C’est trop loin et trop cher. C’est injuste et j’ai décidé d’ouvrir une école où enfants handicapés et non handicapés seraient ensemble. Une école où les enfants apprennent que nous avons tous la même valeur, les mêmes droits et le même besoin d’être aimés, dit Anna.


Gratte-ciel – Nous construisons un gratte-ciel, dit Fanuel. – Oui et quand nous serons grands, nous en construirons de vrais. Nous n’avons jamais vu de gratte-ciel en vrai, seulement dans les journaux et à la télé, dit Baraka, 9 ans, son ami.

Adore le foot – Dans mon école tout le monde peut jouer. Nous nous aimons bien, dit Fanuel, qui adore jouer au foot pendant la récréation.

Anna aime tous les enfants ! « Je suis heureux quand je vais à l’école. Nous sommes tous ensemble. C’est comme si nous étions frères et sœurs et nous prenons soin les uns des autres. Je suis orpheline et j’habite avec ma grand-mère. Nous n’aurions jamais eu les moyens d’aller dans une autre école. J’aime tellement Anna qui me permet de venir ici. Elle a un grand cœur et s’occupe toujours de nous, plus que les autres adultes » Theresia Edward, 12 ans

L’atelier de couture d’Anna aide les enfants – Beaucoup d’enfants de mon école viennent de familles si pauvres qu’ils ne peuvent payer ni l’uniforme scolaire, ni les livres, ni la modique taxe scolaire, qui couvre le salaire de mes deux enseignants. J’ai un petit atelier de couture où je confectionne et vend des tissus qui s’appellent koikoi. Avec l’argent, j’achète les uniformes, chaussures, livres, plumes et tout ce dont ont besoin les enfants les plus pauvres de la classe, dit Anna.

Une découverte ingénieuse Theresia dans le potager d’Anna – Je cultive des haricots et d’autres légumes que l’on sert aux enfants. De cette façon, je sais que même les enfants les plus pauvres ont au moins un vrai repas par jour, dit Anna.

– Ce rouet s’appelle chaka. Je l’ai fait avec mon fils en prenant une vieille roue de vélo. Ce n’est pas nécessaire d’avoir beaucoup d’argent ni des machines coûteuses pour aider les autres. Mais on a besoin d’imagination et d’initiative ! Si on attendait que quelqu’un nous donne de grosses sommes d’argent avant de commencer, on attendrait très, très longtemps. Il y a tellement d’enfants qui ont besoin d’aide. C’est pourquoi nous trouvons nos propres solutions, dit Anna en riant.

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Sakena Yacoobi POURQUOI SAKENA A-T-ELLE ÉTÉ NOMINÉE ?

NO M IN É E • Pages 70–89

Sakena créa son organisation Afghan Institute of Learning (AIL) en 1995, sous l’oppression et en pleine guerre. Le régime des talibans avait interdit l’école aux filles. Mais Sakena ouvrit 80 écoles clandestines, forma des enseignants et créa des bibliothèques mobiles et clandestines. Aujourd’hui, Sakena et l’AIL dirigent des centaines d’écoles, cliniques et hôpitaux en Afghanistan et au Pakistan et ont formé 19.000 enseignants. Près de 125.000 enfants reçoivent chaque année enseignement et soins médicaux. Les enseignants apprennent de nouvelles méthodologies et ont appris à plus de 4,6 millions d’enfants la réflexion critique. Grâce au travail de Sakena, plus de 5,5 millions d’enfants afghans ont foi en l’avenir et de nouvelles chances, malgré la pauvreté et 30 ans de guerre en Afghanistan.

TE X TE: JESPER HOUR PHOTO: MAK AN E-R AHMATI

Sakena Yacoobi a été nominée au Prix des Enfants du Monde 2012 pour son long et dangereux combat afin de donner aux enfants et aux femmes afghans le droit à l’instruction, aux soins médicaux et la possibilité d’apprendre quels sont leurs droits.

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Une classe, un tableau noir, quelques craies et un enseignant formé. C’est tout ce qu'il faut pour changer la vie des enfants de tout un village, dit Sakena Yacoobi. Ses professeurs enseignent l’informatique aux filles.

Petite, Sakena Yacoobi est la seule fille de la classe. Elle pense : « Pourquoi les filles ne peuvent pas aller à l’école ? » Quand la guerre éclate en Afghanistan, Sakena étudie aux États-Unis. Elle veut revenir au pays et aider ceux qui sont le plus touchés par la guerre, les enfants et les femmes. Et quand c’est interdit pour les filles d’aller à l’école, elle ouvre des écoles clandestines. Près de 20 ans plus tard, elle continue de se battre pour les enfants d’Afghanistan et plus de 700.000 d’entre eux ont bénéficié de soutien scolaire et de soins médicaux de la part de Sakena et de son organisation AIL.

L

’histoire de Sakena commence il y a bien des années, à Herat qui est une belle ville ancienne. Le père de Sakena achète et vend des maisons et des

réfrigérateurs et appareils radio de l’étranger. Sa mère est femme au foyer. Sakena est le premier et pendant longtemps, le seul enfant. C’est pourquoi papa

veut qu’elle soit tout à la fois sa fille et son fils. Elle n’a que quatre ans quand il la place dans une école religieuse, où un mollah, un prêtre musulman, est professeur. – J’étais la seule fille dans une classe de 15 élèves. Je n’étais pas timide, mais les garçons me taquinaient. Pourquoi une fille devraitelle aller à l’école ? me demandaient-ils. Je pensais : pourquoi une fille ne devrait-elle pas étudier ? Parfois les garçons me battaient. Quand je me plaignais auprès du mollah, plutôt que de les réprimander, il se mettait en colère contre moi ! Mais j’apprenais facilement. À six ans, j’en savais autant que le mollah, raconte Sakena.


Habillée en garçon

Petite, Sakena porte un petit voile sur la tête, comme doivent le faire les filles, selon la tradition afghane. Mais parfois le père de Sakena l’habille en garçon. – Je cachais mes longs cheveux sous une casquette. Et je mettais une chemise et des pantalons. Et me voilà transformée en garçon. C’était drôle ! Je pouvais participer aux jeux des garçons. On faisait des bras de fer, on luttait et on se battait. J’étais grande et forte pour mon âge et je gagnais souvent. Papa emmène Sakena partout, en voyages d’affaires, aux déjeuners et fêtes où il n’y a que des hommes. Il veut un autre enfant, de préférence un garçon, mais rien ne se passe. – Maman était tout le temps enceinte, Mais l’enfant ne survivait pas. Une fois, elle a failli mourir d’une hémorragie pendant un accouche-

ment. Les bébés étaient mortnés. Ou si faibles qu’ils ne vivaient que quelques semaines. C’était affreux de voir maman si triste quand elle perdait un enfant qu’elle avait porté pendant neuf mois. La même chose arriva à d’autres femmes du quartier. J’ai pensé : Pourquoi faut-il que tant de femmes et d’enfants souffrent ainsi ? Alors, j’ai décidé de changer cela !

C’était un choc. Je croyais que papa savait tout, mais il était analphabète. Pendant toutes ces années, il avait fait semblant de contrôler mes devoirs. Et il m’avait trompée. À partir de ce jour, il ne m’a plus demandé de lui montrer mes devoirs. Je ne l’ai jamais dit à personne. C’est devenu notre secret. Papa ne voulait pas qu’on sache qu’il ne savait ni lire, ni écrire.

Le secret de papa

Refuse les prétendants

Le père de Sakena est sévère. Après l’école il faut faire les devoirs, pas jouer. Tous les soirs, elle lui montre le cahier où elle a fait ses devoirs, il regarde, fronce le nez et dit : « Tu peux faire mieux ! Refais-le, fais juste ! » Et il faut tout recommencer. Un jour Sakena, à l’âge de 10 ans, montre ses devoirs, comme d’habitude et la réponse est la même : « Ce n’est pas assez bien ! Refais ! » Mais comme Sakena sait qu’il n’y a pas une seule faute, elle ose dire : « Lis et montre-moi ce qui est faux ! » Et tend à nouveau le cahier à son père. Il la regarde et dit doucement. « Je ne sais pas lire » – Puis il a détourné le visage. Je l’entendais pleurer.

Sakena entend souvent grand-mère, les tantes et les autres membres de la famille se plaindre que maman ne mette pas au monde des garçons. Ils disent que la mère de Sakena est une bonne à rien, que son père devrait prendre une femme plus jeune. C’est

horrible d’entendre cela, pense Sakena. Mais papa ne veut pas d’une nouvelle épouse, il est heureux avec celle qu’il a. Sakena a 14 ans quand, finalement, un petit frère arrive. Elle est en huitième et s’occupe du travail de bureau dans l’entreprise de son père. Elle est un peu sa secrétaire. À l’école, les autres filles arrêtent les unes après les autres. Elles se marient et s’occupent d’un ménage, bien qu’elles ne soient que des enfants. Le mariage des enfants est commun en Afghanistan. Sakena aussi a des prétendants. – J’étais grosse et pas si jolie, mais beaucoup voulaient se marier avec moi, car j’avais bonne réputation.

Allah est Dieu Dans les textes consacrés à Sakena et à son travail en faveur des enfants en Afghanistan, on parle parfois d’Allah et parfois de Dieu. Mais, c’est la même chose. Allah veut dire Dieu.

Le pays le plus dangereux pour les femmes L’Afghanistan est le pays le plus dangereux au monde pour les femmes. Violences, manque de soins et une grande misère font que les femmes afghanes sont les plus exposées de toutes. Une femme sur onze meurt en mettant au monde un enfant. Quatre filles sur cinq sont données en mariage contre leur gré ou par un mariage arrangé. Seulement une femme sur dix sait lire et écrire.

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Mais papa me demandait toujours : « Sakena, veux-tu épouser cet homme ? » Et je répondais toujours : « Non, papa, je veux aller à l’école ! » Et papa respectait mon choix. C’était un homme bien. À la maison avec les enfants

Sakena est la première de la famille à terminer l’école. Après le gymnase, elle veut étudier, mais, en ce temps-là il n’y a qu’une seule université dans tout le pays. Elle se trouve dans une autre ville, loin de la maison. La solution vient de sa rencontre avec une

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famille américaine, en visite en Afghanistan. Ils lui proposent de l’emmener avec eux aux États-Unis pour y étudier. Sakena veut bien. Papa réfléchit longtemps. Laisser sa fille étudier près de chez eux, est une chose, la laisser partir seule de l’autre côté du globe, c’en est une autre. À la fin, il dit quand même oui. Sakena est si heureuse. Au moment même où Sakena Yacoobi s’installe aux États-Unis, la guerre éclate en Afghanistan. On bombarde villes et villages, les batailles ont lieu dans les ruelles et dans les montagnes. Les tués et les réfugiés sont nombreux.

La mère, le père et les frères de Sakena, réussissent, après pas mal de difficultés, à se réfugier aux États-Unis. La famille se reconstruit. L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais Sakena ne peut pas oublier son pays natal. Elle n’est pas satisfaite de vivre en paix et en sécurité, alors que son peuple souffre. Ils ont besoin d’écoles et d’hôpitaux.

– Mon cœur était avec mon peuple. Je voulais aider tous ceux qui sont frappés par la guerre, surtout les femmes et les enfants. Mes parents n’étaient pas heureux de ma décision. Maman m’a dit : « Tu ne peux pas nous quitter de nouveau. Nous devons rester ensemble » Mais mon père était d’accord avec moi. « Si c’est ce que tu veux, alors

L’Afghanistan L’Afghanistan compte 18 millions d’habitants. C’est un pays de hautes montagnes enneigées toute l’année, de vallées profondes, de forêts et de grands déserts. Les étés sont chauds, avec plus de 40 degrés. En hiver il peut faire jusqu’à -20, avec des

tempêtes de neige et de glace. On y cultive du riz, des pommes-de-terre, des grenades, des mangues et des pastèques. On y trouve beaucoup d’animaux sauvages rares, comme des ours, des aigles, des gazelles et des léopards des neiges. On y élève des


Le but de Sakena Yacoobi est qu’il n’y ait plus une seule fille en Afghanistan qui n’aille pas à l'école et qui n’apprenne pas à lire.

c’est aussi la volonté de Dieu » dit-il. Sakena arrive dans les camps de réfugiés afghans, où elle devient la responsable d’un programme de formation pour enseignants. Très vite, elle ouvre une école pour filles. Puis une autre. Et encore une. Quelques années plus tard, 3.000 filles vont dans les écoles de Sakena.

L’année suivante il y en a 27.000. Sakena ouvre aussi des cliniques et des cours de formation pour enseignants. Quand les talibans, qui à ce moment-là dirigent l’Afghanistan, interdisent aux filles d’aller à l’école, Sakena ne renonce pas. Elle ouvre des écoles clandestines pour filles. Il y a jusqu’à 80 écoles clandestines. Le temps passe

ovins et des bovins, des chevaux, des ânes et des chameaux comme bêtes de somme ou pour les monter.

divers groupes afghans qui se sont battus. Beaucoup d’innocents sont victimes de la guerre. Chaque Afghan a des membres de sa famille qui ont été tués ou blessés, et beaucoup de familles ont été obligées de quitter leur maison. Aujourd’hui, le gouvernement se bat avec l’aide des soldats américains et de plusieurs autres pays, contre les talibans et d’autres

La guerre

L’Afghanistan est en guerre depuis plus de trente ans, il n’y a que les anciens qui se souviennent de la paix. Parfois ce sont les armées étrangères qui ont occupé le pays, d’autres fois ce sont

Les enfants et leur mère attendent dans un des hôpitaux que Sakena Yacoobi et AIL dirigent en Afghanistan.

groupes rebelles. Personne ne semble pouvoir « gagner » et la guerre continue. Les talibans

Le plus grand groupe de rebelles s’appelle talibans. Avant, ils dirigeaient le pays et les femmes n’avaient pas le droit de travailler et les filles d’aller à l’école. Ils interdisaient aussi la danse, la musique, les cerfs-volants et

la télé. Ceux qui refusaient d’obéir, étaient tués ou fouettés. Les talibans sont un mouvement de musulmans fanatiques. Aujourd’hui, ils se battent pour reprendre le pouvoir. Ils font sauter des bombes, font des embuscades et tuent beaucoup de gens. Mais les soldats du gouvernement, américains et d’autres pays tuent aussi parfois des civils.

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Apprends le dari et le pashto Il y a plus de trente langues en Afghanistan, mais le dari et le pashto sont les langues officielles.

et Sakena travaille jour et nuit. – Je n’ai pas eu d’enfants, mais je suis fière et heureuse quand je pense à tous ces enfants que j’ai pu aider. Des milliers et des milliers de filles afghanes. Une grande partie de garçons aussi. Je les aime comme mes propres enfants. Ce sont les enfants qui sont l’avenir de l’Afghanistan. Menaces de mort et gardes du corps

Sakena reçoit parfois des menaces de mort de la part d’hommes qui pensent que les filles ne devraient pas aller à l’école. Alors, elle est protégée par des gardes du corps. D’autres fois, des groupes armés ferment ses écoles et cliniques. Elle les ouvre de nouveau en cachette. Sakena Yacoobi n’abandonne jamais. Son but est qu’il n’y ait plus une seule fille qui ne puisse 74

aller à l’école pour apprendre à lire. – Tout le monde a le droit à l’école. C’est aussi important que de manger ou de respirer. Aux États-Unis et en Europe, les enfants ont des ordinateurs, des jeux vidéo et des téléphones portables. Pourquoi est-ce que les enfants afghans ne pourraient-ils pas au moins aller à l’école ? Il suffit de peu. Une classe, un tableau noir, quelques craies et un enseignant formé. C’est tout ce qu’il faut pour changer la vie de tous les enfants d’un village. Moi-même, je ne serai jamais arrivée si loin, si mon père ne m’avait pas fait étudier.  Quand elle était petite, Sakena Yacoobi était le seule fille de la classe et elle se disait: « Pourquoi une fille ne pourrait pas aller à l’école ? » Elle a voué sa vie afin de donner aux filles et aux garçons afghans cette possibilité.

dari pashto Un yak yau Deux du dua Trois se drei Quatre chahar tsalare Cinq panj penza Oui/Non Bala/Na Hoo/Na Bonjour ! Salam aleikum Salam aleikum Salut ! Khod hafez De kuday pe aman Comment tu Nametan chist? Staa num tse t’appelles ? day? Je m’appelle Namam Zama num Muhammed! Muhammed hast! Muhammed deh!


Nouria se fait conduire à l’école. Elle n’a plus besoin d’aller dans une école secrète.

L

es années passèrent, Nouria eut sept ans et commença dans une école qui avait été créée par l’AIL, l’organisation de Sakena Yacoobi. Nouria lisait et écrivait bien, mais trouvait les maths difficiles. Elle adorait l’école où filles et garçons

se retrouvaient dans la même classe. Mais un jour Nouria arriva à l’école et vit un billet cloué sur la porte par un couteau. « L’école est fermée. Nous coupons la gorge à ceux qui envoient leurs enfants ici » disait le billet. Nouria, qui à l’époque avait

Nouria, 14

11 ans, comprit. Les talibans avaient fermé l’école ! Elle courut à la maison le dire à son père. Le même jour, les talibans arrivèrent au village. Ils allaient de porte en porte pour annoncer qu’ils avaient pris le village. Personne ne devait discuter leurs ordres. – Ils avaient de grandes barbes et des turbans noirs. Et beaucoup d’armes... des pistolets, des fusils et des bazookas. J’étais triste et j’avais peur de ce qui pourrait arriver, raconte Nouria.

PLAT PRÉFÉRÉ : Douceurs MEILLEURE AMIE : Ma cousine

Ont emporté la nourriture

Fatima VEUT ÊTRE : Enseignante AIME : L’école, la poésie, les

contes, les douceurs DÉTESTE : La guerre ANIMAUX PRÉFÉRÉS : Tigres et aigles

Les talibans s’imposèrent auprès des villageois. Le soir, tard ils frappaient à la porte et exigeaient : « Donnez-nous à manger, sinon on vous tue » 75

L’orage grondait et la pluie tombait à verses sur les maisons en terre dans le village de Ghani Khel, la nuit où elle naquit il y a 14 ans. Khan Wali, le père de la petite fille, la souleva à la lumière d’une lampe à gaz et jura : – Tu auras les mêmes chances qu’un garçon, tu iras à l’école et tu apprendras un métier. On nomma la fille Nouria. En arabe cela veut dire lumière. « Elle sera un modèle pour les autres filles » écrivit son père au dos du coran, le livre sacré de l’islam, la nuit où elle naquit.

TE X TE: JESPER HOUR PHOTO: MAK AN E-R AHMATI

Nouria a suivi une école clandestine


Comme ils étaient beaucoup et armés, les gens n’osaient pas désobéir. Le père de Nouria pria sa femme Amina de mettre sur la table ce qu’ils avaient. Riz, rôti d’agneau, raisins secs, noix et légumes. Nouria voyait tout à travers une fente du rideau. Elle vit les soldats se goinfrer, puis disparaître dans la nuit. Cela se produisit souvent. La famille avait peu à manger et Nouria s’endormait souvent en ayant faim. École clandestine

L’école resta fermée. Jusqu’au jour où le père de Nouria et les enseignants de l’école de Sakena Yacoobi trouvèrent un plan pour continuer les leçons en secret. – Nous rassemblions quelques élèves et un enseignant dans une cuisine ou un séjour. On disait qu’on avait une course à faire. On cachait les livres sous notre burqa. Puis on rentrait à la maison, l’une après l’autre, pas en groupe. C’était affreux, mais aussi un peu excitant. On ne se confiait pas à tout le monde dans le village, certains voisins étaient du côté des talibans et pensaient que les filles ne devaient pas aller à l’école, se souvient Nouria. Pendant plus d’une année, les talibans occupèrent le vil-

lage et Nouria fréquenta l’école secrète. Puis un jour, on entendit à la radio que le chef des talibans qui terrorisaient le village avait été tué dans un combat. Nouria et les autres enfants furent soulagés. L’école ouvrit de nouveau dans son bâtiment avec les classes, les bancs et le tableau noir. Les villageois qui avaient soutenu les talibans s’enfuirent.

une lumière pour les autres enfants. J’en ai fait le vœu à sa naissance. Alors, elle doit fréquenter une bonne école, même si on ne se voit pas chaque jour. Comme dit le poète : « Une belle fleur a souvent des épines » 

Rêves d’avenir

Il y a deux ans de cela. Nouria a aujourd’hui 14 ans. Elle vient de s’installer chez son grand-père dans la grande ville de Herat pour fréquenter une nouvelle école. Dans le village on ne peut aller que jusqu’à la sixième. Nouria rêve de devenir enseignante et d’apprendre aux filles quels sont leurs droits : – Malheureusement, en Afghanistan les filles n’ont pas les mêmes chances que les garçons. Il ne devrait pas y avoir de différence. Nous sommes égaux. Je l’ai appris à l’école de Sakena Yacoobi. Sans cette école, je n’aurais même pas pu écrire mon nom. Les parents de Nouria ont envie de la revoir, car elle vit loin de la maison, mais cela en vaut la peine, dit son père. – Ma fille sera un modèle,

Ma fille sera un modèle, une lumière pour les autres enfants. J’en ai fait le vœux à sa naissance, dit le père de Nouria.

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Papa fumait l’opium Fatima, la cousine de Nouria a grandi dans la peur constante de son père. Il la battait et a vendu tout ce que possédait la famille pour s’acheter de l’opium, une drogue dangereuse. Après avoir reçu l’aide d’un oncle, Fatima aujourd’hui vit bien.

Papa a tout vendu

L’Opium L’opium est une drogue dangereuse. Elle vient du coquelicot, une belle fleur rouge, cultivée dans de grands champs en Afghanistan. L’opium peut se fumer. Ou on en fait de l’héroïne que l’on s’injecte avec une aiguille. Ceux qui prennent des drogues ne peuvent plus s’en passer et ne pensent plus qu’à s’en procurer, plutôt que de nourrir leur famille. Ce sont surtout les hommes qui se droguent. Les paysans afghans cultivent l’opium parce qu’ils sont pauvres et qu’on les paye bien, non parce qu’ils aiment la drogue.

La famille de Fatima vivait dans le village d’une campagne isolée, dans une simple maison en terre, entourée de hauts murs. Fatima avait constamment peur et était triste. Elle n’osait raconter à personne comment ils vivaient. Papa la tuerait, lui avaitil dit. À l’école Fatima ne disait jamais rien et elle n’avait pas d’amis. Les autres élèves la trouvaient bizarre. La nuit, Fatima avait des cauchemars. Avant de s’endormir,

elle s’imaginait s’enfuir de la maison. Elle aurait voulu avoir un autre père, un père grand, fort et gentil. – Papa ne pensait qu’à trouver de l’argent pour l’opium. Il a perdu son travail. Alors il a vendu tous nos ustensiles de ménages, casseroles, verres et couteaux. Mon oncle nous a donné un peu à manger, sinon on serait morts de faim. Mais des fois, papa vendait même cette nourriture-là. J’avais mal à la tête à cause de la faim et je n’arrivais pas à me concentrer à l’école. Une nouvelle vie

Une fois, le père de Fatima a essayé d’arrêter de fumer l’opium. D’abord tout s’est bien passé. Il a trouvé un travail et gagnait un peu d’argent. Mais très vite, il a de nouveau été licencié. Il était retombé dans la drogue. – Quelle déception ! Mais le pire c’était de voir mon petit frère qui n’a que cinq ans, imiter papa. Il allumait un roseau et faisait semblant de le fumer, comme si ç’avait été une cigarette d’opium. Alors, j’ai eu peur. Allait-il devenir comme papa ? Est-ce que ça ne finirait jamais ? La dernière chose que le père de Fatima a faite dans le village, a été d’entrer par effraction chez oncle Khan Walis pour voler de l’argent et un téléphone portable. L’oncle a donné une bonne correction à papa. Puis a pris

Fatima, 15 INTÉRÊTS : L’école, la télé, la musique MEILLEURE AMIE : Ma cousine Nouria FRUITS PRÉFÉRÉS : La mangue et le melon VEUT ÊTRE : Avocate DÉTESTE : La drogue et la guerre OBJET PRÉFÉRÉ : Mon nouveau sac d’école IDOLE : Mon oncle Khan Wali, qui dit que les filles doivent étudier

Fatima, sa mère et son petit frère chez lui. Papa a été chassé du village et une nouvelle vie a pu commencer pour Fatima. – C’était comme de se réveiller d’un cauchemar. Personne ne nous battait et nous pouvions manger tous les jours à notre faim. J’avais beaucoup à rattraper à l’école et j’ai commencé à étudier l’après-midi au centre de formation de l’AIL. C’est là que j’ai appris à lire, écrire et ai vaincu ma timidité. Maman a aussi commencé à étudier. Elle qui était tout le temps triste, était soudain si contente. Maintenant elle informe les autres femmes du village sur la façon de préserver leur santé. 

TE X TE: JESPER HOUR PHOTO: MAK AN E-R AHMATI

apa nous battait tout le temps. Il me battait, moi, ma mère et mon petit frère avec les mains, des pierres, bâtons et fouets. Il fumait de l’opium et était drogué. Quand il n’avait pas d’argent pour l’opium, il devenait fou. Une fois, j’étais en train d’arroser les légumes, il m’a saisie et s’est mis à crier : « Qu’est-ce que tu fais ici ? Rentre ! » Il a pointé un pistolet sur ma tempe et m’a dit qu’il me tuerait si je n’obéissais pas. Je tremblais de peur, raconte Fatima.

P

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Très jeune, Aisha se retrouva orpheline, ce qui la marqua profondément au point qu’elle refusa de parler. Mais la gentille dame de l’orphelinat et les profs du programme de formation de Sakena Yacoobi, lui donnèrent l’espoir d’un futur. Après une opération, Aisha avec son « cœur à piles » rêve de devenir professeur et aider les autres enfants en difficulté.

06h00 – Je me lève, je fais mon lit et dis mes prières du matin. Je prie Dieu pour ne pas retomber malade ! Puis, c’est le petitdéjeuner avec œufs, pain et thé.

A

isha ne se souvient pas beaucoup de son père. Mais elle se souvient que son visage inspirait confiance et qu’il avait une belle barbe noire. Et comment elle apprit qu’il avait été tué. Aisha était en train de manger avec sa mère et sa petite sœur, quand un membre de sa famille arriva et raconta une chose horrible. Son père, Said Ahmed avait été abattu par des bandits alors qu’il allait en Iran pour chercher du travail. Makol, sa mère, malgré sa détresse, embrassa ses trois enfants et dit : – Ne vous en faites pas ! Je suis là! Nous nous en sortirons. Je serai votre maman et votre papa. C’est la volonté de Dieu, Dieu donne la vie et Dieu la reprend et nous, nous devons accepter notre sort. Maman tombe malade

Sans père pour entretenir la famille, ce n’était pas facile. Maman Makol faisait des ménages à l’hôpital ou chez les gens riches, mais ne pouvait pas payer le loyer. La famille fut obligée de quitter la maison et de s’installer dans une chambre avec sol en terre battue et ne se nourrissait plus que de pain et de thé. Peu de temps après, maman Makol tomba malade. – Maman avait une malformation cardiaque. Elle ne pouvait pas travailler et devait rester alitée à la maison. On a reçu un peu de riz d’une organisation d’entraide et des voisins, mais rien des membres ne notre famille. 78

08h00 Les profs de l’AIL viennent à l’orphelinat. – Nous apprenons l’anglais, l’informatique et la couture. Mon prof préféré, Seddique enseigne l’anglais et l’informatique et nous apprend beaucoup. Elle commence chaque leçon en nous parlant de la vie et de la société et nous dit que nous aussi, les filles, avons des droits. On n’avait souvent rien à manger, raconte Aisha. Maman était de plus en plus faible. Un matin, elle ne se réveilla pas. Elle était morte pendant la nuit. Une voisine trouva les sœurs en pleurs à côté de leur mère. À l’orphelinat

C’est ainsi qu’Aisha arriva à l’orphelinat. Une maison en béton au centre de la ville avec une grande cour intérieure. Là, se trouvaient de nombreux enfants dans la même situation qui essayèrent de réconforter Aisha.

Aisha

a une pile cardiaq – Ne pleure pas, ils m’ont dit. On sait ce que tu ressens. Nous n’avons ni père ni mère, mais nous sommes ensemble. Et c’était vrai. Certains enfants ne savaient pas où étaient leurs parents, d’autres savaient que leurs parents avaient été tués, étaient en prison ou étaient si pauvres qu’ils ne pouvaient pas s’occuper d’eux. – Nous serons comme des sœurs pour toi, m’ont dit les filles à l’orphelinat et elles m’ont donné des poupées de chiffons, raconte Aisha. Mais elle était inconsolable.

11h00 Aisha va à l’école de filles qui se trouve à proximité. – Il y a des enfants qui viennent de l’orphelinat et des enfants qui vivent avec leurs parents. Nous les enfants de l’orphelinat, nous restons ensemble, nous nous sentons en sécurité, surtout quand les autres enfants nous taquinent. L’école c’est amusant, mais les leçons sont bruyantes. Il y a trop d’enfants par prof.


Aisha, 13 AIME : Ma sœur Fariba. DÉTESTE : La maladie et la guerre. RESSENT LE MANQUE DE : Ma mère

qui est morte. ADMIRE : Mon enseignante Seddique. DÉSIRE : Avoir un cœur sain ! AIME BIEN : L’anglais, l’ordinateur.

ue et veut aider les autres enfants – Maman me manquait et je m’endormais en pleurant chaque nuit. Je n’avais que six ans et je ne comprenais pas vraiment ce que cela voulait dire que maman soit morte. Longtemps j’ai cru qu’elle allait revenir et me retirerait de l’orphelinat. – Au début, j’étais si triste que je ne parlais plus. Je n’allais pas en classe, je me sauvais et me cachais. Une gentille dame

À l’orphelinat il y avait une gentille dame, Bibi Gul. Elle vit qu’Aisha était très triste et

elle allait vers elle, le soir, pour lui raconter des contes et l’embrasser. Petit à petit, Aisha se remit à parler. – Tu peux être ma maman? demanda Aisha. – Tu es en sécurité avec moi, répondit Bibi Gul. Ainsi, toutes les nuits, Aisha allait retrouver Bibi Gul, se couchait près d’elle et s’endormait. Bibi Gul ne la renvoyait jamais, bien qu’elle fût fatiguée après une longue journée de travail. Elle attendait qu’Aisha s’endorme et la portait ensuite dans son lit à l’étage.

Peu à peu, Aisha se sentit plus en sécurité et moins triste. Elle commença l’école. Et elle alla aussi aux leçons tenues par des enseignantes de l’AIL. Elles apprenaient aux filles la couture, l’anglais et à utiliser les ordinateurs. Un monde nouveau s’ouvrit pour Aisha. – Avant, je ne savais rien. Je ne savais pas que l’« anglais » était une langue. Je n’avais jamais vu un ordinateur. Et je ne savais même pas écrire mon nom ! Maintenant, je sais tant de choses, et j’apprends tout le temps, raconte

Aisha, qui aime énormément Seddique, son prof de l’AIL. A une pile cardiaque

Les années passèrent et un matin Aisha se réveilla avec une douleur dans la poitrine. Elle avait onze ans. – C’était comme si j’avais eu un couteau dans le cœur. Un couteau qu’on tournait lentement, un tour après l’autre, dit Aisha. Elle avait, comme sa mère, une malformation cardiaque. Son cœur était faible et n’arrivait pas à pomper le sang dans tout le corps. Aisha 79


13h00 – Pour le déjeuner, il y a du riz et des haricots presque chaque jour. Parfois seulement du riz. Mais quelques rares fois, il y a des spaghettis et de la viande hachée, mon plat préféré. J’en ai un peu assez du riz.

it d n o ’ u Ce q d’Aisha

devait se faire opérer, sinon elle risquait de mourir, raconte le médecin qui l’ausculta. Mais on ne pouvait pas faire d’opération cardiaque en Afghanistan. Alors le personnel de l’orphelinat a organisé un concert, avec chanteurs et musiciens qui se produisirent gratuitement. Avec le prix des billets on envoya Aisha en Iran, dans un hôpital moderne pour enfants. – J’étais la seule qui n’était pas accompagnée par ses parents. Mais les autres enfants et leur père et mère étaient gentils. Ils m’ont donné un livre où ils ont écrit des

Quand son père et sa mère moururent, Aisha s'arrêta de parler. Les enseignants de l’AIL l’ont aidée et à présent, elle veut devenir enseignante pour pouvoir aider les enfants en difficulté.

salutations et fait des dessins et ils ont prié Dieu pour moi, pour que tout se passe bien, raconte Aisha. Pendant l’opération, elle était endormie. – Quand j’ai ouvert les yeux, après l’opération, j’étais toute seule dans une chambre blanche. D’abord j’ai cru que j’étais morte, mais un méde-

cin est arrivé. Il m’a dit qu’ils avaient mis une pile dans mon cœur, une petite machine qui aidait mon cœur à battre. J’ai une cicatrice après l’intervention, dit Aisha. Veut aider les autres

De retour à l’orphelinat, Aisha se sentait mieux. Mais il lui arrive encore de sentir des lancées dans la poitrine.

Seules pour le Nouvel-An « Aisha est ma sœur. Nous nous soutenons quoi qu’il arrive, parce que nous n’avons personne d’autre au monde. Par exemple, pendant le Nowrooz, le nouvel an afghan, les familles de tous les autres enfants sont venues les chercher, pour qu’ils participent à la fête de fin d’année, mais personne n’est venu nous chercher, nous. Nous croyions que notre oncle viendrait et nous avons attendu toute la journée, mais il n’est pas venu. Nous étions très déçues. L’orphelinat était vide, car le personnel avait congé. Il n’y avait que moi, Aisha et Bibi Gul. Malgré tout, nous avons eu un bon Nouvel-An, Bibi Gul nous a raconté des contes et nous nous sommes endormies » Sa sœur Fariba, 10 ans

Elle ne pense qu’à dessiner « Quand Aisha était plus petite, elle adorait ses poupées, elle ne se lassait jamais de jouer avec elles. Mais aujourd’hui ce n’est plus aussi important. À présent, son occupation favorite c’est le dessin. Dès qu’elle a une minute, elle court, sort crayons et papier et commence à dessiner. Nous dessinons ensemble. Des princesses, des chevaux et de beaux châteaux. Et des familles avec mamans, papas et enfants » L’amie Foziya, 12 ans 80


– Des fois je me réveille la nuit et je sens des picotements au cœur. Ça fait si mal. Alors je pense à la mort et que je ne veux pas mourir. Il y a tellement de choses que je veux faire, dit Aisha. Malgré son cœur à piles, Aisha ne peut pas courir aussi vite que les autres enfants. Elle s’essouffle et se fatigue facilement. – Je me demande des fois pourquoi Dieu m’a fait un cœur si faible. Et je prie pour guérir complètement. Je ne veux qu’une chose, être comme les autres enfants, dit Aisha. Mais à l’école, c’est une bonne élève. – J’aime tellement les leçons de l’AIL. C’est beaucoup mieux que l’école habituelle. Ma prof Seddique a changé ma vie. Maintenant je sais ce que je veux, j’ai une idée pour le futur. Je veux pouvoir un jour parler l’anglais aussi bien que ma prof. Et savoir autant qu’elle sur le monde ! Alors, je veux aussi devenir prof, pour aider les enfants qui ont des problèmes. C’est mon rêve dit Aisha. 

15h00 – Je retourne à l’orphelinat et je me repose, je joue et fais mes devoirs. Quand je suis fatiguée d’étudier, je dessine. Ou alors je vais chez Bibi Gul et parle avec elle. Puis nous regardons une émission avec chansons et musique à la télé.

Le prof de Sakena enseigne à l’orphelinat

18h30 – Pour le dîner, nous mangeons les restes du déjeuner. Puis nous faisons ce que nous voulons. J’étudie un peu, je prie et je vais dans ma chambre pour parler avec ma sœur Fariba et pour dessiner.

À l’orphelinat, dans la ville de Herat, il y a des centaines de filles entre trois et dix-huit ans. Il y a aussi 25 garçons, mais vers l’âge de dix ans, on les envoie dans un autre orphelinat. Les enfants de l’orphelinat dorment dans des lits superposés et prennent leur repas dans un réfectoire. Une dizaine de femmes s’occupent d’eux. Dans le jardin, il y a une place de jeux avec balançoires et toboggans, à l’intérieur il y a la télé et les salles de classe. C’est le gouvernement d’Afghanistan qui dirige l’orphelinat, mais six jours par semaine, un enseignant vient de Sakena Yacoobis Afghan Institute of Learning (AIL) pour instruire les enfants. La plupart des enfants, mais pas tous, vont aussi dans une école toute proche.

« Je ne peux pas être la maman d’Aisha, je dois m’occuper de tant d’enfants, mais j’essaie ! Elle a besoin d’amour et sa vie n’a pas été facile. Elle est si adorable et quand elle rit, c’est avec tout son corps. Je suis si heureuse de la voir rire »

Elle est si appliquée « Aisha est une de mes élèves préférées, elle est si gaie, si appliquée et si gentille. Et elle apprend si vite ! Mais je suis un peu inquiète pour son avenir. À 18 ans les filles sont adultes et ne peuvent plus rester à l’orphelinat. Certaines ont un travail, d’autres sont données en mariage à des parents éloignés. Mais d’autres s’en vont simplement et nous ne savons pas ce qui leur arrive ! » Seddique, 25 ans, enseignante

Bibi Gul, 64 ans, qui s’occupe des enfants de l’orphelinat.

Coucher.

22h00

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Tout le corps rit

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– J’ai un voile blanc, qu’on m’a donné à l’orphelinat. Il est beau, pense Malalai, 7 ans qui suit les cours d’une enseignante de l’AIL.

– Je n’aime pas la burqa, le voile c’est suffisant. La burqa, c’est lugubre. J’ai des voiles de toutes les couleurs, aujourd’hui j’en ai un rouge. C’est une couleur gaie, dit Zarafshan, 16 ans, étudiante et enseignante à l’AIL. – Je porte le tchador, parce que selon notre tradition et notre religion ce n’est pas décent qu’une femme montre ses cheveux et son visage aux étrangers. À la maison, je n’ai qu’un foulard, explique Makhfi, 14 ans, qui apprend la couture à l’AIL.

– Je porte la burqa depuis l’âge de 14 ans. Toutes les femmes de mon village l’ont. C’est notre tradition et notre culture et nous sommes fières de nos burqas. Dans la burqa, je me sens en sécurité, raconte Freista, 20 ans, maman de trois enfants en visite au cabinet médical de l’AIL.

Qu’est-ce que tu po Burqa, voile ou foulard ?

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Selon l’islam, une femme doit se couvrir les cheveux, mais rien dans la religion dit qu’elle doit se couvrir tout le visage ou les yeux. Pourtant, la tradition veut que la plupart des femmes en Afghanistan portent la burqa, un vêtement qui couvre tout le corps, quand elles sortent de chez elles. D’autres portent le tchador, une grande pièce d’étoffe et une minorité, seulement un petit foulard.

– C’est maman qui m’a donné ce beau voile. Mais je ne peux le mettre qu’ici, au centre. À l’extérieur, je porte le tchador. C’est dangereux d’attirer l’attention, on peut nous enlever, dit Fatima, 15 ans, qui apprend l’anglais à l’AIL. 8282

Foulard Le foulard sur la tête n’est pas plus encombrant qu’un chapeau ou une casquette. Il est porté par les filles et les femmes appartenant aux familles modernes et instruites des villes.

Tchador Une pièce d’étoffe qui couvre tout le corps, mais laisse visible le visage et les yeux. On le tient ensemble par-devant. La couleur la plus fréquente est le noir. Burqa

Couvre tout le corps et la tête. Un filet en tissu permet à la femme de voir. Les burqas sont souvent bleu ciel, mais aussi blanches, brunes ou vertes. Il est difficile de bouger dans une burqa et l’été il fait chaud sous le tissu. Quand est-ce que les filles commencent à porter le voile ? Quand elles sont bébés, les filles ne portent aucun voile. Jusqu’à l’âge de six, sept ans les filles portent des jupes, des blouses de couleurs gaies et parfois un voile de couleur pastel. De sept à douze ans, la plupart des filles portent un voile blanc ou noir. Vers l’âge de 13-15 ans, quand les filles commencent à avoir des formes féminines, c’est le moment de la burqa. Les femmes de plus de 60 ans, ne se préoccupent parfois plus de porter la burqa.


La burqa protège et opprime Beaucoup de filles et de femmes en Afghanistan sont opprimées. Les hommes décident et la burqa est un moyen de réduire la liberté des filles et des femmes. Selon la tradition afghane, les femmes doivent rester à la maison et ne pas se montrer à l’extérieur, alors que les hommes sont dans la société. Mais toutes les femmes qui portent la burqa ne sont pas impuissantes. Elles ont souvent droit à la parole à la maison, en ce qui concerne le ménage, le mariage et l’éducation. Elles peuvent aussi porter la burqa sur le chemin du travail, mais l’enlever pendant qu’elles travaillent. La burqa c’est une sorte de protection.

rtes ?

Farid aime le foot et apprendre l’anglais Farid ne perd jamais un match de foot avec les garçons du voisinage ou une leçon d’anglais au centre de formation AIL. Farid vit avec sa mère, son père et huit frères et sœurs dans une petite maison de trois chambres. – Papa est enseignant. Il travaille aussi comme réparateur de vélo, mais a des difficultés à nourrir sa famille. Parfois, des parents nous donnent un peu d’argent et papa achète de la nourriture ou des vêtements, raconte Farid. Même si la famille de Farid n’a pas beaucoup d’argent, tous les enfants, y compris les filles, vont à l’école. Papa sait à quel point c’est important de s’instruire. Mais il est aussi sévère et a mauvais caractère. Parfois il bat Farid. Le matin, Farid fréquente l’école publique, l’après-midi, il apprend l’anglais au centre de formation AIL, l’école de Sakena Yacoobi. C’est ce qu’il aime le mieux. À part le foot. – Mon rêve est d’apprendre l’anglais couramment, puis je veux faire des études d’ingénieur. J’aimerais construire des gratte-ciel modernes, tous pareils, pour loger les gens. Chaque appartement aurait beaucoup de pièces, pour qu’on n’ait pas à s’entasser les uns sur les autres. Mais c’est difficile d’être ingénieur. Je vais peut-être devenir enseignant.

Vêtements scolaires

– Pour aller à l’école, il faut mettre de beaux vêtements propres, mais pas trop délicats. Il me faut une heure pour aller à l’école par des chemins poussiéreux et d’étroites ruelles. S’il y a du soleil et il faut chaud, la poussière voltige partout, s’il pleut, il y a plein de boue et d’énormes flaques d’eau.

Vêtements de fête

– C’est important d’être élégant pour les mariages. Ces vêtements-ci, je les ai eus quand mon cousin s’est marié. Il y a eu une grande fête dans le village, le repas était très bon et il y avait au moins mille invités. Les hommes participaient à la fête entre eux et les femmes entre elles. C’est notre tradition.

Vêtements de sport

– J’adore le foot ! Dès que j’ai un moment, je joue dans la cour. Avec les enfants des voisins, nous avons une équipe de foot et il faut donc avoir des vêtements de foot. Malheureusement, je n’ai pas de chaussures de foot, mais papa m’a promis que j’en aurai dès qu’il pourra. C’est mon plus grand désir !

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Le garçon boulanger s’est sauvé et est Muhammed a sept ans et travaille de quatre heures du matin jusqu’à six heures du soir dans la chaleur du four de la boulangerie. Parfois il se brûle et il est battu. S’il lui arrive de brûler toute une plaque remplie de pain, il se sauve et ne revient plus... Le rêve d’aller à l’école se réalise et bientôt Muhammed, avec l’aide des enseignants du centre de formation de Sakena Yacoobi, est le deuxième de la classe.

05h00 Le réveil sonne et Muhammed se réveille. Il s’étire quelques minutes avant de réveiller ses frères, Arif et Amin. Le petit frère Yahya et leur mère sont déjà debout.

À

sept ans, Muhammed vend du chewing-gum et des cartes de téléphone au marché. Mais il ne gagne presque rien. Un soir, son père rentre avec un étranger. – C’est Hamid, le boulanger. Tu seras son aide. C’est un bon travail, dit le père de Muhammed. Le boulanger regarde Muhammed avec gentillesse et lui dit : – Il y a beaucoup de garçons qui veulent travailler chez moi, tu peux être content d’avoir la chance d’apprendre un métier. Tu commenceras demain matin à quatre heures. Chaud et dangereux

TE X TE: JESPER HOUR PHOTO: MAK AN E-R AHMATI

05h15 Depuis la mosquée, le muezzin appelle à la prière. Muhammed tombe à genoux tourné vers la Mecque, la ville sacrée des musulmans et fait la prière du Fajr, celle du matin.

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Cette nuit-là Muhammed ne peut pas dormir. Il est content d’avoir un travail, mais il est aussi nerveux. Il ne connaît rien au pain et aux fours. La boulangerie est loin de la maison de Muhammed et il doit se lever déjà à trois heures du matin. Il fait encore nuit quand il se met en route pour son nouveau travail. Les choses ne sont pas comme Muhammed les imaginait. Il doit enfourner et défourner le pain d’un grand four en pierre. C’est chaud et dangereux. Déjà le premier jour, il se brûle et se met à pleurer.

– Arrête de pleurnicher, sois reconnaissant, sinon je te renvoie, dit le boulanger en levant la main. Soudain il frappe lourdement Muhammed en plein visage. Muhammed refoule les pleurs. « Peut-être c’est mieux si je travaille plus » pense-t-il. Après six heures de travail, c’est la pause pour la prière et le déjeuner, pain et eau. Puis, Muhammed continue à travailler jusqu’à six heures du soir. Quand Muhammed rentre, il est si fatigué qu’il s’évanouit presque. Il a son salaire dans un sac en plastique, quelques pains secs. Mais il ne se plaint pas devant son père et sa mère. Se sauve et retourne à la maison

Ainsi passent les jours, les semaines et les mois. Avec le dur labeur, les sévices et le travail dangereux près des fours chauds. À l’heure du déjeuner, Muhammed quitte la boulangerie, s’assied tout seul sous un arbre et grignote son pain. Il y a une école dans le voisinage et Muhammed regarde avec envie les garçons qui retournent à la maison après les leçons de l’après-midi. Ils rient en balançant leur sac d’école. « Je veux aussi aller à l’école » pense Muhammed.


devenu le deuxième de la classe

Muhammed, 12 IDOLES : Le chanteur Zahir Shah, papa Atiq INTÉRÊTS : Le taekwondo, le football, la télé VEUT ÊTRE : Soldat ou maître des sports de combat PLAT PRÉFÉRÉ : Spaghetti DÉTESTE : Le travail des enfants

06h00 Pour le petit-déjeuner ce sera du thé et du pain.

06h45 Muhammed court à l’école, il ne veut pas être en retard !

Après sept mois de cette vie, Muhammed en a assez. Un matin, il brûle toute une plaque de pain, il a si peur de la punition du boulanger qu’il court à la maison. Le soir, il raconte à son père, Atiq que c’est horrible à la boulangerie, qu’on le bat et

comme c’est facile de se brûler. Il pleure et dit qu’il veut aller à l’école, apprendre à lire et à écrire et non travailler toute la journée. D’abord, papa est furieux, puis il se calme. – Tu es désobéissant. Mais tu es aussi courageux. Tu iras à l’école, mais à une condition, que tu ne manques pas une seule leçon, dit papa Atiq. – Merci, papa, qu’Allah soit avec toi, dit Muhammed. L’emploi du temps rigide de papa

Juste à ce moment-là, le père de Muhammed trouve un travail en tant que soldat gouvernemental et a un salaire. La famille a les moyens de faire étudier Muhammed et ses deux grands frères. Mais papa est sévère. Il écrit un emploi du temps sur un papier qu’il épingle dans l’entrée de la petite maison en terre. – Il faut mettre à profit chaque heure du jour. Pas une minute de perdue, dit papa. Sur l’emploi du temps papa a écrit ce que Muhammed et ses frères doivent faire, heure après heure. Le matin, Muhammed va à l’école et après le déjeuner, il continue à étudier au centre 85


11h15 Muhammed étudie l’anglais dans le centre de formation de Sakena Yacoobi. Le prof, Zahra Alipour, qui a 18 ans, l’aide. – Muhammed est bon élève, mais sa famille n’a pas d’autres parents ici pour les aider. Ils ont peu d’argent et Muhammed porte les mêmes chaussures, été comme hiver. Il fait froid quand il neige. Mais je crois qu’il s’en sortira, il a beaucoup d’amis et il est consciencieux, dit Zahra. de formation de Sakena Yacoobi. Cet emploi du temps rigide a donné des résultats. Muhammed est maintenant en cinquième et est presque le meilleur de la classe. – Quand j’ai commencé l’école j’étais en retard. Sans les cours au centre de formation de Sakena Yacoobi, je n’aurais jamais pu suivre. L’enseignement au centre est bien mieux qu’à l’école. Les 86

13h30 Muhammed et ses frères prennent place à tour de rôle devant le métier à tisser. – Je suis si habitué à nouer des tapis que j’installe un livre sur le métier et fais mes devoirs en même temps, raconte Muhammed.

enseignants sont plus gentils, savent plus de choses et surtout s’occupent mieux des élèves. À l’école d’état c’est si bruyant. Et là on se moque un peu de moi parce que je suis bon élève.

Inquiet pour papa

Même si le père de Muhammed a un travail, ils ne sont pas riches. Pour gagner un peu plus, les enfants nouent des tapis à la maison, de beaux tapis déco-

rés qu’ils vendent. Il faut trois mois pour faire un tapis et il faut travailler plusieurs heures par jour. Mais tout n’est pas que travail et devoirs, cinq jours par semaine Muhammed s’entraîne dans un club avec ses grands frères au taekwondo, le sport de combat coréen. Ils ont reçu des vêtements d’entraînement et ont participé à des compétitions. Une fois, Muhammed a gagné la


L’emploi du Muhamm temps de ed

16h30 Aujourd’hui il n’y a pas d’entraînement taekwondo, l’entraîneur est absent. Muhammed et ses frères s’entraînent dans le jardin. Ils font des pompes et des assouplissements.

médaille de bronze. Aujourd’hui Muhammed est content de sa vie. Il n’y a qu’une chose qui l’inquiète. La guerre. – Papa est soldat. Il fait la guerre aux talibans. La plupart du temps, il travaille en ville. Il surveille les bâtiments officiels et les barrages routiers, mais parfois il est dans les provinces avec son unité. Il est parfois absent plusieurs semaines. Je prie alors plusieurs fois par jour pour qu’il ne soit pas tué, dit Muhammed. Quand papa revient de la guerre, il ne dit rien de ce qui s’est passé, ni à sa femme, ni à ses enfants. Il boit simple-

20h00 Muhammed fait ses devoirs jusqu’à ce que les yeux brûlent. Papa surveille qu’il ne triche pas.

Réveil De 5 à 7 Réveil, prière du m atin et De 7 à 10 petit-déjeuner. L e ç on s à l’école De 10 à 1 . 1 Leçon de lecture De 11 à 1 . 2 Leçon s au centr e de fo rm ation AIL De 12 à 1 . 3 De 13 à 1 Déjeuner et prière 6 Tissag . ed De 16 à 1 9 Entraîn e tapis. ement ta De 19 à 2 ek wondo 0 . De 20 à 2 D îner et prière. 2 Devoirs . 22 h C ouc he r !

Celui qui ne respe cte pas l’ temps fe em ra ses leç ons 6 fois ploi du ! ment son thé en silence. Et prie très longtemps. Des fois, Muhammed parle avec lui de ce qu’il veut faire plus tard. – Je veux aussi être soldat, mais papa ne veut pas. Il dit que c’est un métier où on n’apprend qu’à obéir et à tuer. Moi je trouve que c’est excitant. Et le salaire est bon. Papa veut que je devienne professeur ou homme d’affaires. On verra, dit Muhammed. 

87


Zarafshan blogue sur l’Afghanistan Il y a quelques semaines, Ismet, 19 ans et Hajatullah, 20 ans, n’avaient jamais entendu parler de l’Internet. Mais une jeune fille leur a appris à l’utiliser et depuis, ils surfent librement sur les sites avec les nouvelles de sport et de politique.

Z

arafshan, 16 ans, une jeune fille avec un voile rouge, est enseignante en informatique au centre de formation de Sakena Yacoobi, à Herat. Elle n’est jamais allée à l’étranger, mais a des amis partout dans le monde. Zarahshan est en fait une blogueuse. Dans son journal des blogs, elle écrit en anglais comment est la vie en Afghanistan. – Je raconte des histoires tristes et vraies sur le mariage des enfants, la guerre, et la maltraitance. De ce que j’ai entendu à la maison, au marché ou à la radio. C’est important de dire la vérité sur notre pays. C’est un premier pas pour changer et améliorer les conditions des femmes et des enfants, dit-elle. L’Internet au centre de formation est gratuit pour 88

les enseignants comme pour les élèves, à la différence des cafés internet où il faut payer, ce qui est difficile pour les habitants des quartiers pauvres. Grâce à la connexion internet, le centre est devenu un point d’observation du reste du monde. – Grâce au blog, j’ai connu beaucoup d’étrangers. Nous communiquons par mail et nous parlons de notre vie. J’ai appris tant de choses, raconte Zarafshan. Mais elle n’a plus le temps de parler. Ismet et Hajatullah ont besoin d’aide. Ils viennent de créer leur adresse électronique, mais n’ont personne à qui écrire. Avec l’aide de l’enseignante, Ismet envoie son premier mail. À son cousin Hajatullah, assis à côté de lui. 

Récit du blog de Zarafshan Où sont mes enfants ? « On m’a donnée en mariage quand j’avais 14 ans, à un homme âgé. Une année après le mariage, la guerre a éclaté et mon mari a perdu son travail. C’était dur. Nous avons eu trois enfants, deux filles et un garçon. Un jour, j’ai envoyé mon fils au marché pour vendre des cigarettes, mais il n’est plus revenu. J’étais couchée priant Allah, le tout puissant, quand un ami de mon fils est arrivé. Il m’a raconté que mon fils avait été tué par une bombe. J’étais bouleversée, mais je suis allée sur place. L’explosion avait été si forte que je n’ai pas trouvé le corps de mon fils. Ça a été le pire jour de ma vie. Une année après, mon mari est tombé malade et est mort. J’étais enceinte et j’ai mis au monde des jumelles. Je ne pouvais pas les nourrir, alors je les ai laissées chez une femme qui ne pouvait pas avoir d’enfants. Je me demande souvent ce qui leur est arrivé. Où sont-elles aujourd’hui ? Où sont mes enfants ? »

Zarafshan vient d’apprendre aux cousins Ismet et Hajatullah à envoyer des mails.


Ahmed Muktar, 12 SES IDOLES : Papa et grand-papa. VEUT ÊTRE : Chef d’une organisa-

tion d’entraide ou un écrivain célèbre AIME : Lire des livres et trouver des histoires DÉTESTE : Les adultes qui battent les enfants RÊVE DE : La paix en Afghanistan PLAT PRÉFÉRÉ : Ragoût

Ahmed

J

– ’avais huit ans quand mon père m’a mis dans une école religieuse. Les enseignants étaient très sévères et battaient les élèves, raconte Ahmed. Ahmed fut souvent battu. Il n’arrivait pas à se concentrer et à se souvenir des leçons. Même s’il avait fait ses devoirs, il avait si peur de ne pas savoir quoi répondre qu’il ne disait rien. Alors, le prof

lui frappait le dos avec un bâton. – Une fois, le prof m’a lié les pieds avec une corde. Il m’a enlevé les chaussures et m’a frappé sur la plante des pieds. Ça faisait très mal, raconte Ahmed. À l’école de Sakena

C’est vrai, le silence régnait pendant les leçons, mais le prof d’Ahmed était incompétent. Il y avait trop d’élèves dans la classe et celui qui ne pouvait pas suivre était livré à lui-même. À la fin, Ahmed avait si peur d’aller à l’école qu’il refusa d’y aller, malgré les menaces ou les promesses de ses parents. Alors son père comprit que l’école n’était pas bien. Il mit son fils dans l’une des écoles de Sakena Yacoobi, qui avait bonne réputation. Ce fut tout autre chose. – Les profs étaient gentils, attentionnés et compétents. Et c’était interdit de battre les

élèves. Il me tardait d’aller à l’école, il y avait tellement de choses à apprendre, raconte Ahmed. On ne doit pas battre les enfants

Dans la nouvelle école, Ahmed eut de meilleures notes et sa confiance augmenta. Un jour, tous les élèves durent inventer une histoire

et l’écrire. Ahmed trouva cela si amusant qu’il ne put plus s’arrêter d’écrire. Ce qui donna un livre que le père d’Ahmed fit publier. – Je voulais être un exemple pour les autres enfants. Et montrer qu’il y a des enfants afghans qui font de belles choses et peuvent écrire des livres, raconte Ahmed. Le livre parlait de la vie d’un garçon en Afghanistan et de la différence entre les bons et les mauvais professeurs. Ainsi Ahmed devint le plus jeune écrivain en Afghanistan. On l’invita à la télé, à la radio et dans les journaux et on lui demanda de parler de son livre. – C’était important de faire les devoirs et de s’appliquer. Mais c’est tout aussi important que les profs ne soient pas si sévères. Ils ne doivent pas battre les enfants. Ils doivent écouter les enfants, dit Ahmed.  89

Ahmed Muktar jouit d’une certaine renommée dans l’ouest de l’Afghanistan. Il est souvent à la télé, à la radio ou dans les journaux où il parle du livre qu’il a écrit. Un livre pour et sur les enfants. – Les profs ne doivent pas battre les enfants, ils doivent les écouter, dit Ahmed.

TE X TE: JESPER HOUR PHOTO: MAK AN E-R AHMATI

a été battu et a écrit un livre


Ann Skelton

POURQUOI ANN A-T-ELLE ÉTÉ NOMINÉE ?

NOMINÉ E • Pages 90–109

Ann Skelton a été nominée au Prix des Enfants du Monde 2012 pour son victorieux combat, de plus de 20 ans en faveur des droits des enfants victimes du système judiciaire. Ann a fait un travail révolutionnaire pour les enfants d’Afrique du Sud, aussi bien dans les salles de tribunal qu’en changeant les lois qui affectent les enfants. Lorsque Nelson Mandela a été élu président, on demanda à Ann de prendre la direction du travail d’élaboration de la nouvelle loi protégeant les enfants qui enfreignent la loi. En assistant un enfant dans un cas de divorce, un enfant maltraité dans un foyer pour enfants, un enfant réfugié non accompagné, des enfants maltraités en prison, des enfants dans des « écoles en boue » en mauvaises conditions et en faisant prendre au tribunal une décision en faveur des enfants, Ann a aidé et protégé tous les enfants d’Afrique du Sud dans des situations similaires. Ann est Directrice du Centre for Child Law à l’Université de Pretoria et est assistée par deux jeunes avocates.

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Ann avec les étudiants à la Pretoria Boys High School et la Girls High School intéressés à promouvoir les droits de l’enfant. PHOTO: MASI LOSI

Ann grandit sous le violent régime de l’apartheid en Afrique du Sud. Quand elle avait 15 ans, les enfants noirs de son âge qui protestaient étaient abattus et emprisonnés. En tant que jeune procureur, elle vit des enfants battus par la police, mordus par les chiens policiers et condamnés à des coups de fouet. Elle devint juriste et se battit pour les droits des enfants et écrivit des lois qui les protègent. Elle porte les cas des enfants devant le tribunal et quand elle gagne ces cas, elle aide également beaucoup d’enfants dans des situations similaires à celles de ses clients. C’est important pour Ann que les adultes écoutent les enfants. « Les enfants sont des personnes. Ils ont besoin de la possibilité de participer aux décisions qui concernent leur vie »

À

l’adolescence, Ann détestait toutes les règles de l’école. « Quand j’ai commencé le lycée, mes camarades de classe et moi-même devions porter une plaquette autour du cou avec notre nom. Je trouvais cela abaissant et j’ai refusé de la porter » Mais ce n’était que la première d’une série d’humilia-

tions pour Ann dans son nouveau lycée. « Les enfants plus âgés nous utilisaient, ils nous envoyaient acheter des choses pour eux et nous traitaient comme des esclaves simplement parce que nous étions plus jeunes. Je me suis révoltée contre ce harcèlement et bien sûr j’ai eu des problèmes, qui se termi-


Le Child Justice Act a été développé par un comité dirigé par Ann. La loi met l’accent sur le besoin pour soins et réhabilitations des enfants délinquants plutôt que sur la punition. La plupart des enfants qui ont affaire à la justice en Afrique du Sud, sont maintenant pris en charge par les centres de soins.

naient souvent dans la salle de retenue de l’école. Je me suis toujours sentie exclue d’un système où on était puni simplement parce qu’on avait une opinion différente » Les règles de l’apartheid

Ann fréquenta une « école pour blancs seulement » à Pietermaritzburg – à cette époque, les enfants noirs et blancs étaient séparés dans toutes les activités de la vie. C’était littéralement un crime pour un enfant noir de rendre visite à un enfant blanc dans un voisinage blanc sans une autorisation, appelée « laissez-passer » ! Ann se souvient du jour où les enfants noirs descendirent dans la rue pour protester contre l’apartheid. « J’avais 15 ans et quand j’ai vu à la télé les enfants d’Afrique du Sud se révolter contre les règles de l’apartheid, j’ai compris leurs réclamations d’une tout autre façon que la plupart des gens dans mon école pour blancs et de mon voisinage. Ceci se

Seuls les blancs étaient autorisés à nager sur cette plage.

passait en 1976, quand les enfants noirs protestèrent contre le gouvernement de l’apartheid qui les forçait à vivre dans la pauvreté et à apprendre l’afrikaans – la langue des blancs. Ils voulaient parler leur propre langue. Quel mal y avait-il à cela ? Mais beaucoup d’enfants qui ont protesté dans les rues le 16 juin 1976, ont été emprisonnés ou abattus par la police, pour avoir exprimé leurs opinions et pour avoir

refusé d’être traités en esclaves. Je me souviens avoir écrit un poème sur ce que je ressentais et sur les enfants qui payaient de leur vie leur besoin de liberté » La famille d’Ann

« Mon père qui était le fils d’un mineur en Angleterre avant de venir en Afrique du Sud, savait ce que cela signifiait d’être pauvre. Un jour, alors que nous passions, devant une fabrique, nous

L’apartheid était du racisme légal

avons vu beaucoup de noirs qui faisaient la queue devant la porte dans l’espoir qu’on leur donne un travail et j’ai entendu mon père dire : « Pauvres gens, je me souviens de ce que c’est que de faire la queue de cette façon » À ce moment, j’ai su que ma famille n’était pas différente des familles noires et que nous étions tous dignes de respect. Lors de ma dernière année de lycée, j’ai fait un discours sur l’inégalité. Ce qui ne m’a pas rendue populaire, car c’était toujours du temps de l’apartheid, mais pour moi c’était important parce que j’ai appris à mettre en mots mes sentiments et mes pensées de révolte. Je n’ai pas réalisé alors que j’étais en train de devenir une juriste qui par-

À 15 ans, Ann a vu des enfants noirs protester contre l’apartheid. Hector Pieterson, qui avait le même âge qu’Ann, a été abattu par la police. Hector a reçu, à titre posthume, le Prix Honoraire des Enfants du Monde, pour l’année 2000.

Le racisme s’installa tôt en Afrique du Sud, mais en 1948 il fut légalisé et fut appelé apartheid, ce qui signifie « séparation » En ce temps-là, les noirs et les blancs étaient séparés les uns des autres et les noirs étaient victimes de discrimination et de persécution. L’Afrique du Sud était divisée en zones blanches et noires. Des millions d’enfants noirs et leur famille furent obligés d’aller vivre dans les « zones noires » Les enfants restaient seuls quand leurs parents allaient travailler très loin, dans les maisons, les fermes et les usines des blancs. Beaucoup d’enfants ne voyaient leurs parents qu’à Noël. Les noirs étaient arrêtés s’ils entraient dans une zone blanche sans autorisation. Ils n’avaient pas le droit d’utiliser les mêmes bus, parcs, toilettes publiques, restaurants et nombre d’autres services réservés aux blancs. Si les enfants protestaient contre ces inégalités et réclamaient la liberté, la police et les soldats utilisaient la violence pour les faire taire.

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En assistant au tribunal Shaafi de Somalie et d’autres enfants réfugiés non accompagnés, Ann a protégé les droits de tous les enfants dans la même situation en Afrique du Sud.

lerait au nom des enfants et qui se battrait pour leurs droits. Mais c’est ce qui s’est passé » Des enfants en prison

« Des années plus tard, j’ai étudié le droit et en 1986, j’ai obtenu mon premier job en tant que procureur au tribunal. Dans ce travail, j’ai vu beaucoup d’enfants traînés devant les tribunaux, arrêtés et battus par la police et mordus par les chiens policiers avec des blessures encore ouvertes. Certains, sans vêtements, avaient froid. Ils étaient souvent très jeunes et on les maintenait dans des cellules de prison très longtemps. Si on les jugeait coupables d’enfreindre la loi, ils risquaient la bastonnade.

J’ai compris que le système était très mauvais pour les enfants qui ne respectaient pas la loi et que nous devions changer cela. J’ai quitté le tribunal, je suis allée travailler chez Lawyers for Human Rights et ai initié un projet destiné à aider les enfants en prison. Mes collègues juristes et moi-même, pouvions aller au tribunal pendant la journée et pouvions constater quels étaient les enfants qui avaient été arrêtés pendant la nuit. Parfois, nous devions attendre pendant des heures, assis sur des bancs très durs dans les postes de police, parce que la police faisait de tout pour nous décourager de rester. Mais nous attendions jusqu’à ce qu’ils nous montrent les enfants. Nous faisions de notre mieux pour contacter les familles et leur dire que leurs enfants étaient arrêtés, pour les aider à venir au tribunal et pour qu’ils puissent emmener leurs enfants à la maison. À ce moment-là, le téléphone portable n’existait pas. C’était très difficile de trouver ne « J’ai vu beaucoup d’enfants arrêtés, battus par la police et mordus par les chiens policiers »

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serait-ce qu’un seul membre de la famille qui avait le téléphone, mais quand nous pouvions le contacter, nous pouvions vraiment aider l’enfant et il était relâché » Battu à mort

« Un jour en 1992, un garçon de 13 ans, Neville Snyman et ses amis, se sont introduits par effraction, dans un magasin, ont volé des bonbons, des chips et des boissons. Quand la police les a trouvés, les a arrêtés et mis en prison. En prison, Neville a été violé et battu à mort. Les journaux de tout le pays ont parlé de cet événement scandaleux et beaucoup de gens ont réalisé pour la première fois, l’horreur qu’était la prison pour les enfants »

Pour Ann, ce fut la fois de trop. Elle n’en pouvait plus. « J’ai réalisé que jusqu’à ce moment-là, je n’avais aidé qu’une poigné d’enfants dans une ville et que nous devions aider tous les enfants emprisonnés du pays et immédiatement. Alors, nous avons commencé la campagne ‘Libérez un enfant à Noël’. J’ai appelé des centaines de personnes et chaque juriste spécialisé dans les droits de la personne d’Afrique du Sud a appelé un autre juriste, qui en a appelé un autre… et ainsi nous avons constitué une chaîne d’adultes qui travaillaient ensemble pour essayer de renvoyer le plus d’enfants possible à la maison pour Noël. Je suis allée m’entretenir avec


des membres du gouvernement et les responsables des prisons et j’ai réussi à obtenir leur coopération. Cette année-là, nous avons pu sortir 260 enfants de prison ! » Menacée de détention

Un jour, la police de sûreté nationale de l’apartheid, fit des descentes dans les bureaux où Ann et ses amis juristes des droits de la personne travaillaient. Ils prirent de nombreux dossiers et documents où Ann conservait les informations sur les enfants qu’elle aidait. Ann comprit immédiatement qu’elle-même risquait d’être emprisonnée, puisque la police de sûreté avait déjà arrêté, dans tout le pays, des collègues noirs et des milliers d’autres personnes qui se battaient contre les lois de l’apartheid. Ann alla chez elle et appela son mari. Elle lui dit qu’il allait devoir apprendre à donner le biberon à leur bébé, au cas où Ann finirait en prison. Son mari eut peur, mais fit ce qu’elle dit, car il savait qu’Ann n’abandonnerait jamais son travail pour les enfants, même au risque d’être détenue. Ceci se passait en 1992 et les choses étaient en train de changer rapidement. Le temps de l’apartheid arrivait à sa fin et c’était une période pleine d’espoir pour l’Afrique du Sud. Après de nombreuses années de lutte contre le système de l’apartheid, Nelson Mandela et d’autres combattants de la liberté furent libérés. C’était un temps où il était permis de rêver que le pays allait traiter correctement ses enfants. Nelson Mandela devint président en 1994 et, dans son premier discours au parlement, il dit : « Nous devons vider les prisons des enfants ! » Et il le pensait vraiment. On demanda à Ann de diriger un comité spécial qui rédigerait une nouvelle loi pour les

enfants qui auraient enfreint la loi. A consulté les enfants

Tout en rédigeant la loi, Ann et ses collègues décidèrent de demander aux enfants ce qu’ils pensaient. Après tout, la loi concernait directement ! Voici quelques commentaires que firent les enfants : « Les enfants de moins de 10 ans sont trop petits pour planifier des délits, à moins que quelqu’un de plus âgé les encourage » « Le policier qui m’a arrêté était gentil. Mais au poste de police, les choses ont changé.

On m’a torturé et j’ai même avoué avoir fait des choses que je n’avais pas faites parce qu’on m’a dit que je les avais faites. C’est bien qu’un parent ou un assistant social soit avec vous quand vous racontez ce qui s’est passé, comme ça vous avez moins peur » « La police m’a arrêté et enfermé. Ils ne m’ont pas dit que j’avais le droit de passer un coup de fil. Même si vous êtes arrêté, on doit vous dire quels sont vos droits » « Il n’y a pas de lit dans une cellule de prison. On ne peut pas acheter à manger. Il n’y a personne pour vous aider si vous êtes malade. Ann est devenue juriste afin de défendre la cause des enfants et de se battre pour leurs droits.

Quand Nelson Mandela a été élu président en 1994, il a dit : « Nous devons vider les prisons des enfants ! » On confia à Ann la tâche de présider le comité qui rédigerait une nouvelle loi pour les enfants.

Vous dormez avec des personnes bien plus âgées qui abusent de vous. Les cellules de prison vous donnent des idées de suicide si vous êtes déprimé » « Les tribunaux doivent être plus adaptés aux enfants avec des posters en couleur, des peintures, des meubles, des bonbons. Les adultes ne doivent pas porter de longues robes noires, ça fait peur » Les enfants sont des personnes

Ann explique que la façon dont les enfants voient les prisons et les tribunaux, révèle désespoir et colère. Ils expriment la terreur et la solitude qu’ils ont ressenties en entrant en conflit avec la loi. « Cela nous dit aussi com-

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TE X TE: MARLENE WINBERG PHOTO: SATSIRI WINBERG

Ann croit que les enfants sont souvent floués par le système, et que les adultes doivent apprendre à écouter les enfants.

ment les adultes manquent à leur devoir envers les enfants quand ceux-ci ont des problèmes. Mais cela nous dit aussi que si nous les consultons et nous les traitons avec respect et dignité, ils peuvent s’exprimer d’une façon logique et raisonnable, ce qui peut nous aider à les aider » Ann appelle les enfants qu’elle aide, ses « clients enfants » « Les enfants sont des personnes » dit-elle, « Ils ont besoin de participer aux décisions qui les concernent. L’une des choses les plus agréables, c’est d’aider un enfant à canaliser sa colère et sa révolte dans une action constructive. C’est seulement ainsi que l’enfant peut trouver « Aujourd’hui, quand nous portons un cas devant un tribunal, ce n’est plus pour aider les enfants qui sont déjà en prison, comme au temps de l’apartheid. Maintenant nous avons appris que ce qui se passe dans ce tribunal peut toucher des milliers d’enfants »

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Dans un cas qui a impliqué sept « écoles en boue » en Afrique du Sud, Ann a déclaré qu’elle-même et le Centre for Child Law représentaient les enfants de toute l’Afrique du Sud dans la même situation que celle des sept écoles. Le résultat fut que le gouvernement d’Afrique du Sud promit de mettre à disposition un total de 8,2 milliards de rands (USD 1,2 milliards) pour remplacer toutes les écoles en boue.

les moyens de changer sa situation ! » Le crime fait souffrir

Ann sourit en disant : « Aujourd’hui nous avons la loi que nous avons rédigée. Son nom est Child Justice Act. La loi admet que les enfants peuvent faire des fautes et que les adolescents ont tendance à briser les règles. Si nous les traitons comme des criminels, le danger est qu’ils viennent en contact avec de vrais criminels, se durcissent et finissent par commettre de vrais et sérieux délits. Si nous réalisons qu’ils ont fait une faute, mais leur donnons une deuxième chance, sans les porter devant un tribunal et en prison, il est possible qu’ils tirent une leçon de leurs fautes et deviennent des citoyens respectueux des lois et des droits des autres » « Il ne faudrait pas leur faire supporter les conséquences de leurs fautes pour le reste de leur vie et en faire des criminels. La loi leur permet d’être dirigés vers des

programmes par lesquels ils peuvent apprendre à différencier ce qui est juste et ce qui ne l’est pas, comment se comporter avec les autres et pourquoi le délit fait mal aux autres. Ils peuvent devenir des membres de la société respectueux des lois. Cependant, s’ils continuent à commettre des délits ou si leur crime est très sérieux, tels un meurtre, attaque à main armée ou viol, la nouvelle loi spécifie qu’ils

peuvent être jugés et s’ils sont retenus coupables, ils risquent d’être envoyés dans un centre de soins protégé ou en prison. S’ils vont en prison, ce sera pour le plus court temps possible et ils doivent être séparés des adultes. Tous les enfants ont droit à un avocat et s’ils ne peuvent pas le payer, le Legal Aid South Africa (financé par le gouvernement) mettra gratuitement un avocat à leur disposition» 

Avant, ces deux garçons qui lisent Le Globe au centre de soins pour enfants, auraient été en prison. Mais la nouvelle loi pour les enfants à laquelle Ann a pris part, met l’accent sur la nécessité des soins et la réhabilitation des enfants délinquants plutôt que sur la punition.


Shaafi a été bombardé,

dérobé, illégal et légal Quand la maison de Shaafi, en Somalie fut bombardée, il s’enfuit et traversa plusieurs pays avant d’arriver en Afrique du Sud. Là, il fut « illégal » et arrêté. Ann Skelton et les Lawyers for Human Rights portèrent son cas devant la Haute Cour de justice et se battirent pour ses droits afin qu’il soit « légal » lui et tous les enfants réfugiés.

O

«

uvre la porte ! »

L’ordre est proféré à voix basse. Les yeux de Shaafi tombent sur le pistolet que l’homme tient à la main sur le comptoir qui les sépare. Il se précipite pour ouvrir la porte du magasin. Un autre homme entre et ensemble, ils agressent Shaafi. Il tombe sur le sol. « Où est l’argent ? » demandent les voleurs. Shaafi désigne la monnaie et les billets dans les deux boîtes en carton à côté du comptoir.

« Si tu cries on te tue » menace un des hommes en pointant son arme contre Shaafi. L’autre homme vide les boîtes de leur argent, met la monnaie et les billets dans un sac et empoche quelques boîtes de poisson derrière le comptoir. Ils sont partis aussi

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Shaafi dort par terre, derrière le comptoir du magasin.

vite qu’ils sont venus. Shaafi se relève et ferme la parte derrière les hommes. Ses mains tremblent mais il rassemble ses esprits et se tient droit. Aujourd’hui, le propriétaire du magasin somalien lui a laissé la responsabilité du magasin parce qu’il devait s’occuper d’affaires importantes. Ils ont été dévalisés avant et Shaafi ne veut pas abandonner son

employeur. Il a besoin de ce travail. Prie cinq fois

Quelques minutes plus tard, une femme vient acheter du pain. Dans son mauvais anglais, Shaafi lui dit qu’il ne peut pas lui rendre la monnaie. « Combien d’œufs je peux avoir pour le reste du pain ? » demande-t-elle.

Enfants non accompagnés Les enfants qui tel Shaafi, passent les frontières seuls sont appelés « enfants non accompagnés ou mineurs » Certains enfants fuient quelque chose d’horrible qui a lieu dans leur pays d’origine comme la guerre et la famine. D’autres se déplacent parce qu’ils vivent dans des pays où la plupart des gens sont pauvres et ils espèrent trouver de meilleures possibilités dans d’autres pays – comme l’éducation ou, s’ils ont plus de 15 ans, du travail. Mais d’autres encore recherchent les membres de leur famille desquels ils ont été séparés. Cela peut être dangereux pour les enfants de voyager seuls, parce que les étrangers risquent d’essayer d’abuser de leur confiance. Une fois, dans le nouveau pays, ils ont souvent de la difficulté à y trouver leur place, pour y vivre, pour aller à l’école, parce qu’ils ne peuvent montrer aucun papier qui leur donne le droit de se trouver dans le pays. Les juristes peuvent alors les aider à se procurer les papiers et empêcher leur expulsion, ce qui correspondrait à les renvoyer dans leur pays d’origine. Si un enfant ne peut plus retourner dans le pays d’où il ou elle vient, parce que la situation y est encore dangereuse, ils peuvent obtenir le statut de « réfugiés » dans le nouveau pays et peut-être y rester d’une façon permanente. En Afrique du Sud, il y beaucoup d’enfants non accompagnés provenant d’autre pays africains comme le Zimbabwe, le Mozambique, la RD du Congo et la Somalie. 96

Shaafi garde tout ce qu'il possède dans une petite valise. Il ouvre la valise cinq fois par jour pour y prendre son Coran et prier Allah. Il prie pour sa famille et pour son propre futur.

Shaafi calcule rapidement dans sa tête. « Trois » dit-il et il emballe soigneusement trois œufs dans un vieux journal. Shaafi dort sous l’étroit comptoir du magasin, où son matelas et ses couvertures sont repliés pendant la journée. Au coucher du soleil, il ferme la porte derrière lui et à son lever il l’ouvre. Pendant ces heures, Shaafi a trop peur d’aller aux toilettes, qui se

trouvent dans la cour. À côté de son lit, sur une étagère avec les boîtes de conserve, se trouve tout ce qu’il possède, sa valise. À l’intérieur, soigneusement pliés il y a quelques vêtements près de son Coran, qu’il utilise cinq fois par jour quand il prie Allah. Ses prières sont pour sa famille en Somalie, pour leur sécurité, son avenir en Afrique du Sud et plus parti-


culièrement pour aller à l’école. Maison bombardée

Qu’est-ce qui a amené Shaafi à travailler et à vivre dans un magasin de Mamelodi, une dangereuse banlieue de Tshwane en Afrique du Sud ? En septembre 2010, la maison de Shaafi, à Mogadiscio, la capitale de la Somalie a été bombardée. Son père a été tué et sa mère et ses frères, à la suite de la panique qui s’en est suivie, se sont sauvés dans des directions différentes. Un nombre incalculable de maisons ont été détruites ce jourlà et les soldats des armées militantes ont tué beaucoup de gens. Shaafi joignit un groupe de survivants qui fuyaient le massacre. Il a abandonné sa ville avec les seuls vêtements qu’il portait, ne sachant pas si sa mère était morte ou vivante. Pendant des semaines, Shaafi et les familles réfugiées ont voyagé en bateau et en voiture vers l’Afrique du Sud, avec l’espoir de faire leur vie dans ce pays. Ils ont traversé le Kenya, la Tanzanie, la Zambie et finalement le Zimbabwe. C’était un voyage dangereux. En Zambie, on leur a volé leur argent en ils ont dû passer plusieurs nuits dans les bois avant de rejoindre la frontière entre l’Afrique du Sud et le Zimbabwe. Là, ils ont déclaré aux garde-frontières qu’ils cherchaient asile et ont

Shaafi Daahir Abdulahi ,17 AIME : Lire le Coran et prier

pour la paix. DÉTESTE : La guerre. LE PIRE : Quand ma maison a été bombardée, mon père est mort et ma mère a disparu. LE MEILLEUR : Quand Ann Skelton m'a aidé à légaliser ma situation en Afrique du Sud pour que je ne sois plus arrêté. ADMIRE: Allah. DÉSIRE : Réussir ma vie. Fonder une famille et pouvoir la protéger. RÊVE DE : Retrouver ma mère.

demandé un permis afin d’obtenir un statut de réfugiés. On leur a donné un permis de transit pour 14 jours afin de leur permettre de se rendre au bureau de réfugiés le plus proche.

permis d’asile, on a refusé parce que j’étais un enfant. Ils m’ont dit d’aller au Département du Développement Social du gouvernement sud-africain. Je ne savais pas ce que c’était ni où le trouver. J’étais de plus en plus inquiet parce que mon permis de 14 jours allait prendre fin. Je devais trouver un endroit où vivre et travailler pour me nourrir » C’est alors que j’ai commencé à travailler pour le propriétaire du magasin somalien. J’ai appris l’anglais avec mes clients. Je cherchais une école et on m’a offert une place dans une école musulmane, mais je n’ai pas pu m’y inscrire parce que je n’avais pas de papiers qui prouvaient qui j’étais et ne pouvais payer les taxes scolaires » En décembre 2010, la police a fait une descente dans le

magasin et m’a demandé mon permis. Comme je ne parlais pas anglais, le propriétaire a expliqué que je ne pouvais pas obtenir de permis du fait que j’étais mineur. Le policier m’a arrêté et a dit que j’étais « illégal » et que si vraiment j’étais mineur, je ne devrais pas travailler. Le propriétaire lui a donné 30 rands et alors, le policier m’a relâché » « Les lois d’Ann » protègent

« Quelques semaines plus tard, il y a eu une autre descente de police, mais heureusement, cette fois encore, on ne m’a pas mis en prison. Mais la chance a pris fin quand un autre policier, dans la rue, a demandé à voir mon permis. On m’a arrêté et j’ai été malmené pendant près d’une heure dans le fourgon de police. On ne m’a relâché que quand un ami est venu au

Entre le coucher et le lever du soleil, Shaafi a trop peur de quitter le magasin où il s'est enfermé, même pour aller aux toilettes, qui se trouvent dans la cour du voisin. ­

Inquiet et arrêté

« Les adultes de mon groupe ont payé mon transport à Johannesburg et en retour, je leur ai porté leurs bagages » dit Shaafi. « Mais quand nous sommes arrivés et sommes allés au bureau des réfugiés pour faire ma demande d’un

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Quand il n'y a pas de clients, Shaafi joue avec des jeunes enfants devant le magasin.

poste de police et a payé 50 rands pour moi. Je vivais dans la peur et je n’avais aucune possibilité de me construire une vie ni même de penser à l’école. D’autres Somaliens m’ont conseillé de contacter les Lawyers for Human Rights et de leur demander de l’aide pour obtenir mon permis. Le juriste était gentil et m’a expliqué que le gouvernement sudafricain avait une loi qui protège les enfants réfugiés comme moi. Puis, ils m’ont emmené au Département du Développement Social. Les adultes qui travaillaient à cet endroit, ont refusé de m’aider

et ont dit qu’il n’y avait aucune loi qui les obligeait à aider des enfants réfugiés étrangers » Au Département du Développement Social on ne connaissait pas les lois de leur propre pays. L’Afrique du Sud a signé la Convention internationale relative aux Droits de l’Enfant qui reconnaît, aux enfants réfugiés, le droit de demander l’asile. Ann Skelton décida d’aider Shaafi. Elle savait que l’Afrique du Sud avait de nouvelles lois qui protégeaient les enfants, car elle avait pris une part importante dans l’élaboration de ces lois. Elle savait que Shaafi avait le droit d’aller à l’école, de se faire soigner à l’hôpital si nécessaire, et d’être protégé contre le harcèlement de la part de la police et d’autres adultes. À la Haute Cour

Shaafi et Ann portèrent le cas devant la Haute Cour de jus-

tice. Le juge ordonna au Département du Développement Social de se présenter devant le tribunal. Alors, tous ceux qui avaient refusé de l’aider écouteraient le récit de Shaafi. Voici ce que réclamèrent Ann et Shaafi à la Haute Cour : • Donner immédiatement à Shaafi son permis de demandeur d’asile, ce qui

prouve qui il est et lui garantit ses droits légaux. • Déclarer que tous les enfants réfugiés, sans parents doivent recevoir le même permis. • Ordonner au Département du Développement Social de faire une liste de tous les enfants réfugiés sans parents et faire un plan pour eux afin qu’ils fassent valoir leurs droits. Shaafi est « légal »

Shaafi maintenant est une personne « légale » mais son permis ne le protège pas de la xénophobie de ces gens qui ne l’aiment pas pour la simple raison qu’il vient d’un autre pays ou d’une autre religion. Mais son permis, donne à Ann les moyens de l’aider à faire des plans pour son avenir.

Voici la vue que Shaafi a depuis le petit magasin où il reste pratiquement enfermé 24 heures sur 24.

C’est dur de vivre loin de chez soi « J’avais huit ans quand les soldats du Mouvement Mai Mai m’ont enlevé à mon école. Avant, je vivais avec ma mère à Bukavu, la partie occidentale de la République démocratique du Congo. Beaucoup d’autres garçons ont été enlevés ailleurs, mais au même moment que moi et on leur a appris à utiliser des 98

armes. Après quelque temps, j’ai réussi à m’enfuir avec quatre de mes amis. Nous avons traversé plusieurs pays, nous arrêtant ici et là. Je connais bien la carte de l’Afrique ! Finalement, je suis arrivé en Afrique du Sud où on m’a aidé. J’ai un endroit où vivre et on paie mes taxes scolaires et mes frais de

transport. Certains SudAfricains n’aiment pas les étrangers et quelquefois les étrangers sont agressés à cause de cette xénophobie. A ce moment-là, j’ai eu peur de sortir et pendant un mois, je ne suis pas retourné à l’école parce que j’avais peur de prendre le train. Mais j’ai raconté tout cela aux enfants

de mon école, parce que je veux que les autres enfants comprennent que pour un enfant séparé de sa famille, de son foyer, les choses ne sont pas faciles. Il me reste une année d’école après celle-ci. Quand j’aurai terminé, je voudrais étudier la politique internationale » Joshua Masudi, 17 ans


Shaafi a aujourd’hui un permis de demandeur d’asile. Mais ce n’est pas suffisant. Par une froide après-midi d’hiver, Ann Skelton se rend en voiture dans la banlieue Mamelodi où Shaafi travaille. Elle risque non seulement d’être agressée, mais la vie en se trouvant avec lui près du comptoir du magasin, en recherchant quels sont les désirs de Shaafi pour son futur. Elle veut l’aider à se construire une vie et à réaliser ses rêves. « Il faut que je te dise quelque chose » lui dit-il « Je viens de rencontrer un autre garçon qui s’est sauvé de la même ville que moi en Somalie où la guerre continue. Il m’a dit que mon petit frère est vivant. Les soldats l’ont enlevé pour en faire un soldat comme eux et l’utiliser dans leur guerre. Il a dit que

TE X TE: MARLENE WINBERG PHOTO: SATSIRI WINBERG

personne n’a de nouvelles de ma mère » Respectez ma religion

« Shaafi, maintenant que tes droits ont été reconnus en Afrique du Sud, veux-tu que je trouve un foyer sécurisé pour enfants et une école que tu peux suivre ? » demande Ann. Shaafi n’a pas besoin de réfléchir pour donner sa réponse. « Je veux aller à l’école, mais pas dans un foyer » « Pourquoi est-ce que tu ne veux pas aller dans un foyer sécurisé ? s’enquiert Ann. « Ils ne me laisseraient pas prier cinq fois par jour et respecter ma religion. Ma culture est différente et les autres enfants se moqueraient de moi et me harcèleraient, comme ils le font ici » Ann acquiesce, elle comprend. Beaucoup d’adultes lui ont dit qu’il est ingrat et qu’il

« Je ne veux pas aller dans un foyer pour enfants parce qu'on ne respecterait pas ma religion et les autres enfants se moqueraient de moi » dit Shaafi.

devrait aller où on lui dit d’aller. Mais Ann écoute. Elle sait que la liberté de religion est un droit fondamental de l’être humain et que les enfants sont des êtres humains. Elle est investie d’une nouvelle mission. Elle pense créer un foyer spécialement pour enfants réfugiés, où des

La xénophobie et le racisme poussent les gens à maltraiter leurs frères humains « Xéno » signifie étranger « phobie » signifie peur, ainsi le mot xénophobie signifie littéralement « peur des étrangers » Pourquoi avoir peur des étrangers qui sont des êtres humains comme nous ? Dans certains pays, surtout où il y beaucoup de pauvres, on a peur que les étrangers qui viennent s’établir chez

Ann Skelton demande à Shaafi ce qu'il veut faire, maintenant que ses droits ont été reconnus en Afrique du Sud.

eux, auront le travail et autres avantages, comme l’éducation, à leur place. Parfois, les personnes qui ont peur des étrangers utilisent des moyens violents pour essayer de forcer les étrangers à partir – ils les menacent, leur font du mal ou exigent qu’ils leur donnent ce qu’ils ont, et parfois aussi, ils les tuent.

Ceci fait très peur aux étrangers, y compris les enfants étrangers. Souvent ils ne peuvent retourner dans leur pays parce qu’il y a la guerre ou d’autres événements qui mettraient leur vie en danger. La xénophobie peut développer le racisme.

enfants comme Shaafi, se sentiraient libres d’être fidèles à la culture de leur famille, sans endurer la peur ou les discriminations. 

ho p o n e X m Racis

Dites ce que vous pensez de la xénophobie et du racisme

Avez-vous fait l’expérience d’attitudes xénophobes ou racistes ? Racontez votre histoire et vos pensées concernant le fait de maltraiter « les autres » au Prix des Enfants du Monde.

Badly

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treate d


Le cas d’Ann a changé la loi pour tous les enfants d’Afrique du Sud

L

a Cour Constitutionnelle d’Afrique du Sud est une instance très importante, car elle peut décider si une loi respecte les droits de la constitution de l’Afrique du Sud. La constitution est la loi la plus importante du pays et d’autres lois ou actions des gens ne peuvent aller à son encontre. Toute personne dont les droits sont violés peut porter le cas au tribunal, même les enfants pour autant que quelqu’un les assiste. L’un des cas qu’Ann porta devant la Cour constitutionnelle au nom de tous les enfants d’Afrique du Sud, concernait une loi qui permettait qu’on emprisonne un enfant pour un temps très long, y compris l’emprisonnement à vie. La Constitution dit que détenir des enfants en prison doit être une mesure du tout dernier ressort et qu’une cour doit toujours trouver un autre moyen de sanction et ceci pour le temps le plus court possible. La Cour constitutionnelle trouva que la loi permettant des condamnations longues et la prison à vie allait à l’encontre des droits de l’enfant et ordonna qu’elle soit retirée des manuels juridiques. Les enfants ne peuvent plus être condamnés à la prison à vie. Ce cas important a changé la loi pour tous les enfants d’Afrique du Sud, parce que tous les juges dans tous les tribunaux du pays doivent suivre ce qui est dit par la Cour constitutionnelle.

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Enfants emp Quand Nelson Mandela devint président en 1994, il y avait beaucoup d’enfants dans les prisons d’Afrique du Sud. Le gouvernement de Mandela demanda à Ann Skelton de développer un système judiciaire nouveau pour les enfants. En 2010, le Child Justice Act entra en vigueur, développé par un comité dirigé par Ann. La loi met l’accent sur les besoins de soins et de réhabilitation des mineurs délinquants plutôt que sur la punition. La plupart des enfants qui ont des problèmes avec la justice en Afrique du Sud vont dans des dispensaires pour enfants où ils reçoivent une thérapie appropriée et où il y a des classes et des ateliers pour l’enseignement de l’art, menuiserie, soudage, plomberie, tapisserie et sport. Quatre garçons au centre Horizon BOSASA de la Cité du Cap racontent comment ils sont tombés dans la délinquance et quels sont leurs rêves pour le futur.

Michael

Le visage souriant c’est celui de Dominique saluant sa mère.

La meilleure des mères « J’ai eu une enfance heureuse avec la mère que chaque garçon désirerait avoir. Quand j’avais deux mois, ma mère a divorcé parce que mon père se droguait. Je n’ai pas vu mon père avant l’âge de cinq ans. Jusqu’à l’âge de 15 ans, ma vie était sans histoires, mais un jour un ami m’a fait prendre de la drogue. J’en suis rapidement devenu accro et j’ai commencé à voler. Ma mère a remarqué que des choses disparaissaient et que je maigrissais et ne mangeais pas beaucoup. Alors, une nuit elle m’a demandé « Dominique, est-ce que tu te drogues ? » J’ai répondu, « T’es folle ? » Ma mère m’a placé dans un home pour enfants drogués. J’y suis resté à peu près une semaine. Puis j’ai volé un laptop et me suis retrouvé en détention. C’est pour cela que je suis à BOSASA. Je suis un programme qui m’aide à me sortir de ma dépendance. Les adultes ici sont gentils avec nous, mais je veux retourner à la maison. Je veux me libérer de la drogue et, plus tard, devenir un conservateur de la nature. C’est ma façon de dire à ma mère à quel point je regrette de lui avoir fait du mal » Dominique


risonnés

J’ai fait les mauvais choix « J’avais trois ans quand ma mère et mon père ont commencé à boire et à me battre. Une assistante sociale m’a emmené au foyer d’enfants, où je suis resté jusqu’à l’âge de sept ans. Puis ils m’ont placé dans une famille d’accueil. J’y suis resté une année et puis je me suis sauvé parce qu’ils se moquaient de moi. Puis, à neuf ans, j’ai été place dans une autre famille d’accueil. Je me suis beaucoup battu parce que quand ils me demandaient si j’avais de vrais parents, ils riaient. C’est pour cela que je me mettais en colère et que j’ai commencé à me battre. À 12 ans, j’ai voulu savoir où étaient mes parents. J’étais très agressif. C’est pour ça qu’ils m’ont envoyé dans un autre endroit très loin. Un jour, j’ai demandé un peu d’argent à mes parents d’accueil et ils m’ont insulté. Je me suis sauvé et j’ai commencé à m’introduire dans les maisons et à voler des objets. On m’a arrêté et condamné à six mois de prison. Après, j’ai encore volé et en 2010, j’ai été condamné à deux ans de prison. Je ne suis pas fier de ce que j’ai fait. J’ai fait les mauvais choix dans la vie. C’est pour ça que je veux que quelqu’un m’aide à ne plus voler dans les maisons » Michael

Pardon, maman « Ma mère et mon père étaient divorcés depuis longtemps. Papa s’est remarié et a des enfants avec sa femme. Il ne s’occupe pas de moi et ma mère travaille seule pour moi et ma sœur. Je suis allé à l’école jusqu’à la neuvième, puis j’ai commencé à prendre de la drogue avec mes amis. Ce qui a foutu en l’air toute ma vie. On a commencé à voler pour payer nos drogues. J’ai été arrête pour vol avec effraction. Le tribunal, m’a envoyé à la prison Pollsmoor pour quatre semaines, mais quand je suis de nouveau passé devant le tribunal, ils m’ont envoyé à BOSASA. J’espère que la prochaine fois que j’irai au tribunal, on m’enverra à la maison. Si je suis condamné, ils m’enverront de nouveau à la prison Pollsmoor, parce que j’aurai plus de 18 ans et je ne serai plus un enfant. J’aimerai dire à ma mère qui a tant travaillé pour payer mes taxes scolaires, que je regrette. Si j’ai la chance de ne pas être condamné, je vais finir l’école et travailler pour devenir mécanicien sur voitures » Kevin

Les garçons écrivent l’histoire de leur vie.

« Mon père est mort dans un accident de moto quand j’avais sept ans. Ma mère était aussi sur la moto et à cause de l’accident, elle ne peut plus travailler. Alors on s’est battus à la maison pour survivre. Ma famille est tout pour moi. J’ai eu de mauvaises fréquentations et j’ai fini dans la rue à essayer de trouver de l’argent pour mes problèmes de drogue. Je ne suis plus allé à l’école. On m’a arrêté parce que je m’étais fâché avec ma mère et que je me suis enfoncé dans la drogue. Je l’ai frappée à l’épaule et je lui ai fait mal. Elle m’a dénoncé à la police parce qu’elle disait que je devais apprendre que ce que j’avais fait était mal. Ma mère a dit qu’elle retirerait la plainte si je faisais des efforts. Le tribunal m’a envoyé à BOSASA où je me trouve maintenant et je suis un programme de gestion de la colère ce qui m’aide dans mon besoin de drogue. Mon rêve est de terminer l’école et d’être soudeur sur une plateforme pétrolière et d’avoir une belle maison et une voiture » Brandon

TE X TE: MARLENE WINBERG PHOTO: SATSIRI WINBERG

Ma famille est tout pour moi

Kevin

Brandon

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TE X TE: MARLENE WINBERG PHOTO: SATSIRI WINBERG

Pas d’école pour

Le cas d’Ann a rapporté des milliards aux écoles en boue

Zinathi est élève de la Tembani Junior Primary, l’une parmi les nombreuses écoles en boue d’Afrique du Sud. Quand il a plu, Zinathi et ses camarades de classe doivent utiliser une planche posée comme un petit pont pour entrer dans leur classe. « Comme mon rêve de changer notre vie dépend du fait d’aller à l’école, cela me fait de la peine quand on ne peut pas y aller » dit Zinathi. Elle espère que cela s’améliorera maintenant que son école est l’une de celles que le gouvernement d’Afrique du Sud a promis de remplacer.

L

e cas des « écoles en boue » commença avec sept écoles primaires dans la province du Cap-oriental en Afrique du Sud, dépourvues des équipements les plus élémentaires qu’on pouvait attendre d’une école. Les bâtiments sont fait en boue, il n’y a pas d’eau courante et les enfants n’ont pas assez de bancs et de chaises. L’école de Zinathi, la Tembeni Junior Primary, est l’une de ces écoles. Elle compte 220 élèves qui se partagent 53 bancs et dans certaines classes on ne trouve pas une seule chaise. Dans une autre école, la Nomandla Senior Primary, les enfants utilisent le dos de leur camarade de classe comme surface d’écriture, car il n’y a pas de banc. Les parents et les enfants de cette école ont décidé d’aller au tribunal (aidés par leurs juristes du Legal Resources Centre) pour exiger que leurs écoles soient mises en état, avec eau courante et assez de bancs et de chaises. Ann écrivit un affidavit (une affirmation que l’on dit la vérité) pour le tribunal. Elle y déclara que son organisation, le Centre for Child Law, soutenait les requêtes des parents et des enfants des sept écoles primaires, mais aussi que le problème était bien plus grand. Elle releva qu’il y avait beaucoup d’autres d’écoles dans toute l’Afrique du Sud, construites en boue et qui n’avaient pas assez de bancs et de chaises. L’importance du Centre for Child Law qui joignit les plaignants, c’est qu’ils représentaient les enfants de toute l’Afrique du Sud dans la même situation que celle des sept écoles. Ce qui signifiait que le gouvernement ne pouvait résoudre le problème seulement dans les sept écoles. Le résultat de ce cas, fut que le gouvernement d’Afrique du Sud s’engagea par écrit, dans les trois années suivantes, à réparer les écoles en boue du pays et à faire en sorte que toutes aient l’eau courante et assez de bancs et de chaises. Il promit de dépenser 84 millions de rands (USD 11,5 millions) pour les sept écoles, et un total de 8,2 milliards de rands (USD 1,2 milliards) afin de remplacer toutes les écoles en boue d’Afrique du Sud.

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7h00

Zinathi se lève, quitte sa natte en roseaux et se lave dans un baquet d’eau.


Zinathi quand il pleut Z

inathi est assise près du feu qui réchauffe la maison familiale dans le petit village de Ngqeleni. Elle regarde les étincelles se dégager des flammes et se mélanger à la fumée qui s’élève vers le petit trou dans le toit en herbe de son foyer. Dehors, il pleut à verses. Zinathi et ses amis ne peuvent pas aller à l’école aujourd’hui parce que les rues

7h30 am

sont très boueuses et d’ailleurs, l’école est à quatre kilomètres de marche. Ils seraient complètement trempés en arrivant. Enlever l’eau

« Quand nous arrivons à l’école après qu’il a plu comme ça, nous devons enlever l’eau de la classe avant de pouvoir étudier. Nous prenons quelques planches que

L’apartheid a détruit les forêts L

es forêts autour du village où vit Zinathi sont en danger. Cette zone était un bantoustan du nom de Transkei jusqu’à l’abolition de l’apartheid en 1994. Des milliers de personnes vivaient sur un petit territoire qui s’en trouva hyper exploité par le bétail et l’élevage. Ici, les gens sont très pauvres et ne peuvent compter que sur les petites forêts qui restent pour le bois de chauffage, l’eau et le pâturage. Mais partout ailleurs dans la province du Cap-oriental, le gouvernement a lancé des programmes afin de protéger les étendues sauvages et créé des parcs de jeux dans le but de sauvegarder les ressources naturelles.

Zinathi va à l’école avec son amie, Amanda Puzi. C’est loin, quatre kilomètres de marche aller et retour. « Ça nous maintient en forme ! » dit Zinathi.

8h00 Zinathi et Amanda se mettent en file avec les autres enfants de l’école et entrent dans leur salle de classe en boue où elles étudient jusqu’à 14 heures.

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16h00

Zinathi va chercher de l’eau et du bois dans la forêt. Quand elle arrive à la rivière, elle lave ses vêtements dans un baquet.

15h00

Zinathi rentre et mange un peu de porridge en puisant dans la marmite qui est encore sur le feu. Aujourd’hui elle peut ajouter du sucre et du citron – un régal !

nous utilisons comme bancs pour faire un petit pont devant la porte de la classe. Notre école est faite en boue et n’a ni fenêtres ni portes et les gouttes tombent sur nos livres. C’est difficile d’apprendre dans la classe, même quand il ne pleut pas » Zinathi est frustrée de ne pas pouvoir aller à l’école, mais elle a beaucoup de travail qu’elle doit rattraper dans la propriété familiale. C’est à elle de tenir à jour la fourniture de farine de mealie-meal (maïs) de la famille, une tâche qui prend du temps. Il faut que ça change

Il ne pleut presque plus et Zinathi peut allumer le feu à l’extérieur pour cuisiner. Quand l’eau dans le pot noir bout, elle verse quelques tasses de son mealie-meal frais moulu, dans l’eau

chaude, remue et le laisse cuire à peu près une heure. Sa mère vient de recevoir du sucre d’un ami. Et en y ajoutant le jus d’un citron pressé, le porridge aura aujourd’hui, un délicieux goût aigre-doux. En attendant, Zinathi tisse la natte qu’elle est en train de faire avec les roseaux qu’elle cueille à la rivière. Elle dort sur une natte en roseaux sur le sol en terre battue dans la chambre à coucher de leur maison familiale. Mais Zinathi en a assez de manger du mealie tous les jours et de dormir sur une natte en roseaux sur le sol. Elle veut sortir sa famille de la pauvreté. « Je veux aller à l’école, avoir de bonnes notes et devenir policière. Je sais que d’aller à l’école m’aidera un jour à me sortir de la vie que nous vivons. Je ne veux pas manger du mealie tous les soirs. Je veux aussi dormir dans un lit, sur un oreiller moelleux, ce que font d’autres enfants du village. Avec mon premier salaire de policière, j’achèterai un frigo, comme celui de mes voisins, et je mettrai dedans de la viande et des légumes » Vol et abus

Assister sa famille n’est pas la seule raison pour laquelle Zinathi veut être policière quand elle finira l’école. « Il y a beaucoup de gens 104

dans ce village qui ne travaillent pas et volent les autres » dit-elle. « Je veux changer cela. Mon rêve est d’être policière quand je serai grande, pour protéger ma famille et mon voisinage » Il n’y a pas longtemps, dans un village voisin, l’amie de

Zinathi Ngxokagi, 12 AIME : Avoir assez de nourriture avec de la viande pour moi et ma famille. DÉTESTE : Le crime. LE PIRE : Quand mon amie a été violée dans notre voisinage. Plus personne n’est en sécurité. LE MEILLEUR : La nouvelle salle de classe avec des fenêtres, un toit et beaucoup de chaises. ADMIRE : Nelson Mandela. VEUT ÊTRE : Policière, ainsi je pourrai arrêter les criminels. RÊVE DE : Être en sécurité dans mon voisinage. D’une nouvelle robe verte.


Les amis de Zinathi

Zinathi tisse sa natte de couchage et un panier. Elle connaît si bien cette forme de tissage qu’elle peut le faire les yeux fermés. C’est un travail artisanal traditionnel qu’elle pratique depuis qu’elle est toute petite.

17h00

Encore quelque tâches ménagères. Zinathi broie le maïs pour en faire de la farine pour le porridge. Elle ramasse quelques poignées de tiges de mealie séchées et les met dans la pierre à broyer de sa grand-mère.

« J’aime jouer au football. Je n’aime pas les harcèlements à l’école. Je veux être riche plus tard pour pouvoir offrir une bonne nourriture à ma famille et aussi une maison et une voiture » Magwenqana Masithebe, 12 « J’aime les jeux. Je n’aime pas les crimes parce que ça fait du mal aux gens. Je veux être une star de la télé » Emihle Sawulisi, 12

Lave les uniformes scolaires Quand il pleut, les uniformes scolaires se salissent facilement sur le long chemin qui mène à l’école. Zinathi l’a lavé comme il faut.

« J’aime conduire une voiture. Je hais la violence dans mon village et je veux être ensei­gnante pour aider les gens à devenir quelqu’un » Nelisa Sonyaka, 11

La nouvelle école !

L’emménagement de la nouvelle école est bientôt terminé. Zinathi nettoie les alentours.

TE X TE: MARLENE WINBERG PHOTO: SATSIRI WINBERG

« J’aime jouer au football. Je n’aime pas l’école. Je veux vivre dans une maison en briques avec des fenêtres et je veux conduire une voiture » John Asiphe, 13

Zinathi a été agressée par un homme dans la forêt près de leur propriété. Depuis, les filles ont peur de s’éloigner de leur maison. Pourtant, elles doivent aller par groupes dans la forêt presque chaque jour car ils dépendent des arbres pour se chauffer et de la rivière pour l’eau pour boire et pour laver. Il n’y a pas de magasins dans le village de Zinathi, les gens dépendent des ressources naturelles pour survivre. « C’est pour cela que je n’aime pas quand je ne peux pas aller à l’école. Mon rêve de changer notre vie dépend du fait qu’on va à l’école. Je ne peux entrer à l’école de police que si j’ai de bonnes notes » 

« J’aime regarder la télé. Je n’aime pas la pauvreté et le crime dans mon voisinage. Je veux étudier et devenir infirmière » Amanda Puzi, 12

21h00

Zinathi dort sur le sol, sur sa natte en roseaux.

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Un rap pour l’Ange de Wonder Wonder Machethe avait dix ans quand il commença à fuguer. À douze ans on l’enferma dans un foyer pour enfants, où les garçons auraient dû recevoir de l’amour, une bonne éducation et une vie décente. Au lieu de cela Wonder vivait dans la peur et quand il pleuvait son lit était trempé. Quand Ann Skelton arriva dans la vie de Wonder, elle fit ce qu’elle faisait depuis des années en aidant beaucoup d’enfants à présenter leur cas devant un tribunal. Elle porta le foyer pour enfants devant le tribunal supérieur de région et gagna. Le juge dit : « Nous trahissons les enfants » et ordonna au foyer de changer et de devenir un bon endroit pour les enfants. Depuis, la décision de la cour doit être appliquée par les foyers pour enfants dans tout le pays.

J

« e ne supportais pas la violence à la maison. Nous partagions une maison avec d’autres familles et certaines étaient très pauvres, comme nous. Il y avait toujours quelqu’un qui criait, buvait

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ou était sous l’effet de la drogue, se disputant avec sa femme ou ses enfants. J’avais souvent peur et un jour j’ai tout simplement ouvert la


Ann s’occupe du cas

porte et je me suis sauvé. Je ne savais pas où j’allais, mais je me suis retrouvé à l’extérieur de la ville. Je savais que mon oncle vivait dans la province de Limpopo dans un petit village et je me suis dit que je pourrais essayer de trouver son adresse. Il m’a fallu des jours, mais finalement je l’ai trouvée. Quand je suis arrivé chez lui, il m’a reçu gentiment, mais m’a dit que je devais retourner à la maison, chez mes parents et il m’a mis dans un bus. Je suis retourné à Johannesburg, mais très vite, j’en ai eu de nouveau assez du harcèlement à l’école et de la violence à la maison et je suis reparti. J’ai beaucoup rôdé et une nuit j’ai dormi dans les toilettes de la gare de Johannesburg où un agent de sécurité m’a trouvé le lendemain matin à la première heure. Il m’a remis à la police parce que je n’étais pas censé dormir là »

on l’enfermait dans une cellule pour trois semaines, mais il en ressortait pire qu’avant » C’était un endroit où la police et l’état enfermaient les enfants dont les parents ne s’occupaient pas. Ils l’appelaient école des métiers parce que nous étions censés apprendre un métier comme le soudage ou la menuiserie ou la mécanique sur voiture. Mais nous n’avons rien appris de tout ça » J’étais bon élève à l’école et j’aimais beaucoup mon sport. Je jouais au foot et j’ai rejoint l’équipe. Ce qui m’a vraiment donné confiance et j’ai beaucoup aimé quand l’enseignant de sport m’a invité chez lui un samedi après-midi. Il est venu me chercher. Je lui ai dit comment je me sentais et que je voulais vraiment une chance dans la vie, que je voulais tra-

Ann Skelton trouva Wonder dans ce foyer alors qu’il avait 12 ans. Pour lui, elle est un ange. Ann se souvient très bien du jour où elle a rencontré Wonder. Il y a cinq ans de cela. Elle visitait le Luckhoff School of Industry afin de contrôler l’endroit, après avoir reçu un coup de téléphone anonyme qui lui avait parlé de la situation des enfants à l’école. Ann et Wonder pensent qu’il s’agit de l’enseignant de sport de Wonder qui l’a appelée peu de temps après que Wonder se soit confié à lui. « Je suis allée en inspection à l’école et je l’ai trouvée dans des conditions épouvantables. Les lits des enfants étaient mauvais, le toit était percé et quand il pleuvait, ils étaient mouillés. Les couvertures étaient minces et déchirées.

Les fenêtres étaient cassées et il n’y avait pas de sécurité autour de l’immeuble » Ann ne perdit pas de temps, elle porta la Luckhoff School au Tribunal supérieur de région. Les adultes de cette école d’état essayèrent de se défendre au tribunal en disant qu’ils n’avaient pas d’argent pour les couvertures. Mais, ils avaient de l’argent pour payer les frais du procès !

vailler dur pour faire du sport. Je lui ai dit que je me sentais en danger de tomber dans la drogue que les enfants faisaient passer à l’intérieur du foyer. Il m’a écouté et, pour la première fois de ma vie, j’ai senti qu’un adulte me comprenait »

TE X TE: MARLENE WINBERG PHOTO: SATSIRI WINBERG

Wonder avec ses deux sœurs Ashley, 12 ans et Robin, 10 ans. Ashley dit : « J’admire mon frère parce que il prend soin de moi, il m’aide. Il est allé dans une bonne école, il peut m’aider à faire mes devoirs et il me dit que l’école c’est la meilleure chose que je puisse faire pour préparer ma vie »

« Nous les trahissons »

Le juge déclara que la Luckhoff School violait les droits de l’enfant et les lois du pays. Il leur ordonna de donner immédiatement à chaque enfant un sac de couchage et de construire une barrière autour de l’école pour des raisons de sécurité. Il leur dit également de faire un plan par écrit pour chaque enfant pour qu’ils reçoivent les soins nécessaires de la part d’adultes qualifiés et de lui fournir un rapport quelques semaines plus tard faisant état des progrès. Il dit : « Quel message donnonsnous aux enfants quand nous leur disons qu’on doit les enlever à leurs parents parce qu’ils méritent d’être mieux Ann Skelton a rencontré Wonder dans un foyer pour enfants. Il avait alors douze ans.

S’est senti menacé

La fuite de Wonder prit fin. Il avait 12 ans quand on l’enferma dans un foyer pour enfants, appelé Luckhoff School. « C’était un endroit horrible. Il pleuvait dans nos lits et je me sentais tout le temps menacé par le directeur et sa femme. Ils n’en avaient rien à faire des enfants et nous punissaient sévèrement. Quand un enfant en blessait un autre à coups de couteau, 107


traités, et ensuite nous les négligeons ? Nous les trahissons et nous leur enseignons que ni la loi, ni les institutions d’état peuvent leur garantir leur protection » Ann dit qu’il ne suffit pas de faire de bonnes lois pour protéger les enfants. « Nous devons également enseigner ces lois aux adultes, comme nous avons fait à la Luckhoff School. Beaucoup d’adultes ne savent pas comment protéger et soutenir les enfants. On doit leur montrer la nouvelle façon de traiter les enfants avec douceur. Ce cas a changé la situation non seulement des enfants de la Luckhoff School, mais aussi de toutes les écoles de ce genre dans l’ensemble du pays » « Ma vie a changé »

Ann comprit que l’habilité de Wonder à bien travailler à l’école et ses talents de footballeur méritaient d’être encouragés. Elle invita un bienfaiteur à sponsoriser Wonder à la High School de Pretoria pour cinq ans. « Cela a changé ma vie » dit Wonder, « Pour la première fois, on me traitait avec respect et j’ai appris à avoir confiance dans un groupe de frères. Je vivais dans le logement de l’école et là, les enfants n’étaient pas punis avec violence, mais avec des mots et des conseils. Je suis devenu très bon au rugby et j’ai créé la meilleure équipe de l’école. J’ai fini l’école l’année passée et j’ai réussi mes examens ! » Ma mère a déménagé dans un meilleur endroit et je vis à la maison où je partage une chambre avec elle et mes sœurs. Mon expérience a également aidé mes sœurs plus jeunes, Ashley et Robin, parce que je peux les aider à faire leurs devoirs. Je leur parle et leur dit qu’elles doivent bien travailler pour se construire un meilleur futur » 

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Un rap pour A nn

Lorsque Wonder entendit qu’Ann avait été nominée au Prix des Enfants du Monde, il écrivit une chanson rap. Le rap, a-t-il dit, c’est comme de la poésie avec un rythme, avec un message qui peut exprimer ta passion et ta douleur. Tout petit j'ai traversé l'enfer pour arriver au paradis.

J’ai grandi comme un truand, mais ma vie a pris un autre tournant. Six ans après, tu es nominée au Prix des Enfants du Monde. Ton courage pour moi a été énorme, tu m’as fait voir l’amour sous un autre angle ! Je te jure que quand je t’ai vue la première fois, il y a six ans, tu avais l’air d’un ange. Tu m’as soulevé quand j’étais à terre, à mon tour de changer le cours de cette galère, tu m’as connu plein de pourquoi – qu’importe ce qui arrivera ce jour, ma gagnante à moi, ce sera toujours toi !

Quand Ann a porté le cas du foyer pour enfants, où se trouvait Wonder au Tribunal supérieur de région, elle l’a fait pour aider Wonder et les autres garçons, mais aussi pour aider les autres enfants dans tous les foyers pour enfants en Afrique du Sud. Ici Wonder écrit le rap à Ann, qu’il appelle ange.


À douze ans, Sarisa se retrouva au centre d’une affaire judiciaire entre ses parents divorcés. Ils n’étaient pas d’accord sur la façon de partager la garde de Sarisa et de sa sœur. Sarisa était malheureuse de ne pas pouvoir être entendue et elle a écrit une lettre au juge.

TE X TE: MARLENE WINBERG PHOTO: SATSIRI WINBERG

Ma voix doit être entendue

e aff aire pl iquée dans un im is su je et es J’ai 12 ans concernant m una l de région rib nt. T u fa a ’en e qu ir cia judi et en tant e n on rs pe e qu droits en tant oits parl er des dr que j’ai entendu is fo s. re n iè a em La pr et j’avais dix tait à l’école font partie de l’enf ant, c’é ts de l’enf ant oi dr s le e qu s J’ai appris éc laration de ion appel ée D s le rs ou uj de la constitut to s ne considère pa on t des is a on m i , qu ts ux oi dr rtie de ce pa nt isa fa e enfants comm droits. isavoir une ass ont le droit d’ s nt fa i est qu en s e n le rson Tous riste est une pe ju n U e. ider. iqu a rid us à vo tance ju dre les lois et en pr m co juste à in r révé le entra înée ridique peut se ju e ir a ff a e Parf ois un ne l’aide pas. , si le juriste pour un enfant égés oit d’ être prot nts ont le dr fa en nent s n le ie s nv ou T leur co ements qui ne it a tr s ma l. de du re e cont leur fair ut ce qui peut to re nt co et pas ciaidée, par dé ld Law m’a hi C r fo mon e de tr en té Le C manda oir un juriste av à e, mes ir e qu cia l pour sion judi te au tribuna en és pr re e x oi m choix, qui égés et mon ch aussi être prot fluencent droits puissent questions qui in s le nt a rn ce entendu con ma vie. Sarisa

A

nn Skelton, qui était la juriste de Sarisa, dit au juge que quand les parents divorcent, les enfants devraient être consultés concernant les décisions qui influencent leur vie, comme le temps qu’ils devront passer avec chacun de leurs parents. Ce qui fut déterminant pour Sarisa, parce que les juges l’écoutèrent et à la suite de cela, les adultes aussi. Mais cela fut déterminant pour beaucoup d’autres enfants,

parce que cela donna naissance à un processus qui prenait en compte les voix des enfants dans les cas de divorce des parents. Le cas de Sarisa était le premier en Afrique du Sud où un enfant concernant la bataille de la garde, avait son propre juriste pour l’aider. Le cas de Sarisa servit de précédent pour d’autres cas. Depuis, il n’est pas rare que les enfants aient une représentation juridique au tribunal.

« Les enfants ont droit à la parole dans les disputes sur la garde des enfants » déclare le journal Pretoria News après que le juge a accepté d’écouter Sarisa van Niekerk quand elle avait douze ans (elle en a aujourd’hui 19). Ses parents ne pouvaient se mettre d’accord sur la façon de partager la garde de Sarisa. Ann Skelton était la représentante juridique de Sarisa et c’était la première fois qu’un enfant en Afrique du Sud avait son propre juriste pour l’assister dans cette matière.

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Qu’est-ce que la Conférence de Presse Deux fois par année, toi et tes amis, pouvez organiser une Conférence de Presse des Enfants du Monde. Au moment de présenter les nominés et au moment de la communication du résultat du Vote Mondial. Les enfants seuls ont droit à la parole ! Aucune personne de plus de 18 ans ne sera sur scène. Voici comment faire : • Donnez une conférence de presse à l’école ou dans l’immeuble le plus important de la ville, pour démontrer l’importance des enfants et de leurs opinions. • Invitez les médias à temps. Envoyez les invitations, mais téléphonez ou passez aussi dans les rédactions. Lancez un rappel à toutes les réda­ ctions, le jour avant la confé­ rence de presse ! • Commencez et terminez la conférence de presse avec musique, danses et chan­ sons. • Introduisez la conférence en informant les journalistes sur les droits de l’enfant dans votre pays et dites quelles Cuzco, Pérou.

Bukavu, RD Congo.

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Yolanda Torres Faús, Carlos Alberto Sánchez Tovar, María Diez de Sollano González Cosío, Helena Tatei González Villa, Andrés de la Peña Subacius, Romina Lazo Beltrán, Kevin Alan Martínez Virgen et Bruno Araujo Garnica ont conduit la Conférence de Presse des Enfants du Monde à Jalisco, Mexique.

sont les améliorations que vous exigez afin que les droits de l’enfant soient res­ pectés. Vous pouvez égale­ ment, au préalable, poser des questions concernant les droits de l’enfant à vos politiciens et présenter le résultat lors de la conférence de presse. • Montrez de préférence la vidéo que vous pouvez com­ mander. • Annoncez le nom des trois candidats finalistes ou le résultat du Vote Mondial. • Avant de terminer, distribuez aux journalistes le communi­ qué de presse du Prix des

Enfants du Monde. Donnezleur aussi la feuille d’infor­ mations sur les droits de l’enfant dans votre pays. • Envoyez en Suède les coupures de presse et une liste des stations de radio et de télévision qui ont couvert l’événement et ont parlé du Prix des Enfants du Monde. En Suède et en Inde, se tient chaque année une Conférence de Presse des Enfants du Monde dans 50 villes. En Suède, il y a eu, en un seul jour, entre journaux, radio, télévision et web, jusqu’à 270 publications.

Enfants réfugiés de Birmanie, Mae Sot, Thaïlande.

Vous trouverez sur www. worldschildrenprize.org : Des modèles d’invitations et des questions à poser aux politiciens, des données sur les droits de l’enfant, des idées de manuscrits ainsi que la possibilité de commander une vidéo. Sur le site web, il y a aussi des photos que les journalistes peuvent télé­ charger. Si vous êtes plusieurs écoles Amies Universelles du Prix des Enfants du Monde à invi­ ter les mêmes médias, nous vous conseillons de donner la conférence de presse en commun. Un représentant par école prendra alors place sur scène.


des Enfants du Monde ?

Merci avec la statuette de Murhabazi Un artisan créa, à partir d’un dessin fait par des enfants de Jalisco, représentant Murhabazi Namegabe, lauréat du prix des enfants 2011, des statuettes-Murhabazi. Lors de la cérémonie de clôture, les enfants distribuèrent les « Murhabazi » à ceux qui ont rendu possible le programme du Prix des Enfants du Monde et le Vote Mondial à Jalisco.

Conférence de Presse et cérémonie au Mexique – Les droits de l’enfant c’est très important. On doit les respecter et les prendre au sérieux. Ce n’est pas comme un jeu où on fait semblant, dit María de Sollano Gonzalez Cosio, 12 ans, l’un des enfants qui a ouvert la conférence de presse à Jalisco, au Mexique. Les enfants qui ont présenté la conférence de presse, ont également conduit la cérémonie de clôture du Prix des Enfants du Monde à Jalisco. Les en­fants ont parlé des droits, distribué les statuettesMurhabazi et peint leur visage aux couleurs du drapeau de plusieurs pays. Les enfants qui ont présenté la conférence de presse du Prix des Enfants du Monde à Jalisco venaient de plusieurs écoles et avaient été choisis

par leurs camarades d’école. Ils ont appris ce qu’est le tra­ vail de journaliste, ont écrit leur communiqué pour la confé­ rence de presse, après s’être exercés dans leur famille. On était nerveux en présentant la conférence de presse, mais tout le monde est fier de l’avoir fait. Andrés de la Peña Subacius, 12 ans, raconte qu’un homme a mis en doute les droits de l’enfant pendant la conférence de presse. – L’un de nous a répondu: « Quelle que soit la situation, les enfants ont des droits. Tu n’as pas à les conquérir, ils sont là tout le temps, depuis le moment où tu viens au monde ! » L’homme ne nous écoutait pas, alors tous les directeurs d’école se sont levés pour nous montrer leur soutien. Les droits de l’enfant au Mexique – Ici, les violations courantes

des droits de l’enfant sont que les enfants ne vont pas à l’école, ne reçoivent pas de soins, ne sont pas enregistrés à la naissance, et sont vic­ times de violence. Il y a des millions de mexicains adultes qui ne connaissent ni ne res­ pectent les droits de l’enfant. Beaucoup d’entre eux, sont des décideurs, dit Romina Beltrán Lazo, 12 ans. – Connaître les droits de l’enfant est un premier pas pour les faire respecter. Dans notre école, on respecte les droits de l’enfant. Nos ensei­ gnants nous traitent comme des êtres intelligents. Si nous faisons des erreurs, ils nous traitent avec respect. Ils nous apprennent quels sont nos droits et nous incitent à les promouvoir. Nous pouvons toujours dire ce que nous pen­ sons et pouvons exposer nos opinions. Nous devons consti­ tuer une société où on prend soin les uns des autres, nous

devons apprendre aux enfants quels sont leurs droits et faire des lois qui seront suivies, dit Romina. Une expérience fantastique – Mes tantes qui vivent à Mexico et à Oaxaca, ont beaucoup aimé notre Vote Mondial et moi, j’ai essayé de faire connaître à ces endroits le Prix des Enfants du Monde. C’est un programme fantastique qui m’a fait vivre quelque chose d’exceptionnel, dit María. Danse avec des visages aux couleurs de drapeaux.

Peintures murales sur le Vote Mondial.

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Au cours de la cérémonie de remise des prix, Aung San Suu Kyi de Birmanie, la célèbre combattante de la démocratie et Prix Nobel de la Paix, est devenue Amie Adulte Honoraire et marraine du Prix des Enfants du Monde. Aung San Suu Kyi a été, lors des dernières 21 années, consignée plusieurs fois à domicile pour une période totale de 15 ans. Sa dernière détention a pris fin au mois de novembre 2010.

B

ien qu’elle soit libérée Aung San Suu Kyi ne peut toujours pas quitter son pays. C’est la raison pour laquelle, la Reine Silvia a remis symboliquement le globe en cristal, signe qu’elle est désormais Amie Adulte Honoraire du Prix des Enfants du Monde, à un enfant birman. Aung San Suu Kyi a participé à la cérémonie par la présence d’une grande photo et une salutation par vidéo.

La combattante de la démocratie Aung San Suu Kyi, nouvelle marraine

Beaucoup d’enfants pauvres

Participe au Prix des Enfants du Monde

Grâce à ses importantes ressources naturelles, la Birmanie était une fois le pays le plus riche de l’Asie du Sud-Est. Mais, si les généraux qui gouvernent la Birmanie, depuis qu’ils ont pris le pouvoir par un coup d’état, se sont enrichis, une grande partie des habitants de la Birmanie, vit en extrême pauvreté. Au cours des ans, beaucoup de birmans qui ont protesté contre l’oppression, ont été tués ou emprisonnés.

Depuis plusieurs années, plusieurs milliers d’écoliers en Birmanie, participent au Prix des Enfants du Monde et organisent le Vote Mondial, dans les règles de la démo­ cratie. Le Globe en langue anglaise est introduit dans le pays clandestinement avec les traductions en karen et en birman et les enfants les utilisent afin d’apprendre les droits de l’enfant et s’instruire sur les actions des candidats en faveur des enfants.

– Je ne savais pas ce que je pouvais vous dire en tant qu’Amie Adulte Honoraire, au nom des enfants, alors je le leur ai demandé. Beaucoup d’enfants en Birmanie sont si pauvres, que le droit le plus important est le droit à la vie, dit Aung San Suu Kyi dans son discours, retransmis par vidéo.

Des enfants en Birmanie participent au Prix des Enfants du Monde.

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Ex trait de la lettr e de Aung San Su u Kyi au Prix de Enfant s du Mon s de :

Naturell ement, c’e st un honneur et un pl aisir pour mo Adulte Honorair i d’ê tre Amie e du Prix des En fants du Monde de l’Enf ant. N’hés pour les Droits itez pas à me dir e si je peux faire pour promouvoir quoi que ce soit le remarquable tra vail que vous faite enfants dans le s en faveur des monde entier. À présent que je ne suis pl us déten ue, j’espère pouvoir vos activités. Comm participer à e vous le savez, les enfants de Bi souff rent du manq rmanie ue de soins médic aux et des possibil Tout ce qui peut êt ités d’éducation. re fait pour améli orer leur situation, capacité et la vo leur off rir la lonté de faire fa ce aux défis du fut immense cadeau ur serait un pour mon pays. Je me réjouis d’une col laboration proc he et fructueuse av ec vous » Cordia les sa lutat ions

Les membres du jury Brianna Audinett, Mofat Maninga, Hamoodi Mohamad et Gabatshwane Gumede écoutent les salutations que Aung San Suu Kyi adresse aux personnes présentes à la cérémonie.


CLÔTURE ET CÉRÉMONIE – Bienvenue au château de Gripsholm à Mariefred en Suède et à la cérémonie de remise des prix du Prix des Enfants du Monde, déclare Lisa Bonongwe du Zimbabwe et membre du jury. Sur la scène derrière elle, se tiennent les autres membres du jury. Toutes les écoles qui ont participé au programme du Prix des Enfants du Monde ont la possibilité d’organiser leur propre cérémonie de clôture en faveur des droits de l’enfant avec spectacles et inviter les parents, les responsables politiques et d’autres adultes. Au cours de l’année, on pourra commander la vidéo de la cérémonie de remise des prix, qui aura eu lieu au château de Gripsholm et la visionner lors d’une cérémonie à l’école. Lisa Bonongwe Le Children’s Jazz Band de la banlieue Delft de la Cité du Cap en Afrique du Sud, où beaucoup d’enfants vivent des situations difficiles, eut un grand succès lors de la cérémonie.

Prix des Enfants du Monde pour les droits de l’enfant

Murhabazi Namegabe

PHOTO: SOFIA MARCETIC & KIM NAYLOR

SM la Reine Silvia de Suède, applaudit Murhabazi Namegabe de la RD Congo, élu lauréat du Prix des Enfants du Monde 2011, par les enfants qui ont participé au Vote Mondial. Murhabazi, récompensé pour son dangereux combat afin de libérer les enfants que l’on oblige à être soldats et esclaves sexuels, reçoit de constantes menaces de mort à cause de son travail. Faida Kasilembo est l’un de ces enfants que Murhabazi a libérés.

Les membres du jury Nuzhat Tabassum Promi, Bangladesh, Maria Elena Achahui, Pérou et Poonam Thapa, Népal ont assisté la Reine Silvia dans la remise des bouquets de fleurs et du globe en verre, au cours de la cérémonie.

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Prix d’Honneur des Enfants du Monde

Monira Rahman

Celine Antonels du Children’s Jazz Band, au saxophone.

Sweety Nusrat Jahan, à gauche, agressée à l’essence et Bubly Mehia Akter, victime d’attaque à l’acide, ont été récompensées avec Monira Rahman du Bangladesh qui reçoit le Prix d’Honneur des Enfants du Monde de la part de la Reine Silvia. Monira a été récompensée pour son courageux combat en faveur des filles défigurées, suite à des attaques à l’acide ou à l’essence.

Le quatuor à cordes de Lilla Akademien.

Un ensemble de Bagunçaco, une organisation culturelle pour les enfants vulnérables au Brésil, s’est produit au cours de la cérémonie.

Thanks! Tack! Merci ! ¡Gracias! Obrigado! EN AFRIQUE DU SUD:

Ministry of Education, National Department of Education, Eastern, North West Department of Education and Department of Social Development, Bojanala Platinum District Municipality and Department of Education, Marlene Winberg, Nadia Kamies, Vusi Setuke, Maki Boshomane BANGLADESH: ASF-Acid Survivors Foundation, SASUS,

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Redwan-E-Jannat BÉNIN: Juriste Echos Consult – Jeacques Bonou BIRMANIE: BMWEC, Community Schools Program, Eh Thwa Bor BRÉSIL: Grupo Positivo (Portal Positivo, Portal Educacional et Portal Aprende Brasil), SEMED-Santarém (PA), 5a Unidade Regional de Educação/SEDUC-PA, Projeto Rádio pela Educação/Rádio Rural de Santarém, SME-São José dos

Campos (SP), SME-Araraquara, ONG Circo de Todo Mundo, Samuel Lago, Christiane Sampaio BURKINA FASO: Art Consult et Développement, Malachie Dakuyo BURUNDI: Maison Shalom, Maggy Barankitse, DAJBU, DBF CAMEROUN: SOS Villages d'Enfants Cameroun, Caroll Mikoly CONGO BRAZZAVILLE: ASUDH/Gothia Cup CONGO KINSHASA:

FORDESK, Tuzza Alonda, APEC, Damien Kwabene, APROJEDE, Amisi Musebengi GAMBIE: Child Protection Alliance (CPA), Bakary Badjie GHANA: Ministry of Education, ATWWAR, Ekua Ansah Eshon, Ghana NGO Coalition on the Rights of the Child, Unicef, VRA Schools GRANDE BRETAGNE: The Children’s Rights Director for England, Roger Morgan GUINÉE


Prix d’Honneur des Enfants du Monde

Cecilia Flores-Oebanda Cecilia Flores-Oebanda des Philippines, accompagnée de Samraida Esmail, une des filles sauvées, a reçu le prix d’Honneur des Enfants du Monde des mains de la Reine Silvia. Cecilia, qui a travaillé enfant, a été récompensée pour son infatigable combat – malgré d’incessantes menaces de mort – contre le travail des enfants et le trafic d’êtres humains ainsi que pour son soutien aux filles ex esclaves sexuelles. Kören Spektrum Teens, le jury et les autres enfants ont chanté le chant de clôture « Un monde d’amis »

CONAKRY: Ministère de l’Éducation, CAMUE Guinée, Oumar Kourouma, Unicef, Parlement des Enfants de Guinée GUINÉE BISSAU: Ministério da Educação, AMIC, Laudolino Medina, Fernando Cá INDE: City Montessori School Lucknow, Shishir Srivastava, Times of India’s Newspaper in Education, Barefoot College, Tibetan Children’s Villages, CREATE KENYA: Ministry of Education,

Provincial Director of Education for both Western and Nyanza Provinces, CSO Network for Western and Nyanza Province, Betty Okero MAURITANIE: Association des Enfants et Jeunes Travailleurs de la Mauritanie, Amadou Diallo MEXIQUE: Secretaría de Desarollo Humano Gobierno de Jalisco, Gloria Lazcano MOZAMBIQUE: Ministério da Educação e Cultura, SANTAC

(Southern African Network Against Trafficking and Abuse of Children), Margarida Guitunga, Malica de Melo, FDC (Fundação para o Desenvolvimento da Comunidade), Graça Machel NÉPAL: Maiti Nepal, Janeit Gurung NIGERIA: Federal Ministry of Education, The Ministries of Education in Kogi State, Lagos State, Ogun State, and Oyo State, Unicef, Royaltimi Talents Network, Rotimi Samuel

Gabatshwane Gumede d’Afrique du Sud et membre du jury, a chanté.

Aladetu, CHRINET, Children’s Rights Network, Moses Adedeji OUGANDA: Uganda Local Governments Association, Gertrude Rose Gamwera, Wakiso District, BODCO, Nason Ndaireho, GUSCO PAKISTAN: BLLFS, Mir Sarfraz, BRIC, PCDP PÉROU: Centro Yanapakasun PHILIPPINES: Visayan Forum, Lowel Bisenio RWANDA: AOCM SÉNÉGAL: Ministère de l’Éducation, Ministère de la Femme, de la Famille et du Développement Social, EDEN, Save the Children TCHÉQUIE: Vzajemne Souziti ZIMBABWE: Girl Child Network

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