Reportage : Erciyes Snowkite Festival
Turquie
11-13 mars 2011
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TURQUIE LE VOLCAN DES ERCIYES. Pour la deuxième année, nous voici dans les montagnes au centre de la Turquie, les Erciyes, pour trois jours de snowkite surprenants. A peine rentrés des USA en soirée avec Chasta, nous décollons le lendemain matin pour la Turquie. Cela va nous faire douze heures de décalage horaire, sans transition. Cette fois, Chasta voyage en famille, avec ses deux snowkiteuses, Titaua sa femme et Kailea sa fille de onze ans. Nous serons accompagnés par Marek Zach, de République Tchèque, excellent kiteur du team Ozone international. C’est Murat Bukey, distributeur Ozone sur la Turquie, qui organise ce séjour. Nous sommes déjà venus, Chasta et moi, l’hiver passé, nous connaissons un peu le secteur, et cette année il semble que l’enneigement soit encore plus généreux. Lors de notre premier séjour, nous avions été présentés par Murat au directeur de la station. Nous pensions à une simple visite de courtoisie mais
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en réalité ce directeur, Memet, avait soigneusement noté nos impressions sur les meilleurs secteurs de snowkite autour de la station et avant notre venue cette année, Murat nous annonça qu’un immense périmètre favorable au vent et idéal pour le snowkite avait été délimité par Memet et qu’il n’y aurait jamais aucune remontée mécanique d’installée, le développement du domaine skiable se ferait dans la direction opposée. Memet souhaite aussi que chaque année un événement snowkite se déroule, et voilà, nous sommes en route pour la première édition.
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Le snowkite se développe en Turquie. Même si on observe que les kiteurs présents viennent tous du kitesurf. C’est un pays aux très belles montagnes. Ici, les Erciyes sont en plein centre du pays. Ce n’est pas la région la plus montagneuse qui elle, se trouve dans le Nord-Est avec le célèbre Mont Ararat à plus de 5.000m dans la chaîne du Caucase. Ici, nous sommes proches de la Cappadoce, très belle région de maisons creusées dans des cônes de calcaire. Les montagnes sont plutôt arrondies même si certaines restent impressionnantes, notamment le volcan éteint qui domine la station Erciyes.
Ce volcan, c’est le rêve de Chasta, monter au sommet en snowkite, puis redescendre en freeride snowboard par les couloirs verticaux qui plongent en direction du centre station. On peut voir tout cela depuis notre hôtel. L’année dernière, le vent était contraire et l’ascension restait impossible. Cette destination des Erciyes n’est pas inaccessible depuis la France. Le vol, les tarifs, les transferts, tout est dans les possibilités de snowkiteurs passionnés. Il y a des vols directs depuis Saint-Etienne, l’aéroport d’arrivée est Kaisery, un million d’habitants, à 20mn de voiture de la station. Enfin, vingt minutes, c’est la théorie. En cette fin d’après-midi où nous arrivons à Kayseri, il y a tempête de neige, et nous allons avoir du mal à accéder à la station. On restera tous plantés dans les congères de neige poudreuse, les voitures bloquées près de l’arrivée en station, on termine le trajet à pied, en pleine nuit, dans la neige où on s’enfonce jusqu’à la taille, en traînant nos housse de ski ou snowboard. D’un côté on pourrait ronchonner, un peu assommés de fatigue, mais d’un autre côté ça laisse présager de super conditions pour les prochains jours de snowkite. Ce vent qui souffle en tempête va nous dessiner de merveilleux reliefs de neige vierge. L’enthousiasme de Murat, tout excité de nous montrer la neige dans sa station, maintient une bonne ambiance dans le groupe. L’arrivée dans notre hôtel est une délivrance. Bien chauffé, confortable, pile pour l’heure du repas du soir. Pour le premier matin, encore quelques nuages de traîne, pentes plâtrées de poudreuse, nappes de brouillard,
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vent léger, l’hôtel est au pied des pistes, on sort après le petitdéjeûner directement avec notre kite sous le bras, les skis ou le snowboard à la main. On décolle la voile devant l’hôtel, et c’est parti, des dizaines de kilomètres de neige devant nous, sans une trace.
Marek «Murphy» Zach
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Comme l’hiver passé, nous allons direct vers le volcan, dans l’espoir de monter au sommet avec nos kites. Même si c’est engagé. Même si à chaque journée de vent on voit des nuages de poudreuse soulevés vers le sommet et ça doit être vraiment difficile d’aller jusqu’en haut. Comme l’hiver passé, le vent sud-ouest est défavorable pour les pentes d’ascension exposées nord-est. On accède par le pied de l’immense combe verticale face à la station, on transite sur la gauche et quand on atteint les pentes de montée, on est sous le vent, dans les tourbillons, c’est impossible d’aller plus loin que le premier tiers. Comme l’hiver passé, on abandonne, et on part vers les montagnes environnantes, avec leur enneigement très surprenant. Des épaisseurs de neige inimaginables à des hauteurs aussi modestes. On est environ à 1.200m d’altitude et il y a plus d’un mètre de neige partout, recouvert de cette belle poudreuse légère tombée la veille. Chacun trace son chemin dans cette immensité blanche, Chasta en famille, qui parfois tracte Kailea avec une corde quand c’est trop difficile, puis lui déplie sa voile plus loin si le relief devient plus clément. Titaua reste à leurs côtés. Kiter comme cela en famille, ça doit être quelque chose d’extraordinaire. Marek explore ses propres options de terrain, surtout à la recherche de falaises pour des vols interminables. Moi j’essaie de les suivre pour faire des images mais j’apprends aussi à voler, à ras de la neige, en sécurité, pas si simple, et alors je cherche aussi mes secteurs de poudreuse face au vent qui est ici dans les collines aussi régulier qu’en mer. Chacun suit son instinct à la recherche de paysages incroyables, en suivant une trace de renard, le regard qui flotte sur les chaînes de montagnes au lointain. On alterne distances maximales avec vols de pente, freestyle, cruising, pauses sandwich, sessions photos, road-gaps pour Chasta et Marek, pause thermos, redécollage, et ainsi de suite. Même avec les journées courtes de l’hiver, décoller vers 10h, et rester kiter dans les montagnes jusqu’à la tombée du soir vers 17h, ça fait des méga-sessions. N’oublions pas que Chasta et Marek sont de forts freestylers et qu’à chaque module naturel de neige, ils envoient des mouvement freestyle extrêmes, au bout du compte, si on ajoute les kilomètres parcourus, le dénivelé effectué, ça fait des grosses journées de kite, achevées dans une douce fatigue saine qui ressemble à l’ivresse. L’arrivée à l’hôtel devant lequel on pose nos voiles se fait sous le scintillement des premières étoiles dans un ciel d’encre bleue. Les filles sont rentrées plus tôt, elles ont déjà pris le thé et sont sous leur couette devant la télé. Pour nous, le temps de ranger le matériel, faire sécher les
On décolle devant notre hôtel.
Titaua, back 720 tailgrab.
Chasta, front 720 road-gap.
voiles, les vêtements, waxer les boards, prendre la douche bouillante, on arrive direct à l’heure du dîner. Les discussions au repas tournent autour de ce projet d’ascension du volcan, des immensités incroyables qu’il y a ici pour le snowkite, du vent qui est tout le temps présent même si on observe une légère baisse en milieu de journée chaque jour. Au deuxième jour, le grand ciel bleu est arrivé, et le vent restera sud-ouest durant tout le séjour. Le dimanche arrive, c’est notre dernier jour ici. Le jour de l’événement organisé par Murat. Sous la direction de Chasta qui va proposer la meilleure formule en fonction du vent. Au programme, rassemblement des kiteurs, démonstrations de freestyle par Chasta et Marek pour le grand public, initiations au snowkite par l’école locale Volkite et son fondateur Volkan Gunel, compétition qui sera probablement une Race, une course au long d’un circuit dessiné par Chasta car le niveau général des kiteurs locaux s’exprimera mieux dans ce format de course très accessible, valorisant pour tous, et offrant une pratique constante du kite sans temps mort. On va halluciner sur le nombre de kiteurs qui vont arriver en ce dimanche. Certains viennent de loin
Kailea
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Volkan Gunel. Ecole VOLKITE. et tous travaillent la semaine. La plus grande surprise sera avec le monde qui va envahir la station. Un million d’habitants à 20 mn de voiture, ça remplit vite les parkings et les pistes de ski par une belle journée de mars. Il va y avoir une cérémonie du folklore turc, très belle, avec costumes traditionnels et chants de défilés militaires, et aussi un concert de rap turc, des BBQ immenses, tout cela sous un magnifique ciel bleu mais... pas un souffle de vent. Misère de misère. Murat s’arrache les cheveux. Dommage. Pourtant ça soufflait en matinée, comme chaque jour, puis ça s’est arrêté vers midi. Il y a quelques rares risées de bulles thermiques, que Chasta et Marek vont réussir à exploiter pour faire une très belle démo de freestyle en front de neige devant un public dense et enthousiaste. Pas certain qu’ils comprennent vraiment les handle-pass, les switch 720 rodeo, ou les mouvements déhookés, mais c’est pas grave, l’applaudimètre explose à chaque trick envoyé dans le ciel bleu par nos deux gunners. L’aire d’initiation permettra aussi à quelques uns de s’essayer au snowkite pour la première fois, dont
Marek
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Memet qui va réussir de suite à glisser avec son kite. Il a été dans l’équipe nationale turque de ski en compétition et ça se voit même si il n’est plus tout jeune. Memet s’excuse de ne pas pouvoir rester plus longtemps avec nous, et nous ne trouvons pas de mots assez forts pour le remercier de cette invitation et de ces journées inoubliables dans les montagnes Ericyes. En fin d’après-midi, alors que tout le monde est sur le départ, les au-revoirs chaleureux près des voitures, le vent revient, un peu comme il l’a fait chaque jour. Nous, qui avons la chance de rester encore cette nuit à l’hôtel, nous levons les voiles et partons pour une dernière session de sunset dans les collines des alentours, avec des lumières roses du couchant, un ciel bleu turquoise et des nappes de brouillard mauves qui estompent le paysage. Un vent constant, solide, soulevant la poudreuse par endroits, un froid mordant, la session va nous apporter le même étourdissement de fatigue et de bien-être que chaque
Marek Zach, de la République Tchèque, explore le volcan des Erciyes
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soir. Parfois, la vie nous apporte des moments d’un bonheur simple, si parfait, tellement immense que notre coeur ne peut le contenir en entier, on est là, à glisser sur la neige volatile avec le vent glacial comme l’éther, assistant à cette journée qui s’en va. Le dernier run nous ramène dans la nuit tombée vers les lumières de l’hôtel. Demain c’est le départ aux aurores pour notre vol à l’aéroport de Kaiseri vers 8h. Comment remercier Murat pour son invitation et toute l’organisation qui a été exceptionnelle d’amitiés, d’instants magiques, de confort, de performance pour notre passion de glisse avec un kite ? Nous, qui sommes pourtant des privilégiés, avons malgré tout vécu un séjour dans le coeur de la Turquie comme on n’en rencontrera plus, à moins d’avoir énormément de chance. A l’aéroport le lundi matin, Marek part dans un avion différent pour la République Tchèque. Murat rentre sur la côte adriatique en voiture. Les embrassades sont chaleureuses et teintées de tristesse car tout ceci s’achève forcément. Vous reviendrez, nous assure Murat en signe de consolation. C’est vrai que nous avons rendez-vous avec le sommet du volcan. Ce géant va bien finir par nous récompenser si il constate notre motivation. Rendez-vous pour le ERCIYES Snowkite Festival 2012. FIN
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Voici Titaua qui arrive directement de notre hôtel que l’on aperçoit au centre de la station au fond de l’image. Titaua est une kiteuse internationale mais franchement, regardez quel exceptionnel terrain pour les débutants !!! On peut décoller la voile à la porte de l’hôtel et avec tous ces champs de neige faire notre premier essai de kite sans aucun danger. Et une fois que l’on a un peu progressé, c’est parti pour explorer les immenses secteurs de snowkite que les montagnes des Erciyes offrent comme on peut le voir sur les photos de ce reportage.
Titaua
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Le dimanche, pendant le Erciyes KIS Festival, Chasta et Marek on réussi à effectuer une démo de freestyle sur ce module avec seulement 3knds de légère brise thermique. Chapeau les gars !!! Et au bout d’un moment, les photographes ont fini par comprendre qu’il vaut mieux se tenir au vent des kiteurs... Au départ ils se plaçaient bien en face, pile à la réception des sauts. On est pas passé loin d’en retrouver deux ou trois scalpés direct :-)
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2011 ERCIYES KIS FESTIVAL
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Sur cette image, Titaua nous rejoint après sa sieste. Elle arrive de l’hôtel qui est à peine à un kilomètre sur la gauche du spot. Le vent souffle depuis la gauche de la photo, c’est donc super facile de se promener de partout sur ces pentes tranquilles. Malgré ça, de super congères de poudreuse, des half-pipes naturels, des combes idéales pour des vols de pente interminables en toute sécurité sans prendre la moindre hauteur. A découvrir dans la vidéo. Et tout ce paradis de freeride sans le moindre risque d’avalanche. Franchement, quel autre sport d’hiver possède un tel potentiel ???
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Zero avalanche risk
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Du pur freeride
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Le snowkite, c’est principalement du freeride. Oui, quelques très forts kiteurs réussissent à voler ou à envoyer des figures freestyle. C’est ce que vous verrez sur 99% des photos de magazines. Mais la réalité c’est que 99% des snowkiteurs glissent sur des champs de poudreuse. Sans sauter, sans voler. Ce freeride est le rêve de tout skieur et de tout snowboarder. Et c’est exactement cela que pour l’écrasante majorité d’entre nous, nous faisons avec nos kites. Rien d’autre que du pur freeride. Ici, Chasta sur l’image, peut aller où il veut le long de toutes ces pentes ou champs de poudreuse que l’on aperçoit. Aujourd’hui le vent arrive de notre droite face à nous mais s’il soufflait de la gauche et un peu dans notre dos, Chasta monterait au sommet du volcan que l’on voit en dix minutes. En bas de la page 22 il saute de la falaise que l’on voit ici juste de l’autre côté de la route au fond de l’image, au pied du volcan, on y était avant de venir faire cette photo. Avec le vent consistant de ce jour, il peut atteindre de grandes vitesses même sur le plat. Pas besoin d’un niveau élevé. Même moi j’y arrive, t’as qu’à voir... C’est juste du pur plaisir. Aucun danger à l’horizon. Et cette poudreuse va rester intacte pendant des semaines. Alors qu’en station de ski, y a plus un seul mètre carré de poudreuse une heure après l’ouverture des remontées. Eh oui mon gars !!! C’est comme ça.
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Le Téléski à voile
Le snowkite est le seul sport de glisse qui permette de skier en hors-piste sans danger et en toute liberté. On n’a besoin que du vent. Sinon vous avez le ski de rando, liberté, grands espaces, mais c’est quatre heures de marche pour cinq minutes de glisse, et danger d’avalanches. Ou peut-être le ski de fond, mais faut des pistes tracées, balisées. Le ski en station, c’est pas du hors-piste, ou alors faut traverser une corde noire et jaune et c’est danger d’avalanche permanent. Ici, on peut glisser en montée, en traversées, en descente, tout le temps avec le kite, encore et encore, tant qu’il y a du vent. Chasta est en train de tracter sa fille de onze ans, Kailea, qui aujourd’hui voulait seulement skier et pas kiter. Chasta remorque sa fille avec une corde, sur ces pentes douces. Kailea va faire toute une série de descentes, à chaque fois son père la remonte avec le kite. A la fin de la session, ils rentrent ensemble à l’hôtel qui est un kilomètre plus bas sur notre gauche. D’autres jours, Kailea préfère kiter. Elle se débrouille très bien. Et si il y a un passage difficile qu’elle ne peut pas franchir, elle plie son kite, Guillaume la tracte comme ça pour le passage, puis elle déplie son kite plus loin pour poursuivre la session. Magique, non ?
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J’ai trouvé cette vague de neige et j’ai de suite voulu la kiter. Notre hôtel est juste dans le fond de l’image. Mareck, railey. Chasta saute cette falaise en 360 Mute. Il a le vent travers-arrière... En rafales. C’est vraiment un extra-terrestre !!!
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Ces trois jours ont été absolument parfaits pour Marek (ci-dessus), Chasta, Titaua, Kailea et moi. Mille merci à notre ami Murat BUKEY.
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Vous trouverez plus d’infos snowkite sur : www.boulgakow.com www.flyozone.com Vous souhaitez voir ce reportage en vidéo ? Surveillez White Kite News channel sur vimeo.com. Un séjour aux Erciyes vous tente ? Volez à destination de Kayseri, Turquie. Le plus pratique c’est depuis l’aéroport de Saint-Etienne. Puis 20 minutes de taxi jusqu’à la station de ski Erciyes. Une agence peut vous aider : www.alwayswindy.com Le site de la station Erciyes : www.erciyes-zumrut.com Pour des infos snowkite au quotidien, rejoignez le groupe White Kite News :-) Photos, textes, mise en page de ce reportage : Pascal Boulgakoff Merci à Andy Banks Design de la compagnie Ozone pour son aide :-)
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