Presse Geluck 2014-10 carrefour (pp35-37)

MESLECTURES

bandes dessinées////////////////

CHRISTOPHE LICCOPE

À TABLE AVEC GELUCK ET SON CHAT !

Avec un dix-neuvième album de son célébrissime Chat, des expositions de ses peintures et sculptures, et son arrivée au sein de l’équipe des Grosses Têtes sur RTL, la rentrée est incontestablement marquée de la patte Philippe Geluck. À l’image de son personnage vedette, l’auteur du Chat passe à table pour Carrefour savoirs… propos recueillis par pierre burssens et brieg haslé-le gall Carrefour savoirs / N° 184 / OCTOBRE 2014 / 35

MESLECTURES FRÉDÉRIC LATINIS

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EXPOS Deux expositions incontournables sur l’œuvre méconnue de Philippe Geluck (sculptures et peintures sur toile) sont à voir en France, puis en Suisse :

> huberty-breyne gallery.

91, rue Saint-Honoré. Paris (1er).

Du 16 octobre au 29 novembre.

> galerie catherine niederhauser (galartis).

8, rue du Grand-Chêne. 1003 Lausanne. Du 27 novembre au 20 décembre.

Votre rentrée 2014 est particulièrement riche, à commencer par le dix-neuvième tome du Chat intitulé Le Chat passe à table…

Philippe Geluck : Il s’agit d’un double album qui se décline, comme pour La Bible selon le Chat, sous la forme d’un coffret regroupant deux livres format à l’italienne.

J’avais beaucoup aimé cette présentation pour La Bible, et la majeure partie des dessins que vous découvrirez s’y prête très bien. En outre, le coffret comporte un exemplaire « papier » de La Gazette du Chat, qui existait jusqu’ici sous forme numérique. Comme ce numéro est représenté dans l’album, le lecteur aura en main un journal que l’on retrouve dans un dessin. Une belle mise en abyme, non ? Une autre particularité du Chat passe à table est qu’il est composé à 98-99 % d’inédits, des dessins qui n’ont pas été publiés dans la presse, réalisés au cours de ces dernières années. C’est vraiment du neuf !

Après La Bible…, le Chat retombe donc sur terre…

Tout à fait, et toujours sur ses pattes malgré ce rôle très lourd ! Après avoir joué Dieu pendant des mois, le revoilà mortel. J’ai réalisé un dessin qui exprime ça, avec le Chat chez Roger, mais c’est un sentiment que j’ai véritablement ressenti. Un peu comme Charlton Heston peut-être, qui après avoir joué dans Les Dix Commandements a, un jour, dû retourner faire ses emplettes… Enfin, je ne sais pas si Charlton Heston faisait lui-même ses courses !

Votre éditeur Casterman présente La Bible selon le Chat comme la troisième meilleure vente BD de 2013, votre félin cartonne : comment vous sentez-vous à la veille de la sortie du Chat passe à table ?

Il existe toujours un petit stress, une certaine inquiétude.

Je pense que la seule fois où j’étais totalement serein, c’était à l’occasion de la sortie du premier bouquin. Il n’y avait pas vraiment d’enjeu, j’arrivais de nulle part…

Depuis, j’ai le bonheur de vivre une forme de courbe

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ascendante et j’espère à chaque fois ne pas faire moins bien. Ma pire angoisse est de décevoir les lecteurs qui m’ont suivi jusqu’à maintenant. Je travaille donc beaucoup. La perfection n’existe pas, mais je m’attache à aller le plus loin possible dans le travail, à être très attentif à tous les détails, et toujours avec un poil d’anxiété.

Puis, quand le livre est publié, quand il est dans les mains des lecteurs, il vit la deuxième partie de sa vie. Mais si j’en arrivais à me dire que je suis formidable, que ce que je fais est bien et que, dans cet ordre d’idée, le bouquin sera forcément bien, ce serait l’horreur !

Geluck-Le Chat, Le Chat-Geluck… Il existe très peu d’exemples où un auteur est autant assimilé à son personnage, ou inversement.

C’est vrai, nous sommes liés comme Laurel et Hardy !

Mais je n’anime pas beaucoup de personnages. Pourrais-je être associé à Roger ? Oui, parfois, je fuis les mondanités, ça doit être ça mon côté Roger !

Dans un registre très différent, Hugo Pratt et Corto Maltese se confondent presque dans l’imaginaire des lecteurs…

J’ai connu Hugo Pratt lors de mes débuts dans la revue (À suivre…). J’en garde le souvenir de quelqu’un d’extrêmement bienveillant, encourageant, qui donnait de bons conseils, même si nos univers étaient très différents. Il a été une des bonnes fées penchées sur mon berceau de dessinateur balbutiant.

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Votre actualité comporte également deux expositions de vos peintures et sculptures, un autre aspect de votre travail plus méconnu…

Alors que mes premières expos en galeries avec le Chat datent de 1990-1991 ! J’ai la chance d’avoir un travail graphique qui me permet d’aborder des formats très différents, notamment de grandes toiles, mais c’est un aspect des choses qui m’expose aussi. Je travaille sur une autre fibre, je fais pas mal de recherches. Ici, on est partis sur des gags sur l’art et l’histoire de l’art, quelque part entre l’hommage et le « foutage de gu… » ! Chacun appréciera, tout est question d’interprétation. On retrouvera Pollock, Vasarely, Alechinsky, Mondrian… Ça intrigue les collectionneurs, ça fait du bien dans un milieu où les gens sont parfois un peu compassés. On ne peut pas dire que la peinture rigolote envahisse les musées, mais pourtant ça perpétue la tradition des Dadaïstes ou des Surréalistes qui transgressaient l’art sérieux. C’est une activité qui prend de plus en plus d’importance, compatible avec mon travail de dessinateur. Un jour, on rassemblera tout ça dans un bouquin, mais au format d’un livre ça ressemblera à mes dessins.

Même physiquement, c’est libérateur à mon âge de pouvoir travailler sur de grandes toiles plutôt que recroquevillé sur ma table à dessin !

Malgré vos nombreuses occupations, trouvez-vous encore le temps de lire ?

Je reste un gros lecteur, j’aime lire une ou deux heures par jour. Je ne regarde plus beaucoup la télé mais je suis devenu grand consommateur de séries en coffrets.

Je n’ai jamais rien téléchargé, j’insiste : je vis de droits d’auteur et je respecte totalement ceux des autres ! Sincèrement, je trouve que la qualité de ces séries, parfois supérieure à celle de certains films, redonne ses lettres de noblesse à la télé qui en avait perdu beaucoup. J’ai adoré True Detective, House of Cards, Broadchurch et Breaking Bad, probablement la meilleure de toutes ! Côté BD, j’avoue ne pas être un très gros lecteur. Récemment, j’ai vraiment apprécié L’Arabe du futur de Riad Sattouf. Je picore à gauche et à droite, et je lis mes amis du métier : Schuiten, Tardi, Kroll, Ferrandez…

Europe 1 m’a rappelé, en insistant pour me garder, mais je leur ai dit que j’étais fidèle à ma femme… et à Laurent Ruquier !

Autre facette de votre rentrée, votre arrivée aux Grosses Têtes sur RTL dont Laurent Ruquier a repris la barre fin août…

C’est une histoire d’amitié et de fidélité. Europe 1 m’a rappelé, en insistant pour me garder, mais je leur ai dit que j’étais fidèle à ma femme… et à Laurent Ruquier ! Ils ont rigolé et m’ont répondu que cela m’honorait. Laurent m’a fait débuter à France Inter avec lui en 1996, il a toujours été extrêmement généreux avec moi. Il m’a appelé, a insisté en me disant « Je ne te lâche plus » ! Si je n’étais pas tous les jours aux Grosses Têtes, j’y participerais !

Comment faites-vous pour combiner vos différentes activités ?

J’ai envie de vivre plusieurs choses en parallèle. La vie va d’un point A à un point B. J’essaie de ne pas y aller par le chemin le plus court, d’emprunter des chemins de traverse… Ce que je ne peux gagner en longueur de vie, j’espère le gagner en largeur. Certes, ça ne facilite pas toujours la tâche, mais au moins c’est exaltant. Ma vie professionnelle est faite d’envies, de curiosité, de gourmandise, et, en se complétant, chacune de mes activités m’apporte quelque chose que les autres ne me procurent pas. n

À LIRE Le Chat tome 19 : le chat passe à table | philippe geluck | genre : humour

félin | casterman | DISPONIBLE LE 8 OCTOBRE

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