ENFANTS EN ARMES

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CES ENFANTS QUI PRENNENT LES ARMES Derrière un trou de sniper dans un immeuble de la ville de Deir-Al-Zour, se tient l’un des plus jeunes combattants de l’armée libre de Syrie. Rashdi Muahamad a treize ans, il dit être là pour se battre avec la FSA (free Syrian Army) et s’être engagé pour défendre sa patrie et l’honneur des Syriens… Dans la rue, à quelques mètres de là on croise, kalachnikov à la main, Dani Walid, 12 ans : selon les adultes autour de lui, c’est le plus jeune combattant de la liberté menant ce combat contre les forces de Bashar al-Assad. Il cherche Asad, l’un de ses amis. Mais ce dernier est mort… il avait 14 ans. Dani s’éloigne en pleurant après avoir vu le corps sans vie de son ami. Dani et Rashdi font partie des milliers d’enfants qui se battent en Syrie depuis plus de 3 ans.


PHOTO Enfant soldat - Alep (Syrie) Février 2013

CONTEXTE On estime qu’environ 300 000 enfants garçons et filles de moins de 18 ans sont impliqués dans plus de 30 conflits à travers le monde. Les enfants dans les pays en guerre sont utilisés comme combattants, plantons, porteurs et cuisiniers, ou forcés de fournir des services sexuels. Certains sont enlevés ou enrôlés de force, d’autres sont amenés à s’enrôler à cause de la pauvreté, la maltraitance et la discrimination, ou parce qu’ils cherchent à se venger d’actes de violence commis contre eux ou leur famille. Il peut leur arriver de rejoindre les rangs de groupes armés parce que c’est pour eux la seule façon de pouvoir manger tous les jours et de survivre. Dans certaines situations, la participation des enfants à des conflits en tant que soldats peut même être acceptée ou encouragée. Les enfants peuvent faire la guerre «de leur plein gré», sans comprendre les dangers et les violences auxquels ils s’exposent. Dans la plupart des cas, ces enfants réagissent à des pressions économiques, culturelles, sociales et politiques.



L’Afrique est le continent qui compte le plus d’enfants en armes. On chiffre à presque 150 000 jeunes de moins de dix huit ans le nombre de combattants. La RDC, la Somalie et aujourd’hui la Centre-Afrique sont les pays où ils sont les plus nombreux. Dans le conflit centrafricain on considère qu’il y a 6 000 enfants combattants dans les rangs des rebelles seleka et autres factions rebelles. Enfants en armes ne signifie pas forcément enfants soldats. En effet dans différentes parties du monde les enfants sont embrigadés par des gangs criminels qui les utilisent pour différentes tâches, guetteurs, passeurs de drogue et enfin tueurs à gages. Les ”Maras” sur le continent américain en sont l’exemple le plus flagrant. De façon générale, le terme “Mara” désigne les gangs armés extrêmement violents qui se sont implantés au Salvador, au Guatemala, au Honduras et de façon moins importante au Nicaragua. Le « marero » est un membre de la Mara : les jeunes qui rentrent dans ces gangs ont entre 10 et 14 ans et leur espérance de vie dépasse rarement 30 ans. Les 2 gangs les plus grands et les plus violents sont la Mara Salvatrucha 13 (MS13) et la Mara 18 (M18). Les situations d’enfants armés peuvent prendre plusieurs visages. Un exemple que tout le monde a en tête, ce sont les gamins des rues de Gaza ou de CisJordanie qui lancent des pierres contre des blindés Israeliens. Ils ne portent pas d’armes à feu, mais sont autant victimes que les autres d’une véritable guerre qui dure depuis plus de trente ans si l’on considère que la première Intifada a commencé dans les années 80. Enfin, et ceci à deux heures d’avion de Paris, il existe un nouveau phénomène qui consiste à envoyer des enfants dans des camps paramilitaires lors des vacances scolaires. Notamment en Russie et en Ukraine où des jeunes de 12 ou 13 ans apprennent à vivre comme des soldats, à tirer avec un fusil mitrailleur et subissent d’une certaine manière un lavage de cerveau pour défendre un renouveau du patriotisme et du nationalisme cher au président Russe et autre ex-dirigeant Ukrainien qui espèrent modeler leur jeunesse pour éviter qu’ils décident un jour se soulever comme on peut le voir aujourd’hui dans les rues de Kiev...



LA REALISATION

Le film sera un long voyage à travers le monde où nous irons à la rencontre de tous ces enfants en armes, qui vivent la violence au quotidien. A travers cinq portraits croisés d’enfants de 11 à 14 ans nous verrons qui sont ces gamins qui vivent la guerre au quotidien. Pourquoi se battent-ils ? Ne sont-ils que des victimes comme on peut le croire ici en Europe ? Ou sont-ils aussi responsables de leurs actes malgré leur jeune âge ? Nous essayerons de les comprendre en leur donnant la parole et surtout en se plaçant au niveau de l’enfant et de ce qu’il est capable de comprendre. Chacun vit une situation bien différente, sur un continent différent. Les conflits auxquels ils participent ont des raisons diverses. Si la pauvreté est souvent le déclencheur pour certaines situations comme au Salvador, les luttes de pouvoir et les intérêts politiques sont également la plupart du temps au coeur de ces conflits. La Palestine et Israël semblent s’être arrêtés dans le temps. Ces combats perdurent, ils se transmettent de générations en génération sans jamais en voir l’issue… La réalisation proprement dite sera un croisement de situations qui verront chaque enfant venir raconter son expérience au quotidien. Les combats laisseront place à des moments plus intimes au sein de leurs familles. Nous ferons réagir autant les mères et les pères de ces gamins qui vivent la guerre. Pour comprendre les raisons profondes qui expliquent que plus de 300 000 enfants se battent à travers le monde...


Jeune palestinien pendant la troisème Intifada (Cisjordanie)

Nous sommes à Deir-Al-Zour, une petite ville située à 450 kilomètres de la capitale syrienne, Damas. Depuis trois ans, les combats font rage ici, et dans tout le pays. Nous suivons Dani Walhid un jeune combattant de douze ans. Il a rejoint les Forces syriennes libres pour libérer son pays du dictateur Bashar al-assad, nous confie Jabbar, l’adulte qui l’accompagne. Cela fait presque un an qu’il se bat chaque jour sur cette ligne de front où à chaque instant une balle ou une bombe peuvent mettre fin à la vie de cet enfant si jeune…

LE FILM

Pourtant, contrairement aux clichés, Dani a décidé de se battre. Qu’il ait 12 ans ou 20 ans, cela n’a pas d’importance, nous affirme-il.” La liberté de mon pays n’attend pas”. Dani, nous racontera pourquoi il se bat, comment il a déjà vécu l’enfer, comment il a tué, comment il a perdu des amis au combat alors que, dans le monde, les enfants de son âge jouent au football ou à la playstation…

Au même moment, de l’autre côté du monde, au Salvador, dans une rue de la capitale San Salvador vit Pablo, un jeune enfant de 13 ans. Cela fait deux ans qu’il a rejoint la mara Salvatrucha. Après avoir passé un test d’initiation en subissant le passage à tabac des autres membres du gang, il a dû tuer une personne au hasard dans les rues de la ville. Depuis il est très fier de raconter qu’il a abattu plus de dix personnes. Sa famille c’est la “mara” et il se dit en guerre contre la 18, le gang rival. Il est prêt à mourir pour sa famille, sa clica, sa “mara”... En Amérique centrale, Chaque jour, des jeunes de huit à dix ans


rejoignent les rangs de ces gangs qui deviennent leur famille. Ils sont prêts à tuer et à mourir pour leurs frères. Les membres de la “mara” 18 et la mara Salvatrucha s’affrontent dans un combat sans merci pour le contrôle du trafic de drogue. Les premiers acteurs, et victimes, sont ces enfants qui, armés de pistolets ou de fusils mitrailleurs, sont tous les jours en première ligne

Jeune Maras (Salvador)

Le témoignage de Pablo, son expérience, sa vie quotidienne, nous permettront de comprendre pourquoi un enfant décide, si jeune de rejoindre un gang. Quels sont les manques dans cette societé salvadorienne qui poussent ces jeunes hommes à vivre les armes à la main...pourquoi, chaque jour des jeunes meurent pour un bout de territoire ou pour le contrôle d’un trafic qui profite surtout aux grands cartels de la drogue. Les membres de ces gangs que l’on nomme “maras” ne sont que de la chair à canon pour les barons de la drogue contrôlant le crime organisé de Bolivie jusqu’aux Etats-Unis en passant par le Mexique et donc le Salvador...

Beaucoup plus proche de nous, en Ukraine, alors qu’une nouvelle révolution est en cours et que des centaines de personnes ont déjà perdu la vie dans les rues de Kiev, une nouvelle forme d’endoctrinement se met en place. Depuis l’indépendance du pays, en 1991, les associations “cosaques” recrutent chaque année de plus en plus de membres et de volontaires. Ils seraient aujourd’hui plus de 2 millions. Il s’agit d’un retour aux “vraies valeurs” de l’Ukraine, selon les organisateurs. Beaucoup d’entre eux sont des enfants agés à peine de 11 ou 12 ans et qui apprennent à devenir des hommes, des soldats.


Entrainement militaire de jeunes cosaques (Ukraine)

Flottant dans son treillis camouflé trop grand pour lui, Iaroslav tient fermement contre lui sa kalachnikov. De garde au camp d’été de l’association Spas (Le Sauveur), il a veillé une partie de la nuit sur le sommeil de ses camarades qui dorment encore dans les quelques dizaines de tentes éparpillées le long de la rivière. Le jour vient à peine de se lever sur l’île de Khortytsia, près de la ville de Zaporijia, en Ukraine, mais la chaleur est déjà suffocante. A peine âgé d’une douzaine d’années, il a reçu avant-hier le droit de porter le béret et la cocarde aux couleurs de l’Ukraine, signes distinctifs des jeunes Spas. Ses instructeurs sont fiers de lui, il fera un bon cosaque. Comme les autres, il a suivi avec succès la même formation paramilitaire élémentaire - parcours du combattant, tir à l’arme légère, lancer de couteaux, cours de hopak, l’art martial traditionnel des cosaques, exercices d’athlétisme… - et aura appris à la fois la vie en communauté et l’histoire de ses ancêtres. Pourtant, alors que ceci pouvait être perçu comme un jeu et un apprentissage de la vie, les derniers événement de la nouvelle révolution Ukrainienne peuvent présager du pire pour ces enfants prêts à se battre pour l’ordre cosaque dans leur pays.

A quelques milliers de kilomètres de là, c’est un vendredi comme un autre en CisJordanie. Des scènes de la vie ordinaire, devenu es symbole de toute une lutte. Des jeunes enfants palestiniens affrontent des soldats israeliens à coup de pierres. Ils sont surnommés les enfants de l’”intifada”. Leur jeunesse a été bercée par des images de guerre et de résistance. Ils perpétuent aujourd’hui le combat de leurs aînés. Muslim Odeh a 13 ans : il est devenu un symbole pour toute la Palestine. Il est fier d’avoir été arrété 16 fois par l’armée israeliénne alors qu’il jetait des pierres sur leurs blindés. Lors de sa première arrestation, il avait 9 ans. Il se considère


Enfant soldat (Somalie)

comme un guerrier qui se bat pour que son quartier ne tombe pas aux mains des colons israéliens. Il est prêt à se battre jusqu’à la mort. Son père est catastrophé. Pour lui son fils devrait brandir un livre au lieu de ces pierres. “Son avenir est gâché et un jour il pourrait être tué et non juste arrêté”... mais pour Muslim, c’est un devoir que de se battre. Il ne se voit pas du tout comme une victime, et encore une fois, son âge, en ce qui le concerne, n’a pas d’importance. Il doit combattre comme ses aînés l’ont fait avant lui et sûrement comme ses enfants le feront après lui...

Enfin, pas très loin de là, le conflit continue en Centrafrique. Les forces françaises fortes de plus de 2000 hommes dans le pays peinent à rétablir l’ordre. Dans les rues de Bangui, on peut aperçevoir des visages juvéniles portant l’uniforme de l’armée régulière Centrafricaine. Selon un rapport des Nations-Unies, plus de 6000 enfants soldats feraient partie des différentes factions qui en ce moment s’affrontent dans ce pays. Abdel Kani est membre de la Seleka depuis l’âge de treize ans. Il en a presque quinze aujourd’hui. Il raconte comment dans la brousse il portait une mitrailleuse AA-52. Maintenant il a une Kalachnikov. Il se targue d’avoir déjà tué des dizaines de personnes. Pourtant, quand on lui demande s’il a décidé de rejoindre ce groupe armé, il n’ose répondre. Il regarde les adultes autour de lui en ayant peur de la réponse qu’il pourrait donner… En ce moment, des milliers d’enfants se battent dans les différentes région du pays. Abdel Kani est un exemple parmi tant d’autres d’enfants arrachés à leurs familles et obilgés à tuer, violer ou torturer. Comme dans les pays voisins, le Tchad et la RDC, les enfants sont les premières victimes de ces guerres. Sur le continent africain, c’est rarement par véritable choix que les enfant se retrouvent armes à la main, ils sont près de 150000 à se battre aujourd’hui en Afrique…



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