PARIS fedora parkmann
dans l’œil du reporter photographe viewed by the photo-reporter
Paris, dans l’œil du reporter photographe Lorsqu’un photographe pose son appareil dans une rue de Paris ou qu’un peintre installe son chevalet devant un monument, ils véhiculent, à travers leur cliché ou leur toile, une vision de la capitale qui n’est pas aussi originale ou naïve qu’ils voudraient le croire. Dans leur représentation, ils convoquent l’ensemble des descriptions de Paris qui, transmises par la littérature, la presse, l’art ou le cinéma, ont forgé le mythe de la Ville lumière. Tissée de ces réminiscences artistiques, cimentée par l’Histoire, oscillant entre rêve et réalité, cette mythologie parisienne nourrit l’inconscient collectif. À célébrer dans leurs photographies de rue quelques-unes des figures les plus hautes en couleur et certains lieux parmi les plus célèbres de la capitale, les reporters photographes prennent une part capitale à l’élaboration du mythe de Paris dans l’entre-deux-guerres. La presse illustrée connaît alors un essor sans précédent, qui génère une demande importante d’images photographiques plaisantes et génériques. Elle consacre également une esthétique, l’instantané de rue, et un personnage, le reporter photographe, qui se caractérise par sa mobilité et sa spontanéité. Le regard qu’il pose sur la ville est conditionné par un réservoir de représentations préexistantes, mais dépend aussi des éventuelles consignes de ses commanditaires et de sa vision personnelle. Aborder un corpus de photographies de reportage revient donc à s’interroger à la fois sur l’histoire – politique, sociale, artistique ou tout simplement humaine – qu’il raconte et sur le discours qui s’y construit.
Le discours des images et l’impact des agences photographiques En 1961, lorsqu’il écrit « La photographie de presse est un message », Roland Barthes invite à se référer aux « mobiles et attitudes » de ses concepteurs, c’est-à-dire le photographe et le journal qui le publie 1. Quels sont les normes et les usages professionnels qui président à la fabrication d’une photographie de presse ? Ce genre photographique s’épanouit dans les premières décennies du XXe siècle, à la faveur des nouvelles techniques de reproduction photomécanique qui permettent d’introduire toujours plus d’illustrations sur les pages d’un journal. Cette demande croissante d’images photographiques favorise l’émergence des agences de presse au cours des années 1920. Leur rôle 1
Roland Barthes, « Le message photographique », Communications, n° 1, 1961, p. 127.
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Paris, viewed by the photo-reporter When a photographer places his camera in a Paris street, or when a painter sets up his easel in front of a monument, they convey, through their pictures or canvasses, a vision of Paris which is not as original or naive as they would wish to believe. In their representations, they evoke the whole history of descriptions which, transmitted by literature, the press, art or the cinema, have fashioned the myth of the City of Light. This Parisian mythology, woven from artistic remembrances, consolidated by history, wavering between dream and reality, feeds the collective unconscious. By celebrating in their street photographs some of the capital’s most colourful figures and most famous locations, photo-reporters have played a crucial role in creating the myth of inter-war Paris. The unprecedented boom of the illustrated press at that time brought about a considerable demand for pleasant, generic photographs. It also created an esthetic, the street snapshot, and a character, the photo-reporter, typified by his mobility and spontaneity. His view of the city is conditioned by a fund of pre-existing representations, but also depends on any instructions of their clients may give, or their personal vision. Dealing with a corpus of reportage photographs thus leads to raising questions about the political, social, artistic or simply human history that it relates, and the discourse constructed around it.
The discourse of images and the impact of photographic agencies When Roland Barthes wrote, in 1961, “The press photograph is a message”, this was an invitation to examine the “motives and attitudes” of its creators, i.e., the photographer and the paper which publishes them 1. What are the professional norms and practices governing the production of a press photograph? This photographic genre flourished in the first decades of the 20th century, thanks to new photomechanical reproduction technology which made it possible to insert ever more illustrations on the pages of a paper. This growing demand for photographic images favoured the emergence of press agencies during the 1920s. Their role consisted in grouping together photographers and collecting their pictures – mostly news photos – which they sold to the press. The Keystone Agency, founded in the United States in 1891, expanded its activities to Europe from 1919 onwards, setting up a branch in London. With more offices in Berlin (1923) and Paris (1927), the agency brought 1
Roland Barthes, « Le message photographique », Communications, n° 1, 1961, p. 127.
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« Il y avait de quoi se sentir très affamé, quand on ne mangeait pas assez, à Paris ; de si bonnes choses s’étalaient à la devanture des boulangeries, et les gens mangeaient dehors, attablés sur le trottoir, de sorte que vous étiez poursuivi par la vue ou le fumet de la nourriture. » Ernest Hemingway, Paris est une fête, trad. Marc Saporta, Paris, Gallimard, 1964.
“There was good cause to feel very hungry when one didn’t eat enough in Paris; such good things were spread out in the windows of baker’s shops, and people ate outside, at tables on the sidewalks, so that you were pursued by the sight and smell of the food.” Ernest Hemingway, A Moveable Feast, 1964.
Terrasse de café parisien par un après-midi ensoleillé du début du mois de septembre 1938. Parisian café terrace on a sunny afternoon at the beginning of September 1938.
L’arrivée du Tour de Paris des triporteurs, quai de Grenelle le 20 novembre 1939. Ce championnat très disputé mettait en concurrence les livreurs sur un parcours de 39 km avec une charge de 85 kilos. The finish of the Tour de Paris for delivery tricycles, on the Quai de Grenelle, 20th November 1939. This hotly contested race involved deliverymen carrying 85 kilos over a 39 km course.
Aux nuits fort animées de Montmartre en 1929, autour du Moulin Rouge et du boulevard de Clichy, succédaient des journées tranquilles. Les rues sans dangers étaient alors livrées aux badauds et aux jeux d’enfants. The hectic nights of Montmartre in 1929 around Moulin Rouge and the Boulevard de Clichy were followed by quiet days and safe roads occupied by onlooking children and children’s games.
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...p. 84-85
...p. 86-87
Rendez-vous du Tout-Paris élégant, la piscine Molitor fut, ce 18 juin 1932, le cadre choisi pour le gala nautique de l’Union des artistes, où actrices de cinéma et de théâtre rivalisèrent d’élégance balnéaire. A fashionable Paris meeting-place, Molitor swimming-pool was, on 18th June 1932, venue of the Nautical Gala of the Union of Artists, where actresses became rival bathing beauties.
« Sous les pavés, la plage ! » Si ces amoureux de l’année 1960 ne pouvaient connaître ce slogan non encore inventé, ils en appliquaient le principe, profitant d’un premier doux soleil de printemps. “Under the paving-stones, the beach!” Although these lovers in 1960 could not know this yet to be invented slogan, they applied the principle, enjoying the first gentle spring sun.
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L’église de la Madeleine et la rue Royale après la pluie. Dans la circulation ralentie par l’ondée, ce livreur de denrées alimentaires (reconnaissable à sa veste blanche) guide son triporteur. Madeleine Church and The Rue Royale after the rain. In the traffic slowed down by the shower, this grocery delivery man (recognizable by his white jacket) steers his tricycle.
En contrebas de l’avenue de New-York, à deux pas du pont de l’Alma, le port Debilly offre un amarrage confortable aux yachts, voiliers et péniches habitées, et une belle adresse postale à leurs propriétaires. Below the Avenue de New York, right next to Alma Bridge, Debilly port provides comfortable mooring for yachts, sailboats and houseboats, and a fine postal address for their owners.
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...p. 158-159
Nés en 1649 de l’interdiction de vente ambulante, les colporteurs de livres ont fixé leurs étals sur les quais. Ces bouquinistes - ici quai Saint-Michel en 1934 – figurent au patrimoine mondial de l’humanité de l’Unesco. A product of the 1649 prohibition of street hawking, book peddlers set up stalls on the riverbanks. These booksellers – here on Quai Saint-Michel in 1934 – are part of Unesco’s World Cultural Heritage.
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Les Folies Bergère dont ce cliché montre la façade Art déco refaite en 1928, offrirent au Tout-Paris des années 1870-1935, d’éblouissantes revues menées par des célébrités telles Loïe Fuller et Joséphine Baker. The Folies Bergère – this is a shot of the new Art Deco front from 1928 – offered Paris society of the years 1870-1935 with dazzling revues starring celebrities like Loïe Fuller and Josephine Baker.