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MENSUEL CULTUREL & CITOYEN DU SUD-EST DU 10.12.2016 AU 16.01.2017

JOURNALZIBELINE.FR

2€

société Vers une légalisation du cannabis Politique culturelle Les opéras et orchestres du Sud-est 2€ ÉVÈNEMENTS Flamenco à Nîmes / BNMFEST à Marseille


Directrice de publication & rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@gmail.com 06 09 08 30 34 Rédactrice en chef adjointe Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42

DÉCEMBRE JANVIER 2016 - 2017

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CULTURE ET SOCIÉTÉ

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Directrice Commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 La régie Jean-Michel Florant laregie@gmx.fr 06 22 17 07 56 Collaborateurs réguliers : Régis Vlachos, Dan Warzy, Frédéric Isoletta, Yves Bergé, Émilien Moreau, Christophe Floquet, Pierre-Alain Hoyet, Aude Fanlo, Thomas Dalicante, Marion Cordier, Marie Michaud

Imprimé par Riccobono Imprim’vert - papier recyclé

Polyvolants Chris Bourgue chris.bourgue@wanadoo.fr 06 03 58 65 96

Crédit couverture : © Alouette sans tête

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Administration Catherine Simon admin@journalzibeline.fr

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Houda Moutaouakil contact@journalzibeline.fr 04 91 57 75 11

Conception maquette Tiphaine Dubois

ARENA du Pays d’Aix

ARENA du Pays d’Aix


Climat glacial L’homme désire « une coalition incluant la Russie pour combattre le totalitarisme islamique ». Poutine exulte, les Syriens hurlent, et les Tchétchènes s’enfoncent dans un cauchemar éveillé. Sommes-nous à l’aube d’un nouvel ordre mondial ? L’Autriche a failli élire un président d’extrême droite, les sociaux démocrates sont en France en pleine déroute, et l’avenir semble se jouer entre la droite dure et la droite extrême. Pourtant les cartes restent entre les mains des peuples. Qui ont encore le choix, en Europe, aux États-Unis d’exiger qu’on les écoute. D’accueillir des migrants dans la Vallée de la Roya, de construire des énergies alternatives, de débattre, de filmer, de résister, d’inventer des formes nouvelles.

ARENA du Pays d’Aix

En décembre Zibeline veut vous souhaiter une année 2017 pleine d’espoirs et de victoires. Et vous parler des réussites de ceux qui ne baissent pas les bras et regardent lucidement le monde. Ils sont nombreux, 102 majoritaires, et peuvent exiger d’être représentés. Et gouvernés par des hommes qui tiennent leurs promesses.

ÉDITO

Décembre. Le temps des fêtes. Le fond de l’air a t-il déjà été aussi glacial ? Trump menace la Chine, insulte Cuba, et les agressions racistes explosent, les croix gammées refleurissent sur les murs américains. Et Poutine est heureux. Le Brexit est à l’œuvre, les hommes en exil sinuent sur les routes des Alpes, l’Europe n’a plus de politique commune, et renonce au départ de Bachar el-Assad. L’ordre mondial bascule, et Poutine jubile. François Fillon gagne haut la main la Primaire de la droite, grâce aux retraités à 60 ans, sur-consommateurs de médicaments, qui veulent que leurs enfants travaillent jusqu’à 70 ans et payent leurs traitements antibiotiques.

AGNÈS FRESCHEL

ARENA du Pays d’Aix


Mucem.org

Esplanade du j4, 7 promenade Robert Laffont, 13002 Marseille

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Dans le cadre du 40e anniversaire du Centre Pompidou Avec le soutien exceptionnel de Partenaires

Exposition Après Babel, traduire 14 déc. 2016 – 20 mars 2017

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Traduire


sommaire 102

Adieu Max

SociÉtÉ

Vers une légalisation du cannabis (P.8-9) À Vintimille avec les migrants (P.10-11) Les centrales électriques citoyennes (P.12) Fêtes au MuCEM (P.14-15)

Politique culturelle

Les opéras et orchestres du Sud-est (P.16-17) Entretien avec Benjamin Lévy, nouveau directeur de l’Orcpaca (P.18) Le GMEM et le GRIM fusionnent (P.19) SortieOuest à Béziers, nouveau pôle jeune public à Mireval (P.20-21)

Devant le Palais de Justice de Nice © Malika Moine

événements

Folies foraines à La Friche et au MuCEM, Nuits d’hiver au Grim, BNMfest (P.22-23) Festival flamenco à Nîmes, les Mardis de la Villa Méditerranée (P.24)

Benjamin Lévy, directeur artistique et chef d’orchestre de l’orchestre régional de Cannes © Maryvonne Colombani

critiques

Spectacles, musiques (P.25-41) Marseille, Aix, Arles, Martigues, Port-de-Bouc, Avignon, Toulon, Châteauvallon, Gap, Montpellier, Béziers

Rocio Molina, Festival Flamenco à Nîmes © Pablo Guidali

AU PROGRAMME DU MOIS

Viaggio Nei Progett, exposition D’une Méditerranée, l’autre © Mario Schifano

Musiques (P.42-46) Spectacles (P.48-62)

cinéma [P.64-73] Arts visuels [P.74-80]

Marseille, Aix, Toulon, Montpellier, Aubagne, Arles, Avignon, Béziers

livres [P.81-86]


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Max, dans tous les yeux Zibeline a perdu un ami cher

M

ax Minniti s’est penché sur notre berceau il y a dix ans, lorsque nous avons imaginé Zibeline. Il a créé notre maquette, notre logo, notre identité visuelle, avec enthousiasme, et un talent fou. Le même qu’il mettait au service de tant d’entreprises culturelles de notre région. La Passerelle de Gap, les Salins de Martigues, le Festival de Marseille, la Compagnie Parnas, l’ensemble Télémaque, le Théâtre Nono, les Inovendables, la Maison du Chant... lui confiaient le soin de fabriquer leur image, parce qu’il savait comprendre les projets artistiques, et les traduire en lignes et en couleurs. Chacun, ici, a ses images dans les yeux. C’est qu’il avait cet œil sûr qui nous manque souvent. Le sens de la forme, l’amour des lettres comme objets, la modestie qui permet de proposer des images qui conviennent au projet, la fantaisie qui fait naitre les idées surprenantes, et bouscule doucement les attentes. Et puis cet incroyable sens des couleurs. Je me souviens de cette photo prise à Gap, de sa joie de voir qu’on avait repeint « un petit pan de mur jaune » de la nuance exacte de sa parka. Il l’avait repéré de très loin, s’était approché en riant, avait posé l’air fier et l’œil amusé. Alain, hilare et ému, l’avait photographié. Et puis, Max avait une façon si douce d’accueillir ses amis et d’être au monde. De partager un repas, une conversation, une blague, une chanson. La maison d’Alain et Max était un havre, un refuge où le temps s’arrêtait pour dispenser la chaleur qu’ils avaient su, tous les deux, faire naître de leur amour. Car ils savaient voir les qualités de chacun, et faire disparaître les rivalités, la concurrence, les jugements de valeur qui s’interposent souvent entre les


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artistes, entre les professionnels de la culture. Ce qui se passait entre ces deux êtres, Alain Aubin et Max Minniti, était exceptionnel, et rayonnait bien au-delà d’eux, dans une bienveillance communicative. Leur mariage, il y a trois ans, reste un moment intense d’émotion partagée. Par centaines les amis se pressaient dans la salle de la mairie, poussant les murs, serrant les corps. Jean Marc Coppola mariait ces deux hommes qui vivaient ensemble depuis 35 ans. Tout le monde pleurait, jusqu’à l’officiant, jusqu’à l’employée qui tenait les registres. La manif pour tous et ses haines étaient passées par là, et ce couple formidable était l’incarnation de la beauté, de l’évidence du mariage homosexuel. Alain et Max s’étaient pacsés dès qu’ils en avaient eu le droit, mariés dans une joie intense. Car vivre ensemble pour eux semblait un bonheur permanent et ils partageaient tout, de la poterie au chant, de la politique à la cuisine, de l’amour des voyages à celui de la mer. Au nom de Max et pour Alain, il faut défendre le Mariage pour Tous. Contre Fillon, contre ceux qui en 2012 défilaient à ses côtés, ceux qui refusaient le PACS en 1998 et la dépénalisation de l’homosexualité en 1982. À ceux-là qui veulent nous gouverner demain, il faudra demander ce qui peut bien les déranger dans un tel amour.

Affiche de la 3e Marche pour l’égalité

AGNÈS FRESCHEL

Max et Alain lors de leur mariage, il y a trois ans © J. Nicolas

Aquarelle © MaxMinniti

© MaxMinniti

Quelques logotypes créés par Max Minniti


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société

Libérez l’herbe ! À MARSEILLE L’HERBE TUE. PAS CEUX QUI FUMENT, MAIS LES JEUNES REVENDEURS. PATRICK MENNUCCI VEUT OUVRIR LE DÉBAT DE LA LÉGALISATION DU CANNABIS, ET LANCE UN APPEL DEPUIS SA VILLE droite, pas une fois le mot cannabis n’a été prononcé. Or le monde entier est en débat autour de cette question. Pourquoi l’intituler L’Appel de Marseille ? Les 200 premiers signataires sont Marseillais, c’est Marseille qui s’adresse au pays. Il est important que ce texte parte d’ici, parce qu’ici le problème est particulièrement aigu. 20% du travail policier à Marseille concerne la répression du trafic ou de l’usage du cannabis, plus de 9000 délits en 2016, et déjà 25 morts cette année... La prohibition fait ici beaucoup de dégâts. Prohibition ? Le mot est fortement connoté... Oui, et nous l’employons en connaissance de cause. 8 millions de consommateurs à qui on dit que l’usage est interdit, cela entraine du trafic, de l’illégalité, des morts, une pénalisation des victimes tout autant que des trafiquants... Oui cela rappelle la prohibition de l’alcool aux États-Unis.

Patrick Mennucci © Agnès Mellon

Zibeline : Vous lancez aujourd’hui cet Appel pour une légalisation contrôlée du cannabis. En tant que député socialiste d’une circonscription marseillaise, pourquoi ouvrir ce débat ? Patrick Mennucci : Cet appel émane de la société civile, de médecins, de responsables associatifs qui veulent soigner les gens. Béatrice Stambul, psychiatre, et Yann Granger, du bus 31/32 (unité de soin mobile pour usagers de drogues ndlr) se sont adressés à moi, ont trouvé une oreille attentive, et nous avons rédigé ensemble cet appel. Ce texte est le résultat d’un compromis entre des soignants et des travailleurs sociaux qui voient l’urgence, et sont capables de parler de l’aspect médical du problème, et des politiques, qui savent que le débat sera long. Durant les primaires de la

Le cannabis n’est-il pas plus dangereux ? Certainement pas plus que le tabac ou l’alcool. La prohibition conduit les consommateurs à fumer n’importe quoi, des produits beaucoup plus nocifs qu’un cannabis dont la qualité serait contrôlée. Un des dangers du cannabis actuellement est qu’il est souvent frelaté, coupé, avec un taux de THC dangereux (substance psychotrope artificiellement rehaussée dans le cannabis frelaté ndlr). Une légalisation permettrait de contrôler les produits. Vous parlez donc de légalisation, pas de dépénalisation ? Non. Il ne faut surtout pas de demi-mesure, il faut à mon sens légaliser l’usage, la culture, et s’occuper de la distribution. Comme pour le tabac ? Concevoir un circuit d’état ? Selon moi oui, mais nos positions diffèrent à ce sujet. Nous voulons ouvrir le débat, et non le clore. Les médecins sont plutôt d’avis de

réguler les ventes en donnant une autorisation d’ouvrir des commerces. Moi, je pense qu’il faut un monopole d’état. D’abord parce que ça permettrait de contrôler vraiment la qualité, ensuite parce que cela financerait la prévention et les dépenses de santé. Nous pourrions véritablement envisager d’informer les jeunes. Il faudrait à mon sens ne le vendre qu’aux majeurs, en les informant que fumer n’est pas anodin : un adolescent sur 5 est un fumeur régulier de cannabis, cela nuit à sa santé, mais aussi à sa scolarité, sa socialisation. Or la prohibition empêche qu’on en parle... Mais légaliser le cannabis n’amènera-t-il pas les trafiquants à trafiquer des drogues dures ? À Marseille le trafic de cannabis est à l’origine de 90% des règlements de compte. On estime que 500 000 français seulement sont susceptibles de prendre de la cocaïne. Le volume du trafic n’atteindra jamais celui du cannabis, et la délinquance décroitra. Comme après la Prohibition à Chicago... Comment cet appel est il reçu au PS ? Je pense que parmi les députés une majorité est pour la légalisation. Manuel Valls est farouchement opposé, mais les marseillais comme Carlotti et moi sommes pour ouvrir le débat, Jean Michel Baylet aussi, Jean Marie le Guen, Benoit Hamon... Avant les présidentielles ? Comme thème de campagne ? Ce n’est pas le propos. Le débat doit être ouvert, et avoir le plus de visibilité possible. Et Marseille, au centre du trafic, doit être la tête de pont de ce changement, qui nous fera sortir d’une hypocrisie mortifère. ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL


Appel de Marseille

Pour une légalisation contrôlée du cannabis Depuis près d’un demi siècle la loi qui s’applique à la consommation du cannabis est prohibitionniste, répressive et punitive. Pourtant la dangerosité du cannabis est sans commune mesure avec celle du tabac (60 000 morts par an) et de l’alcool (40 000 morts par an) qui sont elles des drogues licites.

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Cirque autobiographique

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Tu

La prohibition du cannabis est un échec : Elle est directement responsable, chez nous, de réseaux, de trafics très organisés, qui brassent des sommes considérables et gangrènent de nombreux quartiers. Les règlements de compte (2014 : 15 faits, 10 décès ; 2015 : 13 faits, 14 décès, et déjà 25 décès cette année) sont très majoritairement liés au trafic de cannabis. 20% de l’activité policière concerne le trafic de cannabis (9095 procédures pour infraction à la législation sur les stupéfiants en 2015, à 90% pour le cannabis contre 6808 en 2012 soit une augmentation de 25%). La répression a un coût important (santé, police, justice, prison) qui ne va pas aux investissements nécessaires et productifs (santé, logement, école, travaux publics, sécurité). Elle est dommageable pour la santé, car la clandestinité des pratiques éloigne les consommateurs de la prévention, de la réduction des risques et des soins. Le rajeunissement constaté des premières consommations impose des mesures innovantes auprès des jeunes ; mais aucun dispositif spécifique opérant n’existe dans les établissements scolaires, des points d’accueil écoute jeunes ferment, et les consultations jeunes consommateurs peinent du fait de la prohibition, à attirer de jeunes usagers d’exposer leurs questionnements.

©Olivier Meyrou

MAR 10 JANVIER À 20H30 Olivier Meyrou Matias Pilet

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La prohibition génère de l’exclusion puisque des personnes présentant un mode de vie particulier ou une pathologie addictive sont stigmatisées, rejetées, punies, rendues responsables de méfaits dont elles sont souvent les victimes. Et ce, au nom d’un ordre moral qui ne repose sur aucun élément prouvé par la science.

Nous, marseillais, conscients du désastre que cause le trafic dans notre ville, appelons aujourd’hui à une légalisation contrôlée de la production, de la vente et de la consomation, telle qu’elle existe déjà dans plusieurs pays, comme la solution raisonnée que nous devons choisir. La fin de la prohibition aurait de nombreux effets positifs : La fin des réseaux mafieux qui prospèrent sur l’interdit, et qui tuent. Des économies substancielles qui bénéficieront à notre économie. Une taxation légitime sur la vente qui ferait rentrer de l’argent dans les caisses de l’État.

BNMFEST

La réorientation de l’activité de la police et de la justice vers d’autres actions de sécurité.

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L’amélioration de la santé des jeunes consommateurs parfois piégés dans un usage nocif ou une dépendance, et une vraie politique de prévention qui serait connexe à la légalisation. La sortie de l’exclusion et une amélioration de la citoyenneté des personnes qui consomment et que la criminalisation de leur comportement rejette dans l’illégalité. Une organisation nouvelle de la production qui créera des emplois dans l’agriculture.

Il est temps d’agir. Marseille souffre des dommages causés par la prohibition du cannabis. Nous voulons porter le changement et appeler à une politique plus efficace et plus humaine. C’est pourquoi nous lançons de Marseille cet appel à la France, pour que, dans la période électorale qui arrive, le débat sur la légalisation du cannabis soit ouvert.

12 AU 17 DÉC. 2016 AU BALLET NATIONAL DE MARSEILLE

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Devant le Palais de Justice de Nice © Malika Moine

Vallée en résistance V

allée de la Roya. Les montagnes, le rouge et ocre des paysages

EN JUIN 2015, BEAUCOUP DE MIGRANTS ARRIVENT À d’automne, de jolis villages perchés, des routes qui serpentent entre France et Italie, à mi-chemin de Nice et de Vintimille. Voilà pour VINTIMILLE, EN ITALIE, ET CHERCHENT À POURSUIVRE la carte postale. Le long de ces routes, des hommes, des femmes, très jeunes pour la plupart, marchent. Ce pourrait être des auto-stoppeurs, LEUR ROUTE D’EXIL EN EUROPE. ILS SONT en balade dans cette belle région. Mais ils ne tendent pas le pouce. Ils ACTUELLEMENT DE PLUS EN PLUS NOMBREUX, ET avancent, droit devant. Leur proposer de monter dans sa voiture est infraction. Car ce sont des migrants. Mot adopté récemment pour DEPUIS CETTE DATE, LA FRANCE TENTE DE BLOQUER une désigner ces milliers de personnes qui cherchent à gagner l’Europe. LEUR PASSAGE. LES AUTORITÉS ONT RÉTABLI LES Ce terme les englobe dans une masse, un flux. Ils ne sont pas des individus immigrés, ou émigrés, ils migrent. Comme si ce glissement POSTES FRONTIÈRES ET DÉPLOYÉ DES BARRAGES sémantique était une façon pour nos sociétés à la fois de tolérer leur mouvement et de refuser qu’ils s’installent ici. Dans le meilleur des FIXES OU MOBILES LE LONG DES ROUTES. DANS LA cas, ils deviennent demandeurs d’asile, puis réfugiés, si leur requête est Dans le pire des cas, ils seront des clandestins. Avant tout, VALLÉE DE LA ROYA, À CHEVAL ENTRE LES DEUX acceptée. ils restent des migrants. Leur voyage a commencé à des milliers de PAYS, POUR CONTRER LES INSUFFISANCES DE kilomètres de là. Ils ont fui des pays en guerre ou en grande instabilité. Ils ont pris des risques insensés, payé des sommes considérables pour L’ÉTAT, LA SOLIDARITÉ AVEC LES MIGRANTS S’EST atteindre l’Europe et franchir la Méditerranée au péril de leur vie. PEU À PEU MISE EN PLACE. DE PLUS EN PLUS ACTIVE, DE PLUS EN PLUS SURVEILLÉE, DE PLUS DÉNUEMENT ET PRÉCARITÉ À Vintimille, ils sont aujourd’hui plusieurs centaines. Certains sont EN PLUS RÉPRIMÉE, C’EST DEVENU AUJOURD’HUI pris en charge par des organisations humanitaires. Sous l’église Sant Antonio, Caritas, le Secours Catholique italien, a ouvert fin mai un UNE VÉRITABLE RÉSISTANCE centre d’hébergement. Ils sont environ 80 à y être accueillis. Des


11 familles pour la plupart, des enfants, et même des bébés, peut-être nés sur le chemin de l’exil. Ils viennent du Soudan, de Libye, d’Afghanistan. Les lits superposés remplissent les deux dortoirs, l’un pour les femmes et les enfants, l’autre pour les hommes. Le lieu est tenu par des bénévoles et son fonctionnement ne repose que sur les dons de particuliers. Les conditions de vie restent précaires mais l’ambiance est chaleureuse, conviviale. À l’extérieur, sur le parvis de l’église, de nombreux hommes sont rassemblés. Ils savent qu’ils ne pourront pas entrer dans le centre, déjà plein. Certains dorment au campement de la Croix Rouge, très éloigné du centre-ville. En octobre 2015, Zibeline s’était rendu à Vintimille, dans le centre de la Croix Rouge, alors installé près de la gare et qui accueillait 150 personnes. Il a été fermé depuis et ce nouveau lieu compte 350 places, mais ils seraient plus du double à y trouver refuge. Ceux qui n’y vont pas cherchent un abri en ville, ou le long des berges de la Roya. L’hiver approchant, le fleuve est agité. Fin novembre, la montée des eaux a surpris l’un d’eux qui s’y est noyé. La pluie est fréquente en cette saison, le froid est déjà rude. Des personnes sont pourtant en tongs, short et t-shirt. Certains partent dans cette tenue pour tenter de rallier la France.

SOLIDARITÉ AFFIRMÉE

Dans la vallée frontalière, les habitants croisent chaque jour des hommes ou des femmes qui bravent tous les dangers sous les tunnels et au bord des routes étroites. Dans beaucoup de villages de la Roya, la solidarité s’est organisée. La région est devenue une zone d’exception. Côté français, par endroits, la surveillance policière et militaire est maximale. En remontant vers Menton, l’accès à Sospel et Breil-sur-Roya est contrôlé 24/24 par un barrage de gendarmes. Arrêt obligatoire à chaque passage. Une véritable frontière intérieure, un check-point. Les habitants parviennent cependant à contourner ces dispositifs. L’association Roya Citoyenne rassemble quelques centaines de sympathisants, plus ou moins actifs. L’attitude de l’État, exclusivement sécuritaire, les a contraints à se mobiliser pour répondre à l’urgence humanitaire. Un véritable réseau de résistance s’est mis en place où chacun œuvre à son niveau, selon ses moyens et son engagement. « Les gamins arrivent ici, on peut pas les laisser dehors », explique Pierrette, qui vit près de Breil. Ce village est le plus proche de la frontière. C’est là aussi qu’est installé Cédric Herrou, agriculteur de 37 ans. Il est accusé d’avoir transporté et hébergé des personnes en situation irrégulière. Son procès, prévu le

Maraude sous la pluie à Vintimille © Malika Moine

23 novembre à Nice, a été reporté au 4 janvier. Il assume les faits et les revendique. « J’ai des gens chez moi depuis 4 mois, ça ne désemplit pas. Quand des gens frappent à ma porte, elle reste ouverte. Qu’ils aient des papiers ou non, qu’ils soient blancs ou noirs, ça ne m’importe pas. » Cette attitude d’affirmer sa solidarité est de plus en plus répandue. « C’est pour alerter les dirigeants, les mettre face à leurs responsabilités. On ne fait que de l’humanitaire. Je ne me sens coupable de rien quand je vais porter à manger à des gens », raconte Pâquerette, un peintre d’une soixantaine d’années. Un arrêté municipal interdit pourtant de distribuer de la nourriture dans les rues de Vintimille. Chez Pâquerette, un placard est rempli de vivres qu’il répartit avec d’autres militants pour organiser tous les soirs des maraudes dans la ville. « Roya Citoyenne n’aide personne à passer la frontière, précise-t-il. On s’occupe des gens quand ils sont en France, on les aide à se retaper quelques jours, ils en ont bien besoin, et on les emmène plus loin pour qu’ils poursuivent leur route. »

SOLIDARITÉ CRIMINALISÉE

Individuelles ou collectives, affirmées ou discrètes, les actions de soutien aux migrants sont très nombreuses dans la vallée. Selon un autre militant, « pour les autorités, le véritable danger, c’est nous. S’ils nous éliminent, ils régleront facilement la question des migrants. » De fait, début décembre, Eric Ciotti, le président du département des Alpes-Maritimes, a dénoncé à la justice les « agissements de ces individus » qu’il assimile à des « passeurs ». Pourtant il n’en est rien. Les habitants résistants de la Roya ne reçoivent aucune contrepartie. Ils agissent par solidarité, par humanité, et parce qu’ils sont confrontés à des situations qui relèvent de l’assistance à personne en danger. « On doit se substituer aux pouvoirs publics », expliquent-ils.

Une plainte a d’ailleurs été déposée par plus de 300 citoyens contre le département, la Région PACA et l’État, pour « délaissement de personnes hors d’état de se protéger (Article 222-3 du code pénal). » D’autant plus quand il s’agit de mineurs, qui doivent être pris en charge par les services de protection de l’enfance gérés par le département, mais sont très souvent ramenés en Italie, au mépris de la loi. Plus que jamais, la volonté de l’État est de criminaliser la solidarité. Et de faire des exemples. Le 23 novembre, Pierre-Alain Mannoni, un universitaire de 45 ans, a été jugé pour avoir transporté trois jeunes Erythréennes blessées. Il affirme avoir agi par aide spontanée et humaine. L’accusation a tenté de démontrer, en décortiquant son emploi du temps, en épluchant ses SMS, qu’il était un militant engagé. Le procureur a requis six mois de prison avec sursis à son encontre. Le but est manifestement de faire peur, de dissuader les citoyens d’agir ainsi. L’intimidation ne fonctionne pas. Ils étaient des centaines à soutenir et acclamer Pierre-Alain Mannoni devant le tribunal de Nice. Lors d’une discussion informelle, le procureur lui-même reconnaissait que M. Mannoni « moralement, n’a commis aucune infraction ». La loi respectera-t-elle la morale ? « Si vous le condamnez, vous aurez une lourde responsabilité » a conclu son avocate. Le verdict sera rendu le 6 janvier. JAN-CYRIL SALEMI


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Énergie : ça turbine ! collectivités peuvent investir directement dans les projets participatifs), elle est encore loin d’être encourageante. Pour Jérôme Lelong d’Enercoop PACA, « Il faudrait que cela avance plus vite : trop peu de gens sont informés de ces possibilités, et pourtant, quand on a une dynamique vraiment locale qui se concrétise, ça marche ! » Enercoop est fournisseur d’électricité, dans l’optique du scénario negaWatt qui envisage une réduction de la consommation énergétique, et il se réjouit que les citoyens « puissent produire l’électricité qu’ils vont consommer ».

POUR QUI ? POUR TOUS !

Carte des projets soutenus par Energie Partagée en PACA

L

es projets citoyens d’énergie renouvelable commencent à se multiplier, conjuguant respect de l’environnement, démarche non spéculative et ancrage local. Le gouvernement s’enferre dans le nucléaire ? Les multinationales « fossiles » creusent toujours ? C’est vrai, hélas, mais un frémissement parcourt nonobstant le monde de l’énergie. Produire de l’électricité renouvelable sur le toit d’une entreprise ou d’une école, soutenir un projet de méthanisation porté par des agriculteurs, rénover un vieux moulin : la transition énergétique est en marche en dépit des freins, et elle passe par la multiplication des projets à l’échelle locale. Même avec des politiques à la traîne, de plus en plus d’initiatives citoyennes naissent, résolument exigeantes, ambitieuses, et efficaces.

LA MARIE-THÉRÈSE

Les habitants de Velaux ont la chance d’avoir un petit fleuve traversant leurs terres, L’Arc, dont le débit a permis pendant des siècles de moudre de la farine ou de presser de l’huile d’olive. Depuis 1962 et jusqu’en 2011, il produisait de l’électricité hydroélectrique sur le très beau site de la Marie-Thérèse. Une pale cassée, un propriétaire vieillissant... l’activité

ne pouvait perdurer. Jusqu’à ce qu’un collectif constitué sous forme de SAS, Provence Énergie Citoyenne, entreprenne de sauver l’ancien moulin. Leur objectif : remettre la Marie-Thérèse en exploitation, et atteindre une puissance de 150 KW pour une production moyenne de 510 000 KWH par an. Pour cela, il faut réunir un gros budget, compter sur un financement participatif, et aller voir les banques. Une subvention de la Région PACA à hauteur de 150 000 € devrait y aider les Velauxiens. « On va commencer avec la Nef », déclare Denis Hoarau, ancien ingénieur au cœur du projet, passionné d’énergies renouvelables, et déterminé à trouver une solution technique pour que les poissons puissent monter et descendre le cours d’eau sans empêchement.

CIRCUIT COURT

La Marie-Thérèse est un bon exemple de ce qu’il est possible de mettre en place pour assurer la production d’une énergie propre et renouvelable et lutter contre le réchauffement climatique. Partout en France, des structures accompagnent ceux qui veulent se lancer sur leur territoire, pour les aider à surmonter difficultés administratives et écueils juridiques. Même si la législation évolue (aujourd’hui, les

À la Seyne-sur-mer ou à Ventrabren, d’autres centrales citoyennes sont en phase de développement. Il existe aujourd’hui une grande diversité de projets : photovoltaïque, grand éolien, méthanisation ou hydroélectrique, en coopérative, au fonctionnement collégial, initié par des particuliers, sur chantier participatif, avec implication ou non de collectivités et d’entreprises... on peut choisir ceux qui privilégient l’éthique (et ce n’est pas incompatible avec une certaine rentabilité, lorsque l’argent est réinvesti sainement). Comme le formule Arno Foulon de la plate-forme Énergie partagée, « les outils et le réseau sont en place, il faut à présent changer d’échelle et passer à des projets plus importants ». Alors quoi ? Fonçons ! GAËLLE CLOAREC

pour aller plus loin Rapport 2016 ADEME : ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/quelle-integration-territoriale-enr-participatives-2016-rapport.pdf Énergie partagée PACA : energie-partagee.org/nous-decouvrir/ les-reseaux-regionaux/energie-partagee-paca Enercoop PACA : paca.enercoop.fr negaWatt : negawatt.org Provence Énergie Citoyenne : provence-energie-citoyenne.fr


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14 société

Fêtes au MuCEM LE MUSÉE DES CIVILISATIONS DE L’EUROPE ET DE LA MÉDITERRANÉE CÉLÈBRE LES MOTS DU MONDE

Piscinao de Ramos, Brasil. 2012. Beach series © Massimo Vitali

APRÈS BABEL, TRADUIRE

La grande exposition Après Babel, traduire débute le 14 décembre. Une occasion unique de réfléchir ensemble à ce que parler veut dire, avec la grande philologue et philosophe Barbara Cassin au commissariat (accompagnée de Zeev Gourarier, directeur scientifique des collections du MuCEM). Celle pour qui « le passage d’une langue à une autre, c’est aussi la transmission des savoirs et la transmission des pouvoirs » ne se contentera pas d’effleurer une telle thématique, aussi riche que profonde. Le 16 décembre elle a prévu une table ronde audacieuse, qui rassemblera ses confrères Souleymane Bachir Diagne, Philippe Borgeaud et Adi Ophir autour des Intraduisibles des trois monothéismes : Dieu, le livre, l’incroyant. Ils restitueront à cette occasion les résultats des deux journées précédentes, consacrées par l’Institut Méditerranéen des Métiers du

Patrimoine à un workshop sur ce même thème. Comme c’était le cas les années précédentes lors des cycles sur Le Bonheur et Où va la France ? qui avaient remporté un franc succès, le MuCEM renouvelle son partenariat avec l’Institut de Sciences Politiques d’Aix-en-Provence. Ses étudiants prépareront avec la rédactrice en chef de Zibeline, Agnès Freschel, une série de conférences de Nurith Aviv (le 25 janvier), Frédéric Boyer (le 26), Souleymane Bachir Diagne (le 27), Heinz Wismann et Martin Ruess (le 2 février), Barbara Cassin et Magyd Cherfi (le 3 février) portant sur un fil rouge : traduire la parole religieuse. Le mythe de Babel interroge sur la notion de langue sacrée, ou originelle, et sur cette punition divine qui consisterait à séparer les hommes en multipliant les langues. Faut il traduire la parole de Dieu, est-ce la trahir ou la répandre ? Que signifie « penser entre

les langues », et les différences sont-elles une richesse ou une malédiction ? Les étudiants utiliseront le fruit d’un travail préalable avec les lycées marseillais Ibn Khaldoun, Saint Joseph les Maristes, Yavné, Antonin Artaud et Saint Charles, à qui ces questions ont été posées.

AUTRES EXPOSITIONS

Si vous l’avez ratée, vous avez jusqu’au 2 janvier pour voir l’exposition Albanie, 1207 km Est, consacrée à la scène artistique contemporaine albanaise. Parallèlement, Café In se poursuit jusqu’au 21 janvier, avec son Université Populaire du Café en hors-les-murs : le 10 décembre à la Brasserie des Templiers, elle portera sur le développement de la caféiculture cubaine au XIXe siècle, et le 17 à La Criée, sur l’addiction à la caféine. Le 7 janvier, on se demandera Qu’est-ce qu’un bon café ? aux


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Docks de la Joliette, et le 14, dans les ateliers partagés Make it Marseille, on découvrira l’univers esthétique lié au breuvage. Par ailleurs, au Centre de Conservation et de Ressources du MuCEM, rue Clovis Hugues, à partir du 10 décembre et jusqu’en mai, se tient l’exposition évolutive de l’artiste Miguel Palma, qui a travaillé avec une classe du collège marseillais Versailles sur une cité idéale.

JEUNE PUBLIC

avec un concert participatif polyglotte. Et à la fin de tous ces spectacles, rendez-vous au Forum pour décorer le sapin à mots ! Enfin, le 15 janvier une visite-jeu en famille est prévue dans la galerie de la Méditerranée : un guide-cuisinier initiera les tout-petits aux plantes comestibles, grâce à ses « histoires à croquer ».

AUTRES ÉVÉNEMENTS

zen-studio.com

Un nouveau cycle naît au MuCEM : Construire, Juste après Noël, on a souvent un contrecoup détruire, reconstruire. De décembre à juin, de désœuvrement après toutes ces agapes et le musée invitera trois metteurs en scènes ou orgies de cadeaux... pourquoi ne pas aller chorégraphes à créer un spectacle, accompagné écouter des contes au MuCEM ? C’est ce d’une installation-exposition, au croisement que propose la Baleine qui dit « vagues », le de l’archive, de la mémoire et de la création 26 décembre, pour les enfants dès 3 ans, avec artistique. Le premier d’entre eux, Roger ses Histoires et berceuses au bout de la langue. Bernat, a travaillé sur les fadettes et enreLes 28 et 29, la Cie Ito Ita les emmènera gistrements d’aspirants au djihad, placés sous explorer le Pays de La grande fabrique de écoute par la police espagnole. On découvrira mots, et les 30 et 31, pour célébrer la fin de la pièce de théâtre qu’il en a tiré les 16 et 17 l’année en musique, c’est Radio Babel qui décembre (une co-réalisation avec Les Rencontres BiAC zibeline 200x page de 1 02/12/2016 Page1 régalera les 140.qxp_Mise plus grands (àenpartir 6 ans), à 16:22 l’Échelle). Pour introduire le cycle, un débat est

également prévu le 17 avec Isabelle Barbéris et Roberto Fratini, qui s’interrogeront sur les usages de l’archive dans les arts. Le 14 janvier verra le retour des rencontres organisées par Le Percolateur autour de la photographie contemporaine. Le cycle Des Rives invite cette fois Massimo Vitali, artiste italien dont les œuvres soulignent l’absurdité du divertissement contemporain, conçu comme un impératif de consommation. GAËLLE CLOAREC

Retrouvez sur notre WebRadio Zibeline la Traversée mensuelle du MuCEM, avec sa Chronique des libraires, les interviews de Naïma Yahi autour du café chantant, Jean-François Chougnet et Anne Guiot sur les Échappées Foraines (voir p 22), Samar Khedy à propos du cycle Construire, détruire, reconstruire, et un reportage sur les « histoires à croquer ».

MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org


16 politique culturelle

LES CHIFFRES ET BUDGETS DES THÉÂTRES SONT SOUVENT COMMENTÉS, MAIS CEUX DES OPÉRAS ET DES ORCHESTRES RESTENT MYSTÉRIEUX. QU’EN EST-IL DANS NOTRE RÉGION ?

L

e Sud-est est paradoxalement doté : la Région PACA compte 4 opéras, ce qui est le record dans une région française. Ce territoire a aussi la particularité d’avoir deux orchestres régionaux dont un attaché à un opéra, celui d’Avignon, et l’autre pas, celui de Cannes. À Montpellier il y a un Opéra Orchestre National, un des 5 qui relèvent de ce label en France. On peut y ajouter, non loin, l’Opéra de Monte Carlo, qui n’est pas financé par la France mais emploie 91 musiciens, vivant en France pour la plupart. Mais cette relative abondance cache un net sous-financement de l’État, doublé en PACA d’une absence de financement de la Région, en dehors de deux orchestres régionaux. Ce qui implique que ce sont très largement les villes et les agglomérations, et les départements dans une moindre mesure, qui financent la vie lyrique et symphonique du Sud-est. Or celle-ci est très coûteuse, et représente donc une dépense très importante pour les collectivités locales. Les 5 villes ou agglomérations qui ont en charge un opéra y consacrent une très grande part de leurs budgets culturels, au détriment des autres équipements. Depuis

Nos opéras de province

2012, les subventions des 5 maisons d’opéras ont d’ailleurs baissé, globalement, de 8%. Elles n’en représentent pas moins, pour des villes comme Marseille ou Nice, près d’un quart des dépenses culturelles de fonctionnement. Quelles en sont les raisons ?

L’État et la province

La première est, plus encore que pour d’autres équipements, l’incroyable déséquilibre entre l’Île de France et les autres régions, en particulier pour ce qui est des opéras entre Paris et le Sud-est (Lyon et Lille sont bien mieux dotés). Le ministère de la Culture consacre 140 millions d’euros aux opéras et orchestres parisiens, et moins de 60 millions au reste de la France. Sur le territoire, l’Opéra Orchestre « national » de Montpellier est le moins financé des 5 opéras nationaux, avec 3 millions d’euros pour un budget global de 22 millions (Opéra de Lyon 6 millions), et l’Opéra de Marseille celui qui reçoit une des plus faibles dotations des 13 opéras aidés par l’État, soit 0,5 million : la dotation moyenne des opéras (hors Paris !) est de 2,2 millions. L’État dépense autant, dans

le territoire, pour le seul Festival d’Aix (3,62 millions) que pour les deux opéras qu’il finance. Or cette manifestation lyrique n’emploie pas de musiciens de la région, et concerne moins le public local. Quant aux orchestres, l’État en reconnaît et finance 19 en France (hors Paris), pour une dépense globale de 21 millions, soit 1,1 million par orchestre : les deux orchestres élus par l’État reçoivent cette dotation moyenne de 1,2 millions chacun, tandis que les orchestres d’Île de France ou de Lyon reçoivent plus de 2 millions. Et les Régions ne sont pas en reste, puisque la Région PACA ne finance que les deux orchestres à mission régionale, et que la Région Languedoc-Roussillon a en 2011 brutalement baissé le financement de l’Opéra de Montpellier de 9,2 millions à 4 millions. On ne sait ce que fera l’Occitanie, mais l’OONM peine à se remettre de ces 5 millions manquants, que l’agglomération de Montpellier a compensé en partie (2,5 millions supplémentaires) : la Cour régionale des comptes épingle le déficit d’une maison « nationale » qui a perdu plus de 10% de ses moyens, qui doit répondre à un cahier des

Chiffres de l’année 2014


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Budget de l’Etat pour les orchestres et opéras charges d’État en termes de création et de diffusion, dans un contexte où il est difficile de réduire les coûts sans fermer les portes...

L’emploi et le public

Car aujourd’hui tout désengagement supplémentaire des collectivités amènerait à supprimer des productions : l’Opéra de Marseille propose parfois des productions sans mise en scène, moins coûteuses, la seule variable d’ajustement à des budgets en baisse étant le coût des plateaux. Couper encore les subventions aboutirait, forcément, à la fermeture de ces opéras déjà mal financés. En effet, s’il semble possible de mutualiser davantage les productions et ainsi de faire des économies, on ne peut pas diminuer la masse salariale : les opéras emploient un personnel permanent important, bien plus nombreux que dans les théâtres. En PACA 500 musiciens et danseurs sont employés dans les orchestres, les ballets d’opéra et les chœurs, 130 à l’opéra de Montpellier. Le personnel administratif et technique représente en PACA plus de 300 emplois, et 106 à Montpellier. Toutes

ces maisons emploient régulièrement des « supplémentaires », c’est-à-dire des musiciens ou artistes nécessaires pour jouer certains répertoires, ainsi que des solistes invités pour les saisons symphoniques, et des chanteurs pour les productions lyriques. C’est donc la masse salariale qui constitue l’essentiel des dépenses, dans un des rares secteurs artistiques où l’emploi permanent existe. À chaque concours d’orchestre se présente plus d’une centaine de postulants par place disponible : le vivier de musiciens en attente d’un emploi est impressionnant, tant par son nombre que par son niveau. Quant aux spectateurs... Si les théâtres comptabilisent leur public et étudient leur composition, il n’en est pas de même pour les opéras, peu financés par l’État, et peu contraints à lui rendre des comptes. Seul l’Opéra de Montpellier, national, rend chaque année publique sa fréquentation, autour de 25 000 spectateurs, pour des recettes de 800 000 euros environ. On peut juger, en fréquentant les opéras toujours pleins pour les productions lyriques, et souvent pour les concerts, que les 1830 places de l’opéra de Marseille, les

1180 de Nice, les 1300 de Toulon et les 1120 d’Avignon représentent annuellement, avec leurs 50 représentations chacun en moyenne, quelques 275 000 spectateurs pour les seuls opéras et concerts symphoniques. Soit environ 9 millions de billetterie, sans compter les concerts de chambre, nombreux à Marseille, Nice et Toulon, ou les concerts symphoniques hors les murs, spécialité des orchestres régionaux de Cannes (voir p18) et d’Avignon. Pour information, le Festival d’Aix accueille, toutes représentations confondues, 82 000 spectateurs. Ses 8 millions de subventions publiques ne représentent que 35% du budget total (22,3 millions) d’un festival qui sait produire des recettes (4 millions de billetterie), et convaincre mécènes et médias (7,2 millions). Reste que le financement de la vie lyrique et symphonique est incroyablement inégalitaire : la place des spectateurs parisiens (74% du public des Opéras de Paris est Parisien, 11% sont étrangers, 12% viennent d’Île de France, et 3% des autres régions), et dans une moindre mesure des festivaliers, est financée avec l’argent des Français. Celle des provinciaux avec les impôts locaux... AGNÈS FRESCHEL

Chiffres de l’année 2014


18 politique culturelle

L’appel du sud BENJAMIN LÉVY A ÉTÉ NOMMÉ DIRECTEUR ARTISTIQUE ET CHEF D’ORCHESTRE PERMANENT DE L’ORCHESTRE RÉGIONAL DE CANNES, ET A PRIS SES FONCTIONS LE 1ER NOVEMBRE

A

nnie Courtade, Présidente de l’Orcpaca, insiste sur les qualités de ce jeune chef, dont la candidature a été retenue parmi les 160 proposées. « Il y avait de solides critères de choix, parcours, projets, capacité à s’investir dans des missions artistiques, pédagogiques et sociales, jeunesse, adaptabilité, sens du management et pour un contrat au moins de 3 ans (renouvelable ad libitum), afin de mener vraiment un projet structuré… On cherchait un peu l’être parfait. » Avec son effectif mozartien de 37 musiciens, l’orchestre a la particularité d’être consacré à des fonctions d’orchestre symphonique, et d’être le seul de la région à ne pas être attaché à un opéra. Sandrine Deschamps, directrice administrative de l’Orcpaca (et qui a dû gérer la carence de directeur artistique depuis septembre 2016), explique : « Cette année, nous avons réussi à trouver un équilibre, mais les frais ne cessent d’augmenter et les subventions ne peuvent augmenter en conséquence. Nous remercions chaleureusement tous nos mécènes (comme l’association Andantino) et les institutions qui nous soutiennent avec une remarquable constance ! » Benjamin Lévy s’indigne des clichés sur le sud, et se montre plus qu’agréablement surpris de constater à quel point les préjugés parisiens sont erronés. Zibeline : Comment concevez-vous la dimension régionale de l’Orchestre ? Benjamin Lévy : L’Orcpaca a déjà cette dimension régionale, donne des concerts dans divers lieux de la Région, s’attache aux différents publics (à noter Sympho New Académie). Je salue tous les efforts accomplis. Je souhaite que cette maison puisse s’ouvrir aux gens de Cannes, avec des répétitions portes ouvertes, ménager des temps d’échanges, renforcer les passerelles avec le monde des études musicales, intégrer par le biais de projets spécifiques des musiciens amateurs à l’ensemble, poursuivre le travail mené auprès des écoliers collégiens et lycéens (cette année, ils rencontreront West Side Story). Je veux aussi aller à la rencontre de la population en installant l’orchestre dans des lieux inhabituels comme à port Canto en début de saison. Le public se sent légitime quand on va dans ses lieux familiers. Des paroles aussi ? Je souhaite en effet abolir la distance entre concert pédagogique et « vrai concert ». Une

Benjamin Lévy, chef d’orchestre de l’orcpaca et Berthilde Dufour, premier violon super soliste © Maryvonne Colombani

approche moderne du public c’est prendre en compte sa réalité actuelle, il est nécessaire d’échapper à la rigidité conventionnelle. Des collaborations… Avec l’ERAC, l’École Supérieure de Danse Rosella Hightower, le Festival du film… Continuer à développer l’action de l’orchestre en région (festivals, nouvelles salles), par le biais de projets spécifiques, opéras en version concert, travail avec les ballets… La transversalité des arts, c’est très important. Poursuivre aussi les master-class de chef d’orchestre, instituées par W. Doerner, inventer une sorte d’internat (si je reprends une formulation d’études de médecine) destiné aux artistes français ou résidant en France. Un répertoire à élargir ? Je souhaite faire de l’Orcpaca un bijou d’orchestre de musique de chambre ; mais aussi aller au-delà et en-deçà des siècles classiques, aborder les préclassiques, Rameau, Bach (…) et l’univers contemporain. Je me refuse à la segmentation, aux clivages, afin de pouvoir envisager tous les répertoires. Cet orchestre est plus qu’attachant, doté d’une forte personnalité. J’ai été « l’amant » de nombreux orchestres en tant que chef invité, j’aspire au mariage, et à établir un lien stable et durable avec ce bel ensemble !

Les musiciens se réjouissent visiblement de ces ouvertures nouvelles et l’entente est d’emblée perceptible. Un mariage qui débute sous une bonne étoile ! PROPOS RECUEILLIS PAR MARYVONNE COLOMBANI

quelques repères en chiffres 1975 : fondation de l’Orchestre Régional de Cannes par Philippe Bender (1975 - 2012), auquel succède Wolfgang Doerner (2013 - août 2016) 48 salariés dont 37 musiciens Montant global de fonctionnement : 4 millions d’euros Subventions: Mairie de Cannes : 1 087 750€ État (Drac) : 1 135 000€ Département : 600 000€ Région : 600 000€


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Expérimentons LE GMEM, CENTRE NATIONAL DE CRÉATION MUSICALE, ABSORBE ensemble LE GRIM, SON DIRECTEUR ET SON HISTOIRE. POUR LE MEILLEUR ? Zibeline : Vous dirigez un des sept centres nationaux de France. De quelle nature est aujourd’hui votre rapprochement avec le Groupe des musiques improvisées de Marseille ? Christian Sébille : Il s’agit d’une absorption. La fusion a été signée le 5 décembre, en assemblée générale. Jean Marc Montera, qui dirigeait le GRIM, est désormais artiste associé au GMEM. Les deux structures fusionnent sans perte d’argent, en dehors de la baisse du conseil départemental de l’an dernier, que toutes les structures ont subie. Pourquoi cette opération ? La DRAC voulait arrêter de financer le GRIM et donner au GMEM les 50 000€ de leurs subventions. Mais j’ai voulu garder ce Groupe mythique. Je le connaissais bien avant mon arrivée à la direction du GMEM il y a 5 ans, il n’était pas question pour moi de le voir disparaître. Donc nous nous sommes entendus pour une fusion. Entretemps l’idée d’emménager à la Friche s’est concrétisée, la Ville était très contente de notre emménagement commun, les tutelles du rapprochement de nos moyens. Donc au lieu des 900m2 prévus pour le GMEM nous avons aujourd’hui un bâtiment de 1300m2. Est ce que cela va changer votre projet artistique ? Nous ferons plus de musique expérimentale et improvisée, mais nous en faisons déjà ! Quand emménagerez-vous dans votre nouveau lieu ? En février. Le lieu est conçu en trois zones : 300m2 de bureaux partagés, © Pierre Gondard en partie en open space, avec une cuisine conviviale... une zone pédagogique et d’accueil, qui sera ouverte aux étudiants et élèves du conservatoire, avec une salle pédagogique, mais aussi une « Place » de 140 m2 où nous pourrons faire de petits concerts, des conférences, qui sera une sorte de foyer pour ceux qui fréquenteront le lieu, et l’ensemble CBarré qui est embarqué dans notre aventure. Et puis la zone artistique, avec deux studios de répétition et de composition de 40 et 80m2 ; un grand studio sourd et mat de 100m2 avec

une cabine de 60m2 pour les enregistrements, équipé aussi en cinéma et vidéo. Et puis l’église, la cathédrale, la Mecque, on cherche un nom ! Un plateau de création de 200m2, qui pourra accueillir tous les projets en pluridisciplinarité. L’orchestre de Marseille y a déjà planifié son prochain enregistrement... Pourra-t-elle accueillir du public. ? 109 personnes. Notre but n’est pas d’en faire une salle de diffusion, nous allons bien sûr occuper celles de la Friche, comme tous les

résidents, lors de nos festivals. Mais le plateau et les espaces pédagogiques pourront accueillir des classes, des visiteurs, des formes en cours... pas à proprement parler du public, mais le lieu sera le plus ouvert possible. Combien a t-il coûté ? 2,8 millions, plus 800 000€ de matériel. L’État et la Région l’ont financé dans le cadre du contrat de plan, et le million restant est venu de la Ville et du département à parts égales. Cela s’inscrit dans le projet global de la Friche,

qui va continuer les travaux... Allez-vous inaugurer votre lieu ? Officiellement bien sûr, mais nous attendons surtout le festival Les Musiques pour y programmer de petites formes pour nos visiteurs, une installation, un duo entre Jean Marc Montera et moi, des massages sonores... Des massages sonores ? Oui, des séances de guili-guili avec des sons, très sensuelles, où nous faisons crisser et bruire des objets à l’oreille... Donc vous êtes content ? On le serait à moins ! Que pensez-vous de la place de la musique contemporaine sur les scènes de la région ? C’est très paradoxal ! Alors qu’il y a ici un grand nombre de créateurs et d’ensemble, les scènes généralistes ne les programment pas ! Les scènes de la région sont en nette régression sur ce point. Heureusement qu’il y a le GMEM, nos amis de Télémaque, un peu Musicatreize et Marseille Concerts, pour programmer des concerts ! Les scènes nationales, qui devraient être pluridisciplinaires, ont renoncé. Pourquoi cette frilosité des programmateurs ? Les programmateurs sont de plus en plus tenus à des processus d’évaluation en termes de public et de coûts. Or la musique contemporaine coûte cher, et nécessite un vrai accompagnement du public pour une scène généraliste. Il est plus facile de programmer de la danse ou des petites formes de cirque. Et puis les programmateurs connaissent mal le domaine, lorsqu’on propose des projets on se heurte à leur peur esthétique, qu’ils n’ont plus avec la danse ou le cirque contemporain. Le public est pourtant de plus en plus nombreux à aller vers ces musiques. Oui, mais on remplit quand même plus facilement avec Anne Teresa de Keersmaeker qu’avec l’ensemble Ictus tout seul... ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL


20 politique culturelle

Résister à Béziers

s

ortieOuest, en proie à des difficultés financières, est soutenue par une association active et déterminée. L’État et la Région Occitanie vont-ils mettre en place une politique volontariste de résistance au FN, comme ils l’ont fait à Châteauvallon lorsque Toulon avait élu un maire Front national ? Rencontre avec la Présidente de l’association Zibeline : Quelle est l’histoire de sortieOuest ? Françoise Arnaud Rossignol : C’est une scène qui est née il y a dix ans, soutenue par le Conseil général à l’époque. Un grand chapiteau un peu improbable, et devenu aujourd’hui indispensable. Jean Varela a su donner à ce lieu

un ton particulier, multiforme. SortieOuest programme du théâtre, mais aussi du jazz, de la musique classique, rayonne sur le territoire biterrois et au-delà, se déplaçant dans les villages, travaillant avec plus d’une dizaine de lycées. Un véritable service public. Le définiriez-vous comme un lieu de résistance, dans le contexte politique fortement marqué par le Front national ? Certainement, même si nous ne faisons pas de politique, sinon avec un grand P. Dans notre comité de soutien il y a des gens de toutes tendances, hors le Front national. Quelle est l’origine du problème financier de sortieOuest ?

La construction de ce lieu s’est faite sur des bases budgétaires qui n’ont jamais été consolidées. Chaque année le Conseil départemental abondait un budget nettement insuffisant pour les 180 représentations, et une somme d’actions considérables. Cette année la restriction budgétaire n’a pas permis d’annoncer une programmation de saison au-delà de décembre. Ceci dit, depuis la création et le succès de notre association, le Conseil départemental a dit que le budget 2017 allait reconduire celui de 2016, ce qui est une victoire. La scène est aussi conventionnée pour les écritures contemporaines par l’État. Nous allons pouvoir annoncer la programmation 2017 en décembre.

En jeunesse, toute ! BEAUCOUP DE BONNES FÉES ÉTAIENT PENCHÉES SUR LE BERCEAU CE 1ER DÉCEMBRE À MIREVAL, POUR PRÉSENTER UN NOUVEAU LIEU DÉDIÉ À L’ENFANCE ET LA JEUNESSE

À

commencer par le Directeur régional des Affaires culturelles de la région Occitanie, Laurent Roturier, qui s’est déplacé avec la conseillère Théâtre et Danse Nathalie Piat. Le Centre culturel municipal Léo Malet, désormais bien identifié dans l’espace culturel du Bassin de Thau depuis son inauguration en 2007, devient un site de production et diffusion de spectacles pour ce public tant convoité et difficile à toucher : les « jeunes ». Cela fait bientôt deux ans que le maire Christophe Durand, après la fermeture de la scène conventionnée jeunesse de Villeneuve-lès-Maguelone, a commencé de monter ce projet. Très rapidement, la Scène nationale de Sète, avec

son directeur Yvon Tranchant, est devenue un partenaire actif et précieux. Dans ce cadre, le lieu accueillera, dès 2017, plusieurs spectacles et un artiste en résidence : Joris Mathieu, directeur du Théâtre Nouvelle Génération à Lyon, inaugurera ce nouveau programme de production régionale et nationale avec une création in situ. Pour l’instant les financements sont modestes (60 000 € pour 2016, la majeure partie utilisée pour la journée de lancement du 10 décembre, qui propose de nombreux spectacles, animations et ateliers gratuits au sein du lieu qui se dotera d’une scène extérieure supplémentaire et d’un chapiteau), mais la structure espère

De gauche à droite : Antoine De Rinaldo, vice-président de la Communauté d’agglomération du Bassin de Thau, Christophe Durand, vice-président de la Communauté d’agglomération du Bassin de Thau délégué à la Culture et Maire de Mireval, Laurent Roturier, Directeur de la DRAC Occitanie, Yvon Tranchant, Directeur de la Scène nationale de Sète et du Bassin de Thau, René Spadone, Président de l’Association Scène nationale de Sète et du Bassin de Thau, Nathalie Piat, conseillère Théâtre et Danse © X-D.R

fédérer tous les partenaires (État, Région, Département, Agglomération du Bassin de Thau) afin d’obtenir les subventions nécessaires au plein fonctionnement du projet, d’ici deux à trois ans. Travail de longue haleine en effet, que ce maillage du territoire culturel. Le projet de Mireval est ambitieux, et offre à la Scène nationale de Sète une seconde salle, qui manquait à son théâtre historique, pour le travail de création. Jusqu’à présent il fallait attendre les vacances, ou se délocaliser à Paris, Avignon ou ailleurs pour les créations. Désormais, les compagnies (régionales et nationales) seront accueillies entre une à trois semaines à Mireval, installant la présence des artistes dans le quotidien de cette commune du Bassin de Thau, et permettant aux spectacles d’éclore dans le territoire. Ils seront ensuite diffusés en priorité dans l’ensemble des bientôt 14 communes de l’agglomération.

ÉQUILIBRE

Si « la culture est souvent un besoin non exprimé », comme l’explique Laurent Roturier, il s’agit alors d’investir les lieux et les cœurs patiemment, pour que cette nécessité, inconsciente aux dires du Directeur de la DRAC, se mue en désir, en envie gourmande et citoyenne.


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NOVEMBRE 2016

SAISON 2016 // 2017

JANVIER

© Laurent Weyl Argos

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CRÉATION 2017

18 / 11 / 16

Mais il faudrait que tout cela évolue encore… Vers quoi ? La DRAC et la Région acceptent de nous recevoir. Il faut consolider le budget de façon pérenne, ils doivent s’engager davantage, s’ils veulent que Béziers ne sombre pas dans le silence artistique. Quelles sont vos relations avec la municipalité de Monsieur Ménard ? Aucune. Avant nous avions des spectacles coprésentés avec le Théâtre de Béziers. Aujourd’hui sortieOuest est un lieu d’équilibre important pour le Biterrois, ses habitants. Indispensable. Il faut que l’État et la Région en prennent conscience, et nous aident.

THÉÂTRE

Voilà pourquoi les enfants et les jeunes sont particulièrement visés. Ils sont le public de demain, les sensibilités à nourrir. Un programme qui inspire et motive : Yvon Tranchant, qui a annoncé il y a peu quitter ses fonctions prochainement, confie que l’ensemble des candidats à sa succession sont « excités au premier plan par ce nouveau pôle jeunesse, ils ont tous plein d’idées à proposer ». Mais alors, brule-t-on de demander à cet aréopage, qu’en est-il des publics déjà conquis, qui voient l’offre culturelle établie gravement menacée ? Pourquoi développer un nouveau pôle de création, certainement nécessaire et toujours bienvenu, si, quelques dizaines de kilomètres plus à l’ouest, une structure départementale a dû limiter sa programmation de saison aux trois premiers mois de l’année ? « Nous maintenons nos financements et appuis pour la scène conventionnée sortieOuest », répond Laurent Roturier, « et notre mission est de développer, quel que soit le territoire, la culture, avec un principe d’égalité d’accès. » Louable perspective. Mais peut-être que parfois, lorsque le contexte est miné par une politique frontiste comme à Béziers, faudrait-il faire pencher la balance, quitte à bousculer un peu les principes d’égalité.

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ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL

1 ère d e c r é a t i o n art is t e de la B ande / c oproduc t ion M erlan

JEU. 19 & VEN. 20 JANVIER 2017 > 20h30

FACE À MÉDÉE

François Cervantes / C ie L’entreprise « Je voudrais que nous entrions dans le territoire des larmes, sans hystérie, sans pathos, pour partager certaines questions brûlantes d’aujourd’hui » François Cervantes

ANNA ZISMAN

Pour inaugurer le nouveau site de production et diffusion de Mireval, une Fête de l’enfance et de la jeunesse aura lieu le 10 décembre au Centre culturel Léo Malet. Les parrains de cette journée sont Emmanuel Demarcy-Mota et Joris Mathieu.

Médée vient du lointain, un lointain à peine concevable et pourtant enfoui en nous. François Cervantes réécrit le mythe de cette figure incandescente à travers trois femmes qui partent à sa rencontre et nous ouvrent les portes de la tragédie dans un récit intemporel et bouleversant. SAISON 16/17

04 67 74 66 97 scenenationale-sete-bassindethau.com ville-mireval.fr

t arif s : 1 5 / 10 / 5 / 3 € durée ± 1 h1 0 / ≥ 14 a ns


22 événements

Forains, foraines

F

olies foraines à La Friche, Échappées Foraines pour le MuCEM : deux propositions qui s’articulent autour d’un univers foisonnant, celui des foires, avec leurs attractions, kermesses et entresorts. NB : l’entresort est une baraque ou un lieu exigu dans lequel on entre et sort rapidement, après avoir assisté à un court spectacle. Le Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée s’associe avec Karwan pour un événement centré sur les arts forains. Parmi d’autres trésors de ses collections, le manège anglais Burton (XIXe) sera remonté par Sud Side à la Cité des arts de la rue le 11 décembre. Une vraie fête catalane y attend petits et grands, ainsi qu’une exposition-atelier, pour pouvoir mettre les mains à la pâte. Le week-end des 17 et 18 décembre, c’est à La Friche que l’on pourra découvrir les fameux entresorts (petites formes spectaculaires d’un quart d’heure maximum, donc) dont la simple description fait rêver : « du cinéma vintage et bizarre, des photomatons décoiffants, des lectures chuchotées, de la magie en close up, des clowns, une danseuse de revue »... et une mystérieuse femme à barbe « à la façon » du comédien Gurshad Shaheman. Sans compter toboggan géant, chamboultou, tir

Caroussel Titanos © Clément Martin

à la carabine de noyaux d’olives, crèche sanglante de Christian Carrignon, attractions artistiques de la Cie Antigua i Barbuda, et autres festivités délurées. La programmation est assurée en partenariat avec Karwan, le TNM

La Criée et Les Théâtres, et l’événement se tient en parallèle des autres rendez-vous de fin d’année à La Friche : le Grand Marché d’hiver où se procurer produits frais et douceurs de saison (un grand concours de chichis fregi est

A

insi le proclame l’édito du Festival Nuits d’Hiver, initié par le GRIM : à quatorze ans, c’est la pleine adolescence ! Et toujours une passionnante découverte des diverses approches de l’improvisation et de l’expérimentation musicale entre Montévidéo, la Friche Belle de Mai, l’Embobineuse, les ABD Gaston Defferre et le Temple de la rue Grignan à Marseille. On s’interrogera aux côtés de Nicolas Debade sur ce « qu’aurait voulu «dire» ou pas le compositeur d’une œuvre », de Beethoven à Merzbow. Chris Cutler, percussionniste de légende, apportera son ingéniosité et son goût pour les points de rupture périlleux, avec Not a Walk in the Park. Les déplacements des requins-marteaux des Galápagos génèrent grâce aux recherches et aux travaux de Kaffe Matthews les étranges enregistrements de Love Shark. Veine animale encore avec My cat is an Alien et les instruments à cordes « faits maison » de Maurizio Opalio, les

Clara de Asis © Pierre Gondard

Le temps de l’adolescence vocalisations et alienstronics de Roberto Opalio et la voix de Joëlle Vinciarelli. On voyage dans le temps, de l’ère préhistorique à l’antiquité sur Les Mémoires de la Méditerranée de Braudel avec les musiciens improvisateurs de Das Mollsche Gesetz et le duo d’artistes vidéastes Telefante et Anthony Moore pour une Longue durée que suivent les improvisations vertigineuses des platines et saxophones de Mats Gustafsson et DIEB13. Post-rock et krautrock croisent strates vocales de Nicolas Dick et rythmes complexes de Jean-François Thieulen, détonnant duo ! Le groupe bordelais de post-métal, Year Of No Light (YONL), apporte par ses compositions d’une ténébreuse beauté ses sonorités de black/doom metal, ses ambiances psychédéliques. Évoluant entre le mysticisme de Hildegard Von Bingen (XIe siècle) et les œuvres de John Cage, les guitaristes Noël Akchoté et Clara de Asis déclinent l’inspiration de leurs improvisations,


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Dansez maintenant ! même annoncé !), et le Marché des créateurs pour boucler ses cadeaux de Noël. À ne pas manquer : le dimanche à 16h30, une rencontre avec Zeev Gourarier, directeur scientifique du MuCEM, et son invité Marcel Campion -oui, celui qui a bloqué la place de la Concorde à Paris pour protester contre le démontage de sa grande roue. Les deux compères se demanderont Où en est la fête foraine ?, avant de laisser place à la musique (un concert de jazz manouche par Marcel Campion lui-même). Une visite de la collection foraine du Centre de conservation du musée est également prévue les 19 et 20 décembre, rue Clovis Hugues à la Belle de Mai (réservation conseillée au 04 84 35 14 23 ou reservationccr@mucem.org). GAËLLE CLOAREC

Échappées Foraines 11 décembre Cité des arts de la rue, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org Folies foraines 17 & 18 décembre La Friche, Marseille 04 95 04 95 95 lafriche.org

par des « Varians » inspirées. L’univers singulier des chansons folk d’Heather Leigh passe de la douceur à une sauvage incandescence, tandis que phénomènes paranormaux et OVNIS hantent les Émissions Transparentes de Jean-Marc Montera (directeur du GRIM) et autres créations du banjoïste Paul Elwood. Les œuvres du « Viking de la 6e avenue », Moondog, seront proposées aux orgues de Freddy Eichelberger. Enfin, la soirée de clôture sera peuplée d’improvisations, de surprises, suivies d’un dj-set. À cela ajoutez la convivialité, la chaleur de l’accueil… L’hiver, quelle belle saison ! MARYVONNE COLOMBANI

du 14 au 21 décembre Montévidéo, Marseille 04 96 20 60 16 grim-marseille.com

P

our la seconde année consécutive le BNM (Ballet National de Marseille) propose une semaine festive. Les deux directeurs, Emio Greco et Peter C. Scholten, creusent et élargissent leur projet initial : donner au corps en révolte la liberté de s’exprimer au sein du corps du Ballet. Avec le souci du partage. Une expérience à tenter à partir de 10 ans : Nightwalking propose de remonter à la source des émotions Quelque part au milieu de l’infini, Amala Dianor © Matthieu Serreau avec un parcours les yeux bandés ; non-stop tous les soirs de 18 à 22h (environ conférence de l’historienne Geneviève 20 mn). Une conférence le 15 décembre fera Vincent dans le cadre de Parlons danse(s) le point sur les pratiques de professionnels sur la conception du corps dans l’œuvre de de centres médicaux qui travaillent avec des Greco (5€). publics empêchés. Pour finir en beauté, soirée festive avec En coproduction dans le cadre d’Accueil stu- le DJ Carlos Valdes et les cocktails des dio, Amala Dianor dansera avec deux autres Marseillaises ! CHRIS BOURGUE interprètes Quelque part au milieu de l’infini, puis Arno Schuitemaker chorégraphiera BNMFEST une danse énergique proche de la transe avec 12 au 17 décembre I will wait for you (le 12 décembre). Première 04 91 32 72 72 ballet-de-marseille.com en France, Offline d’Amos Ben-Tal, en direct des Pays-Bas pour un échange poétique (le 14). Créations maison : Crisi de E.G/P.C.S avec DU 9 AU 21 DÉCEMBRE 2016 6 danseurs qui appartiennent au dispositif Une exposition-vente dédiée à l’objet d’art, proposée par 12 galeries BNMNext, véritable tremplin pour les jeunes en et structures d’art contemporain cours de professionnalisation, suivi d’extraits du réseau Marseille expos. d’Extremalism (voir journalzibeline.fr) créé à Amsterdam en 2015 puis joué à Marseille. Le 17 décembre, place à une table ronde sur les arts et la science avec une réflexion sur l’utilisation des drones : comment une machine de jeu se transforme en machine de guerre ; avec illustration par le chorégraphe Eric Minh Cuong Castaing en résidence en tant qu’artiste associé jusqu’en 2018. Il propose une performance spatiale avec 4 danseurs et des drones, une mise en bouche avant la réalisation du projet (le 17). Deux nouveautés vont dans le sens de l’ouverture : BNMCiné proposera tous les mois des films de danse suivis d’une rencontre ; lancement le 13 décembre avec Symmetry, GALERIE DU 5E opéra-danse filmé de Ruben Van Leer et

* CHRISTMAS ART MARKET 2016 *

tourné au CERN, Centre d’études nucléaires, montrant l’univers d’un physicien chercheur et l’union art et science ; BNMDoc, centre de ressources documentaires, ouvre les archives du Ballet et d’autres compagnies avec vidéos et photos en accès libre. On retrouve des propositions d’atelier de Pilates et de contemporain, trois ateliers au choix le 15 décembre (5€ par atelier) ; une

Espace culturel des Galeries Lafayette Marseille Saint Ferréol, 5e étage 40 rue Saint Ferréol, 13 001 Marseille 04 96 11 35 00 Entrée libre. Du mardi au vendredi de 14h à 18h et le samedi de 11h à 19h facebook.com/LaGalerieDu5eme


24 événements

Flamenca Nîmes L’hiver sera chaud à Nîmes, comme chaque année en janvier depuis 26 ans, avec l’édition 2017 du Festival Flamenco

Rocio Molina © Pablo Guidali

D

ix jours de retrouvailles et de découvertes, de musique, de danse, de chant, avec un hommage à El Lebrijano, disparu en juillet dernier : après sa mémorable prestation il y a deux ans, son neveu Dorantes, pianiste iconoclaste qui a su imposer l’instrument dans le cœur du genre, puis son frère, le grand guitariste Pedro Peña, viendront célébrer son héritage. Mise à feu du festival avec de la dynamite : la danseuse Rocío Molina, pour qui chaque spectacle semble être l’ultime moyen de rester en vie. Caída del Cielo est une création 2016, nouvelle proposition intense de la danseuse phare du flamenco contemporain. Moins habitué aux feux de la rampe, puisqu’il excelle « derrière » chanteurs ou danseurs en magnifique guitariste accompagnateur, Rafael Rodríguez passe cette année au premier plan, avec une carte blanche dont il s’est emparé avec beaucoup de ferveur. Il a convié deux chanteurs en pleine ascension, José Anillo et David Palomar, et, aux côtés des deux danseurs de premier plan Milagros Mengibar et Javier Barón, Rocío Molina reviendra partager l’affiche. Une fois n’est pas coutume, le spectacle de danse Mehstura réunit un ensemble de sept femmes. Danseuses, chanteuses, musiciennes, elles font bloc et affrontent les stéréotypes

machistes, bien installés aujourd’hui encore dans la culture flamenca. Manuel Liñán et son Reversible, prix de la critique au dernier Festival de Jerez, prendra

la suite, nouvelle proposition qui renverse les conventions, nourrissant son propos des facéties de l’enfance, fil rouge du spectacle. Vicente Amigo, guitariste étoile, clôturera somptueusement le festival, avec une prestation dont on dit qu’elle a rendue muette d’admiration et d’émotion les spectateurs de Séville. Conférences, rencontres et films seront aussi proposées tout au long de ces journées flamenca, avec une présentation mise en scène et en musique, en avant-première, du film d’animation réalisé par le dessinateur nîmois Eddie Pons. Une trentaine des 52 saynètes de Flamen’Comic, prochainement diffusé sur France 3 Sud, permettra de découvrir le duo comico-musical d’un chanteur de flamenco et son inséparable complice guitariste. ANNA ZISMAN

Flamenco 2017 Nîmes du 12 au 21 janvier Nîmes 04 66 36 65 10 theatredenimes.com

Débats et expo à la Villa Méditerranée

L

e cycle des Mardis de la Villa se poursuivra naturellement en 2017, mais à l’heure d’écrire ces lignes la programmation de janvier n’est pas encore arrêtée. Le dernier rendez-vous de 2016 aura lieu le 13 décembre et aura pour thème Royaume d’asphalte, jeunesse et révolte en Arabie Saoudite. L’intitulé peut surprendre tant on connaît mal en Europe les mouvements de contestation qui agitent la société saoudienne. Pourtant, dans un univers mêlé d’urbanisme à l’américaine et de rigueur religieuse, un souffle de révolte anime la jeunesse du pays. Ryad, la capitale, comme les autres villes du pays, compte aujourd’hui d’immenses banlieues, où se joue le devenir politique de la monarchie des Saoud. Entre islamisme, dérives de la culture urbaine ou activistes armés, Pascal Menoret proposera

une analyse de la situation en prenant pour base le rôle de l’espace dans la montée de cette dynamique de protestation. Anthropologue, historien, et professeur à l’Université Brandeis, au Massachusetts, il est l’auteur de nombreux ouvrages sur l’Arabie Saoudite, dont le plus récent porte un titre identique à celui de la conférence qu’il livrera à la Villa. Dans un tout autre registre, le 10 décembre s’ouvrira l’exposition photo Marseille Répertoire – 25 regards, un atelier de photographies avec Thierry Fontaine, avec le Centre photographique de Marseille, dans le cadre du Festival La photographie Marseille. Pendant deux ans, l’artiste a animé un travail participatif auprès d’un groupe d’habitants marseillais. L’objectif pour chacun des participants étant d’aiguiser son regard sur sa ville ou son quartier. Les

14, 17, 21 décembre, 4 et 7 janvier, auront lieu des rencontres avec ceux qui ont suivi le projet, qui y sont associés sur toutes les étapes, de son origine jusqu’à l’organisation et la construction de cette exposition. À noter également que le 7 janvier se tiendra un débat, Photographie et création partagée : un art citoyen est-il possible, avec la participation de la Fondation Daniel et Nina Carasso. J.C.S.

Conférence le 13 décembre Exposition du 10 décembre au 8 janvier Villa Méditerranée, Marseille 04 95 09 42 52 villa-mediterranee.org


critiques rencontres

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Tumultueuse histoire

L

’histoire est l’une des sciences humaines et sociales qui se remet le plus en question, accueillant un bouillonnement des plus roboratifs en ces temps difficiles. Aussi la conférence donnée par Serge Gruzinski, spécialiste du XVIe siècle latino-américain, à la Bibliothèque Départementale des Bouchesdu-Rhône, a-t-elle enthousiasmé le public marseillais. On peut se demander pourquoi une discipline à la réputation austère, et par essence tournée vers le passé, résonne à ce point avec les inquiétudes de l’esprit contemporain. C’est qu’elle est éminemment politique, au sens noble du terme, celui qu’on

ne trouve plus nulle part. Les historiens se rebellent lorsque le pouvoir essaie de les instrumentaliser en fomentant un « roman national », et Serge Gruzinski propose avec une grande clarté d’opérer un déphasage : « La réalité des choses nous oblige, ne nous laisse pas le choix : le monde n’est plus local, il est global. Il faut remettre en lien ce qui a été traité séparément par les récits nationaux ». Pour Jérémie Foa, son interlocuteur de la soirée, l’histoire ne consiste pas à souligner que rien n’est nouveau sous le soleil, mais permet de voir comment d’autres sociétés dans le passé ont été confrontées à des problèmes

comparables aux nôtres, et comment elles ont essayé de les résoudre. Spécialiste des guerres de religion, « je peux dire aux jeunes d’aujourd’hui, concernés par le terrorisme djihadiste, que les catholiques du XVIe siècle avaient développé des niveaux de violence absolument inédits pour l’époque ». En effectuant ce travail, ardu, gigantesque, de mise en relation, en perspective, les historiens peuvent parler à tous, reliant l’expérience de chacun avec ce que d’autres ont vécu. S’ils le font avec humilité, conscients comme le reconnaît Serge Gruzinski que « toute histoire est construite ». GAËLLE CLOAREC

La conférence À quoi sert l’Histoire aujourd’hui ? a eu lieu le 1er décembre à la Bibliothèque Départementale des Bouches-du-Rhône dans le cadre du cycle de conférences À l’écoute des sciences sociales, proposé par l’EHESS

à lire L’Histoire, pourquoi faire ? Serge Gruzinski Fayard, 18 €

Une mer stratégique

R

ichard Labévière a sillonné la planète, en tant que reporter pour de prestigieux médias, puis consultant en matière de défense et de sécurité. Il vient de publier un ouvrage intitulé Terrorisme, face cachée de la mondialisation, et, à la mi-novembre, répondait à l’invitation de la Villa Méditerranée pour intervenir sur son champ de prédilection, la géopolitique. En s’appuyant sur des historiens de référence, tels que Fernand Braudel ou Henri Pirenne, il a cherché à démontrer que La Méditerranée n’est plus une mer occidentale. Voire qu’elle ne l’a jamais été, mais plutôt un carrefour entre trois ensembles continentaux. Un espace conflictuel, traversé de fractures « chaudes et froides », influencé par les relations entre Israël et la Palestine, la question du Sahara Occidental, les guerres en Irak, Lybie, Syrie... Une poudrière stratégique, dans le collimateur des russes et des américains, pour ses réserves colossales d’hydrocarbures. Richard Labévière constate que les choses évoluent rapidement sur cette « masse d’eau mondialisée », sans que les médias mainstream

© Gaëlle Cloarec

ne s’emparent réellement de la question (« ils n’ont pas de correspondants sur place »). Le désengagement des USA a commencé sans attendre Donald Trump, les européens renforcent leur présence, les navires de guerre de Poutine et ses porte-avions se positionnent... Jusqu’aux chinois, qui investissent dans une base navale militaire sur les côtes syriennes.

Question : leurs bateaux seront-ils chargés de l’arme nucléaire, ou pas ? G.C.

La conférence de Richard Labévière a eu lieu le 15 novembre dans le cadre du cycle Les Mardis de la Villa Méditerranée, à Marseille


26 critiques rencontres

Au cœur des ténèbres

© Marc Ferrando

Les Rencontres d’Averroès ont eu lieu le week-end du 13 novembre, dans une dynamique nouvelle et des réflexions récurrentes...

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élas, les questionnements qui animent les Rencontres d’Averroès sont plus que jamais d’actualité : après l’annulation de l’an dernier due aux attentats de Paris, cette édition se demandait comment « surmonter la faille » méditerranéenne. Comme toujours, les propos étaient passionnants, mettant à la portée d’un public toujours plus nombreux ces connaissances qui manquent à nos dirigeants, et à nos médias, et que les intellectuels invités aux rencontres défendent depuis longtemps. Quelques unes ? La conférence inaugurale de Julien Loiseau, historien enthousiaste et lyrique, qui expliquait « ce que l’Islam a apporté à la Méditerranée », en particulier en décentrant le monde vers Bagdad, en commentant la philosophie grecque, mais aussi en dessinant des cartes, en construisant des villes, et... en travaillant à la promotion sociale des esclaves ! Déplaçant les clichés d’une « civilisation islamique » qui aurait soit apporté les sciences à l’Europe et au Maghreb, soit semé la barbarie, il a dispensé sa pensée complexe avec la simplicité de qui veut être compris, jusque dans ses méandres... Magistral !

Les Tables Rondes aussi furent traversées d’idées fulgurantes : Fethi Benslama, psychanalyste, qui s’est penché sur la psyché des jeunes en voie de radicalisation islamiste, qui y trouvent un cadre et un destin. François Burgat qui lui répond, avec pertinence mais une agressivité déplacée, que la faille est historique, et économique. Lors de la quatrième table ronde, Thierry Paquot rêva de Cités nouvelles qui ne seraient plus des villes dévorantes, Andrea Rea pointa l’irresponsabilité politique, la violence du capitalisme qui détruit la possibilité de cette cité désirée, et cette utopie qui s’éloigne. La difficulté concrète de sortir de la fracture actuelle était évoquée lors de la table ronde géopolitique : Myriam Benraad et Basma Kodmani (voir Zib 101) parlèrent de l’Iran, et de la Syrie, en distinguant avec clarté et émotion l’enchaînement des faits, les souffrances des peuples, l’équilibre des forces. La faille, mais aussi la réconciliation, étaient au cœur de la musique d’Anouar Brahem : entouré de musiciens extraordinaires, loin du répertoire du oud, quelque chose était tissé entre tradition orientale et musique

contemporaine, une musique douloureuse et apaisante à la fois...

Changer de paradigme Une autre manière de faire entendre les choses ? Les Rencontres d’Averroès s’y emploient. L’association Des livres comme des idées qui gère désormais les Rencontres sous la direction de Thierry Fabre, veut les ouvrir à d’autres publics tout en préservant leur esprit. Un public est constitué de beaucoup de « têtes blanches », comme l’a dit un jeune spectateur, et même si elles constituent aujourd’hui la moitié des adultes en France, la question de faire venir des jeunes vers cette pensée si essentielle est aujourd’hui posée comme un défi. Un autre, de taille, apparaît : ces débats, menés par des hommes, ont constamment contourné la question de la faille entre hommes et femmes. Quand la question est venue de la salle, Ali Benmakhlouf, philosophe, a répondu que la discrimination des femmes était une constante dans toutes les civilisations, François Burgat que le rôle des femmes


Saison 2016-2017 Loufoquerie philosophique dans « les révolutions arabes » avait été essentiel, et qu’il y avait plusieurs façons d’être féministe. Mais aucun n’écouta Pauline Koetschet, chercheuse au Caire, raconter la difficulté au quotidien pour simplement prendre le bus. Aucun ne répondit vraiment à l’existence de cette faille, non entre féministes, mais entre hommes et femmes. Personne pour parler de l’inégalité dans les lois, de la violence, de la soumission volontaire, si différentes d’une rive à l’autre, et si effrayante pour toutes. Les Rencontres d’Averroès se pencheront-elles un jour sur la question de la domination, et non de façon subsidiaire ? Que se joue-t-il entre les genres en Méditerranée ? Pourquoi tant de conflits portent-ils sur le corps des femmes ? C’est sans doute en posant ces questions, comme celles de l’état actuel de la jeunesse et de son rapport à la politique et à l’exil, que les Rencontres renouvelleront leurs questionnements. Et leur public. Cette volonté est à l’œuvre, et déjà sensible lors du formidable Radio Live...

petite conférence de toutes vérités sur l’existence cIE cassandre - d’après fred vargas

Création

Comme à la radio… Donner la parole à la nouvelle génération, Aurélie Charon et Caroline Gillet savent faire et leurs reportages-documentaires sur les antennes de Radio France font mouche ; au théâtre c’est encore mieux ! Entourées d’Amélie Bonnin qui réagit en direct par dessins spontanés à la ligne tag efficace et de la discrète Paulette Wright aux mélodies folk sensibles, elles orchestrent un dispositif ping-pong et hybride (projections, documents audio…) dans lequel les participants sont invités à se saisir au micro d’une forme témoignant de leur expérience de vie ; les récits sont alertes, drôles malgré la teneur parfois tragique des faits évoqués et le poignant côtoie l’éclat de rire. Chacun occupe sa place de manière étonnante : le brillant Amir a vécu à Gaza jusqu’à l’âge de 20 ans et sa parole souriante évoque l’omniprésence de la guerre, la découverte du français à la fac ; on entend les camions d’eau et l’incongrue Lettre à Elise qui signale leur passage ; la vie quoi ! Amra, venue de Sarajevo, fait des études de droit et raconte aussi les bombes, mais surtout les théâtre menaces exercées contre le couple croato-bosniaque de ses parents ; vive et enjouée, elle est pour quelques répliques la Célimène d’Heddy le marseillais qui revient de plus loinD’alsaCe que sTrasbourg TJP — CenTre DramaTique naTional mersaccadé, 04 janv 16:00 les quartiers nord ; Heddy-la-boxe au phrasé bien loin de l’école, a découvert le théâtre (il effectue un service civique au Merlan) et le Vieux Port « là sous les miroirs musique je me suis dit c’est pas ma ville mais je vais faire en sorte qu’elle le devienne » ; tout comme Sofia, poussée à 7 ans hors d’Algérie oTTilie [b] + guesTs par les massacres de la décennie noire, il occupe le plateau 21:00 ven 13 janv avec un punch allègre et une aisance soufflante. En écho, des jeunes de la classe « allophone-arrivants »du lycée St Charles théâtre montent sur scène partager leur nouvelle vie dans la langue et la société françaises : optimisme, motivation et joie d’être ensemble effacent les frontières pour verTiCal un moment, si la DéTourmême — FréDériC Ferrer 21:00 perte du pays natal est parfois très sensible.sam Alors, les lignes 21 janv de faille ? les enjamber ? les ignorer ? les redessiner pour les affronter autrement ? La soirée a offert une belle circulation danse d’énergies croisées qui invite à ne pas baisser les bras.

SCÈNE NATIONALE DE GAP ALPES DU SUD

du 11 au 17 janvier à 19h à l’Usine Badin renseignements & réservations

04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.eu SCÈNE NATIONALE DE GAP ALPES DU SUD

SCÈNE NATIONALE DE GAP ALPES DU SUD

janvier janvier ja wax

:Passage:

KyoTo Forever 2 guests

AGNÈS FRESCHEL, MARIE JO DHO ET ROXANA NADIM

JoseTTe baïz — grouPe grenaDe ven 27 janv 21:00 04160 Château–arnoux saint–auban

théâtre

wax

TJP — CenTre DramaTique naTional D’alsaCe sTrasbourg mer 04 janv 16:00

TJP — C

musique

:passage: oTTilie [b] + guesTs ven 13 janv 21:00

théâtre

KyoTo Forever 2 verTiCal DéTour — FréDériC Ferrer sam 21 janv 21:00

danse

guests

JoseTTe baïz — grouPe grenaDe ven 27 janv 21:00

infos résa 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr

04160 Château–arnoux saint–auban

info ww


28 critiques

plus de spectacles sur journalzibeline.fr

Alors que j’attendais, d’Omar Abusaada © Didier Nadeau

Un peu de chemin pour se connaître un peu…

C

ette formule, arrachée sans ménagement à un poème du performer américain David Antin, s’accompagne d’un « savoir ne pas comprendre » qui serait, paradoxalement, une expérience nécessaire au cheminement, voire au rapprochement, avec l’Autre. Et la langue arabe est évoquée comme endroit d’une butée qui peut aiguiller vers d’autres formes de partage. C’est ce type de parcours que nous proposent d’expérimenter Les Rencontres à l’échelle.

On comprend quand même… Ouverture donc en français et en arabe avec une petite forme bien ambitieuse : Henri Jules Julien est un lecteur d’Emmanuel Levinas ; De la justice des poissons, son texte sur les villes-refuges, pose la brûlante question des « territoires » et de l’hospitalité par la voix et la présence de l’actrice syrienne Nanda Mohammad qui, accompagnée d’un contrebassiste, en effectue deux passages dans « notre » langue, un troisième dans la « sienne », en modifiant simplement l’énonciation ; subtil décalage difficile à percevoir car l’oreille est sollicitée par les improvisations du musicien et l’œil par le visage de la comédienne qui s’éclaire ou s’assombrit ; on attend quelque chose qui ne se passe pas et en même temps, effet de la lumière tournante ou du sens suspendu dans la douceur de la langue

étrangère, le charme opère. L’arabe encore pour Alors que j’attendais : la même actrice avec d’autres rompus à ce jeu expressif-naturel qu’Omar Abusaada canalise sobrement, l’écriture « documentaire » de Mohamad Al Attar et un dispositif scénique clair (en haut la circulation des pensées de l’homme dans le coma, des images d’actualité et l’étonnant « DJ de Damas » aux platines / en bas le quotidien de la famille dans lequel il s’invite en témoin invisible) font de cette fable réaliste, montée à La Friche et accueillie l’été dernier au Festival d’Avignon, un témoignage plus qu’intéressant sur la jeune génération d’un pays entre la vie et la mort. Troublant regard sur l’urgence de créer et de dire, théâtre en « situation » rare sur « nos » plateaux actuels !

On comprend tout ! Avec la chorégraphe franco-algérienne Nacera Belaza, la mystique muette s’invite et s’impose sans autre forme de communication que l’ample tournoiement obstiné des corps entre ombre et lumière ; les deux pièces présentées successivement -La Traversée et Sur le Fil– offrent à travers de subtiles variations rythmiques des moments de grâce absolue parce que libérés du sens ; combinant la rigueur d’une certaine danse conceptuelle américaine et la transe des soufis, hypnotique et stimulante à la fois, cette chorégraphie sans sujet et pourtant si personnelle cisèle

un espace commun au-dedans et au dehors qui s’approche dangereusement de la Beauté, tout simplement. De la fascination et du lâcher-prise à l’éveil joyeux il n’y a qu’une marche, franchie allègrement en compagnie de la piquante et néanmoins profonde Adeline Rosenstein. Cette performance-conférence documentée, jouée, dansée, par l’auteure-metteure en scène elle-même et quatre complices pendant 4 heures, fait exploser les certitudes liées justement à l’illusion de comprendre. « Il faut vérifier » répète-t-elle à chaque épisode, 4 en tout, censé démêler l’inextricable « Question de Palestine ». Et cette injonction dramaturgique plus que scientifique relance un mode opératoire qui tient tout autant des arts de la scène que de la solide critique de la persuasion par PowerPoint ! Décris-Ravage, titre énigmatique dont on saisit le tragique à l’œuvre dans l’histoire de cette partie du monde, démonte les discours et leur redonne vie, sinon espoir, à travers une gestuelle cocasse dont le leitmotiv volontairement potache consiste en un lancer de boulettes de papier mouillé sur un mur de portes en guise de « projections » d’images ; intelligent, décapant, plein d’humour dans l’approche des thèmes comme dans les rapports entre les comédiens sur scène, le spectacle va loin dans la mise en question du fond (montrer du doigt les « crapules ») comme de la forme (privilégier l’imagination du spectateur). La curiosité reste entière et donc le désir de continuer. MARIE JO DHO

Le premier temps de la 11e édition des Rencontres à l’Echelle a eu lieu du 15 au 26 novembre à Marseille, il se poursuit jusqu’au 13 janvier

à venir D’autres rencontres, sur des sujets liant problématiques de la représentation et actualité brûlante : au MuCEM, Roger Bernat incitera à décrypter Daesh autrement qu’à travers les images imposées par le mouvement islamiste ; en janvier, à La Friche, nous retrouverons la scène iranienne avec Kamal Hashemi et son épopée de l’exil contemporain, et le « théâtre documentaire » de Jérémie Scheidler 04 91 64 60 00 lesrencontresalechelle.com


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Cruel éloignement

D

orian Rossel a mis en scène, au sens de porter au théâtre, le beau film d’Ozu, Voyage à Tokyo. Et y a retrouvé dans le cadre constant du plateau, un art du plan cinématographique, et le calme du cinéaste, qui n’est jamais de la sérénité. Car ce Voyage à Tokyo nous plonge dans la difficulté des relations familiales. Les enfants de ce couple japonais âgé les accueillent, mais ceux-ci ressentent leur gène, leur manque de temps, le fait que leur vie est ailleurs, et des silences embarrassés s’installent. Comme dans toutes les familles ? Il n’est jamais question d’hystérie ici, ni de déchirement, et tout est respectueux. La subtilité du décor japonais, le ton très doux des comédiens, leurs gestes lents et leur retenue, dans la douleur comme dans le constat de leur éloignement accepté, installent une

enfants comme dans une BD, le déplacement assumé par le comédien qui joue l’épouse du fils, ajoutent une distance théâtrale qui préserve du réalisme, et font ressentir la douleur de l’absence, l’effroi sans nom de la mort. Parce que la vie, déjà, était si ténue et ralentie... AGNÈS FRESCHEL

© Carole Parodi

écoute intime, qui rappelle la beauté du film d’Ozu, et la déplace vers une universalité des relations entre des adultes et leurs parents. La jeunesse de la comédienne suisse qui joue la mère japonaise, les pancartes figurant les

Voyage à Tokyo a été joué au Merlan, Marseille, le 25 novembre

Quintet réjouissant Par cœur a ses raisons

J

acques Rebotier s’est entouré de musiciennes talentueuses réunies pour l’occasion, le Quatuor Pamela. Elles montrent une telle complicité qu’on les croirait en équipe depuis longtemps déjà. Du jazz au tango, passant par le théâtre et la poésie, elles font preuve d’inventivité et d’un professionnalisme incontestables. Notamment avec l’exécution de l’adagio de la 5e symphonie de Mahler exécuté debout dans un mouvement dansant magnifique. L’originalité de Rebotier a fait le reste. Son spectacle musical aborde le thème du réchauffement climatique et de la destruction par l’homme de son biotope, avec des textes personnels ou inspirés de chansons populaires détournées. Virginie Rochetti a brodé ses costumes noirs d’ossements : ne creusons-nous pas notre propre tombe ? Avec légèreté et humour le spectacle met en garde contre les écueils de la standardisation et la destruction de notre patrimoine naturel, et de la faune sauvage. Si le rythme n’est peut-être pas encore totalement trouvé, l’ensemble de la proposition réjouit les cœurs et les esprits. CHRIS BOURGUE

© Estelle Monnier

Chansons climatiques & sentimentales par la Cie VoQue s’est donné au Théâtre Joliette du 16 au 19 novembre, après une avant-première avec la Sirène du 2 novembre (à lire sur journalzibeline.fr)

T

iago Rodrigues propose une forme qui peut sembler anecdotique : il convoque 10 spectateurs sur scène pour qu’ils apprennent par cœur un sonnet de Shakespeare. Le sonnet 30, sur la mémoire, et les sentiments enfouis qui reviennent avec le souvenir. La forme est plaisante. Vaine ? Rapidement Tiago Rodrigues tisse des liens entre apprendre, résister et disparaître. Sommes-nous ce que nous retenons ? Le metteur en scène convoque Steiner, puis Pasternak qui face à la menace de l’arrestation par Staline fait réciter à son public le sonnet en russe, la femme d’Ossip Mandelstam qui faisait apprendre par cœur les poèmes de son mari déporté par Staline, pour qu’ils existent. Puis Bradbury, Farenheit 451, et cette vieille dame qui meurt avec ses livres parce que c’est bien sa mémoire, donc elle-même, que les pompiers détruisent en incendiant sa bibliothèque. L’amour des livres est parfaitement dit mais, au-delà, l’amour des mots que l’on apprend, que l’on ingère, que l’on fait siens. Pendant que ces anecdotes et extraits s’égrènent, les 10 spectateurs convoqués apprennent le sonnet vers à vers. Enfin Candida surgit, la grand-mère de Tiago Rodrigues, qui aime lire depuis toujours, et devient aveugle. Candida qui veut apprendre par cœur un dernier livre. Alors, face à la mort, face à la perte de la mémoire, l’espace de la scène s’ouvre vers une émotion que l’on sentait sourdre sous cette forme étrange. Les mots que l’on a appris nous constituent, nous préservent des impérialismes, nous maintiennent en vie. Et notre mémoire, qui nous fait souffrir, est aussi ce qui nous fait vivre. Je souffre au dur retour des tortures souffertes / Je compte d’un doigt las, de douleur en douleur / Le total accablant des blessures rouvertes / Et j’acquitte à nouveau ma dette de malheur. Mais alors, si mon âme, ami, vers toi se lève / Tout mon or se retrouve et tout mon deuil s’achève. A.F.

By Heart a été joué au Théâtre JolietteMinoterie, Marseille, du 1er au 3 décembre


30 critiques spectacles

Quand la danse donne du sens

Vocazione all’asimmetria, Francesca Foscarini © Ilaria Costanzo

La 19e édition de Dansem a tenu ses promesses, ambitieuse et généreuse en découvertes !

B

ouchra Ouizguen (Cie O/Marrakech) n’a pas froid aux yeux. Avec Ottof, elle poursuit son travail chorégraphique sur l’émancipation et le désir pour lequel elle met en scène des Aïtas, chanteuses et danseuses populaires du Maroc. Avec elle, quatre femmes d’âge mur et aux formes généreuses se dévoilent au sens propre comme au figuré. C’est drapées dans des tenues qui semblent contenir leurs mouvements qu’elles apparaissent, le pas lent, presque immobiles. On soupçonne un quotidien fait de contraintes autant physiques que morales. Mais sous l’étoffe et le poids du labeur battent des cœurs de femmes libres voire affranchies. La musique, les déclamations vont libérer des corps qui ne se font pas prier pour s’exprimer, se défouler, provoquer. Jusqu’à mimer des actes sexuels, le sourire en coin. Elles courent, se déhanchent, se trémoussent, s’effeuillent. Sans complexe et sans tabous. Et quand l’occidental My baby just cares for you de Nina Simone passe en boucle, ces coquines rivalisent de déhanchés. En pleine hystérie xénophobe qui tente de figer la culture arabo-musulmane dans un imaginaire rétrograde et puritain, Bouchra Ouizguen remet les pendules à l’heure. Au chapitre des propositions radicales et performatives, on retiendra les soli de la suédoise Alma Söderberg et de l’italien Marco D’Agostin, tous deux présents à Dansem l’an dernier avec, respectivement, Travail et Folk-S d’Alessandro Sciarroni. Tous

deux ont offert une performance où le rapport au corps et à la langue est le moteur, avec la voix pour Alma Söderberg et le rythme pour Marco D’Agostin comme colonne vertébrale. Légère et ingénue, A. Söderberg a proposé un inclassable Cosas bâti autour de chants a capella, de battements de mains et de pieds, de frappes au corps, de doigts qui jappent, de bras qui pètent et de joues qui claquettent. Tout ici est question de ruptures de langues, de variations, de bruitages corporels. L’humour en prime, osant des clins d’œil appuyés aux mythiques Fred Astaire et Ginger Rogers, des emprunts au vocabulaire hip hop et à la danse flamenca. À ce point de rencontre, son solo est une expérience qui tient du collage et de l’alchimie. Déjà en 2014, au festival Constellations à Toulon, elle entrelaçait judicieusement langue, son, chant et mouvement dans le concert-performance Idioter. Autre figure originale, Marco d’Agostin : tel Zébulon dans son manège, rien ne l’arrête, sauf peut-être l’épuisement ! Il débarque sur le plateau en chemise hawaïenne et short de plage pour débiter à la mitraillette un incompréhensible charabia qui laisse pantois. Des aigus aux graves, tout est possible. D’abord droit comme un « I », il va durant trente cinq minutes ne plus jamais s’arrêter de vibrionner, tendu comme un arc prêt à viser. Son corps est élastique mais sa danse angulaire, son phrasé est souple mais sa danse cassante. Combinaison des contraires qui fait toute la particularité de son

exploit nommé Everything is OK. Son regard noir, direct, pénétrant, ne quitte pas des yeux les spectateurs tenus en haleine face à cette succession effrénée de sauts, ciseaux, grands écarts, toupies, glissades et autres formules magiques. Son état d’urgence le laisse KO debout, et nous aussi. S’inspirant des travaux d’Emmanuel Levinas, la chorégraphe Francesca Foscarini interroge, dans sa pièce Vocazione all’asimmetria, le rapport à l’autre, seule manière de se déterminer soi-même. L’autre renvoie-t-il simplement à soi ou une véritable rencontre est-elle possible ? L’approche, l’imitation en miroir, la violence, la douceur, ne sont-elles que leurres et l’altérité n’est-elle qu’illusion et vouée à l’échec, prise dans le jeu des lumières, des musiques originales d’Andrea Cera, des sons produits par les corps, micro frotté contre le tissu d’un vêtement, respirations reprises en boucle, hurlements ? Mais aussi des silences éperdus où les deux danseurs, Francesca Foscarini et son complice Andrea Costanzo Martini arpentent les espaces horizontaux ou verticaux, équilibres, immobilités, envols… dans un travail minutieux qui s’emporte en un vertigineux climax. THOMAS DALICANTE, MARIE GODFRIN-GUIDICELLI ET MARYVONNE COLOMBANI

Le Festival Dansem a eu lieu du 15 novembre au 3 décembre à Marseille, Aix, Arles et Vitrolles


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Match ! A

u Klap la danse s’expérimente et se fabrique. Pour preuves l’installation numérique interactive de Daniel Larrieu et la découverte dansée de Vlam Productions. Déchaussé, libre dans sa tête, le spectateur s’immerge durant une vingtaine de minutes dans le paysage visuel et sonore concocté par le chorégraphe qui l’invite à swinguer, déambuler, se déhancher et rêver sans entraves. Il lui cache même son tour de passe-passe le temps du voyage sur sa planète FLOW 612… Munie de capteurs au sol, l’installation interagit avec les mouvements du spectateur devenu acteur malgré lui car la bande sonore, extrêmement sensible aux variations des corps, s’enrichit de nouveaux sons, cris, sifflements, cloches ou autres grincements. Le son spatialisé l’enveloppe en même temps que son regard se perd dans les méandres colorés d’un paysage floral projeté sur un ciclo. Si la planète FLOW 612 est accueillante, celle où doit atterrir KROMOS l’est peut-être beaucoup moins ! Rien n’est sûr car le décollage n’aura duré que peu de temps, mais suffisamment pour se laisser tenter par l’expérience. Avec une économie de moyens fort appréciable (deux lampes de poche et une caméra sur pied hors d’usage) et une sincérité généreuse, Julien Andujar et Audrey Bodiguel donnent à voir quelques éléments d’appui de leur prochaine création. Le résultat de deux courtes résidences FLOW 612 © Benjamin Favra

au Klap et l’on comprend déjà leur propos, l’architecture du futur spectacle, les réflexions qui l’irriguent. L’une pose les bases du scénario avec beaucoup d’humour, l’autre échauffe ses muscles empesés ; l’une s’échappe du plateau, l’autre y atterrit. Un numéro qui souligne le décalage entre narration et chorégraphie et se moque des efforts physiques intenses du « candidat » au voyage spatial. Vaincre l’apesanteur n’est pas donné à tout le monde et l’apprenti astronaute aura du fil à retordre ! Entraînement, selfie, allusions, tout cela a des airs de téléréalité… Julien Andujar et Audrey Bodiguel n’évitent pas les clichés, au contraire ils s’en amusent, et leur projet présente déjà un super potentiel inventif. Nettement plus lourdingue fut l’atterrissage de Retour sur terre, de Christophe Haleb. Olivier Muller incarnait un adolescent parti sur sa planète dans une allégorie laborieuse : durant 45 mns il s’agissait de déplacer une toile, des dessins, de les remettre en place, d’enchaîner des positions et des séquences sans lien apparent, sur un texte dont le sens échappait. Rock & Goal, créé au Gymnase et tourné au Pavillon Noir, réussissait au contraire particulièrement son coup. Décidément Michel Kelemenis aime écrire pour les enfants, et sait inventer une gestuelle immédiatement compréhensible, qui échappe pourtant à la tentation du mime. À partir de quatre ballons de

foot, hand, rugby et volley, qui se transformaient aussi en sacs à malices, les quatre danseurs et danseuses faisaient une apologie réjouissante des mouvements du sport. Les enfants du public reconnaissaient les gestes évoqués, et le plaisir de la devinette s’accompagnait d’étonnement quand les services de tennis, les enchaînements de gym, étaient détournés, symbolisés, déstructurés. Comme ces gants de boxe réunis dessinant un cœur rouge... La jeune recrue de Michel Kelemenis, Laurent le Gall, la musique qui joue de connotations populaires et classiques, le jeu autour des podiums et de la compétition, la lumière et la scéno, tout était juste et réjouissant. Match ! MARIE GODFRIN-GUIDICELLI ET AGNÈS FRESCHEL

Festiv’anges se poursuit jusqu’au 13 décembre à Klap Maison pour la danse, à Marseille

à venir Rock & Goal 18 janvier Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net 1er février Théâtre de Fos (dans le cadre des Élancées) 04 42 11 01 99 scenesetcines.fr


32 critiques spectacles

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Sur des rails !

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ltime chef-d’œuvre de Dostoïevski, Karamazov, créé au festival d’Avignon à l’été 2016 par Jean Bellorini, entre en résonnance avec notre époque. On y retrouve la violence, la rivalité, les tergiversations de la foi, les lois de l’argent, le sexe. Plus d’un siècle plus tard, cette histoire nous concerne toujours. Fédor Karamazov a eu trois fils qu’il a ignorés, plus intéressé par la boisson et les femmes. C’est un homme qui « déshonore la terre », ainsi est-il présenté au tout début du spectacle par un des personnages qui s’adresse directement au public pour démêler les grandes lignes de l’histoire. L’aîné, Dimitri (Jean-Christophe Folly), délaisse sa fiancée Katerina pour Grouchenka, fille légère qui est aussi maîtresse du père. Ivan, le philosophe (merveilleux phrasé de Geoffroy Rondeau), déclare ne plus croire en Dieu face à l’absurdité du monde, tandis qu’Aliocha, fragile et mystique (mystérieux François Deblock) prêche la réconciliation. Peu bavard, sa présence intense, qui évoque tout autant le Petit Prince que David Bowie, déclenche la parole des autres. Les acteurs, talentueux, jouent d’un instrument, chantent, tandis que la scénographie astucieuse les isole parfois dans des cages de verre, créant des espaces

Karamazov © Victor Tonelli

de jeu intime ou les propulsant sur le toit pour affronter l’univers. Les dispositifs mis en place par des glissements sur des rails donnent une grande fluidité au spectacle. Miracle du talent, les 4 heures 30 du spectacle avec entracte passent, légères et fascinantes. CHRIS BOURGUE

Karamazov s’est joué du 18 au 27 novembre à La Criée, Marseille

Libération en blanc

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ur pointes : il s’agit dans ce diptyque d’introduire le travail sur pointes dans une chorégraphie contemporaine, et de le confronter aux techniques actuelles. Un accessoire (de torture, disent certains) lié à l’élévation qui projette la ballerine vers les cieux en 1832... et la tient le plus loin possible du

sol, en une allégorie de volatile. Pointless, proposition de Jeroen Verbruggen en légèreté et humour, se moque gentiment des codes classiques : en témoigne l’utilisation du tutu porté par tous, qui Momentum © Alwin POIANA se transforme en corolle, huppe, boa ou flocon. Une barre de travail occupe quelques temps le plateau occasionnant une agglutination des danseurs qui posent avec un sourire figé. Pas de deux, arabesques se succèdent dans une envolée de plumes, pour rappeler le cygne...

Momentum d’Emio Greco et Peter C.Scholten est plus grave. Le fond de scène diffuse en continu la vidéo d’un immense drapeau blanc agité par le vent. Les danseurs, comme enchaînés, se déplacent en pliés avec des mouvements ondulants du buste, attirés par la terre. Puis ils s’élèvent sur pointes (remarquable Denis Bruno !) avec des déhanchements douloureux. Grands battements, jetés, fouettés, tout l’arsenal du classique se succède, accompagné d’une bande sonore qui chemine du classique à la musique répétitive. Un couple (Aya Sato et Andrés Garcia Martinez) semble exhorter les autres à se libérer et à se joindre au mouvement. Jusqu’à l’acmé finale où des danseurs répartis dans la salle rejoignent les autres sur scène, en un moment intense. C.B.

Sur pointes s’est créé à l’Opéra de Marseille les 25 et 26 novembre


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Paradoxe du personnage

E

ntre Jeanne et Nicole, rien ne va plus ! Le personnage qu’est la première revendique haut et fort ses droits face à la seconde, comédienne censée l’interpréter. Dans un cocasse basculement des rôles, c’est le personnage qui prend le contrôle ! Jeanne, vieille dame cabotine en diable, s’essaie aux situations les plus variées, dont sa propre mort, « pour voir comment ça fait », joue avec le public, le morigène vertement ou lui distribue des gâteaux secs, s’égare dans les méandres décousus de ses réflexions, passe du coq à l’âne, déclame Racine, s’encanaille, esquisse des pas de danse oubliant quelque peu sa canne, puis se courbe, exténuée de rhumatismes… tout lui est possible, en maître incontesté du jeu. Les limites s’effacent et les spectateurs peuvent partir si cela leur chante… oups ! La limite est atteinte. Sans auditoire, réduite à néant la pièce ! Défait le one-woman-show ! Jeanne se rétracte, puis, aimantée par son propre rôle, reprend le fil de ses élucubrations, passe sa vie à la moulinette des souvenirs, se livre à des réflexions sur le passé, le présent, le futur, les gens, le monde, la société, la liberté… Jeanne ne s’interdit rien. Nicole, l’actrice, tente de reprendre le contrôle sur sa création, passages délirants où tournant le dos au quatrième mur, Jeanne/

© X-D.R

Nicole « se » dispute en un « double je ». Le personnage n’est plus en quête d’acteur et exige son indépendance. Après tout, c’est lui que l’on est venu voir ! D’un égoïsme franc, elle refuse de se plier aux règles, à l’instar de la chèvre de Monsieur Seguin, elle se bat jusqu’au bout, même si l’échéance est proche, même si la fin du spectacle se dessine, même si le verbe s’effrite, s’épuise… Jeanne s’accroche aux mots, aux mimiques, aux gestes, pour exister encore un peu, le toujours n’étant plus de mise… Dans un beau retournement, ce sont ses vêtements soigneusement disposés sur le lit que l’actrice, muette elle, fera applaudir ! La force comique des débuts de

Jeanne pour l’instant, pièce écrite et jouée par Nicole Choukroun dans la mise en scène (et conception) de Claire Massabo, est intacte, et trouve ici une signification qui dépasse le simple divertissement pour nous faire entrer dans une véritable problématique théâtrale qui n’épargne pas nos zygomatiques ! MARYVONNE COLOMBANI

Jeanne pour l’instant a été joué le 15 novembre à la Salle du Bois de l’Aune, Aix-en-Provence

Vers le noir, lumineux

L

e Théâtre du Bois de l’Aune conduit une entreprise singulière. Osant la gratuité, la salle remplit ses gradins d’un public très divers, et l’habitue à des expériences de théâtre pertinentes, et a priori difficiles. Les 4 heures de la trilogie Blanc, Rouge, Noir proposées par la Cie belge de Koe en sont une manifestation exemplaire. Les trois acteurs auteurs comédiens proposent un cheminement en © Koen Broos français et en anglais, à travers trois couleurs : Blanc comme l’immaculé, les promesses, un « exercice de non commencement » où les trois acteurs racontent leur enfance, mais aussi le non sens des paroles de Lady Gaga, la bouffe saine, l’illusion de la pureté ; Rouge comme le désir, la politique, comme Shakespeare et comme Liz Taylor, le luxe dispendieux, l’illusion du bonheur ;

se répètent, se répondent, et construisent une nouvelle façon de faire théâtre : sans incarner autre chose qu’eux-mêmes, et le fictionnalisant pourtant en inventant entre eux des disputes, des séductions, des compétitions fondées sur leur vécu, ils instaurent un jeu de vrai-faux qui inclut sans cesse le spectateur, met le quatrième mur aux oubliettes, et invente sa forme en même temps que son propos. Car il est question ici du Relèvement de l’Occident. Pas moins. C’est ce vers quoi le constat d’échec historique, et la proposition de forme nouvelle, peut effectivement nous amener. Noir comme les désillusions, la mort, comme l’art en Occident, une histoire qu’ils débitent et illustrent montrant comment la course vers la modernité est une succession de plongées vers le néant. Et un retour vers la page blanche. Les trois acteurs, prodigieux, sont drôles, et baladent le spectateur à l’intérieur de leurs références, nombreuses et érudites, et des autofictions qui se superposent, s’interpénètrent,

AGNÈS FRESCHEL

Blanc, Rouge, Noir, le Relèvement de l’Occident a été joué au Bois de l’Aune, Aix, les 25 et 26 novembre


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Un Lepage historique

R

obert Lepage est, au Québec et pas seulement, un metteur en scène historique et L’Aiguille et l’opium un spectacle de référence. Il rapproche la figure de Jean Cocteau, qui découvre New York et vient de rompre avec Radiguet, de celle de Miles Davis, qui la même année est à Paris, et quitte Juliette Greco. Les deux actions, à travers ciel, sont reliées par le personnage de Robert, visiblement autobiographique, à Paris pour doubler un documentaire sur Miles Davis, et lui même en pleine rupture amoureuse. Tout se passe dans un cube qui se transforme, d’illusions en illusions, en chambres d’hôtel, studio d’enregistrement, arrière salle de café. Le cube tourne sur lui même, et les ouvertures se métamorphosent en portes, fenêtres, écran, lit déplié... les acteurs se déplaçant, harnachés, à travers cet espace constamment mouvant. L’exploit technique est époustouflant, de nos jours encore, et ce spectacle qui a 25 ans n’a à cet égard pas pris la moindre ridule. Le jeune acteur, Olivier Lenormand, qui remplace l’historique Marc Labrèche, vedette au Québec, est formidable, incarnant Cocteau avec un accent parisien suranné extrêmement réaliste, s’envolant entre deux ciels,

drôle lorsqu’il double l’anglais en prenant l’accent français, émouvant lorsqu’il parle à sa femme perdue... Pourtant, si le spectacle est visuellement magnifique, l’analogie entre ces histoires d’amour, ce rapport entre Paris et New York, le thème même des grands hommes et de leurs histoires amoureuses, reste aujourd’hui un peu étranger, comme un biopic passé de l’écran à la scène. Pas assez loin pour être aimé comme du répertoire, pas assez proche pour qu’on soit concerné. L’ajout, par rapport à la version de 1991, d’un acteur trompettiste incarnant Miles Davis, et d’une silhouette évoquant Juliette Gréco, enlève sans doute un peu de magie à ce seul-en-scène. Au théâtre de l’illusion absolue, on préfère aujourd’hui celui qui montre sa facture, et ses coulisses. À tort ? AGNÈS FRESCHEL

© X-D.R.

L’Aiguille et l’opium (2013) a été joué aux Salins, Martigues, les 15 et 16 novembre

Histoire à dormir debout

© Samuel Rubio

C

omme dans les livres dont on est le héros, la pièce du collectif Forced Entertainment (dont c’est la première création pour enfants) entraîne chacun, individuellement, dans une aventure pourtant très collective. Car cette Possible impossible maison, il va falloir l’affronter, la mériter, dès l’ouverture de rideau,

dès les premières images de couloirs labyrinthiques plein de portes fermées… mais pas tout seul ! C’est avec une fillette gribouillée, tombée d’un livre de mathématiques, que commence une drôle de quête, celle qui consistera à retrouver son amie l’araignée qui s’est perdue… sans perdre le fil ! Mais aussi avec deux drôles de guides, les comédiens Alain Borek et Judith Goudal qui bricolent l’aventure en direct, l’un en la racontant, commentant les images projetées sur des bouts de cartons, la seconde en la sonorisant grâce à de multiples bruits réalisés en direct, au fur et à mesure des rencontres

improbables que fait la fine équipe que nous formons tous. On prend un grand plaisir à se faire balader, à sourire franchement devant une souris qui mâche du chewing-gum, des oiseaux chanteurs autoritaires, ou un rhinocéros têtu… Sans effets spéciaux sophistiqués, mais avec beaucoup d’ingéniosité et d’inventivité, le dispositif scénique provoque l’imagination, nous fait croire à l’invraisemblable, et brouille astucieusement les frontières entre possible et impossible, comme dans un rêve farfelu ! DO.M.

La Possible impossible maison a été joué le 23 novembre au Théâtre d’Arles


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Entre gravité et dérision

«

On est trop nombreux sur ce putain de bateau !» Le passeur hurle ces mots, qui sont aussi le sous-titre de la pièce de Matei Visniec. L’écrivain franco-roumain est l’un des plus grands auteurs de théâtre contemporain. Ses œuvres sont toujours teintées d’humour noir et d’absurde. Pour sa dernière création, le dramaturge s’est penché sur la question majeure de ce © Manuel Pascual début de XXIe siècle : les migrants. Qui ne sont plus, comme il le relève dans son texte, ni des immigrants, ni des émigrants. Retirer le préfixe à ces mots signifie aussi inclure ces mouvements de population dans la vaste marche de la mondialisation. C’est la leçon que donne le conseiller à l’homme politique qui prépare son discours. Mais les inclure ne signifie pas les accepter. Les marchandises

circulent librement, pas les humains. Pour gagner l’Europe, ils doivent endurer le pire. Etre jetés à l’eau si le bateau est trop lourd. Vendre un rein ou une cornée, pour se payer le voyage de manière plus sûre. La pièce de Visniec dit tout cela. Elle dit aussi le désarroi de ce couple des Balkans, qui n’avait jusqu’alors jamais vu de Noirs, et qui en voit débarquer des dizaines dans

Magie de la langue

© Jean Barak

C

réé à la fin des années 50, Sol, le personnage de clown philosophe de Marc Favreau a repris du service, dans la mise en scène de Michel Bruzat (directeur du Théâtre de la Passerelle à Limoges), et sous les traits d’une passeuse de mots de génie, Marie Thomas. Car si le clown est philosophe, il a sa propre langue, son propre langage fait de subtils mots-valises, de douces contrepèteries, de néologismes insensés, de distorsions vocales de haute voltige... ! Cet être d’apparence fragile et bancale ne cesse de se questionner sur le sens des choses, remet en question l’ordre du monde et ceux qui le dirigent, parle

aux fleurs et à une psy de la même façon, faussement naïve et merveilleusement décalée. Ce clown ne nous dit pas vraiment comment va le monde, mais de constatations en interrogations il donne du sens à la vie d’une jeune fille qu’il exhorte à prendre son indépendance, à l’histoire de ses parents « transparents » ou à la situation géopolitique du Fier monde, avec ceux d’en haut qui ont tout et ceux d’en bas qui n’ont rien, lors d’un monologue d’une rare intelligence. Rien n’est absurde, et si tout est prétexte à digression tout fait sens cependant, avec beaucoup d’humanité. « Faire rire ou réfléchir, il faut toucher » se dit la comédienne avant d’endosser son manteau plein de poches d’air. Chose est faite, brillamment. DO.M.

Comment va le monde ? a été joué le 2 décembre au Sémaphore, à Port-de-Bouc

sa maison, qui demandent à recharger leurs téléphones portables. Elle montre aussi ces hôtesses du salon du barbelé, ou celles qui vantent le détecteur de battements de cœur, idéal pour repérer tout intrus. L’auteur a voulu tout dire, mêlant gravité et dérision. Il a même gardé des scènes supplémentaires en réserve, comme si la pièce ne pouvait jamais être achevée. Son texte est plutôt comme un vaste ensemble dans lequel on peut piocher. Gérard Gélas en a fait une mise en scène qui reste parfois décousue, manquant de liant. Les séquences s’enchaînent, certaines sont vives, poignantes ou grinçantes, d’autres ralentissent le spectacle, qui doit encore trouver son rythme, sa fluidité. Il n’en reste pas moins que porter à la scène un tel propos est aujourd’hui indispensable. JAN-CYRIL SALEMI

Migraaaants a été créé et joué au Théâtre du Chêne Noir à Avignon du 17 au 27 novembre


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Loin de Chéreau

L

’ombre magnifique de Patrice Chéreau a-t-elle pesé sur Charles Berling qui reprend, trente ans après sa création, la pièce de Bernard-Marie Koltès Dans la solitude des champs de coton ? Certainement, tant il semble savoir pris le contrepied de ses mises en scène sans atteindre la tension paroxystique qui lie le dealer au client. Au dispositif bifrontal qui plaçait le public au plus près des acteurs, au décor nu d’un hangar désaffecté qui amplifiait la violence de la situation, au face à face physique d’une rare intensité charnelle, Charles Berling a préféré un décor monumental, qui asphyxie les relations, et la construction d’une passerelle entre le plateau et la salle, qui ne suffit pas à intégrer le public. Pourtant Mata Gabin impose sa présence par son jeu monolithique et son phrasé volontaire : l’idée de faire jouer le dealer, comme le veut le texte (Isaac de Bankolé était le premier dealer de Chéreau), par un acteur noir, et qui plus est par une actrice, pose l’enjeu ailleurs, dans le contexte d’une domination que sous-tend le titre explicitement en rapport avec l’esclavage. Mais Charles Berling en

l’autre, voix tremblante ponctuée de silences, toujours victime. Or c’est une rencontre à forces égales entre le dealer et le client qui se joue dans la nuit, chacun dominant l’autre mentalement, physiquement, tour à tour… L’objet de la transaction est inconnu, pourtant Koltès ne parle que de désir. Ici, pas de danse macabre ni de quête sexuelle, Charles Berling impose une distance entre celui qui désire et celui procure. Le Client reste « en suspension, en déplacement, hors jeu, hors vie » sans se départir de sa peur. Or dans l’approche préalable au deal, Client et Dealer se ressemblent : ils se reniflent, se jaugent, se caressent, combattent au corps à corps. Prendre le contrepied de Chéreau édulcore sans doute le propos de Koltès... MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

© Jean-Louis Fernandez

Client se réfugie dans une incertitude rarement transgressée. Pas hésitant, corps fléchissant, se balançant continuellement d’un pied sur

Dans la solitude des champs de coton a été créé au Théâtre national de Strasbourg du 1er au 11 octobre, et repris au Liberté, scène nationale de Toulon du 8 au 11 novembre

Donner corps à l’errance

L

e thème est complexe, la démarche tout autant : réaliser un spectacle sur le bidonville de Calais et les milliers de migrants qui y vivaient, à partir des travaux de terrain d’une universitaire. La compagnie Etat d’Urgence y parvient, évitant les pièges de la compassion ou du misérabilisme. L’émotion s’accompagne d’un propos politique, engagé, brut et direct, mettant en lumière une réalité crue. Les migrants qui franchissent les portes

de l’Europe-forteresse ne sont souvent pas considérés comme des individus. Ils y sont en errance, perçus comme une masse, une menace. Dites à ma mère que je suis là rend corps et chair à ces hommes, femmes, enfants. Leur donne existence humaine. Par le recueil de témoignages, diffusés en bande son ou en vidéo, comme ce jeune Afghan, qui se souvient des © Philippe Ariagno fêtes dans son village, et des morceaux de blanc de poulet que son père lui gardait toujours. Et par l’investissement physique que déploient les interprètes. Acrobaties, sauts, danse, l’engagement corporel est intense, les images qui en naissent également. Un seau de sable ocre se déverse sur les comédiens. La dune est formée sur le plateau. Celle du Sahara ou celles des plages du Nord. Un homme enragé entre avec une pelle et lance violemment ce sable sur les trois hommes et

la femme, qui en sont déjà recouverts. Puis ils s’accrochent et se balancent sur deux cadres suspendus. L’un est vide, l’autre est grillagé. La frontière est là, avec les kilomètres de barbelés de l’Europe, assez pour faire le tour de la terre. L’irruption sur scène d’Amanda Da Silva, la chercheuse, est troublante. Tous les interprètes sont pieds nus, elle est en chaussures et livre une conférence sur la « sécurisation de l’immigration », parquée, contrôlée dans des camps. L’aspect théorique, froid, est frappant, et le contraste saisissant. Il donne en fait d’autant plus de relief au propos du spectacle, qui réussit la jonction entre art, étude et réalité. Le tout avec un socle commun : l’humanité. JAN-CYRIL SALEMI

Dites à ma mère que je suis là a été créé et joué au Théâtre de La Passerelle à Gap les 14 et 15 novembre


© Eddie Pons

Sous surveillance

© Simon Gosselin

T

out est réussi dans ce Nobody mis en scène par Cyril Teste. Les jeunes acteurs, tous formidables, font passer l’émotion intérieure sur le ton de la confidence et la violence des rapports sociaux avec un désarroi qui n’a d’égale que leur dureté. Le texte, librement adapté de Sous la glace de Falk Richter, met en scène des consultants en restructuration d’entreprises, jeunes loups aux dents longues, tous dépressifs et cruels, planifiant des licenciements en masse avec un cynisme détaché, et en proie eux-mêmes à une compétition interne, une surveillance de tous par tous sous couvert de camaraderie tutoyante. Alignant des indicateurs, des objectifs de compétitivité et des évaluations de productivité, ils photocopient des dossiers et des graphiques sans comprendre la réalité qu’ils recouvrent, en se gargarisant de concepts creux. Leur culture se limite à des comédies musicales type Disney, et ils ne savent faire la fête qu’en s’agitant, se soulant et s’affrontant dans des ébats sexuels navrants. Caricature ? Le monde de la start-up est hélas dessiné avec réalisme, un vocabulaire qui est celui qu’on entend dans le monde économique, et des attitudes de consommation de plaisirs qu’on reconnaît, comme l’on reconnaît l’open space, le bureau partagé, les portables, le stagiaire, le psy d’entreprise, le mobilier de bureau , le vocabulaire... D’autant que le dispositif scénique, très particulier, permet à la fois la vue d’ensemble de la fourmilière, et une approche au plus près des intimités dévastées : la partie inférieure de la scène est surmontée d’un écran où sont diffusées les images de l’action filmée en direct. Cette « performance filmique » place le huis clos théâtral dans un vertige qui déstabilise le regard. Tout est exposé constamment, à deux échelles, sous plusieurs angles, dans un tourbillon d’hyper-modernité vertigineux, qui traque les humains déshumanisés jusque dans leur branlette consolatrice aux toilettes. Le personnage principal, qui rajoute sa voix off à l’action, s’appelle Jean Personne, et aucune révélation, aucune révolte, aucune vérité ne traversera ces barbares d’un nouveau genre, qui ont perdu leur humanité. Désespérant ? L’horreur du libéralisme forcené est là, mais aussi le rejet assuré de ces jeunes artistes : leur compréhension si vive de ce qui structure notre société hypermoderne, et leur talent pour le dénoncer, démontrent que cette génération n’est pas dupe du discours qu’on lui assène depuis l’enfance.

Du 12 au 21 janvier Rocío Perico

Molina

- La Taranta por Bandera

Santiago

et

Antón

Fernández

Rafael Rodríguez - Dorantes - Flamen’Comic ! Andrés Peña et Pilar Ogalla - Mehstura Jesús María Manuel

Mendez

-

Miguel

Terremoto Liñán

et

-

Ángel

Cortés

Antonio

Moya

Vicente

Amigo

...

Renseignements 04 66 36 65 00 Réservations 04 66 36 65 10

AGNÈS FRESCHEL

Nobody a été programmé à Toulon, du 29 novembre au 1er décembre, dans le cadre de la programmation partagée Liberté-Châteauvallon

theatredenimes.com scène conventionnée pour la danse contemporaine


38 critiques spectacles

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À fleur de peau

P

endant sept jours, EXPLICIT a ouvert à hTh les vannes de la transgression des genres et des esthétiques. Beaucoup de choses, pour aborder le queer, le sexe, le porno, oui, disons les mots comme ils sont, mais aussi le féminisme, l’altérité, les minorités. Marianne Chargois et Matthieu Hocquemiller, comme l’an dernier, ont été invités par le directeur du lieu Rodrigo Garcia à inventer une programmation qui rassemble Extime © A contre poil du sens et questionne, touche et choque, défriche ces problématiques dans une pers- corps au microscope. Un malheureux poil pective artistique et novatrice. sur sa peau lisse devient tout autre chose. Avec Extime, ils ont tous les deux donné Son nombril apparaît comme un œil. Les une lumineuse approche du sujet. Concision, plis de sa main, des vallées mystérieuses, finesse, provocation, documentation, poésie inquiétantes. Pendant que Marianne Chargois, de l’image, beauté et secrets du corps, ils ont en théoricienne du sexuel, dévide d’une voix réussi, dans une performance de 20 minutes, monocorde, très prégnante, un historique du à concentrer une puissance de propos aussi concept pornographique. Cela commence claire que pleine de méandres à investir. avec l’apparition du mot, en 1769, et on suit Le danseur et chorégraphe, nu dans un le récit en plongeant à l’intérieur du corps cercle de lumière, se filme avec des mini d’Hocquemiller. On y entre par l’anus, et c’est caméras, l’image projetée derrière lui. Son ensuite un voyage dans quelque chose de

si intime que c’en est fortement émouvant. Le danseur est à quatre pattes, toujours dans son cercle, en pâture. La pertinente création sonore de Stéphane Monteiro accompagne l’incursion. Les sens et le sens sont bouleversés. Au salut, l’artiste est nu, debout, sourire modeste, et pourtant si puissant de nous avoir tant touchés. Le même soir, les performeuses Simone Augherlony et Jen Rosenblit, bien vite nues elles aussi dans Biofiction, n’ont pas réussi à raconter quelque chose qui emporte si loin. Très démonstratives et engagées (l’acte sexuel est mimé à maintes reprises, avec force branches et buches), avec une musique live composée par Hahn Rowe, on ne dépassait malheureusement pas le stade du « soit je ne comprends rien, soit je comprends trop bien ». Faisant de nous des voyeurs malgré nous. ANNA ZISMAN

EXPLICIT a eu lieu du 22 au 27 novembre à hTh, domaine de Grammont, à Montpellier

Rêve éveillé me perds entraîne dans les méandres de l’inconscient de Michiru. Dans un enchaînement de situations aussi fluides que totalement déstabilisantes, elle convoque ses parents, une sœur inexistante, un enfant pas encore conçu, deux amants perdus. Le décalage est subtil entre la mise en scène, très sobre, le décor, concret, l’écriture, directe, et l’univers sans limites des pensées de Michiru. Comme dans un rêve, où tout semble normal, même si les interlocuteurs sont morts depuis © Gotanndadan longtemps, ou ne sont pas ceux qu’ils n apparence, rien d’extraordinaire. Deux paraissent être, même si les lieux ressemblent jeunes femmes se retrouvent dans un à autre chose que ce qui est indiqué, et si le café tokyoïte, hésitent sur la commande temps ne passe pas à la même vitesse que à passer ; l’atmosphère est à l’échange de la veille. Michiru est insatisfaite, elle peine à banalités. Chocolat chaud ou nouilles sautées ? s’émanciper de l’emprise parentale, ses amours Mais très vite, l’auteur metteur en scène japo- sont déjà lointaines, son enfant lui reproche de nais Shiro Maeda nous attrape et ne nous pas lui donner la certitude d’exister un jour. lâche plus la main. Où nous emmène-t-il ? Les concepts psychanalytiques sont revendiOn a la sensation que le voyage est sans qués : le trou dans la dent, qui se mue en vide retour, tant les codes fonctionnent et offrent existentiel puis en voie pour un accouchement de nouvelles perspectives. Et même si je impossible, la mère géante qui dit à sa fille

E

qu’elle a rapetissé, le père qui sort du ventre de la mère, Michiru qui pénètre dans sa propre béance pour découvrir un nouvel appartement à investir… La succession des événements est admirablement rendue, les transitions provoquent un sentiment de naturel tronqué extrêmement riche et jubilatoire. Le ton est léger, l’absurde l’emporte largement sur le spleen. On aime à retrouver l’univers d’un Murakami ou du Quartier Lointain de Jiro Taniguchi. Où les songes ont la force du réel : on les écoute et ils ont le droit d’exister. Le temps est distendu, les pensées sans retenue. Sentiment de flottement réflexif. L’amant a un « OFF » inscrit sur le torse. Depuis toujours il craint que quelqu’un appuie sur son téton et l’éteigne. Le tue. Jusqu’à ce que, désespéré, il menace Michiru de le faire luimême. Le dramaturge est sur le fil, entre rêve et cauchemar, dans une réalité qui éclabousse le feutré du quotidien. A.Z.

Et même si je me perds… a été présenté au Théâtre de Nîmes les 16 et 17 novembre


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Béziers portes ouvertes

L

a cité est en état d’urgence. Une catastrophe climatique s’annonce. Des masses de migrants se pressent aux portes de la ville. Les habitants sont sommés de se rendre dans une salle communale. Stupeur et panique. Nous sommes à Béziers. Réfugiés dans le foyer du collège Lucie Aubrac. Assis par terre, nous écoutons les sons du chaos dans un casque. Heureusement, les murs sont hauts, la ville est à l’abri des malheurs du monde. Il suffit d’y rester confiné. La reine Régine arrive, éplorée et digne. Elle parle bas, on l’entend dans le creux de nos oreilles, ses mots sont solennels et lyriques. Mais une autre voix, juvénile, en colère, tente de couvrir son discours. C’est la princesse Allison, qui pleure Andy le rebelle, privé de funérailles. Elle surgit dans la pièce, enjambe les spectateurs. « Coupez les micros ! », ordonne Régine en se précipitant vers Julien Bouffier, le metteur en scène qui mixe le son à la table de régie. Il lance un morceau langoureux, la voix envoûte. La musique censure les mots. Allison est une Antigone du XXIe siècle. Butée.

avec qui elle graffait les murs de cette ville qu’elle refuse de voir comme assiégée, mais plutôt comme un bastion d’un pouvoir rance. Vanessa Liautey, en belle reine fière, oscille entre morgue et désarroi à cacher, face à ce peuple, nous, les spectateurs, passif, craintif. Les comédiennes serpentent entre les élèves, les parents, le personnel de l’établissement. Allison et Régine s’écroulent parfois parmi nous, terrassées. On se laisse absorber dans l’écoute de la composition musicale de Jean-Christophe Sirven, omniprésente dans les casques. Face à Régine, qui réclame « plus de murs, plus de tours », Allison lui balance, du haut de sa magnifique jeunesse : « T’es juste une fucking fonctionnaire ! » Les mots claquent. « Je les laisserai entrer tous ! ». Dans l’enclave du collège biterrois, cela sonne comme un souffle régénérant. © Marc Ginot

Téméraire. Et Régine est Créon. Le texte a été écrit à la demande de J. Bouffier par la jeune auteure québécoise Marie-Claude Verdier. Zoé Martelli incarne la jeunesse, la révolte, la douceur aussi, lorsqu’elle évoque son Andy,

ANNA ZISMAN

Andy’s gone a été joué les 15, 22, 27 novembre et 2 décembre dans plusieurs collèges de l’Hérault, dans le cadre de Collèges en tournée, initié par le Département de l’Hérault

Grandeur nature

L

a Grande Guerre commence comme un cours magistral sous adrénaline. Didactique, synthétique, sonorisé, imagé. Tout est dit, et même plus, sur le contexte de la fin 14, en moins de dix minutes. La liste exhaustive des pays impliqués achève la mise en place du © Joost van der Broek propos. Elle est criée, hurlée, la voix est peu à peu couverte par le vacarme qui enfle, le nombre noms cité est vertigineux. Silence. La guerre débute, dans un calme pesant. Les trois acteurs du collectif Hotel Modern et le compositeur Arthur Sauer plongent le public dans l’attente du pire. Des cris d’oiseau, des bruissements d’arbres, les sabots d’un cheval sur une route de campagne. L’inquiétude monte en direct. Avec des appeaux, des

calebasses, le son est créé sous nos yeux. Des maquettes et des accessoires sont manipulés et filmés en gros plan par les comédiens, les images transmises sur un écran qui occupe le fond du plateau. On observe la mise en place du théâtre des événements et le basculement provoqué par la captation de ce monde miniature par les caméras. La minutie des gestes, la simplicité des objets, le persil qui devient arbre, la terre qui se mue en champ de bataille, la farine en neige, des

petits soldats qui prennent vie. On assiste à une allégorie de l’absurde. Les membres d’Hotel Modern rejouent la folie des généraux, les hommes sont des objets, le territoire un morceau de carte, les morts à remplacer par d’autres petits soldats. La lecture, en direct aussi, de lettres et témoignages de Poilus rend au contraire sa dimension humaine à l’horreur. Les sons électroniques et bricolés incarnent la violence et la peur. La traduction des scénettes sur l’écran offre un horizon à la fois réaliste et onirique au récit. On pénètre dans une tranchée. On s’aventure dans une maison bombardée. On progresse dans la boue collante et froide en suivant les pas d’un soldat qui foule des cadavres. Le gaz rampe. Les corps s’amoncellent. Le jour se lève. Il neige. Les morts se raidissent. Ils disparaitront sous l’herbe qui repousse. A.Z.

La Grande Guerre s’est joué les 9 et 10 novembre au Théâtre Jean-Claude Carrière au Domaine d’O, Montpellier


40 critiques musiques

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Retours d’Histoire ?

©VDM

«

Entartete Musik » (Musiques dégénérées) ! Voilà comment le régime nazi labellisait les musiques composées, jouées par des juifs, communistes, noirs, avant-gardistes… Et c’est avec une insistance obstinée, louable, que le festival Musiques Interdites met en lumière, réhabilite, recrée, exhume des œuvres de ses musiciens-là, parfois tombés dans l’anonymat, ayant connu l’exil, pourchassés, déportés, assassinés… Parce qu’aujourd’hui, plus qu’hier, on doit se souvenir que lorsque les dictatures surviennent, c’est aux hommes de culture et de pensée, aux artistes en particuliers qu’elles s’attaquent... en tout premier. Après le succès du Journal d’Anne Franck, l’équipe de Michel Pastore consolide son partenariat avec le Théâtre de La Criée. C’est Marie Galante ou l’Exil sans retour qu’on donne : une pièce de Jacques Deval, créée en 1934 sur la base de son roman, popularisée par une dizaine de parties de chants (dont le fameux « Grand Lustucru ») et d’orchestre signées Kurt Weill, du temps que l’auteur de l’Opéra de Quat’sous, fuyant l’Allemagne hitlérienne, était en exil à Paris. L’œuvre est rare : son héroïne, Marie, est embarquée de force de Bordeaux vers Panama, connaît une vie misérable de prostituée, et espère un improbable retour vers une France

idéalisée. C’est Irène Jacob, comédienne à la voix précieuse, qui narre sa destinée, quand les parties chantées sont portées avec conviction et héroïsme par Émilie Pictet, soprano diluant dans son lyrisme classique naturel quelque accent « cabaret ». Elle a la chance d’être accompagnée par un luxueux ensemble de musiciens, issus pour une large part de l’Orchestre Philharmonique de Marseille, dirigés par une figure du piano russe installée en Provence : Vladik Polionov. La mise en scène situe l’action dans son contexte

historique au moyen de symboles « clichés » -extrait sonore d’un discours du Führer, images des jeux olympiques de 1936 à Berlin, blancs qui se griment en noir pour chanter du blues (les baryton et basse Jean-Christophe Maurice et Yves Bergé)– qui enrobent l’épopée d’une nécessaire gravité. JACQUES FRESCHEL

Marie Galante a été créée les 23 et 24 novembre à la Criée, Marseille

Bleu profond

© Chris Boyer

V

oix trompette, voix sax, voix violon... elle se soulève, claire et aérienne, en suspension, ou sombre, câline, aux rivages du blues. L’imagination jaillit ; la diva divague de l’anglais au français. Marion Rampal chante... Elle compose au fil de ses voyages, au gré de ses rencontres, fait battre les cœurs en boucles sonores qui s’étagent en chœur, en mille-feuille... Ses reprises soul ou balades septentrionales, ses chansons de marins en quête de sirène, puisent aux sources New Orleans et des parlers créole, cajun, ses comptines sont revisitées en mode

incantatoire… Main Blue a été enregistré au début de l’été 2016. Avant la sortie officielle du disque le 9 décembre, le public marseillais a pu goûter à un avant-goût de la galette, dans le cadre automnal d’un concert à la Cité de la Musique.

Il n’a pas été déçu : des morceaux hyper-léchés, compositions tout en grâce, y furent dessinés. Pierre-François Blanchard est un pianiste funambule dansant de clavier en clavier sur le fil sensible du groove, jonglant avec les basses syncopées et les notes bleutées. Batteuse princière tombée dans le bouillon du jazz à la pulse absolue, Anne Paceo a de l’or au bout de ses baguettes... Main Blue est « bleu profond », sa matière est émotion, tempétueuse et lyrique ; elle imprègne « les musiques du Delta du Mississippi »... celles d’un disque et d’artistes à découvrir ! J.F.

Le concert a été donné le 7 novembre à la Cité de la musique, Marseille CD Main Blue : sortie le 9 décembre chez nemomusic


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Étoiles suicidées

F

à elle se construit ailleurs, loin des années 60 ou 80 qui furent celles des stars, citant à peine un tube, créant plutôt des émotions au creux de celles qui ont brûlé ces êtres : un solo de batterie de Gildas Estevenard pour dire le déchirement, un dialogue permanent entre les guitares de Nevché et Christophe Rodiomisto pour se mettre à l’écoute intime de l’autre. Et nous faire entendre, dans cette évocation tendre, et triste, leur inadaptation fondamentale à la société du spectacle qui naissait en les shootant. AGNÈS FRESCHEL.

© X-D.R

red Nevchehirlian a l’admiration sensible. Il aime Marilyn et Kurt Cobain, le chanteur star de Nirvana, comme des amis intimement fréquentés. Shooting stars les confronte, dans leurs ressemblances d’étoiles dépassées par leur destin, leur exposition aux regards, leurs addictions, leur mort, leur mythe. L’une boit, l’autre se shoote, tous deux se détruisent mais vivent aussi, avec intensité. En fouillant sans voyeurisme dans leurs écrits intimes, en empruntant aux paroles des chansons de l’un et des films de l’autre, Nevché construit un spectacle mosaïque, qui navigue avec élégance entre lecture et concert, loin du rythme du slam mais se gardant de tout théâtre : sans jamais les incarner il les fait vivre, avec leur incapacité au bonheur, les douleurs

qui les ont propulsés sous les regards brûlants du monde, et que la célébrité n’a rendu que plus visibles, et violentes. La musique quant

Shooting stars a été créé au Merlan, Marseille, le 18 novembre

Vipère au poing ! bonheur. Le maître tchèque montre ici tout son sens de la dramaturgie, de l’orchestration, délicieusement âpre, de la construction. Jean-Yves Ossonce, chef talentueux que l’on avait apprécié dans Hamlet, tira le meilleur de l’Orchestre Régional Avignon-Provence, la musique d’une expressivité sans pareille épousant les différents moments du drame. Les autres protagonistes, Nicolas Cavallier en tête, belle basse épaisse, mais également Sébastien Lemoine... contribuèrent à faire de ce premier opéra de la saison un succès qui ne restera certainement pas sans lendemain. Katia Kabanova Cédric Delestrade © ACM-Studio

L

a Kabanicha est une Folcoche majuscule ! : sournoise, calculatrice, d’une cruauté sans nom -elle veut faire enterrer sa belle-fille vivante-, un cœur de pierre dans un gant d’acier. Rigide dans sa robe mauve, qui tranche avec l’austérité des décors, Marie-Ange Todorovitch incarna ce rôle à la perfection, vociférant tout au long de l’opéra, éructant sa haine dans des phrases longues, saccadées, proches du parlé, comme les aime le grand compositeur tchèque Leos Janácek. Droite dans ses bottes, elle distillera cette haine avec une égale intensité, du début jusqu’à la scène finale, quand Katia Kabanova mettra un terme à sa vie. Car la vie de Katia, est un drame splendide, d’une noirceur absolue, d’une effroyable beauté ! Exécrée par sa belle-mère, repoussée par son faible mari Tikhon (Yves Saelens), éprise d’amour pour Boris (Florian Laconi, parfait dans son rôle d’amoureux romantique), son destin est tout tracé, rythmé par le cours de la Volga. Acteur essentiel de ce drame, le fleuve rythmera la pièce et sera, très justement, au centre de la mise en scène, dépouillée, mais magnifique, de Nadine Duffaut. Belle et ondoyante quand musent les amoureux,

Varavara (Ludivine Gombert, une fois encore d’une belle élégance vocale), et Kudriach (Julien Dran, excellent tant vocalement que scéniquement), la Volga engloutira la belle Katia dans sa robe rouge-sang (Christina Carvin héroïque, dans un rôle éprouvant tant physiquement, vocalement redoutable, qu’émotionnellement). L’acmé de cette pièce -quand Varvara, Kudriach, et Katia avec son amant Boris, goûtent au plaisir de l’amour, batifolent, se rafraichissent avec l’eau du fleuve bientôt meurtrier- fut un pur moment de

CHRISTOPHE FLOQUET

Katia Kabanova a été donné à l’Opéra Grand Avignon les 27 et 29 novembre


42 au programme musiques bouches-du-rhône vaucluse var

20 décembre La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

7 janvier Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

La route fleurie

© OMC 2007-2008

29 décembre au 8 janvier Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

Le tout est dû à un musicien en retard ! Lorsque le cinéaste Pabst demande en 1933 à Maurice Ravel de composer la musique de son film Don Quichotte, en pensant à la voix de Féodor Chaliapine dans le rôle-titre, il ne se doute pas que l’absence de réponse du musicien n’est pas un refus, et que Ravel travaille à cette composition et passe commande à Jacques Ibert. C’est la musique de ce dernier qui sera à l’affiche, celle de Ravel arrive trop tard… Le Quintette à vent de Marseille et le baryton Jean-Christophe Maurice offrent un programme musical rendant compte de cette histoire à l’occasion du 400e anniversaire de la mort de Cervantès. 16 décembre Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

La Chauve-souris

Pour se venger de son ami Gabriel von Esenstein, qui l’a forcé à traverser Vienne déguisé en chauve-souris au retour d’un bal masqué, Dr Falke propose à ce dernier de l’accompagner déguisé à la fête d’Orlofsky. La troisième opérette de Johann Strauss fils regorge de quiproquos, de retournements, de confusions, pour s’achever dans la joie légère des bulles de champagne. L’orchestre et les chœurs de l’Opéra de Marseille suivent cette anecdote débridée servie par de talentueux interprètes sous la direction musicale de Jacques Lacombe, dans une mise en scène de Jean-Louis Grinda.

Le lendemain des Rois, le 7 janvier 2017, on aura le privilège viennois d’assister, dans l’écrin de l’Opéra de Marseille (pour 8€ seulement), au traditionnel concert du nouvel an. Exercice festif où l’année nouvelle puise ses réserves de joie et d’élans heureux. Jacques Lacombe dirigera son orchestre pour notre plus grand bonheur, dans un programme que l’on aura le plaisir de découvrir le jour-même.

La délicieuse opérette de Lopez qui conduit la bohème parisienne (« une vie de patachon ») sur la Côte d’Azur, narre les amours de jeunes gens artistes et fauchés et d’un producteur riche mais compréhensif. Elle fut créée en 1952 avec Guétary, Bourvil, et Annie Cordy qui lança le néologisme « subitiste » et fut ovationnée auprès de son compère Bourvil à chaque représentation avec son « Dagada tsoin tsoin »… Traduction ? Courez vite à l’Odéon retrouver Mimi, Lorette, Rita, JeanPierre, Raphaël et Bonardel, sous la direction musicale de Bruno Conti.

04 96 12 52 74

14 & 15 janvier Odéon, Marseille odeon.marseille.fr

Suites dans le goust françois Jean-Marc Aymes © Marie-Eve Brouet

04 91 54 70 54

Concert du nouvel an

© Marc Dresse

L’âge d’or de l’opéra napolitain nous donne rendez-vous au théâtre de La Criée avec le contre-ténor Max Emanuel Cenčić et l’orchestre Il Pomo d’oro. Virtuosité du chant baroque, acrobaties époustouflantes, dignes, des castrats comme Farinelli idolâtrés du public… L’opera seria napolitain reprend vie avec les airs de Porpora, Leo, Pergolèse, Scarlatti. Pas de tomates (les fameuses « pommes d’or ») pour ces exceptionnels artistes, mais des bravi !

Quintette à vent de Marseille © X-D.R

Les chansons de Don Quichotte Max Emanuel Cencic © Anna Hoffmann

Arie Napoletane

Froberger, Louis Couperin, D’Anglebert, Reinken, Bach, cinq compositeurs pour brosser une histoire de la suite pour clavecin et montrer comment le « goust françois » a conquis toute l’Europe, richesse de l’ornementation, humour, tendresse, émotion… sous les doigts du grand claveciniste Jean-Marc Aymes dans ce programme du Concerto Soave. 14 janvier Musicatreize, Marseille 04 91 00 91 31 musicatreize.org 15 janvier Conservatoire du Grand Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr


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Orchestre Français des Jeunes

Les Méduses

Dans le cadre du 50e Festival des Amis de Saint-Victor, un hommage particulier sera rendu au grand flûtiste Jean Patero, originaire de Marseille et qui, à sa carrière d’interprète soliste international, ajouta celle d’enseignant émérite. Pour ce faire, un programme Bach, Mozart, Ibert, servi par les artistes Georges Nikolaïdis (flûte), Émilie Gastaud (harpe) et l’orchestre symphonique Aix-Marseille Université sous la direction de Sébastien Boin.

Plongée sous-marine, que nenni, personne n’aura à craindre ces curieux animaux gélatineux et urticants. La nuée de méduses luminescentes de l’installation imaginée par le scénographe Francis Guerrier est réglée pour réagir aux variations sonores. Ballet étrange et fascinant animé par le Quatuor Psophos, premier Grand prix du Concours international de quatuor à Cordes de Bordeaux 2001. De la magie pure au programme en partenariat avec le musée Estrine ! (à partir de 10 ans).

© Sylvain Pelly

Hommage à Jean Patero

Aix a le bonheur de voir revenir dans les murs du GTP l’Orchestre Français des Jeunes sous la direction de l’américain David Zinman. Le grand Truls Mørk aura le redoutable privilège de succéder, dans l’interprétation de Tout un monde lointain, concerto pour violoncelle de Dutilleux, à Rostropovitch qui créa l’œuvre en 1970. Puis, l’orchestre montrera toute sa maîtrise et la variété de ses talents avec la Symphonie n°3 en la mineur op. 44 de Rachmaninov.

15 janvier Abbaye Saint-Victor, Marseille 06 51 16 63 78 saintvictorfestival.wix.com/50ans

Cantate de Saint-Nicolas

Orchestre philharmonique du Pays d’Aix

21 décembre Abbaye Saint-Victor, Marseille 06 25 02 36 79 adfontescanticorum.com

Camille Berthollet © X-D.R.

17 décembre Alpilium, Saint-Rémy-de-Provence 04 90 92 70 37 mairie-saintremydeprovence.fr

Jean-Christophe Born © William Nadylam

18 décembre Chapelle du Sacré Cœur, Aix-en-Provence

Quatuor Psophos © Denis Rouvre

15 décembre GTP, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net

En période de Noël, l’évocation de Saint-Nicolas s’impose, et reprendre l’une des œuvres majeures de Benjamin Britten rappelant cette figure commune à l’Orient et à l’Occident s’avère œcuménique et de circonstance. L’Ensemble Ad Fontes et l’Orchestre de Chambre de Marseille interprètera cette riche partition sous la direction de Jan Heiting. Le rôle-titre sera tenu par le ténor Jean-Christophe Born accompagné par un chœur d’enfants issus de l’École de musique de Carry le Rouet et du Conservatoire de Martigues.

Chaque année, l’Orchestre Philharmonique du Pays d’Aix et son chef, Jacques Chalmeau, concoctent la surprise d’un nouveau programme qui permet une charmante exploration du répertoire classique. Cette année, Robert Schumann est à l’honneur avec l’Ouverture de Genoveva, la Symphonie n°4 en ré mineur op. 120 et le virtuose Concerto pour violoncelle en la mineur op. 129, avec la jeune violoncelliste Camille Berthollet qui a bouleversé lors de l’émission Prodiges. 7 janvier GTP, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net

Les Noces de Figaro La folle journée de Beaumarchais reprise en opéra buffa par Mozart et son librettiste Da Ponte n’est plus à présenter. On mesurera avec Figaro (David Bizic) la chambre attribuée par le Comte Almaviva (Michal Partyka), on sourira aux frasques de Cherubino (Anna Pennisi), on sera ému par l’air de la Comtesse (Camila Titinger), on goûtera la fine intelligence de Susanna (Guiliana Gianfaldoni)… Tandis que l’Orchestre et chœur de l’Opéra de Toulon apporteront leur verve à la partition mozartienne sous la houlette d’Eun Sun Kim dans la mise en scène de Christian Gangneron. 27 au 31 décembre Opéra de Toulon 04 94 92 70 78 operadetoulon.fr


44 au programme musiques var

vaucluse hérault alpes-maritimes

Khatia Buniatishvili

Du Nord au Sud

Le Festival de musique de Toulon fête ses vingt ans cette saison et garde la particularité de proposer de grands concerts toute l’année. La virtuose Khatia Buniatishvili pour qui « le piano est le plus noir des instruments, un symbole de solitude musicale » nous emportera dans les élans passionnés de la Sonate n°8 Pathétique de Beethoven, la subtilité des Quatre Impromptus (D899, op.90) de Schubert et les traits sublimes de deux œuvres de Franz Liszt, Réminiscence de Don Juan / Rhapsodie espagnole et la Rhapsodie hongroise n°2 (dans la version de Vladimir Horowitz).

Ah ! Le soleil de Mexico et ses roucoulades par la voix de Luis Mariano ! L’intrigue est rocambolesque à souhait, et promène chanteurs et histoires amoureuses de la fête de Lesaca (au Pays Basque) à Mexico en passant par Paris, le tout en quinze tableaux. L’œuvre célébrissime de Lopez, dirigée par Didier Benetti, entraîne l’Orchestre Régional Avignon-Provence et le Chœur de l’Opéra Grand Avignon aux côtés de Cricri, Bilou, Cartoni, la fougueuse Tornada et même Zapata… Du 30 décembre au 1er janvier Opéra du Grand Avignon, Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

Soupe populaire Ou plutôt La Soupe Pop, ouvre la voie à une nouvelle forme de spectacle, un théâtre musical collaboratif, à mi-chemin entre installation, performance, documentaire, le tout au son des Tiger Lillies, et la mémoire des premières aides aux SDF dans la foulée de la grande dépression de 1929 aux États-Unis. La Soupe Pop de Marie-Ève Signeyrole jongle entre le cabaret brechtien et le burlesque façon années 30.

15 janvier Palais Neptune, Toulon 04 94 18 53 07 festivalmusiquetoulon.com

Concert de Noël

Xavier De Maistre © Felix Broede

© Caroline Doutre

Le Chanteur de Mexico

Finlande, Argentine, Danemark, véritable invitation au voyage que le concert Du Nord au Sud ! La suite orchestrale de Sibelius, Pelléas et Mélisande, d’après le poème de Maeterlinck, émeut par ses denses harmonies, ses subtiles variations. Étonnante de puissance, la harpe du Concerto pour harpe et orchestre d’Alberto Ginastera (jouée par Xavier de Maistre) éblouit de virtuosité. Enfin, la Symphonie n°4 Inextinguible opus 29 de Carl Nielsen décrit selon son compositeur « les sources les plus primitives du flux vital». L’Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon l’interprète sous la houlette de Michael Schønwandt. 15 & 16 décembre Opéra Berlioz, Montpellier 04 67 60 19 99 opera-orchestre-montpellier.fr

L’Orchestre régional Avignon-Provence se glisse dans l’Église des Carmes pour un concert de Noël lyrique sous la direction de Samuel Jean avec la soliste Nathalie Manfrino qui apportera la délicatesse de sa voix de soprano aux grands airs de Verdi, Bizet, Schubert, Mozart, Massenet, Franck, Fauré, Bach, Gounod… Les Ave Maria rejoindront Pelléas et Melisande, la Méditation de Thaïs, l’air de Desdemona ou Cavalleria Rusticana… 16 décembre Église des Carmes, Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

13 au 18 décembre Opéra Comédie, Montpellier 04 67 60 19 99 operaorchestre-montpellier.fr

© Philippe Matsas

Marie-Eve Signeyrole © Marc Ginot

Nathalie Manfrino © robin robin-photos

Misa Criolla

L’un des chefs-d’œuvre vocaux d’Ariel Ramirez, la Misa Criolla, trouvera un écrin de choix en la cathédrale de Grasse. Écrite en Espagnol, elle est construite sur divers thèmes populaires d’Amérique du Sud, et a atteint une popularité mondiale rare. L’ensemble La Chimera apporte sa fougue à cette musique métissée. Autre bonheur, une Messe Indienne, Misa de Indios, semble réconcilier l’occident conquérant et les peuples conquis, par la rencontre de ses sources d’inspiration. 20 décembre Cathédrale de Grasse 04 93 40 53 00 theatredegrasse.com


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46 au programme musiques bouches-du-rhône vaucluse var

Nomades du levant Melizma et Maya Mihneva © X-D.R.

Natacha Barduzzi / Antonio Valdès

Electro Deluxe

Le Forum des jeunes, à Berre, propose une carte blanche à deux des artistes-professeurs de musique qui animent la vie du lieu, et qui ont chacun un nouvel album à présenter : dans ...Lignes de vie, Natacha Barduzzi chante le jazz en y mêlant des rythmes argentins, brésiliens et slaves ; avec SoNiKeTe AZuL, Antonio Valdès fusionne le jazz et le flamenco, dans une explosion d’images sonores et de sensations.

Le bouillonnant groupe d’électro jazz français vient présenter son nouvel album, Circle, dans lequel samplers et machines s’effacent un peu pour laisser la place à une nouvelle section cuivres et des instruments vintage. Emmené par le chanteur crooner James Copley, le groupe renouvelle ainsi magiquement la scène soul.

17 décembre Forum des jeunes, Berre 04 42 10 23 60 forumdeberre.com

Le Gros souper

© Roch Armando

Dj Eve Dahan @ Nicolas Delpierre

Les Sulfureuses #7

15 décembre Espace Julien, Marseille 04 91 24 34 10 espace-julien.com

Natacha Barduzzi © Régine C

11 janvier Le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

14 janvier Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

Le label indépendant Orizon Sud organise la 7e édition de ce rendez-vous électro-rock qui fait la part belle aux talents de la scène locale. Sur le plateau se succèderont les aubagnaises Zenia Church et Marine Soleil, duo féminin détonnant de Swan Ink, la Dj, productrice et interprète Eve Dahan, qui métisse son électro d’influences brésiliennes, indiennes, rock et de sons du répertoire français, et le duo What The S***d né de l’association des multi-instrumentistes Ghes-hi, beatmaker-turntablist, et du machiniste Kilek.

On connaît depuis longtemps les spectacles de ce duo atypique, Bizet était une femme et Opéra Molotov. Cathy Heiting, vocaliste hors norme, et Jonathan Soucasse, pianiste virtuose, proposent là un voyage surprenant entre jazz et hip hop-groove, auxquels se mêlent quelques envolées lyriques magiques !

Duo Heiting - Soucasse © Julien Sayegh.

Cette soirée réunit les musiques de Transylvanie du trio à cordes Ardeal, puis la formation Melizma, qui tire son nom des mélismes dont les flûtes kaval sont porteuses. Le répertoire d’Ardeal (Patrice Gabet, Philippe Franceschi et Christiane Ildevert) rend compte de la grande richesse offerte par la diversité ethnique de la musique populaire et vivante de Transylvanie (roumaine, hongroise, allemande, serbe, ukrainienne et tsigane). Les 3 musiciens de Melizma (Isabelle Courroy, Lionel Romieu et Jérôme Salomon) accueillent quant à eux Maya Mihneva, qui interprète les danses des différentes régions de son pays, la Bulgarie. Emmanuel Frin clôturera la partie concert avec sa cornemuse bulgare, la gaïda.

Soirée jazz

13 janvier Auditorium Jean Moulin, Le Thor 04 90 33 96 80 auditoriumjeanmoulin.com

Plus qu’un repas, Le Gros souper (qui était, rappelons-le, le repas maigre que l’on faisait en Provence lors de la veillée de Noël) est un moment de convivialité où vont se mêler les plats, les odeurs, et les voix de l’ensemble vocal d’hommes Article 9, auxquelles se mêleront celles des femmes d’Alinéa 4, dans un répertoire qui mélangera chants de Noël de Provence et du monde. 17 décembre La Fraternelle, Correns 04 94 59 56 49 le-chantier.com


Kellylee Evans. Photographie : Arnaud Compagne

AIX-EN-PROVENCE 96.2 MARSEILLE 92.8 jazzradio.fr


48 au programme spectacles marseille

La folle journée ou Le mariage de Figaro

Je danse parce que je me méfie des mots

04 91 54 70 54

4 au 7 janvier La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

Stereoptik et Dark Circus Deux musiciens et plasticiens, Romain Bermond et Jean-Baptiste Maillet, sont à l’origine de Stereoptik, une compagnie qui tente d’élever le bricolage et la loufoquerie au niveau des Beaux-arts. Dans le spectacle éponyme, ils font enlever une chanteuse de jazz par des extraterrestres, et pour mettre en place leur Dark Circus, ils empruntent leur texte à Pef, génial créateur, entre autres, du Prince de Motordu. Du 9 au 21 janvier, leur « Invasion » de La Criée se décline aussi sous forme d’exposition, permettant à tous de découvrir un univers graphique unique en son genre.

Réparer les vivants Réparer les vivants, elle sait y faire, Maylis de Kerangal, et Zibeline a souvent célébré son œuvre. Nul ne s’étonne qu’elle inspire d’autres artistes : le film de Katell Quillévéré tiré de son livre vient de sortir, et son adaptation au théâtre fût l’un des grands succès du festival d’Avignon 2015. Emmanuel Noblet est son propre metteur en scène dans un solo-performance où il incarne tous les personnages de cette histoire incandescente de transplantation cardiaque.

© Aglaé Bory

Dark Circus 17 au 21 janvier

04 91 54 70 54

10 janvier Théâtre Joliette-Minoterie, Marseille 04 91 90 74 28 theatrejoliette.fr

Les ombres blanches

Stereoptik 13 & 14 janvier

La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

© Gregory Batardon

Dino fait son crooner, Shirley fait sa crâneuse 13 au 18 décembre Le Gymnase, Marseille 08 2013 2013 lestheatres.net

La danseuse Kaori Ito est passée chez Preljocaj, Decouflé, mais son expérience l’a également conduite vers le théâtre. Dans le droit fil de cette démarche, elle invite ici sur scène son propre père, le sculpteur Hiroshi Ito, et de leur relation intime les deux artistes ont extrait la matière d’un langage universel. Une histoire d’amour filial et paternel, une « façon de se dire au revoir, lentement ». En collaboration avec Klap Maison pour la danse.

© X-D.R

Rémi Barché réactive le délice créé par Beaumarchais au XVIIIe siècle, sur une bandeson qui fait le grand écart entre Mozart et Beyoncé. L’esprit de subversion du grand classique résonne tout au long des cinq actes, empreints d’une dialectique presque aussi vieille que l’humanité : entre maître et valets, hommes et femmes, pouvoir et séduction... Le metteur en scène entend montrer « des personnages qui dansent sur un volcan », et, entouré d’une troupe de comédiens exceptionnels, y parvient de fort belle manière.

Dino fait son crooner, Shirley fait sa crâneuse, et l’un dans l’autre ils parviennent à nous faire oublier que le monde va mal... ce qui n’est pas une mince performance. Il faut dire que Corinne et Gilles Benizio ont de la bouteille, puisqu’ils arpentent en duo les salles de France et de Navarre depuis plus de 30 ans. Dans ce spectacle, les humoristes rendent hommage à la culture italienne, aux chansons de Dean Martin (Dino, donc), et aux pâtes à la sauce tomate.

© Didier Pallages

© Elisabeth Carecchio

Shirley & Dino

10 au 21 janvier Les Bernardines, Marseille 08 2013 2013 lestheatres.net

Pièce chorégraphique pour deux danseurs, Les ombres blanches fait appel à l’imagination et au goût du frisson de ses petits spectateurs (à partir de 6 ans). Fantomatiques, corps sans têtes ou sans mains, Anita Mauro et Lucien Brabec hantent le plateau du Merlan, entre brouillard et feux follets. Nathalie Pernette a bénéficié d’une complicité artistique particulièrement bien adaptée à son univers fantastique : celle du magicien Thierry Collet pour les effets spéciaux, et du musicien Franck Gervais pour l’environnement sonore. 13 & 14 décembre Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org


Nathalie Pernette propose une courte chorégraphie (30 minutes) adaptée aux enfants à partir de 3 ans. Son originalité : recourir à de charmants rongeurs, toute une colonie de petites souris noires et blanches, pour peupler la scène à ses côtés. La danseuse intègre la part d’improvisation liée au travail avec des animaux dans ses évolutions, en se basant sur leur façon très particulière d’être au monde : sons, odeurs, et mouvements ne sont pas perçus de la même manière quand on fait 5 centimètres de long et qu’on est doté d’un nez frémissant !

© Claude Journu

Animale

14 décembre Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org

Llámame Lola + Moi, Corinne Dadat

Llamame Lola © Philippe Savoir

Deux spectacles qui se suivent et se répondent même s’ils ne se ressemblent pas, voilà ce que le Merlan propose, deux soir durant, à son public à partir de 12 ans. Un portrait chorégraphique, où Mickaël Phelippeau dessine le parcours de la danseuse espagnole Lola Rubio, et un portrait privilégiant le texte, celui d’une femme ordinaire, Corinne Dadat, « technicienne de surface » (comme on dit dans les ressources humaines), par Mohamed El Khatib. 10 et 11 janvier Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org

11 > 14 JANVIER 2017

TEATRO DELLE ARIETTE

MOI, LE COUSCOUS ET ALBERT CAMUS

Clameur des arènes Le titre évoque irrésistiblement un combat de gladiateurs, et c’est presque de cela qu’il s’agit : une violence ritualisée, devenue spectaculaire (même si, rassurez-vous, elle n’implique pas de verser le sang comme c’était le cas dans l’Antiquité). Salia Sanou fait converger danse contemporaine et art traditionnel de la lutte à l’africaine. Le musicien et chanteur Emmanuel Djob accompagne avec son groupe les évolutions sur scène de trois danseurs et cinq lutteurs, entre jazz, rock et blues. 13 décembre Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

14+ ans \/ THÉÂTRE CULINAIRE ET AUTOBIOGRAPHIQUE

ADULTE, ENFANT : 10 € CARTE MASSALIA : 8 € BILLETTERIE 04 95 04 95 75

LA FRICHE LA BELLE DE MAI 41 RUE JOBIN 12 RUE FRANÇOIS SIMON 13003 MARSEILLE

www.theatremassalia.com


50 au programme spectacles marseille

Thank you Ferré !

Teatro Naturale ?

En tant que structure qui n’a jamais eu peur d’être lyrique, le Théâtre Toursky présente cette soirée, rendez-vous incontournable et récurrent de sa programmation, comme un « mistral d’outre-saison » porté par le souffle subversif de Léo Ferré. Richard Martin rendra hommage à celui qui considérait la poésie comme une clameur, accompagné au violon par Didier Lockwood.

©Rémy Cortin

Les élans ne sont pas toujours...

Allons, on commence l’année avec de bonnes résolutions ! Notamment, prêter oreille à ceux qui osent parler d’identité avec humour, sans repli ni stigmatisation. Jean-Jérôme Esposito est de ceux-là, évoquant le multiculturalisme marseillais à son meilleur, car « l’Algérie est son origine, l’Italie sa patrie, l’Espagne est dans son assiette, la Tunisie dans son cœur, et sa langue, française. Il est né au cœur des Quartiers Nord de la ville, dans une cité où chaque étage est un voyage. Il entend l’arabe de son voisin, l’espagnol de sa mémé, le comorien de son ami, le vietnamien de la voisine et bien d’autres langues. » Un one man show qui fait du bien. 6 janvier Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

Le Théâtre Massalia cible les adolescents, qui se caractérisent par un appétit considérable, renforcé en période de croissance. Répondant à l’appel du ventre, ils auront le privilège de découvrir l’œuvre de Stefano Pasquini, lequel mêle, en véritable italien, l’amour, la cuisine et la littérature. Le spectacle s’achève sur la dégustation d’un plat de couscous, et célèbre un anniversaire : les 10 ans des Grandes Tables, le restaurant de La Friche. À partir de 14 ans.

Les élans ne sont pas toujours des animaux faciles 13 janvier Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

04 95 04 95 75

Rufunambule

11 au 14 janvier Massalia, Marseille theatremassalia.com

Le Jardin du possible

© Nicolas Désiré Frisque

© Yohanne Lamoulere-Picturetank

Récit de mon quartier

© Stefano Vaja

Ah ça non, les élans ne sont pas toujours des animaux faciles ! Trois compères adeptes de l’humour musical, Pascal Neyron, Emmanuel Quatra et Benoît Urbain, sont là pour en témoigner. Et de bien d’autres choses encore : Verlaine serait à nouveau de passage en ce bas monde, qui abriterait aussi des hybrides -femme côté pile et homme côté face (ou l’inverse)-, sans parler de la possibilité d’y vendre des morceaux d’arc-en-ciel. Le tout sur un air de guitare, de piano ou de contrebasse.

Cinq représentations, c’est bien, mais est-ce que ce sera suffisant ? Suffisant pour faire le tour d’une question qui fâche l’humanité depuis si longtemps, celle de « l’équilibre impossible » entre les hommes et les femmes ? Rufus, le funambule-au-figuré, ne reculera pas face à la difficulté de l’entreprise, et coûte que coûte, quitte à se faire détester des uns et des autres, fera l’éloge de l’amour. 10 au 14 janvier Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

Ce Jardin du possible est un « éveil au toucher et à l’image » accessible à tous (à partir de 1 an !). Benoît Sicat, qui est aussi plasticien, en est le jardinier. Sur ses pas, le spectateur est invité à manipuler lui-même divers minéraux et végétaux, pour s’imprégner de sensations. Car cet artiste est convaincu des atouts du jeu, sans jugement, ni hiérarchie, comme principe d’exploration du monde et de construction de soi.

© Dominique Verite

16 décembre Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

04 95 04 95 75

14 au 16 janvier Massalia, Marseille theatremassalia.com


le meilleur des

© ALEX MAHIEU

réveils 6h-9h30


52 au programme spectacles bouches-du-rhône

Mimi au pays de l’Ampoulélé

Neige de feu

© @fredlameche

Mimi (Myriam Daups) se promène au pays de l’Ampoulélé, dont la reine ressemble... à une ampoule dotée d’ailes. Soudain, c’est la catastrophe ! La source ne coule plus, car son génie s’est laissé aspirer à l’intérieur d’une trompette. Le jeune public à partir de 3 ans suivra avec plaisir l’héroïne dans une quête réparatrice autant qu’initiatique : il s’agit de concocter une potion magique sonore, pour que tout rentre dans l’ordre. Un heureux panaché de musique, théâtre, danse et vidéo.

© Augustina Iohan

Le p’tit bal Marinette Dozeville mène la danse et entraîne ses mini-recrues (à partir de 6 ans) dans un bal « pour les p’tits, par les p’tits, chez les p’tits ». Échauffement, apprentissage des chorégraphies, et les voilà partis pour une heure et quart de défoulement ludique, en rythme s’il vous plaît ! L’ambiance est au disco, les paillettes fleurissent... gare à la surchauffe de la boule à facettes.

Au cours des siècles, le solstice d’hiver a été l’occasion de bien des célébrations païennes ou religieuses. Ici c’est la Cie Terre et Ciel qui œuvre, avec un spectacle pyrotechnique qui illuminera la nuit la plus longue de l’année. Sur une chorégraphie de Michel Raji, Lara Castiglioni évolue seule dans une forêt de symboles : le centre, le cercle, la croix. La danseuse joue avec le feu, entre rituel et fascination pour la lumière.

© Cie Marinette Dozeville

21 décembre Centre Ville, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

5 au 9 décembre Théâtre de Fontblanche, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

Oreste aime Hermione qui aime Pyrrhus…

15 décembre Salle Guy Obino, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

Monsieur Mouche

Un homme à tout faire assure les menus bricolages qui font le quotidien des salles de théâtre. Mais il est aussi un tantinet cabotin, et Monsieur Mouche, alias Thomas Garcia, aimerait bien passer de l’art de changer les ampoules à celui d’attirer les regards sous les feux de la rampe... Ni une ni deux, le voilà qui investit la scène, dans un « solo clownesque musical » où il révèle un talent certain, armé d’un ukulélé, d’une scie musicale, et d’autres instruments nettement plus improbables. 13 et 14 décembre Théâtre de Fontblanche, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

Dans la foulée du P’tit bal (voir ci-dessus ), la Cie Marinette Dozeville propose une version XL, parce qu’il n’y a pas de raison que seuls les minots aient le droit de s’amuser. Son bal moderne participatif part du principe que l’apprentissage de courtes chorégraphies est à la portée de tous, et qu’une fois la gestuelle plus ou moins intégrée, le plaisir de la danse en est décuplé. Festif et ludique, le dispositif a un effet libérateur. 16 décembre Salle Guy Obino, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

© Damien Richard

© Frédéric de Faverney

Le bal disco dont vous êtes le héros

L’intrigue d’Andromaque (quasiment) résumée en un titre ? Avec cette parfaite adaptation des vers de Racine, dans une version ludique et audacieuse portée par deux comédiens formidables, le Collectif La Palmera réussit en tous cas à passionner son auditoire autour de cette chaîne amoureuse inoubliable… Dès 14 ans. Oreste aime Hermione qui aime Pyrrhus qui aime Andromaque qui aime Hector qui est mort 12 et 13 janvier Théâtre de Fontblanche, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr


53

Il était une fois le Petit Poucet

En alerte

La verve de Christian Mazzuchini explore à nouveau l’univers de la psychiatrie. Après son Psychiatrie déconniatrie, il revient avec un délirant Dingo Dingue, et convoque à tour de rôle psychanalystes et poètes : Jean Oury, Lucien Bonnafé, Jacques Lacan, François Tosquelle, Tarkos, Serge Valetti, Charles Pennequin… Il y a la maman avant, la maman après et Christian Mazzuchini maintenant, entre passé, présent et futur qui ont du mal à se départager. Poétiquement génial !

Compagnon de route du Bois de l’Aune depuis plusieurs années, le danseur et chorégraphe Taoufiq Izzediou revient avec sa dernière création. Accompagné sur scène par la musique live de M’Aalem Stitou et Mathieu Gaborit aka Ayato, il offre par sa danse son cheminement d’artiste, ses doutes, ses colères ses espoirs. Par la grâce de la guitare saturée et de la musique Gnawa, la tradition et la modernité se rencontrent dans l’écrin des lumières de Marc Lhommel.

© X-D.R.

Dingo Dingue

Taoufiq Izeddiou © Iris Verhoeyen

Le Petit Poucet après le conte a vieilli, est devenu marquis et perd la mémoire… Ses valets à force de rires, de gags, de chansons, raniment son histoire. La Compagnie de Gérard Gélas, l’Eternel Été, s’empare de l’œuvre de Charles Perrault avec jubilation et les sept comédiens, musiciens, chanteurs nous entraînent (à partir de 6 ans) dans un tourbillon vivifiant sur la musique originale de Luc Santucci et Manuel Le Velly dans une mise en scène d’Emmanuel Besnault. 22 décembre Théâtre Comœdia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

13 & 14 décembre Le Bois de l’Aune, Aix-en-Provence 04 88 71 74 80 aixenprovence.fr

Loin de Linden

La nuit, poésies pour les tout-petits La Cie Tout CouR nous installe en ces instants incertains où passe le marchand de sable, propices à l’éclosion de l’imaginaire, à l’interprétation des ombres que dessinent les jouets de la chambre d’enfant… poésies baudelairiennes, Tristesse de la Lune, Le soleil, magie, marionnettes, théâtre gestuel et musical, au cours d’une envoûtante succession de tableaux oniriques… Le monde s’enchante pour tous les spectateurs à partir de 9 mois. 16 & 21 décembre Théâtre Comœdia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

Depuis vingt ans, elles ne se sont jamais parlé ces deux grands-mères -Eugénie et Clairette (Marie-Claire), la flamande, femme du peuple et la Wallonne, mondaine et voyageuse, fille de général- et cela suffit à créer une infranchissable frontière… Leur petit-fils se place « à l’endroit du silence », les force à se rencontrer, pour enfin comprendre. Et c’est la Belgique toute entière qui se retrouve autour d’une tasse de café ; l’autobiographie et l’universel se croisent avec finesse et humour, sur les mots du texte de Véronika Mabardi dans une mise en scène de Guiseppe Lonobile. 7 janvier Théâtre Comœdia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

04 42 11 01 99

8 janvier Théâtre de Fos scenesetcines.fr

De son titre complet, Il est difficile d’attraper un chat noir dans une pièce sombre (Surtout lorsqu’il n’y est pas), le livre de Christophe Honoré et de l’illustratrice Gwen Le Gac nous emporte dans l’univers de la petite Katell. L’enfant perçoit des images et des sons inaccessibles à ceux qui l’entourent. Dans une adaptation et une mise en scène onirique et sensible de Tommy Milliot.

© Jean Louis Fernandez

14 décembre Théâtre Comœdia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

© A. Piemme

© Richard Patatut

Il est difficile d’attraper un chat noir…

13 & 14 décembre Le Jeu de Paume, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net


54 au programme spectacles bouches-du-rhône

Pixel

Des rêves dans le sable

Les créations numériques d’Adrien Mondot et Claire Bardainne ourlent de leur poésie les mouvements des onze interprètes de Pixel, pièce (créée en 2014) de l’inclassable et talentueux chorégraphe Mourad Merouki. Le décor rendu mouvant, vivant, ajoute sa magie aux évolutions hip-hop, aux improvisations des danseurs, efface les limites… bluffante alchimie !

© Jean-Michel Bihourel

1986, 26 avril, Tchernobyl… Gouri revient à Pripiat, dans la zone interdite, afin d’y récupérer quelque chose ; en chemin, il s’arrête chez Iakov et Véra… vodka, mots humbles… Inspirée par Günther Anders (hanté par le spectre d’Hiroshima), Chantal Morel adapte le roman d’Antoine Choplin La nuit tombée. Travail en épure du texte et des voix. Le théâtre transcrit avec pudeur l’insoutenable tragédie, dans une situation où « nous devenons des analphabètes de l’émotion » selon les mots de G. Anders.

© Patrick Najean

© Laurent Philippe

Ce quelque chose qui est là…

Un plateau de verre, du sable, les images créées projetées sur un grand écran… et un spectacle époustouflant de poésie de grâce, où les portraits et tableaux se composent, se transforment, se modulent sous nos yeux. Contes d’orient, histoires japonaises, temps suspendu. Lorène Bihorel avec finesse et précision nous emporte dans un monde onirique d’une intense poésie. De la magie pure ! (à partir de 6 ans).

04 42 87 75 00

13 décembre Théâtre Vitez, Aix-en-Provence 04 13 55 35 76 theatre-vitez.com

13 & 14 janvier Pavillon Noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org

16 décembre Espace NoVa, Velaux espacenova-velaux.com

#Hashtag Claire et le loup

La Cie Quasi, en résidence au 3bisf, jongle entre la mécanique quantique et la chlorophylle… pour un « jardin quantique » burlesque et étonnant où les plantes vagabondes envahissent progressivement le plateau, croisant dans leur expansion, à moins que ce ne soit le contraire, des « gens joyeux qui cherchent l’art sans jamais le trouver »… une annonce, la fin de la mort en 2043… Éclosion d’une étape de ce travail concocté par Alain Béhar.

© X-D.R

15 décembre 3bisf, Aix-en-Provence 04 42 16 17 75 3bisf.com

© Alain Rico

Les vagabondes

La comédienne et circassienne Claire Dubuis nous raconte à sa manière, tendre et acrobatique, le conte musical de Prokofiev, Pierre et le loup, dans une mise en scène d’Olivier Farge. Les marionnettes de Muriel Kandel accompagnent notre conteuse dans les lumières de Bertrand Blayo. Quel merveilleux cadeau de l’avent ! (pour les 3-7 ans).

16 décembre Maison du Peuple, Gardanne 04 42 65 77 00 ville-gardanne.fr

Nouveau symbole attaché aux rites Internet qui se plient aux exigences des « like » et autres codes virtuels des réseaux sociaux… on est connecté ou l’on n’existe plus (???)… #Hashtag, puisque « tag » il y a, inspire la danse de l’ensemble Pokemon Crew (accueilli en résidence à l’espace NoVa cette saison), sous la direction artistique de Riyad Fghani. Infinies variations dans la continuité du superbe spectacle Silence on tourne… une chorégraphie dynamique et inventive en perspective !

04 42 87 75 00

13 janvier Espace NoVa, Velaux espacenova-velaux.com


au programme spectacles bouches-du-rhône hérault 55

Fidelio

Trois ruptures

Le rap, désormais intégré dans les programmes scolaires (si, si !), est donc enseigné au collège. Lors d’un cours qui commence par une interrogation orale sur la culture hip hop, un élève et son professeur vont se mettre à rapper : le défi de paroles provoque un clash, une battle qui se transforme rapidement en contestation et interrogation sur la nécessité d’apprendre. Jean-Pierre Baro met en scène cette leçon magistrale inventée par David Lescot.

Trois couples, trois ruptures, trois histoires. Othello Vilgard met en scène le texte de Rémi De Vos, trois variations sur l’amour avec le même un point de départ : pourquoi se séparer d’un commun accord alors qu’une rupture déchirante est la meilleure façon de montrer à l’autre qu’il a beaucoup compté ? Le rire est chez Rémi De Vos un exutoire à la folie, la cruauté un élément essentiel du vivant… Voilà de quoi ébranler subtilement certains fondamentaux de nos sociétés !

© Stef Depover

Master

Après Princesse Turandot, la Cie Walpurgis fait à nouveau découvrir aux plus jeunes une des grandes œuvres du répertoire lyrique : Fidelio, seul opéra de Beethoven. Humour et romantisme sont convoqués pour servir cette poignante histoire d’amour entre Leonora et Florestan, qui se trouve être emprisonné pour ses idées politiques. Pour le sauver, elle risquera sa vie en se travestissant pour pénétrer la geôle dans laquelle il est enfermé… Dès 6 ans. 11 janvier Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

© JM Lobbe.

© La Fédération - Cie Philippe Delaigue

Tirésias

Balthazar

© robertdeprofil

Dans cette fable, deux histoires s’entremêlent : il est question d’un petit garçon qui a renoncé à la parole parce qu’on lui a trop répété qu’il était un âne, et d’un âne qui, entouré d’affection, s’est mis à parler. Devenu adulte, le premier travaille comme projectionniste dans un vieux cinéma, tandis que le second triomphe sur les scènes du monde entier. Nicolas Liautard raconte ces deux histoires parallèles dans un spectacle très visuel, où chacun est transformé par le regard de l’autre. Dès 7 ans.

14 décembre Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

Não Não Não ! (non en portugais) est le cri lancé par des adultes à un petit personnage d’argile lorsqu’il glisse dans une flaque de boue ou qu’il rêve de mettre les mains et les pieds dans l’eau pour éclabousser son entourage… Marie Tuffin et Odile L’Hermitte manipulent cette matière tendre et rebelle « pour raconter les évasions sensorielles et salissantes du tout-petit », pour dire ses appétits mais aussi les premiers interdits…

Tirésias, créature monstrueuse dont l’âge et le sexe restent indéfinissables, est l’un des devins les plus célèbres de la mythologie grecque. Retranché dans son cabinet de curiosités, il survit en compagnie de sa fille, rendant ses oracles pour quelques adolescents via Internet. Jusqu’au jour où l’un d’eux le consulte sur ses velléités de suicide… Le texte de Philippe Delaigue, qui se réfère aux écrits d’Ovide, Sophocle et Homère, est pétillant et plein d’humour, révélant avec légèreté l’éternel recommencement de nos erreurs et de nos amours. 13 janvier Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 theatre-semaphore-portdebouc.com 31 janvier & 2 février Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

© Tuffin

13 décembre Collège Henri Daumier, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

16 décembre La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr

11 janvier La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr

04 42 11 01 99

14 janvier Théâtre de Fos scenesetcines.fr


56 au programme spectacles bouches-du-rhône gard vaucluse

Sainte Jeanne des abattoirs

04 66 36 65 10

13 décembre L’Olivier, Istres scenesetcines.fr

16 décembre Espace Robert Hossein, Grans 04 90 55 71 53 scenesetcines.fr

15 au 17 décembre Théâtre de Nîmes theatredenimes.com

13 & 14 décembre Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 theatre-arles.com

Drôles de Noël

Le Bruit des os qui craquent

Vers un protocole de conversation

Depuis 2004, la Ville d’Arles convie des compagnies d’art de la rue à venir fêter Noël dans ses plus beaux lieux patrimoniaux. Durant quatre jours, parmi les 80 rendez-vous (gratuits) proposés, ne ratez pas, en ouverture, le Jardin des anges, par le Theater Tol, le vidéo-mapping de Ad Lib créations projeté sur la façade de l’Hôtel de ville, le Bal des anges de la Cie Bilbobasso dans les arènes, ou encore les Féeries Pyromaniées oniriques de la Cie Cessez L’Feu pour un final pyrotechnique magique ! © Fabien Ebrandere

04 42 56 48 48

10 janvier L’Olivier, Istres scenesetcines.fr

Jardin des Anges © Theater Tol

Dans un pays en pleine guerre civile, Elikia, 13 ans, est enlevée à sa famille par les rebelles pour servir d’enfant soldat. Elle s’enfuira trois ans plus tard, Kalachnikov en bandoulière, avec Joseph, 8 ans, jeune recrue qu’elle prendra le risque de sauver de l’enfer. Au bout de cette fuite, une infirmière lui permettra, petit à petit, de reprendre place parmi les vivants. Le texte intense, dur, cru, mais nécessaire, de Suzanne Lebeau est mis en scène par la Cie Tourneboulé. À partir de 11 ans. 04 90 49 37 40

21 au 24 décembre Arles droles-de-noels.com

Écrite en 1930, la pièce de Bertolt Brecht est une parabole sur la violence économique, sociale et physique, au moment où l’Europe subissait de plein fouet les conséquences d’une crise économique. Dans les abattoirs industriels de Chicago, Jeanne Dark, passionaria des travailleurs, se bat pour leurs droits. Marie Lamachère transpose l’action au cœur de notre réalité, et nous permet de nous interroger avec Brecht, sur les luttes, toujours actuelles, qui secouent le monde.

© Elian Bachini

04 42 56 48 48

La Cie Méli Mélodie s’adresse aux tout-petits avec ces petites histoires courtes mises en chansons, à travers des compositions originales, qui sont un condensé d’émotions, d’expériences et de découvertes. Tout est un jeu dans ce voyage qui éveille leur curiosité musicale et visuelle. À partir de 2 ans.

© Gregoire Edouard

Par-delà les frontières, les limites (en anglais Beyond signifie au-delà), la Cie australienne Circa explore l’animalité cachée en chacun de nous, parcourant tout ce qui peut rapprocher l’homme et la bête. Dans des costumes de circonstance, les circassiens enchaînent les numéros spectaculaires, au cours desquels, dans une savoureuse égalité hommes-femmes, ces dernières sont d’incroyables porteuses déployant leur force avec grâce pour propulser les voltigeurs dans les airs...

Chaque jour, une petite vie © Denise Oliver Fierro

© Richard Daveport.

Beyond

Georges Appaix poursuit son exploration des liens entre les mots et les gestes, entre les notes et les corps. Une femme, muette, qui danse, et un homme qui parle beaucoup vont se rapprocher, paroles et mouvements se faisant rythme, danse, seul ou à deux. Pendant que Mélanie Venino et Alessandro Bernardeschi s’apprivoisent, G. Appaix les guide d’un mouvement de tête, chante et danse aussi. Le plateau devient terrain de jeu, lieu des langages communs au corps et à la parole.

04 90 52 51 51

6 janvier Théâtre d’Arles theatre-arles.com

16 au 20 janvier La Garance, Cavaillon 04 90 78 64 64 lagarance.com


au programme spectacles bouches-du-rhône vaucluse

57

Subliminal

Les bâtisseurs d’empire ou le schmürz

Tu

04 90 52 51 51

© J.Oppenheim

04 90 52 51 51

17 janvier Théâtre d’Arles theatre-arles.com

15 & 16 décembre Théâtre des Halles, Avignon 04 32 76 24 51 theatredeshalles.com

11 janvier La Garance, Cavaillon 04 90 78 64 64 lagarance.com

Antoine et Lili font leur cinéma

Invisibles provisoires Tuiles

© X-DR.

Dans leur ciné-club très personnel et jubilatoire, qui s’apparente plus à un délire poétique qu’à une analyse filmique, Sophie Cattani et Antoine Oppenheim (Collectif ildi ! eldi) questionnent avec humour et impertinence les traces que laisse un film dans la mémoire intime de chacun. Sur des textes écrits par Olivia Rosenthal, qui interrogent la mécanique du désir et les méandres de la vie amoureuse, ils posent un regard décalé sur Les Parapluies de Cherbourg, de Jacques Demy, et les films de la saga Alien avec l’emblématique personnage féminin Ripley.

© Ludovic Leleu

10 janvier Théâtre d’Arles theatre-arles.com

Deuxième volet d’un diptyque -dont le premier, Sublime, avait déjà été créé à La Garance (en 2015)-, Subliminal interroge l’image et sa puissance. Jouant sur « le décalage, le décadrage, la démesure, la dérision, le décentrage entre l’espace, le corps et le son », la Cie Arcosm danse pour défendre la liberté que « le subliminal » ne cesse d’asphyxier.

Qu’est-ce donc qu’un schmürz ? Le mystère sera levé par la Cie A vrai dire qui propose sa version de ce texte de Boris Vian. Tragédie burlesque, la pièce est un portrait de famille, dont les membres semblent plus cruels les uns que les autres. Sauf l’adolescente en rébellion, qui ne supporte pas la violence de ses parents. Chassée de chez elle par un bruit étrange, la famille cherche un refuge et trouve un homme silencieux qui devient un véritable souffre-douleur.

Ce texte collectif, signé par six auteurs, dont Rodrigo Garcia, Joël Pommerat ou Olivia Rosenthal, est créé par la Cie Vertiges Parallèles et mis en scène par Ana Abril. Elle en est également l’une des interprètes, aux côtés de quatre artistes polymorphes, danseurs, musiciens, comédiens. La pièce évoque le mythe de Sisyphe et enchaîne les tableaux où les partitions des auteurs se croisent. L’équilibre et l’instabilité se mêlent à la brutalité et la poésie.

Attention, objet scénique hors norme en approche ! Mélange de manipulation, magie, jonglerie, humour, le spectacle de Fred Teppe est avant tout rempli de surprises et d’inventions déroutantes. Les tuiles, ce sont les chips, que ce « chips’chopathe » engloutit sans retenue. Mais ces boîtes de biscuits apéritif réservent parfois un contenu étonnant. Détourneur d’objets, illusionniste, clown, l’artiste fabrique un univers digne de Jacques Tati ou Pierre Etaix, tout en subtile et tendre naïveté. 14 décembre Chêne Noir, Avignon 04 90 86 74 87 chenenoir.fr

© Delphine Michelangeli et Pierre Salvan

© Olivier Meyrou

© Bertrand Guerry

Tu est une fiction documentaire que l’acrobate Matias Pilet porte en lui depuis sa naissance. Il entreprend ici de rejoindre sa mémoire fœtale, et la scène toute entière est emplie de la douloureuse absence de sa jumelle dont le cœur, quelques jours avant la naissance, s’est arrêté de battre. Cette bouleversante renaissance se traduit par un solo acrobatique qui fait osciller son corps entre douceur et force explosive, que met en scène le documentariste Olivier Meyrou.

13 janvier Théâtre des Halles, Avignon 04 32 76 24 51 theatredeshalles.com


58 au programme spectacles vaucluse alpes

Nourrir l’humanité c’est un métier

Enfin la fin

Kashcaval

© Olivier Laval

régis rossotto © X-D.R

Au départ, il y a un voyage et une influence. Six mois de vagabondage en Europe de l’Est pour les membres de la Cie Latypique, sous l’inspiration de Matei Visniec, le dramaturge franco-roumain, l’un des plus grands auteurs de théâtre contemporain. A l’arrivée, il y aura un spectacle, fait de marionnettes, de masques, et entremêlé des textes de Visniec, avec son « absurde poétique ». Entre temps, il y aura une répétition publique, à l’issue de laquelle la compagnie invitera les spectateurs à réagir à cette œuvre en devenir.

Exposure Sortie de résidence et première confrontation au public pour cette création d’Erika Zueneli. A l’origine du projet, le désir de mettre en écho la danse et la musique, et de s’interroger sur les perceptions des sons par notre corps et nos émotions. L’univers pop-rock des années 70 aux années 90, avec interprétation et chant en direct, rythme les mouvements de la danseuse. Mêlant performance artistique transdisciplinaire et chorégraphie, le spectacle est conseillé à partir de 16 ans. 16 décembre Théâtre des Doms, Avignon 04 90 14 07 99 lesdoms.be

14 décembre Vélo Théâtre, Apt 04 90 04 85 25 velotheatre.com

Mottes A mi-chemin entre céramistes et marionnettistes, François Salon et Sébastien Dehaye donnent vie à trois mottes d’argile. Façonnés par leurs doigts, les blocs deviennent des personnages sous les yeux du public. Les mottes se transforment à volonté, façon Barbapapa d’argile, et racontent l’histoire de leurs racines, celle de la terre. Les compositions musicales de Fabio Ezechielle Sforzini accompagnent cette étonnante création de la Cie Le Poisson Soluble.

14 décembre Théâtre Durance, Château-Arnoux/Saint-Auban 04 92 64 27 34 theatredurance.fr

En France, de nos jours, les paysans représentent une infime partie de la population. Les entreprises de production agricole ont pris la place des petits exploitants, reflet de notre mode de consommation débridé. La Cie Art & Tça a recueilli les témoignages de cette agriculture familiale en train de disparaître, coréalisant avec le Théâtre Durance un spectacle de « théâtre documentaire ». 15 & 16 décembre Centre culturel René Char, Digne-les-Bains 04 92 30 87 10 centreculturelrenechar.fr

Wax Pour ce spectacle conçu par Renaud Herbin, le plateau n’est pas une scène mais un véritable atelier. La comédienne, Justine Macadoux, y incarne une sculptrice qui manipule sa matière de prédilection, la cire (wax en anglais). Brûlant et fondant, le liquide coule dans les moules, avant de durcir et de prendre forme. Mais parfois la matière impose ses propres initiatives. L’artiste, un temps déroutée, y puise bien vite une source de créativité et d’invention inattendues. © François Berard

7 janvier Théâtre des Carmes, Avignon 04 90 82 20 47 theatredescarmes.com

© X-D.R.

Suicide mode d’emploi. Un homme entre en scène, seul, annonce qu’il va compter jusqu’à mille, puis qu’il se tuera une fois le chiffre atteint. Bluff ou pas, le spectateur a de quoi douter, d’autant que l’interprète, Régis Rossotto, l’embarque sur des pentes ambiguës. Un récit de vie s’enchaîne, où tout semble réussi et bien équilibré, parcours amoureux ou professionnel. Pourtant l’homme est décidé à en finir. Ce texte de Peter Turini est mis en scène par Thomas Billaudelle et la Cie Corps de Passage.

4 janvier Théâtre Durance, Château-Arnoux/Saint-Auban 04 92 64 27 34 theatredurance.fr


au programme spectacles alpes var hérault

59

On t’appelle Vénus Petite conférence de toutes vérités…

Les portes pareilles Deux univers se confrontent dans cette chorégraphie signée et interprétée par Balkis Moutashar. La jeune femme mène une « double vie » de danseuse, à la fois sur les scènes contemporaines et dans les cabarets. Les styles se croisent, les ambiances musicales et visuelles aussi, alternant le justaucorps classique et la tenue de plumes, strass et paillettes. Pour jouer avec son double en miroir, Balkis Moutashar est accompagnée par Lisa Vilret.

Yasmina Reza © Pascal Victor ArtcomArt.

Petite conférence de toutes les vérités sur l’existence du 11 au 17 janvier Usine Badin, Gap 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu

En 2010, le film Vénus Noire d’Abdellatif Kechiche avait ravivé l’histoire de cette femme sud-africaine, exhibée en Europe telle un phénomène de foire au début du XIXe. La Cie Difé Kako, avec Chantal Loïal à l’interprétation, assistée de Philippe Lafeuille à la chorégraphie, rend un nouvel hommage à celle que l’on surnomma la Vénus hottentote. Maltraitée et ridiculisée pour ses formes et son apparence, elle prend ici parole et corps, réhabilitée dans sa dignité de femme et d’être humain.

12 au 14 janvier Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

13 janvier Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

24 & 25 janvier Domaine d’O, Montpellier 0 800 200 165 domaine-do-34.eu

Amnésique en musique

no.W.here

© Bohumil Kostohryz © Mirabelwhite

6 janvier Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

La soirée commence mal : un homme invite sa maîtresse au restaurant, une table que lui a recommandé sa femme, ce qu’elle lui reproche âprement… Et pour couronner le tout, il manque d’écraser la belle-mère de la meilleure amie de son épouse sur le parking ! Yasmina Reza met elle-même son texte en scène, dans lequel elle explore les fêlures intimes, les petites et grandes lâchetés de ses contemporains, avec la verve réjouissante qu’on lui connaît.

La troupe toulonnaise Kubilaï Khan, emmenée par son chorégraphe Frank Micheletti, présente sa dernière création, no.W.here, duo pour des danseuses (Sara Tan et Viktoria Andersson) troublantes et magnétiques. Sur une performance musicale de F. Micheletti et Jean-Loup Faurat, il offre une réflexion sur le genre et le brouillage entre féminin et masculin.

Une chanteuse étourdie et un musicien peu bavard vivent ensemble, et ensemble parcourent les théâtres pour donner leur tour de chant. Mais leurs mémoires défaillantes provoquent dérapages et digressions et le duo perd le fil ! Tout devient alors sujet au doute, jusqu’à l’absurde. Philippe Leygnac et Agnès Debord évoquent, avec humour et pudeur, la menace des maladies dégénératives qui nous guettent. 15 décembre Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

© Sem Brundu

Cette « fantaisie philosophique » s’inspire d’un essai de Fred Vargas, auteure bien connue de polards, qui propose ici, à contre-pied des ouvrages de développement personnel, une compilation jubilatoire de propositions pour faire face aux grandes questions existentielles : l’amour, la guerre, la vie, la mort... Sébastien Valignat met en scène un conférencier qui détiendrait toutes les clefs du bien-être universel et absolu.

© Patrick Berger

Bella Figura

14 au 19 janvier Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr


60 au programme spectacles

var hérault

La Queue du Mickey

Carillon

Après avoir abordé le « beau » lors de leur spectacle précédent, Florence Muller et Eric Verdin explorent ici une autre grande et mystérieuse question existentielle : celle du bonheur. Mais qu’est-ce qu’être heureux ? Attraper la Queue du Mickey peut-être, qui permet de « décrocher » du malheur et reprendre sa place dans le grand manège du monde ! C’est ce que quatre clowns lyriques vont tenter de faire, avec humour et poésie.

© La Tal.

Sempé est bien sûr l’auteur du Petit Nicolas, mais il a aussi imaginé un autre merveilleux petit personnage, Marcellin Caillou. Le petit garçon, affligé d’une maladie bizarre qui le fait rougir pour un oui ou pour un non, va rencontrer René Rateau qui, lui, ne cesse d’éternuer sans raison. Leur histoire, et leur indéfectible amitié, est racontée par Les Ateliers du Capricorne en ombres projetées et portées, en personnages et décors de papier en 3D qui semblent sortir tout droit des pages du roman…

C’est l’heure ! L’horloge géante s’anime, sonne, et s’ouvre pour laisser sortir les acteurs-automates de la Cie catalane La Tal. Ça sonne à tout va, ça cliquète, ça tintinnabule. Les gestes saccadés des personnages sont plein d’humanité, et on sent sourdre une douceur enfantine sous l’uniformité des carapaces. Tantôt chevaliers, tantôt clowns, la ronde des automates emmène au pays où l’heure change le rythme de la vie. Spectacle gratuit, à partir de 6 ans. 11 décembre Pôle Jeune Public, Le Revest-les-Eaux 04 94 98 12 10 polejeunepublic.fr

© X-DR

© Remy Perthuisot

Marcellin Caillou

13 & 14 janvier Châteauvallon – Scène nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

A Rovescio

10 janvier Théâtre Marelios, La Valette 04 94 23 62 06 lavalette83.fr

Suzette

Cette œuvre majeure de Bertolt Brecht, dans laquelle il dresse avec dérision le portrait d’un tyran en criminel féroce, est ici adaptée et mise en scène par Dominique Pitoiset, qui retrouve pour l’occasion Philippe Torreton qu’il avait dirigé dans un Cyrano mémorable. Et c’est dans le milieu de la pègre de Chicago qu’ils nous transportent, où la figure d’Arturo Ui emprunte les traits d’Al Capone, et où les pratiques mafieuses rejoignent celles des nazis…

Dès le jour de sa naissance, Suzette est porteuse d’une lourde promesse : la petite bosse que ses parents détectent sur son front fait d’elle un génie à venir. Cette enfant va produire de grandes choses ! Dès lors, l’attente se mue en pression. Fabrice Melquiot saisit là un pan de l’enfance empli de questions pas toujours agréables à cerner pour les parents, et certainement libératrices pour les enfants (à partir de 7 ans).

© Henry Krul

La Résistible ascension d’Arturo Ui

Le spectacle a lieu avant le spectacle. Disons que la scène se situe au devant d’un chapiteau où des artistes se prépareraient à effectuer leur numéro. C’est Giancarlo et Gabriele qui font le véritable spectacle. Tous deux garçons d’écurie dévolus à accueillir le public du supposé cirque, ils découvrent eux aussi les coulisses de la scène, dans des moments d’intimité et d’humour qui les hissent au rang d’artistes inattendus.

17 au 21 janvier Châteauvallon – Scène nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com © Jeanne Roualet

16 & 17 décembre Espace des Arts, Le Pradet 04 94 98 12 10 polejeunepublic.fr

25 au 27 janvier Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com

13 décembre Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatreendracenie.com


au programme spectales var alpes-maritimes gard hérault 61

Opus 14

Concerto pour deux clowns

C’est une histoire d’amour. Entre une mère adoptive et son bébé, qu’elle est allée chercher dans un couvent au Brésil. Est-elle tombée dans un réseau de trafic d’enfants ? L’enquête est menée par un agent de police. Deux comédiens et un circacien incarnent le récit. Trois hommes pour traduire et mouvoir les sentiments de cette femme prête à tout pour repartir avec son enfant. Le nouveau spectacle du Théâtre du Phare.

Des clowns musiciens. La Cie Les Rois Vagabonds ne nous entraine pas sur les chemins de n’importe quelle musique : il s’agit de la noble, la classique, celle qui fait des fois un peu peur et impressionne. Bach, Strauss, Vivaldi ! Une clownesse altière qui joue de l’alto et son comparse tout vouté qui traine son tuba. Le public d’Avignon les a récompensés en 2013, et la piste est encore parsemée d’étoiles pour ces deux inventeurs de cirque.

L’un des porte-parole de la danse hip-hop, le chorégraphe Kader Attou, nous éblouit dans sa nouvelle création avec une réflexion sur le groupe, ou comment en sortir, comment le consolider, comment y exister. Le hip-hop est une expression qui se définit à la fois par une exacerbation des personnalités et la quête d’appartenance. Démonstration par le mouvement des 16 danseurs sur le son électro de Régis Baillet. 13 & 14 janvier Théâtre de Grasse, Grasse 04 93 40 53 00 theatredegrasse.com 17 & 18 janvier Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com

La nuit où le jour s’est levé 13 janvier Pôle Jeune Public, Le Revest-les-Eaux 04 94 98 12 10 polejeunepublic.fr

© Philippe Rappeneau

© Christophe Raynaud de Lage

© Michel Cavalca

La nuit où le jour…

20 & 21 janvier Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr 17 janvier Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

10 janvier Théâtre de Grasse, Grasse 04 93 40 53 00 theatredegrasse.com

Sol Bémol Parcours inattendus

© Eric Massaud

© Kristof Ceulemans

Christelle Chollet est une bête de scène. Une vraie. Elle emporte son public, on ne regarde qu’elle, on n’entend qu’elle. Une humoriste qui chante. Ou une chanteuse qui fait un one woman show. Après un hommage à Piaf, elle décline cette fois son art hybride dans des reprises de Diam’s, Mylène Farmer, Michael Jackson… Clown ou diva ?

5 janvier Théâtre de Grasse, Grasse 04 93 40 53 00 theatredegrasse.com

Après 5 ans de tournée avec leur précédent spectacle Le Carrousel des Moutons, passé par Le Cratère en 2014, Dirk et Fien reviennent avec leur piano, leur poésie et leur langage qui parle le cirque de rue. Le piano est l’élément central de cette nouvelle création : musique, décor, trampoline, scène d’acrobaties… Fien qui en joue et Dirk qui y joue. Une alchimie pour petits (dès 3 ans) et grands, concoctée spécialement pour Noël. 14, 16, 17 & 18 décembre Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

Le centre des arts du cirque Balthazar à Montpellier trace son chemin, offre des horizons aux élèves qui depuis des années suivent les formations de cette école exigeante et novatrice. L’ultime étape du passage devant le public est l’occasion de découvrir des artistes qui se cherchent et trouvent des pistes. Ils se croisent et s’assemblent, inventent et creusent leur sillon. Les perles sont à découvrir dans ces belles occasions.

© Corinne Gal

Comic Hall

17 & 18 décembre Domaine d’O, Montpellier 0 800 200 165 domaine-do-34.eu


62 au programme spectacles hérault

Noos

Meguri

© Erwan Fichou

17 & 18 décembre Domaine d’O, Montpellier 0 800 200 165 domaine-do-34.eu

10 au 12 janvier Domaine de Grammont, Montpellier 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr

Kindertotenlieder

Par/ICI

Neuf pièces en une heure, c’est un défi. Mourad Merzouki propose une fusion des styles, pour une célébration du mouvement hip hop. Il rassemble, pour ce premier volet, quatre chorégraphes, dont il présente des pièces connues. Kader Attou, Anthony Egéa, Bouba Landrille Tchouda et Marion Motin. Un festival d’énergie concentrée et multi facettes. Généreuse adrénaline.

© MDina Photographie

© Mathilde Darel

13 au 15 décembre Domaine de Grammont, Montpellier 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr

20 et 21 décembre Le Corum, Montpellier 0 800 600 740 montpellierdanse.com

La Cie Sankai Juku, 40 ans cette année, revient à Montpellier avec sa dernière création. Le maître du Butô Ushio Amagatsu s’est inspiré du concept de rotation. Meguri, dérivé du mot Meguru évoque l’idée de cycle, quelque chose qui se régénère, dans un ordre défini. Le passage du temps, à travers celui des saisons, traduit l’imaginaire et l’esthétique si codifiée de cette expression qui sans relâche interroge les problématiques contemporaines. 12 et 13 janvier Le Corum, Montpellier 0 800 600 740 montpellierdanse.com

Répertoire #1

A hTh, on aime bouleverser les habitudes et les codes. Au beau milieu de l’avalanche de spectacle dit « de Noël », Giselle Vienne débarque, avec son univers inquiétant et subversif. Le spectacle, créé en 2007, convoque les textes « queercore » de l’écrivain américain Dennis Cooper et la musique « hard » live de KTL. Un questionnement sur l’envahissement du réel par les fantasmes collectifs. Effroi et malaise garantis. Poésie en prime.

© Sankai Juku

Les deux O du titre, comme deux yeux grands ouverts, interpellent et guident vers un être ensemble qui peut-être dépasse le plus conventionnel « Nous ». C’est ce que veulent signifier les deux acrobates Justine Berthillot et Frédéri Vernier. L’un porte, l’autre voltige, mais bien sûr, le duo brouille les pistes et tout s’emmêle pour mieux se nouer et défier les lois de l’apesanteur.

Boris Charmatz, chorégraphe estampillé chef de file de la « non danse », n’en est pas moins l’un des plus beaux danseurs contemporains. Ses désormais rares passages sur scène sont un événement. Il reprend le solo de Tino Seghal, traversée d’un siècle de créations chorégraphiques. Allusions aux maitres, références et langages se mêlent. Suivi d’une proposition de Théo Mercier, avec cascades de moto, clavecin, et domptage motomachique par le performeur François Chaignaud.

© Bruno Canas

© Slimane Brahimi

(sans titre)(2000) + Radio Vinci Park

Les portugais Sofia Dias et Vitor Roriz sont invités par le Centre Chorégraphique de Montpellier à revisiter leurs travaux. Ils nous proposent une déclinaison de divers matériaux issus de pièces précédentes, dans une nouvelle mise en contexte. Après les thèmes des objets et de l’écriture, les deux artistes improviseront sur une base de textes mis en voix pour la première fois. Mots-clés : Débris, simultanéité, fragmentation, double. 14 décembre ICI Institut Chorégraphique International, Montpellier 04 67 60 06 70 ici-ccn.com


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64 au programme cinéma

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bouches-du-rhône

Swagger

L’ardente Fanny à l’Eden

Chang l’éléphant

Swagger, de Olivier Babinet © Rezo Films

Swagger, c’est rouler les mécaniques, se pavaner, faire le fier. Un mot qui apparaîtrait pour la première fois chez Shakespeare et qui, passant par les années 50, aurait prospéré dans les banlieues. C’est aussi le titre du long métrage d’Olivier Babinet, sélectionné au 63e Festival de Cannes, Sélection ACID. Un film qui nous fait entrer dans la tête de 11 enfants et adolescents grandissant dans les cités parmi les plus défavorisées de France, sans perdre ni leurs rêves, ni leur swag ! Mélangeant les genres, jusqu’à la comédie musicale et la science-fiction, ce documentaire choral, loin des clichés misérabilistes ou anxiogènes, redéfinit le « jeune » de banlieue. 14 décembre Cinéma Le Gyptis, Marseille 04 95 04 95 95 lafriche.org

Tim Phonh (Finding Phong)

Tim Phonh (Finding Phong) de Tran Phuong Thao et Swann Dubus © Discovery Communications

Naître dans un corps d’homme et se sentir femme. Le documentaire de Tran Phuong Thao et Swann Dubus relate l’histoire de Phong, jeune Vietnamien, qui dès son enfance se sentait prisonnier dans son enveloppe de garçon. C’est à l’âge de 20 ans, devenu étudiant à Hanoï, qu’il prend conscience que son cas n’est pas isolé. Quelques années plus tard, il entreprend sa transformation. Le film suit son changement de sexe, que le jeune homme, future jeune femme, accompagne en livrant des extraits de son journal intime en vidéo. 11 décembre MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

Une première au MuCEM, un ciné-concert pour accompagner la projection d’un classique du septième art. Tourné en 1926 par Merian C. Cooper et Ernest Schoedsack, les réalisateurs de King Kong, Chang l’éléphant est un film d’aventure dont l’action prend place au Siam. Un cultivateur retrouve son champ de riz piétiné par un éléphanteau qu’il capture. Mais les animaux de la jungle ne comptent pas rester sans réagir. En partenariat avec Fotokino dans le cadre de Laterna Magica, la séance sera mise en musique par Uli Wolters et Christophe Isselée.

Chang l’éléphant de Merian C. Cooper et Ernest Schoedsack © Films du Paradoxe

18 décembre MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

Les beaux jours, de Marion Vernoux © Le Pacte

De passage au Grand Théâtre de Provence, Fanny Ardant sera à l’Eden le 15 janvier. Elle y présentera à 16h son 3e long métrage, Le Divan de Staline inspiré du roman de Jean Daniel Beiltassat, avec Gérard Depardieu, (Staline) Emmanuelle Seigner (Lidia, sa maitresse et Paul Hamy (Danilov, un jeune peintre)… La projection sera précédée d’une rencontre avec Fanny Ardant et la photographe Carole Bellaïche qui a réalisé Tatiana mon amour, avec l’actrice dans le rôle de Tatiana qui croise son ancien amour. À 18h30, Les beaux jours de Marion Vernoux où elle incarne Caroline, une femme à la retraite qui rencontre un homme beaucoup plus jeune.

04 96 18 52 49

15 janvier Eden Théâtre, La Ciotat edencinemalaciotat.com/

Le salsifis du Bengale… Envie de commencer l’année 2017 en douceur et en poésie ? Le 1er janvier, le MuCEM vous propose une séance de treize courts dessins animés, réalisés par de jeunes cinéastes. Les poèmes de Robert Desnos sont mis en images, selon des styles graphiques chaque fois différents. L’univers surréaliste de l’écrivain y trouve un support nouveau, mettant en lumière toute l’inventivité de cet amoureux des mots. Les voix de Romane Bohringer et Jacques Gamblin accompagnent cet ensemble d’une quarantaine de minutes, réalisé en 2015.

Le Salsifis du Bengale, de Raphaëlle Stolz c Autour de Minuit.jpg

Le salsifis du Bengale et d’autres poèmes de Robert Desnos 1er janvier MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

Un paese di Calabria Le 13 Décembre à 19h30 au Cinéma Les Arcades de Salon, le collectif Welcome Salon, en partenariat avec Les Rencontres cinématographiques, le Festival international des droits de l’homme et ALCIEA (Amis de la langue et culture italienne), propose Un paese di Calabria en présence des réalisatrices Shu Aiello et Catherine Catalla. Rosa Maria a quitté Riace en 1931 pour fuir la misère de ce village de Calabre. Un jour, Baïram a accosté sur la plage avec deux cent autres kurdes ; depuis, le village renaît. Aujourd’hui, les habitants s’appellent Roberto, Ousmane, Emilia et Mohamed et ils inventent ensemble leur destinée commune. 13 décembre Les Arcades, Salon-de-Provence 04 90 53 65 06


La Fête du court-métrage Manifestation nationale, La Fête du court-métrage se tient un peu partout en France entre le 15 et le 18 décembre. À l’Espace Robert Hossein de Grans, une journée spéciale sera programmée le 18 décembre. À l’affiche, à partir de 14h30, carte blanche sera donnée à Claude Barras, réalisateur du dessin animé à succès Ma vie de courgette. Sept films seront au programme, dont il est l’auteur ou le producteur. En soirée, dès 21h, projection de Viens voir les comédiens, cinq courts avec de grands noms du cinéma au générique.

Chaque semaine, un expert GÉOPOLITIQUE

Claude Barras © David Zehnder

18 décembre Espace Robert Hossein, Grans 04 90 55 71 53 scenesetcines.fr

ÉCONOMIE URBANISME

Les Intemporels du cinéma Deux classiques du septième art à voir ou revoir en cette période de fêtes. Dans le cadre du cycle Les Intemporels, le cinéma L’Odyssée de Fos-sur-Mer programmera Tous en scène !, film musical de Vincente Minelli, avec Fred Astaire et Cyd Charisse. Puis La Belle équipe, peinture du monde ouvrier des années 30, signée Julien Duvivier, avec Jean Gabin et Charles Vanel. La version restaurée, avec la fin pessimiste voulue par l’auteur, sera présentée.

GRAND TÉMOIN

MA RD I S

D E L A V I L L A

T PAPETERIE

e visite, la carte de correspondance et le papier d’entête. Tous en scène ! de Vincente Minelli © Théâtre du Temple

Tous en scène ! 15, 18, 21 & 23 décembre

INFORMATIONS ET INSCRIPTIONS SUR

WWW.VILLA-MEDITERRANEE.ORG/FR/MARDIS-DE-LA-VILLA

La Belle équipe 29 décembre, 4 & 6 janvier Cinéma L’Odyssée Fos-sur-Mer 04 42 11 02 10 scenesetcines.fr

WAFAW

WHEN AUTHORITARIANISM FAILS IN THE ARAB WORLD European Research Council - www.wafaw.org

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66 au programme cinéma

bouches-du-rhône var vaucluse

hérault

Au bonheur des dames

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Le Gamin au vélo Afectados (rester debout)

Au bonheur des dames de Julien Duvivier © Tamasa Distribution

Le roman de Zola, adapté en 1929 par Julien Duvivier, sera présenté à L’Odyssée de Fossur-Mer, dans le cadre du cycle de films-conférences Villes de cinéma. Ce cycle se tient de novembre 2016 jusqu’à mai 2017, dans plusieurs communes des Bouches-du-Rhône. Il propose de tisser un lien entre une ville et un film, et fait précéder la projection d’une conférence par un spécialiste. La ville à l’honneur est ici Paris, et Noël Herpe, enseignant à l’Université de Paris 8, historien du cinéma, sera l’intervenant.

Ce documentaire signé Silvia Munt (dont le titre original est La Granja del Pas) s’intéresse aux victimes de la crise de 2008 qui a durement frappé l’Espagne. Pris à la gorge par des emprunts toxiques auxquels ils avaient souscrits pour acheter un logement, des centaines de milliers de personnes se retrouvaient alors contraints de rembourser leur prêt tout en étant expulsés de leur maison. La cinéaste a suivi un groupe de gens, constitué en collectif citoyen, pour s’apporter aide et soutien mutuels. Et démontrer que la solidarité et l’espoir sont des valeurs vivaces. (voir aussi p 72).

16 décembre Cinéma L’Odyssée Fos-sur-Mer 04 42 11 02 10 scenesetcines.fr

3 janvier Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Carte blanche à David Ayala Le comédien et metteur en scène David Ayala se fait programmateur cinéma pour le Théâtre Liberté de Toulon. L’artiste, accueilli l’an passé avec Macbeth (The Notes), sera à l’affiche fin janvier avec Le Vent se lève / Les Idiots / Irrécupérables. Dans ce spectacle, il adapte des textes de Pasolini ou Guy Debord. Lors de cette soirée ciné, il présentera trois courts films de Guy Debord, dont Critique de la séparation. Avec l’intention de proposer des clés pour « combattre l’aliénation ». 13 décembre Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Séance exceptionnelle le 13 décembre à l’Utopia de Montpellier. Le film des frères Dardenne sera projeté en présence de l’un d’eux, Luc Dardenne. Le duo fraternel, habitué à récolter les trophées à Cannes (double palme d’Or pour Rosetta en 1999, et L’Enfant en 2005, Le Gamin au vélo recevant le Grand Prix en 2011), compte parmi les maîtres du cinéma de réalisme social. Dans cette œuvre, ils content l’histoire d’un garçon de 12 ans, à la recherche de son père, qui l’a brutalement abandonné. 13 décembre Cinéma Utopia, Montpellier 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org

Le fond de l’air est rouge Les révolutions de la fin du XXe siècle seront au cœur de la soirée pour ce premier rendez-vous ciné de l’année nouvelle au Théâtre Liberté de Toulon. Réalisé en 1977, ce film de Chris Marker retrace toute l’effervescence contestataire qui souffla sur le monde dans les décennies 60 et 70. Cuba, le Chili, la Chine, Castro, Che Guevra, Allende ou Mao, le film rassemble les témoignages sur les événements de cette période, en alternant extraits de documents d’archives et séquences de films coupés au montage.

Le Gamin au vélo de Jean-Pierre et Luc Dardenne © Diaphana

Afectados, de Silvia Munt c Splendor Films

12 décembre Cinéma Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org

La Sociale

Circuit court Ce sera désormais un rendez-vous régulier à l’Utopia d’Avignon. Un samedi matin par mois, une sélection de courts métrages réalisés par des cinéastes locaux sera présentée. Avec l’objectif de faire découvrir des œuvres qui ne trouvent pas leur place dans les circuits de programmation habituels. Un appel est d’ailleurs lancé aux auteurs de la région pour proposer leurs films. À l’affiche de cette première séance, Soury de Christophe Switzer, et Prison Ferme de Claire Thiriet. Projection en présence des réalisateurs.

La Sociale, de Gilles Perret © Rouge Productions

Parmi les acquis sociaux, la protection médicale est l’un des plus essentiels. Mise en place en 1946, la Sécurité Sociale doit sa naissance à l’ardeur d’un ministre communiste de l’époque, Ambroise Croizat. Aujourd’hui, son nom et son engagement sont tombés dans l’oubli. Ce nouveau documentaire de Gilles Perret plonge dans l’histoire de la Sécu, ravive la mémoire de cet homme et met en lumière le rôle fondamental de cet organisme sur la santé des citoyens. Débat avec le Collectif Roosevelt à l’issue de la projection. 15 décembre Cinéma Utopia, Montpellier 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org

Prison Ferme, de Claire Thiriet

17 décembre Cinéma Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 cinemas-utopia.org


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68 critiques cinéma

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Nigériennes à Apt

P

armi les 20 longs métrages présentés à Africapt, une majorité de documentaires (13) dont plusieurs réalisés par des femmes. Deux nous viennent du Niger, Aïcha Macky et Amina Weira avec des films nécessaires, citoyens, qui abordent des sujets tabous.

Se dire et dire le monde Le premier, L’Arbre sans fruit, traite du statut des femmes sans enfant dans un pays où le taux de fécondité est le plus élevé au monde et dépasse les 7 enfants. Une véritable malédiction qui expose les femmes à la présence de coépouses, à l’arnaque de certains marabouts, à la répudiation, au rejet total de la communauté. Peut-on, au Niger, être femme sans être mère ? C’est à cette question que s’attaque frontalement Aïcha Macky, n’hésitant pas à évoquer sa propre histoire, elle qui a perdu sa mère au moment de la naissance de sa sœur. Son film, rythmé par les paroles de femmes qui n’ont pas réussi à devenir mères, par les La colère dans le vent, de Amina Weira c © Vraivrai films témoignages à « Radio alternative » et par une lettre lue à sa mère -Le Prix Fleury Doc décerné par un jury de -« Dans mes nuits blanches, ton esprit guide détenus de la prison de Fleury-Mérogis mes pas ou Je suis un arbre sans fruit »-, brise les tabous, comme dans cette scène où un imam, à l’école coranique, encourage à Témoigner demander le divorce si le mariage ne conduit Le deuxième, La Colère dans le vent, donne pas à la jouissance et au plaisir de la femme la parole aux habitants de la zone minière comme de l’homme, et éventuellement à porter d’Arlit exploitée par Areva, contaminée par plainte auprès des chefs religieux. Ou encore la radioactivité, région d’où vient la jeune quand la réalisatrice va filmer dans un lieu réalisatrice, Amina Weira, qui a fait elle interdit aux femmes, le cimetière où repose aussi son master de réalisation à Saint-Louis sa mère. L’Arbre sans fruit de cette jeune du Sénégal. « Je filme ma société » dit-elle. réalisatrice, formée à l’université Gaston-Berger Son père est un ancien travailleur de la mine de Saint-Louis du Sénégal, qui permet de d’uranium, et tout comme ses collègues il a se dire et de dire le monde a déjà obtenu, à vu la transformation d’un espace pastoral, juste titre, le prix du meilleur documentaire à la limite du désert, à une ville de plus de à African Movie Academy Award’s (AMAA) 130 000 habitants depuis la découverte du au Nigéria et le Prix 1er Film au Festival Jean gisement en 1968. Une ville qui a vu arriver Rouch à Paris. des milliers de migrants, attirés par le travail, L’Arbre sans fruit d’Aïcha Macky a reçu par ce « deuxième Paris » où il y avait l’eau, deux prix lors du 35e Festival international l’électricité, la climatisation. La mine où le père Jean Rouch : de la réalisatrice a travaillé durant 35 ans, sans -Le Prix du Premier film décerné par le jury aucune protection au début, sans masque ni international gants ; où les ouvriers, tels « des manches de

L’Arbre sans fruit, Aïcha Macky © Les Films du Balibari

pelle qu’on peut utiliser tant qu’ils ne cassent pas » sont malades ; où les expatriés touchent le salaire de 50 nationaux. Une région où l’eau est empoisonnée et où ceux qui ont de l’argent boivent de l’eau minérale ; où le poison est partout, dans les murs des maisons, dans les marmites et les bidons confectionnés avec les ferrailles récupérées dans les mines ; où les arbres qu’on plante dépérissent ; où le taux de radioactivité constaté par la Criirad (Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité) et les O.N.G. est très élevé… et où, à certains moments de l’année, de violents vents de sable, chargés de substances radioactives, balaient la ville. C’est tout ce que montre la courageuse réalisatrice dans ce film dont le tournage, difficile, a été interrompu à deux reprises par la police et la gendarmerie. Et c’est à un personnage, mutique, croisé au milieu du désert, qu’Amina confie son désarroi face à cette situation terrible que le gouvernement nigérien ne semble pas prendre en compte. S’égrènent les paroles de la chanson sur les images de silhouettes qui déambulent dans la ville ocre balayée par le Vent de la colère « Oh je pleure, mon amie, n’acceptez pas les hommes des mines car ils sont maudits et car c’est l’enfer qui vous attend ». ANNIE GAVA

Africapt, festival des cinémas d’Afrique du Pays d’Apt, s’est déroulé du 10 au 17 novembre


69

Résistances

C

’est dans la Villa Méditerranée, comble, que s’est ouverte la 4e édition des Rencontres Internationales de Cinéma Arabe le 30 novembre. Une édition placée sous le signe de la résistance comme l’ont rappelé Solange Poulet, présidente d’AFLAM, puis Bernard Valéro, directeur du lieu qui accueille cinéastes, producteurs et un public fidèle. Résistance pour continuer, malgré un budget réduit, à répondre à l’attente des réalisateurs qui ont du mal à montrer leurs films. Résistance pour montrer la force du cinéma face aux flux des images terribles qui nous arrivent. Résistance par l’enthousiasme, l’engagement des réseaux associatifs et la volonté de dialoguer dans un contexte international difficile. Résistance des artistes au Maroc face au concept de « l’art propre » qui oblige les cinéastes à modifier leurs scénarios, à voir leurs films tronqués de certaines scènes dans des salles de moins en moins nombreuses, comme l’a précisé le documentariste Jawad Rhalib, invité à présenter Insoumise, son 2e long métrage de fiction. Une évidence pour AFLAM de proposer ce film qui s’ouvre et se ferme avec des chants contestataires, entre rock et hip hop. Chants que fredonnent au départ une bande de jeunes Marocains qui voudraient changer le monde et se heurtent à la répression policière. Chants qu’écoute tout au long du film Laila, belle, combative, décidée à ne rien lâcher. Sans travail, elle décide de partir en Belgique et de travailler dans une exploitation agricole de la région de Liège. Les conditions de travail des saisonnier-e-s y sont d’autant plus dures que le patron, André, subissant de plein fouet les conséquences de l’embargo russe sur les

produits agroalimentaires européens, exige toujours plus, ne paie pas les heures supplémentaires et menace de représailles celles et ceux qui n’obéiraient pas. Le gouvernement a beau inviter chaque Belge à manger une pomme par jour, la crise pour les paysans est durable. Le conflit social impulsé par Laila aussi ! Même le contremaitre, Thibaut (Benjamin Ramon), rejoindra les travailleuses en grève, ayant succombé au charme de la belle Laila, interprétée par Sofiia Manousha qui porte, du début jusqu’à la fin, ce film plein de bonnes intentions mais au scenario un peu attendu et qui nous apprend tout sur… la pomme belge !

À corps et à voix C’est un joli nom Palmyre. Un nom grec qui s’associe dans l’imaginaire occidental aux vestiges des grandes civilisations qui y fleurirent, au rêve oriental de caravansérail. Inscrite au patrimoine mondial de l’humanité mis en péril par Daesh, «libérée» par les forces de Bachar El Assad, Palmyre, c’est Tadmor en arabe, et on sait moins que ce nom-là désigne aussi l’une des prisons les plus inhumaines du Moyen Orient, où pendant la guerre du Liban, entre 75 et 90, bien avant la terreur djihadiste, des milliers de personnes opposées au régime des Assad ont été incarcérées. Le documentaire de Monika Borgmann et Lokman Slim, Tadmor, affiche d’entrée son dispositif : 22 anciens prisonniers rescapés de l’enfer vont revivre et faire revivre leur expérience carcérale, alternant témoignages frontaux et mise en scène de leur histoire. Ils interpréteront victimes et bourreaux. Une

école abandonnée de Beyrouth leur sert de décor. Des lanières de mousse figureront les schlagues. Tantôt en chemise ou teeshirt blancs, assis face à nous, dans une pièce nue, ils racontent le transfert vers Tadmor, l’« accueil au pneu » où, coincés dans le cercle de caoutchouc, les prisonniers reçoivent des coups de courroies qu’ils doivent eux-mêmes compter à haute voix. Ils disent les rituels imposés, les inspections des dortoirs, les douches fatales, les tâches des « forçats » obligés de faire les travaux les plus dangereux, les caprices des gardiens, les insultes systématiques, l’isolement, la nourriture rare ou corrompue, l’arbitraire, la peur, la folie. Tantôt ils se lèvent, miment leur récit, convoquent le passé par la gestuelle. Tantôt, comme des acteurs, ils jouent à être ce qu’ils ont été, tête baissée, dos voûté, brisés, frémissant aux cris de leurs camarades torturés. Ou retrouvent un moment de partage autour d’un unique œuf dur à découper en 8 et qu’on tire au sort. On ne saura rien de leur parcours personnel. Ils forment un seul corps héroïque qui a résisté à la violence, à l’anéantissement. Les réalisateurs ont déclaré que « le plus grand défi dans la fabrication d’un film comme Tadmor était de [leur] assurer qu’il déclenchait en [eux] la nécessité physique de crier-même à travers la voix des autres ». Ce cri, nous le percevons, plus fort que jamais dans la littéralité et le dépouillement de ce travail de reconstitution, de reconstruction, de restitution. ÉLISE PADOVANI ET ANNIE GAVA

Les Rencontres Internationales de Cinéma Arabe se sont tenues du 30 novembre au 4 décembre à Marseille

Tadmor, de Monika Borgmann et Lokman Slim © Les Films de l’Étranger


70 critiques cinéma

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La lumière des rêves

I

nvité par Image de Ville pour une carte blanche, le réalisateur français d’origine cambodgienne Davy Chou a présenté, le 18 novembre au cinéma Les Variétés, deux films sur le thème choisi cette année par le Festival : jeunesse dans la ville et jeunesse des villes. Des films jumeaux qui se déroulent tous deux à Phnom Penh, capitale d’un pays cherchant à rattraper frénétiquement le retard généré par la dictature des khmers rouges, et proposant aux nouvelles générations une idée mondialisée de la réussite et du bonheur. Projeté en première nationale, Dream Land de Steve Chen, coproduit par Davy Chou, met en scène des trentenaires. La belle Lida est agent immobilier. Elle vend à des paysans enrichis, à des bourgeois, à des étrangers, les appartements et les maisons de « rêve » qui se construisent partout. Elle fourgue des « programmes » de vie et de ville sensés assurer le futur radieux qui s’affiche sur les écrans publicitaires géants. Son compagnon, Sokun, photographe de mode, numérise en quelques clics la beauté de mannequins. Leur couple se délite. Et la réalité fuit comme l’« amour-toujours-jamais » des rengaines populaires reprises en karaoké par les protagonistes. « Tu photographies les gens beaux dans de beaux lieux, et je ne vois rien »

Diamond Island, de Davy Chou © Les films du Losange

lui dit-elle. La ville elle-même semble filtrée. Elle apparaît en second plan, à travers des vitres, blanchie par des voilages, derrière de grandes baies, du haut des balcons ou en maquette derrière un plexi. Perte des repères, le passé s’insinue dans le présent. Une échappée vers Kep, une escale dans une villa du roi Sihanouk en ruines. Un peu de mémoire délabrée, de rythme bohème, de ressac marin et de lumière possible, peut-être. Diamond Island, réalisé par Davy Chou,

Prix SACD 2016 et Grand prix du Festival de Cabourg, suit le destin de Cambodgiens encore plus jeunes. Des ados venus de leurs villages reculés aux chemins de terre rouge, pour couler le béton des immeubles de luxe qui s’érigent dans l’île « diamant » reliée à Phnom Penh par un pont. Logés dans des bidonvilles, mal payés, ils participent au rêve de modernité de la nation, émerveillés par tout ce qui brille, néons de la fête foraine, frisbees phosphorescents, écrans des iPhones, neige

La mémoire dans la peau

P

eau froide et rêche de la montagne, feuillages de hautes futaies secoués par le vent : les premiers gros plans de La propera pell, le thriller psychologique d’Isaki Lacuesta et Isa Campo, projeté au cinéma le Prado La Propera Pell de Isaki Lacuesta et Isa Campo c La Termita Films dans le cadre de CinéHorizontes, ancrent le récit dans une dans un village pyrénéen enneigé. Huit ans nature âpre, sans volonté esthétisante. Et la auparavant un enfant, Gabriel, a disparu dans la scène inaugurale où un jeune homme escalade montagne après la chute mortelle de son père la façade d’un établissement jusqu’au toit, qu’il accompagnait ce jour-là. Un éducateur, ignorant cris et appels de ses camarades restés responsable d’un centre d’accueil frontalier dans la cour, installe le spectateur dans une pour jeunes errants délinquants sans famille, angoisse, un vertige qui ne le quittera guère affirme que Léo, l’un de ses protégés, est Gabriel. jusqu’à la fin. L’action se déroule, côté catalan, Léo a 17 ans, souffre d’« amnésie dissociative »

et son passé est lacunaire. La mère, incarnée avec une grande finesse par Emma Suárez, le reconnaît comme son fils. L’oncle taiseux interprété par un Sergi López cultivant avec talent son ambivalence, est certain qu’il s’agit d’un imposteur. Où est la vérité ? Léo-Gabriel (Alex Monner) semble la chercher aussi. Ou la saurait-il déjà ? Comment son père est-il mort ? Qui était vraiment cet homme ? Son oncle n’a-t-il pas de bonnes raisons de croire qu’il n’est pas Gabriel ? Que lui cache sa mère ? Que veut-elle oublier, expier ? Les vidéos de vacances retrouvées fabriquent le récit trompeur du bonheur familial. Tous les personnages mentent par omission. Le passé qu’on a remué se trouble et le puzzle qui s’assemble peu à peu ne dessine jamais l’intégralité de l’image. Cadrages serrés, regards croisés, la mise en scène au cordeau joue sur les variations de points de vue et entretient sans faiblir le malaise. On chasse, on tue, on


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À courts ouverts ! de lucioles blanches et or des appartements au mauvais goût exubérant. Ils semblent ne rien savoir de l’Égypte où les Dieux ont des têtes de chien et d’oiseau, ni de la richesse culturelle de leur propre pays. Ils travaillent, échafaudent des plans pour aller ailleurs, gagner plus, connaissent des émois amoureux, fêtent la Saint Valentin, flirtent comme des gosses, se querellent. Les filles portent des shorts très courts et des hauts moulants. Les garçons de la ville sillonnent l’île en moto comme le mystérieux Solei, le frère perdu de Bora, un des héros de ce film. Le réalisateur capte à merveille la grâce naturelle des acteurs, tous amateurs. La légèreté d’une balançoire partagée à deux et de jolis pieds féminins nus qui épousent à chaque balancé les tongs fleuris posés au sol ne suffisent pas à rester dans l’insouciance. Malgré ses extérieurs jours, le film est un nocturne bleu, un clair-obscur au néon. Le temps passe et les rêves sont revus à la baisse. Ni Bora, ni son frère n’iront en Amérique. Mais il y a tant à faire sur place, conclut Solei. ELISE PADOVANI

Image de ville s’est déroulé du 10 au 20 novembre à Aix-en-Provence, Port-de-Bouc, Martigues et Marseille

dépèce dans ce coin de Catalogne. Diversion de la violence humaine sur les animaux, le sang et la peau en thèmes constants du film. Dans une séquence où ils dansent ensemble, mère et présumé fils, dans une sorte de jeu, enchaînent, comme s’ils les inventaient de toutes pièces, leurs souvenirs respectifs d’un séjour estival à Cadaquès, qui n’a peut-être jamais eu lieu. À cet instant, l’identité et le passé semblent pouvoir se choisir, pour celle qui reconnaît comme pour celui qui est reconnu. La propera pell (la prochaine peau) paraît possible. Mais la mémoire est inscrite sur le corps des personnages, tatouages et brûlures, et le film ne dira pas si une mue peut effacer ces traces-là. E.P.

CinéHorizontes a eu lieu à Marseille du 12 au 24 novembre

Léthé, de Dea Kulumbegashvili © Gia Gogatishvili

C

’est à vélo et en chanson que s’est ouvert le 28 novembre le festival Tous courts dans la grande salle du Cézanne, à Aix, comble pour cette occasion. Migration et voyages étant au cœur de cette 34e édition ; les cyclistes-maîtres de cérémonie : Rachid Oujdi et Paule Sardou sont arrivés en pédalant gaîment dans les travées, sur Zinzin Moretto, un rap malicieux sauce western spaghetti de La caravane passe : « Tu as quitté ton chez toi fuyant la guerre ou la famine / tu cherchais une terre d’accueil / mais partout on t’appelle l’étranger” »... Après la présentation humoristique des programmes, des temps forts, des jurys et l’hommage à Marc Ripoll, ex-président du festival, membre actif jusqu’à son décès en 2015, 7 courts hors compétition furent offerts au public. Délicieux apéritif aux 50, regroupés en 10 programmes, qui furent projetés par la suite. Internationaux, bi ou tri nationaux, les films passent les frontières plus facilement que les hommes, et ces sept-là nous ont promenés sans visa de la Norvège à la Géorgie, de l’Espagne à la Tchéquie en passant par la France. Si on avait pu attribuer des prix dans cette sélection, celui du scénario serait sans doute revenu à Sabine de Sylvain Robineau, drôle, inattendu, décalé : un vendeur de vidéos largué par sa copine tourne des « films » « hype » « très très très pointus » où les hommes dans la même situation que lui, cherchent par monts et par vaux ces femmes aimées et perdues, criant comme le Christophe d’Aline leur prénom, à gorge déployée. Martine, Nicole, Judith, Nadège, Marie, Louise... : la collection couvre tout un rayon. Et ces films-catharsis, comme bouteilles à la mer, arrivent parfois

à leurs destinataires. Le prix de la mise en scène aurait pu être accordé à Happy end, court d’animation de Jan Saska, qui joue sur la rencontre improbable entre des chasseurs, un conducteur de tracteur, un cadavre (forcément exquis) et reconstruit avec brio toute histoire à l’envers ! Le Prix Spécial serait forcément allé à l’étrange et onirique Léthé de Dea Kulumbegashvili : un village de conte slave avec forêt, fou, chevaux, enfants en grappe dans les arbres, fêtes champêtres, amours naissantes et une violence passée, sourde, affleurant dans le noir et blanc d’une image comme dessinée au fusain. Ou bien décerné à Takk for Turen d’Henrik Martin Dahlsbakken. Dans les couleurs blanchies par l’hiver norvégien, les gestes tendres d’un homme qui soutient son compagnon mourant. Le réalisateur met en scène ce vieux couple d’ex-champions de ski, reconvertis puis retraités, et laisse deviner, par touches discrètes, leurs drames et leurs bonheurs passés. Poussant vers l’orient, la soirée s’est terminée par un cocktail sino-japonais. Et le voyage ne faisait que commencer ! E.P.

Le Festival Tous Courts s’est tenu du 28 novembre au 3 décembre à Aix et dans le Pays d’Aix


72 critiques cinéma

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Un peu d’espoir

I

ls s’appellent Antonio, Nadia, Ismaël, Nori… Chacun menait sa vie, à Barcelone ou ailleurs. Ils ne se connaissaient pas, n’avaient aucune raison de se rencontrer. Pourtant, un jour, ils sont venus à La Granja del Pas, une maison à Sabadell, banlieue ouvrière de Barcelone, local de la PAH (Plateforma de los afectados por las hypotecas). Tous victimes des prêts immobiliers toxiques. Ils sont arrivés, honteux, se sentant coupables d’avoir mal géré quelque chose. Ils ont perdu brutalement leur travail, leur maison, n’ayant pu rembourser leur crédit. Ils n’auraient jamais pensé se trouver dans cette situation et ils sont désespérés. Ils ne sont pas les seuls. Le taux de chômage en Espagne frôle les 27%. À La Granja del Pas, ils ont pu exposer leur « cas ».On les écoute, on les réconforte, on les aide, on les héberge quand ils sont dans l’urgence, on leur redonne un peu d’espoir. Et c’est ce qu’ils feront, à leur tour, chaque mercredi dans ces assemblées que la réalisatrice, Silvia Munt, a filmées d’octobre 2013 à juin 2014, donnant à voir leurs souffrances, leurs

La Granja del Pas © Dissidenz Films

batailles. Elle fait entendre la voix de ces gens frappés durement par la crise économique, de la classe moyenne ou immigrés, sans toit, fragiles, mais qui vont retrouver, peu à peu, grâce à la solidarité, leur dignité. « Je ne serai plus jamais le même, confie Antonio. À la PAH, j’ai rencontré des gens de tous les horizons,

et ils m’ont tous appris beaucoup de choses. À être solidaire, moins égoïste et à aimer les gens davantage. » Un film sobre, sans effet cinématographique : Silvia Munt filme les assemblées où chacun s’exprime, l’occupation d’une banque, les appartements vides, les façades des

Sciences et carnage

La terre abandonnée de Gilles Laurent

L

a soirée de clôture des 10 Rencontres Internationales Sciences & Cinémas invitait à « fêter l’Apocalypse » en compagnie du réalisateur Nikolaus Geyrhalter, dont le film Homo Sapiens révélait lieux et bâtiments désertés par l’homme, où la nature a repris ses droits. L’Apocalypse : c’est aussi ce dont il était e

question lors d’une projection organisée à la BMVR Alcazar, le 22 novembre. La soirée portait pour titre Après le nucléaire, et présentait un court-métrage de Benoît Labourdette1, La science est-elle immorale ? Fort surtout d’une voix off : un texte du sociologue Albert Bayet, publié en 19312, répondant sans hésiter oui, elle l’est. La 1re Guerre Mondiale s’était

achevée sur un « progrès » considérable de la science, qui « apparaissait au monde comme la servante magnifique du meurtre ». Et voilà qu’elle se remettait au travail, « pour que la guerre future fût encore plus meurtrière ». Lors des échanges après la projection, l’un des spectateurs, chercheur de métier, s’insurgeait : pourquoi dresser ainsi un « catalogue de toutes les vilenies et scélératesses de la science, et présenter ses bienfaits comme des alibis ? » À quoi Serge Dentin, le directeur artistique des Rencontres répondait qu’il s’agissait « d’un film-tract, fait pour provoquer la réflexion ». Mission accomplie, donc, surtout en regard de l’œuvre suivante, un long métrage documentaire de Gilles Laurent intitulé La terre abandonnée. Évoquant les rares personnes, souvent âgées, qui ont choisi de demeurer chez elles malgré les radiations, après la catastrophe nucléaire de Fukushima. Notamment Naoto Matsumura, resté pour s’occuper des animaux désertés par leurs maîtres, et qui se retrouve à nourrir des dizaines de chats et de chiens. Le film s’ouvre et se ferme sur des images glaçantes dans leur neutralité :


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Il était une fois immeubles, la nuit, mais aussi les visages, en plans serrés, de ces gens qui se livrent et deviennent au fil du documentaire des Personnages. La Granja del Pas (Afectados), un film âpre et fort, un film nécessaire, un film qui sort dans quelques salles en France grâce à Dissidenz Films. Un film qui sans doute aussi fera prendre conscience que ça n’arrive pas qu’aux autres. ANNIE GAVA

La Granja del Pas a été présenté à la Villa Méditerranée le 23 novembre dans le cadre du PRIMED en partenariat avec Cine Horizontes. Il a obtenu le Grand Prix du Documentaire Eenjeux Méditerranéens, parrainé par France Télévisions, qui s’ajoute au prix du meilleur documentaire de Cine Horizontes.

Le PRIMED, Festival de la Méditerranée en images s’est déroulé du 20 au 26 novembre à Marseille, à la Villa Méditerranée, à la BMVR Alcazar et au MuCEM

P

our sa douzième édition, le Festival International des Musiques d’Écran (FIMÉ) a choisi pour cette année une thématique où l’ambition affichée était de faire apprécier aux spectateurs l’univers des contes et des légendes. En ouverture, le 11 novembre, le Théâtre Denis à Hyères recevait le chefd’œuvre du 7e art signé Fritz Lang Les Niebelungen : la Mort de Siegfried (1924). Avec son art consommé de la rhétorique verbale et musicale, Jean-François Zygel le mit en musique avec une décontraction relative l’habillant d’une riche palette de styles qu’il maîtrise à la perfection : au hasard des images on pouvait entendre des réminiscences de Bach, de Schubert, de Chopin aussi, sans oublier Wagner et pour finir Messiaen. Une improvisation savamment dosée et très en phase avec les images. Le 15 novembre, c’est le Théâtre Liberté, à Toulon, qui accueillait les musiciens de l’Ensemble EMIR, à la tête duquel officie le contrebassiste Barre Phillips, pionnier de la musique expérimentale dans les 60’s, aux confins du jazz. Ils offraient au fameux Faust, Une Légende Allemande (1926) de Murnau un aspect éthéré qui tranchait avec le

Soirée du 19 nov à la Villa Noailles, Fimé#12 © Alexandre Minard

un travelling lent sur des rues à l’abandon. Tout est fermé, tout est vide, des liserons radioactifs poussent sur les pompes à essence. Aucune horreur, pas d’images médicales, juste le témoignage de japonais stoïques, ou de scientifiques allemands rivés à leur compteur Geiger, qui concluent que c’est bien là le problème avec la radioactivité : on ne la sent pas. Tout paraît normal, sauf que c’est invivable. La terre contaminée est stockée dans de gros sacs plastiques, manipulés avec de simples masques, et des gants. Mais évidemment, cela sert uniquement à montrer que quelque chose est fait. Tepco et le gouvernement savent très bien qu’il est impossible de décontaminer les lieux. Joyeuse Apocalypse à tous. GAËLLE CLOAREC

En accès libre sur son site : benoitlabourdette.com/films/ kaleidoscopes/la-science-est-elle-immorale 2 La morale de la science 1

Les RISC 2016 ont eu lieu du 19 au 26 novembre à Marseille

style très expressionniste et saccadé des images. Installée dans une temporalité suspendue par l’absence d’un temps strié, la musique dérobait la cohésion rythmique des différentes séquences, mais offrait en contrepartie une très belle unité onirique à cette légende cauchemardesque où, contre toute attente, le bien triomphe du mal. Pour sa soirée de clôture, le 19 novembre, la Villa Noailles à Hyères accueillait les amateurs de surprises, et tenait ses promesses en commençant par l’étonnant Chant d’Amour (1950) de Jean Genet : les obsessions de l’auteur pour la luxure et l’homosexualité trouvaient un écho idéal dans la musique fuligineuse du duo 2:13PM à mi-chemin entre La Monte Young et Terry Riley. Enfin, à la limite de la saturation, le performer Damien Schultz posait à leur côté sa voix sur les images du court métrage glauque Matkormano (2015), éclairant un peu plus l’énigmatique mage de Marsal dans une ambiance réellement ésotérique. EMILIEN MOREAU

La 12e édition du Festival International des Musiques d’Écran s’est tenue à Toulon et dans le Var du 11 au 19 novembre


74 critiques arts visuels

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Olivier Bernex met ses pas dans ceux du promeneur Rousseau, Henri Cueco se fraye un chemin singulier dans l’œuvre cézanienne. Heureux hasard du calendrier et association fortuite, le musée Granet présente ces deux artistes aux « rêveries » en résonance.

Éloge de la peinture O livier Bernex et Henri Cueco ont en partage d’introduire à l’intérieur de leur œuvre les sensations par tous les pores de la toile, de travailler par thématiques sérielles, de trouver l’équilibre entre évocation et citation. Olivier Bernex entrecroise avec audace la littérature et la peinture en créant des promenades autobiographiques où se fondent l’esprit et le corps, les réflexions de Rousseau et son expérience d’artiste promeneur. Dans cette série d’une fureur expressive jamais relâchée, on retrouve des thèmes fondateurs de son travail (« On peut parler de l’œuvre entière d’Olivier Bernex à travers cette exposition » souligne Bruno Ely, conserveur en chef du musée Granet), des motifs récurrents (la barque, le coquelicot), une permanence visuelle, formelle et sensuelle qui atteint là son paroxysme. Comme si une force vive, quasi tellurique, avait foudroyé l’artiste durant ses marches solitaires et ses lectures attentives, éclatante dans ses croquis et ses études préparatoires conçus comme un story-board. Un process qui lui permet de rester libre dans la construction de ses toiles

que l’on croyait spontanées par le jaillissement gestuel et l’exubérance chromatique. Formes tourmentées, couleurs dynamiques, traces et coulures enchevêtrées : l’accrochage privilégie l’ordre des promenades de Rousseau et s’offre un détour du côté des rêveries intimes de Bernex, tout en tenant compte des accords – et des désaccords – des tonalités. C’est une invitation à lire à voix haute le tableau, un fragment de la prose de Rousseau et un texte d’Olivier Bernex placés en regard. Son enfance, ses expériences familiales, ses tourments et ses révoltes qui déjà irriguent l’ensemble de son œuvre, sont particulièrement prégnants ici. Détaché de tout, en communion avec le massif du Garlaban dont il connaît la moindre anfractuosité, Olivier Bernex est ce promeneur solitaire qui s’interroge : « que suis-je moi-même ? ».

Face à Cézanne Comme Olivier Bernex, Henri Cueco se saisit de l’art du passé pour créer son propre vocabulaire. Olivier Bernex, Les Fleurons, 7e promenade, 2011 Acrylique, collage sur toile, 200 x 200 cm © Olivier Bernex, Photo Jean-Luc Maby

Ses dessins relisent et réinterprètent la leçon de Cézanne dans un éloge magnifique du « ratage » à travers des inachevés et des manques, promesses d’un cheminement à inventer… Compagnon assidu de Nicolas Poussin et Philippe de Champaigne, sa fréquentation de Cézanne a connu un virage décisif à l’occasion de l’exposition Cézanne en Provence au musée Granet en 2006. Il « s’est passé commande à lui-même » et le résultat aujourd’hui prend la forme d’une série de 57 dessins, 37 exposés, dont trois achetés par le musée Granet, et trois carnets de croquis également acquis. Un trésor auquel Bruno Ély rêve dans sa complétude ! Henri Cueco que l’on présentait comme un artiste « entre Vénération et Blasphème »1 creuse dans cet hommage au maître aixois un sillon autrement plus complexe. Il est face à Cézanne et découvre dans cette proximité volontaire une connivence profonde : ils s’inscrivent dans le même acte de peindre et de partager. Ses paysages, ses baigneurs, ses portraits et autoportraits révèlent les mouvements internes des œuvres de Cézanne, leur squelette, les lignes de ruptures et les failles ; son esprit et son crayon pénètrent le mystère cézannien fait d’échecs constructifs, actifs. Selon Evelyne Artaud, critique d’art et commissaire de l’exposition, « l’hypothèse de Cueco est que Cézanne allait lui-même dans le non savoir, là où il ne savait pas faire, et ses maladresses aident à ouvrir d’autres portes. Henri Cueco est à la recherche de quelque chose que lui aussi ne comprend pas… vers l’inconscient ». MARIE GODFRIN-GUIDICELLI 1

Catalogue édité chez Somogy en 2005.

Rêver Rousseau Olivier Bernex jusqu’au 19 février Revoir Cézanne Henri Cueco jusqu’au 19 février Musée Granet, Aix-en-Provence 04 42 52 88 32 museegranet-aixenprovence.fr On peut voir aussi Rêves croisés, d’Olivier Bernex présenté à la Galerie Art Est Ouest, Marseille du 14 décembre au 21 janvier 06 17 24 81 86 art.est.ouest@bbox.fr


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À écouter sur WRZ en ce moment : Pierre-Alain Mannoni et Pâquerette et les migrants de la vallée de la Roya, «L’amour est plus froid que le lac» et «Cette histoire n’est plus la nôtre mais à qui la voudra» : Liliane Giraudon et Jean-Jacques Viton nous parlent de leurs derniers livres, une rencontre avec

Jean-Christophe Bailly à l’Odeur du Temps, une autre avec Roger Bernat pour son projet soutenu par le MuCEM et les Rencontres à l’Echelle, Emmanuelle Bercot, Hervé Castanet, Sergi Lopez, Silvia Munt, Aïcha Macky...


76 critiques arts visuels

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Après Rome et Milan, The Sea is my Land – Artists from the Mediterranean débarque à Marseille et Toulon dans une version revisitée, augmentée d’œuvres des collections du FRAC et de l’Hôtel des Arts. L’exposition, rebaptisée D’une Méditerranée, l’autre, est une odyssée contemporaine polyphonique.

La Méditerranée entre espoir et désenchantement

L

’Europe barricade ses frontières et pour la première fois l’Hôtel des Arts obstrue son hall d’entrée d’une haute cimaise. Geste symbolique volontaire ou involontaire ? En tous les cas, il faut la contourner pour découvrir, au verso, la mappemonde de Mario Schifano aux contours déformés mais flamboyante de vie et d’énergie. À Toulon, la question du voyage physique et intérieur est prégnante, parfaitement illustrée par le photographe albanais Adrian Paci pour qui le monde est devenu un village, une place, espaces bénis pour le rapprochement physique et Viaggio Nei Progett © Mario Schifano la fraternité. Comme se tenir la main dans une ronde infinie… Dans la vidéo ondes sonores de Laurent Durupt et poésie Odyssée, le temps de la traversée est celui berbère provoquent un léger vertige hypnotique. de l’exil et Malik Nejmi, par une subtile Belkacem Boudjellouli creuse l’âme humaine superposition de couches historiques et dans des dessins pleins de fantômes et projette affectives, rappelle qu’il est aussi celui de la sur la toile l’incertitude du monde, tandis que contemplation. Rythme chaloupé des images, David Guez confronte le temps long de la

nature (caisson lumineux d’une forêt plantée avant la création de l’État d’Israël) et le temps court des hommes (les derniers jours d’un vieil homme) dans deux œuvres en dialogue. Image suspendue d’un paysage immortel, image vidéo d’une mort annoncée. D’autres encore disent l’acculturation, la censure, l’uniformisation des villes, les destructions, les interdits ou les conflits. Joseph Dadoune a vécu cinquante jours de bombardements entre Israël et Gaza à l’été 2014 : son « cahier personnel », quotidien témoigne du chaos et de l’enfer, mais aussi de « l’énergie incroyable des hommes ».

Des territoires embrasés Religion, frontière, effacement, mémoire… les images circulent sur les réseaux sociaux. Jusqu’à saturation. Quels sens leur donner ? Au FRAC, les artistes questionnent leur statut

L’esprit des merveilles

«

Soyons curieux, regardons le doigt et la lune en même temps ! Regardons l’image et son envers et son commencement » lance Michel Massi, professeur à l’École supérieure d’art et de design de TPM. Issu de la photographie sociale et du reportage, il se plaît désormais à provoquer l’équivoque. Comme à la Maison de la Photographie à Toulon où il « décompose cette machine photographie » en créant l’illusion par un dispositif in situ, des installations poétiques et des séries anciennes épinglées à même le mur « comme une peau tendue ». Telle une fontaine étrange, Mandorle, version 1, 2016 investit l’espace central et déverse en flux continu, joyeux, un torrent

de roches volcaniques. Celles-là même qui mangent la surface de ses clichés du Vésuve, aux crêtes surplombées de minuscules silhouettes de touristes. Piquets et barrières de sécurité, poubelles, panneaux : le tracé est guidé et l’image nous laisse à notre tour pétrifiés. Mais Michel Massi s’amuse et ne veut pas « figer un seul sens ». Dans ses installations, on ne sait plus sur quel pied danser car les saynètes animées jouent les olibrius : un homme fait des allers-retours sur une ampoule mouvante, en équilibre ; un autre tombe dans un trou noir et disparaît dans le mur. C’est Monsieur Pétitwell, personnage fragile mais vivant grâce à la capacité de la photographie à mettre en

Série Fables © Michel Massi

mouvement la fiction. Jacques Tati ne l’aurait sans doute pas renié ! Dans sa série Fables, objets, jouets, insectes et figurines de plomb,


77 à travers des témoignages ou des images volées : le photographe Ammar abd Rabbo rapporte les mouvements d’insurrection arabes et Fikret Atay filme en caméra cachée une école coranique pour dénoncer l’endoctrinement. À travers des manipulations ou des détournements : les montages d’images recomposées de Panos Kokkinias travestissent la réalité quand Sigalit Landau se réapproprie le jeu traditionnel du couteau dans un ballet de corps et de sons filmé sur une plage à la frontière israélo-palestinienne. « Là où il y a du jeu, il y a de la vie » écrit-elle. La vie a totalement disparu des photos en noir et blanc prises en Cisjordanie, commandées par Taysir Batniji, avec mirador et château d’eau en figures centrales. Leur élégance brute décuple le sentiment tragique. Même rigueur chez Mouna Karray qui donne à voir de Sfax un habitat abandonné, déshumanisé et pose la question du territoire à travers la banalité de son paysage quotidien. Autre paysage en ruines dans le long travelling de Stéphane Couturier réalisé dans la cité Climat de France à Alger. À lui seul le film concentre le propos de l’exposition qui relie passé et présent et témoigne d’une Méditerranée entre espoir et désenchantement. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Objectif Beauté

J

amais deux sans trois : après les voyages d’Hélène Hoppenot et les autoportraits d’Elina Brotherus, le Pavillon Populaire, lieu montpelliérain dédié à la photographie, accueille une troisième femme. Louise Dahl-Wolfe (1895-1989) s’est très largement consacrée à la photographie de mode. Elle en a été l’une des pionnières, pendant presque 30 ans, sur les pages et les couvertures de la revue Harper’s Baazar. Grâce à elle, le luxe et le glamour sont sortis dans la rue, au musée, dans les sites touristiques du monde entier. La lumière devint naturelle, les plastiques non retouchées. Le vêtement s’émancipe : il habite l’espace, il imprègne l’environnement, il nourrit le cadre. Que dire alors de ces femmes qui rarement regardent l’objectif, concentrées sur on ne sait quel rêve ou destin, toutes tellement élégantes, parfaites, sculpturales ? Il règne dans les travaux de Dahl-Wolfe un étrange mélange d’évidente modernité et d’insidieuse atmosphère datée. Les compositions sont très affirmées. Les pièces muséales offrent des contrepoints audacieux. Les matières, dans les tirages noirs et blancs somptueux effectués par l’artiste dans les années 70, sont profondes, vivantes. Mais alors, d’où vient

ce parfum de figé, arrimé dans une époque ? Les visages, toujours blancs ? Les tissus des robes Dior, Balenciaga et autres têtes d’affiche du luxe des années 30-60 ? Les décors intérieurs ? Il y a tout cela, qui nous fait observer les photographies de Dahl-Wolfe avec un certain recul, mêlé de curiosité. On les regarde avec un œil d’historien devant une toile, qui essaierait de mieux plonger dans une époque en décodant les canons de beauté, et les moyens utilisés par l’artiste pour s’en affranchir. Et puis, dans cette galerie de tableaux, des images trouent soudain l’harmonie. Il y a cette femme, photographiée à Paris en 1947, devant des bâtiments bombardés. Le sol est brut, des gravats, les escarpins noirs sont inappropriés, le sourire est éclatant, libre, la robe est en mouvement, le regard plissé, joueur : il y a de la provocation, de l’énergie, la marque d’une artiste qui s’exprime bien au-delà diktats de la mode et de son époque. ANNA ZISMAN

L’élégance en continu, Louise Dahl-Wolfe jusqu’au 8 janvier 2017 Pavillon Populaire, Montpellier 04 67 66 13 46 montpellier.fr

D’une Méditerranée, l’autre jusqu’au 12 février Hôtel des Arts, Toulon 04 83 95 18 40 hdatoulon.fr FRAC, Marseille 04 91 91 27 55 fracpaca.org

mis en scène au premier plan, gardent un tracé net et précis tandis que le sable en arrièreplan nimbe l’horizon d’un flou lointain. Pas de secrets, « tout est fabriqué, concède Michel Massi, c’est un monde fictionnel à part entière, des éléments composés de manière intuitive qui forment un tableau d’histoires ». Une évidente continuité formelle lie ces narrations sensibles et inventives, qui nous transportent au temps des premiers explorateurs du cinéma muet. M.G.-G.

L’idiot et la lune 4 novembre au 21 janvier Maison de la Photographie, Toulon 04 94 93 07 59 toulon.fr Louise Dahl-Wolfe, Suzi Parker au bord de la Seine, ensemble Balenciaga, Paris, France, 1953


78 au programme arts visuels

Max Armengaud Max Armengaud opère une distorsion de la représentation institutionnelle en réalisant des portraits anti-iconiques au cœur du pouvoir : Villa Médicis, Palais de l’Elysée, mairie de Marseille, Rugby Club Toulonnais… Des images forcément décalées des postures officielles ! Mardi 6 décembre à 18h30, Max Armengaud et Michel Enrici, co-auteur du livre Antichambre publié chez Analogues, animeront une conférence autour de l’exposition. M.G.-G.

04 91 54 70 54

© Max Armengaud

Antichambre jusqu’au 4 janvier La Criée, Marseille theatre-lacriee.com

Claude Cieutat

La galerie Zemma développe une ligne éditoriale autour du « phénomène du travail » - productif, créatif ou artistique - et des relations induites par les activités humaines et sociales. Sa troisième exposition ne déroge pas à la règle, qui présente l’immersion photographique de Claude Cieutat dans des sites nucléaires (usines, centrales, chantiers) gardés au secret, pour partie révélés à travers son regard empathique pour les travailleurs de l’ombre. M.G.-G. La commande et le reste. Un photographe dans le milieu industriel jusqu’à fin janvier L’atelier-Galerie Zemma, Marseille 06 74 89 02 54 galeriezemma.fr

Michel Eisenlohr

© Claude Cieutat

Michel Eisenlohr s’est mis au défi de photographier le patrimoine paysager, urbain et immatériel des Islandais dans le rapport qu’ils entretiennent avec leurs croyances millénaires. Ses pas l’ont conduit à se frayer un chemin entre la modernité d’une urbanité galopante et la prégnance de leurs traditions. Mardi 3 janvier à 17h30, visite de l’exposition en présence du photographe, suivie à 19h de la conférence « Architecture en Islande, entre tradition et modernité » à la MAV Paca (12 bd Théodore Thurner, 6e). M.G.-G. Huldufolk, le peuple caché jusqu’au 7 janvier Art-Cade, galerie des grands bains douches de la Plaine, Marseille 04 91 47 87 92 art-cade.org © Michel Eisenlohr

Apprentis Oui, l’apprentissage mène à l’art contemporain ! Comme le prouve cette exposition qui restitue trois années de projets réalisés par de futurs professionnels en lycée technique avec la complicité d’artistes, dans le cadre du dispositif Gestes et métiers en images (Sextant et plus, Fondation GIMS et Académie d’Aix-Marseille). Vernissage le 15 décembre à 18h. C.L. Les Apprentis de l’art 16 décembre au 15 janvier Friche de la Belle de Mai, Marseille 04 95 04 95 95 lafriche.org Nuage, tubes de cuivre, machine à condensation, gouttes d’eau ; artiste : Stefan Eichhorn et classe de première climatisation, Lycée Denis Diderot, Marseille. © Sextant et plus


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Marginaux ? Le Dernier Cri milite pour les arts graphiques hors normes et leur rapport avec la micro-édition. L’exposition soulève ces questions avec les œuvres notamment de Raymond Reynaud, Gérard Lattier, Evelyne Postic, le collectif KutiKuti, la collection de Pop Galerie, une installation de Manuel Ocampo pensée pour l’événement. Vernissage le 17 décembre à 19h30 pendant le festival Vendetta. C.L. Underbrut 17 décembre au 9 avril Friche La Belle de Mai, Marseille 04 95 04 95 95 lafriche.org

American Rock’n Folk Art © Courtesy Le Dernier Cri

Michéa Jacobi A l’occasion de son dernier ouvrage paru aux éditions La Bibliothèque, Michéa Jacobi explore les tréfonds des renoncements humains. Anachorètes, ermites, sâdhus... Ceux et celles qui, à leur façon, ont lâché prise, de Plutarque à Brigitte Bardot... Des portraits en linogravure, un brin caustiques et humoristiques, à découvrir dans l’exposition éponyme. C.L. Renonçants jusqu’au 13 janvier Éditions Parenthèses, Marseille 04 95 08 18 20 editionsparentheses.com

Michéa Jacobi, Antoine © Parenthèses

Arts de Noël Shopping artistique et contemporain aux Galeries Lafayette. 12 lieux du réseau Marseille Expos proposent des œuvres originales, de petit format et petits prix : dessins, photographies, sérigraphies, céramiques ainsi qu’un un large choix de publications et livres d’artistes. Et les petits ne sont pas oubliés. C.L. Christmas Art Market jusqu’au 21 décembre Galerie du 5e, Galeries Lafayette, Marseille 06 95 19 80 60 galerieslafayette.com marseilleexpos.com

Kitty Crowther présentée par Fotokino © K. Crowther

Tapisseries contemporaines Une douzaine de tapisseries de Hans Arp, Victor Vasarely, Georges Braque, Mathieu Matégot, Thomas Gleb et Robert Wogensky, augmentées de plusieurs pièces des architectes Vincent Bécheau et Marie-Laure Bourgeois, composent ce panorama de la tapisserie moderne et contemporaine fabriquée dans les ateliers d’Aubusson. Le petit plus, un espace consacré au processus de fabrication et aux différentes techniques : cartons, dessins et vidéos pédagogiques. M.G.-G. Trames d’Aubusson – Tapisseries contemporaines 10 décembre au 15 avril Centre d’art des Pénitents noirs, Aubagne 04 42 18 17 26 aubagne.fr Le Vigile, 1972, 160 x 190 cm, tapisserie collection Musée de St Dié des Vosges © Marc Petit


80 au programme arts visuels

A la folie La petite folie aixoise promeut depuis des années patrimoine et art contemporain. Les œuvres de Alfons Alt, Vincent Bioulès, Denis Brihat, Lucien Clergue, Claude Garanjoud, Piotr Klemensiewicz, Sophie Menuet, François Mezzapelle, Jean-Pierre Sudre, Jean-Jacques Surian, Christian Tagliavini composeront cette sélection des dernières acquisitions. C.L. 10 ans d’acquisitions et donations 16 décembre au 5 mars Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence 04 42 91 88 75 aixenprovence.fr

Vincent Bioulès, Étagère , Atelier de Cézanne, 2005, aquarelle, crayon sur papier © le laboratoire photo de la ville d’Aix en Provence

Angladon chez Lambert Fermé pour travaux (réouverture en mars 2017) le musée Angladon s’invite chez son voisin pour partager les chefs-d’œuvre de la collection Doucet, peu connue du grand public : Van Gogh, Cézanne, Picasso, Chagall, Modigliani, Man Ray... Ceux-ci côtoieront par ailleurs notre contemporain, Robert Combas (jusqu’au 5 juin) pour une expo monographique. Les deux expositions ouvrent le 11 décembre. C.L. Chefs d’œuvre du musée Angladon - Collection Jacques Doucet 11 décembre au 26 février Collection Lambert, Avignon 04 90 16 56 20 collectionlambert.fr angladon.com Amedeo Modigliani, La blouse rose , 1919, Huile sur toile, 98 x 64 cm. Avignon, Musée Angladon - Collection Jacques Doucet. Cliché Romain Victoria

Yeux ouverts Nicolas Quinette construit une autobiographie tirée de ses notes et photos de carnets de voyage. Isabelle Ha Eav met à mal la pellicule en hommage à Allen Ginsberg. Patrice Loubon met face-à-face le tirage photographique et sa version tissée par des femmes chiliennes selon la tradition des arpilleras. Trois photographes singuliers rapprochés pour leur empathie envers la nature humaine, l’autre comme soi-même.C.L. Don’t blink jusqu’au 7 janvier Le Magasin de jouets, Arles lemagasindejouets.fr Howl © Isabelle Ha Eav - courtesy Le Magaisn de jouets

Vincent Antech De ses nombreux voyages comme en studio, Vincent Photographie, alias Vincent Antech, explore diverses thématiques dont les paysages occupent une place majeure. La lumière se joue cinématographique, la couleur augmentée en post-production, quand s’instaure un jeu entre toucher et matière, l’image et son support aluminium, en grands formats. C.L. Paysages Aluminés jusqu’au 24 février Maison de Région, Béziers 04 67 36 50 10 laregion.fr © Vincent Photographie


critiques livres 81

Carl Norac, Laurent Corvaisier, Raphaële Frier, Judith Gueyfier, Alain Serres © MC

Des livres pour grandir libre Incontournable rendez-vous de novembre, le Festival du livre et de la parole d’enfant d’Aubagne, Grains de Sel, fédère la ville entière

I

rrigant les rues il hante théâtre (Le Comœdia) et cinéma (Le Pagnol), s’immisce dans l’Espace Bras d’Or, ou dans celui, bien nommé, des Libertés, construit de nouveaux territoires sur le Parvis Guy Môquet, structures légères abritant une foule d’activités, ou sur l’Espace Lucien Grimaud, l’imposante librairie dotée d’un espace de rencontres qu’est le Salon Shéhérazade ! Synergie dynamique L’événement conjugue les lieux : établissements scolaires, professeurs, librairies, médiathèque, théâtre, associations, services municipaux, dont celui de Ville Lecture, grâce au dévouement sans faille de Véronique Paris, qui coordonne l’ensemble. En amont du festival, deux journées consacrées aux scolaires accueillent plus de 5000 élèves du Pays d’Aubagne et sa région… Intégrés au dispositif, les collégiens de la classe de 4ème 5 de J. Lakanal d’Aubagne présentent avec intelligence leur recueil, Des poèmes rêveurs ; les enfants de l’école du Pin Vert d’Aubagne lisent avec expressivité Malala, pour le droit des filles à l’éducation de Raphaële Frier (chez Rue du Monde). Il est beau d’entendre ces jeunes voix s’indigner, reprenant les mots de la jeune prix Nobel de la Paix 2014 Malala Yousafzai : « Comment osez-vous me priver de mon droit fondamental à l’éducation ? » Des spectacles L’écriture se théâtralise. Que choisir entre duel de dessins, rencontre d’auteurs, ou représentation : contes, (Anne-Marie Testa, Praline Gay-Para), aventures poétiques

lors d’Un mystérieux voyage en forêt (Cie La Fabrique des petites utopies), lecture délicate d’Anatole et Alma par l’auteur Sabine Tamisier, approche de grands classiques par les bruits et les odeurs, Caché dans son buisson, Cyrano sentait bon la lessive (Cie Hecho en casa), apprentissage de la tolérance avec Petit-Bleu et Petit-Jaune qui deviennent verts en s’embrassant (Théâtre de la Vallée) ou encore de savoir s’accepter pour que le regard des autres change, avec Carmen Baleine d’après l’album Marlène Baleine de Davide Cali et Sonja Bougaeva par Les Mille Tours Compagnie, (Anouck Couvrat). Des ateliers Fleurissent aussi de nombreux ateliers. On s’initie aux parfums et à leur fabrication avec Laurence Michel-Libert, on découvre L’histoire vraie des grandes photos, grâce aux ouvrages de David Groison et Pierangélique Schouler qui nous apprennent pourquoi la photographie du premier homme sur la lune est celle du deuxième, Buzz Aldrin, jaloux de Neil Armstrong. Ici, les Kamishibai racontent leurs histoires en images, puis on réalise des Pocket films, là on est gourmand après avoir participé à l’Agora des philosophes, ou au Boulevard des Sciences, magiques avec les P’tits Débrouillards, on se livre à l’art de rue, on crée des oiseaux de papier, des maisons pop-up, on illustre les Droits de l’enfant dans la rue par des photos, et dans le jardin des Pouss’Droit. Des rencontres Et puis, surtout, il y a les rencontres avec

les écrivains qui expliquent leur démarche lors de points animés par Maya Michalon. Fleur Daugey, éthologue, établit de petites passerelles entre scientifiques et enfants, la Musique pas bête est décryptée avec Nicolas Lafitte, on se passionne pour la saga U4 écrite à quatre mains, (Yves Grevet, Florence Hinckel, Carole Trebor, Vincent Villeminot). Mais surtout, on fête un anniversaire, les 20 ans des éditions Rue du Monde avec leur directeur Alain Serres qui rend hommage à la littérature jeunesse qui ne « prend pas les enfants pour des cornichons », et Laurent Corvaisier improvise en direct une grande fresque sur les trois mots enfance, planète, et lecture. Humour, profondeur, partage du sens avec délicatesse, poésie, une des clés de Rue du Monde (30% du catalogue), « besoin d’une autre musique » sourit le poète Carl Norac… Il s’agit « de partager la belle aventure humaine avec les enfants », déclare Alain Serres, « la littérature est une alliée de l’enfance, pour donner des citoyens libres, actifs, créatifs ». En nos périodes troubles, « on aura plus que besoin des poètes, des artistes, des rêveurs »…. MARYVONNE COLOMBANI

Grains de sel a eu lieu du 17 au 20 novembre à Aubagne. Le 20 novembre était célébrée la Journée des Droits de l’enfant


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Le Théâtre de Grasse, à l’instar de l’Aristée de Virgile, cultive l’art des abeilles, du miel et des mots… Le marathon de lecture que permet, sur deux journées fastes, l’évènement littéraire et théâtral Ouvert la Nuit, convoque lecteurs amateurs et professionnels à célébrer les mots « miellés » des écrivains et dramaturges. (10 heures de lecture, 30 voix, 20 auteurs)

Le miel des mots

Lectures-chorale par les comédiens amateurs formés par la Cie Dynamo Théâtre © X-D.R

L

e public nombreux et passionné renoue avec le bonheur des mots dits ou lus. En financeur principal, le Groupe SUEZ, et en maîtres d’œuvre, l’équipe du Théâtre de Grasse et la troupe du Dynamo Théâtre comme en 2014. Un thème dominant cette année, la Babel méditerranéenne. Les différentes parties du théâtre sont investies, scène accessible par les loges, hall qu’emplissent tour à tour chaises pliantes et tapis moelleux, grande salle enfin. Chaque lieu correspond à un dispositif particulier que les vagues, les paysages, les respirations de la Méditerranée viennent ourler de leur musicalité. Terres tragiques, mémoires éparpillées, thrènes, humour, grandeurs et petitesses humaines nourrissent les textes et les voix justes qui les portent. Rythmant le parcours de ce marathon hors normes, les comédiens-lecteurs, formés tout au long de l’année lors d’ateliers dirigés par le Dynamo Théâtre, offrent des extraits de pièces sélectionnées par leurs comités de lecture aux discussions passionnées. Huit œuvres contemporaines qui ont trait, soit par l’origine des dramaturges (Algérie, France, Grèce, Israël, Italie, Roumanie, Yougoslavie), soit par leur teneur, aux problématiques méditerranéennes. Les voix se mêlent, se croisent, se répondent, convoquent les imaginaires de Slimane Benaïssa, Gianina Carbunariu, Hanokh Levin, Yannis

Mavritsakis, JeanYves Picq, Lina Prosa, Sonia Ristic, et leur appréhension poétique et poignante du monde contemporain. Joëlle Cattino et Michel Bellier (Dynamo Théâtre), accompagnés par les créations musicales de Dominique Lafontaine nous bouleversent par leur interprétation de Lampedusa Way (Lina Prosa) et Le point aveugle (Yannis Mavritsakis), et font espérer une mise en scène « intégrale ». Là-dessus, ajoutez quelques récits de voyage de Maupassant par La Nuit Blanche ; lectures et gâteaux variés se dégustent avec un verre de vin italien. Le bonheur se partage ! La table recouverte de la nappe blanche des jours de fête où la famille se réunit, est propice aux confidences de Clyde Chabot qui raconte sa quête de racines dans l’île de Sicile dont sa famille est originaire, et dont il ne reste que le souvenir du fromage au poivre, ayant occulté jusqu’au terme de pecorino… Ce patient travail de reconstitution (Sicilia) suscite réminiscences, rapprochements, évocation de l’accueil des migrants, depuis celui, piètre, des Espagnols en 1936… Reproduction tragique de schémas voisins, au fil des remuements du monde. L’histoire s’invite encore avec le superbe Faut pas pleurer de Lydie Salvayre, qui raconte la guerre d’Espagne en 1936, dans une époustouflante mise en miroir des vécus de Bernanos et de la mère de l’auteur, une « mauvaise pauvre ». La lecture d’Anne

Alvaro et Nicolas Pignon transporte la salle, par sa justesse, sa clarté, son intelligence. Dans la lignée des hommes-livres du film de Truffaut dans Fahrenheit 451 (Ray Bradbury) et dont les images ouvrent le spectacle, le comédien Polydoros Vogiatzis dit de larges pans du livre très autobiographique de Abdellah Taïa, Le rouge du tarbouche, dans la mise en scène en épure de Frédéric Maragnani. Poésie graphique et émotion… Le livre, infrangible lieu de la réflexion et de la liberté humaine décline ici ses richesses. Hommage à l’humain, malgré… On se laisse alors porter par les mots du poète Constantin Cavafy, et ceux de Marguerite Yourcenar (P. Vogiatzis et Nicole Garcia) qui s’entrelacent à la guitare de Varvara Gyra. « Que le chemin soit long » pour atteindre Ithaque et peu importe si l’île est pauvre, elle nous a donné l’essentiel, le voyage… auquel le théâtre s’accorde, « aventure humaine et civique » dit Jean Florès, directeur du théâtre, et les choix littéraires d’Ouvert la Nuit en sont une indéniable démonstration. MARYVONNE COLOMBANI

Ouvert la Nuit a eu lieu les 25 et 26 novembre au Théâtre de Grasse. 04 93 40 53 00 theatredegrasse.com


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De rennes et d’os

D

ans l’enclos à rennes de la Montagne rouge, en ce matin de septembre, c’est l’apocalypse. Les éleveurs procèdent à l’abattage d’automne, sous une pluie diluvienne et dans une brume à couper au couteau. Des flots dantesques, un magma d’entrailles et de traînées sanglantes, et au milieu la silhouette de Viktor, le fils de Petrus Eriksson, brandissant un os…. « Du doigt, il montra à son père. Petrus vit. Des entrailles de la terre détrempée surgissaient des pointes d’ossements mis à jour par ce déluge de nuit des temps. » Ainsi commence le troisième volume de la saga nordique d’Olivier Truc, un début tout aussi fracassant que celui des deux premiers de la série. Et une nouvelle enquête pour le tandem de la police des rennes. Car à qui ce squelette inopinément déterré (et sans crâne !) peut-il bien appartenir ? Autour de ces os inconnus (et visiblement anciens), les passions vont se déchaîner. Et il ne s’agira plus seulement de l’ancestrale rivalité entre forestiers (norvégiens et suédois bon teint) et éleveurs (sami)… Dans La Montagne rouge,

octogénaire à l’étrange sourire perpétuel et sa troupe de copines qui ne se déplacent jamais qu’au son des pointes métalliques de leurs bâtons de marche. Et puis Petrus, l’éleveur sami, acharné à défendre son peuple de « survivants », de « fils de la toundra » contre tous ceux qui depuis des siècles lui volent ses montagnes et ses terres. Par-delà l’intrigue policière, Olivier Truc poursuit sans relâche son enquête sur les pays du Nord, dévoilant au passage les dessous pas très propres d’une politique suédoise longtemps obsédée par la pureté de la race et la neutralisation des éléments jugés anormaux. Une lecture à la fois palpitante et très instructive. FRED ROBERT

on retrouve avec plaisir les deux policiers Nina et Klemet, ainsi que d’autres personnages récurrents comme l’oncle de Klemet, Nils Ante, et sa pétulante jeune compagne Mademoiselle Chang. On en découvre aussi de nouveaux, deux scientifiques aux méthodes et aux valeurs diamétralement opposées, un vieil antiquaire plus que bizarre, une

La Montagne rouge Olivier Truc Métailié Noir, 21 €

Des femmes disparaissent

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our les éditions Fragrances, « chaque auteur est un nez », chaque livre un parfum. Chaque ouvrage édité (quelques titres seulement pour l’instant) se voit ainsi doté de notes de tête, de cœur et de fond, ainsi que d’une personnalité spécifique. Débâcle, le troisième roman de Laëtitia Kermel, ne fait pas exception à la règle : mousse,

glaïeul et hellébore noir y composent « un assemblage sensible et troublant ». Bienvenue donc dans un subtil thriller arctique, où les végétaux, les fleurs et les parfums jouent un rôle capital. Aurore Larsen est française ; installée depuis quelques années à Reykjavik, elle y a ouvert une boutique de fleuriste. Le choix de ce métier dans ce coin du monde peut sembler étrange. Pour Aurore c’est une évidence. En effet, elle est hyper sensible aux odeurs et l’Islande est l’un des seuls pays où le froid permet de les tenir à distance. L’idéal en somme… sauf que l’existence agréable et réglée de la jeune femme va se trouver perturbée par une série de disparitions de femmes, la première étant celle d’Agatha, la voisine confiseuse avec qui elle commençait à se lier d’amitié. Le roman se lit bien. Une ouverture poétique et glacée, superbe arrêt sur image. Une intrigue en trois temps, rythmée par les trois définitions du mot « débâcle », comme autant de phases dans l’évolution d’Aurore. Un compte à rebours que souligne la numérotation inversée des chapitres. Bref

un récit délicatement ciselé. Mais surtout un agréable guide de voyage romancé. Car au fil des pages, on en apprend beaucoup sur l’Islande. Cette terre sauvage, de glace et de feu, semble le personnage central de la fiction. Et c’est à le découvrir que Laëtitia Kermel invite. FRED ROBERT

La romancière est venue présenter son livre lors de la session de novembre d’Obsession textuelle, l’émissionrencontre animée par Patrick Coulomb et Bruno Richard un samedi matin par mois à la librairie Maupetit (Marseille).

Débâcle Laëtitia Kermel Fragrances éditions, 16 €


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Révolution française au féminin

S

i Olympe de Gouge proposa une déclaration des droits des femmes en 1791, ces dernières ne participaient guère à la vie politique : exclues du vote, de l’éligibilité (il faudra attendre 1944 pour que le droit de vote des Françaises soit institutionnalisé et 1965 pour avoir la capacité d’ouvrir un compte en banque ou de travailler sans le consentement de leur époux). Aussi, le recueil de lettres édité par les éditions Belin sous le titre « Les affaires d’État sont mes affaires

de cœur », présentées par Annie Duprat, spécialiste de l’histoire de la fabrication de l’opinion par les textes et les caricatures, nous offre un saisissant témoignage de la vie du « deuxième sexe » de la fin du XVIIème au début du XIXème siècle. On y découvre une « écrivassière engagée », Rosalie Ducrollay, épouse Jullien, grâce à un imposant corpus de lettres envoyées à sa famille et ses amis. L’ouvrage orchestre ces missives en larges chapitres dont chacun s’ouvre par un aperçu général déterminant repères historiques et familiaux, afin de nous orienter dans la folle complexité des évènements vécus. À travers ces relations épistolaires, superbement écrites, perce la solide culture classique de cette femme passionnée. Émergent au cœur des phrases des citations, on croise Racine, « Comment en un plomb vil, l’or pur s’est-il changé ? » (Athalie acte III scène 7), La Fontaine, « Le serpent et la lime » ou encore « Les frelons et les mouches à miel » : « à l’œuvre on connaît l’artisan »… Rosalie suit les étapes de la Révolution, va autant qu’elle le peut à l’Assemblée Nationale, suit les débats, en narre la substance dans ses courriers, et

offre de surcroit un panorama précis de la vie quotidienne. On connaît l’évolution du prix de la chandelle et l’on voit La Fayette parler « avec la hardiesse de Catilina », « la Commune [faire] des chefs-d’œuvre » et « les discours de Robespierre [ajouter] mille fleurons à sa couronne civique »… Les remuements politiques n’empêchent pas l’expression de sa tendresse ni de sa sollicitude pour les siens auxquels elle distribue des conseils avisés, souvent d’une rigueur bourgeoise surprenante sous la plume de celle qui se passionna tant pour la Révolution. Elle livre, plus tard, une foule de potins à propos de Bonaparte… On se laisse porter par la vivacité, les élans, les inquiétudes, les joies de cette femme des Lumières qui embrassait son fils, Marc-Antoine Jullien fils, « sous le bouclier de Minerve ». MARYVONNE COLOMBANI

Les affaires d’État sont mes affaires de cœur / Lettres de Rosalie Jullien, une femme dans la Révolution 1775-1810 Présentées par Annie Duprat Éditions Belin, 23 €

La fée électricité

P

enchée sur le berceau du monde contemporain, la fée électricité tient-elle des bonnes fées ou de la fée Carabosse ? L’ouvrage d’Alain Beltran et Patrice Carré, additionné d’une postface d’Alain Corbin, dans une nouvelle version de La fée et la servante (Belin 1991), mise à jour et complétée, offre en quinze chapitres une histoire de l’électricité qui décrit l’aventure scientifique qui permit à notre planète d’effacer les étoiles par la profusion lumineuse produite par cet élément étrange pressenti par Thalès de Milet (environ 600 ans avant JC) intrigué par les vertus étonnantes de l’ambre jaune (elektron du Grec ancien). On voit la pensée, l’imaginaire, l’esthétique, les représentations, les modes de vie, la communication, la politique, l’économie, bouleversés par les applications toujours plus nombreuses de l’électricité. Les modes de production, de transports, la société, mutent, les rythmes s’accélèrent, l’électricité fait son entrée dans les maisons, transforme radicalement le quotidien domestique. Si elle était une attraction, une curiosité à la fin du XVIIIème et

aux débuts du XIXème, l’électricité prend une place essentielle dans l’industrie (en dépit des premiers accidents), la communication (depuis le télégraphe aux smartphones actuels)… Bien utile, révolutionnaire, elle est aussi moyen de contrôle : celui qui détient les moyens de production de ce « fluide » exceptionnel détient aussi le pouvoir… Les centrales nucléaires pointent alors le bout de leurs fissions atomiques, dangers que

depuis Tchernobyl, on ne peut plus nier… Apparaît alors le « mythe pacificateur » de la « transition énergétique »… On voit alors la fin du modèle de la « croissance perpétuelle », et l’éclosion de la nécessité d’un nouvel élan, qui doit inventer les énergies renouvelables, et par là même un nouveau modèle de société. Le travail remarquablement documenté, intelligent, passionnant, d’Alain Beltran (directeur de recherche au CNRS) et Patrice Carré (historien de formation et directeur des relations institutionnelles chez un opérateur de télécommunication), propose des bases de réflexion replaçant notre relation à la production d’électricité dans sa perspective historique, et nous fait comprendre à quel point elle a modifié nos imaginaires et notre rapport au monde. MARYVONNE COLOMBANI

La vie électrique (Histoire et imaginaire XVIIIe – XXIe siècle) Alain Beltran et Patrice Carré Éditions Belin, 23 €


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Prêt à vivre

S

e libérer de sa fausse « gueule de rebelle » pour devenir un adulte apaisé, être enfin « prêt à vivre », voilà le but, atteint, du narrateur à la fin du livre de Sorj Chalandon, Profession du père. Depuis les premières pages, le lecteur était en empathie avec Émile, 12 ans, si démuni face à la folie non reconnue

du père auquel la mère, résignée et soumise, ne s’oppose jamais. Cette trinité vit en vase clos, fenêtres souvent fermées, sans amis, sans contact avec l’extérieur. Le père se dit agent secret, mais aussi chanteur, champion de judo, ami de De Gaulle ! En plus d’être mytho, il est Algérie Française. L’action commence d’ailleurs le 23 avril 1961, le jour du Putsch des Généraux : le père se déclare trahi par le général et soumet alors son fils à la préparation intensive d’un attentat contre De Gaulle. Émile, à la fois aimant et terrorisé, entraîne un élève de sa classe dans son aventure qui tourne mal, évidemment. Cet enfer ne s’arrêtera vraiment que 50 ans plus tard, avec la mort du père, portrait craché de celui de l’auteur qui n’a jamais su non plus le métier du sien. Au bout de leurs épreuves, le personnage et l’auteur ont trouvé un épanouissement personnel et professionnel. Chalandon nous offre ici son roman le plus intime, bouleversant par sa vérité et la simplicité de son écriture.

Comme toujours il se révèle plein de foi en l’être humain, confiant en sa force de vie et d’espoir. CHRIS BOURGUE

Novembre 2016 Ce livre fait partie de la sélection du Prix littéraire des Lycéens et Apprentis de la Région PACA pour l’année scolaire 2016/2017. Il a reçu le Prix du style 2015

Profession du père Grasset, 19 €

Sorj Chalandon

Captation de mémoire

D

ans son dernier ouvrage, Ivan Jablonka analyse un fait-divers comme un objet d’histoire. Laëtitia Perrais disparaît en janvier 2011. Son meurtrier est vite identifié, mais le corps de la jeune fille n’est retrouvé que quelques semaines plus tard, démembré. Père de trois filles, bouleversé par cette affaire, l’auteur/historien restitue par écrit la vie de la victime, l’appréhende dans sa singularité afin qu’elle ne soit pas réduite à ce simple crime, n’existant de façon post mortem que par ce qui la relie à son assassin, dans le cadre d’une médiatisation à outrance. Mais cet essai ne se résume pas à une biographie : dans une vision unifiée des sciences sociales, le chercheur convoque tous les outils à sa disposition, ceux de l’histoire orale, de la sociologie, de la géographie, de l’enquête de terrain. Il s’entretient avec tous les protagonistes sauf le meurtrier. L’intention est de mettre le fait-divers en perspective, de trouver le général dans le particulier : celui-ci révèle une époque, la vulnérabilité des enfants perdus dans les méandres de « l’assistance publique », la violence faite aux femmes, la

une justice exsangue qui, peu coutumière de la pratique contestataire, se soulèvera pourtant en nombre contre ces propos iniques. Ouvrage protéiforme où l’émotion d’Ivan Jablonka est souvent palpable, Laëtitia a été salué par les prix Le Monde et Médicis. MARION CORDIER

pauvreté d’une France périurbaine oubliée. Il s’agit aussi d’étudier la polémique politico-judiciaire consécutive à l’événement, lorsque Nicolas Sarkozy, président de la République, le récupère pour instrumentaliser la peur, durcir les mesures répressives à l’égard des délinquants sexuels (alors que le coupable est certes multirécidiviste, mais pas dans cette catégorie…), accuser de dysfonctionnements

Laëtitia Ivan Jablonka Seuil, 21 €


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Épopée lumineuse et sauvage

L

e garçon, prix Femina, de Marcus Malte rompt avec le polar dans lequel il excellait et franchit le mur du son ! Nous sommes en 1908. Son héros d’une quinzaine d’années, muet et sans nom, perd sa mère avec laquelle

il partageait une vie sauvage. Désormais seul au monde, à moitié nu, il part à la rencontre des hommes et de la civilisation. Durant deux années il se déplace, observe, apprend, devient valet de ferme puis lutteur dans les foires. Renversé par une automobile il est accueilli par Emma et son père. Elle sera sa mère, sa sœur puis son amante passionnée. Elle lui donne le prénom de Mendelssohn et lui révèle la musique et la poésie. Quatre années miraculeuses trouvent leur acmé avec la découverte des plaisirs de la sexualité et l’apprentissage de jeux érotiques. « Ne parlons pas de ce qui viendra après » écrit Malte qui intervient dans son récit parfois, comme pour nous guider ou nous mettre en garde. Car la folie meurtrière des hommes se réveille le 1er août 1914. Félix part dans l’horreur des tranchées, frôle de peu la mort. Plus rien désormais ne sera comme avant. Un nouveau parcours le ramènera à l’état de sauvagerie jusqu’à sa mort en 1938.

Enluminée par une langue ciselée, parfois triviale et crue, cette saga est ancrée dans l’histoire du début du XXème siècle et se réclame de l’art et de l’amour prônés par Emma et de la musique de Mendelssohn. On en ressort abasourdi. C’est indubitablement un des meilleurs livres de la rentrée. CHRIS BOURGUE

Le garçon Marcus Malte Zulma, 23,50 €

La photographie dans l’écrit

Q

u’est-ce que parler de son vécu photographique sans montrer (quasiment) aucune image ? Le troisième ouvrage de Didier Ben Loulou publié par Arnaud Bizalion reprend les notes prises par le photographe lors de ses voyages entre 2010 et 2016. L’auteur se raconte à la volée, sans structure narrative, pensées et descriptions s’enchaînent en évacuant toute chronologie dans une itinérance en zigzag entre Jérusalem, le quartier de l’Adjami à Jaffa, Marseille, Athènes, une enfance en Bretagne. Ses réflexions sur l’acte photographique, éthiques, humanistes, spirituelles, sur la mémoire juive en particulier, s’entrecroisent pour prendre au fur et à mesure de l’épaisseur comme ce grain particulier au procédé de tirage Fresson, élu depuis longtemps par le photographe. Dans ce va-et-vient entre introspection et regard sur le monde qui annihile finalement le temps, émerge de l’écrit, progressivement, paradoxalement des représentations. Didier Ben Loulou se dévoile pendant que le récit maintient une part de son opacité, si bien qu’on retient à

Une intention diffuse « ...je cherche à ce que naisse cette image pauvre, cette lointaine résonance et qui ne vient rien dire d’autre que cet espace ouvert sur cette intime présence » semble nourrir le programme photographique de l’auteur. Comme un défi à la vie et au visible. Une gageure aussi de la part d’un éditeur d’images qui a publié plusieurs ouvrages de photographies de Didier Ben Loulou : Marseille, suite à une résidence avec Le garage photographie et Je t’écris devant la fenêtre de mon hôtel, Notes indiennes, dans la collection Notes plus récemment. CLAUDE LORIN

peine la présence de presque une vingtaine de reproductions en noir et blanc ponctuant l’ouvrage. La présence de ces vignettes au format carré et sans légende ni rapport direct au texte, incite, dans un mouvement inverse, à un retour dans le discours du photographe comme dans les strates fragmentaires de son histoire. Les choses vues relèveraient-elles autant de ce qui ne serait pas ou plus visible ?

Chroniques de Jérusalem et d’ailleurs Didier Ben Loulou Arnaud Bizalion Editeur, 24 €



19e Festival des Arts du Geste

du 1 au 12 février 2017 er

Cornillon-Confoux ˘ Fos-sur-Mer Grans ˘ Istres ˘ Miramas Port-Saint-Louis-du-Rhône

Cie Les 7 Doigts Flip Fabrique Le Groupe Acrobatique de Tanger Cie Aracaladanza

WWW.SCENESETCINES.FR 04 42 56 48 48

es

20

Cirk biZ’arT co … m cl a pag t nies, 41 spec

N° licence : 3-1064783

Groupe Noces


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