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LAWS Le magazine de la Conférence du Jeune Barreau

INTERVIEW AVEC MONSIEUR LE BÂTONNIER RENÉ DIEDERICH P. 12

“L’AVENIR

DE LA PROFESSION” ENTRETIEN ENTRE MAÎTRE ANDRÉ ELVINGER ET MAÎTRE JACQUES LOESCH P. 26

P. 42

90 ANS DU JEUNE BARREAU

No 1



SOMMAIRE LAWS NO 1

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5 ÉDITO

Bertrand Christmann, président de la C.J.B.L.

6 ANALYSE

Le maintien de la rémunération du délégué du personnel mis à pied : les fluctuations de la jurisprudence

8 JEUNE BARREAU Un ordre de mission

10 FOCUS

The Young Barrister’s Committee

12 INTERVIEW

Monsieur le Bâtonnier René Diederich : l’avenir de la profession

18 ACTION HUMANITAIRE

Pour les enfants de Madagascar...

20 ASSOCIATION

Dons : destination assurée

22 ÉCHANGES

Coopération avec le Barreau du Mali

24 EU LEGAL

Réforme globale de la protection des données en Europe

26 ENTRETIEN

Paroles d’experts : Rétrospective & Déontologie

32 FOCUS

L’inefficacité des recours en référé en matière de marchés publics

34 ASSOCIATION LAWS NO 1

Le magazine de la Conférence du Jeune Barreau RÉDACTEUR EN CHEF : Bertrand Christmann RÉDACTEURS : Céline Ollier, David Nicchols, René Diederich, Charles Kaufhold, Nicolas Decker, Charles Muller, Rachel Germain, Emmanuelle Ragot, André Elvinger, Jacques Loesch, Guy Perrot, Nicolas Thieltgen, Alain Goebel, Pierre Matringe CONCEPTION & COORDINATION: 360Crossmedia DIRECTEUR ARTISTIQUE : Frank Widling CRÉDIT COUVERTURE : ©360Crossmedia/C.Olinger TIRAGE : 5 000 copies

L’association internationale des jeunes avocats revient à Luxembourg en 2013 !

37 ANALYSE

Modélisation du droit

38 JURISCUP

Le Jeune Barreau de Luxembourg participera à l’édition 2013 de la Juriscup

42 SAVE THE DATE

Les 90 ans du Jeune Barreau


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ÉDITO LAWS NO 1

CHERS CONFRÈRES,

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NOUS SOMMES FIERS DE VOUS PRÉSENTER LA PREMIÈRE ÉDITION DU MAGAZINE DE LA CONFÉRENCE DU JEUNE BARREAU. À l’heure où la C.J.B.L. fêtera symboliquement ses 90 ans et où notre profession est l’objet d’importantes évolutions, nous avons souhaité vous offrir cette tribune. Ce magazine vous appartient. Nous remercions chaleureusement les contributeurs, tout particulièrement Maître Jacques Loesch, Maître André Elvinger et bien entendu notre Bâtonnier Maître René Diederich, pour avoir cru en ce projet. Nous vous souhaitons une agréable lecture et sommes à votre écoute. Bien confraternellement, Bertrand Christmann

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Président de la CJBL


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LE MAINTIEN DE LA RÉMUNÉRATION MIS À PIED : LES FLUCTUATIONS DE LE DÉLÉGUÉ DU PERSONNEL BÉNÉFICIE D’UNE PROTECTION SPÉCIALE EMPÊCHANT L’EMPLOYEUR DE LE LICENCIER ; TOUT AU PLUS L’EMPLOYEUR PEUT-IL METTRE À PIED UN DÉLÉGUÉ DU PERSONNEL QUI A COMMIS UNE FAUTE GRAVE ET DEMANDER LA RÉSILIATION JUDICIAIRE DE SON CONTRAT DE TRAVAIL AVEC EFFET AU JOUR DE LA MISE À PIED SUR LA BASE DE L’ARTICLE L. 415-11 (2) DU CODE DU TRAVAIL. FONCTIONNEMENT DE LA PROCÉDURE Pendant la mise à pied, l’employeur n’a pas l’obligation de continuer à rémunérer le salarié-délégué. Toutefois, l’article L. 41511 (3) du Code du travail ouvre la possibilité au délégué mis à pied de saisir, dans les huit jours de la notification de la mise à pied, le Président du Tribunal du travail afin de voir ordonner le maintien de la rémunération dans l’attente de la décision définitive relative à la résiliation judiciaire du contrat. La jurisprudence traditionnelle en la matière a toujours retenu que le Président du Tribunal de travail devait s’abstenir de statuer sur le fond du dossier, c’est-à-dire sur la gravité des fautes reprochées au salarié, mais devait s’en tenir à un examen sommaire des éléments de fait pour vérifier s’il y avait une apparence de régularité de la mise à pied.

vant guider le Président de la juridiction du travail dans sa démarche juridique est l’appréciation du risque pour le salarié délégué de se voir priver pendant trop longtemps de son salaire en attendant la solution définitive du litige, ce salaire constituant normalement son seul revenu dont il a un besoin absolu pour vivre. Ainsi, le maintien du salaire pourra être refusé soit si la décision définitive du litige au fond est imminente, soit si le salarié délégué dispose d’un revenu de substitution ». De telles décisions aboutissaient, en pratique, à accorder quasi automatiquement le maintien de la rémunération au délégué du personnel. Il est en effet rare qu’un salarié reprenne un nouvel emploi dans le cadre d’une mise à pied. D’autre part, la décision définitive du litige au fond est difficilement imminente, un appel étant toujours possible.

COURANT D’ORDONNANCES Dans le courant des années 2009 et 2010, différentes ordonnances ont été rendues par le Président du Tribunal du travail d’Esch-sur-Alzette1 dans le cadre desquelles le Président a été amené à remettre en question les critères traditionnels dégagés par la jurisprudence. Les différentes ordonnances rendues en 2009 et en 2010 ont tiré d’une analyse de la genèse des dispositions légales que « le seul critère pou-

RÉAFFIRMATION DE LA JURISPRUDENCE TRADITIONNELLE Par différents arrêts rendus en 2011 2 , la Cour d’Appel a mis un coup d’arrêt à ce courant d’ordonnances rendues par le Président du Tribunal du travail d’Eschsur-Alzette et a réformé, du moins par rapport à cette motivation, les ordonnances précitées. Elle a fermement rappelé les principes dégagés par la jurisprudence traditionnelle. Ainsi, l’employeur doit établir

l’apparence d’une faute grave dans le chef du délégué du personnel ; si cette apparence de faute grave est rapportée, le maintien de la rémunération ne sera pas ordonné. Dans le cas inverse, le délégué du personnel bénéficiera du maintien de son salaire. Le Président du Tribunal du travail d’Esch s’est récemment rallié à cette position de la Cour d’appel3. Cette réaffirmation de la jurisprudence traditionnelle est d’autant plus importante qu’elle permet de clarifier les règles applicables dans cette matière, dans l’attente des changements à intervenir dans le cadre du projet de loi portant réforme du dialogue social. 1. Entre autres : ordonnance du Tribunal du travail d’Esch-sur-Alzette du 16 juin 2009 no 1291/09 et ordonnance du Tribunal du travail d’Esch-surAlzette du 21 janvier 2010 no 197/10. À notre connaissance, le Tribunal du travail de Luxembourg n’avait pas rendu d’ordonnances motivées de la même manière. 2. Entre autres : arrêt de la Cour d’appel, 8e chambre, du 13 janvier 2011, no 35697 du rôle ; arrêt de la Cour d’appel, 8e chambre, du 17 mars 2011, no 35902 du rôle. 3. Ordonnance du Tribunal du travail d’Esch-surAlzette du 7 janvier 2013 no 11/13 (à noter que cette ordonnance n’est pas encore définitive).

CÉLINE OLLIER celine.ollier@barreau.lu


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DU DÉLÉGUÉ DU PERSONNEL LA JURISPRUDENCE

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ANALYSE


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UN ORDRE DE MISSION LA MISSION PREMIÈRE DE LA CONFÉRENCE DU JEUNE BARREAU DE LUXEMBOURG CONSISTE À REPRÉSENTER LES INTÉRÊTS DES JEUNES AVOCATS. PRÉSENTATION. DEUX MISSIONS Pour remplir sa mission, l’association concentre ses efforts à deux niveaux. Au niveau national d’une part, elle fait partie des interlocuteurs privilégiés du barreau et des autres acteurs du monde du droit, tel

que le Ministère de la justice. Au niveau international d’autre part, elle dynamise les relations avec des jeunes barreaux étrangers, notamment dans des pays où la finance occupe une part importante du tissu économique. Dans les deux cas, l’agenda est très

chargé car la profession fait actuellement face à de nombreux défis. Citons par exemple la réforme de l’assistance judiciaire au Grand-Duché ou les réflexions actuelles engagées au niveau européen concernant l’évolution de notre profession dans un marché mondialisé. LES MEMBRES Pour être membre du Jeune Barreau, il faut remplir une seule condition : être inscrit au tableau de l’Ordre des avocats depuis moins


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LE COMITÉ DE LA CONFÉRENCE DU JEUNE BARREAU 2013. Première rangée de gauche à droite : Me Stéphanie STAROWICZ, échanges internationaux ; Me Digambal PRIA NAYAGUM, secrétaire ; Me Laurent SUIN, échanges internationaux. Deuxième rangée de gauche à droite : Me Benjamin BODIG (représentant de Diekirch), communication et mécénat ; Me Pierre-Alexandre LECHANTRE, comité des fêtes et des sports ; Me Christina DIEDERICH, comité des fêtes et des sports ; Me Bertrand CHRISTMANN, Président ; Me Alex PENNING, Vice-Président ; Me Nathalie MANGEN, échange internationaux ; Me Philippe SCHMIT, communication & marketing ; Me Tania HOFFMANN, Président sortant ; Me Andreas HOMMEL, trésorier.

de 11 ans. Un avocat assermenté à l’âge de 40 ans peut donc être membre jusqu’à ses 51 ans. La particularité des membres réside dans leurs journées très chargées. Ils sont en général très bien connectés, résolument modernes, mais manquent cruellement de temps pour prendre du recul sur leur profession ou mettre en commun avec leurs confrères leurs réflexions en vue de faire entendre leur voix. Le Jeune Barreau s’efforce donc de réunir des « think-tank », d’augmenter la visibilité de ses membres

dans les médias, et de défendre leurs intérêts auprès des instances représentatives. 90 ANS Le 90ème anniversaire du Jeune Barreau, créé en 1923, nous donnera l’occasion de convier nos confrères, le 14 juin 2013, à une journée anniversaire dans le cadre verdoyant du golf de Junglinster. Nous organiserons à cette occasion, un concours d’éloquence, une table ronde sur l’égalité devant la loi animée par des inter-

venants prestigieux et la première édition de l’open de golf de la CJBL. (voir page 42 du magazine). Cette journée s’achèvera par un dîner de gala et une soirée dansante. INFOS PRATIQUES 45, allée Scheffer, L-2520 Luxembourg, www.jeunebarreau.lu, jeune.barreau@barreau.lu www.facebook.com/ conferencedujeunebarreaudeluxembourg

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JEUNE BARREAU


10 THE YOUNG BARRISTER’S COMMITTEE LAWS NO 1

ALL BARRISTERS IN ENGLAND AND WALES ARE REPRESENTED BY THE GENERAL COUNCIL OF THE BAR (BAR COUNCIL), OF WHICH I HAVE BEEN A MEMBER FOR OVER 4 YEARS. BARRISTERS UNDER 7 YEARS’ CALL (I.E. WHO HAVE BEEN BARRISTERS FOR LESS THAN 7 YEARS – ROUGHLY EQUIVALENT TO YEARS IN PRACTICE) ARE REPRESENTED BY THE YOUNG BARRISTERS’ COMMITTEE (YBC), OF WHICH I WAS CHAIRMAN DURING 2012. THE YBC HAS 30 MEMBERS FROM ALL AREAS of practice and from all parts of England and Wales, led by a Chairman and ViceChairman. It has a paid Secretary who is employed by the Bar Council. There has been a YBC for nearly 60 years and its role is to represent and promote the interests of young barristers (i.e. barristers under 7 years’ Call). This means arguing in favour of young barristers at meetings of the Bar Council, as well as representing the position of the Young Bar on professional, political and other issues to members of the judiciary and the Government. For instance, during my year as Chairman, I had regular meetings with senior judges, as well as the Attorney-General and the Solicitor-General, both of whom are Government ministers.

Sydney Kentridge QC, KCMG, who is still in practice at the age of 90 and who was part of Nelson Mandela’s defence team in South Africa in the 1960s.

Amongst the YBC’s wide range of activities, we organise an annual conference in October and we publish an annual magazine. Last year’s conference focussed on advocacy and included specialist workshops to help develop the advocacy skills of young barristers in particular courtroom situations (e.g. vulnerable witnesses, cross-examining experts and so on). The keynote speech was given by one of the greatest living English advocates, Sir

The YBC is represented at many events internationally and it was a great pleasure for me to attend the Opening of the Legal Year in Paris, Brussels, Geneva, Montreal and – of course – Luxembourg. We also regularly attend international legal conferences (such as the International Bar A ssociation con ference, the Commonwealth Lawyers Conference and the American Bar Association conferences) and we organise our own international con-

Last year’s magazine included a range of articles written by members of the committee, judges, lawyers and others, about the work of the YBC and some of the topical issues affecting young barristers (e.g. how to improve advocacy in the county court). In addition, there were two major interviews: one with Lord Judge who is the Lord Chief Justice (England’s most senior judge); the other with Ken Clarke QC MP who, until September 2012, was the Lord Chancellor and Secretary of State for Justice (i.e. the Government minister in charge of the justice system).

ference for young lawyers from overseas in London at the end of September. Known as International Weekend, this is a joint collaboration between the YBC, the Young Lawyers’ Division of the Law Society (i.e. young solicitors) and the European Young Bar Association (of which I am the VicePresident for 2012-13). Bertrand Christmann and Tania Hoffmann were among the Luxembourgers who attended International Weekend in 2012: I hope many more of you will be able to attend this year in September. Being Chairman of the YBC was hard work but a great experience. I continue to be interested in the work of the YBC and I am confident that my successor, Hannah Kinch, and her Vice-Chairman, Max Hardy, will have every success in continuing the YBC’s important and valuable contributions.

VERSION FRANÇAISE


FOCUS LAWS NO 1

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DAVID NICHOLLS NICHOLLS IS A PRACTISING BARRISTER IN CHAMBERS AT 11 STONE BUILDINGS, LINCOLN’S INN, LONDON (WWW.11SB.COM). HE IS THE CHAIRMAN OF THE YOUNG BARRISTERS’ COMMITTEE OF THE BAR COUNCIL FOR ENGLAND AND WALES FOR 2012. HE IS ALSO THE VICEPRESIDENT OF THE EUROPEAN YOUNG BAR ASSOCIATION, 2012-2013.


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MONSIEUR LE BÂTONNIER RENÉ DIEDERICH

L’AVENIR PROFESSION DE LA

INTERVIEW DU BÂTONNIER DU BARREAU DE LUXEMBOURG, MAÎTRE RENÉ DIEDERICH, PAR MAÎTRE BERTRAND CHRISTMANN, PRÉSIDENT DU JEUNE BARREAU DE LUXEMBOURG. L’ÉVOLUTION DU BARREAU Au début de ma carrière professionnelle comme avocat, le Barreau de Luxembourg comprenait environ 80 avocats et notre promotion de 35 jeunes avocats était perçue, à l’époque, comme une promotion particulièrement importante et une réelle petite « marée ». Le Barreau de Luxembourg était un petit barreau essentiellement local. Les cabi-

nets unipersonnels étaient fort répandus et les quelques associations de 2 à 3 avocats dénotaient déjà une certaine modernité. Les avocats de l’époque étaient en général tournés vers le contentieux et travaillaient pratiquement exclusivement en allemand et en français. L’anglais n’avait guère de place au Luxembourg. Certes, Luxembourg avait une tradition du droit des sociétés (avec les hol-

dings 29) et disposait d’un secteur bancaire tourné vers les crédits à des entreprises et à la clientèle privée. Depuis le début des années 50, certaines entreprises américaines s’étaient implantées au Luxembourg et avaient pris de l’envergure. Mais les avocats traitaient les dossiers juridiques essentiellement sous l’aspect du contentieux et donnaient peu de conseils juridiques autres aux sociétés. Les avocats étaient aussi essentiellement des généralistes ayant une vision horizontale non segmentée du juridique. Les grandes entreprises de la place disposaient de départements juridiques étoffées et le poste de directeur du contentieux de l’Arbed était


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cats d’une plus grande taille, offrant la possibilité de travailler suivant des spécialités et en équipes. A la fin des années 90, les plus grandes études d’avocats regroupaient entre 20 et 30 avocats. Le mouvement s’est ensuite accéléré, sous l’effet du regroupement d’études d’avocats au niveau européen et avec l’entrée sur scène d’études d’avocats réellement transnationales et internationales capables d’offrir à leurs clients un service global. Nous sommes ainsi devenus progressivement un barreau important en nombre (avec 2000 avocats). Ceci n’aurait évidemment pas été possible sans le développement des moyens informatiques et de communication permettant des temps de réponse

presque instantanés, avec évidemment tous ses avantages et inconvénients. L’ÉVOLUTION DU JEUNE BARREAU Lorsque j’étais président du Jeune Barreau en 1989, tous les avocats de Luxembourg se connaissaient et avaient l’habitude de se côtoyer au quotidien dès lors qu’ils étaient encore pour l’essentiel des avocats du contentieux fréquentant régulièrement toutes les juridictions. A l’époque le Bâtonnier était présent tous les jours au Palais. Lorsqu’il y avait un incident, le Bâtonnier intervenait directement devant le magistrat. Il avait un rôle de père de famille qui défendait ses avocats.

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ainsi un poste particulièrement prestigieux. Au lendemain de la grande crise de la sidérurgie des années 70, la place financière a connu un rapide développement qui s’est accéléré au début des années 80 avec l’essor des crédits syndiqués et l’arrivée de nombreuses banques internationales et a pris un réel envol avec le développement depuis 1987 d’une véritable industrie des fonds d’investissements, sous l’impulsion de l’ouverture et de la libéralisation des marchés financiers européens. Cette évolution s’est accompagnée tout naturellement d’une demande croissante de services juridiques spécialisés. Ceci a nécessité et favorisé le développement d’études d’avo-

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Le Barreau était aussi moins structuré et disposait d’une seule secrétaire qui était placée à l’ancien Palais de Justice dans la bibliothèque du Barreau à l’intersection des différentes salles d’audience du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Depuis lors, le Barreau a déménagé à plusieurs reprises pour se doter au début des années 2000 d’une véritable «Maison de l’Avocat » à Luxembourg-Grund. Au début du mois d’avril de cette année, le Barreau a déménagé encore une fois vers de nouveaux locaux situés au Glacis, allée Scheffer, ce qui nous a permis de doubler la surface utile et de disposer de bureaux permettant un renforcement de la professionnalisation de la gestion des services du Barreau, dont notamment l’assistance judiciaire. Un barreau de 2000 avocats ne peut effectivement plus être géré de la même manière qu’un petit barreau d’une centaine d’avocats et les règles de toute nature doivent être respectées beaucoup plus strictement pour éviter des traitements inégalitaires. A l’époque et au vu du petit nombre d’avocats qui se rencontraient régulièrement dans des dossiers, les différends éventuels entre confrères pouvaient se régler de manière plus directe et dans un climat plus convivial. Le Bâtonnier pouvait œuvrer comme médiateur et père de famille et au lendemain de la deuxième guerre mondiale les avocats partageaient largement un vécu commun contribuant à une plus grande solidarité humaine entre confrères. De nos jours, les relations entre confrères se sont distendues et sont devenues plus anonymes, ce qui peut favoriser certains écarts parfois surprenants et souvent inacceptables. Aussi, le vécu est devenu très varié et culturellement divers, ce qui est sans doute une richesse, mais pose aussi nombre de défis à la profession. A partir d’un certain nombre de confrères, une professionnalisation du Barreau était devenue nécessaire. LES ACTIVITÉS DU JEUNE BARREAU Nous proposions déjà à l’époque des activités culturelles et de la formation. D’autres regroupements d’avocats comme la Conférence Saint-Yves et le Cercle François Laurent organisaient également régulière-

ment des conférences et publiaient des revues juridiques. La séparation entre Jeune Barreau et le Barreau dans son ensemble était plus marquée dès lors que les jeunes avocats étaient à l’époque numériquement moins importants. Les jeunes avocats étaient aussi beaucoup moins impliqués dans les affaires de l’Ordre des Avocats et se consacraient essentiellement à l’organisation de festivités et autres activités culturelles. Ce n’est qu’à la sortie du Jeune Barreau que les jeunes avocats se voyaient admis à assumer des fonctions au niveau de l’Ordre et étaient en quelque sorte admis à la table des grands. Vu le nombre de nouveaux arrivants, avec les 35 de ma promotion (contre 6, au mieux 12 auparavant) et les promotions suivantes qui n’étaient pas moins nombreuses, les choses ont lentement commencé à changer. Désormais nous vivons un barreau bien différent de celui que nous avons connu comme jeunes avocats. Ce n’est pas plus mal. Les défis posés à la profession sont importants, mais les avocats du Barreau de Luxembourg ont, de manière générale, merveilleusement bien réussi à relever ces défis. Le Jeune Barreau se montre aussi très dynamique et assume pleinement son rôle dans le contexte de la formation et de l’intégration des jeunes avocats. LE RÔLE DU BÂTONNIER Le rôle du Bâtonnier est devenu plus complexe de nos jours. Le Bâtonnier ne peut plus se contenter de jouer le père de famille ou le père fouettard, suivant les cas et les situations. Le Bâtonnier ne doit pas perdre de vue les différentes composantes de la profession. Il doit veiller au maintien de l’unité de la profession et au respect des règles déontologiques et à l’adaptation de ces règles aux réalités et nécessités de la profession. Le Bâtonnier doit aussi veiller au bon fonctionnement des services du Barreau. Il peut heureusement compter, dans l’accomplissement de ses tâches, sur une équipe professionnelle engagée et dévouée et sur un nombre impressionnant d’avocats qui sont prêts à s’engager à différents niveaux et de différentes manières dans les services du Barreau. Ces avocats assistent et épaulent le Bâtonnier, travaillent notamment dans des

Commissions, se rendent à des réunions et conférences internationales et participent à la rédaction d’avis sur des projets de lois. LA PROFESSION A-T-ELLE ÉVOLUÉ? Les exemples donnés précédemment le démontrent. J’ai vécu cette évolution dans ma propre pratique professionnelle en parcourant progressivement les différentes étapes d’organisation des études d’avocats décrites ci-avant. Nous devons cependant aussi être conscients du risque de voir se développer un barreau à plusieurs vitesses : d’un côté, de très petites structures, avec souvent des jeunes ou moins jeunes avocats gagnant très péniblement leur vie et ayant souvent du mal à survivre dès lors qu’ils doivent faire face à une grande concurrence et qu’ils se trouvent fréquemment dans des situations de faiblesse ou à très grand risque pour eux et pour la profession dans son ensemble ; de l’autre côté, des grandes structures qui ont connu des croissances effrénées et qui ont dû s’organiser en conséquence avec parfois le risque d’une fragmentation du savoir trop grande, ce qui peut générer d’autres risques et faiblesses et peut aussi inhiber ou freiner le développement de l’esprit d’initiative et d’entreprise des avocats y travaillant. L’avocat traditionnel travaillant essentiellement dans le domaine du contentieux peut lui aussi avoir beaucoup plus de mal à faire sa vie aujourd’hui qu’il y a 30 ans dans la mesure où il a dû adapter son modèle de fonctionnement aux nouvelles demandes de ses clients qui sont devenus plus exigeants. Surtout, il doit aussi se comprendre et fonctionner comme une entreprise, en faisant des projections financières et en établissant un plan de son entreprise. VU DE L’EXTÉRIEUR, L’ÉVOLUTION DE LA PROFESSION MET L’AVOCAT FACE À DES CABINETS D’AUDITS OU DES FIDUCIAIRES. QUELLES SONT SES PARTICULARITÉS ? L’avocat ne se mesure pas avec ces professions de conseil. L’avocat a un rôle autre et particulier de défense des justiciables, dont les membres les plus faibles et démunis de notre société, nécessitant en particulier un strict respect des règles de confidentialité. Les réviseurs et autres fiduciaires relèvent d’une autre logique et ne disposent, et pour


INTERVIEW LAWS NO 1

“L’AVOCAT A UN RÔLE À JOUER DANS LA SOCIÉTÉ, EN PARTICULIER AU NIVEAU SOCIAL.”

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cause, pas d’un secret professionnel comparable à celui des avocats. Le rôle de l’avocat est ainsi un rôle essentiel dans une société démocratique en vue du respect et de la défense des droits fondamentaux des justiciables. L’avocat doit constamment être conscient de ce rôle particulier. De ce fait, le Barreau doit aussi veiller au bon grain et il doit réagir lorsqu’il constate que des professionnels du conseil dans d’autres domaines se mettent à braconner sur un terrain qui n’est pas le leur. L’avocat n’est donc pas un commerçant qui tient simplement boutique. Il doit évidemment aussi se comporter comme un prestataire de service et fournir une excellente qualité de service à son client. Il ne doit pas du simple fait qu’il est avocat se croire au-dessus de la mêlée. S’il adopte cette approche, il fait fausse route. Il doit aussi informer et conseiller ses clients en faisant abstraction de son intérêt propre. Il doit agir avec diligence et doit rendre compte à son client de la bonne exécution de son mandat. Il faudra sans doute toujours le rappeler. Je constate néanmoins aussi que la grande majorité des avocats partagent entièrement cette façon de voir les choses et agissent en conséquence. Les avocats ont ainsi bien conscience qu’ils se différencient des professions de conseil mentionnées, par la qualité particulière de leur service et le secret professionnel qui leur est propre. ASSISTE-T-ON À UNE BIPOLARISATION DE LA PROFESSION, AVEC LES GRANDS CABINETS D’AFFAIRES D’UN CÔTÉ ET LES AVOCATS DU CONTENTIEUX DE L’AUTRE ? Je ne pense pas qu’il y ait réelle bipolarisation. Comme je l’ai indiqué, des risques de fragmentation et de segmentation peuvent exister. La volonté des avocats de maintenir l’unité de leur profession est toutefois très forte. Les avocats sont en général bien

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RENÉ DIEDERICH BÂTONNIER

conscients de leur identité particulière et du fait qu’ils doivent assumer un rôle dans notre société démocratique qui va bien au-delà de l’exercice d’une simple activité économique. L’avocat a aussi une responsabilité sociale inhérente à sa profession. Il n’a pas à se découvrir ce rôle et cette responsabilité pour être dans l’air du temps. Ceci s’applique à tous les avocats et non pas seulement aux avocats traitant le contentieux pour des particuliers. Nombreux sont d’ailleurs les confrères qui s’engagent et qui s’impliquent activement dans les associations et dans la vie de la Cité et qui prennent cette responsabilité très au sérieux, souvent en consentant bien des sacrifices personnels. DÉONTOLOGIE & SECRET PROFESSIONNEL Comme je viens de l’indiquer, le secret professionnel des avocats est essentiel à la profession. La Cour Européenne des Droits de l’Homme (C.E.D.H.) de Strasbourg vient encore de le rappeler récemment dans un arrêt phare dans une affaire Michaud contre la France, en date du 6 décembre 2012. La C.E.D.H. rappelle que l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme protège la confidentialité de toute correspondance entre individus et accorde une protection renforcée aux échanges entre avocats et leurs clients. La C.E.D.H. précise que cette règle se justifie par le fait que les avocats se voient confier une mission fondamentale dans une société démocratique: la défense des justiciables. Le secret professionnel de l’avocat contribue ainsi au respect du

droit du justiciable à un procès équitable. Pour pouvoir se défendre, le justiciable doit en effet pouvoir communiquer avec son avocat en le considérant comme un réel confident. L’avocat doit avoir accès à toutes les informations utiles et nécessaires à la défense de ses clients, afin de pouvoir leur donner des conseils éclairés. Il y a donc un lien obligé entre le secret professionnel de l’avocat et le fonctionnement de notre démocratie. Le secret professionnel fait ainsi forcément partie de la déontologie de l’avocat. Cette déontologie comporte une série de règles de conduite et le nouveau Règlement Intérieur de l’Ordre des Avocats de Luxembourg (RIO) insiste en particulier sur les règles à respecter pour éviter des conflits d’intérêts et sur le traitement par les avocats des seuls dossiers relevant de ses compétences, y compris les connaissances linguistiques. L’avocat qui méconnaît les règles fixées par le RIO commet une faute déontologique et s’expose immanquablement à des poursuites disciplinaires. LE SECRET BANCAIRE EST PRÉSENTÉ PAR CERTAINS COMME UN CONCEPT D’UN AUTRE ÂGE, QUI SERAIT DÉTOURNÉ À DES FINS DE FRAUDE. IL EST VOLONTIERS OPPOSÉ AUX VERTUS DE LA TRANSPARENCE. CETTE ÉVOLUTION NE PRÉSENTE-T-ELLE PAS UN DANGER POUR LE SECRET PROFESSIONNEL DES AVOCATS ? Pour les raisons exposées ci-avant, le secret professionnel de l’avocat qui ne souffre en principe pas d’entorses, n’est pas comparable, d’un point de vue qualitatif, au secret bancaire qui, comme nous le savons, est en


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“AVEC LA PRÉSENCE DE 2 000 AVOCATS, IL EST PLUS QUE NÉCESSAIRE D’ANALYSER LE MARCHÉ JURIDIQUE ET SES BESOINS.”

RENÉ DIEDERICH BÂTONNIER

train d’évoluer et de s’amenuiser. Comme il s’agit de deux ordres différents, je ne vois pas le risque que vous soulevez. Je constate au contraire, notamment à la lecture de l’arrêt Michaud pré-mentionné, que le secret professionnel de l’avocat en sort renforcé et n’est pas mis en cause dans les Etats démocratiques européens. Je ne parle pas des régimes totalitaires ou à tendance totalitaire qui se démasquent précisément par les attaques qu’ils lancent contre la profession d’avocat et en particulier le secret professionnel inhérent à l’avocat. L’OUVERTURE PLUS GRANDE DE LA PROFESSION SOUS L’EFFET DES NOUVEAUX MOYENS DE FORMATION ET DE COMMUNICATION L’Université de Luxembourg, comme d’ailleurs aussi la récente ouverture à Luxembourg d’un institut de la Max Planck Gesellschaft, apporte incontestablement un plus pour notre place juridique. Le Luxembourg est aussi une place juridique internationale et est reconnue comme telle par une justice de qualité et la présence de professionnels du droit remarquables. Ceci donne un avantage concurrentiel au Luxembourg, qui est une place reconnue pour sa grande sécurité juridique et son esprit pragmatique et innovant dans l’établissement du cadre juridique nécessaire et adapté aux besoins de la place financière et industrielle de Luxembourg. L’Université est, dans ce contexte, un partenaire de choix pour former et attirer des avocats et juristes de pointe. La formation permanente est aussi indispensable à l’exercice de la profession

d’avocat. Le Barreau est en constante réflexion et en dialogue avec l’Université pour atteindre cet objectif. L’Université profite de l’expérience pratique sur le terrain des avocats et les avocats peuvent profiter des connaissances et méthodologies scientifiques de l’Université. L’Université et la Faculté de Droit, d’Economie et de Finance ont incontestablement réussi à attirer d’éminents professeurs et scientifiques. L’INTERNATIONALISATION, UNE RÉUSSITE ? Le Luxembourg a su tirer avantage avec succès de sa situation particulière en Europe à la croisée de différentes cultures et continue à jouer la carte de l’ouverture et du multilinguisme pour attirer des investisseurs étrangers et les meilleures têtes pensantes. Au début de ma carrière professionnelle, l’anglais jouait un rôle plutôt limité et presque insignifiant, sauf dans certaines études d’affaires. Je me souviens néanmoins aussi que j’ai été encouragé assez vite à pratiquer davantage l’anglais. Comme le Luxembourg a depuis toujours eu une histoire de pays d’accueil, les avocats luxembourgeois ont aussi su s’adapter assez vite aux nouvelles réalités des affaires internationales. Ainsi, l’anglais a fait doucement mais sûrement sa place au Luxembourg pour devenir, de nos jours, l’une des principales langues pratiquées. On peut d’ailleurs noter l’existence d’un certain clivage entre les avocats pratiquant régulièrement les langues officielles du pays (le luxembourgeois, l’allemand et le français) et ceux qui confinent leur pratique à la langue de Molière, même si en principe

notre régime des langues doit favoriser aussi cette approche multilinguiste qui a fait le succès de la place de Luxembourg et des avocats du Barreau de Luxembourg. Je fais dès lors aussi le constat qu’un avocat qui ne maîtrise réellement qu’une seule langue a, de nos jours, bien du mal à trouver un travail lui permettant de survivre. La présence d’études d’avocats étrangères facilite la circulation des avocats luxembourgeois vers l’étranger, et attire de nombreuses nationalités dans nos études d’avocats. Cette circulation plus aisée des avocats en Europe constitue également un enrichissement mais aussi un défi pour notre Barreau, alors que seuls des avocats bien formés ont une chance de trouver leur place et de pouvoir survivre à terme. Avec la présence au Luxembourg de 2000 avocats, il est plus que nécessaire, avant d’entamer une carrière professionnelle, d’analyser l’état du marché juridique et quels en sont les besoins. Beaucoup de jeunes échouent en débarquant avec en tête une vision paradisiaque du Luxembourg. Il faut se rendre à l’évidence que la réussite professionnelle n’est possible que si l’avocat dispose des connaissances de base nécessaires au Luxembourg et s’il est prêt à accepter une grande flexibilité dans l’organisation de travail tout en étant rigoureux dans l’exercice de son métier. L’avocat ne peut pas non plus ignorer les règles qui lui sont imposées par la loi et le RIO en matière de lutte contre le blanchiment, le financement du terrorisme et la corruption. De ce point de vue aussi, l’exercice de la profession d’avocat a fortement évolué alors que l’avocat devra avoir une parfaite connaissance de son client.


INTERVIEW DIFFICULTÉS DU MARCHÉ POUR LES JEUNES, UN PROBLÈME CONJONCTUREL OU STRUCTUREL ? Je pense qu’au niveau du métier d’avocat, la crise nous a placé devant de nouveaux défis. Certaines études d’avocats ont été obligées de réfléchir à leur modèle de business. Mais la crise offre aussi des opportunités. Nous avons vu une demande grandissante d’avocats spécialisés en matière de faillite et de restructurations. Le droit du travail a aussi connu un grand essor. L’avocat comme membre d’une profession libérale doit toujours faire une analyse des opportunités à saisir et des domaines d’activité à explorer pour orienter ou réorienter sa carrière professionnelle. L’avocat ne doit pas dégénérer en assisté au risque de perdre son indépendance qui est elle aussi essentielle à la profession. LOGIQUE LIBÉRALE OU RÉGULÉE, NOTAMMENT EN TERMES DE RÉMUNÉRATION MINIMALE ET DE CONTRATS DE COLLABORATION POUR LES JEUNES CONFRÈRES C’est un sujet difficile car nous sommes toujours une profession libérale. Je pense qu’il faut prévenir des situations de misère et lorsque de telles situations se créent, il faut essayer d’y remédier au plus vite, pour éviter qu’elles ne perdurent. J’estime personnellement que tout travail mérite juste rémunération de la part du client et, dans le cadre d’une collaboration, également de la part de l’avocat faisant appel à des collaborateurs. L’Ordre surveille de près ces situations. La disparité de traitement parmi les jeunes avocats est souvent très grande au niveau de la rémunération. Dans les études d’affaires structurées, les rémunérations des jeunes collaborateurs avocats sont généralement assez décentes, sachant que l’organisation du travail exigée par le type de travail dans ces études d’avocats est beaucoup plus contraignante en général. L’avocat qui engage un jeune collaborateur doit aussi être conscient du fait qu’il doit procurer au jeune collaborateur une formation adéquate. Par contre, il ne saurait être question d’une sorte de salaire minimum garanti pour jeunes avocats, car on nierait de la sorte le caractère de profession libérale. Si un avocat estime qu’il n’arrive pas à gagner convenablement sa vie dans ce métier, il devra faire les choix qui s’imposent. EXPÉRIENCE MARQUANTE DEPUIS LE DÉBUT DE

VOTRE MANDAT ? J’ai été particulièrement frappé par certains différends pouvant exister entre avocats pour des faits qui peuvent parfois paraître anodins et qui pourraient être évités par le dialogue. Je suis particulièrement sensible aux difficultés rencontrées par les jeunes ou moins jeunes avocats dans un environnement économique difficile. Ces difficultés peuvent générer des situations à risques et des vulnérabilités, tant pour les avocats concernés que pour la profession dans son ensemble. J’ai été touché et encouragé par le grand engagement et dévouement de beaucoup de confrères, notamment au sein du Conseil de l’Ordre et dans les Commissions du Barreau et j’en ai tiré une satisfaction certaine. J’ai trouvé beaucoup d’enthousiasme et de dynamisme au sein de l’équipe professionnelle de la Maison de l’Avocat RELATION AVEC LES MAGISTRATS De manière générale, la relation n’est pas marquée par des tensions excessives. Cette relation est nécessairement marquée par le fait que chacun doit assumer pleinement et justement le rôle qui lui est propre. Il ne faut pas s’en offusquer. C’est bien le propre de notre démocratie. Il est entendu que chacun doit assumer son rôle et exercer son métier dans le respect du rôle de l’autre. Beaucoup de magistrats ont d’ailleurs connu la profession d’avocat en début de leur carrière professionnelle. En France, une séparation plus nette existe dans la formation entre magistrats et les avocats. Cette séparation donne lieu à un certain nombre de critiques et réflexions. En Allemagne, la situation est encore différente: les jeunes se destinant à la profession d’avocat sont d’abord formés pour être magistrats et les futurs magistrats n’ont généralement jamais connu la pratique de la profession d’avocat. Là encore, il y a critiques et réflexions du côté de nos voisins et il est actuellement question de faire passer ces jeunes magistrats par des cabinets d’avocats, pour qu’ils se familiarisent avec les fonctionnements des études. Tout ceci me laisse penser que notre système actuel a ses mérites. UN OBJECTIF AU TERME DE VOTRE MANDAT ? Je pense qu’en nous dotant d’un nouveau Règlement Intérieur de l’Ordre et de nouveaux locaux plus spacieux et fonctionnels,

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nous avons fait des progrès au cours de l’année passée au niveau de la réglementation de la profession d’avocat et de la professionnalisation des services que l’Ordre rend aux justiciables et aux avocats. Au cours des mois qui viennent, nous devrons, au niveau de notre organisation, donner un important coup de pouce à l’informatisation du Barreau par le développement de l’intranet et des services en ligne. J’espère aussi que cette démarche pourra se placer dans le contexte plus général de l’informatisation de la justice, alors que nous devons malheureusement constater que le Luxembourg, en dépit de toutes les compétences pouvant exister dans notre pays, prend actuellement un retard inacceptable par rapport aux autres pays européens. Nous comptons sur la détermination de notre nouvelle Ministre de la Justice. Nous devrons poursuivre nos efforts dans le développement et la mise en place des procédures en matière de lutte contre le blanchiment, la lutte contre le terrorisme et la corruption. Ces sujets sont extrêmement sensibles pour notre place, même si nous pouvons constater, en faisant des comparaisons avec d’autres pays européens environnants, que le Luxembourg est, à cet égard, assez bien placé. Nous devrons enfin, toujours et en toutes circonstances, maintenir nos efforts pour souligner l’apport positif que notre profession apporte à notre société démocratique (par la défense des droits fondamentaux) et à notre économie (par notre action pour garantir la sécurité juridique).


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POUR LES ENFANTS DE MADAGASCAR... DEPUIS 2006, L’ASSOCIATION “ENFANTS DE MERIMANJAKA” S’INVESTIT POUR QUE L’ÉCOLE SAINT JEAN BAPTISTE DE LA SALLE À MADAGASCAR FONCTIONNE DANS DES CONDITIONS SALUBRES. LES ENFANTS DU HUITIÈME CONTINENT « Aider une école ! Un projet à dimension humaine, réaliste et tourné vers l’avenir». C’est sur ce chemin que l’association, « Enfants de Merimanjaka » située à Mauchamps près de Paris, a entrepris sa route afin d’aider les 300 écoliers d’une région rurale du huitième continent. Réhabilitation des locaux et constructions, la création de sanitaires fut une étape importante : à l’origine l’école disposait d’une insalubre cabane « équipée d’un trou » servant de latrines pour tous les enfants. Première étape ? Amener l’eau courante à l’école. Pour cela, l’association a conçu un dispositif de récupération des eaux pluviales et la création d’une fosse septique. Au-delà de l’aspect technique, cette action a présenté un progrès social qui permet de mieux maîtriser la question de l’hygiène tant sur le plan individuel que collectif. UN PROJET À LA SOURCE Quel est le meilleur exemple à donner à la population que celui de l’école ? Si l’arrivée de l’eau potable s’inscrit dans une démarche d’amélioration, à l’usage, la pression et le débit s’avèrent insuffisants pour couvrir l’ensemble des besoins. L’association a donc le projet de renforcer le stockage du réseau et de généraliser la récupération d’eau de pluie à l’ensemble des bâtiments. Objectif ? Permettre à l’école de disposer d’eau en quantité suffisante en toute saison pour l’ensemble de ses besoins. Notamment pour inculquer les règles d’hy-

giène aux enfants, faciliter l’arrosage du potager, la préparation des repas et répondre à l’hydratation des enfants. Fin des travaux ? Rentrée scolaire 2013-2014, soit à partir du 1er octobre 2013 ! ACCOMPAGNER L’ASSOCIATION Pour conduire ses démarches, l’association « Enfants de Merimanjaka » trouve ses sources et ses financements dans les dons, les subventions, l’adhésion de nouveaux membres et le système de parrainages. Alimentation des écoliers avec un apport régulier en viande, collecte de jouets pour Noël, collecte de vêtements, financement d’une sortie scolaire annuelle, visites médicales généralisées, soins médicaux gratuits, entretien de l’école sont les multiples actions menées en continu, avec pour adage : « les enfants d’aujourd’hui seront ceux qui, demain, travailleront à un devenir meilleur de Madagascar, dont la grande beauté n’a d’ égale que sa pauvreté endémique. » Le Jeune Barreau soutient l’association « Enfants de Merimanjaka ».

ENFANTS DE MERIMANJAKA 5 RUELLE DU CHANT DE L’ALOUETTE 91730 MAUCHAMPS - FRANCE SIRET : 504592593 00017 - APE 8891A SITE WEB : HTTP://WWW.ASSOLEA.ORG/EDM/ MAIL : MERIMANJAKA@GMAIL.COM CONTACT : +33 6.15.25.21.70


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ACTION HUMANITAIRE


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DONS : DESTINATION ASSURÉE COMMENT UN DONATEUR PEUT-IL AVOIR L’ASSURANCE QUE SON DON SERA EMPLOYÉ DE MANIÈRE EFFICACE ? QUELLES SERONT LES ACTIONS ET COMMENT SERONTELLES GÉRÉES ? TANT DE QUESTIONS LÉGITIMES QUI ONT FAIT LA GENÈSE DE L’ASSOCIATION DE DON EN CONFIANCE LUXEMBOURG. RASSURER LE DONATEUR Née en 2011 de la fusion de seize associations luxembourgeoises, l’a.s.b.l. Don en Confiance Luxembourg a pour but de contrôler et de rendre publique une information objective, permettant de guider les donateurs potentiels dans leurs décisions de soutien. Pour cela, elle a créé un agrément accordé à ses membres qui assure que les dons effectués au profit de cette association sont gérés dans la confiance. Le discours est clair : chaque donateur a le droit de savoir comment est dépensé son argent et s’il est bien géré. Chaque association ou fondation a un devoir envers ses donateurs. C’est pourquoi l’association veut livrer des informations fiables sur l’utilisation des dons.

Charles Kaufhold.

UN ENGAGEMENT, UNE ÉTHIQUE Pour ce faire, Don en Confiance Luxembourg propose l’application et l’engagement du respect d’un code de bonne conduite commun, ouvert à tout organisme luxembourgeois qui correspond au profil retenu dans les statuts. Une dynamique de contrôle et de transparence dans le souci de rassurer les donateurs quant au devenir de leurs dons. « À l’instar d’organisations similaires actives dans les pays voisins, Don en Confiance Luxembourg a été créé par des organismes luxembourgeois poursuivant des activités dans les secteurs humanitaire, social ou environnemental », précise le viceprésident Charles Kaufhold.

CLARTÉ DE FONCTIONNEMENT Constituée d’un conseil d’administration présidé par M. Jean Hamilius, qui veille à l’application du « code de bonne conduite », l’association s’est également dotée d’un comité de sages présidé par M. Jacques Santer, dont le rôle est d’assister et de conseiller le conseil d’administration. Intrinsèquement, Don en Confiance Luxembourg ne sollicite pas de dons, ni d’aides. Ses frais de fonctionnement, réduits au minimum, sont financés par ses membres. Tous ses collaborateurs travaillent de façon bénévole ! Une marque de confiance, non ? VINGT-TROIS ASSOCIATIONS MEMBRES A.T.P a.s.b.l., Autisme Luxembourg a.s.b.l., CARE in Luxembourg a.s.b.l., Croix-Rouge Luxembourgeoise, Elisabeth Stëftung, a.s.b.l. EPI, Fondation Alzheimer, Fondation Autisme Luxembourg, Fondation Cancer, Fondation Caritas Luxembourg, Doheem Versuergt, Fondation EME, Fondation Hëllef fir d’Natur, Fondation Jean Hamilius Jr., Fondation Kräizbierg, Fondation Kannerduerf, Fondatioun Kriibskrank Kanner, HELP, Omega 90 a.s.b.l., ONG Unity Foundation, SOS Faim Luxembourg asbl, SOS Villages d’Enfants Monde, Fondation Ste Zithe. WWW.DONENCONFIANCE.LU CHARLES KAUFHOLD


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COOPERATION AVEC LE BARREAU DU MALI LE BARREAU DE LUXEMBOURG ENTRETIENT DEPUIS 2006 DES RAPPORTS ÉTROITS AVEC LE BARREAU DU MALI AFIN DE CONSTRUIRE UNE COOPÉRATION STABLE ET FRUCTUEUSE. MALHEUREUSEMENT, EN RAISON DE LA SITUATION POLITIQUE INSTABLE AU MALI, AUCUNE DÉLÉGATION LUXEMBOURGEOISE N’A PU SE RENDRE À BAMAKO DEPUIS NOVEMBRE 2011. NOUS NE POUVONS QUE SOUHAITER QUE NOS DEUX BARREAUX PUISSENT REPRENDRE LEURS ÉCHANGES RAPIDEMENT ET ASSURER AINSI LA PÉRENNITÉ DE CETTE COOPÉRATION. HISTORIQUE DE LA COOPÉRATION La coopération entre nos deux barreaux a officiellement pris naissance le 29 janvier 2007 à l’occasion de la signature d’une convention d’échanges en présence de JeanLouis Schiltz, Ministre de la Coopération de l’époque. En l’espace de 6 ans, nos échanges se sont intensifiés au point de devenir le projet de coopération le plus abouti du Barreau de Luxembourg. C’est ainsi que lors de chaque rentrée solennelle du barreau de Luxembourg, la délégation malienne est de loin la plus importante en nombre, et vice versa. A noter également que le barreau de Luxembourg a financé la mise à disposition d’ordinateurs et de manuels de droits aux jeunes avocats. Depuis 2009, notre coopération repose sur deux axes principaux, à savoir d’une part les conférences annuelles et d’autre part, un échange de stagiaires.

LES CONFÉRENCES : CADRE D’UN EXERCICE COMPARATIF Des journées de réflexion et d’échanges entre les barreaux malien et luxembourgeois sont organisées chaque année à Bamako à l’occasion de la venue de la délégation luxembourgeoise. Ces conférences permettent un échange sur différentes thématiques telles que la déontologie, les conflits d’intérêts, la corruption, la politique et la profession d’avocat ou encore la taxation des honoraires. Chacune de ces conférences est suivie d’un débat souvent animé, permettant à l’audience d’appréhender les difficultés auxquelles sont confrontés les confrères affiliés à l’autre barreau. C’est à travers cette comparaison de nos deux systèmes que se distille une compréhension accrue de nos droits respectifs.

LES STAGES : CADRE D’UN ÉCHANGE CULTUREL ET PROFESSIONNEL Toujours dans l’optique de renforcer les liens entre nos deux barreaux, deux jeunes avocats ont chaque année l’opportunité, de part et d’autre, de s’imprégner de la pratique juridique civiliste dans un contexte radicalement différent de celui qu’ils connaissent. Au Luxembourg, les études Kaufhold, Ossola & Associés et Elvinger, Hoss & Prussen accueillent régulièrement les stagiaires maliens. Les rapports de stage des avocats luxembourgeois ayant accompli un stage à Bamako sont consultables sur le site internet du barreau (http://barreau.lu/le-barreau/ les-commissions). CHARLES MULLER - NICOLAS DECKER RACHEL GERMAIN


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ÉCHANGES


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Emmanuelle Ragot.


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RÉFORME GLOBALE DE LA PROTECTION DES DONNÉES EN EUROPE

IL Y A UN PEU PLUS D’UN AN, LE 25 JANVIER 2012, LA COMMISSION EUROPÉENNE PUBLIAIT DES PROJETS D’AMENDEMENT AU CADRE EUROPÉEN DE PROTECTION DES DONNÉES. LA DIRECTIVE ET LE RÈGLEMENT PROPOSÉS VISENT À AMÉLIORER L’HARMONISATION ET À APPLIQUER LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE PROTECTION DES DONNÉES À CARACTÈRE PERSONNEL TOUT EN CONTINUANT À RESPECTER LES SPÉCIFICITÉS DE CE DOMAINE.

MOTIFS DE LA RÉFORME Les principaux objectifs poursuivis par la Commission européenne avec cette réforme tendent à la modernisation du système européen de protection des données à caractère personnel par un renforcement des droits des individus. Simplification des formalités administratives (notification aux autorités nationales de protection des données) en vue de la libre-circulation des données au sein de l’Union européenne sera remplacée par une obligation de documentation. Clarté et cohérence accrues des règles européennes de protection des données pour une application homogène et efficace du droit fondamental à la protection des données à caractère personnel au sein de l’Union européenne. La directive 95/46/CE serait remplacée par un règlement qui, en tant que tel, n’exigerait

pas de transposition de la part des États membres. La cohérence au sein de l’Union européenne s’en trouverait ainsi renforcée. La décision-cadre 2008/977/JAI actuellement en vigueur serait remplacée par une directive.

gation d’informer les autorités de tutelle de toute violation desdites données. Les propositions simplifieraient également les transferts de données, notamment en reconnaissant les règles d’entreprise contraignantes.

LE DÉFI DE LA CROISSANCE ET DE LA COMPÉTITIVITÉ La directive proposée porte sur le traitement des données à caractère personnel par les services d’enquête et la libre-circulation desdites données. La directive et le règlement susmentionnés avancent notamment que les limitations aux principes généraux seront soumises à des conditions et prescriptions harmonisées minimales. De plus, une distinction sera faite entre les différentes catégories de personnes concernées par le traitement des données (témoins ou suspects, par exemple) qui peuvent avoir des droits différents. La réforme peut également être perçue comme une étape supplémentaire dans l’économie numérique. En améliorant la protection des données personnelles, elle renforce clairement la confiance des consommateurs à l’égard du commerce électronique et les encourage à acquérir de nouveaux produits et services. La notification des violations de données à caractère personnel instaure l’obli-

CONCLUSION En résumé, la réforme de protection des données de l’UE a pour vocation de moderniser, simplifier et renforcer le cadre de protection des données. Elle obligera les entreprises à rendre davantage compte des données qu’elles traitent. Les grandes entreprises devront désigner des délégués à la protection des données. Cette réforme européenne est toujours en cours d’amendements. Il est prévu que de fortes discussions auront lieu sur la nouvelle définition du consentement qui devra être explicite, la portée de la documentation à laquelle le contrôleur sera soumis. L’entrée en vigueur est prévue en 2015 en supposant que le vote aura lieu sous la présidence irlandaise de l’UE.

EMMANUELLE RAGOT emmanuelle.ragot@barreau.lu © DR

DANS L’ÉCONOMIE ACTUELLE, la protection des données revêt une importance croissante. Et, bien qu’elle ne soit pas encore finalisée, cette réforme devrait avoir une incidence majeure sur les entreprises et les sociétés détentrices de données. Cet article dresse une vue d’ensemble des principaux points concernés par le projet d’amendement.


26 PAROLES D’EXPERTS : RÉTRO LAWS NO 1

MAÎTRE ANDRÉ ELVINGER AVOCAT, ELVINGER HOSS & PRUSSEN PRESTATION DE SERMENT : 1953 PRÉSIDENT DU JEUNE BARREAU : 1961-1962 BÂTONNIER : 1986-1987 SPÉCIALITÉS : DROIT DES SOCIÉTÉS, DROIT FISCAL, DROIT BANCAIRE


27 ROSPECTIVE & DÉONTOLOGIE ENTRETIEN

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MAÎTRE JACQUES LOESCH

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AVOCAT LINKLATERS LLP, LUXEMBOURG PRESTATION DE SERMENT : 1952 PRÉSIDENT DU JEUNE BARREAU : 1958-1959 BÂTONNIER : 1985-1986 SPÉCIALITÉS : DROIT DES SOCIÉTÉS


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ILS FURENT TOUS DEUX PRÉSIDENT DU JEUNE BARREAU, PUIS BÂTONNIER. ENTRETIEN ENTRE MAÎTRE JACQUES LOESCH ET MAÎTRE ANDRÉ ELVINGER : RÉTROSPECTIVE ET DÉONTOLOGIE. MAÎTRE CHRISTMANN : QUELS SOUVENIRS GARDEZVOUS DE VOS EXPÉRIENCES DE PRÉSIDENT DU JEUNE BARREAU ET DE BÂTONNIER ? MAÎTRE LOESCH : Dès la prestation de serment le jeune avocat était d’office membre du Jeune Barreau. Je garde un très bon souvenir du Jeune Barreau de ce temps. L’ambiance y était conviviale parce que nous étions peu nombreux et nous nous connaissions tous. A l’époque l’aspect formation se réduisait à des conférences et il n’y avait pas de cours. De temps en temps nous avions des conférenciers remarquables. Je me souviens en particulier d’une conférence de Maître Jean Thévenet, Bâtonnier de Bruxelles. Le football occupait une place de choix dans l’activité du Jeune Barreau. N’étant pas joueur je soutenais l’équipe en assistant au match et au dîner qui traditionnellement suivait. MAÎTRE ELVINGER : Je garde ces mêmes souvenirs des réunions entre le Jeune Barreau de Luxembourg et les Jeunes Barreaux de Paris, de Bruxelles et d’autres villes de Belgique. Je me rappelle d’une rencontre mémorable de football avec l’équipe du Jeune Barreau de Paris à Reims. Je n’étais pas joueur non plus, me contentant du rôle de supporter et de participant à des agapes extraordinaires dans les

“LE MONDE ANGLO-SAXON EST ENVAHISSANT, ON NE SAIT PAS JUSQU’OÙ CELA VA NOUS MENER.”

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MAÎTRE ELVINGER

Caves Taittinger. Je crois me rappeler que Monsieur Taittinger était avocat et que son fils devint Bâtonnier de Paris. L’aspect sportif était un peu faussé car, contrairement à nos confrères parisiens, nous comptions parmi nos joueurs des membres de la famille judiciaire au sens large, en particulier l’un ou l’autre greffier qui faisait partie de l’équipe nationale luxembourgeoise de l’époque. Quant aux conférences, c’était aussi la tâche du Jeune Barreau. Une anecdote me revient : en tant que président de la conférence du Jeune Barreau, l’un de mes grands soucis était de bien remplir la petite salle des assises à l’ancien Palais de Justice. Les avocats avaient peu de temps et les magistrats ne se montraient pas très intéressés. J’étais plein d’inquiétude, notamment pour une conférence pour laquelle j’avais fait appel à mon ancien professeur de droit civil à la faculté de Grenoble, Monsieur Nerson. J’avais trouvé la solution pour remplir la salle : le thème de la conférence était la responsabilité civile des enseignants et j’avais invité, outre les juristes, les instituteurs du pays qui se rendaient en grand nombre à mon invitation. La salle fut comble. M.C. : JE VOIS QUE LA SITUATION N’A PAS CHANGÉ. NOUS AVONS TOUJOURS DU MAL À MOBILISER NOS JEUNES CONFRÈRES. M.E. : Les gens sont beaucoup plus gâtés de nos jours. M.L. : Un jour nous avions invité un éminent magistrat de Paris, conseiller à la Cour de Cassation. Lors de sa conférence il n’y avait que 13 personnes présentes. C’était gênant. A propos des matchs de foot, lorsque je devenais président du Jeune Barreau les anciens joueurs de notre équipe m’approchaient aussitôt pour me rappeler de ne pas oublier d’organiser un match avec l’équipe du Barreau de Paris parce que c’était à notre tour de les inviter. Je commençais donc à correspondre avec le responsable parisien pour trouver une date. Plusieurs dates ayant été écartées j’en arrivais à proposer une date fin mai. Le confrère parisien me répondait : « mon cher confrère, vous semblez

ignorer que le football n’est pas un jeu d’été. » M.C. : SI JE COMPRENDS BIEN, LES MEMBRES DU JEUNE BARREAU ÉTAIENT DES COPAINS ET SE CONNAISSAIENT PERSONNELLEMENT. M.L. : De mémoire, je sais que nous étions environ 150 en tout. Tout le barreau était composé de moins de 200 avocats. Nous nous connaissions bien, en particulier les jeunes. C’était plus facile. M.C. : Y AVAIT-IL DES RELATIONS PARTICULIÈRES ENTRE LE JEUNE BARREAU ET LE BARREAU ? M.E: Une tâche majeure assumée par le Jeune Barreau, c’étaient les « Rentrées » annuelles ou bisannuelles qui se tenaient, au Luxembourg comme en France et en Belgique, sous l’égide des Jeunes Barreaux. C’était donc notre conférence du Jeune Barreau qui avait à organiser, pour ces Rentrées, les sujets, la date, la liste des invités, l’excursion et les réjouissances. Bien que ce fût le bâtonnier qui présidait ces Rentrées, toute l’organisation reposait sur le Jeune Barreau. M.C. : C’EST TOUJOURS VRAI. LA RENTRÉE BISANNUELLE EST TOUJOURS ORGANISÉE PAR LE JEUNE BARREAU. M.L. : Les différentes conférences permettaient d’apprendre des choses et de rencontrer des gens. C‘était très intéressant. M.C. : AVEC LES NOUVEAUX MODES DE COMMUNICATION, LES ÉCHANGES SONT PLUS FRÉQUENTS MAIS MOINS IMPORTANTS. M.E. : Les Rentrées étaient l’occasion de grandes joutes oratoires et j’ai toujours trouvé que nos confrères parisiens – je rappelle que les « douze secrétaires » étaient élus sur un concours d’éloquence – et belges étaient très supérieurs à nous sur ce chapitre. Les dîners, toujours mémorables, étaient assortis de nombreux discours, jusqu’à une vingtaine, en Flandre dans deux langues. M.L. : À la rentrée de la conférence du stage de Paris, selon l’usage deux discours étaient prononcés dont le second consistait en général à faire l’éloge d’un ancien bâtonnier ou avocat remarquable. M.E. : C’était toujours un jeune avocat qui était l’orateur de rentrée et le bâtonnier lui apportait la réplique. M.L. : L’usage de prononcer un discours a été introduit chez nous après la guerre. Je me rap-


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pelle que lors d’une telle séance l’orateur avait fait un beau discours sur un sujet de droit administratif. Selon le même usage, le bâtonnier devait y répondre. Le bâtonnier en exercice se levait alors et disait que selon le même usage l’orateur devait lui remettre en temps utile son texte, qu’il avait reçu ce texte seulement pratiquement la veille et qu’il n’était donc pas en mesure d’y répondre, sur quoi il s’est assis. M.E. : Traditionnellement, le discours de rentrée était à caractère culturel ou historique, mais à un moment donné nous trouvions qu’il était plus intéressant de parler de sujets juridiques, entre autres pour la raison que, contrairement à ce qui est heureusement le cas aujourd’hui, il existait peu de doctrine au Luxembourg de ce temps. M.C. : FONDAMENTALEMENT L’APPROCHE N’A PAS CHANGÉ. NOUS ORGANISONS UN CONCOURS D’ÉLOQUENCE POUR LES 90 ANS DU JEUNE BARREAU MAIS IL EST DIFFICILE DE MOTIVER LE PLUS GRAND NOMBRE. M.E. : Nous nous rattrapions par le fait que les avocats plaidaient beaucoup. Les séances des tribunaux comportaient toujours la plaidoirie, même en matière civile ou commerciale. Les conclusions étaient par contre plus courtes qu’aujourd’hui. Certains, comme Alex Bonn et Fernand Zürn, étaient champions en conclusions très concises. De nos jours, les conclusions sont très étendues, les plaidoiries sont courtes ou absentes. M.L. : À l’époque, les juges avaient beaucoup plus de temps car ils avaient moins d’affaires à traiter.Un jour un avocat belge est venu chez nous. Constatant que nous avions l’habitude lire d’abord les conclusions pour ensuite plaider, le confrère disait que notre procédure était chronophage. Vous parlez du problème d’intéresser les jeunes avocats aux activités du Jeune Barreau. Dans le temps c’était plus facile pour nous car nous étions moins nombreux et tous luxembourgeois. Nous avions vocation à rester ici. Ce n’est plus toujours le cas. L’intérêt d’un confrère est moindre s’il ne pense pas faire toute sa carrière ici.

M.C. : NOUS N’AVONS PAS DE STATISTIQUES À CE SUJET, MAIS J’ENTENDS SOUVENT QUE DES AVOCATS ÉTRANGERS ARRIVENT AU LUXEMBOURG POUR UNE OPPORTUNITÉ PROFESSIONNELLE ET FINISSENT PAR BIEN S’Y SENTIR ET S’Y ÉTABLIR. M.E. : Au début des années 60, la place financière était encore très modeste. Son développement explique l’accroissement du nombre d’avocats dans l’ensemble. M.L. : L’arrivée massive de jeunes est trop récente pour pouvoir tirer une conclusion précise et savoir si la majorité va rester. C’est trop tôt pour le dire. M.L. : Pas mal de juristes étaient membres du Jeune Barreau et l’ont quitté pour prendre un emploi dans les Communautés Européennes. M.C. : BEAUCOUP DE JEUNES AVOCATS NE PLAIDENT JAMAIS. SELON VOUS, LA FORMATION MONISTE ESTELLE ENCORE PERTINENTE ? M.L. : L’activité de l’avocat a deux aspects : le judiciaire et le non judiciaire. Nous formons nos jeunes confrères avant tout pour devenir des avocats plaidant. Cela dit, beaucoup ne savent même pas où est le palais de justice, mais cela concerne le judiciaire et pas le juridique. La spécialisation étant de plus en plus poussée, les deux s’éloignent de plus en plus et il est difficile de dire si dans la formation du jeune avocat il faut mettre l’accent sur l’un plutôt que sur l’autre. M.C. : LA FORMATION POURRAIT ÊTRE PLUS CLAIREMENT ORIENTÉE DÈS LE DÉPART. POUR CERTAINS, L’ÉTUDE OBLIGATOIRE DE LA PROCÉDURE CIVILE N’A PLUS BEAUCOUP DE SENS. M.E. : C’est la spécialisation qui veut cela. Elle existe dans le non-judiciaire comme dans le judiciaire. Il suffit de regarder les textes de loi, qui sont de plus en plus complexes et techniques. Dans les études d’avocats plus grandes, certains ne pratiquent pas du tout le judiciaire et ils se spécialisent même au sein d’une branche du non-judiciaire. Il y a quelques années, quant à mon étude, j’étais d’avis qu’il était important que chacun ait un peu de pratique de droit général, mais je crains que cela soit devenu un vœu pieux. Et pourtant peut-on émettre des « legal opinions » valables sans avoir jamais été confronté aux décisions judiciaires ? Certes on a à sa disposition la doctrine et la jurisprudence, mais la pratique du judiciaire reste un atout, du moins une certaine pratique du judiciaire dans le

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droit commercial et le droit des sociétés. M.L. : À nos débuts nous faisions presque tout, nous devions plaider toutes sortes de dossiers. Il est important pour un jeune avocat qui n’a pas l’expérience du judiciaire de faire des recherches et de se forger une opinion dans un dossier contentieux. Dans un tel dossier il y a toujours un contradicteur. cela aide le jeune avocat à mieux structurer sa pensée et son discours. M.E. : Je ne sais pas si les jeunes qui vont lire notre interview partagent notre opinion. M.L. : Probablement pas M.C. : L’EXPÉRIENCE DU CONTENTIEUX EST SELON MOI UNE PLUS-VALUE. QUAND JE DISCUTE AVEC CERTAINS ÉTUDIANTS, JE SENS UNE DIFFÉRENCE DE POINT DE VUE. M.E. : Sur le sujet de la formation, je dirais quand même que, en voyant ce qui se passe chez nous, les jeunes avocats sont mieux lotis que de notre temps. Au sein de nos études, nous organisons des exposés de droit présentés par les associés ou futurs associés. La formation devient ainsi continue. Elle se fait aussi parce que, dans les études plus grandes, il existe un travail d’équipe, à la différence de l’avocat solitaire que nous étions. Un associé ne reste pas seul devant son dossier mais fait presque immédiatement appel à des collaborateurs qui font de la recherche et préparent des projets de textes. Je pense que c’est un grand progrès, qui est facilité par la technologie. L’e-mail est un instrument de communication formidable. M.L. : Les jeunes qui sortent de faculté sont en général mieux formés actuellement. De nos jours nous suivions les cours avec peu d’assiduité et nous n’avions guère de travaux pratiques Aujourd’hui, les avocats ont accès à la formation continue et dans les grands cabinets, ils ont des facilités qu’ils n’ont pas dans les cabinets plus modestes. Attention, les petits cabinets ont leur propre qualité mais les grands offrent souvent des possibilités et des structures qui aident mieux la formation continue. M.C. : ASSISTE-T-ON À UNE FRACTURE ENTRE LES GRANDES ET LES PETITES STRUCTURES ? M.L. : C’est un sujet sur lequel il y aurait beaucoup à dire. Grandes et petites structures : il faut de tout. Nous sommes une profession de services et par conséquent il faut pouvoir fournir le service à des usagers qui sont différents : le ménage qui va peut-être divorcer, les


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“DANS NOTRE PROFESSION, IL EST DES QUESTIONS OÙ LA RÉPONSE N’EST NI OUI NI NON.” MAÎTRE LOESCH

grands groupes industriels, bancaires et financiers qui ont besoin d’un soutien permanent et suivi à grande échelle et qui nécessitent souvent de grandes équipes. Une seule personne ne serait pas à même de le faire. Certains n’aiment pas exercer dans une grande structure mais des contraintes existent que nous ne pouvons pas ignorer. Au Barreau de Paris, ce sont de grands orateurs mais ils sont parfois un peu déphasés par rapport au monde des affaires à celui des gens du chiffre. C’est très bien mais avec cette position extrême, une partie des opportunités vous échappent. Si la profession veut rester impliquée dans tous les secteurs de la société, elle doit s’adapter. Je rappelle qu’à Londres les grands cabinets de solicitors cohabitent avec les barristers qui travaillent chacun seul avec 3 ou 4 pupils. Ils sont groupés dans de petites structures mais ils font un travail d’élite avec des honoraires correspondants. M.E. : Avec évidement une équipe de solicitors qui préparent le terrain. M.L. : C’est une pratique de luxe, de grand luxe, notamment dans le contentieux. Sur 100 dossiers, 3 ou 4 % seulement sont plaidés par les ténors, et le reste est arrangé par les solicitors. M.E. : Vous avez parlé d’une fracture entre le judiciaire et le non judiciaire. Elle ne sera jamais totale. Un exemple : dans le domaine financier il y a pour chaque loi des dispositions pénales et des sanctions administratives à caractère quasi-pénal. On a parlé de « la pénalisation du droit ». Au niveau des sanctions, dans le secteur financier, le juge sera la CSSF

plus souvent que le tribunal correctionnel. J’ai surtout la conviction que, si rupture il y avait entre le judiciaire et le non-judiciaire, elle ne devrait en aucun cas aboutir à une division de la profession. La question s’est posée à l’époque où nous étions Bâtonniers et où nous préparions laborieusement la loi qui allait devenir la loi actuelle, fût-elle modifiée, de 1991 sur la profession d’avocat. De mon temps de bâtonnat, le ministre de la justice avait essayé de me convaincre que ce serait bon d’avoir une profession de « conseils juridiques ». L’autre tentation était une réunion sous une forme ou autre avec la profession du chiffre. Le problème n’a pas tout à fait disparu puisque le Conseil de l’Ordre a envisagé des mesures à l’égard de certains réviseurs d’entreprises pour le respect du monopole de l’avocat dans son domaine. La France a réuni toutes les professions dans une seule : les anciens agréés, avoués et conseillers juridiques ont été fusionnés dans la profession d’avocat. Je ne pense pas qu’il y ait actuellement chez nous une tendance à la division. M.L. : Chez nous existait la profession d’agréé pour les gens qui avaient des connaissances juridiques sans être avocats, mais elle a disparu. De nos jours, chez nous, on nomme toujours un avocat dans les affaires compliquées de liquidation ou faillite alors qu’en Belgique ou en France cela ne se fait plus. M.L. : Si un expert-comptable ou un réviseur est nommé, les tribunaux lui joignent pratiquement toujours un avocat, parfois même à la demande même de la société en faillite. Il faut garder l’unité de la profession et à l’intérieur de la profession, laisser la possibilité de se spécialiser. M.C. : NE POURRAIT-ON PAS CRAINDRE DE PERDRE DES PARTICULARITÉS, NOTAMMENT LE SECRET PROFESSIONNEL, LIÉES À NOTRE PROFESSION ? M.L. : Le secret, la confidentialité de ce qui appartient en propre à chaque personne est de plus en plus remis en cause. Je pense par exemple au secret médical. Dans le code pénal, le même texte régit les avocats et les médecins. Quand on voit l’intervention de la Caisse de santé, le secret médical n’existe pratiquement plus. Tout est mis en commun, socialisé. C’est une tendance. Notre profession l’est également. Nous pouvons ou nous devons le regretter. Il est certain que le secret professionnel des avocats est une chose importante. J’admets que certains problèmes n’existaient pas autrefois : le

terrorisme et le trafic de drogue à grande échelle. Ces problèmes demandent des remèdes plus catégoriques que ceux qui étaient autrefois admis. M.E. : Je dis à mes enfants et à mes jeunes confrères que la profession d’avocat est encore une vraie profession libérale. Nous devons reconnaître que le blanchiment et le terrorisme sont des menaces pour notre société, mais pour le reste, le secret professionnel de l’avocat n’est pas mis en cause. Ce que l’on a appelé à tort la renonciation au secret bancaire – il s’agit en réalité de l’échange automatique d’informations – ne touche pas à notre profession. Je pense que nous allons continuer à vivre sous le secret professionnel et j’espère que nous continuerons à le respecter. À quel titre pensez-vous que cela constitue un danger particulier ? M.C. : DE NOS JOURS, LA TRANSPARENCE EST PERÇUE COMME POSITIVE ET LE FAIT DE NE PAS L’ÊTRE EST ASSOCIÉ À DE LA DISSIMULATION. CERTAINS ACTEURS AIMERAIENT FAIRE UN AMALGAME ET REVOIR L’IDÉE DE TOUT SECRET PROFESSIONNEL. M.L. : Vous avez raison de dire que certaines personnes font des amalgames. Ceux qui veulent que tout soit transparent partent d’une approche que je qualifierai de « philosophie communiste » : tout doit être mis en commun et partagé. À l’opposé il y a la « philosophie bourgeoise », égoïste, selon laquelle chacun ne connait que son propre intérêt et veut protéger celui-ci par le secret. Je pense que l’on trouve dans certaines décisions de la Cour de Strasbourg et celle des Communautés une protection du secret professionnel de l’avocat. Le secret est attaqué de divers côtés, mais la position de l’avocat est différente de celle du banquier. M.E. : Il existe une loi dite « transparence » dans le secteur financier, mais elle a pour objectif la protection de l’investisseur qui doit être bien informé par l’émetteur dont les titres sont admis au marché. Il s’agit là encore de lutter contre un mal, le délit d’initié et l’abus de marché qui vont à l’encontre des intérêts légitimes des autres investisseurs. C’est une transparence qui va dans le bon sens. M.C. : QUE PENSER DES GENS QUI DÉFENDENT LA COMMUNAUTARISATION DE LA VIE PRIVÉE, QUI EST PROTÉGÉE PAR LES AVOCATS ? M.E. : Le secret de l’avocat n’est pas reconnu universellement. Je ne sais pas ce qui se fait en


ENTRETIEN LAWS NO 1 Chine. Aux États-Unis, le secret doit être assuré par contrat. M.C. : QUEL EST LE RÔLE SOCIAL DE L’AVOCAT ? M.L. : Rôle social ? Faites-vous allusion au rôle de l’avocat dans la société ou à son rôle dans une activité sociale particulière ? M.C. : LES DEUX. LE RÔLE DE L’AVOCAT COMME SENTINELLE DU RESPECT DES DROITS FONDAMENTAUX FACE NOTAMMENT, AU DÉVELOPPEMENT DES CAMÉRAS DE VIDÉOSURVEILLANCE. JE PENSE ÉGALEMENT AU RÔLE DES ACTIVITÉS EN « PRO BONO » ET À LA RÉFORME DE L’ASSISTANCE JUDICIAIRE. FAUT-IL Y INTRODUIRE UNE FORME DE TICKET MODÉRATEUR – UN FORFAIT À LA CHARGE DU BÉNÉFICIAIRE ? M.L. : Est-ce que cela a un sens de faire payer un ticket modérateur à une personne qui est vraiment démunie ? Ou alors faut-il le faire par catégories, avec des seuils, des tranches de revenus ? Il y a des affaires d’assistance judiciaire ou la personne fait un procès alors que ce n’était pas indispensable, certes, mais certains doivent se défendre et sont démunis. M.C. : L’EXEMPLE DE LA CONSULTATION MÉDICALE ILLUSTRE LE PROPOS. LE TICKET MODÉRATEUR NE SERAIT-IL PAS DE NATURE À RÉDUIRE CERTAINS ABUS ? M.E. : Quel est le but d’un tel ticket modérateur ? Est-ce celui de réduire le nombre des demandes d’assistance judiciaire dont certaines ne seraient pas justifiées ? Mais attention, le ticket modérateur dans le domaine de la santé s’applique aux riches comme aux pauvres, tandis que l’assistance judiciaire concerne uniquement les indigents.

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M.C. : L’AVOCAT COMME SENTINELLE DU RESPECT DES DROITS FONDAMENTAUX ? M.L. : Je voudrais évoquer une question qui

revient toujours, celle du pacte de quota litis, qui est dans un certain sens proche du ticket modérateur. Notre tradition au Luxembourg, en Belgique et en France a toujours été d’interdire un tel pacte. Mais il faut reconnaitre qu’aux USA, des gens peu fortunés obtiennent une indemnisation à laquelle ils ont droit mais qu’ils n’auraient pas obtenue sans ce système. En Allemagne, il est possible de demander un supplément d’honoraires quand le procès est gagné. Dans ces cas-là, on n’est pas très éloigné du système du pacte de quota litis. Si le Jeune Barreau pensait engager une réflexion plus générale sur ce thème là, ce serait intéressant. Certains pays européens pratiquent ce système. Je ne dis pas que dans notre profession, nous devrions suivre tout ce qui se fait dans les autres pays, mais le système fonctionne ailleurs et ne semble pas avoir provoqué une explosion du nombre des affaires. M.C. : AUTRE SUJET : LA NATURE CONFIDENTIELLE DES CORRESPONDANCES ENTRE AVOCATS NE VOUS SEMBLE-T-ELLE EN CONTRADICTION AVEC L’OBLIGATION LÉGALE FAITE AU MANDATAIRE DE RENDRE COMPTE À SON MANDANT ? M.L. : Quand nous disons que la correspondance entres avocats est confidentielle, cela signifie qu’il est interdit de la communiquer à un tiers ou à la justice. Mais je ne pense pas qu’il est répréhensible de la communiquer à son client/ mandant. M.E. : D’après la jurisprudence, le secret professionnel ne s’applique pas à l’égard du client, ce qui peut, il est vrai, poser un problème pratique car le client pourrait en faire mauvais usage. M.L. : Il revient au client de dire s’il est d’accord ou non à respecter la confidentialité. M.E. : Le client pourrait évidement remettre au juge une pièce que son avocat ne pourrait pas invoquer devant le magistrat. M.L. : Si le client plaide lui-même, oui. M.E. : Le juge ne doit-il pas refuser dans un tel cas, d’en prendre connaissance ? M.L. : Dans certains cas l’avocat peut et doit faire connaitre la pièce ou le renseignement qu’il détient faire. Dans notre profession, il est des questions où la réponse est ni oui ni non. M.C. : FORTS DE VOTRE EXPÉRIENCE, COMMENT VOYEZVOUS NOTRE MÉTIER ÉVOLUER DANS LES DIX PROCHAINES ANNÉES ? M.E. : Depuis le temps où nous étions Bâtonniers, des changements importants se sont produits,

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autres que ceux dont nous avons déjà parlé. Je pense par exemple aux pratiques sur le plan de la publicité de l’avocat. Le règlement de l’Ordre, dans sa version publiée au Mémorial du 6 mars 2013, n’interdit plus la publicité, mais la règlemente. Il est vrai que dans le temps, l’interdiction de la publicité allait jusqu’à l’extrême. En France l’avocat n’était pas autorisé à mettre son nom à l’entrée de son cabinet. C’était, à mon avis, tout à fait excessif. Il n’y a aucune raison valable que l’avocat ne puisse pas dire où il est et ce qu’il fait. Ou cela va-t-il s’arrêter, je ne sais pas, mais il devrait rester les limites de la dignité. M.L. : Le monde va évoluer comme il a évolué beaucoup en ce qui concerne notre profession depuis 50 années. Personne ne sait dans quelle direction ni à quelle vitesse, mais si tout l’environnement change, notre profession changera aussi. En ce qui concerne certaines règles professionnelles, le Luxembourg subit l’influence du monde anglo-saxon, avec des règles différentes de celles auxquelles nous étions habituées. M.C. : ALLONS-NOUS VERS UNE OBLIGATION DE JOUER À CARTES OUVERTES ? M.L. : En Angleterre, l’avocat est un « officer of the court ». Il participe à la justice et par conséquent il doit jouer le jeu et soumettre toutes ses pièces même celles qui sont en défaveur de son client. Pour nous, ce serait un changement fondamental. Nous ne voulons pas tromper le juge, mais nous ne voudrions pas faire un aveu alors que la charge de la preuve incombe à la partie adverse. M.E. : Je me souviens d’un confrère, très sympathique par ailleurs, qui travaillait de façon particulière : il disait « je remets à la cour tout mon dossier », et c’était vraiment tout son dossier, sans le nettoyer. C’était une forme très particulière de la transparence. M.L. : Dans le droit anglo-saxon, il y a des points qui sont différents des nôtres. Jusqu’où devons-nous ou voulons-nous nous y ajuster ? Il y a là un aspect nouveau de l’exercice de notre profession. M.E. : C’est sous Margaret Thatcher que l’Angleterre a voté une loi qui imposait la publicité des solicitors pour assurer la concurrence, y compris leurs modes de rémunération et leurs taux horaires. Le monde anglo-saxon est envahissant, on ne sait pas jusqu’où cela va nous mener.


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L’INEFFICACITÉ DES RECOURS EN RÉFÉRÉ EN MATIÈRE DE MARCHÉS PUBLICS VOTÉE À LA HÂTE APRÈS UNE CONDAMNATION PAR LA COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE, LA LOI DU 10 NOVEMBRE 2010 INSTITUANT LES RECOURS EN MATIÈRE DE MARCHÉS PUBLICS EST LOIN D’OUVRIR AUX OPÉRATEURS ÉCONOMIQUES ÉVINCÉS DES VOIES DE RECOURS EFFICACES ET RAPIDES.

LE RECOURS MARGINAL À LA LOI DU 10 NOVEMBRE 2010 Depuis son entrée en vigueur, rares ont été les recours formés sur base de la Loi de 2010. Apparemment, seules 6 ordonnances ont été rendues, toutes par le président du Tribunal administratif et toutes pour juger les recours irrecevables ou non fondés. LE RECOURS TRADITIONNEL À LA LOI MODIFIÉE DU 21 JUIN 1999 Sur la même période, la plupart des recours ont été formés sur base des articles 11 et 12 de la loi modifiée de 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives. Mais les chances d’obtenir le sursis à exécution ou une mesure de sauvegarde sont faibles. Sur les 24 recours introduits, seules 5 ordonnances présidentielles y ont fait droit. LES RÉFORMES SOUHAITABLES La Loi de 2010 maintient une dualité de compétences réparties entre le président du Tribunal d’arrondissement siégeant comme juge des référés et le président du Tribunal

administratif. Or, en pratique, seul ce dernier est amené à rendre des ordonnances en matière de marchés publics. Le Législateur pourrait donc opportunément lui attribuer tout le contentieux des actes unilatéraux intervenant avant la conclusion des marchés publics, sans distinguer selon qu’ils émanent d’un pouvoir adjudicateur ou d’une entité adjudicatrice. La constitutionnalité de la Loi de 2010 pourrait être remise en cause au regard de l’objectif poursuivi de garantir une protection juridictionnelle effective aux soumissionnaires non encore définitivement exclus, car elle ne régit que les marchés des livres II et III de la loi modifiée du 25 juin 2009 relative aux marchés publics. Le champ d’application de la Loi de 2010 devrait donc être étendu aux marchés visés au livre Ier. En outre, lorsque les demandes de sursis à exécution formées sur base de l’article 11 de la Loi de 1999 concernent des marchés du Livre Ier de la Loi de 2009, elles sont recevables tant que l’affaire au fond n’est pas en état d’être plaidée ni décidée à brève

échéance. Cependant, ces mêmes demandes pour des marchés relevant des Livres II et III de la Loi de 2009 doivent, selon l’article 6 de Loi de 2010, être formées dans les 10 ou 15 jours de l’information donnée aux soumissionnaires évincés sur l’attribution du marché. Une uniformisation des délais de recours serait judicieuse. Enfin, dans la mesure où la jurisprudence applique à tort aux mesures de sauvegarde les conditions de préjudice difficilement réparable et de moyens sérieux et où l’article 6 de la Loi de 2010 prévoit, pour les marchés des Livres II et III de la Loi de 2009, des délais différents pour introduire un recours en sursis à exécution ou demander l’institution d’une mesure de sauvegarde, les conditions d’application de l’article 12 de la Loi de 1999 devraient être clarifiées et simplifiées.

GUY PERROT guy.perrot@barreau.lu


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“LA CONSTITUTIONNALITÉ DE LA LOI DE 2010 POURRAIT ÊTRE REMISE EN CAUSE.”


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L’ASSOCIATION INTERNATIONALE DES JEUNES AVOCATS REVIENT À LUXEMBOURG EN 2013 ! QU’EST-CE QUE L’AIJA ? Constituée en 1962 au Grand-Duché de Luxembourg, l’AIJA est la seule association mondiale qui se consacre aux jeunes avocats et aux jeunes juristes d’entreprises âgés de moins de 45 ans. À travers un large choix de séminaires et de conférences, l’AIJA favorise les rencontres et promeut la coopération professionnelle et l’amitié entre les jeunes avocats qui, à travers le monde entier, traversent une phase clé de leur développement professionnel. L’AIJA est reconnue comme étant la voix de la génération montante d’avocats et elle apporte concrètement à ses membres : • connaissance et savoir-faire, grâce à l’accès à des séminaires de haute qualité scientifique à des prix attractifs ; • une perspective internationale, alors qu’elle permet à ses membres de rencontrer des professionnels du monde entier et d’échanger des informations de grand intérêt pour leur pratique professionnelle ; • un réseau, grâce aux relations privilégiées qu’elle permet de nouer avec des jeunes confrères déjà reconnus dans la profession ou ayant un avenir prometteur, des juristes, de représentants de Barreaux ; • une plateforme, alors qu’à l’AIJA, de jeunes avocats développent leur expertise

en participant activement à nos séminaires aux côtés d’orateurs prestigieux ; • des outils de développement professionnel, grâce à des présentations sur des sujets comme la maîtrise de la négociation, la gestion d’un cabinet d’avocats, … • … le tout dans une atmosphère amicale sans égal ! L’AIJA compte aujourd’hui plus de 4 000 membres actifs à travers le monde et touche plus de 80 000 avocats dans 700 cabinets de différentes cultures et de toutes les tailles. Elle organise plus de 20 événements par an, dont une quinzaine de séminaires, deux conférences semi-annuelles et un congrès annuel. Pour devenir membre, rendez-vous sur www.aija.org. L’AIJA DÉBARQUE À LUXEMBOURG EN NOVEMBRE 2013 ! Du 20 au 23 novembre 2013, l’AIJA organisera sa conférence semi-annuelle du mois de novembre à Luxembourg à l’Hôtel Le Royal. Il s’agira d’une occasion unique de rencontrer un nombre important de ses membres et de participer activement à la vie de l’Association, grâce notamment aux réu-

nions des diverses commissions scientifiques qui se tiendront durant la conférence. Deux séminaires seront organisés durant cette conférence sur les sujets suivants: • “Are you ready to launch an e-shop? Traps and pitfalls to avoid” • “Help, I am losing control! How to deal with shareholder and stakeholder activism?” Nous vous tiendrons au courant des modalités d’organisation et d’inscription à cette conférence mais espérons déjà vous voir nombreux en novembre à nos côtés pour accueillir nos confrères qui viendront du monde entier afin qu’ils découvrent les charmes de l’hospitalité « à la luxembourgeoise » ! ME NICOLAS THIELTGEN, AVOCAT À LA COUR, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT DE L’AIJA ME ALAIN GOEBEL, AVOCAT À LA COUR, REPRÉSENTANT NATIONAL DE L’AIJA POUR LE LUXEMBOURG


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ASSOCIATION


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37 MODÉLISATION DU DROIT ANALYSE

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COMMENT TROUVER UNE SOLUTION JURIDIQUE DANS UN AUTRE ORDRE JURIDIQUE ET COMMENT CRÉER UN OUTIL FACILITANT CETTE RECHERCHE ? LA RÉSOLUTION DE CES QUESTIONS, AMÈNE À DÉFINIR CE QUE L’ON RECHERCHE POUR L’INTÉGRER À UN OUTIL. LANGAGE Les phénomènes fondamentaux de la vie de l’esprit, individuelle ou collective, reposent dans la pensée inconsciente. Les sciences humaines reposent entièrement dans l’espace de la représentation permis par le langage. Malgré une irréductible subjectivité, elles appartiennent au domaine positif du savoir. STRUCTURE La pensée discursive peut ordonner selon deux modalités : la méthode ou les structures. Une structure est un choix arbitraire de caractères déterminant l’ensemble des identités et des différences. La structure, en limitant et en filtrant le visible, lui permet de se transcrire dans la linéarité du langage.

temporel, géographique, matériel et personnel. Bobbio classe les normes en interdictions, obligations ou permissions, auxquelles il faut ajouter les définitions. RECHERCHE DOCUMENTAIRE La recherche d’information juridique tend à accéder à un endroit d’un énoncé. La méthode utilisée, le séquentiel indexé, consiste à créer un répertoire des informations potentiellement recherchées et de leur adresse.

FORMALISATION Une grammaire générative permet de créer des phrases avec les éléments de la norme juridique. L’écriture des modalités déontiques, des domaines de validité des normes juridiques, des mots d’une langue donnée décrivant l’action prescrite ou permise, ainsi que des relations entre normes juridiques, permet leur traitement automatisé. 1. C. LÉVI-STRAUSS, Introduction à l’œuvre de Marcel Mauss, in M. MAUSS, Sociologie et anthropologie, Puf, 1950, Paris, p. XXXI 2. M. FOUCAULT, Les mots et les choses, Gallimard, 1967, Paris, p. 375 3. Id., p. 377 4. M. FOUCAULT, id., p. 154 5. Id., p. 152 6. Id., p. 147 7. H. KELSEN, Théorie pure du droit, p. 79. J.-C. GÉMAR, Traduire ou l’art d’interpréter, Presses de l’Université du Québec, t. 1, p. 15 8. N. BOBBIO, Essai de théorie du droit, Bruylant, 1998, Louvain, p. 222. Hans KELSEN, id., p. 60. 9. N. BOBBIO, loc. cit. 10. H. KELSEN, id, p. 235 11. B. FILLIATRE, Conception et réalisation d’un système de documentation automatique pour la jurisprudence, dir. P. FALGUEIRETTE, thèse, Montpellier II, 1970, p. 44 12. P. CATALA, Place et rôle de l’IRETIJ dans la communauté scientifique nationale et internationale, Informatica e diritto, 2/1984, Le Monnier, Florence, p. 23, n° 29

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VARIATIONS Les structures permettent de rendre compte du droit malgré ses variations. Les sources de variations du droit sont : la justification du pouvoir, la variation des énoncés (alors que leur contenu juridique est exactement rendu), et l’existence de choix documentaires différents. THÉORIE PURE DU DROIT La Théorie pure du droit de Kelsen est une définition structurale du droit. Sa spécificité consiste dans le mode par lequel les normes sont liées entre elles, en un système. Dans un ordre juridique, des normes, plus générales, peuvent déterminer la création des normes, leurs champs d’application et la résolution des conflits entre normes. Selon cette théorie, une norme a quatre domaines de validité, limités ou infinis :

L’informatique documentaire atteint le droit à travers ses sources. Les outils actuels de recherche d’information juridique ont un défaut majeur : une recherche par mot-clef retourne des documents énonçant aussi bien le droit en vigueur que du droit inapplicable.

PIERRE MATRINGE pierre.matringe@barreau.lu


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ON S’ÉTAIT DIT RENDEZ-VOUS DANS 10 ANS, MÊME JOUR, MÊME HEURE, MÊME PORT…

LE JEUNE BARREAU DE LUXEMBOURG LÈVE LES VOILES ET PARTICIPERA À L’ÉDITION 2013 DE LA JURISCUP ! 2 VOILIERS « TRADITION » • 1 CÔTRE BERMUDIEN DE 1934 ET 16,80 DE LONG • 1 KETCH MARCONI DE 1964 ET … 23,75 M DE LONG

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JURISCUP


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CHANGEMENT D’ADRESSE L’ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE LUXEMBOURG DÉMÉNAGE SES BUREAUX À PARTIR DU 1ER AVRIL 2013

© PHOTOS : 360CROSSMEDIA/LD

NOUVELLE ADRESSE : 45, ALLÉE SCHEFFER L-2520 LUXEMBOURG - LIMPERTSBERG


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à l’occasion de ses 90 ans, la conférence du jeune barreau de luxembourg fait peau neuve sur internet

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2013

CONCOURS D’ÉLOQUENCE I TABLE RONDE I TOURNOI DE GOLF I DÎNER DE GALA I SOIRÉE DANSANTE 10 H

Ouverture et accueil des golfeurs

17H30 Séance débat

11 H

Open de golf de la CJBL

18H30 Drink jubilaire offert par la CJBL

16H30 Table ronde sur l’égalité devant la loi animée par :

20 H

M. Marc Fischbach Ancien Ministre de la justice, ancien Juge à la C.E.D.H., ancien Ombudsman

21H30 Finale du concours d’éloquence du « Roude Léiw »

M. Georges Ravarani Membre de la Cour constitutionnelle, Président de la Cour administrative

22 H

Fin du diner et remise des prix aux lauréats du concours et au gagnants de l’Open

23 H

Soirée dansante

M. le Pr. Jean-François Akandji-Kombé Coordonnateur général du Réseau académique européen sur les Droits sociaux (Conseil de l’Europe)

Dîner de gala

modérée par : M. Rusen Ergec, modérateur Professeur en droit public Université du Luxembourg, Faculté de Droit, d’Economie et de Finance

Code vestimentaire : TENUE DE COCKTAIL - Lieu : GOLF DE JUNGLINSTER UNE NAVETTE SERA ASSURÉE AVEC LUXEMBOURG-VILLE À INTERVALLES RÉGULIERS INSCRIVEZ-VOUS SUR JEUNE.BARREAU@BARREAU.LU BULLETINS D’INSCRIPTION DISPONIBLES SUR W W W. C J B L . L U


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