VOISINAGE SUD
Projets en Marche LA COOPERATION REGIONALE DE L’UE VUE PAR LES JOURNALISTES
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VOISINAGE SUD
Projets en Marche
LA COOPÉRATION RÉGIONALE DE L’UE VUE PAR LES JOURNALISTES
« Le chômage, l'exclusion sociale, les inégalités et la pauvreté sont au centre des préoccupations d'avenir des citoyens dans tous les pays. Ces phénomènes comptent parmi les principales causes d'instabilité et d'agitation, et il convient d'y remédier pour ancrer dans le long terme le processus de démocratisation. » Commissaire Štefan Füle
Politique européenne de voisinage (PEV) - Les voisins du Sud L'UE propose à ses voisins une relation privilégiée, basée sur un engagement mutuel en faveur de valeurs communes (la démocratie et les droits de l’homme, l'État de droit, la bonne gouvernance, les principes d'économie de marché et le développement durable). Plus les valeurs partagées seront importantes, plus les relations entre les deux parties pourront atteindre un niveau avancé. Les voisins du Sud de l'UE couverts par la PEV sont l'Algérie, l'Égypte, Israël, la Jordanie, le Liban, la Libye, le Maroc, le Territoire palestinien occupé, la Syrie* et la Tunisie. La communication « Un partenariat pour la démocratie et une prospérité partagée avec le Sud de la Méditerranée », qui a été adoptée le 8 mars 2011, a clairement affirmé le soutien de l'UE en faveur d'un appel au changement et à l'avènement de sociétés plus démocratiques et ouvertes. Une approche fondée sur des incitations a été définie (le principe du « more for more » - donner plus en échange de plus) afin de faciliter les réformes politiques, économiques et sociales dans les pays de la région. En 2012, une feuille de route pour l'action future a permis de définir les objectifs et les résultats à poursuivre jusqu'à la fin 2013.
* La coopération de l'UE avec la Syrie a été suspendue en raison de la situation politique dans ce pays. Toutefois, la Syrie étant en principe éligible à une coopération dans le cadre de l'IEVP, les activités pourraient reprendre dès que la situation s'améliore.
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Des Palestiniennes des villages de la région d'Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, participent à l'atelier « Les femmes peuvent inciter le changement », à Hébron (photo par EPA et COSPE ©EU/Neighbourhood Info Centre).
Contenu
4 Le voisinage s’enracine interview avec le Commissaire Štefan Füle 8 La coopération régionale de l’UE vue par les journalistes 10 Notre réseau de journalistes
44 “J’ai appris à dompter ma peur du feu" Par Elias Zananiri
Société
47 Une bonne recette pour l'agriculture? Des chouettes plutôt que des pesticides Par Elias Zananiri
13 La coopération est avant tout axée sur les gens Entretien avec Raffaella Iodice
Culture
15 Femmes à la recherche de liberté et de respect Par Elias Zananiri
51 Ne touchez pas à ma porte en bois! Par Hicham Houdaifa
18 A l'écoute de ce que les jeunes ont à dire Par Mohammed Ben Hussain
54 Recherche producteurs pour raconter le Printemps Arabe Par Antoine Ajoury
21 « J'ai appris à être citoyenne à part entière » Par Dalia Chams
57 À la recherche de la Pétra médiévale Par Mohammad Ben Hussain
24 Une grille informatique à disposition de la science Par Hicham Houdaifa
60 Un film entre Gaza et Londres: la mission impossible d'Awatif Par Marc Weiss
27 Broderie, peinture, informatique: de l'exclusion à la vie Par Tarik Hafid
Économie
30 La Libye n’a pas besoin d’argent mais d’expertise Entretien avec Andrew Jacobs et Fabienne Bessonne 32 L’UE et le printemps arabe: aider la nouvelle génération à bâtir une société nouvelle Entretien avec Marcus Cornaro
Environnement 35 Les entreprises se mettent au vert Par Yair Qedar 38 Bizerte, une lagune à sauvegarder Par Lotfi Touati
Projets en Marche - Voisinage Sud
41 Que faire en cas de séisme ? J'apprends grâce à un jeu Par Antoine Ajoury
65 L’emploi, la priorité numéro un pour la nouvelle Tunisie Par Lotfi Touati 68 ‘Made in Agadir zone’: une vision ambitieuse pour le futur, mais quels espoirs ? Par Mohammed Ben Hussain 71 Les nouvelles routes commerciales du vieux savon naturel Par EU Neighourhood Info Centre/ANSA 74 Restauré, l'ancien site du Khan - al Wakala renoue avec sa splendeur passée Par Elias Zananiri 78 Soutenir le budget, soutenir le changement Entretien avec Luca Oriani Vieyra
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Le voisinage s’enracine « Le chômage, l'exclusion sociale, les inégalités et la pauvreté sont au centre des préoccupations d'avenir des citoyens dans tous les pays. Ces phénomènes comptent parmi les principales causes d'instabilité et d'agitation, et il convient d'y remédier pour ancrer dans le long terme le processus de démocratisation. » Commissaire Štefan Füle
Iman Gamal dans une rue au Caire: étudiante en master, elle a participé au programme Euromed Jeunesse (Amel Pain ©EU/Neighbourhood Info Centre)
Entretien avec le Commissaire européen Štefan Füle Les relations de l’Union Européenne avec les partenaires de notre voisinage sont à un tournant, a déclaré le Commissaire européen en charge de l'élargissement et de la politique de voisinage Štefan Füle dans un entretien exclusif avec le Centre d’information pour le voisinage européen.
Comment jugeriez-vous les relations de l'UE avec ses voisins à ce jour? Nos relations avec les partenaires de notre voisinage sont probablement à un tournant. Depuis l'adoption en mai 2011 d'une nouvelle politique européenne de voisinage, basée sur la responsabilité mutuelle et un renforcement du partenariat avec la société civile, l'UE a été rapide et déterminée à poser les nouvelles fondations de cette politique. Nous pouvons donc dire que nous sommes aujourd'hui mieux équipés pour développer nos relations avec chacun de nos partenaires, dans la mesure de leurs propres aspirations, besoins et capacités. Nous nous sommes dotés de nouveaux Instruments et, depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, d'une approche bien plus cohérente. Cette approche porte déjà ses fruits et les premiers résultats sont encourageants. Après des années au cours desquelles peu d’avancées ont été réalisées, la démocratie s’implante de plus en plus dans les pays du voisinage. D'une manière générale, la tendance est à une gouvernance plus responsable et à un respect accru des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans les pays où elles ont été mises en œuvre, les réformes structurelles ont permis de réduire la pauvreté et d'attirer des investissements étrangers, mais sur le plan social, les défis restent importants. La poursuite de l'alignement sur les normes et les critères de l'UE a permis de renforcer les relations commerciales, malgré un climat économique des plus défavorables. L'intensification croissante de la coopération avec l'UE contribue quant à elle à remédier aux problématiques du transport et de l'énergie et permet de s'attaquer aux défis climatiques et de l'environnement. L'UE et ses voisins doivent à présent préserver cette dynamique pour renforcer leurs relations. Vous avez effectué de nombreuses visites dans les pays du voisinage et vous avez ainsi reçu un feedback sur le terrain. Comment l'UE est-elle selon vous perçue par les citoyens de ces pays? Est-elle considérée comme un partenaire honnête et fiable? Loin de moi l'idée de nous auto-encenser mais je pense que l'UE est considérée comme un partenaire fiable et respectueux de ses engagements. Et je ne me base pas seulement sur les opinions exprimées par les gouvernements des pays partenaires mais aussi sur le feedback des acteurs de la société civile que j'ai eu l'occasion de rencontrer à maintes reprises l'année dernière. Ce sentiment positif s’appuie sur des faits : l'UE a fait énormément de chemin au cours de ces douze derniers mois. Permettez-moi de vous citer quelques exemples. Nous avons adapté nos instruments politiques. Nous avons continué à moderniser nos relations contractuelles, nous avons été mandatés pour ouvrir de nouvelles négociations commerciales, nous avons lancé des dialogues sur la mobilité et réorienté et renforcé notre aide financière (600 millions pour soutenir la transition démocratique, le développement économique et les contacts interpersonnels) En élargissant le mandat de la BEI et de la BERD, nous avons par ailleurs ouvert la porte à de nouveaux investissements - substantiels - dans les pays partenaires. Il va de soi que cette dynamique doit se poursuivre. Mais la plupart des pays partenaires se sont d’ores et déjà félicités de la nouvelle politique européenne de voisinage proposée par l'UE, et indiqué leur volonté de poursuivre les réformes économiques et politiques avec une détermination renforcée et de s'associer encore davantage avec l’UE. Quelles sont les priorités dans le Sud à la lumière du printemps arabe ? Comme je l'ai déjà expliqué, l'UE a réagi avec rapidité et détermination aux événements
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«Après des années au cours desquelles peu d’avancées ont été réalisées, la démocratie s’implante de plus en plus dans les pays du voisinage»
«L'UE, plus que tout autre acteur international, doit accompagner et soutenir les transitions qui portent leurs fruits. Partageant elle-même l'histoire et le destin de la Méditerranée»
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historiques dans le Sud de la Méditerranée, comme le montrent les deux communications conjointes de la Commission/de la Haute Représentante sur « Un partenariat pour la démocratie et une prospérité partagée avec le Sud de la Méditerranée », adoptées le 8 mars 2011, qui affirment clairement le soutien de l'UE à l'appel au changement et à des sociétés plus démocratiques et plus ouvertes, associé à une approche incitative (« plus en échange de plus ») afin d'appuyer les réformes politiques, sociales et économiques dans les pays de la région. En outre, la communication sur la revue de la politique européenne de voisinage adoptée le 25 mai 2011 donne de nouvelles orientations à la gestion de ces priorités. Tout en peaufinant son approche en matière de politique de voisinage, mise en avant dans les conclusions du récent Conseil européen des 1-2 mars 2012, l'UE élabore aussi sa réponse régionale aux défis, réponse qui inclut entre autres l'Union pour la Méditerranée, qui vient de succéder à la France à la co-présidence nord. L'UE, plus que tout autre acteur international, doit accompagner et soutenir les transitions qui portent leurs fruits. Partageant elle-même l'histoire et le destin de la Méditerranée, elle ne doit pas craindre les succès électoraux des acteurs politiques inspirés par l'islam. Conformément à notre nouvelle approche, nous nous sommes engagés à : participer à un dialogue politique qui exige la compréhension mutuelle et le respect des valeurs universelles, le fondement même de toute communauté d’individus libres et égaux; • nous attaquer à la situation économique désastreuse dans la région - le principal défi pour les nouveaux dirigeants qui doivent parvenir à créer des emplois et générer de la croissance tout en répondant aux attentes sociales des jeunes ; leur réussite dépendra de notre soutien économique ; • faire face aux problèmes de sécurité et assurer dès lors le succès de la transition politique et économique, en éliminant toutes les menaces et sources d’insécurité ; • imaginer des réponses régionales aux défis régionaux ; d’où un engagement renouvelé de l’UE auprès d’organisations régionales clés, comme la Ligue arabe, l’OIC et l’UMA etc… En ce qui concerne l’Union pour la Méditerranée, l’UE a succédé à la coprésidence française ; quel sera l’impact de ce changement ? La succession de l’UE à la co-présidence nord de l’Union pour la Méditerranée (UpM) témoigne en effet de l’engagement de l’UE à jouer un rôle central en accompagnant les profonds changements dans la région du Sud de la Méditerranée. Depuis le 27 février 2012, date à laquelle les institutions européennes des 27 États membres ont succédé à la co-présidence nord, toutes les activités en rapport avec l’UpM sont examinées, analysées et discutées à l’échelon européen. Les institutions européennes vont s’efforcer de partager avec leurs partenaires du Sud les efforts réalisés par l’UE dans plusieurs domaines d’activités, au bénéfice des habitants de la région et dans un esprit de cohérence, d’uniformité et de partenariat. Il faudra aussi absolument renforcer la coopération sectorielle et réaliser les synergies nécessaires entre cette coopération sectorielle et le travail du secrétariat qui consiste à faire aboutir des projets concrets. Au sein de ce partenariat, quels sont pour l’UE les défis les plus difficiles communs aux voisins de l’Est et du Sud ? Trois défis majeurs, intrinsèquement liés, me viennent à l’esprit. Tout d’abord la résolution des conflits. La recherche d’un règlement pacifique à des conflits qui s’éternisent reste un défi majeur dans tout le voisinage. Mais soyons clairs : c’est d’abord aux parties en conflit d’y trouver une solution en renforçant leurs efforts afin d’aboutir à des accords dans un véritable esprit de compromis. Sinon, les efforts de médiation incessants de la communauté internationale, dans les formats classiques de négociation, resteront vains. Si nous voulons exploiter pleinement toutes les possibilités offertes par l’UpM, les pays concernés doivent consentir des efforts plus crédibles et plus soutenus pour régler les conflits. De son côté, l’UE se tient prête à apporter tout le soutien nécessaire à la mise en œuvre des accords une fois que ceux-ci auront été conclus.
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Bâtir et consolider des démocraties durables est un autre défi majeur. Des avancées ont certes été réalisées mais dans certains pays, il reste un long chemin à parcourir. Les libertés d’expression, d’association et de réunion doivent être pleinement garanties, tant au niveau de la constitution que dans les faits et il faut également mettre en place une réelle culture de respect des droits de l’homme, à tous les niveaux, en particulier une protection contre toutes les formes de discrimination dans la politique et la vie quotidienne. Le contexte deviendra ainsi plus favorable à la société civile, qui pourra jouer son rôle clé d’agent de la démocratisation en soutenant un processus de réforme pérenne et inclusif. Enfin, et c’est là le troisième défi, il conviendra de promouvoir un développement économique inclusif. Le chômage, l’exclusion sociale, l’inégalité et la pauvreté sont au centre des préoccupations des citoyens dans tous les pays. Ces phénomènes comptent parmi les principales causes d’instabilité et d’agitation et il convient d’y remédier pour ancrer dans le long terme le processus de démocratisation. Les pays partenaires doivent donc introduire des réformes et adopter une approche intégrant leurs politiques économiques, fiscales, sociales, de l’emploi et de l’éducation. L’UE est prête à soutenir ces réformes par le bien de mesures ciblées visant à promouvoir la cohésion sociale et l’emploi (en particulier l’emploi des jeunes). Pourriez-vous nous en dire plus sur le principe « plus en échange de plus » - plus de fonds pour plus de réformes - que l’UE met en œuvre dans ses politiques en faveur de ses voisins ? Fautil y voir une conditionnalité accrue du soutien ? Le principe ne se limite pas à faire dépendre l’octroi de fonds de l’introduction de réformes. L’approche « plus pour plus » que l’UE privilégie de plus en plus signifie que seuls les partenaires qui se lancent avec détermination dans des réformes politiques et qui respectent les valeurs communes des droits de l’homme, de démocratie et d’Etat de droit pourront se voir offrir les éléments les plus ambitieux de ce que l’UE peut leur offrir, à savoir l’intégration économique, la mobilité des citoyens et effectivement, un soutien financier plus important. L’UE est le premier bailleur de fonds au monde. L’impact de son soutien à la modernisation dans les pays du voisinage est-il à la mesure de son engagement ? Le soutien de l’UE à la modernisation a un impact considérable, comme en témoigne amplement le bilan de ces vingt dernières années. Les États membres de l’UE ont eux-mêmes réalisé des réformes majeures et consenti d’importants efforts de modernisation. Ils ont donc une vaste expérience à partager avec les pays tiers. Je pense que notre impact n’est pas tant limité par le volume de notre aide financière – une aide généreuse comme le souligne votre question – que par la volonté de nos partenaires à se lancer sur la voie des réformes. Si nous sommes prêts à accompagner nos voisins en les aidant à faire face aux défis auxquels ils sont confrontés, nous ne pouvons pas et ne voulons pas nous substituer à eux.
«Si nous sommes prêts à accompagner nos voisins en les aidant à faire face aux défis auxquels ils sont confrontés, nous ne pouvons pas et ne voulons pas nous substituer à eux»
Comment les politiques de l’UE à l’égard de ses voisins vont-elles évoluer ? Je pense qu’il y a une série de domaines pour lesquels l’UE doit aussi réaliser des progrès importants dans un avenir proche. Nous devons faire davantage pour promouvoir les investissements de l’UE dans les pays partenaires. Nous devons faire avancer l’agenda de la mobilité dans le Sud comme à l’Est du voisinage, entre autres en incitant les États membres de l’UE à utiliser de manière plus systématique les possibilités offertes par le code européen des visas. Nous devons aussi faire de notre mieux pour accélérer le processus d’ouverture de négociations sur une première zone de libre-échange approfondi et global dans le Sud. Les négociations bilatérales en cours sur le chapitre de la libéralisation du commerce des services et l’établissement doivent s’accélérer. La coopération sectorielle doit être renforcée en vue d’aboutir à des résultats concrets dans les prochaines années. Nous devons aussi ouvrir progressivement nos programmes et nos agences à la participation de nos partenaires. La nouvelle Politique européenne de voisinage définit ici la phase finale dans ce domaine, une phase ambitieuse avec une idée concrète des résultats que nous voulons obtenir.
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Programme régional de communication Le Programme régional de communication est financé par l'UE et s’étend de 2011 à 2014. Doté d'un budget global de 14 millions d'euros, il vise à améliorer la connaissance de l'Union européenne et de sa politique de voisinage. Le programme contribue à renforcer la compréhension des politiques menées par l'Union et à mettre en évidence ses activités de coopération dans la région. Il travaille à l'établissement de réseaux de communication durables et vise à renforcer la capacité et les compétences des journalistes dans le domaine des affaires européennes. Il fait suite à une phase précédente du Programme régional d'information et de communication. Pays participants: Arménie, Azerbaïdjan, Biélorussie, Géorgie, Moldavie, Russie, Ukraine (Est) ; Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Territoire palestinien occupé, Syrie et Tunisie (Sud) Le programme couvre trois projets : Centre d'information pour le voisinage européen/EU Neighbourhood Info Centre : www.enpi-info.eu Media Neighbourhood – Projet de formation des journalistes et de réseautage
http://www.facebook.com/MediaNeighbourhood http://www.medianeighbourhood.eu Sondage et veille médiatique dans les pays de l'IEVP (Baromètre du voisinage européen)
http://www.enpi-info.eu/maineast.php?id =405&id_type=10 http://www.euneighbourhood.eu
Des élèves de CM2 de l'Ecole des Apôtres de Jounieh au Liban participent à la présentation d'un CD-ROM éducatif lancé par l'Organisation de protection civile (photo par Antoine Ajoury ©EU/Neighbourhood Info Centre).
La coopération régionale de l’UE vue par les journalistes
La coopération entre l'Union européenne et les pays participant à la politique européenne de voisinage (PEV) s'effectue à deux niveaux. D'abord au niveau politique, avec des réunions où les dirigeants se rassemblent pour décider des domaines politiques à privilégier. Ensuite, au deuxième niveau, il s'agit de traduire ces décisions en actions sur le terrain, en finançant des projets et en offrant un soutien concret aux partenaires qui s'efforcent d'amener le changement et la modernisation dans leur pays. Le Centre d'information pour le voisinage européen / EU Neighbourhood Info Centre, qui fait partie du Programme régional de communication, a visité certains des projets financés par l'UE, les a photographiés et a écrit des articles à leur sujet, en collaboration avec des journalistes et des photographes des pays partenaires. Les journalistes se sont renseignés sur les activités des projets et ont pu s’entretenir avec les bénéficiaires. Ils les ont interrogés sur leur propre expérience, ce qu'ils ont retiré du projet, leurs opinions et leurs réflexions pour l'avenir. De leur côté, les photographes ont capturé le récit de ces personnes à travers leur
« Les journalistes se sont renseignés sur les activités des projets et ont pu s’entretenir avec les bénéficiaires. Ils les ont interrogés sur leur propre expérience, ce qu'ils ont retiré du projet, leurs opinions et leurs réflexions pour l'avenir. De leur côté, les photographes ont capturé le récit de ces personnes à travers leur objectif… ».
objectif. Ce magazine présente des reportages réalisés en 2011-2012 et nous donne un bel aperçu du résultat de la coopération de l'UE dans la région du voisinage. Les reportages sont répartis en quatre grandes catégories : personnes, environnement, culture et économie. Tous les articles sont consultables à la section « Reportages » du site internet du Centre d'information pour le voisinage européen /EU Neighbourhood Info Centre – www.enpi-info.eu – en anglais, français, russe ou arabe, selon le pays. Pays participants: Arménie, Azerbaïdjan, Biélorussie, Géorgie, Moldavie, Russie, Ukraine (Est) ; Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Territoire palestinien occupé, Syrie et Tunisie (Sud)
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Notre réseau de journalistes
Hicham HOUDAIFA – Maroc Journaliste indépendant à Casablanca, il a travaillé à l’ « Hebdomadaire » ou Il écrivait des articles et des reportages sur les droits de l’homme et des faits de société. Entre 1999 et 2003, M. Houdaifa a été correspondant à New York pour le magazine international francophone « Jeune Afrique ». Il collabore actuellement à une série de magazines, sites internet et chaînes télévisées ainsi qu'à des projets de communication financés par l'UE.
Tarik HAFID – Algérie Lauréat du Prix du Journalisme Euromed Heritage en 2007, avec son article « Si la Grande Poste nous était contée », M. Hafid écrit depuis 2002 pour l’un des principaux quotidiens algériens en langue française, « Le Soir d’Algérie ». Depuis 2011 il est formateur auprès de la Fédération International des Journalistes (IFJ). Il a également participé au précédent projet euro-méditerranéen Euromed Info Centre, avec des reportages et des articles.
Lotfi TOUATI – Tunisie Ancien rédacteur en chef du « Quotidien », M. Touati a travaillé avec nous jusqu’à sa nomination à la tête du groupe Dar Assabah. Avant, il avait travaillé comme journaliste et reporter pour les quotidiens tunisiens francophones « L’Action » et « Le Renouveau ». Sa carrière professionnelle l’a amené à participer à plusieurs ateliers sur les affaires européennes. Il enseigne actuellement à l'Université arabe des sciences, à Tunis.
Journalistes collaborant à l’EU Neighbourhood Info Centre.
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Projets en Marche - Voisinage Sud
Dalia CHAMS – Égypte Mme Chams a débuté comme reporter et présentatrice à la télévision. Elle travaille depuis de nombreuses années à l’hebdomadaire égyptien de langue française « AlAhram Hebdo », pages Arts, portrait et Culture ; ainsi qu’à la rubrique sociale du quotidien arabophone Al-Chourouq. Elle a reçu le prix du journalisme Euromed Heritage en 2005.
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Antoine B. AJOURY Liban M. Ajoury est journaliste à « l’Orient Le Jour », quotidien libanais de langue française, depuis 2003. Depuis 2008, il y est directeur de la rubrique « Actualités internationales ». Il a contribué au projet euro-méditerranéen Eurojar en rédigeant plusieurs articles sur la coopération entre l’Union européenne et ses pays partenaires du Sud de la Méditerranée.
Elias ZANANIRI– Territoire palestinien occupé M. Zananiri a déjà 35 années d’expérience dans le monde des médias du Proche-Orient en qualité de reporter, de journaliste, de rédacteur, d’enseignant/formateur, de producteur de programmes radio et télédiffusés et de conseiller en relations publiques. Il est actuellement PDG de MAHARAT PR et Media Talents Empowerment, une agence de conseils en relations publiques et de formation média créée dans le Territoire palestinien en 2005.
Yair QEDAR - Israël Ecrivain et réalisateur freelance, M. Qedar collabore actuellement à plusieurs quotidiens israéliens, parmi lesquels Ha'aretz et Yediot Aharonot. Il produit également des documentaires. Il a aussi écrit des scénarios et réalisé plusieurs productions audiovisuelles et a reçu une mention spéciale du jury pour l'édition 2005 du Prix du journalisme Euromed Heritage.
Mohammad BEN HUSSEIN – Jordanie M. Ben Hussein est correspondant de l’agence de presse italienne ANSA et ANSAmed en Jordanie, où il travaille également comme producteur tv pour Thomson Reuters. Il écrit également pour le « Jordan Times » et rédige des analyses politiques pour le « Lang Institute ». En 2007, M. Ben Hussein a remporté le prix Lorenzo Natali pour la liberté d’expression dans le monde arabe, en Israël et en Iran.
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Société
Le jeune Égyptien Moustapha Makhlouf (C), 28 ans, travaille comme réceptionniste dans une entreprise pétrolière. On le voit se promener rue Al Moizz, à Khan al-Khalil, l'un de ses quartiers préférés du Caire (Égypte), le 14 juin 2011. Moustapha a participé à plusieurs occasions au projet d'échanges de jeunes Euromed. Le projet Euromed Jeunesse III vise à promouvoir la compréhension mutuelle et le dialogue interculturel parmi les jeunes de la région euro-méditerranéenne en encourageant la citoyenneté active et leur sens de la solidarité. Il promeut des activités concrètes, dont des échanges de jeunes Euromed, le service volontaire euro-méditerranéen et des mesures de soutien euro-méditerranéen, en vue du développement d'organisations de jeunesse et d'acteurs de la société civile impliqués dans le travail avec la jeunesse, par le biais de coopérations, de partenariats, de mesures de formation et de l'échange de bonnes pratiques. (Photo par Amel Pain ©EU/Neighbourhood Info Centre)
La coopération est avant tout axée sur les gens
Entretien avec Raffaella Iodice chef d'unité, Programmes régionaux pour le voisinage méridional, EuropeAid
Le partenariat de l'UE avec ses voisins du sud de la Méditerranée repose avant toute chose sur une étroite coopération avec la société civile dans le domaine des droits de l'homme, de la culture, des médias, de la jeunesse et de l'égalité homme-femme. « Nous essayons de dépasser l'approche unique », explique Raffaella Iodice, chef d'unité, Programmes régionaux pour le voisinage méridional à EuropeAid, dans un entretien avec le Centre d'information pour le voisinage européen.
« Nous essayons d'aller au-delà d'une approche unique et non personnalisée. »
Qu'est-ce que l'approche individuelle, « people-to-people » ? Cette approche vise essentiellement à définir des stratégies de développement qui associent les citoyens de nos pays partenaires, à mettre en œuvre des projets au profit des communautés locales et à assurer le suivi des réformes adoptées par les gouvernements. La mise en place d'un solide partenariat avec les citoyens et, plus encore, le soutien à la société civile et la promotion des échanges sont au cœur des principaux documents stratégiques publiés en 2011 par l'UE, « Un partenariat pour la démocratie et la prospérité partagée avec les pays du sud de la Méditerranée » et « Une stratégie nouvelle à l'égard d'un voisinage en mutation ». Nous mettons ainsi en œuvre plusieurs programmes régionaux qui permettent, par exemple, à des journalistes, des organisations de la société civile ou des syndicats de discuter des réformes démocratiques ou qui aident des ONG à ancrage local à déployer des initiatives de développement au bénéfice de certaines franges de la population, comme les jeunes ou les femmes. Le développement des capacités et le transfert de connaissances sont des aspects clés de la coopération de l'UE. Que peut-on en attendre ? La priorité sera toujours de développer le capital humain. Nous sommes convaincus qu'une fois leurs capacités renforcées, les gens peuvent devenir des acteurs du développement et des moteurs du changement, et prendre en même temps leur avenir en main. Le développement des capacités peut donc maximaliser l'impact de notre coopération dans des pays qui sont ainsi mieux armés pour relever les défis sociaux, économiques et politiques. En soutenant les acteurs appropriés, nous pouvons promouvoir la participation active de l'ensemble des citoyens et jeter ainsi les bases de sociétés inclusives. La dynamique ainsi créée est particulièrement importante dans le sud de la Méditerranée, une région marquée par une pression démographique croissante – plus de 60 % de la population ayant ainsi moins de 30 ans. Ces jeunes souhaitent être impliqués et pouvoir façonner eux aussi l'avenir de leur pays.
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On retiendra malheureusement aussi du printemps arabe des violations des droits de l'homme : que fait l'UE pour encourager les pays partenaires à renforcer et à respecter les libertés fondamentales ? Les droits de l'homme et la démocratie sont des éléments clés de la bonne gouvernance et du développement durable. Ces principes guident toutes les actions de l'UE et sont à la base de la nouvelle politique européenne de voisinage. Le printemps arabe a montré une fois de plus que les libertés ne peuvent être bafouées et que l'UE doit soutenir les citoyens qui exigent dans leurs pays des libertés que nous considérons comme acquises ici en Europe. A cet égard, l'UE est fière de sa tradition de soutien aux pays en transition, un soutien essentiellement déployé par le biais de l'Instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme (IEDDH). A côté de cela, nous nous sommes aussi récemment associés au Conseil de l'Europe – le gardien des droits de l'homme – pour lancer un ambitieux programme de soutien à la transition dans les pays du sud de la Méditerranée, notamment dans le domaine de l'indépendance du système judiciaire et la lutte contre la corruption. Mais, comme nous le constatons, chaque pays connaît une évolution différente et les tensions entre les appels au changement et les forces de résistance sont loin d'avoir disparu. L'histoire du printemps arabe est encore en cours d'écriture. Il ne suffit pas de renverser un régime despotique ; progresser sur la voie de la démocratie et des droits
« Nous sommes convaincus qu'une fois leurs capacités renforcées, les gens peuvent devenir des acteurs du développement et des moteurs du changement, tout en prenant leur avenir en main. » 13
de l'homme prend du temps, et le rythme du changement est étroitement lié à la situation particulière d'un pays. Seules des forces internes peuvent en fin de compte porter le processus de démocratisation. L'UE a considérablement accru son soutien à la société civile : de quels instruments ces projets bénéficient-ils ? La société civile est devenue un moteur du changement. Des sociétés civiles dynamiques sont essentielles pour les États démocratiques. Et dans certains pays où les possibilités de travailler avec les autorités nationales ou locales sont très limitées, comme en Syrie où la coopération avec le gouvernement est suspendue depuis le mois de mai 2011, la coopération ne peut se faire que par le biais des organisations de la société civile. L'UE doit donc absolument coopérer avec ces organisations afin qu'elles puissent participer au processus de décision et mettre en œuvre les programmes de développement. Le mécanisme de financement pour la société civile, créé en 2011, est un exemple pratique de notre engagement. Cet instrument a pour principal objectif de renforcer les organisations de la société civile et de leur permettre de devenir de véritables acteurs de la démocratisation en encourageant leur participation à l'élaboration des politiques et en développant leurs capacités de plaidoyer, de mise en réseau et de suivi. Dans sa première phase 2011, cet instrument a eu pour principal objectif de nous permettre de réunir davantage d'informations sur les besoins de ces organisations et d'améliorer leurs capacités à promouvoir la réforme et à améliorer la responsabilisation. A présent doté d'un budget de 22 millions d'euros en faveur du sud du voisinage (pour la période 2012-2013), le mécanisme de financement pour la société civile s'attaque à des objectifs plus ambitieux : le renforcement de la participation de la société civile dans le processus d'élaboration des politiques et de son rôle de surveillance. Enfin, n'oublions pas notre soutien au Fonds européen pour la démocratie, qui vise à aider les acteurs du changement à accéder plus facilement aux fonds de l'UE. Ce fonds offrira un mécanisme de financement flexible et rapidement déployable, en particulier pour les organisations qui tentent de travailler dans un contexte politique très instable. Telle sera la valeur ajoutée du Fonds européen pour la démocratie : encourager une « démocratie profonde et durable » dans les pays et les sociétés en transition qui se battent pour la démocratie en complétant le soutien déjà déployé par des instruments existants comme l'Instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme (IEDDH), l'instrument de stabilité, les acteurs non-étatiques et les autorités locales dans le développement (programme thématique ANE-AL), et le mécanisme de financement pour la société civile. Dans les pays du sud de la Méditerranée, le rôle des médias est en train de changer, et très rapidement. Que fait l'UE pour soutenir la liberté de la presse et un journalisme de qualité ? 2011 a été une année de changement radical pour le fonctionnement des médias dans la région. Dans le même temps, nous avons assisté à l'émergence d'un véritable « journalisme citoyen », avec la diffusion d'informations sur le web.
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« Ces jeunes souhaitent être impliqués et façonner eux aussi l'avenir de leur pays. »
Avec un de nos projets régionaux, Media Neighbourhood, nous soutenons les médias en organisant des formations et en encourageant la mise en réseau de journalistes, rédacteurs et propriétaires de moyens de communication. Notre objectif est de renforcer les capacités journalistiques professionnelles dans le voisinage, notamment dans le domaine de l'indépendance des médias et les médias en ligne, mais aussi de mener des actions de sensibilisation à l'éthique des médias et au journalisme d'investigation impartial. Au cours d'une période de trois ans, le projet organisera 108 événements auxquels participeront 1 260 journalistes et 500 étudiants en journalisme. Mais nous devons dans le même temps renforcer le cadre institutionnel. Nous sommes donc en train de lancer un nouveau programme afin de soutenir le processus de transformation des médias. « Média et culture pour le développement dans la région méditerranéenne » sera axé sur le renforcement des capacités et la mise en réseau des régulateurs des médias et favorisera dans le même temps la transition dans ce secteur afin que les médias publics ne soient plus un instrument de propagande aux mains de l'État mais une source fiable d'informations impartiales. L'UE soutient l'égalité entre les femmes et les hommes dans la région. Quelles sont les difficultés rencontrées ? Les changements qui ébranlent la région offrent aux femmes une véritable chance de faire avancer leurs droits. Pourtant, des risques de retour en arrière existent aussi. L'histoire récente nous rappelle malheureusement que l'occupation massive de l'espace public par les femmes durant les révolutions ne leur garantit nullement un rôle dans les organismes politiques des nouveaux régimes. Même si la situation des femmes varie d'un pays à l'autre, elles voient partout leurs droits menacés. Les gouvernements de la région tentent de les exclure de la vie publique. En outre les femmes subissent aussi la discrimination et les violences de groupes extrémistes et des forces de sécurité, qui restent impunies. Alors que les forces conservatrices semblent regagner du terrain, il est essentiel de prendre des mesures pour faire de l'égalité des droits entre les femmes et les hommes un des fondements mêmes des sociétés démocratiques. L'UE s'est engagée à promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes en l'intégrant dans toutes les actions prises à la suite du printemps arabe. En effet, au-delà de son soutien direct, la Commission européenne a intégré la dimension du genre dans tous ses programmes, notamment dans ses programmes axés sur des thèmes comme les droits de l'homme, l'éducation, la justice ou la jeunesse. Le soutien de l'UE en faveur des femmes dans les
pays du sud de la Méditerranée s'élève actuellement à 75 millions d'euros, dont 63 millions pour le soutien bilatéral et 12 millions au niveau régional. L'UE a en effet adopté récemment un programme régional à hauteur de 7 millions d'euros axé sur le renforcement du pouvoir politique et économique des femmes dans la région. L'objectif est d'aider les femmes marginalisées à avoir davantage accès à la vie économique et publique. Pourquoi attacher autant d'importance au secteur culturel dans la région et quelles ont les perspectives d'avenir dans ce domaine ? Cela fait maintenant de nombreuses années que nous soutenons le secteur culturel au travers de deux grands programmes : Euromed Audiovisuel et Euromed Heritage. Outre son rôle dans le dialogue interculturel, la culture est aussi un vecteur clé du développement économique. Elle aide également à promouvoir les différentes formes de liberté d'expression. Nous soutenons ce secteur depuis 15 ans et les organisations de la société civile reconnaissent que cette aide les à encouragées à se faire entendre, même lorsque les régimes autocratiques étaient encore en place. Pour nous, le patrimoine de la région ne se limite pas aux pyramides. Euromed Heritage encourage la protection du patrimoine culturel matériel (des hammams aux archives audiovisuelles) et immatériel. Outre l'ouverture de nouveaux débouchés touristiques et l'impact positif sur la création d'emplois et la génération de revenus, il aide aussi les populations locales à s'approprier leur culture.
Pour en savoir plus : DG EuropeAid – Voisinage méridional – L'échange culturel et social dans la région euro-méditerranéenne EU Neighbourhood Info Centre : pages thématiques : Audiovisuel et Médias Société civile et autorités locales Culture Femmes Jeunesse
Projets en Marche - Voisinage Sud
SOCIÉTÉ > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
Femmes à la recherche de liberté et de respect Elles ont été formées et responsabilisées. Aujourd’hui, elles gèrent des petits commerces tels que des boutiques de chaussures, et sont même professeurs d’aérobic dans des salles de gym pour femmes. Des palestiniennes de six villages de Cisjordanie ont été invitées à suivre un itinéraire pour leur accomplissement personnel. Elles ont réussi, et ce malgré l’opposition venant souvent des propres membres de leurs familles. Notre journaliste en a rencontré quelques-unes parmi celles qui ont décidé de relever le défi de changer leur vie.
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n Femmes palestiniennes des villages autour d’Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, participant à la
formation “Women Can Do Change” (Les femmes peuvent emmener le changement ») à Hébron
RAMALLAH - « J’ai gagné ma liberté et le respect des autres […] » déclare Sundus Hasan Ali Halabi, jeune femme palestinienne de 27 ans. Au départ, lorsqu’elle a pris la décision de participer à un cours de formation offert par le centre communautaire local de sa ville de Beit Rima, elle a eu une réaction hostile de la part de sa famille, venant plus de chez son frère que de son propre mari. Aujourd’hui, elle dit que « la situation s’est beaucoup améliorée, et qu’elle se sent une autre personne ». « Mon frère m’interdisait de passer une seule minute dans un magasin où des hommes de tous âges se rendraient chaque jour. Il était opposé à cette idée. Mais aujourd’hui, il est devenu un client régulier » ajoute Sundus. Près de 6.000 palestiniens vivent dans le village de Beit Rima, à quelques 30 kilomètres au Nord-Ouest de Ramallah. Le mari de Sundus souffre de problèmes dans la moelle épinière qui l’empêchent de travailler régulièrement. Elle a donc décidé de participer aux apports financiers du couple afin de subvenir aux besoins de leur enfant de six ans. Le centre pour les Femmes et les Jeunes de Beit Rima lui a offert le genre d’opportunités dont elle avait besoin. En effet, le centre avait justement débuté des cours de formation visant à responsabiliser les palestiniennes vivants dans les zones rurales. Sundus y a choisi les cours de comptabilité et de gestion. Quelques mois plus tard, le centre a créé un magasin de chaussures dans lequel les femmes locales pouvaient travailler. Au début, Sundus s’y est inscrite en tant que bénévole. Le mois dernier, elle a commencé à recevoir un salaire d’environ 100 euros par mois. Aujourd’hui, Sundus n’est plus la femme confinée qu’elle a toujours été. Elle a changé d’apparence et se sent mieux. « Le salaire est symbolique pour le moment, » dit-elle, « mais il ne s’agit que du début et puis, côté personnel et social, je sens que j’ai accompli quelque chose, » a-t-elle ajouté. 15
SOCIÉTÉ > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
«Je profite de chaque moment passé au centre. Je sens que je suis utile à la communauté et plus particulièrement aux femmes de mon village» Six centres créés à travers la Cisjordanie Six centres ont été créés à travers la Cisjordanie grâce à un financement de l’Union Européenne en partenariat avec le fonds de Coopération pour le Développement des Pays Emergents (Cooperazione per lo Sviluppo dei Paesi Emergenti, COSPE) basé à Florence en Italie, ainsi que l’Union de la Jeunesse Palestinienne dans les Territoires Occupés Palestiniens. Leur objectif est de former les jeunes et les femmes à gérer des activités génératrices de revenus sans avoir recours à des donations. Les centres sont situés dans les villages ruraux de Beit Rima, Mazare' Alnobani, Silwad, Deir Istya, Kobar and Aboud, à proximité de la barrière de séparation en Cisjordanie ou entourés de colonies israéliennes. Les activités qui ont été lancées sont le magasin de chaussures et deux salles de gym réservées aux femmes dans lesquelles des jeunes des centres communautaires ont été formées à être monitrices. Dorénavant, les femmes de la région peuvent aller faire de l’exercice ou
n Femmes palestiniennes faisant de l’aérobic au Centre de fitness pour
femmes d’Al-Amal dans le village de Kaubar, au Nord de Ramallah
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n Seules les femmes peuvent participer aux activités de ce centre
participer à des cours d’aérobic. Pour le moment, les revenus générés suffisent juste à payer les charges et les salaires des monitrices, mais dans un futur proche, les centres devraient dégager plus de rentrées qui permettraient de financer d’autres activités. Chiara Carmignani, la représentante du COSPE en Palestine passe le plus clair de son temps entre les six centres où elle rencontre les bénéficiaires et coordonne le travail avec les administrateurs. « Il est vrai que nous rencontrons beaucoup de défis. Nous devons faire face à des difficultés de toutes sortes mais je ressens l’impact de notre action et je vois le changement se concrétiser. Cela est incroya-
blement gratifiant. » Le COSPE travaille en étroite collaboration avec l’Union de la Jeunesse Palestinienne (Palestinian Youth Union – PYU) qui a été créée au début des années 1990. Rawan Amria, qui dirige le bureau du PYU à Ramallah, dit que l’Union a été mise en place à un moment où la société entière vivait le premier soulèvement palestinien (Intifada). Rawan, qui est titulaire d’une licence en Anthropologie Appliquée aux Communautés et au Travail des Jeunes obtenue à Londres, est heureuse de ce qu’elle fait. « Il s’agit plus de ce que l’on fait pour les autres plutôt que ce que l’on gagne pour vivre », déclare-t-elle. Des cours d’Anglais, d’informatique et de gestion Le COSPE a lancé en collaboration avec le PYU plusieurs études d'évaluation afin d’identifier ce dont a besoin la communauté locale. Cela a conduit le Centre de Mazare’ Alnobani à organiser des classes de 30 heures de conversation en Anglais pendant lesquelles les jeunes ont été formés à tenir des discussions avec les donateurs anglophones qui financent différents projets dans les zones rurales. Il a également proposé des cours d’informatique et de gestion de projets et a mis en place un programme spécial visant à aider les élèves du secondaire à passer leur examen de fin d’études. Enfin, le centre a offert des cours de karaté ainsi qu’une journée de divertissement pour les enfants. Le Centre Communautaire de Beit Rima a quant à lui opté pour plusieurs ateliers en gestion de projet, alimentation des enfants et santé publique. Cela a également été très utile, notamment parce que le village dispose de plusieurs centres dédiés à l’agriculture et aux services publiques, mais aucun spécialement tourné vers les femmes et enfants. Muna Rimawi est la coordina-
«Il s’agit plus de ce que l’on fait pour les autres plutôt que ce que l’on gagne pour vivre» Projets en Marche - Voisinage Sud
SOCIÉTÉ > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
n Le Centre Communautaire de Beit Rima a créé un magasin de chaussures dans lequel les femmes peuvent travailler
trice du centre communautaire local totalement équipé disposant d’une bibliothèque et de six ordinateurs. Muna, qui est titulaire d'un baccalauréat en science politique, a travaillé en tant que bénévole dans le centre depuis 2006. Elle est également conseillère en activités extrascolaires dans l’école voisine pour filles. Pleine d’énergie, elle est pressée de terminer l’interview car elle doit courir vers un autre rendezvous. Elle prend tout de même le temps de faire passer son message clé. «Je profite de chaque moment passé au centre. Je sens que je suis utile à la communauté et plus particulièrement aux femmes de mon village – dit-elle à ce propos. Et de conclure – Cela me fait plaisir lorsque les femmes terminent leur cours et démarrent un nouveau travail ou un commerce. Cela est
profondément gratifiant pour moi. Pour elles, il s’agit d’une victoire.» Textes par Elias Zananiri Photos par EPA and COSPE ©EU/Neighbourhood Info Centre
«Il est vrai que nous rencontrons beaucoup de défis. Nous devons faire face à des difficultés de toutes sortes mais je ressens l’impact de notre action et je vois le changement se concrétiser. Cela est incroyablement gratifiant»
L’habilitation des femmes et des jeunes de Cisjordanie et des zones rurales autour des Centres Communautaires Renforcer la cohésion sociale et le processus démocratique dans les Territoire Palestinien Occupé en plaçant les femmes et les enfants en tant qu’agents du changement Pays participant: Territoire Palestinien Occupé Durée: 2010 - 2012 Budget: 317,107.88 euros Objectif: Encourager la promotion sociale des femmes et des enfants afin de construire une société plus équitable et démocratique à travers le soutien de 6 centres communautaires dans 6 villages de Cisjordanie Pour en savoir plus: Egalité des sexes: Cisjordanie, Gaza et l’UE (Anglais) http://eeas.europa.eu/delegations/westbank/documents/news/20110304_investinginpeople_en.pdf Société civile et Autorités Locales: Portail Thématique de l'EU Neighbourhood Info Centre http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=14&lang_id=469
n Le Centre Communautaire de Beit Rima a lancé des cours de formation pour les femmes Palestiniennes
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Galerie Photo de l'EU Neighbourhood Info Centre http://www.enpi-info.eu/list_images_ med.php?id=661&iden=661
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SOCIÉTÉ > JORDANIE
À l’écoute de ce que les jeunes ont à dire Les programmes de l’UE en faveur de la jeunesse construisent des ponts et relient ainsi les deux rives de la Méditerranée. Raed Ghareeb, d’Amman en Jordanie, est devenu instructeur en résolution de conflit après avoir rejoint un programme euro-méditerranéen. Il a depuis fondé une ONG centrée sur les besoins de la jeunesse. Chaque année, des milliers de jeunes des deux rives de la Méditerranée se rencontrent et échangent leurs expériences. Ce réseau qu’ils tissent est porteur d’espoir pour l’avenir des relations euro-méditerranéennes.
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n Étudiants de l’Université de Jordanie
AMMAN - « Il y a tant de pays d’Europe qui ont été confrontés, pendant des dizaines d’années à des troubles provoqués par des différences sociales et religieuses avant que ce continent ne devienne ce qu’il est aujourd’hui. Cette expérience est pour nous une chance d’apprentissage que nous devons saisir. » Regardant à travers la fenêtre de son bureau, à Amman-Ouest, Raed Ghareeb – ex-participant à un programme d’échange EuroMed Jeunesse et jeune activiste – rêve d’un avenir où les jeunes de son pays joueront un rôle déterminant en aidant la Jordanie à relever une multitude de défis politiques et économiques. Ghareeb a créé une ONG qu’il a baptisée « Bouthour » (graines), axée sur les jeunes hommes : « J'ai constaté l’absence de programmes pour étudiants universitaires », explique-t-il, « j’ai ainsi voulu créer et faire quelque chose dans le domaine de la résolution des conflits, une compétence que je maîtrise depuis que j’ai participé au programme euro-méditerranéen. » Le programme EuroMed Jeunesse – financé par la Commission européenne à hauteur de 5 millions d’euros pour la période 2010-2013 – entend encourager la compréhension mutuelle entre les jeunes de la région euro-méditerranéenne en luttant contre les préjugés et les stéréotypes et en encourageant la citoyenneté active. Un autre objectif est de contribuer à l’élaboration de politiques de la jeunesse dans la région méditerranéenne. Des échanges de jeunes, des programmes de formation et des services de volontariat sont organisés à travers la région euro-méditerranéenne. Ces activités s'adressent aux jeunes et aux organisations nationales. Projets en Marche - Voisinage Sud
SOCIÉTÉ > JORDANIE
« De nombreux pays d’Europe ont été confrontés pendant des dizaines d’années à des troubles, avant que ce continent ne devienne ce qu’il est aujourd’hui. Cette expérience est pour nous une chance d’apprentissage que nous devons saisir. »
Il s’agit du quatrième programme Jeunesse financé par l’UE : au cours de ces dix dernières années, des milliers de jeunes des deux rives de la Méditerranée ont profité de cette expérience qui a changé à jamais leur vie et celle de ceux qui y ont participé. Par exemple celle de Raed Ghareeb, devenu formateur en résolution de conflit car il est convaincu que les hommes et les femmes des deux rives de la Méditerranée doivent être exposés à une culture fondée sur le dialogue, la tolérance et le respect des droits humains. Ils doivent apprendre à lutter contre la xénophobie et les stéréotypes. Augmentation des violences sociales chez les jeunes Ghareeb est citoyen d’un pays dont la société sait ce que tolérance envers la diversité signifie. Pendant des années, la Jordanie, pays stable, a joué un rôle clé en absorbant les vagues successives de refu-
n Participants au programme Jeunesse financé par l’UE.
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giés quittant leur pays pour se mettre à l'abri : des Circassiens, des Arméniens et des Tchétchènes au début du 20ème siècle, et plus tard des Palestiniens et des Libanais et à présent des Irakiens. La présence de dizaines de tribus jordaniennes renforce encore la complexité de cette société qui est devenue un melting pot de races et de religions. Mais la Jordanie doit aujourd'hui faire face à une grave crise économique, encore aggravée par l'absence de ressources énergétiques et l'instabilité politique dans les pays voisins. Plus grave est le phénomène de violences sociales chez les jeunes, qui représentent 70 % de la population. Ce phénomène prend de plus en plus d’ampleur. Selon une étude publiée récemment par un groupe d’étudiants universitaires baptisé « abahtouna » (« Vous nous avez tués »), au moins 37 affrontements impliquant des milliers d’étudiants ont éclaté en
2010, provoquant la mort d’un étudiant universitaire et faisant des dizaines de blessés. Pour certains experts, l’absence de politiques de la jeunesse pourrait être à l’origine de ce phénomène. Renforcement de pouvoir pour les jeunes Pourtant, les responsables gouvernementaux affirment que la politique consiste à présent à exploiter pleinement le potentiel des jeunes hommes et des jeunes femmes, afin de lutter contre la récession économique mondiale et la montée des extrémismes. Et de fait, la Jordanie a vu dans le programme Jeunesse financé par l'UE une chance unique de mener une politique de renforcement de pouvoir des jeunes qui vise entre autres à les rapprocher des jeunes Européens. Ali Bibi, conseiller auprès du ministre en charge du développement politique et directeur du programme Euromed Jeunesse III, est catégorique : « Il est essentiel d'élaborer une stratégie permettant d’exploiter la capacité de notre jeunesse à poursuivre la dynamique de réforme au sein du Royaume », explique-t-il. « Depuis la mise en place du ministère du développement politique, nous avons ouvert un dialogue avec toutes les couches de la société, notamment les jeunes, afin qu’ils puissent faire entendre leur voix. » Une des organisations à avoir soumis un
« Les jeunes du Proche-Orient et d’Afrique du Nord ont été oubliés par les politiques. Ce programme est un instrument destiné à leur donner du pouvoir. » 19
SOCIÉTÉ > JORDANIE
« Au moment où nous nous rapprochons de l’UE, en termes d’accords politiques, nous devons veiller à ce que des citoyens des deux rives de la Méditerranée contribuent directement à l'amélioration de cette relation. Dans le cas contraire, ces accords n'ont aucun sens » dossier en vue de bénéficier de la quatrième phase du programme d'échange lancé en 2011 est le Centre al Hayat, dirigé par Amer Bani Amer, qui estime que les enseignements de ces programmes d'échange sont particulièrement précieux. « Au moment où nous nous rapprochons de l’UE, en termes d’accords politiques, nous devons veiller à ce que des citoyens des deux rives de la Méditerranée contribuent directement à l'amélioration de cette relation. Dans le cas contraire, ces accords n'ont aucun sens », explique Banir Amer, dont l'organisation a accueilli un groupe de jeunes activistes de l’UE dans le cadre du n Participants au programme Jeunesse financé par l’UE
oubliés par les politiques. Ce programme est un instrument destiné à leur donner du pouvoir », explique Qurie, qui a elle-même été bénéficiaire d’un programme d’échange de jeunes. Selon Ms. Galal, ces programmes pourraient marquer un nouveau départ pour les jeunes de sa région. « De nombreux bénéficiaires sont devenus instructeurs ou ont organisé leurs propres programmes d'échange en mettant en place des réseaux avec des jeunes européens participants. » n Amer Bani Amer
projet « Développement durable ». Bani Amer explique que grâce à ce programme, des activistes ont pu identifier quelques-uns des principaux défis environnementaux auxquels doit faire face la Jordanie, notamment la sécheresse, la pollution et d'autres phénomènes peu connus des jeunes européens. « Si nous voulons que des personnes viennent nous aider, nous devons d'abord être sûrs qu'ils connaissent nos problèmes », conclut-il. Dua’a Qurie, ancienne directrice du programme en Jordanie, de même que Gehad Galal, nouvelle chef d’équipe, expliquent que ce programme d’échange a contribué à changer la vie de bien des gens. « Les jeunes du Proche-Orient et d’Afrique du Nord ont été
Textes par Mohammad Ben Hussein Photos par Centre Al Hayat, Mohammad Ben Hussein ©EU/Neighbourhood Info Centre
EuroMed Jeunesse IV http://www.euromedyouth.net/ Vise à soutenir et à renforcer la participation et la contribution des organisations de jeunesse et des jeunes de la région euro-méditerranéenne au développement de la société et de la démocratie tout en encourageant le dialogue et la compréhension mutuelle. Pays participants Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Territoire palestinien occupé, Syrie, Tunisie Durée: 2010 - 2013 Budget: 5 millions d’euros Objectifs: Ce programme vise à stimuler et encourager une compréhension mutuelle entre les jeunes au sein de la région euro-méditerranéenne, à lutter contre les stéréotypes et les préjugés, ainsi qu'à valoriser le sens de la solidarité chez les jeunes en faisant la promotion active de la citoyenneté. Il cherche également à contribuer au développement de politiques destinées à la jeunesse dans les pays partenaires méditerranéens. Pour en savoir plus: Euro-Med Jeunesse IV, fiche et actualités http://www.enpiinfo.eu/mainmed.php?id=335&id_type=10&la ng_id=469 EU Neighbourhood Info Centre – Page Web « Jeunesse » http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=13&lang_id=469
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Projets en Marche - Voisinage Sud
SOCIÉTÉ > EGYPTE
J’ai appris à être citoyenne à part entière n Iman Gamal participe au programme Euromed Jeunesse
Ayant à peine 30 ans ou un peu moins, les jeunes qui fréquentent le YDC (centre de développement pour les jeunes) aspirent à être « citoyen chez soi ». Ils cherchent refuge dans le champ du développement et les méthodes d’éducation non-formelle, acquises entre autres à travers le programme européen EUROMED Jeunesse.
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CAIRE – Ici, on se retrouve au propre comme au figuré. Les rêves fusionnent, dans ces locaux sobres du YDC (à l’origine, acronyme du Centre de développement pour les jeunes), dans la banlieue cairote de Madinet Nasr. On se sent à l’aise, on travaille ou étudie tout au long de la journée, et l’on vient ici le soir pour respirer et rompre avec le décor de carton auquel sont condamnés pas mal de jeunes gens. Un vent frondeur flotte sur les lieux. Ahmad Gamal, l’un des six fondateurs du centre il y a huit ans environ, se plaît à aider tout un chacun à penser son avenir différemment, à se redécouvrir. Le matin, il est « développeur informatique et fier de l’être », bougeant d’une multinationale à l’autre, optant toujours pour « celui qui paie plus ». Et sporadiquement le soir, dans les locaux du centre, il peut se permettre de prêter conseil, de chuchoter à Moustapha Makhlouf (28ans) qu’il devra se pencher sur quelque chose d’artistique et sacrifier son poste de réceptionniste
dans une compagnie pétrolière. C’est son hobby de montrer aux autres comment faire le point sur leurs aptitudes et compétences. Un monde qui s’ouvre devant toi Les deux jeunes hommes se connaissent depuis quelques temps, précisément lorsque Moustapha a voulu participer, via le YDC, au programme d’échange proposé par le programme européen Euromed Jeunesse, en 2004. « Ce qui m’a attiré d’abord vers ce centre, c’était l’idée de rencontrer des inconnus, de voyager… moi qui avais déjà commencé à correspondre avec des étrangers pendant l’adolescence ». Après, c’est tout un autre monde qui s’est ouvert à Moustapha. En Estonie, il a appris à communiquer avec autrui, même si l’on ne parle pas la même langue ; « les mimes et gestes étaient plutôt marrants », comme il le dit pour évoquer le programme d’éducation non-formelle suivi en Estonie, sous le signe de « l’harmonie Nord-Sud ». 21
SOCIÉTÉ > EGYPTE
« Les programmes Euromed Jeunesse sont une belle manière de commencer. Car pendant sept ou dix jours, on exécute un projet, avec des partenaires méditerranéens…» n Les Égyptiens Iman Gamal (D), son frère Ahmad Gamal (centre) et Moustapha Makhlouf (G) s'apprêtent
à partir après une discussion sur leurs expériences respectives en matière de participation au projet d'échanges de jeunes Euromed, lors d'une interview au Centre de développement de la jeunesse.
« Il y a six ans, j’ai lancé un e-groupe : Euromed for Youth, maintenant il regroupe quelque 2300 associations, sans le moindre effort »
À travers un autre programme, Peace bag, à Barcelone, il a joué au casque bleu, pour faire la paix avec son entourage. Et d’un voyage à l’autre, il atterrit plusieurs fois en Turquie, « avec ses mosquées, chants de muezzin et son côté tout à fait à l’occidental ». Ce mélange inextricable l’éprend, mais aussi le rend jaloux. Car le pays
occupe le 14e rang mondial parmi les pôles d’attraction touristique. L’Egypte n’en est pas là ; il est navré. Une idée lui frôle alors l’esprit : concevoir un guide, faisant la promotion touristique de l’Egypte autrement, soi-disant de manière plus artistique et originale. En attendant, il garde les détails pour lui, et continue à
n Le jeune Égyptien Moustapha Makhlouf, 28 ans, travaille comme réceptionniste dans une entreprise
pétrolière. Il pose pour une photo rue Al Moizz, à Khan al-Khalil, l'un de ses quartiers préférés du Caire.
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Projets en Marche - Voisinage Sud
SOCIÉTÉ > EGYPTE
frère en train de faire sa prière, « j’ai appris à être citoyenne à part entière ». Du coup, ils ont tous fait acte de présence à Tahrir.
« C’est surtout la classe B, et non pas la A Premium, qui participe à ce genre d’activités. On se passe l’information de bouche à oreille, et du coup on recrute dans nos sillages » n Iman Gamal, étudiante en master, ayant
participé au programme Euromed Jeunesse
faire du volontariat à travers le centre, qui ne se limite pas aux activités d’échange Euromed. Celles-ci constituent, selon Ahmad Gamal et les amis, un bon tremplin pour s’impliquer davantage dans la société civile et le développement humain. « À la faculté de pharmacie, Université Al-Azhar, en quatrième année, on était six à bénéficier d’un fonds Européen de 35.000 EUR, gérant un programme sur les contes, miroir de la culture, dans le cadre de nos activités estudiantines », souligne Gamal. C’était en 2002. L’année d’après, les six vétérans ou « anciens gardes », comme il les surnomme, décident de fonder leur propre ONG, Développement sans frontières, dont le YDC fait actuellement partie. « On avait acquis confiance, une fois que l’on a réussi à gérer un fonds de 35 mille euros ! Les programmes Euromed Jeunesse sont une belle manière de commencer. Car pendant sept ou dix jours, on exécute un projet, avec des partenaires méditerranéens. Il y a six ans, j’ai lancé un e-groupe : Euromed for Youth, maintenant il regroupe quelque 2300 associations, sans le moindre effort », ajoute Gamal, très impliqué dans cette histoire, ainsi que sa sœur Iman, laquelle prépare un master en radiologie et donne des cours gratuits de sensibilisation politique, usant des mêmes méthodes d’apprentissage non-formel, acquis par les précédents programmes d’échange. Projets en Marche - Voisinage Sud
Un monde qui ressemble à celui des blogueurs Sur place, on se sent comme dans un cocon de développement ; des jeunes qui se sont retirés dans leur coquille pour s’ouvrir au reste du monde et se coacher les uns les autres, sans penser quitter. Un monde qui ressemble à celui des blogueurs où les jeunes avaient leur propre existence, depuis 2005, dans une arène fermée où leurs aînés n’oseraient pas mettre les pieds. Une belle issue pour une population juvénile, zappée par l’ancien régime, constituant pourtant un poids électoral immense (soit 35,5% des habitants, avec un taux de chômage de 14,5% pour les 15-29 ans). « C’est surtout la classe B, et non pas la A Premium, qui participe à ce genre d’activités. On se passe l’information de bouche à oreille, et du coup on recrute dans nos sillages », lance Mohamad Attia (28 ans). Cadre marketing dans plusieurs grosses boîtes, cela fait deux ans qu’il n’a plus le temps de participer aux programmes d’échange, mais il continue à offrir un entraînement gratuit pour ceux qui espèrent se lancer sur le marché du travail, sans en avoir les compétences. À la différence de leurs références, chacun d’eux exprime quasiment la même idée à sa manière : on n’est plus dans un univers clos et timide, ou comme le résume bien Iman Gamal, aux côtés de son
Texte par Dalia Chams Photos par Amel Pain, ©EU/Neighbourhood Info Centre
EuroMed Jeunesse IV http://www.euromedyouth.net/ Francais Ce programme vise à soutenir et à renforcer la participation et la contribution des organisations de jeunesse et des jeunes de la région euro-méditerranéenne au développement de la société et de la démocratie tout en encourageant le dialogue et la compréhension mutuelle. Pays participants Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Territoire palestinien occupé, Syrie, Tunisie Durée: 2010 - 2013 Budget: 5 millions d'euros Objectifs: Ce programme vise à stimuler et à encourager la compréhension mutuelle entre les jeunes de la région euro-méditerranéenne, à lutter contre les stéréotypes et les préjugés et à promouvoir la solidarité entre les jeunes en soutenant la citoyenneté active. Il entend également contribuer à l’élaboration de politiques de la jeunesse dans les pays méditerranéens partenaires. Il fait suite au programme Euromed Jeunesse III mis en œuvre entre 2005 et 2009 Pour en savoir plus: Fiche projet EU Neighbourhood Info Centre > http://www.enpiinfo.eu/mainmed.php?id=335&id_type=10& lang_id=469 Portail Thématique: Jeunesse > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=13&lang_id=469
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SOCIÉTÉ > MAROC
Une grille informatique à disposition de la science
n Etudiants dans le laboratoire : leurs ordinateurs sont reliés au réseau européen
Médicine nucléaire, radiothérapie, radiologie : les possibilités d’utilisation de la grille de calcul pour la recherche scientifique Eumedgrid – et de son interface maroquine MaGrid – sont innombrables. Grace à ce réseau, les scientifiques Marocains sont connectés avec l'ensemble des réseaux d'enseignements et de recherche des pays Européens. Le concept est simple : chacun peut mettre en commun ses données, et profiter d’une analyse – et des avancées - communes. La recherche des nouvelles applications pour ce formidable outil n’est qu’à son début.
RABAT- Aujourd’hui, nous somme entourés par des milliers des réseaux informatiques. Mais celui que la Commission européenne a mis à la disposition des chercheurs marocains est un réseau assez particulier : il relieles scientifiques Marocains avec l'ensemble des réseaux d'enseignements et de recherche des pays Européens. Eumedgrid – la grille de calcul 24
pour la recherche scientifique – est un outil puissant développé dans le cadre du projet européen Eumedconnect. Cette initiative établit un réseau humain dans le secteur de l'eScience. Pratiquement, Eumedgrid permet aux chercheurs méditerranéens de se connecter les uns aux autres. Elle encourage le développement des réseaux
nationaux d'enseignement et de recherche dans les pays méditerranéens, diminue la fracture numérique entre l'Union européenne et les pays méditerranéens, et finalement elle accélère le développement d'Internet dans le bassin méditerranéen. « Eumedconnect intervient dans tout ce qui est traitement et partage de données dans le champ scienProjets en Marche - Voisinage Sud
SOCIÉTÉ > MAROC
n Pr Cherkaoui
tifique - explique le Professeur Rajaâ Cherkaoui El Moursli - L’analyse de résultats dans ce domaine demande des liaisons très rapides entre les laboratoires de recherche. D’où la notion de grille informatique qui permet de mettre le matériel de chacun en commun. Plus encore, ce réseau nous permet une utilisation rationnelle et démocratique des données ». Admission du Maroc au programme Atlas Le Professeur Cherkaoui El Moursli est membre correspondant de l’Académie Hassan II des Sciences et Techniques et membre de la collaboration ATLAS au LHC, le plus grand accélérateur de particules au Monde. Elle nous explique que le choix du Maroc était tout indiqué pour
faire partie de cette expérience scientifique. Le royaume a été précurseur à l’échelle continentale dans plusieurs disciplines de recherche et partie prenante dans des projets de pointe. «Depuis 1996– continue Cherkaoui – le Maroc est officiellement membre de la collaboration Atlas au CERN, l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire, qui est l’un des plus grands et des plus prestigieux laboratoires scientifiques du monde. L’admission du Maroc au sein de cette collaboration, après un vote unanime de plus de 148 institutions de recherche de 33 pays, est la conséquence du travail de qualité de quelques scientifiques marocains avant 1996 ». Le pôle de compétences Réseau Universitaire de Physique des Hautes Energies (RUPHE) est l'institution Marocaine chargée du programme Atlas. RUPHE est directement sous la tutelle du Ministère de l'Education Nationale de l'enseignement supérieur de la formation des cadres et de la recherche scientifique, ainsi que le Centre Nationale de la Recherche Scientifique et Technique (CNRST), organisme qui gère et qui planifie la recherche au Maroc. Eumedconnect a mis à la disposition de ce centre un réseau informatique géant d’un débit de 34 mégabits. Ce volume sera prochainement revu à la hausse
pour atteindre les 155 mégabits. C’est au sein de ce centre qu’une équipe d’ingénieurs informaticiens gère le réseau. La grille marocaine, MaGrid a été mise en place depuis 2006 par le déploiement du premier site au CNRST. MaGrid, une grille marocaine à plusieurs utilisations La grille est mise à la disposition des universités et établissements de l’enseignement supérieur et de recherche pour leurs besoins en moyens de calcul et en capacité de stockage. MaGrid est connectée à la grille Euro méditerranéenne Eumedgrid et à la grille Européenne EGEE. Le cluster informatique
« La notion de grille informatique permet de mettre le matériel de chacun en commun. Ce réseau nous permet une utilisation rationnelle et démocratique des données »
« Eumedconnect intervient dans tout ce qui est traitement et partage de données dans le champ scientifique. L’analyse de résultats dans ce domaine demande des liaisons très rapides entre les laboratoires de recherche » n Une étudiante marocaine qui travaille sur le projet ATLAS
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SOCIÉTÉ > MAROC
n Pr Cherkaoui en compagnie d’Abdelkrim Bougouza, chargé du centre Internet
nouvelles applications pour Eumedonnect pour la recherche scientifique marocaine… Texte et photos par Hicham Houdaïfa ©EU/Neighbourhood Info Centre
(plusieurs serveurs connectés) du CNRST a été certifié pour l'analyse des données ATLAS dans le cadre d'un projet de coopération entre le CSIC (Espagne) et le CNRST. MaGrid est utilisée aussi par des chercheurs de différents domaines, mais essentiellement par deux groupes : physique des hautes énergies et chimie théorique. Par cette action, les chercheurs marocains disposent de certificats reconnus à l’échelle internationale. Les chercheurs Marocains travaillant au sein d'ATLAS utilisent régulièrement la grille de calcul ce qui leur permet de disposer des possibilités des gros centres de calcul de l'ensemble des pays développés. Plusieurs autres cher-
« Parmi ces étudiants, il y en a qui optent pour la recherche de haut niveau. Et c’est là que peut intervenir Eumedconnect »
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cheurs et institutions seront amenés à utiliser MaGrid pour réduire les investissements et aussi harmoniser à grande échelle les outils de calcul. « Aujourd’hui, nous essayons de créer une grille de calcul similaire pour certaines applications de la physique médicale », assure le professeur El Moursli. « A Rabat, on a eu au départ une demande de l’Institut national d’oncologie pour créer un master de physiques médical. Des physiciens médicaux ont été formés pour travailler dans les hôpitaux, dans la médecine nucléaire, la radiothérapie, la radiologie. Les lauréats ont de fortes chances d’embauche dans un secteur qui souffre d’un manque flagrant de compétences. Parmi ces étudiants, il y en a qui optent pour la recherche de haut niveau. Et c’est là que peut intervenir Eumedconnect », explique notre chercheuse. Il est clair que dans le domaine de la recherche, les changements sont rapides. Grâce à Eumedconnect, le Maroc suit ces évolutions. A ce jour, des dizaines de doctorants et de séniors utilisent le réseau. Et les choses ne s’arrêteront certainement pas là. En juin prochain, une session de formation sera organisée par le CNRST afin de créer de petits nœuds dans chaque université. Des ingénieurs vont former les chercheurs à utiliser la grille. A la recherche de
EUMEDCONNECT2 www.eumedconnect2.net Un projet de partenariat entre les communautés de recherche scientifique des institutions de sept pays de la Méditerranée et des pays de l’Afrique du Nord. À travers un réseau de cables reliant les différentes institutions, ces pays échangent des données, des documents et des expériences dans tous les domaines. Le projet EUMEDCONNECT2 permet à environ deux millions d'utilisateurs dans près de 700 institutions à travers l'Afrique du Nord et le Moyen- Orient de collaborer avec leurs confrères répartis dans plus de 4000 établissements de recherche et d'éducation en Europe. Pays participants Algérie, Égypte, Jordanie, Maroc, Territoire Palestinien Occupé, Syrie, Tunisie Durée: 2008 - 2010 Budget: 4 millions d’euros Objectifs: Le projet vise à soutenir et à renforcer la coopération entre l’Europe et les pays partenaires méditerranéens dans le domaine de la recherche et de l’éducation. Le projet souhaite assurer la durabilité sur le long terme de l’infrastructure Internet mise en place par EUMEDCONNECT 1 à partir de 2004. Il souhaite également mettre en place un réseau durable de soutien capable de réduire la disparité digitale entre les pays et stimuler la coopération. Pour en savoir plus: Un nouveau réseau internet à haute capacité pour la recherche et l’éducation > http://www.enpiinfo.eu/mainmed.php?id=21221&id_type=1 &lang_id=469 Société de l’information, portail thématique > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=7&lang_id=469
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Broderie, peinture, informatique: de l’exclusion à la vie Handicap International Algérie et la Fédération Algérienne des Personnes Handicapées ont conduit, durant trois années, le programme de Développement local inclusif, «une solution pour lutter contre l’exclusion des personnes en situation de handicap». Le programme est soutenu par l’Union Européenne. Les 18 associations ayant pris part à ce programme ont développé des actions et des mécanismes visant à lutter contre la marginalisation des personnes en situation de handicap.
ALGER – Zâatra est un gros bourg situé à quelques encablures de la ville balnéaire de Zemmouri. Alger n’est qu’à 70 kilomètres, une heure et demi de route tout au plus. «Prenez à gauche au niveau de l’arrêt de bus, montez la pente puis suivez l’allée qui mène à la place du village. Tournez à droite, je vous attendrai devant la salle de sport». Kamel Foul est bien là, devant le portail gris de la salle de sports, siège de l’association El Fedjr (l’Aurore, en arabe) qu’il préside. De l’extérieur, la bâtisse ne paie pas de mine. Pourtant, à l’intérieur, c’est une véritable ruche qui grouille d’activités. «L’association a été créée au courant de l’année 2004. L’objectif de cette initiative était de prendre en charge les jeunes personnes sur les plans social, éducatif, culturel et sportif. Il y avait une réelle demande de la part de la population du village et même des localités environ-
nantes. Le succès a été immédiat», affirme M Kamel Foul. Prise de conscience Au début, l’association avait établi des programmes d’activités pour les enfants et les femmes qui vivent en milieu rural. Mais le personnel bénévole a fini par découvrir les difficultés auxquelles sont confrontées les personnes en situation de handicap. « Ce fut une réelle prise de conscience. Nous avons constaté que cette catégorie de la population était non seulement marginalisée mais surtout totalement oubliée. Dans certaines familles, le fait d’avoir une personne handicapée à la maison est vécu comme une véritable honte. Une tare qu’il faut absolument cacher du regard des autres», souligne le président de l’association. Les bénévoles d’El Fedjr font fi des
n Classes de maternelle de l’Association El Fedjr de Zaatra
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« Ce fut une réelle prise de conscience. Nous avons constaté que cette catégorie de la population était non seulement marginalisée mais surtout totalement oubliée. Dans certaines familles, le fait d’avoir une personne handicapée à la maison est vécu comme une véritable honte… » préjugés. Ils s’impliquent aux côtés des personnes en situations de handicap pour tenter de les faire sortir de leur isolement. Ils leur proposent de participer à quelques activités éducatives et culturelles en compagnies de personnes «valides». Sans le savoir, l’association applique l’esprit de la Convention Relative aux Droits des Personnes Handicapées, notamment ses dispositions en matière d’insertion et d’inclusion. Ce texte d’une importance capitale a été signé par l’Etat Algérien en mars 2007 et ratifié en mai 2009. Un engagement actif qui prédispose l’association El Fedjr à participer, dès 2008, au programme de «Développement local inclusif, une solution pour lutter contre l’exclusion des personnes en situations de handicap» mis en œuvre par Handicap International Algérie et la Fédération Algérienne des Personnes Handicapées (FAPH), et soutenu par l’Union européenne. Concertation L’association El Fedjr n’est qu‘une des associations soutenues par le projet, qui couvre plusieurs régions algériennes : les mêmes modalités de mise en œuvre ont été utilisées dans 6 wilayas. Dans chacune, plusieurs actions sont inscrites au programme. Certaines sont destinées directement aux membres des associa28
n Membres de l’Association en rèunion
tions en vu de leur permettre de renforcer leurs capacités en matière d’organisation et de mobilisation au profit des personnes en situations de handicap. «Nous avons revu totalement notre façon de travailler. De nouveaux mécanismes ont été mis en place. La première grande étape consistait à développer un diagnostic afin de connaitre l’environnement et les besoins de chaque personne handicapée. Cette opération de diagnostic local a été primordiale car elle nous a permis d’obtenir des données assez précises sur les personnes handicapées qui vivent dans notre localité», note M Kamel Foul. La concertation avec les autorités locales, à travers la mise en place d’un comité de concertation local, et notamment avec les services de l’Assemblée populaire communale (mairie) de Zemmouri, a facilité la mise en place d’un Espace De Socialisation (EDS) qui permet de briser l’isolement des personnes en situations de handicap.
épanouis». A l’intérieur de l’espace de socialisation, plusieurs activités sont mises en place pour développer les aptitudes individuelles des participants et faciliter leur insertion sociale. Au niveau du siège de El Fedjr, les participants ont le choix entre classe d’alphabétisation, couture et broderie, peinture sur soie, poterie et l’informatique. Des excursions sont également organisées tout au long de l’année.
Socialisation Mlle Nawel Labehri est bénévole au sein de l’association. Chaque mardi, elle participe à l’animation d’un espace de socialisation. «Je fais la tournée du groupe, maison après maison. Je rentre chez eux et je les ramène au siège de l’association à bord du bus que la mairie met à notre disposition. Les familles me font confiance, c’est sûrement dû au fait que je sois une fille. Ce qui est incroyable, c’est qu’au début du programme, ils étaient tous très timides, renfermés sur eux-mêmes. Mais après quelques semaines, ils se sont totalement transformés. Aujourd’hui, ils sont
« Ce programme a été une réussite car il encourage l’accompagnement des associations. Les cadres suivent souvent des formations théoriques, mais ils ont rarement l’occasion de les mettre en pratique »
Intégration El Fedjr s’engage aussi dans la formation et la scolarisation. Grâce à elle, certains membres du groupe sont inscrits dans le centre spécialisé de Corso, ville située à quelques dizaines de kilomètres de Zâatra. Mieux, une expérience d’insertion économique d’auto-emploi a également été initiée. M Ahmed Khelifi - un des nombreux bénéficiaires de ce projet - a pu
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acheter un petit troupeau de moutons. «Le programme nous a attribué une aide de 75.OOO dinars (l’équivalent de 720 euros) pour financer un petit projet économique. Avec cette somme, le jeune Ahmed Khelifi a pu acquérir 3 brebis et 3 agneaux au mois d’avril 2010. L’expérience est concluante puisque le cheptel s’est agrandi. D’ailleurs, Ahmed devrait rembourser ce prêt dans quelques mois», explique le président de l’association El Fedjr. En fait, le programme de Développement local inclusif piloté par Handicap International et la Fédération Algérienne des Personnes Handicapées a permis de développer plusieurs autres projets d’intégration économique. A Taghit, par exemple, ville de la wilaya (département) de Béchar située à 1000 kilomètres au sud ouest d’Alger, l’association El Wyam (La Concorde) est parvenue à créer un atelier d’artisanat. «Cet atelier, qui est en fait un espace de socialisation, permet de former de jeunes gens aux activités artisanal. Nous leur apprenons à confectionner des bouteilles décoratives avec le sable du désert. Les objets sont vendus à des magasins de bibelots pour touristes. Nous sommes satisfaits car l’affaire marche plutôt bien» note M Chérif Abdenacer, président de l’association El Wyam, rencontré à l’occasion de la réunion de clôture du programme de Développement local inclusif. Accompagnement Cette réunion, qui s’est tenue à Alger le 23 mars, a dressé un bilan global des activités entreprises au cours du programme. Ainsi, depuis 2008, les capacités de la FAPH ont été renforcées, et un collectif national pour les droits des personnes handicapées constitué. Les actions
n Kamel Foul, président de
l’association El Fedjr de Zaatra
n Xavier Duvauchelle, Director of
the programme at Handicap International Algeria
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« Les espaces de socialisation sont une réponse concrète et directe aux difficultés d’accès aux services des personnes en situation de handicap ». initiées par les 18 associations affiliées à la FAPH ont permis dans 6 wilayas (Alger, Médéa, Ghardaia, Béchar, Jijel et Constantine) à 200 personnes en situations de handicap de suivre un accompagnement à l’autonomie. Au total, ce sont 13 espaces de socialisation - où qui ont été mis en œuvre en collaboration avec les administrations locales. «Nous pouvons dire que ce programme a été une réussite car il encourage l’accompagnement des associations. Les cadres suivent souvent des formations théoriques, mais ils ont rarement l’occasion de les mettre en pratique», indique M Boufekroune Ahcéne, premier vice-président de la FAPH et chargé de suivi du programme de Développement local inclusif. De son côté, M Xavier Duvauchelle, directeur du programme à Handicap International Algérie, estime qu’il est nécessaire de renforcer la coopération entre tous les acteurs pour lutter activement contre toutes formes d’exclusion. «Les programmes de développement local existent depuis peu en Algérie. Le problème reste l’aspect inclusif des dispositifs et services. Aussi, il est fondamental de généraliser cette approche. Les associations ont pour cela un rôle fondamental car elles sont garantes du respect du droit de ces personnes et de leur prise en compte par tous les dispositifs et services. Par ailleurs, elles peuvent avoir un rôle important à jouer en matière d’accompagnement et d’orientation des personnes handicapées mais aussi de conseil aux autorités locales, entreprises et organismes publics délivrant des services. Ainsi, les espaces de socialisation sont une réponse concrète et directe aux difficultés d’accès aux services des personnes
en situation de handicap. De plus, les comités de concertation locaux mis en œuvre dans le cadre du projet sont eux aussi importants à dupliquer car ils sont aussi un outil concret pour assurer la collaboration et la concertation entre les associations et les pouvoirs publics». Texte par Tarik Hafid Photos par Samir Sid, ©EU/Neighbourhood Info Centre
Le développement inclusif local: une solution pour lutter contre l’exclusion des personnes en situation de handicap Par le biais de ce projet, les pouvoirs publics prennent en considération les besoins spécifiques des personnes en situation de handicap dans leurs politiques ; et les personnes en situation de handicap acquièrent les moyens de devenir des citoyens à part entière, participant pleinement a la vie sociale et au développement de leur communauté Durée: 2008 - 2011 Budget: 750.000 euros Budget: Objectif spécifique Mieux structurées et sensibilisées à la question du handicap les associations membres du réseau de la FAHM, en partenariat avec les autres acteurs locaux, développent des actions et des services inclusifs en faveur des personnes en situations de handicap. Maitres d’œuvre du Projet: Handicap International (France) ; Fédération des Associations des Handicapés Moteurs (FAHM) –Alger Pour en savoir plus: Handicap International > http://www.handicap-international.fr/ Délégation Européenne en Algérie > http://eeas.europa.eu/delegations/algeria/ind ex_fr.htm EU Neighbourhood Info Centre portail thématique – Société Civile & Autorités Locales > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=14&lang_id=469
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© European Union
La Libye n’a pas besoin d’argent mais d’expertise
Bain de foule en Tripoli pour Catherine Ashton, qui rencontre les enfants de la ville (Photo par EEAS © European Union)
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Entretien avec Andrew Jacobs et Fabienne Bessonne Unité de coordination géographique pour le Sud du voisinage à la DG EuropeAid
Que fait actuellement l’UE pour aider le peuple libyen à instaurer un régime démocratique dans leur pays ? La société civile est l’un des prérequis essentiels à la transition démocratique et à la stabilisation d’un pays. Et une grande proportion des projets que nous mettons en œuvre en Libye mettent précisément l’accent sur la société civile. Nous tenons aussi beaucoup à participer aux efforts de développement de l’administration publique. Pour bien fonctionner, une démocratie doit pouvoir s’appuyer sur une administration publique efficace, garante de l’État de droit et de l’accès des citoyens aux services publics. Dès lors, outre le volet de coopération avec la société civile, nous aidons aussi le pays à renforcer ses institutions publiques, qui, sous le régime de Kadhafi, n’étaient pas dirigées de la même façon que dans la plupart des autres pays. Quel est le statut de la société civile en Libye et quelle est la contribution apportée par l’UE dans ce domaine ? Rares sont les organisations européennes de la société civile qui connaissent déjà la Libye, et pour les partenaires du développement, il s’agit véritablement d’une terra incognita. Les ONG libyennes sont atypiques, elles sont peu nombreuses et pour la plupart, non structurées. C’est la raison pour laquelle nous les soutenons. Nous avons déjà lancé sept programmes axés sur la société civile et avons récemment organisé un Forum UE-Libye de la société civile, dans les villes de Tripoli et de Benghazi, afin d’aider les organisations libyennes et européennes de la société civile à mieux se connaître. Ce Forum a été un succès ; il a réuni au total plus de 300 organisations libyennes et 30 organisations européennes de la société civile. L’échange d’idées a été fructueux, au point que quelques nouveaux partenariats sont en voie de création. Quelle est la priorité centrale de la coopération européenne en Libye ? Notre première priorité, que nous partageons d’ailleurs avec d’autres partenaires internationaux, est d’aider les Libyens à prendre conscience de ce qu’ils doivent faire pour instaurer une société démocratique qui fonctionne normalement. Certes, nous dégageons des fonds pour la Libye, mais ce dont ce pays a besoin avant tout, c’est d’expertise. Nous devons utiliser les sommes disponibles pour catalyser les mesures que prendra le gouvernement pour normaliser la situation dans le pays. Nous suivons une double approche. D’une part, nous tentons de répondre aux besoins immédiats avec un soutien ponctuel et d’autre part, nous développons des évaluations des besoins pour promouvoir des changements à moyen terme.
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Comment cette aide se traduit-elle sur le terrain ? Nous mettons actuellement en œuvre 12 programmes pour un montant total de 30 millions d’euros et avons affecté 50 autres millions d’euros pour la période 2012-2013 au titre de l’instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP). Ces sommes s’ajoutent aux 2 millions d’euros octroyés au titre du programme « Les acteurs non étatiques et les autorités locales dans le développement » et au million d’euros au titre de l’Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme (IEDDH). Nos activités se concentrent sur trois domaines prioritaires : le soutien au processus de transition (administration publique, société civile, réforme de la sécurité et État de droit), le développement de la qualité du capital humain (enfants, jeunes chômeurs et santé) et la migration (droits des immigrés en Libye et des immigrés libyens à l’étranger). En ce qui concerne le développement économique et social, un autre thème prioritaire, les activités ne démarreront qu’en 2013, sous la forme d’un soutien à la facilitation des échanges, au développement du secteur privé et aux PME. Quel impact escomptez-vous ? Et quand ce changement sera-t-il perceptible sur le terrain selon vous ? Certains projets porteront directement leurs fruits pour les bénéficiaires. C’est le cas de notre programme de 2,4 millions d’euros axés sur le retour des enfants à l’école et l’offre d’un soutien psychologique et social aux enfants et aux enseignants encore marqués par le conflit. Un autre exemple est le programme de formation professionnelle organisé en coopération avec la Fondation européenne pour la formation (ETF) destiné à répondre aux besoins immédiats des jeunes chômeurs. Mentionnons également le programme « migration » à hauteur de 10 millions d’euros qui doit garantir la prise en compte des besoins des immigrés étrangers en Libye et des immigrés libyens en Égypte et en Tunisie. Nous espérons aussi que nos programmes de soutien à la société civile pourront rapidement générer des résultats concrets afin que les organisations bénéficiaires puissent vraiment commencer à jouer le rôle de surveillance qui est le leur, en appelant à la responsabilité du gouvernement. Par contre, la transition démocratique et les réformes plus profondes mettront plus de temps à se mettre en place mais nous sommes convaincus que les Libyens sont capables de relever ce défi. La Libye participe-t-elle aujourd’hui à part entière aux programmes de coopération de l’IEVP ? Oui, la Libye bénéficie de la coopération bilatérale dans le cadre de l’IEVP. En ce qui concerne nos programmes régionaux, nous souhaitons réellement qu’ils restent ouverts à
la participation de la Libye afin de pouvoir normaliser nos relations avec ce pays dans le cadre de nos relations régionales avec les voisins du Sud. La Libye est désormais invitée à participer à tous les programmes de coopération régionale, et certaines activités ont d’ailleurs déjà commencé, comme la coopération interuniversitaire s avec le programme Tempus. D’autres seront développées dans un avenir proche, en fonction des disponibilités des homologues libyens. La Libye est également éligible à TAIEX, un instrument dédié à l’échange d’assistance technique. D’autres fonds lui sont également accessibles au titre des lignes budgétaires thématiques. Durant le deuxième semestre 2012, nous lancerons le premier appel à propositions pour le soutien aux organisations libyennes de la société civile. Comment l’action de l’UE en Libye est-elle perçue sur le terrain ? Nos activités sont perçues positivement et l’on note chez nos partenaires un intérêt considérable pour les échanges d’expérience et la mise en place de partenariats. Toutefois, notre visibilité est encore insuffisante et nous devons nous employer à promouvoir nos activités vers un public plus large. Ce manque de visibilité est également lié à l’absence de médias réellement en mesure de diffuser les messages auprès des citoyens. Nous apportons donc notre soutien aux médias, notamment en vue des élections, par le biais de programme de formation des journalistes à leur travail dans le contexte des élections. Dans quels domaines la coopération européenne avec la Libye se développera-t-elle selon vous au cours des années à venir ? Cette question est prématurée. Pour l’instant, nous nous concentrons sur les besoins immédiats et à moyen terme mais lorsqu’une certaine stabilité sera revenue, nous devrons nous asseoir autour d’une même table avec les membres du gouvernement libyen et définir avec eux quelles doivent être nos priorités communes. Malgré tout, la société civile, l’État de droit ainsi que l’économie, le commerce et la migration resteront les thèmes prioritaires de ces prochaines années. Quel est le principal défi pour l’UE en Libye ? Nous nous heurtons surtout au manque d’expérience de l’administration publique. Le gouvernement ne dispose pas de ressources humaines suffisantes pour reconstruire le pays.
Andrew Jacobs dirige l’Unité de coordination géographique pour le Sud du voisinage et Fabienne Bessonne est Desk Officer pour la Libye à la DG EuropeAid
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L’UE et le printemps arabe: aider la nouvelle génération à bâtir une société nouvelle
“Notre but n’est pas de lancer des révolutions mais plutôt de nous assurer que les révolutions ne soient pas volées aux peuples” déclare Marcus Cornaro, Directeur chargé du voisinage pour la DG EuropeAid, dans un entretien accordé à l'EU Neighbourhood Info Centre au sujet de la réaction de l’Union européenne aux événements du ‘Printemps arabe’. (Photo by Al Hayat Centre, Mohammad Ben Hussein, ©EU/Neighbourhood Info Centre)
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Entretien avec Marcus Cornaro Directeur chargé du voisinage pour la DG EuropeAid
Quelle est la réaction de l’UE face au “Printemps arabe”? L’UE reconnaît l’importance des pays du voisinage du sud et des événements qui ont lieu dans la région, ce qui explique sa réaction rapide aux changements amenés par le Printemps arabe et aux défis de la transition politique et économique dans la région. Cette situation a permis à l’UE de revoir son approche vis-à-vis de la coopération avec les pays partenaires dans la région, en accordant une importance particulière à la volonté du peuple, et en s’assurant que leurs révolutions correspondent à leurs aspirations. Quelles sont les actions qui ont été menées par l’UE? Plusieurs actions et décisions ont été mises en œuvre afin de faire face à cette situation changeante. Un financement supplémentaire d’un milliard d’euros a été approuvé pour l’ensemble des pays du voisinage. Ce montant vient s’ajouter aux 5,7 milliards d’euros déjà prévus pour 2011-2013. En somme, l’UE a augmenté son financement pour la coopération avec les pays du voisinage du Sud de 20%. Il s’agit d’une mesure compensatoire et d’un acte de générosité en temps de crise. Grâce à l’effort conjoint de la Commission et des états membres, les fonds ont été redistribués et réduits dans d’autres domaines afin d’augmenter le financement pour la région du Sud de la Méditerranée. De plus, il est important de souligner également que les fonds supplémentaires ne représentent qu’une partie d’une offre plus large qui comprend d’autres avantages, notamment un meilleur accès au marché et une mobilité accrue. Sur quels programmes vous êtes-vous concentrés? Ce financement supplémentaire comprend un nouvel ensemble de mesures pour le voisinage du Sud, notamment un nouveau programme – L’Aide au partenariat, aux réformes et à la croissance inclusive (SPRING) – doté d’un budget de 350 millions d’euros pour 2011 et 2012 ; une Facilité de soutien à la société civile pour le voisinage (tant au sud qu’à l’est), d’un budget de 12 millions d’euros pour les pays voisins du Sud en 2011 ; ainsi qu’un financement de 82,5 millions d’euros pour le renforcement des programmes Erasmus Mundus et Tempus pour la période 2011-2013.
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Comment ces ressources supplémentaires ontelles été utilisées sur le terrain ? En Tunisie par exemple, l’UE a soutenu le processus électoral et fournit des conseils pour la réforme du système judiciaire. Le Programme d’appui à la relance (PAR) a été mis en œuvre grâce à un financement de l’UE de 100 millions d’euros, qui vient s’ajouter aux prêts de 900 millions d’euros accordés par les autres partenaires. Un autre programme de 20 millions d’euros vise à faciliter le processus de transition démocratique en réduisant les inégalités sociales dans les régions défavorisées en Tunisie et en accordant un soutien aux institutions de microfinance. La Tunisie a déjà obtenu un financement de 20 millions d’euros dans le cadre du programme SPRING, en plus des 10 millions d’euros pour le soutien à la relance économique au pays, et de 10 millions d’euros pour les priorités de la reforme. Il est attendu que l’Égypte, la Jordanie, le Liban et le Maroc bénéficient également du programme SPRING en 2012. Quelle est la situation actuelle de la Libye? La Libye est maintenant éligible au financement régional même si le pays a toujours un statut spécial et que le plan d’action de l’UE pour la Libye n’a toujours pas été finalisé. Trois programmes principaux ont déjà été signés: un programme de coopération pour le renforcement des capacités mis en œuvre par une ONG européenne, une facilité d’assistance technique pour le gouvernement libyen, ainsi qu’une initiative de soutien aux activités en coopération avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). De plus, les journalistes libyens ont bénéficié d’une formation dans le cadre du Réseau du journalisme du voisinage européen, et des projets de l’UE pour la lutte contre le SIDA ont été mis en œuvre dans le pays. Quel est l’impact attendu sur les citoyens? Les actions menées par l’UE visent à répondre aux attentes des citoyens et à soutenir les pays partenaires dans la construction de systèmes démocratiques; en d’autres termes à permettre aux citoyens de jouir des valeurs démocratiques comme la liberté d’expression, d’association et de la presse, mais aussi d’avoir accès à un système judiciaire plus équitable et plus indépendant. Les programmes visant la relance économique faciliteront la création d’emplois et de petits commerces, tandis que les programmes d’éducation et de formation technique
ont été élaborés afin de permettre aux jeunes d’acquérir des compétences plus adaptées et de favoriser leur accès à l’emploi. Si vous deviez citer une initiative pour chaque pays… En Tunisie, le progrès économique demeure une question fondamentale, tandis qu’en Libye, l’accent doit être mis sur l’assistance et le renforcement des capacités de la société civile. En Égypte, le gouvernement de transition a souligné les besoins urgents dans le domaine du logement, tandis que la coopération avec la Jordanie est plus axée sur la formation technique et l’emploi des jeunes. En ce qui concerne le Maroc, un protocole entre l’UE et le Maroc est sur le point d’être signé afin de réussir le statut avancé. Quels sont les principaux défis? Je dirai que les défis résident dans l’application du principe de différenciation puisque l’UE a l’intention de s’assurer que les besoins et les priorités de chaque pays sont bien pris en compte, et aussi dans notre capacité à réagir en temps opportun. Par exemple, la Libye n’a toujours pas de gouvernement et aura besoin d’un soutien important dans tous les domaines avant que la situation se rétablisse. Dans le cas de la Syrie, la situation est très préoccupante et l’UE a suspendu sa coopération avec le pays, excepté dans le cadre des programmes Erasmus Mundus et Tempus. Quelles sont les trois priorités pour 2012? La création d’emploi et offrir aux jeunes des opportunités pour se construire une vie meilleure sont, sans aucun doute, la première priorité pour 2012. La seconde est l’amélioration des capacités de la société civile dans les pays partenaires ainsi que le renforcement de son rôle et de sa participation dans le dialogue politique et la responsabilité publique. Une troisième priorité consiste à considérer la nouvelle approche de coopération de l’UE avec les pays du voisinage ‘more for more’, plus d’aide pour plus de réformes, comme une opportunité plutôt qu’une conditionnalité supplémentaire. Cette approche est fondée non seulement sur les engagements des différents partis concernés, sur la responsabilité mutuelle, et sur un principe plus fort en matière de différenciation en ce qui a trait aux besoins des pays, mais aussi sur l’engagement de l’UE à atteindre le changement démocratique et la croissance économique. Cet entretien a été réalisé en 2012
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Environnement
Un pÊcheur tunisien sur les rives du lac de Bizerte, Tunisie (photo par EPA ŠEU/Neighbourhood Info Centre).
ENVIRONNEMENT > ISRAËL
Les entreprises se mettent au vert La sensibilisation à l’environnement est insuffisante. La pauvreté est en hausse. D’autres problèmes sont considérés comme plus urgents. Néanmoins, la gestion des déchets commence à s’imposer sur les agendas politiques partout dans le monde, même dans les régions déchirées par les conflits. Dans de nombreuses villes arabes en Galilée et dans des zones urbaines palestiniennes de Cisjordanie, l'environnement est à ce point dégradé qu'il constitue une menace pour la santé. Une initiative financée par l’UE soutient les autorités locales dans leur combat pour améliorer la gestion des déchets et la sensibilisation du public. Les résultats sont impressionnants : même les hommes d’affaires se joignent à la cause.
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n Décharge illégale dans le village de Sakhnin
TEL AVIV – « Les déchets ? Ils sont partout et, plus le temps passe, plus ils s’entassent. La seule véritable solution consiste à mieux sensibiliser nos citoyens à cette problématique. » Baker Awawdy est le directeur général de la Galilee Society, la plus grande organisation de défense environnementale du secteur arabe en Israël. Nous nous trouvons dans la ville de Shfaram, qui date de l’Empire romain. Elle s’étend sur plusieurs collines qui surplombent la baie de Haïfa et compte environ 35 000 habitants. Lorsque vous vos promenez à travers le village, il est difficile de ne pas voir les immondices qui s'étalent sur les trottoirs. Les déchets font désormais partie du paysage de ce village arabe de l’État moderne d’Israël : ils sont visibles, ils sentent et ils dérangent. Mais comment résoudre ce problème ? Le projet « Renforcement des Capacités des Autorités locales pour la modernisation écologique » est une initiative soutenue par l’UE qui a pour but de développer la capacité des autorités locales à prévenir ou à réduire les déchets, à les recycler ou à les réutiliser. La « Galilee Society » est un partenaire majeur mais aussi le promoteur de ce projet, mis en œuvre au nom de la ville de Shfaram et en collaboration avec le PENGON (réseau environnemental palestinien) et l’Institut bulgare de modernisation écologique. « Green cities » est l’un des 21 projets financés dans le cadre du programme régional CIUDAD, une initiative dotée de 14 millions d’euros qui vise à aider les gouvernements locaux du voisinage de l’UE à s’attaquer durablement aux problèmes liés au développement urbain.
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ENVIRONNEMENT > ISRAËL
« Les déchets ? Ils sont partout et, plus le temps passe, plus ils s’entassent. La seule véritable solution consiste à mieux sensibiliser les citoyens à cette problématique. » « Nous mettons tout en œuvre pour trouver une solution à l’élimination des déchets qui respecte l’environnement », explique Baker Awawdy, le directeur du projet. « Il s'agit d’un problème très grave qui affecte la vie des villageois. » Points de recyclage dans les écoles Dans de nombreuses villes arabes densément peuplés en Galilée et dans des zones urbaines palestiniennes en Cisjordanie, les conditions environnementales sont telles qu'elles constituent une menace pour la santé. Cette situation s’explique par le fait qu’en Israël, les municipalités arabes ont généralement des budgets municipaux
plus réduits et des services urbains moins bien organisés. En outre, le public n’est que peu conscient des bons principes de gestion des déchets. En Cisjordanie, les gouvernements locaux sont confrontés à d’importantes restrictions économiques et politiques. Par exemple, alors que 41 % des déchets solides y sont organiques, seul 1 % est recyclé. Et 69 % sont mis en décharge à l’air libre. « Le projet tente de mettre en œuvre une approche globale pour résoudre ce problème », poursuit M. Awawdy, « c’est-à-dire en prenant plusieurs facteurs en compte. Il s’agit d’un problème complexe qui exige une solution complexe. Mais en premier lieu, il faut changer les mentalités : beaucoup pensent en effet encore que la solution doit venir des autorités uniquement. » Des activités de sensibilisation sont donc menées auprès du public en vue d'améliorer la compréhension et les connaissances relatives au sujet. « Nous avons divisé toutes les communautés dans lesquelles nous travaillons en huit secteurs », commente M. Awawdy. « Dans chacune d'entres elles, nous avons créé un comité spécial en charge du projet. Dans chaque école, nous avons mis en place un
comité éducatif. Notre objectif est de mieux sensibiliser les élèves à l'importance du tri des déchets. Un point de recyclage a été installé dans chaque école. Les déchets y sont triés et une entreprise de recyclage vient chercher les déchets en plastique. Dans chaque village, nous mettons en place des événements spéciaux, comme « A day for the planet Earth » (« Une journée pour la planète Terre »). Nous avons aussi mis en place
« Un point de recyclage a été installé dans chaque école. Les déchets y sont triés et une entreprise de recyclage vient chercher les déchets en plastique. Dans chaque village, nous mettons en place des événements spéciaux, comme A day for the planet Earth »
n Impliquer les enfants : conférence à l'école primaire d'El Gadir
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ENVIRONNEMENT > ISRAËL
série de conférences sur le réchauffement climatique dans le centre commercial et le public est nombreux. Je pense que nous sommes en train de changer les choses. » Texte et photos par Yair Qedar ©EU/Neighbourhood Info Centre
n Baker Awawdy
n Mai Assadi
une plateforme qui réunit les responsables de district qui sont actifs à l’échelon gouvernemental. L’idée est de faciliter la communication entre les différentes autorités gouvernementales. » Le projet a pour but d'améliorer l'élimination des déchets grâce, entre autres, à la formation des autorités locales. « Nous renforçons les capacités du gouvernement local à traiter ce problème », déclare M. Awawdy, «nous les encourageons donc à faire respecter les lois, à élaborer des plans stratégiques, à développer une sensibilité environnementale spécifique. » Dans le cadre du projet, des initiatives spéciales sont aussi menées, en association avec les autorités religieuses. « Une conférence réunissant 30 imams se tient actuellement dans le village de Pki'in », précise M. Awawdy, « Leur message sera transmis à plus de 20 000 personnes. C’est ce qu’on appelle de l’influence ! »
l’école, les instituteurs se concentrent principalement sur les résultats scolaires et non sur les défis environnementaux... « Il y aussi beaucoup de tensions politiques à l’échelon local », témoigne Mai Assadi, coordinateur environnemental du projet pour le village de Sakhnin, « mais le projet ne traite pas des conflits politiques ». “« Je collabore avec diverses organisations », ajoute M. Assadi, « j'ai par exemple donné plusieurs conférences dans des organisations de femmes. Une quinzaine de participantes étaient présentes à chacune d’entre elles. J’ai également organisé un atelier pour 30 femmes, où je leur ai appris comment recycler. Je donne aussi des cours à des instituteurs maternels, j’organise des ateliers dans des écoles primaires... Les nouvelles générations vont grandir en étant plus sensibilisées à l'environnement que leurs aînés. » Mais d’autres secteurs sont intéressés : le monde de l’entreprise, par exemple », conclut M. Awawdy. « Certaines personnes nous appellent pour rendre leur entreprise plus « verte »... Le centre commercial de Sakhnin, entre autres, a demandé notre soutien. J’y ai donc rencontré les propriétaires des 25 magasins et je leur ai suggéré un plan de travail pour économiser les cartons d’emballage… Nous donnons une
Des cours pour les instituteurs maternels – et les entreprises Mais la situation est complexe, d’autant que les problèmes surgissent à plusieurs niveaux. D’abord, c'est la première fois que le thème de la sensibilisation aux déchets et à l’environnement est abordé. Le public est très peu conscient de cette problématique et il n’est pas facile de lui expliquer pourquoi et comment les communautés peuvent bénéficier des efforts en faveur de l'environnement. La pauvreté est également très importante. Les problèmes personnels et communautaires sont considérés comme plus urgents que ceux relatifs aux déchets. À Projets en Marche - Voisinage Sud
« Les nouvelles générations vont grandir en étant plus sensibilisées à l'environnement que leurs aînés. »
CIUDAD – Développement urbain durable http://www.ciudad-programme.eu/ Vise à aider les gouvernements locaux de la région de l’IEVP à s’attaquer durablement aux problèmes de développement urbain, en encourageant la coopération entre les acteurs locaux et leurs homologues de l’UE Pays participants Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Maroc, Syrie, Territoire palestinien occupé, Tunisie (Sud), Arménie, Azerbaïdjan, Belarus, Géorgie, Moldavie, Russie, Ukraine (Est) Durée: 2009 - 2013 Budget: 14 millions d’euros Objectifs: Le programme « Coopération en matière de développement urbain et dialogue » (CIUDAD) entend promouvoir la compréhension mutuelle, le dialogue et la coopération entre les acteurs locaux de l'UE d’une part et des pays partenaires de l'Est et du Sud du voisinage (IEVP) d’autre part. Il assure à cet effet le renforcement des capacités pour la modernisation et le renforcement des gouvernements locaux et régionaux. Il vise également à mettre en place de nouveaux partenariats et à renforcer les partenariats existants entre autorités locales et régionales de la région de l’IEVP (sud-sud, est-est et sudest) afin de pérenniser les réalisations au-delà de la durée de vie du programme. Pour en savoir plus: Fiche du projet > http://www.enpi-info.eu/maineast.php?id= 310&id_type=10 (en anglais) Mini-site de TourMedEau > http://www.openmed.eu/portal/fr/ms_TOURMEDEAU.wp Société civile et autorités locales – portail thématique > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=14&lang_id=469
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ENVIRONNEMENT > TUNISIE
Bizerte, une lagune à sauvegarder De loin, le lac de Bizerte offre une vue imprenable. Mais en se rapprochant de cette lagune naturelle, on découvre l’ampleur des dégâts : une pollution inquiétante en raison d’une activité industrielle anarchique et d’un manque de sensibilisation de la population. L’optimisme est cependant permis grâce à un projet intégré soutenu par l’Union Européenne qui permettra au lac de changer de visage.
n Un pécheur tunisien sur les rives du lac de Bizerte
TUNIS – Située à quelques encablures de la ville et à une soixantaine de kilomètres de la capitale Tunis, le lac de Bizerte - ancienne base navale - offre aux visiteurs une vue imprenable. Ce lac, qui communique avec la Méditerranée grâce à un chenal de sept kilomètres, occupe une position stratégique et a permis à la région de bénéficier d’un grand nombre d’opportunités d’investissements. Ce n’est pas un hasard que l’Etat tunisien et des opérateurs économiques avaient misé sur les potentiels de cette lagune naturelle pour implanter autour d’elle un complexe sidérurgique, une cimenterie, un chantier naval, des pêcheries et bien d’autres activités qui génèrent des bénéfices certains mais également d’une pollution préoccupante. Montagnes de déchets ménagers et industriels En effet la ville et le bassin souffrent beaucoup d’une dégradation de l’environ-
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nement en raison de l’accumulation d’une série de facteurs polluants en dépit d’une législation environnementale nationale bien étoffée. La ville de Menzel Bourguiba est confrontée à un problème crucial, celui du rejet de déchets industriels provenant de l’usine sidérurgique Al Fouladh, de rejet de déchets domestiques, et de toutes sortes de rejets liquides liés à l’activité portuaire. Qui plus est, la région ne possède pas encore d’infrastructure adéquate pour l’évacuation des eaux pluviales, en particulier les canalisations. Le constat des dégâts sur les lieux est catastrophique. Des montagnes de déchets ménagers et industriels jonchent les bordures du lac à telle enseigne que l’unique plage a non seulement perdu son charme mais fut décrétée interdite à la baignade. Pour M. Taieb Nefzi, chef de la délégation spéciale de la municipalité (mairie) de Menzel Bourguiba, limitrophe du bassin Projets en Marche - Voisinage Sud
ENVIRONNEMENT > TUNISIE
« Nous comptons sur une action parallèle que les autorités publiques devraient promouvoir afin d’élargir le champ d’intervention du projet et rendre ses résultats plus durables » « la situation est difficile malgré l’engagement de plusieurs associations qui essayent de limiter les dégâts, d’autant plus que tous les moyens matériels de la municipalité ont été saccagés durant la révolution. ». Et il ajoute: « Si on ne parvient pas à une solution radicale, on ne fera que reporter les échéances ». Des membres de la société civile et du tissu associatif viennent de tirer la sonnette d’alarme suite à la prolifération visible de certaines allergies dues à la pollution et également d’un certain nombre de cas de cancer. M. Badreddine Jemaa, président de l’Association tunisienne de santé et d’environnement, ne cache pas sa détermination de tout mettre en œuvre pour atténuer les souffrances des habitants de
n
la région. « Avant le 14 janvier 2011 (date de la révolution tunisienne) les associations avaient un rôle symbolique, mais aujourd’hui nous vivons un climat qui nous permet de parler et de faire parvenir notre voix. Nous avons créé cette association et nous sommes en train de rassembler tous les documents et les photos qui vont nous permettre d’agir. » Une maturité environnementale très forte en Tunisie En fait la solution a été trouvée dans le cadre d’un « Programme intégré d'interventions de dépollution dans le bassin versant de la lagune de Bizerte et de ses environs, pour la restauration de la richesse et de la qualité de ses eaux et écosystèmes ». Ce programme fait partie d’une initiative régionale euro-méditerranéenne (HORIZON 2020) qui se propose de réduire d’une manière sensible les niveaux de pollution de la mer Méditerranéenne avant l’année 2020 pour favoriser un développement socioéconomique durable et améliorer la qualité de vie des citoyens de la région. Estimé à environ 80 millions d’euros (soit 160 000 dinars tunisiens) le projet sera co-financé par la Banque européenne
n A Tunisian sailor harvesting mussels
« Aujourd’hui nous vivons un climat qui nous permet de parler et de faire parvenir notre voix. Nous sommes en train de rassembler tous les documents et les photos qui vont nous permettre d’agir… »
Un marin tunisien récolte des moules
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ENVIRONNEMENT > TUNISIE
« Il existe en Tunisie une maturité environnementale très forte en comparaison avec d’autres pays. Ce projet permettra de trouver une solution radicale à ce problème »
n Une vue du lac de Bizerte, contaminé par la pollution
d’investissement (BEI) à raison de maximum 50% et par le gouvernement tunisien, auxquels pourront s’ajouter les contributions d’autres partenaires européens. M. Nick Marchesi, chef de la mission de préparation du projet de dépollution du Lac de Bizerte, sous la supervision de la BEI, a effectué plusieurs visites techniques dans la région. Il coordonne une équipe d’experts locaux et internationaux. Il explique : «Suite à une phase d’actualisation du diagnostic de la situation, nous sommes actuellement au stade d’étude de faisabilité pour offrir toutes les conditions nécessaires au financement du projet par la Banque». M. Marchesi estime que le projet est réalisable et devrait démarrer cette année, une fois l’accord entre la Banque et le gouvernement tunisien concrétisé. « Il existe en Tunisie une maturité environnementale très forte en comparaison avec d’autres pays. Ce projet permettra de trouver une solution radicale à ce problème dans le cadre d’une stratégie globale de développement qui offrira à la région la possibilité de se débarrasser une fois pour toutes de cette pollution. Plusieurs interventions sont à effectuer – continue M. Marchesi - je cite la mise à niveau de 40
toutes les infrastructures polluantes installées autour du Lac de Bizerte dont la décharge de Menzel Bourguiba, la réhabilitation des réseaux d’assainissement, la réduction des émissions atmosphériques liquides et solides de l’usine d’Al Fouladh, et de la cimenterie. » M. Stefano Corrado, chargé des questions environnementales au sein de la Délégation de l’Union européenne, ajoute « Certes le projet ne pourra pas s’attaquer à toutes les sources de pollution existantes au niveau de ce vaste territoire et des solutions autonomes devront être recherchées pour les phénomènes de pollution diffuse provenant de secteurs tels que l’agriculture et le transport. Nous comptons néanmoins - il continue - sur une action parallèle que les autorités publiques devraient promouvoir afin d’élargir le champ d’intervention du projet et rendre ses résultats plus durables. Il s’agira de tenir compte de la démarche participative initiée par le projet et d’utiliser les résultats du diagnostique environnemental approfondi qui vient d’être réalisé. » L’amélioration générale de la situation autour du lac va se répercuter sur la qualité des eaux de la lagune qui vont se renouveler ainsi naturellement. « Il est en outre prévu – termine M. Marchesi - une opération de dragage de sédiments de pollution organique au niveau de la région Menzel Jemil, limitrophe du Lac ». Il est vrai qu’un problème de cette envergure nécessite sans aucun doute une enveloppe financière substantielle, mais rien ne peut aboutir sans la contribution réelle et efficace et l’engagement de tous les habitants des régions limitrophes du lac et sans des dispositifs efficaces de veille environnementale, permettant de
limiter toute action susceptible de nuire aux écosystèmes et au patrimoine environnementale de la région. La participation de toutes les parties prenantes à niveau local et national a été fortement encouragée par l’équipe de projet de la BEI, dirigée par Mme Monica Scatasta, et cela depuis le débuts du processus de préparation de projet en 2010. L’implication de tous sera sûrement un élément fondamental afin d’assurer la pérennité des impactes positifs du projet. Textes par Lotfi TOUATI Photos par EPA ©EU/Neighbourhood Info Centre
Horizon 2020 http://www.h2020.net/ Les gouvernements euro-méditerranéens se sont fixés comme objectif de s'attaquer aux sources majeures de pollution de la Méditerranée d'ici 2020 au travers de l'initiative Horizon 2020 Piliers de l’action de Horizon 2020 • Projets visant à réduire les sources les plus significatives de pollution : les émissions industrielles, les déchets municipaux et les eaux usées urbaines, responsables de 80 % de la pollution de la mer Méditerranée. • Mesures de renforcement des capacités pour aider les pays limitrophes à créer des administrations environnementales nationales capables de développer la législation environnementale et de veiller à son application. • Utilisation du budget « Recherche » de la Commission en vue de renforcer les connaissances environnementales propres à la Méditerranée et en assurer leur diffusion. • Développement d'indicateurs visant à mesurer le taux de réussite d'Horizon 2020. Pour en savoir plus: Site web du programme H2020: http://www.mehsip-ppif.eu/index_main.cfm Page web du projet: http://www.mehsipppif.eu/proj_view.cfm?proj_id=283
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ENVIRONNEMENT > LIBAN
Que faire en cas de séisme ? Je l’apprends grâce à un jeu Un CD-ROM qui vise à développer des mécanismes de prévention en matière de protection civile axés sur la sensibilisation des jeunes : distribué aux écoles par la Défense civile libanaise à 125.000 exemplaires – dans le cadre du Programme euro-méditerranéen de prévention, de préparation et de réponse aux catastrophes naturelles et d’origine humaine (PPRD South) – ce jeu éducatif a été choisi pour son côté interactif. Le but du jeu est d’apprendre à gérer les différents dangers qui menacent chaque citoyen dans sa vie quotidienne, réagir aux accidents qui peuvent survenir à la plage ou sur la route, aux séismes et incendies. Le jeu peut aussi être téléchargé gratuitement sur Internet : on estime ainsi que près de 250.000 enfants bénéficieront de ce projet au Liban.
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n Des élèves de CM2 du Collège des Apôtres participant avec enthousiasme à une séance de
présentation d’un CD-ROM éducatif de la Défense Civile
BEYROUTH - « Moi, je veux sauver les gens comme Superman », murmure un petit garçon à son camarade qui lui répond malicieusement : « Et moi, je veux être secouriste pour réanimer les filles et leur faire du bouche-à-bouche ». Cette conversation a lieu entre deux écoliers du collège des Apôtres à Jounieh, suite à une séance de présentation du CD-ROM éducatif. Distribué par la Défense Civile libanaise aux écoles du pays, dans le cadre d’un projet financé par le programme européen "PPRD South" (Programme euro-méditerranéen de prévention, de préparation et de réponse aux catastrophes naturelles et d’origine humaine) - et qui est aussi mis en œuvre dans plusieurs autres pays méditerranéens, partenaires de l’Union européenne - ce CD-ROM vise à développer des mécanismes de prévention axés sur la sensibilisation des citoyens et notamment des jeunes. Le Liban est une terre propice aux tremblements de terre, tsunamis, inondations ou feux de forêts. Sans oublier les épidémies, les accidents domestiques, etc. Pour faire face à ces catastrophes potentielles et, dans le cas de certaines, les prévenir, la Défense civile libanaise - qui intervient généralement en situation de crise - a décidé de sensibiliser une tranche importante de la société, à savoir les enfants de 7 à 12 ans. Le but ultime étant la création d’une culture de protection civile axée sur la prévention et la gestion des risques. 41
ENVIRONNEMENT > LIBAN
n Un membre de la Défense Civile libanaise se prépare
pour une mission
Un jeu éducatif Pour ce faire, un jeu éducatif sur CDROM a été choisi comme support. « Le jeu est plus efficace pédagogiquement. Le côté interactif rend l’information plus attractive pour l’enfant, beaucoup plus qu’un support classique comme le livre ou le film documentaire », explique Karim Abi Saleh, le concepteur du CD, et programmateur à Wixel studios, une société locale spécialisée dans la programmation de jeux. « Résoudre les problèmes du jeu permet de développer des réflexes adéquats dans la vie de tous les jours », ajoute-t-il. « Le but du jeu est de savoir gérer les diffé-
rents dangers qui menacent chaque citoyen dans sa vie quotidienne. Des accidents qui peuvent survenir à la plage, à la montagne, à la maison, sur la route, et même, les catastrophes d’ordre naturel comme les séismes, les incendies, etc. », ajoute pour sa part, un responsable de la Défense Civile libanaise. Le jeu est divisé en étapes de plus en plus difficiles. Et pas moyen de passer à une nouvelle étape sans avoir gagné la précédente. Afin de stimuler les enfants, une phase ultérieure du programme devrait permettre de s’inscrire en ligne sur le site de la Défense civile libanaise, et de partager son score avec les autres joueurs. Et les gagnants pourraient décrocher une récompense symbolique pour les encourager, affirme ce responsable. L’un des jeux qui a particulièrement intéressé les écoliers du collège des Apôtres est celui relatif aux dangers qui peuvent avoir lieu à la plage ou autour d’une piscine. « Il ne faut pas oublier la crème solaire », crie une petite fille. Ni le chapeau, ajoute un garçon. « Il faut s’hydrater régulièrement », affirme un autre. Une autre fille, l’air sérieuse, déclare solennellement qu’il ne faut jamais
« Je suis ravie que mes filles découvrent ce CD. Non seulement elles s’amusent, mais elles apprennent à se protéger aussi »
descendre à l’eau sans la surveillance d’un adulte. Par contre, les enfants ne savaient pas du tout comment réagir en cas de séisme. « Grace au CD, je sais maintenant qu’il faut se mettre sous le porche de la porte en cas de tremblement de terre. Mais les séismes, c’est au Japon, pas chez nous ! », explique un garçon à sa maitresse. Cette dernière lui explique alors que le Liban subit régulièrement des secousses sismiques… Le caractère libanais du CD Conçus en arabe, français et anglais, 125.000 CD devraient être distribués
n Exercice de simulation : que faire en cas de tremblement de terre dans une école
« Grace au CD, je sais maintenant qu’il faut se mettre sous le porche de la porte en cas de tremblement de terre. Mais les séismes, c’est au Japon, pas chez nous !! »
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ENVIRONNEMENT > LIBAN
n Maria, sa petite sœur Clara et leur mère découvrent ensemble les jeux du CD
découvrent ce CD. Non seulement elles s’amusent, mais elles apprennent à se protéger aussi », conclut la mère de Maria et Clara. Texte et photos par: Antoine Ajoury ©EU/Neighbourhood Info Centre
Protection Civile (PPRD South) http://www.euromedcp.eu/ Programme de prévention, de préparation et de réaction aux catastrophes naturelles et d’origine humaine (PPRD Sud) Pays participants Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Territoire Palestinien Occupé, Syrie, Tunisie, Albanie, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Monténégro et Turquie. La Mauritanie a un statut d’observateur . Durée: 2009 - 2013 Budget: 5 millions d’euros
sur tout le territoire libanais, dans les écoles privées et publiques. Les jeux, précise la direction générale de la Défense civile, peuvent également être téléchargés gratuitement sur internet, et les enfants peuvent en faire des copies à volonté. On estime ainsi que près de 250.000 enfants bénéficieront de ce jeu. Une autre caractéristique de ce jeu est le caractère libanais de l’environnement choisi, avec une ville coincée entre la mer et la montagne. « On a également choisi des noms arabes pour les personnages du CD, afin qu’ils puissent entre compatible avec la culture des enfants. Ils joueront ainsi avec Raed et Leila », affirme M. Abi Saleh. Apprendre et partager Maria, dix ans, est une écolière en CM2. Elle joue régulièrement avec sa petite sœur, Clara, huit ans, au CD. Elles partagent aussi leurs découvertes et leurs exploits avec leurs parents et amies. Désormais, elles mettent toujours la ceinture de sécurité quand elles montent en voiture avec leur père. « Et je ne mets plus ma main hors du Projets en Marche - Voisinage Sud
véhicule », ajoute Maria. Les deux sœurs savent aussi qu’il faut placer le radiateur électrique loin d’objets pouvant bruler. Pour le responsable de la Défense civile « le CD apprend aux enfants à être plus vigilants et plus responsables quand ils font des activités à la maison ou en pleine nature : comment bien éteindre le feu, ramasser les bouteilles, etc. » Cet ambitieux projet dont le lancement a été accompagné d’une campagne dans les médias, semble déjà porter ses fruits. « Je suis ravie que mes filles
« Résoudre les problèmes du jeu permet de développer des réflexes adéquats dans la vie de tous les jours »
Objectifs: Le « Programme de prévention, de préparation et de réaction aux catastrophes naturelles et d’origine humaine » (PPRD Sud) contribue à l’amélioration des capacités des pays partenaires méditerranéens en matière de protection civile au niveau international, national et local. Fort des résultats obtenus dans le cadre de deux programmes précédents, ce programme participe au développement d’une culture de la protection civile reposant sur la prévention plutôt que sur la réaction. Il travaille en coopération avec les autorités de la protection civile des pays partenaires, et sa gestion a été confiée à un consortium regroupant les autorités de la protection civile d’Italie, de France, d’Égypte et d’Algérie, ainsi que la Stratégie internationale de prévention des catastrophes, des Nations unies (SIPC). Pour en savoir plus: Fiche PPRD Sud > http://www.enpiinfo.eu/mainmed.php?id=245&id_type=10 EU Neighbourhood Info Centre > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=6&lang_id=469
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ENVIRONNEMENT > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
«J’ai appris à dompter ma peur du feu»
n Un exercice incendie
Ils ont appris à éteindre des incendies, à porter les premiers secours, à intervenir en cas de noyade et à faire des évacuations en cas de tremblements de terre: plus de 11 000 élèves, scolarisés dans 577 écoles, ont suivi le programme de formation de protection civile avec le soutien de l’UE dans le Territoire palestinien occupé. En cas d’urgence, ces jeunes sont désormais les premiers à intervenir — avant même l’arrivée des équipes de la Défense civile — ou viennent en renfort des services d’urgence. Ils ont non seulement acquis des compétences pratiques, mais ils ont aussi été amenés à se découvrir une autre aptitude: la confiance en soi. JÉRUSALEM - Amjad Kanaan, capitaine chez les pompiers palestiniens, ne cache pas sa joie. Content du type de formation dans lequel il s’est investi, il parle de ces jeunes avec lesquels il a passé deux mois: «Ces élèves sont notre avenir. Les regarder, c’est voir naître une nouvelle génération.» Des renforts en cas de catastrophe Cette formation, qui a été organisée dans le cadre du recrutement de jeunes volontaires pour la défense civile du Territoire 44
palestinien occupé et qui a été financée au titre du programme européen PPRD-Sud (www.euromedcp.eu), a ciblé 10 000 élèves palestiniens âgés de 13 à 17 ans en Cisjordanie. Ce critère d’âge a été retenu, car les adolescents s’intéressent davantage que d’autres groupes de la société aux activités de défense civile et représentent, selon les statistiques officielles, le pourcentage le plus élevé de la population palestinienne. Au total, 11 778 élèves ont suivi cette formation, un chiffre nettement supérieur aux objectifs des organi-
sateurs et des instructeurs. Ces élèves, filles et garçons, viennent de 577 écoles du Territoire palestinien occupé. Les coordonnées de tous les élèves qui ont suivi la formation sont enregistrées dans la base de données du siège de la Défense civile. Ces cours ont en effet été conçus pour faire de ces élèves un corps supplémentaire au service de la protection civile. Ces cours portent sur la défense civile, les premiers soins et les secours ainsi sur que les interventions en cas d’incendie, d’accidents de la route, de sauvetage en mer, Projets en Marche - Voisinage Sud
ENVIRONNEMENT > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
d’inondations, de noyades, de tremblements de terre et d’évacuations. En cas d’urgence, les élèves seront immédiatement mobilisés, soit en tant que premières unités d’intervention — c’està-dire avant l’arrivée des équipes officielles de la Défense civile — soit en tant que renforts. Scolarisé au lycée pour garçons de Bethlehem, Mohammad Abiyat, 15 ans, a été
«Au début, j’avais vraiment très peur. Mais voir mes amis y participer m’a donné du courage, et j’ai décidé d’y assister. Maintenant, je me sens tout à fait capable de porter assistance à quelqu’un» très impressionné par la formation qu’il a suivie avec d’autres garçons de son lycée. Il se dit désormais capable d’intervenir dans certaines situations d’urgence. Depuis la formation, il a effectué une
réanimation cardio-respiratoire sur un homme âgé qui a perdu connaissance en rue. Une autre fois, il a senti une odeur de gaz dans l’immeuble où il se trouvait: il a immédiatement demandé à tout le monde d’ouvrir les fenêtres et a fait appeler les secours. «Je suis fier de moi», s’enorgueillit Mohammad, «j’ai l’impression d’avoir sauvé des vies». Un exercice de défense civile a été organisé dans son lycée, sans avertissement préalable. Dès que les sirènes ont retenti, les membres de l’unité d’intervention d’urgence ont coupé les arrivées d’eau et de gaz. Quelle scène spectaculaire que de voir les 584 élèves du lycée sortir de leur classe pour se rassembler dans la cour en 25 secondes à peine. Sans blessés. Ni cohue, ni temps perdu. «Je me sens différente» À Qalqilya, dans le nord de la Cisjordanie, Taghrid Hassan, 17 ans, explique qu’elle n’aurait jamais cru avoir le courage de suivre une telle formation. «Au début, j’avais vraiment très peur. Mais voir mes amis y participer m’a donné du courage, et j’ai décidé d’y assister. Maintenant, je me sens tout à fait capable de porter assistance à quelqu’un», confie Taghrid. Et d’ajouter que cette formation a eu un autre impact sur elle: «Je me sens diffé-
«Je me sens différente. Je ne suis plus la petite fille timide et fragile du quartier» rente, je me découvre une autre personnalité, plus aguerrie peut-être. Et j’aime ça.» À la question de savoir ce qu’elle entend par «plus aguerrie», elle nous répond: «Je ne suis plus la petite fille timide et fragile du quartier.» Outre la formation des jeunes, les unités de la protection civile de l’Autorité palestinienne font de leur mieux pour sensibiliser la population à la nécessité de respecter les principes élémentaires de sécurité. En matière de sensibilisation, leur action consiste à informer la population sur ce qu’il y a lieu de faire en cas de catastrophe. Leila, 17 ans, vient du village de Wadi Fukin, à la périphérie ouest de Bethlehem. Elle a eu très peur lors de sa première journée de formation: «J’écoutais l’instructeur nous parler d’incendie, et j’ai pris peur. J’ai la phobie du feu. J’ai failli abandonner, mais je me suis dit que ce serait peut-être le meilleur moyen de surmonter ma phobie.» Leila utilise désormais un extincteur sans problème.
n Des adolescentes palestiniennes en formation, dans le district de Bethlehem
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ENVIRONNEMENT > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
n Une équipe d’entraineurs du Département de la Défense Civile
«J’écoutais l’instructeur nous parler d’incendie, et j’ai pris peur. J’ai la phobie du feu. J’ai failli abandonner, mais je me suis dit que ce serait peut-être le meilleur moyen de surmonter ma phobie»
Le jour où un exercice incendie a eu lieu dans son école, elle s’est immédiatement emparée de l’extincteur de ses mains menues pour le braquer sur le pneu qui brûlait. Il ne lui a fallu que quelques secondes pour éteindre l’incendie. Pas assez d'extincteurs Cette formation sert (aussi) à aider les participants à dépasser leurs peurs et à n Un exercice d’évacuation dans une école de Cisjordanie
entrer dans une autre dimension d’intégration sociale, surtout en cas de crise, lorsque les gens savent qu’ils doivent s’entraider. À cet égard, cette formation rapproche les élèves palestiniens et leur famille de la Défense civile et les familiarise avec sa culture, ce qui les rend plus à même de réagir en cas de catastrophe. Malgré ces accomplissements, les responsables de la formation sont convaincus qu’ils auraient pu faire mieux s’ils avaient obtenu tout le matériel de formation dont ils avaient besoin. Les services de protection civile n’avaient pas suffisamment d’extincteurs, alors que les élèves devaient s’exercer à éteindre des incendies. Le secteur privé local leur a fait don d’une centaine d’extincteurs qu’ils ont dû rassembler. Le secteur privé a également fourni gracieusement d’autres supports de formation: projecteurs, tableaux de conférence et papier. Ces dons ont révélé la réalité du sous-équipement des services de protection civile, mais ils ont aussi montré les liens étroits existant entre la Protection civile et le secteur privé. En fin de compte, c’est la société palestinienne dans son ensemble qui bénéficie de la formation. «Nous espérons poursuivre ce programme», insiste le Lieutenant-colonel Mohammad Beiruti, dans son bureau de Ramallah, siège de la Protection civile. «Nous avons connu des difficultés financières et des problèmes d’équipement, c’est vrai, mais nous sommes tout à fait résolus à poursuivre dans cette voie à
l’avenir», confie-t-il. Il dit espérer que l’UE maintiendra son engagement et étendra le soutien déjà accordé. Texte et photos de Elias Zananiri ©EU/Neighbourhood Info Centre
Programme PPRD-Sud www.euromedcp.eu Programme pour la prévention, la préparation et la réponse aux désastres naturels et humains Pays participants Albanie, Algérie, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Monténégro, Territoire palestinien occupé, Syrie, Tunisie et Turquie. La Mauritanie a un statut d’observateur. Durée: 2009 - 2013 Budget: 5 millions d’euros Objectifs: Le programme pour la prévention, la préparation et la réponse aux désastres naturels et humains (PPRD-Sud) vise à contribuer au développement et au renforcement des capacités de protection civile dans les pays partenaires de la Méditerranée, à l’échelle internationale, nationale et locale. S’appuyant sur les travaux réalisés au cours des deux premiers programmes, il contribue au développement d’une culture de la protection civile qui est plus axée sur la prévention que sur la réponse et consiste à travailler avec les autorités en charge de la protection civile dans les pays partenaires. Il est géré par un consortium constitué par les autorités italiennes, françaises, égyptiennes et algériennes en charge de la protection civile ainsi que par les services des Nations unies en charge de la stratégie internationale pour la prévention des catastrophes (UNISDR). Pour en savoir plus: Fiche du programme – Page du pays > http://www.euromedcp.eu/fr/pays/territoirepalestinien-occupe.html Fiche du programme - EU Neighbourhood Info Centre > http://www.enpiinfo.eu/mainmed.php?id=251&id_type=10&l ang_id=469 Portail thématique «Société civile & autorités locales» > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=14
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Projets en Marche - Voisinage Sud
ENVIRONNEMENT > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
Une bonne recette pour l’agriculture? Des chouettes plutôt que des pesticides Au début d’un nouveau programme d’aide aux agriculteurs palestiniens de la vallée du Jourdain, l’Union européenne et son partenaire ont dû surmonter une barrière culturelle. Comment les chouettes peuvent-elles donc apporter quelque chose de positif à l’agriculture ? Dans la culture arabe, cet animal est en effet symbole de perte et de ruine. Mais au fil du temps, les premiers résultats sont apparus. Éloquents. Et les agriculteurs commencent à être convaincus que cet oiseau peut constituer une excellente alternative aux pesticides chimiques… Parallèlement, en travaillant ensemble dans le cadre de ce projet, des organisations jordaniennes, palestiniennes et israéliennes encouragent une culture favorisant la compréhension et le dialogue dans cette région troublée. Projets en Marche - Voisinage Sud
n La Palestine Wildlife Society informe l’audience de l’évolution du projet
JERUSALEM – Comment les chouettes peuvent- elles donc apporter quelque chose de positif à l’agriculture ? Dans un premier temps,les agriculteurs se sont montrés plutôt incrédules. Au début d’un nouveau programme d’aide aux agriculteurs palestiniens de six villages de la vallée du Jourdain, l’Union européenne a dû surmonter une barrière culturelle. En effet, les représentants de l’UE et leurs partenaires locaux ont eu bien du mal à convaincre les agriculteurs que les chouettes sont bonnes pour leurs terres. Car dans la culture arabe, cet animal est symbole de perte et de ruine. Avant, fermiers et agriculteurs utilisaient beaucoup de pesticides chimiques. Mais aujourd’hui, ce programme leur explique que s’ils abandonnent l’utilisation de pesticides, ils pourront s’ils le souhaitent se lancer dans l'agriculture biologique. Une
possibilité qu’envisagent aujourd’hui au moins 13 000 agriculteurs palestiniens de la vallée du Jourdain. Si les chouettes peuvent offrir une alternative moderne aux pesticides chimiques, c’est car celles-ci se nourrissent de souris et de rats dès la nuit tombée. Durant la journée, en pleine lumière du jour, les crécerelles prennent le relais, en se régalant elles aussi de rongeurs. « Les rapaces et la dératisation en tant que modèle de gestion durable des ressources dans la vallée du Jourdain » est un projet d’une durée de trois ans mis en œuvre au titre du programme « Partenariat pour la paix », financé par l’Union européenne. L’initiative vise à préserver la qualité environnementale et l’équilibre écologique dans la vallée du Jourdain. De même, l’objectif général du projet est d’améliorer la coopération et le dialogue durable entre les Arabes et les Israéliens 47
ENVIRONNEMENT > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
n Des femmes de Al-Walaja regardent les activités pratiquées dans l’école
dans la vallée du Jourdain, afin de renforcer la participation de la société civile à la consolidation de la paix. Dans les villages palestiniens, la vie n’est guère facile De nombreux villages de Cisjordanie sont actuellement confrontés à une offre de services clairement insuffisante : l'accès à l'eau, l'assainissement, les routes, les écoles, les hôpitaux ou les cliniques locales, tous les secteurs sont touchés. Ces problèmes sont encore aggravés par un taux de chômage élevé qui a un impact désastreux sur les agriculteurs et leurs familles, confrontés à des taux de pauvreté de plus en plus élevés. Quant aux vives tensions avec l’occupant israélien, elles dominent le quotidien des Palestiniens. Avec ce projet – coordonné par la Fondation Hanns Seidel et mis en œuvre par des organisations jordaniennes, palestiniennes et israéliennes – l’UE espère encourager la durabilité environnementale des pratiques agricoles tout en améliorant les conditions d'une coexistence pacifique dans la région. La Société israélienne de protection de la nature, la Wildlife Society palestinienne et le Centre pour la paix et le développement à Amman veillent à ce que les agriculteurs utilisent ces rapaces vingt-quatre-heures sur vingt-quatre. Grâce aux échanges quotidiens, les partenaires s’emploient égale48
« L’UE est résolument attachée à soutenir ces régions de Cisjordanie : à l’heure actuelle surtout , il est essentiel de soutenir les Palestiniens vivant dans des communautés comme celles-ci. » ment à promouvoir une culture basée sur la paix et le dialogue dans cette région en souffrance. Nasser Ali, le directeur de projet, qui représente la Fondation Hanns Seidel, explique : « L’idée est de mener des activités conjointes, de mettre en œuvre un plan conjoint pour lutter contre l’utilisation des pesticides ». Chaque partenaire est tenu non seulement de travailler au sein de son propre territoire, mais aussi de préserver le dialogue et d’organiser des activités à l’échelon régional. Ce type de coopération peut nous aider à promouvoir le processus de paix. Un exemple concret ? Les échanges d’agriculteurs organisés entre les pays participants, qui leur permettent de se rencontrer, » poursuit Nasser Ali. « C'est pour eux l'occasion de parler de leurs propres expériences, des défis qu'ils rencon-
trent, de la façon dont ils s'efforcent de les surmonter.... Être confronté à des problèmes communs permet de surmonter les différences. » Renforcer les communautés Christian Berger, le représentant de l’Union européenne, visite actuellement de nombreux villages des quatre coins de la Cisjordanie. Lors de sa visite dans le village de Jiftlik, M. Berger a souligné « l'UE est résolument attachée à soutenir ces régions de Cisjordanie : à l’heure actuelle surtout, il est essentiel de soutenir les Palestiniens vivant dans des communautés comme celles-ci. » Et de fait, Jiftlik et ses environs sont également la cible d’un second projet européen qui vise à aider les citoyens ordinaires à défendre leurs droits et leur accès aux services. « Promouvoir le changement communautaire » est un projet d’une durée de trois ans doté d’un budget d’un peu plus de 500.000 euros. Mis en œuvre par Oxfam Grande-Bretagne, il a pour objectif global de donner aux Palestiniens la possibilité de participer au processus de décision et de défendre leurs droits au sein de la communauté. Les bénéficiaires de cette intervention vivent dans les villages extrêmement pauvres de Jiftlik, Fasayel, Uja, Walajeh, Jaba’a et Zbeidat, en Cisjordanie. « Ce projet se propose d’aider les habitants de ces communautés à prendre conscience de leurs Projets en Marche - Voisinage Sud
ENVIRONNEMENT > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
« C’est en donnant aux communautés locales les moyens de prendre conscience de leurs droits et de les exercer qu’il sera possible de changer réellement et durablement la vie quotidienne des Palestiniens. » droits et à les exercer au niveau local, » poursuit M. Berger. « Ils apprendront comment approcher les autorités locales pour demander un accès équitable aux services. L’accent est mis principalement sur des méthodes de communication et de coopération adaptées. » Selon Joan Summers, directrice d’Oxfam
Grande-Bretagne dans le pays, les personnes bien informées et motivées comprennent plus facilement que tout le monde est concerné par ce qu’il se passe, ce qui est particulièrement important lorsqu’on essaie de faire vivre une famille dans des circonstances aussi difficiles. Ces agriculteurs ont besoin d’un avenir meilleur et d’une communauté plus forte, a-t-elle déclaré. Aider les gens ordinaires à avoir accès au processus de décision est essentiel si l'on souhaite renforcer les communautés. L’UE met en œuvre ce programme avec plusieurs partenaires locaux parmi lesquels Palestinian Vision (PalVision), l’Ansar Centre for Children, l’Initiative palestinienne pour la promotion du dialogue mondial et de la démocratie (MIFTAH) et le Centre d’études féminines. Les représentants de ces organisations travaillent en coopération avec des conseils communautaires, des organisations locales, des femmes, des jeunes et
« Ils parlent de leurs propres expériences, des défis qu'ils rencontrent, de la façon dont ils s’efforcent de les surmonter… Être confronté à des problèmes communs permet de surmonter les différences. »
n Les personnes âgées et les plus jeunes de la
communauté regardent les activités exécutées dans l’école
Projets en Marche - Voisinage Sud
d'autres acteurs de la communauté afin notamment de mettre en place des commissions communautaires. En coopération avec les autorités locales, ces commissions s’emploient ensuite à identifier les besoins de la communauté tout entière. Un manuel du citoyen, définissant les droits et les services, sera également préparé dans le cadre du projet. « L’UE est profondément attachée à soutenir ces zones défavorisées, » conclut M. Berger, ajoutant que ce projet est au cœur de cet objectif européen. C’est en
donnant aux communautés locales les moyens de prendre conscience de leurs droits et de les exercer qu’il sera possible de changer réellement et durablement la vie quotidienne des Palestiniens. » Texte par Elias Zananiri Photos par Mounes Abu Shilbayeh, ©EU/Neighbourhood Info Centre
Projets en faveur de la paix au Proche-Orient (Partenariat pour la paix) Soutient les initiatives locales et internationales de la société civile en faveur de la paix, de la tolérance et de la non-violence au Proche-Orient Pays participants Israël, Jordanie, Territoire palestinien occupé Durée: Continu Budget: Budget annuel compris entre 5 et 10 millions d’euros Objectifs: Le « Partenariat pour la Paix » de l’UE soutient des initiatives dans les secteurs susceptibles d'avoir un impact direct sur le quotidien et le bien-être des personnes, y compris les activités pratiques visant à promouvoir la communication et la compréhension mutuelle. Les projets incluent la définition et la mise en œuvre de mécanismes de gestion des conflits et l'éducation des communautés à la promotion de la paix. Le Partenariat européen pour la paix entend aussi renforcer et consolider les relations et la coopération directes avec la société civile, fondées sur l’égalité et la réciprocité entre les Israéliens, les Palestiniens et les autres Arabes. En moyenne, 15 projets sont sélectionnés chaque année, chacun pour une durée maximale de 36 mois. La contribution financière de la CE est comprise entre 50.000 et 500.000 euros. La « Dératisation à l'aide de rapaces comme modèle de gestion durable des ressources dans la vallée du Jourdain au service du processus de paix au ProcheOrient » est un de ces projets. Pour en savoir plus: EU Neighbourhood Info Centre fiche de projet > http://www.enpi-info.eu/mainmed.php?id= 106&id_type=10&lang_id=469 Dialogue politique - Portail thématique > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=3
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Culture
Le château de Shobak en Jordanie fait partie d’un projet à long terme pour la rénovation du site (Photo par Mohammed Ben Hussein ©EU/Neighbourhood Info Centre).
CULTURE > MAROC
Ne touchez pas à ma porte en bois!
n La petite Hasna devant une vieille porte en bois dans la Medina de Tanger
C’est l’histoire d’une aventure qui a rassemblé enseignants, élèves d’écoles publiques, parents d’élèves, directeurs d’écoles, animateurs et conservateurs de musée pour un seul et unique objectif: sauver les portes en bois de la Médina de Tanger. Reportage sur place. TANGER – La fin du parcours est une fête : les enfants des écoles d’Okba Bnou Nafiî, Abdellah Guennoun, Fatem Fihriya, Al Khansae et Hassan I se sont fait beaux afin de clore en beauté une belle opération qui a pour objectif de faire prendre conscience aux Tangérois, petits et grands, de l’importance de leurs anciennes portes en bois. Ils se donnent rendez-vous pour faire la fête avec leurs parents à l’intérieur du musée la Projets en Marche - Voisinage Sud
Kasbah de Tanger, un bâtiment magique qui fait face à l’océan et récemment rénovée. L’enceinte fait office de salle d’expositions de dessins réalisés par les enfants eux-mêmes afin de passer ce message tant important : Ne touchez pas à nos portes en bois ! Le projet « Siwa & Tanger » - financé par l’Union Européenne dans le cadre du programme Euromed Heritage 4 - est mis en place par l’ONG italienne COSPE. Les
enfants, dont la plupart vivent dans l’ancienne médina, suivent tous leurs cours dans des écoles publiques de Tanger dont une, est située au milieu de la Médina. Frappant aux portes des propriétaires « Dans chaque école, nous avons impliqué des enfants âgés de 11 ou 12 ans suivant leurs cours dans une classe de la 51
CULTURE > MAROC
n La réaction des habitants de la Medina
aux activités du projet était très positive
«Nous avons donné des appareils photos jetables aux enfants et nous leur avons demandé de prendre des photos des anciennes portes en bois de la médina ».
n Les enfants de Tanger interviewent
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les habitants de la Médina
cinquième ou de la sixième année. La classe est encadrée par leur enseignant. Chaque classe a suivi huit séances de travail », explique d’emblée Ilaria Conti, responsable du programme au sein de Cospe. La première séance a été gérée par la conservatrice du musée de la kasbah afin d’initier les enfants à l’architecture urbaine et domestique. La deuxième séance a été dédiée aux visites intramuros dans l’ancienne médina, de la maison Abdellah Guennoun et du Riad Sultan afin de montrer aux enfants ce que c’est une maison traditionnelle. Visite extramuros au menu de la troisième séance : les enfants ont exploré les mille et une facettes du Palais Moulay Hafid, une des maisons les mieux conservés du royaume et où se tient annuellement le salon du livre de Tanger. Place aux portes pour la quatrième séance avec un cours de formation administré encore une fois par la conservatrice du musée de la kasbah. « Pour la cinquième séance, nous avons donné des appareils photos jetables aux enfants et nous leur avons demandé de prendre des photos des anciennes portes en bois de la médina. C’était en même temps une occasion de les initier à la photographie », explique Mme Conti. Les enfants se sont regroupés lors de la sixième séance afin de concevoir des questionnaires à administrer aux habitants de la médina. Objectif : répondre à la question « Pourquoi certains habitants de la médina préfèrent changer leurs portes en bois ? ». « Nous avons élaboré les ques-
« Le regard de l’enfant est magique, rigolo, mais en même temps très protecteur de l’environnement et du patrimoine » tionnaires ensemble, avec les enfants et les enseignants », insiste Fatema, éducatrice à Cospe. Septième séance : les enfants se sont improvisés enquêteurs et ont procédé aux interviews de plus de 200 habitants de la médina. « Les résultats sont très positifs. Ceux qui ont des portes en bois sont satisfaits de leurs portes. Plus encore, les habitants de la médina de Tanger sont conscients que les portes en bois font partie du patrimoine de la ville et de l’identité de l’ancienne médina », assure Ilaria. Ultime séance : une séance de dessin et conception de messages de sensibilisation sur la protection des portes en bois. « C’est une opération qui s’est bien passée, explique Abdelhak Jibet, instituteur à l’école Abdellah Guennoun, les enfants ont eu un sentiment très fort surtout après la visite au Palais Moulay Hafid. La séance réservée à la photographie a été également un moment fort de cette formation. Moimême, je ne croyais pas qu’il y avait autant de portes en bois à la médina. Les enfants ont fait plus de 150 photos de Projets en Marche - Voisinage Sud
CULTURE > MAROC
carrelage, afin que nos enfants prennent conscience de leurs racines », conclue à juste titre, l’enseignant Abdelhak Jibet. Texte de Hicham Houdaifa Photos de Karim Selmaoui, Hicham Chafadi, ©EU/Neighbourhood Info Centre
Euromed Heritage IV Contribution à l’échange d’expériences sur le patrimoine culturel, création de réseaux et promotion de la coopération Pays participants Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Territoire Palestinien Occupé, Syrie, Tunisie Durée: 2008 - 2012 Budget: 17 millions d'euros
n Beaucoup de ces portes ont plus de 100 ans
portes en bois alors que l’on n’a pas visité toute la médina. » Le regard de l’enfant est magique et très protecteur… En cette après-midi ensoleillée au musée de la kasbah, on va procéder au vote final qui déterminera les messages et les dessins les plus populaires afin d’en faire des cartes postales. Les dessins illuminent la salle, et les messages sont clairs et précis. Jugez-en vous-mêmes : « Matkich babi » (ne touche pas à ma porte), « les anciennes portes en bois nous gardent bien » ou encore « les anciennes portes en bois font partie de notre vie et de patrimoine ». En plus des cartes postales, les initiateurs du projet prévoient le lancement d’un jeu didactique et interactif sur le patrimoine architectural de la médina de Tanger. « Ce qui est le plus intéressant dans ce parcours, c’est le rapport qu’entretiennent les enfants avec l’architecture. Le regard Projets en Marche - Voisinage Sud
de l’enfant est magique, rigolo, mais en même temps très protecteur de l’environnement et du patrimoine. Nous sommes vraiment agréablement surpris du résultat final », s’exulte à juste titre Fatema. La réaction des habitants a été très positive puisqu’ils se sentaient concernés par cette initiative. « Ce genre d’initiatives devrait être multiplié dans d’autres secteurs du patrimoine comme pour les vieilles maisons, le zellige, le bois ou encore le
« Les habitants de la médina de Tanger sont conscients que les portes en bois font partie du patrimoine de la ville et de l’identité de l’ancienne médina »
Objectifs: Le programme facilite la coopération interdisciplinaire, l’échange de bonnes pratiques, la formation, la création de réseaux, les actions permettant de stimuler et de renforcer l’impact social et économique du patrimoine culturel et enfin, l’amélioration des cadres institutionnels et législatifs du patrimoine culturel dans les pays partenaires. Une unité régionale de soutien et de gestion (RMSU) apporte son appui technique à 12 projets, dont «Siwa & Tanger » fait partie. Pour en savoir plus: EU Neighbourhood Info Centre fiche du projet > http://www.enpiinfo.eu/mainmed.php?id=249&id_type=10& lang_id=469 Site web du projet > http://www.euromedheritage.net/index.cfm ?lng=fr ENPI fiche du Projet Euromed Heritage II et III > http://www.enpiinfo.eu/mainmed.php?id=73&id_type=10&l ang_id=469 Portail Thématique > http://www.enpiinfo.eu/thememed.php?subject=10 Siteweb du COSPE > http://www.cospe.it/cospe/old/francais.php
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CULTURE > LIBAN
Recherche producteurs pour raconter le ‘printemps arabe’
n La productrice libanaise Abir Hashem discute d’un tournage avec le cameraman
Le « printemps arabe » pourrait-il être le moteur de créativité dans le paysage cinématographique méditerranéen ? Des pages entières de scénarii sont certainement en marche, mais encore faut-il que ces films documentaires puissent être produits. Et c’est là que le bas blesse: A Beyrouth – comme dans d’autres pays de la Méditerranée –les producteurs locaux qui puissent soutenir l’épanouissement du paysage cinématographique local font défaut. Et là intervient le programme européen DOCmed en proposant de développer les capacités des producteurs locaux et de leur trouver des ouvertures hors de leur pays. BEYROUTH – Samedi soir ordinaire à Beyrouth. Les salles de cinéma de la capitale libanaise sont archicombles. Les centres commerciaux regorgent de jeunes avides de découvrir les derniers films de la saison. Seul bémol dans le paysage cinématographique libanais : une quasiabsence flagrante de films locaux, alors 54
que les productions américaines et européennes envahissent le marché. Le même constat peut être fait si on regarde les programmations des télévisions arabes : peu de documentaire de création de qualité des pays de la région. D’où l’intérêt pressant d’un programme comme DOCmed, qui « vise à développer
les capacités des producteurs locaux et de leur trouver des ouvertures hors de leur pays, pour que leur travail puisse être connu et reconnu au niveau international », déclare Roula Kobeissi, coordinatrice du programme, à Beyrouth. L’idée de DOCmed est née grâce à trois partenaires : Beirut DC (Liban), Eurodoc Projets en Marche - Voisinage Sud
CULTURE > LIBAN
« L’organisation d’un programme de formation pour les producteurs est, en soi, visionnaire. »
(France) et Doc à Tunis (Tunisie), en coopération avec Arte France. Son objectif est clair : former des producteurs de pays arabes du sud de la Méditerranée. Sa cible est facile : essentiellement les projets de documentaires créatifs. D’une durée de 3 ans, (2011 à 2013) Docmed est issue d’un programme européen plus large, Euromed Audiovisuel III, dont le but est de contribuer au développement du secteur cinématographique dans les pays du sud du bassin méditerranéen. Un manque à combler En plein cœur de Furn el Chebbak, Beirut DC occupe le rez-de-chaussée d’un ancien immeuble. Avec son petit jardin, son bassin d’eau et ses volets rouges, ses bureaux contrastent avec le brouhaha insupportable de ce quartier populaire de Beyrouth. L’intérieur est une vraie ruche en ébullition. Lui aussi hyperactif, Jad Abi khalil, responsable de Beirut DC explique :
n La coordinatrice libanaise de DocMed, Roula Koubeissi
Projets en Marche - Voisinage Sud
n La productrice libanaise Abir Hashem
« Nous avons d’excellents projets qui n’aboutissent pas à cause notamment d’une carence de formation des producteurs. Il existe aussi un manque de formation dans la coproduction, alors qu’une grande partie des films se fait aujourd’hui en coproduction avec des pays européens. D’où l’intérêt de DOCmed pour la formation à la coproduction dans le monde arabe et au Liban ». « On voit souvent le réalisateur porter les deux casquettes de producteur et réalisateur, alors qu’il serait plus efficace que le
réalisateur se concentre sur son travail, et qu’on laisse à un producteur professionnel le soin et les moyens de faire son travail ». Pour elle, c’est peut-être une des raisons principales du manque de production cinématographique importante au Liban. De plus, il n’y a pas assez de visibilité pour les films libanais sur le marché local, arabe et international. Le projet DOCmed est donc venu pour combler les besoins du cinéma arabe et libanais en matière de production, afin de trouver des solutions et aider les producteurs à assumer pleinement leurs rôles et fonctions. Dix producteurs ou producteurs/ réalisateurs sont choisis chaque année dans le cadre de ce programme cofinancé par l’UE. Les bénéficiaires doivent déjà avoir un projet en développement, mais dont la réalisation n’a pas encore commencé. Un programme de formation ‘visionnaire’ Assise confortablement dans un café beyrouthin, entourée de ses collaborateurs, Abir Hashem, travaille à « Solo films » au Liban, une maison de production vieille d’une dizaine d’années. Elle est la productrice d’ «Asphalte », un documentaire réalisé par Ali Hammoud sur le parcours de chauffeurs de poids lourds, du Liban jusqu’à Dubaï ou au Qatar, en 55
CULTURE > LIBAN
notre cas de documentaires », conclut Roula Kobeissi. Texte par Antoine Ajoury Photos par Nabil Mounzer, ©EU/Neighbourhood Info Centre
Euromed Audiovisual III http://www.euromedaudiovisuel.net EuroMed Audiovisuel III contribue au dialogue interculturel et à la diversité culturelle en soutenant le développement des capacités cinématographiques et audiovisuelles dans les pays du sud de la Méditerranée Pays participants Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Territoire palestinien occupé, Syrie, Tunisie
n La productrice libanaise Myriam Sassine à Beyrouth
Durée: 2009 - 2012
« L’intérêt majeur de bénéficier de financements externes, européens, dans le cadre de DocMed, est de pouvoir être indépendant vis-à-vis des pressions que peuvent exercer certaines stations de télévision » passant par la Syrie et la Jordanie. Selon elle, « l’intérêt majeur d’avoir des financements est l’indépendance que cela procure. Nous n’avons pas ainsi besoin de nous diriger vers une télévision et subir ses conditions, ses orientations idéologiques, ses immixtions dans les travaux du film ». En présentant sa candidature à DOCmed, elle espérait avoir une chance de suivre un projet de A à Z. « Quand on me demande parfois, je réponds que je suis productrice de A à C ou de C à D », affirme-t-elle dans un éclat de rire. « C’est donc une opportunité énorme pour moi de mieux approfondir les méandres de ce métier en commençant par le financement jusqu’au pitching, en passant par le budget. L’expérience partagée par des professionnels 56
européens est donc d’une grande utilité », ajoute-t-elle. Myriam Sassine, travaille à « Abbout productions », une maison de production créée en 1998. Myriam travaille sur un film réalisé par Carine Doumit, intitulé « Journal d’un dépaysement », un journal intime, sur l’histoire de la réalisatrice et sa relation avec son pays, le Liban. «L’organisation d’un programme de formation pour les producteurs est, en soi, visionnaire. La fonction de producteur de films n’est pas très connue dans les pays du Proche-Orient. Il y a plein de réalisateurs, et pas assez de producteurs », affirme-t-elle. « Le problème du Liban se pose également en Syrie et en Algérie. Dans certains pays, comme au Maroc, il y a des fonds pour financer les films, mais il n’y a pas assez de savoirfaire pour trouver le financement adéquat pour chaque production », estime, d’autre part, Myriam. Toujours sur le plan régional, le printemps arabe fut d’une inspiration pour les participants qui étaient très enthousiastes lors de leur première session. « Ils ont pu ainsi partager leurs expériences personnelles et leurs espoirs communs. Les révoltes arabes étaient, si l’on peut dire, une motivation majeure qui a pesé aussi positivement sur les projets des participants, surtout qu’il s’agit dans
Budget: 11 millions d'euros Objectifs: Ce programme vise à contribuer au dialogue interculturel et à la diversité culturelle en soutenant le développement des capacités cinématographiques et audiovisuelles dans les pays partenaires. Il encourage la complémentarité et l’intégration des secteurs cinématographiques et audiovisuels de la région, tout en visant à harmoniser les politiques et législations du secteur public. Il s’appuie sur les réalisations d’EuroMed Audiovisuel I et Audiovisuel II pour exploiter le potentiel d’un marché de l’audiovisuel en développement dans la région et pour aider les films méditerranéens à se tailler une place sur la scène mondiale. Pour en savoir plus: Fiche du projet DoCMed > http://euromedaudiovisuel.net/general.aspx? menu=1&treeID=11139&lang=fr&documentID=11143 Beirut DC > http://www.beirutdc.org/beirutdc/default.aspx EU Neighbourhood Info Centre - fiche projet > http://www.enpiinfo.eu/mainmed.php?id=334&id_type=10&la ng_id=469 Portail thématique > http://www.enpiinfo.eu/thememed.php?subject=9
Projets en Marche - Voisinage Sud
CULTURE > JORDANIE
À la recherche de la Pétra médiévale
n Des touristes visitent l’ancienne forteresse de Shobak
Faire le lien entre la cité rose et la forteresse des croisés, promouvoir le développement d’une communauté marginale, redécouvrir et mettre en valeur les richesses d’une région oubliée du sud de la Jordanie : tels sont les différents volets du projet euro-méditerranéen « Liaisons pour la croissance ». L’objectif ? Faire de la ville de Shobak et de son château un nouveau site touristique du Royaume, aider les habitants à exploiter sa riche histoire et développer le tourisme durable. Projets en Marche - Voisinage Sud
AMMAN - « Vous voyez ce château-fort ? C’est un véritable miracle ». Chiara Marcotulli, archéologue italienne, passe au crible plusieurs strates de l’histoire alors qu’elle met au jour l’entrée du château de Shobak, place-forte millénaire des croisés situé au sud de la Jordanie. Un site que les siècles ont progressivement détruit et recouvert de pierres et qui est loin d’avoir livré tous ses secrets. « Nous commençons seulement à comprendre quels ont été les grandes phases de l’histoire de ce château. C’est un site d’une grande superficie et les fouilles seront longues, » explique-t-elle. Chiara est l’une des nombreuses boursières en mission en Jordanie pour mettre au jour ce château qui pourrait révéler toute l’importance historique de la ville et aider à mettre en valeur les richesses d’une région oubliée. Doté d'une enveloppe de 14 millions d'euros, CIUDAD (Cooperation in Urban Development and Dialogue, Coopération en matière de développement urbain et dialogue), vise à promouvoir le dialogue et la coopération entre les acteurs locaux de l’UE et les pays partenaires du Sud et de l’Est du voisinage (région de l’IEVP). Ces objectifs sont soutenus par un large éventail d’actions, parmi lesquelles le projet « Liaisons pour la croissance ». Soutenu par la Commission européenne à hauteur de 550.000 euros, il est mis en œuvre en Jordanie et en Arménie et entend aider les zones marginales et développer le tourisme durable. En Arménie, le projet est mis en œuvre dans les régions d'Ararat et de Vajots Dzor, et deux districts touristiques ont été identifiés : « L’Arménie est un superbe pays, doté d’un réel potentiel touristique », explique Catia Segnini, directrice de FAR Maremma, partenaire italien du projet. « Et aujourd’hui, en coopération avec nos partenaires locaux, nous élaborons notre plan directeur d’urbanisme et mettons au point des séjours touristiques qui seront proposés aux acteurs concernés, par exemple les agences de voyage de l'UE. Ce projet a pour objectif 57
CULTURE > JORDANIE
n L’archéologue italienne Chiara Marcotulli
« Nous essayons de relier Pétra à Shobak en donnant aux touristes de bonnes raisons et les moyens de faire une halte au château. Historiquement, les deux villes étaient liées et nous voulons à présent rétablir ce lien. » général d’attirer davantage de touristes dans le pays et, à terme, d'assurer un réel impact sur le développement local ». Une vitrine pour le sud médiéval de la Jordanie À Shobak, le projet multi-volets soutenu par l’UE a pour objectif de restaurer le château, de le faire connaître dans le monde occidental et de le faire découvrir aux visiteurs de la région. « Grâce à notre travail, nous espérons bien mettre en valeur le sud médiéval de la Jordanie, » poursuit Chiara. « Shobak – explique-t-elle – était situé au milieu de la route reliant le nord de la Jordanie aux régions du sud, dont le port d'Aqaba et Pétra. » Perchée en haut d'une colline, le château-fort de Shobak a joué un rôle majeur dans l'histoire médiévale du pays, puisqu'il a 58
notamment servi d'avant-poste au Roi Baudouin Ier de Jérusalem. Après un siège de deux ans, la place forte tombe aux mains de Saladin, en 1189. Le chef musulman préserve la structure du château et en fait un avant-poste de commandement pour la nouvelle capitale de la région. Plusieurs siècles plus tard, la ville tombera progressivement dans l’oubli, négligée par les puissances régionales, avant de disparaître, laissant seuls les habitants avec leurs souvenirs de gloire passée et leurs problèmes de pénurie de logement et de chômage. Guido Vannini, professeur d'archéologie médiévale à l'université de Florence, explique que les liens qui pourront être noués avec la cité rose sont la clé du succès du projet. « Nous essayons de relier Pétra à Shobak en donnant aux touristes des bonnes raisons – et les moyens – de faire une halte à Shobak. Historiquement parlant, les deux villes ont été liées et nous voulons à présent rétablir ce lien » nous dit-il, rappelant que l'Université de Florence a récemment organisé une exposition sur les liens entre Shobak et Pétra : « From Pétra to Shobak ». « Après l’exposition, l'afflux de touristes à Shobak a augmenté de 23%, soit deux fois plus que dans les autres régions touristiques du pays ». Située à un jet de pierre de Pétra, Shobak a été négligée par les touristes en route
vers la cité rose, perle du secteur du tourisme en Jordanie. Un accord a déjà été conclu entre le gouvernorat de Pétra et la municipalité de Shobak en vue de la création d'un réseau de transport reliant Shobak et Pétra, qui accueille chaque année 800.000 touristes. Pour l’équipe italienne, la visite du château complétera à merveille l’itinéraire des milliers de touristes qui envahissent Pétra. Selon M. Vannini, le projet commencera à attirer les touristes étrangers lorsque des infrastructures appropriées (hôtels, restaurants, etc.) auront été mises en place. Le projet « Liaisons pour la croissance » s’articule ainsi autour d’un plan directeur d’urbanisme qui vise à développer les abords du site sans porter atteinte à l'infrastructure de base. « Notre plan d’urbanisme touristique – explique-t-il – est conçu comme un guide flexible pour le développement durable du site, c'est-à-dire avec la mise en place d'une infrastructure touristique préservant totalement les ressources historiques. Dans quelques années, la région pourrait se voir dotée d'itinéraires touristiques et d’un fléchage pour guider les visiteurs sur le site. » Émigrer pour trouver un emploi Pour l’instant, les visiteurs ne se bousculent pourtant pas sur le site. Juste à côté de la porte en bois du château, une petite salle où attend le seul et unique guide local, Mohammad Rawashdeh qui nous explique : « Les touristes préfèrent Pétra, plus glamour. Mais ce dont ils ne se rendent pas compte, c’est que Shobak fait partie intégrante de l’histoire de Pétra ». Cette ville de 15.000 habitants est nichée Projets en Marche - Voisinage Sud
CULTURE > JORDANIE
n Fouilles au château de Shobak
entre des collines couvertes d'oliviers et de vignes. Au fil des décennies, la moitié des habitants de Shobak sont partis pour Amman et d'autres villes pour trouver un emploi stable dans le secteur public. Ceux qui sont restés ici nous expliquent que l’industrie locale est inexistante. Dans la rue principale, Abu Odai, officier à la retraite de 66 ans est assis sur un banc. Il se repose et
« Après l’exposition, l'afflux de touristes à Shobak a augmenté de 23%, soit deux fois plus que dans les autres régions touristiques du pays. »
discute avec des amis qui terminent une longue journée de travail. Il a vu sa ville d’origine traverser de nombreuses crises. « Nous ne recevons pas beaucoup d’aide de la part du gouvernement, » explique-t-il. « Ce qu’il nous faut, ce sont des projets pour persuader les habitants de rester ici et participer à la revitalisation de la ville qui se vide lentement de ses habitants », poursuit-il. Et telle est précisément l’idée derrière ce projet financé par l’UE : travailler avec des réseaux locaux afin de promouvoir la coopération entre les communautés urbaines et marginales. Le projet a pour principe clé de promouvoir les synergies en vue de la mise en place d'infrastructures touristiques et de l’organisation de séjours. En créant des agences locales, les partenaires définissent les caractéristiques et les priorités de leurs districts touristiques, ils s’emploient à développer des produits touristiques et élaborent des plans de marketing et de promotion. Il faudra des années avant que des fouilles minutieuses ne révèlent – peut-être – les secrets de Shobak. D’ici là, le projet européen « Liaisons pour la croissance » pourrait offrir à la communauté locale l’occasion de mettre au jour et de valoriser les richesses de cette ville oubliée du sud de la Jordanie. Texte et photos de Mohammad Ben Hussein, ©EU/Neighbourhood Info Centre
« Dans quelques années, la région pourrait se voir dotée d'itinéraires touristiques et d’un fléchage pour guider les visiteurs sur le site. » CIUDAD – Développement urbain durable http://www.ciudadprogramme.eu/index.php Vise à aider les gouvernements locaux de la région de l’IEVP à s’attaquer durablement aux problèmes de développement urbain, en encourageant la coopération entre les acteurs locaux et leurs homologues de l’UE Pays participants Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Territoire palestinien occupé, Syrie, Tunisie, Arménie, Azerbaïdjan, Belarus, Géorgie, Moldavie, Russie, Ukraine Durée: 2009 - 2013 Budget: 14 millions d’euros Objectifs: Le programme CIUDAD (« Cooperation in Urban Development and Dialogue – Coopération en matière de développement urbain et dialogue) entend promouvoir la compréhension mutuelle, le dialogue et la coopération entre les acteurs locaux de l’UE d'une part et des pays partenaires du Sud et de l'Est du Voisinage (région IEVP) d’autre part. Il assure à cet effet le renforcement des capacités pour la modernisation et le renforcement des gouvernements locaux et régionaux. «Liaisons pour la croissance » est l’un d’eux. Pour en savoir plus: “Liaisons for growth” fiche projet > http://www.ciudadprogramme.eu/grant.php?lang=4 CIUDAD – fiche > http://www.enpiinfo.eu/maineast.php?id=310&id_type=10 EU Neighbourhood Info Centre - Société civile & autorités locales > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=14&lang_id=469
n Un bédouin a été recruté par le gouvernement pour garder le château de Shobak
Projets en Marche - Voisinage Sud
EU Neighbourhood Info Centre - Les personnes derrière les projets : entretien avec Frank Samol - CIUDAD > http://www.enpi-info.eu/mainmed.php?id= 313&id_type=6&lang_id=469
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CULTURE > ISRAËL
Un film entre Gaza et Londres:la mission impossible d’Awatif Une fille vivant dans un camp de réfugiés à Gaza qui veut devenir metteuse en scène internationale : ça peut bien sembler une mission impossible, mais cela est en train de devenir une réalité pour Awatif Aljedaili, résidente du camp de réfugiés Bourej, dont le film ‘Dans l’attente du Paradis’ a été sélectionné pour participer à la prestigieuse école d’été qui se tient à Amsterdam en 2011 à l’occasion du Festival international du documentaire (IDFA). Par le biais du programme Euromed Audiovisuel, financé par l’Union européenne, Awatif a réussi à suivre des séminaires de formation sur Skype, et à envoyer les premiers extraits de son film par internet… C’est l’histoire d’un rêve qui devient réalité.
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n Une scène sur le plateau de tournage de « Cinq caméras brisées »
JÉRUSALEM - Si la réalisation du premier documentaire semble être une tâche difficile pour ceux qui aspirent à devenir des réalisateurs au Moyen Orient, c’est presqu’une mission impossible pour les résidents de la bande de Gaza. Awatif Aljedaili, résidente du camp d’elBourej âgée d’une trentaine d’années, s’est vue refuser par Israël la permission de quitter Gaza. Elle a eu également à affronter l’hostilité des autorités du Hamas à Gaza, qui avaient peur que son film ne serve à encourager l’émigration. Mais elle s’est battue contre toute attente, et elle se trouve actuellement à Londres en train de mettre les dernières touches à son documentaire ‘Dans l’attente du Paradis’, sélectionné pour participer à la prestigieuse école d’été qui se tient à Amsterdam en 2011 à l’occasion du Festival international du documentaire (IDFA).
Trois générations de pêcheurs dans un camp de réfugiés Le sujet du film d’Aljedaili tourne autour de trois générations de pêcheurs originaires du camp de réfugiés de Shati, et leur manière de concevoir le conflit et la notion de patrie. Le grand-père a fuit Jaffa en 1948 et possède toujours les clés de l’ancienne maison de famille, à laquelle il rêve de retourner un jour. Son fils est très occupé par sa survie au quotidien pour rêver de rentrer. Le petit fils, quant à lui, considère que le paradis est partout ailleurs sauf à Gaza, et il a hâte de quitter le pays. L’idée est bonne, mais sans le projet Greenhouse, elle n’aura jamais pu prendre forme. Grâce au programme Euromed Audiovisuel financé par l’Union européenne, Aljedaili a réussi à entrer en contact avec Greenhouse, basé à Tel Aviv, qui aide les réalisateurs à développer leurs aptitudes et à lancer leurs films sur le Projets en Marche - Voisinage Sud
CULTURE > ISRAËL
« Les tunisiens étaient étonnés de voir les israéliens et les palestiniens travailler aussi bien ensemble, et vous aurez du mal à croire le nombre de demandes que nous recevons de Gaza. Les artistes qui habitent cette région de conflit ressentent un réel besoin d’établir un dialogue sincère, et c’est justement ce que Greenhouse est en mesure de leur offrir ». marché international. Quelques 16 projets et 21 réalisateurs originaires d’Algérie, de l’Égypte, de la Jordanie, d’Israël, du Liban, de la Palestine, du Maroc, et de la Tunisie ont été sélectionnés pour participer au projet de formation de Greenhouse cette année. Greenhouse organise trois séminaires au cours de l’année, et accorde un espace culturel unique aux réalisateurs israéliens et arabes pour leur permettre de communiquer et d’échanger leurs idées. Puisqu’on avait empêché Awatif de quitter Gaza, son frère, Mohammed, résident de la Cisjordanie, avait assisté aux séminaires à sa place, devenant ainsi le réalisateur du film. Awatif a participé au moyen de téléconférences sur Skype et a été impliquée dans toutes les décisions clés qui ont été prises. « Greenhouse m’a beaucoup aidé car, même si je n’étais pas en mesure de participer aux séminaires, j’ai réussi à envoyer les premiers extraits de mon film au moyen d’internet à Sigal Yeruda, la directrice générale du bureau de Greenhouse à Tel Aviv, et elle me renvoyait des conseils que j’ai trouvés très utiles », explique Awatif. En janvier 2009, à une étape critique où la date limite pour présenter la demande de subvention pour son projet de film se rapprochait, Awatif a été forcée de fuir son Projets en Marche - Voisinage Sud
n Sigal Yehuda, directrice générale du Programme de développement
de Greenhouse pour les réalisateurs de documentaires
domicile quand la région a été bombardée par les israëliens pendant la guerre de Gaza. Yehuda considère que le scepticisme de certains participants arabes vis-à-vis d’un programme qui promeut ouvertement la coopération entre israéliens et arabes a été dépassé quand ils ont vu les résultats du travail de leurs propres yeux. « Si vous croyez qu’il ne devrait pas y avoir de dialogue, vous ne laissez plus de place à l’espoir. Je me souviens que les tunisiens étaient étonnés de voir les israéliens et les palestiniens travailler aussi bien ensemble, et vous aurez du mal à croire le nombre de demandes que nous recevons de Gaza. Les artistes qui habitent cette région de conflit ressentent un réel besoin d’établir un dialogue sincère, et c’est justement ce que Greenhouse est en mesure de leur offrir ». Un réalisateur palestinien et un réalisateur israélien travaillent ensemble à Paris Greenhouse a acquis plusieurs années d’expérience et suit les jeunes réalisateurs à chaque étape de conception de leur film, notamment la direction artistique, la production cinématographique et la présentation du documentaire à des investisseurs potentiels. Au cours des cinq dernières années, Greenhouse a eu comme partenaires des instituts cinématographiques et des compagnies de production d’origine néerlandaise, turque, espagnole, et marocaine. Le palestinien Emad Burnat et l’israélien Guy Davidi travaillent actuellement à Paris
« Les projets comme Greenhouse sont absolument indispensables puisque le plus difficile pour ceux qui aspirent à devenir réalisateurs est que leur premier film soit lancé ». avec une compagnie française de production afin de réaliser leur documentaire « Cinq caméras brisées ». Un autre succès de Greenhouse, le documentaire a été filmé par Burnat qui se concentre sur la lutte contre la construction par Israël de la barrière de séparation dans Bilin, son village natal en Cisjordanie. Il montre l’impact qu’a eu cette campagne sur sa vie au quotidien, qu’il s’agisse de la mort d’un ami proche, de l’arrestation de ses frères, ou du passage de son plus jeune fils à l’âge adulte. Greenhouse a proposé à Burnat de travailler avec Guy Davidi, un réalisateur israélien militant, qui a été également impliqué dans la lutte de Bilin. « Ce qui m’a surpris le plus dans le métrage d’Emad, c’est la scène où son père tente d’intercepter une voiture de militaires israéliens qui emmenait son frère en prison », explique Davidi. « Quand j’ai vu cette scène, je n’avais aucun doute que ce film a été réalisé du point de vue personnel d’Emad ». « Cinq caméras brisées » a gagné le prix du 61
CULTURE > ISRAËL
house, et l’Union demeure notre plus important partenaire stratégique ». Texte par Marc Weiss Photos par Oliver Weiken et le projet Greenhouse ©EU/Neighbourhood Info Centre
Euromed Audiovisuel III http://www.euromedaudiovisuel.net/ EuroMed Audiovisuel III contribue au dialogue interculturel et à la diversité culturelle en soutenant le développement des capacités cinématographiques et audiovisuelles dans les pays du sud de la Méditerranée n Emad Bornat, réalisateur du film « Cinq caméras brisées »
meilleur projet lors du forum de lancement de Greenhouse en 2009, et les deux réalisateurs palestinien et israélien espèrent que le documentaire sera présenté en avantpremière en France le printemps prochain. « Les projets comme Greenhouse sont absolument indispensables puisque le plus difficile pour ceux qui aspirent à devenir réalisateurs est « de lancer » leur premier film, explique Davidi. « C’est surtout le cas dans certains pays du Moyen-Orient comme la Jordanie, l’Égypte et le Maroc, où il y a peu d’opportunités et un manque de subventions accordées aux réalisateurs de documentaires locaux». “Quand on rencontre l’autre, les choses ne sont plus les mêmes” Dorit Inbar, la directrice générale du
n « Dans l’attente du paradis », par Awatif Aljedaili
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Nouveau fond pour le cinéma et la télévision basé à Tel Aviv, qui a lancé le projet Greenhouse et qui en demeure la partenaire principale, a évoqué avec beaucoup de fierté le double impact de ce dernier. « D’abord, il s’agit d’un projet qui a eu beaucoup de succès. Au bout de 5 ans, Greenhouse a produit 10 films qui ont reçu des prix au cours de festivals à travers le monde, et plus de la moitié de nos projets sont actuellement en cours de développement. Ensuite, les relations se tissent entre les réalisateurs de la Méditerranée, et pas seulement entre israéliens et arabes, mais aussi entre turcs et kurdes, et d’autres nationalités. Ces personnes ne pourront plus jamais dire ‘nous n’avons pas rencontré l’autre’, et l’impact de ces rencontres se fera sentir pendant plusieurs années ». Inbar a parlé fièrement du rôle de l’Union européenne. « Sans la vision de l’Union européenne, il n’y aurait pas eu Green-
« Ces personnes ne pourront plus jamais dire ‘nous n’avons pas rencontré l’autre’, et l’impact de ces rencontres se fera sentir pendant plusieurs années ».
Pays participants Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Territoire palestinien occupé, Syrie, Tunisie Durée: 2009 - 2012 Budget: 11 millions d'euros Objectifs: Ce programme vise à contribuer au dialogue interculturel et à la diversité culturelle en soutenant le développement des capacités cinématographiques et audiovisuelles dans les pays partenaires. Il encourage la complémentarité et l’intégration des secteurs cinématographiques et audiovisuels de la région, tout en visant à harmoniser les politiques et législations du secteur public. Il s’appuie sur les réalisations d’EuroMed Audiovisuel I et Audiovisuel II pour exploiter le potentiel d’un marché de l’audiovisuel en développement dans la région et pour aider les films méditerranéens à se tailler une place sur la scène mondiale. Pour en savoir plus: Fiche du Projet Greenhouse > http://euromedaudiovisuel.net/general.asp x?menu=1&treeID=11139&lang=fr&documentID=11144 Site web de Greenhouse > http://www.ghfilmcentre.org/ EU Neighbourhood Info Centre - Fiche de projet > http://www.enpi-info.eu/mainmed.php? id=334&id_type=10&lang_id=469 Portail thématique > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=9&lang_id=469
Projets en Marche - Voisinage Sud
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Économie
Un jeune garçon brandit une affiche commerciale dans un centre commercial d’Amman. (Photo par Mohammad Ben Hussein ©EU/Neighbourhood Info Centre).
ÉCONOMIE > TUNISIE
L’emploi, la priorité numéro un pour la nouvelle Tunisie Une bonne éducation est une condition préalable pour un bon emploi : alors que la Tunisie se bat pour atténuer les effets pervers du chômage, la Fondation Européenne pour la formation (ETF) a placé le pays parmi ses priorités et y a doublé le budget alloué. Le gouvernement tunisien a récemment adopté un programme destiné à accompagner les demandeurs pour les aider à intégrer le marché de l'emploi. L’ETF s’est engagée à soutenir cette action, avec le but d’aider la Tunisie à exploiter au maximum le potentiel de ses ressources humaines.
n Des jeunes diplômés font un sit-in devant le ministère de l'emploi
TUNIS - Avec une dextérité remarquable, toujours affable, il manipule quotidiennement la machine à café de l'établissement pour servir les clients. Depuis le mois de décembre de l'année dernière, Lotfi Ltaief, la trentaine, travaille en tant que serveur dans ce café, dans la localité du Bardo, à trois kilomètres du centre de Tunis. Lotfi, depuis près de six ans, a acquis une expérience respectable dans ce domaine. Ce que beaucoup de clients ignorent, c'est que ce jeune est titulaire d'une maitrise en lettres arabes depuis l'année 2003. Depuis cette date il n'a pas cessé d'envoyer des demandes d'emploi, de déposer sa candidature pour le poste d'enseignant au ministère de l'éducation nationale et de participer à divers concours. En vain. Il s'agit d'un cas parmi tant d'autres qui pose le véritable problème auquel la Tunisie fait face. Une préoccupation majeure Sur une population de plus de dix millions d'habitants, le nombre de chômeurs est
Projets en Marche - Voisinage Sud
officiellement estimé à près de 700.000 dont 150.000 de diplômés du supérieur. Le problème de la création de nouveaux postes d'emploi constitue aujourd'hui en Tunisie un problème majeur. Depuis la révolution du 14 janvier, les mouvements de revendications sociales se sont amplifiés. Les grèves sauvages, les sit-in, se sont multipliés un peu partout dans tous les secteurs public et privé, entrainant purement et simplement la fermeture d'un certain nombre d'entreprises. L'emploi a constitué la principale préoccupation de tous les gouvernements depuis l'indépendance. Le problème est crucial aujourd'hui car il intervient à un moment où le pays passe par une étape difficile. Les citoyens sont devenus plus revendicatifs et n'hésitent pas à recourir aux démonstrations de force. Malgré cette situation, un travail en profondeur est en train d'être réalisé pour venir à bout de ce phénomène et atténuer un tant soit peu, les effets pervers du chômage en Tunisie. Le gouvernement provisoire dirigé par 65
ÉCONOMIE > TUNISIE
«L'ETF n'est pas un bailleur de fonds mais un partenaire technique qui mobilise l’expertise et les expériences souhaitées pour aider à la décision en matière de choix de politique de formation et d’emploi » M. Béji Caid Essebsi, est plus que conscient de la situation et est en train de fournir des efforts notables. « Je n'ai pas de baguette magique" insiste-t-il à chaque occasion. Dès mars dernier, le gouvernement provisoire a lancé un programme d’urgence pour l’emploi destiné à accompagner les demandeurs pour les aider à intégrer le marché de l'emploi. Le programme s'articule autour de quatre axes, explique M. Ali Takout, directeur régional : développer les emplois salariés, à travers la création de 40.000 postes dans le secteur public et privé, à sauvegarder les postes en aidant les entreprises connaissant une situation
n Le nombre de chômeurs est officiellement estimé à près de 700.000, dont 150.000 de diplômés du supérieur
difficile, développer l’entrepreneuriat et la micro-entreprise, aider les jeunes à créer leurs propres activités, améliorer l’employabilité des jeunes diplômés (volet Amal du programme, qui signifie ‘espoir’ en arabe) tout en leur assurant une aide à la recherche active d’emploi. De bonnes pratiques La problématique de l’emploi n'est pas uniquement liée à la création de postes,
« Après la révolution, nous avons doublé le budget alloué à notre action en Tunisie. Elle est devenue pour nous prioritaire »
n Jeune diplômé en lettres arabes travaillant comme un serveur dans un café
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Projets en Marche - Voisinage Sud
ÉCONOMIE > TUNISIE
ment, la formation professionnelle et l’emploi. L’accent sera mis tout spécialement sur le développement de compétences utiles sur le marché de l’emploi. « Notre fondation est perçue comme un conseiller fiable et impartial – poursuit Mme Dorléans – et comme un partenaire capable de réunir autour de la table divers acteurs. Cette neutralité est particulièrement appréciée par le gouvernement tunisien ».
n Le directeur régional de l'emploi, Mr. Ali Takout
mais également à la réforme de l'éducation et de la formation professionnelle, ainsi qu’à l'instauration de bonnes pratiques destinées à introduire plus de célérité et de transparence dans la gestion de ce dossier. Depuis 1995, la Fondation Européenne pour la Formation (ETF) coopère avec la Tunisie dans le domaine de la formation, en appuyant la politique suivie par le ministère et en accompagnant la stratégie de mise en place. Mme Marie Dorléans, directrice de l'ETF pour la Tunisie, explique : « L'ETF n'est pas un bailleur de fonds mais un partenaire technique qui mobilise l’expertise et les expériences souhaitées pour aider à la décision en matière de choix de politique de formation et d’emploi. A l’heure où la priorité nationale porte sur l’emploi et le développement régional, nous avons par exemple initié un projet d'appui à une région bien déterminée, le gouvernorat de Medenine, située près de la frontière tuniso-libyennes. Dans cette phase initiale, nous avons organisé des rencontres avec l'ensemble des acteurs, dans le but de diagnostiquer les problèmes de la région en vue d’améliorer l’adéquation entre offre de formation et emploi. Après la révolution, nous avons doublé le budget alloué à notre action en Tunisie. Elle est devenue pour nous prioritaire ». « Nous n'avons pas de modèle à vendre – continue Mme Dorléans – mais nous essayons de voir les approches ou pratiques, en particulier européennes, qui peuvent inspirer la Tunisie. À moyen terme, l’ETF s’est engagée à soutenir les politiques régionales intégrant l’enseigneProjets en Marche - Voisinage Sud
Les mouvements n’arrêtent pas Malgré les mécanismes nouvellement introduits pour faciliter l'accès à l'emploi, les mouvements de revendications n'arrêtent pas. Depuis le 16 mai dernier, un groupe de jeunes diplômés protestent à leur manière en implantant une tente devant le ministère de la formation professionnelle et de l'emploi. Ils protestent contre des mécanismes de création d'emploi mise en place durant l'ère de Ben Ali et qui sont pour eux, aujourd'hui obsolètes. De l’autre côté, du 12 au 30 septembre le gouvernement a lancé le « mois de l'emploi », une initiative qui vise surtout à rapprocher les acteurs de l'emploi, c'est-à-dire les demandeurs d'emploi, les institutions de formation et les entreprises publiques et privées, la société civile, les partis politiques et les agences de recrutement. Plusieurs thèmes seront abordés, du déblocage de crédits pour certains projets, au contrats de pré-
« Nous n'avons pas de modèle à vendre, mais nous essayons de voir les approches ou pratiques, en particulier européennes, qui peuvent inspirer la Tunisie » embauche dans les entreprises privées, au parrainage de demandeurs d'emploi par des employeurs pour financer des formations. Des journées portes ouvertes dans les entreprises sont aussi prévues. Texte et photos par: Lotfi Touati, ©EU/Neighbourhood Info Centre
n Siège de l'agence tunisienne de l'emploi
Fondation européenne pour la formation http://www.etf.europa.eu/web.nsf/pages/Home_FR?OpenDocument Objectifs: La Fondation européenne pour la formation est une agence créée par l'Union européenne qui vise à contribuer au développement des systèmes d'éducation et de formation de ses pays partenaires européens. Dotée d'un budget annuel de 18 millions d'euros, sa mission consiste à aider les pays en développement et en phase de transition à exploiter le potentiel de leurs ressources humaines par le biais de réformes dans les secteurs de l’éducation, de la formation et de l’emploi, dans le cadre de la politique de relations extérieures de l’UE. Pour en savoir plus: Fondation Européenne pour la formation - Site internet > http://www.etf.europa.eu/web.nsf/pages/Home_FR?OpenDocument Fondation Européenne pour la formation - Tunisie > http://www.etf.europa.eu/web.nsf/pages/Tunisia EU Neighbourhood Info Centre - Portail Thematique – Education & Formation > http://www.enpiinfo.eu/thememed.php?subject=11&lang_id=469
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ÉCONOMIE > JORDANIE
‘Made in Agadir Zone’: Une vision ambitieuse pour le futur, mais quels espoirs ? En 2004, quatre pays arabes de la région méditerranéenne ont signé un pacte – l'Accord d'Agadir – afin de mettre en place une zone de libre-échange au niveau régional et de promouvoir l’intégration économique. L’idée maîtresse était d’éliminer les obstacles au commerce et de faciliter les investissements. La Commission européenne a largement soutenu ce projet sur le plan financier et elle continue à le financer. Sept ans après la signature de l'accord, alors que les experts continuent à travailler sur les aspects techniques, les chiffres pointent vers un avenir prometteur : les échanges commerciaux au sein de cette zone ont en effet augmenté de 45%. Pourtant, l'accord doit toujours faire face à de nombreux obstacles, qui l'empêchent de réaliser tout son potentiel.
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n Un ouvrier de l’usine textile CJC, dans la zone industrielle de Sahab, près d’Amman
AMMAN - « Made in Agadir Zone » : un rêve ou un objectif ambitieux pour l’avenir de l’Accord commercial d’Agadir, le pacte qui vise à mettre en place une zone euro-méditerranéenne de libre-échange ? « Nous aimerions voir un jour commercialisés des produits « made in Agadir Zone », utilisant toutes les règles d'origine des industries et secteurs des quatre pays signataires de l'accord, à savoir l’Égypte, la Jordanie, la Tunisie et le Maroc, » explique Waleed El Nozahy, président-directeur de l'Unité technique d'Agadir. Sept ans environ après la signature de l’accord, un groupe d’experts basés au secrétariat d’Agadir, à Amman, s’emploie toujours à faire de ce rêve une réalité, en dépit des obstacles qui s'accumulent. L’Accord d’Agadir, qui associe quatre nations du Sud de la Méditerranée, a été signé à Rabat, au Maroc, le 25 février 2004. Il a pour objectif de créer une zone régionale de libre-échange entre l'Égypte, la Jordanie, la Tunisie et le Maroc, couvrant une population de 115 millions d’habitants. Cet accord vise également à promouvoir l'intégration économique au sein de cette zone, ainsi qu’avec le marché européen. Enfin, la mise en place d’une zone de libre-échange au niveau régional devrait aussi améliorer les investissements dans les pays partenaires d’Agadir : l’accord, qui doit permettre d'éliminer les obstacles aux échanges commerciaux et de faciliter les investissements, a pour objectif global de stimuler l'activité économique, de soutenir l'emploi et d'améliorer le niveau de vie. Projets en Marche - Voisinage Sud
ÉCONOMIE > JORDANIE
« En s’associant, ces pays pourront être en fin de compte mieux placés pour produire pour le marché européen. Mais il reste encore un long chemin à parcourir, car il existe encore de nombreux obstacles entre les pays d'Agadir » Le soutien financier et technique assuré par l’UE permettra aux quatre pays signataires de résoudre de nombreux aspects techniques. La Commission européenne a financé l'accord à hauteur de 8 millions d’euros depuis le début du processus, investissant notamment dans une Unité technique qui se concentre sur les aspects pratiques, à savoir : l'harmonisation des législations, les réglementations douanières, les règles d'origine, etc. Trois secteurs, qui doivent permettre de stimuler rapidement les échanges commerciaux entre les pays signataires, ont été identifiés : le textile, le cuir et les technologies automobiles. Les chiffres sont très encourageants pour l'avenir. Depuis la signature de l’accord, les échanges commerciaux « intra-Agadir » ont enregistré une augmentation de 45%. En Égypte, les échanges avec les signataires de l’Accord d'Agadir ont fait un bond de 160% entre 2007 et 2009. Au cours de cette même période, la Jordanie a bénéficié d’une augmentation de 70% des échanges commerciaux avec les membres d'Agadir, tandis que le Maroc enregistrait une hausse de 30% des échanges intra-Agadir. Malgré ces chiffres prometteurs, les experts et les hommes d’affaires estiment que la mise en œuvre de l’accord a pris du retard. Les pays signataires doivent en effet livrer bataille, en amont, pour venir à bout des obstacles politiques, législatifs et logistiques. Ces quatre pays ne possèdent aucune frontière commune, leur législation relative au dédouanement et à la normalisation sont obsolètes et leurs frais de transport sont très élevés. Selon ces experts et hommes d’affaires, de tels obstacles pourProjets en Marche - Voisinage Sud
raient empêcher de faire du rêve d'une zone « Agadir » une réalité. Se concentrer davantage sur les échanges commerciaux bilatéraux au lieu de viser d’emblée le marché européen Les responsables européens à Amman affirment que l’accord est en bonne voie, malgré ces difficultés. «Les échanges entre ces pays représentent au total 4% de leurs échanges commerciaux internationaux. Ce pourcentage est peu élevé, mais il met en avant une tendance à la hausse » ; explique Bertrand Jolas, officier de liaison et attaché de la CE au commerce et au transport pour Agadir. Il appelle les membres à se concentrer sur les échanges bilatéraux plutôt que de viser d'emblée le marché de l'UE. « En s’associant, ces pays pourront être en fin de compte mieux placés pour produire pour le marché européen. Mais il reste encore un long chemin à parcourir, car il existe encore de nombreux obstacles entre les pays d'Agadir», explique-t-il.
Une vision que partagent certains hommes d’affaires jordaniens. Selon eux, la faiblesse des échanges commerciaux interarabes n’est pas due à l’absence d’accords. Et d’épingler ici un accord de libre-échange entre les 17 membres de la Ligue arabe, qui n'a pas encore été mis en œuvre complètement. Ce qu’ils souhaitent, c’est un marché arabe intégré qui s’inspire de l’expérience de l’UE. « L’accord d’Agadir est meilleur que l’accord panarabe », affirme l’homme d’affaires et exportateur Talal Ghazawee. « Il est plus facile de mettre en place des échanges B to B entre deux pays pour mettre un réseau sur les rails », précise-t-il. Obstacles à l'accès au marché européen Les hommes d’affaires se heurtent aussi à des obstacles à l’étranger. Ils affirment que leurs exportations vers l’UE ont diminué, en raison d’une législation plus stricte sur les règles d’origine. Dans l’usine de confection CJC, située à Sahab, une zone industrielle de Jordanie très dynamique, Sameer
n Employé d'une entreprise de vente au détail parlant à un consommateur à Amman
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ÉCONOMIE > JORDANIE
n Travailleurs d’une usine textile dans une zone industrielle d’Irbid
échanges commerciaux et éliminer les obstacles régionaux au commerce, avançant ici que le pacte d’Agadir ne peut être un succès avec seulement quatre pays signataires. Même si la voie vers un marché unique est longue et difficile, les experts sont convaincus qu’à mesure que l’accord accumulera les success stories, un plus grand nombre de pays s’ouvriront sur la région afin d'être plus concurrentiels sur le marché mondial. « Si nous parvenons à convaincre la Syrie, le Liban, la Palestine et l’Algérie de s’associer à l’accord, Agadir sera vraiment le pacte que nous attendions tous », conclut M. Emrani. Texte et photos de Mohammad Ben Hussein,
«Il faut absolument promouvoir l'échange de marchandises et de biens entre pays arabes. Ces échanges ouvrent de nouveaux horizons. Pourtant, cet aspect n’a pas encore été sérieusement abordé, afin de ménager les sensibilités politiques.» Maqdah, directeur-général, explique que pour faire de l'accord d'Agadir une réalité, les règles strictes de l'UE en matière d'exportation doivent être revues. « Avant 1999, j'exportais en Europe près d'un tiers de ma production, mais avec le renforcement des règles d'origine et d'autres problèmes, j'ai bien plus de mal à exporter vers l'UE », déplore-t-il. « Je ne sais pas pourquoi nous devrions baser un modèle commercial sur
n Sameer Maqdah
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un accord au lieu de mettre en œuvre un accord qui se fonde sur le modèle commercial en vigueur », ajoute-il. Une vision régionale pour promouvoir la compétitivité à l’échelon international Pourtant, pour des pays comme la Jordanie, qui affiche un taux de chômage de 14% et un taux de pauvreté élevé, l’Accord d’Agadir pourrait constituer le remède pour relancer la croissance économique. Fathallah Emrani, président de la Fédération du syndicat jordanien des travailleurs du secteur textile, estime que cet accord pourrait être la solution au problème du chômage que connaît la Jordanie. L'industrie textile a en effet besoin d'une importante main-d'œuvre. «Il faut absolument promouvoir l'échange de marchandises et de biens entre pays arabes. Ces échanges ouvrent de nouveaux horizons. Pourtant, cet aspect n’a pas encore été sérieusement abordé, afin de ménager les sensibilités politiques », fait-il remarquer. M. Emrani appelle la Ligue arabe à mettre en œuvre une stratégie pour stimuler les
« Si nous parvenons à convaincre la Syrie, le Liban, la Palestine et l’Algérie de s’associer à l’accord, Agadir sera vraiment le pacte que nous attendions tous »
©EU/Neighbourhood Info Centre
Accord d’Agadir – Projet de soutien de l’UE (phase II) http://www.agadiragreement.org/ Ce projet contribue à la réalisation d’une zone euro-méditerranéenne de libre-échange et promeut l’intégration économique au niveau régional grâce à la consolidation du cadre institutionnel mis en place au titre de l’Accord d’Agadir Pays participants Égypte, Jordanie, Tunisie et Maroc Durée: 2008 - 2012 Budget: 4 millions d’euros Objectifs: L’Accord d’Agadir cherche à promouvoir l'intégration et la coopération économique entre les pays participants afin de renforcer la coopération Sud-Sud. Il contribue au processus de libéralisation économique en cours dans l’ensemble de la région méditerranéenne et soutient l’objectif du partenariat euro-méditerranéen de créer une zone de libre-échange au niveau régional. Pour en savoir plus: Fiche sur l’Accord d’Agadir > http://www.enpiinfo.eu/mainmed.php?id=325&id_type=10& lang_id=469 EU Neighbourhood Info Centre > portail thématique sur l'économie > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=4&lang_id=469
Projets en Marche - Voisinage Sud
ÉCONOMIE > LIBAN
Les nouvelles routes commerciales du vieux savon naturel Les produits cosmétiques ont été choisis en raison de leur énorme potentiel pour l’expansion du marché : le savon à base d’huile d’olive et autres baumes de l’est et du sud sont maintenant plus accessibles aux consommateurs européens. Le projet Med Cosmetics – ayant pris fin en 2011 et faisant partie du programme Invest In Med financé par l’Union européenne – a impliqué 150 représentants de sociétés européennes, libanaises, syriennes, et jordaniennes, qui ont été capables de promouvoir leurs marques par le biais de réunions d’entreprises, de conférences et de séminaires. Chaque année, près de 600 sociétés des pays partenaires de la Méditerranée exportent 42.000 tonnes de produits cosmétiques vers l’Europe : on fait la promotion d’un grand nombre de produits sur les marchés étrangers, alors que les hommes d’affaires au niveau local sont mieux informés au sujet des règles pour vendre mieux à l’étranger… Projets en Marche - Voisinage Sud
n Un homme libanais portant le costume traditionnel range les savons parfumés exposés à l’intérieur
du magasin de l’usine de Khan El Saboun situé dans le plus vieux marché de Tripoli
BEYROUTH - Des anciens ateliers de Tripoli, au Nord du Liban, ou d’Alep, au Nord de la Syrie, le savon à base d’huile d’olive et autres baumes de l’est sont maintenant accessibles aux consommateurs européens grâce aux efforts de Med Cosmetics, un projet financé par l’Union européenne dans le cadre du programme Invest In Med. Le projet, ayant duré de mai 2010 jusqu'à mars 2011, et impliqué près de 150 représentants de sociétés libanaises, syriennes, jordaniennes et européennes, fait partie des plans européens qui visent à développer des routes commerciales durables entre les producteurs des deux côtés de la Méditerranée. «L’objectif principal de notre travail est de renforcer, à long-terme, la capacité de production et d’exportation de nos produits ainsi que la capacité des sociétés libanaises, syriennes et jordaniennes à
promouvoir leurs marques par le biais de réunions d’entreprises, de séminaires et de conférences organisées à Beyrouth, Damas, Alep et Paris», déclare Aline Farajan, Directrice de Med Cosmetics pour le Liban. 42.000 tonnes de produits cosmétiques en voie de commercialisation En Syrie, au Liban et en Jordanie, plus de 600 sociétés exportent près de 42.000 tonnes de produits cosmétiques industriels chaque année, et près de 45.000 tonnes de savons naturels. «Cette richesse mérite d’être renforcée et reconnue auprès des marchés étrangers, tout comme les hommes d’affaires au niveau local, qui ont besoin de connaître les règles pour vendre mieux à l’étranger», dit Farajan. Le travail de Med Cosmetics a aboutit à l’organisation de réunions pendant l’édi71
ÉCONOMIE > LIBAN
n Un jeune homme libanais portant le costume traditionnel range les savons parfumés exposés à
l’intérieur du magasin de l’usine de Khan El Saboun situé dans le plus vieux marché de Tripoli
« L’objectif principal de notre travail est de renforcer, à long-terme, la capacité de production et d’exportation de nos produits ainsi que la capacité des sociétés libanaises, syriennes, et jordaniennes à promouvoir leurs marques » accords importants de coopération ont été signés entre les sociétés locales et françaises».
« Cette richesse mérite d’être renforcée et reconnue auprès des marchés étrangers, tout comme les hommes d’affaires au niveau local, qui ont besoin de connaître les règles pour vendre mieux à l’étranger »
n Une ouvrière libanaise modèle le savon récemment
fabriqué sous forme de boules à l’usine de Med Cosmetics située près de Tripoli au Nord du Liban
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tion 2010 de Beyond Beauty Paris qui s’est tenue au mois de septembre de l’année dernière. «Près de 50 représentants européens ont rencontré près de 30 délégués libanais, 60 délégués syriens, ainsi qu’une délégation de producteurs jordaniens», déclare Farajan, chercheuse à la Chambre de Commerce, d’Industrie et d’Agriculture de Beyrouth et du Mont Liban (CCIB). En plus du CCIB, le projet travaille également en partenariat avec le Centre syrien des affaires (SEBC) et l’Association jordanienne de développement des entreprises (JEDCO). Dans le cadre de ce projet, une étude relative a la fabrication de produits cosmétiques au Liban et en Syrie a été réalisée et un séminaire organisé à Damas, afin de familiariser les hommes d’affaires au niveau local avec les procédures techniques et administratives en Europe. «Les produits cosmétiques ont été choisis par les organisateurs du projet en raison de leur énorme potentiel pour l’expansion du marché. Les producteurs libanais et syriens sont reconnus pour leur longue tradition en matière de fabrication artisanale, en particulier des savons à base d’huile d’olive et de laurier, pour lesquels la demande augmente sur le marché européen», dit Farajan. En ce qui concerne les résultats obtenus par Med Cosmetics, Farajan souligne «qu’entre mars et aujourd’hui, plusieurs
Un réseau solide de contacts entre les opérateurs Invest in Med est un réseau euro-méditerranéen d’organisations, financé par l’Union européenne grâce à un budget de €9 millions et axé sur la promotion des investissements et du commerce, ainsi que sur le renforcement de la collaboration et l’échange de meilleures pratiques entre les petites et moyennes entreprises. Il vise à améliorer les capacités et l’efficacité des agences méditerranéennes pour la promotion des investissements (IPA), permettant ainsi une augmentation des
n Les visiteurs regardent les produits fabriqués à partir de plusieurs
savons à Khan El Saboun situé dans le vieux marché de Tripoli
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ÉCONOMIE > LIBAN
n Un homme libanais portant le costume traditionnel range
les différents légumes et fruits faits de savons parfumés exposés dans le magasin de l’usine de Khan El Saboun situé dans le plus vieux marché de Tripoli
soutien aux institutions, la création d’un réseau, et la promotion de l’investissement régional. Quelques 40 agences gouvernementales et réseaux internationaux participent à ce programme. Afin de réaliser ces objectifs, Invest in Med travaille sur l’image globale de la Méditerranée, les conditions de réception des investisseurs dans les pays partenaires, et les bonnes pratiques. Ayant organisé au début des présentations, des séminaires, des formations et des conférences, le programme se concentre actuellement sur les missions d’assistance technique. Texte par ANSAMED & ENPI INFO CENTRE Photos par EPA ©EU/Neighbourhood Info
investissements directs étrangers (IDE) dans les pays partenaires méditerranéens. Cette plateforme multi-pays soutient le développement économique des pays de la Méditerranée en renforçant la coopération entre les agences européennes et méditerranéennes pour la promotion des investissements (IPA). Chaquen année, le programme Invest In Med, lancé en 2008 et ayant continué jusqu’en 2011, permet de créer un réseau de contacts entre les opérateurs du secteur des 27 pays membres de l’UE et les 9 pays partenaires du Sud de la Méditerranée. Ses activités couvrent trois domaines : le
Centre
« Les producteurs libanais et syriens sont reconnus pour leur longue tradition en matière de fabrication artisanale, en particulier des savons à base d’huile d’olive et de laurier, pour lesquels la demande augmente sur le marché européen » INVEST in MED Réseau euro-méditerranéen d’organisations qui se consacrent à la promotion des investissements et à la facilitation des échanges commerciaux, il renforce la collaboration des PME et les échanges des meilleures pratiques Pays participants Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Maroc, Territoire palestinien occupé, Syrie, Tunisie Durée: 2008 - 2011 Budget: 9 millions d'euros (ENPI Sud)
n Une femme libanaise regarde les colliers fabriqués à partir
de savons colorés
Objectifs: Le réseau vise à accroître les capacités et l’efficacité des agences méditerranéennes de promotion des investissements et, par conséquent, permet l’accroissement des investissements étrangers directs dans les pays partenaires méditerranéens. Cette plate-forme multi-pays soutient le développement économique de la région méditerranéenne et renforce la coopération entre les agences européennes et méditerranéennes de promotion des investissements. Pour en savoir plus: Invest in Med: fiche de l'EU Neighbourhood Info Centre > http://www.enpi-info.eu/mainmed.php?id= 102&id_type=10&lang_id=469 Page thématique régionale de l’ENPI: économie > http://www.enpi-info.eu/thememed.php? subject=4&lang_id=469
n Un travailleur libanais manipule les herbes naturelles qui seront utilisées dans la fabrication
Site web d’Invest In Med > http://www.invest-in-med.eu/
du savon à l’usine de Med Cosmetics située près de Tripoli au Nord du Liban
Projets en Marche - Voisinage Sud
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ÉCONOMIE > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
Restauré, l'ancien site du Khan-al-Wakala renoue avec sa splendeur passée
n Les travaux de rénovation en cours au Khan-al-Wakala
Rares sont ceux qui auraient imaginé que cet ancien caravansérail serait restauré et retrouverait ainsi sa splendeur passée. Le site avait en effet été ravagé par un terrible tremblement de terre en 1927. Avant le séisme, le site, situé le long de la route reliant l'Asie à l'Afrique du Nord, avait accueilli des générations de marchands venus y passer la nuit. Le séisme avait laissé le site dans un tel état de ruines que personne n'osait croire qu'une restauration serait possible... Jusqu'à ce que l'Union européenne décide de prendre les choses en main et donne le coup d'envoi à un projet de réhabilitation. Au cours des 12 premières années du projet, le chantier n’avait pourtant pas beaucoup avancé… Guère plus que si le personnel y avait travaillé trois ans et demi. Des retards qui s’expliquent par les conflits, l'impasse politique et l'Intifada. L'ancien Khan-al-Wakala est aujourd'hui restauré et prêt à relever un premier défi : devenir une incubatrice d'entreprises artisanales et de services touristiques et culturels pour la ville de Naplouse. NAPLOUSE - Il faut vraiment le voir pour le croire. Les ruines rappelant celles de la Seconde Guerre mondiale ont fait place à un tout nouvel édifice, majestueux. Voici comment un projet a redonné vie à un 74
édifice urbain. « Le Khan-al-Wakala, à Naplouse, représente toute une époque ; une époque que nous voulons ressusciter pour les habitants de cette ville et pour tous les Palestiniens », explique le repré-
sentant de l'UE, John Gatt-Rutter. « Naplouse est une ville éternelle, une ville pleine de vie, au riche passé. Nous sommes partis du cœur de la vieille ville avec l'intention de restaurer le site mais aussi de Projets en Marche - Voisinage Sud
ÉCONOMIE > TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ
revitaliser la ville de Naplouse sur le plan culturel et commercial. » Les Palestiniens l'ont baptisé Khan-alWakala, un mot arabe qui veut dire auberge. Construit il y a environ 350 ans, le site abritait un caravansérail qui accueillait les marchands traversant les terres historiques de Palestine, le long de la route allant de l’Asie à l’Afrique du Nord. Ils venaient y attacher leurs mules dans la cour et passaient la nuit ici. En 1927, le site a été détruit par un terrible séisme et laissé à l'abandon jusqu'au milieu des années 90. C'est à cette époque que Ghassan Shakaa, le maire de Naplouse, et Adala Attireh, ingénieur municipal en chef, ont eu l'idée de restaurer le site. Un rêve impossible, pensait-on. « Nous avons rencontré des responsables de l'Union européenne et leur avons expliqué notre projet », se souvient Adala, qui est à présent ingénieur en chef au Conseil municipal de Ramallah. « Après de longs pourparlers, le Conseil municipal a accepté de se lancer dans ce projet à condition que le bâtiment devienne la propriété de la ville. Le Conseil décida ainsi de racheter toutes les sections appartenant encore à des particuliers. Le site est ainsi devenu une propriété publique. Et grâce à l'engagement de l'UE, le projet a pu être mis sur les rails. » Un bâtiment qui résume à lui seul toute l'histoire d'un pays Naplouse est l'une des plus grandes villes de Cisjordanie. La vieille ville est un condensé d’histoire dont les édifices rappellent le passé de tout le pays. La restauration du Khan-al-Wakala a été un défi, non seulement en raison de l'ampleur des dégâts provoqués par le séisme, mais aussi car ce projet pouvait s'inscrire dans un projet encore plus insensé, à savoir la réhabilitation de toute la vieille ville. Le rêve de chaque nouveau maire ! Lorsqu'elle décida de s'associer à ce projet d'un montant de 2,5 millions d'euros, l'Union européenne demanda la participation d'autres acteurs aux côtés de la municipalité – à savoir l'Université An-Najah de Naplouse et l'UNESCO, l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture. Tous les acteurs ont coopéré du mieux qu'ils pouvaient mais il y eu Projets en Marche - Voisinage Sud
n Durant toutes les phases du projet, les restaurateurs ont préféré les outils artisanaux aux machineries Lourdes
« Je m’imagine déjà, à 80 ans, voire plus, raconter tout cela à mes petits-enfants. Je leur expliquerai ce que j’ai fait, comment j’ai participé à la restauration d’un site – un projet que tout le monde jugeait insensé… » inévitablement des contretemps. Lors de la deuxième intifada palestinienne, en 2000, suivie par l'incursion de troupes israéliennes dans les villes de Cisjordanie, en 2002, le chantier fut interrompu pendant près de trois ans. Pendant cette période, les travaux furent pratiquement à l'arrêt et lors d'un échange de tirs en 2002, un missile ravagea même une très grande partie de la zone en cours de diagnostic. L'ancienne porte du site fut quant à elle détruite par les Palestiniens à la recherche de survivants (en vain) après une attaque israélienne contre une savonnerie voisine. Lorsque la situation se normalisa, le chantier reprit pendant un an ou deux avant d'être une nouvelle fois interrompu. Non pas en raison d'affrontements armés, mais à la suite d’un conflit politique après les élections législatives de 2006, qui amenèrent le Hamas au pouvoir et provoquèrent des tensions avec la communauté internationale. Il fallut plusieurs années de négociations pour que le chantier reprenne et aujourd'hui, alors que le projet est pratiquement finalisé, le résultat semble à la hauteur des attentes, malgré tous les
problèmes rencontrés. L’ancien Khan-alWakala est magnifique et plein de vie. « La qualité de la restauration montre que cet investissement en valait vraiment la peine », explique le représentant de l'UE, John Gatt-Rutter. « Elle recèle un énorme potentiel pour la ville de Naplouse, tant en termes de création d'emplois que de croissance économique. » « La réhabilitation et la réaffectation du Khan-al-Wakala ont été réalisées parallèlement à un projet mené depuis plus de dix ans par l'UNESCO en vue de la préservation et de la revitalisation du patrimoine culturel palestinien », explique Derek Elias, chef de Bureau, Bureau de l'Unesco à Ramallah. « Ce projet a même parfois été pour nous l’occasion de comprendre le contexte palestinien, un vrai défi alors que nous étions confrontés à des retards liés à la force majeur. D'où notre fierté d'avoir mené à bien ce projet de restauration. » Artisanat, tourisme et services culturels Outre les aspects historiques et culturels de la restauration du caravansérail, le
n Une équipe de 12 Palestiniens a été formée aux
techniques de restauration des vieilles pierres
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« Nous sommes partis du cœur de la vieille ville avec l'intention de restaurer le site mais aussi de revitaliser la ville de Naplouse sur le plan culturel et commercial. » projet vise à améliorer le niveau de vie des habitants de Naplouse. Les infrastructures situées à proximité du caravansérail ont été rénovées pour abriter une incubatrice d'artisanat, de tourisme et de services culturels. En outre, des experts ont préparé pour la municipalité un projet visant à transformer le site en centre générateur de profit, de façon à pérenniser l'impact du projet. Un bâtiment a déjà été inauguré. Il abritera une petite auberge de neuf chambres et plusieurs boutiques d'artisanat traditionnel proposant par exemple des savons à l'huile d'olive et des broderies. D'autres boutiques accueilleront les visiteurs dans des offices du tourisme. Un restaurant sera aménagé sur deux étages et l'ancienne cour, où des mules ont passé la nuit pendant des centaines d'années, accueille désormais des manifestations publiques. Et de nombreux projets de soirées et de concerts sont d’ores et déjà à l’affiche pour le mois du Ramadan. Une restauration totalement artisanale Un volet clé du projet – outre la rénovation de l'infrastructure – a été le développe-
ment des compétences des ouvriers palestiniens dans le domaine de la restauration. Une équipe de 12 Palestiniens ont ainsi reçu une formation aux techniques de restauration des vieilles pierres à l'Université An-Najah et à l'étranger. Des experts du Comité de réhabilitation d'Hébron ont également participé au projet, en offrant une assistance technique considérable. Durant toutes les phases du chantier, les ouvriers n'ont utilisé aucune machinerie lourde, comme des compresseurs à jets de sable ou à jets d’eau, mais uniquement de l’outillage à main. Ils ont même été se former auprès de tailleurs de pierre traditionnels, qui travaillent exclusivement au marteau et au burin. Raed Arafat est charpentier. Il travaillait dans l'atelier de son père à quelques mètres du Khan-al-Wakala. Recruté par la ville comme ouvrier de chantier, il a reçu, avec 11 autres ouvriers, une formation intensive
« Ce projet a même parfois été pour nous l’occasion de comprendre le contexte palestinien, un vrai défi alors que nous étions confrontés à des retards liés à la force majeure. D'où notre fierté d'avoir mené à bien ce projet de restauration. »
en techniques de restauration. Aujourd'hui, Raed et deux de ses collègues, Alaa Rihan et Kayed Okasha, travaillent toujours sur le site. Les autres sont partis car ils ne pouvaient pas se permettre de longues périodes de chômage. « Je suis très fier de mon travail », explique Alaa, un jeune homme de 25 ans environ. « Je m’imagine déjà, à 80 ans, voire plus, raconter tout cela à mes petits-enfants. Je leur expliquerai ce que j’ai fait, comment j’ai participé à la restauration d’un site – un projet que tout le monde jugeait insensé… » Texte par Elias Zananiri Photos par EPA ©EU/Neighbourhood Info Centre
Rénovation du centre historique de Naplouse Pour servir de modèle à la future protection du patrimoine culturel de Naplouse et du Territoire palestinien occupé ; pour contribuer à la réhabilitation du tissu urbain de cette ville historique, à la modernisation de ses services ainsi qu’à l'amélioration des conditions de vie des habitants Pays participants Territoire palestinien occupé Durée : 1999 - 2012 Budget: 2,5 millions d’euros Objectifs: Le premier objectif est la restauration du bâtiment historique du Khan-al-Wakala. Le deuxième est la rénovation et la modernisation de l’infrastructure publique dans les environs directs du caravansérail. Le troisième est la transformation du bâtiment en complexe urbain servant d’incubateur d’entreprises d’artisanat et de services touristiques et culturels, dans le but de garantir la pérennité de l'intervention. En savoir plus: Assistance de l’UE en faveur des Palestiniens http://eeas.europa.eu/delegations/westbank/index_en.htm Portail thématique de l’EU Neighbourhood Info Centre sur la culture http://www.enpi-info.eu/thememed.php?s ubject=10&lang_id=469
n Le complexe abritera une petite auberge de neuf chambres et plusieurs boutiques
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Projets en Marche - Voisinage Sud
Guides du voisinage
européen Différents manuels peuvent être téléchargés du site internet du Centre d’information pour le voisinage européen. Ces guides offrent des conseils aux professionnels des médias pour une meilleure couverture des activités de coopération de l'UE, ainsi que des informations sur la façon d'accéder à un financement de l’UE ou pour comprendre l’eurojargon. Une mine de connaissances à votre disposition, juste en un clic sur http://www.enpiinfo.eu/index.php?lang_id=469.
Soutenir le budget Soutenir le changement L’appui budgétaire de l’UE n’est pas un don. Il s’agit d’un contrat mutuellement accepté ayant pour but de soutenir les réformes dans un secteur approuvé d’un commun accord, explique Luca Oriani Vieyra, responsable de l’appui budgétaire, de la politique macro-fiscale et de la coordination générale avec les institutions financières internationales au sein du Département en charge du voisinage à la Commission.
Des étudiants tunisiens avant leurs cours à l'École supérieure de technologie de Bizerte, à Bizerte (Tunisie), le 9 mars 2012. Le système éducatif tunisien bénéficie d'un important programme d'appui budgétaire européen. Photo EPA ©EU/Neighbourhood Info Centre
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Projets en Marche - Voisinage Sud
Entretien avec Luca Oriani Vieyra Responsable de l’appui budgétaire, de la politique macro fiscale et de la coordination générale avec les institutions financières internationales au sein du Département en charge du voisinage à la Commission
« Les changements ayant un impact positif sur les citoyens peuvent se produire par le biais du soutien aux réformes, ce qui contribuerait, par exemple, à une société mieux éduquée et mieux informée »
En pratique, en quoi consiste l’appui budgétaire? Il s’agit d’un contrat impliquant la Commission européenne d’une part et le gouvernement du pays partenaire d’autre part. Il s’agit donc d’un type de coopération basée sur un ensemble bien défini d’accords contractuels qui engagent les deux parties. La Commission européenne autorise le transfert total des fonds d’appui budgétaire dès que les engagements approuvés ont été mis en œuvre dans leur intégralité par les autorités des pays partenaires. Si ce n’est pas le cas, le montant du transfert financier autorisé par la Commission européenne est réduit en conséquence ou le transfert n’est pas effectué du tout. En termes plus simples, quand on parle d’appui budgétaire, il s’agit des «réformes accomplies en échange de l’argent payé». Dans la région de l’IEVP, neuf pays bénéficient de l’appui budgétaire de l’UE, notamment l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Géorgie, la Moldavie, et l’Ukraine à l’Est, ainsi que l’Égypte, la Jordanie, le Maroc et la Tunisie au Sud. L’objectif principal est de soutenir les politiques de rapprochement législatif et réglementaire dans le voisinage européen, et les types de réformes comprennent notamment la promotion de la bonne gouvernance, l’amélioration des conditions des échanges commerciaux et des investissements, etc. – en d’autres termes, les programmes d’appui budgétaire de l’UE permettent de créer des conditions plus favorables qui font profiter les citoyens et les entreprises. Il est clair que l’appui budgétaire de l’UE n’est pas un remède miracle. L’ultime responsabilité et le succès lié à la mise en œuvre rapide de réformes reviennent à l’administrateur élu. Comment l’appui budgétaire fonctionne t-il? Le programme d’appui budgétaire dure de 3 à 4 ans et l’argent est déboursé en fonction des conditions relatives aux tranches annuelles. Ensuite, les objectifs que le gouvernement doit atteindre sont clairement définis, par exemple en ce qui concerne la réforme du système judiciaire en Géorgie, les réformes du système de santé en Moldavie ou les réformes de l’enseignement supérieur en Tunisie. Enfin, le déboursement effectif de chaque tranche est effectué par la Commission européenne, en fonction du degré de succès que reflètent les résultats obtenus. Quel est l’impact de l’appui budgétaire sur les citoyens? Les citoyens ne bénéficient pas du programme d’appui budgétaire d’une manière immédiate, puisque ces programmes ne représentent pas des transferts d’urgence permettant de combler, par exemple, les écarts de salaires liés au budget. L’accent est mis plutôt sur les changements structurels à moyen terme. Pour-
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tant, quand les programmes d’appui budgétaire permettent d’accélérer les changements structurels dans les domaines comme l’éducation ou le transport, ils font bénéficier les citoyens et les entreprises, en assurant le développement durable de la société dans son ensemble. Il existe un autre aspect important qui concerne le citoyen. En tant que bailleur de fonds, devez-vous fournir un appui budgétaire à un pays dont la gouvernance est douteuse ? On pourrait refuser en attendant que la gouvernance se rapproche du modèle suisse. Cependant, on doit également garder à l’esprit que les changements ayant un impact positif sur les citoyens peuvent se produire par le biais du soutien aux réformes, ce qui contribuerait, par exemple, à une société mieux éduquée et mieux informée. Il existe certainement plusieurs aspects qu’il faudrait prendre en compte, mais une décision est toujours prise à la fin. En Biélorussie par exemple, nous ne mettons pas en œuvre des programmes d’appui budgétaire. Quels sont les critères qui sont appliqués pour accorder l’appui budgétaire? Nous appliquons les critères d’éligibilité suivants, notamment : 1) La mise en œuvre d’un plan national ou d’un plan sectoriel approprié de développement. 2) L’existence d’un cadre macro-économique favorisant la stabilité, ainsi que des politiques fiscales et monétaires favorables à la croissance économique. 3) Une amélioration progressive de la gestion des finances publiques. Tant que ces conditions sont respectées, l’appui budgétaire pourra être mis en œuvre pour soutenir des réformes spécifiques dans les domaines comme le commerce et l’énergie. Quel sera l’avenir de l’appui budgétaire? Les pays éligibles à l’appui budgétaire de l’UE devront satisfaire une condition supplémentaire bientôt, axée sur la transparence budgétaire. Les citoyens intéressés auront un meilleur accès aux informations pertinentes et une meilleure idée des accords conclus dans le domaine des réformes du système judiciaire par exemple, ce qui contribuera à augmenter la transparence et la responsabilité. En résumé, l’appui budgétaire de l’UE, bien qu’il soit un instrument politique sophistiqué vu la complexité des réformes dans la région de l’IEVP, est en train de devenir un moyen efficace pour soutenir le renforcement de l’appropriation nationale et de la responsabilité dans des domaines clés comme les réformes de la gouvernance publique.
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Pour en savoir plus
Politique européenne de voisinage (PEV) Cette politique a été conçue en 2004, après l'élargissement de l'UE à dix nouveaux États membres, dans le souci d'éviter l'apparition de nouvelles lignes de division en Europe. Avec cette politique, l'UE propose à ses voisins une relation privilégiée, basée sur un engagement mutuel en faveur de valeurs communes : la démocratie et les droits de l’homme, l'État de droit, la bonne gouvernance, les principes d'économie de marché et le développement durable. La PEV offre une relation politique et une intégration économique plus poussées par la mise en place de réformes visant à atteindre la paix, la stabilité et la prospérité économique. À la suite d'une refonte approfondie, en 2011, l'UE a lancé une version renouvelée de sa PEV qui entend renforcer les liens avec ses voisins grâce au principe du « more for more » (donner plus en échange de plus). Cette approche consiste à augmenter les fonds disponibles pour les pays les plus engagés dans un processus de réforme. Les pays participants sont l'Algérie, l'Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, l'Égypte, la Géorgie, Israël, la Jordanie, le Liban, la Libye, la Moldavie, le Maroc, le Territoire palestinien occupé, la Syrie, la Tunisie et l'Ukraine. Bien que la Russie soit également un voisin de l'UE et qu'elle bénéficie de l'IEVP, les relations avec ce pays relèvent d'un partenariat stratégique. http://ec.europa.eu/world/enp/index_fr.htm
Liens utiles
L'instrument de partenariat : de l'IEVP à l'IEV Mis en place en janvier 2007, l'IEVP est le bras financier de la politique européenne de voisinage (PEV). Cet instrument financier unique remplace les programmes MEDA (Sud), TACIS (Est) et divers autres instruments financiers. L'IEVP a pour but d'aider les pays partenaires à atteindre un développement durable et à rapprocher leurs politiques et normes de celles de l'UE en se basant sur des priorités adoptées de commun accord. Pour l'exercice budgétaire 2007-2013, des fonds européens s'élevant à quelque 12 milliards d'euros sont disponibles pour appuyer les réformes dans les pays voisins. À partir de 2014, l'IEVP sera remplacé par l'instrument européen de voisinage (IEV), qui sera de plus en plus axé sur les politiques et qui permettra une différenciation accrue, une plus grande flexibilité, ainsi qu'une conditionnalité et des incitations plus strictes pour les pays obtenant les meilleurs résultats. http://ec.europa.eu/europeaid/where/neighbourhood/overview/index_fr.htm
Commissaire en charge de l'élargissement et de la PEV http://ec.europa.eu/commission_2010-2014/fule/ Site internet de la PEV http://ec.europa.eu/world/enp/welcome_fr.htm Développement et coopération – EuropeAid http://ec.europa.eu/europeaid/index_fr.htm Service européen pour l'action extérieure (SEAE) http://eeas.europa.eu/index_fr.htm
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Projets en Marche - Voisinage Sud
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Le Centre d'information pour le voisinage européen / EU Neighbourhood Info Centre est un projet de communication régional financé par l'UE qui vise à mieux faire connaître le partenariat entre l'UE et ses pays voisins.