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La justice en question

L’indulgence de certaines juridictions n’est plus à prouver, tant l’actualité est pavée de faits divers faisant état d’individus libérés alors que leur peine n’est pas accomplie ou très incomplètement. La tentative de meurtre commise à Toulouse, sur un chauffeur de taxi par un détenu en permission de sortie qui n’a pas regagné sa cellule illustre parfaitement cette complaisance à l’égard des criminels. Condamné à 22 années d’emprisonnement par une cour d’assises pour un homicide particulièrement ignoble il y a 10 ans, une juridiction d’application des peines a décidé d’accorder à cet individu une permission de sortie dont on ignore les arguties. Le détenu, pétri de reconnaissance, s’est empressé de disparaître et s’en est pris à un pauvre homme qui le transportait dans son véhicule, lui infligeant de graves blessures avec un cutter.

Cette affaire tragique met en lumière un certain nombre de sujets qu’il est temps de tenter d’analyser. En premier lieu, la liberté qui est laissée aux juridictions d’application des peines et l’interprétation qui en est faite par ceux qui y servent. Le cheminement d’une remise en liberté répond à des conditions strictes mais, au risque d’être politiquement incorrect, suppose que la Loi permette qu’elles soient aménagées. Il y a donc une disjonction entre l’esprit et la lettre de la décision. En effet, il est admis qu’à partir d’un certain délai et en fonction du jugement ou de l’arrêt, un aménagement de de l’emprisonnement soit attribué à l’auteur à sa demande expresse. Ce qui doit conduire la juridiction d’application des peines à la plus grande vigilance quant à la réitération de faits pour lesquels le détenu est déjà en prison. C’est là qu’intervient l’intime conviction de celui qui va off rir une chance au condamné de prouver qu’il a assimilé la sanction et qu’il ne va pas recommencer. Avant d’aller plus loin, il faut se rappeler d’une disposition légale qui prend toute son importance en cas de libération anticipée.

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La récidive légale, ou la réitération d’une inf raction de même type, est une circonstance aggravante prévue expressément par le code pénal. Elle a fait l’objet de plusieurs adaptations au cours des vingt dernières années. L’interprétation souvent aléatoire qui en est faite par les magistrats est parfois incompréhensible. Enf in, la responsabilité du législateur dans la fabrication de lois toujours plus complexes et fastidieuses dans leur application conduit à une perméabilité des décisions.

L’histoire se répète à l’envi et la complaisance de certains magistrats a déjà conduit à des faits divers tragiques. Le plus emblématique pour la Gendarmerie, fut assurément celui de la libération d’un multirécidiviste du département du Var à l’issue d’un procès pour coups et blessures sur sa propre mère et qui, moins d’une semaine après, a assassiné deux jeunes femmes gendarmes. Il avait un casier judiciaire qui aurait dû le conduire directement en prison, mais la juridiction de Toulon, face au retrait de plainte de la plaignante, l’a condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis. A travers cette condamnation mineure, elle a certainement estimé que ses capacités à être réinséré étaient réelles. Les trois juges ont-ils pu se regarder dans le miroir le 18 juin 2012 au matin, alors que toutes les chaînes infos de France diffusaient le portrait de celui qu’ils avaient jugé avec beaucoup de complaisance ? La discrétion de ces juges fut plus forte que leur pénitence. Drapés dans leur statut très protecteur, ces magistrats du siège, inamovibles, n'ont aucun compte à rendre à un quelconque ministre et encore moins aux justiciables. Seules les voies de recours légales peuvent être exercées contre leurs décisions. Des intouchables qui ne se privent pas d’exprimer, à travers leurs jugements, des positions parfois très idéologiques. Ce fut le cas dans le tragique affaire de Collobrières, comme dans celle de l’agression à Toulouse.

Quels enseignements peut-on tirer de ces faits divers qui n’auraient jamais dû se produire si la Justice avait été moins complaisante à l’égard de voyous ?

L’évolution de la procédure pénale garantit un certain nombre de droits liés au statut de mis en cause. Le droit à se taire, à se faire examiner par un médecin, à contacter sa famille, à manger, à se reposer, mais également elle a sacralisé la notion de sursis pour les peines d’emprisonnement ferme inférieures à une année.

Rappelons qu’en 2018, la loi a supprimé les courtes peines de prison pour développer les alternatives à l’incarcération, comme le travail d’intérêt général ou la détention à domicile avec un bracelet électronique. Les juridictions se sont engouff rées dans ce segment très indulgent de la Loi pour en faire une généralité. De l’aveu même des services du cabinet du ministère de la justice, le taux d’emprisonnement réel des condamnés à moins d’un an de prison ferme et qui restent dehors est de 74 %, récidivistes compris. Les seuls chiff res qui apparaissent sur le site officiel du ministère de la justice concernant le taux de récidive sont proches de 50%. Le taux d’emprisonnement n’est pas mentionné. Depuis la disparition de l'Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales, les chiff res qui sont fournis au compte-gouttes par le ministère de l’intérieur, restent pour la plupart du temps illisibles pour les néophytes. Ne nous y attardons pas. Revenons plutôt au sujet qui nous intéresse. L’idéologie des magistrats n’est plus à démontrer. S’il ne suffisait que d’un seul exemple pour illustrer ce point de vue, on pourrait repeindre le mur des cons à l’infini érigé par un syndicat qui représente plus d’un tiers des magistrats. Cette idéologie se diffuse dans tous les tribunaux et le sentiment d’impunité propre aux éléments de langage d’une certaine classe politique semble être désormais une réalité chez les magistrats. Auditionnés par leurs pairs en cas de manquements graves, ils finissent toujours par glisser entre les mailles du filet en se camouflant derrière un corporatisme qui ne dit jamais son nom. L’affaire d’Outreau est l’exemple parfait de cette république des juges qui appliquent aux autres ce qu’elle exonère aux siens. Tous les magistrats ne sont pas à jeter aux chiens, bien heureusement. Cependant la palanquée d’idéologues fait le lit d’une défiance consommée entre ceux qui essaient de sécuriser la rue et ceux qui, au nom du peuple f rançais, rendent une justice tantôt très indulgente pour leurs pairs et pour les voyous, tantôt intraitable pour les agents des forces de sécurité. Mais ces juges s’invitent également à la table des faits de société. Ici, une croix est descellée au nom d’une laïcité à géométrie variable, là elle étrille une municipalité pour défaut de vigilance. Même la justice administrative s’illustre en rendant des décisions qui vont à l’encontre de l’ensemble des élus et des administrés. C’est le cas des éoliennes de la commune de Vay (44) où conseil municipal, élus départementaux, services de l’état et préfet ont refusé leur implantation pour que finalement la cour des appels administratifs annule l’arrêté du représentant de l’état, créant ainsi un déni de démocratie. Un pouvoir supra républicain qui se torche avec l’unanimité ! Profitant d’une judiciarisation à l’américaine, elle s’infiltre dans tous les secteurs de la vie quotidienne. Elle a tendance à agir comme un tyran aux mille visages, qui cannibalise tous les sujets en imposant une vision tantôt épicurienne, tantôt dogmatique, selon l’individu qu’on lui présente.

C’est cette vision partisane que l’on doit dénoncer. La Justice n’est pas l’adversaire de la Police (et de la Gendarmerie). Elle doit juste reprendre sa place dans le continuum républicain. Elle se grandirait à s’appliquer les mêmes sanctions quand un de ses pairs a failli, qu’elle le fait le plus souvent aux policiers ou aux gendarmes mis en accusation.

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