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Chronique de la famille Arié de Samokov (suite
El kantoniko djudyo
Chronique de la famille Arié de Samokov (suite)
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Nous poursuivons la publication bilingue de la chronique de la famille Arié de Samokov. Ce tapuscrit qui comprend plus de 2000 pages en judéo-espagnol en caractères latins retrace la vie d’une famille de grands commerçants sépharades de Bulgarie du milieu du XVIII e siècle jusqu’au début du XX e siècle.
Bannie de Vienne par un édit impérial, la famille Arié s’est d’abord établie à Vidin en 1775, sur les bords du Danube. C’est là que le patriarche Moche A. Arié, soutenu par ses trois fils Samuel, Isaac et Abraham développe avec succès un premier négoce.
À sa mort en 1789, ses fils héritent du commerce qui est ruiné lors du pillage de la ville de Vidin par des troupes irrégulières. Sans ressources, les trois frères se séparent. Alors qu’Isaac demeure à Vidin, Samuel se rend à Tourno-Severin en Roumanie et Abraham M. Arié I part pour Sofia. Il y fait la connaissance d’un pharmacien juif, M. Farhi, qui l’embauche et ne tarde pas à lui confier la gestion de son commerce où se rendent couramment des notables turcs. Il y rencontre un jour l’Agha Mehmed Emin de Samokov qui lui confère le titre de fournisseur officiel et lui permet ainsi de s’installer dans sa ville où il devient vite un notable apprécié des habitants et de ses coreligionnaires.
En este anyo de 5556, el S-r. Abraam, I. ke su negosio de su butika, era siempre andando i engrandesiendose, fue en este anyo tambien se pronto su nota de las ropas ke ya le eran en manko en la butika, i aparte lo azia saver a todos sus klientes ke ya teniya de partir por Kostan, i si teniyan algunos de darle komandas ke esto ya tenia siempre, i tambien era ke al prinsipio se lo azia saver al S-r. de Mehmed Emin AA. i komo lo alensiava era ke se iva por razon ke de todos los etchos de la politika ya estava al koriente el S-r. de Mehmed Emin AA. i esto era muntcho importante, porke lo soideyavan por el kamino, i lo pudian i matar el S-r. de Mehmed Emin AA., se gustava muy muntcho de esto ke ya estava adelantando el S-r. Abraam, I. i kuando alguna vez tadrava de ir le, lo mandava a yamar, i le dizio ke siempre ke le vaiga i ke non se travara por nada i kuando kere algun ayudo seya en moneda o de otra koza ke lo demanda, ke ansi era ke sovre todo esto ke el S-r. Abraam I. le demandava en todo lo kontentava, el ke ya estuvo pronto por partir a su viaje, lo izo i izo todos estos empleyos ke la butika los demandava, komo tambien les merkava por todos estos las komandas ke resiviya, i sin muntcho tadrarse se viniya a Samokov, en kada viaje ke azia el S-r. Abraam, I. siempre le traiva una manera de prezente para el S-r de Mehmed Emin AA., entre eyos en la una vez le trucho, una kyulia [turc: külah, coiffe conique très haute de l’ordre des derviches] de derviches komo estas ke yevan los derviches ke estan en la mevlahane de Kostan ke le plazio muy muntcho i se stuvo estalandose de ariir, ke para pasar la ora i djugar kuando estavan solos se la mitiya el S-r. de Mehmed Emin AA., i se ivan ariendo, el ditcho Mehmed Emin AA., era una persona menuda i bacho en la kavesa yevava un sarik de toka blanka grande, i ensima lo teniya a Samokov entero boltandolo sigun ke el lo keriya, a toda via era una persona bonatcha i se komportava kon muntcho, meoyo, i tambien era muy savido i estudiado, i intelijente, le plazia kuando le ivan la djente ke eran para el enteresentes, akeyos ke eran savidos en los estudios el S-r. Abraam I., ke era de
5556 [année civile 1795/1796]
En 5556, M. Abraam I, dont les affaires se développaient toujours plus, fit le compte des marchandises qui venaient à lui manquer à la boutique. Il fit en outre savoir à tous ses clients qu’il devait se rendre à Constantinople et que s’ils avaient des commandes – ce qui était toujours le cas – ils pouvaient les lui passer. Dès le départ, il mit au courant l’Agha Mehmed Emin afin qu’il l’y autorise et parce que celui-ci était au courant de toutes les affaires politiques. C’était très important, car on les détroussait et on pouvait les tuer en chemin. La prospérité de M. Abraam réjouissait beaucoup l’Agha Mehmed Emin et quand parfois il tardait à lui rendre visite, il le faisait appeler. Il lui disait toujours de ne rien apporter et que s’il avait besoin d’une aide quelconque que cela soit de l’argent ou d’autre chose, il n’avait qu’à en faire la demande. C’est ainsi qu’il satisfaisait à tout ce que M. Abraam pouvait lui demander. Celui-ci qui était déjà prêt à partir en voyage se mit en route. Il fit tous les achats nécessaires à son commerce et à toutes les commandes qu’on lui avait passées et, sans beaucoup s’attarder, revint à Samokov.
Lors de chaque voyage que faisait M. Abraam I, il rapportait une sorte de présent pour l’Agha Mehmed Emin. Entre autres, il apporta une fois une kuliya 1 de derviche comme celles que portaient les derviches du sanctuaire de Constantinople. Elle plut beaucoup à l’Agha qui éclata de rire; pour passer le temps et se divertir quand ils étaient seuls, l’Agha Mehmed Emin la mettait et cela les faisait bien rire. L’Agha Mehmed Emin était une personne de petite taille qui portait sur la tête un grand turban en soie [sarik ou toka] blanc. Il était à la tête de tout Samokov, menant la ville à son idée. En toutes circonstances, c’était une personne calme qui agissait avec beaucoup de réflexion et qui était très savante, instruite et intelligente. Il appréciait la venue de gens qui étaient pour lui intéressants comme ceux qui étaient versés dans les études parmi lesquels M. Abraam I. Quand il y allait, si leur conversation tombait sur un thème d’études à approfondir, il
1. Du turc, külah, coiffe conique très haute de l’ordre des derviches.
2. Tchelebi que l’on pourrait traduire par maître ou sieur est pour les minorités de l’Empire ottoman l’équivalent du terme Effendi pour les musulmans.
Derviches à Istanbul vers 1875. Photographe: Abdullah frères
Collection: Pierre de Gigord. Getty Research Institute.
Derviches à Istanbul. Photographe: Iranian M. Fin XIX e s.
Collection: Pierre de Gigord. Getty Research Institute.
estos, kuando le iva i si es ke se les avria algunos linguajes de estudios mas ondos era ke restava kon oras enteras dandole a entender, el se okupava muntcho por sus ijos los mas grandes ke son Hr. Tchelebi, i Hr. Josef, porke se enbezaran bien a meldar, fin a ke pudieran alkansar en los estudios los mas altos, sigun ke ya fue ansi, eyos todos los dos ermanos estuvieron en Sofia komo un anyo en el midrach de los hahamin ke ya avia en Sofia i se enbezaron en los estudios de el Talmud, los mas enportantes, i el S-r. Abraam, I. sus Padre ke ya lo konosia este estudio al fondo era ke en las notches les dava el mizmo liksiones i ansi es ke devinieron Hahamin, grandes, porke i a eyos tambien les plazia muntcho toparsen ande aviyan platikas sovre los estudios, ke non se embevisiyan [embever : s’absorber] en avlas baldias, o en algunos apetites de mansevos, ansi era de mizmo i el S-r. Abraam, I. su natura era de levantarse de maniana, i se iva a el kaal, a dizir la su tefila, kon minyan, i meldava denpues el Hor-Le-Israel, i se mitiya dos pares de tefilin, ke era un ombre muy Hasid, i muy religioso i denpues se viniya a kaza i azia su desayuno, sin ke apretava por nada ; i denpues saliya a la plasa para azer los empleos por el menester de el mantenimiento de la kaza, ke era el mizmo solo ke los merkava, ke non se avergonsava el mizmo de merkarlos i de traerlos, el non dechava sufrir a mujer por dinguna koza ke de todo esto ke le demandava, la kontentava, porke la amava muntcho de mizmo era i kon sus ijos i kon toda la djente de su kaza, era muy amorozo de el lavoro, non se dechava servir en kaza por nada ke non se haraganiyava el mizmo de levantarse, i servirse por su menester, i denpues se iva a la butika, i muy repozadamente, era ke resentava la butika, i enkontrava a sus klientes, ke ya teniya muntchos, sus venditas eran dekontino sin estankar, era kon la mas grande deretchedad ke aziya sus venditas en la medio dia se veniya a kaza a komer, i komiyan todos djuntos, i denpues se etchava i durmiya, media ora, ansi lo azia en kada dia, non lo empleava muntcho el vino o raki, su natura era sana i rezia, su puerpo era proporsionel,
restait des heures entières à réflechir dessus. Il s’occupait beaucoup de ses aînés maître Tchelebi 2 et maître Josef afin qu’ils sachent bien lire et puissent accomplir des études supérieures. Il en fut ainsi : les deux frères se rendirent à Sofia étudier environ un an au midrash 3 des hahamim 4 qui se trouvait dans la ville. Ils étudièrent les matières les plus importantes du Talmud. Leur père, M. Abraam I qui connaissait à fond ces études leur donnait lui-même la nuit des leçons. C’est ainsi qu’ils devinrent de grands érudits. Eux aussi appréciaient de pouvoir débattre de ces études et ils ne se perdaient pas en vaines discussions ou dans les distractions de la jeunesse. Il en allait de même de M. Abraam I. Il était lève-tôt et se rendait à la synagogue dire sa prière en présence du minyan 5 . Il lisait ensuite le Or-le-Israël et se mettait les tefilin 6 . C’était un homme très observant et très religieux. Ensuite il allait à la maison et prenait son déjeuner sans aucune précipitation. Puis il sortait en ville faire les achats nécessaires aux besoins de la maison. Il était le seul à le faire et il n’éprouvait pas de honte à les acheter et à les apporter lui-même. Il ne laissait en rien souffrir sa femme. Il la contentait en tout ce qu’elle demandait, car il l’aimait beaucoup. Il en allait de même avec ses fils et avec tous ceux de sa maisonnée. Il était très travailleur, il ne laissait personne le servir chez lui et ne rechignait pas à se lever pour satisfaire ses besoins. Il se rendait ensuite à la boutique et très tranquillement il l’arrangeait et allait à la rencontre de ses nombreux clients. Il vendait continuellement sans faire de pause. Il était d’une grande rectitude en pratiquant ses ventes. À midi, il rentrait chez lui pour manger et tous déjeunaient ensemble. Puis il se couchait et dormait une demi-heure. Il en allait ainsi chaque jour. Il ne prenait pas beaucoup de vin ou de raki. Il était de constitution saine et robuste, son corps était droit et bien proportionné. Il marchait d’un pas tranquille. Il avait beaucoup de vêtements, aimait en changer et les portait très propres. Il ne se fâchait avec personne, n’était ni capricieux ni susceptible et était très patient.
En fin de journée, à 11 h½ à la turque 7 , il fermait sa boutique et se rendait à la synagogue pour les
3. École religieuse où l’on étudie le Talmud.
4. Sages en hébreu, souvent employé pour désigner les rabbins judéoespagnols.
5. Dix hommes juifs.
6. Les phylactères.
7. Le décompte des heures à la turque commence au lever du soleil.
8. La bénédiction sur le vin.
i deretcho kamenava repozado, enpatronava i le plazia renovar sus vestidos ke teniya muntchos, i los vestiya muy limpios, non se araviava kon dinguno, i non era kapritchozo ni menos supito otro ke era muy pasensiozo, sovre todos los puntos en las tadres kuando ya era 11/2 a la turka ya serava su butika i se iva a el kaal, i deziya minha i arvid, kon minian, i deretcho se veniya a kaza, eyos denpues ke ya komiyan, estavan komo la ora ke beviyan kahve i se etchavan por durmir temprano i todos se levantavan de maniana, en todos los dias antes de Chabatod i de los Moadim, serava su butika a la ora 9 de la tadre, i se venia a kaza para resivir el Chabad i los Moadim de temprano kon ke se lavava i se arapava, i se kortava las unias, i tomava un vasiko de raki kon un poko de eskulatcha, ke esto era para resivir el Chabad, i los Moadim, i denpues se iva a el kaal, por dizir la minha i el arvid, i kalia ke salieron de el kaal antes ke estuviera de notche, por resivir el Chabad, temprano, la meza ya estava puesta, kon la lampa ensendida de 7 metchas era enkolgada de un zindjir de tel del tavan enkolgada, en la meza eras resentadas 12 pitas una ensima de la otra, prezentando en la forma de el pan de 2 karas adjuntado de un salero de sal i un kutchiyo lo todo kon un bogo lavrado kon letras de merobah, eskrito el Kiduch de Chabad, i kuando ya viniyan los ombres de el kaal, diziya el patron de la kaza, a las mujeres todas vestidas kon los vestidos de Chabad, kon boz alta, Chabat Chalom, i los grandes de kaza ke son el padre i la madre, se asentavan en la chelte, i les viniyan a unos a unos al presipio sus ijos los grandes les bezavan las manos de el padre i la madre i denpues viniyan sus nueras, ijos, i ijas en kurto todos las djentes de su kaza, i denpues se bezavan las manos los unos kon los otros, el mas grande al mas tchiko i denpues se levantavan en pies los ombres i deziyan a boz alta el Kiduch, todos a la una estos Pasukim, ke estan reglados, antes de dizir el Kiduch, kon el vazo de vino ; i kuando ya eskapavan i esto, era solo el patron de la kaza ke le davan un vazo de vino ke era Kacher i estando en pies delantre de la meza i todos deredor
offices de minha et d’arvid en présence d’un minyan et il rentrait ensuite directement chez lui. Après avoir dîné, ils passaient environ une heure à prendre le café, se couchaient tôt et se levaient de grand matin. Tous les jours précédant le shabbat et les fêtes, il fermait sa boutique à 9 heures de l’après-midi et rentrait tôt à la maison pour se préparer à accueillir les shabbats et les fêtes en se lavant, se rasant et en se coupant les ongles. Il prenait un petit verre de raki avec un peu de vermicelles [eskulatcha] pour accueillir les shabbats et les fêtes et ensuite il se rendait à la synagogue pour les offices de minha et arvid. Ils devaient sortir de la synagogue avant la tombée de la nuit pour accueillir à temps le shabbat. La table était déjà mise avec le chandelier à sept mèches pendu au plafond à une suspension [zindjir] en fil de fer [tel]. Sur la table étaient disposés douze petits pains, les uns au-dessus des autres, formant comme un pain à deux faces, accompagné d’une salière et d’un couteau, l’ensemble enveloppé d’un tissu brodé avec le texte du kidoush 8 du shabbat en caractères hébraïques. Quand les hommes revenaient de la synagogue, le maître de maison disait à voix haute aux femmes toutes vêtues de leurs habits de shabbat: shabbat shalom. Le père et la mère, les maîtres de la maison, prenaient place sur la banquette et chacun venait à tour de rôle leur baiser les mains, en premier les aînés, puis leurs brus, leurs fils et filles, en résumé tous les gens de la maisonnée. Puis ils se baisaient les mains entre eux, du plus petit au plus grand. Les hommes se mettaient debout pour dire à haute voix le kidoush et les passages requis avant le kidoush avec le verre de vin. Une fois cela achevé, on donnait un verre de vin casher au maître de maison debout devant la table, et tous les autres se tenant debout et silencieux à ses côtés prêts à écouter le kidoush. Le maître de maison chantait alors le kidoush du vendredi en tenant le verre en argent ou en verre dans sa main. Après avoir terminé, il s’asseyait et buvait la moitié du verre et donnait l’autre moitié à sa femme en lui baisant la main avec une petite révérence. Il en allait de même entre eux; du plus grand au plus petit, chacun goûtait une gorgée et se baisait la main en recevant le verre. Puis ils se lavaient les mains, disaient la bénédiction
de el, tambien en pies kayados ke van a sintir el Kiduch, i el grande de la kaza a boz alta lo kantava el kiduch el Yom Hachihi en deteniendo el vazo kual de plata i kual de vidrio en su mano denpues ke ya lo eskapava, se asentava i se bevia el medio vazo i la otra metad, lo dava a su mujer kon bezarse la mano kon una tchika temena i ansi del uno al otro enpesando del mas grande fin al mas tchiko i todos gustavan a un sorvo a kada uno, i tambien todos se bezavan las manos al resivir de el vazo, i denpues se lavavan las manos i deziyan la Beraha, i denpues kantavan el lemitsva-alriftah, i denpues el patron de la kaza kitava el bogo ke tapavan las 12 pitas, en metiendo kon las 2 manos ensima de todas las 12 pitas ke eran resentadas a 2 en kuenta 6 i diziendo la Beraha, de el Amotsi, i se tomava las 2 de eyas en deteniendolas kon las 2 sus manos fin ke eskapava de dizir la Beraha, i denpues de las 1 de estas 2 partiya kon la mano la media i al presipio se partiya para si kuanto un bokado i lo untava en la sal i se lo komiya i denpues iva partiendo para todos los de la meza a un bokado a kada uno i les iva dandoles i kada uno se lo tomava i lo untava en la sal en diziendo la Beraha de el amotsi se lo komiyan, i denpues traivan guevos enhaminados kon una redoma de raki i unos kuantos vazikos, i los mundavan los guevos, i se tomavan kada uno a un pedaso deteniendolo fin ke el grande de la kaza va a dar a kada uno un vaziko de raki i todos van a dizir de muevo Chabad Chalom, i se lo bevian i denpues se komiyan el pedaso de guevo por meze, i denpues traivan las komidas i komiyan todos de un plato ke lo metiyan en medio de la meza, i kuando ya eskapavan se lavavan todos las manos kon savon por razon ke komiyan kon la mano, i denpues traivan frutas kon vino i tomavan todos seya de las frutas komo tambien i a un vazo a kada uno de vino i kantavan los pizmonim de notche de Chabad, denpues se lavavan de muevo las manos i deziyan Birkat Hamazone, denpues levantavan la meza i se ivan kada uno a su kamareta, i esta forma lo aziyan en todos los Chabatod i los Moadim, seya en las notches komo tambien i en los dias, (lo ke
et chantaient Le mitzvah al-riftah. Ensuite le maître de maison retirait le tissu enveloppant les douze pains en plaçant les deux mains sur les deux piles de six pains chacune et disait le motsi 9 en tenant deux d’entre eux entre ses mains jusqu’à ce qu’il ait fini de dire la bénédiction. Puis, avec la main, il rompait l’un des deux, prenait d’abord une bouchée pour lui qu’il trempait dans le sel et mangeait. Il divisait ensuite le pain pour toute la tablée, en donnait une bouchée à chacun que l’on trempait dans le sel en disant la bénédiction du motsi avant de la manger. Puis l’on apportait les œufs marbrés avec un flacon de raki et quelques verres. On épluchait les œufs et chacun en prenait un morceau en le tenant jusqu’à ce que le maître de maison ait donné à chacun un petit verre de raki et que tous aient dit à nouveau shabbat shalom. Ils le buvaient et ensuite mangeaient l’œuf en apéritif. Après on apportait la nourriture et ils mangeaient tous d’un plat disposé au milieu de la table. Une fois terminé, ils se lavaient les mains avec du savon, car ils mangeaient avec les mains. On apportait alors les fruits avec du vin. Ils prenaient tous des fruits, un verre de vin chacun et entonnaient les cantiques. Ils se lavaient de nouveau les mains, disaient le chant d’action de grâce avant de se lever de table et d’aller chacun dans sa chambre. Il en allait ainsi tous les shabbats et jours de fête, de jour comme de nuit (d’après les personnes âgées, ils se mettaient en colère quand ils tardaient à rentrer de l’office d’arvid avant le shabbat, car l’œuf dont on a parlé plus haut devait être partagé avant la nuit tombée; cette coutume de l’œuf était considérée à l’égal de l’un des dix commandements de la Loi).
5557 [année civile 1796/1797]
En l’an 5557, M. Abraam I qui jouissait déjà de la meilleure situation et dont le commerce allait tambour battant 10 adressait toujours des louanges à Dieu. Il donnait du plaisir à qui se présentait devant lui, jouissait d’une grande influence et ainsi gagnait une haute renommée. Les notables de la ville qu’ils soient Turcs, chrétiens ou Juifs venaient toujours lui rendre visite dans sa boutique et lors de celles-ci beaucoup le
9. La bénédiction sur le pain.
10. Le texte dit littéralement « comme eau courante ».
Maison Arié de Samokov dite maison du changeur (Sarafska). Conçue par l'architecte Stephan d'Edirne et bâtie par des maçons de Plovdiv vers 1860, elle abrite actuellement un musée ethnographique.
dizen los viejos i se aravian kuando kedan mas tadre para dizir el arvid, de la notche de Chabad, era por razon ke el guevo ditcho ariva se devia partirlo antes ke estuviera de notche, ke este guevo, se afirmava komo una de las 10 enkomendansas de la Ley).
En este anyo de 5557, el S-r. Abraam, I. ke ya gozava de todo bueno, i su etcho de la butika ke ya le koriya komo la agua, era ke siempre dava las lores al alto Dio, i ir aziendo plazeres al kual se le prezentava delantre, i enfluensa ke tenia muy grande ansi era ke se gano grande renome, i siempre le ivan viniendo los S-res i notavles de la sivdad seya turkos komo tambien i kristianos i djidios a vijitarlo en su butika, i entre estas vijitas avian muntchos de estos ke le rogavan porke les eskapara algunas diferensias ke tenian seya los unos kon los otros seya ande el Mehmed Emin AA., i a todos los sintiya kon grande atension, i buchkava de kontentarlos a todos, ke visto a esto ke teniya kaji sin kedar en kada dia ke le ivan
priaient d’arranger quelques différents qu’ils avaient entre eux ou avec l’Agha Mehmed Emin. Il les écoutait avec grande attention et s’efforçait de tous les contenter. Il en résultait qu’il avait ainsi presque chaque jour et sans discontinuer des visiteurs. Il décida de procéder à un changement pour ne pas prendre du retard dans ses affaires et en même temps donner satisfaction à tous ceux qui s’adressaient à lui. Il changea de boutique et en prit une composée de deux pièces; dans la première, il disposa sa marchandise et dans la seconde, il reçut ses visiteurs et aussi les Juifs qui s’adressaient à lui pour qu’il juge de leurs conflits et des affaires de la communauté. Ce n’était que les dimanches qu’il s’asseyait à la maison d’études, le lieu consacré pour gérer ce qui relevait de la communauté. Avec les administrateurs, il jugeait le peuple et régentait les affaires communautaires. On ne décidait d’aucune question sans lui en référer et il sacrifiait beaucoup d’argent aux besoins de la communauté.
M. Abraam I était d’un naturel joyeux et il cherchait toutes les occasions pour combler ses désirs,
viniendo ansi djente ; se detchizo de azer un trokamiento, i para non kedarse tambien atras de su etcho i en mizmo tiempo de kontentar a todos estos ke se le adresen, lo izo troko la butika i se toma otra kon 2 kamaretas ke en la una resento su ropa i en la otra resivia a la djente ke le ivan, i por los djidios ke le viniyan para ke los djuzgara sus diferensias ke tenian el uno kon el otro, i estas tambien por los etchos de el kolel, lo izo ke solo en los dias de los alhades se asentava en el midrach lugar ke era apropiado para menear los etchos de el kolel, i djunto kon los mimonim, iva djuzgando al puevlo i reglavan los etchos de el kolel, ansi era ke non se azia ni menos ke se eskapava dinguna kestion sin ke se le demandara de el S-r. Abraam, I. i mas ke sakrifikava muntcha moneda por el menester de los etchos de el kolel.
La natura de el S-r. Abraam, I. era muy alegre i siempre buchkava las okaziones de arivar sovre la parte de reintchir sus dezeos, ke lo todo depiende de la persona eya mizma, sovre lo todo ke ya le alkansava la mano i el poder, i lo todo kon muntchos konto i kon karar, i ansi era ke se kontentava i se alegrava kuando se le realizavan sus dezeos, de kuala forma fuesa, ke el las dezeyava, en denpues ke ya eskapavan de komer las notches se tomava a sus 2 ijos, i estudiavan algo en algunos, pedasos de la Guemara, i esto era muy poko, ke non los detiniya muntcho, por ke non se enfasiaran i denpues en algunas notches tomava el pandero la S-ra Bulisa Buhuru, djunto el S-r. Abraam, I. i todos sus ijos endjuntos, i kantavan i se alegravan, ke todos saviyan kantar i teniyan bozes buenas i altas, esto tambien les turava komo una ora i denpues se ivan kada uno a su kamareta por durmir.
El S-r. Abraam, I. sigun de siempre ke se lo azia saver al Mehmed Emin AA., por kuando se iva a ir a Kostan por azer sus empleos, i kalia ke lo alesensiara tambien, fue i en esta okazion dezirselo, i el Mehmed Emin AA., ke ya lo alesensio fue tambien i le ordono agora mas muntchas kozas i le dio el menester de moneda i tambien le demando si es ke teniya el menester de alguna suma moneda ke
ce qui ne dépendait que de lui, d’autant plus qu’il avait déjà le pouvoir et tout en main, en quantité plus que suffisante. Ainsi il se réjouissait et prenait du plaisir quand se réalisaient ses désirs, quelle que soit leur forme. Après avoir terminé de dîner le soir, il prenait ses deux fils avec lui et ils étudiaient brièvement quelque point d’un passage de la Guemara. Il ne les retenait pas beaucoup afin qu’ils ne s’ennuient pas. Ensuite, certaines nuits, Madame Bulisa Buhuru prenait le tambourin avec M. Abraam I et, avec tous leurs fils, ils chantaient et se réjouissaient. Ils savaient tous chanter et avaient de belles voix claires. Cela durait environ une heure, puis ils regagnaient chacun leur chambre pour dormir.
M. Abraam I prévenait toujours l’Agha Mehmed Emin avant d’aller faire ses achats à Constantinople afin qu’il l’y autorise. Il alla donc le lui dire à cette occasion et l’Agha Mehmed Emin lui donna la permission, lui commanda beaucoup plus de choses en lui donnant ce qu’il fallait comme argent. Il lui demanda aussi s’il avait besoin qu’il lui fasse crédit. Aussitôt, [M. Abraam I] le remercia en embrassant le pan de son habit et lui dit qu’il allait le lui demander. Il lui donna mille [?] groches et ensuite il s’en fut chez les autres notables de la ville et prit des commandes de tous. Quand il fut prêt, il partit pour Constantinople et réalisa tous ses achats. Alors qu’il était à Constantinople, il s’entendit avec tous ses fournisseurs pour qu’à l’avenir il leur passe commande par lettre et n’ait pas à venir lui-même à Constantinople, car il était obligé de fermer sa boutique et que ces voyages prenaient beaucoup de temps. Ils se mirent ainsi tous d’accord et lui promirent de faire suivant son désir. Il rentra à Samokov heureux de sa réussite. Il poursuivit son commerce qui allait toujours en se développant. Les achats qu’il avait réalisés lors de ce voyage avaient été beaucoup plus importants que lors des précédents et il avait rapporté beaucoup plus de nouveaux articles. Tous les articles trouvaient acheteur, car, en ce temps-là, ils ne passaient pas de mode. On s’habillait toujours de la même façon, que ce soit les hommes ou les femmes même si les jeunes filles portaient un type de vêtement jusqu’au mariage et
le podia i emprestar, a la ora se lo rengrasio kon bezarle la alda i le dicho ke esto ya le iva a demandar, i le dio mil [?] groches, i denpues se fue i ande los otros Beguis i los Signores de la Sivdad i de todos tomo komandas, i kuando ya estuvo pronto partio por Kostan, i se izo todos sus empleos, i en este tiempo ke estuvo en Kostan kon todos estos ke les empleava las ropas kedo de akordo por ke para el avenir ke les iva azer komandas kon kartas i por non vinir el mizmo a Kostan a razon ke era uvligado de serar su butika ke estos viajes le turavan tambien lungo tiempo i ansi fue ke kon todos estos se konvino i todos le prometieron azer sigun su dezeo, i se vino a Samokov, kontente de su reuchita i kontinuava en su negosio siempre au(g)mantando, i sus empleos de este viaje fueron muntcho mas grandes ke de los otros i tambien agora trucho muntchos mas muevos artikolos, ke de lo todo era ke le eran pasavles i los vindia todos por ke en akeyos tiempos non avia pasar las modas ke todo i siempre eran una forma de vestimientas ke vestian, seya kon los ombres ansi de mizmo i kon todas las mujeres ke ya era apartado kon las mujeres, fin kuando eran mutchatchas se vestian una forma, i kuando la kazavan era en otra forma, i kuando ya arivavan a la edad de 40 anyos ya kalia ke se vestieran de unos vestidos mas komo ya son a la edad i ya se kontavan komo mujeres de las viejas i kuando ya arivavan a la edad de 60 anyos ya eran enteramente de unos vestidos ke se kitavan las kamizas para afuera i se metiyan unos enteris de 3 aldas en dechandosen ver una partida de la kamiza de la parte de los pies i en la kavesa muy bien apretada kon unos kuantos chamis i muy bien guadrarse los kaveyos i reborsarsen de las kechadas en tapandosen las medias karas, eyas todas las mujeres delantre kual ombre fuesa mizmo i de su marido non salia deskalsa ni menos en talia ke salia se vestiera de un tcherkes ke es un palto i kon tchorapes ansi tambien a dingun presio se podiya de mostrar delantre los ombres kon kaveyos de su kavesa - ke esto [es] el mas grande pekado komo una de las 10 enkomendansas, esto se kontinuo fin a el anyo de 5640, se
un autre après. Quand elles atteignaient les quarante ans, on les considérait déjà comme des femmes âgées et elles devaient porter des vêtements en rapport avec leur âge et quand elles atteignaient les soixante ans, elles portaient des vêtements qui laissaient passer les chemises dehors et elles mettaient des robes à trois pans en laissant paraître aux pieds une partie de la chemise. Sur la tête, elles portaient les cheveux bien serrés et dissimulés avec des bonnets remontant jusqu’aux joues couvrant la moitié du visage. Aucune femme ne sortait déchaussée devant quelque homme que ce fût y compris leur mari, ni sans manteau [en talia]. Lorsqu’elles sortaient, elles passaient un tcherkes c’est-à-dire un manteau avec des bas de laine [chorapes]. À aucun prix, elles n’auraient montré leurs cheveux devant les hommes, ce qui aurait été considéré comme le plus grand des péchés, comme une infraction à l’un des dix commandements. Il en fut ainsi pour les cheveux jusqu’en 5640 [1879/1880]. Pour le reste, les choses évoluaient avec le temps. La plupart prenaient exemple sur les Turcs y compris les hommes. Il n’existait à l’origine qu’une seule sorte de vêtement propre aux Juifs; ils portaient une ample robe de coton sur un pantalon à large entrejambe [tchakchir du turc čakšire] ou un pantalon ample [chalvar], au ventre une ceinture enroulée [sariado, du turc sarmak, enrouler, envelopper, emballer, entourer, ceindre] de deux ou trois tours et une courte veste [fermela] sous un manteau long [djube ou kyurdi]. Celui qui était un sage portait la boneta et le reste du peuple un turban rouge. Les jeunes enroulaient un linge noir au-dessus du fes. Autrefois les femmes rasaient entièrement leurs cheveux sauf quelques mèches sur le pourtour de la tête formant des boucles et les couvraient d’un couvre-chef en coton blanc. Aucun ciseau ou rasoir [ustra du turc oustoura, rasoir] pour couper la barbe. Leurs moustaches étaient taillées afin que lorsqu’ils mangeaient de la viande, au cas où il leur resterait un peu de fromage du repas précédent, on ne puisse pas considérer qu’ils avaient mangé de la viande avec du fromage. C’est pour cela qu’ils se lavaient les mains entre les plats à base de viande et les plats à base de fromage. L’hiver ils n’avaient qu’un réchaud à charbon pour se chauffer; ils n’avaient pas de poêles à
entiende solo kon la kestion de los kaveyos, ke por lo restan se iva trokando en diferentes tiempos ke lo mas muntchos tomavan los enchemplos de los Turkos i ansi tambien lo azian i los ombres ke al presipio los Djidios era de solo una forma de vestidos ke vestian separatamente para Djidios, ke era ke se vestian de unos enteris largos de demikaton ensima de un tchakchir o un chalvar, i en el bel un kuchak ke era sariado 2-3 vezes i una fermela kon un djube o un kyurdi ensima i en la kavesa akel ke era haham yevava una boneta, i lo restan de el puevlo un sarik de un kuchak kolorado sariado i los mansevos se sariavan kon un chami preto ensima la fes, ke al prisipio se metian un haratchin de hase o de tira ke los azian las mujeres blankos sus kavesas enteras arapadas en dechandosen unas ulufias de kaveyos en las sienes de el meoyo, en forma de daled, en sus barvas non metiyan ni tijera ni ustra, sus mustatchos kirkiyados por kuando komen de karne i se le puede kedar algo de lo de kezo ke komiria mas antes i denpues ke podra komer de karne va a ser ke se le puede kontar komo ke komio la karne kon el kezo, era por esto que se lavavan las manos entre la komida de kezo kon la de la karne, en los diyas de el envierno eyos se kayentavan solo kon lumbres de kimur ke non tiniyan sobas para asenderla kon lenya en las kamaretas al prisipio espandian saman o paya i denpues estiravan los mas muntchos un tchul i algunos un kilim i lo enklavavando todas 4 partes i en las ventanas las enpapelavan deredor de todos los djames kon tiras de papel kon ke las untavan kon tchirich i en sima de el tavan lo sovadiavan kon baro i de esta manera era ke estavan siempre kayentes, ma non les dava en la kavesa las lumbres de kimur no menos teniyan menester ke tomaran aver las kamaretas, ansi lo azian i en sus butikas i en todos otros sus asientos ande los teniyan ke non avia medios otros para enplear la lenya, la Bulisa Buhuru, ke era en kaza eya era akompanyada de una tchika dichipla para ke guadrara a la kriatura kuando durmiya i por lo restan de todos los menesteres de la kaza se los reglava eya sola,
bois dans les chambres. Ils disposaient d’abord du foin [saman] ou de la paille et ensuite la plupart plaçaient un tapis grossier [tchul] ou encore certains un kilim et ils le fixaient aux quatre extrémités. Ils calfeutraient les fenêtres avec des bandes de papier autour des vitres [djames] que l’on imprégnait de colle [du turc tchirich]. Le plafond était enduit [sovadeado] d’argile [baro] et de cette façon ils étaient toujours au chaud sans que la chaleur du charbon leur monte à la tête et sans que l’on ait besoin d’aérer les chambres. Ils procédaient également ainsi dans leurs commerces et dans toutes leurs autres résidences où l’on ne pouvait utiliser le bois. Madame Bulisa Buhuru était secondée à la maison par une petite servante qui servait de garde d’enfant quand elle dormait. Elle s’occupait de toutes les autres tâches domestiques, car, comme je l’ai dit, c’était une femme saine et robuste, bonne ménagère et très économe. Bien souvent elle adressait des reproches à son mari afin qu'il ne fasse pas de grandes dépenses. M. Abraam avait du plaisir à la contenter en lui achetant tout ce qui lui paraissait bon. C’était quelqu'un de placide et que rien ne fâchait.
5558 [année civile 1797/1798]
En cette année 5558, il ne se rendit pas à Constantinople, car comme il a été dit, il s’était arrangé pour se faire apporter les marchandises dont il avait besoin. Cette année-là, il établit une note pour chaque marchand de Constantinople des articles dont il avait besoin et leur remit les crédits nécessaires et, après un certain temps, toutes ses commandes lui parvinrent en bon ordre. Ses ventes allaient comme auparavant, toujours en s’accroissant et en se développant. Après avoir reçu les marchandises commandées à Constantinople et après avoir réalisé les premières ventes, alors que les affaires étaient pour un certain temps plus calmes, il se décida à faire un voyage aux foires qui avaient lieu à Seres, Perlipe et en d’autres endroits. Ces foires se tenaient en de nombreuses places en Turquie. Les grossistes qui avaient soit des restes de certains articles invendus, soit qui avaient besoin de vendre pour rembourser un crédit apportaient leurs marchandises à ces foires et les vendaient. Plus tard
11. Harem, c’està-dire taboue, défendue.
sigun ditcho ke era una mujer muy sana y rezia i muy kazera ansi de mizmo i muy ekonomioza ke muntchas vezes le dava kechas a su marido porke non iziera gastes grandes, ke el S-r. Abraam, I., le plazia kontentarla, kon todo esto ke le paresia de bueno de ir merkandole, ke era una persona muy bonatcha i non se araviava por nada.
En este anyo de 5558 non fue a Kostan i sigun ditcho ke ya se lo tuvo resentado su etcho por azerse traer las ropas ke se le azian de menester, fue ke en este anyo izo una nota para kada merkader de Kostan, por los artikolos ke teniya menester i les remetio los emportas menesterozos, i dopo de un sierto tiempo, ya le arivaron todas sus komandas en muy buena regla, i sus venditas eran de mizmo komo i de antes, siempre andando i engrandesiendosen, denpues ke ya resivo las ropas komandadas a Kostan i denpues ke ya izo las primeras venditas, i ke los tratos ya son por un sierto tiempo algo mas flakos, se detchizo de azer un viaje i en algunas ferias, ke avian en Seres i Perlipe, i en otros lugares, ke estas ferias se azian en muntchos lugares de la Turkia, i era ke los merkaderes ke eran vendidores de ropas en engro seya ke les restava algunos artikolos ke non se le vendieren o ke teniya menester de vender por enkontrar sus pagamiento se yevavan sus ropas a estas ferias i las vendiyan, ke mas tadre lo izieron esto komo grandes merkansias i se aziyan traer de las fabrikas a kantedades grandes solo para las ferias porke se espandio muntcho este negosio en las ferias, i era ke empesaron a ir de todas las sivdades deredor de ande se azia la feria en general todos los merkaderes de kada sivdad para azer sus empleos en las ferias ditchas, i aparte ivan tambien i muntchos patrones de familias a merkarsen lo menester de ropas por sus kazas para el anyo entero, i en mismo tiempo aviyan i muntchos ke se yevavan sus artikolos ke eyos los unos ke lo rekojian de sus produidos i los otros ke los lavoravan en sus kazas i los vindiyan en las ferias kon mijores presios, i el S-r. Abraam, I. izo algunos empleos de muntchos artikolos ke le eran pasabiles para su butika, i se topo muy kontente, sovre todo de esto ke se
cela devint une activité commerciale majeure et l’on faisait venir des fabriques de grandes quantités destinées seulement aux foires, car ce type de commerce s’était beaucoup développé. Tous les marchands des villes aux alentours de la foire commencèrent à venir faire leurs achats dans ces foires et de nombreux chefs de famille venaient aussi acheter les marchandises nécessaires pour leur maison durant l’année. Il y avait également beaucoup de gens qui apportaient leurs articles que certains collectaient chez leurs producteurs et que d’autres réalisaient chez eux et dont ils obtenaient un meilleur prix dans les foires. M. Abraam I fit l’achat de beaucoup d’articles qui lui paraissaient convenir pour sa boutique. Il s’en trouva fort satisfait d’autant qu’il fit ainsi la connaissance de beaucoup de grands commerçants, qu’il apprit de nombreuses choses et de nouvelles règles pour le commerce. Comme je l’ai écrit plus haut, M. Arié I était très curieux et il aimait tout connaître. Lors de cette foire, il vit des usages et des comportements parmi les Juifs qui l’étonnèrent beaucoup. Parmi elles, il en est une particulièrement surprenante que je vais relater ici. Un matin, alors qu’il marchait en ville, il tomba sur une femme qui tenait un sabre [yatagan] dégainé à la main et qui se défendait contre un homme également armé. Il chercha à savoir pourquoi ils se battaient et était curieux de voir une femme le sabre en main se défendre avec force. Il vit que tout autour de l’affrontement, il y avait beaucoup d’hommes tous bien armés, car l’usage était que tous les Turcs soient armés d’un sabre et de deux pistolets à balles qu’ils portaient dans une cartouchière passée au-dessus de leur ceinture comme je l’ai déjà écrit. Mais personne ne s’approchait des adversaires. Il en demanda la raison et on lui dit que c’était affaire de femme 11 et juste à ce moment-là, il vit 30 à 40 femmes qui couraient avec leurs sabres dégainés vers le lieu de la dispute pour venir en aide à la femme qui se disputait. Et tous ceux qui regardaient attendaient l’arrivée de la police pour empêcher l’homme de porter la main sur la femme. Quand la police arriva, elle s’approcha de l’homme, lui donna une baffe si forte qu’elle s’entendit jusque dans le public, le ramassa et l’emmena. Les policiers demandèrent à la femme de les suivre et toutes les femmes en criant se dispersèrent. L’affaire était la
konosio kon muntchos merkaderes grandes, i se embezo tambien muntchas kozas i reglas muevas para la merkansia, sigun ke ya lo tengo eskrito de mas antes ke el S-r. Abraam, I, era muy kuriozo ke le plazia saver de todas las kozas, en esta feria el vido unos uzos i komportos entre los Djidios ke le fueron muy maraviozas, entre las muntchas ke vido fue la una mas maravioza, ke la vo a eskrivir aki ke es una demaniana ke se estava kaminando en la plasa enkontro a una mujer ke teniya un yatagan dezvainado en su mano i se estava defendiendo de un sierto ombre tambien armado, i enteresandose por saver por kualo era ke eyos se harvavan i kuryozo de ver a una mujer kon el yatagan en la mano fuertemente defenderse, i viendo ke deredor de el pleito ya aviyan muntchos ombres ke todos tambien armados porke el uzo ya era siempre todos los Turkos dekontino eran armados, kon un yatagan i de 2 pichtoles plomos i los yevavan en una silah enkochakada ensima de su kuchak ke sovre eyo ya tengo eskrito en ke forma las yevavan, ma dinguno non se aserkava ande los peleantes, i demandando la razon le dicheron ke era Harem (mujer) lo ke estava peleando i en este tiempo lo vido ke koriyan 30-40 mujeres todas dezvainados su yataganes ande era el pleito para vinir en ayuda de la mujer ke peleava, i todos los ke estavan mirando, eran esperando a la polisia, i non dechar al ombre ke levantara mano sovre la mujer, i kuando ya arivo la polis se aserko ande el ombre i kon un buen chamar ke le dio ke se sentio fin ande estavan todo el puevlo, lo rekojeron i se lo yevaron i a la mujer le dicheron ke vaiga detras de eyos, i todas las otras mujeres kon gritos se ezparzieron, ke el etcho fue ke la mujer tuvo de merkarle de el ombre ke era vendidor de frutas i le tuvo de merkar una oka de mansanas i la mujer ke ya le pago le kijo el ombre kovrarle sigun la mujer por la sigunda vez, ke el ombre le kijo tomarle atras las mansanas i la mujer non kijendo darselas, es ke le vino el etcho a las armas, en la polisia kondenaron al ombre a un mes de prezo i [mot illisible] aspros de endamnite (djeza) i a la mujer la toparon deretcha, esto fue a feria de Prilepe ke
suivante: la femme avait voulu acheter à l’homme qui était un vendeur de fruits, un peu plus d’un kilo [una oka] de pommes; d’après la femme, alors qu’elle avait déjà payé, il avait voulu la faire payer à nouveau. L’homme chercha à lui reprendre les pommes tandis que la femme ne voulait pas les lui donner de sorte qu’ils en vinrent aux armes. La police condamna l’homme à un mois de prison et une amende de [mot illisible] aspres; ils innocentèrent la femme. Cela s’est passé à la foire de Prilep en Macédoine et [M. Abraam I] fut très surpris de voir des femmes en armes sachant se défendre. Après s’être enquis à ce sujet, on lui dit que cela faisait partie de leurs coutumes et que toutes les femmes qui sortaient en ville portaient sous leur manteau un sabre, que certaines avaient aussi des pistolets et qu’il en allait de même des femmes juives. Qu’il fallait considérer cela comme partie intégrante du vêtement et non comme une chose qui doive faire peur. En Albanie, les femmes portaient les armes passées sous leur ceinture comme le faisaient les hommes. Moi-même, Monsieur Moche A. Arié II, l’auteur et le rédacteur de ladite biographie Arié, j’ai vu une jeune femme juive de Leskovsa en Serbie qui était venue à Samokov. Elle aussi avait des armes qu’elle savait utiliser et qu’elle avait apportées. Moi et tous ceux de notre maisonnée, nous la priâmes de bien vouloir s’armer. Pour nous faire une faveur [azermos la palavra], elle alla dans une autre chambre où elle avait son bagage et elle passa un chalvar de drap brodé de clinquants [klabudan] et de fil d’or avec de belles ramures sur les poches, les jambes et le dos. Au niveau du ventre, elle portait une ceinture de laine fine de différentes couleurs [aladjali, du turc aladjalamak bigarrer, barioler] bien serrée à la taille et sur la ceinture une cartouchière de cuir fin rehaussée d’argent sous laquelle étaient passés deux pistolets et un sabre dont toutes les crosses étaient gravées d’or et d’argent. Ces dernières tenues par des chaînettes d’argent étaient pendues à la cartouchière. Aux extrémités de la cartouchière pendaient deux petites boîtes en argent également tenues par des chaînettes d’argent qui contenaient la poudre et les cartouches et dans l’une d’entre elles une éponge imbibée d’huile pour graisser les plombs. Elle était vêtue au-dessus d’une courte veste [tchepken] allant
es en la makedonia, i le vino de maraviya a ver a mujeres armadas i tambien saversen defender, i denpues ke demando sovre esta kistion, le dicheron ke este modo es sus uzos ke todas las mujeres kuando saliyan a la plasa debacho de sus feredjes siempre kalia ke tuvieran kon eyas un yatagan ke es un kotchio grande i algunas teniyan tambien i pichtoles, de mizmo eran i las mujeres djudias tambien, ke esto era komo un vestido non les era nada de espanto, en la albania yevavan las mujeres las armas en sus kuchakes proprio komo yevan los ombres, yo Tchelebi Moche A. Arie, II. el kompozidor i eskrividor de la dita biografia Arie, tengo visto a una mujer djudia manseva ke tuvo venido a Samokov, i era de Leskovsa Serbia mos kontaba esto mizmo eskrito ariva por las mujeres ke se arman tambien i de sus partes i ke eya tambien se arma i save amplear las armas i ke agora ke se vino a Samokov eya se trucho kon si tambien armas, i yo kon la djente de muestra kaza le roguimos porke se armara, i eya por azermos la palavra se fue en otra komareta ande teniya su bagaje i se vistio de un chalvar de panio ke era lavrado de klabudan i de tertil de oro kon ermozos ramos en las aldikeras i en las patchas i en la espalda i delantre la tripa bien apretado en su talia i en su bel un kuchak de lana fina aladjali i ensima el kuchak una sillah pintada kon pinturias de plata etcha de kuero fino, i en esta sillah, se metio 2 pichtoles kon un yatagan, i en los mangos de todos los 3 eran pintados de modos de pinturias kon oro i plata, detenidos de unos zindjirikos de plata de sus mangosas la sillah enkolgando i en los kenares de la sillah dechados enkolgando de rodas 2 partes unos kutikos de plata detenidos tambien de zindjirikos de plata ke kontenian el barut i les kruchumes i en el uno una espondja embevida en la azeite por untar en los plomos, i ensima de todo esto eya se vistio de un tchepken kurto fin a la talia dechandose enkolgar las mangas ke eran enteramente lavradas de klabudan de oro figurando maneras de armas, i la espalda i en las aldas era de mizmo lavradas enteras tambien kon klabudan de modos de rozas, sus patchas eran
jusqu’à la taille aux manches pendantes et entièrement brodées de clinquants d’or figurant des armes. Le dos et les pans du vêtement étaient de même entièrement ornés de clinquants au motif de roses. Ses jambes étaient enserrées dans des guêtres également ornées de clinquants et de grands boutons travaillés avec de l’or filé. Aux pieds, elle portait des bas de laine fine ornés de roses rouges et était chaussée d’escarpins de cuir fin bien serrés. Sur la tête elle portait une toque tenue par une bride noire. Au niveau des joues [kechadas litt. mâchoires] la toque était comme celle que portent les Monténégrins et la pointe ornée de clinquants.
Nous l’attendions tous au salon. Soudain, elle entra dans la pièce et d’un coup dégaina son sabre qu’elle plaça dans sa bouche le tenant entre ses dents. Elle saisit les deux beaux pistolets les tenant fermement entre ses mains et nous dit: « Par la force de mes armes, je me défends de vous autres et qu’aucun de vous n’ose bouger de sa place! » Elle alla à la fenêtre et d’un seul coup déchargea les armes. Elle ouvrit les boîtes où elle gardait sa poudre et ses cartouches, les rechargea et s’assit avec nous. Elle nous raconta que dans son pays beaucoup de femmes savaient utiliser les armes et qu’elles en possédaient de beaucoup plus précieuses encore. Dans notre famille Arié, M. Chemouelatchi, le fils cadet de M. Tchelebi Yeouda possédait à cette époque les vêtements que j’ai décrits et Madame Bulisa, la femme de Monsieur Tchelebi Yeouda les portait avec au surplus une jupe à la mode grecque. Chacun des membres de la famille Arié possédait les plus précieuses de ces armes et de la meilleure qualité; seulement dans notre famille aucune femme n’a jamais su les utiliser. À cette époque, ces vêtements valaient 2 000 groches et aujourd’hui ils sont déjà considérés comme des antiquités.
Intérieur de la maison Arié de Samokov dite maison du changeur (Sarafska). Elle a le statut de monument national et abrite un musée d'État.
apretado en koptchadas de unos tuzlukes lavrados tambien kon klabudan kontiniendo unos botones grandes de klabudan i en sus pies unos tchorapes de lana fina alheniados de rozas lo mas muntcho de kolorado i su kalsado unos skarpines de kuero fino muy bien apretados, en su kavesa una kapika detenida de un freno preto en sus kechadas la kapika era komo estas ke yevan los Montenegrinos el tepe lavrado kon klabudan, mozotros todos ke estavamos esperandola en el salon, eya entre fuertemente al salon i al punto se dezvaino su yatagan i se lo metio en la boka deteniendolo kos sus dientes, i al punto se tomo los 2 pichtoles ermozos en sus 2 manos deteniendolos fuertes i mos dicho, yo me defendo de todos vozotros, a fuersa de mis armas, i dinguno de vozotros ke non tenga la uzadia de menearse de su lugar, eya se fue a la ventana i los dezbarko todos los 2 de una, i avrio sus kutis ande teniya depozitado su polvora i kruchumes i los intcho de muevo i se asento kon mozotros, i mos estuvo kontando ke por sus partes ay muntchas mujeres ke saven emplear ansi armas i ke empatronan muntcho mas valutozas de estas, en muestra Familia Arie, los eskritos vestidos ya los empatrona en este tiempo S-r. Chmuelatchi k’es el ijo tchiko de Tchelebi Yeouda, los kualos se los vestia la S-ra Bulisa ke es mujer de Tchelebi Yeouda, kon una fustanela demazia ke es moda Grega, ansi de mizmo i todas las ditchas armas de mizmo las empatronavamos kada miembro de la Familia Arie, de las mas mijores kualitas i las mas valutozas, solo ke entre las mujeres de la Familia Arie, non uvo una mujer ke las supo emplear ansi unos vestidos en akel tiempo teniyan una valor de 2000 groches i agora ya son komo antikas.