Majoliques italiennes de la Renaissance COLLECTION PAUL GILLET
FONDATION BEMBERG
Majoliques italiennes de la Renaissance
C OLLECTION PAUL GILLET
musée des arts décoratifs de lyon
FONDATION BEMBERG
Majoliques italiennes de la Renaissance collection paul gillet
du 25 juin au 27 septembre 2015 FO N D AT I O N B E M B E R G Hôtel d’Assézat - Place d’Assézat 31000 Toulouse tél.: 33 (0)5 61 12 06 89 · fax: 33 (0)5 61 12 34 47 accueil@fondation-bemberg.fr · www.fondation-bemberg.fr Horaires d’ouvertures:
La Fondation est ouverte du Mardi au Dimanche, de 10h à 12h30 et de 13h30 à 18 h. Le Jeudi de 10h à 12h30 et de 13h30 à 20h30.
La Fondation Bemberg aimerait remercier très particulièrement monsieur Maximilien Durand, directeur du MTMAD de Lyon et l’équipe du musée des Arts décoratifs de Lyon
Cette exposition a été organisée en partenariat avec le musée des Arts décoratifs de Lyon
S O M M A I R E
La Collection Paul Gillet à la Fondation Bemberg par guillermo de osma 5
La majolique : un art et une technique par philippe cros 6
L’Attribution des majoliques istoriato de la Renaissance par timothy wilson 9
Les centres de production de la majolique italienne de la Renaissance par philippe cros 27
Catalogue des œuvres Notices par mesdames carola fiocco, gabriella gherardi et liliane sfeir fakhri 67
Bibliographie 255
La Collection Paul Gillet à la Fondation Bemberg
L
a Fondation Bemberg a ouvert ses portes à Toulouse il y a vingt ans, au cœur de l’un des plus magnifiques bâtiments de la Renaissance française, l’Hôtel d’Assézat. Afin de commémorer cet anniversaire, nous présentons, du 25 juin au 27 septembre, une sélection de 85 pièces appartenant à l’extraordinaire collection de majoliques de la Renaissance, qu’a rassemblée, tout au long de sa vie, Paul Gillet (1874-1971), important industriel de la ville de Lyon. Cet ensemble, qui regroupe plus de deux cent pièces, constitue l’un des plus précieux au monde, accumulé par un seul collectionneur. P. Gillet a fait don de sa collection au Musée des Arts décoratifs de Lyon, où ces pièces sont montrées parmi ses trésors les plus inestimables et qui, maintenant, nous les prête de manière tout à fait exceptionnelle. À travers cette exposition nous souhaitons également rendre hommage à Georges Bemberg (1916-2011), créateur de la Fondation et grand collectionneur. Vrai cosmopolite, né en Argentine, il a partagé sa vie entre Paris, New York et Buenos Aires. Homme de profonde culture, pianiste, compositeur, écrivain, financier et industriel, G. Bemberg a consacré une grande partie de son énergie, de sa passion et de ses connaissances — sans oublier sa fortune — à créer sa collection. Ensemble éclectique et encyclopédique, qui regroupe bronzes, peinture ancienne — de Cranach à Guardi —, mobilier, majoliques, porcelaines, horloges, orfèvrerie, reliures, tapisseries et autres objets artistiques datant du xv e jusqu’au début du xx e siècle, avec un ensemble important de tableaux impressionnistes et post-impressionnistes, couronné par une trentaine d’œuvres de Bonnard. La Collection Paul Gillet dialogue parfaitement avec la Collection Bemberg, qui présente aussi certaines majoliques hors pair d’une des périodes favorites de son créateur : la Renaissance. Nous aimerions que cet événement ouvre une série d’expositions annuelles consacrées à une grande collection particulière. Une collection qui soit conservée dans la demeure de son propriétaire ou qui ait trouvé sa place définitive dans une fondation ou dans les salles d’un musée, souvent le destin des collections privées, comme celles de P. Gillet et de G. Bemberg. Le collectionneur est un personnage atypique — curieux, passionné, libre, indépendant, sagace, connaisseur, capable de prendre des risques et de miser sur ce qu’il aime —, entouré très souvent d’un halo de mythe et de légende, mais qui ne reçoit pas, en général, le prestige qu’il mérite. Le collectionneur est une figure centrale dans l’Histoire de l’Art. Grâce à ces expositions — toujours accompagnées d’un important catalogue, documenté et illustré —, nous désirons rendre hommage et analyser le personnage du collectionneur dans toute sa complexité et la fascination qu’il exerce. Parallèlement, nous souhaitons également faire découvrir à un large public — spécialistes, mais aussi amateurs et curieux — des collections inédites ou méconnues. Collectionner est un acte fascinant, personnel et créatif mais aussi insolite, car il consiste pour l’essentiel à s’approprier de certains objets pour les regrouper dans un nouveau contexte. Collectionner n’est pas seulement une façon de comprendre le monde, mais de vouloir créer un univers propre, un microcosme marqué par la personnalité du collectionneur et, en même temps, révélateur de cette personnalité. Comme le disaient les frères Goncourt, c’est la collection, et non les objets, qui doit être signée du nom du collectionneur. C’est le cas, incontestablement, des collections Gillet et Bemberg, constituées par deux personnes discrètes qui, de façon silencieuse et élégante mais animées de la même passion, du plaisir que confère l’aventure de la recherche et du goût de la possession qui anime tout collectionneur, ont réussi à créer leurs univers personnels et enrichissants, éléments indissociables de leurs vies. Ces deux collectionneurs en sont arrivés à vivre leurs aventures comme un destin à vocation publique, notamment en raison d’un désir de postérité — ni P. Gillet ni G. Bemberg n’avaient de descendant direct —, allié sans aucun doute à une volonté sincère et généreuse de partager avec la société cet univers de beauté, de connaissance et d’excellence qui est la clé de toute collection. Guillermo de Osma President de la Fondation Bemberg 5
La majolique : un a L
e choix d’accueillir une grande partie de la collection de majoliques italiennes du musée des Arts décoratifs de Lyon, de loin l’une des plus importantes conservées en France, est en résonnance profonde avec l’âme même de notre musée. En effet, parmi les ensembles constitués par M. Bemberg, la collection de majoliques italiennes est importante car, à l’image de la collection de bronzes, elle présente un tour d’horizon des différents ateliers de la Renaissance, les mêmes ateliers richement représentés dans la collection amoureusement constituée par Paul Gillet. Le visiteur curieux pourra ainsi confronter la collection du musée à l’éventail plus large des œuvres de Lyon. Si peu de néophytes savent que le terme de majolique désigne la faïence italienne de la Renaissance, cette exposition, à la fois didactique et immédiate de par la fraicheur colorée des œuvres et l’immédiateté des scènes représentées, permettra au public de découvrir un véritable phénomène culturel propre à la Renaissance Italienne. Les centres de production des majoliques étaient surtout situés dans la partie nord de l’Italie. Les plus importants étaient notamment Faenza, Urbino et Deruta, mais on en produisait également à en Toscane ou à Venise. Le nom de majolique donné par les Italiens, provient en fait de la déformation du nom de l’île de Majorque par où transitaient les céramiques lustrées d’Espagne, dites « hispano-mauresques ». Techniquement les faïences se caractérisent par une glaçure opacifiée à l’oxyde d’étain permettant d’obtenir une surface blanche parfaitement adaptée à un décor peint. Plus précisément, la pâte argileuse est recouverte d’un émail composé de silice et d’oxyde de plomb et rendu opaque et blanc grâce à l’oxyde d’étain. Sur ce revêtement vient se poser le décor peint à l’aide d’oxydes métalliques. La majolique subit plusieurs cuissons. La première (vers 1000-1100° C), permet la rigidité de l’objet pour faciliter sa manipulation. La majolique est ensuite recouverte de l’émail sur lequel le peintre peint le décor à partir d’oxydes colorants : rouge de fer, jaune d’antimoine bleu de cobalt, vert de cuivre, brun et violet de manganèse essentiellement. L’opération interdit tout repentir car la terre encore poreuse absorbe les oxydes. Une seconde cuisson, à température un peu plus basse, fixe le décor en vitrifiant l’émail désormais brillant et imperméable. Un décor de « lustre » peut éventuellement être ensuite appliqué sur la pièce. Il s’agit d’un mélange de particules de cuivre et d’argent qui, suite à une troisième cuisson, se fixe à la surface de la majolique et donne à cette dernière, grâce à des reflets
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rt et une technique argentés ou dorés, l’éclat des pièces métalliques. Cette troisième cuisson à basse température (autour de 600° C) a lieu dans un four maintenu en atmosphère « réductrice », empêchant, contrairement aux deux cuissons précédentes faites en atmosphère oxydante, l’oxygène d’entrer cette fois ci dans le four. Durant la première moitié du xv e siècle, le passage de la céramique émaillée au plomb, caractérisant le Moyen Âge, à l’utilisation de l’émail stannifère typique de la majolique fut progressif. Encore aujourd’hui, on connaît mal le rôle exact joué aux origines par les différents centres, mais il est certain que le répertoire de la majolique italienne du xv e siècle présente à la fois des formes déjà utilisées auparavant et de nouvelles formes répondant aux exigences de la société contemporaine. Aux origines de la majolique, on retrouve l’influence moyen-orientale et les motifs gothiques tardifs. Les décors somptueux se diversifièrent rapidement, grâce surtout à la variété de couleurs offerte par l’utilisation de l’émail stannifère. Les exemplaires conservés du xv e siècle permettent de comprendre comment, à l’origine, la majolique italienne puisa dans la tradition gothique tardive et adopta des décors d’origine islamique, tout en assimilant progressivement les thèmes ornementaux liés au répertoire humaniste. Ces thèmes récurrents, notamment ceux inspirés des produits manufacturés orientaux, rencontrèrent un succès durable. Si nombre d’œuvres révèlent les liens intenses entre le répertoire arabe et la majolique italienne, l’origine même de l’albarello, forme dont on conserve de nombreux exemples dans les musées, nous apporte confirmation de cette influence. Conçu en Orient pour contenir les épices, il fut adopté par les apothicaires de la Renaissance, car il permettait une bonne conservation des médicaments. Déjà à la fin du xv e siècle, cette faïence da farmacia, mieux conservée et en plus grande quantité que celle de table, conjuguait les cultures arabe et humaniste. Enfin, durant tout le xvi e siècle, les cours se transformèrent en ateliers de recherche intéressés par tous les domaines du savoir humain. Dans cette optique, les potiers italiens utilisèrent la surface blanche de la majolique comme support pour un décor de scènes historiées peintes, créant un genre original : l’istoriato. Ce genre devait se développer au début du xvi e siècle à Urbino et dans les Marches. C’est donc dans ce contexte mêlant l’utilitaire et l’ostentation qu’on doit considérer les majoliques qui, souvent, nous éclairent sur des aspects essentiels de la culture de la Renaissance. Philippe Cros Directeur de la Fondation Bemberg
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L’Attribution des majoliques istoriato de la Renaissance Timothy Wilson Ashmolean Museum, University of Oxford
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e type de majolique italienne connue sous le nom d’istoriato (quoique le terme plus en usage au seizième siècle ait été figurato) se développa durant les années précédant le début du xvi e siècle dans plusieurs centres de production céramiques du centre-nord de l’Italie. L’istoriato devint pendant près de cent ans le plus prestigieux type de production majolique de la Renaissance, et ses mécènes furent parmi les hommes et les femmes des plus érudits et raffinés de l’époque. Lorsqu’ils sont peints de sujets historiés, les assiettes, bols, ou pichets en majolique sont une expression à part entière de la peinture de la Renaissance composée d’un large faisceau iconographique et plastique allant de la fresque et de la peinture de chevalet, à la décoration de mobilier, de tissus, de verrerie, ainsi qu’aux estampes. Si un panneau de cassone du quinzième siècle est à la fois un meuble, revêtant une fonction sociale et domestique, mais aussi un exemple de la maitrise du peintre; c’est aussi le cas pour une assiette istoriato. La majolique mérite amplement l’intérêt de ceux qui s’intéressent à la Renaissance italienne. Elle fait partie des rares formes de l’art de la Renaissance dans lesquelles la couleur nous est parvenue telle qu’elle était lorsqu’elle quitta l’atelier, sans altération aucune. La majeure partie de la majolique dépeint le monde de l’Antiquité classique ou relate des scènes de la vie contemporaine ou de la littérature, et nous offre ainsi un des plus grands ensembles de sujets profanes de l’art du seizième siècle. Cet art domestique, dans lequel les femmes étaient souvent actives en tant que mécènes, commanditaires, ou simplement destinatrices de cadeaux, nous fait « toucher du doigt » la vie de la Renaissance de façon plus intime et quotidienne que la plupart des autres formes d’art. De plus, un grand nombre de ces délicates céramiques ont survécu, malgré leur fragilité; j’estime que plus de dix mille spécimens istoriato du seizième siècle nous sont parvenus. Lorsqu’on se penche sur la question de l’istoriato il faut garder deux choses présentes à l’esprit. Premièrement, l’istoriato n’a jamais représenté plus qu’une toute petite part de la production de chaque centre de production des majoliques de la Renaissance. Même pour des villes célèbres pour leur istoriato telles que Faenza, Urbino ou Pesaro, les fouilles et les découvertes fortuites révèlent pour un simple fragment d’istoriato des centaines de fragments peints d’ornementations plus rudimentaires. Cipriano Piccolpasso de Castel Durante, dans son ouvrage Trois livres de l’art du potier écrit vers 1557, c’est à dire à la fin des « jours fastes » de la peinture istoriato, ne voyait guère matière à s’intéresser au sujet. A cet égard, les collections de majolique des plus grands musées du monde: de Londres à New York, de Saint Petersbourg à Florence, de Paris à Lyon, riches d’istoriato, rassemblés au cours des siècles tels des trésors, sont trompeuses. 9
Deuxièmement, le fait que les céramiques aient survécu en plus grandes quantités que d’autres objets d’art plus fragiles, ou dont la valeur du matériau justifiait une réutilisation, peut nous induire à surestimer leur importance et leur valeur aux yeux des anciens. C’est en fait le cas pour la céramique grecque. Les ‘vases’ antiques ont pendant longtemps été et sont toujours, collectionnés avec passion en Europe et ailleurs. Cependant, dans un livre aussi éloquent que polémique publié en 1994, Artful Crafts, Michael Vickers et David Gill ont proposé que la céramique grecque antique n’avait qu’une faible valeur financière et n’était guère qu’un substitut aux objets en métal précieux. Ils avancèrent que considérer sérieusement les vases comme des œuvres d’art, ou dépenser temps et énergie intellectuelle pour leur classification stylistique, comme le fit notamment pendant des décennies le chercheur d’Oxford Sir John Beazley, revenait à ne pas comprendre le rôle de la céramique dans le monde antique1. Dans l’Italie du seizième siècle de même, les objets en métal précieux étaient bien plus chers que la majolique. En 1530, l’envoyé de Federico, duc de Mantoue, pouvait acheter près de 100 pièces de majolique istoriato Urbino pour 25 écus2. En 1525-1526, une salière argentée conçue par Giulio Romano pour Federico revenait à 31 ducats pour les matériaux et à 20 ducats pour le travail de l’orfèvre (sans compter la rémunération de Giulio)3. Puisque un ducat et un écu avaient approximativement la même valeur, une salière argentée — bien que réalisée en modèle unique et conçue par un artiste prestigieux — représentait en valeur presque l’équivalent de 200 pièces de majolique istoriato de belle qualité. Peu de temps avant, à l’automne de 1524, la mère de Federico, Isabelle d’Este, marquise de Mantoue, reçut de sa fille, Eleonore, duchessse d’Urbino, un service en majolique qu’Eleonore avait commandé à Urbino. Eleonore écrit : « J’ai fait faire un service (credenza) en céramique (...) parce que les maestri de notre région ont une réputation pour le travail bien fait. Je serais heureuse si votre excellence l’appréciait et que vous en fassiez bon usage à Porto, puisque cela sied bien à une villa ( per essere cosa da villa )... »4. Nous ne possédons pas de témoignages documentaires quant au nombre de pièces que comprenait ce service, mais les 24 pièces qui ont survécu [cliché 1] en font le plus célèbre des services en majolique connu. Eleonora s’attendait à ce que sa mère utilise le service dans sa villa suburbaine de Porto Mantovano, aux alentours de Mantoue. A la cour, à Mantoue, en tant qu’épouse de chef d’état, Isabella se devait selon l’étiquette de manger dans des assiettes d’argent ou d’or. Dans sa villa à la campagne, loin du protocole, et en compagnie d’amies, de musiciens, et de lettrés, les assiettes étaient extraites du vaisselier (le mot credenza désignait à la fois le service en poterie et le meuble sur lequel il était présenté) où l’on pouvait les imaginer disposées à la vue de tous et prêtes à être posées sur la table. Les personnages des Métamorphoses d’Ovide et autres sujets, devenaient prétextes à conversation entre gens cultivés. Le fait que la majolique coûta moins que l’argent n’implique cependant pas que cette cosa da villa ne fut, dans le contexte raffiné de Porto, l’objet d’attention et d’intérêt de la part d’Isabelle. Eleonore ne mentionne pas le nom du peintre en majolique qui dans son esprit devait être un artisan de talent plutôt qu’un artiste de ‘renom’. Il semblerait qu’il n’y ait aucun document du seizième siècle qui insiste, comme le font les contrats pour des oeuvres de peinture de grande taille, pour que le travail soit effectué par un maître lui-même, propria manu. Quoiqu’il en soit, alors que l’istoriato se développait après 1500, les pein10
l ’ attribution des majoliques « istoriato » de la renaissance · timothy wilson
1. Vickers et Gill 1994. 2. Mallet 1981, p. 167. 3. Ferrari 1992, I, pp. 109, 112. 4. La lettre fut découverte
par Mariarosa Palvarini Gobio Casali. Pour les renseignements récents sur le service d’Isabelle et la documentation, voir Thornton et Wilson 2009, pp. 229-34; Ecouen 2011, pp. 64-7; Wilson et Mallet 2012, no. 49. Pour une reproduction moderne, Ferrari et Palvarini Gobio Casali 2014.
cliché 1: Assiette, Orphée et Eurydice, armes et devises d’Isabelle d’Este, de Nicola da Urbino (Nicola di Gabriele), Urbino, 1524 Diam. 39 cm. MUSÉE DU LOUVRE, OA12207 © RMN
5. Mallet 2007B est un point
de vue personnel sur la question de l’attribution des majoliques. 6. Bernard Rackham écrivait (1943, p. 12) « Il est aussi raisonnable de peindre une image sur une forme en terre cuite que sur une fresque murale ou sur un carré de toile. Mais, sur un simple pot j’ai quelquefois un sentiment de culpabilité ». Cette angoisse reflète l’esthétisme normatif des mouvements Arts and Crafts et Moderniste auxquels Rackham été mêlé.
tres de majoliques se mirent à signer et à dater leur travail de plus en plus fréquemment. Quels qu’aient pu être les avantages d’une telle publicité, cela laisse tout de même entrevoir chez les peintres de majoliques l’émergence d’une conscience artistique grandissante, ainsi qu’une aspiration à jouir un peu du nouveau statut de notoriété atteint à l’époque par certains peintres tels que Raphael. Même si l’on accepte pleinement les arguments de Vickers et Gill sur la faible valeur et la moindre importance de la poterie dans le monde grec antique (ce que tous les erudits n’acceptent pas) et même si ce point s’appliquait à l’Italie du seizième siècle (ce qui n’est pas le cas), je ne pense pas qu’il s’ensuivrait que des érudits tels que Beazley, ou mon ami et mentor John Mallet 5, ou Carola Fiocco et Gabriella Gherardi, les éminents auteurs des notices de ce catalogue, qui se sont consacrés pendant des années de labeur à trouver à qui attribuer quoi parmi les peintres et les ateliers, aient perdu leur temps. Les musées montrent au public de riches collections de majolique istoriato et beaucoup de personnes trouvent délectation et connaissance dans cette section de l’art de la Renaissance. Peu sont assez fortunés pour en constituer des collections. Les conservateurs de musée tels que moi se doivent rédiger les cartels de musée. Je n’abdiquerai pas mon point de vue selon lequel la tentative de donner des attributions précises aux majoliques serait une démarche d’érudition méritant d’être approfondie6. 11
cliché 2: Assiette lustrée. Atelier de Maestro Giorgio, Gubbio, 1518. Diam. 29.5 cm. BRITISH MUSEUM, PE1855,1201.69 © BRITISH MUSEUM
Cecineveutpasdirequejepensequelesapprochestaxonomiquessoientlesseulesvoies pour étudier la majolique de la Renaissance, ni même les plus éclairantes. Quiconque s’intéresse à la céramique de la Renaissance doit suivre les nombreux travaux archéologiques, officiels ou non, qui se déroulent en Italie. L’histoire du développement de la cuisine ou des rituels de table dans les différentes couches sociales nous fournit des cadres pour comprendre les services de majolique et les formes de leurs composants. Les archives des villes italiennes, et plus spécialement les très grandes archives notariales, nous offrent la matière nécessaire pour l’étude de l’économie industrielle: les prix, l’organisation du travail, le rôle des corporations, la législation corporatiste, ainsi que l’émergence de systèmes ‘proto-capitalistes’ de financement de la production, nous sont révélés de manière toute à fait satisfaisanteparcesarchives.Lesétudesscientifiquesdesargilesetdesémauxpeuventserévéler fructueuses, bien que les résultats n’aient pas toujours été aussi révélateurs que souhaité, en partie parce que les argiles destinées aux artisans — comme l’a noté Cipriano Piccolpasso7 aux environs de 1557 — étaient transportées sur de longues distances depuis leur lieu d’extraction jusqu’aux ateliers où elles étaient utilisées. Inévitablement, il existe un certain degré de subjectivité lorsque l’on attribue de l’istoriato à un peintre donné; on peut lui attribuer un nom grâce à une signature ou à des 12
l ’ attribution des majoliques « istoriato » de la renaissance · timothy wilson
7. Piccolpasso 2007, Livre I,
p. 48, remarquant, par exemple que: « Venise travaille l’argile de Ravenne et de Rimini et celui de Pesaro pour les meilleures réalisations ».
documents archives, ou bien il reçoit un « nom de convention » de la part des chercheurs modernes. A différents moments de par le passé, on a tenté de créer une science de l’attribution. Cette approche, souvent associée au nom de Giovanni Morelli, peut être sujette à sarcasmes si l’on songe qu’elle peut aller jusqu’à l’étude de la façon dont les artistes peignaient les ongles de la main. Certes, la manière dont les différents peintres peignaient les ongles peut servir d’indicateur utile pour trancher dans des attributions, mais la chose ne saurait égaler un œil expérimenté ayant vu — et manipulé — une grande quantité de majolique. Les observations concrètes et objectives sont alors épaulées par l’instinct ainsi développé. Trois aspects compliquent le processus d’attribution de l’istoriato aux différents peintres et ateliers: la collaboration entre artistes, la mobilité de ces derniers, et l’utilisation de sources graphiques.
cliché 3: Détail du cliché 2, avec inscription « Azuro »
8. Thornton et Wilson 2009,
no. 295. 9. Mallet 2004, p. 190. 10. Wilson 1996, no. 112, pour
les plats de l’atelier de Guido di Merlino, avec deux écritures distinctes sur chaque pièce.
Le cliché 2 nous montre une assiette datée de 1518 fabriquée dans l’atelier du maître Giorgio de Gubbio. Sur l’aile, sur la droite près du centre, il y a le mot « Azuro » [cliché 3] . Le peintre principal, semble-t-il, esquissa les traits et, ensuite, confia l’assiette à un assistant afin que ce dernier peigne le fond en bleu. L’assistant utilisa hélas un bleu trop pâle, laissant ainsi le mot à la vue de tous 8. Ce genre de collaboration entre l’artiste principal et un artiste moins adroit est un des types de collaboration possibles dans le cadre de la peinture de majolique; cependant, on peut en imaginer d’autres tout, particulièrement dans un grand atelier en pleine activité. Le propriétaire de l’atelier pouvait être lui-même peintre en majolique, mais il pouvait également confier l’œuvre à peindre à des employés ou à des peintres extérieurs appelés ponctuellement à effectuer des tâches particulières. Un témoignage d’archives de Castel Durante de 1606 nous révèle une situation hybride assez typique: un peintre employé par un atelier mentionne un autre peintre « qui vient quelquefois travailler dans cet atelier »9, et qui s’était plaint que quelqu’un avait utilisé ses pinceaux. Il se peut que certains peintres aient été spécialiste en bordures ornementales, d’autre en istoriato, alors que d’autres l’étaient en paysages, d’autres en silhouettes et d’autres en armoiries. Il se peut que certains peintres n’aient su ni lire ni écrire, donc les mots au dos des assiettes étaient souvent inscrits par le chef d’atelier ou par un spécialiste en calligraphie. Il y a d’ailleurs des cas où, sur une même assiette, on relève deux écritures 10. 13
cliché 4: Fragment d’assiette, Apollon et les Muses de Nicola da Urbino, Urbino, vers 1525 Diam. 14 cm. MUSÉE DU LOUVRE, OA1244. © RMN
cliché 5: Revers du cliché 4
La maitrise d’exécution des assiettes conservées du service d’Isabella est de la plus haute qualité, et ce uniformément, aussi le style est-il homogène. Si le cliché 1 est comparé à un fragment du Louvre [clichés 4 et 5] , nous serons tous d’accord pour admettre que le peintre était le même. Le fragment du Louvre possède un monogramme qui, observé attentivement, permet de lire nicola suivi des mots da Urbino. Grâce aux découvertes faites en examinant les archives d’Urbino, Nicola da Urbino a pu être identifié comme étant le peintre et propriétaire d’atelier Nicola di Gabriele Sbraghe, mentionné en 1520 et qui mourut pendant l’hiver 1537-1538. L’atmosphère lyrique et poétique qu’il a su recréer, empruntée aux Métamorphoses d’Ovide, demeure inégalée. Nous pouvons être certains que le monogramme de « Nicola » est bien, sur ce fragment, celui du peintre et non celui du propriétaire d’atelier; le grand plat [clichés 6 et 7] peint d’un motif à sujet biblique tiré de l’Ancien testament, La Découverte de la Coupe dans le Sac de Benjamin , comporte également les mots Io niChola pinsitt « Moi, Nicola, ai peint ceci ». Cette assiette et le fragment sont peints de la même main, celle de Nicola. 14
l ’ attribution des majoliques « istoriato » de la renaissance · timothy wilson
cliché 6: Grand plat, La Découverte de la Coupe dans le Sac de Benjamin, de Nicola da Urbino, Urbino, vers 1525-30 Diam. 42 cm. MUSEO DIOCESANO, REGGIO EMILIA (DE L’ÉGLISE DE NOVELLARA)
cliché 7: Revers du cliché 6
11 .
Mallet 1981, p. 166.
12. Thornton et Wilson 2009,
no. 148.
Pendant une grande partie du vingtième siècle, le service d’Isabelle fut à juste titre attribué à Nicola, quoique souvent daté sans aucune raison valable, aux alentours de 1519. En 1981, Mallet fit une étude de style basée avant tout sur les travaux datés, et proposa pour le service une date située « aux alentours de 1525 »11. Peu de temps après fut publiée pour la première fois, à partir des archives de Mantoue, la lettre d’Eleonore prouvant que le service était livré en novembre 1524. La chose constitue le parfait exemple d’une hypothèse formulée à partir d’une analyse de style, et confirmée par des découvertes faites grâce aux archives! Une assiette du British Museum [clichés 8 et 9] 12 portant la même écriture manuscrite sur le revers est signée « Nicola da. V ». Bien que fasse défaut la grâce d’exécution du service d’Isabelle et qu’il appartienne sans doute à une date un peu plus tardive, le style est sans aucun doute comparable. Mallet soutint pendant des années qu’à cette assiette manquait la fluidité et le sens de l’espace de Nicola, et il croit, malgré ce qui semble bien être une signature au dos, que cette assiette avait été en grande partie, voire complètement, peinte par un assistant. Mais comment distinguer dans ce genre de cas de figure, 15
cliché 8: Assiette, Les Athéniens sacrifient à Diane. Probablement entièrement ou partiellement peint par Nicola da Urbino, vers 1535 Diam. 26 cm. BRITISH MUSEUM, PE1855,0313.23 © BRITISH MUSEUM
cliché 9: Revers du cliché 8
le travail d’un assistant du travail du maître qui aurait été souffrant, ou vieux, ou qui aurait bu un verre de vin de trop ? Ceci reviendrait grosso modo à vouloir distinguer quelles parties d’une œuvre de l’atelier de Rubens seraient de lui et quelles seraient celles revenant à ses assistants. Dans les deux cas, des yeux experts peuvent conduire à des conclusions différentes. Personnellement, je pense que cette assiette a été peinte, soit partiellement soit totalement par Nicola. Mallet et moi avons été amicalement en désaccord sur ce point pendant plus de trente ans. Le cliché 10 nous montre une autre assiette où Mallet et moi sommes en désaccord. J’ai déclaré dans une publication que je considérais que Nicola et un assistant avaient dû collaborer, et je pense que le Cupidon dans les nuages est de la main de Nicola13. Mallet m’a dit qu’il refusait l’idée que la moindre partie de l’assiette puisse faire partie de l’œuvre de Nicola14. La belle et délicate assiette de la Fondation Bemberg [clichés 11 et 12] , représentant César en Égypte ainsi qu’une magnifique cité fortifiée représentée dans le fond est, selon moi, une œuvre autographe de Nicola. La composition est dérivée d’une petite gravure sur bois tirée d’une édition en italien de l’historien romain Dion Cassius publiée à Venise en 1533 [cliché 13] 15. L’assiette ne peut donc être d’une date antérieure. 16
l ’ attribution des majoliques « istoriato » de la renaissance · timothy wilson
13. Darr, Simons et Wilson 2013, no. 14. Il n’y a pas d’inscription au dos. 14. Mallet m’écrit, le 28 Mars 2015: « l’assiette me semble en tous points attribuable à un seul peintre, celui qui peignit au moins une grande partie du Service Montmorency ». 15. Dione Historico Delle Guerre & Fatti de Romani, Venice 1533, début du Livre 41. Le voyage de César n’était pas en fait en l’Egypte.
cliché 10: Assiette, Hercule et Omphale. Peut-être de Nicola da Urbino et un collaborateur Diam. 25.7 cm. DETROIT INSTITUTE OF ARTS, DON PROMIS DE MR. AND MRS. R. BRODIE © DETROIT INSTITUTE OF ARTS
cliché 11: Assiette, César en Egypte. Ici attribuée à Nicola da Urbino, Urbino, vers 1533-1535 Diam. 26.7 cm. FONDATION BEMBERG, NO. 4003 © FONDATION BEMBERG et RMN
cliché 12: Revers du cliché 11
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Une autre version, de semblable composition, avec la même inscription écrite au dos (sans doute de la main de Nicola) se trouve au Victoria and Albert Museum de Londres [clichés 14 et 15] 16. Dans le catalogue de 1940 de ce musée, Bernard Rackham l’attribua avec des réserves à Nicola. Je pense pour ma part que c’est une réplique d’atelier réalisée par un assistant ayant eu sous les yeux soit un dessin abouti, soit l’assiette « Bemberg »; cette pièce porte l’inscription de Nicola en tant que chef d’atelier17. Un groupe similaire de silhouettes équestres se retrouve sur une assiette d’un service peint peut être par Nicola lui-même, sans la moindre assistance, pour Federico de Gonzague, duc de Mantoue et sa femme Margherita Paléologue18; ils s’étaient mariés en 1531 mais si, comme cela semble être le cas, les silhouettes proviennent bien de la gravure sur bois de 1533, alors, une partie ou même toutes les majoliques armoriées, que Nicola éxécuta pour eux, ne peuvent être antérieures à 1533.
cliché 13: Page de Dione Historico Delle Guerre & Fatti de Romani, Venise, 1533, début du Livre 41
16. Rackham 1940, no. 576; Mallet
2007, no. 123, comme « inscrit par Nicola mais soit complètement soit partiellement peint par une autre main ». 17. Une possibilité est que l’assistant en question ait été le jeune Sforza di Marcantonio, un peintre de Castel Durante, qui plus tard alla travailler à Pesaro; voir Fiocco et Gherardi 1996. 18. Liverani 1939, p. 14; voir Thornton et Wilson 2009, no. 147; Boutin 2011.
cliché 14: Assiette, César en Egypte. Probablement réplique d’atelier du cliché 11, par un peintre de l’atelier de Nicola da Urbino (peut-être Sforza di Marcantonio), vers 1533-1535 Diam. 25.5 cm. VICTORIA AND ALBERT MUSEUM, LONDRES, C.2255-1910 © VICTORIA AND ALBERT MUSEUM
cliché 15: Revers du cliché 14
18
l ’ attribution des majoliques « istoriato » de la renaissance · timothy wilson
cliché 16: Grand plat, La Chute des Géants, de Francesco Durantino, réalisé dans l’atelier de Guido di Merlino, Urbino, 1543 Diam. 45.8 cm. M A K VIENNE, KE6699 © MAKKATRIN WISSKIRCHEN
cliché 17: Revers du cliché 16
19. Wilson 2001, pp. 214-5. 20. Pesante 2012, p. 10.
Plus avancent les recherches d’archives effectuées sur la majolique italienne de la Renaissance plus il devient clair que les potiers et les peintres en majolique, chacun avec un savoir bien spécifique, voyageaient loin pour œuvrer durant de courtes périodes, puis allaient s’établir dans de nouveaux endroits. Francesco di Berardino, connu sous le nom de Francesco Durantino, d’après la ville d’où il était originaire, Castel Durante, et où il avait probablement été formé, est un exemple particulièrement bien documenté d’une telle mobilité. Les clichés 16 et 17 nous révèlent un grand plat peint avec une représentation ambitieuse de La Chute des Géants 19. Elle est signée par Francesco et porte une inscription le présentant comme travaillant en 1543 dans un atelier d’Urbino dont le propriétaire était Guido di Merlino. Il y a tout lieu de croire que Francesco avait travaillé auparavant pour un atelier concurrent d’Urbino, celui de Guido Durantino 20. Le sujet de cette assiette est tiré d’une gravure d’après Perino del Vega. La composition d’une pièce istoriato pouvait être soit originale, soit inspirée par l’illustration d’un livre (comme le Dion Cassio illustré ci-dessus), soit basée plus ou moins fidèlement sur un dessin. En fait, plus un peintre était fidèle à un modèle précis, plus sa spécificité artistique devenait opaque. Dans ce cas, malgré la fidélité à la gravure, le dessin de la silhouette vigoureuse est sans le moindre doute caractéristique et attribuable à Francesco. Les clichés 18 et 19 montrent une assiette récemment acquise par le Musée national de la Renaissance d’Ecouen. Le monogramme peut être lu comme étant celui de Francesco, et de fait son attribution est convaincante sur le plan stylistique. Dans la mesure où elle est datée de 1543, il se peut que l’assiette ait été peinte dans l’atelier de Guido di Merlino; n’oublions pas qu’il est également possible que des peintres de talent comme Fran19
cliché 18: Coupe, Alphée and Arethuse. De Francesco Durantino, probablement réalisé dans l’atelier de Guido di Merlino, Urbino, 1543 Diam. 28 cm. MUSÉE NATIONAL DE LA RENAISSANCE, © RMN
cliché 19: Revers du cliché 18, avec monogramme de « Francesco »
cesco aient travaillé pendant des périodes plus ou moins courtes pour différents propriétaires d’atelier. La coupe représentée sur les clichés 20 et 21 est datée de 1547 et porte la marque d’une exécution à Monte Bagnolo, petit village aux alentours de Pérouse 21. Grâce aux documents d’archives, nous savons que Francesco déménagea d’Urbino en 1547 pour reprendre une fabrique située à Monte Bagnolo, et cette coupe est sans doute l’une des premières fabrications en ce lieu 22. Bien que son style soit reconnaissable, la touche picturale et l’inscription dénotent des signes d’un travail un peu hâtif. Il est possible que Francesco, ayant à gérer sa propre affaire pour la première fois, n’eût que peu de temps à consacrer à son art. Quoiqu’il en soit, si la coupe n’avait pas eu une marque, nous n’aurions pu trancher si elle avait été fabriquée à Urbino ou à Monte Bagnolo. Les recherches documentaires récentes nous permettent de suivre Francesco dans ses déplacements constants à travers l’Italie, parfois d’ailleurs pour échapper des dettes 23. On le voit à Nazzano, petite ville au nord de Rome, puis à Rome et ensuite à Turin, puis de nouveau à Nazzano. L’assiette des clichés 22 et 23 n’est pas signée mais annotée comme ayant été fabriquée à Nazzano le 1er août 1583. La décoration de la face est tout à fait différente de celle du travail istoriato de Francesco; mais une fois découvert, grâce aux 20
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21 .
Thornton et Wilson 2009, no. 247. 22. Wilson 2002; Balzani et Cutini 2013. 23. Pesante 2012.
cliché 20: Coupe, L’Écorchement de Marsyas. De Francesco Durantino, Monte Bagnolo, 1547 Diam. 25.5 cm. BRITISH MUSEUM, PE1895,1220.2 © BRITISH MUSEUM
cliché 21: Revers du cliché 20
cliché 22: Assiette avec armoiries, par Francesco Durantino, Nazzano, 1583 Diam. 27.4 cm. FITZWILLIAM MUSEUM, CAMBRIDGE, C.1-2000 © THE FITZWILLIAM MUSEUM, CAMBRIDGE
cliché 23: Revers du cliché 22
21
cliché 24: Albarello, La Profanation du Cadavre du Père, armes de Boerio. Castel Durante, 1562-1563, peut-être de « Andrea da Negroponte », peut-être de l’atelier de Ludovico et Angelo Picchi. H 24.5 cm. ASHMOLEAN MUSEUM, OXFORD, OFFERT PAR LA FAMILIE ROYER, WA2006.178
cliché 25: Coupe godronnée, Apollon et Marsyas, Castel Durante, vers 1550-1563, peut-être de « Andrea da Negroponte », peut-être de l’atelier de Ludovico et Angelo Picchi Diam. 24.8 cm. MUSEO NAZIONALE D’ARTE MEDIEVALE E MODERNA, AREZZO, no. 14614
cliché 26: Revers du cliché 25
recherches documentaires, que Francesco travaillait à Nazzano en 1583, il fut facile de reconnaître son écriture sur le dos 24. Les archives, l’analyse de style, les inscriptions et les autres indices se complètent et s’éclairent mutuellement. L’atelier le plus prolifique à Castel Durante (aujourd’hui appelée Urbania) au milieu du seizième siècle était sans doute l’atelier dirigé par Ludovico et Angelo Picchi 25. En 1562, les deux frères reçurent, en compagnie de deux autres potiers locaux, la commande de 307 vases de pharmacie pour un client génois résident à Palerme, un certain Andrea Boerio. La plupart devait être figurati ou istoriati (les deux termes se trouvent dans les documents) alors que d’autres devaient être décorés de trofei. Les deux frères Picchi ne purent livrer ces vases à la date requise et furent mis en procès par Boerio. Les documents du procés sont éloquents: Boerio déclara à la cour que Ludovico et Angelo étaient « généreux en promesses et réticents à la livraison »26. Les frères durent payer des compensations, puis se virent obligés de fermer leur atelier et déménagèrent à Rome. Plus de cinquante vases de pharmacie portant les armes de Boerio ont survécu, et ces derniers devaient faire partie de cette commande. Deux albarelli portent la marque de fabrique de l’atelier de Ludovico Picchi 27, mais il n’est cependant pas évident de distinguer ceux fabriqués par Picchi de ceux fabriqués par d’autre potiers impliqués: Pompeo Cresce et Baldo dalla Murcia. 22
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24. Ceci est également vrai pour
un bol percé du Palazzo Madama de Turin, marqué comme étant fabriqué à Turin le 12 septembre 1577 (Pesante 2012, p. 15). C’est un objet de type bianco di Faenza, mais puisque nous savons que Francesco travaillait à Turin à peu près à la même époque, il est possible de reconnaître l’inscription comme, très vraisemblablement, écrite de sa main. Le style de la silhouette est différent du travail istoriato antérieur de Francesco tel que nous le connaissons, mais me semble pouvoir correspondre au développement stylistique éventuel d’un peintre, dans
les vingt années suivant la dernière œuvre signé. 25. Wilson 2002, pp. 143-149; Leonardi et Moretti 2002, pp. 35-67. 26. Leonardi et Moretti 2002, p. 49: larghi al promettere et all’attendere parchi. 27. Biscontini Ugolini 1997, no. 19. Wilson 2002, figs. 33a et 33b; Celui publié là provenant d’une collection privée, fut vendu à Finarte Semenzato, Florence, le 19 décembre 2002, lot 172. On peut discuter le fait que ces exemples marqués soient de « Andrea da Negroponte ». 28. Wilson 2002, p. 145, figs. 37, 38; Wilson 2007. 29. Wilson 2014. 30. Fuchs 1993, no. 217; Wilson 2002, pp. 137-138. 31 . Lessmann 1979, p. 148.
Un de ces vases [cliché 24] 28 est peint et représente trois frères impies en train de tirer à l’arc sur le corps de leur défunt père. Il s’agit d’une fable moralisatrice du talmud babylonien popularisée dans l’Europe médiévale et de la Renaissance 29. Ce style pictural preste et fluide est reconnaissable et se retrouve sur nombre de bols et plats istoriato. Un de ceux-ci [clichés 25 et 26] 30, conservé au musée d’Arezzo, porte inscrit au dos andrea da negroponto. En 1979, Johanna Lessmann31 attira notre attention en proposant que cet Andrea (Negroponte est le nom italien de l’île grecque d’Eubée, possession vénitienne, et il se peut qu’Andrea ait été un immigrant grec ou vénitien) fut le peintre de tout un groupe de majoliques apparentées pour des raisons stylistiques. J’ai demandé au grand spécialiste des archives de Castel Durante, feu Don Corrado Leonardi, s’il existait une quelconque trace de « Andrea da Negroponte » dans les archives de Castel Durante. Il me répondit qu’il n’avait jamais rencontré ce nom. Comme il me semblait peu probable qu’un homme qui avait été un peintre très important à Castel Durante pendant plus d’une décennie n’ait laissé aucune trace dans les archives, je doutai de l’identification et je proposai donc la possibilité que « Andrea da Negroponte » ait été le commanditaire et non le peintre de l’œuvre. Tout récemment, une assiette de ce style a réapparu et elle porte les initiales A et B [clichés 27 et 28] , apparemment
cliché 27: Assiette, La Profanation du Cadavre du Père, Castel Durante, vers 1550-1563, peut-être de « Andrea da Negroponte ». Peut-être de l’atelier de Ludovico et Angelo Picchi. Diam. 28 cm. COLLECTION PRIVÉE, PHOTOGRAPHIE DE JUSTIN RACCANELLO
cliché 28: Revers du cliché 27, avec initiales « A B »
23
les initiales de l’artiste. Il est possible que A soit la première lettre d’Andrea et que B soit celle d’un nom de famille encore non identifié. Ceci renforce la proposition de Lessmann comme quoi Andrea da Negroponte était le nom du peintre. Il est probable, mais pas certain, qu’il ait travaillé soit totalement soit ponctuellement pour les frères Picchi. J’ai récemment eut l’occasion d’examiner l’assiette AB avec l’albarello de l’Ashmolean Museum. Ils sont du même sujet et la chose facilite la comparaison. La première impression que j’avais était qu’ils venaient d’un seul et même peintre. Cependant, il y a des détails qui sèment le doute. Par exemple, les joints au mortier sur les briques sont dépeints avec deux traits verticaux, alors que l’albarello ne nous montre que de simples coups de pinceaux. Ici l’étude Morellienne sur le détail le plus subtil et l’impression immé24
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cliché 29: Fiasque, armes du comte et de la comtesse de Lemos, Atelier de Francesco Patanazzi, Urbino, 1599-1600 H. 27.2 cm. FONDATION BEMBERG, no. 4051 © FONDATION BEMBERG
cliché 30: Vue latérale du cliché 29
32. Pour les pièces du British
Museum, Saint Louis et Braunschweig, voir Thornton et Wilson 2009, p. 412. 33. Negroni 1998, p. 115. Le service était une version agrandie du service qu’Isabelle avait commandé auprès du même atelier pour être un cadeau remis à l’épouse du vice-roi précédent, Juan de Zuňiga, comte de Miranda; voir Wilson 2004B, p. 207. Negroni est prudent lorsqu’il s’agit d’identifier la « Principessa di Bisignano » mentionnée, mais il est probable que la référence désigne Isabella Della Rovere.
diate donnée par le style général semblent hélas conduire dans deux directions opposées. Sommes-nous confrontés à un seul peintre, peut-être au travers d’œuvres séparées par quelques années, ou en face de deux peintres travaillant côte à côte développant ainsi ensemble un « style maison » très semblable? Les briques furent-elles confiées pour être peintes par un apprenti? Ma conclusion est que les deux ouvrages sont dans leur intégralité du même peintre, mais la discussion reste ouverte. La fiasque de la Fondation Bemberg [clichés 29 et 30] , porte les armoiries de Fernando Ruiz de Castro Andrade y Portugal, comte de Lemos et de son épouse; c’est l’une des quatre pièces connues d’un groupe d’œuvres portant les mêmes armoiries 32. En 1599, ce grand d’Espagne avait reçu la charge de vice-roi de Naples. Des documents ont récemment révélé que ces quatre pièces sont tout ce qui reste d’un très grand service de 377 pièces qui fut commandé auprès de Francesco Patanazzi par Isabelle, sœur du duc d’Urbino et épouse du prince de Bisignano en tant que cadeau diplomatique pour l’épouse du vice-roi. Il se peut que la fiasque de la Fondation Bemberg soit l’une des trois fiaschi di bella forma con fondo historiato et il resto grottesco (« fiasques de belle forme avec fond istoriato et le reste décoré à grotesque ») répertoriées par Francesco Patanazzi lors de l’enregistrement de la commande en 1599 33. Les pièces subsistantes de ce service servent donc de points de départ quant à l’identification et à la datation des produits de cet atelier, le plus important des ateliers d’Urbino au seizième siècle. « Connoisseurship », « L’art de la connaissance », est cette dimension de l’histoire de l’art qui tente de découvrir, après l’examen des styles et des techniques, l’auteur et la date d’une œuvre d’art, et par la même occasion de dépister les faux. Cette activité est quelquefois critiquée de nos jours, comme étant trop subjective, ou peu scientifique, ou encore un peu trop étroitement liée aux intérêts du marché de l’art. Dans les universités britanniques, il y a, et ce de manière alarmante, trop peu d’historiens d’art ayant pour objectif principal de « débrouiller » les œuvres et leurs auteurs, quel que soit d’ailleurs la discipline artistique, ou pour qui l’élaboration de catalogues raisonnés soit une préoccupation principale. Mais n’oublions pas que si les objets sont mal attribués ou mal datés, les conclusions qui en découlent s’avèrent alors non fiables. Dans l’étude de la majolique l’istoriato, la détermination du style en liaison avec les témoignages archivistiques, archéologiques, scientifiques, héraldiques, et autres n’en demeure pas moins l’approche essentielle pour la connaissance approfondie de cette remarquable branche de l’art de la céramique peinte. Cette dernière dont la collection Gillet nous offre une sélection si intéressante. remerciements: Victoria Avery, Françoise Barbe, Lynda Clark, Thierry Crépin-Leblond, Philippe Cros, Judith Crouch, Alan Darr, Carola Fiocco, Rainald Franz, Gabriella Gherardi, John Mallet, Marino Marini, Cristina Maritano, Thomas Matyk, Luca Pesante, Justin Raccanello, Megan Reddicks.
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25
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26
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l ’ attribution des majoliques « istoriato » de la renaissance · timothy wilson
La majolique italienne et ses centres de production Philippe Cros Directeur de la Fondation Bemberg
P
oint de rencontre entre l’Orient et l’Occident, Venise occupa au xvi e siècle un rôle politique et culturel de premier plan. A l’époque, la Cité des Doges connaissait un véritable bouillonnement culturel, favorisé par les commandes artistiques des familles patriciennes et des confréries religieuses. Dans le domaine de la majolique, Venise commença dès le début du xvi e siècle à jouir d’une grande renommée, au point qu’en 1518 la marquise de Mantoue, Isabelle d’Este Gonzague, une des femmes les plus importantedelaRenaissanceitalienneetfigureàlafoisculturelleetpolitiquedetoutpremier plan, commanda une série d’assiettes aux ateliers vénitiens. Deux ans plus tard, c’est son frère Alphonse Ier d’Este, protecteur des Arts et des Lettres, qui commanda à Venise, par l’intermédiaire du Titien, des vases pour sa pharmacie. Si l’on se penche sur la chronologie, le xvi e siècle commence pour la majolique vénitienne par une interrogation sur le pavementdela chapelle Lando à San Sebastiano(la chapelle est à gauchedumaître-autel).Cette église est située dans le quartier de Dorsoduro, et construite à partir de 1506 par Francesco da Castiglione sur les plans d’Antonio Scarpagnino. On ne sait si ce pavement daté de 1510 et composé de plaques aux dessins très variés comportant monogrammes et armoiries, est l’œuvre d’artisans vénitiens ou s’il a au contraire été importé de Pesaro. A partir de la seconde décennie du xvi e siècle, en revanche, on peut de manière moins aléatoire, attribuer à Venise des services commandés à l’occasion de mariages et portant les armes de familles d’Allemagne du sud, principalement d’Augsbourg et de Nuremberg. Peut-être est-il d’ailleurs nécessaire de rappeler l’influence de Venise sur Nuremberg, les deux villes ayant eu à cette période des contacts importants, tant marchands qu’intellectuels. Preuve s’il en est, Dürer séjourne à Venise en 1506. C’est là qu’il apprit à manier le clair-obscur et en rapporta son dramatique Crucifiement du musée de Dresde. Enrichis de motifs végétaux stylisés inspirés de la porcelaine chinoise, ces services de mariages sont décorés alla porcellana. Période riche en échanges, la Renaissance vénitienne a aussi vu s’intensifier les rapports entre l’Orient et l’Occident. Le rapprochement des Majoliques de la Sérénissime avec les porcelaines chinoises permet d’illustrer les liens entre ces foyers culturels. En effet, tout comme les aires chrétienne et ottomane de l’Europe n’ont jamais cessé d’échanger ou de commercer, il en a été de même entre Venise et la Chine. Ces décors alla porcellana ont été tout d’abord uniquement en bleu et blanc, puis à partir de 1550 décorés d’autres couleurs. Cette adaptation au gout « contemporain » nous rappelle que le succès principal des majoliques vénitiennes de cette époque tenait à ses décors de fruits, de fleurs et de feuilles. 27
Un peu avant cette multiplication des couleurs était apparue une variante de ces décors alla porcellana, là encore en blanc et bleu, mais posé cette fois ci sur un fond délicatement bleuté. Nous disposons encore de quelques belles pièces de ce style, réalisées par des artistes tels que maître Lodovico, installé à San Paolo, ou Maître Giacomo de Pesaro, installé quant à lui dans le quartier de San Barnaba. Dans ces œuvres, les motifs décoratifs s’éloignent de l’influence chinoise pour privilégier un répertoire plus étroitement lié aux éléments décoratifs de la Renaissance, tels que grotesques et trophées. Une seule majolique de la collection Gillet est attribuée avec certitude à la production vénitienne. Il s’agit d’une assiette du xvi e siècle exécutée d’après une gravure de Matteo Pagani et représentant trois membres de la cour dogale. Cette œuvre remarquable est caractéristique du genre de la céramique historiée, dite istoriato. En effet, au tournant de 1500, les peintres sur majolique s’étaient emparés des thèmes iconographiques mis en valeur par les artistes et les humanistes de la seconde moitié du xv e siècle. Ils s’appuyaient sur les sources graphiques contemporaines, en l’occurrence les livres illustrés et les gravures. L’assiette en question allie dans un paysage pittoresque, la solennité des attitudes à une remarquable vivacité des expressions. Elle témoigne magistralement de la grande qualité de la majolique vénitienne de cette époque, même si notre connaissance demeure très lacunaire. En effet, outre le fait que les pièces signées étaient très rares, des fabricants de majolique venus d’autres centres culturels travaillaient à Venise depuis la fin du siècle précédent, et ce avec des habitudes décoratives propres à leurs ateliers d’origine. On conserve, par exemple, des pièces de typologie caractéristique d’Urbino bien qu’une inscription au revers atteste une origine vénitienne. De même, on sait que certains maîtres tels que le dénommé Mazo, furent probablement formés à Urbino avant d’aller travailler à Venise. L’érudit Cipriano Piccolpasso évoque d’ailleurs la présence à Venise d’artisans provenant du duché d’Urbino, et décrit notamment avec admiration les dimensions gigantesques du four vénitien du potier Francesco de Casteldurante. Rappelons que Piccolpasso avait composé en 1548, à Casteldurante, le plus ancien traité européen de technique céramique, où il révélait en particulier les secrets des maîtres de l’art de la majolique. Il expliquait d’ailleurs son propos par de nombreux dessins, illustrant les outils et les scènes du métier. Pour la petite histoire, son ouvrage resta oublié pendant trois siècles avant d’être acquis et ainsi redécouvert par le Victoria & Albert Museum de Londres. Ces peintres exilés évoqués par Piccolpasso travaillaient bien évidement à la manière de leur terroir, et de cette situation découle bien sur nombre d’incertitudes. Les attributions évoluent au gré des découvertes d’un centre à un autre. Sur un plan stylistique, l’assiette Gillet est caractéristique du décor dit istoriato. Entre les années 1480 et le tournant de 1500, l’art de la majolique s’oriente vers un univers résolument nouveau lié à l’invention récente de la gravure et de l’imprimerie, puis atteint son apogée dans les années 1520. Cette période voit l’apparition et le développement de ces majoliques historiées (istoriato). Les décors ornementaux à motifs antiques de grotesques ou géométriques sont remplacés peu à peu, sans pour autant complètement disparaître, par des représentations figurées de scènes de l’Antiquité, de la mythologie ou de la Bible, ainsi que des allégories ou des contes et satires en tous genres. A ce titre, leur infinie variété d’inspiration témoigne avec éclat de la large culture de leurs commanditaires. 28
l a m a j o l i q u e i ta l i e n n e e t s e s c e n t r e s d e p r o d u c t i o n · p h i l i p p e c r o s
Assiette. Venise, maître Domenico, vers 1560-1570 [det. cat. no. 1]
Domenico (ou « Domenego »), l’auteur de l’assiette Gillet, dont les œuvres signées peuvent être datées entre 1562 et 1568 est, à n’en pas douter, le plus créatif des peintres vénitiens d’istoriati mais on ne sait hélas que fort peu de chose sur son statut. Qualifié par un document de 1547 de « peintre en vases » (il n’est donc pas à priori uniquement potier), on ignore à ce jour s’il exerçait la peinture sur majolique en profession libérale (on peut aussi d’ailleurs imaginer qu’il peignait aussi sur toile) ou si, de manière plus organisée, il était propriétaire d’un atelier à proprement parler. Les assiettes historiées de Domenico sont généralement extrêmement élaborées mais il ne s’est pas borné à cette typologie d’objet, loin de là. Ses vases de pharmacie étendirent d’ailleurs sa réputation bien au-delà de Venise lorsqu’il exécuta pour l’hôpital de Messine, en Sicile (commande entre 1562 et 1568), un ensemble de majoliques de ce type. Ces réalisations, généralement sphériques, sont agrémentées de médaillons représentant de manière enlevée bustes et profils enrichis de couronnes végétales (dites a fiori et frutti ) aux couleurs vibrantes évoquant irrésistiblement les grands peintres vénitiens. Elles ont indubitablement influencé la majolique du sud de l’Italie, tant sur le continent qu’en Calabre. C’est dans la période de production de Domenico que triomphe largement l’istoriato mais, du fait de la maîtrise artistique qu’il exige, en l’occurrence un vrai talent de peintre, il demeure onéreux. Seules les plus nobles et surtout les plus riches familles commandent ces objets délicats, plus pour la délectation que pour un usage pratique, en en garnissant des crédences conçues à cet effet (le terme credenza identifierait en fait le service lui-même plutôt que le meuble). Si Domenico est le plus brillant représentant du style istoriato (d’ailleurs, on pense maintenant que certains istoriati, jadis attribués à Pesaro ou à Urbino, pourraient en réalité être vénitiens et potentiellement de lui), il est aussi, sur un plan chronologique, l’ultime grand maître de la majolique vénitienne. Au siècle suivant, la production perdura, mais elle se banalisa au point d’avoir perdu beaucoup de ses particularismes. Elle finira par se fondre stylistiquement dans la production d’autres centres.
O
n aura compris que l’attribution des majoliques est souvent incertaine. Cela est en grande partie dû non seulement aux rares signatures, mais aussi aux mouvements continus des artisans, d’un centre à un autre. Exemple typique de cette science en perpétuelle évolution qu’est l’étude de la majolique italienne, si l’importance de Faenza en Emilie-Romagne, n’est pas à l’heure actuelle vraiment remise en cause, sa prédominance et l’antériorité de sa production sont en revanche sérieusement discutés; tandis que les créations de la cité voisine de Forli sont à nouveau mises en lumière. Quoiqu’il en soit, cette tradition de la majolique de Faenza est née d’une heureuse convergence de situations favorables: un terrain riche en argile, la permanence dans les siècles de rapports politiques et commerciaux avec la voisine Toscane (en particulier avec Florence), et enfin une indéniable sensibilité pour cette forme d’art. Au pied des premières collines Subapennine, Faenza est entouré par une région agricole faite de collines et de plaines fertiles. Le nom, datant des Romains qui ont développé ce centre sous le nom de « Faventia », est devenu synonyme de la céramique en plusieurs langues dont le français avec le mot faïence. Dès la seconde moitié du 1er siècle après Jésus Christ la ville a prospéré considérablement, en raison du contexte agricole privilégié et du développement des activités artisanales telles que la production de poterie. 29
Carte des centres de production
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Après une période de décadence, Faenza a pleinement retrouvé sa prospérité autour de l’an 1000, avec le gouvernement des évêques, pour atteindre ensuite son apogée en termes de richesse et d’expansion sous le règne de la famille Manfredi. Rappelons qu’après la conquête par César Borgia, Faenza devint une partie des États pontificaux. Une production céramique est mentionnée à Faenza à la fin de 1142, dans un document citant un obscur Petrus Orzolarius. Mais c’est seulement après 1350 que se développe la majolique à usage domestique dite « archaïque », reconnaissable à ses décors gothiques ou orientaux, et généralement peinte dans une palette brune et verte. Un peu plus tard, dans la première moitié du siècle suivant, non seulement Faenza améliore la qualité de son émail, mais elle ajoute aussi au répertoire ornemental de nouveaux décors d’influence islamique. Les échanges d’ornements étaient alors fréquents et le rapprochement des majoliques italiennes (parfois plus inspirées d’ailleurs des tissus que de la céramique d’importation) et des céramiques ottomanes, permet d’illustrer les apports réciproques de ces foyers culturels. En effet, les interactions complexes entre les aires chrétienne et ottomane de l’Europe se firent en partie par l’Espagne mauresque. Comme on le sait, l’île de Majorque par où transitait une partie de la production espagnole à destination de l’Italie fut un intermédiaire capital. La technique de la faïence, inventée au viii e siècle de notre ère près de Bagdad, gagna la péninsule ibérique, puis les potiers italiens. Au premier chef ceux de Faenza, assimilèrent dès le xii e siècle la technique d’une majolique archaïque, même si, on le verra plus avant, ils ne percèrent le secret de « la faïence lustrée » qu’au début du xvi e siècle. Se distinguant avant tout par leur caractère essentiellement décoratif, les pièces du deuxième quart du xv e comprennent de magnifiques vases de style encore oriental en vert sur fond d’émail blanc laiteux, dits « à feuilles de chêne ». A ces couleurs s’ajoutent bientôt le bleu, le brun de manganèse et le jaune. Les typologies sont alors dites zaffera a relievo ou italo-moresche, témoignages sans ambiguïté des influences orientales subies. En termes de formes, à côté des vases (formes les plus courantes), apparaissent des tasses, des albarelli, de petites coupes et, moins fréquemment, des écuelles et des plats. Au milieu du xv e siècle s’imposent largement les séduisants motifs du gothique fleuri, (Il s’agit du gothique appartenant au dernier âge de l’architecture ogivale, où les ornements et les découpures sont multipliés à l’excès) dans lequel les associations de couleurs se font plus vibrantes. La classification des pièces par les spécialistes en « familles » montre la diversité décorative des productions du moment: « famille à œil de plume de paon », « famille à palmette persane », etc... En synthèse, on retiendra qu’à partir de la fin du xv e siècle, la technique s’affine, et le décor et la palette s’enrichissent. D’autre part, les formes se font plus recherchées, tandis que des motifs ornementaux, plumes de paons, spirales, zigzags, lignes sinueuses, remplissent les fonds. C’est dans le dernier quart du xv e siècle que le répertoire de la Renaissance commença, sous forme de besants, de perles, de guirlandes, ou d’une foule d’autres motifs pleins de fantaisie, à pénétrer la majolique faentine. Dans un premier temps, ces motifs s’allièrent aux décors antérieurs, comme sur le pavement Vaselli, exécuté entre 1492 et 1497 en l’église San Petronio de Bologne. Un atelier faentin avait reçu commande d’un pavement en faïence pour un notable Bolonais, le chanoine Vaselli. Ce pavement était destiné à une chapelle de l’église de San Petronio, (la plus importante de la ville après la cathédrale Saint Pietro, dont le chanoine avait obtenu le ius patronatus (patronage). Un tel privilège permettait au dédicataire de vouer la chapelle à son propre saint protecteur, d’y 31
célébrer des messes privées ou d’y enterrer ses propres morts sous le pavement ou dans des enfeus pratiqués dans les murs. Pour l’obtention d’un tel privilège, le dédicataire payait et s’appliquait généralement à décorer les lieux avec le plus grand faste. Le chanoine Vaselli ne lésina pas, quant à lui, sur les dépenses. Ayant obtenu le ius patronatus le 3 avril 1489, il décida de dédier la chapelle à San Sebastiano, invoqué pour lutter contre les épidémies de peste. Pour le pavement en faïence, parfaite illustration du répertoire décoratif faentin, il s’adressa donc aux ateliers de Faenza. On connaît au moins l’un des auteurs ce pavement, un certain Pietro Andrea de Faenza (dont le nom latinisé en Petrus Andrea de Favencia apparaît sur un carreau). Jusqu’à la fin du premier quart du xvi e siècle, période de transition stylistique, répertoire gothique et motifs de la Renaissance coexistent encore. Des motifs dérivant de l’architecture classique sont juxtaposés à des variantes à l’infinie fantaisie de la « palmette persane ». Ce décor raffiné d’origine orientale était utilisé depuis la fin du xv e siècle. Le motif, inspiré des feuilles en éventail du palmier ou bien du lys, est formé d’une tige verticale ornée de feuilles à huit pétales. La fleur peut être arrondie, en bouton, ou bien entièrement épanouie avec les pétales en éventail. Elle se prête en tout cas toujours admirablement aux formes souples et sinueuses de la majolique. Dans le même temps, des pièces à peu près contemporaines affichent quant à elles des éléments uniquement renaissants. En effet, l’art italien au Quattrocento s’était nourri de constantes références à l’Antiquité, modèle revendiqué pour parvenir à un nouvel Age d’or. Cette démarche artistique était en fait issue d’une connaissance régénérée par l’édition de textes illustrés. Cette floraison éditoriale, liée au renouvellement économique et social de la société italienne, fut rendue possible par le milieu humaniste et stimulée par une clientèle de plus en plus aisée et nombreuse. Donc, au tournant du xvi e siècle, si la production évolue, c’est pour prendre une dimension particulière en se faisant l’écho des préoccupations humanistes. Sur les précieuses faïences apparaissent figures humaines et sujets narratifs. Sur le cat. no. 3, on découvre un profil de femme agrémenté sur l’aile d’un motif à grotesques. Le grotesque est un style d’ornement découvert à la Renaissance et le mot vient en fait qualifier les ornements de la « Domus Aurea » construite par Néron dont les murs étaient couverts de tels motifs. On rappellera qu’à la fin du xv e siècle, un jeune Romain tomba dans un trou sur les pentes de l’Oppius et se retrouva dans une sorte de grotte couverte de peintures surprenantes, d’où l’attribution du nom de grotesques que l’on donna à ces peintures. En réalité, il s’agissait de la « Domus Aurea », ensevelie. Le développement du motif de grotesque sur la majolique de Faenza n’est sans doute pas étranger à l’influence locale de la famille d’artistes Aspertini, et notamment à Amico Aspertini. Élève de Francia à Bologne (Giacomo Raibolini dit Giacomo Francia: Bologne, 1484-1557), Aspertini tenta d’assimiler le style de Pérugin et de Pinturicchio durant le séjour qu’il fit à Rome de 1500 à 1503. Finalement c’est là, surtout, qu’il étudia les motifs de grotesques qui nous intéressent. Aspertini a d’ailleurs laissé plusieurs carnets de dessins qui révèlent son intérêt pour les monuments et les sculptures antiques. Cependant, si les objets de fouilles du musée de Faenza, démontrent indubitablement que cette production de motifs à grotesques sur fond orangé était bien courante à Faenza, ce type de décor était 32
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Plat. Faenza, début du xvie siècle [det. cat. no. 3]
Plat d’apparat. Faenza, vers 1520 [det. cat. no. 9]
traditionnellement attribué aux ateliers Siennois. Grâce à des recherches plus poussées, on expliqueaujourd’huilefaitqu’onrencontreégalementàSiennecetypeprécisdegrotesques par la présence dans cette ville d’artisans faentins venus là pour tenter leur chance. Parallèlement se développe à Faenza dans la première moitié du xv e siècle l’istoriato. Le terme istoriato, auquel nous avons déjà fait allusion, désigne dans le vocabulaire de la Renaissance un type particulier de décor consistant à représenter sur la surface de la majolique de vraies histoires avec un sujet, des personnages, et un environnement. Il s’agit donc d’une véritable peinture sur céramique. Ces majoliques (assiettes et coupes) évoquent les thèmes issus de l’histoire biblique, romaine, ou même contemporaine. La mythologie avec les amours et métamorphoses des dieux, les épisodes de la guerre de Troie, de l’Énéide ou les légendes de la fondation de Rome y sont aussi représentés. On rencontre aussi des fables, des histoires populaires ou bien souvent des sujets allégoriques qui nous sont devenus difficilement intelligibles. Ces sujets sont parfois repris des carnets de dessins qui circulent dans les ateliers ou plus souvent des gravures allemandes ou nordiques. La production graphique allemande, dans la première moitié du xvi e siècle, atteint une richesse d’invention et une qualité technique rarement égalées. Siècle de la Réforme, époque de grandes transformations politiques et économiques, le xvi e siècle allemand est en fait un véritable Age d’or pour la gravure. Profondément influencés par Albrecht Dürer, le plus grand artiste de son temps, de nombreux graveurs élaborent à Nuremberg, en Bavière, en Suisse ou en Franconie, un art nouveau et original par le graphisme et le choix très libre des sujets. Ces gravures illustrent soit des thèmes profanes, soit des épisodes bibliques et mythologiques. On citera parmi les plus connus Lucas de Leyde, Dürer ou Schongauer; mais aussi Albrecht Altdorfer, premier graveur à avoir adopté des formats minuscules et principal représentant de l’école du Danube. Pour le nord de l’Allemagne, on peut évoquer Heinrich Aldegrever, artiste complexe hésitant entre trois esthétiques: le maniérisme flamand, le naturalisme local et les formes de la Renaissance italienne. Cependant, dès le second quart du siècle, cet engouement très vif pour les gravures allemandes, s’estompe au profit des gravures italiennes, jugées d’un goût plus « moderne ». Parmi ces gravures reflétant les grands décors contemporains, particulièrement ceux de l’atelier de Raphaël, on citera surtout les gravures de Marc-Antoine Raimondi. Né à Bologne, Raimondi est l’élève de Francia qui lui apprend l’art de la gravure. Si ses premières œuvres sont marquées par son premier maître mais aussi par l’art de Florence et de Padoue, il subit aussi l’influence de Lucas de Leyde, preuve s’il en fallait des nombreuses interactions artistiques à l’époque entre le Nord et le Sud. En 1506, lors d’un séjour à Venise, Raimondi étudie Dürer, mais c’est à Rome en 1510, qu’il se lie avec Raphaël qu’il interprète désormais avec ferveur. L’influence de ce classicisme délicat inspiré de Raphaël transparait dans le plat [cat. no. 9] représentant Diane et Actéon, peut-être une œuvre de jeunesse du peintre d’histoire faentin Baldassare Manara. Ruiné par le sac de Rome (1527) au cours duquel son atelier est dévasté Raimondi se réfugie à Bologne, où il meurt dans la misère. Ses cuivres seront volés par ses élèves ou par ses éditeurs, mais ils auront le mérite de diffuser la manière de Raphaël dans le domaine des 33
arts mineurs, et au premier chef dans celui de la majolique. On nomme d’ailleurs « a raffaelesche » le style assez courant inspiré du décor créé par Raphaël et son équipe autour de 1510 pour les loges du Vatican, (à la suite des fresques réalisées vers 1480 dans les mêmes lieux par Pinturicchio). C’est donc essentiellement dans la peinture murale contemporaine, probablement diffusée par des dessins et rapidement par la gravure, que les peintres de majolique puisent leur inspiration. Dès les années 1520, l’apogée était atteint; et nombre d’istoriati sur émail berettino sont des exemples admirables de cette connaissance de l’art de Raphaël. S’affirmant soudainement à partir de 1520 à côté de la production à fond blanc, le décor « a berettino » consiste en fait en des décors ornementaux sur émail bleuté (l’émail devient azuré par l’adjonction d’un peu de cobalt). La pièce est plongée dans un émail teinté en bleu clair, et les motifs (grotesques et rinceaux) sont réservés par rapport au fond bleu posé au pinceau et rechampis de blanc. Il y avait alors à Faenza plusieurs fabriques renommées, notamment celle des frères Piroti, (la célèbre Casa Pirota), celle des Bergantini, ou l’atelier de Virgiliotto Calamelli, sur lequel des témoignages existent dès 1531. On citera aussi Viani ou Baldassare Manara, le plus classique des peintres d’histoire faentins, se démarquant ainsi de l’expressionnisme ambiant inspiré d’Aspertini. On leur doit des istoriati « a berettino », véritables tableaux sur faïence d’une extraordinaire virtuosité, peints sur un fond délicatement teinté en bleu au cobalt. L’émail à fond berettino est surement une des typologies les plus séduisantes de la majolique faentine qui se prolongera jusqu’aux alentours de 1540. la dominante azurée crée des équilibres subtils et confère aux couleurs une grande harmonie. Sur ces istoriati, parmi les plus beaux jamais peints, Le décor foisonne de trophées, de grotesques et d’arabesques. On citera le plat tardif (cat. no. 10) représentant la Mort d’Orphée, dans un paysage faentin typique qui épouse la forme circulaire de l’objet de manière idéale. Après avoir dérogé aux conditions imposées par les Dieux pour retrouver Eurydice, Orphée pleurait sa bien-aimée. Alors qu’il ne prêtait guère attention aux ménades, jalouses d’un tel amour, celles-ci le déchiquetèrent et jetèrent les morceaux de son corps dans différents fleuves. Ce paroxysme est bien évoqué par la violence anguleuse des mouvements entrecroisés et des draperies. Au fond berettino participent souvent des touches d’un rouge cinabre flamboyant que Picolpasso atteste avoir vu dans les ateliers faentins, comme ici sur l’aile à grotesques sinueux sur fond jaune citron. Des services berettino entiers sont produits, le plus souvent armoriés, mais les cruches et bouteilles sont plus rares que les assiettes, les coupes ou les plats. Les blasons des grandes familles florentines apparaissent souvent, et ces commandes toscanes fréquentes dénotent une véritable mode surement lié à la présence en Romagne de l’homme d’Etat et historien humaniste Francesco Guicciardini (marié à Maria Salviati). Entre mai 1524 et janvier 1526, Guicciardini administra la Romagne pour le compte du pape et résida à Faenza. Sont conservées des pièces d’un magnifique service de table réalisé par le peintre de la coupe Bergantini soit pour le couple, soit pour Maria Salviati elle-même. Les comparaisons entre différents services armoriés comprenant des fiasques, des salières, des aiguières, des coupes et des assiettes de différentes formes, réalisés à Faenza dans les années 1520 et 1530, tendent à prouver que les patriciennes florentines appréciaient beaucoup ces objets, qu’elles recevaient comme cadeaux ou dont elles étaient commanditaires. Ces services étaient probablement destinés à être exposés ou à servir occasionnellement et constituaient dans un intérieur une décoration érudite et sophistiquée. 34
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Plat. Faenza, 1540 [det. cat. no. 10]
Les spécialistes se divisent cependant toujours sur l’usage des istoriati. En effet, la présence d’un service entier de majoliques exposé sur un dressoir, dans une salle d’apparat, comme il était de coutume pour les pièces d’orfèvrerie, n’est attestée par aucun témoignage mais, sans être trop tranché, il semblerait que leur utilisation se limitait aux grandes occasions. Cet usage parcimonieux est en fait induit par le décor même de certaines pièces, à priori destinées à se « répondre ». Quoi qu’il en soit, comme dans le cas de l’orfèvrerie d’apparat, la présence de majoliques d’usage n’implique pas que les pièces soient réellement utilisées. A la suite de cette magnifique production « a berettino », se développe dans les années 1530-1550 le style que l’historien d’art Gaetano Ballardini a nommé le « Stilefiorito ». Le style se caractérise par le décor « a quartieri »: des pièces de forme souvent mouvementée (les coupes godronnées reproduisent des modèles en métal précieux) sont couvertes de fonds de couleurs alternées (bleu, vert, jaune ou orange) portant des rinceaux et entourant un motif du type a istoriato. Les motifs, souvent constitués de grotesques ou d’éléments végétaux d’une riche polychromie, se détachent désormais sur ces champs de couleurs vives. Ce fastueux décor est souvent associé à des scènes historiées, des portraits ou des allégories. Au-delà de la beauté de ces décors « a quartieri », dans la nouveauté qui marque les formes du support, l’habileté de l’artisan s’impose, notamment dans la production des coupes godronnées et à bord festonné (« crespina ») inspirées des pièces de métal. Autour du médaillon central bombé portant un sujet allégorique ou un putto, le décor de rinceaux et de feuillages stylisés disposés dans des compartiments à fonds de couleurs alternées transforme l’argile en l’équivalent du métal le plus noble. Mais à partir de 1535, au moment même où travaillait le brillant Baldassare Manara, l’habitude de copier des gravures fit que peu à peu, la production de Faenza perdit un peu de son originalité, se confondant avec celle d’Urbino. Cependant, à la même époque, certains potiers de Faenza, tel Virgiliotto Calamelli (atelier connu de 1550 à 1570), mirent à la mode la faïence blanche (« bianchi ») simplement décorée de quelques touches de jaune et de bleu. Ce décor, aussi dit « à compendiaro » et qui fut imitée en Italie et dans tout le reste de l’Europe, joue sur la matière de l’émail qui couvre l’objet. La décoration se compose de couronnes de feuilles et de fleurs, de putti, d’armoiries, de petites figures caractérisées par une facture rapide et concise rehaussée de quelque touche de bleu de jaune et de vert (cela explique l’adoption du terme « compendiario » pour ce genre de peinture sur majolique: venant de l’italien, « compendiare » qui veut dire résumer). Comme s’il s’agissait d’une ébauche avec peu de couleurs, l’objet est décoré de quelques simples traits de pinceau. Le décor « à compendiario » est le plus souvent appliqué sur des objets aux formes mouvementées: assiettes aux bords festonnés, plats godronnés, objets de forme bombée avec application d’ornements en ronde bosse s’inspirant largement de l’orfèvrerie. Les potiers profitent de la surface blanche (l’émail d’un aspect laiteux doit sa couleur à une quantité importante d’étain) pour mettre en valeur la forme complexe de ces majoliques. Ce renouvellement et cette plus grande valorisation des formes des objets (les surfaces sont plus riches et plus sculpturales), explique sans doute le succès, jusqu’au milieu du xvii e siècle, de ces faïences 35
de Faenza peintes sur émail blanc. Ce style se répandit très vite dans toute l’Italie (Ces céramiques seront vite imitées dans d’autres centres tels que Montelupo, Urbino ou Deruta, et des familles comme les Médicis commanderont à Faenza de fastueux services bianchi), la France, la Hollande et dans l’Europe de l’Est, où la réputation des « blancs » de Faenza prit une grande ampleur. Pour la France, le mot « faïence » qui apparaît notamment à Nevers au début du xvii e siècle désigne alors les « bianchi di Faenza ». De manière plus large, au xvii e siècle, la production de la majolique européenne donnera souvent aux pièces émaillées le nom de « Faenza ». Malgré cette vague européenne d’imitation, la majolique de Faenza prospéra encore longtemps et ne fut à vrai dire supplantée que par l’énorme production de Delft, mise à la mode par le gout orientalisant introduit par la compagnie des Indes. Dans l’attente de ce terme, les potiers faentins savaient en fait flatter les aspirations des commanditaires de la Renaissance en suivant le goût décoratif du raphaëlisme tardif, inspiré alors du synthétisme de la peinture romaine dus Bas Empire. Ce goût avait été adopté par l’école de Vasari, et principalement par Marco Marchetti dit Marco da Faenza (vers 1528-1588). Marchetti se spécialisa en fait dans l’exécution de grotesques. Il travailla d’abord pour les Médicis au Palazzo Vecchio de Florence, en compagnie de Giorgio Vasari qui le décrit comme inégalé en ce domaine. Dans les années 1570 il travailla à Rome pour le Pape Grégoire XIII. Après la mort de Sabbatini en 1576, il supervisa toute la décoration de grotesques de la Loggia et des Stanze du Vatican. Pour revenir à Faenza, sa production évolue donc après 1550 vers des formes plus complexes. Ses créations originales et exubérantes, composées d’éléments divers et proposant plusieurs lectures de l’objet, transposent sur le plan décoratif l’infinie fantaisie du maniérisme, ainsi que son attrait pour la métamorphose. Une curieuse anecdote porte témoignage de la popularité de la faïence de Faenza à travers les âges. En Août 2006, le premier ministre du Québec annonça que les archéologues canadiens avaient découvert l’emplacement précis de la première colonie du Canada: Charlesbourg. Un fragment d’une plaque ciselée décorative fabriquée à Faenza entre 1540 et 1550 avait été trouvé sur les lieux, vestige des biens d’un membre de l’aristocratie française dans la colonie...
A
près la chute de Rome, la Toscane fut occupée dans la seconde moitié du v e siècle par les Lombards, puis les carolingiens s’y installèrent à partir de 774. La région prit alors le nom de Toscane avec Lucques comme capitale. A la mort de Boniface II en 1052, le pouvoir passa à sa femme, Béatrice de Lorraine, puis à sa fille Mathilde, la Grande Comtesse. Avant sa mort en 1115, la comtesse Mathilde céda toutes ses possessions à l’Église, engendrant une série de revendications de la part des Empereurs du Saint Empire Romain Germanique. L’Empire envoya en Toscane une série de ses représentants mais à cette époque, de nombreuses villes toscanes prirent position contre les deux « contendenti », le Pape et l’Empereur, puis se déclarèrent indépendantes et commencèrent à résister. C’est ainsi que naquirent les Communes toscanes comme Florence, Sienne, Pise ou Lucques, devenues ensuite de véritables États. Ce sont elles qui firent la véritable histoire de la Toscane, jusqu’à la seconde restauration des Médicis en 1530. Dans le domaine de la céramique, à partir du xiii e siècle, les somptueuses productions lustrées des ateliers espagnols de Valence se diffusèrent dans plusieurs lieux de la Péninsule dont la Toscane. Elle devint au xv e siècle, l’un des centres les plus créatifs dans la technique de la majolique. Après un premier style de céramique à émail stannifère, la 36
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Toscane se distingua par la suite par une production plus personnelle. En effet, dans un premier temps, à l’époque médiévale, presque toute la région fabriquait une majolique verte et brune. D’autre part, l’influence de l’Espagne, grande source d’approvisionnement de la faïence, s’imposa longtemps, notamment dans la forme de bassins. En effet, ces derniers ne sont pas sans rappeler fortement les grands plats creux à fond plat, à marli presque vertical et aile droite, que l’on rencontre dans la production de Manises, près de Valence. Ces bassins étaient d’ailleurs eux-mêmes inspirés des bassins de cuivre dits « de Damas ».
A
Cruche (boccale). Florence, atelier de Giunta di Tugio?, première moitié du xve siècle [det. cat. no. 14]
la fin du xiv e siècle, une production de majolique décorée et plus élégante se concentre alors dans quelques centres tels que Florence, qui adoptent de nouveaux styles décoratifs inspirés du gothique tardif et de la Renaissance. Florence, en particulier, attire de nombreux céramistes des environs. On pourrait citer Bartolo di Piero (de Serravalle Pistoiese) et Domenico di Cecco (de Montelupo), mais on retiendra au premier chef Tugio di Giunta (vers 1382-1450), venu de Bacchereto, qui signa sa production. Si on le considère comme le potier florentin le plus important de son époque, sa réputation est en fait en partie due à l’immense commande qu’il reçut aux alentours de 1430. L’Hôpital Santa Maria Nuova avait commandé près d’un millier de pots à pharmacie, dont plusieurs nous sont parvenus. Dès 1426, l’Hôpital, avait demandé à un potier de la ville 588 pièces de vaisselle de type « damascène », et quelques exemplaires portant sur leurs anses l’emblème de l’hôpital ont là aussi subsisté. Il convient de rappeler que les premières céramiques italiennes destinées à rivaliser commercialement et artistiquement avec les céramiques étrangères furent produites en série pour les pharmacies et les hôpitaux, alors commanditaires importants de récipients opaques, étanches et à propriétés isothermes. Il s’agissait de grands vases à panse ovoïde, parfois munie de deux anses, ou d’albarelli. A noter que l’albarello florentin conserve la forme classique de ses lointains modèles orientaux. Il présente un profil cylindrique, légèrement cintré pour faciliter la préhension, et son col à bourrelet permet la ligature d’un couvercle en parchemin. Jusque dans le premier quart du xv e siècle, quand il s’agissait d’une commande importante, les Italiens, se tournaient semble-t-il plutôt vers Malaga. En 1424, l’inventaire d’une pharmacie florentine fait mention d’une grande jarre à épices venue de Damas ou de Malaga. Ainsi en 1420, un marchand milanais commande à un potier de Manises 720 jarres « damascènes » en lustre doré, probablement pour approvisionner un hôpital. Enfin, quoique plus rarement, les Italiens se tournaient même vers le Proche-Orient musulman. Les céramiques produites en série pour les pharmacies et les hôpitaux, représentent la production produite à Florence la plus connue de cette première moitié du xv e siècle. Ces majoliques s’identifient au type appelé par l’historien d’art Ballardini « zaffera in rilievo »: des vases pharmaceutiques à deux anses plates (parfois aussi des objets à usage de la table, ou même des pièces d’apparat) ornées de feuilles de chêne, d’animaux et de figures humaines, exécutés en bleu de cobalt en relief (« rilievo ») épais et dont le Louvre possède plusieurs exemples. Si le « bleu et blanc » des ateliers florentins était appelé « zaffera », le mot désignait en fait la pigmentation donnée par le cobalt asiatique. Comme il avait tendance à couler pendant la cuisson, les Florentins l’entouraient d’un trait de manganèse violacé assez semblable au trait noir avec lequel les Syriens cernaient le leur. Dans les pièces d’apparat se donnait libre cours le goût pour les riches ornements. Le 37
motif « à la bryone » était un emprunt direct aux potiers valenciens. Ces derniers l’avaient introduit dans leurs productions à partir du milieu du xv e siècle, en compagnie d’autres motifs s’éloignant volontairement du répertoire musulman tel que l’avait transmis les ateliers de Malaga. Cette étape inaugurait une nouvelle phase dans l’art de la céramique hispano-mauresque qui se fondait de plus en plus dans le répertoire gothique, comme dans le nord de toute l’Italie centrale. C’est ce motif « à la bryone » que recueillit la céramique florentine, car il composait un fond idéal pour de grands motifs tels que par exemple les armoiries des familles patriciennes. Mais outre ces motifs héraldiques, étaient particulièrement prisés pour les pièces d’apparat les motifs zoomorphes et végétaux, tendant dans une sorte d’horreur du vide à remplir tout l’espace. Il faudra cependant attendre la seconde moitié du xv e siècle pour voir les faïenciers, grâce à leur maîtrise des techniques de cuisson, produire une polychromie de grand feu plus large. Rappelons en marge de notre sujet, qu’au xv e siècle, à Florence, le procédé de la majolique fut copié par Luca della Robbia (vers 1400-1482) qui l’appliqua, comme ses descendants, à l’architecture avec de grandes sculptures religieuses en bas-relief. Pour en revenir à notre sujet premier, il convient d’être néanmoins prudent sur les provenances. Si les cruches et les jarres à feuilles de chêne bleues en relief du xv e siècle (empreintes d’une nette influence islamique métissée par l’apport des motifs du gothique tardif ), sont généralement attribuées à Florence, des tessons similaires ont également été trouvés lors de fouilles à Montelupo, bourgade proche de Florence, dont il convient de parler en détail.
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ité construite au milieu du xiv e siècle, Montelupo a été l’un des plus importants centres de production de céramique de la Renaissance, tant au niveau italien qu’européen. Son abondante production est désormais bien connue grâce aux découvertes archéologiques. Dès la fin du xiii e siècle, la région produisait des pièces d’inspiration hispano-mauresque aux motifs bleus tirant sur le vert, puis les fours ne cessèrent de se multiplier. La production se développa largement à partir des modèles vert et brun purement utilitaires du Moyen Âge, vers des modèles plus élaborés. Comme Deruta l’avait été pour Pérouse, Montelupo devint peu à peu le « four » de Florence. À la fin du xv e siècle, on comptait en fait plus de 50 unités. Le niveau de production est d’ailleurs tel qu’il nécessita un édit du maire pour interdire de déverser dans la rivière Pesa les énormes quantités de déchets produits par les faïenceries. Au milieu du xv e siècle, le site de Montelupo, déjà le plus important centre céramique de la région, était devenu l’un des protagonistes du phénomène de circulation des techniques et des connaissances qui caractérise cette période de la Renaissance. Les artistes de Montelupo allèrent alors travailler à Faenza et Cafaggiolo. Les archives s’avèrent fort précieuses. Ainsi, le contrat passé en 1490 par un riche négociant de Florence, Francesco Antinori, témoigne de la vitalité de la production de Montelupo à son heure de gloire. Antinori réservait la production de vingt-trois potiers pour trois années, et s’engageait à l’acheter à un prix forfaitaire fixé par avance. Mais à cette époque, Florence allait une fois de plus être rattrapée par la politique. Si l’élection d’un Médicis au Trône Papal avait renforcé le pouvoir de la famille à Florence, lorsque les Florentins apprirent en 1527 le sac de Rome, ils se rebellèrent et chassèrent encore une fois les Médicis, affirmant ainsi leur liberté. Ce fut la dernière tentative pour remettre en place le gouvernement républicain et, en août 1530, à l’issue d’un siège de 38
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Albarello. Montelupo, fin du xve - début du xvie siècle [det. cat. no. 16]
onze mois, les troupes de l’empereur et du Pape entrèrent ensemble dans Florence. L’année suivante, par concession impériale, Alexandre de Médicis fut déclaré « chef du gouvernement et de l’Etat ». Il installa alors une tyrannie et toutes les institutions qu’il créa furent entièrement sous son contrôle. Ces événements eurent leur incidence sur les ateliers. Après le siège de 1530, à la fois par la crainte des incendies mais aussi par l’intérêt d’installer les fours à proximité des matières premières, Florence ne semble pas avoir conservé de fours dans le centre de la ville. Ce fut au profit de Montelupo où la concentration devait de fait être très importante. Sur le plan des communications, la proximité du port de Pise facilitait les échanges, notamment avec l’Espagne, ce qui explique l’imitation au cours du xv e siècle de la typologie hispano-mauresque. Au xi e siècle comme à l’époque romaine, Pise était déjà une importante base navale, mais elle intensifia encore le commerce en Méditerranée, jusqu’à disposer d’une puissance militaire qui lui permit de nombreuses victoires sur les musulmans. Elle profita ensuite des croisades pour étendre son trafic commercial en Méditerranée orientale et, bien vite, le long des côtes africaines où des colonies pisanes furent fondées. Après une brève domination sur la ville rivale de Lucques (1341-1368), Pise fut conquise par Florence en 1406. L’imitation de la typologie hispano-mauresque s’exprime sur les majoliques en des décors ornées d’arabesques bleues et blanches portant quelques touches de jaune ou dans des orangés monochromes imitant le lustre métallique. Concernant ce lustre métallique, Turcs et Européens ont longtemps et vainement tenté de percer le mystère de la confection de la porcelaine de Chine. A défaut d’avoir découvert la technique qui permet de confectionner une vaisselle blanche, sonore et translucide, les chercheurs des productions islamiques et espagnoles voire italiennes, (Deruta devait, comme on le verra plus loin, devenir célèbre dans ce domaine) mirent au point des techniques tout aussi intéressantes comme celle des reflets métalliques du lustre, imité ici à Montelupo de manière encore empirique. Vers la fin du xv e siècle, une importante production, destinée à l’usage de la table ou de la pharmacie et, il faut bien l’avouer de qualité moyenne, est en grande partie réservée à l’exportation. Outre les emblèmes monastiques et les armoiries, on y trouve comme motifs, et ce jusque dans le courant du xvi e siècle, la palmette persane, l’œil de plume de paon, mais aussi des feuilles de style gothique. Même si la production est très abondante, c’est justement au cours du xvi e siècle que l’inspiration des ateliers de Montelupo semble marquer le pas, à travers des décors moins spontanés et des formes tendant à devenir plus conventionnelles, même si les couleurs se diversifient avec l’introduction d’un beau rouge. Devenant un des éléments caractéristiques de la production locale, ce beau rouge n’est pas sans rappeler le bol d’Arménie. Connu depuis l’Antiquité, le bol d’Arménie est un type d’argile très fin, oxyde de fer rouge, qui permet notamment l’adhérence des feuilles d’or. Aux typologies élaborées au xv e siècle s’ajoutent de nouveaux motifs géométriques en bleu champlevé dit « a graffito ». C’est dans les majoliques de la période précédente que ce mode de décor « a graffito » était le plus fréquent. Il consistait à « gratter » les lignes du dessin en réservant les motifs ornementaux, ou à découper de petites surfaces dans l’épaisseur d’une couche de terre superficielle, dont on avait préalablement recouvert le corps de la poterie. Le tout était enrichi de rehauts de couleurs vert, jaune, brun et enduit d’un vernis plombifère transparent. Ce procédé, très pratiqué au xv e et donc encore au xvi e siècle, se maintint en fait dans le nord de l’Italie jusqu’au xvii e siècle. 39
Le décor « alla porcellana » peint en bleu et blanc, devient aussi très courant et révèle toute l’attrait que l’extrême orient exerce alors sur la céramique occidentale. Les motifs ornementaux d’arabesques se détachant en bleu sur le fond blanc relevant de cette typologie de décor, témoignent de l’influence de la porcelaine chinoise, importée en quantité de plus en plus importante au début du siècle. Elle devient alors la céramique la plus recherchée à la cour des Médicis. Dans seconde moitié du xvi e siècle à Montelupo, période de déclin, la production dénote un net appauvrissement des couleurs et même de la qualité de l’émail. Les potiers se bornent désormais à répéter inlassablement le répertoire de formes préexistant. D’ailleurs, dès cette période et dans les premières décennies du siècle suivant, afin de préserver une production en crise les commandes publiques se multiplient, comme vers 1520-1530 celle de vases appelés à compléter la pharmacie de Santa Maria Novella de Florence. La dernière production originale est celle de grands plats ornés de figures comiques. Ce déclin s’explique en partie par la concurrence de la production de Faenza, alors à son zénith. L’influence nette de ce centre est notable dans des œuvres utilisant la disposition « a quartieri » ou s’inspirant clairement des « bianchi ». Les motifs de grotesques sur fond blanc inspirés de Raphaël trahissent l’imitation des modèles de Casteldurante ou d’Urbino, alors que des éléments strictement décoratifs dénotent l’influence du répertoire vénitien. Les dernières réalisations de prestige de Montelupo seront le fait de commandes d’état, telles que le pavement en majolique de la salle du Poêle au Palais Pitti ou des bouteilles réalisées pour des noces princières, celles de Ferdinand Ier et de Christine de Lorraine, ou celles de Corne II Médicis et de Marie-Madeleine d’Autriche. C’est à la fin du xvii e siècle, après que fut achevée la production des superbes albarelli destinés aux pharmacies florentines des dominicains de San Marco et de Santa Maria Novella, que commença le déclin lent mais inexorable de la production de céramique à Montelupo. Ce n’est en fait que dans la production de vases les plus humbles que la technique vivota au cours des xviii e et xix e siècles. La mémoire de la splendide céramique Renaissance de Montelupo fut cependant perdue. Ce matériel, désormais exposé dans le musée de la céramique de la ville, dont il forme le noyau principal, permet une bonne connaissance des typologies de Montelupo. Aussi incroyable que la chose puisse paraître, des fragments de poteries de Montelupo ont été trouvés sur des sites archéologiques d’Amérique centrale, liés à la première colonisation européenne, ainsi que dans les Philippines et en Écosse. Cependant, excepté les plats figurés du xvii e siècle, la quasi-totalité de la production de Montelupo, est cependant restée totalement dans l’ombre. La découverte dans les années 1970, par les bénévoles du « Groupe archéologique de Montelupo Fiorentino », à l’intérieur du château surplombant le village médiéval, de l’entrée d’une grande fosse (jadis un lavoir), remplie de matériaux de décharge venant des fours de l’époque de la Renaissance, changera cela.
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i la collection Gillet ne comprend hélas aucune pièce que l’on puisse attribuer de manière sure à Caffagiolo, cette manufacture prestigieuse du xvi e siècle, mérite tout de même d’être évoquée. En effet, le nom de « Caffagiolo », qui apparaît sur des faïences du début du xvi e siècle, prouve l’existence d’ateliers de potiers dans cette petite ville des environs de Florence. Les Médicis, qui en avaient fait une de leurs résidences préférées, durent favoriser le développement d’une production luxueuse proche de celle de Faenza. A l’origine, à la fin du xv e siècle Lorenzo di Pierfrancesco de Médicis, le propriétaire de la villa de Cafaggiolo, fit venir des potiers de Montelupo. Parmi 40
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ces derniers, on citera Piero et Stefano di Filippo qui marquèrent leur production du monogramme « sp » et dont les descendants furent appelés Fattorini. On sait que les fours étaient primitivement situés près des écuries de la villa. Au commencement, la production reflétait certains modèles contemporains de Montelupo dans le répertoire décoratif typique de la fin du xv e siècle et du début du suivant, notamment la typologie de décor « alla porcellana ». Les motifs ornementaux d’arabesques se détachant en bleu sur le fond blanc sont en effet attestés dans la production de Cafaggiolo dès la première décennie du xvi e siècle. Ils témoignent là encore de l’influence de la porcelaine chinoise, importée en quantité de plus en plus importante au début du siècle. Les plus belles pièces de Caffagiolo appartiennent au premier tiers de ce siècle. Avec le retour des Médicis à Florence et la création du Duché, Cafaggiolo se consacra presque exclusivement aux commandes du gouvernement, souvent pour de grandes majoliques d’apparat. Il s’agit de céramiques le plus souvent présentées en exposition comme c’était le cas pour l’argenterie la plus élaborée, et elles avaient en commun la fonction de décorer la salle à manger et de révéler aux invités la richesse de l’hôte.
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Albarello. Sienne, première moitié du xvie siècle [det. cat. no. 19]
ivales en politique comme en matière commerciale, les communes toscanes et en particulier Florence, Pise, Venise et Sienne se livrèrent une « guerre artistique » qui prit en fait la forme d’une émulation passionnée. Sienne, vaincue par Florence au xiv e, siècle devint au siècle suivant un grand centre artistique dans la continuité de Florence, ville qui devait conserver malgré tout sa prééminence. Nous avons déjà souligné le fait que c’est d’Orient qu’est venu le premier essor de la majolique, par l’intermédiaire de la Perse et de l’Espagne musulmane. Parmi les plus anciens spécimens de poteries italiennes du moyen âge, figure un important groupe de plats et de vases trouvés à Sienne dont le décor peint en vert et en violet de manganèse rappelle nettement la fabrication musulmane de Paterna (province de Valence). Après une période médiévale très prospère, Sienne continua de produire un nombre important de majoliques inspirées du gothique tardif. Au xv e siècle, la ville entretenait d’excellentes relations avec Montelupo et cette relation fut certainement favorable au développement accru de la majolique. Les potiers siennois se firent de plus en plus nombreux, au point que, dans la seconde moitié du siècle, ils répondaient non seulement aux besoins de la cité, mais aussi à ceux de la région avoisinante. C’est probablement cette surabondance de main d’œuvre qui amena certains d’entre eux à chercher du travail dans les villes à l’est des Apennins. Par exemple, on sait qu’en 1462, le potier Ventura di Maestro Simone de’ Piccolomini quitta Sienne pour s’établir à Pesaro. Ce serait d’ailleurs à cette époque que l’usage de l’émail stannifère aurait été importé à Pesaro, peut-être par ce dernier. Cette émigration partielle n’ayant guère atténué la rigueur de la concurrence, les potiers siennois cherchèrent en 1476 à y remédier en sollicitant par une pétition la protection de la Seigneurie contre la concurrence étrangère. On apprend ainsi que la ville comprenait seize ateliers (en 1483 ils peuplaient une rue tout entière) capables de fournir beaucoup plus de majoliques que n’en nécessitait la demande de Sienne et des villes alentours. Les maîtres potiers siennois demandèrent alors qu’à la seule exception des poteries métalliques de Valence et de Malaga, on imposât lourdement toutes poteries entrant dans la ville. La pétition reçut satisfaction, et il fut stipulé que quiconque méconnaîtrait cette mesure verrait ses marchandises détruites et paierait qui plus est double taxe. Ainsi protégés, les ateliers siennois prospérèrent d’autant plus. 41
Dans ces années 1480, avant l’arrivée de potiers étrangers dans leur ville, les artisans locaux produisaient déjà des œuvres remarquables. Le beau pavage de l’Oratoire de sainte Catherine fut réalisé alors et, en 1488, deux Siennois, Pietro et Niccolo di Lorenzo Mazzaburroni exécutaient un autre pavage parmi les plus beaux de la Renaissance italienne (on admire encore dans la chapelle Bichi à San Agostino). Ces Mazzaburroni étaient en fait actifs depuis le milieu du xv e siècle, et c’est dans leur atelier qu’avait été également exécuté vers 1475, le pavement Docci en l’église San Francesco. Leur technique raffinée et d’une qualité décorative remarquable éclate dans les belles armoiries et les élégants feuillages gothique. Cette période est la grande période de la majolique de Sienne. De même que certains potiers Siennois émigrés avaient fait connaître leur art dans les villes de l’Italie orientale, Sienne accueillit par la suite des artisans venus de Faenza et d’Urbino. L’influence de Faenza est clairement sensible sur les majoliques siennoises. Dans les archives, nous relevons notamment à partir de 1503 le nom d’un certain Maestro Benedetto, de Faenza. Il possédait un atelier-magasin près de l’église Santa Lucia, quartier où vécurent et travaillèrent des générations d’artistes céramistes. Hélas, Benedetto n’a apposé sa signature que sur un unique plat, traité en monochromie azurée sur fond blanc, et dont l’aile est ornée d’une guirlande de feuilles « alla porcellana ». Ce plat est conservé au Victoria and Albert Museum de Londres et représente saint Jérôme pénitent. La stylisation des albarelli siennois rappelle fortement les décors à grotesques sur fond bleu ou orangé courants à cette époque à Faenza, des fragments de fouilles de Faenza faisant foi. La présence de Benedetto, explique certainement cette influence, à tel point qu’on peut hésiter sur l’attribution de certaines pièces entre Sienne et Faenza. Outre celle de Faenza, d’autres influences sont également sensible sur les majoliques siennoises, comme nous allons le voir. En fait, dans l’attente de découvertes archéologiques qui révéleront ou confirmeront l’existence attestée par les archives, des innombrables ateliers, la production historiée précoce de Sienne n’a pas encore dévoilé tous ses secrets. Les spécialistes mettent aujourd’hui l’accent sur la complexité des réseaux d’influence entre ces ateliers due notamment à l’itinérance des peintres. En effet, la collaboration d’un même peintre à différents ateliers, y compris dans des zones géographiques éloignées, est désormais un point communément admis. Sur un plan stylistique, les potiers siennois, dans les premières années du xvi e siècle, abandonnent peu à peu le répertoire gothique pour assimiler comme partout ailleurs celui la Renaissance. Ce basculement fut favorisée par la venue à Sienne, en 1502, du peintre Bernardino di Pinturicchio (1454-1513). Ce dernier étudia avec Le Pérugin et devint son collaborateur pour la décoration de la Sixtine. Devenu le peintre favori de l’aristocratie pontificale, Alexandre VI lui commande les fameux appartements Borgia du Vatican. Fidèle au style du xv e siècle, Pinturicchio refusait les multiples innovations artistiques des années 1500, et réalisa sa dernière grande réalisation à Sienne, la Bibliothèque Piccolomini dont le contrat fut signé en 1502. Les grotesques qui prolifèrent alors sur la majolique siennoise sont à l’image de celles peintes dans la Bibliothèque Piccolomini. On citera pour exemple les beaux albarelli décorés en registres où, entre des bandes couverts de grotesques sur fond bleu foncé ou orangé, comptant perles, guirlandes, dauphins, bucranes têtes d’anges ou cornes d’abondance, s’étire un cartouche sur lequel on lit le nom du médicament. Sur un plan chromatique, dans le premier quart du xvi e siècle, le jaune atteint à Sienne une pureté et un éclat inégalés, avec des décors de 42
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grotesques, de chimères, de masques se détachant sur un fond noir ou jaune. Pinturicchio revint à Rome en 1507, pour décorer pour Jules II le chœur de Santa Maria del Popolo, puis il regagna Sienne où il travailla jusqu’à sa mort, y peignant plusieurs fresques, notamment pour la cathédrale. En 1507 fut installé dans la Bibliothèque Piccolomini le beau pavement à triangles décorés de l’emblème des Piccolomini (des croissants) puis, vers 1513, le pavement de chapelle Piccolomini à l’église San Francesco. Par la suite, la majolique siennoise devait peu à peu se réduire à une production plus médiocre et résolument répétitive.
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Albarello. Deruta, vers 1507 [det. cat. no. 26]
’est à Deruta, ville de l’Ombrie septentrionale proche de Pérouse, et dont la collection Gillet conserve de nombreuses majoliques qu’on attribue toute une riche vaisselle à reflets métalliques. À la fin du xiii e siècle est attestée dans cette bourgade une production de majoliques vertes et brunes. Rappelons qu’à l’époque médiévale, l’Ombrie comme la Toscane fabriquait uniformément une majolique verte et brune. Moins célèbre que celle d’Orvieto, la production de Deruta était cependant destinée aussi bien aux besoins locaux qu’à l’exportation vers les autres centres de l’Ombrie, tels qu’Assise et Pérouse. D’ailleurs, par la suite, nombre de céramiste de Deruta devaient posséder un atelier à Deruta mais aussi un autre à Pérouse, achetant la citoyenneté de Pérouse pour vendre plus facilement leurs produits. La production de majoliques du Moyen Age tardif se caractérise à Deruta par un décor trèssimpleconstituéd’ornementsgéométriquesetvégétaux,commedanslesautrescentres de l’Ombrie, à l’exemple de Pérouse. Ce type de production perdurera jusque dans la première moitié du xv e siècle, à coté de nombre de majoliques à décor « a graffito ». Sur ces pièces, en grattant les lignes du dessin ou en découpant de petites surfaces dans l’épaisseurdelacouchedeterre,onobtenaitundécordesurfacepleindevigueur.Cen’estqu’après 1450 qu’on assiste à un renouveau complet des typologies au moment où Deruta s’affirme en tant que centre céramique au détriment de Pérouse, comme l’avait fait Montelupo vis à vis de Florence. Une grande quantité de documents et de fragments de fouilles font revivre la production de la seconde moitié du xv e siècle dans de la cité, alors pleinement spécialisée dans la majolique. Parmi les typologies du gothique tardif, on citera non seulement nombre de récipients pharmaceutiques: Albarelli à anses, vases globulaires souvent pourvus d’anses torsadées et imitant des modèles espagnols, mais aussi de beaux plats d’apparat dont le revers percé au talon trahit l’usage purement décoratif. Période de transition, la fin du siècle est comme dans la plupart des autres centres une période de mutation rapide vers la nouvelle esthétique de la Renaissance. Celle-ci voit un renouvellement non seulement des formes et des décors, avec des motifs en bandes géométriques de style résolument renaissant, mais aussi des techniques. À Deruta règne alors une émulation culturelle liée en partie à l’expansion de la famille des Masci, et d’autre part à l’apparition artistes propres à stimuler la production, comme Nicola Francioli, identifié comme le peintre qui signait « Co » au revers de plusieurs majoliques. Il était l’oncle du peintre Giacomo Mancini, dit El Frate, un des maîtres des grands plats d’apparats. On voit à cette époque s’imposer rapidement tout le répertoire classique composé de guirlandes, de trophées et de grotesques empruntés à l’Antiquité. A ce moment apparaît la typologie dénommée « petal-back » dans la mesure où le revers des coupes et assiettes est décoré d’un motif à pétales. Les éléments décoratifs de cette typologie, d’une grande richesse de couleurs, se caractérisent par une volonté de stylisation. 43
C’est à ce moment-là qu’est mise au point la technique du lustre métallique, permettant d’obtenir sur la céramique des effets de métallisation essentiellement dorés. A ses débuts, ce lustre était à Deruta d’un rouge cuivré mais il prit par la suite un ton jaune doré. C’est lui qui jusqu’à la fin du xvii e siècle fera la renommée de Deruta. Ce décor, dont l’un des objectifs est d’apporter à la céramique l’éclat de l’orfèvrerie, produit des reflets métallescents de couleur argentée ou dorée, mais aussi rouge ou brune selon la proportion de sels de cuivre et d’argent et la température de cuisson. Sur le plan technique, après une première cuisson les pièces étaient émaillées, puis décorées avant de subir une seconde cuisson à environ 940° C. Le peintre laissait en blanc les parties destinées à accueillir le mélange d’oxydes métalliques mêlés à des pigments (ocre rouge ou jaune, etc.). Le mélange était ensuite peint sur l’œuvre. Une fois appliqué sur la pièce, ce « lustre », mélange donc de nanoparticules de cuivre et d’argent, avait la particularité de se fixer à la surface de la céramique lors d’une troisième cuisson. La chose se faisait à basse température (vers 600° C environ) dans un four spécialement conçu à cet effet, dit moufle, et dans une atmosphère dite réductrice, c’est-à-dire en présence de fumée. La fumée empêchait l’oxygène d’entrer dans le four, contrairement aux deux cuissons précédentes faites en atmosphère oxydante. Durant cette troisième cuisson, les oxydes retournaient à l’état métallique et se déposaient sur la surface émaillée en de beaux effets colorés, variant selon les proportions des composants. Cette technique d’origine islamique, d’aspect à la fois luxueux et décoratif, était en fait utilisée depuis la fin du ix e siècle en Mésopotamie. Plus précisément, le début de la production de la céramique à reflets métalliques ou « lustrée » se situe à l’époque de la dynastie abbasside, dans sa capitale de Samarra au ix e siècle. L’invasion arabe la diffusa en Espagne où elle fut produite aux xiii e et xiv e siècles dans la ville de Malaga. Ce lustre si décoratif valut à la céramique espagnole de l’époque un engouement dans toute l’Europe et avant tout en Italie. Destinée en majorité à l’exportation, cette production luxueuse connut alors un développement extraordinaire. La réputation décorative de ces faïences se prolongea d’ailleurs, en perdant peu à peu de sa qualité, jusqu’au xvii e siècle. Après avoir été expérimentée après 1450 dans des centres tels que Pesaro ou Faenza, c’est néanmoins à Deruta et à Gubbio que la technique du lustre métallique devint une spécialité. Soulignons que cette technique coûteuse et complexe nécessitait une grande habilité et une parfaite connaissance des transformations des pigments sous l’effet de la cuisson. En ce qui concerne le processus de production, les fouilles d’anciens fours ont révélé que les mêmes ateliers et les mêmes décorateurs exécutaient aussi bien les pièces polychromes que les pièces au beau lustre métallique d’un jaune cuivré; En grande partie des vases de pharmacie et des plats d’apparat. Les motifs étaient pour la plupart également communs aux pièces à lustre et à celles traitées en polychromie. Le compartimentage de l’aile des plats était également commun aux deux techniques. Il évoquait les métopes et les triglyphes de l’antique frise dorique. Etait enfin également était fréquent dans les deux techniques l’usage d’entourer le décor principal, qu’il s’agisse de portraits en buste de « belle donne » ou de héros de l’Antiquité dans une guirlande enrubannée. Preuve supplémentaire s’il en fallait, des pièces signées de la même main et de forme identique nous sont parvenues aussi bien polychromes que décorées à lustre. Dans la première moitié du siècle, suivant le goût du Pérugin ou du Pinturrichio l’exécution des pièces, souvent à lustre métallique, est délicate. Troués au talon afin d’être 44
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Plat d’apparat. Maître del Pavimento di san Francesco, vers 1524 (Nicola Francioli detto Co?) [det. cat. no. 33]
Plat d’apparat. Deruta, deuxième moitié du xvie siècle [det. cat. no. 41]
suspendus, les grands plats d’apparat à aile large sont la plus haute expression de la production de Deruta, et ils sont souvent ornés de sujets prestigieux, notamment de décors d’armoiries. L’héraldique demeure à la Renaissance comme au Moyen Age l’élément le plus universel pour affirmer l’identité d’une personne, qu’elle soit noble, roturier ou prélat. En effet, l’apparition puis la rapide diffusion des armoiries au Moyen Age avait concerné toutes les classes sociales et tous les pays européens. L’usage des armoiries n’était pas réservé à la noblesse et pouvait concerner une famille bourgeoise, aussi bien d’ailleurs qu’une institution ecclésiastique. L’omniprésence de l’héraldique en Italie, pays où la noblesse ancienne ou de hiérarchie élevée était rare (seuls l’empereur et le pape pouvaient conférer des titres de noblesse), était exacerbée par les perpétuelles rivalités entre les familles aussi bien qu’entre les cités. En effet, avec des villes connaissant presque toutes un régime politique oligarchique, les armoiries tenaient une place prépondérante en tant qu’affirmation de l’identité. Par la présence de la couleur, la majolique se prêtait particulièrement, à la reproduction d’armoiries et d’emblèmes. L’héraldique s’insérait avec beaucoup d’à-propos dans le décor ornemental « all’antica » comme dans les décors de grotesques diffusés tout au long du xvi e siècle d’après les modèles créés par Raphaël et son atelier. Les plats d’apparat de Deruta destinés à l’ostentation, dits « piatti da pompa » en sont souvent pourvus, aussi bien sous la forme de l’écu complet que de l’insertion des « meubles » (éléments) et des « émaux » (couleurs) qui le composent, accompagné généralement d’une devise. Car à ce caractère presque systématique de l’emploi des armoiries l’Italie s’ajoute un goût prononcé pour une mode venue au quattrocento de France et d’Angleterre: celle de « l’emblème ». Alliant aux couleurs d’une famille une image (animal, objet ou personnage..) et un « mot » ou « motto », l’ensemble constituait la devise (souvent très codée) et reflétait en fait la dimension morale de la famille qui l’avait adoptée. Si la majolique est considérée à l’époque comme une œuvre d’art, rappelons qu’elle a aussi servi de support aux débats intellectuels et aux savants jeux d’esprit d’une élite humaniste. Au-delà de Deruta, dans toute l’Italie, des familles excellaient à cette pratique: Les Médicis à Florence, mais également les Gonzague de Mantoue, cour d’ailleurs très influencée par celles de France et Angleterre. Le goût pour le décor héraldique se maintint dans la majolique tout au long du xvi e siècle, y compris dans des réalisations destinées à des personnalités étrangères: Princes français et espagnols aussi bien que marchands allemands. Ces plats d’apparat de Deruta ne parlent pas que d’héraldique mais célèbrent aussi les Belles dames. Dans son « Livre du courtisan », Baldassare Castiglione a souligné à maintes reprises, dans le cadre de la cour d’Urbino, le rôle des femmes dans les cercles intellectuels. A travers les « belle donne »: la majolique historiée pourrait en être en quelque sorte le symbole. Le constat selon lequel plusieurs services historiés sont liés à des commanditaires ou des destinataires féminins, a d’ailleurs conduit certains spécialistes à considérer la majolique comme un objet souvent féminin. Accompagnées d’une banderole à leur nom ou parfois portant une devise, ces Belles dames dont le poète Adriano da Concole dressa dans une de ses dissertations poétiques une liste destinée au faiseur de vase de Deruta, sont traitées de façon résolument stylisée, à la manière de la peinture ombrienne. 45
Les grands plats d’apparat de Deruta présentent également souvent des héros et des saints. Dans ces années-là, la mythologie gréco-romaine constituait alors la source d’inspiration majeure des peintres sur majolique de Deruta, devant les thèmes historiques, religieux ou allégoriques. Le mélange des genres, mythologie et récits de la guerre de Troie, estcependantpermanentetlafrontièreestminceenmatièred’inspirationentre« historia » et « fabula ». Les sources littéraires classiques sont d’ailleurs celles des écrivains tels que Virgile et Ovide et non celles des historiens. Les thèmes religieux, historiques ou contemporains, ne sont cependant pas en reste, et on note la présence de saints récurrents comme saint François d’Assise et saint Jérôme. De même qu’au Moyen Age, l’iconographie de l’Ancien et du Nouveau Testament est souvent en concordance, soulignant qu’un épisode de l’Ancien Testament est en fait la préfiguration d’un épisode du Nouveau. L’érudition facilite par ailleurs l’association des héros bibliques à ceux tirés d’épisodes de l’histoire antique. Aux alentours de 1540, s’impose comme peintre d’istoriati la personnalité d’un membre de la famille Mancini: Giacomo dit « il Frate », que nous avons évoqué plus haut. Il exécute vers le milieu de cette décennie une suite de pièces d’après des gravures dont au premier chef celles de Raimondi, ou s’inspirant des illustrations du « Roland furieux » de Gabriele Giolito de Ferraris (vers 1508-1578). Imprimeur et éditeur actif à Venise, ce dernier fut un des premiers éditeurs majeurs de la littérature en langue vernaculaire italienne. Ces pièces du « Frate » d’un tracé rapide et d’une grande expressivité présentent des couleurs éclatantes. Se différenciant en cela de la tradition de Deruta, Il Frate reprenait la gravure telle qu’elle mais prenait néanmoins soin de « l’enchâsser » dans le paysage traditionnel présentant montagnes et édifices typiques. Dépassant le milieu du siècle, sa production, outre potentiellement une production anonyme incluant plaques et plats d’apparat métallique et polychromes, comprend pour ce que l’on sait actuellement trois beaux pavements ornés de grotesques, échelonnés entre 1563 et la fin de la décennie. Après 1550, à la différence des pièces de la première moitié du siècle, l’usage du lustre se fait plus rare à Deruta. T tandis que les couleurs se font plus vives et que le traitement est moins soigné. Les personnages représentés, surtout des représentations de chasseurs, de cavaliers, et de joueurs, ont désormais de grosses trognes et des membres courts et rebondis. Nonobstant le grand nombre de potiers nommément cités dans les archives, la production demeure alors presque entièrement anonyme. Ainsi pour désigner certains artistes se distinguant par leur style ou la qualité de leur travail, les historiens d’art ont eu recours à des appellations. Le cas le plus fameux est celui du « peintre du Pavement de San Francesco » (son chef-d’œuvre daté de 1524, date de sa réalisation ou de son inauguration) auquel reviennent notamment des plats d’apparat de grande beauté. Prenant une grande liberté avec ses modèles iconographiques et à l’image de nombres d’artistes de Deruta, dans ses plats il retire les figures de leur contexte premier, et les « colle » de manière assez bidimensionnelle sur un paysage Ombrien aux couleurs froides tout à fait typique. Ses sources iconographiques, outre les gravures déjà évoquées, incluent les soi-disant « Tarots de Mantegna », de la fin du xv e siècle. Chefs-d’œuvre de l’art de l’estampe, ces cartes sont l’un des premiers grands exemples de gravure. Elles furent créées vers 1460, peut-être à Ferrare, par un artiste anonyme de l’école de Francesco del Cossa. Quant au projet iconographique du jeu, il doit certainement être attribué à un 46
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Plat d’apparat. Deruta, deuxième moitié du xvie siècle [det. cat. no. 42]
grand lettré de l’époque. Il est sans doute lié au cercle de l’humaniste Guarino Guarini, qui travailla longtemps pour Lionello d’Este, Seigneur de Ferrare, imaginant des cycles picturaux semblables en certains aspects aux « Tarot de Mantegna ». Ces cartes apparaissent en fait comme une synthèse de l’encyclopédisme médiéval. De manière concise, il s’agit d’un microcosme contenant cinq « classes » de figures, correspondant à la réalité sociale de la fin du Moyen-âge, à ses dimensions intellectuelles et ses mondes spirituels. On y découvre tour à tour: Le groupe des Conditions humaines, le groupe d’Apollon et les Muses, les Arts et Sciences, le groupe des Génies et Vertus et enfin, le groupe des Planètes et Sphères célestes. Outre cette manne iconographique pour les peintre en majolique, on citera également comme autre source l’influence de la peinture ombrienne (Pérugin, Pinturrichio), mais aussi celle de Raphaël, d’un classicisme plus ancré dans le xvi e siècle, et enfin celle des sculptures antiques, familiarisées par les gravures de MarcAntoine Raimondi. Le xvii e siècle devait être encore pour Deruta une période prospérité avec une production évoluant à partir des caractéristiques du xvi e siècle, mais conservant une grande séduction de décor. En revanche, encore en activité au xviii e siècle, les ateliers de Deruta imitaient désormais plutôt les faïences françaises.
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elle ville riche de monuments qui témoignent de son glorieux passé, Gubbio est une des plus anciennes cités de l’Ombrie. Au xi e siècle, elle devint une commune indépendante, puis intégra le duché d’Urbino au xiv e siècle. Cette période marqua la période l’apogée de la ville. Depuis les époques les plus reculées, Gubbio fut un centre céramique connu. On a d’ailleurs retrouvé des restes de fours antiques pour la production de briques et de vaisselle dans les alentours. Il est évident que la qualité des argiles locales était particulièrement excellente. On recense dès le xiii e siècle les premiers documents écrits sur l’art ancestral de la céramique. On y découvre que les potiers de Gubbio produisaient des objets de qualité qui étaient commercialisés, non seulement sur place, mais encore dans les villes de l’Ombrie et des Marches. La première production céramique qui nous intéresse remonte sans doute à cette époque. Elle est conforme à la typologie archaïque du bas Moyen Âge, à savoir verte et brune, comme on a pu la découvrir dans d’autres centres à la même époque. Les oxydes colorants étaient en fait surtout le manganèse et le cuivre qui donnaient une coloration marron ou verte. Au xv e siècle, en revanche, les fouilles ont révélé des pièces de haute qualité représentatives du gothique tardif et proches de celles de Faenza, de Pesaro et de Deruta. Dans l’attente de nouvelles découvertes archéologiques, comme celle de Deruta, la production historiée précoce de Gubbio n’a pas encore dévoilé tous ses secrets. Là comme ailleurs, il faut prendre en compte la complexité des influences entre les ateliers, due notamment à l’itinérance des peintres. A vrai dire, la production de Gubbio sort de l’anonymat seulement avec l’arrivée de Giorgio Andreoli. Giorgio Andreoli, appelé « Mastro Giorgio », né entre 1465 et 1470 à Intra sur le lac Majeur et décédé à Gubbio en 1555, est considéré comme un des artistes les plus importants de la majolique italienne. Il exerça sa longue activité de potier uniquement à Gubbio où il s’était installé avec ses frères en 1490, après avoir habité Pavie. En 1492, Giorgio et son frère Salimbene s’unissent à un céramiste de Borgo San Sepolcro, Francesco di Giovanni. Entre 1495 et 1501, les deux frères s’associent au maître Giacomo di Paoluccio de Gubbio, pour la production d’objets à lustre métallique. En 1497, l’abondance de 47
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Plat d’apparat. Gubbio ?, première moitié ou premier quart du xvie siècle [det. cat. no. 43]
travail fut telle que pour s’agrandir, Giorgio et ses frères acquirent terrains, maisons et fonds de commerce dans le quartier de St Andrea. C’est de là que pourrait dériver, d’après l’historien Giuseppe Mazzatinti, le nom de famille Andreoli, qui n’apparaît dans aucun registre avant 1523. L’année suivante, en 1498, Mastro Giorgio demanda et obtint pour lui et ses frères Salimbene et Giovanni, le droit d’être citoyens de Gubbio pour 20 ans. Le privilège leur fut renouvelé à vie en 1519 par le Pape Léon X « en vertu de l’art de la faïence dans lequel il excelle sans pareil et pour le prestige apporté aux habitants, au Seigneur et à la ville de Gubbio ou la vente des vases issus de son atelier a apporté profit et droits de douane ». La première phase de l’activité artistique de Mastro Giorgio nous est inconnue, et l’œuvre la plus ancienne connue à ce jour, est un plat daté de 1515, décoré avec un lustrage rouge rubis et conservé au Victoria and Albert Muséum de Londres. D’autres pièces reconnues sont datées de 1518. Plus ou moins après la mort de Giacomo di Paoluccio survenue avant 1519, Giorgio, travaillant encore au nom des frères, commence à utiliser pour sigle ses propres initiales. En 1525, Giorgio s’associe à Giovanni Luca, peintre de Casteldurante, afin que celui-ci peigne les majoliques sur lesquels il appliquerait ensuite le « lustre ». En effet, la renommée de Mastro Giorgio, dépassant les limites de la ville, s’identifie avant tout à l’usage d’un lustre métallique rouge rubis, spécialité de l’atelier. Par le biais de ce lustre métallique rubis, Giorgio rend ainsi les majoliques plus raffinées, faisant alterner cette couleur avec des zones plus larges rehaussées d’un lustre métallique jaune évoquant le vieil or. On ignore à ce jour si, comme on le pensait jadis de manière unanime, Mastro Giorgio a apporté la technique du lustre métallique de Pavie, ou s’il l’a découverte à Gubbio de céramistes venus de Deruta. Quoi qu’il en soit, tout comme dans la ville voisine de Deruta, le lustre devait certainement être connu à Gubbio depuis la fin du xv e siècle. Sa grande habileté technique l’enrichit très vite et il devient l’un des habitants les plus respectés de Gubbio. En 1536, Giorgio se sépare des héritiers de ses frères (Salimbene est décédé avant 1523, Giovanni vers 1535) et à partir de cette date, l’activité est reprise par ses fils Vincenzo (Cencio) et Ubaldo, même s’il ne cesse le travail qu’aux alentours de 1541. En 1547, les deux frères s’associent pour exercer l’art dans l’atelier paternel. Cencio s’occupe de la fabrication de tous les types de vases, et Ubaldo, les peint et les fait peindre, notamment avec le beau rouge rubis de Mastro Giorgio. C’est pourquoi, on trouve souvent sur la même œuvre autant la signature de l’artiste qui peignait, que celle du maître qui apposait sur l’œuvre la couche de lustre. Cependant, on ne peut rigoureusement affirmer que Giorgio a inventé de nouvelles compositions décoratives. Les majoliques sorties de son atelier appartiennent presque toutes aux typologies en usage dans le duché d’Urbino, et bien sûr au premier chef à Gubbio notamment. Giorgio eut en outre pour habitude d’embaucher des décorateurs venus d’ailleurs, et qui travaillaient selon leurs traditions. Dans un premier temps, son atelier suit les dessins rayonnants en usage à Deruta; puis vers 1525 les schémas ornementaux de Faenza et les grotesques de Casteldurante, enfin vers 1530 les décors d’Urbino. Mais ces décors se distinguent avant tout par la légèreté et la finesse de leur pâte, et par la perfection et l’éclat de leur lustre métallique. Après 1530 prévalent les coupes avec des ornements en relief caractéristiques. Maître Giorgio meurt en 1555 et ses fils continuent quelque temps son œuvre, mais la belle époque des faïences lustrées reste malgré tout la première moitié du xvi e siècle. Le testament de Vincenzo porte la date de 1573, époque à laquelle la mode du lustre métallique disparaît lentement. Par la suite, les potiers de Gubbio, comme deux de Deruta, se contentèrent de copier des gravures. 49
La notoriété de Mastro Giorgio ne s’altéra cependant pas avec le temps, si bien qu’en 1911, un collectionneur anglais paya plus de 2500 livres sterling pour un plat daté et signé de 1522.
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rbino, Casteldurante, Pesaro et d’autres villes des Marches produisirent durant le xvi e siècle quelques-unes des plus belles majoliques de la Renaissance, se distinguant de Faenza et d’autres centres de productions italiens par un décor caractéristique et par la finesse des istoriati. Après avoir vu passer les Romains, les Grecs (à qui revient la fondation d’Ancône), les tribus gauloises des Sénons, les Sarrazins puis les Goths, la région des Marches, sans unité historique réelle, fut au Moyen Âge, le théâtre des affrontements des maisons seigneuriales: les Malatesta de Rimini et les Montefeltro d’Urbino, qui créèrent un duché resté longtemps la plus forte entité politique de la région, tandis qu’au xii e siècle se constituèrent de nombreuses communes libres. Plusieurs cités et seigneuries s’y affirment: Celle des Sforza à Pesaro (1445-1500 puis 1503-1512) avec une interruption due à la brève domination de César Borgia. La région constituée d’états aux orientations politiques divergentes, subit par ailleurs les luttes intestines entre les Gibelins et les Guelfes. A noter que les Marches firent partie des Etats pontificaux à partir de 1532, ce qui avait déjà été théoriquement le cas jusqu’à la fin de la domination franque. Lorsque le pape Eugène IV confère en 1443 aux Montefeltro le titre de ducs d’Urbino, ceux-ci régnaient de facto sur la ville et ses environs depuis la fin du xii e siècle. On citera, outre la capitale, les villes de Casteldurante, Gubbio, Cagli, ainsi que d’autres localités plus petites. Commence alors une période faste, avec l’arrivéeaupouvoiraumilieudusiècledeFedericoIIdaMontefeltro,quientrepritunecampagne de reconstruction de la ville. Les remparts furent reconstruits selon les dessins de Léonard de Vinci. Le nouveau palais ducal (tout comme le palais ducal de Gubbio) fut l’œuvre de LucianoLauranaetdeFrancescodiGiorgioMartini.Lepalaisdevintlenoyaudutissuurbain et sa conception fut le modèle des nouveaux édifices de style Renaissance érigés par les familles nobles de la cour ducale. Cette dernière accueillit alors les plus brillants artistes et érudits de l’époque, dont Piero della Francesca. À Frédéric succéda son fils Guidobaldo, dernier des Montefeltro. A la mort de Guidobaldo en 1508, Urbino passa aux mains de la famille Della Rovere qui entre temps avait annexé Pesaro. Mais c’était sans compter sur le pape Léon X Medici qui contraignit Francesco Maria Della Rovere à quitter son trône pour laisser sa place au neveu du Pape, Lorenzino. La mort de Léon X en 1521 permit à Francesco Maria de rentrer en possession de ses domaines pour y gouverner sereinement. Son successeur, Guidobaldo II, fit de Pesaro sa résidence favorite mais, sans héritier, il laissa son duché à l’Église à sa mort en 1631. Quatre grands centres ont joué dans l’orbite d’Urbino un rôle capital dans le domaine de la majolique: Pesaro, Casteldurante, Urbino et enfin Gubbio, déjà en Ombrie et qu’à ce titre nous avons étudié avant les marches.
L
a production de Pesaro, dont la notoriété dans le domaine de la majolique est relativement récente, fut réévalué depuis les années 1980 par le biais des découvertes archéologiques; en l’occurrence celles d’une production des xiii e et xiv e siècles, l’une des plus raffinées de l’Italie centrale et jusqu’alors ignorée car assimilée à celle de Faenza. Cette production Imprégnée des modèles décoratifs du gothique tardif et stimu50
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Coupe. Gubbio, atelier de Maître Giorgio Andreoli, vers 1530-1550 [det. cat. no. 46]
Coupe. Pesaro Nicolò da Fano (Peintre de la planète Vénus), 1543 [det. cat. no. 51]
lée par la présence de la cour des Sforza, semble particulièrement en pointe à la fin du xv e siècle et produit des pièces de grande qualité. On y trouve quantité de belle vaisselle décorée de motifs aussi élégants que variés, tels que l’œil de plume de paon, la feuille gothique recoquillée, ou des carreaux de pavement. Les potiers de Pesaro, réputés et aptes à répondre aux désirs de commanditaires issus des élites, reçoivent à cette époque plusieurs commandes majeures: Citons aux alentours de 1460-1470 le magnifique pavement du couvent San Paolo de Parme, puis le service de table destiné au roi de Hongrie Matthias Corvin et à sa femme Béatrice d’Aragon, peut-être à l’occasion de leur mariage en 1476. A ce stade, il convient d’évoquer l’amitié des Sforza, suzerains de Pesaro, et des Aragon de Naples. En effet, Alexandre Sforza combattit victorieusement en 1460 les angevins aux cotés de Ferdinand d’Aragon, et celui-ci concéda à son fils Costanzo le privilège d’ajouter le nom d’Aragon au sien. C’est ce même Costanzo, qui épousa en 1483 la propre nièce de Ferdinand, Camilla, fille du duc de Sessa. Ces rapports entre les cours de Naples et de Pesaro durent stimuler des influences réciproques dans le domaine de la majolique, ce qui peut expliquer l’analogie troublante, tant en matière de formes que de décors entre les albarelli de Pesaro et ceux de Naples à la fin du xv e siècle. Citons enfin l’ensemble de carreaux de pavement ornés d’armoiries et de devises destiné au marquis François II Gonzague et à son épouse Isabelle d’Este, fille du duc de Ferrare, pour le studiolo de Mantoue. Commandé à la fin du siècle à l’atelier des Fedeli, ce pavement illustrant des exploits familiaux est aujourd’hui malheureusement dispersé. La période confuse du début du xvi e siècle tout comme l’invasion des Borgia parait avoir ralenti pour un temps la production majolique de Pesaro. Il est en effet délicat d’identifier clairement les œuvres du premier tiers du siècle. Pesaro perd son rôle prépondérant au début du xvi e siècle au profit de Casteldurante et d’Urbino. Ces derniers ont une production précoce malheureusement mal connue et difficile à distinguer même si elle est attestée très tôt dans les archives. En revanche, la production prospère sous le règne de Guidobaldo II, duc d’Urbino de 1538 à 1574. Grand amateur de majoliques, le duc aimait à séjourner là avec sa cour. Les premiers istoriati marqués datent de la fin de la première moitié du siècle et leur style est très proche de celui d’Urbino. Sur un plan iconographique, plusieurs grands plats attribués à Pesaro, dont l’un porte la date fort précoce de 1498, illustrent la fortune artistique remarquable de l’« Ovidio Metamorphoseos vulgare », dans la traduction écrite au xiv e siècle par Giovanni de’ Bonsignori, et popularisée par l’édition illustrée publiée en 1497 à Venise. Le principal atelier de Pesaro à cette époque est celui de la famille Lanfranco dalle Gabicce (En l’occurrence Girolamo, qui travaillait avec son fils Giacomo) qui pour embellir certaines pièces avait certainement recours au lustre métallique. Girolamo nous est connu comme actif dès 1526. On sait qu’en 1539 il est propriétaire d’un atelier où il exécute un plat conservé au British Muséum et daté de 1544. Il meurt onze ans avant son fils, en 1578. Si des recherches récentes ont permis de définir la production de plusieurs autres peintres d’istoriati à Pesaro, ils restent néanmoins anonymes et ils ont dû recevoir des appellations de conven51
tion telles que: « Peintre de Zénobie », « Peintre de Sforza », « Peintre de la Planète Vénus », « Peintre d’Argus » etc. Dans la seconde moitié du siècle, cette seconde grande période de Pesaro dans le domaine de la majolique semble s’être lentement étiolée, en attendant des jours meilleurs qui ne devaient arriver qu’au xviii e siècle.
L
’actuelle Urbania, près d’Urbino, s’appelait à l’origine Castel delle Ripe mais, commune guelfe, elle fut détruite en 1277 par les gibelins d’Urbino. La nouvelle ville fut reconstruite grâce au gouverneur de la Romagne dont en son honneur elle prit le nom: Casteldurante. Par la suite la cité tomba sous la domination d’Urbino. C’est le pape Urbain VIII Barberini qui devait à partir de 1636 la rebaptiser à nouveau Urbania. Aucune étude approfondie n’existe malheureusement à ce jour sur Casteldurante, et les attributions demeurent assez aléatoires, basées avant tout sur des analogies stylistiques que ne viennent étayer aucunes fouilles approfondies. La conséquence en est qu’on attribue un peu trop généreusement à Casteldurante des majoliques produites très certainement ailleurs, et notamment Urbino et à Pesaro, puisque des typologies jadis couramment considérées comme caractéristiques de Casteldurante ont été découvertes dans les fouilles effectuées à Pesaro. Il n’est qu’à prendre pour exemple les coupes ornées de « Belle donne », genre apparu vers 1520, et ayant persisté au-delà de 1550. Ces dames (et de façon plus rare d’hommes ou de couples) sont peintes à mi buste, de face ou de profil. Elles sont entourées de banderoles portant le nom de la jeune femme accompagné du mot Bella. Exécutées généralement sur des coupes à pied bas, elles devaient être des gages d’amour, commandés par les jeunes gens de la noblesse. Ces représentations n’étaient que rarement des portraits à proprement parler, les artisans disposant de modèles à partir desquels ils changeaient simplement le nom et quelques ornements. On a longtemps considéré ces portraits en buste de femmes comme une spécialité des artistes de Casteldurante, alors qu’ils devaient probablement être produits dans tout le duché y compris à Gubbio, par Giorgio Andreoli, dont nous avons eu l’occasion de parler. Il employait des peintres venus d’Urbino et de Casteldurante, avant d’enrichir leurs œuvres de lustre métallique. Seuls quelques tessons de fouilles attestent réellement la présence de « Belle » à Casteldurante mais sans plus. En fait, c’est l’appartenance erronée de Nicola da Urbino à Casteldurante qui avait fait attribuer nombre de « Belle » à cette ville, car on les croyait peintes par lui. La conséquence en est qu’il faut toujours prendre en considération les autres centres, et notamment Urbino et Pesaro, puisque des typologies jadis couramment considérées comme caractéristiques de Casteldurante ont été découvertes lors de fouilles effectuées dans ces dernières villes. Autre exemple de l’attribution jadis un peu trop généreuse à Casteldurante de majoliques (produites certainement ailleurs), on découvre sur des tessons de fouilles trouvés aussi bien à Pesaro qu’à Casteldurante des putti similaires, laissant imaginer que ce décor se rencontrait identique dans différents centres de la région. Quoi qu’il en soit, il y avait à l’époque dans la ville plus de 40 fours pour satisfaire les commandes de bien des cours d’Europe, et on a recensé pour alors plus de 150 spécialistes modeleurs et décorateurs tels que, Simone da Colonello, les Dolci, les Fontana etc. Dès 1510-1520, les peintres de Casteldurante rivalisaient avec ceux de Faenza dans l’exécution de somptueux services destinés aux princes. 52
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Plat. Casteldurante (Urbania) ou Urbino, 1572 [det. cat. no. 60]
Cet essor de très haut niveau du point de vue de la qualité était nourri par la leçon de Raphaël et stimulé par les peintres, les poètes et les humanistes de la cour ducale. Casteldurante est aussi célèbre dans l’histoire de la majolique pour avoir été la ville natale de l’unique théoricien de la faïence italienne de la Renaissance, auteur du Traité des « Trois livres de l’art du potier » écrit vers 1548: Cipriano Piccolpasso, dans ce traité dont nous avons déjà eu l’occasion de parler et actuellement conservé au Victoria and Albert museum de Londres, énonce les secrets et les règles de la fabrication de la faïence. Dans l’édition de 1568 de la « Vie de Battista Franco », Vasari rapporte que le duc d’Urbino Guidobaldo II, insatisfait des ouvrages qu’il avait demandé à Battista Franco pour la cathédrale d’Urbino, lui proposa de se « racheter » en donnant aux ateliers de majoliques de Casteldurante une série de dessins. Mais citons Vasari lui-même: « Effectivement, Battista n’avait pas son pareil pour faire un bon dessin et, dans ce domaine, était un artiste de grande valeur. Le duc s’en rendit compte et pensa que ces dessins donneraient d’excellents résultats s’ils étaient utilisés par les artisans qui fabriquaient de merveilleux vases de terre à Castel Durante et qui s’étaient déjà servi de gravures de Raphaël et d’autres bons artistes; il en fit faire à Battista une quantité; peints sur cette excellente terre, la meilleure d’Italie, ils donnèrent de merveilleux résultats. On fabriqua tant de ces vases, et de tant de sortes, qu’ils auraient pu suffire à orner la crédence l’un roi; les peintures qui les décoraient n’auraient pas été plus belles peintes à l’huile par de très bons maîtres ». Ce texte précieux a permis d’attribuer à Battista Franco un certain nombre de dessins réalisés spécialement pour la majolique. Guidobaldo offrira d’ailleurs à de grands personnages des services exécutés à partir de ces dessins. Vasari relate également que le duc avait envoyé une « double crédence à l’empereur Charles Quint, et une à son beau-frère, le cardinal Farnèse ». A la même époque, plusieurs maîtres potiers quittent Casteldurante pour aller diffuser leur art en Italie (rappelons également qu’à Venise le décor istoriato fut importé notamment par les artisans de Casteldurante et d’Urbino) et en Europe du Nord. Vers 1510 notamment, le potier Guido Andries dit « Guido di Savino », s’était installé à Anvers où il forma des disciples, qui gagnèrent les Pays-Bas du Nord et du Sud et l’Angleterre. Malheureusement, on ne conserve que de rares exemples qui puissent être rendus avec certitude à Casteldurante; dont une coupe de la collection Lehman du Metropolitan Museum of Art de New York, datée de 1508, portant l’inscription « Casteldurat » [sic] et signée de Zoan Maria. On considère parfois que ce Zoan Maria en est l’auteur, mais peut être l’a-t-il seulement signée en tant que propriétaire de l’atelier, preuve à nouveau de la fragilité des connaissances actuelles sur le centre de production de Casteldurante. De manière tout aussi aléatoire, on suppose qu’il pourrait ne faire qu’un avec Giovanmaria di Mariano, connu plus tard sous le nom de Viviani auquel on attribue au moins deux coupes. Autre exemple de productions propres à être rendues sans trop de doute à Casteldurante: deux vases de pharmacie à grotesques (l’un daté de 1519) attribués à Sebastiano di Marforio et conservés à Londres. Très proche chromatiquement et stylistiquement, de Sebastiano di Marforio et actif autour de 1524 à 1526, on citera celui qu’on appelle généralement le « Peintre de Casteldurante » dans la mesure où son nom ne nous est 53
pas parvenu. Ce remarquable peintre d’istoriati tirait ses modèles de gravures, essentiellement de Raphaël, via Marc-Antoine Raimondi, le plus habile des graveurs à reproduire les dessins du maître. Si le « Peintre de Casteldurante » transpose ces modèles avec une certaine raideur, rappelons que le potier, lorsqu’il utilise des gravures, en tire des poncifs, dessins dont les contours sont perforés et que l’on pose sur l’émail encore cru. Lorsque la poudre de carbone est appliquée au tampon, elle laisse sur cet émail, au niveau des trous, une trace qui guidera le pinceau. Détail précieux, le « Peintre de Casteldurante » est le seul à inscrire en jaune au revers de ses majoliques la date et le lieu d’exécution. Au-delà de ces exemples, de manière plus générale, l’istoriato a dû connaitre une grande popularité à Casteldurante. Désormais, contrairement à ce qui prévalait jadis, les spécialistes s’accordent à penser que l’istoriato est en fait apparu au même moment en plusieurs lieux d’Italie centrale; mais son développement s’est par la suite concentré dans quelques centres bien précis, dont bien sur Urbino mais aussi Casteldurante. Rappelons d’ailleurs que le terme istoriato fut inventé par le durantin Picolpasso dans son traité déjà cité, et a peut-être été choisi par référence aux discussions de Léon Battista Alberti sur la peinture d’histoire. Ces objets raffinés ne faisaient certainement pas partie de la production quotidienne des ateliers de poterie, et les peintres les plus doués devaient travailler « à la pièce », se déplaçant d’un atelier à l’autre. Cette prolifération sur la majolique, au tournant du xvi e siècle, de la figure humaine et de sujets proprement narratifs, liés à des sources littéraires et des modèles graphiques qui les ont inspirés (la diffusion massive du livre et de l’image imprimée et le développement de l’istoriato sont en parfaite simultanéité), suscite de grandes interrogations sur la place que tint la majolique au sein de la culture humaniste en Italie. Le rôle joué après le premier quart du xvi e siècle par Casteldurante dans la production et la diffusion de l’istoriato dans la région dut être considérable, et dut au premier chef influencer Urbino. Nombre d’artistes ont dû apprendre à Casteldurante l’art de peindre les istoriati. De cette ville étaient en fait originaires le plus célèbre des chefs d’ateliers d’Urbino: Guido Fontana mais aussi le peintre Francesco Durantino et Sforza di Marcantonio de Julianis qui, bien qu’il ait travaillait à Urbino et à Pesaro venait lui aussi de Casteldurante. Mais si l’on veut rétablir l’équilibre, force est d’avouer que la réputation de Casteldurante dans l’istoriato repose hélas aussi partiellement sur une terrible erreur, à savoir l’assimilation du célèbre Nicola da Urbino, peut être le meilleur des maîtres de l’istoriato au père de Guido Durantino-Fontana: Nicole Pellipario. Une telle assimilation révélerait en fait des incohérences dans les déplacements de Pellipario et, désormais, les chercheurs ont démontré cette erreur d’identification. En fait, le père de Guido, Nicolo Pellipario, était sans doute marchand de fourrures et n’avait rien à voir avec Nicola da Urbino. Force est donc de retirer à la gloire de Casteldurante ce grand artiste... Néanmoins, même si Nicola da Urbino doit être retiré du panthéon des artistes de Casteldurante, il faut reconnaître qu’aux alentours de 1450, la production durantine, connaît un développement extraordinaire, avec une production destinée en grande partie à l’exportation. Parmi nombre de modeleurs et de décorateurs exceptionnels, on citera Simone da Colonello et Ludovico Picchi, mais aussi le peintre d’istoriati qu’on appelle 54
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Coupe. Casteldurante, vers 1510-1520 [det. cat. no. 61]
par convention, en raison du nom inscrit au revers d’une coupe conservée à Arezzo, « Andréa da Negroponte », même s’il pourrait s’agir seulement du nom du commanditaire. Les œuvres attribuées à Andréa da Negroponte sont nombreuses et datables de 1550 à 1565. Des similitudes stylistiques avec la crespina, coupe signée Andrea da Negroponte conservée à Arezzo, et un plat aujourd’hui au Victoria and Albert Museum montrent une technique rapide et puissante, un goût pour la disposition horizontale par le traitement du ciel et de l’eau en lignes parallèles, pour des rochers accumulés encadrant souvent la scène, et pour un positionnement des personnages en frise. La comparaison du revers des coupes est également significative, avec une calligraphie identique, et des filets caractéristiques entourant les godrons. Quoi qu’il en soit, le dit « Andréa da Negroponte » est le seul artiste majeur dont la présence au milieu du xv e siècle à Casteldurante soit indubitable. Cette production de Casteldurante, destinée comme nous l’avons souligné en grande partie à l’exportation, se composait d’albarelli et de vases variés à usage pharmaceutique, très colorés, historiés ou enrichis de décors de grotesques inscrits dans des compartiments a quartieri. Notons que le répertoire décoratif classique à Casteldurante est composé de trophées peints en brun sur fond azur incluant des accessoires martiaux et des blasons. Ces décors sont dans un premier temps très minutieux, puis à partir de 1450 deviennent plus rapidement brossés. Ces trophées courant sur l’aile des assiettes sont animés par des rubans ondulants, tandis que le centre de l’assiette est fréquemment décoré de putti. Les ateliers de Castel-Durante restèrent en activité jusqu’à assez tard, mais à partir du milieu du xvi e siècle, leurs œuvres ne se distinguent plus guère de celles d’Urbino. En définitive, au regard de ce que nous venons d’évoquer, il apparaît donc difficile aujourd’hui de définir avec certitude les « contours » de la production céramique de Casteldurante, les recherches ne permettent pas en effet de tirer des conclusions suffisamment claires.
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ous avons vu qu’annexé en 1513 au duché d’Urbino, Pesaro avait perdu son rôle prépondérant au début du xvi e siècle au profit de Casteldurante et d’Urbino. D’ailleurs, en ce qui concerne cette dernière, les premiers ateliers de potiers n’apparaissent qu’aux environs de 1500, fondés en majeure partie par les artisans venus de Faenza ou de Casteldurante. La commande passée en mai 1501 au potier Francesco Garducci d’un ensemble de 91 pièces pour le cardinal Ludovico Podocatario et la célèbre coupe aux armes du pape Jules II Della Rovere datée 1508 (Metropolitan Museum of Art, New York) témoignent du succès précoce des potiers d’Urbino au service des grands. C’est à partir des années 1520 (grâce sans doute au retour de Francesco Maria Della Rovere et à la présence dans la ville d’une cour érudite) que leur production prend son essor et connaît un succès considérable. A ce moment, l’industrie croît si rapidement que dès le milieu du xvi e siècle, l’influence d’Urbino s’imposait à toute l’Italie. Pratiquant tous les genres, les ateliers les plus prestigieux se spécialisent dans l’istoriato, qui devait faire la gloire d’Urbino. Tentant de rivaliser avec la peinture contemporaine et subordonnant souvent la forme au décor, les artistes utilisent alors une riche palette où prévaut le jaune-orangé. En remplaçant les compositions originales par la copie des gravures les plus diffusées, en particulier celles de Raimondi et de l’école de Raphaël, mais aussi les illustrations de tous les ouvrages à leur portée, le style s’unifie, faisant de la céramique un reflet transposé de l’art des grands maîtres de l’époque. 55
Les grandes familles commandent alors d’amples services de majoliques, mais davantage pour la contemplation que pour l’usage. La passion que portait aux arts la marquise de Mantoue, Isabelle d’Este, la « prima donna del mondo », et en tout cas la plus célèbre des femmes mécènes de la Renaissance italienne, ne pouvait négliger la majolique. Cependant on ignore la genèse de la credenza dont sa fille Eléonore, duchesse d’Urbino, lui annonce l’envoi dans une lettre datée du 15 novembre 1524. La présence des armes, devise et emblèmes d’Isabelle unifie les pièces très différentes et à la thématique variée, constituant l’exceptionnel service d’apparat, service qui comptait certainement davantage de pièces que les vingt-trois assiettes et plats parvenus jusqu’à nous. De ce service, dont la diversité du programme témoigne de la culture des commanditaires de la Renaissance, certains pensent qu’il était en totalité l’œuvre de Nicola da Urbino... A San Paolo, le grand quartier des ateliers de céramique au sud du palais ducal d’Urbino, certains des maîtres parmi les plus fameux étaient natifs de Casteldurante (C’est le cas du « Durantino », de son vrai nom Guido di Nicolo Schippe). En revanche, nombre d’autres étaient bien d’Urbino. On citera notamment Guido di Merlino, mentionné en 1523 en tant que patron d’un atelier dans une liste de potiers devant exécuter pour le duc d’Urbino des carreaux de céramique. Nicola di Gabriele Sbraghe est également originaire d’Urbino, et sa première mention dansdesdocumentsdatede 1520, alors qu’ilest déjàmaître et patrond’unimportantatelier. On l’a longtemps confondu avec Nicola Pellipario Schippe, de Casteldurante, le père de Guido, mais cette erreur a été corrigée par les chercheurs en 1985. Par la suite, il apparaît dans d’autres documents comme jouissant visiblement d’une certaine célébrité, justifiée par la qualité exceptionnelle de sa peinture. L’œuvre de peintre de Nicola est en fait identifiable grâce à cinq pièces marquées sur le revers, de son nom en toutes lettres ou sous la forme d’un monogramme: une coupe à l’Ermitage (premier repère sûr daté de 1521), un fragment de plat au Louvre, un grand plat au Bargello (qu’il exécute et signe en 1528 dans l’atelier de Guido Durantino), un grand plat dans l’église Santo Stefano à Novellara, dont l’inscription démontre que Nicola n’était pas seulement propriétaire d’un atelier de poterie mais également peintre, et enfin une assiette au British Muséum. C’est sur la base de ces pièces que le développement et la cohérence stylistique de l’œuvre de Nicola sont fondés. Peintre raffiné, Nicola s’inspire dans des couleurs pastel de gravures qu’il réinterprète avec lyrisme mais d’une manière classicisante prouvant qu’il avait correctement assimilé l’art de Raphaël. Il montre une grande maitrise du dessin et excelle dans la perspective de ses paysages arcadiens remarquablement profonds et habités de personnages aux gestes fluides. A Nicola revint en fait le mérite de fonder la notoriété du style classique de l’istoriato d’Urbino. Comme nous l’avons évoqué un peu plus haut, on attribue à Nicola de grands services dont aucun n’est hélas daté ou signé. C’est le cas du magnifique service aux tons azurés du musée Correr de Venise (Le plus grand service de table de majolique du xvi e siècle à être resté réuni: non moins dix-sept assiettes et coupes), peint selon les spécialistes vers 1520-1523. En 1524, Nicola se voit confier une commande prestigieuse: La credenza que la duchesse Eléonore veut offrir à sa mère, Isabelle d’Este. Vient ensuite, parmi d’autres commandes, le service aux armes des Calini de Brescia. Vers 1533, Nicola da Urbino est encore suffisamment apprécié pour recevoir une commande du fils d’Isabelle d’Este, le duc Federico de Mantoue. Ce service porte le blason d’alliance de Federico et de Marguerite Paléologue mais, dans ce travail empreint de moins de lyrisme, Nicola da Urbino s’est sans doute fait aider en grande 56
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Plat. Urbino, atelier de Nicola de Urbino (Francesco Xanto Avelli?), vers 1530 [det. cat. no. 64]
Coup. Urbino, Peintre de l’Epsilon-phi (Francesco Xanto Avelli da Rovigo), vers 1528-1530 [det. cat. no. 66]
partie par des assistants Après la mort de Nicola au cours de l’hiver 1537-1538, sa veuve Girolama loue l’atelier et le matériel de son mari à Vincenzo Andreoli, fils de Maestro Giorgio de Gubbio. Dans le domaine de la majolique, un autre artiste majeur habitait Urbino à cette époque. Il s’agit de Guido Durantino, autrement dit « Guido de Castel Durante », mais on le trouve en 1553 portant le nom de Fontana. Ayant épousé une fille d’Urbino, il est établi dans la ville comme potier dès 1519. Fils d’un peaussier, c’est peu après la mort de son père, aux alentours de 1515, que Guido s’était probablement établi à Urbino, où son oncle Simone avait un négoce de peaux. Guido devait effectuer toute sa carrière dans cette ville, carrière qui se révéla fort longue puisqu’il mourut en 1576. Guido avait trois
fils, Nicolò Fontana (mort en 1565), Camillo Fontana (mort en 1589), et en fin Orazio, mais ce dernier est le seul de l’atelier paternel, entre 1541 et 1544, à parfois signer ses istoriati d’un monogramme enfermé dans un rond. Ainsi secondé, Guido Durantino est une figure centrale de l’histoire de la majolique d’Urbino. Cependant il pourrait ne pas avoir été peintre, car, contrairement à Nicola da Urbino, il n’a pas été possible d’établir si Guido était autre chose que fabricant de vases. En effet, le propriétaire d’un atelier pouvait être lui-même peintre en majolique, où il pouvait également confier l’œuvre à peindre à des employés. Mais on sait en revanche que Guido a bien été chef d’entreprise et dirigé un atelier qui produisit dès les années 1520 et durant la première moitié du-siècle des istoriati de très haute qualité. L’atelier était alors un des plus recherchés dans sa spécialité, exécutant de beaux services pour l’exportation et notamment pour la France, destinés à des personnages aussi prestigieux que le cardinal Duprat, Chancelier de France, et Légat du Pape, ou le connétable Anne de Montmorency. Le propriétaire d’un atelier pouvait confier des œuvres à décorer à des peintres extérieurs, appelés ponctuellement à effectuer des tâches particulières, et il est évident que Guido devait embaucher du personnel suivant les fluctuations des commandes. Malheureusement, il est impossible d’identifier les artistes ayant œuvré pour lui, même si les œuvres portent au revers le nom de l’atelier. Un de ses décorateur particulièrement doué avait adopté avec intelligence la manière de rendre paysages et architectures de Nicola da Urbino. Rappelons que Guido était voisin de ce dernier et parfois en affaires avec lui. Devenu un homme d’affaires prospère, Guido Durantino était en 1530 signataire d’un 57
accord entre les propriétaires d’atelier importants pour s’opposer aux réclamations salariales d’un groupe d’artisans. D’autre part, dans les années 1540, il était devenu prieur d’une confrérie de la ville.
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Né à Rovigo en Vénétie à la fin des années 1480 et contemporain de Nicola da Urbino et de Guido Durantino, Xanto Avelli est l’un des plus illustres artistes de la majolique italienne. De son vrai nom Santi ou Santini, il s’établit à Urbino vers 1530, année où il commença à écrire le nom de cette ville sur ses œuvres lustrées (« in Urbino »). Cependant, durant les années précédentes, il pouvait déjà se trouver dans le duché, notamment à Gubbio dans l’atelier de Giorgio Andreoli, comme des indices le laissent supposer dans ses œuvres. Avant les années 1530, il n’utilisait pas encore son nom en entier, ce qui a par le passé favorisé des attributions incertaines. Un conflit commercial pourrait en fait avoir incité l’artiste à signer ses assiettes avec son nom complet. Selon les documents d’archives, Xanto décorateur indépendant et passant d’un atelier à un autre (dont par exemple celui de Francesco di Silvano) fit partie avec d’autres salariés des contestataires qui, comme nous venons de le voir, réclamaient des salaires plus élevés. En réponse, les propriétaires d’ateliers résistèrent aux demandes des salariés et Xanto pourrait avoir tenté de garder une plus grande maîtrise sur ses œuvres en les signant. On ignore si par la suite Xanto Avelli eut jamais son propre atelier mais, grâce à cette pratique de signer, on connaît plus d’œuvres signées, datées et inscrites de Xanto Avelli que de n’importe quel autre peintre en majoliques. Pour l’istoriato, utilisant très tôt un style et une palette très proches de ceux des artistes d’Urbino et de Casteldurante et ayant souvent recours à l’usage du lustre, il a privilégié des scènes de la littérature classique et contemporaine. Il les adaptait souvent d’une manière originale pour les plier à ses compositions. Mais il a aussi dépeint des événements contemporains, tels que le Sac de Rome ou sur une assiette peinte en 1541, un exploit de Charles Quint. Xanto semble avoir été un homme accompli, aux talents multiples et plus érudit que la plupart de ses pairs. Outre ses majoliques, Xanto a écrit une série de sonnets à la gloire du Duc d’Urbino, Francesco Maria Della Rovere, sous les auspices duquel sa carrière avait pu s’affirmer. Malheureusement, il devient après 1535 impossible de suivre la carrière de Xanto et de lui attribuer d’autres œuvres. Le dernier témoignage connu sur lui date de 1542. Autour d’Avelli gravita tout un groupe de peintres disciples s’inspirant des mêmes gravures, imitant sa manière et ayant eux aussi souvent recours à l’usage du lustre. Durant la seconde moitié du xvi e siècle, alors que des figures comme Xanto Avelli ont disparu mais que d’autres maîtres tels que Guido Durantino travaillent encore, la production de majolique continue à Urbino. Les artisans réalisent encore de beaux services en istoriato, style alors dominant. Au tournant des années quarante, c’est désormais l’atelier de Guido di Merlino qui parait avoir été le plus prospère, avec de nombreux peintres ne signant pas mais notant au revers le nom de l’atelier. Un nom demeure cependant, celui du très doué Francesco Durantino réalisant des compositions « atmosphériques », affranchies des contraintes linéaires et influencées par le style de Dosso Dossi à la Villa Impériale de Pesaro. A noter qu’à partir de 1565, Orazio Fontana dont nous avons déjà eu l’occasion de parler au travers de son père, se mit à son compte. 58
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Coupe. Urbino, Francesco Xanto Avelli, 1541 [det. cat. no. 69]
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C’est vers 1560 que, souvent associées aux istoriati, les grotesques sur fond blanc commencent à apparaitre dans la majolique d’Urbino. Outre les services à décor « a istoriato », Urbino est également alors le centre de production de grands services ornés de grotesques sur toute leur surface. Véritable phénomène artistique, le genre décoratif des grotesques était, comme nous l’avons vu, repris des compositions de Raphaël pour les Loges du Vatican, compositions elles-mêmes inspirées des fresques antiques découvertes au xv e siècle à Rome dans la « Maison dorée » de Néron. Largement diffusé dans les arts décoratifs, ce décor est utilisé dans les ateliers d’Urbino à partir du début des années 1560, et particulièrement dans le dernier grand atelier d’Urbino, celui de la famille Patanazzi. Actifs à Urbino entre 1570 et 1620, Les Patanazzi ont été la dernière des grandes familles d’artisans italiens impliquées dans la création et le développement d’ateliers de majolique au xvi e siècle. Très actifs, ils ont d’abord continué le décor « a istoriato » puis ont privilégié le style « grotesque ». Les formes produites par la fabrique des Patanazzi sont souvent baroques, enrichies de moulures épaisses, de masques, de parties de corps hybrides. Les Patanazzi et les Fontana étaient en fait parents et, dans la seconde moitié du xvi e siècle, ils avaient à Urbino le monopole de la céramique. Ils recouraient à cette date aux mêmes sources iconographiques et aux mêmes formes élaborées et enrichies d’applications. Ils utilisaient aussi le même type de décor à médaillons historiés ornés de grotesques sur fond blanc. Les compositions, purement ornementale, sont souvent constituées d’une combinaison de figures chimériques, d’animaux fabuleux, de rinceaux et de termes harmonieusement répartis, exubérance qui ne renonce néanmoins jamais à la symétrie de part et d’autre d’un motif central. Par une inépuisable variété de détails et une abondance de motifs, l’artiste majolique témoigne alors d’une évidente capacité d’invention. Les Patanazzi succédèrent d’ailleurs aux Fontana dans la commande des vases de pharmacie du couvent de Lorette, et les pièces les plus tardives du service doivent leur être attribuées. C’est cependant avec les Patanazzi que s’achève au début du xvii e siècle, la belle histoire de l’istoriato d’Urbino.
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Plat. Urbino, vers 1560-1570 [det. cat. no. 73]
ituée au pied du massif montagneux du Grand Sasso, Castelli d’Abruzzo rivalisa au xvi e siècle avec la production des meilleurs centres de majoliques italiennes. La ville fut fondée à l’époque carolingienne, dans la phase de fortification des centres urbains qui caractérise cette époque. L’installation des moines bénédictins dans l’Abbaye de San Salvatore remonte aux alentours de l’An Mil. Castelli fut d’abord le fief des comtes de Pagliara puis à partir de 1340 de la famille Orsini. En 1526, par volonté de l’Empereur Charles Quint, Castelli passa dans le patrimoine des marquis de Mendoza qui l’administrèrent longtemps. Quant à la production la plus ancienne de Castelli, et ce au moins jusqu’au xv e siècle, seule la découverte de matériel de fouilles nous renseigne sur elle. Les recherches en archives, secondées par les études typo-chronologiques et par les analyses géochimiques des tessons provenant des fouilles d’ateliers et de dépotoirs de potiers permettront à l’avenir de dresser une meilleure synthèse des productions de la ville, entre le xv e et le xvii e siècle. On espère que les résultats des fouilles feront mieux entrevoir l’organisation des ateliers, les structures de production et les évolutions techniques qui ont pu se manifester au sein de ces ateliers. Datés par les sources textuelles et les données archéométriques effectuées sur les restes de fours, les témoignages archéo61
logiques fourniront peut être des instantanés de production incontestables, qui remettront en perspective l’identification des ateliers de la ville dont l’historiographie est encore controversée. Par le passé, on pensait par exemple que la période faste de la majolique de Castelli avait commencé au xvii e siècle avec les typologies « a compendiario » et « a istoriati » mais, depuis, toute une production insoupçonnée et de très haute valeur a été rendue à ce centre. Les archives avaient déjà révélé la grande prospérité au xvi e siècle des Pompei, puissante famille locale de fabricants de majoliques, mais ce n’est que récemment qu’un type précis de céramique put être rendu à l’un de ses membres: Orazio. Il s’agit d’un type de vases de pharmacie appelé « Orsini-Colonna » et que l’on attribuait par le passé à Faenza ou à la Toscane. En fait, des fouilles effectuées dans les années 1980 à Castelli ont été publiées et étudiées lors d’un colloque, et ont permis de prouver la parenté stylistique des tessons de fouilles avec le plafond de l’Eglise San Donato de Castelli. Cette église fut d’ailleurs définie par Carlo Levi comme « la Chapelle Sixtine de la majolique italienne » ! Le premier plafond de l’église, aujourd’hui conservé en partie au musée municipal de la ville, avait été remplacé au xvii e siècle par un nouveau. Le premier plafond, daté de 1551, porte le monogramme « oro », qui fut interprété comme la signature d’Orazio Pompéi (1516-1596), peintre dans l’atelier éponyme. D’autre part, depuis l’époque de l’historien d’art Fortnum, les spécialistes avaient donc désigné cet ensemble de pièces d’apothicairerie (toutes de forme fermée, sauf un plat et une coupe) sous l’appellation Orsini Colonna en se basant sur un vase et sur une médaille conservés au British Museum. Sur une face de cette dernière, un décor représente l’ours des Orsini tenant dans ses pattes la colonne des Colonna, et symbolise l’alliance des deux familles romaines rivales. Selon l’historien d’art Gaetano Ballardini, les emblèmes de ces deux familles rivales de Rome pourraient correspondre à une commande des Orsini sans que l’on puisse définir de façon certaine si cette production commémorait une quelconque alliance des deux familles. Néanmoins, cette alliance fut bien matérialisée en 1552 par le mariage d’un Colonna avec une Orsini. Si l’on suit l’analyse stylistique, ces majoliques Orsini-Colonna durent être réalisées à Castelli vers le milieu du siècle, donc bien à l’époque d’Orazio Pompei. Elles se caractérisent par un style aux ornements d’une grande variété, basé sur des formes originales (notamment des vases à anses). On note d’autre part dans ces majoliques Orsini-Colonna de puissants décors maniéristes (Anses torsadées, becs en forme de dragon) caractérisés par une recherche du grotesque et un goût prononcé pour l’ironie dans la réalisation de ces expressions outrées. Ces décors comprennent des bustes, mais aussi des personnages en pied aux vêtements évoquant notamment ceux des portraits de Bronzino, des animaux, des armoiries et diverses scènes mythologiques, historiques ou allégoriques. Un cartouche porte généralement dans la partie inférieure le nom de la préparation médicinale. Le succès remporté par la typologie Orsini-Colonna entraîna une production assez abondante dans laquelle on peut distinguer des qualités variables de décor. A base de bleu, de vert et d’orangé, les couleurs sont vibrantes et l’émail est resplendissant. Même si par le passé la chronologie de la typologie Orsini-Colonna a pu être sujette à caution, il est admis aujourd’hui que cette dernière appartient à une seule période de l’atelier des 62
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Bouteille. Castelli d’Abruzzo, atelier d’Orazio Pompei, vers 1550-1560 [det. cat. no. 78]
Assiette. Castelli d’Abruzzo, probablement Berardino Gentili il Vecchio dans l’atelier de de Francesco Grue, années 1670-1680 [det. cat. no. 81]
Pompei. Si une partie de la décoration peut paraître parfois un peu démodée, c’est qu’il faut certainement y voir la participation d’assistants au style très individualisé. Après la typologie Orsini-Colonna, la majolique de Castelli s’inspira de Faenza en adoptant les décors sur fond bleu intense « a compendiario ». Ces décors parfois rehaussés de jaune apparaissent aussi bien dans le pavement de l’église Santa Maria della Spina que dans le service réalisé pour le cardinal Farnèse. Les pièces réalisées à Castelli étaient d’ailleurs très recherchées par les grandes familles non seulement italiennes mais aussi Européennes, qui commandaient alors de vastes ensembles de vaisselles destinés à célébrer des événements privés ou politiques importants. Les ateliers de Castelli ont produit alors des majoliques décorées sur toute leur surface de scènes istoriato élaborées souvent d’après des textes littéraires, mais aussi décorées de scènes bibliques, de héros de l’histoire romaine, ou encore de portraits d’hommes et de femmes. Au xvii e siècle, la majolique de Castelli continue d’utiliser sur un fond blanc le décor « a compendiario » associé à des décors de groupes de bergers ou d’animaux entourés d’élégantes guirlandes. C’est justement à cette époque qu’est installé le second plafond de San Donato, que nous avons déjà évoqué. Avec Francesco Grue (1618-1673), on assiste à un renouvellement complet du décor avec l’istoriato baroque. Francesco Grue se fit une spécialité des sujets militaires: Triomphes et autres combats encadrés de bordures à trophées. Francesco goûtait en effet particulièrement les thèmes mythologiques ou héroïques alors diffusés par la gravure, comme ceux traités par Annibal Carrache dans les fresques de la galerie Farnèse. Le répertoire à trophée d’armes est donc typique de la production de cet artisan, fondateur d’une dynastie de majolicaires qui allait devenir célèbre au-delà de Castelli, à Naples et en Campanie. L’iconographie de ses plats consiste donc en scènes mythologiques et religieuses le plus souvent encadrées de rinceaux ou de trophées généralement rehaussés d’or. Sa palette est variée et ses compositions sont riches et touffues, avec souvent de nombreux personnages présentés en gros plan. L’un des chefs-d’œuvre de Francesco Grue est le retable qu’il réalisa en 1647 à Castelli, pour l’église de San Donato. Contrairement à ce qui se passait dans le reste de l’Italie, la production de poterie de Castelli continua de croître au cours des siècles suivants, tant en qualité qu’en quantité grâce au talent des autres membres de la famille Grue. Au xviii e siècle, un nouveau style de peinture se développa qui utilisait une gamme de couleurs pâles, proche de l’aquarelle et qui contrastait avec les majoliques richement colorées de la période Renaissance. La variété des sujets représentés devait alors être enrichie par des scènes de la vie quotidienne, des paysages animés et harmonieux et des ruines à l’antique.
A
lphonse V d’Aragon profita des querelles familiales des Anjou pour s’emparer de Naples en 1442 et se proclamer Roi des Deux Siciles. Ses successeurs immédiats entreprirent d’importants travaux et soutinrent les arts et les sciences. Naples devint alors la capitale d’un nouvel empire maritime étendu de Barcelone à Palerme. Elle se montra accueillante aux artistes et aux humanistes de la Renaissance italienne, qui devait inspirer par son intermédiaire la première Renaissance française, à 63
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art铆culo en cur s o 路 au tor
Albarello. Naples, Maître de la Chapelle Brancaccio, fin du xve – début du xvie siècle [det. cat. no. 83]
la suite de l’occupation de la ville par les troupes de Charles VIII (1495) et de Louis XII (1501-1503). Se multiplia alors la production des fameux « riggiole », ces carreaux napolitains représentant un des secteurs les plus riche et fascinant de la création majolique de Naples. Ces « riggiole » qui venaient concurrencer l’importation de leurs rivaux espagnols, les azulejos. Ce sont en fait les Arabes qui avaient apporté en Europe cet art de l’Orient. Le premier usage de carreaux émaillés avait été constitué d’assemblages géométriques de morceaux de carreaux découpés, technique dont on peut encore voir de magnifiques exemples toujours en place à l’Alhambra de Grenade. Les principaux centres de production espagnols concurrençant Naples étaient alors essentiellement Malaga, Séville, Valence (Manises et Paterna), et Talavera de la Reina. L’un des premiers pavements probablement exécuté par des artisans napolitains fut celui de la chapelle des Caracciolo del Sole, en l’église San Giovanni a Carbonara. La construction de l’église remonte au xiv e siècle: Aux alentours de 1340, le riche patricien napolitain Gualtiero Galeota avait fait don à l’ordre des Augustins de terres hors les murs de la cité, pour y construire un complexe religieux. Au début du xv e siècle, le roi Ladislas souhaita que l’église accueille sa sépulture. C’est finalement sa sœur, la nouvelle reine Jeanne qui devait mener à bien son dessein, en faisant construire un tombeau monumental dans l’abside de l’église. L’amant de la reine Jeanne, Sergianni Caracciolo, décida en 1427 d’être lui aussi enterré dans l’église. Il souhaita faire construire une nouvelle chapelle. Longtemps considéré comme d’origine toscane, le pavement de la chapelle aux coloris bleutés dénote en fait nettement l’influence des majoliques hispanomauresques. On situe ce pavement après 1440, date à laquelle le fils de Sergianni Caracciolo réalisa le souhait de son père, mort assassiné. D’autres pavements napolitains un peu plus tardifs révèlent dans des coloris très vifs le répertoire gothique finissant, tel qu’il était alors diffusé par les centres de production de majolique du centre et du nord de l’Italie. On citera le pavement de la chapelle Brancaccio de l’église Sant’Angelo a Nilo, chapelle tenant son nom du cardinal qui la fit construire à la fin du xiv e siècle. Le tombeau de ce dernier, achevé en 1427 par les florentins Michelozzo et Donatello, est d’ailleurs l’une des premières œuvres de la Renaissance napolitaine. De ce pavement, réalisé dans la seconde moitié du xv e siècle par celui qu’on a appelé le « Maître de la chapelle Brancaccio », subsistent hélas seulement quelques carreaux, tracés dans des couleurs vives grâce à un dessin épuré et un peu naïf. Ces derniers de forme assez classique, avec un carré cantonné de quatre hexagones, présentent, outre des décors armoiries, des lièvres courant, différents motifs végétaux et des profils en buste. Ce style clairement reconnaissable du « Maître de la chapelle Brancaccio », apparait également dans une série de vases à usage pharmaceutique, dont certains peuvent être chronologiquement mis en relation avec le mariage en 1465 d’Ippolita Sforza et du duc de Calabre. Ippolita était la fille de Francesco II Sforza, duc de Milan, et son époux Alphonse d’Aragon, duc de Calabre devait être roi de Naples sous le nom d’Alphonse II. Les vases en relation avec le dit mariage, peut être destinés à l’apothicairerie du palais, présentent des bustes souvent proches de ceux des pavements, pour la plupart de profil. Ces bustes copiés de médailles ou de miniatures représenteraient les portraits de personnages de la cour de Naples. Mais en dehors du cadre de ces pavements ou de vases à usage pharmaceutique, la majolique triomphait aussi largement dans le décor des intérieurs napolitains, au point de rivaliser avec l’orfèvrerie dans le domaine de la vaisselle. 65
A cette époque, la guerre civile menée par les barons favorisa la conquête de Naples par Charles VIII de France. Par la suite, l’opposition de la population à l’occupation française permit la mainmise de l’Espagne sur Naples. Durant deux siècles de 1503 à 1707, le royaume de Naples devait être dirigé par des vice-rois Espagnols. Ce changement politique priva la ville d’une cour brillante, comme l’avait été celle d’Aragon, mais stimula en revanche les échanges culturels et artistiques avec l’Espagne. La production de « riggiole » concurrença de plus belle les carreaux espagnols. En ce qui concerne ces riches échanges, rappelons que c’est un italien (même s’il n’est pas napolitain mais pisan), Francesco Niculoso, dit « Niculoso Pisano », qui en 1498 s’établit à Séville et introduisit en Espagne la technique de la majolique, pour l’appliquer brillamment à l’azulejo. Beaucoup de grands décors, et notamment de pavements sont alors mis en place, comme au palais ducal de Palma Campania, ou en l’église de l’Annonciation à Vallemaio, près de San Giorgio al Liri (pavement daté de 1576). Si les portraits, les motifs végétaux ou zoomorphes sont monnaie courante dans la production napolitaine de l’époque, il est à noter que istoriato, ne semble avoir eu la faveur des commanditaires, puisque quasiment aucun exemple ne nous est parvenu. Si les noms de quelques maîtres nous sont parvenus, bien d’autres restent hélas anonymes. C’est le cas d’un artiste ayant travaillé pour les Capece, l’une des principales familles nobles du royaume de Naples, divisée en de nombreuses branches dont les Capece Galeota. Dans la chapelle des Capece Galeota de la cathédrale de Naples subsiste un pavement à trophées du xvi e siècle, réalisé par cet artiste anonyme qui travailla plus tard pour la même famille Capece Galeota dans un couvent proche de Nola. Les quelques pavements en majolique conservés de cette époque nous révèlent tout un répertoire de personnages de profil, de motifs héraldiques et de divers motifs géométriques. L’expression revêche des personnages peints sur les carreaux de l’un de ces pavements a fait baptiser un maître anonyme actif aux alentours de 1550 le « Maître des profils courroucés ». Ces visages se retrouvent entourés de feuillages sur plusieurs albarelli et quelques vases de pharmacie à panse globulaire conservés dans différents musées. C’est à partir d’un pavement de la région de Naples (plus précisément de Castellabate, au sud sur le littoral) qu’on attribue désormais à la région ce type de décor du « Maître des profils courroucés » jadis attribué à la Sicile. La confusion était en fait aisée dans la mesure où, les échanges commerciaux entre Naples et la Sicile étant très intenses (comme d’ailleurs entre l’Ile et les autres centres italiens tels que Faenza, Venise et Casteldurante), les artisans siciliens devaient imiter de manière assez systématique les productions continentales. Il faut dire que la production des artisans siciliens ne devait atteindre un niveau de qualité honorable qu’au xvii e siècle, s’inspirant néanmoins toujours des principales typologies italiennes, et c’est à ce moment que brillèrent les grands centres tels que Trapani, Caltagirone ou Sciacca.
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l a m a j o l i q u e i ta l i e n n e e t s e s c e n t r e s d e p r o d u c t i o n · p h i l i p p e c r o s
CATALOGUE DE S Ĺ“U VRE S Notices par mesdames carola fiocco,
gabriella gherardi et liliane sfeir fakhri
1.
Assiette Venise, maître Domenico, vers 1560-1570 H. 2,8 / D. 24,4 / D. talon 9,8
•
Inv. 1974
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, bistre, violet, noir, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION :
Facture soignée; picots; revers: émail grisâtre irrégulier. Intègre.
PROV.: Coll. Baron Gustave de Rothschild; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 106, p. 77; Giacomotti, 1962, p. 45, repr. p. 43, fig. 28.
L
’assiette représente trois vieillards à barbe blanche, sur fond de paysage. Les deux premiers semblent parler, suivis d’un troisième qui brandit une épée. Ces trois personnages de la suite du doge de Venise, deux ambassadeurs et un porteur d’estoc, dérivent d’une gravure de Matteo Pagani représentant le Cortège ducal, éditée à Venise en 1550 et conservée au musée Correr. Le céramiste a isolé les figures et modifié le fond. Revers orné de quatre bandes concentriques jaunes. On attribue cette assiette à Maestro Domenico, peintre de céramique que l’on peut probablement identifier au domenego depentor over bochalor –peintre et aussi potier–, bénéficiaire du testament du peintre vénitien Zoan Maria, rédigé en 1547 1. Le terme depentor dénote une appréciation particulière pour l’art de Domenico; par l’ampleur des formes et le sens de la couleur, intense et rehaussée de blanc, son style est en effet proche de la peinture, en particulier de celle de Véronèse. Même si les archives témoignent de l’activité de Domenico depuis la fin des années 1540, c’est seulement à partir de 1562 que nous trouvons ses oeuvres datées. Cette annéelà, il signe en effet un vase de pharmacie du service de l’Ospedale Grande de Messine, qui lui avait été commissionné 2. Une grande partie de sa production est en fait consacrée aux vases de pharmacie, essentiellement des albarelli et des vases sphériques; ils sont ornés de bustes masculins et féminins à l’intérieur de médaillons entourés d’une riche végétation fleurie dont les couleurs vives ressortent sur un fond d’un bleu intense. Cette typologie rencontra un tel succès qu’elle fut imitée, d’une façon plus grossière toutefois, par des ateliers de Sicile et de Calabre. Si l’on tient compte des oeuvres signées et datées, l’activité du maître semble se prolonger jusque vers 1568 3. Celui-ci travaillait dans un atelier qu’il gérait probablement lui-même, situé près de l’église de San Polo. Une assiette très proche, ornée seulement de deux personnages et datée par Rackham des années 1550-60, est conservée au Victoria and Albert Museum à Londres 4. Alverà Bortolotto la situe cependant plus tard, vers 1560-70, période qui semble mieux s’accorder aux couleurs lumineuses et à la rapidité du trait qui la caractérisent 5.
Matteo Pagani, Cortège ducal (dètail), Venise, Musée Correr [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
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Concina, 1975, p. 136. La première référence relative au maître remonte à quelques années antérieures, 1544, quand celui-ci est mentionné dans le testament d’un autre faïencier, Maître Giacomo de Pesaro, dont il avait épousé la fille (Alverà Bortolotto, 1988, pp. 24 et 97-98). 2. Pavone, pp. 60-61. Le service est au musée national de Messine. 3. Il s’agit de trois assiettes de 1568. Deux d’entre elles, décorées, l’une de Moïse devant le pharaon et l’autre de Miriam qui se souvient de l’épisode de la Mer Rouge, sont à l’Herzog Anton Ulrich-Museum de Brunswick (inv. 1154 et 628, repr. in Lessmann, 1979, nos. 737 et 738); la troisième, illustrant le Passage de la Mer Rouge et l’Histoire de Joseph se trouve au musée international des Céramiques de Faenza (inv. 21149, in Bojani et al. , 1985, no. 805). Un albarello portant la même date, est par ailleurs conservé au Museum für Kunsthandwerk de Francfort (Alverà Bortolotto, 1988, pl. XC). 4. Inv. C. 2252-1910, in Rackham, 1940, no. 974, attribué à Venise, vers 155060. 5. Alverà Bortolotto, 1988, pl. XCVIII (sans indication de page). 1.
2. Albarello Faenza, vers 1510 H. 23 / D. base 13,4 / D. col. 12, 6
• Inv. 1373 COUL.: Bleu, jaune, orangé, rehauts de brun. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Intérieur émaillé, léger talon brut et base émaillée, lèvre plate brute; sillons de tournassage apparents. Intègre. PROV.: Paul Gillet, don 1938.
L
’albarello, d’usage pharmaceutique, porte une bande médiane chargée de l’inscription de la drogue, Diapenidion (à base de pénides ou sucre d’orge). La surface restante de la panse est ornée du motif de la grenade ou de la palmette persane d’inspiration orientale, dans une de ses variantes faentines. Ici, la palmette n’est pas associée à la rosette aux pétales circulaires, ce qui est souvent le cas, mais à une fleur stylisée caractéristique de la famille dite alla Porcellana qui dérive des porcelaines chinoises blanches et bleues de la période Ming ou de leur imitation moyen-orientale. Pour cette raison et compte tenu des nuances pâles des couleurs qui animent le champ de la surface du vase, blanc dans les exemplaires de la fin du xv e siècle, nous penchons pour une datation plus tardive, vers 1510. Pour des analogies, voir par exemple un albarello du musée du Louvre 1 et un autre dans une collection privée 2. Le contenu de l’albarello est un looch, c’est-à-dire une préparation de consistance sirupeuse dense, à base de sucre d’orge, aux propriétés émollientes 3.
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Inv. OA 6992, in Giacomotti, 1974, no. 137. 2. Cf. Gardelli,1999, pp. 86-87, no. 41. 3. Saladin d’Ascole, in l’Interrogatorio agli speziali, définit le diapenidion « lenis confectio, quia habet pectus et guttur lenire, unde penidia, id est lenificantes guttur, pectus, et pulmonem » (Mesuae, 1558, II, 288 v). 1.
3. Plat Faenza, début du xvi e siècle H. 4,4 / D. 27,2
•
Inv. 1986
COUL.: Bleu, vert, jaune, dominante brun-roux. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Accidenté, complet (nombreux fragments), restauration ancienne; émail tressaillé. PROV.: Coll. Alfred Pringsheim (vente Londres, II, 19 juillet 1939, no. 251); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Falke, 1914, II, repr. no. 168 (attr. Faenza, vers 1520); Damiron, 1943, no. 51, p. 37; Giacomotti, 1962, p. 32, repr. p. 35; Fiocco-Gherardi, 2004, fig. 1, p. 199.
P
lat à bassin très profond (tondino). Au centre, en médaillon, le buste d’une femme de profil à gauche. Autour, zones concentriques d’arcatures en blanc fixe (bianco sopra bianco). Sur l’aile, décor à grotesques où alternent des sphinges et de grands masques ailés. Au revers, des filets concentriques bleus et deux filets orange. L’attribution de ce plat à un centre a été problématique: Falke le donnait à Faenza, Damiron et Giacomotti à Sienne. Toutefois son revers, analogue à celui du plat no. 4 du catalogue, dont l’attribution n’est généralement pas mise en doute, semble typique de Faenza. A notre sens, les fragments de fouilles du sous-sol faentin conservés au musée de Faenza 1, ornés pour certains de grotesques très semblables, permettent de l’attribuer de façon certaine. Le profil peint au centre d’un plat de la collection Emaldi de Faenza, exposé au Palais ducal d’Urbania en 1982 2, nous semble être de la même main. Toutefois ce dernier exemplaire est légèrement antérieur car il présente sur l’aile un décor de type gothique.
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Les fragments sont conservés dans les « caisses didactiques » du musée. 2. Leonardi, 1982, p. 26, fig. 4. 1.
4. Assiette Faenza, première moitié du xvi e siècle H. 3,5 / D. 24
•
Inv. 1954
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Fond bleu avec motifs en champlevé (a graffito). Accidenté, complet (douze fragments), restauration ancienne de qualité exceptionnelle. PROV.: Coll. Richard Zschille (vente Londres, 1-2 juin 1899); Alfred Pringsheim (vente Londres, II, 20 juillet 1939, no. 369); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Falke, 1899, pl. 16, no. 9; Falke, 1914, II, repr. pl. 90, no. 169; Damiron, 1943, no. 45, p. 32; Giacomotti, 1962, p. 26, repr. p. 27, fig. 7; Norman, 1976, p. 121; Ravanelli Guidotti, 1998, p. 294.
L
’assiette est ornée sur toute sa surface d’un décor alambiqué de grotesques. Au centre, une sphynge ailée et, tout autour, des oiseaux et des dauphins disposés au milieu de rameaux et d’inflorescences. Au revers, plusieurs filets concentriques bleus, et deux orangés. Un fragment de plat 1 orné de motifs semblables de trophées et de volutes sur fond bleu, trouvé à Faenza, est à l’origine de l’attribution que confirme le décor du revers. Typiquement faentin, ce décor est très bien « documenté » sur place. 1. Argnani, 1898, II, pl. XXXI, Des exemplaires similaires sont conservés dans de nombreux fig. XVII. Le fragment a été musées (Faenza 2, Wallace Collection 3, Victoria and Albert donné au Louvre (inv. OA 4 5 569480, in Giacomotti, 1974, Museum ) ainsi que dans les anciennes collections Damiron , no. 231). Weinberger 6 et Spitzer 7. 2. Inv. 17597, de l’ancienne coll. du comte de Harewood (repr. in vente Harewood,
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1965, no. 46, attribué à Cafaggiolo, et in Ravanelli Guidotti, 1998, no. 65, pp. 294-295. 3. Inv. III C 107, in Norman, 1976, no. C52, pp. 120-121, attribué probablement à Faenza, vers 1530. 4. Inv. 1670-1855, in Rackham, 1940, no. 247, attribué à Faenza. 5. Damiron, vente 1938, no. 28. 6. Chompret, 1949, II, fig. 72, attribué à l’atelier de Zoan Maria de Casteldurante. 7. Spitzer, vente 1893, pl. 34, no. 1067.
5. Plat Faenza, 1517 H. 4,8 / D. 29
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Inv. 2007
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, marron. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Face: motifs en champlevé (a graffito), trois traces de pernettes dans le bassin; revers: un retrait important révèle une sous-couche jaunâtre; picots. Accidenté, complet (trois fragments), ancienne réparation; fêlure (19 h); égrenures sur le bord. PROV.: Coll. Pasolini, Faenza; Coll. Bellegarde; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Frati, 1852, p. 11, no. 13, p. 12; Chompret, 1949, I, p. 26, repr. II, p. 10, fig. 70 (avec attribution à Giovanni Maria de Casteldurante); Damiron, 1956, no. 70, p. 62; Giacomotti, 1962, p. 28, repr. p. 35; Rasmussen, 1989, pp. 42-43; Ravanelli Guidotti, 1998, p. 295; reproduit dans « Il mito della ceramica e nei cofanetti in pastiglia a Brixiantiquaria », CeramicAntica, anno XV, no. 10, novembre 2005, p. 55.
U
n décor à grotesques, chargé, est disposé symétriquement de part et d’autre d’un axe sur lequel se détache le voile de sainte Véronique avec la Sainte Face (la Véronique) soutenu par deux monstres ailés et sommé d’une coquille, d’un bucrane et d’un oiseau ventru aux ailes déployées. Au-dessous, un orgue et un trophée d’instruments de musique. Un cartel, en bas à gauche, porte la date de 1517. Au dos, autour d’un astérisque central, se développe un décor rayonnant de pétales striés transversalement. L’attribution à Faenza est confirmée par le décor du revers et la stylisation des grotesques, l’oiseau aux ailes déployées en est un exemple caractéristique, que l’on retrouve sur de nombreux tessons de fouilles locales 1. Le plat présente une étroite analogie avec un exemplaire de la collection Lehman, au Metropolitan Museum of Art de New-York 2. Un autre exemplaire semblable, peutêtre de la même main ou du même atelier, est conservé à la Wallace Collection 3. Rackam l’a d’abord attribué au peintre C I 4, avant de le donner 1. Cf. par ex. deux plats de déblai de l’ex-palais Rossi à à l’auteur d’une coupe à signification amoureuse et d’un albaFaenza, inv. 7797, 7798, in 5 rello, tous deux au British Museum . Le revers du plat Wallace Ravanelli Guidotti, 1998, pp. présente les mêmes pétales striés que le plat Gillet et porte en 298-299. son centre le ballon barré d’une croix, fréquent dans la produc- 2. Rasmussen, 1989, p. 42, no. 26, avance prudemment une tion faentine de la première moitié du xvi e siècle. attribution faentine basée sur une certaine ressemblance avec les éléments floraux et les couleurs des exemplaires sur émail bleu (berettino) autrefois attribués à la Casa Pirota. Ce plat présente des affinités avec le plat Gillet mais Rasmussen a par erreur noté la date de 1537 au lieu de 1517 et le situe par conséquent aux environs de 1530. Les autres raisons proposées pour une attribution à Faenza sont la
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ressemblance du plat avec celui du Jugement de Pâris, autrefois dans la collection Damiron, aujourd’hui au musée de Faenza, et avec les putti au revers d’un plat représentant l’Agonie au Jardin des Oliviers, daté de 1538 (Metropolitan Museum). 3. Inv. III C 115, repr. in Norman, 1976, no. C44, pp. 103-108. Norman l’attribue sans hésitation à Faenza, le datant des environs de 1520. Le plat porte au centre un jeune homme assis, et sur l’aile, un motif à grotesques sur fond bleu, où se détachent des éléments que l’on retrouve sur l’aile du plat Gillet, par exemple les inflorescences rondes à l’extrémité d’une tige en spirale et quatre oiseaux aux ailes déployées semblables à ceux déjà mentionnés. 4. Le peintre marque ainsi un plat ex-Basilewski aujourd’hui à l’Ermitage de St Pétersbourg, cf. Rackham, 1952, note p. 21. 5. Respectivement inv. MLA 78, 12-30, 411 et MLA 57, 8-4, 33. Cette dernière hypothèse d’attribution est reprise dans Norman, 1976, p. 104, et se base sur une lettre conservée à la Wallace Collection.
6. Assiette Faenza, vers 1525-1530 H. 3,8 / D. 23,6 / D. base 6,6
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Inv. 1987
COUL.: Camaïeu bleu sur fond berettino, vert, jaune, orange, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Facture soignée; trois marques de pernettes sur la face; au verso, quelques picots. Intègre, légères égrenures en bordure. PROV.: Coll. A. Imbert; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 57, p. 42.
A
ssiette à bassin profond et à aile large (tondino). Elle porte au centre un blason d’alliance non identifié, encadré d’un rang de perles et d’une bande d’inflorescences tracées en blanc sur fond bleu. L’aile est parcourue d’un motif à grotesques sur fond bleu sombre, sur lequel se détachent des dauphins unis par la queue, des têtes d’anges, des livres et des rinceaux se terminant par des volutes. Sur le revers, une guirlande de petites feuilles alla porcellana interrompue par quatre grosses fleurs rondes; sur la base, des filets concentriques. Ce plat est particulièrement représentatif d’une typologie très commune à Faenza entre 1525 et 1535. Le décor à grotesques y apparait en réserve, en bleu clair sur un fond bleu intense, rehaussé de blanc et caractérisé par des dauphins affrontés ou adossés, des mascarons, des cornes d’abondance, des livres et de jolies petites têtes d’anges. L’emploi de l’émail berettino, encore utilisé pour les majoliques historiées, s’affirme à Faenza à partir de 1520 environ et perdure jusqu’en 1540.
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7. Assiette Faenza, vers 1525-1535 H. 4,5 / D. 24 / D. base 7
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Inv. 1990
COUL.: Bleu sur fond berettino, vert, orange, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Bel émail; trois marques de pernettes sur le marli; gauchie. Intègre; deux égrenures, une sur l’avers (5 h), une sur le revers (1 h). PROV.: Coll. A. Imbert; Murray; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 58, p. 42; Chompret, 1949, I, p. 72, repr. II, p. 60, fig. 471; Taburet, 1981, repr. p. 77; Rondot, 1993, pl. 5; Blazy, 1998, repr. p. 74. EXP.: Paris, 1911, no. 143.
C
ette assiette au bassin profond et à aile large (tondino) porte au centre l’allégorie de la Justice, représentée sous les traits d’une femme tenant de ses mains l’épée et la balance; elle est cernée d’une frise concentrique d’inflorescences tracées en blanc sur fond bleu (berettino) et de galons de perles. Sur l’aile, un motif à grotesques où se détachent des dauphins, des inflorescences et des rinceaux, sur fond bleu foncé posé au pinceau. Au revers, des bandes et des filets concentriques se terminent par un cercle sous la base. Ce plat entre dans la même typologie que le précédent. Des figures féminines de ce type, dans lesquelles on voit couramment des allégories ou des personnages historiques, bibliques ou mythologiques, apparaissent souvent sur la production a berettino de Faenza. Sur un plat très semblable, autrefois dans la collection Pringsheim 1, la même figure porte une épée et une tête coupée (Judith), tandis que sur un autre plat du musée international des Céramiques de Faenza, elle porte une colonne (La Force) 2.
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1.
Falke, 1914, no. 176.
2. Inv. 21136/C, in Bojani et al. ,
1985, no. 106, p. 56. Cf. aussi Chompret, 1949, no. 471.
8. Gourde Faenza, 1535 H. (sans bouchon) 26,5 / L. max. 22,5 / Ép. 14,5 // Piédouche: L. 9,8 / Ép. 6,8
•
Inv. 1991
COUL.: Bleu sur fond berettino, vert, jaune, orangé, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Deux fentes pratiquées sur le piédouche pour permettre le passage d’une cordelette; corps intègre; coulants restaurés et haut du col remplacé par un goulot en argent et un bouchon ciselé en argent. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 30, p. 25; Giacomotti, 1962, p. 25, repr. p. 26, fig. 5; Norman, 1976, p. 128; Poole, 1995, p. 251; Ravanelli Guidotti, 1998, repr. p. 290, fig. 22.
G
ourde piriforme sur pied bas, pourvue de deux anses verticales, d’un bouchon d’argent ciselé, et peinte sur émail berettino. Sur les deux faces, au centre, deux médaillons représentant respectivement Tobie (un vieillard avec un livre ouvert et une banderole sur laquelle est écrit TOBIA.P.) et Nabuchodonosor (un vieillard tenant une tablette écrite et le nom NABUC dans une banderole semblable à la précédente). Au dessus des médaillons, la date de 1535. Tout autour, des motifs à grotesques où se détachent des dauphins affectant la forme d’une virgule, des coquillages, des mascarons ailés et des rinceaux en volutes. Le P qui suit le nom de Tobie pourrait être l’initiale de Prophète, bien qu’en réalité il ne l’ait jamais été. Le livre que tient Tobie est en effet un livre deutérocanonique de la Bible qui n’existe pas dans la version hébraïque, alors que sa figure a toujours été très populaire dans la littérature et l’art figuratif du monde chrétien 1. Nabuchodonosor était le fils de Nabopolassar, fondateur de l’empire néo-babylonien 2. Sa présence en vêtement de sage, une main sur une tablette gravée, en pendant de Tobie, ne s’explique pas par son contexte historique mais plutôt par la célébrité biblique dont il jouissait, au même titre que Tobie. Il est possible que la captivité babylonienne soit le 1. Tobie était un hébreu exilé, lien entre les deux images. Les représentations à mi-buste de qui vivait à Ninive. Le Seigneur vint à son secours prophètes ou de sages anciens sont fréquentes dans la majoet fit en sorte qu’il fût lique faentine du xvi e siècle, souvent accompagnées du nom, récompensé. Son fils recouvra une grosse mais parfois anonymes 3. La présence du turban se rapportant créance de Raguel, dont il à un personnage de la période pré-islamique est due à l’imépousa la fille Sara, guérit mense considération dont jouissaient les savants arabes, en son père de la cécité. Un cantique de reconnaissance particulier les commentateurs d’Aristote et les auteurs de traiet le récit de la mort sereine tés médicaux. Dans la production a berettino de Faenza, les du vieillard terminent le formes fermées sont rares et il ne peut s’agir que de gourdes livre. 4 2. Devenu roi de Babylone en de pélerins . 604 av. J. C. , il soumit la Palestine et s’empara à deux reprises de Jérusalem, en 596 et 586, mettant fin au règne de Juda. Le prophète Daniel vécut à sa cour. 3. Cf. par ex. le plat du British Museum de Londres avec des grotesques semblables
82
à celles de cette gourde, aussi sur émail berettino, daté de 1524 (MLA 1855, 121, 68, in Wilson, 1987a, no. 112), et celui identique du Kunstgewerbemuseum de Cologne, sur lequel est représenté le prophète Daniel, lui aussi avec un turban (inv. E 1596, in Klesse, 1966, no. 227). L’inscription est la suivante, P(ro)feta daniel. 4. Une cruche, datée de 1536, ornée à grotesques avec trois médaillons, dont l’un représente le prophète Elisée avec un livre à la main, se trouve au musée Paul Getty de Malibu (inv. 84. DE. 115, in Hesse, 1988, no. 28); une aiguière, dans la collection Lehman, Metropolitan Museum de New York (inv. 1975. 1. 1053, in Rasmussen, 1989, no. 25); une autre au Victoria and Albert Museum (inv. C 21231910, daté de 1531, in Rackham, 1940, no. 290). Dans le même musée se trouvent deux albarelli (inv. C 2108 et 2107-1910, ibid. , nos. 303 et 304), alors qu’un autre est dans une collection privée de Faenza (Ravanelli Guidotti, 1988a, pl. II). Enfin, une coupe avec les armes des Salviati de Florence appartient au musée Umeleckoprumysloveho de Prague (Vydrová, 1973, cat. no. 38).
9. Plat d’apparat Faenza, vers 1520 H. 8,5 / D. 38,4
•
Inv. 1983
COUL.: Bleu, vert, jaune, brun / roux. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Face très soignée; trois traces de pernettes dans le bassin; revers: fond et talon bruts; coulures d’émail et picots. Intègre, égrenures et léger manque sur le bord. PROV.: Coll. Pasolini di Faenza (?); Coll. Heugel; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Frati, 1852, p. 12, no. 12 (?); Damiron, 1956, p. 32, no. 37; Giacomotti, 1962, p. 22, repr. p. 25, fig. 3; Ravanelli Guidotti, 1996, p. 36, repr. fig. 4 a-b; Casati, 2004, p. 52; CeramicAntica, « Mostra –Mercato », novembre 2005, repr. p. 55.
D
ans le fond du bassin, l’histoire du chasseur Actéon qui surprit Diane tandis qu’elle se baignait avec ses servantes et qui, pour punition, fut changé en cerf avant d’être dévoré par ses propres chiens 1. Sur l’aile, une large frise de losanges entrelacés. Le revers du marli est émaillé en blanc, le reste sans revêtement. Deux trous pratiqués sur le talon avant la cuisson indiquent la fonction de pompe ou d’apparat du plat, destiné à être accroché. Le sujet dérive, avec quelque modification, de la xylographie du maître I B à l’oiseau; la figure de Diane en particulier en est proche. Le plat n’étant pas daté, il serait utile de connaître la date exacte de la xylographie et d’avoir ainsi un point de départ. Malheureusement, les œuvres de I B ne sont pas datables avec précision. Elles auraient été exécutées au cours d’une période qui s’étend de 1500 environ à 1510-1516 2. Le plat serait probablement un peu postérieur, vers 1520, et provient certainement de Faenza. Le motif décoratif de l’aile figure sur de nombreux fragments de fouilles de Faenza. Du point de vue stylistique, il nous semble correct de rattacher le plat Gillet au peintre de majoliques de Faenza Baldassare Manara, peut-être dans sa première période 3, lorsqu’il ne signait pas encore l’ensemble de IB dall’Ucello (peut être Giovanni ses œuvres. Battista Palumba) Diane et Actéon
[ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
84
Ovide, Les Métamorphoses, III, 131. 2. Bartsch, 1984, p. 155. 3. Ravanelli Guidotti, 1996, p. 36. 1.
10. Plat Faenza, 1540 H. 4,2 / D. 45,5
•
Inv. 1696
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, brun, rouge de fer, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: La face est d’une exécution parfaitement soignée; le revers l’est moins:
nombreux retraits d’émail à la cuisson; traces de pernettes sur l’aile. Intègre; un trou pratiqué après la cuisson pour suspendre le plat; égrenures sur le pourtour. PROV.: Coll. Pasolini, Faenza; Baron Gustave de Rothschild; Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Frati 1852, p. 17, no. 89; Damiron, 1943, no. 64, p. 47; Rondot, 1993, repr. en couverture; Casati Migliorini, 2004, pp. 41 et 52.
D
ans le fond du plat, représentation de la Mort d’Orphée fustigé par les Ménades lorsque, après la mort de son épouse Eurydice, il méprisait et repoussait tout contact féminin (Ovide, Métamorphoses, xi, 1-66). En arrière plan, un paysage où coule un fleuve et, dans le lointain, un bourg fortifié et la montagne. Sur l’aile du plat se déploie sur fond jaune un motif à grotesques où l’on remarque des sphinges ailées, des monstres quadrupèdes affrontés, des mascarons, des vases et des inflorescences. Sous la base, la date de 1540 se lit au milieu d’une rosace entourée d’inflorescences disposées en guirlandes concentriques sur tout le revers. La scène semble utiliser assez librement une gravure anonyme de Ferrara de la seconde moitié du xv e siècle, inspirée de Mantegna, dans laquelle les Ménades ne sont que deux 1, ainsi qu’une gravure de Giovanni Antonio de Brescia représentant quatre femmes en train de danser. Deux d’entre elles semblent avoir servi de modèle pour le plat. Ce plat est inhabituel. Il est d’une grande importance dans le panorama faentin où, dans les années quarante, la grande période du berettino était désormais terminée et où l’on recommençait à peindre sur émail blanc. C’est alors l’époque des fameux Bianchi décorés en style compendiario, auxquels toutefois s’adjoint toute une production très colorée, décorée surtout a quartieri, dans une manière que Ballardini qualifiait de stile fiorito. L’auteur du plat Gillet n’est pas nouveau, il avait peint auparavant sur émail berettino. Sa main est en effet reconnaissable dans un groupe de plats historiés, parmi les plus beaux de la majolique faentine, généralement attribués autrefois au Maître vert (Maestro verde), appelé ainsi pour l’effet qu’il obtenait en posant du jaune sur l’émail de base couleur azur. Citons Diane et Actéon, du musée Herzog Anton Ulrich de Brunswick 2 et du musée international des Céramiques de Faenza 3, Eros et Léandre du Paul Getty Museum de Malibu en Californie 4, deux Jugement de Pâris, tous deux au musée de la Renaissance d’Ecouen 5, et un troisième au Victoria et Albert Museum de Londres 6. Ces exemplaires, tous sur émail berettino, présentent en outre une aile ornée de grotesques de même type que dans les fiches précédentes avec des têtes de putti, des dauphins affrontés, des mascarons et des cornes d’abondance. Les revers, excepté celui du plat du musée de Faenza, sont décorés de façon complexe, avec des cercles de petites feuilles alla porcellana et des rosaces entourées de rinceaux. Dans deux cas, sous la base, un volatile est peint au centre (Getty et Herzog Anton Ulrich). Sur le plat daté d’Ecouen figurent des serpentins autour d’un cercle barré en croix portant l’inscription et la date; 86
Cette gravure d’après Mantegna, non retrouvée, a également servi de modèle à un dessin de Durer (Kunsthalle de Hambourg, cf. Panofsky, 1979, pp. 44-45). 2. Inv. no. 1155, in Lessmann, 1979, no. 19. 3. Inv. 25009, in Ravanelli Guidotti, 1990a, no. 146. 4. Inv. 84. DE. 113, in Hess, 1988, no. 26, pp. 85-87. 5. Inv. Cluny 2438 et 2436 (le deuxième daté de 1532), in Giacomotti, 1974, nos. 336 et 335. 6. Inv. C. 2110-1910, in Rackam, 1940, no. 297. . . /. . 7. Carte 207. 1.
sur celui de Londres, qui est antérieur, la date de 1527 inscrite sur un cartel sous la base est accolée à deux cercles barrés en croix et soulignés d’un signe en forme de croissant, ce qui est souvent le cas pour cette marque célèbre. Sans doute le peintre avait-il travaillé dans l’atelier autrefois identifié à tort comme la Casa Pirota, et aujourd’hui considéré comme inconnu. Le plat Gillet, tout en étant peint sur émail blanc, reprend les manières et le schéma décoratifs des exemplaires cités, en entourant la scène d’une grotesque minutieuse qui évoque, dans les monstres quadrupèdes affrontés et dans les écus en demi-lune occupés par des profils humains, la grotesque utilisée par le peintre de la coupe Bergantini. Il conserve aussi la complexité du revers que l’on peut confronter notamment, en dépit de couleurs différentes, au plat du Jugement de Pâris d’Ecouen (Inv. 2438) qui présente des graphismes similaires. Le rouge vif qui anime la gamme et apparaît sous le jaune des grotesques n’est pas une nouveauté dans la céramique faentine, il y est présent depuis les années 1520. Le citant, Piccolpasso dit l’avoir vu, beau comme un cinabre, dans l’atelier de Virgiliotto de Faenza 7, mais ce rouge était certainement produit dans d’autres ateliers de la ville.
88
7. Carte 207.
11.
Coupe Faenza, milieu du xvi e siècle H. 7,4 / D. 29,8 / D. piédouche 14
•
Inv. 1371
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, noir. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Très bel émail; cinq traces de pernettes sur la face. Intègre. PROV.: Paul Gillet, don 1938. BIBL.: Rondot, 1993, pl. 6; Blazy, 1998, repr. p. 76.
C
oupe sur pied bas à bord découpé en coquilles (crespina). Au centre, dans un médaillon convexe, Vénus, une longue flèche dans la main droite, et Eros, assis devant elle, lui offrant un cœur. Tout autour, un décor à feuillages, découpé dans des quartieri alternativement verts, bleus et orange. Au revers, contour souligné en bleu et jaune. L’iconographie du xvi e siècle représente parfois Vénus armée, parfois Vénus victorieuse, puisqu’elle était aussi, selon la tradition, vénérée à Sparte 1. Ici, la scène a un sens amoureux et une fonction avant tout décorative. La coupe galbée, ou crespina, façonnée par estampage, devient d’un usage courant à Faenza vers le milieu du xvi e siècle, parallèlement à la diffusion des bianchi. A la différence du compendiario, cet exemplaire est orné a quartieri, selon la définition de Piccolpasso, c’est-à-dire de compartiments de formes variées, avec un fond de couleurs alternées dans lequel s’ordonnent des feuilles ou des éléments à grotesques 2. De nombreux fragments de fouilles confirment l’origine faentine du plat Gillet 3. La date est généralement fixée vers les années 1540-1545 par analogie décorative avec certains grands vases reconnus et datés, ornés a quartieri et en tout point semblables 4. Analogues à la coupe Gillet et proches par la forme, des exemplaires de cette typologie, qui a été largement diffusée, sont conservés au Louvre 5, au musée national de la Céramique de Sèvres 6, au Herzog Anton Ulrich-Museum de Brunswick 7. Des figurines armées au centre de crespine a quartieri chantournées diversement, existent aux musées des Arts décoratifs de Berlin 8 et de Cologne 9.
90
Selon Cartari, qui cite Lattanzio et Ausonio, la tradition remonterait à l’épisode dans lequel les Spartiates défendirent seules la ville contre les Messéniens (Cartari, 1556, CXV). Vénus est représentée armée dans une gravure anonyme, traitée par Marcantonio Raimondi, avec Vénus et Eros, in Bartsch, 1978, vol. 26, no. 260, p. 253. 2. Piccolpasso appelle ce type de décoration Le Quartierei et en reproduit un exemple dans une de ses planches (Piccolpasso, 1980, vol. I, livre troisième, pl. 70r). 3. Cf. par ex. au Louvre, OA 5694 (57, 58, 60), in Giacomotti, 1974, nos. 943945, acquis en 1902, provenant de la collection Argnani composée de fragments provenant du sous-sol faentin. 4. Cf. par ex. les vases a quartieri dans les collections du Louvre OA 6330, in Giacomotti, 1974, no. 959 et au Kunstgewerbemuseum de Cologne, inv. E. 512, in Klesse, II, 1966, no. 281, tous les deux datés de 1548. 5. Inv. R 963 et R 964, in Giacomotti, 1974, nos. 937938. 6. Inv. 23106, ibid. , no. 939. 7. Inv. 739, 797, 798, in Lessmann, 1979, nos. 21-23. 8. Inv. 97129, in Hausmann, 1972, no. 132. 9. Inv. E 1597, in Klesse, 1966, no. 279. 1.
12. Chevrette Faenza, milieu du xvi e siècle H. 22,9 / D. panse 15,6 / D. base 10 / D. col 9
•
Inv. 2395
COUL.: Bleu, vert, jaune, brun / roux. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Intérieur émaillé (émail très maigre), très usé. Accidentée, complète;
anciennes restaurations au col, au bec et au pied. PROV.: Coll. Paul Gillet; Mme Paul Gillet, don 1973. BIBL.: Damiron, 1943, no. 112, p. 81.
L
a chevrette possède un bec tubulaire et, à l’opposé, une anse verticale. La chevrette est décorée de feuillages, de dauphins et d’inflorescences répartis dans des quartieri alternativement verts, bleus et orange. Son contenu — Syº. de. liquirifia — est écrit en cursive gothique dans un cartouche situé sous l’anse. Il s’agit de sirop de réglisse, glycirrhiza glabra, employé pour ses propriétés adoucissantes servant à calmer la toux et les maux d’estomac. Pour le décor a quartieri, voir la notice précédente. Le musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg 1 conserve une chevrette semblable portant l’inscription OL. DE. AMADOL D (huile d’amandes douces).
92
1. Inv. F 2081, in Kube, 1976,
no. 19.
13. Albarello Faenza, milieu du xvi e siècle H. 22,5 / D. panse 19,8 / D. base 15,2 / D. col 15,4
•
Inv. 2396
COUL.: Bleu, vert, jaune, brun / roux. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Bel émail; deux imperfections sur le corps; intérieur émaillé; base brute. Deux fêlures, l’une partant à la verticale du fond jusqu’au haut du pot, l’autre allant du haut jusqu’à la carène supérieure; égrenures au col et au pied; gros manque en bas à gauche de l’inscription. Fond percé après cuisson. PROV.: Coll. Paul Gillet; Mme Paul Gillet, don 1973. BIBL.: Damiron, 1956, no. 11, p. 9.
L
’albarello, cylindrique, est orné de rinceaux de fleurs et de feuilles découpées. Au centre, se déroule un cartouche portant l’inscription Ireos en lettres gothiques. Avec sa forme trapue et plutôt trop large en regard de sa hauteur, l’albarello était probablement destiné à recevoir des pilules ou des trochisques d’iris obtenus à partir du rhizome de cette fleur, desséché et réduit en poudre. Expectorants à faible dose, ils sont vomitifs à dose plus élevée. Le décor, caractéristique de la production de Faenza vers le milieu du xvi e siècle, se rencontre également, souvent enfermé dans des quartieri. Exportée en grande quantité en Sicile, cette typologie décorative fut fréquemment confondue avec la production sicilienne. Elle fut effectivement imitée au siècle suivant dans les ateliers de Palerme et de Sciacca. De grands vases de pharmacie de réalisation faentine 1, en partie datés de 1569 et portant l’inscription IN FAENCIA, confirment de façon certaine l’attribution de notre albarello à Faenza. L’auteur en serait Emiliano Capra, dit Saladin 2. Un albarello de la collection Strozzi-Sacrati avec l’inscription CURCUMA est également assez proche, tant par sa forme que par certaines bandes décoratives 3.
94
Voir par ex. le vase avec le prophète Jonas (Sèvres, musée national de la Céramique, inv. 5078, Giacomotti, 1974, no. 965); il présente aux épaulements et au pied des motifs étroitement analogues et le même type d’écriture gothique sur le cartel pharmaceutique, mais porte en plus sur le revers un écriteau avec l’inscription « Joane castru fecitt / fieri in F… Ma / stro miliano salatino ». Voir aussi le vase avec le Christ devant Pilate, du même musée, inv. 18666, ibid. , no. 964, daté 1569, avec l’inscription « IN. FA/ENCIA ». 2. Cf. Ravanelli Guidotti, 1993, pp. 36-38. Maître Miliano Saladin figure dans un acte notarié des Archives d’Etat de Faenza de 1570 comme figulo faven (potier de terre), c’est-à-dire potier faentin. 3. Bojani-Vossila, 1998, p. 39, no. 8. 1.
14. Cruche (boccale) Florence, atelier de Giunta di Tugio ?, première moitié du xv e siècle H. 17 / D. panse 14 / D. base 9,8
•
Inv. 1978
COUL.: Bleu intense (zaffera in rilievo), violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail beige, très irrégulier, rugueux; base brute; à l’intérieur, mince couche d’émail laissant de nombreuses zones sans revêtement. A l’ouverture, vers l’anse, fracturé (trois petits fragments), réparation ancienne; manques au bord; usures sur l’anse; à l’intérieur, fêlures en étoile dans le fond. PROV.: Coll. A. Imbert; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 5, p. 4. EXP.: Paris, 1911, no. 52.
C
ruche à bec trilobé, ornée de sarments de feuilles de chêne et d’une frise de baies autour du col, peints en brun de manganèse et en bleu de cobalt mis en épaisseur. Un astérisque est tracé sous l’anse. Sur cette typologie décorative dite zaffera in rilievo, et sur l’astérisque qui serait probablement la marque de l’atelier de Giunta di Tugio. Le motif du rameau à feuilles de chêne, tracé avec autant de finesse, apparaît plus souvent sur des vases à deux anses que sur des cruches, moins courantes dans la production toscane 1. Bien que Cora attribue la marque de l’astérisque à la production de Florence, des fragments portant ce même motif ont été trouvés dans les fouilles de Montelupo 2, et Berti vient d’attribuer à ce centre une cruche très semblable à celle de la collection Gillet 3. Une cruche très semblable se trouve aussi au Kunst Industri Museet de Copenhagen, elle aussi attribuée à Giunta di Tugio 4.
96
Cf. par ex. des rameaux semblables sur un vase à deux anses au Musée National de Florence, inv. Maioliche 511, in Francovich, 1989, p. 52, no. 17, et aussi sur celui du Louvre, inv. OA 8236, in Giacomotti, 1974, pp. 13-14, no. 36. 2. Berti, 1997, figs. 22-23. 3. Ibid. , figs. 29-30. 4. Houkjaer 2005, no. 108, p. 126. 1.
15. Vase Zone florentine ou Montelupo, première moitié du xv e siècle H. 16,5 / D. panse 13,2 / D. base 8,6 / D. col 8
•
Inv. 1977
COUL.: Sur un fond d’émail laiteux à l’ancienne, bleu (zaffera diluée), violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail beige, base brute; sur la panse, point de contact (enfournement serré); à l’intérieur, mince couche d’émail. Gros manque à l’une des anses; sur la panse, manques d’émail et cratère dû à une particule de calcium non résorbée à la cuisson. PROV.: Coll. A. Imbert; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 4, p. 4. EXP.: Paris, 1911, no. 62.
V
ase à deux anses, orné à zaffera diluita, de part et d’autre de la panse, d’une rosace formée d’un fleuron central et de quatre feuilles de chêne dessinant une croix de Saint-André. Zigzag ponctué autour du col et sur les anses plates. La zaffera diluita est une variante de celle en relief, le bleu n’a pas la même densité et ne présente pas d’épaisseur. Des cruches à deux anses de ce type (groupe VI de Cora) sont habituellement données à Florence ou à la région florentine, et datées de la première moitié du xv e siècle 1. De récentes trouvailles ont cependant prouvé qu’elles étaient produites en abondance à Montelupo 2. Un exemplaire très semblable au vase Gillet, tant par la forme que par le motif décoratif, est conservé dans une collection privée de Rimini 3.
98
1.
Cora, 1973, pl. 97-100.
2. Berti, 1986, p. 23. 3. Fiocco-Gherardi, 1996b,
pp. 26-27.
16. Albarello Montelupo, fin du xv e - début du xvi e siècle H. 27 / D. base 10,6 / D. col 10,2
•
Inv. 1958/2
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail beige rosé; coulée d’émail sur la base brute. Accidenté: fracture circulaire restaurée au-dessous de l’épaulement supérieur et au col; plusieurs manques au pied. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 19, p. 15.
L
’albarello, cylindrique, légèrement cintré, aux épaulements arrondis, est orné de motifs en oeils de plume de paon entourés de rinceaux de feuilles recoquillées de style gothique. L’intérieur est émaillé d’un émail blanc laiteux. L’oeil de plume de paon appartient au répertoire décoratif du gothique tardif d’influence moyen-orientale, il est fréquent dans les arts appliqués, notamment dans les tissus. Il se répand dans la majolique à partir du milieu du xv e siècle, et Ballardini attribue cette appellation à un groupe entier ou famille. Dans la production toscane, il est plus tardif, en général d’aspect géométrique et souvent combiné avec des motifs végétaux ou floraux bleus de type mauresque.
100
17. Albarello Montelupo, début du xvi e siècle H. 19,8 / D. pied 8,4 / D. col 8,6
•
Inv. 1717/1
COUL.: Bleu, vert, jaune orange, rouge. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Un point de contact en haut de la panse (manque d’émail dû à un enfournement serré); à l’intérieur, émail incomplet, zones brutes, très usé. Intègre; un trou après cuisson au centre de la base; usures aux arêtes, lèvre érodée. PROV.: Paul Gillet, don 1956. BIBL.: Damiron, 1943, no. 75, p. 55; Ravanelli Guidotti, 1990a, p. 59.
A
lbarello, aux épaulements carénés, rétréci au centre, orné de deux médaillons opposés, cernés de guirlandes, dans lesquels s’inscrit en caractères gothiques le monogramme du Christ Bernardin. Entre ces médaillons, motif floral à la palmette persane. Des bandes et des filets ceinturent le col et le pied. Vénéré par saint Bernardin, le monogramme grec du nom de Jésus est l’un des symboles sacrés les plus usités dans les armoiries des ordres et congrégations religieux. L’albarello faisait donc probablement partie de l’équipement d’une pharmacie monastique 1. Des albarelli semblables et provenant du même ensemble, en dehors d’autres exemplaires de la collection Gillet (cf. Fiocco et alii, 2001, nos. 33-34), sont conservés au musée international des Céramiques de Faenza 2 et au Victoria and Albert Museum de Londres 3. Le musée de Faenza possède une cruche portant sous l’anse la lettre P, avec le même décor et le même emblème 4 qui apparaissent également sur des fragments de fouilles de Montelupo 5. Il peut s’agir là d’une partie du sigle de l’atelier auteur de l’ensemble. La palmette persane utilisée en remplissage entre les médaillons est plus large et aplatie dans la version toscane que faentine (cf. cat. nos. 2-3). Ce motif, lié au décor moyen-oriental et à la grenade (melograno) sur les tapis et les brocarts, se répandit dès la fin du xv e siècle dans la céramique de Montelupo. Il y perdura avec succès, alors qu’il semblait ailleurs être en pleine décadence 6.
102
On pourrait émettre l’hypothèse d’une pharmacie gérée par les Jésuates, qui aurait pour emblème le monogramme bernardin. Cette congrégation religieuse fut fondée en 1360 à San Giovanni Colombini de Sienne, approuvée en 1367, et prit, en 1492, le nom des Jésuates de saint Jérôme sur ordre d’Alexandre VI. Durant environ deux siècles, les Jésuates furent rigoureusement laïcs, malgré les trois vœux, et c’est seulement en 1606 qu’ils purent accéder au sacerdoce (ils s’appelèrent ensuite Clercs Apostoliques). L’Ordre fut dissout en 1668 par le pape Clément IX. 2. Inv. 21099 et 24870, repr. in Bojani et al. , 1985, no. 487, et in Ravanelli Guidotti, 1990a, no. 24. 3. Inv. C. 80-1911, repr. in Rackham, 1940, no. 355. 4. Inv. 21070, repr. in Bojani et al. ,1985, no. 488. 5. Cf. par ex. la cruche représentée in Berti Pasquinelli, 1984, p. 38. 6. Les derniers exemples, privés du rouge et avec le contour des palmettes en manganèse, perdurèrent jusqu’au début du XVIIe siècle (cf. Berti, 1990, p. 106). 1.
18. Plat Montelupo, fin du xvi e - début du xvii e siècle H. 4,5 / D. 34,2 / D. base 14,8
•
Inv. 1368
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé, noir. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail irrégulier; revers à fond blanc rosé: grand retrait, base brute à ressaut (3 mm) partiellement émaillée; bordure brute apparente au revers. Accidenté; de face: restauration sur le quart supérieur gauche (9 h / 12 h); au revers: restauration (8 h / 12 h); un trou de suspension a été percé dans l’aile après cuisson. Sur la base, inscription en noir, à froid: A-II (ou n). PROV.: Paul Gillet, don 1938.
A
u centre, dans un médaillon cerné d’une bande hachurée, une tête d’ange porte une corbeille de fruits. L’aile à bord déversé est cernée d’une moulure saillante. Autour du médaillon, décor a quartieri de compartiments rayonnants sur fond alternativement bleu, vert, jaune et orange, parcourus par des rinceaux terminés en crosses et entourés d’une frise d’arcatures portant chacune une fleur. Au revers de l’aile, trois filets concentriques bleus et espacés. Le décor a quartieri, ainsi appelé par Picolpasso 1, s’affirma à Faenza dans les années 1540-1560 (cf. cat. no. 21). Il fut également utilisé par les potiers de Montelupo en vue sans doute d’imiter les modèles faentins, dans des versions généralement simplifiées, cependant parfois, très proches des originaux 2. Les datations sont postérieures, du dernier quart du xvi e siècle et de la première moitié du siècle suivant.
104
Cf. feuille 70 r. du manuscrit reproduit en fac-similé par R. Lightbown et A. CaigerSmith (Picolpasso, 1980, vol. I). 2. Cf. , par ex. , les exemplaires du musée international des Céramiques, inv. 21338, 21506 et 21502. 1.
19. Albarello Sienne, première moitié du xvi e siècle H. 34,2 / D. max. 28,5 / D. base 16 / D. col 16,2
•
Inv. 1993
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail incomplet: zones brutes aux épaulements, aux anses, autour de la base; intérieur à glaçure plombifère. Egrenures sur le pourtour, à l’épaulement supérieur et à l’anse gauche; restauration au col; à la base, l’émail s’écaille et laisse voir une pâte rosée. PROV.: Coll. Alfred Pringsheim (vente Londres, II, 20 juillet 1939, no. 334, repr. p. 100); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Falke, 1914, repr. II, pl. 89, no. 167; Damiron, 1943, no. 40, p. 29; Giacomotti, 1962, p. 25, repr. p. 38, fig. 17; Thornton-Wilson, 2009, I, p. 184; Luccarelli - Migliori Luccarelli, 2012, p. 90, note 57; Poole, 1995, p. 151 (mentionné par rapport à un albarello semblable).
L
’albarello cylindrique, à épaulements carénés et col court à rebord évasé, est muni de deux anses verticales formées de trois colombins accolés terminés en pointe retroussée. Une frise de motifs alla porcellana orne les épaulements supérieur et inférieur. Sur la face principale, décor à grotesques sur fond bleu avec sphynge, dauphins et ibis affrontés. En-dessous, un écriteau à fond blanc porte l’inscription pharmaceutique SASSAFINA. Sur l’arrière, où se prolonge l’écriteau qui ceinture complètement le corps, figure un blason désormais illisible. On connaît d’autres albarelli de la même série, conservés au Fitzwilliam Museum de Cambridge 1, au British Museum 2 et au Victoria and Albert Museum de Londres 3, au Kunstgewerbmuseum de Leipzig 4, au musée civique de Massa Marittima 5, et dans une collection privée 6. Ils ont à peu près tous les mêmes forme et distribution décorative, avec des variantes notamment en ce qui concerne la présence, ou non, d’un médaillon représenté au centre de la grotesque. Une incertitude plane sur leur origine. L’attribution faentine des plus anciens catalogues est désormais dépassée, faute d’une quelconque confrontation; Wilson attribue avec le bénéfice du doute l’albarello du British Museum à Montelupo Fiorentino en raison de ses affinités, sur le plan du décor, avec une cruche à grotesques provenant du puits des lavoirs 7, la plus importante fouille de Montelupo. Poole, à propos de l’exemplaire du Fitzwilliam, préfère parler plus généralement de Toscane, soulignant que les analyses faites en 1991 par le département de recherche scientifique du British Museum n’ont donné aucune indication certaine. Luccarelli, en revanche, penche fortement pour une attribution à Sienne, et il nous semble avoir raison. Par exemple, l’analogie des formes entre ce groupe d’albarelli et celui de l’ensemble de l’hôpital de la Scala de Sienne 8 est significative. En outre, les exemplaires du musée civique de Massa Marittima proviennent, selon des informations recueillies sur place, du couvent local de S. Chiara; la proximité de Massa et de Sienne rend probable une commande à des artisans de Sienne qui, dans la première moitié du xvi e siècle, étaient parfaitement en mesure de produire de la céramique décorée de très haut niveau. Dans le catalogue du British Museum, édité en 2009, Dora Thornton et Timothy Wilson semblent pencher eux aussi pour une attribution à Siena, avec quelque réserve cependant 9. Le contenu est probablement à interpréter comme SAL SABINA, Sel de Sabine, sel obtenu du Juniperus Sabina L., conifère dont on récolte les feuilles; on utilise le suc de ses jeunes pousses pour ses vertus médicinales, emménagogue, antihémorragique et diurétique. 106
Inv. C. 185-1991, repr. in Poole, 1995, p. 151, no. 215. 2. Inv. MLA 1885, 5-8, 23, in Wilson, 1987a, no. 109 (attribué dubitativement à Montelupo, c. 1510-40). Thornton- Wilson 2009, I, no. 117, pp. 183-184. 3. Inv. 7840-1861, in Rackham, 1940, no. 248 (attribué à Faenza, c. 1530). 4. Gaude, 1986, no. 62. 5. Repr. in Luccarelli, 1990a, pp. 370-371, pl. IX-X. 6. Hotel Drouot, Paris, 29 juin 1977, no. 11. 7. Repr. in Berti-Pasquinelli, 1984, p. 108. 8. Luccarelli, 1990a, pp. 366370, pl. II et VIII. Luccarelli Migliori Luccarelli, 2012, p. 39, figs. 21-23. 9. Thornton-Wilson 2009, p. 184. 1.
20. Albarello Sienne, début du xvi e siècle H. 24,6 / D. base 11,6 / D. col 11,2
•
Inv. 1916
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, violet, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Picots et bulles; intérieur émaillé, irrégulier, nombreuses zones brutes, pâte rosée; lèvre et base brutes. Accidenté, complet (un fragment au col, cinq fragments à la base), restauration ancienne. Sous la base, étiquette de marchand, rectangulaire, imprimée doré sur fond blanc: « GARANTI ANCIEN / Jean Nicolier / 72 rue de Seine, PARIS ». PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 73, p. 54; Fiocco - Gherardi, 2004, p. 204, fig. 12.
A
lbarello à épaulements anguleux, légèrement rétréci en son milieu, au col court à lèvre évasée. Le corps est orné d’une large bande circulaire à grotesques composées de vases d’où sortent inflorescences et serpents affrontés. A la partie supérieure, un cartouche horizontal porte l’inscription en majuscules S. YO. DI’. Z OPPILATI. DO (sciroppo deoppilativo diarhodon de Mésué). Autour des épaulements, deux bandes superposées de carrés barrés par deux diagonales. Dans la production contemporaine de Sienne et de Faenza, l’alternance du fond bleu et orangé des motifs végétaux et des grotesques est fréquente. Le contenu pourrait être le sirop désopilatif diarhodon de Mésué à base de rose, de sucre et de vinaigre, qui, selon Calestani, ouvre l’opilation, c’est-à-dire l’occlusion du foie et de la rate 1.
108
1. Calestani, 1575, pp. 44-45.
21.
Plat Sienne, début du xvi e siècle H. 6 / D. 30,2 / D. talon 10,5
•
Inv. 1922
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé, violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Revers émaillé blanc; talon et base bruts; deux trous de suspension
pratiqués avant cuisson; balafre sous la base. Accidenté, entier (onze fragments), restauration ancienne; traces d’usure sur le bord. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Fiocco - Gherardi, 2004, p. 211, fig. 30.
A
u centre du plat creux, le blason de la noble famille siennoise Mazzacorni dell’Incontri (partie gauche; d’argent à l’aigle au vol de rouge terni, couronné d’or, sortant de la partition; partie droite: gradins échelonnés d’azur et d’or surmonté d’une tête d’angelot 1. L’aile est ornée en bleu sur fond orangé, d’un motif à grotesques composé d’inflorescences flanquées de dauphins affrontés et de cornes d’abondance. Revers uni. Ce plat appartient à la production de Sienne du début du xvi e siècle qui développe le thème de la grotesque dans le goût répandu du Pinturicchio et de ses ateliers, et qui trouve ses meilleurs exemples dans le pavement de l’Oratorio de Santa Caterina à Fontebranda (1504-1505) et dans celui du palais Petrucci (1509). Cette production présente de grandes affinités avec celle de Faenza, au point de créer souvent des confusions. Cela est dû à la présence de céramistes de Faenza immigrés, dont le fameux maître Benedetto, qui semblent être les protagonistes de la première période de la Renaissance de la majolique de Sienne. Les pavements de la fin du xv e siècle, le Docci à San Francesco (vers 1475) et le Bicchi à San Agostino (1488), exécutés par l’atelier de Mazzaburroni à Sienne, sont en fait fondamentalement différents, bien que le second montre déjà un goût prononcé pour le fond orangé.
110
1.
Archive de l’Etat de Florence, armoiries des familles toscanes décrites dans le Recueil Ceramelli Papiani fascicule 7020. Parce que le céramiste n’était pas en mesure de reproduire exactement la couleur rouge de l’aigle, il a utilisé à la place le brun de manganèse.
22. Plaque votive Toscane ?, début xvii e siècle H. 26,3 / L. 25,7 / Ep. 1,5
•
Inv. 1973
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, rouge, noir, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Revers brut, coulées d’émail. Accidentée, complète, fracture diagonale
(trois fragments) de l’angle supérieur gauche à l’angle inférieur droit; réparation ancienne. PROV.: Coll. Heugel; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 38, p. 33.
L
a plaque, presque carrée, a un bord en relief. Elle représente la Vierge portant sur le bras l’Enfant Jésus qui se penche pour embrasser le petit Jean-Baptiste; derrière lui, sur la gauche, saint Pierre, reconnaissable à ses clés. Fond de paysage de montagnes et, sur la droite, un arbre au tronc tourmenté. L’image semble adaptée librement d’une gravure de Nicolas Béatrizet, elle-même inspirée de Girolamo Muziano 1. L’attribution est incertaine; les couleurs, en particulier la présence du rouge et la tonalité du vert, semblent indiquer une production toscane du xvi e siècle tardif. Des plaques votives furent produites tant à Montelupo que dans d’autres centres de la Toscane méridionale. Il s’agit toutefois d’un sujet encore peu étudié et les références sont rares.
Nicolas Beatrizet, La Sainte Famille et saint Jean Baptiste enfant [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
112
1. Surnommé le Beatricetto
(Lunéville 1515? - après 1565), dessinateur et graveur, il travailla à Rome de 1548 à 1553 où il grava de nombreuses œuvres inspirées aussi bien de l’antiquité que de son époque, en particulier Raphaël. De même Muziano, peintre et graveur (Acquafredda, Brescia, 1528 - Rome, 1592), s’établit à Rome en 1548 où il travailla principalement pour la cour pontificale.
23. Albarello Deruta, début du xvi e siècle H. 23,5 / D. base 10,7 / D. col 10
•
Inv. 1962
COUL.: bleu, vert, jaune, brun / roux. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Intérieur à glaçure plombifère jaunâtre et terne; deux points de contact sur la face arrière (enfournement serré); base brute. Email tressaillé; fêlure à droite de la couronne, deux égrenures (l’une au col, l’autre sous le médaillon); réparations dont le portrait. PROV.: Coll. Robert Kahn; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 115, p. 84.
A
lbarello à épaulements carénés, à peine rétréci dans sa partie centrale, au col cylindrique à lèvre évasée. Dans une guirlande de feuilles et de fruits liée de lacs s’échappant vers l’arrière, un cartouche rectangulaire divise en deux le décor. Il porte l’inscription en capitales romaines ZVRºBºGºLºSSATO (Zucchero buglossato, saccharum buglossatum de Mésué, fleurs de buglosse confites au sucre, coloré en rouge par l’alkanna); la buglosse ou bourrache était autrefois très recherchée pour soigner les affections cardiaques et celles du système urinaire. Au-dessus du cartouche dans un médaillon ovale feuillu, profil de femme en vêtements « à l’antique ». Au-dessous, blason non identifié, flanqué de deux cornes d’abondance, symboles de prospérité. L’attribution à Deruta se fonde sur la forme et la distribution décorative. La guirlande liée de lacs et l’espace interne divisé en deux par le cartouche sont caractéristiques de la production de Deruta. Les couleurs à base d’ocre, de jaune clair, de bleu noirâtre et de vert émeraude, du type dénommé petal-back, autorisent une datation du début du xvi e siècle. Pour l’analogie, voir un exemplaire du Victoria and Albert Museum de Londres, attribué par Rackham à Deruta, vers 1515 1. Sur un plan stylistique, un albarello semblable daté de 1499, et d’importance car il constitue une référence chronologique, se trouve dans une collection privée 2.
114
Inv. C. 367-1889, in Rackham, 1940, no. 420. 2. In Luzi et al. , 1991, no. 27/C, p. 133. 1.
24. Albarello Deruta, début du xvi e siècle H. 22 / D. base 10,2 / D. col 10,6
•
Inv. 2012/2
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Col gauchi; intérieur à glaçure plombifère de couleur bistre; sillons de tournassage apparents; dessous du pied brut avec des signes gravés après cuisson: L N 3 X; inscription à froid, tracée à l’encre blanche: 6846. Intègre; tressaillures dans l’émail. PROV.: Don Paul Gillet, 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 44, p. 31; Giacomotti, 1974, p. 115, no. 419; Blazy, 1998, repr. p. 72.
A
lbarello à épaulements anguleux, légèrement rétréci dans sa partie médiane, au col très court à lèvre évasée. Dans une guirlande de feuilles et de fruits liée par des rubans se prolongeant vers l’arrière, buste d’un empereur de profil à gauche. Devant lui, banderole verticale avec l’inscription IVSTINO.I.PERADºR. (Justino Imperator: l’empereur Justin). Il s’agit de l’un des rares cas où le décor est en rapport avec le contenu, un électuaire appelé ainsi du nom de l’empereur d’Orient Justin 1, son inventeur. Ce remède était conseillé dans les cas de calculs et de maladies urinaires 2. Un exemplaire semblable est dans la collection Gillet 3, un autre se trouvait dans la collection Beckerath 4. On peut aussi le comparer, pour la stylisation de sa guirlande, à un exemplaire daté de 1499 dans une collection privée 5, avec un autre daté de 1503 au musée des Céramiques de Faenza 6 et à un fragment portant la même date provenant de la décharge du couvent Sainte-Anne à Foligno 7, pièces qui fournissent un point de référence chronologique bien qu’elles n’appartiennent pas au même ensemble 8.
116
Justin vécut de 450 à 527, et fut l’oncle de Justinien. 2. Parmi les 24 substances qui le composaient, il y avait encore du saxifrage. 3. Fiocco et al. , 2001, no. 50 4. Chompret, 1949, no. 329 5. Luzi et al. , 1991, no. 27/C, p. 133 6. Fiocco - Gherardi, 1988, no. 181, p. 266 7. Busti-Cocchi, 1995, pl. IV, fig. 9 8. Toutefois quelques albarelli datés de 1543 avec guirlande semblable font supposer que ce type a perduré longtemps (Finarte, 1964, no. 68). 1.
25. Albarello Deruta, vers 1507 H. 21 / D. base 11 / D. col 10,2
•
Inv. 1969
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail bleuté; à l´arrière, grosses lacunes d´émail (retraits de cuisson); intérieur à glaVure plombifère; au col, deux manques avant cuisson; base brute avec inscriptions gravées après cuisson, et une inscription peinte à l´encre noire: 320; à l´intérieur étiquette ronde et festonnée: DOUANE / CENTRALE / PARIS. Intègre; ébréchures au col. PROV.: Coll. Verdé Delisle; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 116, p. 84.
A
lbarello à épaulements carénés, légèrement rétréci en son milieu, au col très court à lèvre évasée. Au milieu d’une guirlande de feuilles et de fruits liée de rubans qui se prolongent à l’arrière jusqu’à se toucher, buste d’empereur de profil à gauche et couronné de lauriers, dans un médaillon encadré de motifs à palmettes. Sous le médaillon, un cartouche porte, en caractères romains, l’inscription VNGº. CO CAPHºFA (onguent à base de camphre, substance aromatique extraite de la cinnamone, à odeur aromatique caractéristique, utilisée comme stimulant des centres nerveux). La forme, les couleurs, la distribution décorative et la stylisation de cet albarello permettent de l’inclure dans un groupe homogène d’exemplaires dont certains, datés de 1507, sont conservés au musée des Céramiques à Faenza, au Kunstgewerbemuseum de Cologne et au Geementemuseum de La Haye 1. Ce groupe est aux couleurs du petal-back (cf. cat. no. 28); son iconographie est inspirée des Tarots de Mantegna. Sur cet exemplaire de la collection Gillet le profil est en revanche probablement issu d’une monnaie ou d’une médaille romaine, ou bien d’un dessin la représentant. Un albarello très semblable, portant un profil couronné de lauriers identique, était conservé dans une collection privée de Rimini 2 et faisait sans doute partie du même ensemble.
118
Reproduits in Fiocco Gherardi, 1994, nos. 58-60. 2. Reproduit in Leonardi, 1982, p. 133, fig. 142; l’inscription pharmaceutique « VGO. DE. COTI. CASTANNIO » est tracée avec des caractères et des abréviations similaires. 1.
26. Albarello Deruta, vers 1507 H. 23 / D. base 11,8 / D. col 10,8
•
Inv. 1967
COUL.: bleu, vert, jaune, orangé. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émaillage incomplet; intérieur à glaçure plombifére. Accidenté, complet (partie haute cassée en plusieurs fragments), réparation ancienne; point de choc à droite de l´inscription d´où partent trois fêlures. PROV.: Coll. Alfred Pringsheim (vente Londres, 8 juin 1939, no. 142); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Falke, 1914, I, repr. pl. 60, no. 106; Damiron, 1943, no. 29, p. 22; Giacomotti, 1962, p. 32, repr. p. 41, fig. 19; Giacomotti, 1974, p. 113; Drey, 1978, repr. p. 39, fig. 11C; Ibid. , 1984, repr. p. 24, fig. 46; Fiocco - Gherardi, 1994a, repr. p. 189, no. 64; Busti-Cocchi, 2004, fig. 4, p. 31.
A
lbarello légèrement cintré, à épaulements carénés, à col court et bord évasé. Sur la face, un cartouche médian porte l’inscription gothique: ELLE. CONTRA. PESTA (électuaire contre la peste). Au-dessus, saint Roch, entre deux cornes d’abondance, montre le bubon de la peste sur sa cuisse. Au-dessous de l’écriteau, un groupe d’enfants dont l’un est ailé, joue avec un chien monstrueux. Le tout s’inscrit dans une guirlande de rubans entrelacés, liés à leur base, qui s’échappent et se rejoignent vers l’arrière. Là encore l’illustration a été choisie en fonction du contenu, saint Roch étant le patron des pestiférés. La figure du saint s’inspire, avec quelques petites variantes, d’une fresque attribuée au Pérugin 1 (Pietro Vannucci, dit le), représentant Dieu, saint Romain et saint Roch (1477-1478), autrefois dans l’église San Francesco à Deruta et qui est aujourd’hui conservée à la pinacothèque. Cet albarello appartient a une série de forme plutôt souple, aux épaulements biseautés et au col très court, orné de figures grotesques (souvent des personnages intentionnellement exagérés et monstrueux) dans une guirlande composée de gros fruits proches des poires ou des coings. Les couleurs sont celles du petal-back. Là encore, l’ancienne attribution à Sienne a été rectifiée par Rakham au profit de Deruta. Très courante, cette typologie comprend aussi des chevrettes à corps ovoïde sur pied haut dont le goulot est relié au col par une tresse. Des exemplaires semblables sont conservés dans de nombreux musées parmi lesquels la Corcoran Art Gallery de Washington, le Metropolitan Museum de New York, le Victoria and Albert Museum, le Louvre, le Musée national de la céramique de Sévres et l’Ermitage à SaintPétersbourg. Le Pérugin, L’Eternel avec saint Romain et saint Roch, Deruta, Pinacothéque [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
120
1. La fresque était autrefois
attribuée à Florenzo di Lorenzo, malgré la ressemblance de la figure de saint Roch avec celle d’un des Rois mages de l’Adoration attribuée au Pérugin (Galerie nationale de l’Ombrie). La représentation de la ville dans son aspect médiéval, avant la démolition des tours et des fortifications, est d’un grand intérêt documentaire (cf. Mancini, 1980, p. 42).
27. Chevrette Deruta, début du xvi e siècle H. 23 / D. pied 11,4 / D. col 10 / D. panse 17,2
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Inv. 1917/2
COUL.: Bleu, vert, jaune, jaune / orangé. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail maigre rosé; à l’intérieur, glaçure plombifère; sur la lèvre, dépression provoquée avant cuisson; sur le Y de l’inscription, gros pois de contact (enfournement serré). Le dessous du pied brut porte des signes gravés après cuisson: H L 3 S 1 0. Manques restaurés au bec et au pied; lien restauré; fêlure à la base. PROV.: Coll. John Edward Taylor (vente Londres, juillet 1912, no. 115); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 67, p. 50; Giacomotti, 1962, p. 32, repr. p. 38, fig. 18; Ibid. , 1974, p. 114; Drey, 1978, p. 41, fig. 12C; Ibid. , 1984, p. 24, fig. 49. EXP.: Nice, 1990, no. 5.
C
hevrette à panse globulaire étirée vers le bas simulant un piédouche, sur fond plat évasé, avec col cylindrique à lèvre retroussée et goulot retenu par un lien; l’anse, coudée et verticale, porte deux cannelures. Le décor à registres s’inscrit dans une guirlande de feuilles et de fruits liée de rubans se prolongeant vers l’arrière. Au centre, un cartouche horizontal porte l’inscription en caractères latins SY.DE.ABSENZO (sirop d’absinthe employé pour réguler le suc gastrique et en tant que digestif). Au-dessous figure l’emblème non identifié de la pharmacie commanditaire et, au-dessus, un décor de chimères ailées, affrontées et des motifs en champlevé (graffito). La forme épouse à peu près celle des chevrettes de l’ensemble précédent dont plusieurs exemplaires sont datés de 1507 1. Les couleurs fondées sur l’ocre et le bleu noirâtre, identiques à celles du petal back, sont également caractéristiques des vases pharmaceutiques de Deruta du premier quart du xvi e siècle.
122
1. Fiocco - Gherardi, 1994a,
no. 66.
28. Plat Deruta, fin du xvi e - début du xvi e siècle H. 6,5 / D. 39 / D. base 20
•
Inv. 1693
COUL.: Bleu, vert, jaune, jaune orangé. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Gauchissement très prononcé; léger manque sur le bord (10 h), produit avant cuisson. Tressaillures dans l’émail. Accidenté, complet (cinq fragments), restaurations importantes. PROV.: Coll. Ponche d’Abbeville; Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Damiron, 1943, no. 22, p. 17; Giacomotti, 1962, repr. p. 32, fig. 11; Fiocco-Gherardi, 1994, repr. p. 168, fig. 34.
A
u centre du plat, dans un médaillon bordé d’une rangée de festons et de pointes, un guerrier en buste, de profil à gauche, devant une branche de fleurs de tournesol. L’aile du plat est divisée en compartiments où alternent inflorescences et imbrications. Le revers est orné de grands pétales striés en forme de gouttes avec des astérisques, formant un décor rayonnant. Ce plat appartient à la typologie que Rackam a appelée petal-back en se référant au décor des revers de ce type. Il en définit les caractéristiques et le rattache à la production de Deruta dans un article fameux publié en 1915 par le Burlington Magazine 1. Le pétale dérive probablement de l’oeil de plume de paon, motif qui appartient au répertoire gothique tardif. Cependant le petal-back représente la première typologie véritablement Renaissance de la majolique de Deruta, que caractérisent les ornements géométriques et végétaux à base d’ovales, d’imbrications et de guirlandes disposés de manière rigoureuse en compartiments ou en bandes concentriques, et surtout la représentation fréquente de profils classiques de guerriers et d’empereurs dans des médaillons. Sur le plan chronologique, si l’on se réfère aux pièces datées ou que l’on peut dater 2, en corrélation avec la diffusion à Deruta du lustre métallique et la suprématie exercée par famille Masci au sein des fabricants de majoliques dérutins 3, ce plat se situe vers la fin du xv e siècle et les débuts du xvi e. Les plats et les coupes de type petal-back sont généralement très soignés et légers. Ils portent parfois sous la base une lettre paraphée, vraisemblablement la marque de l’atelier. Les couleurs de base — jaune ocré, jaune froid, bleu noirâtre, vert émeraude — caractérisent aussi la majeure partie des pots de pharmacie produits à Deruta dans ces années-là.
124
Rackam, 1915, pp. 28-35; pour une synthèse, cf. Fiocco - Gherardi, pp. 43-45. 2. Par ex. le service de pharmacie à emblème de la tête de maure (cf. cat. no. 62) daté de 1501 et 1502, le plat de la Wallace Collection portant le blason épiscopal de Christophe Bourbon de Petrella, évêque de Cortone de 1477 à 1502, et le petit plat du Victoria and Albert Museum orné des armes d’alliance des Getani et des Minerbetti mariés en 1493 (cf. Fiocco-Gherardi, 1994a, figs. 52-57, 31 et 33). 3. Biganti, 1987, pp. 214-220. 1.
29. Coupe Deruta, début du xvi e siècle H. 17,5 / D. 26 / D. pied 14,4
•
Inv. 1699
COUL.: Bleu; reflets métalliques dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Revers du piédouche émaillé blanc; imperfections techniques, picots. Accidentée, complète (coupe en six fragments, piédouche intègre), réparation ancienne. Ebréchures sur le pourtour. PROV.: Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Damiron, 1943, no. 90, p. 66.
C
oupe de forme circulaire, sur piédouche haut, à paroi cintrée et à bord galbé. Dans le fond et au centre, en médaillon, un oriental en buste de profil à gauche devant un rameau de fleurs de tournesol; tout autour, alternance de dents de loup et d’inflorescences ovales. A l’extérieur du corps, une frise d’inflorescences identiques et, à la partie inférieure, des godrons obliques; sur le pied, une frise de feuilles découpées rayonnantes. Dans la première moitié du xvi e siècle, des coupes de ce genre, avec un profil cylindrique néanmoins plus trapu, se rencontrent fréquemment à Deruta 1. Le profil d’homme, que caractérisent la netteté du dessin du sourcil et une certaine dureté, se retrouve presque à l’identique, non seulement sur des exemplaires à lustre généralement datés du début du siècle2, mais aussi sur des majoliques polychromes de type petal-back 3. Ils ont donc été exécutés à Deruta, dans un atelier actif au début du xvi e siècle 4.
126
D’autres coupes ornées au centre d’un profil entouré de dents de loup, de forme cependant cylindrique, sont conservées au Louvre (inv. OA 1662 et 1674, repr. in Giacomotti, 1974, nos. 550551) et au musée Adrien Dubouché de Limoges (inv. 5 444, repr. , ibid. , no. 552). 2. Cf. par ex. la coupe du Petit Palais à Paris, inv. Dutuit 1119, in Join-Dieterle, 1984, no. 25, pp. 98-99, et le petit plat du musée municipal de la Céramique à Deruta, in Omaggio a Deruta, 1986, no. 25, p. 98. 3. Cf. par ex. la coupe du Louvre inv. OA 7573, in Giacomotti, 1974, no. 455, p. 132, et le fragment de fouilles de Deruta in FioccoGherardi,1988, p. 37, pl. IXa. 4. La manière de peindre de cet artiste rappelle celle du Painter of the Diruta Plate, appelé ainsi par Rackham en raison de l’inscription Fato in Diruta d’un plat du Victoria and Albert Museum (inv. C. 2156-1910), in FioccoGherardi, 1994a, fig. no. 133, p. 237). 1.
30. Vase Deruta, première moitié du xvi e siècle H. 24,2 / D. panse 18,6 / D. col 12,6 / D. pied 10,6
•
Inv. 1935
COUL.: bleu; reflets métalliques dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Lustre métallique discret; surface rugueuse à certains endroits; intérieur émaillé blanc grisâtre; sous l’anse, sur la panse, retraits d’émail; sur le piédouche, une fêlure provoquée à la cuisson; base brute. Trois traces de réparations: le fel au col, sur la paroi de la coupe et à la jonction du piédouche. PROV.: Coll. Lafontaine; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 91, p. 67; Poole, 1995, p. 173 (cité en relation avec un exemplaire analogue).
V
ase en forme de bulbe sur piédouche haut et conique, avec col à bord mouluré et deux anses verticales recourbées Deux grandes inflorescences opposées, une frise médiane et de larges godrons peints à la partie inférieure et sur le pied constituent le décor. Cette forme de vase est l’une des plus communes à Deruta au xvi e siècle, qu’il s’agisse de majoliques à lustre ou polychromes. Elles étaient dotées d’un couvercle conique muni d’un bouton de préhension. La cruche à bec en gouttière et à une seule anse en constitue une variante. Ces vases reposaient vraisemblablement au centre d’un bassin à ombilic, genre également très commun à Deruta. A notre connaissance, la corrélation avancée n’a cependant jamais été prouvée. Largement diffusés, de nombreux vases similaires subsistent, notamment dans les collections publiques (Louvre 1 et Petit Palais 2 à Paris, musée régional de la céramique d’Ombrie 3, musée national d’art médiéval à Arezzo 4, Metropolitan Museum de New-York 5 et Fitzwilliam Museum à Cambridge 6 ).
128
Inv. OA 1832, OA 1831, R 221, R 222, OA 1657, OA 6999, OA 7000, R 220, R 219, in Giacomotti, 1974, nos. 626634. 2. Inv. S. 2446 et S. 2447, in Join-Dieterle, 1984, nos. 2627, pp. 100-103. 3. In Omaggio a Deruta, Florence, 1986, no. 27, p. 51. 4. In Maioliche umbre decorate a lustro, 1982, no. 33, p. 114. 5. Ibid. , no. 34, p. 115. 6. Inv. C. 53-1927, in Poole, 1995, no. 244, pp. 172-173. 1.
31.
Coupe Deruta, vers 1520-1530 H. 4,6 / D. 30 / D. pied 12
•
Inv. 1946
COUL.: Bleu; reflets métalliques dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Trois traces de pernettes sur le portrait; revers émaillé; imperfections techniques sur la surface. Fêlure (3 h); usures sur le pourtour; manque au pied; réparations anciennes d’un fragment (1 h / 3 h) et de deux éclats d’émail sur le médaillon central. PROV.: Coll. Alfred Pringsheim (vente Londres, II, 19 juillet 1939, no. 320); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 50, p. 45; Falke, 1994, vol. III, pl. CLXXX.
C
oupe sur pied bas ornée au centre d’un profil de guerrier en buste, vêtu d’un habit et coiffé d’un casque de type classique, se détachant sur un fond de paysage animé de petites collines pointues. Sur l’aile, frise de motifs rayonnants à arabesques. Le revers est émaillé en blanc. Un certain nombre d’estampes imprimées à Florence par un florentin du cercle de Baccio Baldini, actif vers 1470, présentent des profils masculins coiffés de casques fantastiques que le peintre de cette coupe aurait pu interpréter. La gravure Roma, du Maître IB con l’uccello, plus proche encore par le casque à plumet, le drapé de la tunique et la figure, a également pu l’inspirer. Le décorateur aurait utilisé la tête seule, en la modifiant légèrement, comme ce fut le cas pour le plat du Maître du pavement de San Francesco conservé au Louvre 1. Cette coupe paraît du reste très proche du style de l’atelier, qui a produit ce pavement. Bien que notre majolique soit d’une exécution moins raffinée, on y retrouve certains éléments, tel le paysage stylisé qui présente en fond des montagnes coniques sur lesquelles se dressent des tours, telle l’ombre bleue qui crée une zone autour du profil, tel enfin le dallage à carreaux. Il est rare que le motif à arabesque encercle un figure centrale; pour une disposition similaire, on pourra se référer par exemple au plat d’apparat du château d’Ecouen, décoré au centre de deux chiens attrapant un lièvre de leurs crocs, dont l’exécution est également très proche du pavement de San Francesco 2.
130
Inv. OA 1545, in Giacomotti, 1974, no. 538. 2. Inv. Cluny 2454, Ibid. , no. 642. 1.
32. Plat d’apparat Deruta, Maître du pavement de San Francesco, (Nicola Francioli dit Co?), vers 1524 H. 9,5 / D. 42,5 / D. talon 14
•
Inv. 1945
COUL.: Bleu, vert; reflets métalliques dorés et rehauts de rouge métallique. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »:
décor de grand feu complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Nombreux défauts dans l’émail; sillons de tournassage apparents. Accidenté, complet (cassé en deux dans sa hauteur, plus quatre fragments de part et d’autre de la cassure centrale, sur l’aile), réparations anciennes. PROV.: Coll. Heilbronner; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 41, p. 36.
P
lat sur talon, à bassin profond et à aile large. Au centre et sur fond de paysage, saint Paul tient le livre et l’épée devant deux inflorescences. Sur l’aile divisée en compartiments de largeurs inégales, appelés métopes et triglyphes, alternent fleurons et imbrications. Le revers est recouvert d’un vernis jaunâtre. Deux trous percés au talon avant cuisson indique qu’il s’agit là d’un plat d’apparat destiné à être suspendu. Bien que l’aile porte un motif des plus communs, ce plat n’appartient certainement pas à une série. L’image même de saint Paul est rare sur les plats d’apparat de Deruta, et nous avons là une pièce vraisemblablement réalisée sur commande. Le contraste du décor assez grossier de la bordure et de celui du centre, qui se distingue par l’extraordinaire qualité de son trait, apparaît très clairement. Ce plat serait attribué au plus raffiné des peintres ayant décoré le pavement de San Francesco, chef-d’œuvre de la majolique de Deruta daté de 1524, probablement Nicola Francioli dit « Co » faute de documentation 1. Hormis le tracé de la figure du saint, l’arrière-plan composé d’une ville riche en tours et en campaniles, les inflorescences, sont autant d’éléments communs au pavement et au plat. Ce dernier devrait donc dater de la même époque. Un plat orné d’un profil féminin, également sur fond de paysage, est attribué à la même main (ancienne coll. Charles Damiron) 2.
132
Sur le pavement et sa bibliographie, cf. FioccoGherardi, 1984, 3-4, pp. 183-188; Ibid, 1994a, pp. 5051, fig. 138; Busti-Cocchi, 2004b. 2. Chompret, 1949, II, p. 29, fig. 209. 1.
33. Plat d’apparat Maître du pavement de San Francesco, (Nicola Francioli dit Co?), vers 1524 H. 9 / D. 42 / D. base 12,2
•
Inv. 1937
COUL.: Bleu (deux tons, dont un intense); reflets métalliques dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »:
décor de grand feu, complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Irrégularités de la glaçure: coulures, picots, balafres. Usures et manque d’émail sur le pourtour extérieur et l’arête interne. Bon état de conservation. Porte un cachet de cire rouge. PROV.: Coll. Baron Gustave de Rotschild; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 63, p. 46; Giacomotti, 1962, repr. p. 44, fig. 29; Wilson, 1993a, p. 149 (cité en relation avec un autre exemplaire portant la lettre N couronnée). Casati Migliorini, 2004 p. 45; Anversa, 2014, p. 90
P
lat à talon, à bassin profond et à aile large. Au centre et sur fond de rameaux fleuris, buste de face d’un jeune homme coiffé d’un casque ailé et vêtu d’une armure élégante; à son côté, lettre N en majuscule, surmontée d’une couronne. Sur l’aile, guirlande d’inflorescences à calices et à feuilles découpées. Le revers est recouvert d’un vernis vert clair. Deux trous percés au talon avant cuisson indiquent que ce plat était destiné à être suspendu. L’attitude du visage, la forme du couvre-chef et de l’armure s’inspirent sans doute d’un dessin perdu du Pérugin. La lettre N couronnée est difficile à interpréter. Elle apparaît en effet auprès de personnages très différents les uns des autres. Elle est associée par exemple à la jeune femme de profil ornant un bassin à grotesques en relief de la collection Lehman, que l’on pourrait peut-être attribuer au maître du pavement de San Francesco 1; elle accompagne également la tête d’empereur lauré qui figure sur un plat d’apparat de la National Gallery de Washington 2. Cette lettre ne peut Le Pérugin, L’Eternel avec des donc se référer au personnage lui-même. prophètes et des sibylles (dètail) Pérouse Collegio del Cambio [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
134
New York, Metropolitan Museum of Art, inv. 1975. 1. 1032, in Rasmussen, 1989, no. 44, p. 76. 2. Inv. 1942. 9. 320, in Wilson, 1993a, pp. 147-149. 1.
34. Plat d’apparat Deruta, première moitié du xvi e siècle H. 7 / D. 44,4 / D. talon 13,3
•
Inv. 1704
COUL.: Bleu; reflets métalliques dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Très voilé; nombreux picots et défauts sur l’ensemble du plat. Intègre; usure sur l’arête interne; léger manque sur le bord, visible au revers. Etiquette: « Coll. A. Chevet ». PROV.: Coll. A. Chevet (vente Paris, 5-6 nov. 1951, no. 171); Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Damiron, 1956, no. 43, p. 38; Tortolani, 2013, p. 14, fig. 9b.
P
lat à bassin profond et à aile large dont le bord est taillé en biseau. Au centre, l’écu à rubans de la famille Baglioni. Sur l’aile, compartiments rayonnants de différentes largeurs où alternent inflorescences et imbrications. Le revers est revêtu d’un vernis jaunâtre. Deux trous pratiqués au talon avant la cuisson indiquent l’utilisation décorative de ce plat destiné à être suspendu. Les armoiries des Baglioni se rencontrent souvent dans la majolique de Deruta jusqu’aux environs de 1540 1, en hommage à cette famille qui régnait sur Pérouse que protégeait Deruta, son bourg fortifié. En effet, un plat d’apparat orné d’un blason flanqué de cornes d’abondance et portant l’inscription VIVA LA BAGLIONA CHE P.TVTTO... est d’une importance capitale car il confirme irréfutablement cette attribution. Ce plat est conservé au John Mable Ringling Museum of Art de Sarasota (USA) 2.
136
Jusqu’à la guerre du sel qui causa la ruine de la famille Baglioni. A la la mort de Paul III, celle-ci se releva toutefois et certains Baglioni occupèrent à nouveau de hautes fonctions dans la ville. Un plat de l’atelier du Frate, des années 1560, est l’exemple le plus tardif que nous connaissons de majoliques portant leurs armoiries (cf. FioccoGherardi, 1995b, pl. I). 2. S. N. 7045, in Ladis, 1989, no. 10. 1.
35. Plat d’apparat Deruta, première moitié du xvi e siècle H. 9,2 / D. 43,8 / D. base 8,2
•
Inv. 1707
COUL.: Bleu; reflets métalliques dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Pièce gauchie; trois traces de pernettes; plusieurs défauts: picots et tressaillures. Revers rugueux par endroits, inclusions, balafres et fente dans le talon. Usures sur l’arête interne, égrenures et écaillures sur la bordure; fond: fêlure et trois réparations (sur deux zones de l’aile, puis sur le bras gauche et le buste), sans aucune fracture, cette réparation de 6 cm de diamètre s’expliquerait par un problème d’adhésion de l’émail. PROV.: Coll. Parpart (Hünegg); Hermann Emden (vente Berlin, 3-7 novembre 1908, no. 74, repr. pl. 6); Heilbronner; Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Damiron, 1956, no. 46, p. 41.
P
lat au bassin profond et à aile large dont le bord est biseauté. Au centre, une jeune femme à mi-buste, de profil à gauche, tient une branche fleurie. Devant elle, une banderole porte l’inscription NEMO/SVASOR/ TE. CHONTEN/TVS (personne n’est satisfait de son propre destin). L’aile est divisée en métopes et triglyphes, compartiments rayonnants de différentes largeurs où alternent inflorescences et imbrications. Le revers est recouvert d’un vernis jaunâtre. Sur le talon, deux trous percés avant cuisson indiquent la fonction d’apparat du plat, destiné à être suspendu. L’inscription est sans doute tirée du poète latin Horace qui exprime ce concept dans la première partie des Satires 1. L’illustration est à la manière de la peinture ombrienne de la fin du xv e et du début du xvi e siècle, en particulier celle du Pérugin et du Pinturicchio. Le plat est certainement postérieur, il peut être daté des années 1520-1530, époque où la bordure à métopes et triglyphes est au goût du jour. Les majolicaires de Deruta restèrent toutefois longtemps attachés à cette manière, après même qu’elle ait cessé d’être significative du développement de l’art italien. On a souvent souligné les rapports étroits de Deruta avec Pinturicchio. Son influence stylistique émane probablement des dessins et des cartons qui circulaient dans les ateliers artisanaux. Après avoir été utilisés pour des œuvres de plus grande importance, ces dessins et ces cartons servirent longtemps aux peintres en majolique. Ce profil de jeune femme apparaît sur d’autres plats d’apparat, le plus souvent tourné à gauche - parfois à droite comme il advient lorsque le potier retourne le poncif utilisé pour calquer le dessin. L’image est fréquemment accompagnée d’une banderole portant un proverbe ou le nom d’une femme suivi de l’appellation Bella 2. Les céramistes utilisaient le plus possible le même modèle, variaient l’inscription et personnalisaient le plat selon les exigences du client.
138
Sermonum liber prior, I, v. 13: Qui fit, Maecenas, ut nemo, quam sibi sortem / seu ratio dederit seu fors obiecerit, illa / contentus vivat, laudat diversa sequentis. 2. D’autres plats d’apparat à lustre métallique présentant une jeune femme analogue sont conservés au Metropolitan Museum de New-York (repr. in Maioliche umbre decorate a lustro, 1982, no. 5, p. 94), au Victoria and Albert Museum (Rackam, 1940, nos. 475478), au Louvre et à Ecouen (Giacomotti, 1974, nos. 582583), au Fitzwilliam Museum de Cambridge (inv. C. 241932, in Poole, 1995, no. 237), et au musée municipal de Pesaro (in Mancini Della Chiara, 1979, nos. 165 et 167). 1.
36. Plat d’apparat Deruta, première moitié du xvi e siècle H. 8,9 / D. 41,5 / D. base 13
•
Inv. 1941
COUL.: Bleu; reflets métalliques dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Quelques imperfections techniques: pièce voilée; émail rugueux; retrait sur le bord laissant la terre apparente; au revers de l’aile, une zone brute. Usure de l’arête interne; deux ébréchures sur le bord postérieur. Intègre. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 59, p. 52; Wilson, 1993a, p. 154 (cité en relation avec un autre exemplaire portant la même inscription).
P
lat à bassin profond et à aile large. Au centre, une jeune femme à mi-buste, de profil à droite, tient une branche fleurie. Devant elle se déroule une banderole portant l’inscription CHI / BE. G / VIDA. SUA. BACA / ESEPR / E.IPOR / TO (Celui qui dirige bien sa barque est en sécurité comme s’il était encore au port). L’aile est divisée en métopes et triglyphes, compartiments de différentes largeurs dans lesquels alternent inflorescences et imbrications. Le revers est revêtu d’un engobe vernissé. Deux trous pratiqués dans le talon avant cuisson indiquent l’utilisation décorative de ce plat destiné à être suspendu. Ce type d’illustration associée à des inscriptions diverses, pour la plupart des proverbes et des sentences moralisantes 1, apparaît souvent sur les plats d’apparat. Le proverbe lui-même, qui invite à la prudence, se rencontre très fréquemment dans le répertoire de Deruta 2.
140
Cf. par ex. l’exemplaire du musée national de Ravenne, inv. 1855, in Zurli-Jannucci, 1982, no. 7, pp. 65-66. 2. Cf. Wilson, Op. cit. , pp. 1524, en particulier la note 5 où sont énumérés différents exemplaires portant la même maxime. 1.
37. Plat d’apparat Deruta, première moitié du xvi e siècle H. 8,5 / D. 41,6 / D. base 12,5
•
Inv. 1942
COUL.: Bleu; reflets métalliques dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu, complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Retrait d’émail sur la bordure; guillochages sur le revers de l’aile (défauts provoqués par le tournassin); trois fentes dans l’épaisseur du talon. Intègre. PROV.: Coll. Mme Mathilde de Rothschild; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 62, p. 45; Rondot, 1993, pl. 2; Blazy, 1998, repr. p. 72.
P
lat à bassin profond et à aile large au bord biseauté. Au centre, une jeune femme de face à mi-buste, portant de longues tresses nouées sur la poitrine; derrière elle se déploie une banderole qui porte l’inscription GIROLIMA. BE / LLA. PVL / ITA. Sur l’aile, métopes et triglyphes, compartiments rayonnants de différentes largeurs où alternent inflorescences et imbrications. Le revers est revêtu d’un vernis jaunâtre sur lequel est tracée une ligne bleue. Deux trous percés dans l’épaisseur du talon avant cuisson attestent le rôle décoratif de ce plat qui veut être un hommage à une femme prénommée Girolima. Les artisans de Deruta étaient si célèbres pour leurs plats d’hommage aux « belles » qu’un poète de Todi, Adriano da Concole, dans une oeuvre intitulée Au potier de Deruta, dresse une longue liste de femmes dignes selon lui de cet honneur 1. Ce portrait, que caractérisent les tresses nouées sur la poitrine, a été souvent repris sur des plats d’apparat à lustre métallique ou polychromes, accompagnés de noms divers ou de proverbes 2. L’inscription à lustre métallique est en revanche inhabituelle. Elle indique que le plat aurait été cuit en deuxième cuisson avec un phylactère vide, et complété sur commande à la troisième cuisson.
142
1.
Briganti, 1903, pp. 13-15.
2. Cf. par ex. le plat d’apparat
polychrome avec aile à contours fleuris de l’ancienne collection Adda: un portrait de femme identique est accompagné d’une banderole portant le proverbe Chi ben guida sua barca e sempre in porto (qui mène bien sa barque revient toujours au port), in Rackham, 1959, pl. 166 A, no. 380) et celui du Victoria and Albert Museum, in Rackham, 1940, no. 749, inv. 84. 1901.
38. Plat d’apparat Deruta, Giacomo Mancini dit Il Frate ?, vers 1540-1550 H. 8,1 / D. 42,2 / D. base 14
•
Inv. 1947
COUL.: Bleu; reflets métalliques dorés et rehauts de rouge métallique. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu, complété par un décor de petit feu conduit en réduction. Pièce voilée; le lustre doré est discret; nombreux défauts et picots dans l’émail; au revers, sur l’émail grisâtre et irrégulier, une marque peinte en bleu. Usures sur le bord et l’arête interne. Intègre. PROV.: Coll. F. W. Lippmann; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 20, p. 15; Giacomotti, 1962, p. 32, repr. p. 35; Fiocco-Gherardi, 1994, repr. p. 222, fig. 113.
P
lat à bassin profond et à aile large. Décor en plein représentant le Christ en croix. La croix se dresse sur un pavement quadrillé tandis que des édifices occupent l’arrière-plan. Aux pieds du Christ, le monogramme bernardin IHS tracé en grandes lettres gothiques. De part et d’autre, saint Jérôme se battant la poitrine d’un caillou, son chapeau cardinalice et le lion devant lui, et saint François en prière. Le revers est revêtu d’émail blanc. Deux trous pratiqués sur le talon avant cuisson indiquent que ce plat d’apparat était destiné à être exposé. On retrouve l’image centrale, bien que d’une autre une main, sur un plat d’apparat avec aile à compartiments (anciennes collections Buchan Hepburn et Bolognesi de Milan) vendu par Sotheby’s en 1997 1. L’iconographie a probablement été inspirée par l’illustration d’un livre sacré. La gravure qui introduit le Plenarium 2 d’Augsbourg, le 7 mai 1478, en est particulièrement proche bien que le monogramme surmonté du crucifix soit entouré des symboles des quatre évangélistes 3. La représentation de saint Jérôme a sans doute été empruntée à la gravure du Maître PW de Cologne. Elle est semblable aussi dans le rendu de l’ombre de l’anatomie. L’exécution, rigide et quelque peu archaïsante, évoque le style de Giacomo Mancini dit Il Frate des années 1545, époque où il réalise la série inspirée du Roland Furieux, et rappelle également le bassin représentant le mythe d’Erysichthon du musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg 4.
144
1.
Sotheby’s, 1997, no. 375.
2. Le Plenarium est un ouvrage
rassemblant des textes relatifs à un même sujet. Le plus commun était le Missel Plenarium qui contenait toutes les prières de la messe. 3. Bartsch, 1981, II, p. 114, no. 82. 4. Fiocco-Gherardi, 1994a, pp. 54-55, figs. 158-164.
39. Plat d’apparat Deruta, vers 1520-30 H. 9 / D. 40 / D. base 13. 5
•
Inv. 1700
COUL.: Bleu, vert, jaune orangé. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Légèrement voilé; glaVure plombifère terne; défauts. Accidenté:
cassé en deux (12 h / 5 h), fragmenté à droite (six pièces), réparation ancienne. PROV.: Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Damiron, 1943, no. 135, p. 96; Fiocco-Gherardi, 1990a, p. 35; Wilson, 1993a, p. 158 (dans
chacun de ses ouvrages, le plat est mis en rapport avec un exemplaire similaire).
P
lat à bassin profond et à aile large. Au centre, sur fond de paysage, Vierge à l’Enfant. Sur l’aile s’enroulent des rinceaux fleuris. Le revers, recouvert d’un vernis jaune verdâtre, est orné de deux spirales peintes en bleu sombre. Deux trous de suspension pratiqués sur le talon avant cuisson indiquent la destination d’apparat du plat. Cette représentation, courante dans la majolique de Deruta sur des plaques ou sur des plats d’apparat 1, dérive sans doute d’un dessin du Pérugin. Certaines de ses Madones sont en effet très proches. Citons par exemple celle du Gonfalon de la Justice (Pérouse, Galerie nationale d’Ombrie), la madone exécutée sur fresque pour la chapelle San Biagio, datée de 1521 et déposée à l’église Santa Maria Maggiore de Spello, ou encore la madone sur fresque de l’église de l’Annunziata à Fontignano, postérieure d’une année et qui en reprend l’iconographie. Le motif de rinceaux fleuris autour de l’aile se rencontre aussi dans les détails décoratifs des marqueteries du chœur du dôme et du collège du Change de Pérouse; il appartient au répertoire décoratif renaissant de l’Ombrie 2.
146
Cf. par exemple le plat d’apparat à lustre métallique avec aile à imbrications de la National Gallery of Art de Washington D. C. , inv. 1942. 9. 325, où l’image est accompagnée d’une inscription. AVE/ SANTI / SSIMA MA/RIA. MATE/ R DEI. REG/ INA. CELI (in Wilson, 1993a, pp. 156-158); le plat d’apparat à lustre métallique avec aile à compartiments du Musée National de Florence (inv. maioliche no. 96, in Fiocco-Gherardi, 1990a, no. 15, p. 34; le plat d’apparat avec aile à compartiments du Royal Scottish Museum avec l’inscription SANTA MARIA ORA PRONOBIS (in Curnow, 1992a, no. 29); la plaque autrefois dans les collections Murray et Damiron, vendue chez Sotheby’s, à Londres, le 28 avril 1954, no. 131. 2. Cf. Fiocco-Gherardi, 1988, pp. 67-68. 1.
40. Plat d’apparat Deruta, première moitié du xvi e siècle H. 9 / D. 41,5 / D. talon 13
•
Inv. 1703
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Gauchissement très prononcé; manques au talon; défauts, inclusions, revers à glaçure plombifère moutarde. Accidenté, haut latéral droit (quatre fragments), restauration ancienne; fêlure. PROV.: Coll. Heilbronner; Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Damiron, 1956, no. 44, p. 39.
P
lat à bassin profond et aile large. Au centre, une jeune femme à mi-buste, au sein dénudé et aux longs cheveux noués. A sa droite, une banderole portant l’inscription P.SERVIRE. SE. RVE. SEN / PER (per servire serve sempre: « Servir sert toujours ») 1. Sur l’aile, dans des compartiments de différentes largeurs alternent inflorescences et imbrications. Le revers est recouvert d’un vernis jaunâtre sur lequel est tracée en bleu une spirale. Deux trous de suspension pratiqués sur le talon avant cuisson indiquent l’usage d’apparat du plat. Cette représentation est récurrente sur les plats de Deruta 2, qu’ils soient polychromes ou à lustre métallique.
148
Cette devise est légèrement modifiée (Per servire seserve sempre) sur un plat du Victoria and Albert Museum (inv. C. 2169-1910, in Rackham, 1940, nos. 479480); également associée à un visage de femme, elle est ainsi interprétée par Rackham: Servir les autres, c’est toujours se servir soimême. 2. Cf. par ex. les plats du Louvre, inv. OA 1433, in Giacomotti, 1974, no. 588, du Victoria and Albert Museum, in Rackham, 1940, no. 479, du musée municipal médiéval d’Arezzo, in De Mauri, 1924, pl. XLI, du Kunstgewerbemuseum de Berlin, inv. no. K 1697, in Hausmann, 1972, nos. 154155, de la Walters Art Gallery de Baltimore (USA), in Erdberg-Ross, 1952, pl. 11, no. 16 et des coll. Mannheim (in Chompret, 1949, II, fig. 201) et Adda (Rackham, 1959, no. 353). 1.
41.
Plat d’apparat Deruta, deuxième moitié du xvi e siècle H. 7,3 / 7,8 / D. 40 / D. base 13,5
•
Inv. 1702
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Très voilé; sur le bord, deux éraflures avant cuisson; revers: émail
irrégulier (coulures et manques), criblé de picots, tressaillures. Bon état de conservation, léger manque et quatre réparations au bord. PROV.: Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Damiron, 1943, no. 149, p. 107.
P
lat à bassin profond et à aile large. Au centre, sur fond de paysage, un jeune homme coiffé d’un chapeau à plume tient de la main gauche un violon et de l’autre un archet. Sur l’aile sont disposées des inflorescences à calice alternant avec des feuillages. Revers émaillé de blanc. Deux trous de suspension pratiqués dans l’épaisseur du talon avant la cuisson indiquent qu’il s’agit là d’un plat décoratif. Ce plat est exécuté d’une manière hâtive et dans un genre quelque peu populaire, deux caractères de la céramique de Deruta après le milieu du xvi e siècle qui semblent vouloir vulgariser l’œuvre de Giacomo Mancini dit Il Frate de Deruta. En réalité, afin de maintenir sa production à un haut niveau de qualité, Giacomo en vint à certaines stylisations spécifiques que l’on reconnaît par la suite sur de nombreux plats d’apparat du type de celui-ci, constituant désormais des séries, et exécutés sans doute dans son atelier. La comparaison avec un plat du Museum für Kunst und Gewerbe de Hambourg 1 portant sur l’aile une ornementation identique et au centre les armoiries de Jules III (Giovanni Ciocchi del Monte), pape de 1550 à 1555, confirme une datation tardive.
150
1. Inv. no. 1905. 59, in
Rasmussen, Hambourg, 1984, no. 113, pp. 153-154.
42. Plat d’apparat Deruta, deuxième moitié du xvi e siècle H. 7,6 / 8,1 / D. 41 / D. base 12,5
•
Inv. 1934
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange intense, brun, noir. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Très gauchi; nombreux picots. Réseau de tressaillures dans l´émail; accidenté, trois fragments (7 h / 12 h; sur l´aile (1 h / 3 h), restauration habile; deux grandes fêlures. PROV.: Coll. C. H. (Heilbronner ?); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 42, p. 37.
P
lat à bassin profond et aile large. Au centre, sur un fond de paysage, un jeune homme coiffé d’un chapeau à plume emporte au galop sur sa monture une femme assise en croupe. L’aile est ornée de neuf arcs brisés dans lesquels s’entremêlent des feuilles dentelées. Revers émaillé en blanc. Deux trous de suspension faits dans l’épaisseur du talon avant cuisson indiquent l’usage d’apparat du plat. Sur le plan stylistique, ce plat est proche du plat no.41 du catalogue; tous deux datent de cette période où la manière des céramistes de Deruta, tout en devenant plus vive et expressive, perdait de son élégance.
152
43. Plat d’apparat Gubbio ?, première moitié ou premier quart du xvi e siècle H. 9,5 / D. 42,2 / D. talon 16
•
Inv. 2394
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, ocre. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail irrégulier, marques et défauts; deux petits retraits sur la face; au revers: glaçure plombifère jaunâtre, fond et talon bruts. Accidenté, deux fragments (9 h / 3 h), fracture transversale horizontale, réparation ancienne. PROV.: Coll. Paul Gillet; Mme Paul Gillet, don 1973. BIBL.: Damiron, 1956, no. 53, p. 47.
P
lat à bassin profond et à aile large. Au centre, un centaure enturbanné brandissant un cimeterre porte sur le dos une jeune femme à demi nue. L’aile est divisée en compartiments de différentes largeurs alternativement ornés d’inflorescences à calices, d’œils de plumes de paon et de rinceaux fleuris. Revers vernissé avec deux trous de suspension au talon indiquant l’usage d’apparat du plat. La scène semble représenter un épisode du mythe d’Hercule, l’enlèvement de sa femme Déjanire par le centaure Nessus. On s’étonne toutefois que le héros Hercule n’y figure pas et que le centaure soit fastueusement coiffé à l’orientale. Si la forme du plat et la répartition du décor permettent de penser à une production de Deruta, plusieurs anomalies rendent cependant cette attribution incertaine. Par exemple, l’allure et le type des inflorescences qui constituent le décor alla porcellana rappellent la majolique d’Urbino du début du xvi e siècle; par ailleurs les personnages, plus sculptés et à l’anatomie lourdement dessinée, présentent de notables ressemblances avec le saint Sébastien du plat Gillet (Fiocco et alii 2001, no. 95 ) 1. L’hésitation entre les typologies de Deruta et celles des Marches caractérise la production du début du xvi e siècle de Gubbio, centre marqué par ces deux influences en raison de sa situation géographique et politique. Dans l’état actuel des recherches, on attribue plutôt à Gubbio ce plat tout à fait inhabituel.
154
1. Par ailleurs, le visage du
centaure semble s’apparenter au saint Ubald du plat de pompe du musée de Faenza, inv. 24930, attribué par Ravanelli à Deruta (1990a, pp. 172-173) mais que nous pensons de Gubbio.
44. Plat d’apparat Gubbio ?, début xvi e siècle H. 8 / D. 44,4 / D. talon 14
•
Inv. 1694
COUL.: Bleu, vert, brun / roux, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Pièce gauchie; émail criblé de picots, rugueux, six éraflures; revers à glaçure plombifère, retrait sous l’aile, fond brut. Accidenté, un fragment (11 h / 4 h), fêlure dans le prolongement de la fracture; au revers, traces d’agrafes supprimées. PROV.: Coll. Alfred Pringsheim (vente Londres, 19 juillet 1939, no. 237, repr. II, p. 73); Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Frati, 1844, no. 190, p. 37; Falke, 1924, II, repr. pl. 120, no. 232; Damiron, 1943, no. 55, p. 40; Chompret, 1949, I, p. 42, repr. II, p. 26, fig. 189; Giacomotti, 1962, repr. p. 37, fig. 13; Giacomotti, 1974, p. 138 (cité en rapport avec le plat du Louvre); Rondot, 1993, pl. 3; Blazy, 1998, p. 69; Piccini, 2000, repr. p. 30, fig. 20; Gardelli, 2001, repr. p. 54, fig. 12; Casati Migliorini, 2004, pp. 47 et 54. EXP.: Manderen, 1998, no. 6.
P
lat à bassin profond et à aile large. Au centre, sur un fond bleu intense, un petit amour ailé, un jeune homme et une jeune femme jouent respectivement de la cymbale, du violon et de la cithare. L’homme est assis sous un arbre dépouillé auquel est suspendu un cartouche portant les lettres B. P. C. R. L’aile est ornée de trophées d’armes et de musique sur fond orangé parmi lesquels on distingue des écus, des armures, des tambours et des flûtes. Le revers est recouvert d’une glaçure blanchâtre présentant des traces d’émail. Cinq trous percés sous le pied avant cuisson indiquent que ce plat était destiné à être présenté comme plat d’apparat. Une scène identique, peut-être du même peintre, figure sur un fond de plat du Louvre 1. La dame en est cependant absente, remplacée par un cerf et un lapereau, tandis que le cartouche qui pend à droite de l’arbre porte les lettres S. B. R. C. La présence d’animaux sur ce fragment permet de penser que la scène représente Orphée charmant les animaux de sa musique. La femme peinte sur le plat de la collection Gillet pourrait donc être son épouse Eurydice. Sa forme et le fait que de tels plats sont typiques de la production de Deruta ont traditionnellement fait attribuer ce plat à Deruta. Cependant, les trophées d’armes qui ornent l’aile sont beaucoup plus fréquents sur la majolique du duché d’Urbino. Certains éléments permettent par ailleurs de supposer que Gubbio, qui faisait partie de ce duché, a exécuté au début du xvi e siècle des typologies proches de celles de Deruta. Bien qu’ accentuées par leurs grandes dimensions, les figures ressemblent, par la rigidité des profils classiques et la raideur du mouvement, à celles d’une coupe de la collection Lehmann 2 ornée d’un épisode amoureux du Roland Furieux, coupe datée de 1528, et à celles d’une autre conservée à Brunswick illustrant l’histoire de Joseph et de la femme de Putiphar, datée de 1524 3. Ce plat paraît cependant plus archaïsant et d’une exécution antérieure.
156
Inv. OA 1629, in Giacomotti, 1974, no. 473. 2. New-York,Metropolitan Museum of Art, inv. 1975. 1. 1088, in Rasmussen, 1989, no. 69. 3. Herzog Anton UlrichMuseum, inv. H33 (1771-1806), in Lessmann, 1979, no. 173, p. 191. 1.
45. Assiette Gubbio, atelier de Maître Giorgio Andreoli, vers 1526-36 H. 5 / D. 25,5 / D. base
7,2 •
Inv. 1914
COUL.: Bleu, vert, jaune; reflets métalliques rouges et dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu, complété par un décor de petit feu conduit en réduction pour l’application du lustre métallique. Les motifs de l’aile sont champlevés (a graffito), les parties évidées étant ensuite coloriées. Accidentée, complète (deux fragments), réparation ancienne; bord érodé. PROV.: Coll. Goldschmitt; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 65, p. 57.
S
ur le médaillon central, un amour ailé, debout, s’appuie sur un bâton recourbé. L’aile est ornée d’un motif de palmettes classiques. Le revers, émaillé de blanc, est sillonné de bandes et de filets en lustre métallique rouge. Parmi les plus diffusés de la Renaissance, le décor à palmettes dans sa version de Gubbio provient de l’atelier de Maitre Giorgio, principalement dans les années 1526-1528; on en retrouve toutefois des exemples en 1536. Ce décor orne certains des plus célèbres services exécutés a Gubbio, tel celui des Saracinelli d’Orvieto (1526-1528 environ) ou celui de Niccolò II Vitelli de Città di Castello, exécuté en 1527. Des putti ailés sont souvent représentés au centre des assiettes dans des attitudes variées, jouant avec des ballons, des armes, des instruments de musique ou de petits chevaux de bois. Peut-etre ces décors font-ils allusion à une signification symbolique, bien qu’elle soit sans doute vague, ou alchimique (ludus puerorum / jeu d’enfant).
158
46. Coupe Gubbio, atelier de Maître Giorgio Andreoli, vers 1530-1550 H. 5,4 / D. 18,6 / H. pied 1 / D. pied 9,4
•
Inv. 1907
COUL.: Bleu; reflets métalliques rouges et dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Pièce façonnée par estampage à l’aide d’un moule; décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu, complété par un décor de petit feu, ce dernier conduit en réduction pour l’application du lustre métallique. Bel aspect; légèrement voilée; un trou de suspension dans le talon avant la cuisson qui détermine sa fonction d’apparat. Bon état de conservation; fêlure (3 h); éraflures; manque au talon; légères réparations en bordure, sur la face interne. PROV.: Coll. Norzy (vente 1860, no. 45); Henry Oppenheimer Esq. , Londres (vente Londres, 15 juillet 1936, no. 29, repr.); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 102, p. 75; Fiocco-Gherardi, 1991, p. 34 (cité en rapport avec un exemplaire semblable); Rondot, 1993, pl. 8; Blazy, 1998, repr. p. 68.
C
oupe sur pied bas. Au centre, dans un médaillon cerné d’une moulure saillante, deux mains surmontées d’une couronne s’étreignent au-dessus d’un feu. Autour, des godrons obliques, légèrement en creux, alternent avec des bourgeons. Au revers, six bandes concentriques à lustre métallique cuivré. L’iconographie possède une signification amoureuse. Elle symbolise la foi consacrée par l’engagement nuptial et entretenue par le feu de la passion. La couronne fait probablement allusion à une issue heureuse 1. On rencontre souvent cette iconographie sur la majolique à partir de la fin du xv e siècle, tandis que se diffusent les symboliques amoureuses liées à la vulgarisation des thèmes néoplatoniciens 2. A partir de 1530 environ jusqu’au-delà de 1550, cette typologie de coupe est prépondérante dans l’atelier de Maître Giorgio de Gubbio. Il s’agit d’une production de série, rarement datée. Son exécution sommaire est compensée par la brillance des lustres métalliques. D’autres coupes, dont l’iconographie représente les mains étreintes, parfois sous un cœur blessé ou sous deux yeux en pleurs, sont conservées au musée national de Florence 3, au Louvre4 au musée Vivenel à Compiegne 5 et au musée de la Renaissance à Ecouen 6. Une autre, avec la couronne, appartient à une collection privée de Foligno 7.
160
La présence de cette représentation sur un pavement de la seconde moitié du XVe siècle provenant du couvent S. Paolo à Parme, aujourd’hui à la pinacothèque locale, fait supposer qu’elle pourrait être aussi interprétée dans un contexte religieux (Fornari Schiandi, 1988). Ces symboles se rencontrent aussi sur des assiettes d’accouchée (Ladis, 1989, p. 70) 2. Fiocco-Gherardi, 1981, pp. 68-77. 3. Inv. majoliques no. 192, in Fiocco-Gherardi, 1991, no. 3, p. 32. 4. Inv. R 962, in Giacomotti, 1974, no. 724. 5. Blanchegorge-Lécuyer, 2011, no. 17, pp. 50-51 6. Inv. Cluny 7520, Ibid. , no. 725. 7. Galeazzi-Valentini, 1975, p. 88. 1.
47. Coupe Gubbio, atelier de Giorgio Andreoli, vers 1530-1550 H. 5,5 / D. 19,2 / H. pied 1,2 / D. pied 9,6
•
Inv. 1732
COUL.: Bleu, vert; reflets métalliques rouges et dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Pièce façonnée par estampage à l’aide d’un moule; décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu, complété par un décor de petit feu, ce dernier conduit en réduction pour l’application du lustre métallique. Empreintes du moule très visibles. Réparations sommaires: accidentée sur l’aile (deux fragments: 4 h et 9 h) et au bord (12 h / 6 h et 9 h / 11 h); manque au pied. PROV.: Paul Gillet, don 1956. BIBL.: Damiron, 1956, no. 60, p. 53.
C
oupe sur pied bas présentant au centre, dans un médaillon convexe entouré d’une moulure saillante, saint Jean-Baptiste enfant marchant dans un pré, à côté d’un arbre, une croix à la main. Autour, alternance de pins et de bourgeons avec des feuilles découpées, le tout en relief. Le revers est émaillé en blanc. Pour la typologie de cette coupe, cf. cat. no. 46. Associée à des contours divers, cette même iconographie apparaît souvent sur des coupes de Gubbio. Ces pièces portent parfois au revers le sigle N, probablement le monogramme de Vicenzo, fils de Giorgio Andreoli 1.
162
1. Cf. par ex. les deux coupes
du musée de la Renaissance à Ecouen, inv. Cluny 1152 et 7521, et celle du musée Adrien-Dubouché de Limoges, inv. 5455, in Giacomotti, 1974, nos. 712, 731, et 713 (la première est marquée du N, la troisième du P attribué à Vittorio, dit Il Prestino); d’autres exemplaires, au musée du Petit-Palais à Paris (inv. S. 2434, in Join - Dieterle, 1984, no. 65), au Victoria and Albert Museum (inv. 36 1923, in Rackham, 1940, no. 708) et à la Walters Art Gallery de Baltimore (inv. 48. 1355, in Erdberg - Ross, 1952, pl. 23, no. 35). Un fragment portant la lettre N est conservé au musée de Faenza (inv. 9490, in FioccoGherardi, 1989, no. 373).
48. Chevrette Pesaro ? (ou Deruta), fin du xv e siècle H. 26,5 / D. panse 19,5 / D. base 13 / D. col 10,2
•
Inv. 1980
COUL.: Bleu, vert, orange, brun / roux, violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Retraits d’émail, notamment à l’anse; base brute; intérieur à glaçure plombifère de couleur jaune. Quelques manques au col, ébréchures à la base; bec verseur refait sur 2,5 cm, avec un profil non conforme. PROV.: Coll. Alfred Pringsheim (vente Londres, 7 juin 1939, no. 21, repr.); Sigismond Bardac; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Leman, 1913, pl. 15, repr.; Falke, 1914, repr. p. 29, no. 44 a-b; Damiron, 1943, no. 26, p. 20; Chompret, 1946, I, p. 64, repr. pl. 20, fig. 60; Giacomotti, 1962, p. 22, repr. pp. 33 et 36; Drey, 1978, repr. p. 45, fig. 16B; Blazy, 1998, repr. p. 71; Casati Migliorini, 2004, p. 40; Ceramic Antica no. 3, anno IV, mars 1994, couverture et p. 3.
C
hevrette ovoïde sur base évasée, col cylindrique, bec à goulot recourbé tenu par un lien plat. Sous le bec, banderole avec inscription pharmaceutique en minuscules gothiques, SY. DE ASIENTIO, surmontée d’une croix patriarcale. Au-dessous, monogramme dans un cercle. Sur les côtés, face à face, des profils d’homme et de femme sur un fond fleuri. Au col, courant de feuilles vertes entre des bandes et des filets. La chevrette était destinée à contenir du sirop d’absinthe (Artemisia Absinthium), plante médicinale très amère dont les feuilles et les fleurs produisent une huile essentielle utilisée pour stimuler l’appétit par la sécrétion des sucs gastriques et de la bile, ainsi que pour soigner les troubles digestifs et les coliques intestinales. En 1914, Falke attribua la chevrette à Sienne, la datant des environs de 1470. Si l’on peut s’accorder sur cette période puisque le décor est encore lié aux canons du gothique tardif, une connaissance plus approfondie de la majolique d’Italie centrale permet actuellement d’écarter cette attribution à la Toscane et de la reporter sur la région de l’Ombrie et des Marches. Même si la forme n’a pas d’antécédent précis, les caractères décoratifs et la blancheur de l’émail semblent indiquer une production de Pesaro de la fin du xv e siècle. Dans le sous-sol de cette ville, on a en effet mis au jour de nombreux fragments portant des motifs à rosettes, ou fleurs de bryone, et un courant de feuillages identique à celui qui cerne le col de l’exemplaire Gillet, mais toujours peint en bleu, jamais en vert 1. De telles caractéristiques se retrouvent toutefois, et assez semblables, dans la production polychrome de Deruta qui présente, dans le dernier quart du xv e siècle, de fortes analogies avec celle de Pesaro. Tout cela n’autorise donc pas une attribution définitive, d’autant que le bec recourbé existe en effet sur certaines chevrettes de Deruta dont la forme est dans l’ensemble cependant différente 2.
164
Berardi, 1984, p. 254, figs. 31-32; voir aussi l’albarello du British Museum inv. 1885,5-8,21, repr. Ibid. , fig. 34. 2. Il s’agit de celles qui appartiennent au service à « la tête de Maure »; pour leur typologie, cf. ThorntonWilson, 2009, no. 249, p. 426 et no. 266, p. 453. 1.
49. Chevrette Pesaro, fin du xv e siècle H. 28 / D. panse 19 / D. base 12,8 / D. col 10,4
•
Inv. 1982.
COUL.: Email bleuté; bleu, vert, orange, violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Intérieur émaillé blanc. Réparations au pied, au col et au bec; manque au col. PROV.: Coll. Alfred Pringsheim (vente Londres, I, 4 juin 1939, no. 4); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Falke, 1914, I, repr. p. 14, no. 21; Damiron, 1943, no. 21, p. 16; Giacomotti, 1962, repr. p. 23; Rondot, 1993, pl. 4; Ravanelli Guidotti, 1994, I, p. 24 (une provenance de la coll. Bardac y est signalée).
C
hevrette à panse ovoïde étirée vers la base, évasée et à fond plat, à col cylindrique, bec en goulot et anse verticale plate. Sous le bec, dans une réseve qui en suit le contour, oiseau de profil à gauche. A l’arrière, sous l’anse, un cartouche avec l’inscription Mele. rosato en minuscules gothiques. Fond d’élégants rinceaux de feuilles recoquillées. Autour du col, une rangée de serpentins sur fond de hachures. Sur l’anse, trois rosaces superposées. Cette chevrette était destinée à contenir du miel Rosat dans lequel avaient macéré des pétales de roses. Il était recommandé en cas d’hémorragie et de diarrhée et contribuait à guérir la tuberculose. En infusion, il était utilisé contre les inflammations de la bouche et de la gorge. Les motifs décoratifs offrent des caractéristiques de Pesaro, en particulier les serpentins striés autour du col et l’enroulement en forme de gouttes des feuilles recoquillées 1. L’oiseau se détachant sur une réserve, stylisé à l’identique, figure également sur un arbarello orné de feuilles recoquillées, avec arête de poisson au col et au pied, très probablement de Pesaro (ancienne collection Bardac) 2.
166
Berardi, 1984, pp. 262-263, figs. 44 et 46. 2. Leman, 1913, pl. 11. L’albarello est ensuite passé dans les collections Boy et Schiff. 1.
50. Albarello Naples ou Pesaro , deuxième moitié du xv e siècle H. 32,7 / D. pied 11,4 / D. col 10,2
•
Inv. 1692
COUL.: Bleu, orange violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail rugueux; les zones peintes au manganèse sont bullées,
nombreu picots; intérieur émaillé maigre; manipulation peu soignée; point de contact (enfournement serré); lèvre et base brutes. Intègre; deux fêlures croisées à la base. PROV.: Coll. M. X***, Mme X (vente Paris, 9 mai 1927, no. 37, repr. pl. VIII); G. Blumenthal (vente Paris, 4 avril 1933, no. 26); Coll. Fernandez; Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Damiron, 1943, no. 18, p. 13; Chompret, 1949, I, pp. 62-63, II, p. 49, fig. 367; Donatone, 2013, p. 31.
A
lbarello très élancé, légèrement cintré, aux épaulements carénés et au col court évasé. Le décor est disposé en trois registres horizontaux qui ceinturent le vase. Sur la bande centrale, des rinceaux ondulants à fleurs rondes; au dessus et audessous, suite de grandes feuilles recoquillées de type gothique alternant avec des inflorescences. A l’épaulement, une frise de lignes obliques, dessinant des S et une sorte de chaînette, entre plusieurs filets et bandes concentriques. La disposition du décor en bandes parallèles est semblable à celle de l’albarello précédent. En ce qui concerne l’attribution, on peut trouver des analogies de décor sur des fragments de fouilles de Pesaro, par exemple avec le motif à fleurs, marguerites ou bryones, de type italo-mauresque 1 et les feuilles recourbées en spirales, appelées par Berardi sequenziali monomorfe ou séquencielles monomorphes 2. Il faut toutefois tenir compte d’un groupe généralement attribués à Naples 3, albarelli de forme presque identique et vases globulaires ornés de feuilles recoquillées de même stylisation, qu’accompagne souvent aussi une frise de S, en chaînette, autour de l’épaulement. Ce groupe est en fait orné de ce qu’on pense être les armoiries et les profils des souverains aragonais, apparemment de la même main que les décors des pavements de la chapelle Brancaccio à Sant’Angelo de Nilo ou de la chapelle du Crucifix à San Pietro de Maiella, qui datent de la deuxième moitié du xv e siècle 4. En l’état actuel des recherches, il est donc impossible, pour les nombreux albarelli de ce type, de proposer une attribution précise à l’un des deux centres. Les spécialistes eux-mêmes ne peuvent se prononcer 5. L’identification est d’autant plus difficile que, dans la seconde moitié du xv e siècle, d’étroits rapports liaient politiquement les Sforza, seigneurs de Pesaro, à Ferdinand d’Aragon, roi de Naples.
168
Berardi, 1984, p. 254, fig. 31 e, f, h. 2. Ibid. , p. 258, fig. 37. 3. Cf. par ex. l’albarello du Fitzwilliam Museum de Cambridge, inv. C. 54-1927, in Poole, 1995, no. 461, p. 428; celui de l’ancienne coll. Sacker, repr. in Donatone, 1993, pl. 43. 4. Ibid. , pl. 7. 5. L’exemple du Bargello est valable pour tous, avec héron et feuilles recoquillées de style gothique d’où sortent des œils de plume de paon, pièce attribuée sans hésitation à Naples par Donatone (1993, pl. 150) et à Pesaro par Berardi (1984, p. 261, figs. 42-43). Il reste donc à s’émerveiller de l’affinité de production contemporaine entre deux centres aussi éloignés dont les échanges réciproques furent peutêtre stimulés par le mariage de Camilla d’Aragon et de Costanzo Sforza, seigneur de Pesaro. 1.
51.
Coupe Pesaro Nicolò da Fano (Peintre de la planète Vénus), 1543 D. 27,4
• Inv. 1926 COUL.: Bleu, vert, jaune orange, brun, noir, violet, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Quatre traces de pernettes sur la face; quelques retraits et picots; pâteclaire. Piédouche coupé. PROV.: Coll. Pasolini, Faenza; Coll. Baron Gustave de Rotschild; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Frati, 1852, p. 18, no. 97; Damiron, 1943, no. 93, p. 69; Casati Migliorini, 2004, pp. 55-56; Mallet, 2010, p. 182.
L
a coupe, pourvue à l’origine d’un pied bas, possède une paroi concave et un bord déversé. Galatée est représentée en plein, debout sur une conque traînée par des dauphins, et entourée de nymphes, de tritons et de petits amours. Le revers, orné de deux filets concentriques jaunes, porte en caractères cursifs bleus et enfermée dans un cartel rectangulaire, l’inscription La Galatea suivie de la date 1543. L’iconographie a été conçue par Raphaël pour la villa Farnèse à Rome. Cependant, le peintre en majolique s’est sans doute directement inspiré de la gravure de Marc-Antoine Raimondi. Galatée, nymphe marine fille de Nérée et de Doride, fut aimée en vain par le cyclope Polyphème qui tua Acis par jalousie et fut ensuite, par la volonté divine, transformé en fumée 1. Sur le plan stylistique, notamment dans la façon de traiter le paysage, la coupe est assez proche d’un plat du musée municipal de Padoue représentant Latone changeant les paysans en grenouilles, daté aussi de 1543 2. Sa calligraphie concorde parfaitement, de même que la date également inscrite dans un cartel rectangulaire. Le plat de Padoue est généralement attribué à un artiste appelé, sur la suggestion de Mallet, le peintre de la planète Vénus. On doit cette appellation au décor d’une autre coupe exécutée par lui In Pesaro 1544, conservée au Castello Sforzesco à Milan 3. Le peintre était précédemment dit Peintre de César et Cicéron, d’après une coupe du British Museum représentant Cicéron et César législateurs. Comme l’indique l’inscription du revers, cette dernière est datée de 1541 ou 1542 et fut exécutée à Pesaro dans l’atelier de Girolamo dalle Gabicce. On a reconnu la même main dans nombre d’autres œuvres au point d’en constituer une liste abondante 4. En 2010 Mallet est revenu sur le sujet, en identifiant le « Peintre de la Planète Vénus » à Nicolò de Fano, actif à Pesaro dans les années 1540- 1544 dans l’atelier du maître Girolamo dalle Gabicce. Il partit ensuite pour Faenza où il signa dans l’atelier de Virgiliotto Calamelli un plat avec Apollon et Marsias 5.
Marc-Antoine Raimondi, Galatée [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
170
Ovide, Métamorphoses, XIII, 750-727. 2. Padoue, Musée Municipal, inv. 177, daté de 1543. 3. Mallet, 1980, p. 154. 4. Une liste exhaustive se trouve dans Mallet, 2010, pp. 182-183. 5. Fiocco - Gherardi, 2007, fiche no. 122, pp. 182-6; Mallet, 2010. 1.
Il s’agit d’un peintre aux couleurs vives qui stylise ses personnages d’une manière caractéristique, visages arrondis, membres musclés mis bien en évidence, tandis que le paysage, offrant une perspective profonde, s’agrémente souvent de petits ponts en dos d’âne à trois arches ou plus. Les inscriptions au revers sont parfois accompagnées d’une sorte de ligne ondulée verticale, très mince, qui pourrait être la marque du peintre. On sait qu’il est actif à Pesaro aux alentours des années 1542-1545, puis on en perd la trace. Il est possible qu’il ait été un temps potier à Urbino, et qu’il se soit absenté à une certaine période de l’atelier de Girolamo. Pour sa part, Berardi pensait qu’il pouvait s’agir d’un autodidacte local et soulignait la essemblance stylistique avec le peintre Giacomo, supposé être fils de Girolamo, qui a signé une coupe du musée municipal de Bologne représentant le Bain de Psyché, datée de 1542 6.
172
6. Inv. 1003, cf. Berardi, 1984,
p. 184.
52. Plat Pesaro, Peintre de Zénobie, milieu du xvi e siècle H. 4,5 / D. 27,6 / D. base 8,6
•
Inv. 1891
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, violet, brun, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: trois marques de pernettes sur la face. Intègre; légère fêlure (4 h); bordérodé. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 92, p. 75.
P
lat au bassin profond, décoré en plein d’une légende concernant le roi Phalaris, tyran d’Agrigente entre 570 et 554 av. J.C. (Pline, 34, 89) et, plus précisément, le sculpteur athénien Perillos. Ce dernier présenta au roi un taureau en airin qu’il avait exécuté afin de faire périr par le feu, à l’intérieur de la sculpture, les coupables du crime de lèse-majesté. Les cris des condamnés devaient se transformer en meuglements parfaits. Hélas pour lui, Perillos fut le premier à expérimenter son invention. Sur la gauche du plat, le tyran, assis sur un trône, ordonne le supplice. Sur la droite, Perillos est empoigné pour être introduit de force, par une trappe ouverte, dans le taureau sous lequel un grand feu a été allumé. La légende, célèbre, a été reprise par Dante (Enfer, xxvii, vers 7 et suiv.). Au revers du plat, l’inscription De Perillo au entre de deux cercles concentriques jaunes. Le même thème, à l’iconographie semblable, figure sur un plat de la Galerie nationale d’art antique, au Palais Barberini à Rome. Ce plat est attribué au Peintre de Zénobie 1, appelé ainsi d’après un plat du Victoria and Albert Museum, daté de 1552, qui représente un épisode se rapportant à l’histoire de la reine de Palmyre 2. L’écriture même semble identique. On ignore tout de ce peintre qui, selon Berardi, est assez peu « pesarien ». Sa manière de distribuer les personnages et de dessiner la perspective serait plus proche de celle d’Urbino. Ses peintures sont remplies de personnages disposés sur une bande médiane transversale, tracés rapidement, bien modelés et expressifs 3. Auteur prolifique, ses œuvres se rencontrent dans les principaux musées, notamment le Herzog Anton Ulrich-Museum de Brunswick qui conserve un groupe significatif 4.
174
Inv. 172-187, in Gresta, 1991, p. 79, fig. 10. 2. Inv. C 47-1970, repr. in Sotheby’s, Londres 3 novembre 1970, no. 20. 3. Berardi, 1984, pp. 186-187. 4. Lessmann, 1979, pp. 335-344. 1.
53. Assiette Pesaro, atelier du Peintre de Zénobie, vers 1550 H. 4,7 / D. 23 / D. talon 6,6
•
Inv. 1324
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, noir, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Très belle qualité; sur la face, vert de cuivre métallisé, picots; au
revers, vert fusé, un cratère dû à une particule de CaCO3, carbonate de calcium (conduite de la cuisson). Au revers, trois zones de restauration; égrenures sur le pourtour. PROV.: Paul Gillet, don 1935.
A
ssiette à bassin creux, figurant la scène biblique de la rencontre de Tobie avec l’ange Raphaël, qui le guidera jusqu’en Médie. Tobit, le père de Tobie, envoie son fils récupérer de l’argent en dépôt chez Gabaël de Raguès, en Médie. Il charge Raphaël, qui s’est présenté sous une fausse apparence, de l’accompagner (Tobie, 5, 1-23). Au revers, l’inscription Tubia en lettres cursives bleues, suivie d’un trait de plume ressemblant à un serpentin vertical 1. Il s’agit d’une signature (cf. cat. no. 52) souvent utilisée par le Peintre de Zénobie que l’on reconnaît aussi à certains éléments stylistiques. Sur le plan de l’iconographie, cette assiette est semblable à une autre conservée au Herzog Anton Ulrich-Museum de Brunswick portant l’inscription tubia quando a/parve langole. Cette assiette, également marquée du serpentin, est attribuée par J. Lessmann à l’atelier des peintres de Zénobie 2 à Pesaro.
176
Il s’agit d’une ligne sinueuse différente de celle du Peintre de la planète Vénus (cat. no. 119), plus courte et large. 2. Inv. 404, in Lessmann, 1979, no. 482. 1.
54. Coupe Pesaro, atelier du Peintre de Zénobie ?, vers 1550 H. 5,5 / D. 22,4 / D. pied 10,2
•
Inv. 1736
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, violet, noir, légers rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail irrégulier; retrait. Fêlure apparente au revers (1 h);
restauration d’un manque (12 h / 1 h); bord ébréché. PROV.: Paul Gillet, don 1956. BIBL.: Damiron, 1956, no. 88, p. 72.
C
oupe sur pied bas représentant une scène difficile à identifier. Un ange indique la route à un voyageur qui se dirige vers un édifice circulaire, peut-être l’ange Raphaël guidant Tobie vers la Médie (cf. no. précédent). Le revers est émaillé en blanc. La stylisation des figures et surtout la musculature, ainsi que plusieurs aspects du paysage, rappellent la manière du Peintre de Zénobie (cf. cat. no. 52).
178
55. Plat Duché d’Urbino (Pesaro ou Casteldurante), vers 1510-1520 H. 2,2 / D. 22,6
•
Inv. 1984
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, marron, violet, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Au revers de l’aile, sur la moitié de sa largeur, zone concentrique
d’émail mince (terre rosée); sillons de tournassage apparents. Usures du bord; fêlure (7 h / centre de l’assiette); réparé sur la face. PROV.: Coll. Alessandro Castellani (vente Paris, 27-29 mai 1878, no. 246); Spitzer (vente Paris, 17 avril - 16 juin 1893, no. 1043); Coll. Steinkopf (vente Londres, 1935); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Piot, 1881, p. 385 (repr. graphiquement); Molinier, 1892, no. 8, p. 20, repr. pl. IV; Damiron, 1943, no. 46, p. 32; Giacomotti, 1962, p. 28, repr. p. 29; Wilson, 1993a, p. 133; Piccioli, 2000, pp. 65- 68; Thornton-Wilson, 2009, pp. 363 et 367
A
u centre, sur un fond de paysage, un jeune homme est assis sur un escabeau, occupé à jouer du luth. Sur l’aile du plat, des trophées de musique, un mascaron accosté de dauphins, deux putti ailés et une tête de chérubin au-dessus d’un cartel portant le sigle S.P.Q.R., se détachent sur un fond bleu sombre orné de rubans tracés en champlevé (graffito). Le revers du marli est décoré d’un rinceau de fleurs et de petites feuilles recourbées bleues alla porcellana. Par les couleurs, le style et la décoration du revers, l’objet présente une affinité notable avec un groupe de plats portant des putti en train de jouer. L’Ashmolean Museum à Oxford 1, la National Gallery of Art de Washington 2, le Getty Museum à Malibu 3 et le Victoria and Albert Museum 4 en conservent chacun un exemplaire. On peut y ajouter deux assiettes du British Museum 5, une assiette (tagliere) d’une collection privée vénitienne présentant au centre une vieille fileuse et qui porte, comme l’un des plats du British, une spirale sous le fond, enfin, un plat de la collection Altomani avec, au centre, une représentation de Leda et du cygne. Cette typologie était attribuée à Zoan Maria Vasaro de Casteldurante, auteur de la coupe du Metropolitan Museum aux armes de Jules II, datée de 1508 6. Cette attribution n’a plus cours aujourd’hui, le groupe est généralement considéré comme provenant du duché d’Urbino, ou même d’origine vénitienne en raison des couleurs azurées et de la guirlande alla porcellana du revers 7. L’hypothèse de Paride Berardi, qui penche pour une production de Pesaro, nous paraît vraisemblable; le décor et les couleurs rappellent en effet plusieurs fragments de fouilles et, d’autre part, la guirlande du revers alla porcellana ainsi stylisée, si elle figure sur des objets vénitiens, se rencontre également à Pesaro 8.
180
Repr. in Wilson, 1989, p. 26, no. 9. 2. Inv. 1942. 9. 313 (C38), in Wilson, 1993a, pp. 130-133. 3. Hess, 1988, no. 29. 4. Rackam, 1940, no. 529. 5. Thornton-Wilson, 2009, nos. 214 et 215, pp. 363-367. 6. Cf. Rackam, 1928, pp. 8892. Sur une possible identification à Zoan Maria avec Giovanmaria di Mariano, connu par la suite sous le surnom de Viviani, ou avec Zoan Maria, fabricant de pots du duc d’Urbino, présent à Venise en 1523, cf. la synthèse in Fiocco - Gherardi, 1997, p. 16. 7. Wilson, 1987b, p. 186; cf. également Wilson, 1989, no. 9, p. 26. 8. Berardi, 1984, p. 185. 1.
56. Coupe Casteldurante (Urbania), 1525 H. 4 / D. 22,6 / D. piédouche 11
•
Inv. 1995
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, grisaille, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail rosé. Accidentée, complète (7 fragments),
restauration ancienne; bordure entièrement reprise. PROV.: Coll. Pringsheim (vente Londres, II, 20 juillet 1939, no. 397); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Falke,1914, II, no. 160, pl. LXXXV (repr.); Damiron, 1943, no. 16, p. 12;
Giacomotti, 1962, p. 28, repr. p. 35.
C
oupe sur pied bas, décorée d’un motif à grotesque disposé a candelieri. L’axe central est formé d’un mascaron, d’un médaillon avec l’aigle des Montefeltro 1 et d’une tête d’angelot, surmontés d’un cartouche aux lettres SPQR (Senatus Populus que Romanus) et d’un trophée. Disposés symétriquement de chaque côté, des trophées d’armes, des perles d’ambre enfilées, des cornes d’abondance sur un fond bleu foncé orné de nombreux lacs sinueux gravés en champlevé (graffito). Sur la droite, un cartel porte la date de 1525. Cette coupe fait partie d’un important ensemble de pièces, comprenant aussi des plats et des assiettes, caractérisées par une gamme chromatique où dominent l’ambre et le bleu noirâtre et par une décoration à grotesques semblable, où alternent trophées, putti et mascarons. Rackham attribuait ces pièces à Zoan Maria de Casteldurante du fait qu’une coupe signée de cet ensemble est ornée dans ce style 2. Il s’agit toutefois d’un groupe plutôt diversifié, qui ne participe pas de la suprême élégance et de la culture picturale du peintre de Casteldurante. Cet ensemble émane sans doute de plusieurs mains et ateliers 3. En outre, cette typologie a probablement été exécutée dans de nombreux centres de l’état d’Urbino, bien que l’on persiste à l’attribuer traditionnellement à Casteldurante dans la plupart des catalogues. L’aigle des Montefeltro contenu dans le médaillon, que l’on retrouve sur de nombreux fragments de fouilles dans une stylisation identique, confirme l’ attribution de l’exemplaire Gillet.
182
L’aigle apparaît deux fois sur l’écu des Montefeltro, seigneurs d’Urbino jusqu’en 1508. A la mort de Guidobaldo I en 1508, le duché passa aux Della Rovere qui unirent leurs armoiries. 2. Inv. 1975. 1. 1015, in Rasmussen, 1987, no. 62, p. 100. Pour l’attribution du groupe à Zoan Maria, cf. Rackham, 1928, pp. 433445; Rackham, 1929, pp. 88-92. Pour une identification éventuelle de Zoan Maria à Giovanmaria di Mariano, cité par la suite avec le nom de Viviani, ou avec Zoan Maria, fabricant de cruches du duc d’Urbino, présent à Venise en 1523, cf. Fiocco-Gherardi, 1997, p. 16. 3. Le plat du Fitzwilliam Museum nous paraît particulièrement proche, par la stylisation de la tête d’ange et la relative simplicité de la marque (inv. EC. 19-1939, in Poole, 1995, no. 364, p. 293). 1.
57. Plat Casteldurante (Urbania), 1533 H. 3 / D. 28
•
Inv. 2003
COUL.: Bleu, grisaille, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail rugueux; revers: émail uni beige rosé, nombreux défauts de
manipulation. Fracture de l’aile (un fragment, 10 h / 1 h); fêlure; ébréchures sur le pourtour; repeints sur toute l’arête du marli; réparations éparses. PROV.: Coll. du Theil; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 113, p. 82; Giacomotti, 1962, p. 28, repr. p. 31, fig. 9.
P
lat au bassin profond, orné d’une grotesque en grisaille sur un fond bleu parsemé de rubans en champlevé (graffito), disposée a candeliere. Le décor axial est constitué d’un mascaron, d’une tête monstrueuse, d’un vase et d’une tête d’ange qui, à son tour, supporte un autre vase débordant de fruits. De part et d’autre, deux sphinx ailés, l’un mâle et l’autre femelle, deux oiseaux et deux cornes d’abondance. La date de 1533 est inscrite sur deux cartels, l’un sous le mascaron, l’autre sur la gauche. Ce plat présente une étroite analogie de couleurs et de décor, spécialement dans la figure de harpie et la tête d’ange ailé, avec un exemplaire du musée municipal médiéval de Bologne, daté de 1528 et attribué à Casteldurante 1. Deux autres plats eux aussi à grotesques disposées a candeliere, datés de 1529 et 1533, se trouvent au British Museum de Londres 2. L’ attribution traditionnelle à Casteldurante de ces grotesques, avec monstres et mascaron en grisaille, vient de ce qu’on les rencontre sur deux grands vases de pharmacie conservés, l’un au Victoria and Albert Museum, l’autre au British Museum, et qui furent exécutés en 1519 dans l’atelier durantin de Sebastiano di Marforio 3. De très petits fragments de ce type de grotesques en grisaille à monstres et fruits, provenant de fouilles locales, figurent par ailleurs dans les collections du Palais ducal d’Urbania.
184
Inv. 981, in Ravanelli Guidotti, 1985, no. 90, p. 114. 2. Thornton-Wilson, 2009, no. 217, p. 370 et no. 220, p. 374. 3. Le vase qui porte le nom de l’atelier et la date est au British Museum (ThorntonWilson, 2009, no. 216, pp. 367-369), l’autre se trouve au Victoria and Albert Museum (in Rackham, 1940, no. 618). Sur l’argumentation, cf. aussi Fiocco-Gherardi, p. 18. 1.
58. Assiette Duché d’Urbino (Casteldurante ?), vers 1540 H. 4 / D. 24
•
Inv. 1724
COUL.: Fond bleu, grisaille, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Bel émail; quatre pernettes sur la face; picots. Intègre;
usures sur l’arête interne et ébréchures en bordure. PROV.: Paul Gillet, don 1956. Inv. 1724. BIBL.: Damiron, 1943, no. 128, p. 91.
A
ssiette au bassin profond ornée d’un trophée central entouré de trophées d’armes et d’instruments de musique, en grisaille sur fond bleu. Revers émaillé en blanc. Inspirés de la décoration antique, les trophées constituent l’un des motifs les plus diffusés de la Renaissance. Particulièrement répandus dans le duché d’Urbino, ils y furent utilisés plus que partout ailleurs 1, soit en association avec des grotesques et des spirales, soit seuls, comme c’est le cas ici. Ils sont entourés de fins rubans tracés en champlevé (graffito) sur le bleu du fond. D’abord de couleur azurée ou en grisaille sur fond bleu, ils furent par la suite, dans la seconde moitié du xvi e siècle, d’un ton marron brûlé. Même s’ils sont traditionnellement attribués à Casteldurante, il est désormais certain qu’ils furent également produits dans cette même typologie, à Urbino, à Pesaro et dans les centres avoisinants. Deux exemplaires portant des trophées exécutés de manière identique, conservés, l’un au musée de la Renaissance à Ecouen, l’autre au musée national de la Céramique de Sèvres 2, appartiennent à la même série que ce plat Gillet. Un plat analogue du musée d’Ecouen, daté de 1539 3, permet de situer le nôtre autour de 1540.
186
Piccolpasso, 1980, vol. I, livre III, c. 66r. 2. Inv. Cluny 15044 et 2477, in Giacomotti, 1974, nos. 768769. 3. Inv. Cluny 1991, repr. , Ibid. , no. 767. 1.
59. Assiette Casteldurante (Urbania) ou Fabriano, 1530 H. 4 / D. 25 / D. talon 7
•
Inv. 1996
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, camaïeu bistre. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Trois traces de pernettes sur la face; retraits sur l’aile et au revers; nuage verdâtre déposé par la volatilisation de CuO durant la cuisson. Intègre; sur la face, une écaillure, usure de l’arête interne, égrenures et écaillures sur le pourtour. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 71, p. 63, no. 71; Mezzanotte Meloni-Incerti Senigagliesi, 1997, repr. , pl. XII; Fiocco-Gherardi, 1997, p. 60; cat. exp. Fabriano, église de San Domenico, 15 juin - 20 juillet, 1997, repr.
A
ssiette au bassin profond portant, au centre, les armes de Nicolo Agostini de Fabriano flanquées de rubans et des lettres N et A. L’aile à fond bleu foncé est ornée de rubans gravés en champlevé (graffito) et de huit groupes de trophées d’armes, dont l’un porte la date de 1530. Revers émaillé de blanc uni. Cette assiette fait partie d’un service complet portant ces mêmes armes. D’autres pièces en sont conservées à l’Ermitage, au Kunstgewerbemuseum de Berlin, au Wadsworth Atheneum de Hartford (Connecticut), et dans la collection Bellini à Florence 1. Le blason figure dans la pierre ou le bois de plusieurs palais de Fabriano, autrefois propriété des Agostini, noble famille de la cité. Il est également reproduit en majolique polychrome, en tous points semblable à celui des assiettes, au-dessus de la porte cochère de l’un de ces palais. Par sa typologie de trophées, le service Agostini est traditionnellement attribué à Casteldurante ou plus généralement au duché d’Urbino. Il est cependant très probable qu’il s’agisse d’une production de Fabriano, par l’un des ateliers de faïenciers attestés à la Renaissance et qui étaient capables eux aussi d’exécuter des istoriati 2.
188
Tous les exemplaires et leur documentation sont reproduits in MeloniSenigagliesi, 1997, pl. VIII-XI. 2. Voir par ex. le plat de l’Ermitage, de très haute qualité, avec la Présentation de la Vierge au Temple(?), portant au revers le nom de la cité (le débat est soulevé in Meloni-Senigagliesi, 1997, sans indication de page). 1.
60. Plat Casteldurante (Urbania) ou Urbino, 1572 H. 4,3 / D. 33 / D. talon 18 * Inv. 1733 COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, brun, violet, grisaille, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Retraits d’émail sur la face et au verso. Revers émaillé blanc orné au
pourtour de plusieurs moulures; bande brute masquée par un repeint; fêlure sur le bord; légère réparation sur l’aile (4 h); étiquette dorée avec inscriptions E. ALLAIN … PROV.: Paul Gillet, don 1956. BIBL.: Damiron, 1956, no. 69, p. 61; Giacomotti, 1962, p. 28, repr. p. 31, fig. 10.
P
lat à bassin creux, à bord déversé. Au centre, dans un médaillon entouré d’une guirlande de lauriers, sur un tertre de verdure, un Amour, les yeux bandés, est attaché à un arbre mort; à l’arrière plan, un paysage de montagne. Tout autour de l’aile se déploie un décor à trophées d’armes et d’instruments de musique, peints en brun sur fond bleu. Sur l’un d’eux, à gauche, un écriteau porte, renversée, la date de 1572. Le revers est émaillé blanc. Le putto représente Cupidon qui, depuis la Renaissance, prit l’aspect du puer alatus classique. La présence du bandeau s’associe, selon le néoplatonisme, à la forme uniquement sensuelle et profane de l’amour, par opposition à une forme plus élevée. Cupidon dans les fers devint cependant symbole de chasteté, après avoir pris ce sens dans le Triomphe de la Pudeur de Pétrarque. Puni par son adversaire, l’amour pur, un Cupidon aux yeux bandés attaché à un arbre avec ses armes brisées, orne le frontispice du traité de J.B.Fulgosus, intitulé Anteros 1. Les trophées sont stylisés à la manière de Casteldurante ou du duché d’Urbino. Dans les collections du musée de Sèvres 2, la date de 1572 et un décor analogue à guirlandes et trophées figurent sur une assiette ornée en son centre d’un Cupidon dansant.
190
Sur le sujet, cf. Panofsky, 1975, chap. IV, « Cupido cieco ». 2. Inv. 21053, in Giacomotti, 1974, no. 973, avec l’attribution à Casteldurante. 1.
61. Coupe Casteldurante, vers 1510-1520 H. 4 / D. 21,4 / D. piédouche 10
•
Inv. 1718
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, violet, grisaille, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Facture de grande qualité; 3 picots et un léger retrait de face; revers mouluré près du bord. Bonne conservation; léger manque au pied; une écaillure sur le bord; cassée (2 petits fragments latéraux: 2 h / 5 h, restaurée sur la manche). PROV.: Coll. Alfred Pringsheim (vente Londres, II, 20 juillet 1939, no. 300); Paul Gillet, don 1956. BIBL.: Falke 1914, II, no. 211, repr. pl. 110; Liverani, G. , 1942, pp. 3-8, repr. pl. I; Damiron, 1943, no. 81, p. 59; Chompret, 1949, I, p. 32, repr. II, p. 19, fig. 140; Giacomotti, 1962, p. 28, repr. p. 35; Rasmussen, 1989, p. 104, repr. p. 244, no. 63. 3; Ravanelli Guidotti, 1989, repr. fig. 32; Rondot, 1993, pl. 9; Blazy, 1998, repr. p. 70; Casati Migliorini, 2004, pp. 4 et 54; Thornton-Wilson, 2009, p. 347; Majolique, 2011, no. 36, p. 81.
L
a coupe représente un homme de guerre, casqué, de profil à gauche; derrière lui, une banderole porte l’inscription SCANDERBECH. Il s’agit de Giorgio Castriota canderbeg, héros de l’indépendance de l’Albanie lors de la lutte contre les turcs, au xv e siècle. A la suite de la défaite de son père, Giorgio est envoyé en otage à la cour du sultan. Il s’y convertit à l’Islam, prend le nom d’Alexandre (Iscander) et le titre de « Beg ». Il sert alors dans l’armée turque, qu’il abandonne en 1443, tirant profit de la victoire de Giovanni Hunyadi à Nicée. Il revient à la foi chrétienne et, pendant plus de 20 ans, combat l’empire ottoman. A la tête de la ligue des peuples albanais, il obtient l’aide de la République de Venise et d’Alphonse le Magnanime, roi de Naples. En 1459, lors d’une courte trêve avec les turcs, il vient en Italie porter secours au roi de Naples Ferdinand d’Aragon, en lutte contre le prétendant au trône Giovanni di Angiò. Débarqué à Trani, il combat à Bari et à Ursara et contribue à la victoire de Ferdinand qui, pour le récompenser, lui cède Trani, Monte Gragano et San Giovanni Rotondo. Scanderbeg retourne ensuite dans son pays et repart en guerre contre les turcs. Il meurt à Alessio en 1468. Avec lui prend fin la résistance albanaise. Nombre de ses compatriotes partent s’installer en Italie méridionale afin d’établir des rapports satisfaisants entre l’Albanie et la royauté de Naples; ces liens sont par ailleurs renforcés par le mariage d’Irène Castriota, fille de Scanderbeg, et du prince de Bisignano. Dans l’imaginaire italien, Scanderbeg demeure un héros analogue à ceux de la mythologie et de l’antiquité. Le profil de la coupe n’est pas un portrait de notre héros. Il diffère entièrement de la xylographie qui illustre l’œuvre de Barletius 1 et a servi de modèle à plusieurs biographies successives. Il s’agit en revanche d’une version commune à plusieurs autres coupes de même typologie 2. Gravure représentant Giorgio Castriota dit « Scanderberg », tirée de la biographie de M. Barlezio, 1508 [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
192
Barletius, 1508, carte AA, au verso. Une copie réduite se trouve dans la biographie de Demetrio Franco, Glillustri et gloriosi gesti et vittoriose imprese fatte contra Turchi dal. . Giorgio Castriotto detto Scanderbeg, Venise, Altobello Salicato, 1584, alors qu’une copie libre illustre plusieurs traductions allemandes de Barlezio (cf. Zappella, 1988, p. 81). 2. En particulier, cf. le Polidamas du British Museum (MLA 1878, 12-30, 423, in Wilson, 1987a, no. 228. 1.
Sur le plan céramique, la coupe appartient en effet à un groupe d’exemplaires similaires réalisés à notre sens par la même main. Ils sont ornés de bustes de profil, d’hommes et de femmes illustres de l’histoire et de la mythologie 3, modelés en grisaille ou azur sur fond bleu et accompagnés d’une banderole qui se déploie et porte leur nom. En raison de sa qualité exceptionnelle, ce groupe avait été attribué à l’un des plus fameux décorateurs sur majolique, Nicola da Urbino 4. Alors qu’on s’attache aujourd’hui à une révision générale des attributions traditionnelles, souvent dénuées de bases solides, cette opinion n’a plus guère de crédit. Rasmussen propose en revanche une attribution à Zoan Maria Vasaro, auteur d’une célèbre coupe aux armes du pape Jules II, datée de 1508 et exécutée à Casteldurante 5. Il se fonde sur les analogies entre cette dernière et la coupe Carendina, de la série de Scanderbech. Le spécialiste allemand a pu les confronter puisqu’elles sont toutes deux au Metropolitan Museum of Art de New York, dans la collection Lehman dont il a rédigé le catalogue. Son attribution s’appuie donc sur des bases sérieuses, bien qu’uniquement stylistiques. On doit alors restituer tout l’ensemble aux années 15101520, bien que de nombreuses autres coupes de typologie similaire, mais de mains différentes, sont considérées comme plus tardives. Aucune d’entre elles ne porte une date antérieure à 1522 6. Ajoutons que les majoliques lustrées par Maestro Giorgio ne l’ont pas été avant 1530. L’attribution traditionnelle de ces coupes à Casteldurante dépend probablement de leur attribution à Nicola da Urbino que l’on croyait alors de Casteldurante. Bien que le sous-sol durantin ait effectivement livré des tessons qui témoignent d’une telle production, et que certaines coupes semblent appartenir à l’In Casteldurante Painter 7, il est toutefois pratiquement certain que beaucoup d’autres furent exécutées à Gubbio et sans doute aussi à Urbino.
194
3. Pour une liste exhaustive,
cf. Thornton-Wilson, 2009, p. 347. 4. Falke, 1917; Rackham, 1959, pp. 112-113. 5. New York, Metropolitan Museum of Art, Lehman Coll. , inv. 1975. 1. 1015. 6. Comme le rappelle Rasmussen, l’exemplaire connu à ce jour comme étant le plus ancien daté (1522) est la Faustina du musée municipal de Pesaro. 7. Sur le peintre, cf. FioccoGherardi, 1997, pp. 19-23.
62. Plat Casteldurante, Atelier de Ludovico et Angelo Picchi (Andrea de Negroponte?), vers 1550-1560 H. 3,8 / D. 27,8
•
Inv. 1905
COUL.: Bleu, vert, orange, brun, noir, violet, grisaille, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Trois traces de pernettes sur la face; au revers, rugosités de l’émail
provoquées par la cuisson. Intègre, quelques ébréchures sur le pourtour et au talon. PROV.: Don Paul Gillet, 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 101, p. 82.
P
lat au bassin profond, illustrant la légende de Marcus Curtius qui se sacrifie pour la patrie. Le jeune patricien, en armes et à cheval, paraît prêt à se jeter dans le gouffre qui, selon les augures, se refermera seulement lorsqu’un Romain s’y jettera avec ce qu’il a de plus précieux, c’est-à-dire ses armes et son courage. L’épisode (362 av. J.C), se déroula dans le forum de Rome. L’abîme, refermé sur le héros, fut ensuite nommé lacus curtius (les traces du lac furent découvertes dans le Forum en 1904). En revanche sur le plat, la scène se déroule en plein air, entre des arbres, face à un bras de mer au-delà duquel on entrevoit une ville. Au revers, en bleu et en lettres cursives, on peut lire l’inscription Curzio romano. La manière incomparable, très vive et queque peu naïve, avec laquelle est exécutée la scène, est typique du peintre appelé conventionnellement Andrea da Negroponte. Ce nom figure au revers d’une coupe godronnée du musée national d’art médiéval et moderne d’Arezzo, représentant la Lutte entre Apollon et Mars peinte par la même main 1. Le nom d’Andrea Negroponte venant tout de suite après l’argument, ou explication de la scène représentée, pourrait donc être celui du peintre. On ne peut toutefois exclure qu’il s’agisse du nom du commanditaire. C’est là l’opinion de Wilson qui attribue ces oeuvres à l’atelier de Ludovico et Angelo Picchi, peut être de la main d’un des frères 2. Cependant à notre avis on ne peut en effet exclure qu’Andrea en soit l’auteur, et il n’est pas significatif jusquà ce jour, que son nom n’ait pas été retrouvé dans des documents. Le catalogue de Negroponte est assez riche en œuvres et porte des dates s’échelonnant entre 1551 et 1563. Outre la collection du musée d’Arezzo 3, un autre ensemble important est conservé au Herzog Anton Ulrich-Museum de Brunswick 4. Negroponte a également décoré des albarelli et des vases sur lesquels apparaît le nom de Casteldurante, nous permettant ainsi de rattacher à ce centre son activité. Ce service de pharmacie, orné de grotesques, trophées et istoriati, fut exécuté dans les premières années de la décennie de 1560, probablement dans les ateliers des Picchi, d’Ubaldo della Murcia et de Simone da Colonello 5. Ces 1. Fuchs, 1993, no. 217, p. 233. 2. On doit à Wilson noms nous sont révélés par les archives durantines, mais jusqu’à l’identification des armoiries d’ Andrea Boerio sur un célèbre ustensile pharmaceutique réalisé chez les Picchi dans les années 1562-63: Wilson, 2002, pp. 138-147; Thornton-Wilson, 2012, p. 383. 3. Ibid. , nos. 217-231, selon les attributions de Fuchs.
196
4. Lessmann, 1979, nos. 102-
121 (cf. aussi p. 148 une liste des œuvres principales dans les musées). 5. On y distingue en particulier deux services, l’un est marqué d’un blason avec un lion rampant accosté des initiales G et F, auquel appartient l’exemplaire du musée international des Céramiques de Faenza, inv. 24875, daté de 1562 et exécuté dans l’atelier de maître Simono (Simone da Colonello?), un autre marqué d’un blason avec une tour et un taureau (Boerio) dont plusieurs exemplaires sont datés de 1563, exécutés chez Ludovico Picchi selon l’indication portée sur un albarello de la coll. Bayer (Biscontini Ugolini, 1997, no. 19, pp. 80-83). Tous ces vases ne sont pas attribuables à la main de Negroponte, mais ceux qui présentent des scènes entières historiées semblent être de lui. Cf. sur le sujet, Ragona, 1976, pp. 106-109; Drey, 1985, pp. 5-12 (en particulier p. 12 où est donné l’avis de Mallet soulignant l’erreur de lecture de la date 1541 sur un albarello du Louvre de la série Boerio, qui serait plutôt 1562 ou 1563, et la conviction qu’il faut voir dans ce type de vaisselle la main d’Andrea da Negroponte) et Drey, 1987, pp. 195-200. Pour une synthèse, cf. Wilson, 2002, pp. 139-147.
présent aucune trace d’Andrea n’a été trouvée. S’agit-il d’un décorateur qui travaillait pour l’un de ces ateliers ? Andrea a peint un grand nombre d’assiettes et de coupes godronnées ornées de scènes tirées de la Bible, des Métamorphoses et de l’Histoire romaine, mais aussi de grands plats avec des scènes complexes, ainsi celle d’Alexandre et Diogène au Castello Sforzesco de Milan 6 ou encore deux autres avec Marcus Curtius au musée de la Renaissance d’Ecouen 7. Cette dernière histoire revient souvent dans sa production, notamment sur une coupe godronnée du musée national d’art médiéval et moderne d’Arezzo 8, sur un plat, une coupe et une petite cruche du musée Herzog Anton Ulrich de Brunswick 9 et sur une coupe du musée Adrien-Dubouché de Limoges 10. Enfin, Negroponte est l’auteur de services entiers, tel le SAPIENS DOMINABITUR ASTRIS, appelé ainsi en raison de la formule qui le distingue et qui est accompagnée d’armoiries non identifiées, et dont deux plats portent la date de 1551 11. Un autre de ses services porte des armoiries tronquées dans lesquelles figurent un corbeau et trois rosettes 12.
198
6. Inv. 121. 7. Giacomotti, 1974,
nos. 1041-1042. 8. Inv. Fraternita dei Laici
14704, in Fuchs 1993, no. 232. 9. Inv. 565, inv. 889, inv. 553, in Lessmann, 1979, nos. 102, 113 et 115. 10. Inv. 5406, in Giacomotti, 1974, no. 1169. 11. Fiocco-Gherardi, 1997, p. 48. 12. Un exemplaire, la Récolte de la Manne, est conservé à la Walters Arts Gallery de Baltimore Erdberg-Ross, 1952, no. 63, pl. 41), un autre, Sinon conduit devant Priam est au Louvre (Giacomotti, 1974, no. 1022).
63. Coupe Casteldurante, atelier de Ludovico et Angelo Picchi (Andrea da Negroponte?) vers 1550-1560 H. 4,5 / D. 25,6 / D. piédouche 11,3
•
Inv. 1737
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, noir, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Belle facture; revers orné d’un cercle jaune au piédouche. Accidentée,
anciennement restaurée (de face, 10 h / 1 h), trois fragments en bordure; une fêlure à l’horizontale au-dessus de la scène, apparente au revers (7 h /11 h). PROV.: Paul Gillet, don 1956. BIBL.: Damiron, 1956, no. 93, p. 76.
C
oupe à ombilic, à bord festonné et sur pied bas, dont la paroi est sillonnée de godrons rayonnants. Cette forme de coupe est communément appelée crespina. La scène représente le péché originel (Genèse, III, 1-3). Sous le regard d’Eve à genoux, le démon, ayant revêtu l’apparence d’un serpent au corps de femme, présente à Adam le fruit défendu de l’Arbre de vie. Au fond, le paradis terrestre qu’animent des montagnes et un bras de mer. Au revers, bord festonné avec des arcs qui en soulignent la forme. Sous la base, en cursive et en bleu, l’inscription Adam et Heua. Les caractères stylistiques, la forme, ainsi que le décor au revers, sont typiques d’un peintre appelé conventionnellement Andrea da Negroponte (cf. cat. no. 62). Le Royal Scottish Museum d’Edimbourg conserve une coupe identique par la forme et le sujet, avec la même inscription, qui pourrait être de Negroponte 1. Une assiette du musée de la Renaissance à Ecouen 2 en reprend également le thème.
200
Inv. 1882. 8. 9, in Curnow, 1992, no. 61, p. 59. 2. Inv. Cluny 10988, in Giacomotti, 1974, no. 1060, pp. 348-349. 1.
64. Plat Urbino, atelier de Nicola de Urbino (Francesco Xanto Avelli?), vers 1530 H. 3 / D. 30,6
•
Inv. 1892
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, brun, noir, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Accidenté à la partie inférieure de l’illustration; fracture (3 h - 6 h, deux fragments), ancienne restauration dégradée. PROV.: Coll. Heugel; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 1, p. 1; Giacomotti, 1962, repr. p. 43, fig. 26; Brody, 2007, p. 102.
P
lat au bassin creux et à aile large représentant l’allégorie de la Charité, figurée par une femme tenant un enfant par la main et en serrant un autre sur son cœur. Elle avance dans une niche dont la base porte le mot CARITAS. V. Au revers, filets et bandes concentriques jaunes et, en cursive bleue, l’inscription Per vera Charita aquista / il cielo. La scène est tirée d’une gravure de Marc-Antoine Raimondi, de la série des Sept vertus. La calligraphie au revers, soignée et ordonnée, identique à celle qui apparaît sur les œuvres signées de Nicola d’Urbino 1, permet de penser que ce plat devrait avoir été peint dans son atelier. L’exécution même est en harmonie avec le style de Nicola vers 1530. Il est ainsi possible de le comparer au plat du musée national de Florence, daté de 1528 (Martyre de sainte Cécile), et à celui du musée municipal médiéval de Bologne, daté de 1532 (Présentation de la vierge au Temple) 2. Le style de Nicola était alors assez proche de celui d’Avelli à ses débuts, quand ce dernier signait encore FR. C’est à Avelli en fait, même si il s’agit de l’atelier de Nicola, que Brody attribue le plat (voir la bibliographie).Collègue et ami de Guido Durantino, patron d’atelier et lui-même auteur d’un grand nombre d’œuvres 3, Nicola di Gabriele Sbraghe est considéré comme l’un des plus grands maîtres du style istoriato d’Urbino. Sa pièce la plus ancienne porte la date de 1521 4. Vers cette même période, on lui attribue le service Ridolfi ou Correr. Aux alentours de 1525 il aurait exécuté pour Isabelle de Gonzague marquise de Mantoue, belle-mère du duc d’Urbino, le service habituellement appelé Este-Gonzague. On a tendance aujourd’hui à être plus prudent quant aux attributions à Nicola, autrefois trop généreuses, mais celles-ci n’ont pas encore été révisées de façon systématique. La véritable identité du peintre, un moment confondu avec Nicoló Pellipario Schippe, père de Guido, lui a été rendue grâce aux recherches de Negroni 5. Ce dernier nous apprend son nom complet et la date de sa mort qui se situe aux environs de 1538. C’est à cette date que sa veuve loua son atelier à Vincenzo, fils de Maître Giorgio Andreoli de Gubbio. Marc-Antoine Raimondi, La Force [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
202
Cf. par ex. le fond du plat du Louvre représentant Le Parnasse, inv. OA1244, in Giacomotti, 1974, no. 829 et le revers du plat de Novellara avec L’histoire de Joseph, repr. in Liverani, 1991, pp. 46-50, fig. 3, p. 49. 2. Lustré par Maestro Giorgio Andreoli de Gubbio et autrefois attribué d’un commun accord à Nicola; on tend maintenant à l’attribuer à un peintre voisin qui lui est proche, travaillant peut-être dans son atelier (cf. Lessman, 1991, p. 27). 3. L’autographe de Nicola dans les œuvres qui lui sont attribuées se déduit du fait que le plat cité plus haut, signé par lui, du Bargello de Florence a cependant été exécuté dans l’atelier de Guido Durantino comme l’indique l’inscription au revers. C’est donc un cas bien différent de celui du même Guido ou de Giorgio de Gubbio, dont on ne sait pas avec certitude s’ils peignaient personnellement, et qu’on peut encore moins distinguer leur propre main de celle des peintres qu’ils embauchaient pour décorer. 4. Saint-Pétersbourg, Ermitage, inv. F363, in Kube, 1976, no. 58. 5. La confusion d’identité entre Nicola et Pellipario avait déjà été mise en doute par Burr Wallen (Wallen, 1968, pp. 92-105). L’essai concluant de Franco Negroni, au titre significatif de « Nicoló Pellipario ceramista fantasma », a été publié in Notizie da Palazzo Albani, 1, 1985, p. 17. 1.
65. Coupe Urbino, Le peintre de Marsyas de Milan, vers 1525-1530 H. 4,2 / D. 26 H. pied 2 / D. pied 12
•
Inv. 1890
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé, brun, noir. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Picots dont un important sur la patte du lion.
Intègre; écaillures sur le bord. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 3, p. 3; Giacomotti, 1962, repr. p. 43, fig. 25.
C
oupe sur pied bas, à paroi légèrement incurvée. Elle présente, sur fond de paysage montagneux, une jeune femme tenant un lion en laisse et avançant vers un feu. Il s’agit de l’allégorie de la Force, une des quatre vertus cardinales, d’après une gravure de Marc-Antoine Raimondi, elle-même inspirée de Raphaël et de Jules Romain. D’après son style, on peut attribuer cette coupe à un peintre d’istoriati dont le nom nous est toujours inconnu. Il était en activité à Urbino de 1525 à 1535. Conventionnellement, il fut appelé le peintre de Marsyas de Milan d’après un plat peint par lui, figurant la guerre entre Apollon et Mars, conservé au Castello Sforzesco de Milan 1. Fortement influencé par Nicola, dont il tire la plus grande partie de ses stylisations et le type de ses physionomies, il en diffère cependant par une habilité moindre 2. En effet, ses personnages ne sont pas aussi expressifs et variés dans leurs attitudes, et les paysages n’ont pas sa profondeur. On considère qu’il est l’auteur d’une partie du service orné d’un blason avec trois croissants, deux en pointe et un au sommet 3. Marc-Antoine Raimondi, La Force [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
204
1.
Mallet, 1988, pp. 70-73.
2. Cf. cat. no. 64. 3. Rasmussen, 1989, pp. 126-
127; Fiocco-Gherardi, 1998a, p. 21.
66. Coupe Urbino, Peintre de l’Epsilon-phi (Francesco Xanto Avelli da Rovigo), vers 1528-1530 H. 3,6 / D. 27,6
•
Inv. 1897
COUL.: Bleu, jaune, orange, brun, noir, violet, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Lèvre déversée, au revers et en bordure du marli,
quatre moulures très accentuées; quatre traces de pernettes sur la face; nombreux picots. Intègre; manque au bord, apparent au revers. PROV.: Coll. Hermann Emden (vente Berlin, 3-7 novembre 1908, no. 45, repr. pl. 10); Robert Kahn; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 133, p. 94; Cioci, 1995, p. 246; Fiocco-Gherardi, 2002, pp. 117-118, fig. 1; Mallet, 2007, p. 34; Sani, 2007, no. 68, p. 192; Cioci, 2012, p. 10, figs. 1-2.
C
oupe ornée d’une représentation allégorique de l’empereur Charles Quint armé à la manière des anciens romains, avec l’aigle bicéphale sur le cimier. D’un air décidé, il se dirige vers un ange assis sur un tronc coupé. Celui-ci, alarmé, se tourne vers lui. De sa main, il protège la sphère surmontée de la Croix, symbole du monde chrétien. Au revers, l’inscription Cerco la monarchia per punir molti; immaginatione y. L’allégorie fait allusion aux troubles qui affectèrent l’Italie dans les années 1527-1530 et culminèrent avec le sac de Rome, l’empereur s’étant affronté au pape Médicis Clément VII. Francesco Xanto Avelli, l’auteur de la coupe, fit sa carrière sous la protection du duc d’Urbino, Francesco Maria Della Rovere, à qui il dédia même un poème, Il Rovere Vittorioso (Rovere victorieux). Le duc était un farouche adversaire du pape et de sa famille, d’autant qu’il avait été déchu par Léon X en faveur de Laurent de Médicis. Il fut réhabilité en 1523 grâce à Adrien VI d’Utrecht. Bien qu’adhérant à la ligue de Cognac, il ne s’était jamais vraiment engagé dans la lutte contre les armées impériales et avait peu fait pour éviter le sac de Rome. Dans de nombreuses majoliques historiées, Avelli épouse le parti de son protecteur. Il manifeste des sentiments violemment impérialistes et anti-papistes, démontrant que le sac était une juste punition pour Rome, devenue dès lors la grande prostituée de l’Apocalypse. Il s’exprime dans des allégories complexes dont le sens n’est pas toujours aisé à comprendre aujourd’hui. Avelli est pratiquement un cas unique parmi les peintres de majoliques qui préféraient en général s’en tenir à l’antiquité, à la mythologie ou à la religion. Sur notre coupe, l’ange symbolise la papauté qui tient d’une main ferme ses pouvoirs spirituel et temporel et se refuse à les céder à l’empereur. Il n’est pas exclu que la nef sur le fond représente la nacelle de saint Pierre. Le commentaire du revers exprime le désir de l’auteur que Charles Quint venge les torts subis par son seigneur. Le terme immaginatione qui achève la phrase transporte le tout sur le plan de l’imaginaire. Il correspond au terme fabula utilisé ailleurs 1. La terminaison en volute, qui ressemble à l’epsilon ou au phi grec et qui a valu à l’auteur le surnom de Maître de l’epsilon-phi, est interprétée de façons diverses, mais jamais de manière convaincante. Selon Mallet, il s’agit d’une volute quelconque, d’une sorte de remplissage 2, tandis que Rasmussen y voit un C paraphé qui signifierait et cetera 3. Ce signe apparaît aussi après la signature d’Avelli et a été considéré comme sa marque. Il l’utilisait également avant 1530, année où il commença à signer ses œuvres de son nom entier. 206
Les autres termes employés sont « nota » et « historia », avec la référence à des faits mythiques désormais lointains. 2. Mallet, 1988, pp. 67-69. 3. Rasmussen, 1989, p. 130. 1.
Avelli est l’un des plus célèbres décorateurs de la majolique italienne. Natif de Rovigo, en Vénétie, il est cependant actif dans le duché d’Urbino, pour une production entièrement vouée à l’istoriato. Un document de 1530 nous révèle qu’il s’appelait en réalité Santi ou Santini, et qu’il voulut probablement valoriser son nom en le modifiant en Xanto, l’un des fleuves de la plaine de Troie, y ajoutant Avelli quand sa carrière commença à décoller sous les auspices du duc. Le même document le présente aussi comme décorateur libéral. Il est cependant probable qu’il ait acquis par la suite son propre atelier; après 1530, il semble en effet n’avoir travaillé qu’une seule fois pour d’autres.
208
67. Assiette Urbino, Francesco Xanto Avelli, 1531 H. 4,5 / D. 26,5
•
Inv. 1901
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé, brun, noir, touches de violet, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Bel aspect; quelques picots; émail verdi par la volatilisation du
cuivre. Accidenté, complet (plusieurs fragments), on en compte neuf sur le fond postérieur, masqués par une ancienne réparation. PROV.: Coll. Wilfred Buckley (vente Londres, 1922); Alfred Pringsheim (vente Londres, I, 8 juin 1939, no. 183); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Falke, 1914, II, pl. CXXXII, no. 257; Ballardini, 1938a, no. 40, p. 20, fig. 37; Damiron, 1943, no. 84, p. 61; Giacomotti 1962, p. 44, repr. p. 1 de couverture; Holcroft, 1988, no. 51, p. 233, note 61; Join-Dieterle, 1984, p. 220, no. 72; Kube, 1976, notes 77- 78; Rackham, 1977, p. 211; Rasmussen, 1984, p. 178; Ravanelli Guidotti, 1990a, p. 224; Watson, 1986, p. 130, note 1; Wilson, 1993b, p. 31, note 15; Rondot, 1994, pp. 22-29, no. 1, repr. p. 23, figs. 1a-1b; Sani, 2007, p. 194, no. 155; Thornton-Wilson, 2009, p. 269.
L
’assiette, décorée en plein, représente la Mort de Cléopâtre. A droite sur l’aile, la 1. Rondot, 1994, p. 24. reine d’Egypte est à demi étendue, la tête penchée, l’aspic enroulé autour du bras. 2. Watson, 1986, p. 130. Le blason des Squarzoni est A ses pieds un amour, son carquois à terre, pleure désespéré, tandis qu’un autre décrit dans Crollalanza, 1886-90, III, p. 295. en vol disperse une guirlande de fleurs. Sur la gauche, une femme et un homme accablés 3. Cioci, 1987, p. 127. pleurent. Un enfant se prend la tête dans les mains en signe de douleur. La scène se déroule dans une salle Renaissance, au plafond à caissons. Au centre de l’assiette, dans une fenêtre à riche corniche s’encadre un blason, non identifié, représentant Hercule tuant le lion de Némée. Au revers, l’inscription: 1532. / Morto ch’ Antonio / fu morir vols io / Nel XL. L. a Trogo / pompeio. /.fra: Xato.A. da / Rovigo, i / Urbino. Elle se réfère ainsi à l’œuvre de Trogue Pompée, Historiae Philippicae, connue au xvi e siècle à travers l’épitomé de Marco Giuniano Giustino, Epitoma Historiarum Philippicarum Pompei Trogi, traduite en italien à Venise en 1477 par Girolamo Squarciafico, et gravée à plusieurs reprises 1. Elle ne parle cependant pas de façon spécifique de la mort de Cléopâtre mais seulement de la fin de la dynastie des Ptolémée. L’assiette est signée en entier par Avelli, établi à Urbino depuis 1530. Elle fait partie d’un service dont le commanditaire n’a pas été identifié. Le blason ressemble en réalité à celui des Squarzoni de Ferrare mais présente des couleurs différentes 2. Il n’est pas certain d’ailleurs qu’il s’agisse d’armoiries véritables ou même d’un emblème. Selon Cioci, il pourrait symboliser le conflit qui opposait Francesco Maria Della Rovere, duc d’Urbino, au leone feroce (lion féroce) le pape Léon X, comme l’écrit Avelli au vers 13 du chant xiv de son poème Il Rovere Agostino Veneziano, Mort de Cléopâtre Vittorioso (Rovere Victorieux) 3. [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
210
Marc-Antoine Raimondi, Martyre de saint Cécile (dètail) [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
Marc-Antoine Raimondi, Le Parnasse (dètail) [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
On connaît huit autres pièces du service 4, dont quatre datées de 1531 et deux de 1532. Leurs sujets ne sont pas homogènes mais embrassent histoire et légende. Comme à l’habitude, Avelli a utilisé toute une série de gravures dont il a séparé les personnages pour les réunir ensuite dans une composition originale. Cléopâtre et le petit amour en pleurs sont tirés de gravures d’Agostino Veneziano sur le même sujet, l’amour voltigeant qui éparpille des fleurs, du Parnasse de Marc-Antoine Raimondi, tandis que les trois personnages à gauche sont inspirés du martyre de sainte Cécile du même Raimondi. La gravure de la mort de Cléopâtre a été réutilisée plusieurs fois par Avelli avec des variantes dans le contexte, ainsi pour le plat à lustre métallique du Museum für Kunst und Gewerbe de Hambourg, daté de 1538 5, pour celui de la Colombus Gallery of Fine Arts 6 ou encore la bouteille du musée Correr de Venise, datée de 1531 7. Sur le service d’Hercule tuant le lion, le style d’Avelli se manifeste désormais dans sa plénitude, riche de personnages puissants, cernés d’un trait épais, aux couleurs éclatantes.
212
4. Pour une liste exhaustive,
cf. Thornton-Wilson, 2009, p. 269. 5. Inv. 1900. 160, in Rasmussen, 1984, no. 124, où l’auteur fournit une liste exhaustive des autres exemplaires qui ont utilisé la même gravure. 6. Inv. 31. 31, in Cole, 1977, no. 16, p. 44, daté de 1540. 7. Rondot, 1994, p. 27.
68. Assiette Urbino, Francesco Xanto Avelli, 1533 H. 2,7 / D. 25,6
•
Inv. 1904.
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé, noir, rehauts de blanc; reflets métalliques rouges et dorés. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Décor mixte obtenu par deux cuissons après celle « de dégourdi »: décor de grand feu, complété par un décor de petit feu, ce dernier conduit en réduction pour l’application du lustre métallique. Sur la face, cinq traces de pernettes. Accidentée, complète (neuf fragments), très habilement restaurée. PROV.: Coll. Duc de Dino; Duchesse de Dino (vente Paris, 8 mai 1894, no. 42); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 67, p. 59; Lessmann, 1990, p. 349; Norman, 1976, p. 179; Triolo, 1988, p. 275; Watson, 1986, p. 134, note 8; Wilson, 1993b, p. 31, note 15; Rondot, 1994, no. 3, pp. 32-37, repr. p. 32, figs. 8a-8b; Poole, 1995, p. 344; Sani, 2007, p. 196, no. 220.
L
e plat raconte la destruction, lors d’une tempête, de la flotte de Séleucos II, roi de Syrie. Les navires coulent au milieu des rafales de vent et des nuages. Les marins sont en proie à la panique. Au premier plan, un cadavre flotte sur une planche de bois. A gauche, un personnage fuit, peut-être Séleucos lui-même qui seul survécut au naufrage. Grâce à cette flotte, le roi espérait mater la rébellion survenue après l’assassinat de sa belle-sœur, sœur de Ptolémée d’Egypte, et de ses fils. Les dieux en décidèrent autrement. Au revers du plat, au milieu d’une riche décoration à lustre métallique formée d’arcatures et de losanges, l’inscription tracée en bleu et en caractères cursifs .1533. / Seleuco sol della sua / Classe seluo. / Nel.XXVII. Lite de Justino His: / .ff: Xanto. A. / da Rovigo, i / no. Un rameau en lustre métallique précédé des lettres F.P., tracé aussi en lustre métallique, se superpose à la signature de l’auteur. Le sujet fait là encore référence à l’œuvre de Giustino de Trogue Pompée (cf. numéro précédent) et l’inscription, incomplète en raison d’une restauration, peut être transcrite comme Seleuco solo della sua flotta salvo. Les sources graphiques, ponctuellement identifiées par Rondot, sont, selon l’usage, multiples. De chacune, Avelli tire ses personnages et les réunit de manière autonome. Il emprunte à la Bataille au coutelas de Raimondi la figure de Seleucos et celle du personnage étendu, au Martyre de saint Laurent, du même artiste, le marin debout; des Noces d’Alexandre et Roxane de Caraglio, il tire l’homme à la barbe blanche qui s’agrippe au grand mât, du Martyre de sainte Cécile de Raimondi, le marin de profil qui tente de Marc-Antoine Raimondi, La Bataille au coutelas (dètail) [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
Gian Giacomo Caraglio, Les Noces d’Alexandre et Roxane [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
214
Marc-Antoine Raimondi, Martyre de saint Cécile (dètail) [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
Georg Pencz, Apollon [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
manœuvrer le gouvernail. Enfin, le personnage de dos, au centre, reproduit inversé, l’Apollon de Georg Pencz. C’est donc un vrai puzzle que réalise ici Avelli à partir d’empunts, comme il en est pour un plat du Fitzwilliam Museum à Cambridge, illustrant le même sujet et portant la même date 1. L’assiette a été complétée par le lustre doré et rouge caractéristique de l’atelier de maître Giorgio de Gubbio (cf. cat. nos. 96 à 107 et 164). Avelli utilise souvent le lustre métallique. Ses rapports avec l’atelier de Giorgio commencent assez tôt, avant même 1530. En effet, de nombreuses œuvres à lustre métallique sont attribuées à l’artiste au monogramme FR que l’on croit être Avelli dans sa première phase, et également celles signées de l’Y-phi 2 (par exemple, la coupe figurant Hercule et Déjanire du musée municipal d’art médiéval et moderne d’Arezzo et le plat figurant Pico et Canente du musée du palais des Consoli à Gubbio, tous deux datés de 1528). Selon nous Avelli aurait travaillé pendant quelques années dans l’atelier de Gubbio qui engageait en premier lieu des décorateurs venus d’ailleurs. A partir de 1530 –après son établissement à Urbino et ses débuts de carrière sous la protection de Francesco Maria della Rovere– Avelli continua à faire appliquer le lustre métallique sur ses istoriati, mettant cependant bien en relief sa propre signature et la légende In Urbino. A propos de ses œuvres exécutées entre 1530 et 1533, dont cette assiette Gillet fait partie, Mallet note que le lustre métallique semblerait vouloir presque couvrir la signature de l’auteur, comme si Giorgio n’appréciait pas ce signe d’indépendance 3. Cela devait cesser par la suite; on voit de plus en plus souvent apparaître, en lustre métallique, le sigle N qu’on suppose être celui de Vicenzo, le fils de Giorgio qui travailla durant une certaine période à Urbino. En revanche, il ne ressort pas qu’il ait jamais apposé le sigle FP, indication probable de l’artisan ou de l’atelier qui appliquait le lustre. Le décor « à losanges » du revers est par ailleurs proche, bien que différent, de celui d’une coupe du musée municipal de Pesaro, datée de 1533 et attribuée à Francesco Urbini 4, et de celui d’une assiette plus ancienne, datée de 1519 de la collection Lehman de New-York 5.
216
Inv. C. 87-1961, Poole, 1995, no. 393, pp. 342-344. 2. Pour ce sigle, cf. les nos. 151- 152. 3. Mallet, 1988, pp. 68-69. 4. Ballardini, 1938a, no. 81, 264 R. 5. Rasmussen, 1989, p. 183, no. 110. 1.
69. Coupe Urbino, Francesco Xanto Avelli, 1541 H. 6 / D. 27,8 / H. pied
2 / D. pied 14,4 •
Inv. 1896
COUL.: Bleu, vert, jaune, brun, bistre, violet, noir, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Gauchissement; exécution parfaitement soignée. Fêlure sur le
marli (6 h); plusieurs éclats et ébréchures sur le pourtour de la coupe et au bord du pied. PROV.: Coll. Baron Gustave de Rotschild; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 96, p. 72; Giacomotti, 1962, p. 44; Rondot, 1994, no. 6, pp. 44-47, repr.
p. 44, fig. 18a et p. 45, fig. 18b; Blazy, 1998, repr. p. 73; Sani, 2007, no. 394, p. 200.
C
oupe sur pied bas représentant une scène de l’Enéide de Virgile (ix, 25 et suiv.); Turnus, roi des Rotules, allié du roi latin, combat Enée et les exilés troyens qui se sont établis dans le Latium. Turnus figure à gauche de la coupe, à cheval, se lançant avec deux hommes d’armes à l’assaut des bastions de la « Nouvelle Troie », c’està-dire le camp fortifié ennemi avec ses défenseurs. Au revers, sous la base, inscription en cursives bleues .1541./ Turno d’intorno / alla nouella Troia. / X. Pour représenter le camp troyen, Avelli a eu recours à une gravure de Marco Dente, la Prise de Carthage d’après le dessin de Jules Romain. Pour un grand plat représentant la Prise de la Goulette en Tunisie par l’Empereur Charles-Quint, Avelli s’est inspiré, la même année, de cette même gravure. Ce sont là les dernières œuvres connues d’Avelli puisqu’on perd sa trace l’année suivante. Le plat illustré de la prise de La Goulette fut exécuté, selon l’inscription au revers, dans l’atelier de Francesco di Silvano. Si cette collaboration n’a pas été occasionnelle 1 et si Avelli a bénéficié cette annéelà d’une place stable dans cet atelier, il n’est pas impossible qu’il soit également l’auteur de la coupe Gillet.
Marco Dente, la Prise de Carthage
218
1. Comme le fut, par exemple,
celle de Nicola di Gabriele Sbraghe dans l’atelier de Guido Durantino en 1528 pour l’assiette du Bargello représentant le martyre de sainte Cécile.
[ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
70. Assiette Urbino, atelier de Guido Durantino, vers 1540-1550 H. 4. 5 / D. 26. 6 / D. talon 9. 6
•
Inv. 1931
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, ocre, noir, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: De face, sur l’aile, cinq traces de pernettes; au revers: trois filets jaunes; émail irrégulier; plages vertes dues à la migration du cuivre d’une autre pièce de la fournée. Intègre; ébréchures et léger manque sur le pourtour. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 86, p. 71; Crépin Leblond-Ennès, 1995, p. 50; Anversa, 2007, p. 40; Thornton-Wilson, 2009, p. 310.
C
e plat creux illustre la métamorphose des compagnes de Proserpine en sirènes. Bouleversées de douleur par le rapt de Proserpine, l’ayant cherchée sur la terre entière, les jeunes filles émirent le vœu d’avoir des ailes pour voler sur les flots. Satisfaites, elles devinrent oiseaux, conservant toutefois figure et voix humaines 1. L’auteur de l’assiette n’a pas suivi Ovide à la lettre. Les sirènes ont pris des queues de poisson et sont sur le point de se jeter à l’eau. On peut voir, sous la base, un écu avec deux têtes de maures (Lanciarini de Rome) autour duquel s’ordonne l’inscription Le cho / pagnie / d proserpi / na che / se muto / rne in sene (les compagnes de Proserpine qui se transforment en sirènes). La même scène, représentée de façon similaire et avec la répétition de la figure centrale, se retrouve sur un plat du musée municipal de Pesaro 2. On connaît de nombreux autres exemplaires du service, mais qui ne sont pas tous du même peintre 3. Le traitement stylistique du peintre se rapproche de celui du service Nordi. On peut sans doute identifier le peintre à l’auteur de certaines chevrettes et de deux vases à large ouverture de la pharmacie du sanctuaire de Lorette 4, bien que ceux-ci semblent appartenir à une période postérieure en raison de la monumentalité des figures et du trait plus abrégé. Le service Lanciarini est donc attribué au cercle de l’atelier de Guido Durantino où travaillait encore son fils Orazio, vers la fin des années quarante.
220
Ovide, Métamorphoses, v, 551-554. 2. Mancini Della Chiara, 1979, no. 257. 3. Pour une liste exaustive, cf. Thornton-Wilson, 2009, p. 310-311. 4. Grimaldi, 1977, nos. 425-470. 1.
71.
Plat Urbino, atelier de Guido Durantino, vers 1540-1550 H. 3,3 / D. 26,5
•
Inv. 1933
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, brun, noir, violet, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Cinq traces de pernettes sur la face; picots sur l´ensemble de la pièce, trace de contact sur l’aile; au revers, saillie au-dessus de l’inscription. Accidenté dans la partie haute de l’illustration, complet (trois fragments en bordure), restauré. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Taburet, 1981, repr. p. 17.
L
e plat, au bassin profond, représente une scène de bataille, l’épisode au cours duquel Hannibal, combattant les Romains, fait tomber de cheval Publius Cornelius Scipion. Autour de lui, des groupes de guerriers se battent tandis que les étendards se déploient au vent. Au revers, en cursives bleues, l’inscription Come Hannibale Combate / do co li Romani li / ruppi, et Preso publio / Cornelio, Patre de / Scipione africano (Comment Hannibal, combattant contre les Romains, bat et capture Publius Cornelius, père de Scipion l’Africain). Il s’agit de la bataille du Tessin en septembre 218 av. J.C., au cours de laquelle Publius, à la tête de deux légions, affronta Hannibal. Il fut battu et gravement blessé. Seule l’intervention de son fils de dix-sept ans lui sauva la vie. Il leva donc rapidement le camp et mit ses hommes à l’abri vers Piacenza. La scène est tirée, avec quelques variantes, d’une gravure de Barthel Beham (Nuremberg, 1502-1540) représentant un combat de nus et sur laquelle il est écrit Titus Gracchus. De la même gravure dérivent également l’ornement extérieur d’une coupe de la Galleria Estense de Modène 1, et en partie celui d’un plat du Victoria and Albert Museum de Londres 2. A partir des années quarante, de grands plats portant des scènes de batailles, avec des personnages vêtus à l’antique, furent exécutés dans l’atelier de Guido Durantino. La plupart de ces représentations sont tirées de gravures inspirées directement des dessins de Raphaël et Jules Romain pour la Chambre de Constantin au Vatican 3. Les peintres travaillant dans cet atelier avaient habituellement recours aux gravures de petits maîtres de Nuremberg, en particulier à celles du frère de Barthel, Hans Sebald 4.
Inv. 2018, in Liverani, 1979, no. 17, pp. 61-65. 2. Inv. 1679-1855, in Rackham, 1940, no. 922. 3. Massari, 1993, pp. 40, 53 et 60. 4. Cf. cat. nos. 173, 175 5. Cf. par ex. le plat daté de 1543 de la coll. Ghigi Saracini à Sienne (in Ravanelli Guidotti, 1992, no. 13), et Liverani, 1957, pp. 131-134. 1.
Barthel Beham, Titus Gracchus (Combat de nus) [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
Les plats au monogramme d’Orazio 5, fils de Guido, qui travailla auprès de son père jusqu’en 1565, offrent des affinités avec l’assiette Gillet. Les scènes de batailles y sont très proches, au moins dans la manière de traiter le paysage et l’anatomie des chevaux. Un lien stylistique étroit existe également avec un plat de service Nordi du musée Boymans van Beuningen de Rotterdam, représentant la Bataille entre Philippe de Macédoine et des Etoliens. On peut donc supposer que le plat Gillet a été exécuté chez Guido et Orazio, probablement au début des années quarante.
222
72. Assiette Urbino, atelier de Guido di Merlino ?, vers 1540-1550 H. 4 / D. 24,4 / D. pied 6,5
•
Inv. 1927
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, brun, noir, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Au revers, émail verdâtre dû à la migration du cuivre d’une autre
pièce de la fournée. Intègre; nombreuses égrenures en bordure. Au revers, étiquette: 15 from the Brookman Collection, Sotheby’s 1946… PROV.: Coll. Beit; coll. Brookman (vente Londres, 1946, no. 15); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 85, p. 70.
A
ssiette au bassin profond, représentant une scène mythologique non identifiée (l’Age d’or ?). Au devant d’arbres et d’édifices, un jeune homme, au premier plan, se penche en avant. Autour de lui, des personnages nus et en partie drapés l’observent. Dans le fond, un homme et une femme sont assis côte à côte, une main posée sur un vase. Le revers est émaillé de blanc. Le peintre, inconnu, présente plusieurs traits caractéristiques qui se répètent dans son œuvre et le font reconnaître, tels les yeux en demi-lune donnant un regard étonné, l’anatomie musclée, les genoux ronds et empâtés, les doigts soulignés à la base d’un trait qui les sépare presque du reste de la main. Les fonds d’architecture sont caractérisés par des perspectives bizarres, sillonnés d’arcades voûtées, et couronnés de rotondes à coupoles. Ce peintre, déjà introduit dans le domaine de la production de Pesaro sous le nom de Peintre de Samson et les Philistins 1, semble toutefois être l’auteur d’un bassin récemment acquis par le musée national de la Céramique de Sèvres, et représentant Orphée jouant au milieu de bêtes féroces. Il est écrit au revers qu’il fut exécuté en 1542 dans l’atelier de Guido di Merlino 2, fils de maître Benedetto di Merlino, et l’un des plus importants faïenciers du xvi e siècle à Urbino. En 1523, quand il est mentionné pour la première fois dans les documents, il dirige déjà son propre atelier 3. En 1530 il fait partie des patrons qui s’accordent pour tempérer les prétentions des travailleurs sous contrat, au nombre desquels figure Avelli 4. En 1536 il embauche comme peintre de majoliques Caesar Care Carii de Faenza. En outre, en 1543, Francesco Durantino, Luca di Bartolomeo de Casteldurante et Fedele di Giovanni s’engagent à peindre chez lui 5. Guido avait donc l’habitude d’embaucher par contrat des peintres pour des périodes plus ou moins longues. Il est certain que l’auteur de notre plat en faisait partie. Au rang des nombreuses œuvres qu’il semble avoir exécutées, à côté du bassin représentant Orphée dont il a été parlé plus haut, citons le plat du musée Gadagne à Lyon avec sa scène politico-allégorique (Le disgrazie d’Italia), « La disgrâce d’Italie » 6, deux coupes de la Wallace Collection, Le Sacrifice de Noé 7 et les filles de Minyas durant la célébration de la fête en l’honneur de Bacchus (cette dernière œuvre, à lustre métallique, datée de 1543, avec les armoiries Bocchi de Bologne) 8, le plat représentant Proserpine et ses compagnes du musée Herzog Anton Ulrich de Brunswick 9, deux plats du Louvre, Apollon et Mars et Apollon et Pan 10, un plat de l’Indianapolis Museum of Art, l’Enlèvement de Ganymède 11, un plat de la Walters Arts Gallery de Baltimore, Samson tuant les Philistins 12, un autre de même sujet au musée municipal de Padoue 13, un autre encore, Le meurtre de Tarpée, au musée du Vatican 14. Parmi les
224
Bonal-Gresta, 1987, pp. 76 et sqq. L’attribution du peintre à Pesaro se base sur l’identification de celuici avec l’auteur d’une coupe du Louvre représentant Samson combattant les Philistins (Giacomotti, 1974, no. 913), derrière laquelle est écrit 1540… fatta i Pesaro. 2. Mallet, 1996, figs. 9 -10. Au revers, on note l’inscription suivante fate in botega / de guido de mertigno / vasaro da urbino/ in sanpolo adi 30 / de marzo 1542. 3. Mallet, 1987, p. 287. 4. Pungileoni, 1879, p. 337, note 8. 5. Scatassa, 1908, p. 168. 6. Inv. 42397. 7. Inv. III E 200, in Norman, 1976, no. C 134 (l’inscription au revers est Schrefizi). 8. Inv. IIIA41, ibid. , no. C 134 (l’inscription au revers est Fabulatrice de baccho). 9. Inv. 748, in Lessmann, 1979, no. 504. 10. Inv. OA 1556 et MR 2240, in Giacomotti, 1974, nos. 996 et 1024. 11. Inv. 59. 34, in Cole, 1977, no. 33, p. 72. 12. Inv. 48. 1325, Erdberg-Ross, 1952, no. 59. 13. Inv. 164, in Bonali et Gresta, op. cit. , p. 77. 14. Inv. 2245, in Morello, 1993, no. 11, p. 250. 1.
nombreuses œuvres inédites, mentionnons celle du musée international des Céramiques de Faenza, L’Histoire de Coriolan 15, une autre dans une collection privée de Novare, Cléobis et Biton et une dernière dans une collection privée de Hambourg, avec des traces d’un lustre métallique ayant subi une cuisson manquée. Il s’agit donc d’un peintre travaillant à Urbino au début des années 40, sûrement aussi dans l’atelier de Guido di Merlino, qui utilisait sporadiquement le lustre rouge de Gubbio. Sa production, assez abondante, est constituée de préférence de thèmes mythologiques ou bibliques. Sur le plat du musée Gadagne, le peintre a toutefois traité un thème que l’on rencontre rarement, excepté dans la production d’Avelli, celui de l’allégorie politique contemporaine.
226
15. Inv. 9854.
73. Plat Urbino, vers 1560-1570 H. 4,5 / D. 28,6
•
Inv. 1894
COUL.: Camaïeu bleu, plusieurs verts, jaune, orange, brun, noir, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail irrégulier, rugueux à certains endroits; au revers retrait
apparent au niveau du marli, trois filets jaunes, l’un soulignant le talon, sur fond d’émail beige. Intègre, deux manques au talon, quelques égrenures sur le contour. PROV.: Paul Gillet, don. BIBL.: Damiron, 1956, no. 99, p. 80.
P
lat au bassin profond représentant, en plein, la scène biblique du Sacrifice d’Abraham (Genèse, 22, 1-14). Dieu voulant mettre à l’épreuve Abraham lui ordonne de sacrifier son fils unique. Abraham conduit alors Isaac sur la montagne et s’apprête à l’égorger quand il est arrêté par l’ange du Seigneur. Un peu plus loin, il aperçoit un bélier et l’offre en sacrifice à la place de son fils. Dans le fond, on peut voir le feu préparé pour le sacrifice, une ville et des chaînes de montagnes. Au revers, en cursive bleue, l’inscription Abram. L´iconographie semble tirée, en dépit de quelques variantes, notamment dans la position du garçon, de l´illustration de Hans Sebald Beham pour les Biblisch Historien (Francfort, 1533), très proche elle-même d’une gravure au burin de Benedetto Montagna. Par son style, le plat appartient à la production d’Urbino, peu après le milieu du xvi e siècle. Les coloris, la façon de faire les nuages en forme d’escargots, le paysage du fond qui présente des montagnes azurées de forme arrondies, et les édifices en sont les signes distinctifs 1. Le fait que ces caractères soient communs à tous les ateliers rend difficile l’attribution précise du plat à l’un d’entre eux.
1. Une comparaison peut
être faite avec deux gourdes de l’Herzog Anton Ulrich-Museum de Brunswick, qui montrent des éléments semblables dans le paysage et la forme des nuages, et qui sont attribuées à l’atelier Fontana (inv. 2930, in Lessmann, 1979, nos. 189 -190).
Hans Sebald Beham, Le Sacrifice d’Abraham, (Biblish Historien, 1533) [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
228
74. Gourde Urbino, atelier des Fontana, vers 1550-1570 H. (sans bouchon) 30 / L. max. 23,3 / L. 13
•
Inv. 1889/2
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, brun, violet, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Pièce de forme. Le bouchon manque, il a été remplaçé par un
couvercle en argent, gravé de rinceaux; le piédouche est entouré à sa base d’une monture à oves en bronze doré, d’époque postérieure. Restaurations au pied et sur les mascarons des anses; manque d’émail sur une anse; blason refait. PROV.: Coll. Baron Gustave de Rotschild; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 114, p. 83; Blazy, 1998, repr. p. 75.
G
ourde plate, à haut col, sur pied évasé avec deux fentes symétriques, flanquée de deux anses en relief formées des cornes enroulées de deux masque de satyres. Le décor historié se développe sur toute la surface. Un côté de la gourde présente Joseph que ses frères viennent de jeter dans un puits (Genèse, 37, 23-24). Informés de ses songes prophétiques et comprenant que Joseph deviendra très puissant, ses frères décident par jalousie de le vendre comme esclave aux Ismaélites qui l’emmènent en Egypte. Esclave dans le palais de Putiphar, calomnié par la femme de ce dernier puis emprisonné, Joseph rentre en grâce et, pour avoir su expliquer au pharaon les songes qui le hantent, devient vice-roi d’Egypte. C’est en cette qualité qu’il reçoit ses frères qui ne le reconnaissent pas. Voulant d’abord les punir, il les met à l’épreuve, puis leur accorde son pardon. Sur l’autre côté de la gourde, Joseph présente ses cinq frères au pharaon qui leur permet de demeurer en Egypte, dans la région de Gochen (Genèse, 47, 1-6). Sur le col de la gourde, un petit blason surmonté d’un heaume empanaché sur lequel sont disposées trois tortues et un écriteau avec la devise BRADYTES, en caractères grecs. Les deux scènes bibliques sont tirées de gravures sur bois d’Hans Sebald Beham publiées pour la première fois dans les Biblisch Historien (Francfort-sur-le-Main, 1533).
Grimaldi, 1977, nos. 294295. 2. Inv. III D 138, in Norman, 1969, no. C141, p. 279. 1.
Hans Sebald Beham, Joseph et ses frères devant le Pharaon, (Biblish Historien, 1533) [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
Hans Sebald Beham, Joseph dans le puits, (Biblish Historien, 1533) [ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
Cette même iconographie se retrouve sur deux grandes amphores de la pharmacie du sanctuaire de Lorette 1, dans des scènes analogues exécutées probablement par la même main. La scène de Joseph dans le puits figure aussi sur un plat de la Wallace Collection 2 qui fait partie d’un service ayant pour emblème un phénix.
230
75. Gourde Urbino, atelier des Fontana, vers 1560-1570 H. sans bouchon 25 / H. avec bouchon / 31 Panse 26,2 / L. 13,2 / Pied 11,5 / l. 10
•
Inv. 1923
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, noir, brun. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: La ligne de jonction de la partie haute du col avec le restant de col
est apparente; au piédouche, deux fentes pratiquées avant cuisson pour le passage d’un lien souple. Intègre; quelques égrenures aux anses et au bouchon restaurés. PROV.: Coll. Gustave de Rothschild; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 108, p. 79.
G
ourde sur pied évasé, avec deux anses à passant en forme de dragon, col haut et bouchon à vis, qui représente une version raffinée du type dit gourde de pèlerin. Sur une face, dans un cadre ovale, Hercule combat un centaure, tandis qu’à côté un homme armé, accablé, s’accroche à une colonne. Une bataille de cavaliers décore l’autre face. Sur la surface restante de la panse et autour du col, grotesques sur fond blanc dites aussi raphaélesques. Des formes semblables se rencontrent encore dans la majolique d’Urbino du milieu du siècle, par exemple dans le service exécuté pour le connétable de Montmorency en 1535 dans l’atelier de Guido Durantino 1. Cependant la présence de la grotesque sur fond blanc, qui semble faire son apparition dans la majolique d’Urbino après l’exécution du Service espagnol (1560-1562) nous conduit à en retarder la datation. Une gourde de forme semblable, représentant La chasse au sanglier calédonien 2, est conservée à la Walters Art Gallery de Baltimore.
232
Turin, Musée Municipal, inv. 2756C, reproduite in Rasmussen, 1989, p. 260, fig. 91. 13. 2. Inv. 48. 1372, in ErdbergRoss, 1952, pl. 37, no. 58. 1.
76. Salière Urbino, atelier des Patanazzi, vers 1580-1590 H. totale 17 / H. du corps 12,7 / L. 24,8 / l. 15
•
Inv. 1726
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé, brun, noir, blanc fixe. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Pièce de forme façonnée au moyen d’un moule. Les grotesques
sont peintes sur une couche de blanc fixe qui couvre l’émail de base. Gros problèmes d’adhésion de l’émail. Accidentée, (7 fragments), une tête de bouc est recollée, quelques manques et nombreuses écaillures. Deux trous percés après cuisson, au centre, dans l’axe. PROV.: Baron Gustave de Rothschild; Paul Gillet, don 1956. BIBL.: Damiron, 1943, no. 142, p. 102.
S
alière ovale modelée de têtes de bouc et de mascarons à têtes de lion, portée par une tête de monstre. A l’intérieur de la vasque, un cupidon ailé tend son arc. A l’extérieur, ornementation de grotesques sur fond blanc (raphaélesques). Les grotesques sont peintes sur un fond bianco sopra bianco posé au pinceau sur l’émail de base avant cuisson. Des exemplaires de modelés analogues sont conservés au Musée Correr de Venise 1, au Musée national de Stockholm 2, et à l’Herzog Anton Ulrich-Museum de Brunswick 3. L’exemplaire de Brunswick est particulièrement important quant à la chronologie de ce genre d’objets; il porte les armes de Fernando Ruiz de Castro et la croix de l’Ordre de Calatrava auquel appartint ce haut personnage à partir de 1578, ce qui fournit une date d’exécution post quem. Une salière assez semblable du British Museum de Londres 4 contribue de la même manière à sa datation. Elle appartient au service Ardet Aeternum, attribué à Antonio Patanazzi et lié au mariage du duc de Ferrare Alphonse II et de Marguerite Gonzague célébré en 1579. Comme la précédente, la salière Gillet appartient donc à la production de la fin du xvi e siècle d’Urbino et, plus précisément, à l’atelier des Patanazzi.
234
1.
Papagni, 1981, pl. 75.
2. Dahlback Lutteman, 1981,
no. 28, p. 133, attribué aux Patanazzi. 3. Inv. Z. L. V. 7264, in Lehmann, 1979, no. 254. 4. In Thornton-Wilson, 2009, no. 241, p. 411.
77. Bouteille Castelli d’Abruzzo, atelier d’Orazio Pompei, vers 1550-1560 H. 42 / D. panse 24 / D. base 18,2 / D. col 11
•
Inv. 2019
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, brun. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Surface parfois rugueuse; intérieur émaillé blanc. Restaurations au
col, autour du pied et sur la panse en quatre endroits; ébréchures au col. Dessous, étiquette portant les inscriptions FAENZA, PHARMACY BOTTLE, 1520 [date manuscrite], Coll. of Lord de Tabley, Tabley House, Krutsford, Cheshire, Art Treasures Exhibition, Manchester, 1857. PROV.: Coll. Lord de Tabley; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Cat. exp. Manchester, 1857; Damiron, 1956, no. 33, p. 28; cat. exp. Pescara, 1989, repr. p. C 59 et C 160, no. 448; Casturà, 2000, pl. VIII, no. 450, repr. EXP.: Manchester, Art Treasures in the United Kingdom, 1857.
B
outeille à corps piriforme, à haut col galbé et pied légèrement saillant. Sur la face, dans un espace ovale délimité par une bande ornée de motifs fleuris en volutes, champlevés graffito sur le fond bleu, un jeune berger dans un pré, appuyé sur une houlette, offre une miche à son chien. En dessous, écriteau avec, en lettres gothiques, l’inscription pharmaceutique A.d.ordminis (Aqua hordeum, eau d’orge, ou bien Aqua de Salvia Horminum eau de sauge hormin); préparée principalement à partir des feuilles, la sauge hormin est employée comme aphrodisiaque et détersif. Au revers, branches recourbées en spirales sommairement esquissées en bleu. Cette bouteille appartient au groupe appelé Orsini-Colonna et est produite à Castelli d’Abruzzo dans l’atelier d’Orazio Pompei vers le milieu du xvi e siècle 1. Un personnage dans une attitude similaire (David avec la tête de Goliath) orne une bouteille autrefois dans la collection Pringsheim 2 et une autre se trouvant dans une collection privée à Florence 3. Le peintre a donc dû prendre comme modèle une gravure, qui reste non identifiée ainsi qu’il en est pour la plupart des vases Orsini Colonna. De même, il est impossible de dire si l’ovale subdivisé en losanges à la hauteur du col, qui apparaît sur d’autres exemplaires 4, définit un ensemble pharmaceutique ou s’il constitue seulement, comme il est plus probable, un motif décoratif.
236
Fiocco-Gherardi 1985 e 2002a. 2. Attribué à la seconde période du « groupe II » datable, selon les auteurs, entre 1540 et 1560. 3. Cat. exp. Pescara, 1989, no. 449. 4. Ibid. , no. 432. 5. Ibid. , nos. 434, 435, 454 et 469. 1.
78. Bouteille Castelli d’Abruzzo, atelier d’Orazio Pompei, vers 1550-1560 H. 36,8 / D. panse 21 / D. base 14,8 / D. col 10
•
Inv. 2016
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé, rehauts de blanc. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Base et lèvre brutes; un point de contact, de face, derrière la figure; petit cratère dû à une particule de CaCO3 (conduite de la cuisson); salissures de manipulation malhabile. Intègre; ébréchures à la base, légère fêlure au col; couvercle accidenté, trois manques sur le bord et le bouton de préhension. Dessous, une étiquette portant les inscriptions « FAENZA, PHARMACY BOTTLE, 1520 [date manuscrite], Coll. of Lord de Tabley, Tabley House, Krutsford, Cheshire, Art Treasures Exhibition, Manchester, 1857 ». PROV.: Coll. Lord de Tabley; Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Cat. exp. Manchester, 1857; Damiron, 1956, p. 24; cat. exp. Pescara, 1989, repr. p. C 54 et C 163, no. 502. 1 EXP.: Manchester, Art Treasures of the United Kingdom, 1857.
B
outeille à corps piriforme et à haut col, à bord galbé avec ressaut; deux anses verticales cannelées et retroussées aux extrémités, un couvercle à coupole. Sur la face, dans un compartiment ovale entouré d’une bande de motifs alla porcellana tracés en bleu sur fond jaune, une dame nue assise sur un rocher, dans une attitude méditative. A la partie inférieure, dans un écriteau, l’inscription de pharmacie en caractères gothiques A. fumisterre (eau de fumeterre). Au revers, un rameau de feuilles en volutes, sommairement tracé. La bouteille appartient au groupe appelé Orsini-Colonna et est produite à Castelli d’Abruzzo dans l’atelier d’Orazio Pompei vers le milieu du xvi e siècle 2. Le fumeterre ou fumaria officinalis contient un alcaloïde (la fumarine) et agit sur les muscles lisses, favorisant la digestion; il a, en outre, des effets diurétiques et cholagogues.
238
Attribué à la seconde phase du groupe dit « groupe II » datable, de l’avis des auteurs, entre 1540 et 1560. 2. Fiocco-Gherardi, 1985 et 2002a. 1.
79. Chevrette (versatore) Castelli d’Abruzzo, atelier d’Orazio Pompei, vers 1550-1560 H. 23,8 / D. panse 18 / D. base 11 / D. col 11,8
•
Inv. 2013
COUL.: Bleu, vert, jaune, orangé. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Surface rugueuse; lèvre plate et brute, base brute,
tachée d’émail; intérieur émaillé blanc (émail maigre). Intègre. PROV.: Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 23, p. 18; cat. exp. Pescara, 1989, repr. p. C 42
et C 153, no. 355 1; Casati Migliorini, 2004, p. 39.
C
ruche à panse globulaire, à col évasé et goulot à bec galbé en forme de dragon, et anse côtelée. Sur la face, dans une réserve lobée entourée de motifs alla porcellana, très fragmentés et tracés en bleu sur fond jaune, deux têtes de vieillards barbus, de part et d’autre du bec et légèrement tournées vers lui. Dans le bas, écriteau avec l’inscription pharmaceutique en lettres gothiques Oleo.de.manule.do (huile d’amande douce). A l’arrière, esquissés, des motifs végétaux en volutes très stylisés. Cette cruche appartient au groupe appelé Orsini-Colonna et est produite à Castelli d’Abruzzo dans l’atelier d’Orazio Pompei vers le milieu du xvi e siècle 2. Les deux têtes de vieillard offrent de fortes analogies avec celles peintes sur plusieurs carreaux du premier plafond de l’église San Donato à Castelli, exécuté lui aussi dans le cercle de l’atelier d’Orazio Pompei 3. Ceci confirme les origines de la vaisselle. Le contenu, l’huile d’amande douce, a des propriétés laxatives; en usage externe, elle était utilisée comme émollient et pour protéger la peau.
240
Attribué au groupe dénommé « groupe I » datable, selon l’opinion des auteurs, entre 1530 et 1550. 2. Fiocco-Gherardi, 1985 et 2002a 3. Cat. exp. Pescara, 1989, p. C 14, nos. 1-3. 1.
80. Vase Castelli d’Abruzzo, atelier d’Orazio Pompei, vers 1550-1560 H. 18,5 / D. piédouche 10,8 / D. col 11,2 / D. max. 19 (anses comprises)
•
Inv. 1950/1
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Retrait d’émail au col; picots; marque de contact sur la panse; revers piédouche brut. Sur la panse: plusieurs fêlures provoquées par un choc; col très usé; réparation à l’anse. PROV.: Coll. Hermann Emden (vente Berlin, 3-7 novembre 1908, no. 79, repr. pl. 12); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 50, p. 36; Chompret, 1949, I, pp. 67-68, repr. II, p. 58, fig. 441; Montagut, 1987, repr. p. 22, no. 7; cat. exp. Pescara, 1989, repr. pp. C 80 et C 149, no. 319. 1
V
ase globulaire et trapu, au col évasé, à pied haut, avec deux anses verticales torsadées, retroussées aux extrémités. Sur la face, dans un espace délimité sur les côtés par des bandes à décor de losanges, un homme barbu à mi-buste, de profil. Au-dessous, dans l’écriteau, l’inscription pharmaceutique STOMATICº GALEN (Stomatico di Galeno), en capitales romaines. A l’arrière, un rameau de feuillages sommairement esquissé en bleu. Ce vase appartient au groupe appelé Orsini-Colonna et est produite à Castelli d’Abruzzo dans l’atelier d’Orazio Pompei vers le milieu du xvi e siècle 2. Pour analogie, voir l’exemplaire muni d’un couvercle de la collection Lehman du Metropolitan Museum de New-York 3. Le vase contenait peut-être le cérat stomachique de Galien inventé par le médecin célèbre de Pergame (131-210 av. JC) et considéré comme la panacée pour tous les problèmes d’estomac 4. Les cérats étaient préparés comme des emplâtres, mais étaient plus durs, de consistance cireuse, d’où leur nom.
242
Attribué au groupe dénommé « groupe III » datable, selon les auteurs, entre 1551 et 1570-80. 2. Fiocco-Gherardi, 1985 et 2002a 3. Inv. 1975. [1. 1115 et 1975. 1. 1114], in Rasmussen, 1987, nos. 60-61. 4. Il était fait avec des roses, du mastic, de l’absinthe, du nard, de la cire et de l’huile rosée et, selon Calestani, guérit tous les maux de l’estomac quelles qu’en soient les causes, soulage le foie, incite à l’appétit, facilite la digestion et assainit les couleurs de tous ces organes (Calestani, 1575, p. 379). Souvent dans les anciennes pharmacopées on ne fait pas la différence entre stomatite (pour la bouche) et stomachique (pour l’estomac). 1.
81.
Assiette Castelli d’Abruzzo, probablement Berardino Gentili il Vecchio dans l’atelier de de Francesco Grue, années 1670-80 H. 2,4 / D. 24,4
•
Inv. 1975
COUL.: Tonalités douces de bleu, vert, jaune, orange et rehauts d’or. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Technique mixte: l’or appliqué sur un décor de grand feu déjà cuit, avec une cuisson au petit feu. De face, facture très soignée; au revers, grosses irrégularités de l’émail. Intègre. PROV.: Coll. Baron Gustave de Rothschild; Paul Gillet, don 1961. BIBL.: Damiron, 1943, no. 103, p. 76.
A
ssiette peu profonde, à bord déversé, représentant une scène de pêche; sur une barque au premier plan, deux pêcheurs rament, un troisième pêche avec un trident. On voit dans le fond une autre barque et les bâtiments d’une cité. Autour de l’aile se développent des rameaux fleuris sur lesquels perchent des oiseaux. Le revers est émaillé de blanc. La scène est tirée des Venations (Chasses) d’Antonio Tempesta éditées à Rome en 1602 1. Par ses ressemblances stylistiques, l’assiette rentre dans la production de Berardino di Giacomo di Intino, dit Il Vecchio (1635-1683). A partir de 1663 il prit le nom de « Gentili », qu’il transmit à ses fils. On ne connait de lui que deux œuvres signées, de type folklorique, à partir desquelles il est pourtant possible de retrouver les caractéristiques de son style, qui se situent dans des œuvres bien plus raffinées et provenant d’impressions complexes. Sur une base stylistique, on peut lui attribuer des majoliques réalisées dans l’atelier de Francesco Grue, avec qui il était apparenté, autour des années 1670-1680 2. L’assiette Gillet doit être rapprochée, en raison de son étroite ressemblance (stylisation des ornements et utilisation de gravures de Tempesta), de plusieurs assiettes aux armes Alarcon y Mendoza du musée de San Martino à Naples. Egalement en partie rehaussées d’or, ces pièces sont attribuées à la pleine maturité de Grue 3.
Antonio Tempesta, Les Vénations
244
Venationes Ferarum, Auium, Piscium / Pvgnae / Bestiarorium et mutuae Bestiarum / delineatae /Ab Antonio Tempesta… Joannes Orlandus Formis, Rome, 1602, repr. in Bartsch, 1983, p. 340. 2. Pour cette attribution, et pour la bibliographie qui s’y rapporte cf. FioccoGherardi-Matricardi, 2012, pp. 122-123 ) 3. Fittipaldi, 1992, II, pp. 12-13, nos. 8-12, et I, pp. 55-56. 1.
[ CLICHÈ MESDAMES C. FIOCCO ET G. GHERARDI ]
82. Albarello Naples, Maître de la chapelle Brancaccio, xv e siècle, vers 1475-1476 H. 32,6 / D. base 11 / D. col 10,6
•
Inv. 1956
COUL.: Bleu, vert, orange, violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Lèvre et base brutes; fond troué après cuisson; intérieur émaillé blanc. Conservation passable; tressaillures dans l’émail; deux fêlures: l’une, très importante part de la base et l’autre du haut; légères réparations sur le visage. PROV.: Coll. Charles Damiron (vente Londres, 16 juin 1938, no. 18); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1943, no. 9, p. 7; Giacomotti, 1962, repr. p. 22, fig. 2; Giacomotti, 1974, p. 30, no. 98; Donatone, 1993, repr. pl. 26-27; Donatone, 2013, pp. 57-58 et pl. 16 a, b.
A
lbarello cylindrique à épaulements carénés, très légèrement rétréci au centre. Sur la face, de profil à gauche dans un cadre, une femme couronnée. La surface restante est occupée par des feuilles recoquillées de style gothique qui se développent de façon symétrique par rapport à une inflorescence. Déjà identifié par De Ricci et Borenius, le groupe auquel appartient cet albarello est caractérisé par une forme similaire et par des profils masculins et féminins, parfois accompagnés d’un cartouche vertical contenant un nom. Par ailleurs dans la partie postérieure, on peut trouver à côté des feuilles recoquillées, de grandes fleurs à clochettes ou d’autres éléments végétaux et géométriques. Dans l’incertitude, l’albarello a été attribué successivement à la Toscane, à Faenza et à Rome 1. Toutefois Borenius se réfère à Leverton Harris qui disait que la majeure partie de ces albarelli provenait d’une pharmacie de Caltagirone, en Sicile, qu’ils avait été achetés par M. Canessa qui les avait ensuite revendus en Amérique. En 1903 le Louvre acquit de Roger Firino trois exemplaires qui portent encore un sceau de cire avec l’inscription Sigillo del Convento di Palermo 2. L’un d’eux présente les armoiries d’Alphonse II d’Aragon et de son épouse Hyppolite Sforza, ce qui permet de situer les albarelli entre 1465, date de leur mariage, et 1484, date de la mort d’Hyppolite 3. Le musée national de Capodimonte à Naples conserve d’autres exemplaires portant les mêmes armoiries, et qui proviennent également de Sicile 4. Malgré cela, Governale est le seul à les attribuer aux ateliers siciliens de Sciacca 5. A l’heure actuelle on privilégie la thèse de Donatone qui les attribue à des ateliers napolitains, notamment celui de la chapelle Brancaccio de San Angelo à Nilo (aujourd’hui au musée de l’Institut d’Art Palizzi) et celui de la chapelle du Crucifix, ou des Campaniles, puis des Altemps, dans l’église de S.Pietro à Maiella, donnés au même peintre et tous deux de la seconde moitié du xvi e siècle 6. Les profils ont été comparés à ceux des seigneurs aragonais apparaissant sur des médailles et des bas-reliefs 7. Donatone formule l’hypothèse que l’albarello Gillet représenterait Béatrice ou Jeanne d’Aragon, épouses du roi Ferrante (cf. bibl.). Dans une publication plus récente (2013), le studieux napolitain y reconnut en revanche Giovanna, sœur de Ferdinand le catholique, que Ferrante d’Aragon roi de Naples épousa en secondes noces en 1477. Après avoir abdiqué en 1495 en faveur de Ferrandino, Alphonse II partit pour la Sicile avec quatre embarcations chargées d’objets précieux et se retira dans un couvent de Monreale.Parmilesobjetsarrivésdansl’île,peut-êtresetrouvait-ildesvases.Ceciexpliqueraitlaprovenancesiciliennedesalbarelliquifurentsansdouteacheminésparlasuitejusqu’au couvent de San Giovanni des Ermites dépendant des Bénédictins de Monreale (1524) 8. 246
De Ricci, 1927, nos. 39-47, attribués dans le doute à la Toscane. Ils provenaient de la collection de Miss Walter Cacciola, à Taormina, et étaient ensuite passés dans la collection Canessa; Borenius, 1931, pl. VIII, A, B, et p. 5. 2. Inv. OA 5880, 5881, 5882, repr. in Giacomotti, 1974, nos. 96- 98. 3. Il s’agit du no. 97, voir Vasselot, 1903, pp. 338-343. 4. Naples, Musée National de Capodimonte, collection De Ciccio inv. 6139, avec les armoiries d’Alphonse d’Aragon, provenant de Sicile, et inv. 6144, provenant lui aussi de Sicile. 5. Governale, 1995, nos. 308309, pp. 296-297 et no. 314, p. 301. 6. Donatone, 1993, pl. 6-7, 24-35. 7. Ibid. , figs. 9 et 10. 8. Ibid. , p. 35. 1.
83. Albarello Naples, Maître de la Chapelle Brancaccio, fin du xv e - début du xvi e siècle H. 36,5 / D. base 21,8 / D. col 21
•
Inv. 1960/1
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Fin réseau de tressaillures dans l’émail; intérieur à glaçure plombifère opaque de couleur beige / rosé; traces concentriques de tournassage dont un sillon médian très marqué; pied brut; gros point de contact. PROV.: Coll. Richard von Kaufmann (vente Berlin, 25 novembre - 2 décembre 1917, no. 520, repr. pl. 85); Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 16, p. 13; Donatone, 2013, p. 31 et pl. 27 a, c.
A
lbarello de forme cylindrique à épaulements carénés, très légèrement cintré en son milieu. Dans un cadre, au premier plan, un homme en buste de profil à gauche, barbu, auréolé et vêtu à l’antique, devant un écriteau vertical qui porte l’inscription DIVO. PETRUS en capitales romaines. A l’arrière, branches de feuilles recoquillées disposées symétriquement par rapport à un axe horizontal. Le personnage représente saint Pierre, le chef des apôtres. L’albarello est à rapprocher d’un vase sphérique de la Morawska Galerie de Brno 1 orné sur la face d’un oiseau des marais dans une guirlande et, à l’arrière, des motifs à la feuille recoquillée. Ils sont exécutés de façon très semblable, y compris le nœud particulier formé de deux pistils entrelacés 2, l’un jaune et l’autre vert. Le vase de Brno a été attribué par Donatone à la production napolitaine de la dernière décennie du xvi e siècle, et plus précisément au Maître de la chapelle Brancaccio 3. Cette attribution trouve une base solide dans la manière particulière d’interpréter le sol et la pelouse. En vertu de ce rapprochement, on peut proposer pour cet albarello une origine napolitaine. Récemment l’albarello a été réexaminé par Donatone et confronté à un exemplaire similaire d’une collection privée qui portait dans le cartel l’inscription « Agricano » (personnage de l’Orlando amoureux de Bojardo et contre lequel se battit Sacripan, et donc probablement de la même série). L’attribution de Donatone revient encore au napolitain Maître du revêtement au sol de la chapelle Brancaccio. Ce revêtement, un temps dans l’église de Sant’ Angelo a Nilo, se trouve aujourd’hui en grande partie, au musée Palizzi de Naples.
248
Inv. B 1514, Vydrová, 1955, no. 3, p. 48. 2. Un motif semblable existe aussi sur un vase de forme similaire, avec un félin, dans une collection privée, repr. in Governale, 1995, p. 317, fig. 327. 3. Donatone, 1993, pl. 151-152. 1.
84. Albarello Naples ?, début du xvi e siècle H. 36,2 / D. base 19,2 / D. col 20,3
•
Inv. 1960/2
COUL.: Bleu, vert, jaune, orange, violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail bullé, rugueux; lèvre et base brute; intérieur à glaçure plombifère
opaque. Conservation assez bonne; ébréchures, éclats au col; léger manque au pied. PROV.: Coll. Richard von Kaufmann (vente Berlin, 25 novembre - 2 décembre 1917, no. 519, repr. pl. 85);
Paul Gillet, don 1960. BIBL.: Damiron, 1956, no. 15, p. 12; Donatone, 2013, p. 31 et tav. 27 b, d.
A
lbarello de forme cylindrique à épaulements carénés, très légèrement cintré en son milieu. Sur la face et dans un cadre, le profil à droite d’un homme en buste, barbu, avec heaume et armure. Devant lui, un écriteau vertical porte l’inscription SACHRIPARDO en capitales romaines. Au revers, une branche de feuilles recoquillées de style gothique disposées symétriquement, sur laquelle s’épanouissent des oeils de plume de paon. L’homme en buste représente Sacripant, roi de Circassie, héros de poèmes de chevalerie italiens, en particulier du Roland amoureux de Bojardo dans lequel, pour l’amour d’Angélique, il combat Agricane, roi de Tartarie 1. La forme et la stylisation du feuillage recoquillé indiquent que cet albarello peut être rattaché au précédent dont il partage les références et probablement l’origine.
250
1. Le chapitre XI du livre I du
poème contient les exploits surhumains du guerrier, que l’on trouve également dans le chant I du Roland furieux de l’Arioste.
85. Albarello Origine indéterminée, xvi e siècle H. 30 / D. base 11 / D. col 11
•
Inv. 1691
COUL.: Bleu, bleu zaffera, vert, jaune, orange, violet. NOTES TECHNIQUES ET CONSERVATION: Émail irrégulier, zones brutes; intérieur émaillé, émail maigre;
picots; col gauchi. Conservation assez bonne; fin réseau de tressaillures dans l’émail; légère réparation à la base; égrenures à l’arête et à la base. PROV.: Paul Gillet, don 1955. BIBL.: Damiron, 1943, no. 17, p. 13; Drey, 1978, repr. pp. 46-47, pl. 17D; Ibid. , 1984, repr. p. 29, no. 67.
L
’albarello, aux épaulements carénés et légèrement cintré, représente une jeune femme de profil à droite dans un médaillon ovale. Au-dessous, une banderole porte, en caractères gothiques, l’inscription pharmaceutique S.de.Limonibus (sirop de citrons; il était utilisé comme cordial, rafraîchissant et comme remède contre le scorbut). La surface restante est ornée de palmettes persanes entremêlées de rinceaux et de volutes. L’albarello présente des caractères étroits avec la majolique italienne du xvi e siècle, mais il est difficile de déterminer sa provenance. Il est impossible en effet de l’inclure de manière convaincante dans quelque production connue, et cela malgré les nombreux centres référencés. La forme et certains éléments de l’ornementation secondaire, notamment au col et au pied, rappellent des exemplaires napolitains 1, bien que la palmette persane ne semble pas y être présente. La palmette est en outre stylisée différemment en Toscane et à Faenza. Il pourrait peut-être s’agir d’un centre encore non étudié ou d’une production réalisée hors d’Italie sur des modèles italiens, ainsi qu’il en était en France et dans la Flandre au cours du xvi e siècle.
252
1. Donatone, 1993, pl. 144.
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© Fondation Bemberg, 2015 © Textes: les auteurs, 2015 © Photographie musée des Arts décoratifs de Lyon - Sylvain Pretto: cat. nos. 1, 3-7, 9-11, 18, 21-22, 28, 31-47, 51-73
musée des Arts décoratifs de Lyon - Pierre Verrier: cat. nos. 2, 8, 12-17, 19-20, 23-27, 29-30, 48-50, 74-85 coordination et mise en page: Miriam Sainz de la Maza et Alfonso Meléndez impression: Advantia isbn: 2-911516-18-4 · ean: 9782911516184 Imprimé en Espagne
C E C ATA L O G U E A É T É I M P R I M É À MADRID LE 3 JUIN 2015, FÊTE DE SAINTE CLOTILDE
Majoliques italiennes de la Renaissance
collection paul gillet
FONDATION BEMBERG M USÉE DE S ARTS DÉC ORATIFS DE LYON
FONDATION
BEMBERG