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milieux marins

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Bibliographie

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Terres sauvages : Ceinture littorale et milieux marins

Posidonie Oursins

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Etoile de mer Pin maritime

Soude épineuse Arroche couchée

Banquettes de posidonie Bruyère à balais Callune

Tamaris

Cinéraire

Un littoral mouvant

La ceinture littorale est composée de nombreux milieux différents tous liés les uns aux autres. Les habitats littoraux porquerollais sont composés d’une mosaïque d’habitats méditerranéens thermophiles. Ils se caractérisent par l’alternance de falaises côtières au sud et de systèmes dunaires comme ceux des plages Nord.

L’arrière plage : manteau protecteur

Les plages sont essentiellement représentées au nord. La largeur du couvert végétal de l’arrière plage varie considérablement en fonction de la topographie mais elle est généralement composée des mêmes espèces : halophiles pour la plupart (qui s’accommodent ou ont besoin de fortes concentrations en sel pour vivre). L’arrière plage est composée d’arbrisseaux et de buissons aux couleurs variées et joue un rôle de tampon entre la plage et les divers milieux en recul de la côte, retenant les embruns marins. Y dominent des tamaris, du pin maritime, de la soude épineuse et d’autres essences n’étant pas perturbées par les embruns salés ou la rareté de l’eau douce. Les plages étant très recherchées par les touristes, ce milieu est en mauvais état. Des travaux de rénovation du couvert végétal ont été entrepris pour essayer de «réparer» les dégâts causés par la surfréquentation estivale.

La plage : bande sensible

Sur la plage, on retrouve un sable fin et ocre, un assemblage de feuilles de posidonie, de brindilles, de bois flottés polis et blanchis par une longue dérive. C’est ce qu’on appelle la laisse de mer. Son maintien sur les plages est volontaire. Elle permet de protéger les plages de l’érosion et favorisent leur stabilité en contribuant à l’édification et à l’alimentation des dunes. Elle empêche que le sable soit emporté par les vagues, et que les plages disparaissent peu à peu. Les milieux sableux abritent des espèces psamophiles (espèces qui affectionnent un substrat sableux) de grande valeur patrimoniale. Malheureusement, la hausse du niveau de la mer étant trop rapide, ces espèces n’ont pas le temps de migrer vers les milieux sableux en recul de la plage.

Les bancs de sable sous-marins

Cet habitat pouvant atteindre une profondeur de 20 mètres sous le niveau de la mer, subit l’influence hydronamique des houles et des courants. Il abrite des herbiers à Zostères (plantes aquatiques marines) et à Cymodocées (genre de plantes monocotylédones sous-marines), de nombreuses espèces d’invertébrés, des mollusques et des petits crustacés attirés par l‘abondance des matières organiques en suspension. Aujourd’hui, ces bancs de sable sont majoritairement menacés par l’impact humain (piétinement, pollution d’hydrocarbure) mais il est possible que dans quelques décennies le changement des courants marins puisse modifier la dynamique de ce milieu.

L’herbier de posidonie : poumon de la mer

L’herbier de posidonie est présent tout autour de l’île, comme une ceinture. La posidonie est une algue qualifiée d’espèce «clef de voûte» puisqu’elle joue un rôle prépondérant dans l’équilibre biologique des côtes. Elle est à la fois productrice d’oxygène, briseuse de houles, fixatrice de sédiments, une ressource alimentaire et un abri indispensable pour la flore et la faune marine. Aujourd’hui des espèces envahissantes, comme l’algue verte invasive Caulerpe, prolifèrent et rentrent en compétition avec elle. En outre, les mouillages de plus en plus nombreux abîment son réseau racinaire.

Les falaises et rochers littoraux : jardins suspendus

La côte sud, inhospitalière est majoritairement composée de falaises rocheuses tombant à pic. Au nord, des bandes rocheuses sont aussi présentes. Les conditions de vie de ces milieux sont difficiles. Cependant, quelques végétaux peuplent ce milieu rude, soumis au déferlement des vagues, arrosé par les embruns marins qui l’enrichissent en sel, lessivé par la pluie, brûlé par le soleil.

À la limite de la terre et de la mer une végétation clairsemée, fixée dans la fente de la roche, s’accroche. La saladelle et le crithme sont des espèces caractéristiques de ce milieu. Véritable «bonsaï» ils mettent du temps à se développer. Cette ceinture halophile (qui aime le sel) est présente, plus ou moins profondément, sur tout le périmètre rocheux de Porquerolles et des îlots. Sa largeur dépend de la force des vagues, de la zone d’extension des embruns, de l’exposition de la station, de l’ouverture aux vents et de la topographie de la côte. Ainsi, sous l’influence du mistral ou du vent d’est, on observe un développement halophile plus important sur les côtes exposées ouest (îlot du Petit Langoustier, pointe du Grand Langoustier) et est (côte du Cap des Mèdes au Gros Saranié).

En arrière de cette zone adaptée au sel le recouvrement végétal augmente. Arbres et arbustes sont tous plaqués au sol et comme taillés en brosse, étirés dans le sens du vent. Les vents et les événements tempétueux de plus en plus violents et récurrents mettent en péril cet équilibre déjà instable et précaire entre terre et mer. L’apparition d’espèces envahissantes remet aussi en cause l’équilibre de ce milieu : actuellement les griffes de sorcières, espèce particulièrement bien adaptée aux embruns et aux terrains rocheux, envahit les promontoires au détriment de la diversité d’espèces.

Les falaises sous-marines et récifs

Les bancs d’algues rouges (trottoirs à lithophylum), remarquables et très fragiles, se trouvent à la limite entre la terre et la mer. Lorsque l’on passe sous l’eau, les fonds rocheux sont le siège d’une vie intense d’invertébrés, crustacés, poissons, en particulier pour les juvéniles. On retrouve aussi une flore sous marine riche sur les parois rocheuses. Des algues peuvent s’accrocher formant ainsi ce que l’on appelle le coralligène ou alors des coraux peuvent se développer formant des récifs, très représentés à Porquerolles. Constituant un des principaux réservoirs de biodiversité méditerranéens, par son extrême hétérogénéité de structure, il réunit un nombre important de compartiments écologiques. Il abrite notamment de nombreux cnidaires, gorgones et éponges. De nos jours, ces habitats sous-marins sont fortement en danger. L’acidification des eaux, liée à l’absorption du CO2 par les océans, et la hausse des températures de l’eau remettent en cause cette vie sous-marine. Un réchauffement important survenu en 1999 a, par exemple, entraîné une forte vague de mortalité, notamment des gorgones. Cette hausse de la température de l’eau entraine également l’apparition d’espèces «tropicales», s’acclimatant aux nouvelles températures méditerranéennes. Par ailleurs, les tempêtes sont capables de détruire de nombreuses espèces par la force du courant.

La côte rocheuse sud

Algue rouge Lithophyllum

Ilots et rochers Crithme maritime

Saladelle Pistachier lentisque Genévrier de Phénicie

Barbe de Jupiter

Paroles habitantes

Leur vision du changement

«On voit le trait de côte se modifier, c’est clair. Mais rien ne tiendra. Avec les vagues en plein mistral ça bouscule. La Courtade recule, Notre Dame aussi… C’est une histoire de va et vient, ça n’est pas linéaire cette affaire. On ne peut rien faire sauf peut-être ralentir un peu le phénomène. Et encore, je ne vois pas comment faire. Avec le changement climatique on prévoit de gros épisodes de dépression, des minis tornades et si la température de l’eau continue d’augmenter on en aura de plus en plus souvent. »

Les effets du réchauffement m’inquiètent à force. La température de l’eau augmente et on voit de nouvelles espèces des mers plus chaudes arriver. Il y a aussi une mortalité importante du corail, des gorgones et des éponges.

La hausse du niveau de la mer et l’érosion

Les plages sont particulièrement concernées par la hausse du niveau de la mer qui entraine inévitablement l’érosion rapide des côtes sableuses. Cette montée rapide du trait de côte entraine une sallinisation rapide des terres de l’arrière plage et met en péril les espèces qui la compose, retenant les embruns marins pour les milieux en retrait.

La hausse des températures de l’eau

Le réchauffement des eaux de surface, combiné à son acidification mettent en péril les différents milieux marins de Porquerolles. Un impact direct sur la subsistance des espèces sous marines, comme le corail ou les gorgones est déjà visible. Des espèces des mers tropicales font aussi leur apparition depuis quelques années.

La violence et la récurrence des événements tempétueux

Le recul de la végétation de la ceinture littorale, particulièrement touchée lors d’événements tempétueux importants a pour effet d’augmenter l’érosion des sols, tendres sur Porquerolles et surtout de fragiliser les parties aériennes des végétaux. Cela a aussi un impact sur les milieux aquatiques. La force des vents et la concentration de sel dans les embruns marins entraînent des difficultés de régénération des espèces littorales.

La végétation côtière ainsi que la flore marine est en train de voir apparaître de nouvelles espèces, mieux acclimatées aux nouvelles conditions climatiques. Ces espèces prennent la place de celles déjà présentes, comme celle de la posidonie ou des poissons dans les récifs et leur font concurrence.

Je vois le changement sur la faune marine. Ça fait un bout de temps que je regarde sous l’eau. J’observe une grosse diminution de la quantité. Certaines espèces s’adaptent mieux que d’autres c’est sûr, des espèces ont totalement disparu, celles qui étaient déjà rares et d’autres, des nouvelles sont apparues. D’autres ont changé de comportements, comme le mérou qui nous fuit beaucoup plus. Les loups et les dorades il y en a de plus en plus. Il y a aussi des barracudas, des girelles paons… Cela va sûrement avec le réchauffement de l’eau. »

Émergence d’espèces invasives

Des paysages vraiment sauvages ?

Ces terres dites «sauvages» sont composées de deux grandes entités : une forêt intérieure et une ceinture côtière et marine, toutes deux riches d’une multitude de milieux et d’espèces. Pour certains d’entre eux, l’intervention humaine est nécessaire à leur survie, pour d’autres son absence conditionne sa bonne évolution. Ces terres dites «sauvages» qui nous apparaissent, au premier abord, comme des terres préservées, avec des paysages «naturels» sont finalement plutôt anthropisées.

Fréquentant beaucoup ces espaces de nature, les îliens ont alors une vision lucide des changements qui s’y opèrent. Ils prennent conscience du changement de paysages qui est en train de s’opérer et remarquent des dynamiques isolées sur certains milieux. Ces témoignages mis bout à bout prouvent bien que les insulaires sont particulièrement sensibles aux modifications en cours.

Les milieux naturels terrestres et marins assurent des fonctions essentielles pour le territoire : production des ressources, prévention des risques naturels, amélioration de la qualité de l’eau et de l’air ; fonctions qu’il convient de préserver ou d’accompagner dans ce contexte de changement climatique. Plus largement, la préservation et la valorisation de la biodiversité terrestre et marine relèvent de l’effort collectif. La sensibilisation et l’information des insulaires mais aussi des promeneurs- plongeurs sur les enjeux que représentent les milieux naturels pour l’ensemble des services écosystémiques est à mener.

La ceinture littorale de Notre Dame et la baie de l’Alycastre

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