La baleine 174 - De la surconsommation à l'économie et la convivialité

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De la

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surconsommation à l'économie de convivialité

décembre 2013 / 3€20 N°174


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ACTIONS

© Emily Brosious, Betsy Katherine Brown, Owen Crowley, Friends of the Earth Europe, Juliette Renaud, Diana Tircomnicu.

19 octobre 2013 Journée mondiale contre la fracturation et l'extractivisme

La journée mondiale du 19 octobre 2013 contre la fracturation hydraulique a été organisée cette année en France de manière décentralisée, partout où les prospecteurs menacent nos territoires, notre environnement, notre santé.

« Montélimar fait des nougats, le gaz de schiste fera des dégâts » Le point fort a eu lieu à Montélimar où 2 500 manifestants ont défilé, représentant les collectifs du Var, de l'Hérault, de la Drôme et de l'Ardèche, très mobilisés depuis l'origine du mouvement. L'aspect international n'a pas été oublié avec la présence de militants venus de toute l''Europe en particulier des collectifs en lutte de Zurawlow en Pologne, et de Balcombe dans le Sud de l’Angleterre. A Toulouse, un rassemblement régional a

eu lieu place Arnaud-Bernard, avec animations et mises en scène de fracturation hydraulique. D'autres rassemblements ont eu lieu à Saint-Claude dans le Jura, à Lille contre l'exploitation des gaz de couche, et dans la région parisienne : rassemblement de la Seine-et-Marne à Montereau, opération escargot du Plessis Paté jusqu'au siège de la société Vermillion à Vert-le-Petit, dans l'Essonne, à Paris, à l'appel de treize associations, une péniche ornée de banderoles a navigué sur la Seine entre la Tour Eiffel et le Pont de Tolbiac. Aux côtés des collectifs, les groupes locaux et les militants des Amis de la Terre ont été présents dans plusieurs de ces rassemblements. Alors que Conseil constitutionnel avait validé le 11 octobre la loi de 2011 interdisant

en France la fracturation hydraulique, adressant en apparence une fin de nonrecevoir aux industriels, il est essentiel de rappeler que l’avis du Conseil constitutionnel ne remet pas en cause les ambiguïtés de cette loi, en particulier son article 2 qui permet l’expérimentation, porte ouverte à l'exploitation. De plus, le maintien de la loi n'empêche pas les multinationales françaises de prospecter et d'exploiter hors de l'hexagone, à l'exemple de GDF-Suez en Angleterre, de Total en Argentine. Dans cette situation, comme l'a démontré l'occupation de la plateforme de Jouarre le 22 septembre 2013, les collectifs resteront plus que jamais sur leurs gardes, actifs et solidaires des mobilisations, ici comme ailleurs.

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ALAIN DORDÉ


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Edito 2014, en route pour la transition ! Noël et les fêtes de fin d'année deviennent synonymes de perte de nos valeurs. On se détache de plus en plus de ce qui nous rassemble et nous réunit. Cette période de l'année doit-elle devenir le symbole de l'attachement matériel et de l'obsolescence programmée ? Crise des valeurs, crise de société, les Amis de la Terre voient les choses en vert. 2014, une nouvelle année pour une nouvelle dynamique dans notre association. Dire uniquement que l'année 2013 a été difficile reviendrait à oublier nos actions et nos succès : montée en puissance des prix pinocchio avec plus de 41 000 votes, Bizi !, groupe associé aux Amis de la Terre qui réunit 12 000 personnes autour de centaines d'alternatives concrètes dans le village Alternatiba à Bayonne, deux nouveaux groupes locaux qui viennent renforcer notre Fédération, et bien d'autres... L'année 2013 a aussi marqué pour notre Fédération, le lancement d'un processus de débat interne qui se veut le plus large possible afin de réunir nos forces et réformer notre fonctionnement face aux enjeux d'importance qui se dessinent devant nous. Nous voulons impliquer toujours plus les adhérent(e)s et les groupes locaux dans notre projet commun et dans les processus de décisions. Nous avons besoin de chaque adhérent(e), de chaque sympathisant(e) pour construire ces sociétés soutenables qui nous rassemblent Cette nouvelle année ne sera pas non plus sans difficultés financières. La mise en place du nouveau prélèvement sepa va devoir demander à nos adhérents de nous renouveler leur confiance. Le développement de notre réseau est capital pour nous permettre de développer notre autonomie. Pour que les Amis de la Terre soient en France une association écologiste de masse, radicale et pragmatique, plus que jamais nous avons besoin de vous ! 2014 année de transition. Les Amis de la Terre France viennent de rejoindre le Collectif pour une Transition Citoyenne et nombre de groupes locaux participe déjà à la création des collectifs locaux. On le sait, la solution partira du local mais ne pourra pas non plus se passer d'une coordination bien plus large. Les Amis de la terre, avec leur dimension internationale, offrent une ouverture planétaire aux impulsions venues du local et doivent en être un acteur majeur. 2015 déjà en ligne de mire. Six ans après Copenhague, la COP21 se tiendra à Paris. Cette 21ème conférence des parties est un enjeu majeur. Les Chefs d'État se sont engagés à y adopter un nouvel accord international de lutte contre le changement climatique pour l'après 2020. Seule une mobilisation citoyenne de masse peut aboutir à ce que la COP21 ne se transforme pas à nouveau en un échec retentissant. Résistez, mobilisez, transformez ! Les Amis de la Terre c'est vous ! LE CONSEIL FÉDÉRAL

Une Assemblée fédérale extraordinaire

SOMMAIRE 2 > ACTIONS 19 octobre 2013 - Journée mondiale contre la fracturation et l'extractivisme REGIONS 4 > Notre-Dame-des-Landes : un projet qui augmente la dette écologique de la France Les Amis de la Terre Gironde engagés dans le défi climatique ! 5 > Une « ferme-usine » de 1 000 vaches pour du biogaz ! NATIONAL 6 > Nucléaire et débat démocratique : une succession d’occasions manquées INTERNATIONAL 7 > Prix Pinocchio 2013 : gros succès pour entreprises « petites » Les pollueurs parlent... on détale ! 8 > Alpha Coal : la mobilisation fait réagir la Société Générale Quand la carbone du Vatican se planque, Planktos se plante DOSSIER > DE LA SuRCONSOmmATION à L'éCONOmIE DE LA CONvIvIALITé 10-11 > Peut-on croire aux technologies numériques « vertes » ? Imprimante 3D, une impression de déjà-vu 12 > Avec la loi de consommation, le changement, ce sera... peut-être plus tard 13 > Mines urbaines : une option pour pallier la pénurie de métaux ? Des solutions pour donner une seconde vie à nos anciens appareils ? 14 > « Collaborative washing » : quand les entreprises recyclent les initiatives citoyennes « Alternatives » : Vers un guide du réemploi pour la métropole lilloise 15 > Blanche-Neige sauvée de l'obsolescence programmée Sociétés avides/sociétés à vide en débat à Annecy Ne soyez pas démodés, faites réparer ! mOBILISATIONS 16 > 10, 100, 1 000 Alternatiba ! Mettre en œuvre la transition énergétique : les mesures nécessaires

C'était plus que des turbulences ! Le fidèle commissaire aux comptes lançait des SOS. Il y avait déjà des hommes et des femmes à la mer. Le rafiot national menaçait de partir en morceaux mais les rescapés soutenus par le pôle finances souquait avec la dernière énergie. La première mesure du plan ORSEC fut de convoquer une AG fédérale extraordinaire. Alors, des six coins de l'hexagone, les Groupes locaux dépêchèrent des sauveteurs à Montreuil, un samedi 7 décembre. Retenons les leçons de l'expérience. Gardons-nous de fonctionner par « bouc émissaire » mais sachons que, si on cumule les responsabilités, il faut s'attendre à être tenu pour responsable : notre solution c'est de miser sur la collégialité ! Nous voulons éviter que les positions personnelles éloignent de l'intérêt général ? Décidons par consensus... Et pour ne pas voir filer les dépenses, « mettons le paquet » sur le suivi des finances ! Le nouvel équipage a fait le plein de bonnes résolutions : >> http://www.amisdelaterre.org/Le-Conseil-federal,733.html Souhaitons-lui bonne traversée ! Le Courrier de La Baleine n°173 « Se ranger du côté des baleines n’est pas une position aussi légère qu’il peut le sembler de prime abord. »

Décembre 2013 • n° CPPAP : 0317 G86222 - ISSN 1969 - 9212 Dans ce numéro, les adhérents retrouveront un bulletin d'adhésion/abonnement aux Amis de la Terre ainsi qu'une lettre.

Depuis 1971

Directeur de la publication Florent Compain Rédactrice en chef Caroline Prak Rédacteurs Les Amis de la Terre Gironde, Haute-Savoie, Loire-Atlantique, Nord, Rhône, Elise Bancon, Gérard Caby, Philippe Collet, Martine Degrave, Alain Dordé, Fabrice Flipo, Camille Lecomte, Jean-Luc Le Therizien, Malika Peyraut, Lucie Pinson, Juliette Renaud, Capucine Simon, Annelaure Wittmann, Communication, relations presse Caroline Prak • caroline.prak@amisdelaterre.org • 01 48 51 18 96 Image de couverture, crédit : Amis de la Terre Maquette Nismo Carl Pezin • www.nismo.fr Impression sur papier recyclé Offset cyclus 115g/m2 avec encres végétales • Stipa • 01 48 18 20 50


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REGIONS

Notre-Dame-des-Landes Un projet qui augmente la dette écologique de la France L’analyse du projet de Notre-Dame-des-Landes par rapport à son empreinte écologique potentielle permet de mesurer son impact négatif. L’ empreinte écologique (EE) a été mise au point en 1990 et mesure la surface (en ha) de sols et d’espaces aquatiques bioproductifs nécessaire à une société pour permettre un certain niveau de consommation durant une année donnée et sans entamer le capital naturel. Comparée à la capacité écologique renouvelable ou biocapacité, constituée des terres agricoles, des forêts, des ressources de la mer, l’EE permet de mesurer le déficit écologique (ou l’équilibre) d’une société. En France, l’EE par habitant est de 5,6 ha pour une biocapacité de 3 ha1 soit un déficit ou une dette écologique considérable : l’EE dépasse de presque deux fois la capacité de l’écosystème. La France n’est pas isolée, de tels déficits se retrouvent dans les principaux pays européens et davantage aux Etats-Unis. La répartition de l’empreinte écologique et de la biocapacité en France par composante montre que la part la plus importante est l’empreinte carbone correspondant à la consommation d’énergie fossile (63 %) puis l’empreinte de la composante agricole (nourriture 20 %), forestière (bois, papier 8 %), piscicole (5 %), urbanistique (4 %)2.

va augmenter car le projet encourage la mobilité des clients potentiels pour les voyages en avion (un A/R Nantes-NY représente 0,7 ha ou 0,5 tonnes équivalent carbone ) à laquelle se rajoute les transports routiers pour accéder par la route au projet ainsi que l’énergie grise pour construire les infrastructures.

L’impact du projet sur L’EE

Impact NDDL sur l’empreinte écologique nationale

L’impact de NDDL est sans surprise colossal pour les composantes agriculture : l’empreinte de l’équipement est de 1 600 ha et réduit la biocapacité agricole d’autant ; forêt : environ 100 ha de défrichement d’où une diminution de la biocapacité forestière ; urbanisation : l’empreinte urbanisée augmente avec les emprises à construire, en outre l’aéroport actuel est aussi urbanisé en partie à la place d’espaces verts ; énergie : l’empreinte de l’énergie

Au total toutes les composantes de l’EE traduisent une augmentation de l’EE et une diminution de la biocapacité, soit un déficit de plusieurs milliers d’ha. A cela se rajoutent les impacts économiques, écologiques dont la biodiversité abordés par ailleurs par les opposants au projet. Alors que la transition écologique est de plus en plus urgente et que la décroissance de notre empreinte écologique est indispensable pour assurer une société soutenable,

le projet d’aéroport de Notre-Dame-desLandes va dans le sens inverse en augmentant la dette écologique. Cette dernière, à la différence de la dette financière, ne peut pas être remboursée car les stocks d’énergies fossiles sont limités et les composantes de la biosphère (terres, eaux, climat) ne peuvent être reconstituées dans un temps court. La chute risque d’être brutale. Notons également que la dette financière de la France est en partie due aux importations d’énergie fossile pour soutenir un modèle énergétique dépassé, faute de transition suffisante. L’empreinte écologique constitue donc un excellent indicateur pour juger d’un projet local ou à l’échelle d’un pays et un outil politique de pilotage d’une économie soutenable..

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JEAN-YVES LE THERIZIEN

Les Amis de la Terre Loire-Atlantique

1/ Global Footprint Network, 2003. 2/ Global Footprint Network (compilation A. Boutaud l’EE, éditions La découverte 2009).

Les Amis de la Terre Gironde engagés dans le défi climatique !

S'il n'est pas toujours évident de faire le lien entre les changements climatiques et nos modes de production et de consommation, les Amis de la Terre Gironde se sont risqués à cet exercice en

interpellant le public lors d'Alternatiba le 4 octobre 2013 à Bayonne (voir aussi l’article en page 16). C'est au cœur de l'espace « consommation responsable », entre le stand de RAP (Résistance à l'Agression Publicitaire), le Patxoki (haut lieu de la militance basque), et l'espace VEGAN que nous avons présenté les activités menées par la Fédération sur les alternatives au productivisme et au consumérsime, à savoir la sobriété et l'équité. Pillage des ressources, société du gaspillage, rejets de gaz à effet de serre : nos modes de vie sont irresponsables. Nous avons donc choisi de mettre en avant la lutte contre l'obsolescence programmée et le système publicitaire notamment en

valorisant le secteur de la réparation, du réemploi et du savoir-faire soi-même (Do It Yourself). La présentation d'une petite saynète théâtrale sur l'obsolescence programmée (largement inspirée de celle des Amis de la Terre Rhône et sur une musique originale de Guyom Touseul) a également reçu de bons retours du public. Un autre moyen de sensibiliser tout en s'amusant ! Cette escapade à Bayonne pourrait marquer le début d'une nouvelle aventure pour les Amis de la Terre Gironde, avec pourquoi pas un Alternatiba à Bordeaux à l'automne 2014 ?

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LES AMIS DE LA TERRE GIRONDE


REGIONS

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Mobilisation Une « ferme-usine » de 1 000 vaches pour du biogaz ! Un entrepreneur du BTP, monsieur Ramery rêve, sur le modèle allemand, de produire industriellement du « biogaz » dans un méthanisateur géant adossé à une ferme-usine de 1 000 vaches laitières… et voit naître une résistance massive face à son projet. Des barons locaux incapables de raisonner autrement qu’à court terme,une structure officielle, le CODERST chargée de donner son avis préalablement à la décision du Préfet quant aux projets relatifs à des installations classées. Des riverains qui exposent leurs arguments lors des débats publics en amont du projet, ne sont pas entendus et finissent par constituer une association : NOVISSEN. Un préfet qui malgré l’opposition de la population finit par accorder en mars 2013, le permis de construire et d’exploiter (pour 500 vaches, mais avec la possibilité d’atteindre les 1 000 vaches du projet initial)… Et enfin, des organisations locales et nationales (dont les Amis de la Terre France) qui soutiennent NOVISSEN et dont les représentants de 46 d’entre elles défilent le 3 mars 2013 dans les rues de Paris et au le Salon de l’agriculture. Voilà les ingrédients de la mobilisation autour du projet de ferme-usine dit des « Mille vaches ». La lutte s’organise pour faire annuler le projet qui met en péril la santé, l’environnement, l’emploi…

L’appel de « Nos vies saines » a été entendu De nombreuses actions marquantes sont organisées. Des « lettres ouvertes », adressées à M. Ramery, au Préfet, et dernièrement à François Hollande lui-même, rappellent à chaque fois les aberrations de ce type de projet dangereux : • Pour la santé des humains et des animaux : concentration de vaches laitières qui favorisera l’utilisation intensive d’antibiotiques, mutations incontrôlables de virus, etc. cela pour produire du lait et de la viande industriels qui concentreront tout ce que nous dénonçons depuis des décennies : engrais chimiques, pesticides, soja OGM ; • Pour la sécurité des riverains : normes de sécurité industrielle non applicables,

camions circulant sans arrêt, tant pour alimenter le digesteur, dans un rayon de 110 km que pour épandre les 40 000 tonnes annuelles de « digestat » résiduel sur 2 700 hectares de terres ; • Pour l’emploi : cette étable-méthanisatrice industrielle va accélérer la disparition des exploitations actuelles… et empêcher de jeunes agriculteurs de s’installer ; • Pour les émissions de gaz à effet de serre : déforestation alliée aux cultures de soja OGM, va-et-vient des camions, méthane émis par les vaches… Pour la balance du commerce extérieur : importation supplémentaire de soja transgénique ; • Pour la dette publique subventions à la production de biogaz, entretien et réfection du réseau routier local. Cette « Usine Mille Vaches – Ramery » est un cas d’école d’incohérence des décisions politiques. Construire une infrastructure spécifique, non pas pour produire du lait (qui devient ainsi un

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sous-produit), mais pour produire des quantités industrielles de gaz soi-disant « bio » au mépris des risques d’ordre sanitaire, financier, démocratique et pour l’emploi… et au détriment des citoyens et des populations. Et pourtant, alors que les enjeux sont trop importants pour que le combat ne s’intensifie pas, et malgré le démarrage des travaux de construction en avril 2013, toutes les organisations civiles réunies restent mobilisées. Quant aux CODERST, ne serait-il pas utile d’en modifier la composition en donnant une place plus importante aux associations agréées ?

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GÉRARD CABY

Pour en savoir plus : NOVISSEN : nos villages se soucient de leur environnement - www.novissen.com CODERST : Conseil de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques http://www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr/Autres-acteurs,14340.html

Signez la pétition pour demander un moratoire sur les OGM Roundup © Compte tenu des résultats alarmants de l’étude du professeur Gilles-Eric Séralini et de son équipe soutenus par de très nombreux scientifiques du monde entier, et sur la base de la stricte application du principe de précaution dans un domaine touchant à la santé publique, des organisations de la société civile lancent une pétition et exigent des pouvoirs publics : • la mise en place d’un moratoire sur l’importation de tous les OGM qui se retrouvent dans l’alimentation animale en grande quantité, et en particulier du maïs NK 603 et de l’herbicide RoundUp ; • la remise en cause de façon transparente et indépendante de toutes les autorisations de mise en marché accordées aux plantes génétiquement modifiées du fait de l’insuffisance et l'inadéquation des tests et des protocoles adoptés.

Pour en savoir plus et signer la pétition : http://action2.bioconsomacteurs.org/


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NATIONAL

Entretien - Nucléaire et débat démocratique : une succession d’occasions manquées Le débat sur la transition énergétique a permis à l’industrie de l’atome de se présenter favorablement. Jouant sur la « participation à l’effort », elle renouvelle ses arguments. Une stratégie développée depuis plus de quarante ans, comme le montrent les travaux de Sezin Topçu* qui répond à nos questions. Le débat sur la transition a-t-il permis une approche démocratique de l’énergie ? Il devait constituer un pas important dans ce sens. On devait débattre publiquement des choix passés, actuels et à construire, dans un contexte de crise économique et écologique. Tout devait être mis sur la table, mais il a été très tendu. C’est une occasion manquée. Comme souvent autour des questions nucléaires et énergétiques, on reste dans le « débat pour le débat », du moins le « débat inachevé ». Il n’a même pas débouché sur des recommandations communes, citant éventuellement les avis divergents. On doit se contenter d’une synthèse, un texte très soft qui fragilise ce débat, sa capacité à peser sur les décisions majeures. Ce débat a très clairement mis en relief les tensions et les rapports de force. Au fond, des visions de monde très contrastées se sont affrontées. Mais dés le départ, le nucléaire a fait polémique car deux anciens patrons du nucléaire étaient pressentis pour siéger au comité de pilotage. Certaines ONG ont ressenti une volonté de verrouiller, une fois de plus, la question nucléaire. Finalement, force est de constater que la question du nucléaire n’a pas été suffisamment politisée. Sa place dans ce futur énergétique à dessiner collectivement, la question du choix qui a été fait il y a 40 ans, et qui peut être défait, ou refait, n’a pas été approfondie.

coût de la transition, gommant le fait qu’en cas d’accident les dégâts sanitaires, environnementaux, sociaux et économiques seraient irréparables.

Et les débats n’y changent rien ? La tenue d’un débat démocratique sur l’énergie était une revendication forte du mouvement écologiste et antinucléaire des années 1970. Après l’accident de Three Mile Island (1979), l’organisation d’un débat suivi d’un référendum figure parmi les promesses électorales de Le nucléaire semble même conforté dans François Mitterrand. Finalement, il orgal’esprit du gouvernement ? nisera juste un débat parDans les conclusions de la Conférence environne« Comme souvent lementaire entérinant le nucléaire. Depuis 20 ans mentale, il est maintenant question de « contri- autour des questions on assiste à des tentatives bution du nucléaire à l’efnucléaires, on reste souffrant à chaque fois de défauts organisationnels, fort national de transition énergétique ». Il faut le dans le « débat pour sinon de déficits démocramettre à « contribution », le débat », du moins tiques, malgré des apports indéniables en termes comme on mobilise les acteurs humains, à le débat inachevé. » d’information et de mise à l’agenda médiatique d’enl’image du citoyen à qui jeux cruciaux pour la plupart négociés à on demande de faire des éco-gestes ! huis clos. On arrive encore à transformer une poliLe débat sur l’énergie de 2003, qui se raptique contestée, le prolongement de la proche du dernier sur la forme, a fait l’obvie des réacteurs, en « service » rendu à la jet de fortes critiques car il était trop cencollectivité : le nucléaire va « payer » la tré sur le nucléaire et guère conçu pour transition, titrait un journal. Une fois de débattre des alternatives. Les ONG ont plus, un handicap, ici des centrales vieildonc monté des contre-débats. Les lissantes, devient une vertu, ici un avandébats publics sur l’énergie nucléaire de tage financier. Le renouvellement des 2005-2006, qui devaient marquer une arguments est permanent. avancée démocratique, se sont en partie Ainsi, certains experts, en tentant d’emsoldés par un échec. Celui sur l’EPR s’est pêcher la fermeture de Fessenheim, se avéré problématique car le gouvernedonnent pour mission de minimiser le

ment a annoncé sa construction sans attendre les conclusions. Il a débouché sur une deuxième grosse crise, lorsque l’affaire secret-défense a éclaté, et qu’il a été déserté par les ONG les plus importantes. Enfin, le Grenelle présente un aspect intéressant : le nucléaire a été déclaré tabou. Il a carrément été traité, de façon publique et assumée, en tant que tel. Récemment les dispositifs de « grand débat » se sont multipliés, mais sans parvenir à établir la confiance en prouvant qu’ils sont utiles et souhaitables : ils permettent d’éclairer les décisions politiques et ils permettent une participation démocratique, même indirecte, des citoyens à la fabrique des politiques qui les concernent. En tout cas, l’objectif à attendre est bien celui-là.

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PROPOS RECUEILLIS PAR PHILIPPE COLLET

* Sezin Topcu est chargée de recherche en histoire et sociologie des sciences au CNRS, Sezin Topçu vient de publier le passionnant La France nucléaire, l'art de gouverner une technologie contestée au Seuil (Septembre 2013, 21 euros).


INTERNATIONAL

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Prix Pinocchio 2013 Gros succès pour entreprises « petites » Veolia a reçu le Prix Pinocchio dans la catégorie « Une pour tous, tout pour moi » avec 39 % des votes, pour son implication dans des projets de privatisation de l’eau en Inde, en particulier à Nagpur. Alors que la multinationale se présente en héros apportant l’eau aux pauvres, sur le terrain, les échos sont bien différents. Dans la catégorie « Plus vert que vert », Areva remporte haut la main le Prix Pinocchio avec 59 % des votes. Il faut dire que la multinationale du nucléaire avait osé l’inimaginable : ouvrir « Urêka », un musée à la gloire des mines d’uranium, sans aucun complexe par rapport aux graves impacts sociaux et environnementaux que continuent d’avoir ses mines d’extraction d’uranium dans le monde entier. Enfin, avec 50 % des votes, le Prix Pinocchio de la catégorie « Mains sales, poches pleines » a été décerné à Auchan. Le numéro 2 de la grande distribution en France refuse de reconnaître sa responsabilité et de participer à l’indemnisation des victimes de l’effondrement des usines textiles du Rana Plaza au Bangladesh. Dénonçant de nombreuses violations des droits des peuples et de l’environnement, les Prix Pinocchio ont su gagner en importance depuis leur création en 2008, et contribuer

© Capucine Simon

Les Prix Pinocchio 2013, organisés en partenariat avec Peuples Solidaires et le CRID, et ont été remis le mardi 19 novembre à l’issue d’une cérémonie humoristique qui a vu Veolia, Areva et Auchan récompensés.

ainsi à faire pression sur les entreprises pour qu’elles changent leurs pratiques.

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JULIETTE RENAUD ET CAPUCINE SIMON

Pour en savoir plus : Rendez-vous sur prix-pinocchio.org et sur multinationales.org

Sommet climat de l'ONU Les pollueurs parlent... on détale ! Varsovie, 21 novembre 2013 : les 19e négociations des Nations unies sur le changement climatique sont sur le point de s’achever quand, pour la première fois dans ce processus, la société civile écœurée fait bloc et se retire. « Polluters talk, we walk » les pollueurs parlent, on part ! clament les ONG, syndicats et organisations représentant des millions de personnes dans le monde, tout en rajoutant avant de claquer la porte un « volveremos » (nous reviendrons) chargé de promesses. Prometteur, parce que les gros bras des négociations climatiques comme WWF, Oxfam, Action Aid, Greenpeace et autres ont osé dénoncer la farce qu’était devenue la COP à Varsovie. Le décalage entre les larmes du philippin Yeb Sano et la rétrocession des Etats dits développés sur leurs engagements climatiques était devenu intolérable. En toute impunité,

l’Australie, le Canada, le Japon et les Etats-Unis faisaient marche arrière sous le regard passif de l’Union européenne. Sans que cela ne choque personne, Alstom, BMW ou le charbonnier polonais PGE s’affichaient librement comme partenaires des négociations, tandis que, pour bien montrer qu’elles s’en moquent, les entreprises se réunissaient à quelques rues de la COP pour un Sommet international du charbon et du climat. Et comme pour prouver leur assujettissement au secteur privé, des dirigeants comme Christiana Figueres, chef climat de l’ONU, y ont assisté alors que la société civile, dont les Young Friends of the Earth, les enjoignait au boycott. Retrait prometteur aussi parce que cela rappelle la nécessité d’une réelle justice climatique et reflète le renouveau de la société civile. Car, partout, dans les terri-

toires, les citoyens étaient déjà sortis de cette négociation-renonciation climatique. Eux s’acharnent localement et quotidiennement à revisiter les modes de vie, à repenser la façon de consommer, à impulser des alternatives. Ce 21 novembre, c’est la mise en garde du peuple à la communauté internationale et à la France en particulier, puisque c’est elle qui accueillera les négociations en 2015, conférence annoncée comme l’ultime étape avant de renoncer à sauver le climat. Attention, susurre-t-il, vous ne vous moquerez pas de nous à Paris comme à Varsovie. Les transitions sont déjà en marche dans les territoires et vont plus vite que vous : nous reviendrons…et nous savons déjà que nous sommes des millions.

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MALIKA PEYRAUT

Chargée de campagne Institutions financières internationales


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INTERNATIONAL

Banques françaises Alpha Coal : la mobilisation fait réagir la Société Générale Les Amis de la Terre ont pris part à une mobilisation internationale pour sensibiliser les citoyens sur le projet minier Alpha Coal, dans le Bassin de Galilée en Australie. Leur cible, la Société Générale.

Actions menées dans la Drôme, la Moselle et le Val d'Oise en octobre 2013.

30 millions de tonnes de charbon exporté annuellement pendant 30 ans, 1,8 milliards de tonnes de CO2 émis, diminution dramatique des nappes phréatiques dont dépend la population locale, destructions irréversibles de la Grande Barrière de corail et de la biodiversité marine et terrestre … Le projet Alpha Coal, impensable ? La Société Générale mène pourtant aujourd’hui des études de faisabilité et d’impacts préalables à son lancement. Pour montrer leur opposition à ce projet, les Amis de la Terre ont d’abord adressé, en octobre, une lettre signée par 57 organisations, restée sans réponse. Puis, ils se sont mobilisés en pleine Conférence « Climat » de l’ONU et alors qu’un rapport de Banktrack dénonçait le financement des mines de charbon par les banques. Les groupes locaux de la Drôme, du Val d'Oise, du Poitou, de Paris, de Côte dOr et de Moselle ont fait pression sur la Société Générale et lui ont demandé de se retirer d’Alpha Coal. Actions de rue, tractage et même mini-scénettes théâtrales ont été organisés en vue d'obtenir une réaction de la banque. A Metz, les militants se sont déguisés en agents financiers et liquidateurs pour mimer un hold up et crime environnemental sur Dame nature toute vêtue de blanc en symbole des ressources hydriques et de l'océan.

Informer, dialoguer et mobiliser! La mobilisation a permis d'informer sur les impacts du projet et de sensibiliser sur le rôle des banques dans le financement des changements climatiques. Ces informations ont été appréciées des passants et des clients de la Société Générale, choqués par le soutien de la banque à un projet aux conséquences dévastatrices. Au-delà des actions de rue visant à interpeller les passants, ces mobilisations ont permis de susciter des échanges entre les citoyens mobilisés et les personnels des agences régionales. Plusieurs groupes ont ainsi rencontré le directeur et le/la chargé(e) de communication. A Metz, les militants ont remis aux employés de la banque une lettre d'information sur l'implication de la Société Générale dans Alpha Coal. Leur démarche a reçu un bon accueil. « La plupart des gens ont jugé le projet honteux et certains se sont d'eux-mêmes engagés à changer de banque et à quitter la Société Générale si elle ne se retirait pas du projet ! » témoigne un des militants de Moselle. Les informations ne sont pas non plus passées inaperçues au siège parisien qui, à l’issue d’une action organisée le 15 novembre, a immédiatement réagi par un mail envoyé aux Amis de la Terre. Si la banque refuse d'être perçue comme

responsable du maintien d'un modèle économique et énergétique fondé sur les énergies fossiles, elle se dit « soucieuse de sa responsabilité dans les services financiers qu’elle apporte à ses clients […] Toute implication de la Société Générale dans le lancement effectif du projet Alpha se fera dans le respect de [ses] Principes [Généraux environnementaux et sociaux] et des conditions fixées par l’état de Queensland et l’Australie, plus particulièrement celles visant à préserver la Grande Barrière de Corail ».

Maintenir la pression Or, ces politiques sont insuffisantes pour garantir toutes les précautions sociales, environnementales et climatiques ; les autorités australiennes sont de plus plutôt ferventes du développement minier1. Quant à l'organisme chargé de la protection de la Grande barrière de corail, deux de ses membres sont soupçonnés de conflits d'intérêts avec les industries des mines et du gaz2… La semaine d'actions a permis de démontrer la détermination de la Société civile à stopper Alpha Coal. Après avoir ignoré les protestations des citoyens, la Société Générale a enfin réagi. Il s'agit désormais de ne pas se démobiliser tant qu’elle n'aura pas déclaré mettre un terme à son rôle de conseil, comme l'a déjà fait la banque états-unienne la Citi en début d'année.

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LUCIE PINSON

Chargée de campagne Finance privée

>> Restez mobilisé/e : Signez la cyberaction www.cyberacteurs.org/cyberactions/financer-alpha-coal-detruire-grande-barrierecorail-climat-689.html

Toutes les informations sur la campagne : www.amisdelaterre.org/alphacoal

1/ http://www.theguardian.com/environment/planet-oz/2013/nov/07/climate-change-keystone-galilee-queensland-coal-mining 2/ http://www.lemonde.fr/planete/article/2013/11/01/la-grande-barriere-de-corail-infiltree-par-l-industrie-miniere-et-gazie_3506815_3244.html

Humeurs - Quand le carbone du Vatican se planque, Planktos se plante ! On compare souvent les mécanismes de compensation carbone ou biodiversité au système des indulgences, qui, au Moyen-Age, consistait à accorder des jours de purgatoire en moins aux pêcheurs repentis. Le responsable de Planktos, une société basée à San Francisco dont l'activité est « la restauration de milieux océaniques et terrestres », a pris cette analogie au pied de la lettre, et accordé de telles indulgences... au Vatican ! La cité pontificale annonçait donc en juillet 2007, qu’elle était heureuse et fière d’être le premier Etat neutre en émissions de carbone, celles-ci devant être compensées par la plantation de 7 000 hectares d'arbres dans un parc naturel situé en Hongrie, pays où Planktos a une filiale ! Pourtant, six ans plus tard, la « forêt climatique » du Vatican, attend toujours d'être plantée et le Vatican a annoncé qu'il pourrait porter plainte contre la société qui devait s'en charger. Quand on sait que la principale activité de Planktos, est de générer des crédits carbone via des projets d’ensemencement des mers avec de la poudre de fer pour doper la photosynthèse, unprocédé dénoncé par le GIEC comme dangereux, on se dit que l'indulgence vis-à-vis de ce genre de pratiques ne risque de nous ouvrir qu'une seule voie, celle de l'enfer sur Terre !

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ALAIN DORDÉ


DOSSIER

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De la surconsommation à l’économie de la convivialité Entre la rentrée, Noël puis les soldes, les géants de la high-tech maintiennent le consommateur en alerte toute l'année, et son porte-monnaie grand ouvert. Souvent présentés comme « verts » et dématérialisés, les produits high-tech auraient un impact environnemental faible, mieux ils pourraient nous aider à relever les défis planétaires : changement climatique, chômage, etc.1. Pourtant, avec une durée de vie qui ne cesse de se réduire (18 mois pour un téléphone), ces biens sont renouvelés trop rapidement et participent à un modèle de surconsommation qui détruit la planète. Ce rythme de consommation imposé par les marques, et adopté par la majorité des consommateurs, implique trop souvent, qu’un nouveau produit qui arrive sur le marché rend obsolète son prédécesseur. En parallèle, les programmes de collecte des appareils usagés en vue de leur recyclage déculpabilisent le consommateur, en laissant croire que parce que nous recyclons nous pouvons nous permettre de consommer toujours plus. Mais alors que 23 millions de téléphones neufs ont été vendus en 2011, seuls 1 million de téléphones usagés ont été collectés. Peu collectés, nos téléphones sont peu recyclés et ce sont donc de nouvelles ressources qu’il faut prélever. Pire, la forte demande en métaux liée à l’engouement pour la high-tech, poussent les constructeurs à fermer les yeux sur les conditions sociales et environnementales de l’exploitation des métaux contenus dans leurs produits2. La démultiplication des produits (smartphone, tablette, etc.) contribue à accroître le sur-équipement donc la consommation énergétique des ménages (lire p. 10 - 11), tout comme la courte durée de vie des biens génère des déchets à traiter (lire p. 13). De vraies solutions existent : d’autres modes de production et de consommation favorisant des usages mutualisés (prêts à la demande, partage entre utilisateurs... une véritable « économie de la convivialité » est possible), les circuits courts (approche territoriale), des produits évolutifs, modulables et réparables (éco-conception), et in fine une durée de vie plus longue des produits. Néanmoins il convient d’être vigilants quant aux fausses promesses des imprimantes 3D qui permettraient de re-créer une barrière de corail artificiel – et pourquoi pas des dinosaures... - (lire p. 11) et à la récupération de la consommation collaborative par de grands groupes cotés en bourse (lire p. 14).

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ANNELAURE WITTMANN

Référente pour les Amis de la Terre sur les Modes de production et de consommation responsables 1/ GeSi and The Boston Consulting Group, SMART 2020 : enabling the low carbon economy in the information age, 2008- réalisé par les constructeurs. 2/ Les Amis de la Terre UK ont révélé suite à un travail d'enquête que l’étain utilisé pour les soudures des smartphones des marques Apple, Samsung, Nokia ou LG provient d’exploitations minières responsables de la destruction de 65 % des forêts et plus de 70 % des récifs coralliens de l’île Bangka, ainsi que de la mort d’une soixante de mineurs en 2012.


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En débat Peut-on croire aux technologies numériques « vertes » ? Face aux préoccupations environnementales actuelles, les technologies de l’information et de la communication véhiculent une image de technologie propre. Qu'en est-il vraiment ? Une étude et un livre1 questionnent les enjeux écologiques des technologies numériques de l'information et de la communication (TIC).

Mineurs dans une mine d'étain à Tanjung Pesona, dans le district de Sungai Liat, Bangka, (Indonesia).

demandes, aucune réduction de la La dématérialisation, parce qu’elle perconsommation matérielle agrégée n’est mettrait de diminuer la consommation en vue. Pire, la montée en puissance des de papier et de réduire les déplacements, TIC alimente la flambée du cours des aurait un impact environnemental positif. terres rares, un groupe de métaux indisPremier bilan : les TIC vertes ne le sont pensables pour fabriquer écrans plats, pas tant que ça. Elles consomment de LED, téléphones… et dont la Chine, principlus en plus d’énergie : 13 % de la pal pays producteur, a restreint l’exportaconsommation électrique française soit tion, pour des raisons stratéenviron une dizaine de réacgiques. Enfin en l’absence teurs nucléaires et sont à « La relativité de de filière structurée, cerl'origine de 2 % de nos tains matériaux contenus émissions annuelles de gaz la définition des dans les TIC deviennent à effet de serre. La crois« TIC vertes » des déchets toxiques qui sance de leur consommasont mélangés au tout tion a intégralement comne garantit pas venant, avant d’être incinépensé les efforts faits dans les autres secteurs, en par- que l’amélioration rés et d’être stockés en décharge, sans possibilité ticulier l’électroménager d’un produit d’être récupérés. On ne sait (réfrigérateurs A++, etc.). De plus les TIC produisent conduise forcément que faire de ces stocks, qui des déchets difficiles à trai- à une amélioration ne peuvent être recyclés dans la nature. ter, dont les quantités à pour la planète » Accusé, le secteur a réagi. gérer augmentent très Google, par exemple, a rapidement. Les filières peiéquipé en 2007 son siège nent à se mettre en place, social à Mountain View (Californie) de contrairement à ce que laisse croire « panneaux solaires, et compte produire l’éco-contribution » affichée à côté du 50 mégawatts d’énergie renouvelable prix de vente. Enfin les TIC réclament, d’ici 2012. Son système de refroidissement pour leur fabrication, des matériaux qui par évaporation permettrait également étaient jusque-là peu sollicités. Cette de diviser par 5 sa consommation d’énergie. demande s’ajoutant aux autres

Séparer le bon grain de l’ivraie Ces annonces ne sont pas toutes aussi « green » qu’elles en ont l’air et se contentent souvent de saisir l’opportunité marketing que représente le souci écologique. Par exemple, pour augmenter l’autonomie des smartphones, grâce auxquels nous pouvons lire nos mails, regarder des vidéos, consulter notre agenda, les constructeurs ont réduit la consommation électrique des terminaux mobiles. Une bonne chose en soi qui n’a pourtant rien à voir avec un souci écologique mais qui répond aux attentes des clients. De plus, ce progrès doit être relativisé. En effet, pour parvenir à un tel résultat, les calculs sont désormais réalisés en partie sur les serveurs : la consommation d’énergie s’est donc déportée, mais le problème reste entier. Et comme les smartphones consomment beaucoup plus, en réalité, que les téléphones classiques, les ingénieurs chargés des réseaux voient la consommation d’énergie augmenter depuis leur arrivée sur le marché. Ce qui est « vert » ne se laisse donc pas saisir si facilement. Pour mieux comprendre ces écarts, la deuxième partie de notre étude a consisté à enquêter sur le sujet auprès des acteurs socio-écono-


© Ulet Ifansasti

DOSSIER - De la surconsommation à l'économie de la convivialité

miques : producteurs, distributeurs, pouvoirs publics, mouvements écologistes et consommateurs. Ces investigations ont permis d’établir une définition des « éco-TIC », qui coïncide d’ailleurs avec celle qui a été officiellement retenue par la Commission de terminologie. Pour la plupart des acteurs, une « éco-TIC » est une technologie de l’information et de la communication (ordinateur, téléphone...) moins polluante que les autres. Cette définition relative n’a pas de sens par rapport à des critères biophysiques absolus.

L'écoconception délaissée Chacun a donc tendance à voir le « vert » en fonction de ses intérêts. Les fabricants se concentrent sur l’économie d’énergie. Ils se consacrent en revanche assez peu à l’écoconception. Pire, leurs produits évoluent souvent de manière contraire aux recommandations des rares études qui existent : augmentation de la taille des écrans au lieu de diminution, réduction de la durée de vie au lieu d’augmentation, etc. Les distributeurs rechignent à récupérer les produits usagés car cela occasionne des frais et de l’occupation d’espace. Les associations écologistes se sont d’abord concentrées sur les toxiques, accompagnant le mouvement

de la réglementation européenne (directives relative aux déchets d'équipement électrique et électronique et celle relative à la limitation de l'utilisation des substances dangereuses), qui les a précédées. Elles ont abordé plus tardivement la question de l’énergie. Les consommateurs, eux, se soucient d’abord des effets néfastes des ondes électromagnétiques, n’ayant aucune idée de la consommation d’énergie induite. Ils ont tout de même le sentiment que les TIC ne sont pas des déchets comme les autres, aussi les conservent-ils dans leurs placards. Mais ils ignorent les impacts environnementaux, tant l’information est indisponible, et noyée dans un concert de louanges quant aux vertus des produits. La relativité de la définition des « TIC vertes » (ou « éco-TIC ») ne garantit pas que l’amélioration d’un produit conduise forcément à une amélioration pour la planète. Ainsi, même si les téléphones consomment moins d’énergie, il existe un effet rebond du fait de leur diffusion de plus en plus massive partout dans le monde, augmentant in fine leur impact environnemental. Résultat, on assiste à une situation schizophrène, où l’on vante les nouvelles performances des appareils pour pousser à acheter tout en critiquant la société de consommation. Sortir de cette situation n’est pas facile, car cela implique d’adopter une vision large. Or de nombreux acteurs préfèrent rester dans les bornes étroites des responsabilités qui sont les leurs. On assiste donc à un effet de report de la responsabilité : les entreprises en appellent à l’Etat ou aux associations écologistes, lesquelles en appellent à l’État, lequel en appelle aux entreprises et aux associations... Ce qui aboutit à laisser le grand public totalement ignorant et en dehors du problème. Les écologistes eux-mêmes ont souvent célébré les vertus des TIC. Pendant ce temps, le téléphone portable, inconnu dans les années 1990, est subitement devenu indispensable, comme la voiture ou internet. Ce n’est plus un choix, contrairement à ce que raconte la fable libérale à propos de la liberté du consommateur. Résister est devenu difficile, mais n’en reste pas moins urgent.

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FABRICE FLIPO

Maître de conférences en Philosophie

1/ Rapport Ecotic http://etos.it-sudparis.eu/rapports/Rapport_Ecotic.pdf La face cachée du numérique, Fabrice Flipo, Michelle Dobré et Marion Michot - Editions de l'Echapée, octobre 2013.

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Imprimante 3D, une impression de déjà-vu Recréer des pièces détachées impossibles à trouver ou vendues à des prix exorbitants et donc de lutter contre l'obsolescence programmée, telle est la promesse de l'imprimante 3D. Avec des consommateurs toujours plus férus de nouvelles technologies et des prix d'entrée de gamme en baisse, à partir 100¤, des analystes espèrent que Noël 2013 marque le début de l'imprimante 3D pour tous. Nos intérieurs regorgeant déjà d'objets, nous en possédons plus de 2 0001, l'imprimante 3D offrira la possibilité de créer de nouveaux objets, des plus utiles aux plus inutiles bien sûr ! Des possibilités de créations infinies dont la seule limite est aujourd'hui l'impossibilité d'assembler différents matériaux. Une difficulté qui on peut l'imaginer sera bientôt levée. Au delà de la question de l'utilité des objets créés, il faut aussi que l'imprimante 3D soit utile à celui qui la possède. Or, aujourd'hui, peu d'industriels partagent leurs secrets de fabrication et les déceler demandent une certaine expertise. Des mouvements comme celui des Fab lab pour fabrication laboratory, (laboratoire de fabrication), permettent aux hackers, bricoleurs en herbe ou curieux de décrypter et partager ces informations. Espérons que l'engouement pour les imprimantes 3D reste dans la sphère de ces passionnés et contribue à contraindre les constructeurs à mieux diffuser l'information, et non à tout à chacun à se prendre pour un génie créateur !

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CAMILLE LECOMTE

Chargée de campagne Modes de production et de consommation responsables 1/ Thierry Kazazian, Design et développement durable – Il y aura l’âge des choses légères, 2003, 192 p


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Projet de loi « Conso » Le changement, ce sera peut-être... plus tard !

© Capucine Simon

Le 2 mai 2013, le gouvernement dépose un projet de loi, relatif à la consommation dit « projet de loi Hamon ». Son objectif : « mettre en place de nouveaux outils de régulation économique pour rééquilibrer les pouvoirs entre consommateurs et professionnels ».

Le dépôt du projet de loi du nom du ministre délégué à l'Economie sociale et solidaire et à la Consommation est une opportunité que les Amis de la Terre saisissent pour formuler des mesures contre l'obsolescence programmée et allonger la durée de vie des produits. La mobilisation est forte, le suivi, poussé. L’Assemblée nationale adopte le 3 juillet en première lecture, un texte de loi suite aux avis et « rabots » de plusieurs commissions demeurent néanmoins l’action de groupe pour les consommateurs, le principe de l’amélioration de l’information et des droits contractuels des consommateurs, des mesures concernant l’assurance et le crédit, l’introduction d’indications géographiques et de protection du nom des collectivités locales (une sorte d’AOC pour les biens non alimentaires).

Les mesures ambitieuses à la poubelle La déception est grande pour les Amis de la Terre dont les trois mesures phares pour allonger la durée de vie des prod<uits ont d’ores et déjà été rejetées. Un groupe de travail réfléchira à la recon-

naissance du délit d’obsolescence programmée. En attendant, le renouvellement prématuré des produits restera la règle, une bonne nouvelle pour les producteurs et les distributeurs. Une énorme déception côté consommateurs : le projet de loi mise uniquement sur l’information des consommateurs et leur consommation « éclairée » de produits présentés comme réparables par des constructeurs volontaires. L’allongement progressif de la garantie légale à 10 ans proposé par les Amis de la Terre a également fait long feu : la garantie est maintenue à 2 ans. Seule la période pendant laquelle le consommateur n’a pas à fournir la preuve que le défaut existait au moment de la prise de possession du bien est portée de 6 à 12 mois. Le soutien au secteur de la réparation et du réemploi reste un vœu pieu reposant sur le civisme des producteurs. Les producteurs échappent ainsi, entre autres, à l'obligation de fournir des pièces détachées nécessaires à la réparation de produits tombés en panne. Finalement le texte de loi est adopté en

première lecture par le Sénat le 13 septembre 2013 et transmis à l'Assemblée nationale le 16 septembre 2013 pour la seconde lecture. Il repassera au Sénat avant d’être adopté définitivement en fin d’année. « Pour Benoît Hamon, c'est un premier pas contre l’obsolescence programmée.. Pour les Amis de la Terre, les annonces étaient séduisantes, les mesures sont dérisoires » selon Camille Lecomte, chargée de campagne Modes de production et de consommation responsables. En 40 ans, notre consommation de ressources a augmenté de plus de 30 % et la production des déchets des ménages a doublé. L’obsolescence programmée de nos biens est le symbole de cette société du gaspillage. En laissant les entreprises s’autoréguler par des engagements volontaires, la France ne prend pas la voie d’un changement de modèle économique. La logique reste celle du produire, consommer, jeter. Jusqu’à quand faudra-t-il attendre l’entrée dans le modèle vertueux de l’économie circulaire ?

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MARTINE DEGRAVE

Programmons la fin de l’obsolescence ! Après l’adoption du projet de loi consommation en première lecture, aucune sanction ne peut être prise à l'encontre d'un producteur qui limite la durée de vie de ses produits, ou encore aucune disposition légale n’oblige les producteurs à fabriquer des pièces détachées. Pourtant, l’allongement de la durée de vie des produits et la promotion de la réparation présentent à la fois un intérêt économique et écologique : moins de déchets à collecter et à traiter, et plus d’emplois dans le secteur de la réparation et de l’économie sociale et solidaire. Pour y parvenir, des mesures s’imposent, et notamment : • Faciliter le recours à la réparation en informant mieux le consommateur des possibilités de réparations et en soutenant le secteur de la réparation. • Etendre la durée légale de garantie de 2 à 10 ans. • Créer un délit d’obsolescence programmée. Signez la pétition et demandez à Benoît Hamon de soutenir ces mesures : http://www.amisdelaterre.org/Soutenez-nos-luttes.html


DOSSIER - De la surconsommation à l'économie de la convivialité

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Mines urbaines : une option pour pallier la pénurie de métaux ? Les ressources s'épuisent, les mines les plus accessibles ont déjà été exploitées. Il y aurait désormais plus d'or dans une tonne de vieux téléphones portables que dans une tonne d'un gisement d'or exploité. L'idée d'exploiter les « mines urbaines » émerge : changera-t-elle les comportements ? L'engouement pour les nouvelles technologies augmente l'utilisation de métaux : en 1980, un ordinateur en comptait une dizaine, aujourd'hui il en compte plus de 60. Des appareils plus nombreux dans lesquels le nombre de métaux croît, tout comme leur rareté à l'échelle de la planète. Au point qu'aujourd'hui, l'épuisement des gisements inquiète les décideurs économiques et politiques nationaux et européens qui élaborent des stratégie pour y pallier1. L'exploitation des mines urbaines autrement dit le recyclage des déchets électriques et électroniques n'est pas la priorité. La sécurisation des approvisionnements ou la recherche de produits de substitution, qui passe par l'exploration de nouveaux gisements, lui est préférée. La logique poursuivie est bien de continuer à prélever les ressources encore disponibles, indépendamment des questions de pénurie ou des conflits géopolitiques (en RDC ou en Chine par exemple). Loin des principes de l'économie circulaire qui propose de transformer nos déchets en ressources, les pratiques des entreprises sont aussi déconnectées des beaux discours : réduire la quantité de métaux, privilégier l'utilisation des métaux recyclables, investir dans le développement de nouveaux procédés de recyclage.

La pénurie est déjà là Les stocks sont quasiment épuisés pour l'indium qui a été massivement exploité pour les écrans LCD des télés, téléphones ou ordinateurs portables, alors que les ressources minières étaient estimées à quelques dizaines d'années. D'autres métaux sont concernés mais leur utilisation n'est toujours pas conditionnée au développement de procédés de recyclage qui permettraient de ne pas les extraire jusqu'à épuisement.

Cependant, si les industriels ne misent pas sur le recyclage, c'est notamment parce que les déchets électriques et électroniques sont difficiles à collecter et parce que les taux de collecte restent faibles malgré une légère progression. Sur les 20 kg de déchets électriques et électroniques engendrés chaque année par un Français, à peine 7 kg sont collectés, dépollués et recyclés par les structures agrées. Le recyclage, une fois les déchets collectés, est lacunaire : en cause, des techniques de recyclage limitées, en décalage avec les nouveaux produits mis sur le marché.

Où sont les « mines urbaines » ? Parler de mines urbaines marque une évolution dans la conception de nos déchets électriques et électroniques. En effet, les premières mesures réglementaires visaient essentiellement l'encadre-

ment de l'élimination de ces produits qui contiennent des substances dangereuses et donc présentent un risque de pollution. Depuis, l'accent est mis sur le recyclage des ressources déjà prélevées. Cependant, au fur et à mesure que la législation progresse, elle est contournée et les filières d'exportation illégale de déchets se renforcent. Ainsi, entre 550 000 et 1,3 millions de tonnes de déchets électriques et électroniques sont exportés en Afrique et en Asie souvent dans un cadre commercial, parfois sous couvert d’aide humanitaire. Ces déchets sont pourtant loin d’aider les pays qui les accueillent. Au final, les mines urbaines se trouvent le plus souvent ailleurs...

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CAMILLE LECOMTE

Chargée de campagne Modes de production et de consommation responsables

1/ Comité des métaux stratégiques, organisé sous l'égide du Ministère du redressement productif ou Initiative «matières premières» de la Commission européenne.

Des solutions pour donner une seconde vie à nos anciens appareils ? Les Ateliers du Bocage ont été créés en 1992. D'abord spécialisés dans la collecte et le reconditionnement des cartouches d'imprimante, l'association s'est adaptée et reconvertie dans la deuxième vie des téléphones et bientôt des tablettes. Les 240 personnes qui travaillent aux Ateliers du Bocage, dont 40 postes en entreprise d'insertion et 14 postes en entreprise adaptée trient les téléphones : les plus vieux, pour être recyclés ; les autres, vérifiés, vidés de leurs données, si besoin réparés, seront revendus. Si vous avez des téléphones inutilisés dans vos tiroirs, si acheter un téléphone dernier cri ne vous intéresse pas, si vous cherchez une pièce détachée ou un chargeur pour allonger la durée de vie de votre appareil, rendez-vous sur le site La Bootique ! www.la-bootique.com


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« Collaborative washing ? » Quand les entreprises recyclent les initiatives citoyennes Partager ses biens, une bonne idée pour en finir avec notre société de surconsommation... à condition de bien choisir ses plate-formes d'échange. En privilégiant l'usage sur la propriété, en mettant en commun et en partageant leurs biens, depuis quelques années, des citoyens ont fait le choix de la « consommation collaborative », un mode de consommation en pleine expansion qui compte de plus en plus adeptes, 3 millions de covoitureurs en 2012. Depuis quelques mois, de nouveaux sites se créent et s'ouvrent à un public plus large, en offrant de nouvelles garanties de paiement ou en lançant des campagnes de communication grand public. Une question se pose néanmoins : qui se cache derrière ces sites qui surfent sur la vague de la consommation collaborative ? Loin des initiatives citoyennes ou locales qui ont popularisé le covoiturage, ces sites sont dirigés par des sociétés attirées

que des plate-formes de par l’appât du gain ou la « Une question mise en relation, les entrerecherche de nouveaux marchés. Blablacar est se pose néanmoins : prises qui sont derrière ne devenu en quelques mois qui se cache derrière gèrent pas l'entretien des voitures ou des logements, la nouvelle référence du covoiturage en France et ces sites qui surfent l'augmentation des commissions ne poursuit en Europe, après le rachat sur la vague de qu'une logique spéculades sites concurrents la consommation tive. Pour que la consom(covoiturage.fr ou 123-voimation collaborative ture.org) et poursuit son collaborative ? » continue d'être porteuse de développement avec la valeurs éthiques et de repoconclusion de partenariats ser sur l'idée de moins consommer, souavec des entreprises comme Total. Une tenons donc les plate-formes associaautre start-up bien connue des adeptes tives comme Covoiturage-libre.fr ou des du partage d'appartement, AirBnb, mise plate-formes d'hébergements qui privilésur des commissions élevées, 12 %, gient l'échange. payées par les usagers pour accroître son chiffre d'affaires et satisfaire l'intérêt des > CAMILLE LECOMTE actionnaires de cette société cotée en bourse. Rappelons que ces sites ne sont

Alternatives Vers un guide du réemploi pour la métropole lilloise Les Amis de la Terre Nord mettent toutes les occasions à profit pour sensibiliser au fléau de l’obsolescence programmée, de la surconsommation et de l’épuisement des ressources qu'elle entraîne. Afin d'apporter des outils pédagogiques et donner des pistes de réponses concrètes, le groupe local a décidé de réaliser un guide du réemploi et de la seconde vie des produits. Un groupe de travail a été constitué, qui rassemble des membres du groupe local, des représentants d'autres associations et des citoyens intéressés par la démarche. Ensemble, ont été convenus un périmètre et des étapes de réalisation de ce guide, aidés pour cela par le « manuel pour la réalisation de guides du réemploi locaux de la seconde vie des produits » réalisé par l’équipe nationale et les Amis de la Terre Paris. Le groupe de travail a participé le 16 novembre 2013 à la journée du réemploi organisée par la mairie de Lille, ce qui lui a permis à la fois de commencer à promouvoir le projet mais aussi de nouer des contacts avec les acteurs du réemploi présents.

Et tâchera ensuite de concrétiser son ambition : terminer et diffuser leur guide aux Lillois à la fin du printemps 2014 !

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LES AMIS DE LA TERRE NORD

Pour en savoir plus : http://www.produitspourlavie.org/


DOSSIER - De la surconsommation à l'économie de la convivialité

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Lyon Blanche Neige, sauvée de l’obsolescence programmée « Oyez, oyez ! » C'est par ces mots que l'attention des passants était attirée ce samedi 15 juin 2013, alors qu'ils faisaient leurs emplettes rue de la République à Lyon. Ceux qui s'arrêtaient pouvaient assister à une petite pièce de théâtre de quelques minutes mettant en scène des personnages de conte de fées : Blanche Neige, la terrible sorcière et le valeureux prince. Offre commerciale ? Animation culturelle dans le cadre de quelque festival ? Rien de tout cela ! Les jeunes gens ainsi déguisés étaient en fait membres de l'association écologiste Les Amis de la Terre Rhône, et cherchaient à alerter le public sur le problème de l'obsolescence programmée – manoeuvre dont sont accusés certains industriels, et qui consiste à réduire volontairement la durée de vie des produits pour forcer le consommateur à en racheter de nouveaux... contribuant ainsi à l'épuisement des ressources naturelles et à l'accumulation de déchets. Ainsi la sorcière offrait à Blanche Neige non pas une pomme empoisonnée mais un téléphone de la marque Apple, connue pour concevoir ses appareils électroniques de manière à ce qu'ils ne puissent pas être réparés. Le téléphone tombait évidemment en panne sur les douze

coups de minuit, laissant Blanche Neige sans solution... Jusqu'à l'intervention salvatrice du prince qui annonçait solenellement les mesures législatives soutenues par les Amis de la Terre : un allongement

obligatoire de la garantie des produits à 10 ans, un soutien au secteur de la réparation et la création d'un délit d'obsolescence programmée.

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LES AMIS DE LA TERRE RHÔNE

Annecy - Sociétés avides/sociétés à vide Mi-novembre 2013. Le décor est planté, le compte à rebours lancé : la fièvre acheteuse a démarré accompagnée de sa cacophonie publicitaire. L'an dernier, 1 million de « tablettes » vendues. Quel sera le « produit phare » de cette année ? De ces tonnes d'objets achetés, vendus, offerts, combien de métaux et d'énergie ont été nécessaires ? Combien seront délaissés dans quelques mois/semaines, devenus démodés ou tombés en panne ? Au final, de la conception à l'élimination, quel en est le coût environnemental et humain ? Tels ont été les propos tenus par Camille

Lecomte, chargée de campagne au sein de l’association des Amis de la Terre, venue débattre en Rhône-Alpes dans le cadre du mois de l'économie sociale et solidaire. La critique du système « croissance, productivisme, consumérisme » dont l'obsolescence programmée est le moteur n'a pas été remise en cause par le public. En revanche, s'est posée aussitôt la question du « comment faire autrement ? ». La réponse dépend du comportement de chacun en tant que consommateur. Les réponses existent, encore faut-il vouloir sortir de l'hypnose collective dans laquelle la société de consommation

nous enferme. Allonger la durée de vie de nos produits en les réparant, recycler tout ce qui peut l'être, réfléchir sur nos actes d'achat. Casser le mythe de la possession. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Nous, Amis de la Terre, pouvons accompagner ces changements par la distribution de tracts, d'actions de rue, l'organisation d'ateliers de consommation responsable qui amèneront chacun à réfléchir sur ses modes de consommation, à les remettre en question et à devenir consomm'acteur. Le sens remplira le vide.

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LES AMIS DE LA TERRE HAUTE-SAVOIE

Pratiques - Ne soyez pas démodés, faîtes réparer ! C’est sur ce ton léger et plein de bonne humeur que s’est déroulée, le 6 octobre 2013, la journée de la réparation à Nantes. Deux grands barnums, un stand des Amis de la Terre Loire-Atlantique bien renseigné, un beau soleil, nous étions fin prêts à répondre à toutes les questions. Comment changer un écran cassé ? Où trouver une pièce détachée ? Pourquoi réparer ?… Autant de problèmes du quotidien auxquels nous souhaitions proposer des solutions alternatives à l’achat de produits neufs. A nos côtés, des acteurs engagés de la filière de la réparation étaient présents. L’occasion pour la charrette de Vélocampus (1 des 3 lauréats avec SNALIS de l’appel à projet, cf. La Baleine n°173) de tester sa toute jeune notoriété, et vu l’engouement, le pari est réussi ! Les associations ALIS 44 et SNALIS 44 (deux Associations Libre Informatique Solidaire) ont pu faire connaitre leur démarche. SNALIS a également pu sensibiliser le grand public sur les métaux utilisés dans les D3E par le biais d’une exposition pédagogique très complète. Avec environ 63 000 téléphones et 16 500 tablettes tactiles vendus chaque jour, il était essentiel de mettre en avant l’alternative de la réparation pour ce type de produit particulièrement vulnérable dans la durée. Acteur fort de la journée, le stand du réparateur Ecophone 44 n’a pas désempli. Cette journée fut très enrichissante pour le public, présent en nombre, qui a pu (re)découvrir les enjeux de l'obsolescence programmée et les moyens d'y faire face. Pour les AT 44 et les participants, cet événement a été un franc succès, de l'avis de tous : à renouveler !

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LES AMIS DE LA TERRE LOIRE-ATLANTIQUE


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Mobilisations

Climat 10, 100, 1 000 Alternatiba L’ambiance est joyeuse ce dimanche 5 octobre 2013 à Bayonne. Foule, musiciens dans les rues, buvettes, on pourrait penser se retrouver au milieu d’une des nombreuses fêtes qui ponctuent le calendrier du Pays Basque. Mais Alternatiba, ce n’est pas qu’un événement festif, c’est d’abord une journée de mobilisation citoyenne, un Village des alternatives individuelles, collectives et systémiques au changement climatique et à la crise énergétique. Avec ses 12 000 visiteurs, cette journée a d’ailleurs été le rassemblement en faveur du climat le plus important depuis Copenhague en 2009. Bizi1! mouvement à l’origine de l’organisation d’Alternatiba est parti d’un triple constat : • Les grandes conférences internationales sont devenues des coquilles vides, elles promeuvent de fausses solutions et les dirigeants ne prennent aucune mesure concrète face à l’urgence climatique. • Les citoyens sont mal informés (si ce n’est désinformés), et la crise financière a occulté les enjeux liés au dérèglement climatique. • Les personnes sensibilisées se sentent impuissantes pour agir efficacement et se démobilisent, alors que les alternatives existent déjà. Il est donc nécessaire de mettre en place une vraie stratégie de remobilisation de la société civile, permettant de faire pression sur les dirigeants. Programmé quelques jours après la date de sortie du rapport du GIEC, Alternatiba a donc été conçu comme une grande

sommet international sur le climat qui aura lieu en 2015 à Paris. Sur tout le territoire, il existe des initiatives à mettre en valeur, des personnes qui souhaitent en savoir plus et s’engager. Pendant l'hommage à Stéphane Hessel qui a clôturé la journée d'Alternatiba, un appel à créer 10, 100, 1 000 Alternatiba partout en France et en Europe a été lancé et diffusé en 17 langues européennes (www.bizimugi.eu/fr/creons-10-100-1000-alternatiba-en-europe). Quelques militants peuvent suffire à lancer un projet et les bonnes volontés suivront. Les fête, une université populaire (4 500 personnes ont pu participer à l’une des nombreuses conférences proposées) et un festival des Alternatives avec des centaines de stands tenus par des associations, des collectivités, des particuliers ou des professionnels. Le centre historique de Bayonne, fermé aux voitures, a été divisé en 15 quartiers thématiques tels que transports, alimentation, économie soutenable ou éducation à l’environnement… Une place particulière a été laissée aux alternatives municipales dans la perspective des prochaines élections : rencontre avec des élus locaux porteurs de projets innovants et distribution de la boîte à outils municipale.2

Lancer une dynamique Mais Alternatiba à Bayonne est loin d’être un aboutissement, c’est le début d’une dynamique en vue de la COP 21, le

citoyens ont soif d’actions positives qui permettent d’envisager l’avenir avec optimisme et de reprendre son destin en main. Le succès d’Alternatiba à Bayonne vient de la diversité de ses acteurs et l’événement a été à l’image du monde qu’il promeut : simple, joyeux, porteur d’espoir ; un lieu de rencontre et de créativité. Et chez vous, Alternatiba, c’est pour quand ?

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ELISE BANCON

Membre de la coordination de Bizi!

1/ Bizi!, qui signifie vivre en basque, est une association écologiste du Pays Basque créée à la suite de la conférence de Copenhague en 2009. Bizi ! est un groupe associé aux Amis de la Terre. http://www.bizimugi.eu/fr

2/ Cette boîte à outil programmatique propose des pistes concrètes pour intégrer des éléments de transition énergétique et écologique dans les programmes des candidats aux élections municipales. A télécharger ici : http://www.bizimugi.eu/fr/bopa/

Mettre en œuvre la transition écologique : les mesures indispensables Les Amis de la Terre Gironde ont publié en juillet 2013 un rapport présentant leurs principales revendications en matière de « climat-énergie » afin de s'engager réellement sur la voie de la transition énergétique. Cette publication est l'occasion de rappeler l'importance fondamentale de la question énergétique dans le fonctionnement de nos sociétés et alerter sur la gravité de la situation actuelle : raréfaction des ressources, périls écologiques (changement climatique) et sociaux (précarité énergétique), risques sanitaires (nucléaire, pollutions), facture énergétique colossale, etc. L'urgence à agir est bien réelle et la politique des petits pas n'est plus concevable. C’est pourquoi les Amis de la Terre Gironde

considèrent que pour transformer le système énergétique, il est impératif de s’engager dès maintenant sur des objectifs et mesures de rupture basés sur trois piliers : sobriété, efficacité, renouvelables. Débattre sur l’énergie doit amener à repenser un projet de société sur la base d’un renouveau démocratique, celui d’une société soutenable plus sobre, plus sûre et plus juste. Avec à la clé, un potentiel de création nette de plusieurs centaines de milliers d'emplois.

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LES AMIS DE LA TERRE GIRONDE

L’enjeu climat – énergie : état des lieux et recommandations des Amis de la Terre Gironde - Juillet 2013 – 34 pages.

A télécharger à cette adresse : www.amisdelaterre.org/www-amisdelaterre-org-Gironde.html


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