La fin des Labyrinthes- Graphisme et sociologie dans le transport public

Page 1

la fin des

LabyrintheS GRAPHISME ET SOCIOLOGIE DANS LE TRANSPORT PUBLIC

Ana Victoria Villafana Ramirez

Mémoire DNSEP École Supérieure d’Art de Cambrai 2013



Je tiens à remercier ici toutes les personnes qui, d’une façon ou d’une autre, ont contribué à réaliser cette mémoire, particulièrement Isabel Claros Abarca et Alexandre Laumonier.


4

INTRODUCTION

Chapitre 1

Chapitre 2

p7

p9

p39

LA FIN DES LABYRINTHES

LA BOUSSOLE GRAPHIQUE

L’évolution de la trame du tissu urbain

Un système qui devient pragmatique au cours du temps : le cas du Métro de Paris

Vers une standardisation de la signalétique

Un siècle du réseau de métro

La ville et sa cartographie

La conception graphique des informations relatives au métro

La carte déformée : naissance des plans de métro non-géographiques

Signes mercantiles et signes sauvages

Le langage graphique: des phrases aux pictogrammes

Un système entre chaos et rigueur: Lima, des combis au métro

Le transport en commun en site propre et sa signalétique

Entre chaos et bruit, le transport public et son histoire à Lima Graphisme, information et mobilité

Au-dessus : des bus et des tramways

L’arrivée des bus en site propre et du métro

Au-dessous : le chemin de fer métropolitain

LE DEVELOPPEMENT

LES ENTREPRISES DE TRANSPORT :

DU TRANSPORT EN COMMUN

CODE ORAL ET INFLUENCES SUR LES

DANS LES VILLES D’AMERIQUE LATINE

USAGERS


5

Sommaire

Chapitre 3

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

p73

p87

p91

GRAPHISME ET SOCIOLOGIE DANS LES TRANSPORTS PUBLICS À Paris et Lima Comparaison des signalétiques des transports en commun

Sociologie de la signalétique L’avenir du graphisme dans le métro: physique ou virtuel ?


6


7

Introduction

La vieille Europe est pleine de puissance. Notre esprit nourri des siècles est alerte et inventif ; sa force est dans la tête, tandis que l’Amérique a des bras solides et la noble sentimentalité de l’adolescence. Si en Amérique on produit et on sent, en Europe, on pense. Il n’y a pas de raison pour enterrer la vieille Europe. Le Corbusier  1

Depuis mon enfance, pour me déplacer dans ma ville, Lima, les trajets quotidiens ont été longs. Mais, je ne me rendais pas compte jusqu’à quel point. Passer plus de deux heures par jour dans des bus replets, parfois même sans être assise, avec une ambiance particulière, bruyante et ce pour aller d’un quartier à un autre, était une habitude. Voir des spectacles de cirque aux feux rouges, acheter un journal, des bonbons ou des boissons “fraiches” pour quelques centimes, parler avec n’importe qui, écouter les tragédies vécues pas ceux qui demandaient de l’argent ou lire pendant le trajet, tout cela faisait partie d’un mode de déplacement typique à Lima. Les trajets devaient être appris par cœur. Pourtant, avant mon premier départ pour l’Europe en 2010, l’arrivée d’un « nouveau » système de transport métropolitain muni de ses propres voies allait me changer de point de vue sur le transport public. Avec ce nouveau système, les trajets étaient plus directs et les arrêts mieux localisés, même si parfois ils étaient un peu éloignés de la rue. Les usagers durent apprendre à respecter les indications ; ils furent éga-

1.  Le CORBUSIER et Jean CASSOU. Urbanisme. Vincent, Fréal et cie, 1966. Avertissement


8

lement obligés de lire des horaires sur des panneaux.

J’ai toujours été par les flux et les attitudes des usagers

Cela représentait, pour les usagers, beaucoup des

du transport public, qui se côtoient sans se parler –

nouvelles informations, ce qui expliquait le nombre

ce que l’on constate plus particulièrement dans les

des guides nécessaires pour expliquaient chaque

grandes villes dont les réseaux sont plus complexes.

panneau. Mais, je n’avais encore rien vu.

Par ailleurs, dans l’espace souterrain du métro, la superficie de la ville reste vague. Il n’y a ni paysage

Je suis arrivée en Espagne via un des plus grands aé-

ni ciel.

roports d’Europe, Barajas, avant de prendre un métro pour aller jusqu’au terminal des bus, avant de partir

Les plans des réseaux métropolitains sont, donc, des

enfin à Bilbao -un long parcours à réaliser, en solitaire,

cartes non-géographiques informations sur chaque

avec l’avantage de la langue et la signalétique. Arriver

ligne et leurs correspondances. Ces plans peuvent-t-ils

à destination sans problème fut une expérience vrai-

être des radiographies de la mobilité des citoyens ?

ment enrichissante. Apprendre à me repérer en lisant

Ce mode de transport fait désormais partie intégrante

le nom des rues, ou avec un plan de la ville, un plan

de la ville – « une image grossie des évolutions de la

de métro et un simple stylo, m’a tellement plu que l’ap-

société en mouvement », comme le signale Marc Augé  2.

parente indifférence des usagers des transports public

Mais à Lima, où il n’y a pas encore des grands réseaux

m’a interrogé : j’ai alors constaté la différence entre les

de transport, comment un système signalétique peut-il

grandes métropoles du « Nord » et les villes en voie

être efficace pour améliorer l’autonomie des usagers

de développement du « Sud ». L’indifférence envers

qui se déplacent au quotidien ?

la signalétique des usagers du « Nord » est plutôt le fait d’une habitude ancrée chez les gens depuis

Je souhaite présenter, dans ce mémoire, les liens entre

longtemps.

le graphisme d’information et l’usage qu’en font les individus dans un contexte de mobilité urbaine. Un

Un étranger à Lima doit faire plus d’effort d’adaptation

chapitre liminaire s’attachera à définir la croissance

qu’un touriste à Paris. Pour quelles raisons ? Répondre

des réseaux urbains dès la fin du XIXème siècle pour

à cette question est ce qui m’a amené à rédiger ce

montrer l’adaptation de la signalétique à ces change-

mémoire, puis que c’est grâce au graphisme d’informa-

ments, en ajoutant une partie sur l’appropriation de

tion, à la simplicité des pictogrammes, à l’utilisation de

ces modèles en Amérique Latine. Pour aborder ces

différentes langues, et à la signalétique que les trajets

différences de contexte géographique et culturelle par

peuvent être faits en toute simplicité. Nous dépendons

rapport aux usagers du transport public, le deuxième

ainsi du design graphique pour nous repérer et savoir

chapitre présentera deux études de cas : Paris et Lima.

quelle direction prendre. Avant de conclure, dans le troisième chapitre, une comLe rôle des graphistes s’avère primordial : tout est infor-

paraison entre ces deux systèmes nous emmènera à

mation ; tout n’est que communication. Que l’information

discuter sur l’actualité et l’avenir du graphisme d’infor-

soit en ligne, qu’elle soit imprimée, environnementale

mation dans ce contexte. Comment doit être la straté-

ou expérimentale, le plus important est de concevoir

gie du graphisme d’information, au moment d’informer

les conditions permettant aux utilisateurs de transport

à l’écrit là où cette méthode n’est pas si commune?

public d’arriver là où ils veulent. Le graphisme d’infor-

Est-ce que la standardisation des systèmes de trans-

mation repose tout entier sur l’idée de communication.

port public urbain peut « tuer » les particularités des villes ? Quelle est la influence des nouvelles technologies sur le graphisme d’information mondiale ?

2 . Marc AUGÉ. Le métro revisité. Seuil. Paris, 2008, p.9


9

Chapitre 1

LA FIN DES LABYRINTHES


10


11

L’évolution de la trame du tissu urbain

Etudier les différents types de signalétique présents dans les réseaux de transport public demande avant tout de contextualiser ces réseaux au sein de l’évolution des espaces urbains. Avant la Révolution Industrielle, la distinction entre ville et campagne était évidente ; cela semble moins clair aujourd’hui  1. Le développement des moyens de communication et de transport, l’augmentation de la distribution de l’énergie, puis l’homogénéisation des habitudes ont fait que dans les pays industrialisés les différences entre l’urbain et la campagne ont tendance à s’estomper. Pour comprendre la naissance des grands réseaux de transport public, il faut d’abord aborder la transformation de la « surface » des grandes villes. Dès le début du XIXe siècle, les villes ont expérimenté des processus d’urbanisation qui ont bouleversé la vie des citadins. L’une des premières villes à avoir

1.  Horacio CAPEL. La definición de lo urbano. Estudios Geográficos, 1975, vol. 138, p. 265.


12

subi un changement profond a été Paris. Les rues

loppement des espaces urbains eut pour conséquence

où les passants marchaient tranquillement ont vu

le développement massif des moyens de transport liés

l’apparition de véhicules

(des carrosses dans un

au quotidien. Cette restructuration de la ville fait que

premier temps), et avec eux des circulations effre-

l’espace perdit de l’importance en tant que territoire. Les

nées. Prendre un café en ayant une conversation

villes devinrent un réseau de nœuds où s’interconnectent

avec en fond le bruit des carrosses, des chevaux et

différents flux. La structure de ces nœuds dans l’espace

des passants, devint une habitude. Il n’y avait alors

urbain devint importante compte tenu du nombre de

pas de normes, les piétons étaient obligés à marcher

déplacements de chaque individu  6 .

dans la boue, à côté des chevaux. Une ville où le nombre d’habitants dépassait 50 000 Puis la construction des boulevards a fait que dans

personnes prit alors le nom de

« métropole »  7. Les

les villes on commença à privilégier le déplacement

villes grandissent : certaines conservent encore les rues

(comme Marshall Berman le constate dans les poèmes

de l’époque médiévale, où le piéton peut déambuler;

de Charles Baudelaire). Ces déplacements ont apporté

d’autres sont envahies par les voitures, les bus et les

désordre et danger, ce qui a perturbé les citoyens qui se

piétons qui coexistent tous ensemble dans le chaos des

déplaçaient à pied. On passe alors d’une ville centrée

grand boulevards. D’autres encore ont été construites

sur le piéton à une ville où le conducteur devient roi. La

exclusivement pour le déplacement et se retrouvent vides

rue n’appartenait plus à l’individu, mais à l’automobile.

de tout individu. Aujourd’hui, dans certaines villes occi-

L’homme de la rue, affirme Berman, devait se fondre dans

dentales, de nombreuses activités se délocalisent vers

cette nouvelle situation. La planification urbaine deman-

la périphérie. Cet étalement urbain fait que certaines

dait de nouveaux types de rue, qui devait être équipée

métropoles se rapprochent des espaces ruraux qui sont

comme une usine, ainsi que l’affirme Le Corbusier : (les

limitrophes aux villes ; ces nouvelles zones deviennent

rues) « ne sont pas dignes de l’époque : elles ne sont

alors des communes-dortoirs.

plus dignes de nous » . Des grand boulevards divisent   2

désormais la ville : « ici les gens, là le trafic ; ici le travail,

Les villes d’Amérique du Nord sont très représentatives

là les logements » . L’explosion démographique due au

ces « villes vides », souvent construites sous forme de

fort taux

grille où de larges avenues se croisent à angle droit ;

3

de natalité et à l’immigration expliquent la

mobilité croissante des citoyens dans la ville moderne.

c’est le règne du tout-voiture : inutile d’y chercher un piéton car le manque de trottoirs rend la marche à pied

Dans les années 1880-1890 se produisit une sorte de

particulièrement dangereuse.

deuxième Révolution industrielle. La fonction crée la forme : cette conception devint importante dans les nouveaux

Aujourd’hui, les régions où on trouve une métropole (telle

programmes architecturaux (construction d’usines, de

que Kevin Lynch la décrit) ont des plus vastes horizons,

grands magasins, de gares, d’immeubles de bureaux,

des points nodaux et des connections. Les éléments qui

d’appartements, de garages, de stades, de cinémas et

forment les métropoles sont les voies à grande vitesse

d’aéroports ). La ville devient alors essentielle à l’écono-

(comme les autoroutes, mais aussi les voies utilisées par

mie des pays industriels  5, et offrait ainsi aux citoyens un

les transports en commun), de grandes régions avec des

îlot protecteur et structuré en opposition avec l’hostilité

bordures d’eau ou des espaces ouverts ; des grands

de la nature.

centres commerciaux ; des reliefs topographiques ; peut-

4

être des massifs qui servent de points de repère  8 . Dans les premières décennies du XXe siècle, il y eut une effervescence pour construire des voies. Le déve-

2 . Le CORBUSIER et Jean CASSOU. Urbanisme. Vincent, Fréal et cie, 1966. Avertissement 3.  Marshall BERMAN. All that is solid melts into air: The experience of modernity. Verso, 1983. p168 4 . Michel RAGON. Histoire de l’architecture et l’urbanisme modernes. Tome 1 Idéologies et pionniers 1800-1900, p. 324 5.  Horacio CAPEL. La definición de lo urbano.. op.cit

6.  Claudia BIELICH SALAZAR. La guerra del centavo : una mirada actual al transporte público en Lima Metropolitana. Publicaciones del Instituto de Estudios Peruanos, Lima, 2009, p. 11 7 . Horacio CAPEL. La definición de lo urbano. op.cit 8 . Kevin LYNCH. The image of the city. MIT press, 1960, p. 112


13

vie des citadins, comment gagner du temps ? Avec des déplacements de plus en plus rapides, efficaces

Vers une standardisation de la signalétique

et longs, la demande augmente au sein de la multiplication des usines, des logements, des divertissements, etc. Mais la taille des villes et leur complexité font qu’elles sont perçues comme des labyrinthes à parcourir. Les transports en commun font des trajets prédéterminés qui doivent être maîtrisés par les usagers – mais comment ? L’un des éléments qui aide aux voyageurs à se déplacer est la communication entre l’usager et le réseau du transport en commun : la signalétique. Grâce à quelques objets spécifiques– tels que les grandes horloges du centre ville, les plans urbains,

Le besoin de mobilité dans l’espace urbain a né-

des panneaux, etc. –, le voyageur a accès à de

cessité le développement de différents modes de

l’information afin de pouvoir se déplacer. Cette

transport. Parmi ceux-ci se trouvent les transports

information se standardise à travers le temps : le

publics. Ces services sont gérés par l’État (où les

langage écrit, graphique et sa position dans l’es-

collectivités locales), qui est supposé organiser la

pace, a évolué et est devenu une sorte de langage

mobilité à l’intérieur des espaces urbains. Grâce aux

universel de l’idée de transport.

diverses normes et à la planification urbaines, les communes et le ministère des Transports doivent travailler ensemble pour que la mobilité des citoyens soit la plus confortable possible. Renato Ortiz a réfléchi sur les liens historiques entre l’espace et un capitalisme qui discipline le travail et rationalise le temps : le temps (performance nécessaire au capitalisme global) « dépasse, en l’intégrant, la vieille maxime time is money de l’ascétisme capitaliste »  9 . De cette manière, nous pourrions dire que

Fig.1

dans le monde du transport public, les acteurs qui

Panneau de route

interagissent élaborent des tactiques ou des stra-

barrée, 1906

tégies pour rationaliser, contrôler et organiser le temps. Et la vie dans la ville, comme le dit Ortiz, est caractérisée par la tentative des citoyens pour obtenir une maîtrise effective du temps, donc de l’espace. Vu l’évolution des réseaux de communications et leur importance quant à l’amélioration de la qualité de

9.  Renato ORTIZ. Modernidad y espacio. Benjamin en Paris. Grupo Editorial Norma, Bogotá, 2000, p. 79


14

Les cartes sont aujourd’hui très précises, leur langage graphique montre le monde qui nous entoure, des

La ville et sa cartographie

phénomènes de tout ordre s’y manifestent, de la météorologie à la cartographie de l’Internet ou des logiciels d’affichage qui permettent de visualiser la Terre à partir d’images satellites et de photos aériennes – tout cela confère à la carte à la fois une excellente lisibilité et une remarquable suggestion de la réalité. Face à la mémoire topographique de cultures qui ne connaissent pas les cartes, pour qui la notion du territoire réside dans la mémoire et la transmission de l’information de génération en génération, le GPS moderne résoud le problème de la désorientation

Les cartes sont le dessin d’un territoire, d’un par-

dans les grandes villes  10 . Grâce à des appareils

cours, d’une vision du monde et un reflet de son

comme le GPS, la carte est devenue numérique ; elle

évolution. La carte géographique dans sa forme

nous montre où nous sommes et nous dirige vers là

la plus simple n’est pas celle qui aujourd’hui nous

où nous voulons aller.

paraît plus naturelle (la carte qui représente la surface du sol comme vue du ciel).

Les usagers de cartes perçoivent celles-ci comme un miroir graphique de la réalité. Cartes et plans

Les cartes existent depuis l’Antiquité, même si très

se caractérisent par la recherche de l’exactitude.

peu d’entre elles sont parvenues jusqu’à nous. La

« L’inexactitude est un crime cartographique »   11.

production de cartes devint abondante à partir

Mais cette précision n’est pas toujours l’objectif final

du Moyen Age. Les navigateurs réalisaient des

des cartographes puisque, selon les informations

graphiques pour transformer ce qu’ils voyaient en

à délivrer, avoir trop de détails peut empêcher les

informations nécessaires ensuite aux cartographes.

lecteurs de comprendre le message d’ensemble de la carte.

Au XIXe siècle, les progrès techniques permettent d’améliorer la production de cartes. La lithographie

D’un côté plus politique et artistique, la radicalité

permit de les reproduire plus rapidement à moindre

du projet des surréalistes, dans leur proposition

coût. Puis la photographie et le radar améliorèrent

«La Carte du Monde »  12 en 1929, paraît évidente

les relevés topographiques terrestres et sous-marins

;il s’agit d’une carte imprécise, pleine d’erreurs, une

pour que les cartes gagnent en précision afin de

mauvaise carte dans laquelle rien n’était à l’endroit

rendre les déplacements plus efficaces. Plusieurs

où cela devait être, elle n’avait pas non plus taille

types de cartes ont été crées pour décrire les auto-

qu’elle devait avoir.  13 Le monde, pour les surréalistes,

routes qui commencèrent à être construites et car-

était divisé en deux : d’un côté un «ici» détesté, et

tographiées au début du XXe siècle en Allemagne,

de l’autre un «ailleurs» tant rêvé, valorisé en tant

puis dans d’autres pays européens et aux Etats-Unis,

qu’espace mental plutôt qu’en tant qu’espace géo-

avant que le reste du monde ne suive le même modèle. 10 . Estrella DE DIEGO. Contra el mapa: Disturbios en la geografía colonial de Occidente. Siruela, Madrid, 2008, p. 59 11.  John Brian HARLEY. The new nature of maps: essays in the history of cartography. Johns Hopkins University Press, 2002, p. 35 12 . « Le Monde au temps des surréalistes ». in : Variétés, Le surréalisme en 1929. Éditions Variétés, Bruxelles,1929. 13.  Estrella DE DIEGO. Contra el mapa: Disturbios en la geografía colonial de Occidente. Siruela, 2008, p.12


15

graphique. Dans cette carte, nous pouvons voir comment la représentation des choses peut déterminer notre connaissance des autres cultures ; la carte n’est plus qu’une simple description de la superficie de la Terre. Les surréalistes prirent « le rôle de flâneur dans les rues de Paris à celui du voyageur »  14 afin d’interroger la question du pouvoir du cartographe et celle du public qui reçoit l’information. Qui détermine les directions et les distances? Comment être certain d’arriver au lieu que nous cherchions dans la carte? Qu’avons-nous dessiné dans la carte même? Est-il nécessaire de parcourir les distances complètes? Le voyage a-t-il une simple intention de parcourir un espace, dans une direction abstraite qu’il suffit d’intérioriser ? Le visiteur se retrouve d’emblé au milieu d’une carte sans carte, n’ayant que des directions différentes et démultipliées.

14.  Elza ADAMOWICZ. Ceci n’est pas un tableau: les écrits surréalistes sur l’art. L’Age d’homme, 2004 .p 115


16

Les entreprises décidèrent alors de s’associer pour créer un réseau de transport intégré : la Bakerloo

La carte déformée : naissance des plans de métro non géographiques

Railway, la Central London Railway, la City & South London Railway, la District Railway, la Great Northern & City Railway, la Hampstead Railway, la Metropolitan Railway et la Piccadilly Railway devinrent The London Passenger Transport Board (LPTB), aussi connus sous le nom de London Transport à partir de 1933. La mention «Underground» apparaît pour la première fois sur les stations des lignes qui intègrent le réseau au début su XXe siècle. En 1933, Harry Beck publie le premier plan schématique du métro de Londres. Ce dessinateur industriel, employé de l’Underground, avait réalisé que le

L’histoire du développement du tube londonien se

réseau était trop large pour être représenté sur une

déchiffre dans les lignes dessinées que l’on trouve

carte géographique, et qu’il était inutile de locali-

dans les plans successifs du réseau. Initialement, des

ser géographiquement les stations pour changer de

cartes gravées en noir et blanc se voyaient ajouter

station. Il créa alors, en 1931, une carte topologique,

à la main des signes en couleur afin que les entrées

The London Underground Diagram, où la position des

et les sorties des lignes soient visibles : des cercles

stations ne correspond pas à leur localisation réelle.

pour les arrêts, des lignes pour le trajet. Mais c’était

Mais cette carte permit de mieux les situer les unes

approximatif car, en sous-sol, les métros ne prenaient

par rapport aux autres. « En regardant un vieux plan

pas le même chemin que les rues en surface. Les

de l’Underground Railways, je me suis dit qu’il serait

cartes de la ville étaient mises à disposition des

possible de mettre un peu d’ordre en rajustant les

voyageurs, soit sous formes de panneaux, soit en

lignes, en expérimentant avec des diagonales et en

édition de poche, voire à l’occasion de la publi-

égalisant les distances entre les stations »  15 . Face à

cation d’événements. Mais, malgré l’exactitude des

la proposition de Beck, la compagnie qui dirigeait

cartes par rapport à la surface et à la position des

alors le réseau fut d’abord sceptique. Mais lors d’une

bâtiments,

trajet d’une ligne de métro

distribution de cartes miniatures aux usagers, en

souterrain était difficile. Dans la deuxième moitié

situer le

1933, le succès fut tel que le plan d’Harry Beck fut

du XIXe siècle, la concurrence entre des compa-

adopté. Il est depuis cette année-là le plan officiel

gnies privées chargées de construire les principales

du tub e londonien. Beck continua à dessiner le plan

lignes du métro obligeait les usagers à parcourir de

du métro londonien jusqu’à son décès, en 1960. Ce

grandes distances à pied pour changer de stations.

plan fut plusieurs fois modifié dans les années sui-

Ces usagers avaient donc besoin de se repérer pour

vantes, comme en 2002 lorsque les zones tarifaires

ne pas se tromper de ligne. Pour informer adéqua-

furent intégrées dans la carte pour aider les usagers

tement les usagers, chaque entreprise avait fait un

à mieux mesurer les coûts des tickets. Malgré ces

plan différent mais aucune d’entre elles n’avait de

modifications, le plan originel de Beck reste encore

connections avec les autres lignes. La confusion

la base du plan moderne de l’Underground.

était évidente : l’ensemble des plans était difficile à déchiffrer pour les usagers.

15.  ‘Looking at an old map of the Underground railways’, he said, ‘it occurred to me that it might be possible to tidy it up by straightening the lines, experimenting with diagonals and evening out the distance between stations’- Entretien avec Harry Beck.


17

The London Underground Diagram est une carte clas-

phie comparée des différents plans de métros où

sique où le design graphique met en évidence

les cartes sont considérées comme des galaxies dans

des changements de mentalité liés à la modernité

les villes  18 . La carte de chaque réseau métropolitain

– simplicité et universalité. Le plan du réseau n’est

varie selon les caractéristiques des modes de dépla-

pas vraiment fidèle à la réalité géographique. Les

cement – il y a de nos jours plus de cent réseaux.

correspondances et les différentes lignes forment

Le style de Beck a au fur et à mesure influencé le

un réseau presque abstrait du monde souterrain

design graphique des plans des réseaux ; on peut

de Londres, où la fonctionnalité crée un nouveau

néanmoins constater de multiples différences parmi

langage cartographique spécifique. De la première

ces plans, le seul point commun étant la représenta-

carte du réseau souterrain en 1908 à la création de

tion des itinéraires sous forme de ligne droites, les

Beck, se trace l’histoire du premier métro qui sera

correspondances entre deux lignes étant représen-

l’exemple puis l’icône cartographique des réseaux

tées par des cercles plus gros. Nous appelons ce

de transport en commun. Lors de cette période,

type de représentation « le design graphique des

l’ajout de symboles, d’étiquettes, de traits mais aussi

plans de métro  19 ».

la simplicité commencèrent à être remis en question. Les graphistes-cartographes firent des éditions

Il faut concevoir ces plans de telle manière que soient

plus pratiques afin de faciliter les déplacements: la

visibles, au même moment, une cartographie et un

modernité était partout.

point de vue graphique. Habituellement, la carte du métro est présentée comme une carte géographique

Aujourd’hui, les personnes qui habitent ou travaillent

d’une ville où sont inscrits l’emplacement de toutes

dans les grandes métropoles utilisent régulièrement

les stations. Seules quelques villes restent fidèles à

les transports en commun de la ville. Ces voyages

la géographie en superposant (en jouant parfois sur

quotidiens leur ont fait recréer une image de leur

un contraste coloré) le réseau des lignes de métro

propre parcours. La mémorisation des trajtes résulte

sur le plan de la ville. Plus grand est le réseau de

d’une longue expérience liée à la vie familiale et

métro, plus utilisés sont des plans schématiques  20 .

au travail .   16

Le grand avantage des plans schématiques consiste La carte tire son origine dans le fait que les indi-

en sa liberté au moment de jouer avec l’échelle et

vidus doivent se déplacer d’un endroit à un autre,

diminuer la sinuosité des trajets des lignes de train

ce qui les oblige à décrire le chemin parcouru puis

que nous avons normalement dans une carte géo-

à sauvegarder ces informations une foius revenus

graphique. Ce qui est important c’est la destination,

à la maison. Les histoires de vie, tout comme les

non le chemin. C’est ainsi que les plans de métro

parcours mythiques de ceux forcés par les circons-

peuvent réorganiser une carte confuse.

tances à abandonner leur lieu d’origine, modifient les lectures habituelles des cartographies  17. De cette

Puis les plans schématiques se diversifièrent pour

façon, chaque voyageur est le propre cartographe

d’autres réseaux de transport. Les schémas sont

de son parcours.

adaptés aux réseaux souterrains ou à la circulation routière, mais sont peu utilisés pour représenter les

Un livre présenté à Barcelone en 2008, qui est une

lignes de tram ou bus par exemple  21.

étude sur 28 grandes métropoles possédant un réseau souterrain de métros, propose une cartogra-

16.  Michel PINÇON et Monique PINÇON-CHARLOT. Sociologie de Paris. La Découverte, 2010, p. 14 17.  Estrella DE DIEGO. Contra el mapa.p.43

18.  Josep PARCERISA et María RUBERT DE VENTÓS. Metro: galaxias metropolitanas. Université Politecnique de Catalunya, 2002. 19.  Martin NÖLLENBURG. Automated drawing of metro maps. Université Karlsruhe, Faculté d’Informatique, 2005, p. 19 20.  Ibid, p. 20 21.  Alastair MORRISON. «Des différences entre les plans des transports publics en France, en Allemagne et en Espagne». Mappemonde, 1995, vol. 3, no 95, p. 23-29.


18

Aujourd’hui, ces plans se sont diversifiés et banalisés grâce aux outils informatiques mis à disposition de tous. Dès les années 1960, il y eut une de plus en plus d’artistes qui se mirent à travailler avec des cartes ; les gabarits des cartes se sont dispersés dans le monde artistique  22. Le détournement des cartes schématiques pour faire de l’art, des infographies avec « l’style métro » et tant d’autres objets touristiques font partie des représentations de la vie urbaine. Pourtant, pour se déplacer en ville, sortir d’une station souterraine et puis regarder la surface pour essayer de trouver la destination souhaitée, n’est pas toujours évident. Des bâtiments toujours identiques et des médias aussi identiques effacent le principe même de territorialité ; cela nous empêche de nous orienter. Mais les signalétiques présentes dans les villes comme les enseignes, les panneaux, les plaques et autres formes nous donnent de l’information qui doit interagir avec les cartes. Il est certain que quand nous recherchons dans une carte, ce que nous voyons c’est le nom propre de chaque endroit. Leur particularité, qui sera affichée, sera l’aboutissement d’un parcours.

22.  Katharine HARMON. The Map As Art, : Contemporary Artists Explore Cartography. Princeton Architectural Press, 2009, p. 9


19

Fig.2 Frederick H. Stingemore. Map Of London’s Underground Railways, 1927

Fig.3 Harry Beck. Schéma de poche Underground,1933

Fig.4 Plan du réseau du métro de Shanghai pour l’Exposition de Shanghai, 2010


20


21

Les dispositifs d’information dans l’espace

Chaque lieu a un nom, selon sa particularité, son histoire, etc. Les chemins, au moment de relier l’espace, signale des destinations, des distances. Les dispositifs d’information routière existent depuis la création même des chemins. Des jalons romains au GPS, leur évolution est remarquable. Les gens ont une tendance à penser aux destinations et aux points d’origine : ils avaient envie de savoir d’où venaient les chemins d’accès et où ils menaient. Des chemins d’accès avec origines simples et connus avaient des identités plus fortes, permettaient de relier la ville et donnaient à l’observateur un sens de ses repères, chaque fois qu’ils les traversaient  23 . Tant aujourd’hui qu’au Moyen Age, voir les nombreux signes multidirectionnels aux intersections des voies et avec des marqueurs de distance aux villes est courant. Mais, à travers le temps, nous avons constaté que ces connections sont devenues de plus

23 . LYNCH, Kevin. The image of the city. MIT press, 1960, p. 54


22

en plus complexes, surtout à partir de la Révolution

pas les caractéristiques nécessaires pour éviter les

industrielle. Voitures, vélos, bus, etc., ont envahi les

reflets – les premières solutions à ce problème furent

voies et leur vitesse devint également un danger.

développées par la compagnie 3M en 1940, puis améliorées vers 1989  26 .

Vers la fin des années 1870 et le début des années 1880, les organisations de cyclisme commencent à

Peu à peu, chaque pays a adopté la signalétique

ériger des panneaux de signalisation pour avertir

routière en utilisant des symboles internationaux

des dangers potentiels le long des artères .

pour décrire les conditions routières, les limites de

24

vitesse et d’autres informations. Selon Jérôme Dennis, Il fallut attendre l’invention de l’automobile pour

cette tendance à la standardisation dans la signa-

que les panneaux de signalisation deviennent plus

létique repose sur l’idée que les gens se retrouvent

importants. À partir de ce moment-là, le réseau

plus facilement s’ils retrouvent la même forme tout le

autoroutier continue son développement jusqu’à nos

temps. Il est alors impératif de créer des standards:

jours. Les autoroutes ont été conçues pour assurer

faire que les éléments utilisés soient identiques sur

une sécurité maximale, si les règles sont respectées.

l’ensemble du réseau autoroutier, dans une série de

En 1895, le Touring Club italien conçut l’une des

gares ou dans le métro et c’est comme ça que les

premières versions du code de la route. En 1908, le

usagers vont se repérer. Ce choix autant graphique

premier Congrès international de la route qui eut

que politique fait du signaléticien un opérateur de

lieu à la Sorbonne adopta notamment le principe

stabilité et d’ordonnancement du monde  27.

des premiers panneaux de signalisation – ce fut un moment-clé dans le déveoppement des panneaux

La signalétique se standardise et nous pouvons voir

routiers . L’information mise sur les panneaux n’est

comment les aéroports, par exemple, ont des associa-

pas seulement donnée pour se repérer, mais pour

tions internationales professionnelles pour régler les

respecter les parcours des autres.

problèmes de la signalétique aéroportuaire. Puis les

25

entreprises de signalétique ont instauré des codes : Peu après, en 1909, plusieurs gouvernements européens ont

des genres de typos à utiliser, les emplacements des

convenu de l’utilisation de quatre symboles picturaux indi-

éléments, les matériaux, etc. Le cas de la signalé-

quant « bosse », « courbe », « intersection » et « passage à

tique du métro est particulier car elle a évolué entre

niveau scolaire ». Entre 1926 et 1949, les gouvernements ont

un objet qui servait essentiellement pour des raisons

travaillé sur l’adoption internationale d’un code de la route.

de sécurité à faire sortir les gens vite et efficace-

Par rapport aux matériaux utilisés pour construire des

ment. Puis avec la complexification des réseaux de

panneaux de signalisation, la pierre, le bois puis le

transport, elle devait présenter des correspondances

fer ont été les plus courants. Au milieu du XXe siècle,

et la sortie vers la ville.

l’aluminium et d’autres matériaux ont progressivement remplacé les anciens matériaux car ils étaient plus

D’autre part, la technologie a apporté plus d’outils

simples à travailer et moins chers. Les couleurs des

à la signalétique: aujourd’hui les voyageurs peuvent

panneaux ont aussi changé à travers le temps. Les

voir des panneaux électroniques aériens, des

codes couleur comme celui du danger, ou ceux qui

écrans, etc. Ces signes peuvent clignoter et peuvent

fonctionnaient mieux le soir pour devenir un fond de

être mis à jour instantanément par ordinateur afin

lettrage pour les messages devaient être tenus en

de refléter l’évolution de la situation de la route, par

compte au moment de concevoir un panneau. Bien

exemple. Cependant, la signalétique ne donne pas

évidement, les premiers panneaux ne possédaient

seulement des directions ou des interdictions, elle

24.  J. BURNEY. Road Sign History – Filled with Twists and Turns. Municipal Supply & Sign Co. Florida. Blog. 2011. http:// municipalsigns.com/wordpress/2011/10/road-sign-history-filledtwists-turns/

26.  J. BURNEY.Road Sign History – Filled with Twists and Turns. Municipal Supply & Sign Co. Florida. Blog. 2011. http:// municipalsigns.com/wordpress/2011/10/road-sign-history-filledtwists-turns/

25.  Mathieu FLONNEAU. Paris au cœur de la révolution des usages de l’automobile 1884-1908. Histoire, économie & société 2/2007 (26e année), p. 61-74.

27.  Samuel GOETA. Lisibilité urbaine et signalétique du transport parisien [Entretien avec Jérôme Denis] Urbanews.fr, 10 juillet 2012.


23

s’est multipliée partout, dans les lieux de transport comme dans les lieux publics. Elle est devenue une interface entre l’individu et le monde, une annonce publicitaire, une offre politique. Où est-elle en train de nous emmener ? L’installation de la signalétique varie selon les individus qui vont l’utiliser. D’abord sous forme de signes institutionnels pour gérer les flux et pour annoncer des éventuels problèmes en chemin. Cette signalétique fait alors partie de l’aménagement du réseau de transport. Le deuxième type d’informations correspond aux signes mercantiles, aux affiches – aux élément qui se font de la concurrence entre eux. Et c’est pour cela que la standardisation des signes est si importante. En fonction de l’usager, la signalétique lui permet de prendre connaissance des différents services proposés et de leur localisation (fonction d’orientation); puis de savoir, durant son parcours, s’il est sur le bon chemin (ajustement de la direction) et de savoir, à la fin de son parcours, s’il est bien arrivé à la destination désirée (identification). L’usager doit reconnaître tout de suite comment se repérer mais aussi s’informer. Le processus de mise en place des panneaux institutionnels et le réglement sur la quantité de publicité autorisée dans n’importe quel lieu public ne font pas forcément appel à des normes identiques puisque chaque rue ou chaque station ne sont pas tout à fait identiques. Pourtant, cette situation sort de l’activité de maintenance ordinaire  28 . La signalétique est aussi un outil d’articulation et de tricotage des réseaux de transport avec la ville : on indique dans les réseaux de transport ce qu’on peut trouver de la ville et dans la ville ce qu’on peut trouver des réseaux de transport.

28  DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro. 1ère éd. Paris : Transvalor- Presses des MINES, 2010, p. 131


24

“L’histoire de ce qui est considéré par tous comme étant le premier panneau routier s’inscrit encore dans

Le langage graphique : des phrases aux pictogrammes

la préhistoire de la signalétique : il s’agit d’un acte apparemment spontané, ne participant pas encore à la conception d’un système global de circulation. Il est antérieur à l’apparition de l’automobile. Sa forme figurait les mâchoires de frein à sabot des attelages. C’est la première forme iconique, et non verbale, d’une signalisation routière que l’on connaisse, représentant le geste à accomplir pour éviter la perte de contrôle du véhicule avant de s’engager dans une descente. Il était peint sur les rochers bordant les routes de montagne en Suisse et en Autriche, régions touristiques dont la langue n’était pas forcément connue de tous les voyageurs”  30 .

Comme les cartes, le langage avec lequel la signalétique communique a évolué selon la nécessité de

C’est

l’origine

des

pictogrammes

contemporains.

transmettre des messages aux différents moments de

Comme nous l’avons vu, l’évolution de la signalétique

l’histoire.

est fortement liée à l’essor de l’automobile à la fin du XIXe siècle. Mais la première production de panneaux

Si au début de l’existence humaine les images de l’art

picturaux émerge de l’action des clubs et des asso-

rupestre étaient le seul moyen de communication,

ciations : une émanation spontanée des populations

ils est proche de ce que nous pouvons comprendre

locales, tel le panneau apparu dans les montagnes

grâce à la signalétique. L’un des plus importants

suisses. Les premiers signaux internationaux émergent

concepteurs du langage graphique, Otto Neurath,

en 1909 avec déjà pour mission de dépasser la bar-

explique comment les hiéroglyphes et d’autres inscrip-

rière des langues  31.

tions murales furent une source d’inspiration pour son travail : « J’ai regretté que l’ancienne écriture pictogra-

Otto Neurath a réfléchi sur un langage d’images et

phique soit progressivement tombée en désuétude au

c’est comme cela que son fameux langage pictural,

lieu de devenir la base d’une langue pictographique

l’ISOTYPE, International System Of TYpographic Picture

internationale capable de rassembler tous les peuples

Education, fut conçu. Avec l’aide du graphiste Gerd

du monde » .

Arntz, qui s’est joint au projet in 1927, Neurath déve-

29

loppe des graphiques de données, un affichage visuel Les signes de l’alphabet sont abstraits : seule l’instruc-

qui transforme l’information quantitative en statistiques

tion dans une langue déterminée peut aider à com-

picturales  32. Ce qui est important dans le projet d’édu-

prendre le message. La division entre les personnes

cation visuelle de Neurath est l’utilisation pragmatique

qui savent interpréter les signes d’un langage écrit et

des signes qui se sont par la suite popularisés dans le

les autres crée de l’incompréhension et est source des

domaine de la signalisation publique et de l’informa-

conflits. De même pour les inscriptions qui étaient dans

tion graphique.

les chemins qui reliaient les villes. Seuls les panneaux de signalisation et des institutions étaient un outil fré-

Ce langage de signes graphiques utilise des picto-

quent utilisé dans les rues depuis le Moyen Age.

grammes pour représenter des objets concrets qui

29.  NICHOLSON et WATSON. Otto Neurath : From HIEROGLYPHS to ISOTYPES en Future Books N°III “The Crowded Scene”,1946, p.96

30 . Brigitte CAMBON DE LAVALETTE. La signalétique dans le réseau des déplacements routiers : histoire et fonction in Actes INRETS n°73, 2001, p. 6 31.  Emmanuelle BORDON . L’interprétation des pictogrammes: approche interactionnelle d’une sémiotique. Harmattan, 2004, p. 34 32.  Frank HARTMANN. “Visualizing Social Facts: Otto Neurath’s ISOTYPE Project”. European Modernism and the Information Society: Informing the Present, Understanding the Past, 2008, p. 279.


25

servent à communiquer des idées. Aujourd’hui, un

culières de police; de donner des informations relatives

pictogramme est une représentation graphique sché-

à l’usage de la route (…).Tous les autres matériels de

matique, un dessin figuratif stylisé faisant fonction

signalisation non soumis à homologation doivent avoir

de signe : un dessin schématique désignant le plus

reçu un avis favorable à l’emploi”  36 . Michelin continue

clairement possible une direction, une fonction ou

cependant sa production de panneaux jusqu’en 1971,

une action . Les pictogrammes sont très utilisés dans

mais ils ne portent plus aucune mention publicitaire.

33

de très nombreux domaines : cartes géographiques, météo, routes, transport, tourisme, informatique, télé-

Texte et pictogrammes coexistent lorsqu’il s’agit de

phonie, santé, sécurité, chimie, produit ménagers, etc.

transmettre l’information. La standardisation des messages universalise quelques langues plus courantes,

Deux genres de signalétiques peuvent être distingués :

surtout l’anglais, au profit des passants qui ne parlent

ceux qui se basent sur du texte et ceux qui se basent

pas la langue locale. Pour diminuer les controverses

sur des icônes. Vers la fin su XIXe siècle, le seul moyen

accompagnant le choix des langues d’affichage, la

que la signalétique avait pour communiquer était le

signalétique commence à réduire la quantité de texte

texte. La taille et la longueur des phrases de ces pan-

ou le remplace par des pictogrammes. Des panneaux

neaux de réglementation sont aménagées d’une façon

additionnels appelés « panonceaux » sont destinés à

désordonnée. Par exemple, en France, André Michelin

donner aux usagers des indications complémentaires à

va rapidement se montrer comme un véritable pionnier

celles du panneau principal. Ils portent des indications

de la signalisation routière sur laquelle il travaille dès

et des symboles relatifs à la réglementation du station-

1908 . Des phrases telles que « Merci » et « veuil-

nement, de l’arrêt, des flèches de direction, etc. Les

lez ralentir », tout comme la désignation des numéros

pictogrammes, bien sur, n’ont pas besoin d’être traduits.

34

de route et le nom de la localité, étaient offertes et placées gratuitement avec le nom « Michelin » dessus.

Le choix sur qui va dominer l’ensemble d’un système signalétique quelconque dépend du but de cette

Les formes des panneaux varient d’une ville à l’autre,

information et à qui elle est donnée. Par exemple,

la fin d’une zone à vitesse limitée n’est pas indiquée,

en 1972 les sociétés d’autoroute commandent à Jean

les panneaux sont surchargés d’inscriptions, de publi-

Widmer une signalétique pour les autoroutes du

cité… Bref, ils sont difficiles à lire par les conducteurs.

sud de la France afin de rompre la monotonie des

Pour faire face à ces inconvénients, en 1946 paraît une

trajets en voiture. Sa lecture se présente comme un

instruction générale sur la signalisation routière qui

jeu : la question est posée par le pictogramme et la

annule toutes les instructions antérieures. “De 1607 à

réponse est donnée par un texte, 300 mètres plus

1851, nombreux furent les décrets et les ordonnances

loin, à l’aide du caractère Frutiger de couleur blanche

qui la réglementèrent de près ou de loin. La loi du 30

sur fond brun. « Le travail subtil et laborieux de la

mai 1851 sur la police des roulages et des messageries

signalétique est le deuxième point fort de Widmer (…)

publiques ainsi que les premières règles relatives au

On terminera par les 550 pictogrammes qui jalonnent

croisement et au dépassement des véhicules, datées

les autoroutes, décriés puis copiés, animant le trajet

du 10 août 1852, peuvent être considérées comme les

comme des lutins de la découverte. Widmer les a

ancêtres de notre code de la route” . Homogénéité et

peaufinés en s’amusant comme un enfant appliqué

cohérence des panneaux sont désormais de rigueur.

pour qu’on puisse lire le cerf, le pont, l’église et ce que

“La signalisation routière a pour objet : de rendre plus

l’on va trouver dans son assiette à 100 km/heure »  37.

35

sûre la circulation routière; de faciliter cette circulation; d’indiquer ou de rappeler diverses prescriptions parti-

33.  http://fr.wiktionary.org/wiki/pictogramme 34.  Marina DUHAMEL-HERZ. Un demi-siècle de signalisation routière en France, tome 1. Naissance et évolution du panneau de 1894 à 1946. Presses de l’Ecole Nationale des Ponts et Chaussées. Paris, 1994 35 . Alain GALOIN. « Les embarras de la circulation en 1643- 1945» L’Histoire par l’image.org. (Réunion des musées nationaux, de France) http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_detail.php ?i=636&d=1&m=signalisation&id_sel=1093

36. Arrêté du 7 juin 1977 relatif à la signalisation des routes et autoroutes Journal officiel de la République Française 13 août 1977. 37  CUVELIER, PASCALINE. Un signe de Jean Widmer. «Jean Widmer, un écologiste de l’image» en Libération.fr, 29 novembre 1995.


26

Fig.5 Otto Neurath. Gerd Arntz. Symbols of pictorial statistics (symboles des statistiques picturales)


27

Fig.6

Fig.7

Signalétique du

Métro de New

Forum La-Caixa.

York. Pictogrammes

Barcelone

d’interdictions

Fig.8 Pictogrammes standard

Fig.9 Valmetro, métro de Maracaibo, Venezuela. Plan schématisé de la ligne 1

Fig.10 Métro de Mexico D.F. Plan schématisé de la ligne 12


28


29

Le transport en commun en site propre et sa signalétique

La rue n’est plus conçue pour la voiture mais pour les piétons et le transport collectif qu’ils utilisent. Dans ces systèmes, l’interdépendance entre les divers éléments des réseaux – véhicules, voies, stations, signalétique – dont chacun contribue à l’ensemble qu’ils constituent, crée une nouvelle relation entre les usagers et son environnement : ils créent une expérience de la vie urbaine. C’est pourquoi on peut trouver des grandes rues ayant des couloirs réservés aux bus et taxis, puis des voies qui bénéficient uniquement aux transports évoulés (métros, tramways, etc.). Ces systèmes ont un équipement et une signalétique spécifiques.


30

à sa destination. C’est là que la signalétique doit configurer l’espace et faciliter l’accès à l’information.  38. Et, quel que soit la solution retenue, il est nécessaire que celle-ci

Au-dessus :

soit reproduite à l’identique ou de façon cohérente.

des bus et des

Les équipements d’information voyageurs servent à présenter l’offre globale des moyens de transports, à savoir

tramways

les numéros de lignes et leurs destinations, le nom des arrêts, les schémas des lignes, le plan du réseau, les horaires et les tarifications. La lisibilité de ces informations dépend de la taille des caractères utilisés, de l’éclairage et des contrastes de couleurs, ainsi que l’information dynamique (moniteur vidéo, afficheur à diodes électroluminescentes, éclairé ou non, etc.), visuelle ou sonore.

Les omnibus et les tramways, plus confortables que

Les arrêts doivent avoir une présence physique dans

les carrosses mais encore tractés par des chevaux, ont

l’espace et disposer d’un équipement minimum de signa-

évolué dès la fin du XIXe siècle. Les tramways sont des

lisation, à l’abri des agressions climatiques (vent et pluie).

grands véhicules à traction électrique circulant

voies

L’information fournie doit être d’actualité (horaires, plans

ferrées la surface des villes, tandis que les bus, en tant

de lignes...). Par ailleurs, l’information doit être visible –

que véhicules automobiles, se déplacent un peu plus

comme le bouton de demande d’arrêt et d’ouverture de

librement. Ces deux types de véhicules sont des systèmes

porte, un rappel visuel de demande d’arrêt, des compos-

de transport soit en voie propre, soit implant dans les rues

teurs sans contact ou avec ticket, des plans de ligne et un

pour éviter des embouteillages et de telle sorte que les

pictogramme qui signale un espace handicapées.

piétons puissent traverser en toute sécurité. Il est intéressant de voir comment les tramways sont de Les bus sont utilisés de préférence pour les lignes régu-

retour: ils utilisent de l’électricité, ont plus de capacité que

lières urbaines tandis que les lignes interurbaines uti-

les bus pour mobiliser des personnes aux pires moments

lisent plutôt des cars. La place du tramway est là où la

de la journée et sans faire du bruit ! C’est très pratique

fréquentation potentielle est trop importante pour être

et touristique, notamment pour les centres historiques des

absorbée par un bus et trop faible pour justifier les coûts

villes  39.

élevés d’un métro. L’infrastructure du tramway permet, à terme, la réalisation de lignes de tram-train. Les choix du modèle de bus ou tramway sont faits en fonction des points d’arrêt de la ligne, de la ville ou de l’agglomération. Pour se déplacer, un voyageur doit normalement se renseigner pour préparer son voyage; se rendre au point d’arrêt; repérer le bon véhicule; monter à bord; se déplacer à l’intérieur du même véhicule; payer le voyage; s’asseoir et se lever; s’informer sur le trajet en cours; faire une demande d’arrêt; descendre et finalement se rendre

38  DEJEAMMES, M., ARMENI, A., et RAMBAUD, F. Les bus et leurs points d’arrêt accessibles à tous. Guide méthodologique. TRANSPORT ET MOBILITE, 2001, p. 54 39  ACUÑA, Virgilio. ¿Por qué dejamos que desaparecieran los tranvías de Lima? En virgilioacuna.com, 29 avril, 2010


31

Pour réussir un voyage en métro, un voyageur doit : situer son point de départ et son point d’arrivée,

Au-dessous : le chemin de fer métropolitain

découvrir le nom des stations de métro les plus proches, définir une ligne, un croissement de lignes, une autre ligne... et mémoriser ces informations. Au départ, il doit trouver dans la rue la station de métro, acheter le bon billet, découvrir le bon couloir, le suivre jusqu’au bon quai en fonction des informations mémorisées, reconnaître les stations où il doit descendre et enfin suivre le bon couloir de sortie. Finalement, c’est ici que les plans géographiques sont utiles, au moment de retourner à la réalité de l’extérieur.

Le premier projet de construction d’un réseau ferré

Le système doit créer des liens entre la superficie et

souterrain fut conçu à Londres et il remonte à 1830.

ses stations, entre les lignes et le plan. Pour identifier

Pourtant la première ligne du tube ouvre finalement

ce choix dans les couloirs et les quais, «il semble

en 1863. Depuis cette époque, l’aménagement des

que la redondance chiffre + couleur soit la solution

métros souterrains a évolué et s’est intégré à la vie

la moins mauvaise, surtout si le même code se trouve

quotidienne des usagers qui s’en servent pour se

sur le plan, dans les couloirs, sur les quais»  41. Des

déplacer.

messages dans les couloirs servent à rassurer l’usager sur le chemin emprunté. La lecture du nom de la

Normalement, les usagers du transport public dans

station et sa personnalisation (caractéristiques archi-

la surface de la ville ont une idée sur leur position.

tecturales de la station, des décorations murales)

Il peut alors être troublant de regarder des plans

sont très utiles pour éviter de manquer l’arrêt.

des réseaux souterrains où les choses sont montrées d’une autre façon. Au-dessous, le voyage est perçu

Un bon plan de métro est fait pour établir des iti-

comme plus direct : le trajet va du réticulaire au

néraires  42. Néanmoins, pour une grande partie des

linéaire, comme si le dessin des schémas a tracé le

usagers, ce type de schéma peut être aussi utile

chemin. Cette sensation demeure dans les schémas

pour planifier des trajets, même dans les réseaux à

des plans de métro actuels. Selon Jean-Didier Urbain,

la surface des villes.

le train est « un lieu utopique, univers suspendu, un espace initiatique où nul n’est vraiment chez lui, ni

Il y a différentes manières de donner l’information

l’étranger, ni l’autochtone » . Le voyageur désorienté

dans la signalétique du métro : New-York est par

se pose alors un problème de cheminement : il faut

exemple le cas typique d’une signalétique qui écrit

définir une ligne. Le danger est de se tromper de

tout alors que d’autres signalétiques condensent le

ligne ou de construire un parcours trop long. La

message en utilisant des pictogrammes. Pour des

topographie exacte, comme nous l’avons vu, est ici

textes de signalétiques, la clarté est la base de la

plus qu’inutile – elle est même source d’erreurs.

communication. Pour éviter le risque de mauvaise

40

lecture, une typographie linéale facilite la lisibilité à distance. Cette expérience est aussi prise du métro londonien, qui commença à utiliser une typographie 40  URBAIN, Jean-Didier. L’idiot du voyage: histoires de touristes. Plon, 1991, p. 202

41  GOLEDZINOWSKI Felicia. Signalisation et désorientation dans le métro. En: Communication et langages. N°55, 1er trimestre 1983. p. 69 42  NÖLLENBURG, Martin. Automated drawing of metro maps. Universität Karlsruhe, Fakultät für Informatik, 2005, p. 20


32

unique et un logo pour tout le réseau avec la police sans serif qu’Edward Johnston conçut pour l’Underground en 1916. Une politique globale de réseau vise à assurer au mieux les correspondances. Dès lors, des pôles d’échanges sont crées pour articuler des réseaux de différents modes de transport de voyageurs. Cette politique – assez récente – initie l’unification de la signalétique institutionnelle de chaque réseau pour qu’elle devienne la signalétique du transport publique de la ville. Jean-Didier Urbain nous explique qu’on assiste aujourd’hui à une homogénéisation des lieux. Les réseaux de transport se déclinent de façon similaire à travers le monde. Ils limitent les efforts et le temps pour parvenir aux destinations choisies. Puis de nouveaux espaces apparaissent entre les mailles du réseau nouvellement créé.  43

43  Jean-Didier URBAIN, . L’idiot du voyage: histoires de touristes. Plon, 1991, p. 94


33

Fig.11 Station Sol, mĂŠtro de Madrid


34


35

LE DEVELOPPEMENT DU TRANSPORT EN COMMUN DANS LES VILLES D’AMERIQUE LATINE


36

Au cours des dernières décennies, les villes d’Amé-

réseaux de transport public est alarmante : les

rique Latine ont eu des grands changements de

infrastructures sont inadaptées et en mauvais état,

dimension et d’organisation urbaine. C’est surtout

la saturation du trafic génère de la pollution et

les alentours de la ville qui ont été progressivement

provoque aussi d’autres nuisances tels que le bruit,

occupés sans contrôle, ni planification. Derrière ces

des problèmes de circulation des piétons, etc. Les

phénomènes se retrouvent les différences sociales

villes ont laissé les transporteurs privés prendre le

et économiques, tout comme l’impuissance de l’Etat

contrôle des rues. Cette situation augmente le prix

et des institutions en charge des problèmes urbains.

du transport et le nombre des compagnies qui font

Nous retrouvons une séparation entre les pavillons

les mêmes trajets, saturent les rues et font encore

des riches, les bidonvilles et des zones d’habitat pré-

perdre des usagers au profit de la moto ou de la

caire issues de l’exode rural. Le transport public, en

prolifération d’operateurs non régulés du secteur

étant le principal moyen – ou du moins la seule al-

privé. Les axes routiers sont d’habitude bouchés

ternative – pour accéder à un travail, à l’ééducation,

pendant des heures.

à la santé ou au divertissement, peut aussi générer et approfondir les inégalités déjà présentes. Depuis

L’Agence Française de Développement (AFD), par

2008, la moitié des habitants de la planète vivent

exemple, appuie financièrement les équipes d’ur-

en ville et, sur les 21 villes les plus peuplées du

banisme des différentes villes d’Amérique Latine.

monde, 15 sont des villes du « Sud » . En Amérique

L’expertise technique et l’expérience des institutions

Latine, la population est très jeune, avec un taux de

comme L’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR) et le

fécondité très élevé. La situation de manque de ser-

groupe SYSTRA (RATP, SNCF) identifient des pro-

vices de transport massifs alors aura une tendance

blématiques et suggèrent des stratégies de déve-

à s’aggraver.

loppement du transport urbain. Des projets euro-

1

péens comme le TURBLOG WW font des échanges Le premier pays de l’Amérique latine à utiliser le

d’expériences et de bonnes pratiques de logistique

métro fut l’Argentine : le Subte circule depuis 1913

urbaine  3 .

à Buenos Aires. 28 grandes villes comme Mexico et Guadalajara au Mexique, Saõ Paulo, Rio de Janeiro

Le métro de Mexico DF fut ainsi développé par

et Curitiba au Brésil et Santiago au Chili, ont aussi

SOFRETU (ancien nom de SYSTRA) vers la fin des

avec des réseaux de métro souterrains ; d’autres

années 1960. Le réseau est aujourd’hui composé de

villes sont en train d’en construire.

11 lignes. L’aménagement signalétique du réseau utilise beaucoup de pictogrammes pour indiquer les

On trouve deux modèles de transport public en

noms des stations « tout en constituant un langage

Amérique Latine : un qui est plus règlementé (Brésil

universel aisément compréhensible par un public

et Costa Rica), et d’autres faiblement réglementés .

international, mais surtout repérables par la partie

Dans ces derniers, les mairies n’ont pas le contrôle

de la population qui ne sait pas lire, ils s’inspirent

du système mais délivrent des permis de conduire

largement des traditions culturelles mexicaines »  4 .

pour les véhicules de transport collectif. De multiples

Mais, malgré l’ajout d’un système de bus de haut

sociétés de transport sont alors en concurrence pour

niveau dès 2005 et des projets de tram, cette ville,

prendre des usagers dans les rues.

avec ses 21 millions d’habitants, est la troisième ville

2

la plus congestionnée du monde  5 . Pour les villes où le métro n’existe pas ou n’est pas encore étendu sur tout le territoire, la situation des

1  LATTES, Alfredo. Urbanización, crecimiento urbano y migraciones en América Latina en CARRIÓN, Fernando. Población y Desarrollo, Tendencias y Desafíos, 1995, p. 50 2  Corporación Andina de Fomento (CAF) Desarrollo urbano y movilidad en América Latina, Editorial Norma Color, Panamá 2011, p. 310

3  http://www.apur.org/activites-internationales 4  ROUARD, Margo. Autoroutes et graphisme. Entretien de Jean Widmer en TALLON, Roger (ed.). Roger Tallon: itinéraires d’un designer industriel. Centre Georges Pompidou-Ircam, 1993, p. 65 5  L’étude mondiale d’IBM sur la pénibilité des trajets quotidiens http://www.ibm.com/news/ca/fr/2010/06/30/c674440r68001f08.html


37

Dans la ville de Bogota en Colombie, un système

Fig.12

de bus express circulant en voies propres, le

Accès d’une station

“TransMilenio”, est installé en 2000 avec le soutien

de métro de Buenos

de l’entreprise anglaise de transport Steer Davies

Aires avant 2005

Gleave (SDG). Son succès inspire d’autres villes non seulement en Colombie mais aussi au Mexique, Brésil, Venezuela et Chili. Pourtant le TransMilenio est si saturé que dans les plus grandes stations 30 minutes peuvent passer avant que les passagers n’aient accès à un bus. Le service a du augmenter son prix aux heures de pointe pour dissuader les usagers de l’emprunter. Voir dans cette ville des calèches à cheval circuler encore aujourd’hui parmi les voitures n’est pas non plus un signe d’ordre du transport urbain. Le Subte à Buenos Aires n’a pas pu suivre le développement urbain des quartiers du centre ville, même s’il fut le premier à circuler en Amérique Latine. Les lignes n’ont pas assez d’arrêts proches des lieux de travail, les habitants doivent alors se mobiliser autrement. Le système a été privatisé par la société MetroVías en 1993. L’instauration d’une nouvelle

Fig.13

signalétique du métro, l’ajout de la télévision et du

Accès de la station

Wi-Fi dans les stations, comme le renouvèlement des

Acoyte après le

véhicules de la ligne A, en témoignent . Les réseaux

renouvellement de la

de transport sont encore en train de suivre les pas

ligne A du métro de

du développement des réseaux européens, mais en

Buenos Aires

6

envisageant un aménagement et des dispositifs de signalétique actuels. Cela rendra les réseaux de transport des villes du « Sud » plus efficaces et organisés, dans un futur proche. Mais cela correspondrat-il à une homogénéisation des villes elles-mêmes ?

6  RIVAS Tomas. Así funcionarán las bibliotecas con vagones del subte A. La Nación. 11 janvier 2013.


38


39

Chapitre 2

LA BOUSSOLE GRAPHIQUE


40


41

Un système qui devient pragmatique au fil du temps: le cas du mÊtro de Paris


42

serte de banlieue à banlieue sont devenus prioritaires, mais introduits peu à peu : la

Un siècle du réseau de métro

création des lignes du réseau express régional d’Île-de-France (RER) a lieu dans les années 1970, suivie de l’amélioration et le prolongement des lignes existantes et la réintroduction du tramway en Île-de-France à partir de 1992 (il avait disparu et avait été remplacé par des bus dans les années 1950). Le réseau métropolitain continua ainsi à se développer grâce au renouvellement du matériel roulant, augmentant ainsi la capacité des lignes les plus chargées, et grâce à l’extension des lignes en banlieue qui commença à voir le jour après plus de cinquante ans de planification.

Actuellement, les transports à Paris offrent plusieurs modes de transports différents. La ville et sa ban-

Le métro parisien est l’un des plus fréquentés

lieue sont accessibles par un réseau de lignes de

au monde. La ligne 1, est la ligne la plus an-

bus et de tramways, mais aussi et surtout par le

cienne, avec un tracé de 16,6 km et 25 stations

métro, où les stations sont très proches, puis par les

; elle est aujourd’hui également la ligne la plus

RER et les Transiliens, le tout créant un réseau fer-

fréquentée: 213 millions de voyages annuels

roviaire qui s’étend au-delà des limites de la ville.

aujourd’hui pour 160 millions de voyages en 2006  1.

Le Métropolitain de Paris commença à circuler le 19 juillet de 1900, l’année de l’Exposition Universelle

Le rôle de la RATP est fondamental. Sa stra-

qui eut lieu sur le Champs de Mars, près de la tour

tégie commerciale repose sur l’accueil des

Eiffel. Il comptait à peine 30km de trajet mais, dix

usagers à qui l’on donne des informations, sur

ans plus tard, la ville avait déjà 160 stations. La

un rapprochement avec l’Office du tourisme,

première ligne fut réalisée par l’ingénieur Fulgence

sur la distribution de documents concer-

Bienvenüe et les accès aux stations conçus par

nant le réseau et par la vente de produits

l’architecte décorateur Hector Guimard.

éventuellement associés à des opérations touristiques telles que les forfaits réalisés en

Assez rapidement, les lignes et stations de métro

partenariat avec des musées. Anne-Marie

se multiplient, et les compagnies CMP et Nord-Sud

Idrac, présidente de la RATP, indique que «

ne sont plus capables de gérer le système entier.

le résultat de cette politique, mesurée par des

La Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP)

enquêtes de satisfaction, est jugé favorable-

est alors crée en 1949 pour gérer l’ensemble des

ment : 77 % de passagers jugent le réseau

moyens de transport publics à Paris et dans sa

bon, les moins satisfaits étant les Japonais. »  2

banlieue. Mais il faut tenir compte d’autres détails, Néanmoins, étant données la croissance continue

comme le civisme des usagers, qui va au-delà

de l’agglomération parisienne, des projets de des-

de la signalétique. Le métro parisien est connu

1  RATP, Direction de la communication. Statistiques annuelles 2011 2  PLAISAIT, Bernand. L’accueil des touristes dans les grands sites de transit. La Documentation française, Collection des rapports officiels. Paris, 2004, p. 74


43

pour son odeur fétide et ses voyageurs au regard parfois trop insistant, qui rendent les trajets moins agréables. Dans les métros d’autres pays, comme le Tube londonien, contrairement au métro de Paris, les voyageurs n’insistent pas lorsqu’un métro est plein, les personnes âgées se voient souvent offrir un siège et les femmes enceintes font se lever tous les voyageurs.  3

3  TABARY, Zoé Tube vs Métro www.lepetitjournal.com/londres, 27 février 2012


44

ligne allant de 1 à 14, une couleur, et les noms des deux stations (départ et arrivée). Pour le RER, les lignes sont au nombre de 5 ; elles sont dési-

La conception

gnées par une lettre, de A à E, et une couleur.

graphique des

Puis, dans toutes les stations et les gares, il y a des panneaux qui affichent le plan général des trans-

informations relatives

ports en commun. À l’intérieur du réseau souterrain, de nombreux panneaux fléchés montrent où

au métro

aller pour prendre tell ou telle ligne et indiquent souvent les différentes arrêts qui vont être desservis. L’organisation formelle de la RATP repose sur les départements de Conception et Identité des Espaces, sur celui de l’Ingénierie et de la Maintenance signa-

L’une des spécificités de Paris est de disposer de

létique, qui travaillent ensemble pour vérifier que

panneaux absolument partout : aucun endroit dans

les normes soient respectées dans l’intégralité du

le métro parisien n’est dépourvu de signalétiques .

réseau  6 . Chaque jour, des évaluations sont réalisées

La signalétique du métro parisien présuppose que

par des agents anonymes qui doivent noter de

le voyageur peut ne rien savoir, elle offre un mode

manière détaillée les éventuelles anomalies consta-

d’emploi complet avec lequel l’usager n’a pas besoin

tées  7. Pour autant, la norme est relativement flexible

de préparer son voyage à l’avance, ni de demander

et s’adapte aux caractéristiques des stations et aux

des renseignements à d’autres usagers. Pourtant, ce

initiatives venant de divers autres agents (de mainte-

sont souvent les touristes qui posent des questions,

nane par exemple).

4

ou qui demandent aux points d’information comment se rendre à telle ou telle station.

L’un des principes fondamentaux de la signalétique est la standardisation des éléments graphiques.

L’ordre de l’aménagement et de la signalétique des

On peut toutefois trouver, sur une même ligne,

stations suivent une norme qui a évolué au cours

des panneaux anciens mélangés avec la nouvelle

du temps. Aujourd’hui, des règles très précises sur

signalétique. Cette situation crée des confusions

leur composition et leur installation laisse paraître

chez les usagers, mais cette confusion n’était pas

les stratégies de communication de la RATP. Tous les

vraiment une préoccupation centrale pour la RATP.

principes de l’installation des panneaux, des flèches,

Les formes, les couleurs, la typographies, etc., sont

des pictogrammes, des noms des arrêts, tout comme

perçues comme des éléments décoratifs  8 . La signalé-

les espaces publicitaires, sont inscrits dans une base

tique est le résultat d’un programme d’organisation

de données qui précise comment conserver cette

graphique qui peut également être appréhendé

standardisation dans chaque station.

comme une sortie d’instruction, une forme de gouvernement  9 . Il s’agit alors de dispositifs disciplinaires

Dans les 383 stations du métro  5, l’homogénéi-

où le civisme des usagers est convoqué.

sation graphique de l’ensemble des dispositifs signalétiques est complexe. Le métro parisien

Le renouvellement de la signalétique dans les

est désigné par plusieurs choses : un numéro de

espaces métropolitains est essentiel pour que l’infor-

4  GOETA, Samuel. Lisibilité urbaine et signalétique du transport parisien [Entretien avec Jérôme Denis] Urbanews.fr, 10 juillet 2012.

6  DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro. Paris : Transvalor- Presses des MINES, 2010, p. 48

5  RATP, Direction de la communication. Statistiques annuelles 2011

7  DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro. Paris : Transvalor- Presses des MINES, 2010, p. 53 8  DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro. Paris : Transvalor- Presses des MINES, 2010, p. 59 9  DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro. Paris : Transvalor- Presses des MINES, 2010, p. 79


45

mation soit davantage visible. Par ailleurs, le besoin

d’être utilisé sur des panneaux de signalétique, mais

de présence humaine se fait particulièrement sentir

son utilisation tend cependant à se généraliser sur

au moment où le voyageur, abandonné à lui même,

bien d’autres supports.

a besoin de renseignements particuliers. Toutes les inscriptions présentes dans le métro, et D’un côté, les éléments datant de la première étape

notamment le nom des stations, utilisent des alpha-

de construction sont désormais un patrimoine

bets très simples qui se présentent sous forme de

historique. Les accès aux stations conçues par

compositions murales de grande taille, souvent en

Guimard, facilement reconnaissables grâce à leur

céramique. Ces inscriptions en lettres capitales

style Art Nouveau en fer forgé, portent l’inscription

sont peu à peu remplacées par des panneaux qui

« Métropolitain » en capitales, avec une police parti-

suivent une norme différente : des grandes lettres en

culière inspirée des lettrages de George Auriol. On

bas-de-casse pour le nom de la station sur un fond

y trouve aussi les mentions « métropolitain, station,

bleu, et un sous-titre en fond marron pour signaler

sortie, entrée, etc. », mais pas de nom de lieux car

un lieu touristique ou culturel qui se trouve à la

Guimard n’a pas créé de typographie comportant

sortie de la station.

un alphabet complet ; il a uniquement dessiné un lettrage destiné aux seules mentions que l’on trouve

L’abandon des capitales, ce à quoi s’ajoute le

sur les édicules. Cet alphabet patrimonial a été

remplacement des phrases par des pictogrammes,

retravaillé à la demande la RATP à l’occasion de son

donne la possibilité de reconnaître les mots au lieu

centenaire en 1999, par un graphiste, David Poullard.

de les lire : distinguer facilement donne du confort

Puisque le métro parisien a une esthétique forte,

à l’usager. Tout cela améliore la fluidité du réseau

pour maintenir cette identité ont été conservés des

car lire prend du temps, alors que reconnaître est

éléments tels que certaines inscriptions anciennes

presque immédiat  10 . L’enjeu est aussi politique : cette

des compagnies CMP et Nord-Sud, qui datent du

reconnaissance des mots est possible même pour

début du XXe siècle, et des carreaux de faïence

les illettrés : il s’agit de faciliter l’accès au réseau

blancs des murs. Mais la rénovation du réseau peut

pour les usagers qui ne savent pas forcément bien

aussi changer complètement l’aspect de certaines

lire le Français, ce qui est aussi l’objectif de la stan-

stations en les rendant uniques et plus facilement

dardisation des couleurs des lignes. En revanche,

identifiables.

la signalétique concernant la sécurité est en lettres capitales ; elle est destinée à canaliser les foules.

Les panneaux signalétiques ont tendance à être de plus en plus épurés. Les caractères typographiques

Les plans que l’on trouve dans dans chaque station

bâtons, ou linéales, y sont utilisés. Depuis 1996, sur

sont un autre système d’information où tout le

tous ses nouveaux plans et les noveaux panneaux,

réseau est représenté : c’est l’usager qui doit utiliser

la RATP utilise une police de caractère spécifique-

son propre mode d’emploi pour trouver le point de

ment crée pour les transports parisiens, la Parisine,

départ et d’arrivée de son itinéraire, voir les cor-

dessinée par Jean François Porchez. Cette police est

respondances à faire, etc. C’est un outil qui donne

moins ambiguë que les anciennes polices standard

une idée des opérations à exécuter, qui familiarise

avec empattements. Son dessin porte l’infulence des

l’usager avec les noms des directions à suivre, les

travaux d’Edward Johnston et d’Eric Gill réalisés

numéro des lignes et les couleurs. Mais, une fois que

pour le métro de Londres. Le but de la Parisine était

l’usager est dans les couloirs, c’est la mémoire qui

10  RATP, La signalétique de la RATP, Document de présentation interne, Unité conception et Identité des Espaces, 2002, diapositive 13


46

joue un rôle fondamental sauf si l’usager a dans la

Pour que l’usager maîtrise tous ses déplacements,

poche le plan du réseau distribué gratuitement dans

la signalétique du métro parisien est devenue mul-

toutes les stations.

timodale : elle s’articule avec les autres systèmes de transport dans un ensemble qui est en train d’être

Dans les couloirs, les panneaux guident et s’en-

installé dans toute la ville. Avec ce nouveau disposi-

chaînent les uns avec les autres. C’est en suivant

tif de signalétique multimodale, l’écrit a été intégré

ceux-ci, et en respectant le sens des flèches, que le

comme une ressource à part entière de l’informa-

voyageur peut être certain d’aller au bon endroit

tion en prenant en compte la nécessité d’informer les usagers. La finalité du projet est de fournir des

La « langue visuelle » du métro est fait de codes

informations locales sur le trafic (prochains trains,

couleur et de typographie. La forme d’une plaque,

état du trafic, perturbations, etc?). L’usager pourra

la couleur d’un icône, l’emplacement d’un symbole,

mieux s’approprier ces informations pour se répérer

etc., font partie de cette langue qui ne prétend pas

et organiser son trajet. Le système développé est

traiter du sens, mais envoyer un message le plus

amené à remplacer tous les systèmes d’information

universel possible aux usagers. Les représentations

déjà existants  12.

11

mentales collectives liées au dessin des lettres luimême sont souvent perçues inconsciemment : les lettres « bâton » sont interprétés comme plus strictes, autoritaires. Les plans ou les horaires ne sont pas conçus pour délivrer un message, mais pour aider les usagers à calculer le temps de leur trajet. Toutes les lignes sont équipées du système de panneaux électroniques SIEL : ils permettent de savoir quelle heure il est, et de connaître en temps réel le temps d’attente avant le prochain passage d’un métro. Avant de monter dans une rame, dans certaines stations des portes palières programmées pour ne s’ouvrir que lorsque le train est à quai ont été installées dans le cadre de l’automatisation et de la modernisation du réseau. Ici, des signaux lumineux et sonores sont installés pour annoncer le départ du train. De plus, un panneau orange avec un triangle noir est également installé en tête de quai pour indiquer le point d’arrêt de la première rame. Les rames sont, à l’intérieur, équipés d’une signalétique similaire à celle des bus et des tramways (pictogrammes relatifs à la sécurité, informations sur les arrêts, signals sonores à l’approche de la station suivante, etc.)

11  RATP, La signalétique de la RATP, Document de présentation interne, Unité conception et Identité des Espaces, 2002.

12  Site web RATP. Plus d’innovations. http://www.ratp.fr/fr/ ratp/r_6368/bien-informer-les-voyageurs-en-temps-reel/


47

Fig.14 Station Charles de Gaulle- Etoile

Fig.15 Panneau de sortie d’une station du métro parisien

Fig.16 Flèches et schéma d’une ligne dans le métro parisien


48

peut être enlevées facilement, prennent parfois tout l’espace: les murs, le sol et même les entrées des

Signes mercantiles et signes sauvages

tunnels. La signalétique institutionnelle est aujourd’hui colonisée par les techniques marchandes. La RATP fait de la publicité pour annoncer des nouveautés, des activités ou des spectacles, voire même pour donner des conseils relatifs au civisme dont doivent faire preuve les usagers. Par ailleurs, la RATP n’est pas seulement une institution, elle est aussi une marque : son logo est reconnu dans le monde entier. En dehors de la publicité, d’autres signes sauvages, comme les graffitis et les petits panneaux collés sans

La signalétique et la publicité, à l’intérieur même des

autorisation, se disputent les espaces des stations

espaces graphiques du métro, sont souvent perçues

de métro. Dans le cas des graffittis, le langage écrit

comme étant des ennemies. L’espace publicitaire a

s’exprime d’une manière très différente : il s’oppose

son propre mode de reconnaissance, qui est spé-

politiquement et esthétiquement à la signalétique

cifique à la fois dans sa forme et son contenu. La

institutionnelle. L’inscription de ces signes et le fait

publicité joue sur une certaine mise en forme gra-

d’avoir ensuite à mes enlever dégradent parfois les

phique afin que les usagers se souviennent d’un

lieux. Comme dans la publicité, les auteurs de ce

sujet ou d’une marque. Elle propose des représen-

« graphisme sauvage » cherchent bien souvent à

tations, associant mise en scène, mise en spectacle,

« vendre » un produit, leur art ou une capacité à

mise en récit : c’est un théâtre des objets reposant

fabriquer de l’art, à l’aide d’une pratique autoré-

que une brève narration qui doit séduire en un bref

férentiuelle finalement assez proche du mécanisme

instant  13 .

publicitaire. Par ailleurs, la diffusion de spots sur les écrans vidéo de certaines stations font que la publi-

La publicité a un coût financier au mètre carré,

cité a d’une certaine manière une place plus noble

tandis que la signalétique est une dépense en

que celle allouée à la signalétique.

vue d’améliorer les services rendus par la RATP. Comment protéger la signalétique contre les campagnes publicitaires qui sortent du cadre établi et envahissent tous les espaces possibles ? Cela implique des négociations qui sont délicates entre la RATP et les annonceurs. L’écologie graphique se double donc d’une écologie compétitive  14 . Dans certaines stations, la signalétique du métro ne protège que son emplacement et laisse la place libre à la publicité. Les publicités collées provisoirement et qui

13  PENINOU, Georges. Des signes en publicité. Études de communication [En ligne] 2011, URL : http://edc.revues.org/986 14  DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro. Paris : Transvalor- Presses des MINES, 2010, p. 73


49

Fig.17 Station Saint Lazare

Fig.18 Installation typique respectant l’espace publicitaire à la station MontparnasseBienvenüe de la ligne 13 du métro de Paris

Fig.19 Installation publicitaire à la station Opéra


50

Fig.20

Fig.22

NASTY. Panneau de

NASTY. Plan du

sortie vandalisé au

réseau Île-de-France

métro de Paris

Fig.21 Ecran publicitaire vandalisé

vandalisé au métro


51

Fig.23 NASTY. Plan du métro de Paris vandalisé. Dessine-moi un métro. Gallerie Margoth. Paris, 2011


52


53

Un système entre chaos et rigueur: Lima, des combis au mÊtro


54

Au milieu des années 1950, le développement de la circulation automobile et la puissance des lobbys

Entre chaos et bruit, le transport public et son histoire à Lima

pétrolier et industriel provoquent des attaques virulentes contre le tramway, considéré comme archaïque et gênant. Les autorités envisagent déjà de supprimer du centre de Lima des lignes de tramway, pour laisser plus de place à la circulation automobile. Outre la pression de plusieurs lobbys, ce choix s’appuie sur un constat : les lignes de la capitale sont souvent mal tracées, circulant à contre courant sur des voies importantes, etc. Elles sont en outre victimes d’une réglementation qui n’a pas évolué, faute de moyens et de volonté politiques. Par ailleurs, l’élargissement des rues avait été conçu sans penser au fait que les usagers, à l’approche des stations de

La ville de Lima, comme Rio de Janeiro, était consi-

tramways, devaient traverser les raues car la ligne

dérée comme un exemple d’efficacité en terme de

du tramway se situait au milieu de cette rue.

transport publique grâce à son réseau de tramways, établi au début du XXe siècle. Ce réseau desservait

Malheureusement, au lieu de moderniser le réseau

les principaux points de la ville jusqu’aux faubourgs

de tramways, les autorités ont décidé de le sup-

du littoral centre et sud, et jusqu’au port. Le tramway

primer malgré le fait qu’il fut fort utilisé dans les

avait assuré, tant bien que mal, les déplacements

années 1950, alors que l’immigration connaissait un

des habitants de la ville, mais les lieux peuplés

pic. La plupart des pays d’ Amérique Latine suivirent

récemment n’avaient pas d’accès à ces arrêts. C’est

l’exemple des États Unis et de la France en suppri-

pourquoi la première ligne d’omnibus apparut en

mant ce réseau, tandis que d’autres pays européens

1921, premier pas vers un réseau officiel de transport

continuèrent à utiliser les tramways et à les perfec-

en commun.

tionner. Le réseau de tramway a été supprimé au milieu des années 1960, remplacé par des trolleybus.

Toutefois, vers 1930, un réseau informel de bus

Les maires de Lima, à cette époque, optèrent pour

apparut ; plus ou mons privé, il était une réponse

la construction de grandes voies rapides destinées

aux déficiences du réseau officiel créé en 1921.

aux automobiles.

Après 1930, toute une série de normes furent imposées pour unifier le fonctionnement de ce réseau

En outre, la population ne voulait plus voir tous

informel. Certains critères furent créés pour refuser

ces tramways remplis de gens et d’»urbanitos», des

à de nouvelles entreprises de créer des itinéraires

tramways saturés en raison du triplement du nombre

qui étaient déjà desservis auparavant, ou pour

d’habitants à Lima. Par ailleurs, la vitesse des tram-

désengorger la circualtion dans certaines rues. Les

ways était limitée en raison du manque de mainte-

entreprises privées qui se consacraient au transport

nance et des grèves successives des ouvriers, ce qui

public avaient proliférées, et l’État avait décidé d’in-

a accéléré la disparition du réseau. Les trolleybus

tervenir en établissant un règlement permettant de

qui les remplacèrent connurent le même destin peu

contrôler les prix, les caractéristiques des véhicules,

de temps après.

etc.


55

Fig.24 Tramway à Lima au début du XXe siècle.

Fig.25 Schéma des lignes desservies du tramway à Lima et Callao


56

Les réseaux de transport officiels étaient donc en

saturé et n’était plus suffisant. Le réseau tomba en

crise. En revanche, les réseaux informels, non offi-

faillite, suite aux grèves internes des conducteurs de

ciels, étaient de plus en plus présents en ville. La fer-

bus et en raison de tarifs trop bas pour garantir

meture des réseaux officiels, dans les années 1960,

la rentabilité de l’entreprise ENATRU (0,03 centimes

laissa la ville presque sans moyen de transport. Par

d’euro par personne pour un trajet), même si celle-ci

ailleurs, en raison de l’augmentation de la popu-

recevait une subvention de l’État. Alors la société

lation, l’urbanisation de Lima devint une priorité,

n’avait plus les moyens de réparer ni de renouve-

et des nombreuses rues furent élargies. Pour que

ler les bus, une centaine d’entre eux furent brulés

le réseau de transport public soit remis sur pied,

par des terroristes. L’État décida alors d’augmenter

l’Association Paramunicipale de Transport de Lima

la tarification au début des années 1990, mais il

(APTL), commencera ses activités en 1966.

était déjà trop tard. Les bus restants furent offerts aux chauffeurs en échange de leur dernière paie,

À ce moment là, on considéra que la Via Expresa

avant que ENATRU ferme définitivement ses portes.

del Paseo de la República, une grande voie à haute

Par ailleurs, les travaux de construction d’un métro

vitesse qui avait été construite depuis peu, était

aérien, qui avaient débuté à la fin des années 1980,

utilisable pour construire un métro, étant donné sa

furent abandonnés par le nouveau gouvernement.

largeur – mais jamais le métro ne vit le jour. Dans ces conditions, il fut alors décidé de profiter de cet

Vers 1992, l’État libéralise le réseau de transport

espace pour y faire passer des bus articulés. Puis

public car le service n’était pas à la hauteur des

vers 1975, l’Entreprise Nationale de Transport Urbain

attentes des usagers, qui étaient de plus en plus

du Pérou (ENATRU) remplace l’APTL en raison d’une

nombreux. Cela offrit la possibilité à des entreprises

crise financière. L’Entreprise devint alors le premier

privées d’intervenir sur le marché du transport

réseau de transport en site propre d’Amérique du

public. L’objectif était d’encourager la qualité du

Sud, comme le seront plus tard le réseau de trans-

service et la baisse des prix. Ces entreprises prirent

port de Curitiba au Brésil, ou celui du Transmilenio

alors le contrôle des itinéraires et des horaires. Puis

de Bogota, en Colombie.

l’autorité publique leur laissa aussi la prérogative de fixer une tarification. La Mairie de Lima était

Les bus articulés étaient neufs et de couleur jaune-

souple par rapport aux conditions de création des

moutarde, avec des itinéraires préalablement établis.

entreprises dédiées au transport public. N’importe

Ces bus étaient connus sous le nom d’« ENATRU

quelle personne pouvait désormais offrir un service

». Ses chauffeurs étaient des salariés de l’Etat et,

de transports en commun avec n’importe quel type

le plus souvent, avaient une bonne éducation (en

de véhicule, à l’exception des camions et des deux

revanche, il ny’ avait pas de contrôleur). La voie,

roues. Le Président Fujimori favorisa plutôt, dans des

longue de 16km, reliait cinq grands quartiers de la

conditions obscures, l’importation de petites voitures

ville, du Nord au Sud, et les lignes parcouraient des

et de minibus japonais peu chers, et souvent déjà

trajets encore plus longs pour arriver aux extrémi-

anciens. Ces importations furent d’une telle ampleur

tés de la banlieue. D’autres lignes de bus, privées,

que ces véhicules envahissent aujourd’hui littérale-

complétaient ce réseau mais ces bus ne pouvaient

ment les rues de la ville.

utiliser la voie express. Quelques années plus tard, la couverture de Lima La forte migration qu’a connu Lima se continua dans les années 1980 ; le réseau des bus devient

par le réseau de bus avait augmenté et les temps


57

d’attente avaient diminué, en offrant davantage de

étape de la réforme des transports collectifs a

confort aux usagers qui eurent désormais plus de

été lancée l’année dernière afin de réguler les

place dans les véhicules. Toutefois, même si cette

bus dans cinq grands axes de la ville  18 . Mais

situation donnait une apparente sensation de

cela ne se fait pas sans contestation de la part

bonheur, la privatisation créa plus de problèmes

des milliers de petits transporteurs indépen-

alarmants que de solutions. Comme l’offre avait

dants, qui voient là une remise en cause de

augmenté rapidement, qu’il y avait beaucoup de

leur moyen de subsistance.

bus et moins d’usagers dans chacun d’entre eux, le prix du ticker augmenta pour que les compagnies

Avec l’apparition des nouveaux réseaux de

gagnent autant qu’auparavant. Le grand nombre de

transport en voie propre dès 2010, une grande

véhicules généra également plus d’embouteillages

partie des usagers des combis disparut ; mais

et de pollution.

comme la ligne 1 du Metropolitano n’arrivera à transporter que 7% des usagers, et que le

Il existe aujourd’hui, dans toute la ville, 414 entre-

métro ne concernera que 3% de ceux-ci, 10%

prises de transport urbain proposant 218 itinéraires

seulement des usagers utiliseront ces deux

par autobus, minibus, coasters, « combis » et « moto-

nouveaux moyens de transport, ce qui ne règle

taxis »  15 . 83% des voyages motorisés à Lima, soir

pas le problème de mobilité des habitants  19,

l’équivalent de 10 millions de voyages, utilisent ces

qui continueront en grande majorité à emprun-

transports ; 37% utilisent des « combi », 30% des

ter les bus.

minibus, 16% des autobus, 9% des taxi, 6% des moto taxis, et 2% des voitures collectives  16 . Il y a plus de 27 000 véhicules destinés aux transports collectifs, sans compter ceux qui ne sont pas autorisés. Dans plusieurs cas, les services effectués sont informels et les itinéraires flexibles. Les camionnettes rurales telles que les « combis » et les « mototaxis » constituent le moyen de transport public typique pour les trajets courts, en particulier dans la périphérie de la ville, si bien que les itinéraires de quelques « combis » couvrent presque toute la zone métropolitaine. Les véhicules sont capables de desservir des zones à la géographie plus difficile, telles que les rues étroites ou sinueuses, ou des endroits moins densément peuplés. Ce moyen de transport, malgré la pollution et le bruit qu’il provoque, reste encore très prisé des Péruviens. Cependant, le service est déficient par rapport aux normes de sécurité et de confort car il souffre du manque de renouvellement des véhicules qui ont, en moyenne, 15 ans d’âge  17. De ce fait, la préfecture de la ville envisage le remplacement de ces véhicules par des autobus modernes et le renouvellement des itinéraires pour 2014. La première

15  Municipalidad de Lima. Gerencia de Transporte Urbano http:// www.gtu.munlima.gob.pe/transporte/rutas.htm 16  CORPORACIÓN ANDINA DE FOMENTO. Observatorio de Movilidad Urbana para América Latina, CAF, 2010, p.19

18  Municipalidad de Lima, Gerencia de Transporte Urbano, URL : http://www.gtu.munlima.gob.pe

17  CORPORACIÓN ANDINA DE FOMENTO. Observatorio de Movilidad Urbana para América Latina, CAF, 2010, p.35

19  CORPORACION ANDINA DE FOMENTO (CAF) Desarrollo urbano y movilidad en América Latina, Editorial Norma Color, Panamá 2011, p. 232


58

l’aide de bandes horizontales où figurent le nom et le logo de l’entreprise. Identifier une ligne demande de décoder ces code couleurs. Seuls les bus plus

Graphisme,

anciens conservent une lettre ou un numéro de ligne identifiable, que l’on trouve près du pare-brise. Il y a

information

également des panneaux décollables où sont représentés les rues ou les bâtiments les plus célèbres

et mobilité

devant lesquels le véhicule passe ; ces bâtiments peuvent aussi être montrés par le rabatteur lorsqu’il crie, ce qui permet d’identifier le bus même de loin. À l’intérieur, seuls les tarifs de l’entreprise et l’attestation d’assurance du véhicule sont officiels. La signalétique est plutôt sauvage : des autocollants avec des personnages de BD tels que Condorito et

Pour comprendre la mobilité quotidienne des

les pictogrammes indiquant par exemple « Personne

Liméniens, il faut prendre connaissance des minibus

à Mobilité Réduite » sur un siège sont détournés

locaux bariolés qui traversent la ville de part en

de manière ironique. D’autre part, des photos de

part. Les « combis » ne peuvent accueillir qu’une

famille du chauffeur, ainsi que son saint préféré,

vingtaine de personnes assises mais ils sont si nom-

des phrases argotiques et bien d’autres éléments

breux qu’ils sont le principal moyen de transport

se retrouvent à l’intérieur des bus et amusent les

urbain. Il en résulte une congestion dramatique et

usagers pendant des longs trajets.

un chaos général. Le mauvais état des routes, les nombreux chauffards et les embouteillages sont

À Lima, les infrastructures nécessaires pour que

typiques à Lima. Mais prendre le combi

coûte à

les transports publics automobiles constitue un vrai

peine 0,30 euros, ce qui permet aux plus pauvres de

réseau articulé ne sont actuellement pas en place.

pouvoir se déplacer.

Les arrêts n’ont pas de nom, sont presque inexistants, et leur forme et leur signalétique sont différentes

Les lignes de bus sont privées, ce qui veut dire que

selon le quartier. Dans la plupart des cas, seul un

sur un même itinéraire différents types de véhicules,

poteau ayant un pictogramme blanc sur fond bleu

de couleurs et de signalétique entrent en ligne de

signale un arrêt autorisé. Les Abribus, dans une ville

compte. Le chauffeur ne s’occupe que de la conduite

où il n’y a pas d’intempéries, sont utilisés plutôt pour

et un rabatteur crie par la porte, toujours ouverte,

la publicité. Il n’existe aucun tracé schématique des

la destination et le trajet qu’il emprunte. Les deux

routes, ni de plans avec tous les arrêts possibles

portent souvent un uniforme aux couleurs de leur

dans la ville.

entreprise. N’importe quelle ligne qui passe par la rue où Pour pouvoir être identifiable, les autobus adoptent

se trouve un arrêt peut le desservir. Vue la quan-

une signalétique qualifiée de « chicha » : lettrages

tité de véhicules par ligne, les horaires des arrêts

à la main en capitales gothiques, sur fond blanc,

n’existent pas ; le temps d’attente est de 1 à 5

pour les panneaux qui indiquent les destinations

minutes en moyenne. En général, on peut prendre

sur la vitre avant ; par ailleurs, les bus sont colorés à

un bus partout car les chauffeurs s’arrêtent selon


59

Fig.26 Ensemble de «combis» dans une rue liménienne

la présence des possibles usagers qui sont dans la rue. Rester dans un coin de la rue et lever le bras ou pointer vers l’autobus souhaité est la principale méthode pour les emprunter. Attendre un bus à un arrêt n’est pas non plus une garantie d’arriver à prendre le bus souhaité. La concurrence des autobus et la quantité des usagers aux heures pointe font que tout le monde traverse les voies pour monter

Fig.27

dans les véhicules, et notamment aux feux rouges.

Incohérence

Ce désordre, ainsi comme la perte de temps qu’il

entre un abribus

occasionne, est de plus en plus sanctionné par la

et un panneau

mairie de Lima. Pourtant, les usagers continuent à

d’interdiction

appeler les combis n’importe où, même s’il y a pas d’arrêt près d’eux. L’annonce des arrêts qui identifient les principales stations de l’itinéraire est faite par le rabatteur. Ce travail est indispensable, surtout aux heures de pointe, car les véhicules sont remplis de passagers et personne à l’intérieur ne peut voir où est exactement le bus. Pour descendre, l’usager doit s’approcher de la porte et payer, s’il n’a pas pu le faire à l’avance en achetant un ticket. Pour autant, les grandes lignes de bus, souvent plus modernes, ont des sonneries et sont pourvus de panneaux en LED. Dans ce cas, le rabatteur ne sert uniquement qu’à vérifier que l’usager va payer son trajet.


60

Fig.28 Plusieurs typographies dans les panneaux de direction des combis


61

Fig.29 Fenêtre de combi remplie de messages

Fig.30 Vue de l’intérieur d’un combi


62

au Sud sur 9,2km. Il faut compter 30 minutes pour parcourir les 7 stations entre Villa el Salvador et

L’arrivée des bus en site propre et du métro

Cercado de Lima (centre-ville), ce qui prenait plus de deux heures auparavant.

Les rames du métro

sont conçues et fabriquées par les sites d’Alstom en Europe. Le consortium regroupe Graña y Montero S.A, société de construction et de promotion immobilière péruvienne, et l’opérateur argentin Ferrovias S.A. Les travaux continuent et, à terme, le réseau comportera sept lignes. Par ailleurs, l’État, qui gère le système, avait décidé de construire une nouvelle ligne de métro souterrain là où Metropolitano 2 (une autre ligne de bus) devait être construit. La mairie a du accepter ce

Le nouveau réseau de bus, connu sous le nom de

projet, et refaire un réseau de bus qui n’aura pas

« El Metropolitano », est un réseau de transport

de voie propre pour tous les itinéraires. Ce dernier

aérien doté d’une voie en site propre et de gares

projet prévoit de faire circuler 5 voies à vitesse

d’autobus répartis dans lkes principaux axes de la

rapide vers la fin 2013 pour compléter le réseau de

ville. Il s’agit d’un réseau de bus à haut niveau de

transport public là où ni le métro ni le Metropolitano

service (BHNS) qui remplace l’ancien système des

n’arrivent à desservir les arrêts.

ENATRU des années 1980. Le système BHNS, en provenance des Etats-Unis, avait d’abord été trans-

Le Metropolitano et Metropolitano 2 offrent un accès

posé à Bogota avec le TransMilenio.

le plus aisés aux stations, lesquelles sont aménagées – par contraste avec les arrêts de bus informels

Depuis sa mise en circulation en 2010, les habitants

–, avec des des rames spécialement équipées. La

de Lima ont bien adopté ce réseau de bus nouvelle

signalétique à destination des usagers est la même

génération. Le confort est tout autre (sièges tout

pour les deux métros. Les stations ont été construites

neufs, rampe d’accès aux personnes handicapées,

en béton gris, ce qui donne davantage de visibilité

plus de espace et de fraîcheur) et, surtout, les cou-

à la signalétique qui est de couleur jaune, bleu et

loirs de bus permettent d’éviter les bouchons de la

blanc pour le réseau de bus Metropolitano. Dans le

capitale. Cette voie en site propre est longue de 26

cas du métro, chaque station a une couverture et

kilomètres, sans compter les itinéraires effectués par

des escaliers d’une couleur précise mais sa signa-

les autobus de rabattement. Son trajet compte 37

létique utilise des couleurs orange, orange, bleu et

stations, dont la principale, au centre-ville, intègre

blanc. Les stations aériennes du métro sont facile-

un centre commercial. 16 quartiers sont desservis :

ment reconnaissables par la couleur de leur toit, leur

de Chorrillos (au sud de Barranco) à Comas (tout au

nom en grandes lettres capitales blanches sur un

nord), de 5h à 22h.

mur noir, et un poteau vert indiquant l’entrée.

Le métro de Lima, plus connu sous le nom de « Tren

Des kiosques d’information sont placés à l’entrée de

Eléctrico ,» circule depuis février 2012 et est princi-

chaque station. La vente de titres de transport se

palement aérien. La ligne 1 traverse Lima du Nord

fait dans la station, soit par distributeur automatique,


63

soit au kiosque. Le service utilise une carte rechar-

Des flèches, des panneaux indiquant la sortie et

geable achetable dans les stations. Pour ouvrir les

des schémas de lignes sont installées dans les cou-

portillons d’accès, il est nécessaire de valider le

loirs, les escaliers et les ascenseurs, exclusivement

titre de transport, qui montre automatiquement le

en espagnol. Le système reste simple et facile à

montant d’argent qui reste. L’objectif, dit Juan Tapia,

comprendre. Le seul problème de communication

le PDG de ProTransporte de Lima, est que l’utili-

à l’intérieur des stations du Metropolitano vient du

sation des voies rapides ainsi que le métro et le

fait que les différentes zones d’embarquement ne

Metropolitano, puisse être payée avec une seule

sont pas suffisamment bien indiquées, d’autant que

carte et avec un tarif unique  20 .

parfois elles sont à grande distance les unes des autres.

À l’intérieur de la rame, des panneaux lumineux indiquent le temps d’attente avant le prochain passage. Tous les détails concernant la ligne sont affichés (stations desservies, horaires, etc.) Pourtant ce ne pas le cas des cartes géographiques : cellesci présupposent-elles une vraie connaissance géographique de la part des usagers ? Le métro de Lima, ainsi que le Metropolitano, traverse plusieurs quartiers très différents, et se tromper de station n’est pas souhaitable dans une ville si étendue. Le Metropolitano a des portes palières qui se situent le long des quais, en bordure des voies. Le nom des stations est inscrit sur du vynile avec une typographie linéaire gras-italique en bas-de-casse, bleu sous fond blanc. Chaque station est pourvue d’un écran LCD proposant des informations sous formes de journaux, mais il n’y a pas d’espace publicitaires. L’affichage

dynamique

d’informations

sur

des

panneaux électroniques et le schéma de la ligne sont visibles à l’intérieur de chaque véhicule. Pour répondre aux questions que peuvent se poser les usagers, et pour distraire les passagers pendant leur trajet, le réseau s’appuie sur les dernières technologies d’information et de communication (TIC) en temps réel. Ainsi, à l’intérieur des véhicules, des écrans peuvent afficher la progression du bus, et donner également des informations institutionnelles, voire même diffuser une chaîne de télévision (dans les bus du Metropolitano du moins).

20  SALAZAR VEGA Elizabeth « INFOGRAFÍA: las rutas de los corredores complementarios de Lima » El Comercio, 24 février 2012. URL : http://elcomercio.pe/lima/1378685/noticia-infografia-rutascorredores-complementarios-lima


64

Fig.31 Vue de ´La Via Expresa del Paseo de la República», ligne 1 du Metropolitano

Fig.32 Station Angamos, Metropolitano

Fig.33 Un bus express dans une station

Fig.34 Un conseiller à la station Benavides

Fig.35 Ecran de TV et pictogrammes collés à la station Benavides


65

Fig.36 Signalétique suspendue

Fig.37 Exemple de signalétique suspendue et éloignée des usagers

Fig.38 Vue de l’intérieur d’un des bus du Metropolitano

Fig.39 Plans schématisés des services du Metropolitano


66

Fig.40 Vue de la ligne 1 du métro de Lima à Villa el Salvador (banlieue Sud)

Fig.41 Vue d’un métro en mouvement au quartier San Borja

Fig.42 Accès à la station Ayacucho du métro de Lima


67

Fig.43 Point d’information à la station Ayacucho

Fig.44 Train à la station Ayacucho

Fig.45 Vue de l’intérieur d’un véhicule de la ligne 1 du métro

Fig.46 Schéma de l’ensemble de la ligne 1 du métro


68


69

L’INFLUENCE DU CODE ORAL DES COMBIS À LIMA


70

« La tombée de la nuit est l’heure de pointe à Lima, l’im-

espace symbolique. Il y a trois types de personnes

mense capitale péruvienne aux 8,4 millions d’habitants. Sur

dans un combi : le chauffeur, le rabatteur et l’usager.

l’avenue Javier-Prado qui traverse la ville, des centaines

Le premier est le patron, le deuxième l’opérateur du

de bus et «combi» (minibus) hauts en couleur se pressent

système, et les clients utilisent le bus pour arriver à

les uns contre les autres. Leur but ? Gagner la «course

destination. Pour lui, chaque usager est censé payer

aux passagers» dont dépend la paye du chauffeur » .

le même prix – ce pourquoi ceux qui ont un tarif

21

réduit ne sont pas bienvenus. Il en va de même pour La ville de Lima est aujourd’hui le résultat du

les usagers à mobilité réduite, qui lui font perdre du

mélange entre les cultures des migrants et la culture

temps. Par contre, les jeunes filles sont toujours bien

des Liméniens d’origine . Ces groupes ont du

accueillies.

22

s’adapter ensemble. Le contact entre les rabatteurs de combi (à la vie marginale et souvent de mauvaise

Les verbes ne sont pas correctement conjugués dans

éducation) et les usagers de l’ensemble de la ville

le langage combi, ce qui est évident en espagnol,

a été décisif pour caractériser les habitus de ceux

car toutes les lettres sont prononcées. la combi est

qui vient à Lima.

« repassée », « planchada » quand elle est remplie. « Al fondo hay sitio » informe aux usagers sur des

La lutte pour gagner le maximum de passagers est

endroits libres dans la partie postérieure du véhi-

bien connue à Lima et dans la plupart des pays

cule mais qui ignore la vraie agglomération du bus

d’Amérique Latine. Cette concurrence existe même

de propos délibéré. Pour descendre, il faut dire

parmi les autobus d’une seule entreprise. Avoir un

« bajan semáforo», « ils descendent au feux rouge »

véhicule bien rempli et faire plusieurs aller-retour

ou dans un coin, arrêt etc.

n’améliore pas la qualité du réseau, bien au contraire.

et conjugué en pluriel, cela représente un usager

Les entreprises spécialisées dans le transport public

quelconque. D’autre côté, cette formule simplifie le

n’urent plus de contrôle sur ces pratiques dès lors

langage, comme le langage écrit que l’on trouve

que le système fut privatisé. Le salaire fixe des

dans la signalétique des nouveaux systèmes de

chauffeurs et des rabatteurs n’existe pas, et cette

transport. Le langage combi et les codes « signa-

situation permet aux conducteurs qui rapportent plus

létiques » que les rabatteurs utilisent pour appeler,

d’argent à l’entreprise d’être eux-même mieux payés.

donner des renseignements, annoncer les possibles

Ici, le soi est aperçu

arrêts et encaisser produit du sens collectif, du fait La principale stratégie pour attirer des possibles

du dialogue entre le transporteur et son usager.

clients n’est pas la signalétique, mais la parole: ce sont surtout les rabatteurs des combis qui crient

Dans les bus du Metropolitano, il y a encore au-

d’une façon particulière l’itinéraire du véhicule.

jourd’hui des usagers qui ne comprennent pas le

Cette pratique est devenue tellement populaire,

plan de la ligne et ne saisissent pas les panneaux

qu’elle a son propre argot et sa propre musicalité.

de signalétique. Par conséquent, les passagers pré-

Les usagers ont du s’adapter au code oral de la rue,

fèrent demander des renseignements aux conseillers

mais aussi à la vie à l’intérieur des combis.

pour connaître les arrêts désservis par tel ou tel bus. Dans ce cas, les conseillers remplacent l’une

Ces minibus sont une sorte de laboratoire urbain : les

des fonctions du rabatteur dans l’ancien système

Liméniens deviennent plus Liméniens à bord de ces

des combis. Toutefois, seules les grandes stations

voitures de seconde main, et les citadins de n’importe

comme la Centrale, Naranjal et Matellini disposent

quel niveau social se retrouvent à l’intérieur de cet

de panneaux de signalisation qui offrent à voir le

21  BARBIER Chrystelle. « À Lima, la réforme des transports urbains est une priorité » LE MONDE, version web du 23 août 2012. URL : http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/08/23/a-lima-la-reformedes-transports-urbains-est-une-priorite_1749014_3244.html 22  ARRELLANO Rolando et BURGOS David. Ciudad de los Reyes, de los Chávez, de los Quispe… Lima : Editorial Planeta Perú, 2010, p. 65


71

Fig.47 Rabatteur en plein appel

nombre d’arrêts, les plans schématiques de chacune des lignes et les heures d’embarquement. Les autres gares disposent de petits panneaux indicateurs placés sur le côté supérieur des gares, mais aucun des utilisateurs consultés n’a pu expliquer la signification des ces panneaux. Selon Juana Ruiz, l’une responsables des conseillers de la station Centrale, rien que dans la nuit, quand l’afflux de passagers augmente jusqu’un 75% par rapport à l’après-midi, il y a de 15 à 20 personnes par heure qui préfèrent demander aux conseillers plutôt que de consulter les plans  23 . Il ne s’agit pas d’un analphabétisme généralisé, mais d’une habitude reposant sur l’ancien système des combis dont le flexibilité faisait qu’il était possible de descendre en pleine rue même si l’arrêt où vous vouliez descendre était déjà passé… ce qui n’est évidemment plus possible avec les nouveaux réseaux du Metropolitano et du métro.

23  SANDOVAL DEL AGUILA, Pamela. « Metropolitano: a seis meses del inicio de recorridos, los pasajeros piden más información » El Comercio, 9 novembre 2010. URL : http://elcomercio.pe/lima/666376/ noticia-metropolitano-seis-meses-inicio-recorridos-pasajeros-pidenmas-informacion


72


73

Chapitre 3

GRAPHISME ET SOCIOLOGIE DANS LES TRANSPORTS PUBLICS


74


75

À PARIS ET LIMA

D’où provient la spécificité des villes, ces conditions grâce auxquelles les habitants définissent un territoire où ils vivent? Chaque rassemblement de personnes dans un espace limité crée des rythmes, des flux, mais aussi un langage graphique. La coexistence de différents quartiers au sein des métropoles pousse à la cohabitation de réalités différentes. Les transports publics, lorsqu’ils se font déplacer les usagers, créent leur propre identité qui est en décalage avec les quartiers qu’ils traversent : c’est un syncrétisme urbain. Les collectivités sont sans doute représentées par les constructions urbaines tels que les bâtiments, les bars, les boulevards, etc., mais les espaces liés aux transports publics sont en passe d’être de plus en plus standardisés. Est-ce que les activités des habitants dans ces espaces fabriquent une identité graphique propre aux moyens transports d’une ville ? Après avoir réalisé un constat sur les différents graphismes d’information et les différentes signalétiques de villes comme Paris et Lima, une comparaison des signes utilisés peut être enrichissante pour comprendre les relations entre transporteurs et usagers eu égard au développement du transport public dans le monde entier.


76

sont en concurrence avec des entreprises privés

Comparaison des signalétiques des transports en commun

qui ne donnent pas assez d’information sur les rues empruntées. La quantité de lignes, de stations et de correspondances du métro parisien le rendrait labyrinthique s’il n’y avait un système de signalétique interne adéquat.

Cette

signalétique

s’est

développée

depuis plus d’un siècle. L’attention nouvelle portée aux usagers ces derniers temps s’est traduite par une profonde redéfinition du public concerné par les transports en commun. Le public n’est plus une masse abstraite d’individus: le voyageur est devenu singulier  1. La signalétique est devenue plus importante pour donner accès, selon les besoins de chaque usager, à plusieurs dispositifs. Le métro, en tant que lieu public, doit garantir la diversité des information livrées aux voyageurs. Plus il y a d’informations, moins de questions sont posées ; il est donc possible de gagner le plus de temps afin de réaliser un trajet au sein du

Dans une société où l’État a un rôle et une présence

réseau des transports collectifs. Chacun a à sa dis-

forte, les usagers doivent interagir dans le cadre

position plusieurs choix : se servir de la signalétique

de règles et de normes partagées. C’est le cas du

pour ceux qui sont perdus, ou bien les ignorer pour

système de transport parisien. À Lima, au contraire,

les habitués qui savent directement où aller.

l’atmosphère manque de normes et de présence de l’État ; la désorganisation force ainsi les individus à

À Lima, pour obtenir de l’information, l’usager doit

élaborer des tactiques tout au long de leur parcours.

avoir une stratégie complètement différente. Lorsqu’il par en quête d’information, cela se passe oralement.

De nos jours, la grande majorité des Liméniens se

Dans le système des combis, l’information à destina-

plaint lorsqu’il s’agit d’aller d’un lieu à un autre,

tion des voyageurs n’existe presque pas ; et même si

en raison soit les embouteillages, soit du fait d’être

un usager a en mémoire la couleur et le logo du bus

serrés dans les véhicules et de descendre loin de

qu’il prend au quotidien, les trajets varient en fonc-

l’endroit souhaité. Cet inconfort est aussi ressenti

tion des embouteillages et des travaux. Le manque

par les Parisiens, même si pour ces derniers les

de coordination entre les autorités locales, la mairie

déplacements ne se font pas à l’aveugle : l’unité

de Lima et les projets d’État engendre un chaos et

des différents systèmes de transport public forme

une absence d’une signalétique globale dans la

un réseau en accord avec la longueur de la ville, ce

ville. Personne n’a pris la responsabilité d’installer

qui ne eut exister à Lima, où les systèmes nationaux

ou de coordonner un schéma où se retrouveraient toutes les lignes des transports en communs, privées ou non.

1  DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro. Paris : Transvalor- Presses des MINES, 2010, p. 102


77

Une rationalisation des arrêts permettrait de mettre

des dispositifs graphiques sont identiques puisqu’ils

en œuvre des projets d’urbanisme souterrains mieux

viennent d’être installés. En revanche, dans les rues,

articulés avec la surface et offrant ainsi un confort

la multiplicité des transporteurs privés (lesquels

d’usage meilleur. Cette évolution est prévue dans les

veulent tous exister grâce à leur marque) a fini

réseaux de transport à Lima comme à Paris. Pourtant,

par créer du désordre et de la confusion parmi les

le coût des infrastructures de transport et les sub-

usagers, qui doivent encore se méfier de la signalé-

ventions publiques nécessaires à leur fonctionne-

tique et écouter les rabatteurs.

ment et à leur maintenance sont élevés à Paris en raison de la taille du réseau. De la même manière,

Tandis que le métro de Paris forme un grand réseau

les dépenses liées à la construction des nouveaux

de seize lignes d’une longueur moyenne de 13,3km,

systèmes de transport urbain à Lima représentent un

le Metropolitano n’est formé que d’une seule ligne

grand investissement.

excessivement longue de 34 km, où plusieurs autre lignes sont raccordées à ses deux extrémités. Cette

A Paris, dans l’espace d’une gare ou celui d’une

ligne principale se dédouble en deux lignes, A et

station de métro, la concurrence sémiotique entre

B, qui suivent grosso modo le même parcours mais

les différentes signalétiques fait partie d’une seule

dont certains arrêts sont différents. Le problème se

écologie graphique, dont l’objectif est d’occuper

complique parce que A et B proposent chacune un

l’espace tout autour des usagers (couloirs, escaliers,

service normal et un service express. Il y a donc 4

quais, etc.) afin d’attirer leur attention avec effica-

parcours différents constitués à partir de la même

cité. Les collectivités ne s’en rendent pas forcément

ligne.

compte car ils ont pris l’habitude de voir partout des annonces, des graffitis et des panneaux d’infor-

La fréquence des bus du Metropolitano n’est pas

mation. Il y a une relation très complexe entre les

la même que celle du métro car la ligne principale

espaces du métro, les sorties en plein air à la surface

n’utilise pas tout le temps une voie propre. Par

et les commerces.

ailleurs, trois zones de la ville ont des exigences différentes : deux d’entre elles se situent aux extré-

La nouvelle signalétique de la RATP a été pensée

mités de la ligne, à partir desquelles les usagers

en

des

se rendent dans le centre ville le matin avant d’en

espaces, de leur design, etc. La standardisation de

articulation

avec

une

reconfiguration

repartir le soir (ce qui implique une forte demande à

la signalétique a été l’occasion de contrôler (en le

ces moments-là) ; l’autre concerne le centre-ville, où

restreignant) l’affichage publicitaire en fonction de

la demande est la forte pendant la journée. Les bus

la longueur des quais, l’espace publicitaire étant

qui se trouvent aux deux extrémités de la ligne sont

désormais « contenu » par la signalétique. La coha-

obligés de revenir dans le centre en journée pour

bitation entre l’ancienne signalétique et la nouvelle

pourvoir la forte demande en centre-ville.

est parfois difficile à comprendre car le changement n’est que progressif et ne concerne pour l’instant

Dès que la nouvelle ligne de bus Metropolitano

pas toutes les stations;

a existé, des problèmes de congestion eurent lieu (surtout au niveau de la station Naranjal, terminus

La signalétique du Metropolitano et du métro de

Nord), surtout par manque de bus. Par ailleurs, aux

Lima est clinquante, mais il faut la décoder car les

terminus de la ligne, il faut aller chercher le bus

habitudes prises dans la ville l’ont été sans elle.

souhaité en fonction du trajet (A ou B) et en fonction

Dans toutes les stations, le style et l’emplacement

du service souhaité (normal ou express), ce qui rend


78

ces terminus très chaotiques. L’usager doit suivre son instinct et suivre la foule aux heures pointe parce que les informations n’existent que devant les bus, sans que soient mentionnés A ou B. Initialement, de simples panneaux en LED indiquaient les directions sous forme abrégée, puis les responsables du Metropolitano ont du ajouter des grands panneaux avec la lettre de la ligne et le type de service, à l’aide d’un code couleur. La signalétique du Metropolitano est suspendue, accrochée au toit. Dans la plupart des stations, ces toits sont très élevés et lire le plan de la ligne peut être difficile (il faut considérer que la taille moyenne des péruviens est de 1,64m pour les hommes et 1,51m pour les femmes). Par contre, dans le métro parisien la plupart des panneaux d’information sont à l’hauteur des yeux ou bien suspendus à une hauteur moins élevé, ils utilisent également une typographie plus grande. Les plans des lignes sont en haut uniquement à l’intérieur des rames. Contrairement au métro de Paris, le Metropolitano et le métro de Lima sont dépourvus de publicité ; ils sont propres et respectés par le public. Mais dans les combis, c’est tout une autre histoire.Ici, il y a de la publicité sur les côtés extérieurs des véhicules (pour les autobus et bus), sur le toit, ou à l’arrière. Cela peut empêcher les usagers de regarder à l’extérieur par la fenêtre, et cela empêche surtout de rendre visible la signalétique déjà peu présente. À l’intérieur, des petites annonces sont collées à l’arrièe des sièges, dans les fenêtres et sur les portes, sous forme d’affiches, de stickers avec le logo de chaîne de radios, voire au dos des tickets. Des propos incitant au civisme, des blagues et des pictogrammes détournés sont partout présents et créent une esthétique singulière, envahissante. Cette esthétique ne se retrouve pas dans le métro parisien où les signes sauvages sont plutôt des tags, des détournement de publicités et des affiches non réglementaires. Les nouvelles techniques d’impression sont en train de remplacer les anciens lettrages en lettres gothiques que l’on trouvait dans les combis, ce qui donne davantage de diversité graphique à toutes ces inscriptions.


79

Fig.48 Panneaux routiers

Fig.49 Numéro de ligne au dos des bus

Fig.50 Accessibilité des mototaxis aux endroits non aménagés


80


81

SOCIOLOGIE DE LA SIGNALÉTIQUE

Le graphisme offre la possibilité de créer des signes dans la ville. Le signe montre une certaine volonté qu’ont les gens de vivre ensemble. L’orientation que la signalétique nous donne est une forme de civilité. La fonction d’origine d’une signalisation est celle du « panneau indicateur ». Avec ces dispositifs, l’usager peut identifier des lieux, connaître les itinéraires, la nature et les temps de parcours, la présence d’autres services. La signalétique a alors essentiellement un rôle d’orientation et de service. Mais, pour répondre aux nécessités locales, la diversité du mobilier, des signes, des messages, l’accumulation de panneaux de toutes dimensions et de tous matériaux sur les sites, l’organisation

de ces éléments et leur message ne doivent

pas être ni redondantes, ni incohérentes, encore moins envahissante. Marc Augé décris poétiquement dans Un Ethnologue dans le métro le comportement des usagers à l’intérieur du métro parisien: des modes de lecture, d’interaction avec d’autres passagers, avec les gens qui jouent de la musique ou qui mendient, des façons d’attendre le métro ou de se déplacer dans les couloirs, en révélant la grande variété des modes d’être présents simultanément dans un contexte apparemment contraint. Il prête aussi son attention aux correspondances, aux passages,


82

aux changements de ligne, à la construction d’itinéraires

sein des transports publics. Le fait de signaler ou de

différents – tout ce qui au fait du système un espace

ne pas signaler, le positionnement de ces dispositifs, les

mobile et multiple. L’influence de la signalétique sur les

messages qui y sont inclus – tout cela va permetre une

stratégies de déplacement des usagers est mise au jour.

meilleure gestion des flux de visiteurs et d’améliorer leurs

La standardisation de ce système est en train de modi-

réactions dans l’espace. Les usagers, au moment de faire

fier le comportement des habitants des villes, qui sont en

leurs parcours, reagrdent uniquement l’information dont

train peu à peu de l’adopter. Cette situation, bien qu’elle

ils ont besoin mais pour cela il leur faut apprendre les

facilite la communication entre des cultures différentes

codes. En dehors du territoire même des transports en

au profit d’une mobilité plus grande, peut aussi faire

commun, cette signalétique existe également pour rendre

disparaître d’anciennes habitudes inhérentes à chaque

accessible et visible les points d’entrée de ce territoire.

territoire. Plus subtilement, la tonalité des messages joue aussi un La signalisation permet également de marquer les limites

rôle sur l’image donnée par les transports. De même, le

d’un territoire, de rappeler son identité. Ces repères sont

graphisme d’information peut refléter diverses dimen-

symboliquement importants car ils influencent l’attitude

sions en accord avec la culture urbaine où elle est

du visiteur lorsqu’il pénètre dans un territoire particulier.

inscrite. L’information sera comprise selon l’endroit où

Ces points nodaux jouent un rôle clé dans les processus

elle est placée, certains lieux se prêtant à des explica-

de décentralisation. Ils constituent également une oppor-

tions, d’autres devant privilégier le signe : placer le bon

tunité pour développer des espaces commerciaux et de

message au bon endroit n’est pas évident. La signalé-

service souterrains et nécessitent une signalétique plus

tique demande une réflexion coordonnée à l’échelle

simple. Les stations Chatêlet / Les Halles à Paris en sont

d’un territoire et une concertation des divers acteurs

un bon exemple : dans ce point nodal, se croisent trois

pour qu’elle soit efficace. De plus, elle peut aussi servir

lignes de RER et quatre lignes de métro très fréquentées.

à rappeler les règles de bonne conduite en vigueur

Ce fut donc une profonde transformation pour le quartier,

dans ces espaces. Le réglement et la manière dont il

devenu un lieu central pour le commerce, la culture et

est graphiquement inscrit dans ces espaces sont impor-

le tourisme. Ces espaces commencent à émeger éga-

tants car ils sont rappel à l’ordre adressé aux citoyens,

lement à Lima, dans les grands axes de la ville, afin de

lesquels peuvent prendre connaissance des infractions

décentraliser et de raccourcir les flux, mais aussi pour

à ne pas comettre. Pourtant, la signalisation est souvent

faciliter l’accès au centre-ville grâce l’installation du métro.

traitée de manière ponctuelle, répondant à des besoins

Un bon exemple en est station Centrale, qui intègre un

immédiats et laissée à l’initiative individuelle d’agents

centre commercial, et la station Gamarra, qui donne un

de terrain qui n’ont pas toujours les moyens pour suivre

accès plus simple aux milliers de personnes qui travaillent

les normes (ajout de signes à la main, papiers collés

et achètent dans le quartier, où se trouvent un grand

avec information supplémentaire, etc).

nombre de micro-entreprises d’industrie textile et de confection, ce qui fait de ce quartier l’un des plus grands

L’installation, la supervision et la réparation des pan-

du Pérou dans son genre.

neaux s’appuient sur certaines compétences dont nous avons parlé plus haut ; des capacités de jugement et

La signalisation peut avoir de multiples objectifs qui

d’improvisation qui, si elles semblent contraster avec la

doivent être codifiés et identifiés par divers genres de

dimension extrêmement normalisée du dispositif, sont

panneaux, par un choix d’implantation, par une stratégie

en réalité les conditions de son actualisation et de sa

de messages et de fonctions réglementaires (typographie,

permanence  2. Les panneaux sont comme les mots, ils

couleur, pictogrammes). La gestion des flux est aussi l’un

permettent de parler. Mais sans organisation générale

des objectifs les plus importants de la signalétique au

de la signalétique, il n’y a pas de message.

2  DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro. Paris : Transvalor- Presses des MINES, 2010, p. 174


83

Fig.51 Signalétique de bonne conduite dans le métro de Lima

Fig.52 Exemple de signalétique intermodale à la Gare de Lyon


84

gnements sur les réseaux sont disponibles. Cette nouvelle diffusion des informations permet par exemple à

L’avenir du graphisme dans le métro: physique ou virtuel?

des usagers aveugles ou malvoyants de planifier leur déplacement à l’avance, ce qui facilite l’accessibilité aux transports. En effet, des programmes informatiques peuvent leur permettre de convertir le texte en parole, ou en braille. Ces usagers peuvent se renseigner sur les itinéraires et les horaires à condition que le site Internet soit lui-même accessible  3 . D’après l’étude TNS Sofres-Chronos de 2011 sur la mobilité en France, 61 % des personnes interrogées estime que les Smartphones auront une importance cruciale en tant que support grâce auquel les informations permettront de se déplacer plus facilement,

On pensait qu’Internet et les technologies d’informa-

au même titre que les sites internet et les applications

tion numérique pouvaient potentiellement faire dispa-

(72 %) ou le GPS (77 %), très loin devant les supports

raître les villes à partir du moment où tout le monde

en papier (18%)  4 .

peut travailler depuis n’importe où. Mais contrairement à ces idées, nous somme aujourd’hui dans un moment

Le projet de signalétique intermodal (métro, bus, train,

de l’histoire de l’humanité qui n’a jamais connu autant

etc.) qui est en cours à Paris offrira de des usages

d’urbanisation. La concentration des populations

inédits liés aux nouveaux médias. Cette signalétique

advient dans des grands centres d’activité où des

en partie numérique permettra aux usagers d’anticiper

phénomènes d’extension spatiale sont stimulés par le

les trajets et d’alterner les moyens de transport en fonc-

virtuel. Internet permet, d’une part, de relier des mé-

tion des contraintes des différents réseaux. L’une des

tropoles et, dans chacune d’entre elles, de relier des

conditions essentielles du développement de ces nou-

bureaux, des entreprises, des résidences, des services,

velles formes de services est lié à l’accès aux données

le tout dans un ensemble géographique très impor-

issues des opérateurs de transports, mais aussi aux

tant. Internet permet de travailler depuis n’importe

usagers eux-mêmes. Tous les modes de transport sont

quel lieu car la société s’empare des technologies et

aujourd’hui concernés. L’interraction entre les affiches

les adapte à ses habitudes et à ses besoins.

(publicitaires ou non) et les portables passera par des codes QR. La prise en photo d’un code QR, qui est

Par ailleurs, Internet est au cœur de l’interactivité et

composé de carrés, déclenchera des actions diverses

des nouveaux médias : c’est un réseau opérationnel

sur l’écran du smartphone, comme la réception de l’in-

qui permet d’interagir et de canaliser l’information là

formation sur le temps d’attente du prochain véhicule.

où elle se trouve, puis partout ailleurs, ce pourquoi Internet modifie les canaux de communication et, en

Par ailleurs, plusieurs laboratoires et entreprises tra-

particulier, les communication par écrit, ce qui inclut

vaillent à la mise en place de systèmes permettant de

la signalétique des transports publics.

prévoir l’état futur du trafic, les arrêts aux feux rouges, la planification des trajets en ville, etc. Les services

La plupart des responsables des transports urbains

ainsi créés combinent les données des opérateurs de

disposent dorénavant de sites sur lesquels les rensei-

transport, les croisent avec d’autres données relatives

3  DEJEAMMES, M., ARMENI, A., et RAMBAUD, F. Les bus et leurs points d’arrêt accessibles à tous. Guide méthodologique. TRANSPORT ET MOBILITE, 2001, p. 128 4  SIDAWY Elsa « À l’avenir, 61 % des usagers utiliseront leur mobile pour se déplacer » Innov’in the City, 5 mai 2011. URL : http:// www.innovcity.fr/2011/05/05/avenir-usagers-utiliseront-leur-mobilepour-se-deplacer/


85

au territoire et aux usages en temps réel, ou encore

Fig.53

les enrichissent avec de données liées aux obser-

Panneau interactif

vations des usagers. Le statut légal et l’accès tech-

sur la ligne 1

nique aux données restent encore un obstacle à leur

du métro parisien,

véritable développement. C’est pourquoi il existe des

station Franklin D.

applications « officielles » pour chaque système, mais

Roosevelt

aussi des applications travaillant à partir de données ouvertes (open data) ou d’informations rendues disponibles à l’initiative des transporteurs. De nombreuses applications mobiles sont désormais proposées aux usagers : Comuto, CityLab du MIT, SmartWay, FixMyStreet, See Click Fix, Citysourced,

Fig.54

Beecitiz, Alerte Voirie, Fixmytransport, MySociety,

Application

CheckMyMetro, MetroEclaireur etc  5 . Ces applications,

participative

souvent gratuites, vont fournir aux usagers des trans-

smartphone et web

ports collectifs une plateforme d’échange d’informa-

de Datea sur le plan

tions communautaire sur le trafic d’une part,

de la ville de Lima

mais

aussi des informations relatives à la localisations des musiciens du métro, des publicités ou des graffitis potentiellement intéressants. D’autre part, l’application affiche les itinéraires alternatifs sur une carte qui montre les arrêts, les connexions, les modes de transport, les directions, les heures d’arrivée et de départ. L’utilisateur, s’il décide de changer de destination, reçoit alors, en temps réel, une nouvelle proposition d’itinéraire. S’il est pris dans des embouteillages, le système met à jour les trajtes possibles et propose d’éventuelles solutions alternatives. Le GPS, normalement utilisé pour géolocaliser des véhicules, est aussi

Fig.55

utilisé dans l’espace souterrain du métro parisien.

Application Android

Ce système, baptisé BlueEyes, offre aux personnes à

de réalité augmentée

mobilité réduite, mais aussi aux touristes et aux visi-

et des horaires du

teurs occasionnels, une solution pour se déplacer de

Metropolitano

manière autonome dans les réseaux de la RATP  6 . Dans les villes où les réseaux de transport ne sont pas si développés ou organisés, les applications pour smartphones ne peuvent pas aider les usagers à maîtriser leurs options ; seul un système comme le GPS aide les individus à se repérer dans la rue quand le système est actualisé. Dans le cas de Lima, l’infor-

5  Délégation aux Usages de l’Internet (DUI). Actualités Tourisme et Transport Portail PROXIMA MOBILE http://www.proximamobile.fr 6  Portail web RATP. Plus d’innovations. http://www.ratp.fr/fr/ ratp/r_6335/blueeyes-la-geolocalisation-au-service-des-personnesa-mobilite-reduite-pmr/


86

mation sur les itinéraires des lignes de bus n’est pas donnée sous forme de schémas dans les portails web officiels des entreprises de transport public. Il s’agit souvent d’initiatives d’usagers créant leur propre mode d’emploi du réseau de transport, dans le but d’aider les visiteurs. Des contributions pour améliorer le service sont faites par des habitants, comme DATEA, qui est une plate-forme utilisée sous forme de cartes géographiques interractives de la ville de Lima. DATEA veut améliorer la qualité de vie des habitants en rapport avec les problèmes de transport et l’aménagement urbain que l’on trouve dans ces cartes. Ces technologies ne font pas concurrence à la signalétique in situ, bien au contraire ; elles sont un complément à l’individualisation de l’information. Les schémas abstraits du réseau donnent une idée de l’ensemble ; les cartes, une notion géographique ; et les parcours des lignes y sont très détaillés. Les applications des portables donnent des indications qui sont ensuite confirmées par les panneaux des couloirs et ceux des arrêts. La tendance à utiliser les nouveaux médias est en train de changer le regard des usagers envers leur environnement. Peut-être l’avenir connaîtra-t-il des signalétiques moins homogènes et plus personnalisables. L’installation d’écrans tactiles dans le cadre du renouvellement des stations de la ligne 1 à Paris peut donner quelques pistes sur la manière dont les liens entre le graphisme et les transports en communs pourront se retisser à l’avenir grâce aux nouvelles technologies.


87

Conclusion

Plusieurs facteurs ont, au fil du temps, fait s’éloigner la proximité idéale entre le domicile et le lieu de travail. C’est pour cette raison que les réseaux de transports furent, et sont encore, à la fois une réponse à cette évolution et un moyen de diminuer le temps de déplacement. En ce qui concerne les transports collectifs, c’est tout particulièrement la réalisation des réseaux haut de gamme qui rendent viables ces déplacements. Dans un monde où les connaissances se sont de plus en plus démocratisées grâce aux flux d’information, les pratiques les plus efficaces pour améliorer les déplacements se sont répandues rapidement, créant une standardisation qui va au-delà des premiers pictogrammes du code de la route, au début du XXe siècle. Les réseaux des métropoles du Nord comme ceux de Londres, Paris, ou New York, s’adaptent aux tendances, se renouvellent sans cesse. Les réseaux des nouvelles métropoles comme celles d’Amérique latine, reprennent désormais ces nouveaux standards. Si l’avenir repose sur une maîtrise du développement des zones périphériques, sur une amélioration sensible des qualités environnementales dans les zones à forte population, et sur une meilleure répartition des infrastructures de transport, la bonne organisation des transports publics restera, et de plus en plus, un principe incontournable  1. Comme la signalétique joue un rôle très important lorsqu’il

1  DUHEM Bernard et BEAUCIRE Francis « Les espaces souterrains, points nodaux de la ville éclatée » Espaces et Sociétés n°96 Infraestructures et formes urbaines, 1999 p. 67


88

s’agit de se déplacer, le contrôle de l’environnement gra-

Les signalétiques ne sont pas censées être en concur-

phique doit être prévu dès la conception architecturale

rence – souvent, cette concurrence survient suite à un

des espaces de transport public  2.

mauvais service. La multiplicité des opérateurs, chacun voulant exister avec sa propre marque, aboutit par

Pour une bonne diffusion de l’information la signa-

ailleurs à des désordres signalétiques contradictoires

létique doit être claire : facilement lisible et compré-

dont l’objectif est pourtant le même. Cela ne fait que

hensible; concise – avec des pictogrammes adaptés

perturber la compréhension des usagers. Si le regard

permettant

l’information;

d’un usager se perd en raison des divers panneaux

précise – correcte et vérifiée constamment –, et dis-

de

saisir

rapidement

présents dans l’espace publique, l’identité des trans-

ponible au moment où l’usager en a besoin . Depuis

ports publics d’une ville peut être conçue par rapport

récemment, les individus ne sont plus seulement reliés

aux besoins de déplacement des usagers. Cela per-

les uns aux autres par des voies de transport, mais

mettrait d’avoir une identité plus forte, unique, avec

aussi par l’information : Internet, c’est la société-ré-

moins de dépenses d’installation et de maintenance

seau, un réseau qui constitue la base matérielle de

à long terme. Remplacer des signes disparates im-

nos vies et permet le développement d’une série

plique un nouvel ordre qui doit être conçu selon les

de nouvelles formes de relation sociale. La structure

spécificités du réseau et des citoyens.

3

de cette société-réseau est construite à partir des informations circulant au sein d’Internet, qui est un

Les typographies style 1900 et la Parisine du métro

nouveau moyen de communication  4 . Mais le rôle le

parisien, la Johnston Underground du tube londonien,

plus important d’Internet, dans la restructuration des

ainsi comme les pictogrammes des stations du métro

relations sociales, c’est sa contribution au nouveau

de Mexico DF, sont des exemples où les styles ont

modèle de sociabilité, basé sur l’individualisme.

été unifiés et gardent encore un sens culturel. Même, dans les transports en commun, si la tendance est

Comme Internet se trouve au cœur d’un nouveau

à l’imposition d’un modèle général de graphisme

modèle technique d’organisation de l’information, le

d’information, le devoir des graphistes est de donner

processus global de développement du réseau est

une « touche d’identité » qui familiarisera les usagers

forcément inégal. Les effets cumulés de mécanismes

à la signalétique.

d’exclusion divisent les individus, non dans une configuration Nord/Sud comme auparavant mais entre

Dans les villes du « Nord », ne pas se perdre dans

ceux qui sont connectés aux réseaux globaux, et ceux

les transports publics demande à la fois de la lecture

qui ne le sont pas  5 . L’espace virtuel ne menace pas

pendant les déplacements et un effet sensoriel en-

la réalité, et il ne la remplace non plus. Il enrichit les

gendré par les codes couleur et les divers signes

modalités de relation que nous connaissons.

installés à des endroits stratégiques. Comme une présence discrète dont on ne pourrait parler parce

Pour répondre à la multiplicité des signes présents

qu’elle s’oublie avant de réapparaître au bon moment,

dans les espaces publics, la signalétique des trans-

la signalétique est un art peu reconnu et pourtant

ports publics doivent être repérés facilement. Pourtant,

présent partout.

dans la plupart des villes, chaque système de transport a sa propre identité visuelle, et, parfois, plusieurs

Les caractéristiques du transport public en Amérique

identités visuelles pour un même type de service à

Latine répondent aux besoins des usagers et des

cause sont mélangées.

transporteurs suite à l’expérimentation de systèmes insuffisants par rapport à la demande de mobilité.

2  DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro. Paris : Transvalor- Presses des MINES, 2010, p. 76 3  DEJEAMMES, M., ARMENI, A., et RAMBAUD, F. Les bus et leurs points d’arrêt accessibles à tous. Guide méthodologique. Transport et mobilité, 2001, p. 92 4  CASTELLS Manuel, La galaxia Internet, empresa y sociedad, Ariel, 2001, p.154 5  CASTELLS Manuel, La galaxia Internet, empresa y sociedad, Ariel, 2001, p.307


89

Ces formes de mobilité exigent, par conséquence, de

compréhension ne sont pas forcément liés à la

développer un graphisme d’information singulier et

méfiance des usagers, mais à l’emplacement des

particulier à chaque pays. La reconnaissance des

dispositifs, auxquels ils doivent s’adapter.

signalétiques informelles dans certains types de transport fait partie de la culture urbaine populaire.

En supposant que le transport public urbain soit

Des pays comme le Pérou et le Mexique ont engen-

fortement hiérarchisé, et qu’il y aient des services

dré et dynamisé le style urbain, comme avec les «

locaux dans les quartiers, s’il n’y a aucune ligne

combis » ; ne pas se perdre est alors un enjeu visuel,

qui relie les extrémités de Lima, alors il n’y aura

graphique et gestuel, où l’oralité et la présence des

plus de concurrence entre le système de bus simple

autres orientent aux usagers.

et les systèmes à haute vitesse. Au contraire, les deux systèmes seraient mélangés. Pour l’instant, les

Considérer les signalétiques des transports des villes

services informels continuent à combler les rues

du Nord comme étant supérieures à celles des villes

principales mais emmènent les usagers aux stations.

du Sud n’est pas pertinent car les dynamiques de

L’Amérique latine deviendra bientôt un réseau de

déplacement sont différentes ; la mobilité n’y est pas

villes, et le défi pour Lima est de trouver quelle

la même. Les transporteurs, au Nord comme au Sud,

place elle voudra occuper dans ce réseau. Il ne me

tentent de gérer le temps de la meilleure manière

reste plus qu’à dire : montrez-moi vos panneaux, je

possible afin d’obtenir le plus de bénéfices possibles.

vous dirai qui vous êtes…

Néanmoins, en Amérique latine, le processus d’installation des systèmes de réseau de transport en voie propre est en train de bouleverser cette dynamique et de transformer les actes de langage en signes graphiques. Est-ce un adieu aux rues pittoresques ? Un adieu aux petits métiers de rue ? Un adieu à l’identité graphique de la ville? L’avenir nous le dira. Dans le cas de Lima, la ville vit actuellement un grand moment: le pays doit faire face à une croissance économique ; la démocratie est en train de se renforcer ; et l’avenir repose sans doute sur le développement des espaces urbains. L’arrivée attendue du Metropolitano et du métro, ainsi que le début de réforme du transport public urbain, en témoignent. Pour le moment, la coexistence entre des réseaux de transport en voie propre, en phase de développement, et les anciens réseaux, qui disparaissent peu à peu, rendent les usagers ambivalents : ils en sont toujours à apprendre à lire la signalétique et font de plus en plus confiance aux informations délivrées par les conseillers. Ces problèmes de


90


91

Bibliographie


92

DENIS Jérôme et PONTILLE David. Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro.

Livres

Transvalor- Presses des MINES, Paris, 2010. (MINES ParisTech, Collection Sciences Sociales) ESKILSON, Stephen J. Graphic design: A new history. Yale University Press, 2007.

ADAMOWICZ, Elza. Ceci n’est pas un tableau: les écrits surréalistes sur l’art. L’Age d’homme, 2004.

GAUTRAIS, Marie. RATP.Direction de la communication. Mémento de statistiques annuelles. RATP, Paris, 2011.

ARRELLANO Rolando et BURGOS David. Ciudad de los Reyes, de los Chávez, de los Quispe…Planeta Perú, Lima,

GRAFMEYER Yves et AUTHIER Jean-Yves. Sociologie

2010.

urbaine. Armand Colin Éditeur 3ème Ed. Paris, 2011. (Collection universitaire de poche, série « Domaines et

AUGÉ Marc. Non-Lieux. Introduction à une anthropologie

approches des sciences sociales » n°128)

de la surmodernité, Paris, 1992 GUTIÉRREZ, Andrea. Transporte público y exclusión AUGÉ Marc. Un ethnologue dans le métro. Le Seuil, Paris,

social. Reflexiones para una discusión en Latinoamérica

1986.

tras la década del ‘90. XIII Congreso Latinoamericano de Transporte Público y Urbano. CIDATT- Centro de

AUGÉ Marc. Le métro revisité. Le Seuil, Paris, 2008.

Investigación y de Asesoría del Transporte, Lima, 2005.

BAER Kim. Information Design Workbook. Rockport

HARLEY, John Brian. The new nature of maps: essays in

Publishers, Beverly, Masachusetts, 2008.

the history of cartography. Johns Hopkins University Press, Baltimore, 2002

BERMAN, Marshall. All that is solid melts into air: The experience of modernity. Verso, 1983.

HARTMANN,

Frank.

Visualizing

Social

Facts:

Otto

Neurath’s ISOTYPE Project. European Modernism and the BIELICH SALAZAR Claudia. La guerra del centavo :

Information Society: Informing the Present, Understanding

una mirada actual al transporte público en Lima

the Past, W. Boyd Rayward, 2008.

Metropolitana. Publicaciones del Instituto de Estudios Peruanos, Lima, 2009. (Serie Investigaciones Breves del

HEURGON, E. Nouveaux rythmes urbains et organisation

CIES ; n°31)

des transports. Institut National de Recherche sur les Transports et leur Sécurité (INRETS), RATP, Paris, 2001.

CAMBON DE LAVALETTE, Brigitte. La signalétique dans le réseau des déplacements routiers : histoire et fonction en

HEVIA, Julio. Habla, jugador: gajes y oficios de la jerga

Actes INRETS, 2001.

peruana. Taurus, 2008.

CASTELLS Manuel, La galaxia Internet, empresa y sociedad, Plaza y

LIEBERHERR-GARDIOL Françoise et SOLINIS Germán.

Janés, Madrid, 2001

Quelles villes pour le 21e siècle ? Gollion : Infolio éditions, 2012. (Collection Archigraphy Poche)

CORPORACION ANDINA DE FOMENTO (CAF) Desarrollo urbano y movilidad en América Latina. Norma Color,

LADEUIX, Anabella MANZONI, Manuel MICCIO, María

Panama, 2011.

Cecilia. TransportePúblico y DesigualdadSocial. Un análisis comparativo en la ciudad de Mar del Plata. Universidad

DEJEAMMES, M., ARMENI, A., et RAMBAUD, F. Les bus et

Nacional de Mar de Plata Facultad e Humanidades,

leurs points d’arrêt accessibles à tous. Guide méthodolo-

Licenciatura en Sociología, 2009

gique. Transport et mobilité, 2001.


93

LATTES, Alfredo E. « Población urbana y urbanización en América Latina ». CARRIÓN, Fernando. La ciudad construida: urbanismo en América Latina. FLACSO, Ecuador, 2001.

Journaux

p .49 -76 LIPTON Ronnie. The Practical Guide to Information Design. New Jersey : John Wiley & Son’s Inc, 2007.

BARBIER Chrystelle. « À Lima, la réforme des transports urbains est

ONGIN, Olivier. Vers la troisième ville?. Hachette, 1995.

une priorité » LE MONDE, version web du 23 août 2012. URL : http:// www.lemonde.fr/planete/article/2012/08/23/a-lima-la-reforme-des-

NICHOLSON

et

WATSON.

From

HIEROGLYPHS

to

transports-urbains-est-une-priorite_1749014_3244.html

ISOTYPES en Future Books N°III “The Crowded Scene”,1946, p.92-100. Scans.

CUVELIER, PASCALINE. Un signe de Jean Widmer. «Jean Widmer, un écologiste de l’image».

PARKER Simon, Urban Theory and the Urban Experience: Encountering the City 2004

Libération, 29 novembre 1995. http://www.liberation.fr/ vous/0101160221-un-signe-de-jean-widmer-jean-widmer-un-

PINÇON

Michel

et

PINÇON-CHARLOT

Monique.

ecologiste-de-l-image

Sociologie de Paris. 2ème Ed. Paris: Éditions La Découverte, 2008. (Collection RépèresPLAISAIT, Bernand. L’accueil des

RIVAS Tomas. Así funcionarán las bibliotecas con vagones

touristes dans les grands sites de transit. La Documentation

del subte A. La Nación. 11 janvier 2013. http://www.lana-

française, Collection des rapports officiels. Paris, 2004.

cion.com.ar

www.ladocumentationfrancaise.fr RAGON, Michel. Histoire de l’architecture et de l’urbanisme modernes. Vol. 1. Ideologie et pionniers: 1800-1910; Vol. 2 Naissance de la cité moderne: 1900-1940, Seuil , Paris, 1991. STRÖM Marianne, Métro-art et métro-poles. ACR Éditions, Paris, 1986 TEISSIER-ENSMINGER, Anne. Autos, panneaux, signaux: du droit en un clin d’oeil. Editions L’Harmattan, 1998. URBAIN, Jean-Didier. L’idiot du voyage. Histoires de touristes L’envie du monde.Plon, 1991. VIGNELLI, Massimo. Vignelli from a to Z. Images Publishing, 2007. O’GRADY, Jennifer Visocky et O’GRADY, Kenneth Visocky. The information design handbook. How Books, 2008.


94

Revues

CAPEL, Horacio. « La definición de lo urbano »Estudios Geográficos, 1975, vol. 138, p. 265. DUHEM, Bernard et BEAUCIRE, Francis. « Les espaces souterrains, points nodaux de la ville éclatée » Espaces et sociétés GOLEDZINOWSKI, Felicia. « Signalisation et désorientation dans le métro ». Communication et langages n°55, 1983. pp. 55-70.

Sites web ACUÑA, Virgilio. Por qué dejamos que desaparecieran los tranvías de Lima? virgilioacuna.com, 29 avril, 2010

http://virgilioacuna.com/2010/04/29/¿porque-dejamos-quedesaparecieran-los-tranvias-de-lima/

Belsoeur Camille. UNDERGROUND: L’histoire du métro londonien à travers les cartes. www.lepetitjournal.com 9 octobre 2012 http://www.lepetitjournal.com/londres/accueil/ actualite/124851-underground-lhistoire-du-metro-londoniena-travers-les-cartes

SHERINGHAM, Michael. « Trajets quotidiens et récits délinquants ». Temps zéro. Revue d’étude des écritures

BRADANOVIC Tomas. La cultura combi. 15 avril 2007.

contemporaines, nº 1, 2007.

http://tombrad.wordpress.com/2007/04/15/la-cultura-combi/

ZARATE, Joseph. Flash, las letras de un pincel ambulante.

BURNEY, J. Road Sign History : Filled with Twists and Turns. Municipal Supply & Sign Co. Florida, 2011

Revista NNoût 2012. FLONNEAU, Mathieu. Paris au cœur de la révolution des

http://municipalsigns.com/wordpress/2011/10/ road-sign-history-filled-twists-turns/

usages de l’automobile 1884-1908. Histoire, économie & société, février 2007, p. 61-74.

CONSEJO DE TRANSPORTE DE LIMA Y CALLAO. Proyecto de Transporte Urbano para el Area Metropolitana de Lima y Callao. http://www.mtc.gob.pe/ctlc/protum.htm FONAM – PROTRANSPORTE. Estudio para la Consolidación del Sistema Integrado de Transporte Público de Lima, Resumen Ejecutivo, 2010 http://www.protransporte.gob.pe/COSAC_II/Memoria/ ResumenEjecutivo.pdf GALOIN, Alain. Les embarras de la circulation en 1643- 1945 L’Histoire par l’image.org. Réunion des musées nationaux, Ministère de la Culture et de la Communication de France. http://www.histoire-image.org/site/etude_comp/etude_comp_ detail.php?i=636&d=1&m=signalisation&id_sel=1093

GOETA, Samuel. « Lisibilité urbaine et signalétique du transport parisien. Entretien avec Jérôme Denis » Urbanews.fr, 10 juillet 2012. http://www.urbanews.fr/2012/07/10/22132-lisibilite-urbaine-etsignaletique-du-transport-parisien-entretien-avec-jerome-denis/

MULLEN, Chris. The ISOTYPE Institute en The visual telling of stories.


95

http://www.fulltable.com/VTS/index2.htm NICOLAS, Alexandre. Histoire de la cartographie - Le développement de la cartographie moderne (XV-XVIIIème siècle) Le Catrographe.net http://www.le-cartographe.net/index.php/fr/ notions/56-le-developpement-de-la-cartographie-moderne

PLANTIN, Jean-Christophe « Google Maps versus OpenStreetMap : redistribution des cartes sur le Web ? » InaGlobal, La Revue des industries créatives et des médias. Institut National de l’Audiovisuel.28 mai 2012 http://www.inaglobal.fr/numerique/article/google-maps-versus-openstreetmap-redistribution-des-cartes-sur-le-web

Délégation aux Usages de l’Internet (DUI). Actualités Tourisme et Transport Portail PROXIMA MOBILE http://www.proximamobile.fr

REYNA ARIMBORGO, Carlos. Comparando al Metropolitano. Creyna Comentarios, 24 mai 2011 http://creyna-comentarios.blogspot.fr/2011/05/comparando-almetropolitano-conclusion.html

SECRETARÍA DE TRANSPORTES Y VIABILIDAD (SETRAVI) Cinco siglos de Transporte en la Ciudad de México. La secretaria de Transportes y Vialidad del gobierno del Distrito Federal, México D.F http://www.setravi.df.gob.mx/wb/stv/cinco_siglos_de_transporte_en_la_ciudad_de_mexico_/_rid/71?page=2

SIDAWY Elsa « À l’avenir, 61 % des usagers utiliseront leur mobile pour se déplacer » Innov’in the City, 5 mai 2011. http://www.innovcity.fr/2011/05/05/ avenir-usagers-utiliseront-leur-mobile-pour-se-deplacer/

STRENIO, Jacqueline Ann. La Economía del Transporte Público en Santiago de Chile. Independent Study Project (ISP) Collection. Paper 320, 2006. http://digitalcollections.sit.edu/isp_collection/320 TABARY, Zoé. « Tube vs Métro » www.lepetitjournal.com/ londres, 27 février 2012 www.lepetitjournal.com/pratique.../96047-transport-tube-vsmetro.html

TREGGIDEN, Katie « Images ISOTYPE Confessions of a design geek Design Blog.19 février, 2011 http://confessionsofadesigngeek.com/2011/02/19/ out-and-about-isotype/

WOLKE, Leslie. Sistema de señalisación del Subte Diseño Shakespear Argentina. DGCV™ / Portal informativo sobre Diseño Gráfico y Comunicación Visual. 17 octobre 2010 http://www.dgcv.com.ar/ sistema-de-senalizacion-de-subte-por-diseno-shakespear/


96

Table des illustrations

Fig.13 Accès de la station Acoyte après le renouvellement de la ligne A du métro de Buenos Aires. http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f8/Buenos_Aires_-_Subte_-_ Acoyte_2.jpg Fig.14 BECKHAM, Walter (photographe). Station Charles de Gaulle- Etoile, Paris, 2011. http://walterbeckhamphotography.blogspot.fr/2011/09/metro-paris-france.html

Fig.1 Arrêté préfectoral, Salon 1906 [pancarte prévenant que la route est barrée pour cause de course automobile] : [photographie de presse] / [Agence Rol]. Bibliothèque nationale de France. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b69125593 Fig.2 STINGEMORE, Frederick H. Map Of London’s Underground Railways, 1927

Fig.3

Fig.15 PORCHEZ, Jean-François. Panneau de sortie d’une station du métro parisien (typographie Parisine), 1996. http:// www.graphismeenfrance.fr/gf-medias-2010/ratp.jpg

Fig.16 parisien

Flèches

et schéma d’une ligne dans le métro

BECK, Harry. Schéma de poche Underground,1933

Fig.4 Exposition de Shanghai. Plan du réseau du métro de Shanghai, 2010

Fig.5 NEURATH Otto et ARNTZ, Gerd. Symbols of pictorial statistics, ISOTYPE Project : Gerd Arntz Web Archive. http://www.gerdarntz.org/isotype

Fig.6 Signalétique du Forum La-Caixa. Barcelone. http:// media.smashingmagazine.com/wp-content/uploads/uploader/ images/signs/caixa-forum-pictograms/full_caixa-forum-pictograms.jpg Fig.7 CHOI Nahee. Pictograms in NYC. http://choin519. wordpress.com/blog/pictograms-in-nyc/

Fig.8 Pictogrammes standard. http://media.smashingmagazine.com/wp-content/uploads/uploader/images/free-iconsets/151.jpg

Fig.9 Valmetro, métro de Maracaibo, Venezuela. Plan schématisé de la ligne 1 http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/6b/ Valmetro-linea_1.gif

Fig.10 Métro de Mexico D.F. Plan schématisé de la ligne 12. http://www.movimet.com/2012/10/ciudad-de-mexico-la-redde-sistema-de-transporte-colectivo-metro/ Fig.11 Station Sol, métro de Madrid. http://www.metromadrid.es/comun/imagenes/Las_tienes_que_conocer/Galeria_ Imagenes_Puerta_del_Sur/foto4.JPG

Fig.12 Accès d’une station de métro de Buenos Aires avant 2005. http://www.dgcv.com.ar/wp-content/uploads/2012/03/ subte2.jpg

Fig.17 Station Saint Lazare. PEPINSTER, Julien. Le métro de Paris. La Vie du Rail. Paris, 2010 p.120 photo

Fig.18 Station Montparnasse- Bienvenüe, ligne 13 du métro de Paris

Fig.19 Train LGB : Un train au plafond. canalblog.com. Pub dans le métro : Puma se paie Opéra. http://lgb4ever.canalblog.com/archives/2008/09/25/10718336.html

Fig.20 NASTY. Panneau de sortie vandalisé au métro de Paris. http://www.boumbang.com/ dessine-moi-un-metro-2/

Fig.21 Ecran publicitaire vandalisé. http://wanderingcity.me/tag/metro/ Fig.22 NASTY. Plan du réseau Île-de-France vandalisé au métro. http://wanderingcity.me/tag/metro/ Fig.23 NASTY. Plan du métro de Paris vandalisé. Dessine-moi un métro. Gallerie Margoth. Paris, 2011. http://wanderingcity.me/tag/metro/ Fig.24 Tramway à Lima au début du XXe siècle. http://www.boletindenewyork.com/tranvias1928.htm Fig.25 Schéma des lignes desservies du tramway à Lima et Callao. http://www.boletindenewyork.com/tranviasmap1.htm

Fig.26 THURMAN, Brooke. «Combi Update». The Lima Bean. http://brookethurman.wordpress.com/2009/11/02/ combi-update/


97

Fig.27 VALDIVIA, Juan Carlos. «Total?». Perufail.com. http://www.perufail.com/2012/10/24/ paradero-prohibido-letrero-cartel-contradictorio/

Fig.41 FERNANDEZ, Giovanna (photographe). «Metro de Lima : pruebas preoperativas son gratuitas» El Comercio, 4 janvier, 2012.

Fig.28 DIJK, Kasper. «Travelling mad» Cuy con papas : Reports and observations on Peru. http://cuyconpapas.wordpress.com/2010/07/09/travelling-mad/

Fig.42 Toustodo’s Blog. «Tren electrico de Lima, un elefante blanco». http://toustodo.wordpress.com/2011/10/20/ el-tren-electrico-de-lima-un-elefante-blanco/tren_elec_1/

Fig.29 SPENCER, Henry. «Instrucciones de combi»http://www.perufail.com/2011/12/07/evitar-inalacion-monoxido-musica-combi-coaster-custer-micro-bus/

Fig.43

Fig.30 «Humble combi». Peru Times. http://senorsi86.wordpress.com/2008/11/07/the-humble-combi/

Fig.31 Vue de ´La Via Expresa del Paseo de la República», ligne 1 du Metropolitano

Point d’information à la station Ayacucho

Fig.44 Portail Autoridad Autonoma del Tren Electrico (AATE). http://www.aate.gob.pe/2012/01/03/ comenzo-la-operacion-del-metro-de-lima/

Fig.45 Portail Autoridad Autonoma del Tren Electrico (AATE). http://www.aate.gob.pe/2012/01/03/ comenzo-la-operacion-del-metro-de-lima/

Fig.32 Cafeinico Blogger «El Metropolitano». http://cafeinico.blogspot.fr/2010/10/el-metropolitano.html

Fig.46 Portail Linea 1 métro de Lima. Schéma de l’ensemble de la ligne 1 du métro http://www.lineauno.pe

Fig.33 LANATTA, Gianfranco. «Lentopolitano, parte I». La Mula.pe http://lamula.pe/2010/06/09/lentopolitano-parte-i/ hablalanatta

Fig.47 DIJK, Kasper. «Travelling mad» Cuy con papas : Reports and observations on Peru. http://cuyconpapas.wordpress.com/2010/07/09/travelling-mad/

Fig.34

Fig.48 Panneau D21 «Panneau de signalisation directionnelle de position (France)» Academic.ru. http://fr.academic. ru/dic.nsf/frwiki/1287647 et EZETA, Daniel. «Carteles inteligentes» en Perufail.com http://www.perufail.com/2011/06/15/ semaforo-frustrado-tapado-carteles-publicidad-peatonal/

Un conseiller à la station Benavides

Fig.35 Cafeinico Blogger «El Metropolitano». http://cafeinico.blogspot.fr/2010/10/el-metropolitano.html

Fig.36 Cafeinico Blogger «El Metropolitano». http://cafeinico.blogspot.fr/2010/10/el-metropolitano.html

Fig.37 TV Peru. «MML : Alza de tarifas del Metropolitano no sera implementado» http://www.tvperu.gob.pe/noticias/ locales/municipales/39570-mml-alza-de-tarifas-del-metropolitano-no-sera-implementado.html Fig.38 Wikipedia commons. Vue de l’intérieur d’un des bus du Metropolitano http://commons.wikimedia.org/wiki/ File:Interior_de_un_bus_del_Metropolitano_en_Lima_2.JPG

Fig.39 Portail El Metropolitano de Lima. Como usar el Metropolitano. http://www.metropolitano.com.pe/index.php/ como-usar-el-metropolitano Fig.40 ULMA Construccion. Tren Electrico, Lima. Estructuras MK. http://www.ulma-c.com/3/Obras/231/Tren-eléctrico,-Lima,Perú.aspx

Fig.49 RATP0145 blog Images des Bus RATP. ratp0145.skyrock.com/profil/wall/

http://

Fig.50 «The Streets of villa el Salvador on a cloudy day» Where we where from Blog. Wordpress. com http://wherewewerefrom.com/2012/07/26/ the-streets-of-villa-el-salvador-on-a-cloudy-day/ Fig.51 «Señalética interesante en Lima» Obtuzo Blog. http://obtuzo.blogspot.fr/2012/09/senaletica-interesante-enlima.html Fig.52 «La gare de Lyon fait peau neuve» Portail SNCF http://www.sncf.com/fr/actualite/halls-paris-gare-de-lyon Fig.53 Panneau interactif sur la ligne 1 du métro parisien Portail RATP. Plus d’innovations. http://www.ratp.fr/fr/ ratp/c_9087/ligne-1-un-projet-d-avenir/ Fig.54 DATEA beta. «Mapeo de baches, fallas en diseño, lugares peligrosos». http://www.datea.pe/#/mapeo/11 Fig.55 VELASQUEZ LOPEZ, Diego. Application Android de réalité augmentée et des horaires du Metropolitano https:// play.google.com/store/apps/details?id=com.diegoveloper. metropolitano&feature=search_result


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.