…vu de l’atelier
… ou la couleur de l‘autoportrait
couleurs de peintres
Notre époque retient de la vision des peintres du passé, le souvenir d’une couleur devenue emblématique, couleur qu’ils ont choisie et aimée en fonction de leur sensibilité acérée et expérimentée. La postérité a donc retenu dans l’histoire de l’art, la rencontre entre un génie créatif et une qualité chromatique typique de sa palette. Il est vrai que les peintres anciens, en broyant terres et pigments, fabriquaient des couleurs propres à leur atelier, à leurs besoins et à leurs envies. Ainsi n’est-il pas interdit de concevoir que le rouge que Titien utilisait était celui qui lui convenait, parce qu’il l’avait conçu, mis au point, perfectionné, fabriqué. Le rouge Titien serait donc bien une référence tangible, une teinte désirée, reproduite avec la plus grande constance possible tout au long de sa carrière. La question est aujourd’hui de savoir laquelle ? Le souvenir qu’un peintre laisse est souvent celui d’une couleur qu’il aime à utiliser, presque comme un leitmotiv, une signature. Celle-ci finit par entrer dans une palette culturelle, un répertoire de couleurs partagées. L’œil a donc mémorisé un registre de couleurs clairement attribué à un peintre, souvent étalonné sur la foi d’un tableau emblématique. Pour chacune des couleurs de cet imaginaire collectif, A3DC dresse son inventaire sensible des couleurs de peintres. La base de travail, son étalon indiscutable et méthodologique est l’autoportrait, témoin indestructible où le peintre s’est mis en scène dans la couleur qu’il affectionne, dans sa volonté de transmission d’un message visuel intact, destiné à traverser le temps.
l’inspiration
Mission passionnante du coloriste, retrouver et ranimer un savoir collectif, lui donner forme et couleur, celui des couleurs communément attribuées à tel ou tel créateur, parce qu’elle lui fut une teinte de prédilection ou d’usage constant. Enfin, tout savoir du vert Véronèse ou du bleu Chardin, et parler couleur en connaissance de cause, grâce à un vocabulaire établi… Chaque page de ce cahier présente l’étalon d’une couleur attribuée à un artiste, telle qu’A3DC la conçoit et la mémorise, avec la référence à l’autoportrait du peintre, quand le tableau existe, et qui nous semble le maître-étalon. Du temps suspendu, un voyage dans le monde de la peinture, comme un bain bouillonnant de culture…à la recherche de la couleur de l’autoportrait et des couleurs de peintres.
l’aspiration
autoportrait au chat, 1928 blanc foujita, un blanc sfumato grisĂŠ, glacĂŠ
blanc Foujita
Ts u g u h a r u Fo u j i t a é t u d i e à l ’ é co l e d e s A r t s d e To kyo j u s q u ’ à s o n d i p l ô m e e n 1 9 1 0. E n 1 9 1 3 , p a r t i p o u r l a Fra n ce, i l é t u d i e l a p e i n t u re e t l a g rav u re à l ’ É co l e d e Pa r i s . I l re n co n t re M o d i g l i a n i , Pa s c i n , S o u t i n e e t L é g e r, s e l i e ra p i d e m e n t d ’a m i t i é ave c J u a n G r i s , P i c a ss o e t M a t i ss e. Fo u j i t a , aya n t fa i t i n st a l l e r d a n s s o n p re m i e r a te l i e r a u 5 , r u e D e l a m b re à M o n t p a r n a s s e, u n e b a i g n o i re ave c l ’e a u c h a u d e co u ra n te, b e a u co u p d e m o d è l e s y v i e n n e n t a p p r é c i e r ce l u xe. Pa r m i e u x , K i k i q u i p o s e n u e p o u r l u i . U n p o r t ra i t d e K i k i , i n t i t u l é “ N u co u c h é à l a to i l e d e J o u y ” , l a m o n t re d é n u d é e s u r u n fo n d b l a n c i vo i re. I l fe ra s e n s a t i o n à Pa r i s a u s a l o n d ’a u to m n e e n 1 92 2 , s e ve n d a n t p l u s d e 8 .0 0 0 f ra n c s . Tr è s v i te à p a r t i r d e s o n ex p o s i t i o n d e 1 9 1 8 , Fo u j i t a a c q u i e r t l a re n o m m é e d e p e i n t re d e b e l l e s fe m m e s e t d e c h a t s , ave c u n e te c h n i q u e t r è s o r i g i n a l e d e b l a n c s i n s p i r é s d u j a p o n i s m e. E n 1 9 5 5 , Fo u j i t a o b t i e n t l a n a t i o n a l i t é f ra n ç a i s e. A p r è s u n e i l l u m i n a t i o n myst i q u e d a n s l a b a s i l i q u e S a i n t - R é m i à Re i m s , Ts u g u h a r u Fo u j i t a s e co nve r t i t a u c a t h o l i c i s m e e n 1 9 5 9 e t s e fa i t b a p t i s e r L é o n a rd Fo u j i t a . I l m e u r t d ’ u n c a n ce r à Z ü r i c h e n 1 9 6 8 .
bla n c Fou jit a , b la n c Z u rb a r a n , b la n c M al e v it ch, t it ane ,
autoportrait, 1630-1639 blanc zurbaran, un blanc rosĂŠ clair, de chair, couleur de peau
blanc Zurbarran
Zurbaran est avant tout un peintre religieux. Son art d’une grande force visuelle et d’un profond mysticisme est mis au profit d’une cause à servir, la foi. Ses couleurs ont donc une signification, véhicule un message... Peintre du siècle d’or espagnol, Francisco de Zurbaran, contemporain et ami de Velázquez, devient l’artiste emblématique de la Contre-Réforme. D’abord très marqué par Le Caravage, son style austère et sombre évolue pour se rapprocher de celui des maîtres italiens maniéristes. Ses représentations s’éloignent du réalisme de Velázquez et ses compositions s’éclaircissent dans des tons plus acides. L’usage de ces blancs lumineux, tranchant sur le clair-obscur de ses fonds sombres est en soi un message. Le blanc pur est réservé à la représentation des hommes saints, des hommes de foi. Les autres, les humains, le commun des mortels portent tous des faux blancs, salis, tachés, des blancs cassés sans aucun doute par le pêché, la faute. Cette transcription par la couleur de l’imperfection de l’homme est emblématique dans l’usage que Zurbaran a du blanc, un faux blanc Zurbaran, plein de vie, de profondeur, d’erreur, réchauffé d’humanité. Pas très éloigné du blanc de la reine Isabelle, la fameuse couleur Isabelle, en somme…
blanc Watteau, gris Whistler, jaune Vouet, jaune Van Gogh*,
autoportrait, 1972 rose Bacon, un rose putride de chair fânÊe
rose Bacon
Francis Bacon est né en 1909 à Dublin. Peintre de la violence, de la cruauté et de la tragédie, Bacon dit lui-même que “l’odeur du sang humain ne me quitte pas des yeux“. Le jeune Bacon est un enfant maladif, asthmatique, maigrelet. Son père, éleveur et entraîneur de chevaux, l’éduque avec rigueur, jusqu’à le rejeter, puis le renvoyer du foyer familial, à 16 ans, lorsque son homosexualité est découverte. Son œuvre se déploie en grands triptyques mettant en scène sa vie, ses amis, son admiration pour Vélasquez, Van Gogh ou Picasso. Ses portraits torturés sont comme pliés dans la texture de la toile, déchirés, écartelés. C’est de l’âme sensible couchée sur la toile, comme épinglée et suspendue dans le temps. Cette animalité de l’humain, cette souffrance, cette torture aussi bien physique que mentale, c’est la chair qui les exprime le mieux, une chair rose, humaine, un rose d’incarnation. Avec le rose emblématique du message du peintre, la couleur porte ce que le rose a de plus terrible, de plus sourd, de plus funeste. Le rose Bacon est la couleur d’une force à la fois autant dérangeante que puissante, un rose morbide de la déchéance, des corps malades ou morts, de la décomposition, du temps qui passe et du dégoût de soi. Rien de confiant, rien de rose, rien de mièvre, la couleur de Bacon est celle de l’inconfort même… et c’est le rose qui signe à la fois toute la force et toute la faiblesse d’un des plus grands peintres modernes.
jaune Gauguin, jaune Brueghel, jaune Munch, jaune Toulouse-Lautrec,
autoportrait, 1910 rouge malevitch, un rouge basique, essentiel, graphique
rouge Malevitch
Kazimir Severinovitch Malevitch est né à Kiev en Ukraine, (Empire russe) le 23 février 1879. C’est un des premiers artistes abstraits du XXe siècle. Peintre, dessinateur, sculpteur et théoricien, Malevitch fut le créateur d’un courant artistique dénommé par lui « suprématisme ». Après une formation de dessinateur technique à Moscou en 1902, il développe en autodidacte son œuvre plastique qu’il décline au cours de sa vie dans une dizaine de styles différents: Réalisme, Impressionnisme, Symbolisme, Cézannisme, Fauvisme, Néoprimitivisme, Cubofuturisme, Cubisme alogique, Suprématisme, Supranaturalisme. En 1915, il présente à la «Dernière exposition futuriste de tableaux 0,10 (zéro-dix)» un ensemble de 39 oeuvres qu’il appelle «suprématistes», dont Quadrangle, surtout connu comme Carré noir sur fond blanc que Malevitch forgera plus tard en oeuvre emblème du suprématisme. En 1918, il peignit Carré blanc sur fond blanc, qui est considéré comme le premier monochrome de la peinture contemporaine.Même si les autorités lui décernèrent des funérailles officielles en 1935, la condamnation de son œuvre et du courant suprématiste s’accompagna d’un oubli de plusieurs décennies. La reconnaissance de cet artiste intervint à partir des années 1970. Depuis, les nombreuses rétrospectives à travers le monde ont consacré Kazimir Malevitch comme l’un des maîtres de l’art abstrait.
rose Bacon, rose Pompadour, rose Pontormo, rose Signac,
portrait de l’homme au turban rouge, Van Eyck, 1433 rouge van eyck, un rouge prÊcieux, rouge de velours grenat
rouge Van Eyck
Jan van Eyck, est un peintre néerlandais de la fin du XIVe siècle, célèbre pour ses portraits d’un réalisme minutieux. Cette précision est donc au service de messages à faire passer. Les tableaux les plus connus de van Eyck, la Vierge du Chancelier Rolin et le portrait d’un homme au turban rouge que l’on soupçonne fort d’être un autoportrait, sont très révélateurs d’un intérêt commun pour le rouge, un rouge chez Van Eyck qui se révèle être fastueux, opulent, profond et généreux, marquant une ascension certaine dans la société de son époque et la richesse du statut social. L’homme au turban rouge porte en réalité un chaperon dont les extrémités, habituellement laissées pendantes, sont ici attachées entre elles au sommet du crâne, une précaution nécessaire portée par un peintre. Un personnage, situé à l’arrière-plan de la Vierge du Chancelier Rolin, porte un chaperon similaire. Il a donc également été suggéré qu’il s’agissait d’un autre autoportrait de l’artiste, en rouge. Ce rouge est emblématique du peintre, d’autant plus que ce rouge signe également le portrait de sa femme, Marguerite van Eyck, vêtue d’une élégante robe de laine rouge bordée de petit-gris. Van Eyck utilisera le même rouge et la même figure de femme pour le portrait de la Vierge dans le tableau du Chancelier Rolin. Une belle preuve d’entêtement et de boucle infinie…
rose Balthus, orange Cézanne, orange Kalho, orange Gauguin,
portrait de Marcantonio Trevisani, 1554 rouge titien, un rouge de terre cuite et d’oxydes
rouge Titien
Tiziano Vecellio naît vers 1490 à Pieve di Cadore, en Vénétie. Envoyé à Venise avec son frère Francesco à l’âge de 10 ans pour étudier l’art, il entre dans l’atelier de Giovanni Bellini, l’artiste le plus réputé de Venise et y fait la connaissance de Giorgione. En 1516, Tiziano est nommé peintre officiel de la République de Venise. Il établit un atelier sur le Grand Canal. De nombreux artistes contemporains y passent dont Tintoretto et El Greco. En 1520, il exécute une importante commande pour la décoration du Palais des Doges, et les portraits des doges successifs. Considéré comme un grand portraitiste de l’époque, notamment grâce à son habileté à faire ressortir les traits de caractère de ses sujets, il rencontre, en 1530, Charles Quint à l’occasion d’un voyage en Italie. L’empereur germanique lui accordera le titre de Comte Palatino et Cavaliere dello Sperone d’Oro, un honneur sans précédent pour un peintre. En 1545, Titien se rend à Rome à l’invitation du pape Paul III et découvre les œuvres de MichelAnge. En 1548, il se rend à Augsbourg où se tient la Diète du Saint-Empire, présidée par Charles Quint, occasion pour lui de peindre les portraits de notables et de l’empereur luimême. Sa dernière phase de travail, caractérisée par une touche beaucoup moins graphique et plus libre, laisse penser que Titien a peint avec ses doigts certains de ses tableaux de la fin de sa vie. Il meurt de la peste en 1576 à Venise.
rouge Van Dongen, rouge de Vlaminck, rouge Raphaël, rouge Derain,
autoportrait, 1907 brun picasso, un brun de terre jaune, un brun d’afrique
brun Picasso
Picasso est une force de la nature, une force créative, un torrent d’inventivité, un taureau, un sanguin. Il est un défricheur, ayant tout inventé, car Picasso, en tout, a toujours été le premier. En 1907, il peint la première œuvre d’art moderne, les Demoiselles d’Avignon. Peu savent que cette période de Picasso, marquée par les tons de bruns naturels et de terres est influencée par l’Afrique, Picasso étant sous le charme puissant de masques africains qu’il vient d’acheter. La première période créative de Picasso, la période brune court jusqu’en 1909 et les portraits s’enchaînent dans des tonalités somptueuses et chaudes de couleurs de terres, d’ocres et de pigments naturels. L’autoportrait de 1900 est de ceux-ci. Très vite, Picasso détruit 500 ans de tradition artistique avec sa révolution cubiste et il innove encore. Peintre mais aussi sculpteur de génie, il travaille avec tout ce qui lui tombe sous la main : bois, tôle, jouets, ustensiles de cuisine, galets et clous. Diana Widmaier Picasso, petite-fille du peintre, a même dévoilé un curieux petit secret de famille aux auteurs du livre “Cent secrets du monde de l’art“. En 1938, Picasso a été jusqu’à utiliser les excréments de sa fille Maya car, selon lui, “les excréments d’un nourrisson de 3 ans avaient une texture et une couleur d’ocre uniques“. Pablo Picasso aura été à nouveau le premier artiste à créer des œuvres d’art à partir de matière fécale humaine… Picasso, ou le génie de l’art de la provocation.
rouge Van Eyck, rouge de Staël, rouge Malevitch, rouge Rothko,
autoportrait, 1895-1900 orange cézanne, un orange de fleurs et de fruits, de souci et d’épices
orange Cézanne
Paul Cézanne naît en 1839 à Aix-en-Provence. Au collège, il se lie d’amitié avec Émile Zola. En 1862, Cézanne travaille à l’Académie Suisse et y rencontre Pissarro, Renoir, Monet, Sisley… De 1872 à 73, installé à Auvers-sur-Oise, il peint avec Pissarro, rencontre Van Gogh et travaille dans la maison du docteur Gachet. En 1874, il expose collectivement avec ses amis Impressionnistes dans l’atelier du photographe Nadar, et le public réserve un accueil scandalisé aux toiles de Cézanne. Il rejoint la Provence à partir de 1882, d’abord à L’Estaque, puis à Gardanne en 1885, petit village près d’Aix. Là, chef de file de la nouvelle école de “Plein air”, il commence son cycle de peintures sur la Montagne Sainte-Victoire qu’il représentera près de 80 fois. En 1886, vexé, blessé, il rompt avec Zola qui lui a dédié son roman “L’Œuvre”, le peintre ayant inspiré l’écrivain. Zola y fait de Claude Lantier, personnage central proche de Cézanne par la physionomie et le caractère, un peintre raté, finissant par se suicider. En 1895, Cézanne loue un cabanon aux carrières de Bibémus où il passe une bonne partie de son temps, à peindre, En octobre 1906, alors qu’il peint dans le massif de la Sainte-Victoire, un violent orage s’abat. Cézanne fait un malaise, est recueilli par des charretiers et déposé dans sa maison à Aix où il mourra, le 22, emporté par une pneumonie.
rouge Chagall, brun Picasso, brun La Hyre, brun Van Dyck,
autoportrait au chapeau, 1893 jaune gauguin, un jaune dĂŠlurĂŠ et franc, joyeux et exotique
jaune Gauguin
Eugène Henri Paul Gauguin naît à Paris en 1848. Après ses études, il navigue 6 ans dans la marine marchande. En 1874, Gauguin, ayant connu Pissarro, découvre la 1ère exposition du courant impressionniste, devient amateur d’art et s’essaye à la peinture. Il expose avec les impressionnistes entre 1876 et 1886, part à PontAven et y rencontre Émile Bernard. De retour à Paris, il connaît Van Gogh en novembre. En avril 1887, il embarque pour Panama et travaille au percement du canal. Les conditions de vie y étant difficiles, Gauguin décide de repartir pour la Martinique. Enthousiasmé par la lumière et les paysages, il y peindra 12 toiles. De retour en France, il rejoint début 1888 la Bretagne, centre d’un groupe de peintres expérimentaux, mystiques et symbolistes : l’école de Pont-Aven. Il retrouve Van Gogh à Arles, d’octobre à décembre. La cohabitation des deux amis est difficile, Gauguin, comme Van Gogh, tentera de se suicider. Ruiné, il repart en Polynésie en 1891 et s’installe à Tahiti. Il passera le reste de sa vie dans ces régions tropicales, Tahiti et les Îles Marquises où il semble être au paradis. Influencée par l’environnement tropical et la culture polynésienne, sa peinture utilise de grandes surfaces de couleurs vives. Son œuvre gagne en force. Ses expérimentations sur la couleur et l’ensemble de son œuvre influencèrent l’évolution de la peinture, notamment le fauvisme du XXe siècle.
bleu Monet, bleu Majorelle, bleu Matisse, bleu Picasso, bleu Klein,
autoportrait, 1620 jaune vouet, un jaune de lumière et d’or
jaune Vouet
Simon Vouet naît à Paris en 1590. Quoi de plus manifeste que son “Allégorie de la Richesse” pour décrire le jaune Vouet, ce jaune dont l’or est l’inspiration et l’opulence, la respiration généreuse ? Un jaune lumineux, noble, riche, profond et chaud que Vouet utilise dans sa peinture pour souligner l’exemplarité de ses sujets et leur statut hors du commun, comme illuminés et touchés par la grâce divine. S’il y a de la démonstration dans le jaune de Vouet, c’est que l’Italie l’a inspiré. À partir de 1613, Vouet entame un long séjour italien, visitant Venise, Rome, Gênes. Il travaille pour le cardinal Barberini, futur pape Urbain VIII. Devant le succès immense dont il jouit à Rome, il est nommé à la tête de l’Accademia di San Luca en 1624. Vouet rentre en France en 1627, sur l’ordre de Louis XIII. Il importe en France le style baroque italien et l’adapte aux grandes décorations de l’époque. Nommé premier peintre du Roi, Vouet loge au Louvre qu’il décore. Louis XIII lui commande portraits, cartons de tapisserie et peintures, tous rythmés par un mouvement et des coloris éclatants. Le jaune lumineux de l’or est la signature de l’artiste, considéré comme un des grands maîtres de la peinture française du XVIIe siècle. Un baroque français réinterprétant l’inspiration solaire de l’Italie.
brun David, brun Vinci, vert Véronèse, vert Bosch, vert Botticelli,
autoportrait au chapeau de paille, 1888 jaune van gogh, un jaune de soleil et d’aveuglement
jaune Van Gogh
Vincent Willem van Gogh est né le 30 mars 1853 à GrootZundert aux Pays-Bas. Son œuvre pleine de naturalisme, inspirée par l’impressionnisme, annonce le fauvisme et l’expressionnisme. À l’approche de 1880, il se tourne vers la peinture. Autodidacte, Van Gogh prend néanmoins des cours de peinture. Sa peinture reflète ses recherches et l’étendue de ses connaissances artistiques. Toutefois, sa vie est parsemée de crises qui révèlent son instabilité mentale. Il est influencé par ses amis peintres, notamment Van Rappard, Bernard et Gauguin. Il admire Millet, Rembrandt, Hals, Anton Mauve et Delacroix, tout en s’inspirant de Hiroshige, Monet, Monticelli, Cézanne, Degas et Signac. Vincent peint de lui des autoportraits à plusieurs reprises. Les peintures varient en intensité et en couleur et l’artiste se représente avec barbe, sans barbe, avec différents chapeaux, avec son bandage qui représente la période où il s’est coupé l’oreille, etc. Beaucoup de ces autoportraits utilisent le jaune, l’on sait combien il avait été frappé par la lumière et le soleil de Provence. À plusieurs reprises, Van Gogh souffre d’accès psychotiques et d’instabilité mentale, en particulier dans les dernières années de sa vie. Ce qui provoqua son suicide, à l’âge de 37 ans, dans sa chambre de l’auberge Ravoux, à Auvers-/Oise.
vert Guimard, vert Delacroix, vert Ingres, vert Courbet,
autoportrait dans la glace du cabinet de toilette, 1945 jaune bonnard, un jaune de lumière et de mimosa
jaune Bonnard
De son premier portrait en 1889, Pierre Bonnard (1867-1947) a conservé sa vie durant la pratique régulière de l’autoportrait, établissant une longue série de tableaux de la vie d’un homme, de sa jeunesse à son vieillissement. En 1889, Bonnard est élève des Beaux-Arts à Paris. Il fait la connaissance de Vuillard, fréquente Maurice Denis et la plupart des Nabis, un groupe de “prophètes“ très actif. L’autoportrait de Bonnard est plein de vie, d’exécution rapide, avec de larges aplats de jaune éclatant, des couleurs sorties du tube, un admirable rendu de la lumière, une touche alerte. La main du jeune peintre est très assurée, le réalisme saisissant et le regard perçant, fortement influencé par les idées de Paul Gauguin et par la vogue du japonisme. Marqué par cette tendance et la conception de la perspective et de l’espace typique du kakemono, Bonnard reçoit le surnom de “nabi très japonard“, pour son exaltation de la couleur, la simplification de la forme et la sublimation du quotidien, auquel les nabis confèrent un caractère atemporel. Bonnard est un peintre de la lumière, sa relation avec elle est intime, touchante, vécue de l’intérieur. Les jaunes sont éclatants, lumineux, joyeux, à l’instar de ses peintures de l’atelier au mimosa, et des souvenirs de son Arcadie personnelle, Le Cannet et la Côte d’Azur. Une vie intime et sereine de petits bonheurs quotidiens, éclatants de lumière jaune.
bleu Nattier, bleu Vermeer, bleu Chardin, bleu Quentin de la Tour,
autoportrait en costunme de chasse, 1562 vert veronese, un vert amandÊ d’arsÊniate de cuivre
vert Véronèse
Paolo Caliari, dit Véronèse, est né en 1528 à Vérone. Très jeune, il travaille chez son père, tailleur de pierres. Toutefois, il manifeste très vite un penchant pour la peinture, ce qui le mène comme apprenti chez l’un de ses oncles, peintre, chez lequel il apprend vite. En 1552, il s’installe à Venise. Les commandes officielles sont nombreuses car il est devenu le «peintre de la République». Il réalise les fresques des salles du conseil des Dix au palais des Doges à Venise. Avec le soutien de Titien, il est désigné, avec six autres peintres célèbres dont Le Tintoret, pour participer à la décoration du plafond de la salle de la Libreria de la bibliothèque Saint-Marc. A partir de 1562, Véronèse entreprend la décoration de villas construites par Palladio, avec des fresques à l’apogée de son art. Partout, l’espace architectural est mis au défi grâce à l’usage de trompel’œil et d’illusions picturales. Entre 1562 et 1563, Véronèse peint Les Noces de Cana, commandées pour le réfectoire du monastère bénédictin de l’Île de San Giorgio Maggiore, à Venise. La peinture est immense, près de dix mètres de large. Elle contient plus d’une centaine de personnages, dont les portraits reconnaissables de Titien, de Tintoretto et de Véronèse lui-même. Il meurt à Venise d’une pneumonie en 1588. Son nom reste attaché à un vert amande jaunâtre profond, imprégné de la couleur de l’arséniate de cuivre.
bleu Monory, bleu de Stäel, bleu Vermeer, bleu Debré,
portrait de Franรงois-Marius Granet, Ingres, 1809 vert ingres, un vert de velours et de damas
vert Ingres
Jean Auguste Dominique Ingres naît à Montauban, en 1780. Son père, peintre, favorise ses penchants artistiques. Formé à l’Académie de Toulouse dès 11 ans, il se rend à Paris, en 1796, pour étudier sous la direction de David. En 1806, Ingres découvre en Italie Raphaël et le Quattrocento qui marqueront définitivement son style et son amour pour Rome. La chute de Napoléon l’entraîne dans une période de grandes difficultés. Il trouvera finalement le succès en France, sera nommé directeur de l’Académie de France à Rome de 1835 à 1840. Egalement violoniste, Ingres devient, durant un temps, deuxième violon à l’Orchestre du Capitole de Toulouse. Ingres devient célèbre grâce à son tableau emblématique, “La grande Odalisque”. Cette représentation d’une femme de harem expose des éléments orientalisants : éventail de plume de paon, lourds bijoux, turban d’indienne, pipe à eau. Ingres aimait tellement les courbes “qu’il ajouta trois vertèbres” au dos sans fin de son modèle dont le blanc nacré de la peau est souligné par les drapés de la tenture de soie de ce vert Ingres à la couleur de paon, entre verts et bleus profonds, aux effets brillants et moirés comme les ocelles des plumes. Le vert Ingres est la couleur de son tableau le plus célèbre. À sa mort, Ingres est enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris.
bleu Dufy, bleu Miro, bleu Kokoschka, gris Beckmann,
autoportrait dit le fumeur de pipe, 1848 vert courbet, un vert aqueux, liquide, glauque
vert Courbet
Courbet, natif d’Ornans, est un peintre de la nature, issu lui-même d’une famille d’agriculteurs et de propriétaires terriens. On connaît la passion de Courbet pour les grands espaces, les arbres et la forêt. La Franche-Comté et la Suisse offriront les paysages qui l’inspireront, Courbet étant connu pour le réalisme de ses œuvres. Opposé aux critères de l’académisme, il peint ce qu’il voit en extérieur, une peinture de chevalet inspirée par le fil de ses déambulations. Il participe à des ateliers de plein air, sa peinture respire la nature, le vécu et la réalité paysanne. Son autoportrait, dit Le Fumeur de Pipe, l’habille d’une blouse aux manches d’un vert de frondaisons profondes et de sous-bois romantiques. Le même vert dont il peindra le portrait de Proudhon et ses enfants, puis ses tableaux de vagues, de houles et de mers déchaînées à Etretat. L’autre portrait du peintre, appelé “Bonjour, Monsieur Courbet“, ou la Rencontre, met en scène l’artiste rencontrant son mécène Alfred Bruyas sur le chemin vers Montpellier, avec son valet et son chien. Œuvre emblématique de l’artiste, c’est aussi l’une de ses plus populaires, ayant fait l’objet de nombreuses reproductions. Le mécène y est habillé d’une sorte de veste autrichienne, en loden vert, entre redingote de chasse et veste de randonnée. Un vert naturel typique de la nature profonde du Courbet intime…
gris Whistler, gris Goya, gris della Francesca, gris Turner,
autoportrait, 1753 bleu nattier, un bleu pastel grisĂŠ, couleur de brouillard
bleu Nattier
Jean-Marc Nattier naît le 17 mars 1685 à Paris. Fils du portraitiste Marc Nattier, son talent est repéré dès 15 ans, il remporte le premier prix de dessin de l’Académie. Sa célébrité à venir lui est prédite par Louis XIV qui, voyant quelques-uns de ses dessins, lui dit : « Continuez, Nattier, et vous deviendrez un grand homme ». Nattier peint des portraits et sa réputation s’établit. Il devient portraitiste officiel de la famille d’Orléans puis de la cour de Louis XV. Le chevalier d’Orléans le charge d’achever la décoration d’une des galeries de son hôtel. À la mort du chevalier, le prince de Conti fait vendre tous ses tableaux. Touché de voir vendre des tableaux qui lui avaient coûté autant de travail, Nattier les rachète. Si le début de sa carrière fut brillant, la fin de vie de Nattier fut malheureuse. Les guerres successives, ce fléau des arts, l’inconsistance du public, le goût de la nouveauté, tout se réunit pour le faire passer de mode. La douleur fut encore plus grande, le jour où son fils, envoyé en Italie pour y achever ses études de peinture, se noya en se baignant dans le Tibre, six mois après son arrivée à Rome. Réduit à un état voisin de la misère, ayant échoué à obtenir une pension, ressentant les premières atteintes du mal qui le retint au lit pendant les quatre dernières années de sa vie, Nattier, reconnu aujourd’hui comme l’un des plus grands portraitistes du XVIIIe siècle, meurt à Paris en 1766.
gris Picasso, noir Soulages, noir Poussin, noir Pollock,
autoportrait au jabot de dentelle, 1751 bleu de la tour, un bleu de satin et de lapis
bleu de la Tour
Maurice Quentin Delatour est né à Saint-Quentin en 1704 dans un milieu cultivé, fils d’un maître-écrivain et ingénieur géographe. Dès l’enfance, il s’intéresse au dessin et, en 1719, entre en apprentissage à Paris, au moment de la pleine mode du portrait au pastel. En 1735, il réalise un portrait de Voltaire qui l’enchante et Quentin de la Tour devient célèbre, grâce à son don exceptionnel pour capter une physionomie, en allant à l’essentiel et en idéalisant la représentation. Agréé à l’Académie royale de peinture et de sculpture en 1737, il bénéficie d’un engouement pour ses portraits de la famille royale, des nobles, des philosophes et des artistes (Rousseau en 1753, marquise de Pompadour en 1755, duc de Berry en 1762). En 1750, il est nommé Peintre du Roi puis, conseiller à l’Académie royale. En tant qu’humaniste, Quentin de la Tour est un ami des encyclopédistes, et il cherche à promouvoir les projets philanthropiques pour améliorer l’humanité. Ses portraits sont une véritable anthologie des caractères, des visages et des modes du règne de Louis XV. Le bleu pastel y est partout présent, parce que pour la première fois dans l’histoire, avec la culture du pastel et de l’indigo, le bleu devient la couleur préférée du XVIIIe siècle. Quentin de la Tour exposera pour la dernière fois en 1773. Il mourra fou dans sa ville natale en 1788, laissant le souvenir d’un bleu pastel d’élégance et de raffinement dans le patrimoine de la couleur.
noir Marquet, noir Motherwell, noir Caravage, noir Manet,
autoportrait, 1775 bleu chardin, un bleu de drap de coton, de pastel et d’indigo
bleu Chardin
Jean-Siméon Chardin naît à Paris le 2 novembre 1699. Outre qu’il a été l’élève d’un peintre d’histoire et qu’il fut conseillé par Coypel, aucune certitude n’existe sur sa formation. Il est probable que deux de ses tableaux dont “la Raie”, ont été remarqués par des membres de l’Académie royale à l’Exposition de la Jeunesse, place Dauphine, en 1728, notamment par de Largillière, un des meilleurs peintres français de nature morte. Ces deux tableaux sont les morceaux de réception de Chardin à l’Académie royale. Il devient ainsi peintre académicien “dans le talent des animaux et des fruits”, c’est-à-dire au niveau inférieur de la hiérarchie des genres reconnus en peinture. En 1731, sous la direction de Van Loo, il participe à la restauration des fresques de la galerie François Ier au château de Fontainebleau. Chardin va se consacrer aux scènes de genre, les amateurs de peinture du XVIIIe siècle prisant, plus que tout, l’imagination. Présenté à Louis XV à Versailles en 1740, Chardin offre deux tableaux au souverain. En 1772, Chardin tombe gravement malade. Il souffre probablement de “la maladie de la pierre”, c’est-à-dire de coliques néphrétiques. À cause de l’âge et de la maladie, le 30 juillet 1774, il démissionne de sa charge de Trésorier de l’Académie. Il meurt en 1779 à Paris.
or Klimt, b l anc Fo u j i ta , b la n c Z u rb a ra n, bl anc M al e v it ch,
autoportrait, 1886 bleu monet, un bleu de myosotis, lotus et de pervenche
bleu Monet
Monet naît à Paris en 1840. En 1862, il rencontre Renoir, son ami fidèle. Lors de son premier déplacement au Royaume-Uni, en 1870, pour fuir la guerre francoprussienne, Monet a l’occasion d’admirer les œuvres de Turner. Il est impressionné par sa manière de traiter la lumière, notamment dans les œuvres présentant le brouillard de la Tamise. Il rencontre, à cette occasion, Whistler, avec lequel il se lie d’amitié. De retour en France, Monet peint un paysage du Havre : Impression, soleil levant. Cette peinture fut présentée au public en 1874, sans le succès attendu par les peintres. En 1876, les peintres utiliseront le terme d’impressionnisme pour identifier leur style. Lors de nouveaux séjours à Londres de 1899 à 1901, prolongés par son travail en atelier jusqu’en 1904, Monet peint près d’une centaine de tableaux sur le thème du brouillard. Monet s’installe alors dans une maison à Giverny en Haute Normandie où il s’organise le jardin qu’il aime : sauvage, libre, japonisant, envahissant, naturel. En 1914, Monet commence une nouvelle grande série de peintures de nymphéas, à la suggestion de son ami Georges Clemenceau. À la fin de sa vie, Monet souffre d’une cataracte qui altére notablement sa vue. La maladie évoluant mal, elle eut un impact croissant sur ses derniers tableaux et leur flou. Il décède en décembre 1926 à Giverny.
blanc Watteau, gris Whistler, jaune Vouet, jaune Van Gogh*
le gĂŠographe, 1669 bleu vermeer, un bleu de soie, de lapis-lazuli et de gaude
bleu Vermeer
L’on sait peu de choses du Sphinx de Delft, de sa vie, de sa formation et de son œuvre. Il n’y a pas même d’autoportrait authentifié pour sûr de Johannes Vermeer. Quelques dates surnagent, celle de son baptême en 1632, plutôt que celle de sa naissance, peu sûre… Celle de sa mort, en 1675. Pas grand‘chose d’autre… En revanche, le rapprochement de quelques-unes de ses scènes de genre ont en commun les touches d’une même qualité de bleu lapis, utilisé pour illuminer les pièces de vêtements, les textiles, les tentures et les tapisseries domestiques. Ces éclats de bleus sont la lumière qui rentrent dans les intérieurs sombres hollandais du XVIIe siècle, éclairant l’intimité des gens dans la vie quotidienne de Delft. Paradoxe ultime, tout comme le bleu éclaire les pénombres, la peinture de Vermeer ne représente que des scènes de grand calme, de silence, d’intimité, dans une époque de guerres, de violence, de crise économique, de ruine et de faillite personnelle. La peinture de Vermeer est une échappatoire, une diversion, une œuvre complètement étrangère aux réalités de la vie du peintre. Prêtons à Vermeer cette idéalisation dans la pureté et la lumière d’un bleu céleste dont il laisse pour toujours la signature et la marque personnelle de ses plus beaux portraits. “La Laitière“ et “La Jeune fille à la perle“ comptent désormais parmi les œuvres les plus célèbres de l’histoire de la peinture.
rouge Van Eyck, rouge de Staël, rouge Malevitch, rouge Rothko,
autoportrait, 1967 bleu monory, un bleu d’outrmer turquoisé et électrique
bleu Monory
Jacques Monory est un peintre français né en 1924 à Paris, vivant et travaillant à Cachan. Après une formation de peintre-décorateur à l’école des Arts appliqués de Paris, Jacques Monory travaille dix ans chez l’éditeur d’art Robert Delpire, où il découvre l’univers de la photo et apprend à l’utiliser pour sa peinture. Il est l’un des principaux représentants du mouvement de la figuration narrative (avec notamment les peintres Gérard Fromanger, Hervé Télémaque, Erró, Bernard Rancillac, Peter Klasen, Eduardo Arroyo, Valerio Adami) qui, au milieu des années 1960, s’est opposé à la peinture abstraite. Profondément préoccupé par la violence de la réalité quotidienne, les tableaux de Monory suggèrent des atmosphères lourdes et menaçantes. Les thèmes sont développés à travers des séries et les images qu’il utilise sont directement issues de la société contemporaine. Des emprunts photographiques et cinématographiques, le recours à la monochromie, la froideur de la touche et de la composition caractérisent un style singulier et engagé dans la représentation, et baignent toujours dans un camaïeu de bleu. Un bleu Monory d’une certaine qualité d’outremer… à la fois glaçante comme un objectif photographique, et neutre, impersonnelle, détachée d’une réalité trop crue et trop violente.
jaune Gauguin, jaune Brueghel, jaune Munch, jaune Toulouse-Lautrec,
Jacques Majorelle ÂŤLa GuedraÂť, 1957 bleu majorelle, un bleu de pigment cobalt
bleu Majorelle
Jacques Majorelle est né en 1886 à Nancy. Il est le “fils de l’Atlas” de l’ébéniste Louis Majorelle. Jacques baigne donc, dès son enfance, dans le courant Art Nouveau de l’École de Nancy. Il accompagne fréquemment son père dans ses ateliers de meubles, s’inscrit en 1901 à l’École des Beaux-Arts de Nancy en section Architecture et Décoration. Dès 1903, Jacques préfère devenir peintre et part à Paris faire son apprentissage en peinture à l’Académie Julian. Il complète sa passion par des voyages en Espagne, en Italie. En 1910, il découvre l’Égypte, le monde de l’Islam, ses couleurs, ses lumières, ses coutumes, c’est le début de sa passion pour l’Afrique. En 1917, il arrive au Maroc, s’installe à Marrakech. Il organise l’année suivante une première exposition de ses œuvres dans le hall de l’hôtel Excelsior à Casablanca. En 1919, il publie “Carnet de route d’un peintre dans l’Atlas et l’Anti-Atlas”, journal relatant son périple dans le sud marocain. Il se fait construire une maison à Marrakech, dans le style mauresque et aménage progressivement le jardin. Il peint le plafond de l’hôtel Mamounia, puis en 1937, la villa à laquelle il donne son nom, avec des couleurs vives dominées par un bleu profond et mystérieux. En 1947, il ouvre son jardin au public. Majorelle décède à Paris en 1962. La propriété sera rachetée par Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé dont la fondation assure désormais la conservation. Il est inhumé à Nancy au cimetière de Préville, aux côtés de son père.
rose Bacon, rose Pompadour, rose Pontormo, rose Signac,
autoportrait, 1906 bleu matisse, un bleu de papier timbrĂŠ
bleu Matisse
Henri Émile Benoît Matisse naît en 1869 au CateauCambresis. Après des études de droit qu’il abandonne définitivement en 1890 pour se consacrer à la peinture, il est admis à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris et fréquente l’atelier de Gustave Moreau en 1895. Au Salon d’automne de 1905, l’accrochage des œuvres de Matisse, Marquet, Vlaminck, Derain et Van Dongen provoque un scandale par leurs couleurs pures et violentes posées en aplat. Le critique Louis Vauxcelles compare la salle à une «cage aux fauves». L’appellation de «fauve» est aussitôt adoptée et revendiquée par les peintres eux-mêmes et Matisse devient le chef de file du fauvisme. Il entreprend alors de nombreux voyages qui seront autant de sources d’inspiration : Algérie, Italie, Allemagne, Maroc, Russie, Espagne, États-Unis et Tahiti. Après avoir passé une partie de l’hiver 1916-1917 à Nice, Matisse décide de rester plus longuement sur la Côte d’Azur qu’il considère comme un paradis. Il s’y installe dans plusieurs ateliers près du marché aux Fleurs, avec une vue infini sur la mer . Ii peindra de très nouvelles vues depuis ses fenêtres, et cherchera la transcription de ce bonheur dans ses toiles. Le ciel, la mer seront jusqu’à sa mort les inspirations de ces bleus profonds. Il meurt à Nice en 1954.
rose Balthus, orange Cézanne, orange Kalho, orange Gauguin,
autoportrait, 1962 bleu klein, un bleu d’outremer extrême
bleu Klein
Yves Klein, né à Nice en 1928, est considéré comme l’un des plus importants protagonistes de l’avant-garde artistique d’après-guerre, malgré une carrière artistique assez courte, de 1948 à 1962. Sa première exposition de tableaux au club des Solitaires en 1955 passe pratiquement inaperçue. Il y expose des monochromes de différentes couleurs (orange, vert, rouge, jaune, bleu, rose), sous le titre « Yves, peintures », peints au rouleau. Lorsqu’il veut exposer un tableau monochrome au musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, on lui refuse en lui demandant d’y ajouter une seconde couleur, un point ou une ligne. Mais Klein reste inébranlable dans son idée que la couleur pure représente « quelque chose » en elle-même. En automne 1956, il trouve un bleu outremer extrêmement saturé, mat et d’une absorption totale de la lumière, résultat d’un an d’expérience en chimie. Selon Klein, ce nouveau bleu est «la plus parfaite expression du bleu». Avec l’International Klein Blue (IKB), il découvre la définition picturale, la matérialisation de sa sensibilité individuelle entre étendue infinie et immédiate. Ce bleu qu’il appliquera sur de nombreuses œuvres (toiles, sculptures, éponges...) fera sa réputation et les monochromes bleus seront l’essence de la peinture monochrome du XXe siècle. L’IKB incarne la dialectique entre la matière et l’esprit, le physique et le spirituel, le temps et l’infini. Il meurt d’une crise cardiaque à Paris le 6 juin 1962.
rouge Van Dongen, rouge de Vlaminck, rouge Raphaël, rouge Derain,
autoportrait, 1833 gris turner, un gris de nuage, de ciel lourd et de brouillard
gris Turner
Joseph Mallord William Turner, plus connu sous le nom de William Turner est un peintre aquarelliste et graveur britannique. Il appartient au mouvement romantique anglais, mais son œuvre est une recherche novatrice qui le fait considérer comme un précurseur de l’impressionnisme. À 14 ans, il obtient son premier emploi de dessinateur chez un architecte, pour y réaliser des aquarelles de ruines et de reconstructions. Passionné par l’architecture, il apprend la perspective et la topographie et s’entiche de “paysage topographique“, en vogue en Grande-Bretagne, et dont il fait le cœur de sa technique. Turner est un peintre de paysages sauvages puis de paysages marins. La matière fluide, insaisissable de l’océan convient à sa technique, progressant de représentations réalistes aux œuvres fondues, sans matière, où seule la lumière s’exprime et émerge du brouillard. Turner devient le “peintre de la lumière“, noyant sa peinture dans un sfumato d’élégance, des combats de nuages, à la limite de l’imaginaire. Tous les gris pré-romantiques sont convoqués, aériens, marins, tourmentés, tempétueux, fumeux. Sa palette de gris n’est peutêtre malheureusement que la visualisation de sa personnalité. Turner est décrit comme rustre, avare, excentrique et taciturne, ivrogne, fumeur, dépressif, seul et solitaire. Une personnalité grise totalement dominée par l’image écrasante d’un père tout-puissant, Saturne moderne dévorant ses enfants.
rouge Chagall, brun Picasso, brun La Hyre, brun Van Dyck,
autoportrait, 1871-1873 gris whistler, un gris couleur de fumĂŠe
gris Whistler
James Abbot McNeill Whistler est un peintre américain, né en 1834 dans le Massachusetts, formé à Saint-Pétersbourg à l’Académie Impériale russe des Beaux-Arts, puis installé à Londres en 1848. Whistler et sa mère retournent dans le Connecticut en 1849 pour repartir en 1855, étudier la peinture à Paris. Découvrant Vélasquez et la peinture espagnole introduite au Louvre par Louis-Philippe, il part pour Madrid afin d’admirer l’œuvre du maître. Vélasquez l’influencera dans nombre de ses nocturnes et portraits comme le quasimonochromatique “Arrangement en noir et gris”, sous-titré “La mère de Whistler” (1871). Il se fixe définitivement à Londres en 1859. Whistler s’intéressant également à la peinture extrême-orientale, il est l’initiateur du style “anglo-japonais”. Graveur très doué, Whistler produit nombre de lithographies, d’estampes et des pointes-sèches. Un voyage à Venise en 1880 pour réaliser une dernière série de gravures permet un regard croisé stimulant entre l’artiste et les photographes de la ville. Ce voyageur incessant, ce touche-à-tout génial, ce passionné de cultures lointaines qui a abordé gravure monochrome, encre, contrastes d’ombre et de lumière, clair/ obscur, photographie noir et blanc avec un égal talent, laisse le souvenir d’un peintre symboliste sombre dont les gris profonds annoncent l’art abstrait. Il meurt en 1903 et est enterré à Londres.
brun David, brun Vinci, vert Véronèse, vert Bosch, vert Botticelli,
autoportrait au collier, 1933 gris kahlo, un gris chaud teintĂŠ de rose, un gris de pleurs et de souffrance
gris Kahlo
Magdalena Carmen Frieda Kahlo y Calderón, dite Frida Kahlo, naît le 6 juillet 1907 à Coyoacán au Mexique. Elle est un paradoxe en elle-même, car on l’imagine, de par sa nature, ses origines, apparemment forte, solaire, combative. Une battante faite artiste, particulièrement engagée dans les luttes pour l’émancipation de la femme dans une société mexicaine encore très machiste. Sa rencontre merveilleuse avec Diego Rivera dans l’auditorium de son école, le peintre qu’elle admirait beaucoup, en fait une femme amoureuse, passionnée. Ses portraits de l’époque sont exotiques, fleuris, abondants, luxuriants, chaleureux de nature et de couleurs. Et pourtant, la femme sera progressivement brisée, par la vie, par la maladie (sa colonne vertébrale sera brisée lors d’un accident de tramway), par sa lassitude et son dégoût des États-Unis et des Américains alors que son mari, lui, reste fasciné par ce pays et ne veut pas le quitter. En 1935, Frida découvre que son mari a une liaison avec sa sœur, Cristina. Le conte de fées s’arrête net. Ses autoportraits la représentent en biche traquée, saignante, percée de flèches, en martyr, en suppliciée. Ses portraits gagnent en profondeur, en douleur, en gravité, les gris chauds traversent désormais toute la palette de sa maturité de leurs fonds sobres et tristes. Elle meurt le 13 juillet 1954, devenant à jamais l’artiste peintre essentielle dans le mouvement artistique mexicain de son époque.
vert Guimard, vert Delacroix, vert Ingres, vert Courbet,
autoportrait, 1625 brun van dyck, un brun de cuir, de cheval et de crin
brun Van Dyck
Portraitiste, peintre de sujets religieux et mythologiques, Antoon Van Dyck est formé à Anvers en 1609, à l’âge de dix ans. Très vite, il démontre un intérêt pour les maîtres vénitiens qu’il découvre dans l’atelier de Rubens dont il devient le collaborateur et le disciple, entre 1618 et 1620. En 1620, il part à Londres, à la cour de Jacques Ier dont il peint le portrait officiel. Il obtient du souverain un laissez-passer en 1621 pour voyager en Europe. Repassant par Anvers, il part pour le Grand Tour en Italie. Après Gênes, Venise, Mantoue, Milan, Turin, Florence, il séjourne à Rome en mars 1623. En octobre, il se fixe à Gênes où il devient portraitiste officiel de l’aristocratie locale. Il repart en Sicile en 1624 et en France en 1625. De 1627 à 1632, il est de retour à Anvers. En 1630, il est à Londres puis à La Haye, pour exécuter le portrait du prince Frédéric-Henri d’Orange. À partir de 1632, Van Dyck est à Londres et occupe une situation privilégiée à la cour. Il y meurt en 1641, après un ultime voyage à Paris. Van Dyck laisse une gamme de couleurs où domine le contraste des tons bruns du costume, rafraîchis par le détail plus clair du linge blanc des cols. Ces fonds de terre d’ombre sombres, conçus comme de nouveaux noirs qui valorisent la couleur des carnations, sont de profonds bruns chauds, des marrons dramatisés d’un noir coloré de rouge.
bleu Nattier, bleu Vermeer, bleu Chardin, bleu Quentin de la Tour,
autoportrait, 1681-1682 noir poussin, un noir de tÊnèbres et de rigueur
noir Poussin
Nicolas Poussin, né en 1594, est le parangon du classicisme pictural français, le diamant noir des scènes d’histoire, de peintures à messages religieux et mythologiques, d’illustrations de textes bibliques. A l’exception de 2 années passées à Paris où Louis XIII le nomme peintre du roi, entre 1640 et 42, il est essentiellement actif à Rome de 1624 à 1665. La moralité de ses sujets, la richesse de ses compositions et la beauté de ses expressions l’ont fait surnommer le peintre des gens d’esprit. L’homme est rigoureux, sévère, janséniste dans l’âme. Son aspiration tend à rechercher dans l’Antiquité le bon goût, le bel idéal. Poussin pense qu’il n’existe qu’un modèle unique de beauté, inspiré par la foi. Sur ses trois autoportraits, revêtu d´une cape noire, dans le vide du décor, la lumière frappe la main de Poussin qui dessine le tableau et éclaire un anneau serti d’une pierre noire. Le noir est la couleur de la nuit et du royaume des morts, mais avant tout le symbole de la renaissance et de la fertilité dont joue Nicolas Poussin sur ses tableaux. Tout comme le noir des habits dont Poussin habille Moïse sauvé des eaux fertilisantes et noires du Nil, Poussin est un initié, un religieux qui croît à la vie après la mort et à la résurrection. Ses tableaux sont une maîtrise du clair-obscur, du travail entre lumière et pénombres, entre le noir et la couleur qu’il utilise pour la force de leur pouvoir démonstratif.
bleu Monet, bleu Majorelle, bleu Matisse, bleu Picasso, bleu Klein,
portrait 1981 noir soulages, un outrenoir au-delĂ du noir
noir Soulages
Pierre Soulages naît en 1919 à Rodez. Très jeune, il est fasciné par les matériaux patinés et érodés par le temps. À douze ans, son instituteur l’emmène visiter l’abbatiale Sainte-Foy de Conques, où se révèle sa passion de l’art roman et le désir confus de devenir un artiste. Il reçoit aussi le choc émotionnel des peintures rupestres des grottes du Pech-Merle (Lot), et de Lascaux en Dordogne. Soulages commence à peindre dans son Aveyron natal avant de “monter à Paris” à dix-huit ans, pour préparer le professorat de dessin et le concours d’entrée à l’école des Beaux-Arts. Il fréquente alors le musée du Louvre et voit des expositions de Cézanne et Picasso qui sont pour lui des révélations. En 1946, Soulages commence à peindre des toiles abstraites où le noir domine. En janvier 1979, Soulages, travaillant sans cesse sur un tableau, ajoute, retire, ajoute du noir pendant des heures. Ne sachant plus quoi faire, il quitte l’atelier, désemparé. En y revenant deux heures plus tard : “ Le noir avait tout envahi, à tel point que c’était comme s’il n’existait plus “. Cette expérience marque un tournant dans son travail. Soulages expose, dans la foulée, au Centre Georges Pompidou ses premières peintures monopigmentaires, fondées sur la réflexion de la lumière sur les états de surface du noir, appelé plus tard “outre-noir” où Soulages atteint un au-delà du noir.
bleu Monory, bleu de Stäel, bleu Vermeer, bleu Debré,
chaque époque a sa couleur
cap sur la couleur
Chaque artiste, chaque créateur a apporté sa touche de couleur à la palette générale de l’art pictural. Son nom reste accolé à une qualité chromatique particulière qu’il enjolive, qu’il valorise, qu’il élève au statut de couleurs privilégiées, celle de couleur de peintre. Et l’histoire de l’art en est riche… C’est donc fort de toutes les dimensions sémiologiques de la couleur, ses attributs culturels, ses connotations, ses valeurs, ses dimensions positives et ses boulets, avec un œil aiguisé sur tous les continents et toutes les époques que l’A3DC travaille, en connaissance de cause, ses colorations, préconisant des recommandations affûtées et durables, parfaitement en phase avec le cahier des charges. Tout comme les autres couleurs, l’A3DC recense les couleurs de peintres, cherche à fixer un vocabulaire commun des couleurs, pour faciliter le partage et pour que tous les acteurs parlent le même langage de la couleur. Depuis plus de 30 ans, l’A3DC qui a le sens des couleurs, note leur apparition, leur résurgence, leur fréquence, l’évolution de leurs qualités chromatiques, par secteur, par saison, par cible. Il enregistre leur succès, leur demande, leur rencontre avec un marché. Ce design de la couleur répond à un marketing de la couleur, une intervention nouvelle et sensible de décodage des envies, au service de l’entreprise et du cadre de vie.
la mĂŠthodologie
Arjowiggins Fine Papers, Etablissement Public du Grand Louvre, Ministère de la Culture-Direction du Patrimoine, Créapolis le Mans, Bic, PlacoPlâtre, Rockwool International, Fast-Poland, Principauté de Monaco, Hayco Limited, Mapa-Spontex, Weber SaintGobain, SGGS-Saint-Gobain-Glass Solutions, Verreries Aurys, Eurocoustic, Acoustiroc, A-I-P ArchitectesIngénieurs-Partenaires, U-P Urbanisme & Paysage Cabinet d’architecture Dominique Coulon, VMZ-Vieille Montagne Zinc, OCDE-Organisation de Coopération et de Développement Economique, Sulky-Burel-Sky, Peintures Zolpan, IQAP masterbatch, Vicat-VPI, Parc Naturel Régional Oise-Pays de France, LDRP Design & Architecture, Mairies de Luzarches, Chaumontel, Colombes, Villeneuve d’Ascq, Mantes-la-Jolie, Dammarie-les-Lys, Saint-Germain-en-Laye, Villierssur-Marne, Alençon, LEA Architectes, LeGuyader Engineering, SNC-Lavallin, EPS Charcot-Plaisir, Bouwfonds Marignan Immobilier, Tigex Puériculture, Nuk, BabySun, Sulky-Burel, Balsan, Ambassade de France à Moscou, Sagim-Logis Familial, Groupe Dadoun, OSICA, Coopération & Famille - Le Logement Français, Confluence Habitat-Montereau-Fault-Yonne… nous ont fait confiance
atelier 3D couleur sensiblement différent
61, rue de Lancry 75010 Paris contact@a3dc.paris www.a3dc.paris Tel 01 42 02 34 86 Fax 01 42 03 27 73
couleur de peintres… graphisme vu par nancy olivier & marie fournier
Plus de trente ans d’expérience dans le domaine de la couleur appliquée à l’architecture et au produit industriel ont permis de mettre au point une méthodologie précise, pointilleuse qui alimente une banque de données inestimable et incomparable sur les habitudes socioculturelles de l’usage de la couleur dans le monde. Pays par pays, région par région, marché par marché. Pour conquérir de nouveaux consommateurs, éviter les faux-pas, connaître ses gammes de couleurs sur le bout des doigts, correspondre aux attentes des acheteurs où qu’ils se trouvent, les anticiper et y répondre, et assurer le succès du produit sur son marché, la couleur doit être conçue au plus juste.