B.D.Z Mag #01 - Dossier spécial Iznéo - Avril 2011 © BDzMag Team 2011

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le magazine impertinent

qui cause de bulles et de pixels

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av r i l 201 1


éditorial... Pour ce numéro 1 , l'actualité nous impose de faire un dossier « Izneo ». Alors, je vous préviens ! Là, il y a du texte. Et pour ceux qui ont du mal avec des phrases de plus de quatre mots, je vous déconseille de continuer, ou alors ne regardez que les pages des BDZ girls... Enfin, nous espérons tous que ce numéro 1 vous plaira autant que le numéro précédent. Je rappelle, enfin j'annonce, car je ne vous l'avais pas dit avant : nous avons une page facebook. Ben oui ! ça fait classe d'avoir une page facebook ! Nous n'avons pas encore beaucoup d'amis, mais nous acceptons tout le monde . Alors, soyons amis !!! Tu cliques sur l'image, là, à droite, et normalement, si le typographe n'était pas trop saoul quand il a fait la mise en page, ça devrait marcher !

SOMMAIRE... Le coup de gueule de Jean-Mi .................................................................... 3 BDZ's girlz (1 ) : Shanna, par Frank Cho ...................................................... 5 Nos coups de cœur (1 ) : - Le sursis, de Gibrat ................................................................................... 7 - Djinn, de Dufaux et Miralles ....................................................................... 8 DOSSIER SPÉCIAL « IZNÉO » ................................................................ 1 0 Nos coups de cœur (2) : - La Chronique des Immortels, de Von Eckartsberg et Von Kummant ...... 24 - L'Alternative, de Chevais-Deighton, Agosto et Philboo ........................... 25 - L'île des morts, de Mosdi et Sorel ........................................................... 26 BDZ's girlz (2) : Dejah Thoris, princesse de Mars, par Frank Cho ............. 25 B.D.Z - Le mag #1 - Avril 2011 © BDz Mag Team 2011


Le coup de gueule de Jean-Mi. ..

A

ujourd'hui, c'est l'anniversaire d'Oscar. Il vient d'avoir 20 ans. On lui a offert une magnifique tablette à écran souple, dernière génération, format A4, spécialement conçue pour lire les BD. Il l'essaye aussitôt, se connecte sur son site préféré de téléchargements pirates et prend les dernières news. Il y trouve peu de nouveautés depuis un an. C'est même devenu chose rare que d'avoir des sorties récentes en BD. À croire qu'il n'y a presque plus d'auteurs de bandes dessinées... En parcourant les anciens sujets du forum, il tombe sur un vieux message de 2011 signé B.D.Zmag et intitulé “Vers un piratage responsable !”. L'article disait qu'il fallait prendre des décisions pour éviter que le piratage ne devienne la plaie de la BD, que les lecteurs n'achèteraient plus de BD papier à fortiori avec les tablettes... blablabla... les auteurs seront de plus en plus rares... blablabla... blablabla... Très ennuyeux quoi ! Oscar se souvient de 2009, de l'arrivée de l'offre légale en BD numérique, des éditeurs qui se sont lancés dans une voie, tête baissée comme des taureaux, sans réfléchir et sans connaissance du terrain. Les publicités d'offres légales lui ont fait découvrir, à lui et à beaucoup d'autres bédénautes, que le piratage des BDs existait. Il n'a pas mis longtemps à trouver son bonheur. Il se souvient aussi de ce B.D.Zmag qui disait : « faites un piratage réfléchi, sinon nous allons tuer notre art favori ». Tout le monde prenait l'auteur de ce message apocalyptique pour un fou... Et pourtant... Six ans plus tard, Oscar se demande si ce gars-là n'avait pas raison. Lui, il n'achète plus de BD papier. Il n'achète pas plus de BD numériques. Les BD papier se font de plus en plus rares. Des librairies, il ne reste plus que les gros groupes. Les éditeurs, de leur côté, essayent tant bien que mal de fermer les sites pirates, mais il y en a tellement ! La numérisation pirate est la nouvelle mine d'or pour des administrateurs de sites peu scrupuleux. Même les sites légaux expliquent comment faire pour lire des fichiers d'images sur les tablettes ou même pour numériser ses BD. page 3


Personne ne veut plus acheter des BDs numériques légales, ni les prendre en location. Il n'y a plus d'équipes de numérisation comme avant, mais des lecteurs sur tablettes et qui font eux-mêmes leur propre contenu. Les auteurs eux sont de plus en plus rares, enfin ceux qui se lancent dans la BD, ils préfèrent d'autres sources de revenus plus sûres. Finalement, Oscar regrette le temps du papier : il y avait plus de nouveautés... et il trouve dommage que les pirates, qui étaient à la base des passionnés, aient détruit l'art qu'ils aimaient. Mais bon, ce n'est pas de sa faute, il se dit. Lui, il profite de ce qu'il y a, comme tout le monde... Fiction ou juste anticipation ? Il n'y a pas encore de réponse. Mais pour que ce ne soit pas la réalité, il faut juste ouvrir les yeux et commencer à réfléchir. La BD est totalement différente des films ou de la musique. L'auteur de BD n'a que son livre pour vivre de son métier (je sais, il y a aussi les produits dérivés, mais cela ne touche qu'une partie du top 10 des auteurs de BD). Le piratage a pour but de faire découvrir des BDs, pas de remplacer le papier par un téléchargement, alors que c'est la voie qu'on est en train de prendre. Malheureusement. Plus vous mettez de nouveautés issues des dernières sorties papier, plus vous tuez l'art que vous aimez ! Numérisez d'anciennes BD, retrouvez dans vos cartons des titres que les éditeurs ne diffusent plus. Au pire, chosissez des BD parues depuis plus de deux ans en librairie. Si vous ne pouvez pas vous empêcher de mettre à disposition des nouveautés toutes fraiches, faites-le en privé mais pas en public. Créez des groupes privés qui ne rediffusent rien en public. Le piratage pourrait être un complément à l'offre légale et non son adversaire. N'oubliez pas que même si on nous appelle pirates, cela ne veut pas dire qu'il faut qu'on se comporte comme tels. Le partage doit être un acte réfléchi qui apporte un plus, c'est la réponse simplifiée de mise en ligne de contenu sans passer par les dures lois du copyright, pas une mise à sac des œuvres ou un non-respect des dessinateurs et des scénaristes !

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Le Sursis,

nos coups de cœur...

de Jean-Pierre Gibrat Gibrat est scénariste et dessinateur, il est né en 1 954 c'est donc une fiction. L'histoire se situe sur 2 années de guerre, 1 943 et 1 944, dans un petit village de la vallée du Lot : Cambeyrac. Ne cherchez pas l'endroit est fictif, il y a un Cambayrac dans le Lot, qui ne ressemble guère à notre village. Notre héros Lucien a sauté du train qui l'emmenait au STO en Allemagne. Ironie du sort, le train saute aussi, et comme un passager lui avait piqué ses papiers... il est mort pour tout le monde. Pendant ce temps-là, il rentre dans son village d'origine, où il se cache avec l'aide de sa tante dans la maison inoccupée de l'instituteur communiste déporté. Installé en plein centre du village, il voit tout : son enterrement, la terrasse du café, les miliciens au béret noir, le maquis, les profiteurs et surtout Cécile... Son amour d'enfance encore très présente dans son cœur. Mon Dieu qu'elle est belle Cécile, moitié jeune fille, moitié femme, fine, intelligente, sensible... notre premier amour quand on a eu de la chance! Pour une fois pas de science-fiction, d'horreur, de glauque, rien que du quotidien, des relations humaines toutes naturelles sans manichéisme, ni outrance dans un petit village du sud de la France qui ne pâtit pas tant que ça de la guerre, très peu de violence si ce n'est celle de l'Histoire, un scénario très crédible et pas ennuyeux. Cela aurait pu être un très bon roman . Le dessin, tout en aquarelles extrêmement douces et lumineuses, nous éclaire bien l'ambiance de la région. Toutes les saisons y passent, avec leurs couleurs respectives, on marche les pieds dans les feuilles mortes en tapant dans les châtaignes, en sentant l'odeur de moisissure des champignons, avec la petite main de Cécile dans la sienne, ce sont les vacances, la réalité de la vie s'imposera bien assez tôt, les nuits de lune, quand Julien sort dans la campagne, les journées ensoleillées avec cette lumière tamisée par les persiennes. Ah! cette nuit étoilée dans les bras de Cécile à surveiller les lumieres qui s'éteignent dans la vallée du Lot. Le destin a refilé à Lucien, 2 ans de plus, mais 2 ans pendant lesquels il va réaliser et vivre avec Cécile plus que beaucoup ne vivront jamais dans leur existence ! Alors, il n'y aura que le lecteur qui saura si la robe était rouge à pois blancs, mais ces deux ans valent une vie. Lisez Le Sursis et sa suite Le Vol du Corbeau, vous tomberez amoureux et irez hurler à la mort, les nuits bleutées, votre solitude, au fond du jardin !!! page 7


Djinn

de Dufaux et Miralles Une magnifique série, servie par un scénario de qualité et un dessin tout aussi parfait : Djinn de Dufaux et Miralles, neuf albums et deux hors-série pour le moment, publiés chez Dargaud. Une histoire fantastique, où se mêlent réalité et fiction dans un passé très historique en deux unités de lieu et de temps : la fin de l'empire Ottoman et le désert, puis l'Afrique à l'époque coloniale. Des scènes contemporaines entrecoupent le récit en recherche du passé et de sa propre identité. Des personnages forts, des seconds rôles indissociables du récit, une histoire magique au milieu du harem, l'armée allemande à la recherche du trésor du sultan, suivie par une incursion dans une Afrique sauvage envahie par l'homme blanc, mais où règnent encore les sorciers et la déesse des fièvres. On est sensé suivre Kim Nelson dans Istanbul à la recherche spirituelle de sa grand-mère Jade.... Oui mais Jade est un djinn, terrible et sensuelle, faisant et défaisant la politique du sultan à coup de hanche et de déshabillé. Après, tout se suit de manière très fluide et complètement illogique jusqu'au sacrifice sexuel avec le roi gorille! Personne ne sort indemne, beaucoup ont des morts tragiques mais Kim avance à la découverte de la réalité : n'est-elle pas elle-même un djinn ?

Dufaux à son meilleur niveau, qui programme une suite indienne à la recherche de la perle noire de Pipiktu. Chouette! Ana Miralles, je ne sais plus quoi dire tellement ses femmes sont belles. Lisez les hors séries pour réaliser la qualité de ses dessins, tout en estampe, aquarelle et crayon de couleur, on est sur le Bosphore, dans les sables du désert, tout est lumineux et brille au soleil et cette Afrique irréelle où tout devient rouge sang, vert de jungle et toujours cette poussière et ce soleil qui brûle les corps et les esprits. Pourtant je n'étais pas fan de Miralles, A la recherche de la licorne ne m'avait pas emballé... Mais là, chapeau, Madame !

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DOSSIER SPéCIAL

IZNéO

« Bande Numérique », quand les éditeurs chassent en bande… Casterman, Bamboo, Delcourt, Dupuis, Glénat, Lombart, Soleil et Dargaud viennent d'annoncer le lancement d'un catalogue commun de BD numérique. Les acteurs lancent ainsi Bande numérique, qui se veut une « une offre commune légale, simple et attractive, qui répond au double défi du piratage et de l'ambition des grands opérateurs internationaux sur un marché de la lecture numérique en formation. » C'est manifestement autour d’IZNÉO, la plateforme proposant des ouvrages en version homothétique que s'accomplira la destinée de ce regroupement. D'un point de vue marketing, ils ont supprimé ainsi tous les concurrents et intermédiaires qui pensaient s'aligner avec eux sur le marché (digibidi, acquafadas, etc.) ou d’autres offres alternatives qui pourraient voir le jour. Mais quelles sont les autres conséquences de cette association qui ressemble beaucoup à la création d’un monopole sur la diffusion des BD numériques ? Et quand je dis « ressemble », ça l’est totalement, en fait ! D’autant que ça permet véritablement un contrôle total du prix de vente… Nous allons essayer d'y répondre dans ce dossier qui va tenter de présenter Izneo sous toutes les coutures...

Comment fonctionne Iznéo ? Régis Habert, directeur général de Bande Numérique, nous l'explique : « Il s’agit d’une plateforme

ouverte à d’autres éditeurs que ses actionnaires, où les conditions commerciales sont les mêmes pour tous. Les œuvres y sont stockées en format numérique, avec l’accord des auteurs obtenu par leurs éditeurs respectifs. La mission d’Izneo est de développer le réseau des libraires en ligne. Et aucunement de se poser en concurrent par rapport à eux : nous ne faisons aucune publicité pour attirer des acheteurs. Le site se veut seulement un lieu d’expérimentation, pour tester de nouvelles offres vis-à-vis des lecteurs. »

J'ai recopié tout l'extrait pour éviter que l'on me reproche de prendre des phrases hors contexte. Par conséquent, le spam lancé par « Julie-izneo »* a donc seulement été envoyé pour rabattre des cobayes (vous, lecteurs) ! Content de savoir qu'Izneo n'a pas de clients mais des cobayes ! Il ajoute : « La mise à disposition se fait de façon raisonnée et régulière, comme pour le papier, afin que le catalogue se constitue gentiment et que chacun puisse connaître le rythme de mise en place. Notre objectif est de proposer 5000 œuvres à la vente à la fin 2011. Mais nous devons avant tout travailler à stabiliser le marché. »

Pour la mise à disposition c'est le mot « raisonnée » que je ne comprends pas. Quand on voit sur le site les trous béants dans les séries (voir plus loin), je dirais plutôt mise à disposition « incohérente » ! « Stabiliser le marché »... oui. Mais lequel ? Il n'existe pas ! Comment peut-on stabiliser un marché inexistant. Cela veut peut-être dire fermer tous les sites pirates... Je ne sais pas. Pour le prix, c'est simple, chacun fait ce qu'il veut ! Les éditeurs restent absolument maîtres de fixer le prix de vente de leurs ouvrages, et n'ont pas pour obligation d'adhérer aux offres déjà mises en place par Iznéo. « Les prix sont ainsi fixés, sans rapport direct, comme dans le livre, entre numérique et papier, en consultation avec les auteurs. »

Ne vous attendez pas à de la location annuelle, comme chez Marvel...

* voir : http://www.google.fr/search?hl=fr&source=hp&biw=&bih=&q=julie+izneo&btnG=Recherche+Google page 1 0


Mais au fait, combien coûte une version numérique ? Ça, c’est une bonne question : le MOTif, l’observatoire du livre et de l’écrit en Île-de-France (encore eux, eh oui !), a fait une étude* sur le sujet... Mais pouvons nous fier à leurs études ? Sachant que les éditeurs ont les flashes (copie numérique) de toutes leurs publications après 1 980, les ressortir et les transformer pour une lecture web ne doit pas être si difficile et surtout pas si coûteux que ça. C’est comme pour nous de reprendre des bruts qui ont déjà été retouchés et les rediffuser en les redimensionnant par exemple. Pour eux, il s’agit de prendre du matériel déjà rentabilisé et de le mettre à une nouvelle sauce : les éditeurs le faisaient déjà sur support papier en publiant des intégrales, ou en republiant des éditions existantes avec de nouvelles couvertures, un format différent... le numérique permet de continuer dans la même veine sur un autre support. Et les éditeurs décideront eux-mêmes ce qui est bien pour vous de lire en numérique… Pas question d'intégrer les œuvres d'auteurs indépendants, ni de publier et commercialiser directement. « Ce serait sortir de notre rôle de diffuseur distributeur d'œuvres. » déclare Régis Habert, directeur général d’Iznéo. Évidement on ne mélange pas les torchons et les serviettes. Être indépendant est un luxe, soit vous êtes indépendant mais vous crevez la dalle, soit vous êtes dépendant et vous aurez peut-être un trognon de pain, mais ce n’est pas sûr... Les auteurs sont un peu obligés de suivre, car s’ils avaient des idées de publier leurs œuvres sans un éditeur, derrière ce mastodonte ça ne va pas être facile d’avoir une visibilité commerciale et rentable. On apprend également que les auteurs de BD numérique pure n'auront pas leur place pour l'instant sur Iznéo : « Pour le moment, nous n'intégrons pas d'œuvres directement conçues pour le web. » . Ah oui ? Et pourquoi ? Je réfléchis… … … Je réfléchis toujours… … Bon… En réfléchissant bien, j’ai fini par trouver une raison. Et vous ? En fait, la raison est toute bête : pourquoi prendre des risques avec de nouveaux produits puisqu’on a un stock ancien qui a fait ses preuves (et qui est déjà rentabilisé), et qui ne demande pas de faire signer un contrat à un nouvel auteur inconnu du public. « D'autant qu'avec les problématiques de la vente posée par Apple, cela nous complique encore plus la vie. » , ajoute-t-il également...

Ah ? Parce que tout le monde possède un iPad ? Heu... pas moi, comme beaucoup d'entre vous d’ailleurs. La BD numérique prend le même chemin que celle sur papier : elle devient un produit trop cher, réservé à une élite. Car dépenser 500 euros pour une tablette, ce n'est pas à la portée de toutes les bourses ! Et Android ? Ce n’est sans doute pas assez classe pour eux... Voilà pour le hors d’œuvres. Passons au plat de résistance.

* voir : http://www.lemotif.fr/fr/etudes-et-analyses/etudes-du-motif/cout-d-un-livre-numerique/ page 11


Les prix et l’abonnement Lisons de plus près les CONDITIONS GÉNÉRALES D'UTILISATION ET DE VENTE EN LIGNE DES SERVICES DU SITE IZNEO : « Accès courte durée » : Le tarif d’accès à la visualisation pendant 10 (dix) jours de chaque Produit est fixé par IZNEO et sera celui mentionné sur le site http://www.Iznéo.com. En contrepartie du paiement du prix facturé à l’Utilisateur, l’Utilisateur aura un droit d’accès pour visualiser dans sa bibliothèque virtuelle intitulée « Mes albums » sur le site http://www.izneo.com, chacun des Produits loués pendant une durée de 10 (dix) jours suivant la première visualisation du Produit, et ce, autant de fois qu’il le souhaite pendant cette durée de 10 (dix) jours. Accès permanent : Le tarif d’accès à la visualisation permanente de chaque Produit est fixé par IZNEO et sera celui mentionné sur le site http://www.izneo.com. En contrepartie du paiement du prix facturé à l’Utilisateur, l’Utilisateur aura un droit d’accès pour visualiser dans sa bibliothèque virtuelle intitulée « Mes albums » sur le site http://www.izneo.com, chacun des Produits, et ce, autant de fois qu’il le souhaite pendant tout le temps où le service est accessible sur le site http://www.izneo.com, avec une durée minimum garantie de six mois à compter de la première visualisation du Produit. L’accès aux Produits sur un Compte Client est limité à 5 terminaux de lecture (IP fixes) pour la lecture sur internet.

Comparons donc un peu quelques exemples de prix entre l’offre d’Iznéo et les albums papier traditionnels.

Une nouveauté de Comics US : Walking Dead, tome 1 3 Sur Iznéo (en quatre parties !)

Version papier sur Amazon Prix de la version papier : 1 2,83 euros Prix total de la version numérique : 1 0,96 euros Différence : 1 ,87 euros

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Une BD franco-belge grand public : Cité d’la balle, tome 2 sur Amazon (à gauche)

Sur Iznéo (à droite) Prix de la version papier : 11 ,35 euros Prix de la version numérique : 6,99 euros Différence : 4,36 euros

BD de fond de catalogue… : Thorgal, tome 1 Sur Amazon

Sur Iznéo Prix de la version papier : 11 ,35 euros Prix total de la version numérique : 1 ,99 ou 4,99 euros Différence : 9,36 ou 6,36 euros On s’aperçoit, grâce à ce rapide comparatif, que les nouveautés reviennent presque au même prix que leur version papier (faudrait-il au passage considérer que les coûts d’impression et de distribution ne s’élèvent qu’à 1 5% du prix total ?). En revanche, le fond catalogue est plus économique (sauf à le comparer au prix de l’achat de la BD en occasion bien sûr). Mais dans tous les cas il ne faut pas oublier que les achats sur Iznéo ne sont que de la location de temps de lecture. Et l’accès au contenu « acheté » n’est garanti que six mois… Ce qui rend l’offre relativement chère pour un contenu que vous n’avez pas à disposition, que vous ne pouvez pas embarquer en déplacement, et qui est totalement inaccessible sans connexion internet (à moins de posséder un iPad, seul à permettre la lecture hors-ligne). page 1 3


La qualité des BD : Black is black Chez Iznéo, le noir est noir à 1 00%.

(« #000000 » en code hexadécimal sur l'image de gauche)

Ce phénomène s'explique par l’utilisation d’un script automatique appliqué sur toutes les images, sans souci de respecter la BD. C’est peut-être plus simple (et plus économique aussi) pour Iznéo de faire comme ça pour ne pas avoir à réfléchir à chaque support de lecture, mais le rendu peut devenir catastrophique sur certaines planches sombres, où le dessin finit par être totalement illisible.

Version Iznéo

Version retouchée Étonnant la différence n’est pas ce pas ? Quand tout est automatique et que personne ne vérifie… on se retrouve : Avec des couvertures en noir et blanc (je vous rassure, l’original est bien en couleur !)

Avec des bulles illisibles (Vous arrivez à lire vous ?) page 1 4


Avec des planches non recadrées, où les traits de coupe, des marques de cadrage et le nom du fichier imprimeur apparaissent. On arrive même parfois à trouver des BD avec des planches sans texte ! Et même des albums incomplets… Je ne vais pas vous lister toutes les erreurs qu'il peut y avoir sur le site, sinon on n’en finirait pas ! Mais entre les marges pas droites, trop grandes, les points parasites, les noirs à zéro... le nombre est affolant ! Ce problème de qualité pose une autre question : les auteurs ont-il un droit à la parole sur ce qui est fait de leurs œuvres une fois en ligne ? Apparemment non. Il est évident que j’ai mis en avant des points négatifs les plus flagrants. Toutes les BDs ne présentent pas autant de défauts (hormis le noir à 0, qui est constant) ! Sur une offre pirate, ça pourrait être compréhensible, mais sur une plateforme légale qui se veut la référence en offre numérique ça ne l’est pas. N'oublions pas qu’ils vendent les BD avec leurs défauts au même prix que les autres.

L’ergonomie du site et le stock proposé J’arrive sur le site, je veux voir toutes les BDs commençant par la lettre L (je sais, je l’ai fait exprès… mais avec Z, ça aurait été moins drôle).

Avec étonnement, je m’aperçois que les articles n’ont pas été retirés de tous les titres. Ce qui fait que pour la lettre L, vous avez 11 8 séries.... On ne peut même pas dire que c’est un choix systématique ! Car on a aussi bien « Combat ordinaire (Le) » (classé dans les C), que « L'Agent 212 » (classé dans les L). Dans tous les cas, que ce soit volontaire ou pas, ça n’aide pas à la navigation. Bon, la prochaine fois, j'utiliserai le moteur de recherche, et je n'essaierai pas de voir tous les titres de leur collection !

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Tiens ! La série Papyrus... ça me rappelle mon enfance... les gros albums annuels de SPIROU, que je lisais chez mes grands parents... Moins de la moitié de la série est disponible, ce n’est pas le seul exemple : plein de séries sont comme ça ! Vous pouvez lire le dernier tome mais pas le premier par exemple, ou bien vous avez des trous dans la série... Là encore, c’est moins grave pour une série d’albums indépendants les uns des autres (le cas de Papyrus), que pour une série où les albums se suivent et où vous êtes obligés de vous arrêter en cours de lecture car il manque un tome. Vous pouvez me dire qu’il se passe la même chose en bibliothèque… mais ce n’est pas une bibliothèque, comme on l’a dit plus haut… Un peu plus de cohérence dans le catalogue ne ferait pas de mal

La lecture Lecture en streaming sur ordinateur Le lecteur est simple, le temps de chargement des pages est correct… ce qui est normal compte-tenu de la taille des images utilisées (1 200 px de large, 450 Ko par page en moyenne). Rien à dire de particulier pour une lecture web

Lecture sur iPad Sur iPad vous pouvez retrouver le principe d’Iznéo dérivé sous plusieurs applications. Tout d’abord, la principale se nomme « Iznéo BD » (bien évidemment) et est gratuite. Vous ne devrez payer que pour consulter les BD proposées. Lorsque vous ouvrez l’application, la première page vous affiche les dernières nouveautés proposées, vous propose de vous inscrire à Iznéo, des coups de cœurs, des promotions… On retrouve une section « ma bibliothèque » dans laquelle s’affiche tout ce que vous avez consulté, loué, acheté. La partie catalogue affiche à l’heure où ces lignes sont rédigées, 1 993 BD. C’est certes beaucoup, mais loin d’être exhaustif. Maintenant, qu’en est-il de la lecture proprement dite. Tout d’abord, il faut bien être conscient que l’iPad est limité par sa taille, les pages sont donc plus petites que n’importe quel format de bande dessinée (exception faite de quelques comics ou manga). En pleine page, on remarque que tout est clair, pas de flou, les couleurs sont vives. Cependant, si vous désirez zoomer sur certains passages, on constate vite les limites du système, celui-ci ne permettant pas un « gros » zoom et donc, donnant un rendu légèrement flou (mais n’empêchant pas la lecture). page 1 6


On préférera la lecture horizontale sur iPad car, si celle-ci ne permet pas d’avoir la page affichée entièrement, au moins le zoom automatique proposé pour cette position sera suffisant pour simplement faire défiler la page de haut en bas afin d’avoir une lecture plus naturelle. À l’opposé, la position verticale vous obligera parfois à zoomer par endroit, revenir en arrière, descendre dans une zone de l’image, revenir en arrière, zoomer ailleurs… Mais ceci est un problème que vous rencontrerez sur toutes les applications « comics », aussi bien sur Xcomics qui propose également un vaste contenu de comics en ligne qu’avec Comiczeal4 où vous-même rajoutez vos propres BD au format de votre choix. Notons toutefois l’effort des p’tits gars de chez Iznéo de corriger certains problèmes de bande blanche ou de pages affichées de travers au début qui ont tendance à se faire de plus en plus rare dans les nouveautés proposées. De nouvelles applications sont récemment proposées, utilisant la base de données Iznéo et proposant le même contenu mais plus directement ciblé comme par exemple l’application Lucky Luke, Blake et Mortimer, Spirou… Notons au passage BDBuzz, nouvelle application, qui vous propose de gérer votre propre collection de BD numériques, soit achetées chez Iznéo (possibilité d’acheter via BDBuzz dans le catalogue Iznéo), soit rajoutées par vous-mêmes. L’application se connecte également sur le site BDgest pour vous proposer les dernières critiques et chroniques, et propose également quelques bandes annonces classées par éditeurs. Autre test sur l'iPad : http://cod9x.com/test-Izneo-sur-iPad/

Lecture sur ePad Android J’ai testé le site Iznéo avec l’Epad2 (ZT1 80S). Mais j'ai eu beau regarder partout sur ce site et sur d'autres pour charger une application qui me permettrait de faire comme pour l’Ipad, je n’ai rien trouvé. Pour le moment, on ne peut donc absolument pas lire à partir d'un Androïd, car pour nos amis d'Iznéo, il n’y a pas de flash sur les Androïd version 1 .3 et 2.1 . Ils n’ont pas pensé à Androïd 2.2 et 3.0, pour lesquels le flash fonctionne dès à présent. Après leur avoir envoyé un email j’ai reçu la réponse suivante : « Une application Androïd est en cours de création et devrait sortir dans quelques mois, ce qui permettra de faire exactement comme pour l’Ipad, à savoir pouvoir lire les BDs sans être connecté sur le net. »

Bande numérique : la riposte des éditeurs BD au piratage D'abord une petite précision sur la sécurité des fichiers. Iznéo emploie un lecteur flash, et jusqu’à preuve du contraire, le flash n’est pas d’une sécurité absolue contre le téléchargement des JPG. Il est donc impossible de garantir la protection des œuvres une fois qu’elles sont publiées sur le net. Si la crainte du piratage sert à justifier l’emploi du streaming, cela fait peu un léger comme argument… Or Bande numérique, se veut une « offre commune légale, simple et attractive, qui répond au double défi du piratage et de l'ambition des grands opérateurs internationaux sur un marché de la lecture numérique en formation » .

Aujourd’hui le piratage des BD est à la une. Hier on en entendait à peine parler : une fois, en 2005, un jeune a été condamné à un euro symbolique*. En 2005 également, l’échec cuisant de la tentative de fermeture d’un newsgroups sur free**. Depuis rien. Quelques tentatives par-ci par-là contre smarttorrent, et dernièrement sur un site de direct download contre un célèbre diffuseur de PDF, mais rien de bien méchant. * voir : http://www.pcinpact.com/d-56-1 -Piratage-de-BD-Interview-de-Bruno-Bellamy.htm ** voir : http://www.clubic.com/actualite-1 27060-bd-free-responsable-piratage-newsgroups.html page 1 7


Aujourd'hui, c’est différent... On est devenu les méchants, en fait surtout des gêneurs, des empêcheurs de tourner en rond. J’imagine que ça doit être délicat pour les éditeurs d’être à la bourre à cause de 5 gus dans un garage (je l’adore celle-là, désolé)... Grâce à Iznéo, les éditeurs veulent se positionner, ici pas encore de manque à gagner… puisque le numérique ne rapporte rien encore ! Louis Delas, président du groupe BD au SNE et PDG des éditions Casterman déclare : « D'abord, je

tiens à souligner que le numérique ne rapporte toujours rien. Le chiffre d'affaires est toujours bas, et les coûts de fabrications pas encore rentabilisés. »

Il n’est donc pas question de perte d’argent dans l’immédiat, mais bien de contenu disponible ou pas. Régis Habert, directeur général d'Iznéo reconnaît de son côté : « Aujourd'hui, tout est disponible en offre pirate, il ne me faudrait pas longtemps pour vous le montrer. »

Le piratage a déjà la majorité des catalogues en ligne ! Contrairement au partage des films ou de la musique, qui est venu en même temps que dématérialisation du produit - et même n’a pu exister que grâce à cette dématérialisation des produits, puisque les MP3 et les DivX venaient de CD ou de DVD rippés (sans parler des « screeners », le temps de fabrication peut être estimé de 5 minutes pour un CD à 2-3 heures pour les DivX, avec un travail réalisé de façon totalement automatique par les ordinateurs) - , les BDZ, elles, elles existaient bien avant l’offre légale, et étaient réalisées de façon totalement « artisanale » et manuelle à partir des BD originale au format papier. Régis Habert ajoute cependant : « Nous ne disposons pas de chiffres précis, mais il serait illusoire de croire que de joyeux lycéens sont aux commandes. Il s’agit d’un véritable business, qui rapporte un chiffre d’affaires publicitaire à certains. Via Izneo, "Bande Numérique" vise à protéger les œuvres, disponibles en streaming ou via des fichiers cryptés, sécurisés. »

« Véritable business !» Là je tombe sur le cul (pardonnez-moi l'expression...). Je ne connais aucune team qui scanne pour faire un quelconque profit avec sa production, c'est contre toute l'éthique du partage (je sais, je suis vieux jeu, mais on ne se change pas). Ce qui existe par contre ce sont les parasites du net qui prennent le travail des teams et ne font rien d'autre que de les rediffuser. C'est à ce moment là que les BDZ deviennent un moyen de rémunération grâce aux régies de pub, les sites d'upload rémunérateurs, moteurs de recherche etc... Ce sont eux qui ont tué l'image du partage ; ce qui d'ailleurs est l'évolution générale dans le "warez"... Donc oui, ça profite à certains. Mais sachez que dans le milieu du scan, beaucoup sont opposés à cette dérive, et ont pris les dispositions nécessaires pour éviter que ces blaireaux en tirent profit. Contrairement à un grand nombre de pirates spécialisés dans d'autres supports (films, musiques, logiciels...), les teams de scans ont un respect énorme pour le travail des auteurs. Ce respect est en revanche, je l'avoue, bien moindre pour celui des éditeurs... Et si on s'en tient aux lois du marketing, à long terme, tout marché se réduit à un duel entre deux concurrents. Or ce duel a commencé, entre deux offres que tout oppose. Et la question n’est pas de savoir qui en sortira vainqueur, mais qui fait plus de mal à la création. Pour ceux qui suivent les news relatives à la BD numérique, vous savez tous ce qui s'est passé avec les auteurs de bande dessinée à propos des droits spécifiques au numérique. Non ? C'est sur la page du SNAC* (Syndicat national des auteurs et des compositeurs)... Et le piratage peut même aider à la vente ! Pour preuve, ce qui s’est passé avec Steve Lieber (dessin) et Jeff Parker (scénario) à la suite d’un piratage de leurs comics** : les ventes des albums papier ont explosé ! Comme quoi le piratage a plusieurs facettes, dont beaucoup n’ont pas été exploitées, ou dont on préfère ignorer l’existence... Et pourtant nous sommes ouverts à tout. * voir : http://www.facebook.com/notes/groupement-des-auteurs-de-bande-dessinée-snac/aucun-accord-majeur-entre-auteurs-etéditeurs-sur-le-numérique/1 01 501 21 7539021 21 ** voir : http://blog.slate.fr/des-bulles-carrees/201 0/1 0/25/pirate-il-voit-ses-ventes-de-bd-augmenter/ page 1 8


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Offre légale vs offre illégale Faire que les gens préfèrent l’offre légale à l’offre illégale ne va pas être simple (surtout à la vue de l’offre légale) car la majorité des adeptes du numérique sont déjà passés du côté obscur de la force. Et faire venir les lecteurs papier au numérique va être encore plus dur. Je ne sais pas si les éditeurs s’en sont rendu compte, mais s’ils ont pris comme référence le marché japonais ou américain pour établir leurs « business plan », ils sont complètement dans l’erreur : le Français est très attaché au papier. Ceux que vous appelez pirates (scanneurs, retoucheurs) sont vos clients, et souvent même de très bons clients. Et en général, ce sont de très gros collectionneurs… qui ont permis au fil des années où l’offre légale était inexistante de faire découvrir des BD à l’aide des scans. Je ne dis pas qu’une BD téléchargée entraîne une vente papier, mais je suis sûr que cela a aidé de nombreux lecteurs de BDZ à faire un choix plus précis, ou découvrir des séries qu’ils n’auraient pas pu découvrir autrement. J'admets cependant qu'aujourd'hui, avec l'arrivée des iPad, ePad et autres tablettes, et avec le développement de la lecture numérique nomade, l'argument peut perdre complètement de sa valeur : avec ces nouveaux outils, le piratage peut devenir un mauvais instrument s'il n'est pas responsabilisé. En tout cas, que les éditeurs ne disent pas que nous n'arrêtons pas de nous retrancher derrière cette prétendue fonction promotionnelle du piratage, car ils savent très bien que c’est l'un de leurs propres arguments de vente ! Quelqu’un peut-il me dire le coût réel des bandes dessinées, proposées dans les grandes enseignes spécialisées ou généralistes, rendues invendables par leur lecture « à la sauvette » par des lecteurs peu scrupuleux avachis contre des étagères ? Quelqu’un peut-il me dire pourquoi certains albums (qui souvent n’ont pas beaucoup marché) sont carrément donnés en format souple aux bons clients des librairies ? Quelqu'un peut-il m'expliquer l'objectif des « bonnes affaires » des grandes surfaces, quand elles descendent le prix de certaines BD à 1 ,99 € ou 2,99 €, sans que ce soit du déstockage d'un éditeur qui a fait faillite ? Quelqu’un peut-il m’expliquer enfin la raison du cadeau du tome 1 offert sous blister avec le tome 7 d’une série, sinon pour l’offrir à un ami (il est quand même très rare qu’on achète le dernier tome d’une série sans avoir lu les précédents…) et qu’il la découvre… et l’achète ? En fait, les questions que pose l’offre légale sont très simples. Pourquoi louer une BD numérique légale, si on peut télécharger le fichier sur son disque dur gratuitement à qualité égale ou même souvent supérieure ? Car là est la grande différence : l’offre légale ne permet pas d’acheter un contenu, mais uniquement de la bande passante et, comme on l’a vu, sous certaine condition. Et tout ça par peur du piratage ! Pourquoi le possesseur de tablette ou d’ordinateur, qui achète une BD papier, doit repayer sa version numérique ? Tout français qui achète du matériel électronique ne paie-t-il pas une taxe pour la copie privée (même s’il ne fait aucune copie privée par ailleurs) ? Voila une question intéressante, qu’on peut d’ailleurs élargir : pourquoi dissocier le numérique du papier ? Pourquoi un acheteur de livre papier n’aurait pas le droit d avoir une copie numérique de son achat ? Le numérique proposé sur Iznéo est sauf erreur de ma part, et à l’exception peut-être des BD dont les dessinateurs n’ont que des originaux numériques - une copie scannée du papier, rien de plus, il ne faut pas l’oublier ! Cette envie de séparer les deux supports est inquiétante : au lieu d’en faire des contenus complémentaires, comme cela devrait l’être, les éditeurs les opposent uniquement pour gagner sur les deux tableaux. J’espère que les choses vont évoluer dans un autre sens, car les éditeurs se sont aperçus que leurs chers contenus sont déjà disponibles sur le net. En privant les potentiels acheteurs d’acquérir un contenu lisible hors connexion, beaucoup resteront sur le piratage, on peut voir ce qui se passe avec les films et la mise en place de DRM en tous genres.

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Ma vision de l’offre numérique Comme le disait Abraham Lincoln, « seul peut critiquer celui qui est prêt à aider » . Faire une critique d’Iznéo est un exercice facile, ce qui serait plus dur, c’est de faire une proposition d'offre légale. Apparemment, les pseudo-professionnels du genre en sont incapables. Je vais m’y risquer en tant qu’amateur… Imaginons un instant que nous sommes dans monde idéal (ce n’est pas facile, je sais...). Les BDZ légales arrivent dans ce monde, nos amis éditeurs ont alors une bonne idée, puisque les gentils pirates ont déjà mis a disposition leurs catalogues en téléchargement. Ils imaginent une offre attrayante pour éviter de rabaisser les droits des charmants auteurs qu’ils aiment et dont ils respectent le travail… et qui savent qu’ils ne peuvent pas vivre sans eux. Voici l’offre : À chaque achat de livre, pour une somme modique, le client a la possibilité d’acheter la version numérique de son album (dans un format sans DRM et en une version basique). Mais ce n’est pas tout. Ils ont eu une autre idée ingénieuse… Puisque tout est déjà en ligne, il faut aller plus loin , être plus fort , plus performant que les pirates. Et donc, ils vont aller à l’inverse du marché, c’est-à-dire revenir sur des supports physiques peu couteux, comme les mini-disc, les carte SD, les clés USB... qui pourraient contenir la BD, un making off, une version noir et blanc, et plein d'autres bonus qui raviront leurs fidèles lecteurs. Ces produits constitueraient les BDZ légales, largement supérieures à celles proposées par les pirates qui, eux, seront incapables de rivaliser, et qui – au pire – continueront tranquillement leurs scans basic… ou cesseront leur activité puisque l’offre légale aura rendu inutile le temps qu’ils passent à faire des scans (1 heure par BD) et des retouches (4 à 6 heures selon la difficulté du travail). Ces BDZ seront donc des produits à part, entièrement revendables, échangeables, collectionnables… Le public pourra enfin acheter un produit tangible, et différent de la BD numérique qu’on propose dans une autre dimension. Et moi je serai directeur de projet avec une jolie secrétaire... Mumm et pourquoi une seule… non deux. Et très jolies N’est il pas beau mon monde ? Bon arrêtons de rêver et revenons à la triste réalité. Il est temps de conclure ce dossier. Pour les derniers mots de ce dossier je laisse la parole à un auteur, dessinateur de BD : Alors sur Iznéo ? « C'est dur de se prononcer, car les auteurs ont des avis différents, déjà, en ce qui concerne la BD numérique. Voici mon avis personnel : les éditeurs sont dépassés et se sont vite retrouvés entourés de sociétés prestataires qui proposent de leur vendre des solutions techniques hors de prix, pour profiter du marché naissant, et ce dans un environnement qui n'est pas l'environnement naturel des éditeurs, auquel ils ne sont pas adaptés : celui du web. Par dessus le marché, il faut rajouter leur décision de s'engager dans la Hadopi, qui est une erreur stratégique. Ils se concentrent là-dessus (la lutte contre le piratage) au lieu d'investir dans la création et proposer une offre de BD numérique originale à leur lectorat. De plus, j'ai du mal à comprendre leur logique : pourquoi s'engager dans la lutte contre le piratage sur un marché, qui, selon eux, n'existe pas ? page 21


Ils disent "il n'y a pas de marché" mais c'est à eux de le faire, de le mettre en place, d'être actifs, de prendre des risques, d'oser. Le marché tant qu'ils ne le structureront pas, qu'ils n'auront pas cette volonté de proposer autre chose que de la BD scannée, c'est sûr, ne décollera pas. Et ne verra jamais le jour. Sans parler des pourcentages consentis aux auteurs. Est-ce normal de toujours proposer les mêmes pourcentages (environ 8% du prix de vente) sur un bien vendu deux fois moins cher, alors que le nombre d'intermédiaires est divisé par deux, et que la valeur ajoutée entre le fichier natif et la version numérique de l'album est souvent nulle ? Un des premiers gestes significatif qui pourrait montrer que les éditeurs veulent se lancer sérieusement dans la BD numérique serait de consentir à augmenter considérablement les pourcentages des auteurs, pour les passer à 30% du prix de vente. Ceci dit, si les choses en restent là, ils vont se faire surprendre et dépasser par des boîtes dont le web, les TIC, sont le vrai métier : Google, Apple... les seuls acteurs "natifs" à sortir du lot seront des sociétés mixtes comme Ankama qui est à la base, une société du web et du jeu vidéo, mais qui s'est muée en un empire du divertissement transmedia. Ankama et ses dirigeants comprennent le milieu, savent comment il fonctionne et surtout comment "fonctionnent" les lecteurs. Ils essaient d'être en phase avec leurs attentes, leurs usages. Plus généralement, je pense que les éditeurs ne sont pas prêts pour le numérique et le web, ce qu'il implique, notamment la communication web, en temps réel, mais aussi sur les réseaux sociaux, dont ils font un mauvais usage, ou qu'ils utilisent à minima, sans stratégie, sans réflexion, sans essayer d'approfondir. Ils n'ont pas compris que les usages des lecteurs évoluent, que la communication web devient primordiale, vitale. Toutes les sociétés ne jurent que par leur communauté : il faut créer une communauté, la fédérer, l'alimenter, la faire grossir... les éditeurs ont la chance d'avoir une communauté, des communautés déjà constituées, depuis des années, fédérées autour de séries, autour d'auteurs... et ils n'en profitent pas. Ce n'est pas pour rien que le terme "éditosaure" est apparu. »

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nos coups de cœur... La Chronique des Immortels,

de Benjamin Von Eckartsberg et Thomas Von Kummant La série est tirée d'une saga d'heroic fantazy : La Chronique des Immortels de Wolfgang Hohlbein écrivain culte outre-rhin, inconnu ou presque chez nous. Ses livres sont en cours d'édition chez l'Atalante, j'espère qu'il n' y aura pas 30 volumes traduits par 3 traducteurs différents... La BD suit le scénario du premier livre : Andrej Zelany rentre dans son village natal, d'où il a été chassé gamin pour des raisons que vous découvrirez. Zelany veut récupérer son fils. Il découvre un village rasé, la population prise en esclavage, son fils agonisant sous la torture et à qui il donne la délivrance. Non, ce n'est pas gai... De toute façon, comme les autres livres d'Hohlbein, c'est une histoire triste d'un homme perdu, qui possède des pouvoirs qu'il ne comprend pas et qui cherche à découvrir qui il est exactement. Violent, sombre et finalement désespérant, tel est le scénario de la série que je ne veux pas trop dévoiler. Le plus intéressant c'est le dessin, sinon lisez les bouquins, ils se lisent vite et facilement, sans mal de tête. Le dessin de Von Kummant est très atypique pour de la BD, en restant cependant attractif. Fidèle à l'histoire, il est sombre, les personnages sont anguleux, au milieu d'une campagne de moyenne montagne avec des éclairages très doux de début d'automne où les couleurs prédominantes sont des ocres et marrons, sans violence, qui mettent d'autant plus en relief les silhouettes tourmentées souvent sanguinolentes et tachées de vif des hommes. Il y a des différences flagrantes entre le premier volume sorti en 2005 et le deuxième sorti cet été 201 0. La façon de dessiner a changé, pas tellement les paysages, mais les personnages qui étaient très détaillés et mis un peu en "sketch" sur le fond dans le premier volume, sont fondus dans le deuxième. Je préfère nettement le premier. Le deuxième volume a été scindé en deux pour le marché français, avec des dessins pour remplir l'album... On aura la fin en 2011 , toujours avec des dessins pour faire du remplissage... Bon. Les Allemands, eux, ils auront un seul volume complet en 2011 . Marketing ? Certainement... En tout cas, La chronique des immortels est une magnifique série dont je vous recommande l'achat pour son graphisme d'exception. D'ailleurs, pour les illustrations de cet article, j'ai été bien embêté pour les choisir, tant elles sont toutes exemplaires... page 24


L'Alternative,

d'Édouard Chevais-Deighton, Stéphan Agosto et Philboo Cette série a été créée par le scénariste Édouard Chevais-Deighton en 2009 chez Glénat, et dessinée par Stéphan Agosto, pour le tome 1 et par Philhoo pour le tome 2. Ici on s’intéresse au parcours d’un jeune homme, fils d’un paysan d’origine allemande et d’une française de Champagne-Ardenne: un « fils de boche ». L’originalité du récit de Chevais-Deighton est d’imaginer les alternatives qui auraient pu être celles de Pierre Hemmer : suivre son père en Allemagne et devenir une future recrue de la Gestapo, ou rester en France et devenir un résistant luttant contre l’occupant germanique. Chaque destinée hypothétique est traitée dans chacun des volumes contrebalançant en face à face la vision de chaque personnage, reprenant les faits chronologiquement dans chaque album, et posant le choix de la bonne alternative à suivre en ces temps troublés par nature… Pour moi une bonne idée de scénario sur les différents choix de la vie et les chemins empruntés, thème peu exploré et développé en BD. Si l'histoire nous tient en haleine, il est toujours difficile de faire passer une vie en 1 album, et quelques cases passent trop vite pour raconter le contexte en détail. Niveau dessin, j'apprécie plus Agosto que Philhoo aux traits plus accentués (goût personnel), la mise en couleur rend bien l'époque et nous intègre à l'histoire.

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L'île des morts, de Mosdi et Sorel

Pour finir, une bd qui m'a particulièrement impressionné , un classique des années 90 : L'île des morts. Parue en 5 albums correspondant chacun à un chapitre de l'histoire, de 1 991 à 1 996, chez Vents d'Ouest, plus une intégrale. Scénariste : Mosdi, peintre : Sorel. J'ai bien dit peintre et non dessinateur, car la peinture on en est plein dedans. D'abord : L'île des morts… Un tableau peint par Arnold Böcklin en 1 880, représentant un linceul mené par Charon sur une île... Cinq versions différentes auraient été faites par Böcklin... Cette île c'est la constante des cinq chapitres. Ils veulent tous y accéder quelqu'en soient les conséquences... Le scénario est très prenant mais assez compliqué, je ne vais pas m'étendre, juste un copier-coller du net : "Un univers évanescent,

morbide, baroque et gothique à la fois, peuplé de non-dits et de zones sombres, où les personnages tentent tant bien que mal de se faire une place. [...] tres influencée par Lovecraft ou Edgar Poe, une sombre et tragique destinée attend nos personnages dans cet univers glauque où règnent la pauvreté, la corruption, le crime et l'horreur abjecte de ce qui devrait rester caché à jamais. Un cinquième chapitre est pour moi inintelligible".

La peinture colle parfaitement à l'histoire, d'abord des constantes de couleurs qui évoluent au fil des chapitres. Dans le premier tout est marron, terre de sienne, gris bleuté ou noir, les chairs blêmes, l'environnement est sombre et poussiéreux, même la nature est grise. Une seule tache colorée : un tableau ! Au fur et à mesure de l'évolution de l'histoire apparaissent des rouges sang, des jaunes électriques ou pisseux, enfin un peu de vert et de bleu à la fin, sans délire. Le trait est parfait, rendant à la perfection la folie, le doute et la perversité de nos personnages. Je conclurai sur cet autre copier-coller du net, qui résume bien mieux que moi cette oeuvre : "Cet album pose la série comme un véritable chefd'oeuvre, autant au niveau graphique que scénaristique, une oeuvre hermétique au charme sulfureux, et qui se goûte comme un suave poison."

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Tu es seul derrière ton écran ? Tu as des questions existentielles ? Tu veux proposer un article ? Tu es dessinateur ? Tu veux envoyer une BD ? Tu veux nous insulter ? Tu aimes ?

ÉCRIS NOUS !!!

b.d.z.mag@gmail.com


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