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LE PAYS BRIONNAIS DANS LA VALLÉE DE LA RISLE LES HÉRITAGES PAYSAGERS À L’ÉPREUVE DE DYNAMIQUES CONTEMPORAINES: ENTRE “BANALISATION” ET PATRIMONIALISATION.

COQUIN Bertrand//Mémoire personnel d’étude et de recherche Mémoire 100 ans de paysage-2016 FORMATION D.E.P-ÉCOLE NATIONALE SUPÉRIEURE D’ARCHITECTURE ETDE PAYSAGE DE BORDEAUX


Remerciements à, -association AMSE ( Les amis des monuments et sites de l’Eure) -Frédéric Scribot, président de l’intercommunalité «pays Brionnais et maire de Calleville -la médiathéque de Brionne -Elizabeth Moisan Berryer, paysagsiste DPLG à Calleville -Hervé Goulaze, pour ses conseils -Didier Galop chargé de Recherche CNRS et enseignant à l’Ensap Bordeaux


Avant propos: Spontanément j’ai choisi de parler de mes paysages, ceux dans lesquels j’ai grandi pour tenter de comprendre, d’étudier ce qui est longtemps resté à mes yeux l’ordinaire, le quotidien. Parler des paysages dans lesquels j’ai grandi, c’est aller à la rencontre de l’héritage de la vallée, de l’identité locale qui est aussi la mienne. Par curiosité, j’ai souhaité de nouveau parcourir ces paysages, ces champs ces villages, ces forêts mais à travers un regard différent aujourd’hui. J’ai souhaité réaliser une analyse fine des paysages portée à l’échelle de l’intercommunalité mais aussi avec un aller-retour sur des portions de paysages pour aller à la rencontre des singularités et de leurs places dans le paysage. Pour cela, j’ai d’abord privilégié les sessions de terrains, puis utiliser les entretiens d’acteurs locaux pour comprendre les représentations du paysage selon chacun des habitants, des agriculteurs, du paysagiste, mais aussi et surtout auprès des élus, questionner sur la césure des paysages et les événements politiques, les conflits d’acteurs qui ont fait émerger les paysages d’aujourd’hui. «Ce qui se passe chaque jour et qui revient chaque jour, le banal, le quotidien, l’évident, le commun, l’ordinaire, l’infra-ordinaire, le bruit de fond, l’habituel, comment en rendre compte, comment l’interroger, comment le décrire?» Comment parler de ces «choses communes», comment les traquer plutôt, comment les débusquer, les arracher à la gangue dans laquelle elles restent engluées, comment leur donner un sens, une langue: qu’elles parlent enfin de ce qui est, de ce que nous sommes?» (Perec, 1989, p. 11)


Avant-propos. Sommaire Introduction et problématique. Localisation du territoire d’étude.

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1ÈRE PARTIE

I.BRIONNE ET LA VALLÉE DE LA RISLE, UNE FIGURE PAYSAGÈRE BANALISÉE. 1.Les héritages à l’épreuve des dynamiques urbaines. 1.1 Un fond de vallée large et habitée. 1.2 Le fond de vallée: une confrontation brutale avec l’espace agricole. 1.3 Le bas des coteaux: témoin des mutations.

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2. Calleville et les débordements urbain de la vallée. 2.1 Les héritages paysagers altérés par l’extention pavillonnaire. 2.2 L’homogénisation des cultures.

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II.DES FORMES SINGULIERES ET HÉRITIÈRES DE PRATIQUES ANCIENNES ENCORE LISIBLE.

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2.Les plateaux agricole du Lieuvin et du Neubourg. 2.1 L’openfield céréalier du Neubourg. 2.2 Les villages bosquet du Lieuvin : entre près vergers et bocage des caractères singulier. 2.3 Les villages à bord de champs, vers un uniformisation de l’ossature villageoise.

DES

23 25

1.Les vallées affluentes de la Risle, des valeurs paysagères et patrimoniales persistantes. 1.1 Le vallon d’Authou. 1.2 La vallée du Bec.

2ÈME PARTIE: RÉTROSPECTIVES ET ÉVOLUTION FIGURATIF DES PAYSAGES DU PAYS BRIONNAIS.

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29 31 32

TRAITS

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I. Du 19ème à 1950: L’inscription dans le paysage de vocations agricole et industrielle singulière. 1.1.Un fond de vallée industrialisé:les manufactures de filature en bord de Risle. 1.2. L’essor de l’activité cidricole normande: la conquête du vergers. 1.3 Les près vergers normands. 1.4 Les lisières végétales une structure paysagère partager par les villages.

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II. De 1946 à 1993: Morcellement du pays Brionnais: la perte des élémenst paysagers clefs. 2.1 La déprise agricole des coteaux, des boisement continue. 2.2 Le déclin des vergers. 2.3 L’ouverture du bocage, vers la simplification des paysage du Brionnais. 2.4 Les premières exentions urbaine ou la fin de la ville niché.

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III. De 1990 à aujourd’hui entre banalisation et préservation, la confirmation d’un paysage à deux vitesses.

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3.1 Patrimonialisation et protection: vers la mise en place de “poche de résistance”. 3.2 Le rôle de l’intercomunalité dans l’évolution du paysage. 3.3 Des extensions en continue.

59 60

3ÈME PARTIE: Prospective, un paysage en ordre dispersé, vers la perte d’une identité culturelle.

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État des lieux et identification des dynamiques et enjeux sur les paysages du pays Brionnnais.

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Scénario tendenciel: “Le pays en ordre dispersé”, entre banalisation et patrimonialisation du pays Brionnais, vers la perte de l’identité.

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Loi Notre: 2017 vers le regroupement des communes, un, projet pour fédérer les paysages.

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5 1

“L’église associée à l’ifs”

“Des villages bocagers”

“Les coteaux raides et boisée en continue”

Figure emblématique Patrimoine

“Des maisons ouvrières, témoin du passé”

Première représentation, premiers mots sur le paysage.


Introduction et problématique Lorsque l’on traverse la vallée de la Risle, dans le pays Brionnais, on ne peut que constater le contraste saisissant entre les paysages. Les scènes proposées durant les sessions de terrains ont montré le caractère radicalement opposé des paysages, dans le fond de vallée les grandes extensions pavillonnaires continuent à se propager jusqu’au plateau, les pratiques agricoles deviennent de moins en moins nombreuses, de l’autre se dessine une grande richesse de valeurs paysagères, des prairies, des vaches aux côtés de pommiers, l’horizon dégagé de l’openfield et le paysage remarquable des vallées affluentes. Néanmoins, les tendances actuelles poussent une grande partie de ces paysages, non protégés à s’uniformiser, s’homogénéiser. C’est tout particulièrement cette opposition, la dichotomie des paysages qui ont suscité mon attention. À quoi tient l’identité du paysage du pays Brionnais dans la vallée de la Risle ? Quels dialogues sont entretenus entre ces paysages, quelle est la place laissée à l’héritage, aux formes anciennes dans le paysage. J’aborderai ce mémoire en 3 grandes parties, séquencée autour de l’étude de deux grandes entités paysagères. Tout d’abord, j’évoquerai les paysages de la vallée de la Risle autour de la commune de BRIONNE et ses débordements urbains sur le plateau. Différentes parties mettront ainsi en évidence la banalisation des paysages, l’héritage laissé par le temps et l’impact des débordements urbains. Puis, l’étude des paysages remarquables des vallées affluentes et des traits singuliers encore perceptibles dans le Lieuvin et sur le plateau du Neubourg.

L’étude dans le temps des trajectoires prises par ces entités de paysages montrera dans un premier temps le rôle des vocations industrielles et cidricoles du 19ème, dans un système paysager qui liait fond de vallée, versants et plateaux environnants. L’étude sur la période de 1950 à 1993 évoquera le périclitage des motifs de la vallée, la fin d’un système uniforme, notamment par l’expression des phénomènes d’urbanisation consommatrice des pratiques agricoles. L’analyse de l’impact des grands bouleversements agricoles du XXème montre la perte continue des valeurs paysagères. Enfin, l’analyse des dernières décennies mettra en lumière l’impact des choix et événements politiques, d’une intercommunalité longtemps désolidarisée à l’absence prolongée de dispositif réglementaire d’urbanisation, mais montrera également paradoxalement, le phénomène de patrimonialisation d’une partie des paysages. La dernière partie propose une lecture prospective des paysages, de l’impact des grandes tendances actuelles sur le paysage d’ici 2030. Il s’agit d’évoquer dans un premier temps la saturation 6 des paysages dans le futur, à partir des prévisions d’extensions supplémentaires évoquées par les élus et les dynamiques l’homogénéisation des cultures constatées. Puis, à l’aube du regroupement des intercommunalités prévues dans le cadre de la loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République, la loi NOTRE apparaît comme une clé d’entrée, un outil pour redéfinir l’identité locale, préserver et entretenir les paysages dans leur ensemble, dans une échelle élargie.

“L’Openfield céréalière”

de

culture

“La vallée aux Boeuf, logements construit l’agriculture ?”

des sur


Site d’étude: Le territoire étudié se situe dans le département de l’Eure, en Haute Normandie à environ 50 kms au sud de ROUEN. Au sein d’une grande diversité de paysages, la vallée de la Risle est au point de rencontre de plusieurs pays naturels; du Lieuvin à l’ouest, du Roumois et du plateau du Neubourg à l’est. Cette position au sein d’une mosaïque de paysages constitue la particularité du pays Brionnais, entre les plaines bocagères du Lieuvin ou l’élevage domine encore, l’openfield du plateau du NEUBOURG, enfin le Roumois entre cultures céréalières et élevage. La Risle alimente le fond de vallée et prend sa source depuis le Perche pour finalement rejoindre la Seine. C’est une vallée qui présente deux faciès, en amont c’est une vallée étroite, peu habitée et très boisée dans laquelle la Risle est sinueuse, en aval c’est une vallée large, habités, aux coteaux boisé symétriques, et où la Risle est plsu droite. C’est dans cette dernière que se situe le pays Brionnais, la Risle a creusé dans la craie, une large vallée, aux coteaux abrupts et boisés symétriquement. Brionne concentre la majorité des populations, réparties depuis le bas des versants puis progressivement dispersées le long des routes et sur le plateau du Neubourg. Le territoire d’étude s’insère dans une vallée dans laquelle chacun des pôles partage cet enjeu d’attractivité autour de paysages protégés; Pont Audemer et le marais Vernier, dans la partie classée de la Risle plus en aval, conjuguent le développement et préservation.

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- “À dominante rurale, les paysages bas-normands se distinguent en formant une mosaïque complexe, reflet à la fois de la position d’interface géologique, mais aussi de contrastes liés à la diversité des modes de production agricole, des partis d’aménagement du territoire ou encore des modes de construction de l’habitat rural traditionnel.” (P.Brunet, 2001)/Tirée de la thèse Germaine 2009. ESTUAIRE DE LA SEINE

PONT-AUDEMER

BRIONNE

BEAUMONT-LE-ROGER

LA FERRIÈRE SUR RISLE

RUGLES

Figure: Carte de localisation du site d’étude dans la vallée de la Risle.


Vallon d’Authou et Vallée du Bec Les poches de résistances

Plaine bocagère du Lieuvin

Openfield du Neubourg

La vallée de la Risle

Calleville, les débordements urbains

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Un paysage scindée... L’étude des paysages se fait à partir de deux grandes entités séquencées en plusieurs unités, d’une part la vallée de la Risle et ses débordements qui créent une césure au sein du pays Brionnais. Une urbanisation répartie dans la vallée au détriment de l’agriculture qui devient résiduelle, néanmoins, l’analyse fine de ces paysages montre les témoins de vocations industrielles et de pratiques agricoles anciennes. Les débordements sur la commune de Calleville, démontrent toutefois l’impact de la tendance actuelle de banalisation des paysages. De l’autre ,des paysages jusqu’à aujourd’hui préservés, parfois protégés comme les vallons d’Authou et du Bec qui véhiculent une partie des singularités du territoire.

À leurs côtés, les paysages de plaines du Lieuvin et du Neubourg qui oscillent entre homogénéisation et conservation. Les vastes cultures céréalières du Neubourg, sont ponctuées par quelques boisements à l’approche des vallées, en dépit de quelques extensions urbaines , l’organisation traditionnelle des villages est préservée. Le bocage du Lieuvin connaît la déprise agricole, l’augmentation des terres labourables et voit peu à peu disparaitre les motifs et pratiques agricoles d’autrefois, vergers, prés et lisières végétales. Cette organisation des paysages se ressent sur le terrain, dans les ambiances et les traits qu’elle dessine et témoigne d’une césure, du profond morcellement des paysages du pays Brionnais.


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I.BRIONNE ET LA VALLÉE DE LA RISLE, UNE FIGURE PAYSAGÈRE BANALISÉE. La vallée de la Risle est un axe traversant dirigé vers la Seine, dans laquelle les pôles locaux comme Brionne se sont installés dès le moyen-âge. Traverser la vallée depuis Beaumont-le-Roger jusqu’à Pont-Audemer mon permis de saisir la particularité du territoire d’étude, d’y observer les vestiges de pratiques et de formes agricoles, cerner, grignoter par l’urbanisation rampante bien au-delà de la vallée. Pour aborder cette entité paysagère j’aborderai dans un premier temps l’armature urbaine de la ville de Brionne, puis j’évoquerai dans un second temps, les “sorties d’urbanisation” sur le plateau du Neubourg, signe de trajectoires, de dynamiques d’uniformisation et de banalisation des paysages.


V a l l o n d’Authou Vallée du Bec

Plateau du Neubourg

Plaine du Lieuvin

10 BRIONNE

Calleville

Vallée de la Risle

1 ÈRE PARTIE


1.Les héritages à dynamiques urbaine.

l’épreuve

des

1.1 Un fond de vallée large et habitée. De Beaumont-le-Roger à l’estuaire, Brionne est une des centralités de la vallée. Comme beaucoup d’autres villes du moyenâge, Brionne s’est construite au bord de l’eau, dans une position stratégique à la fois proche des grands axes de commerce mais aussi dans une position militaire comme en témoigne l’héritage du donjon carré normand, implanté au sommet du coteau.

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Lorsque l’on regarde Brionne depuis le coteau, on s’aperçoit que c’est une ville lovée dans le creux de la vallée avec des étirements urbains de part et d’autre de la Risle. Parfois excessive, la ville s’étend à la fois dans la largeur, dans le vallon des Fontaines et dans la vallée au boeuf mais au-delà de vallée sur le plateau agricole du Neubourg. C’est cette forme particulière de “ville nichée” qui caractérise les villes de la vallée de la Risle. Ce qui était initialement un positionnement à l’abri des vents, couronnée d’un coteau boisé, laissant place aux grandes cultures sur les plateaux et à un fond de vallée agricole semibocagère est aujourd’hui de moins en moins lisible et de plus en plus construit. Les sinuosités de la Risle ont formé un îlot central depuis lequel les commerces et les habitations se déploient. Les paysages actuels témoignent d’un contraste fort entre des formes agricoles et architecturales ancienne adossée au pied du coteau et l’urbanisation des dernières décennies, étendue dans la vallée. La capacité d’accueil dense et réduit de la ville-nichée, s’oppose à celle plus délayée du pavillon. Aux côtés des débordements diffus, l’espace agricole borde de part et d’autre la commune. Brionne une ville-nichée dans la vallée qui s’étend...

1

1.Le viaduc de l’A28 donne la largeur de la vallée.

2

2.Le “Vieux donjon” sur les hauteurs de la vallée.


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Les parties les plus anciennes de la ville se trouvent groupées en bas des versants et enjambent la rivière(1 & 2). L’habitat plus récent, des quartiers périphériques s’étend, aux dépens de l’agriculture, dans les vallons de part et d’autre de la vallée, au pied des coteaux, le long des grands axes routiers reliant le reste de la vallée (3). L’implantation des zones commerciales et industrielles, notamment au nord, étire un peu plus les limites de l’armature urbaine (4). Une grande partie de l’activité industrielle est aujourd’hui révolue mais elle emploie encore une part importante de la population et occupe une place dans le paysage. Enfin de manière éparse, les hameaux de Launay, des Essarts ou de Valleville, présentent des formes traditionnelles linéaires et groupées de plus en plus distandue (5 & 6). Ainsi Brionne présente un profil paysager à dominance urbaine qui occupe l’ensemble de la vallée. Le paysage offre ici une lecture homogène avec des typologies architecturales différentes, parfois brutales, marquant la succession d’urbanisation standardisée sur des paysages autrefois diversifiés.(Figure)

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4 1 2

6 3

5

Figure:carte répartion spatiale des formes d’urbanisation sur la commune de Brionne

Plaine bocagère du Lieuvin

12 Fond de vallée plat et large Prairie humide bocagère et ripisyvle.

Coteaux raides boisés

Le”Vieux-donjon”

Routes sur les flancs de coteaux. Petit bras canal ou fossé drainant

Coeur historique sur le bas de pente La Risle

Figure: Coupe schématique de la vallée de la Risle.


1.1 Un fond de vallée large et habiter. Une accumulation hétéroclite.

d’entités

urbaine

Le tissu résidentiel et pavillonnaire qui occupe les paysages de part et d’autre du centre historique s’est inséré progressivement dans la vallée de la Risle. Ce paysage urbain reflète à la fois l’histoire de la vallée, notamment de son passé industriel et agricole mais évoque également, loin de l’architecture normande, une période de constructions standardisées de pavillonnaire. Aujourd’hui les limites naturelles qui stoppent l’urbanisation dans la vallée se dessinent à partir de la zone inondable inscrite au PPRI et des zones natura 2000 reconnues et prises en compte dans les directions et orientations du PLU. Ces limites ont poussé l’urbanisation à sortir de la vallée et s’orienter vers les plateaux. Ce développement à la croissance urbaine lente à fragiliser l’espace agricole de la vallée en contact avec Brionne et simplifier le système paysager en place. L’observation de la morphologie urbaine de Brionne rend évidente le processus de simplification des paysages, appauvri par la perte d’une partie de ces espaces agricoles, des pratiques associées et donc de son héritage.

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Le centre historique marqué par l’église Saint-Martin et le “vieux Donjon” dans sa position dominante sur la vallée témoigne d’un héritage, d’une implantation ancienne par ces ouvrages issus du XIe siècle. On retrouve comme beaucoup de villages dans l’Eure la bichromie des matériaux extraits du soussol, torchis, silex, calcaire et brique construisent l’architecture normande depuis des siècles. Les maisons ouvrières de la vallée sont des constructions associées à l’ancien bassin d’emploi que formait Brionne, des industries de filature, qui marquent le paysage par les usines, les logements et les demeures des gérants ( Les Essarts, Rue du Donjon ou rue Lemarrois).

Quartier Lemarois.

ouvrier

rue

Le centre Brionne.

historique

de


Dans la vallée, le développement urbain s’observe sous une forme linéaire à la fois le long de la départementale D438, traversant la vallée ouest-est et autour des voies de circulation nordsud (D130 et D46) surplombantes sur le bas des coteaux. L’habitat, sous toutes ses formes, partage la caractéristique d’être orienté sur le fond de la vallée, occupé par des prairies. La répétition en lots des quartiers pavillonnaires en périphérie et l’homogénéité des paysages qui en résulte forme les étirements et alimente la banalisation des paysages

de la vallée. Dans la vallée aux boeufs, lieu dit à la toponymie connotée agricole, on observe le contraste entre des lotissements collectifs issus d’opérations publiques de logements sociaux (années 60) et de bien maigres surfaces agricoles à leurs côtés. Ce quartier a longtemps véhiculé une image de zone difficile, “sensible” mais est aujourd’hui en voie de rénovation, il s’est construit sur de précédentes structures agraires, c’est-à-dire de prairies, de vergers. Étalement pavillonaire long des routes.

le

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Les logements sociaux de la vallée aux boeufs.


1.2 Une vallée semi bocagère de prairie humide contrainte à l’urbanisation

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Si la structure urbaine de Brionne occupe, comme vu précédemment, une large partie de la vallée, celle-ci présente aussi un paysage agricole fragilisé par la pression urbaine. Prairies et marais prennent en effet une place dominante dans la vallée de la Risle, comme en atteste le Marais Vernier à Pont Audemer aux portes du PNR des boucles de la Seine désigné site RAMSAR en décembre 2015. Ici dans le pays Brionnais il s’agit de prairies de fauches ou de couplage pâtures/fauches de part et d’autre des rives de la Risle. L’espace agricole est compris entre la voie ferrée et la route départementale au sud de Brionne et entre la zone économique et un habitat dispersé au nord. On distingue parmi ces prairies une grande partie de friches et parfois de mégaphorbiaies qui témoignent de la déprise agricole dans la vallée. L’ensemble est entouré pour la plupart des haies arborées qui constituent la trame semi-bocagère et participent à l’image verdoyante dans la vallée. Il faut également y associer la végétation rypisilaire qui accompagne la Risle et forme un linéaire végétal. Une partie de ces paysages est inscrit ZNIEFF et compris plus largement dans la zone natura 2000 “Risle, Guiel, Charentonne”. Au sein de la vallée, l’élevage est très restreint, atteint par la déprise agricole il en subsiste une partie au sud de Brionne, autour du lieu dit “La Vacherie”(13 exploitants en 2010 pour 37 en 1988 Rf: agreste.fr). Pour quelquesunes de ces prairies, les pommiers sont encore là, les rangs sont encore parfois lisibles mais ces vergers sont souvent altérés par le temps et les engins agricoles. Ils témoignent de l’abandon de pratique pastorale et fruitière de pommes à cidre. De la déstructuration du mail bocager, au labourage des prairies et leurs remplacements en culture de maïs, de blé tendre ou de colza, les indicateurs d’une agriculture révolue, de pratique abandonnée sont perceptibles un peu partout dans la vallée. Ces paysages au contact de Brionne, de son parc d’activités, du lac ou de l’aqueduc de l’A28, n’efface en rien la présence urbaine. Au contraire il s’observe un partage brutal des relations qui mettent en morceaux l’agriculture posant ainsi des problèmes de mitage et d’enclavement des prairies et friches (notamment au nord).

Superficie toujours en herbe (ha) Superficie en terres labourables (ha)

1988

2000

2010

76

192

141

303

243

149

Source: Agreste.fr

La vallée offre loin des habitation un paysage verdoyant et diversifier autour de la Risle.


La rencontre entre l’espace agricole et l’urbain, une confrontation brutale. D’après diagnosctic du PLU.

Mitage des prairies par contact et extension propable de la zone d’activité. “Barrière écologique” l’urbanisation de Brionne

par

Enclavement des prairies par urbanisation.Zone d’échange entre prairies, zones humides et forêts.

Dispartion des formes agricole s par urbanisation dans la vallée aux Boeufs

16 1

Cultures Forêts (feuillus et conifères) Prairies

1

2

1.La trame bocagère enclos les prairies et cultures dans la vallée 2.Le contraste de l’implantation pavillonaire, des paysages qui offrent peu de singularité


1.3. Des terrasses basses sur les versants, témoin de pratiques qui s’estompent. plus proche d’appartenir à Brionne que d’être une véritable transition. On constate le grignotage permanent de l’espace agricole, entre abandons, mitages et enclavements. L’implantation pavillonnaire se fait ainsi au détriment d’usages et de pratiques sur les versants qui différenciaient autrefois les paysages. Quelques exceptions de cultures spécifiques (Gaec Doucet) et les rares vestiges de vergers viennent enrichir le paysage et offrent une relative diversité. L’exemple du GAEC Doucet est isolé et ne suffit pas à lui seul à définir la singularité mais il permet d’imaginer ce que pouvait être l’identité de la vallée de la Risle lorsque les prairies bocagères, les vergers et l’élevage régnaient. 442 393 294 37 1988 Nbr d’exploitations 1

2

28 2000

13 2010 S.A.U (en ha)

1.L’émergence de cultures spécificique apportent de la diversité aux paysages (GAEC DOUCET source:altals-des-paysage-Haute-normandie.fr. 2.Les cultures céréalières et fouragères sur les bas de versant.

source: agreste.fr

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La partie basse des versants Est est à l’interface entre les plateaux cultivés du Neubourg et du Lieuvin et le fond de vallée alluviale pâturée et habitée. C’est un “micro-paysage”, une partie réduite de la vallée qui suite aux sessions de terrain m’ont permis de comprendre les mutations engagées dans la vallée. Il s’agit d’un paysage de terrasse basse, non inondable, urbanisée, représentatifs des changements, de l’abandon de pratiques visibles plus largement dans la vallée. Cet espace se dégage dans le paysage parce qu’il constitue la transition entre la route départementale qui surplombe légèrement la vallée et l’épais coteau boisé. Sont présents à la fois d’anciens motifs agricoles, comme les vergers dans des prairies permanentes ou des friches, mais aussi des motifs plus diversifiés comme ces cultures de blé, de colza ou de maraichage. Néanmoins ce qui domine ce sont des habitations le long des routes; des constructions du 19ème, des quartiers issus des années 50 et des pavillons plus récents qui étirent un peu plus la structure urbaine de Brionne. Ces parties linéaires sont à la fois des formes singulières d’un parcellaire organisé autrefois perpendiculairement à la route et des formes plus récentes de consommation excessive des paysages. Aujourd’hui cet espace est


Le Hameau linéaire des Essarts.

S’ils subsistent au sein de certaines localités des morceaux d’agricultures, d’élavage ou de vergers, leur quantité trop restreinte ne se perçoit que très peu dans le paysage et manifeste la perte d’une identité. La disparition des haies depuis les années 70, entraine des problèmes d’érosion mais surtout l’ouverture du bocage par suppression des prairies se fait au profit de l’urbanisation, d’un pavillonnaire mal contenu, dès lors que les cultures sont abandonnées on constate l’implantation urbaine. De ses dynamiques sur les versant et dans le fond de vallée, résulte un impact considérable sur le paysage et créer ainsi un contexte de simplification et d’uniformisation des paysages de vallée par l’appauvrissement de ces structures agraires. P r a i r i e bocagère au coté de zones d’activités

C u l t u r e sur bas de pente Quelques vergers sur la pente

Coteau boisé P l a i n e continu Implantation céréalière du de hameaux sur Neubourg bas de pente

Figure: Bloc-diagramme schématique des paysages de versant.

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2. Calleville et les débordements urbains de la vallée. 2.1 Les héritages pavillonnaire.

paysagers

altérés

par

l’extention

La forte pression urbaine des dernières décennies n’a pas exclu les plateaux, au contraire, les débordements urbains se prolongent jusqu’à Calleville et forment ainsi une unité paysagère à part entière. Contraint notamment par le PPRI et le risque d’inondation, l’accroissement s’est orientés par-delà d’abrupts coteaux boisés pour atteindre les grandes plaines agricoles de l’openfield du Neubourg. Toutefois aujourd’hui, il convient de considérer la commune de Calleville, par ses caractéristiques paysagères et les dynamiques enclenchés, plus proche de la vallée de la Risle. En effet, elle apparaît comme une conurbation de Brionne, “une main tendue” urbaine avec des systèmes agraires déconnectés à l’image du Pays Brionnais où vallée et paysage environnant ne sont pas liés. Autrefois Calleville était un village agricole c’est-à-dire né de la combinaison entre fermes et habitations, plutôt regroupées, parfois autour de la mare, qui laisse ensuite de vastes espaces dédiés à l’agriculture. Entre chaque village, les grands espaces de cultures formaient des respirations, aujourd’hui disparues à l’image de la liaison Brionne-Callevile. L’apparition et la construction de l’A28 a isolé la commune et l’incite dans son développement urbain à se diriger vers la vallée. Aujourd’hui, c’est à partir de seulement quelques indices, les mares et les quelques vergers, que l’on peut lire et comprendre cette ossature villageoise. Les extensions les plus récentes sont au contact direct de grandes cultures, modifiant la trame villageoise et affectant l’aspect regroupé qui devient étalé en ilots.

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1

2

1.Les vestiges d’une longère normande au coté du près vergers. 2.La mare des villages du plateau.

Calleville: L’extention pavillonnaire défigure les villages. des exentiosn en bord de champ.


2.2. L’homogénisation des cultures. Dans le pourtour de la commune on peut percevoir deux motifs agricoles. D’une part des cultures de blé tendre, de colza, de maïs et de betteraves qui forment un ensemble homogène de pratique uniforme de grandes cultures intensives en contact direct du village. Ces mêmes cultures dessinent le contour géométrique, boisée, du coteau. Il s’agit de forêts mixtes de feuillus et de conifères en futaies et en taillis, un paysage sylvicole mise en place depuis la fin de la guerre, par le fond forestier national. De l’autre des prairies de pâtures et de fauches et des vergers parfois encore en activité, ils sont souvent à l’abandon ou la propriété des habitants. Ces motifs formaient autrefois une lisière agricole diversifiée propre à la forme du village agricole. Le développement en conurbation n’a pas pris en compte, dans les documents d’urbanisme notamment, ces éléments qui constituaient cette lisière. L’agrandissement des parcelles, la mécanisation de l’agriculture et la croissance urbaine, ont favorisés l’absorption du foncier pour le voir s’urbaniser. Ce débordement de la vallée forme un échantillon des dynamiques en cours mais aussi des pratiques révolues et d’une identité peu évidente dans le Pays Brionnais.

1988 2000 2010

Superficie tjr en herbe (ha)

231 243 410

Superficie en terres labourables (ha)

291 164 160

Source: Agreste.fr

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Cultures Forêts (feuillus et conifères) Prairies Vergers & près-vergers.

Figure: carte d’occupation des sols sur la commune de Calleville.


Synthèse: L’uniformisation des paysages dont le pays Brionnais fait aujourd’hui l’objet, est une dynamique durablement inscrite dans les paysages de la vallée. Les objectifs d’attractivité et de développement de plus de 250 logements d’ici 2030, interrogent sur le devenir de l’identité paysagère de la commune dans le pays Brionnais. L’étalement de la trame urbaine de Brionne dans la vallée (1) et ses débordements vers les plateaux (2) à pour incidence la suppression des rares formes agricoles encore présente dans vallée et donc la raréfaction des traits singuliers du paysage Brionnais. La simplification des paysages se fait par le développement d’une agriculture céréalière de grandes parcelles (3), de plus en plus présente, notamment dans le pays naturel (originellement bocager) comme le Lieuvin. Les seuls liens qui peuvent être établis entre vallée et les paysages environnant des plateaux du Neubourg et du Lieuvin sont de l’ordre des voies de communication, des services à la personne développés par l’intercom et de ce linéaire d’urbanisation. Cette situation, visible dans le paysage banalise et efface les héritages pour favoriser une césure dans le système vallée-plateaux. Ce qui est aujourd’hui un pôle pour la vallée (Brionne) mais aussi un centre de décision (intercommunalité), est avant tout un paysage urbain dans une plaine alluviale où les formes anciennes de pratiques agricoles et culturels sont de moins en moins nombreuses au détriment de l’identité locale. Cet ensemble forme une entité paysagère qui dénote, qui contraste au regard de l’hétérogénéité, de la richesse des unités paysagères environnante du Pays Brionnais.

1

BRIONNE

21 Lieuvin

Le vallon des Fontaines

3

FRANQUEVILLE


C o t e a u x symétrique boisé et continue Plateau du Neubourg

Brionne étirés dans la vallée de la Risle La “main tendue” urbaine de Brionne à Calleville

2

3

Vallée du Bec Hellouin

Bec-Héllouin

La traversée de l’A28 au sein des cultures céréalières

CALLEVILLE

Vallée aux Boeufs

Vallée large entre prairie et urbanisation

Paysage du pays Brionnais en vallée de la Risle en 2016.

22


II.DES FORMES SINGULIERÈS ANCIENNES ENCORE LISIBLES.

ET

HÉRITIÈRES

DE

1.Les vallées affluentes de la Risle, des paysagères et patrimoniales persistantes.

PRATIQUES

valeurs

Les paysages de plateaux agricoles du Lieuvin ou du Roumois et les vallées affluentes de la Risle forment des paysages aux faciès diversifiés et aux caractéristiques parfois communes. Ils montrent le véritable contraste avec la vallée de la Risle dont ils sont déconnectés, mais surtout illustrent la singularité du Pays Brionnais et interrogent les pratiques encore existantes et celles émergentes. 1.1 Le vallon d’Authou. Le vallon d’Authou est une des petites vallées affluentes de la Risle qui s’immisce dans le plateau du Lieuvin et présente un paysage singulier qui se différencie nettement de la vallée de la Risle. En effet il emprunte les motifs paysagers du pays du Lieuvin notamment de l’élevage et des vergers. C’est une vallée étroite dont les crêtes sont boisées de feuillus et conifères qui annonce les forêts des rebords de plateaux. Un paysage rural où les habitations sont peu nombreuses, que l’on retrouve sur le flanc des coteaux à l’abri des débordements du torrent de l’Authou. Il s’agit pour la plupart d’habitations anciennes à colombages, de chaux et toit de chaume .En contrebas de ces habitations, des prairies bocagères composent en grande partie les paysages. L’élevage qui y est associé se présente sous un cheptel restreint mais, qui a l’échelle de la vallée, constitue la singularité du paysage. L’Authou ondule en fond de vallée marquée par les peupleraies, par d’anciens moulins et par le réseau de vannage. Il s’agit aussi de paysages reconnus comme étant remarquables puisqu’une partie de la vallée est devenue site classé depuis le 1er mars 1993. La trajectoire prise dans les années 90 a permis de maintenir les paysages en place, de conserver les traits d’une singularité emblématique dans le paysage du Pays Brionnais. Aujourd’hui par le biais des outils réglementaires instaurés par la DRAC ces paysages font l’objet d’une attention particulière qui notamment vise à préserver le vallon de la fermeture des paysages par le mitage. Le vallon d’Authou forme une poche de résistance, apprécier et valoriser.

23

1

2

3

1.L’élevage bovin dans la vallée 2.Les vestiges de vergers dans les jardins 3.Moulin Sainte-Mariea bandonner.


Végétation ripisyvle le long du torrent d’Authou Pente douce Coteau boisé

Près vergers et vergers sur le bas des versants

Implantation sur le bas de la pente

Cultures céréalières sur le haut des versants

Trame bocagère

Vallée large de prairies bocagère

Un cadre rural singulier, préserver des dynamiques d’urbanisation et d’uniformisation.

24


1.Les vallées affluentes de la Risle, des valeurs paysagères et patrimoniales persistantes. 1.2 La vallée du Bec. À l’image du vallon d’Authou, la vallée du Bec Héllouin est une petite vallée affluente représentative de “poches de résistances”, d’une attention particulière qui protègent et entretient les paysages. La vallée du Bec garde la morphologie en U à fond plat avec des versants symétriques abruptes et boisées. C’est un paysage rural de prairies bocagères organisées autour du village jardinés du Bec Hellouin et de son abbaye, depuis les coteaux jusqu’au long du cours d’eau c’est un paysage verdoyant qui prédomine. On observe des motifs paysagers diversifiés, de prairies bocagères, de patûres et de fauche pour un élevage ovin et bovin restreint, des peupleraies et des vergers associés à des constructions anciennes qui ont forgé l’identité du Bec. Le vallon comprend des parcelles de de prairies humides mésophiles, hygrophiles et de mégaphorbiaies qui offrent une mosaïque de milieu humide. Ce caractère rural dessine un paysage remarquable et fait l’objet de protection au titre de la loi 1906-1930 de site inscrit. L’abbaye Notre Dame du Bec et sa tour Saint nicolas ainsi que l’ancien logis abbatial sont classés momunents historiques dès 1840 et inscrits dans les premières indications de Prosper Mérimée. Aujourdhui l’abbaye est gérée par le centre des momunents nationaux. Les moines et soeurs ont initié la 25 1 construction du Bec Héllouin, de son village au Xème siècle mais également entretenu les paysages en exploitant les terres, aujourd’hui cette tâche revient à des exploitants professionnels. 1

2

3

4

1.Vallée en U à fond plat et versant boisée continue 2.Les vergers sur le bas des versants. 3.L’Abbaye du Bec Héllouin.

L’exemple d’un entretien des paysages par la permaculture: La conservation et la pérennité dans le temps de ces paysages résident aussi dans les initiatives d’acteurs locaux à préserver les paysages. C’est le cas de la Ferme du Bec installée depuis 2010 dans la vallée qui à mis en place une ferme expérimentale de plus de 5000m2, sur les principes de la permaculture autour d’un maraïchage bio. Elle fournit une production de fruits, de légumes et quelques moutons. Perrine et Charles HERVE-GRUYER y ont également ouvert une école de permaculture et travaillent aujourd’hui en partenariat avec l’INRA et AgroParisTech dans le but d’approfondir les recherches en matière d’agriculture biologique. L’activité de la ferme, inscrite en zone natura 2000 permet l’entretien du site mais aussi plus largement du caractère rural de la vallée. Une partie de la vallée du Bec Héllouin est site inscrit depuis 1976, suite à plusieurs procédures enclenchées depuis plusieurs années, la vallée pourrait prochainement devenir site classé afin de consolider cette dynamique de protection.

La ferme biologique du Bec Hellouin dans la vallée.


V a l l é e bocagère en U à fond plat.

Des versants abrupts symétriques boisée par foret de feuillus et conifère.

Village-groupé du Bec Hellouin organisé au pied du versant.

Vergers & près vergers sur le bas des coteaux. Malleville sur le Bec.

Vallée humide prairies bocagères

de

26 1

Axe de circulation en surplomb sur le bas des versants Route de Rouen, axe traversant dans le pays Brionnais, dans les vallée du bec et de la Risle.

Grands parcellaires de cultures céréalières du plateau du Neubourg ,au contact direct des villages.

Paysage de la vallée du Bec en 2016.

Synthèse: Des paysages représentatifs de poche de résistance. Les vallées affluentes de l’Authou et du Bec proposent une lecture de paysage radicalement différente qu’en vallée de la Risle. Elles se définissent globalement par des structures agraires traditionnelles inscrites dans un système paysager en place qui est préservé et entretenu. Les vallées d’Authou et du Bec semblent déconnectées de la vallée principales et sont plus proches des plateaux tant elles empruntent les motifs du Lieuvin ou du Roumois. Ces observations révèlent surtout un fort

contraste entre cette diversité, cette hétérogénéité que forment “ces poches de résistance”, face au problématiques de mitage d’étalement, et la vallée de la Risle qui se présentent comme une césure entre les paysages. Les trajectoires prisent dans l’évolution des paysages, très différente de celle de la vallée de la Risle, montrent surtout, par l’intermédiaire d’outils juridiques et d’initiatives locales, le maintien d’une identité, d’un héritage paysager.


2.Les plateaux agricoles du Lieuvin et du Neubourg. Des plateaux indistincts qui donnent forme particulière, représentatif des pays naturel auquel ils appartiennent, il illustre la position singulière au d’une mosaîque de paysage qu’occupe la vallée de la Rilse. 2.1 À la lisière de l’openfield céréalier du Neubourg. Entre le pays naturel du plateau du Neubourg la mare avait, avant l’arrivée de l’eau courante, toutes et la vallée de la Risle il y ce paysage hybride, mixte sortes d’usages : alimentaire, agricole, domestique, de l’openfield des grandes cultures céréalières et de la témoin de pratiques agricoles diversifiées, vivrières verticalité des forêts, du rythme des bosquets. C’est ou d’élevage. Les rebords boisés des vallées du Bec un plateau ouvert, de grandes cultures, de blé, orge, ou de la Risle sont des futaies de hêtres et futaies de colza, de lin et de betteraves. Selon le SCOT du pays pins sylvestres qui se mêlent à des taillis de feuillus du Neubourg “son bassin de vie est ainsi répertorié par mélangés et suivent une découpe géométrique. l’INSEE comme un « bassin agricole mono orientées L’implantation de l’A28 et de son échangeur est venu de grandes cultures », dans lequel la surface Agricole perturber la qualité de ses paysages en s’installant Utilisée représente 76 % du territoire.” Un paysage dans les espaces de respiration. forgé par l’agriculture et par le déboisement mais La pédologie du sol a incité le développement des dont le contour ouest présent des valeurs paysagères grandes cultures. Sur des sols bruns lessivés (présent différentes. Une trame arborée résiduelle à l’approche aussi sur les plateaux de Caux, du Roumois, du des vallées se distingue de cet ensemble ouvert et Lieuvin) parmi les meilleures terres agricoles, les dessine le particularisme de cette lisière. Ponctués couches profondes sont saturées d’eau, alors que le de rideaux d’arbres, de prairies, de quelques rares taux d’humidité du premier mètre fluctue fortement vergers et de mares cette singularité forge l’identité avec les saisons. C’est une terres limoneuses de grande des villages et de leurs environnements. qualité formés à partir du loess, un limon éolien apporté par le vent à l’ère quaternaire et souvent épais C’est une transition douce entre les vallées encaissées de plusieurs mètres. et les cultures céréalières intensives. Les villages au 27 1 caractère rural très marqué, en rue ou en tas sont surtout des villages agricoles, où fermes et habitations se côtoient. Autrefois les villages s’accompagnaient de vergers, de prairies aujourd’hui à l’état résiduel. La mare est aujourd’hui le lieu de rencontre bien loin de ses fonctions d’autrefois. Pour les besoins des hommes, Sols profinds sur limon Sols sur loess peu épais Sols sur alluvions fines Sols sablo-caillouteux sur terrasses alluviales

Sols sableux Sols argileux et argileuxlimoneux sur craie

3500 3123

source: agreste.fr

3079

Sols sablo-argileux

1682 1160

1988

2000

1000

Figure: D’après l’atlas de l’agricuture normande, source:AREHN

2010

Superface en herbe

S.A.U (en ha)


Figure: Harcourt, l’expression de l’identité du plateau: openfield, céréales et boisements.

1

2

3

1

Village en étoile comme Harcourt (figure), ou hameaux agricoles (Malleville-sur-le-Bec, Bosrobert), les villages de la plaine du Neubourg se différencient du reste des paysages par les grandes parcelles céréalières toujours plus nombreuses, qui les entourent (3), ponctué de quelques prairies lorsque l’on se rapproche du centre-bourg (2). Les boisements qui ponctuent l’openfield, relèvent d’une époque de déforestation, “d’essartage” (dont la toponymie fait souvent état) intensif du Xème siècle au XIVème (1).

2

La labour domine dans l’openfield du plateau du Neubourg.

28 1


2.Les plateaux agricoles du Lieuvin et du Neubourg. 2.1 Les villages bosquets du Lieuvin : entre prés vergers et bocages, un caractère singulier. L’identité qui émane des paysages observables sur la frange Est de la vallée la Risle le sont aussi pour le plateau du Lieuvin à l’Ouest. L’association des structures agraires et de l’habitat définit l’identité de cette unité de paysage. L’habitat diffus, forme un réseau dispersé de hameaux, de bourgs qui sont enclos par une lisière végétale. Celle-ci est définie par le CAUE du département de l’Eure comme “par extension, le tissu interstitiel séparant et protégeant l’habitat de l’espace de plein vent, la lisière est un signe essentiel de la ruralité”. Formant ce qui est appelé “village-bosquet”, cette ceinture végétale se constitue d’une part par une activité d’élevage et d’arboriculture; les prés vergés. De l’autre par la trame bocagère qui s’associe à ces activités agricoles qu’on retrouve dans les hameaux comme au Mesnil ou plus largement au sein des bourgs comme à Notre-Dame-d’épine où celle-ci est particulièrement présente. L’habitat et le bocage sont deux éléments intimement liés au sein de ces villages. Le mail bocager se poursuit plus au nord du Lieuvin et devient de plus en plus dense. Depuis les routes qui traversent les plateaux, les villages bosquet sont discrètement dissimulés par ces éléments de paysage et modèle la figure d’ensemble. Au sein des bourgs, les maisons sont peu éloignées les unes des autres et les parcelles sont donc jardinées, cultivées, closes de vergers ou de haies bocagères. L’image rurale est ici intacte. Il est encore aujour’dui possible de contempler des vaches et des pommiers dans le même herbage, témoins de rares héritages préservés dans le pays Brionnais. Au sein de l’ossature villageoise, il susbsiste l’église et l’if qui se côtoient, une autre figure paysagère propre au bourg de l’Eure. Vestige de l’élevage, l’If était répulsif pour les animaux et évitait ainsi qu’il pénètre dans l’enceinte du cimetière.

29 1

1

2

1.Prés-vergers dans le Lieuvin. 2.Les vergers basses-tiges à Berthouville.

Le bocage du Lieuvinn un paysage singulier qui rythme la plaine.


Notre-Dame-d’Épine, l’exemple du paysage emblématique du Lieuvin. Le paysage vivrier et productif des lisières provient d’une économie autrefois rurale dans laquelle l’autoconsommation et la commercialisation de proximité étaient privilégiées. Ces bourgs du pays brionnais sont les plus atypiques et riches de valeur longtemps préservées, aujourd’hui menacées par l’arrivée des systèmes modernes d’exploitation, la non régénération du bocage et la pression urbaine croissante.

Ces éléments paysagers évoqués sont également observables dans les vallons affluent du Bec et de l’Authou mais de moins en moins dans la lisière du plateau du Neubourg. À nouveau on remarque un fort contraste des qualités et de la diversité des paysages avec le fonds de vallées. Lorsque l’on traverse d’un bord à l’autre la vallée, les paysages traduisent des trajectoires différentes.

De nouvelles cultures céréalière qui remplacent le modèle de prairies et de vergers.

Près vergers et vergers au coeur du villages, parfois reconvertis en vergers basse-tiges Une ceinture de prairies paturés et fauché autour du village

30 1

Le maillage bocager qui s’étend depuis le village et ses fermes jusque dans la plaine agricole.

Paysage des lisières du village de Notre-Dame-D’Épine.

Le hameau linéaire ou groupés autour de l’églis et de l’Ifs,


La place de l’économie cidricole dans les paysages du pays Brionnais

31 1

Les prés-vergers et les vergers possèdent une image régionale qui est celle d’un élément représentatif de l’association entre deux économies traditionnelles de la Normandie, le cidre et le lait. Il s’agit d’un symbole, de l’image plébiscite par l’industrie agroalimentaire et les institutions. Le préverger et le verger en Pays Brionnais sont des éléments beaucoup moins représentés et productifs que dans d’autres ensembles paysagers de Normandie (ex: Pays de Caux), néanmoins, ils reflètent les vestiges de l’économie cidricole, ils sont ainsi une part entière de l’identité du paysage. Les prés-vergers sont une prairie fauchée ou pâturée par les vaches, plantée de fruitiers de hautetige à la fructification tardive (10 ans). Le pré-verger normand, système de culture arboricole et herbagère à cycle long, fournit sur un même sol des productions complémentaires de diverses natures : fruits à boisson, herbe, lait et viande. C’est une pratique agricole qui s’est mise en place sur les sols humides notamment du Lieuvin, peu propice aux céréales. Il constitue aujourd’hui l’élément traditionnel et structurant du système paysager des villages-bosquets dans le Lieuvin. Aussi plus qu’une image, c’est un motif. Le verger haute-tige haut-normand se compose de 996 000 arbres dans l’Eure.

Aujourd’hui au vu du nombre réduit de vergers, on ne peut véritablement pas parler de vocation cidricole pour le pays Brionnais néanmoins, les vergers ont une place paysagère qui participe à la singularité des lieux. À partir des années 50 l’urbanisation et la mécanisation de l’agriculture voient le nombre de vergers et prés vergers réduits. Ce sont les régions les moins spécialisées comme le Pays Brionnais, qui verra disparaitre près le plus de vergers. Le décret de 1953 sur la lutte contre l’alcoolisme participera également à la raréfaction des prés-vergers par l’arrachage de pommiers. Parallèlement s’est développée une reconversion vers de grands “champs” de vergers basse-tige plus productifs (ex: commune de Berthouville). Il s’agit d’un modèle beaucoup plus productif et rentable, 650 arbres à l’hectare contre 100 pour les pommiers hautes-tiges. Enfin, la filière cidricole en Normandie a su, ces dernières années, en s’appuyant sur les AOP, AOC et IGP, développer de nouveaux produits (ex: pommeau) et préserver une partie du verger. Dans le pays Brionnais le Lieuvin concentre l’ensemble de la production dont une grande partie est composée de vergers haute tiges régulièrement pâturés par les troupeaux.

Figure: carte de répartition des aires d’appelations et indice géographique protégée

Aire AOC Calvados Aire AOC Calvados Pays d’Auge Aire AOC Calvados Domfrontais Aire AOC Pommeau de Normandie Aire IGP Cidre de Normandie


2.Les plateaux agricoles du Lieuvin et du Neubourg. c.Franqueville, Aclou des villages à bord l’uniformisation de l’ossature villageoise.

de

champs,

vers

Figure: carte d’occupation des sols des communes d’Aclou et de Franqueville dans le Lieuvin.

32 1 Cultures Forêts (feuillus et conifères) Prairies Vergers & près-vergers.

Ces dernières années les constructions les plus récentes s’affranchissent du bocage au profit des grandes cultures céréalières grâce à des sols de plus en plus drainés. La partie du sud du Pays Brionnais tend à se désolidariser des traits paysagers du Lieuvin. Plus généralement le bocage est gagné par l’urbanisation et la disparition progressive de ces lieux d’aménités vient gommer la singularité du paysage. Les communes de Franqueville ou Aclou illustrent ces nouvelles ossatures villageoises. Pour ces communes les constructions récentes ne se rattachent pas au mail bocager, les surfaces sont souvent trop exiguës pour avoir des jardins plantés, ou des vergers. Ainsi ces villages sont aujourd’hui en contact direct des grandes routes A28, D438 et des grands champs. Les orientations générales retenues par le PADD ne suffisent pas à préserver les éléments de paysage qui construisent à la singularité des villages et campagnes du Pays

Brionnais. L’absence de PLU pour l’intercommunal et l’absence de document d’urbanisme pour ces petites communes favorisent la disparition de ces héritages. Pourtant l’identité du territoire réside dans ces formes encore présentes, dans les vallées affluentes ou dans ces rebords de plateaux, elle raconte une évolution très différente. 1988

2000

2010

Surface agricole utile (S.A.U)

4761 4283 4503

Superficie en herbe (ha)

2826 1749 1437

Source: Agreste.fr


La dichotomie des paysages du pays Brionnais: une vallée qui se désolidarise du reste de ces paysages. Ainsi la vallée de la Risle et Brionne marquent une césure dans la richesse des motifs comme ils sont proposés dans les vallées affluentes et sur les rebords de plateaux. L’étude des paysages du pays Brionnais traduit une situation dichotomique, un profond et lisible contraste dans le système plateau-vallée. La vallée est déconnectée de ces plateaux, loin des relations et pratiques agricoles qu’elle semblait entretenir autrefois. À l’image de la commune de Calleville, l’homogénéisation du paysage provoque la répétition d’un schéma urbain et agricole identique qui se propage sur le territoire. La concentration de l’urbanisation le long des cours d’eau et sur les bas des versants place la banalisation des paysages au coeur des dynamiques actuelles. La situation paysagère actuelle fait état de deux paysages contrastés, des plateaux agricoles singuliers, l’un céréalier de grandes cultures et l’autre dominer par l’élevage, des vallées affluentes protéger aux “paysages remarquables” qui constatent à la banalité de la vallée de la Risle, notamment par ses nombreuses extensions, étirement urbain qui efface toute singularité. En dépit des spécificités du contour de la vallée, il est difficile de reconnaitre l’identité paysagère du pays 33 1 Brionnais.

Figure: carte schématique de l’opposition actuelle des paysages.

Mes sessions de terrain et mes rencontres ont révélé des conflits entre les acteurs politiques locaux, mais surtout une méconnaissance des particularités du paysage, comme l’absence de réelle identification de ces valeurs dans les documents d’urbanisme en fait état. Les populations locales, se raccrochent plus souvent des paysages issus des “poches de résistance”, comme le Bec et le vallon d’Authou, pour définir l’identité de la vallée de la Risle. La multiplication des lotissements pavillonnaires et le mitage résidentiel, visible sur les coteaux, remettent en cause non seulement le concept de ville nichée mais aussi interroge sur l’origine de la standardisation des paysages . Aujourd’hui, une partie des pratiques et héritages agricoles du territoire disparaissent, le mail bocager est menacé dans le Lieuvin, les cultures industrielles s’intensifient. Comment expliquer des trajectoires paysagères si différentes ? Par quelles combinaisons d’événements, de choix, la trajectoire du système vallée-plateau s’est-elle scindée? À partir de ces constats on peut s’interroger sur l’identité paysagère de la Risle autrefois. Les paysages actuels ont- ils toujours présentés cette situation de dichotomie ? Enfin, comment font évoluer les traits figuratifs de la vallée de la Risle, quelles places avaient-ils dans ce paysage ?


2ÈME PARTIE RÉTROSPECTIVES ET ÉVOLUTION DESTRAITS FIGURATIF DES PAYSAGES DU PAYS BRIONNAIS

34 1

I. Du 19ème à 1950: L’inscription dans le paysage de vocations agricoles et industrielle singulière. Le 19ème siècle est marqué par de profonds bouleversements socio-économiques, notament par la révolution industrielle qui signe le passage d’une société à dominante agraire à une société industrielle. Autrement dit, c’est la transformation d’une agriculture de subsistance vers des pratiques industrielles d’intensification, de mutation de l’artisanat dans lesquelles, la vallée de la Risle et le Pays Brionnais prennent part. Le pays Brionnais présente durant cette période des paysages harmonieux et singulier qui forme une identité paysagères et culturelles.


1.1.Un fond de vallée industrialisé:les manufactures de filature en bord de Risle. Au début du 19ème la vallée de la Risle connaît une reconversion industrielle, le long de la Risle, du Bec ou de l’Authou, les moulins à blé, huile et à foulon en enfilade est réinvestie et laisse peu à peu place à une industrie de textile. Comme la vallée de la Risle, les vallées affluentes de l’Authou et du Bec présentent un nombre important de moulins à eau au début du XIXème siècle. Dans ses petites vallées ces ouvrages ne seront pas atteints par la reconversion industrielle, ils sont peu à peu abandonnés où réinvestissent en habitation. En 1812 le moulin à foulon de Brionne deviendra la “Grande Fabrique”. L’implantation de cette manufacture de draps de lin marquera le début d’un développement industriel dans l’ensemble de la vallée de la Risle. Comme ses voisines la vallée de la Risle voient l’activité industrielle et notamment de filature s’implanter sur les espaces disponibles et en particulier sur les coteaux, en dépit de l’activité agricole présente. L’installation de ces manufactures surmontées de cheminée donne lieu à la construction du quartier ouvrier fait de briques(Rue Lemarois), 35 1 de réseau de vannage le long de la Risle, et des demeures des patrons. La naissance du paysage industriel en vallée de la Risle voit le paysan-ouvrier devenir au XIX l’ouvrier-paysan, supprimant ainsi peu à peu la ferme vivrière. L’activité de filature tournée vers la Risle, se lie à la route et au chemin de fer. Accompagner par dess petites industries et des scieries cette transformation industrielle de la vallée forme à Brionne un bassin d’emploi à la fin du 19ème. Les États de section de la commune de Livet-surAuthou indique en 1809, la présence de 9 moulin à eau dans le vallon. Le département de l’Eure comprend à cette même époque, 82 % de moulin à eau, soit 511 moulin à eau pour 111 moulin à vent.

Figure 1: carte de cassini du vallon d’Authou en 1747.

figure 2: carte de cassini de la vallée du Bec en 1747.

Figure 3: carte de Brionne en vallée de la Risle en 1747.


Vallon d’Authou 9 moulins à eau.

Vallée du Bec, 4 moulins à eau.

Brionne, vallée de la Risle,6 moulins à blé, foulon et à huile.5 reconvertis en filature de coton.

Représentation de la vallée de la Risle en 1850.Une ville nichée qui préserve les coteaux.

36 1 Jusqu’à la fin des années 40, la vallée de la Risle est ainsi marquée à la fois par l’activité industrielle insérée dans la trame urbaine de Brionne et des pratiques agricoles traditionnelles. L’implantation sur les coteaux de l’industrie a préservé à cette époque un paysage ouvert sur les prairies et sur Risle. À cette époque Brionne constitue une position centrale dans l’articulation du territoire et des paysages, c’est un axe de passage, un lieu d’échanges, de foire mais surtout un bassin d’employer.


1.2. L’essor de l’activité cidricole normande: la conquête du verger. Le pommier est au XIXème siècle “l’arbre des campagnes” (CAUE76), c’est avant tout une production personnelle et vivrière de fruits ou d’alcool puis devient au début du XXème un produit de plus en plus consommé. En Normandie, le nombre de vergers va ainsi s’accroitre en quantité et le cidre s’exporter. Témoin de l’essor de l’activité cidricole la consommation du cidre s’accroît à Paris, 56 300 hectolitres en 1879, 117 100 hl en 1882 et 300 000 hl en 1886 (Revue de 1906 “cidres et Poiré”). Au début du 20ème la production nationale atteint les 18 millions hl en 1920, la Normandie produit alors à cette même époque 7 millions hl. Le poids de cette économie régionale affecte les paysages et voit le motif paysager du verger cidricole se multiplier et devenir une icône pour la région. Plusieurs événements croisés sont à l’origine de cet essor. La suppression des frontières fiscales à la chute de l’ancien Régime ouvre le marché et relance l’activité. La crise viticole par l’oïdium en 1848, le mildiou en 1870 et le phylloxéra en 1900 favorisent l’essor de l’activité cidricole au détriment du vignoble français. Enfin, les besoins de la guerre en contingents d’alcools d’États en 1915 marqueront également le développement de l’activité.

37 1

Figure : Carte de répartition des vergers au XIXème siècle.


La généralisation des vergers cidricoles. Les deux guerres mondiales provoquent de nombreux bouleversements économiques qui affectent directement la production. Durant la guerre le gouvernement réquisitionne les pommiers pour la fabrication d’explosifs, de carburant ou pour le moral des hommes, aussi la région connaît un fort développement des plantations. Les pommes sont directement envoyées aux distilleries pour produire rapidement et en grande quantité. Ainsi paradoxalement si le cidre connaît une perte de qualité et de renommée, la surproduction causée par la guerre, a développé un vaste réseau de distillerie et voyaient les vergers se multiplier. Dans le Pays Brionnais les paysages sont progressivement et durablement investis par le modèle du verger à cidre. Au début du XXème les vergers s’installent et côtoient le paysage à travers des schémas variés: -dans les vallées de Brionne, du Bec Hellouin ou d’Authou les vergers sont présents, sur les basses pentes, aux côtés des cultures. Sur ces basses terrasses

se trouvent alors de petites exploitations où se joignent des cultures maraichère et des prairies. -Sur les plateaux du Neubourg et du Lieuvin, les vergers haute-tige sont aux côtés du finage céréalier, nuancé par quelques prairies dans le Lieuvin. -Enfin, dans les villages le verger occupe les lisières, complémentaires aux prairies et aux bocages qui les enclosent. La diffusion de ce motif dans la vallée de la Risle est intimement liée à la proximité des grands axes de circulation tournés vers les marchés de Paris à Cherbourg et d’Alençon à Rouen. Dans le pays Brionnais au lendemain de la guerre le paysage des vergers se modifie et occupe de plus vaste surface.

38 1

Figure: Répartition des vergers & près-vergers dans le pays Brionnais en 1950. (d’après IGN 1950).


1.3 Les près vergers normands. Avec l’essor de l’économie cidricole et laitière en Normandie le pré-verger connaît son âge d’or dans la seconde partie du XI Xème. En 1900, la Normandie est alors la première région d’élevage en France, lequel devient essentiellement bovin et le couchage en herbe fréquent. L’implantation et le maintien dans le paysage des prés-vergers s’expliquent par l’adéquation entre l’économie rurale et d’autoconsommation au XIXème et un système agraire qui demande peu de main-d’oeuvre et offre des ressources alimentaires diversifiées. À partir du XXème l’association de deux pratiques agricole en plein essor au sein d’une même surface facilite son maintien dans le paysage. L’obtention du label Appellation

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d’Origine Réglementée en 1942 marque à la fois la reconnaissance de l’activité. D’abord timidement présent dans les bourgs du plateau à l’Est, les prairies déjà présentes sur les rebords du plateau à l’Ouest sont progressivement convertis en près vergers. Le verger traditionnelle haute tige côtoie les prés-vergers, ensemble, ils composent les lisières végétales qui entourent les bourgs. Ainsi à la fin des années 40, ce motif paysager occupe chaque bourg du pays Brionnais et forme un élément emblématique dans le paysage. Le préverger constitue un trait commun et marque une époque ou le pays Brionnais présent des paysages semblables.

1.& 2. Les vergers sur le coteau au pied du vieux donjon. Source: archives.cg27.fr

De la pratique de subsitance à l’économie cidricole. En 1840 le registre statistique et historique des communes du département de l’Eure enregistre sur les 16 045 hectares du canton de Brionne, 8.863 ha de cultures labourées, 789 ha de prés et herbages et 1512 ha de vergers et jardins. Autrement dit les vergers représentent, dans la seconde moitié du 19ème, plus de 10% de l’occupation des sols du Pays Brionnais. Le pommier est alors présent dans les cours des habitations, dans les villages, le long de rues ou des parcelles. Les bouilleurs ambulants, de village en village proposaient l’alcool, habilités à produire le cidre ou le calvados ils étaient aussi les récoltants. À la fois dans les bourgs et dans les centres-villes les vergers constituaient alors une part entière des paysages et de la vie courante.

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1. Bouilleur de crue ambulantdans l’Eure. Source: archives.cg27.fr 2 & 3. Mise en sac des pommes et préparation du cidre. Sources: Delcampe.fr


Le pays Brionnais au 19ème: Un système paysager unifier. Au 19ème siècle, le pays Brionnais connaît déjà l’orientation agricole actuelle de ses plateaux. En effet, les cultures céréalières du plateau du NEUBOURG et les prairies bocagères du Lieuvin sont antécédentes au 19ème. L’implantation “massive” d’ouvrages hydrauliques amorcée au 18ème par des moulins et poursuivie au 19ème par l’industrie de filature propose alors dans un même système paysager des vocations agricoles différentes mais pas moins déconnectées. Ces orientations agricoles dissociées restent néanmoins complémentaires, les moulins et industries jouent alors un rôle fondamental ; ils fournissent l’emploi, une production de blé, de farine, de pain pour les villages ruraux, pour les foires locales, pour exporter vers les grandes villes, les récoltes à partir des routes royales. Ainsi au XIXème siècle, les paysages du fond de vallée, des versants et des plateaux sont en interaction. Cela forme un ensemble à la fois hétérogène, de motifs et de pratiques variées et propres à chacune

des “séquences” qui se juxtaposent pour produire, créer une économie. Les moulins participent à la mouture des céréales issues des plateaux, fabriquent l’huile, fournissent l’alimentation nécessaire à l’autosuffisante de l’époque. L’industrie participe au développement des villes, elle emploie la main d’oeuvre locale et utilise notamment les productions de lin du plateau du Neubourg. Enfin, l’élevage du Lieuvin alterne entre la plaine, les versants, alimente les foires, la production de lait et de viande dans la vallée. Les foires dans les villes et village témoignent de ces échanges, du lieu qui existait et rassemblait les populations autour des pratiques agricoles. La vallée de la Risle dans le pays Brionnais possède au XIX des fonctions, des usages de l’espace pour faire fonctionner les unités paysagères dans une logique vivrière, économie de temps, de moyens.

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1. & 2. Foire et marché aux porcs à Brionne. source:delcampe.fr


1.4 Les lisières végétales une structure paysagère partager par les villages. L’association des prés-vergers aux bocages et le développement du couchage en herbe associé à l’essor cidricole et laitier modifient profondément l’ossature villageoise. Les pratiques agricoles d’élevages bovins et d’arboricultures se sont assemblées entre elles autour de l’habitation et de la cour. À l’époque les maisons sont souvent sans étage, étirée (longère) disséminées assez aléatoirement dans les prairies et vergers. Le bocage enclos, les terres labourées et les prés-vergers fournissent une protection face aux vents, une réserve de bois, et une clôture pour les pâtures. La combinaison de ces éléments forme une lisière végétale et productive, une transition douce entre l’espace bâti et l’espace agricole. Elles marquent l’horizon céréalier en formant des villages bosquets. La lisière devient la structure représentative et emblématique des vocations cidricoles et laitières prospères de l’époque. Cette figure paysagère, que constitue la lisière, de cas isolé à un modèle à généraliser dans les villages du pays Brionnais grâce notamment à l’essor économique le cidre. Présentes sur les rebords de plateau du Lieuvin ou du Neubourg, d’un bord à l’autre de la vallée ces lisières témoignent au XXème d’un paysage semblable, de valeurs paysagères partagées. La trame bocagère qui prend naissance dans ces villages se poursuit des plateaux vers les vallées du Bec, d’Authou, ou de Brionne formant des continuités visuelles de qualité. Jusqu’aux années 50 le système paysager de valléeplateau se caractérise par des valeurs paysagères similaires notamment autour de l’élevage et des prés-vergers. Jusqu’aux premiers bouleversements agricoles, le pays Brionnais préserve des pratiques agricoles mixtes de part et d’autre de la vallée. (céréalier et sylvopastoralisme).

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De 1850 à 1950, le pays Brionnais partage autour des villages, des lisières de prairies et de vergers.

Paysage du pays Brionnais en vallée de la Risle en 1850. Source: IGN.remonterletemps.f

Paysage du pays Brionnais en vallée de la Risle en 1950. Source: IGN.remonterletemps.f


Des îlots bocagers préservés entre 1850 et 1950.

Près-vergers et vergers dans les interstices du village.

Boisements et bosquets se prolonge par des haies bocagères et annoncent les rebords de vallées.

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Contour de villages:Monopolisation des surfaces agricoles par les prairies et l’élevages.

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Figure: Bloc diagramme Notre-Dame-D’Épine, l’état des lisière en 1950.

1. Les lisières était aussi formait par le jardin (vivrier parfois composait de vergers. 2. Les vergers du Presbytère de Berthouville.


Coteaux ouvert, prairie et culture en lanière autour des villages. Une ville niché qui préserve les coteaux, culture sur versant, une vallée connecter à son paysage environnant.

Paysage de la vallée de la Risle au 19ème siècle.

Orientations agricole conserver, plateau bocager dominé par l’élevage.Généralisation du vergers dans les lisières de villages.

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PLATEAU DU LIEUVIN


L’évolution des paysages entre 1850 et 1950 sur le pays Brionnais dans la vallée de la Risle. Brionne et la vallée de la Risle.

À partir des vocations industrielles et agricoles, notamment de l’économie cidricole, les paysages du pays Brionnais ont connu leurs premières grandes transformations du 19ème jusqu’aux années 50. C’est une période faste, qui a vu se construire la singularité des paysages autour d’éléments paysagers partagés. Depuis la vallée jusque sur les plateaux, on retrouve en 1950 des lisières de villages fournis par des vergers et des prairies dans chaque village, tout en conservant des orientations agricoles opposées. Entre les grandes cultures céréalières des plaines du Neubourg, déjà présentes en 1800 et les prairies bocagères du Lieuvin, la vallée de la Risle était alors le lien culturel, paysager et identitaire du pays Brionnais.

Eléments paysager clefs partager dans la vallée et dans le paysage environnant, vergers, prairies.

Orientations agricole conserver, plateau peu ondulé aux cultures industrielle, dominé par les céréales.

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PLATEAU DU NEUBOURG

Paysage de la vallée de la Risle après 1950.

Vallée aux Boeufs, préserver de l’urbanisation jusqu’à la fin des années 50.


Petit parcellaire exigu, en lanière de polycuture et d’élevage. Lisière de village sur le plateau du Neubourg (vergers et praries).

Vallée de prairies humides.

Le coteau entrouvert sur le plateaux.

Les alignments d’arbres le long des routes de commerces vers Paris/Rouen.

Paysage de la vallée du Bec Héllouin au 19ème siècles.

45 1 Généralisation du motifs de vergers autour des villages. Emboisement du coteau à partir des années 50. Déprise agricole et opération de reboisement du fonds forestier National.

Développement des dans la vallée.

vergers

Multiplication des bocagères autour prairies.

haies des

Paysage de la vallée du Bec Héllouin après 1950.


L’évolution des paysages entre 1850 et 1950 sur le pays Brionnais dans la vallée de la Risle. Les vallées affluentes du Bec Héllouin et d’Authou.

Les vallées affluentes de la Risle ont jusqu’aux années 50 connu une trajectoire commune et semblable à la vallée de la Risle. De l’abandon progressif des moulins pour l’industrie de filature à BRIONNE, à l’essor de l’économie cidricole qui engendre la multiplication des vergers, c’est une période durant laquelle ces paysages vont se forger un caractère rural, peu habité, à l’écart de l’industrie et de l’animosité de la vallée de la Risle. Le début de mesure de protection et de préservation du patrimoine lance une trajectoire de patrimonialisation de ces espaces, encore active aujourd’hui.

Coteau entrouvert sur le plateau. Alignement le long des routes.

Moulins et fermes bocagères autour du torrent d’Authou.

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Paysage de la vallée du Bec Héllouin au 19ème siècle.

Généralisation du motifs de vergers autour des villages.

Fermeture et emboisement du coteau

Inscription des valeurs rurales dans le paysages, prairies, vergers, rypisilve, longère.

Paysage du vallon d’Authou après 1950.


II. De 1946 à 1993: Morcellement du pays Brionnais: la perte des élémenst paysagers clefs. 2.1 La déprise agricole des coteaux, vers des boisements continue.

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En près d’un siècle, les coteaux et rebords de plateaux se sont emboisés, formant une épaisse frange boisée témoin des premières déprises agricoles. La disparition d’une partie de la main oeuvre agricole vers les bassins d’emplois du département et l’industrialisation de la vallée a favorisé l’abandon de terres. Souvent difficiles à mécaniser et à exploiter ces terrains se sont progressivement enfrichés puis boisés. Le sylvopastoralisme a également concentré l’élevage sur les prés-vergers et les pâtures du fond de vallée, laissant à l’abandon d’anciennes pâtures. Enfin les nombreuses crises qui ont pu toucher l’élevage on favoriser l’abandon progressif des troupeaux dans les pâtures situées sur les coteaux. À partir de 1946, le fond forestier national entreprend l’organisation de travaux de boisement et de reboisement, la mise en valeur

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et la conservation des terrains boisés en France. Dans le pays Brionnais ces mesures favorisent l’emboitement et la fermeture de paysages des vallées du Bec, de l’Authou, et de Brionne. Les motifs paysagers des coteaux et plateaux autrefois perceptibles depuis la vallée sont peu à peu camouflés et supprimés par l’emboitement. En 1950 les coteaux apparaissent largement boisés, formant une épaisse frange de feuillus et conifères, l’emboitement conduit à la perte d’un système de plateau-vallée ouvert l’un vers l’autre, cela met fin à des continuités paysagères, aux vues dominantes. L’abandon de ces terres lorsqu’elles ne sont pas reboisées rend fragiles ces espaces face à la croissance urbaine. Ils deviennent des lieux propices aux premières extensions pavillonnaires consommatrices d’espaces.

1. Vergers et emboisement sur les versants de la vallée du Bec. Vers 1940.source:delcampe.fr 2. Pas de boisment sur le versant au pied du vieux donjon.source: delcampe.fr


La fermeture des coteaux dans les vallées. Figure: Photo-comparaison des boisements d’après photographies aérienne. source; géoportail.fr

Vallon d’Authou

Vallée du Bec Héllouin

1946

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Brionne

1946

1989


2.2 Le déclin des vergers.

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Le décret du 9 mars 1953 “relatif à l’orientation de la production cidricole et à la commercialisation des cidres, poirés et de certaines boissons similaires entame l’arrachage des pommiers et le déclin de l’activité. Ainsi l’État subventionne l’arrachage dans le cadre d’un plan de lutte contre l’alcoolisme. En outre, il met en place une interdiction de planter des vergers de plus de vingt arbres sans autorisation et une suppression du privilège des bouilleurs de cru. En 1956 le gouvernement abandonne progressivement les quotas d’état et cesse alors tout politique de soutien aux producteurs. La recrudescence du vin en France et le changement des habitudes de consommation vers d’autres alcools réduisent considérablement la production et le nombre de fermes traditionnelles. Enfin, la mécanisation de l’agriculture, les phénomènes de rurbanisation et les tempêtes successives dans les années 90 (1987, 1988 et 1999) on eut raison d’une grande partie des vergers. La tempête de 1987 détruit plus de 20% des vergers. (ref: atlas de l’agriculture normande 1995). Entre 1963 et 1991, le département de l’Eure à perdu plus de la moitié de ses arbres, de 2680 à 1039 arbres, soit une diminution de 61%, une disparition considérable qui impacte directement le paysage. Les quotas laitiers en 1984, la spécialisation vers la viande bovine et la diminution du cheptel entrainent le départ ou la reconversion d’un grand nombre d’exploitants et parachèvent le déclin de l’activité. Entre 1988 et 2010 le cheptel total (tous confondus en unités gros bétail alimentation totale) passe 10 101 à 6 968 sur le canton de Brionne. Les progrès techniques, l’industrialisation de l’activité cidricole dans de grandes cidreries

Évolutions des paysages autour de la vallée du BEC. 1.plan de l’abbaye en 1626 2. photo aérienne de la vallée en 1940 3.Photo aérienne de la vallée dans les annés 90.

participent également à rendre peu à peu obsolète le modèle des prés-vergers. Progressivement les prés-vergers et vergers haute-tige disparaissent du paysage, poussant au démantèlement des structures paysagères notamment dans la plaine du Neubourg. L’enchainement par abandon des prés-vergers participe à simplification du paysage et donc l’appauvrissement des structures agraires. Les lisières végétales autour des villages du Lieuvin et du Neubourg sont sérieusement modifié, la suppression du verger, du pré vergers dans les pâtures ou dans les cours créer des confrontations brutales avec des espaces agricoles simplifiés. Seul un tel poche note le maintien de l’activité dans la vallée, peu à peu par manque d’entretien disparaît. À la fin des années 90 la vallée de la Risle s’est engagée durablement dans une économie du secondaire et du tertiaire au détriment de l’activité agricole. En 50 ans les vergers disparaissent au fur et à mesure. Parallèlement à partir des années 70 débute la reconversion, la transformation timide vers “le verger spécialisé”; le verger bassetige. Néanmoins les alignements répétitifs et denses du verger basse-tige dans de grandes parcelles proposent une forme moins diversifiée, des paysages moins pittoresques. Par le biais d’aides publics, du soutien des mesures agroenvironnementales, de la PAC ou du département, les prés vergés et vergers tentent de se rénover, se réintroduire.


COMMUNE DE BRIONNE Figure: Photo-comparaison d’après photographies aérienne sur la commune de Brionne. source; géoportail.fr

1946 1989

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II. De 1946 à 1993: Morcellement du pays Brionnais: la perte des éléments paysagers clefs. 2.3 L’ouverture du bocage, vers la simplification des paysage du Brionnais.

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La période de remembrement qui suit la fin de la guerre ne touche que peu le Pays Brionnais. En effet dans les années 50 le bocage et les ceintures végétales qui entourent les villages sont encore bien présentes. C’est à partir des années 70 que la trame bocagère est grignotée par suppression des haies et par disparition des prairies au profit des grandes cultures, au moment même où l’activité cidricole connaît un véritable déclin et où les prairies se raréfient au profit des grandes cultures céréalières et fourragères. L’enchevêtrement de la mécanisation de l’agriculture, de la disparition des vergers, et la spécialisation céréalière des paysages conduisent à la disparition du bocage et des lisières. L’abandon des pratiques culturales se traduit par une colonisation des parcelles par les espèces ligneuses et un élargissement des haies non entretenues. Dans le Lieuvin et à la lisière de la plaine du Neubourg les prairies disparaissent et sont réinvesties par des cultures céréalières qui consomment alors le bocage. À la fin du XXème la trame est discontinue et se réduit à des bribes de haies, non entretenues elles deviennent vulnérables à l’urbanisation. Les disparités les plus importantes sont surtout observables sur la commune de Calleville. L’ouverture des villages par Supression du bocage, le changement des cultures et l’agrandissement des parcelles contribuent à la simplification du paysage. La perte des éléments de ces structures paysagères entraine à partir de 1970 la raréfaction de pratiques agricoles directement issues du 19ème et marque le début de la banalisation des paysages du pays Brionnais. L’industrialisation des activités agricoles c’est faite aux dépens des fermes traditionnelles et des petits exploitants qui détenait à travers leur savoir-faire la singularité, l’identité du paysage. Supérieur à 50% 40 à 49% 30 à 29% 20 à 29% Inférieur à 20%

% surface en herbe/ Surface totale

Figure: Mutation des paysages agricoles, carte de répartition des prairies en Haute-Normandie.source: Agreste/Atlas des paysages.


COMMUNE DE CALLEVILLE Agrandissement des parcelles, suppression des haies dans les lisières dans la plaine du Neubourg. Figure: Photo-comparaison d’après photographies aérienne sur la commune de Calleville.source; géoportail.fr

1946 1989

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2.4 Les premières exentions urbaine ou la fin de la ville niché. Après la guerre le tissu urbain est encore relativement compact au sein des villages, aux côtés d’anciennes bâtisses et quelques quartiers naissent dans le coeur de la ville à Brionne. Les populations évoluent relativement peu jusqu’aux années 50, la structure générale des bourgs du pays Brionnais reste conforme au modèle de ville nichée et de villagebosquet du 19ème. Le phénomène de rurbanisation qui touche la France à partir des années 60-70, touche durablement et sensiblement le pays Brionnais. Les secteurs les plus affectés sont BRIONNE et les villages de la plaine du NEUBOURG. Au début des annés 40 la population de Brionne est de 2900 hab contre plus 4950 hab à la fin des années 90 soit une augmentation de 70%. Ce processus dessine une urbanisation rampante et 53 1 forme d’importantes discontinuités qui défigurent la ville nichée et les lisières .La commune de BRIONNE s’étire, notamment dans les secteurs des Fontaines et de la vallée aux Boeufs, mais aussi sur les bas versants. Les années 60 sont marquées par des opérations publiques de logement conséquentes dans la vallée aux Boeufs. Les nouveaux logements d’abord sous la forme de pavillons (1963) puis de logements collectifs, mettent fin à des activités agricoles insérées

Abandon de l’industrie filature

Dispartion des prairies et vergers sur les versanrt

dans la composition de la ville depuis plus d’un siècle, les vergers, prairies et cultures disparaissent des abords. Favoriser par la non prise en compte dans les documents d’urbanisme locaux des éléments paysagers tels que les haies, les vergers, les prairies, déclenche le mitage des espaces dits “naturels” ou agricoles dans la vallée. Les constructions de la seconde moitié du XXème s’éloignent de la bichromie qui caractérise BRIONNE, les nouveaux modèles d’habitat fin 90 banalisent et standardisent la ville. Néanmoins, le phénomène ne touche pas l’ensemble des paysages, les bourgs du Lieuvin, les vallées du Bec et de l’Authou ne connaissent pas les mêmes transformations, les populations évoluent peu de 1950 à 1990, l’inscription de la vallée du Bec en 1976 limitant entre autre l’impact. Toutefois au sein de ce paysage rural, le peu de parcelles libérées laisse rapidement place aux grandes cultures ou à l’habitation individuelle qui modifie la structure d’ensemble.Le fusionnement entre la déprise agricole et cette pression urbaine favorise une consommation excessive des structures agraires, des éléments paysagers clefs. BRIONNE voit émerger à partir de 1960 un développement urbain important, mal maitrisé dans la vallée et sur la plaine du Neubourg.

Pavillonnaire des années 60


Le contexte de transformation systémique provoque le renversement, des pratique et des motifs, mais également la disparition des valeurs qui les incarnent. En 1950 la vallée aux Boeufs (figure) est encore préserver de l’urbanisation, les champs, les prairies, le bocage sont encore actifs. source: delcampe.fr La vallée aux Boeufs en 1950. Début années 70, implantation de logements ouvriers sur le coteaux autrefois préserver.

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Figure: Photo-comparaison entre 1950 et 1974. source: delcamp.fr

Les “Essarts” sur le versant Est de la vallée de la Risle vers 1950. Encore préserver de l’urbanisation.

Industrie textiles.

Cultures céréalières aux côté de quelques habitations.

Les prairies et vergers sur le bas des pentes.


Coteaux ouvert, prairies et cultures en lanière autour des villages. Une ville nichée qui préserve les coteaux, culture sur versants, une vallée connectée à son paysage environnant.

Paysage de la vallée de la Risle après 1950.

Tendance à la raréfaction des prairies, des vergers, diminution de l’élevage (passage du bovin laitier vers bovin à viande), homogénisation des cultures sur le modèle du plateau du Neubourg.

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PLATEAU DU LIEUVIN


L’évolution des paysages entre 1950 et 1993 sur le pays Brionnais dans la vallée de la Risle. Brionne et la vallée de la Risle.

Les grands bouleversements de la seconde partie du XXème siècle vont durablement impacter les paysages du pays Brionnais. L’urbanisation de la vallée associée à la déprise agricole, notamment de raréfaction des prairies et de mécanisation, facilite les opérations de logements. En dépit des pratiques préservées jusqu’à là, le pays Brionnais voit sa singularité peu à peu consumée. Sur le rebord des plateaux, les villages perdent une grande partie des vergers notamment sur la plaine du Neubourg, de plus, une partie des terres du Lieuvin sont labourées, modifiant les lisières et simplifiant encore un peu plus les structures agraires. Au terme des années 90 la vallée s’est désolidarisée du reste des paysages, et marque un contraste entre banalisation, singularité encore préservées dans les vallées affluentes

Éléments paysagers isolés sur les plateaux, vallée urbanisée, tendance à la banalisation, simplification des paysages, appauvrissement des structures agraires.

Agrandissement des parcelles, généralisation des cultures industrielle, augmentation des terres labourables.

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PLATEAU DU NEUBOURG

Paysage de la vallée de la Risle dans les annés 90.

Vallée aux boeufs, urbanisation importante à partir des années 60 qui se poursuit sur au-delà du coteaux et consomme l’espace agricole.


III. De 1990 à aujourd’hui entre banalisation et préservation, la confirmation d’un paysage à deux vitesses. 3.1 Patrimonialisation et protection: vers la mise en place de “poche de résistance”. En parallèle de la valorisation des terroirs et finages cidricoles par A.O.C, le classement du site du vallon d’AUTHOU en 1993 marque le début d’une période de résistance, d’une lutte pour le maintien des paysages. Se met en place dans le pays Brionnais à partir de 1984, l’A.O.C “Calvados”, en 1991 “Pommeau de Normandie” et l’IGP (indication géographique protégée) en 2000, reconnue par l’Europe. Si les mesures sont peu efficaces et tardives tant la disparition d’une grande partie des vergers est déjà actée au début 1990, elles permettent encore aujourd’hui à quelques rares exploitants de produire localement le cidre, le calvados et le pommeau en pays Brionnais (en service court).Enfin, l’inscription de la vallée du Bec à l’inventaire des sites en 1976,relancée aujourd’hui pour une procédure de classement, est représentative de la mise en place début 90 de poches de résistance dans lesquelles le paysage d’autrefois est reconnu et protégé pour ses valeurs et qualités .Le rôle d’initiative plus locale, comme l’implantation de la ferme permacole du Bec dans les années 2000 ou des actions menées par l’AMSE (Les amis des 57 1 monuments et sites de l’Eure) depuis les années 30, participent au maintien des paysages du Brionnais.

témoignent d’une prise de conscience, notamment par les zones natura 2000, ces valeurs sont reconnues mais restent vulnérables notamment sur les plateaux. En matière d’urbanisation les dynamiques de mitages, de débordement urbain ont l’arrivée tardive d’un outil réglementaire tel que le PLU pour le remplacer le P.O.S de 1987 Certains sont juste identifiés, d’autres pas des outils de protection. Aussi, aujourd’hui BRIONNE possède peu d’outil de protection vis à vis de ses vallées affluentes du Bec et d’Auhtou. Ce constat est transposable à l’échelle de l’ensemble de la vallée de la Risle, ou la portion dans laquelle BRIONNE se situe est marginalisée -Site RAMSAR Marais Vernier et Risle Maritime -Vallée de la Risle GLOS SUR RISLE-MONTFORT SUR RISLE –APPEVILLE. Ce qui à la fois représente un atout pour une partie des paysages qui se voient protégés à partir des années 90 devient également une source d’inégalité pour le reste des paysages, Cette profonde dichotomie par ce double processus de banalisation et de protection est le résultat des dynamiques des 50 dernières années Le dernier classement dans les années 2000 abbaye en 2008.

Les outils mis en oeuvre pour la protection des paysages dans le Brionnais ont étaient semble inégalement répartis. Si une grande des paysages représentatifs de la configuration singulière d’autrefois, la vallée de la Risle est démunie de protection, notamment vis à vis de la raréfaction des prairies. Certain élément ou structure paysagère sont certes identifiés et

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La Tour de l’abbatiale au Bec (1906),monument historique en 1840. source: archiv.27.fr

Héllouin

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1.Le vieux donjon en 1900 2.La porte de l’abbatiale (1900-1950) source: archiv.27.fr


Figure: Carte des protections et de outils de reconnaissance des paysages dans le Pays Brionnais, des années 70 à aujourdhui.

Le vallon d’Authou Site classé (1993)

L’Ifs du cimetière Site classé (1929)

L’abbaye Notre-Dame-du-Bec Classé MH (2008) Entrée de l’abbatiale Site classé (1926) La vallée du Bec Site inscrit (1976)

L’Église Juliette (1961)

Saint (XVe)

Cyr et Inscrit

St MH

L’Ifs du cimetière entourant l’église Site classé (1926)

Le château de Brionne (XIe) Inscrit MH (1925)

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Le château d’Harcourt xiiie Classé MH (1862)

Manoir de la Haule (XIVe) siècle Inscrit MH (2011)

Forêts

L’église Saint-Ouen Classé MH (1862)

Xiie

Monument historique (Classé & Inscrit)

Vergers & près-vergers. Zones NATURA 2000 Directive habitats

Site classé et inscrit

Aire du site isncrit ZNIEFF Aire de site classé


III. De 1990 à aujourd’hui entre banalisation et préservation, la confirmation d’un paysage à deux vitesses. 3.2 Le rôle de l’intercomunalité dans l’évolution du paysage. L’intercommunalité de la ”communauté la structure, sans les compétences en urbanisme, se de communes rurales du canton de BRIONNE” limite au volet culturel, à la gestion des transports est créée en 1998 sous l’impulsion de la loi et du tourisme, au grand regret du Président de CHEVENEMENT (1999) sous la forme d’une EPCI l’intercom. de type communauté de communes. Elle regroupe Alors que les collectivités locales, et tout dans son organisation initiale 22 acteurs excluant particulièrement les structures intercommunales BRIONEN à sa création. En effet, la commune assument des responsabilités croissantes en matière décide de ne pas rejoindre la structure, les élus de paysage, le choix de s’exclure de la C.C. a porté locaux évoquant alors des différences d’enjeux vis à préjudice au paysage et à son évolution. Néanmoins, vis de communes rurales. depuis 2013 il y a une véritable prise de consciences Pendant plus de 15 ans, les paysages sont des enjeux, de la banalisation du paysage, du mitage soumis à une politique d’aménagement du territoire et de la perte d’identité culturelle dans le pays dans les communes du Lieuvin et sur la plaine du Brionnais. Le développement du SCOTT “RisleNUEBOURG. Malgré sa position au coeur de Charentonne” fin 2011 a notamment permis pour l’armature urbaine et paysagère et son rôle à jouer la première fois de mettre en place un document dans les politiques de logement ou de préservation analytique et prospectif sur le paysage du Pays des paysages, BRIONNE se désolidarise du pays Brionnais. Brionnais. Les conflits d’intérêts adjacents à cet événement ont une répercussion directe dans le paysage alimente la césure entre la vallée et le 59 1plateau. Ce refus est un événement prépondérant, un facteur explicatif de la dichotomie des paysages, du manque d’initiative, de solutions globales. En 2013 BRIONNE rejoint ce qui devient “l’Intercom du Pays Brionnais”. Son rôle au sein de

Carte comparative des limites de l’intercomunalité de 1998 à aujourd’hui.


3.3 Les extensions en continue. A partir de 1990 BRIONNE et les communes voisines de la plaine du NEUBOURG connaissent une seconde phase d’urbanisation, une croissance de la population qui continue de défigurer l’identité culturelle et les vestiges du paysage d’autrefois. CALLEVILLE, MALLEVILLE SUR LE BEC et BOSROBERT connaissent une augmentation de population qui s’exprime par des ilots de résidences tout particulièrement aux extrémités, dans les contours des villages. CALLEVILLE voit sa population doubler entre 1990 et 2013, passant de 330 habitants à plus de 600 aujourd’hui. Les nouvelles constructions dans ces secteurs particuliers étirent un peu plus les villages et remettent en cause les espaces de respiration entre chaque commune. Ces observations révèlent une consommation d’espaces, de paysages excessifs. Selon le diagnostic territoriale du P.L.U établit en 2013, il s’agit d’une consommation “de l’ordre de 16 hectares avec une moyenne, toute opération confondue, de l’ordre de 17 logements par hectare” sur une étude portée depuis 2002. Ce même document relève la nécessité “de réduire l’artificialisation des terrains au cours de la prochaine décennie en tendant vers une moyenne de l’ordre de 25 à 30 logements par hectare...”.Politique de logements sociaux dans BRIONNE, de nouvelle lotissement une part importante 30 % de logements sociaux, des constructions nouvelles qui continuent . Entre raréfaction des prairies par la déprise agricole et croissance urbaine, les constructions sont de plus en plus favorisées et deviennent très consommatrices d’espaces agricoles. La volonté des communes et de la C.C de rendre attractif le pays Brionnais, l’importance du défi urbain, l’absence de documents d’urbanisme autre que le POS avant 2013 a favorisé jusqu’ aujourd’hui, les extensions urbaines. L’incidence directe sur les paysages, est la banalisation du territoire, le déclin en continu de l’identité aveugle.

1535 1446 1311

1068

1081

1142

1990 1999 2004 2008 2010 2013

Populations cumulés sur les communes de Calleville, Bosrobert, Malleville-sur-leBec. source:Insee

Figure: Photo-comparaison de l’urbanisation d’après photographie aérienness sur la commune de Brionne et Calleville. source; géoportail.fr

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L’évolution des paysages entre 1850 et aujourd’hui sur le pays Brionnais dans la vallée de la Risle. Un système paysager lié et hétérogène au 19ème.

Paysage de la vallée de la Risle au 19ème.

Généralisation du modèle de lisière, essor des vergers, partage de valeurs paysagères. Système vallée-plateau connecter,

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Paysage de la vallée de la Risle après 1950.

Mécanisation de l’agriculture, homogénisation des cultures, destrucration du bocages, raréfaction des prairies et verger, rurbanisation. Système vallée-plateau désolidariser/

Paysage de la vallée de la Risle aujourd’hui.


Partage des trajectoires pour les vallées affluentes qui se désolidarisent du reste de la Risle.

Paysage de la vallée du Bec Héllouin au 19ème siècles.

Paysage du vallon d’Authou au 19ème.

Déprises agricoles + reboisements FFN Mesures de protections des paysages et du patrimoines historiques.

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Paysage de la vallée du Bec Héllouin après 1950. Paysage du vallon d’Authou après 1950.

Paysage du vallon d’Authou aujourd’hui.

Inscription et demande de classement, préservation des paysages singuliers, développement du tourisme, iniatives locales d’entretien des paysages.

Paysage de la vallée du Bec Héllouin aujourd’hui.


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Synthèse: Des années 90 à aujourd’hui on constate que le processus de banalisation des paysages qui conduit à la situation de dichotomie actuelle, se poursuit durablement. Malgré la mise en place de poche de résistance auquel les population s’accroche aujourd’hui pour définir l’identité culturel du pays Brionnais, une grande partie des paysages est fragilisée par le manque d’outils pour limiter l’urbanisation et favoriser la protection des héritage laissés par le temps. L’association d’une intercommunalité esseulée par BRIONNE, d’urbanisation croissante et d’une déprise agricole permanente des années 90 a aujourd’hui alimenté l’effacement de l’identité du pays Brionnais.


3ÈME PARTIE PROSPECTIVES: UN PAYSAGE EN ORDRE DISPERSÉ, VERS LA PERTE D’UNE IDENTITÉ CULTURELLE. La vallée aux Boeufs à Brionne source:atlas des paysages de haute-normandie.

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État des lieux et identification des dynamiques et enjeux sur les paysages du pays Brionnnais:

Le pays Brionnais à d’abord présenter un système paysager connecter, une figure composée d’éléments paysagers traditionnels, lisible et continue d’un bord à l’autre de la vallée. Les années 50 marquent alors la fin de ce système paysager construit autour de la vallée, du cours d’eau et reposant sur la complémentarité avec son paysage environnant. C’est la fin d’une période de diversification des fonctions des paysages pour se spécialiser vers un modèle industriel 65 1 de l’agriculture. Jusque dans les années 90, on constate la simplification des structures agraires pour de grandes cultures mécanisées, mais surtout une urbanisation massive en fond de vallée. Les 30 dernières années ont montré une oscillation entre des actions de valorisation ou/et de patrimonialisation d’un côté et d’abandon ou/et de suppression de l’autre. Néanmoins, jusqu’aux premières prises de conscience à partir de 1976,

avec le l’inscription de la vallée du BEC, puis le classement du vallon d’AUTHOU en 1993, les paysages ont évolué sans véritable réglementation en matière d’urbanisation. Ainsi paradoxallement dans le temps, les paysages du Pays Brionnais sont d’une part de plus en plus banaliser et de l’autre de plus en plus protéger. C’est de ce contraste que née la césure entre les paysages. Les enjeux d’aujourd’hui porte sur la perte d’identité locale dans le Brionnais, sur la maitrise de l’urbanisation de la vallée au profit du mantien des paysages, sur la place laisser à l’héritage. La banalisation actuel tend à s


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Figure: Carte des dynamiques et enjeux après étude des paysage. Extentions pavillonaires. Etirement des conurbation. Émergence de cultures spécifiques, marâichages, agricultures biologiques, vergers basse-tiges. Homogénéisation des cultures. Mise en valeur des paysages, protection au titre de site classé ou inscrit.


Scénario tendenciel: “Le pays en ordre dispersé”, entre banalisation et patrimonialisation du pays Brionnais, vers la perte de l’identité.

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À partir de l’analyse approfondie des paysages, des formes passés et des dynamiques en cours dans le pays Brionnais, on comprend le morcellement actuel. Des grands bouleversements d’après-guerre résulte un double processus, d’une part de banalisation, relatif à l’urbanisation excessive depuis les années 50, de l’autre, la patrimonialisation des paysages, en particulier dans les vallées affluentes qui connaissent des procédures d’inscription et de classement de site à partir de 1970. Le processus d’extension urbaine n’est pas spécifique à Brionne, aussi toutes les communes rurales du territoire sont soumises ces dernières années à ce phénomène. Les lisères sont supprimés, les villages s’agrandissent, modifiant les relations qu’ils entretenaient avec l’espace agricole, avec le paysage alentour. Le contexte difficile de l’agriculture en France rend fragiles les espaces agricoles aux conurbations, facilite les grandes cultures, la récupération foncière, et l’implantation de maison individuelle ou de lot résidentiel dans le pays Brionnais. Ces maisons standard, associée à la consommation de l’espace agricole, héritière de singularité, appauvrissent l’identité du pays Brionnais. L’urbanisation est sans limite sur des plateaux de grandes cultures, sans “obstacles” paysagers. À l’inverse, parallèlement, dans une trajectoire radicalement opposés, les vallés afluentes font l’objet de développement touristique pour des paysages reconnu et protéger en dépit du reste du territoire.

L’absence prolongée de documents d’urbanisme majeur comme le PLU et ainsi la non-prise en compte des éléments paysagers clé du territoire, souvent réduit uniquement à de très petite surface ou aux espaces “remarquable”on encourager la césure des paysage et explique en grande partie la situation actuel. C’est seulement à une échelle plus large, que le SCOT “RisleGuiel-Charentonne, envisage un scénario de “territoire éclaté”, de “pays en ordre dispersé”. L’apport récent des orientations du SCOT, les prescriptions du CAUE su r les lisères végétale des bourgs on favoriser l’identification des valeurs paysagère et des enjeux sur un « territoire ‘éclaté » et apporter un renouvellement des positions et des regards sur les paysages. À l’aube du regroupement des intercommunalités, ces documents associée aux dispositifs réglementaire de l’urbanisation en cours de réalisation, en particulier du PLU de Brionne doit guider et entérinés la césure des paysages. À court terme, sans PLUI, c’est dans les communes rurale que ce situe l’enjeux fort de banalisation et d’homogénisation. Récemment qu’il s’agissent de la mise en place de culture spécifique, du développement des vergers basse-tige, des subventions régionale pour la plantation de pommier, ces actions de préservation mené à différente échelle mettent en valeur et participe, non pas à retrouver du bocage ou des prairies mais à construire de nouveaux motifs dans le pays Brionnais.


Les orientations du paysage du pays Brionnais. Aussi, le scénario envisageable pour le pays Brionnais, pour les 30 prochaines années voit le renforcement du morcellement du territoire vers la perte des singularités, de l’héritage et donc de l’identité du pays Brionnais. -D’une part, on prévoit la saturation des paysages par l’urbanisation avec les 400 habitants supplémentaires dans la commune de Brionne, fixés comme objectifs par le diagnostic territorial du P.L.U. L’homogénisation systématique des paysages agricoles vers les grandes cultures prévoit la disparition des anciennes pratiques

(notamment de l’élevage et des vergers). -D’autre part, la mise sous cloche des vallées affluentes d’Authou et du Bec objet de toutes les attentions, au détriment du reste des paysages. Là de reparton inégale et très localisé de protection et mise en valeur de paysage reconnu, apprécier et protéger et des paysages banalisés qui scinde le pays Brionnais. La sectorisation des paysages par les politiques de protection oublie les lisières, les interstices le « liant » des paysages.

3.Patrimonialisation des grandes valeurs paysagères dans les vallés affluentes.

68 1 Paysage de vallée de la aujourd’hui.

la Risle

1.Homogénéisation des pratiques agricoles pour les cultures céréalières, disparition de l’identié culturelle.

2.Saturation des paysages par les extentions résidentielles dans les conurbations.


PAYSAGE DU PAYS BRIONNAIS EN 2030 La croissance démographique projetée d’ici 2030 prévoit 400 habitants supplémentaires, plus de 300 logements dans la commune de BRIONNE d’ici 2025. Le PADD issu du SCOT « Risle, Guiel, Charentonne » envisage au minimum 60 ha de logements et d’activité dans l’intercommunalité. Si dans ses orientations, le SCOT, encourage à réduire de 1/3 les surfaces affectées au résidentiel et à l’activité, aux vues des dernières années, de l’augmentation des populations des communes avoisinantes notamment de CALLEVILLE, l’implantation de ses extensions pavillonnaires devrait s’étaler un peu plus sur le plateau Est créant ainsi une seule et même conurbation depuis la vallée jusqu’au coteau. Enfin, le contexte agricole indique clairement l’homogénéisation vers les cultures céréalières, d’ici 2030 les rebords du Lieuvin, à l’image des communes d’ACLOU et de FRANQUEVILLE aujourd’hui, supprimer peu à peu lisières, prairies et vergers. Sans obstacle, l’urbanisation peu continuer à utiliser les parcelles non exploitées de manière rapide et avec un tissu lâche; la trame bocagère qui subsiste aujourd’hui à l’ouest de la vallée disparaîtrait

Généralisation des terres labourables, vergers limiter à quelque surface basse-tige. Disparition du bocage.

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PLATEAU DU LIEUVIN


Disparition des motifs paysagers ,disparition du bocages, suppression des lisières par homogénéisation des cultures, transformation céréalières des terres du Lieuvin. Agrandissement des parcelle, monopolisation des terres par cultures céréalières.

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Émergence de cultures spécifiques, maraîchages, vergers basses-tiges.

PLATEAU DU NEUBOURG Paysage de la vallée de la Risle en 2030. Vallée aux Boeufs, paysage saturés par l’extentions pavillonaire, vers la fin d’un vallon agricole.


Loi Notre: 2017 vers le regroupement des communes, un, projet pour fédérer les paysages.

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Promulguée le 7 août 2015, la loi portant sur la nouvelle Organisation Territoriale de la République (NOTRE) confie de nouvelles compétences aux régions et redéfinit les compétences attribuées à chaque collectivité territoriale. C’est le troisième volet de la réforme des territoires après notamment la nouvelle carte des régions. L’article 33 de la loi NOTRE relève le seuil minimal de constitution d’un EPCI à fiscalité propre au seuil de 15 000 habitants. Pour l’intercommunalité du Pays Brionnais, avec 12 484 habitants, ce projet de loi représente une opportunité de travailler conjointement autour de la vallée de la Risle. Au regard de l’étude des paysages dans le temps, l’intercommunalité a joué un rôle déterminant dans la trajectoire des paysages, l’absence de structure cohérente jusqu’en 2013 a durablement affecté l’aménagement du territoire. Aussi, jusqu’ici concurrentielles, les intercommunalités ont la possibilité, à une échelle élargie et attentive aux dynamiques en cours, de gérer durablement l’aménagement du territoire de la vallée. Pour F. SCRIBOT, Président de l’intercom du “Pays Brionnais” c’est surtout la possibilité de mettre en place un PLUI à partir de la mise en œuvre du schéma régional de coopération intercommunale (SRCI).

Les intercommunalités inscrites dans un schéma de coopération intercommunale auront entre autre l’augmentation des compétences des intercommunalités (tourisme, aires d’accueil des gens du voyage, maisons de services au public). Pour les intercommunalités comme le pays Brionnais, sans PLUI aujourd’hui, la loi NOTRE devient un nouvel objectif pour une structure qui devenait limitée dans ses actions. En concordance avec le SCOT ”Risle, Gueil, Charentonne”, le travail déjà accompli autour de l’identification et l’orientation possible du territoire, la réglementation du PLUI sur les paysages, élargis, de la vallée de la Risle semblerait apporter des réponses à la construction de l’identité paysagère et combler l’absence de dispositif réglementaire. Plus largement la loi NOTRE propose finalement une entrée fédératrice de l’aménagement du territoire qui dans le cas du pays Brionnais devient un outil, une réponse aux enjeux actuels.

Brionnais, Beaumontais, Beaumesnil, Broglie, Bernay des paysages aux enjeux partagés.


Figure: Projet de schémas départementale de coopération intercommunale.

Le projet de schéma départemental de coopération intercommunal proposé par les présidents de l‘intercommunalité, sous réserve de validation de la préfecture envisage le regroupement de 4 intercommunalités; -CC du Pays Brionnais -CC de BERNAY“ Risle, Charentonne” -CC de BEAUMESNIL -CC du pays Beaumontais Ainsi le périmètre d’échelle choisi coïncide avec ceux de l’étude du SCOT “Risle, Charetonne”, dont l’objectif est de donner un contenu précis, utilisable par les intercommunalités et les communes, notamment lors de l’élaboration de leurs documents d’urbanisme. C’est-à-dire de mener un projet de politique publique qui mettre en relation les réflexions, les outils, les orientations accumulées et partagées au service de l’aménagement du territoire et du paysage. Ce regroupement des intercommunalités est perçu par les présidents de C. C, comme la réponse pour répartir et organiser le territoire en fonction des équipements publics, des densités dans un périmètre partagé, c’est-à-dire dans une mosaïque de pays naturels, d’identités paysagères qui connaissent une perte, un déclin de motifs clés. (Lieuvin, plateau du Neubourg, Roumois et pays d’Ouche); Enfin du point de vue prospectif, l’apport du P.L.U.I, issu de la loi ALUR, à l’échelle d’un regroupement

d’intercommunalité constitue une réflexion L’affirmation du regroupement intercommunal comme échelle du projet de territoire et de paysage doit ainsi permettre: - d’appréhender visuellement les caractéristiques et les enjeux d’un territoire à l’échelle appropriée Utiliser le paysage comme levier (ressource et moyen) pour répondre aux autres enjeux du territoire : 1 aménagement (travail sur les franges urbaines), 72 habitat (attractivité), biodiversité (gestion des milieux), agriculture, culture & patrimoine (mise en spectacle du territoire)... -Tirer profit de la transversalité du paysage pour assurer l’articulation des politiques, éviter une réflexion “multicouche” grâce à ce fil rouge volonté des élus de donner corps à cette politique du paysage - Tirer profit des Oap (Orientations d’Aménagement et de Programmation) pour privilégier et constituer un outil précieux à mobiliser, qui laisse de la place à l’interprétation et à l’évolution, éléments essentiels à toute démarche paysagère. rf: objectifs issus du club-plui: pourquoi construire un plan local d’urbanisme intercommunal par le biais d’une approche paysagère ?


Conclusion: Le temps a ici durablement modifié les paysages et a sans doute vu disparaitre l’identité locale du pays Brionnais. Les rapports quotidiens au paysage ont pendant longtemps forgé et entretenu des pratiques agricoles d’une grande richesse paysagère et porteuse de singularité. En près d’un siècle les grands bouleversements socio-économiques, agricoles et culturels ont posé sur les paysages une empreinte brutale et banale. La distance entre le pouvoir et les paysages, les conflits politiques, l’absence de réglementation ont progressivement déconstruit, morcelé le paysage. Aussi, aujourd’hui il faut agir en faveur de la conservation, de la protection d’élément identitaire, du patrimoine local, mais aussi au travers de la loi NOTRE de créer un sentiment d’appartenance à un même paysage, de (re) construire de la richesse paysagère dans notre cadre de vie, dans le paysage quotidien qui conditionne notre bien-être. Il ne faut pas chercher à retrouver l’état antérieur, à l’identique, mais être en faveur d’une quête de singularité, d’une unité paysagère. Les années à venir seront déterminantes face à la banalisation qui touche nos paysages “ordinaires” tels qu’ils sont définis dans la convention européenne du paysage (2000). De la même manière que les grands paysages remarquables ont participé à la construction des identités nationales, les paysages ordinaires jouent également un rôle à l’échelle des communautés habitantes locales.

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BIBLIOGRAPHIE THÉMATISÉ:

LA VALLÉE DE LA RISLE: MOSAÎQUE DE PAYSAGE: -”Le paysage et ses fonctions” publication de l’Agence régionale de l’environnement de Haute-Normandie.septembre 2010. -Confluence “Entre Risle et Vièvre, le Lieuvin” publication 2011.AMSE (amis des monuments et sites de l’Eure) -La Normandie (Que sais-je?) Ed. Presses universitaires de France, 1987 -Atlas de paysages de la Haute-Normandie. Claire GAUTIER Agence FOLLÉA_GAUTIER FORMES ET PRATIQUE ANCIENNE: -Atlas de l’agriculture normandes de 1995, CERVIR,SRSA.Presse universaitaire de CAEN.R.CALMÈS/P.BRUNET/M.RAIMBEAULT -Atlas et géographie de la france moderne “LA NORMANDIE”. Éditions flammarion ARMAND FRÉMONT. -Monument et site de l’Eure, les cahiers Jacques Charles n°9 publication AMSE (association des Amis des monuments et site de l’Eure).2007 -Publication “Panorama de l’agriculture et de l’agroalimentaire) Édition 2015.Chambre d’Agriculture Normandie. -Monographie des villes et villages de France: « Histoire de Brionne » réédition de « Brionne à vol d’oiseau » publié en 1887 par F.Desbuards. STRUCTURE ET DEVELLOPEMENT URBAIN: -La ville franchisée: formes et structures de la ville contemporaine, Editions de la Vilette, Paris, 2010. -MANIFESTE « QUELLE ÉVOLUTION POUR LES QUARTIERS PAVILLONNAIRES ? ». CAUE27, 2013. ED. CAUE27 -fiche méthodologique “PLUI et Paysage. PLUI.territoires.gouv.fr

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BIBLIOGRAPHIE THÉMATISÉ: PROBLÉMATIQUE DE BANALISATION DES PAYSAGES: -De la cacractérisation à la gestion des paysages ordinaire des vallées dans le nord-ouest de la France. Thèse M.A.GERMAINE.Université de CAEN décembre 2009 -« LISIERES VIVANTES COMMENT HABITER LES BOURGS DE L’EURE ? », 2011.Publication CAUE 27. -SAGE de la Risle, état des lieux, synthèse générale. Département de L’EURE. ICONOGRAPHIE: -site internet delcampe.fr -archive départementales de l’Eure. EVREUX. POLITIQUE PUBLIQUE:

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-SCOT du “Pays Risle, Charentonne”, syndicat mixte, avril 2013 -Diagnostique territoriale du PLU de la commune de BRIONNE. -DOCOB, document d’objectifs du site natura 2000 fr 2300150 “Risle, Guiel, Charentonne. Octobre 2000. - LES ESSENTIELS du Service Territorial de l’Architecture et du Patrimoine de l’Eure (DRAC Haute-Normandie) Connaissance n°79 – 31 mars 2013 C. MOINIER, M. PIOLINE, F. POULAIN -http://www.arehn.asso.fr PERSONNE RESSOURCE: Pierre et Renée ROUSSEL: responsables de l’association AMSE (Amis des monuments de l’Eure Frédérick SCRIBOT:Président de l’Intercom Pays Brionnais Elizabeth Moisan Berryer: Paysagsite DPLG durant 30 ans à Callevile. Agriculteurs et habitants rencontrer spontanément lors de mes sessions de terrains.


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