Libre de le dire à l'Église • CNEF

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Quelles sont les limites lorsque le message chrétien bouscule l’opinion publique ? Qu’en est-il de l’enseignement des enfants et des jeunes mineurs ? Ce manuel pratique guide tous ceux qui s’interrogent sur le cadre de l’expression de leurs convictions en Église. En supplément : « 5 clés pour les prédicateurs », « 5 clés pour aborder des sujets sensibles avec nos contemporains » et « 5 clés pour les moniteurs des enfants et les animateurs de groupes de jeunes ».

ISBN 978-2-36249-302-7

9 782362 493027

4,90 €

Libre de le dire à l’église

En France, l’Église vit au sein d’une société fortement sécularisée. Dans une République laïque, de quelle liberté de parole dispose réellement l’Église ? Existe-t-il à cet égard une liberté totale de prêcher ? A-t-elle toute liberté pour exprimer, exposer et enseigner sa théologie ?

à l’Église Pasteurs, prédicateurs, évangélistes, animateurs enfance et jeunesse



à l’Église


Libre de le dire à l’Église : Pasteurs, prédicateurs, évangélistes, animateurs enfance et jeunesse • Cnef © 2016 • BLF Éditions • www.blfeditions.com Rue de Maubeuge • 59164 Marpent • France www.blfeditions.com Collection Libre de le dire • www.libredeledire.fr Édité sous la responsabilité du Cnef : Conseil national des évangéliques de France 123 avenue du Maine • 75014 Paris • France www.lecnef.org • contact@lecnef.org • 01 43 21 12 78 Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés. Maquette : Jean Schott • www.studiozede.com Mise en page : BLF Éditions Impression n° XXXXX • IMEAF • 26160 La Bégude de Mazenc ISBN 978-2-36249-302-7

broché

Dépôt légal 1er trimestre 2016 Index Dewey (CDD 23) : 261.72 Mots-clés : 1. Liberté religieuse. Laïcité. 2. Liberté de conscience et de culte. Liberté d’expression.


à l’Église Pasteurs, prédicateurs, évangélistes, animateurs enfance et jeunesse



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Sommaire • Introduction • Libre de prêcher 5 clés pour les prédicateurs • Libre d’évangéliser

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5 clés pour aborder des sujets sensibles avec nos contemporains

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• Libre d’enseigner la Bible aux enfants

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5 clés pour les moniteurs des enfants et les animateurs de groupes de jeunes

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Introduction Dans l’Église1, chacun peut vivre son chemin de foi chrétienne au sein d’une communauté vivante et organisée. L’Église ne se réduit pas aux rassemblements dominicaux des chrétiens. Elle se vit au quotidien dans les liens interpersonnels entre ses membres, dans l’annonce de l’Évangile et dans les activités sociales et culturelles qui l’accompagnent. L’Église, témoin du Christ envers le monde, interpelle aussi la société en interrogeant la place accordée au respect du prochain et de la création. Les libertés de conscience et d’expression jouent un rôle central au sein de l’Église. L’Église est en effet le fruit par excellence de l’exercice de la liberté de conscience des individus qui la rejoignent par un choix éclairé. Cela n’est possible que parce que la foi chrétienne a pu être exprimée, en paroles et en actes, en public ou en privé, au même titre que d’autres convictions, idées ou philosophies. Par Église, nous entendrons ici une communauté de chrétiens, à distinguer du bâtiment (édifice cultuel, lieu de rencontre ou local) ou des associations cultuelles ou culturelles, qui peuvent en être la forme juridique. Il ne s’agira pas non plus d’une dénomination chrétienne en particulier. Le Cnef choisit de s’adresser plus particulièrement aux chrétiens dans ce livret mais le propos vaudra, dans son principe, pour les autres confessions ou religions qui n’utilisent pas le terme d’Église pour la communauté des croyants qu’elles rassemblent.

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8/ En France, l’Église existe au sein d’une société fortement sécularisée. L’Église a-t-elle toute liberté pour exprimer, exposer et enseigner sa théologie ? Existe-t-il à cet égard une liberté totale de prêcher ? Quelles sont les limites lorsque le message chrétien bouscule l’opinion publique ? S’agissant des mineurs, l’Église dispose-t-elle de toute liberté pour les enseigner dans la foi ? Voici quelques clés pour trouver le juste équilibre.


Introduction

Déclaration universelle des droits de l’homme (ONU, 10 décembre 1948) Article 18 Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites.

Article 19 Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit.

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Constitution française du 4 octobre 1958 Article 1, § 1 La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée.

Loi du 9 décembre 1905, séparation des Églises et de l’État Article 1 La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public.


Libre de prêcher Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (26 août 1789) Article 10 Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi.

Article 11 La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.


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Dans l’Église, existe-t-il une liberté totale de prêcher ? La prédication est centrale dans l’Église puisqu’elle est le lieu de la lecture et de l’explication de la Bible, texte fondateur de la foi chrétienne. La prédication, entendue au sens large, que ce soit par un ministre du culte ou par un diacre, par un pasteur ou un enseignant des enfants (« moniteurs d’école du dimanche ») est un moyen d’exposition et de transmission de l’enseignement biblique. La prédication n’est, certes, pas le seul moyen de transmission de la foi. Une personne peut tout à fait lire la Bible seule, l’étudier et en tirer un enseignement chrétien. Cependant, pour l’Église, dans sa dimension collective, la prédication constitue un élément fondateur du culte chrétien dans lequel la Bible, la parole de Dieu, joue un rôle prépondérant. La prédication peut se traduire par l’enseignement au sein de l’Église, envers les membres adultes et envers les enfants, ou par l’annonce de l’Évangile aux non-croyants. À l’heure actuelle, elle peut revêtir des formes variées allant de la communication orale, écrite, à une diffusion multimédia ou par l’internet.


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Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales2 (Conseil de l’Europe, 4 novembre 1950) Article 9 : Liberté de pensée, de conscience et de religion 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites. 2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.

La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, généralement connue sous le titre de Convention européenne des droits de l’homme (CESDH), a été signée par la France le 4 novembre 1950. Le 3 mai 1974, elle a été ratifiée par la France et est entrée en vigueur dans le pays. Ses dispositions sont d’applicabilité directe en raison de la précision suffisante des droits qu’elle protège. La CESDH s’intègre donc dans l’ordre juridique interne français. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), sise à Strasbourg, veille à l’application de la CESDH par les États membres. Sa jurisprudence permet de définir les droits protégés par la CESDH et de condamner les violations commises par les États membres.

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14 / La prédication bénéficie d’une double protection au titre de : – La liberté de pensée, de conscience et de religion (CESDH, art. 9), notamment la liberté de manifester sa religion ou sa conviction collectivement, en public ou en privé, par le culte et l’enseignement. – La liberté d’expression (CESDH, art. 10) qui comprend la liberté d’opinion et la liberté de communication. Alors que la liberté du for intérieur, celle de croire ou de ne pas croire, est absolue, la liberté du for extérieur, la liberté de manifester sa religion ou la liberté d’expression, peuvent être limitées dans certains cas prévus par la loi (alinéas 2 des art. 9 et 10 de la CESDH, notamment). Ainsi la « liberté de prêcher » n’est pas illimitée. Le prédicateur (entendu au sens large) est donc responsable de ses paroles ou de ses écrits et de leurs conséquences envers les auditeurs, les tiers et l’État. Une importante distinction doit être énoncée à ce stade. S’il n’y a pas de limite à une conviction intérieure, en revanche, précisément, il existe des limites à l’expression d’une conviction lorsque celle-ci, dans le cadre de la loi (notamment pénale), porte atteinte à d’autres droits. En effet, la liberté de pensée, de conscience et de religion et la liberté d’opinion couvrent le contenu des convictions, qui est entièrement libre. Les individus demeurent libres de croire ce qu’ils veulent. L’Église est libre d’établir sa confession de foi. En effet, l’État ne saurait contrôler les croyances, il n’est aucunement théologien et se doit à une stricte neutralité vis-à-vis des croyances en vertu du principe de laïcité.


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D’ailleurs, dans une société démocratique et pluraliste, il n’existe pas, par principe, de délit d’opinion. La doctrine chrétienne ne peut donc pas souffrir d’interdiction sur ses thèses et idées en elles-mêmes. Le texte biblique, dans son intégralité, ne pourrait également subir une censure ou interdiction d’édition ou de diffusion, sur certains passages, même si ceux-ci peuvent choquer, inquiéter ou offenser certains individus ou groupes d’individus. Comme le rappelle la Cour européenne des droits de l’homme, le droit à la libre expression « vaut non seulement pour les informations ou idées accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l’État ou une fraction quelconque de la population. Ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture sans lesquels il n’est pas de société démocratique3 ». En effet, le délit d’opinion serait incompatible avec les valeurs de la société démocratique dans laquelle, par définition, coexistent de multiples conceptions du Bien. Comme le disait Voltaire, « le droit de parler l’emporte sur le contenu des opinions exprimées ».

CEDH, 7 décembre 1976, Handyside c. Royaume-Uni, § 49.

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Convention européenne des droits de l’homme (Conseil de l’Europe, 4 novembre 1950) Article 10 : Liberté d’expression Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les États de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d’autorisations. L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire.


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Quelles sont les limites légales à la liberté de prêcher ? S’il existe bien des limites à la « liberté de prêcher », celles-ci sont de l’ordre de l’exception, la liberté demeurant le principe. On distingue d’une part, les limites générales qui s’appliquent à toute communication et d’autre part, celles qui s’appliquent spécifiquement aux lieux de culte et aux ministres du culte en application de la loi de 1905. 1. D’une part, la prédication est soumise à la loi générale qui établit les cas dans lesquels la liberté d’expression peut être limitée et sanctionnée. – La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse prévoit plusieurs infractions qui ne concernent pas uniquement les organes de presse et leurs agents, mais toute personne qui s’exprime publiquement4, de façon orale ou par écrit. Il s’agit notamment des délits5 de :

Dans un cercle plus restreint que l’Église, dans le cadre privé (par exemple, des groupes de maison), il est possible que trouvent à s’appliquer les articles R.624-3, R.624-5 et R.625-7 du Code pénal, sur l’injure et la diffamation non publiques et sur la provocation non publique à la discrimination, qui prévoient des peines contraventionnelles seulement. 5 Plusieurs articles traitent de cas divers : respect de la présomption d’innocence (art. 35 ter et quarter), du secret de l’instruction (art. 38), du secret de la filiation des personnes adoptées (art. 39 quarter), du secret de l’identité des personnes victimes d’agressions sexuelles (art. 39 quinquies), ou des agents travaillant dans certains services de sécurité de l’État (art. 39 sexies). L’article 41 prévoit en outre une immunité qui couvre les débats parlementaires et leurs retranscriptions, ainsi que les débats judiciaires s’agissant de l’outrage, l’injure et la diffamation dans certaines circonstances. 4


18 / • Provocation aux crimes et délits, notamment à la haine ou à la violence ou à la discrimination à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison de leur sexe, de leur orientation ou identité sexuelle ou de leur handicap, en raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (art. 24). • Contestation de l’existence d’un crime contre l’humanité (art. 24 bis). • Diffamation : toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé (art. 32). • Injure publique (art. 33). – Le respect de la vie privée6 des personnes interdit la communication d’images ou d’informations privées sans l’accord des personnes. – Le droit d’auteur7 interdit la reproduction d’œuvres de l’esprit sans l’accord de leur auteur, sauf exception (citation, parodie, etc.).

Art. 9 du Code civil. Code de la propriété intellectuelle, art. L.122-1 et suivants.

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Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse Article 23 : Provocation aux crimes et délits Seront punis comme complices d’une action qualifiée crime ou délit ceux qui, soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l’écrit, de la parole ou de l’image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au regard du public, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique, auront directement provoqué l’auteur ou les auteurs à commettre ladite action, si la provocation a été suivie d’effet. Cette disposition sera également applicable lorsque la provocation n’aura été suivie que d’une tentative de crime prévue par l’article 2 du code pénal.


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Article 24 : Provocation aux crimes et délits Seront punis de cinq ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ceux qui, par l’un des moyens énoncés à l’article précédent, auront directement provoqué, dans le cas où cette provocation n’aurait pas été suivie d’effet, à commettre l’une des infractions suivantes : 1° Les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l’intégrité de la personne et les agressions sexuelles, définies par le livre II du code pénal ; 2° Les vols, les extorsions et les destructions, dégradations et détériorations volontaires dangereuses pour les personnes, définis par le livre III du code pénal. Ceux qui, par les mêmes moyens, auront directement provoqué à l’un des crimes et délits portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation prévus par le titre Ier du livre IV du code pénal, seront punis des mêmes peines. Seront punis de la même peine ceux qui, par l’un des moyens énoncés en l’article 23, auront fait l’apologie des crimes visés au premier alinéa, des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes et délits de collaboration avec l’ennemi. Tous cris ou chants séditieux proférés dans les lieux ou réunions publics seront punis de l’amende prévue pour les contraventions de la 5° classe. Ceux qui, par l’un des moyens énoncés à l’article 23, auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne


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ou d’un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, seront punis d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ou de l’une de ces deux peines seulement. Seront punis des peines prévues à l’alinéa précédent ceux qui, par ces mêmes moyens, auront provoqué à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison de leur sexe, de leur orientation ou identité sexuelle ou de leur handicap ou auront provoqué, à l’égard des mêmes personnes, aux discriminations prévues par les articles 225-2 et 432-7 du code pénal. En cas de condamnation pour l’un des faits prévus par les deux alinéas précédents, le tribunal pourra en outre ordonner : 1° Sauf lorsque la responsabilité de l’auteur de l’infraction est retenue sur le fondement de l’article 42 et du premier alinéa de l’article 43 de la présente loi ou des trois premiers alinéas de l’article 93-3 de la loi n° 82652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, la privation des droits énumérés aux 2° et 3° de l’article 131-26 du code pénal pour une durée de cinq ans au plus. 2° L’affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l’article 131-35 du code pénal.


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Article 29 : Définition de la diffamation et de l’injure Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés. Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est une injure.

2. D’autre part, une série de dispositions s’applique spécifiquement dans le cadre des lieux de culte ou du ministère cultuel. – La loi du 9 décembre 1905 prévoit l’interdiction des réunions politiques dans les lieux de culte. Les lieux de culte sont en effet exclusivement affectés au culte et servent « l’autorité spirituelle ». Ils ne peuvent devenir des lieux « d’autorité temporelle » ou politique. Cette interdiction n’empêche pas l’Église d’évoquer des situations politiques, d’intercéder pour les autorités, en faveur de la paix civile ou d’accueillir des représentants de l’État ou des hommes politiques en son sein. Cette interdiction rappelle cependant la nécessaire réserve que l’Église doit entretenir avec le pouvoir politique : elle ne peut pas s’identifier à un parti politique ou organiser des réunions politiques. Ce n’est pas son objet dans le cadre d’une association cultuelle.


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– La loi de 1905 établit les délits d’outrage ou de diffamation d’un citoyen chargé d’un service public ou de sédition (appel à l’inexécution des lois ou à lever une armée) à l’encontre des ministres du culte. À l’époque, il s’agissait de réduire tout risque de rébellion contre la loi de séparation et sa mise en œuvre. Aujourd’hui, ces articles, toujours en vigueur, indiquent que le ministre du culte se doit de favoriser l’ordre public et encourt un risque s’il invite l’Église à la désobéissance civile. – En outre, le ministre du culte est soumis au secret professionnel par les articles 226-13 et 226-14 du Code pénal. Il ne saurait dévoiler une information qui lui a été confiée du fait de sa qualité de ministre du culte, sauf les cas où la loi autorise ou impose la révélation du secret8. La prédication doit ainsi respecter un cadre légal, qui vise à empêcher la violation des droits d’autrui ou de l’ordre public.

Sur le secret professionnel des ministres du culte, cf. Circulaire Crim 2001-10 du 11 août 2004 de la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la justice relative au secret professionnel des ministres du culte et aux perquisitions et saisies dans les lieux de culte. Cf. plus loin : Église et protection des mineurs, p. 68.

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Loi du 9 décembre 1905 Article 26 Il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l’exercice d’un culte.

Article 34 Tout ministre d’un culte qui, dans les lieux où s’exerce ce culte, aura publiquement par des discours prononcés, des lectures faites, des écrits distribués ou des affiches apposées, outragé ou diffamé un citoyen chargé d’un service public, sera puni d’une amende de 3 750 euros et d’un emprisonnement d’un an, ou de l’une de ces deux peines seulement. La vérité du fait diffamatoire, mais seulement s’il est relatif aux fonctions, pourra être établie devant le tribunal correctionnel dans les formes prévues par l’article 52 de la loi du 29 juillet 1881. Les prescriptions édictées par l’article 65 de la même loi s’appliquent aux délits du présent article et de l’article qui suit.


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Article 35 Si un discours prononcé ou un écrit affiché ou distribué publiquement dans les lieux où s’exerce le culte, contient une provocation directe à résister à l’exécution des lois ou aux actes légaux de l’autorité publique, ou s’il tend à soulever ou à armer une partie des citoyens contre les autres, le ministre du culte qui s’en sera rendu coupable sera puni d’un emprisonnement de trois mois à deux ans, sans préjudice des peines de la complicité, dans le cas où la provocation aurait été suivie d’une sédition, révolte ou guerre civile.

Article 36 Dans le cas de condamnation par les tribunaux de police ou de police correctionnelle en application des articles 25 et 26, 34 et 35, l’association constituée pour l’exercice du culte dans l’immeuble où l’infraction a été commise sera civilement responsable.


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Quels risques court-on à prêcher aujourd’hui sur un sujet sensible ? Un sujet sensible est un sujet sur lequel on présentera une « vérité qui dérange », un jugement moral ou une conception théologique à contre-courant de l’opinion publique majoritaire. À l’heure actuelle, la réputation est facilement entachée par le moyen des médias et des réseaux sociaux, souvent hors de contrôle et friands des polémiques. Pour le prédicateur, le premier risque sera médiatique, c’est-à-dire celui de la stigmatisation ou de la mise à l’écart par l’opinion publique du fait d’une médiatisation, souvent déformée et instrumentalisée, de ses propos sortis de leur contexte. L’atteinte à la réputation peut alors s’avérer véritablement néfaste. Plus gravement, le risque juridique peut exister si certaines personnes s’estiment lésées par les propos tenus ou que ces derniers dépassent les normes de l’ordre public. Une plainte peut alors être déposée, et suivant le cas, une enquête de police ouverte. Le cas échéant, une mise en examen et un procès suivront. Néanmoins, pour qu’une condamnation soit prononcée, il faut des faits bien établis et une qualification juridique certaine. S’agissant de liberté d’expression, une grande partie de l’appréciation faite par les juges résidera dans les éléments matériels et intentionnels au moment des faits. Il est donc difficile d’établir des généralités en l’état de la jurisprudence rare sur ce sujet précis. Il convient cependant de rappeler l’étendue de la protection de la liberté d’expression.


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Quelques principes directeurs pour cerner les risques juridiques 1. Exprimer une opinion qui dérange n’a rien de légalement répréhensible en soi puisque la liberté d’expression comprend le droit de choquer, de déranger et d’inquiéter autrui. La Cour européenne des droits de l’homme dans sa jurisprudence sur la liberté d’expression, inclut la protection des propos impopulaires, impolis, irrespectueux voire idiots, etc., et même un « droit de choquer9 », dans la mesure où il n’y a pas de danger avéré et imminent d’incitation à la violence. Il y a donc espace pour le débat, la contradiction et l’expression de positions divergentes. Dans ce cadre, tous, y compris les chrétiens, doivent accepter la critique, pour permettre un vrai pluralisme des idées. La liberté d’expression ne se réduit pas à la protection d’une expression de complaisance mais elle garantit le droit à exprimer des opinions, des convictions et des idées plurielles. La liberté d’expression permet même de heurter la sensibilité de certaines personnes. À l’inverse, les croyants sont d’ailleurs régulièrement heurtés dans leur sensibilité par certains propos ou critiques qui visent leurs convictions ou l’Église à laquelle ils appartiennent et qui sont néanmoins couverts par la liberté d’expression.

Cf. note 3 p. 15.

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28 / 2. Par ailleurs la liberté de conscience, de pensée et de religion garantit la possibilité d’enseigner la doctrine religieuse, sans pouvoir être inquiété quant au contenu de sa croyance. Si la forme de la prédication (les mots utilisés, les images, les appels à l’action, etc.) a évité toute injure, toute diffamation et toute incitation à la violence, à la haine et à la discrimination envers un individu ou un groupe d’individus, il ne devrait pas y avoir de risques juridiques particuliers. La distinction peut ainsi être clairement marquée entre l’exposition d’une théologie, d’une application biblique ou d’une exhortation circonstanciée fondée sur les convictions religieuses, et le fait de viser un individu ou un groupe d’individus, par l’injure, la diffamation et la provocation à la haine ou à tout autre délit. Si l’expression est exempte de toute volonté de blesser, de toute invective, si elle n’incite pas à des comportements délictueux, si elle sert par ailleurs le débat de pensée, le débat théologique en particulier dans l’Église, elle ne devrait pas dépasser les limites admissibles de la liberté d’expression. 3. Il faut néanmoins admettre qu’il existe actuellement une zone d’insécurité juridique autour des infractions précitées (injure, diffamation, provocation, etc.). Cette incertitude juridique résulte, d’une part, de l’appréciation des faits au cas par cas par les juges du fond (chaque situation étant très spécifique) et, d’autre part, d’une approche de plus en plus « subjective » des délits d’expression. En effet, pour caractériser l’infraction, la prise en compte du ressenti de la personne (la personne s’est sentie offensée, blessée ou attaquée) tend à remplacer une


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analyse objective des termes utilisés dans leur contexte (l’expression employée atteint les droits de la personne). Comme la question se déplace de l’objectif (ce qui est exprimé) au subjectif (ce qui est perçu), une place croissante est donnée à l’arbitraire, en fonction des sentiments de la « victime ». Cette dérive pourrait restreindre sérieusement le périmètre de la liberté d’expression en interdisant de simples expressions d’opinions négatives à l’encontre de certaines personnes ou comportements. Ce phénomène est également amplifié par la possibilité d’instrumentalisation des procès par des groupes ou des individus qui porteraient plainte pour des propos déplaisants à leur égard et éventuellement sortis de leur contexte, sans que ces propos portent atteinte directement ou nommément à la dignité des personnes ou soient porteurs en soi de violences. Cette insécurité juridique se constate à travers l’Europe et est un sujet de préoccupation. Les défenseurs de la liberté d’expression et de religion dénoncent en effet les dangers des lois dites de « discours de haine » en raison des difficultés d’interprétation des infractions qu’elles ont créées. Ils constatent l’effet d’autocensure que ces lois produisent mécaniquement en raison de cette insécurité juridique latente, au détriment du déploiement maximal de la liberté d’expression. Cette préoccupation porte essentiellement sur l’expression des positions éthiques chrétiennes, notamment concernant la famille, l’orientation sexuelle, la vie.


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En 2012, l’Observatoire sur l’intolérance et la discrimination contre les chrétiens en Europe indique : « Des chrétiens ont été accusés devant les tribunaux pour avoir cité la Bible ou pour avoir défendu, par leurs propos, des positions chrétiennes, alors qu’il n’y avait en aucun cas incitation à la violence, dans leurs intentions ou l’effet de leurs propos10 » (trad. libre). Le cas le plus emblématique en Europe est celui du pasteur Ake Green11. Il fut condamné en 2004 en Suède à un mois de prison pour avoir prêché dans sa paroisse un sermon dans lequel l’homosexualité était critiquée, au même titre que d’autres comportements, sur le fondement d’enseignements bibliques. Le Observatoire de l’intolérance et des discriminations contre les chrétiens en Europe, Rapport 2012 : Europe : restrictions légales affectant les chrétiens ; 2012 : Cas d’intolérance ou de discrimination contre les chrétiens, Vienne : Kairos publications, 2013. URL : <http://www.intoleranceagainstchristians.eu> (consulté le 5/11/2015). 11 Cf. Paul Coleman, Censored : How European « hate speech » laws are threatening freedom of speech, Vienne (Autriche) : Kairos, 2012, p. 49. L’auteur évoque des cas de sanctions civiles, d’enquêtes ou d’arrestations policières, d’accusation et de procès contre des personnes ayant exprimé des opinions impopulaires, au nom de leurs convictions religieuses au travers de l’Europe. Paul Coleman déplore l’existence des lois dites de lutte contre le discours de haine qui peuvent être utilisées d’une manière subjective et restrictive de la liberté d’expression et de religion dans une société pluraliste. Il en critique notamment la rédaction qui laisse place à une marge d’interprétation trop large par les tribunaux et procure ainsi peu de sécurité juridique. 10


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délit d’injure ou de mépris envers un groupe de personnes lui était imputé. Le pasteur fut condamné en première instance, puis acquitté en appel. Un pourvoi en cassation fut formé. Le 9 novembre 2005, la Cour suprême de Suède l’acquitta. Cette position a été expliquée par le sentiment qu’une condamnation en la matière ne satisferait pas aux exigences de la Convention européenne des droits de l’homme et que les juridictions suédoises risquaient d’être contredites si l’affaire était portée devant la Cour européenne des droits de l’homme. La liberté de religion et d’expression protégeait bien la liberté de prêcher du pasteur Ake Green, dont les propos n’avaient été ni injurieux ni méprisants. En France, fort heureusement, aucun cas similaire n’a été recensé à ce jour. L’attachement à la liberté d’expression12 et la culture française peu procédurière l’expliquent en partie. De manière générale, le droit français et la jurisprudence privilégient une conception libérale des droits et tiennent compte de la jurispru-

Dans le domaine politique, on citera l’affaire du député Vanneste. Affaire Vanneste, Cour de cassation, Crim., 12 novembre 2008, pourvoi n° 07-83398. En janvier 2006, le politicien Christian Vanneste avait été condamné à 12 000 euros d’amende pour avoir critiqué le comportement homosexuel. À l’Assemblée nationale puis dans les médias, Christian Vanneste avait émis des commentaires selon lesquels l’hétérosexualité était moralement supérieure à l’homosexualité. Trois associations de défense des droits des personnes homosexuelles l’avaient mené en justice. Le député Vanneste avait alors été condamné en première instance et en appel pour violation de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la Presse. En novembre 2008, après près de quatre ans de procédure, la Cour de cassation cassa l’arrêt d’appel estimant que la liberté d’expression et la loi sur la liberté de la Presse n’avaient pas été justement appliquées. La Cour précisa que « si les propos litigieux, qui avaient été tenus dans la suite des débats et du vote de la loi du 30 décembre 2004, ont pu heurter la sensibilité de certaines personnes homosexuelles, leur contenu ne dépasse pas les limites de la liberté d’expression ».

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32 / dence de la CEDH. La jurisprudence, restée rare en la matière pour l’instant, est en développement13. Il conviendra d’en suivre les évolutions avec attention. 4. Il est généralement admis une plus grande liberté d’expression14 dans le lieu de culte en raison d’une communauté de valeurs et de culture parmi les croyants. Le risque juridique s’accroît ainsi lorsque la diffusion de la prédication est extérieure à l’Église (dans un espace public, sur Internet, célébrations diffusées en direct sur le web, par des tracts, etc.). Néanmoins, à l’heure de la médiatisation instantanée et facilitée de tout propos, la protection du lieu de culte semble devoir être tempérée. D’une part, le lieu de culte n’est en effet pas un lieu qui échappe à l’emprise de la loi et les règles générales s’y appliquent. D’autre part, si la prédication est diffusée à l’extérieur, il convient d’assumer le risque que les propos soient considérés comme des propos prononcés sur la place publique, envers tout public et pas seulement pour le cercle des croyants. Quelques précautions s’imposent donc avant toute

Sur la liberté de distribuer un tract intitulé « Délivré de l’homosexualité » et relatant le témoignage de conversion d’un jeune homme, cf. Tribunal correctionnel d’Angoulême, 2 novembre 2015, procédure en appel en cours auprès de la cour d’appel de Bordeaux. Dans le domaine politique, sur la liberté d’exprimer une opinion négative sur l’homosexualité par une personnalité politique, cf. Tribunal correctionnel de Paris, 17 décembre 2015. Procédure d’appel en cours auprès de la cour d’appel de Paris. 14 Par exemple, le voile intégral est naturellement admis dans les lieux de culte musulman alors qu’il ne l’est pas dans l’espace public pour des raisons de protection de l’ordre public. Le lieu de culte est ainsi un espace où la liberté d’expression religieuse est supérieure car elle s’exerce au sein d’une communauté qui en comprend le sens et les codes. Il en est de même pour la liberté d’expression par la parole. 13


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diffusion publique (comme pour les prédications mises en ligne sur les sites web des Églises15). 5. Pour porter plainte et obtenir une condamnation, il faut que les délits reprochés soient bel et bien constitués. Des poursuites peuvent être engagées, mais si les éléments constitutifs du délit ne sont pas réunis, il ne peut y avoir de condamnation. Si l’on ne peut écarter l’éventualité d’affaires montées de toutes pièces ou instrumentalisées, il est nécessaire de revenir à la réalité des agissements et des intentions au moment des faits. Enfin, si accusation il y avait, la présomption d’innocence persiste tant que le juge n’a pas rendu son verdict et que les voies de recours ne sont pas épuisées. Comme cela a été le cas pour le pasteur Ake Green, même après quelques années de procédure, l’acquittement a été prononcé et la liberté de la prédication clairement affirmée au plus haut niveau de juridiction nationale. 6. Afin d’accorder une place maximale à la liberté d’expression, le Code pénal (art. 431-1) prévoit un délit d’entrave à la liberté d’expression. Cette infraction sanctionne le fait d’entraver l’exercice de la liberté, de manière concertée et par des menaces ou des actes de violences. L’intimidation en matière de liberté d’expression est un acte grave et pénalement sanctionné. Les personnes qui useraient de menaces, d’intimidations, d’accusations sans fon-

Cf. p. 36.

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34 / dement pour dissuader les prédicateurs de s’exprimer sur des sujets sensibles risquent également d’être poursuivis pour entrave à la liberté d’expression. La loi atteint donc un certain équilibre pour permettre à la liberté d’expression d’être exercée pleinement. Ainsi, le prédicateur qui exprime une opinion (voire un jugement moral) fondée sur une croyance religieuse et respectueuse des individus, est protégé par la liberté d’expression et la liberté de conscience selon les articles 9 et 10 de la CESDH et la loi française.



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