LA SAVANE BOTSWANAISE Par Kathia Bernier
La chaleur accablante réchauffait la peau de Paul et le faible vent faisait danser ses cheveux. Ses yeux fixaient les acacias et les arbustes de la savane. Il était pensif. Les dernières semaines défilaient dans son esprit paisible. Au départ, l'incident l'avait laissé plutôt troublé, évidemment, et pendant quelques temps, il eut peur d’être démoli à jamais, mais il avait finalement réussi à surmonter cette épreuve. Il avait eu une illumination. Il avait compris que sa vie pouvait se terminer à n'importe quel instant, sans aucun avertissement, et qu'il fallait qu'il la vive au maximum. Après s’être remis sur pied, il s’était trouvé stupide de ne pas avoir pensé à la phrase que John F. Kennedy, son idole adoré depuis toujours, avait prononcée : «Il ne faut pas chercher à rajouter des années à sa vie, mais plutôt essayer de rajouter de la vie à ses années». C’est en suivant ce chemin de pensée qu'il avait pris la décision de partir au Botswana, petit pays au sud de l'Afrique, un endroit où il avait toujours rêvé de se rendre pour admirer la savane, les divers animaux qui s'y trouvent et pour profiter de la chaleur étouffante que Paul avait toujours curieusement appréciée. Son entourage le croyait devenu fou, car selon eux, après avoir vécu des événements si éprouvants, il fallait se reposer mentalement et ne pas se laisser aller. Ils ne comprenaient pas que Paul se sentait tout à fait normal et que sa vie le comblait. Ses parents étaient particulièrement réticents à l’idée de sa grande aventure en Afrique, car croyant bien connaître leur fils, ils s’imaginaient que Paul fuyait son passé. Mais leur opinion importait bien peu à ses yeux. Toute sa vie, des gens l’avaient empêché de réaliser de grandes choses, et maintenant, il n’allait pas se laisser décourager. Les rêveries de Paul furent interrompues par le conducteur de la Jeep, le guide, qui communiqua aux quelques touristes présents dans le véhicule qu'ils seraient près d'une petite famille de guépards dans quelques minutes. Paul voyait déjà des silhouettes floues au loin. C'est avec un sourire au visage et l’esprit encore plus calme qu’à l’habitude depuis son illumination à propos de la vie qu'il se laissa emmener aux animaux. Tout était comme il l'avait toujours imaginé, toujours souhaité. La savane était hallucinante. Son rêve devenant réalité le comblait.
Enfin, ils arrivèrent à proximité des guépards. À environ une vingtaine de mètres de là, deux petits bébés guépards se chamaillaient amicalement aux côtés de leur mère qui roupillait sans souci. Les petits aux grands yeux gris et avec un pelage roux tacheté de noir se mordillaient les oreilles pour jouer. Le guide expliqua que ces jeunes bambins étaient nés il y avait quelques mois de cela et que leur mère se reposait après avoir chassé lfeur repas. Soudain, alors qu'il contait des anecdotes par rapport aux animaux, il s'écria : «Mais que faites-vous ?! Vous ne pouvez pas...», comme si quelqu'un agissait d'une manière insolite. Et c'était le cas. Paul était sorti hors du véhicule et s'avançait rapidement, et dangereusement, vers les guépards. La femelle guépard commençait à s’agiter, le bourdonnement de la Jeep dérangeant son sommeil. Dans la main droite de Paul se trouvait un pistolet, celui qu’il conservait en permanence sur lui depuis la fois où son propre frère, son aîné, avait tenté de l’assassiner violemment à l’aide d’un poignard. Depuis cet épisode, quelque chose d’aussi banal que de croiser le regard d’une personne inconnue dans l’autobus l’inquiétait, il ne faisait plus confiance à personne. N’importe qui pouvait l’attaquer à n’importe quel moment et il fallait absolument qu’il puisse se défendre, car son destin ne lui accorderait sûrement pas une seconde chance de survivre. En apercevant ces deux guépards, deux frères, Paul perdit la raison. Et sans raison, il ne pouvait comprendre que se batailler n’était qu’un jeu pour les deux bébés. Donc, sans comprendre que cela n’arriverait pas, il ressentit le besoin d’empêcher qu’un des guépards tue l’autre, ce qui serait un véritable désastre. Paul ne voulait pas que l’une des bêtes ait le dessus sur l’autre, comme son frère l’avait toujours eu sur lui depuis leur jeune temps. Il souhaitait laisser une chance au plus petit guépard. Après avoir couru pendant quelques secondes, sous le regard inquiet du guide et des touristes choqués qui lui aboyaient de revenir à la Jeep pour une question de sécurité, Paul arriva tout près des animaux. Il tira. Il sourit. Il était sous l’impression d’avoir fait justice.
LA LIMONADE Par Camille Villeneuve
Assise dans mon salon, je l’attendais. J’attendais ce coup de téléphone qui me libérerait. Qui me libérerait de ce goût de vengeance qui m’envahissait depuis déjà longtemps. Je n’arrivais juste pas à faire mon deuil. Depuis la mort de mon fils, je me sentais seule dans cette grande maison. Cette maison avait auparavant été joyeuse et belle, mais désormais, elle était vieille, triste et sale. On aurait dit, vu de l’extérieur, une maison abandonnée. De l’intérieur, ce n’était pas mieux. C’était le désordre total, et j’en avais assez. Ces longues heures d’attente et de solitude étaient maintenant insupportables. Tout ce qu’il me restait à faire, c’était admirer ce cadre. Il représentait un de mes plus beaux souvenir avec mon fils. C’était une journée pluvieuse et sombre, et nous étions en voyage à Paris. Malgré le mauvais temps, nous avions beaucoup de plaisir. Mon fils se tenait devant la tour Eiffel. Il faisait presque complètement noir, mais il tenait quand même à prendre une photo. Je voulus lui dire que nous ne voyions même pas son magnifique sourire, mais il était tellement fier de poser devant cette tour que je ne dis rien pour ne pas gâcher ce moment. Alors, les seules choses que nous pouvions distinguer sur cette photo étaient la tour Eiffel, la silhouette de mon fils ainsi que les branches sans feuilles de l’arbre qui se tenait à ses côtés.
Mon fils me manquait terriblement. Il n’y avait pas une minute où je ne pensais pas à lui. Sa mort avait fait tout une histoire. En fait, il avait été victime d’un meurtre. Il y a plusieurs mois, mon fils est rentré en pleurant. Il était dans un état de panique très inquiétant. Il ne voulait pas me parler. Il disait que s’il en parlait, il risquait d’avoir de gros ennuis. Il risquait même de mourir. Je lui dit qu’il exagérait et qu’il devait me dire ce qui se passait pour que je puisses l’aider. Il finit par tout me raconter. Jamais je n’aurais imaginé que mon fils se retrouverait dans une telle situation.
Il était parti chercher du lait au dépanneur du coin. Il était juste au mauvais endroit, au mauvais moment. Une fois dans le dépanneur, il voulut immédiatement en ressortir, mais il était trop tard.
Un homme tenait le caissier en otage. Il força mon fils à voler l’argent qui se trouvait dans la caisse. L’homme était armé, donc mon fils obéit. Le cambrioleur portait une cagoule, alors mon fils ne pouvait pas voir qui c’était. Il avait eu l’ordre d’aller cacher le sac d’argent dans notre jardin, très très creux, et de ne jamais rien dire à personne. Mais, mon fils avait fini par m’expliquer la situation. Par je ne sais quel moyen, le cambrioleur a su que j’étais au courant. Malheureusement, c’est mon fils qui a subi les conséquences de sa colère. Lorsqu’il a été retrouvé mort, il n’y avait aucune trace du meurtrier. Malgré ses nombreuses recherches et enquêtes, la police n’a jamais réussi à le retrouver.
Pendant que je regardais cette photo encore et encore, le moment que j’attendais arriva enfin. Le téléphone sonna. Je répondis: c’était mon agent immobilier. Cela ne faisait même pas une semaine que ma maison était à vendre, que j’avais déjà une offre d’achat. J’étais très contente. Mon agent immobilier me dit que l’acheteur voulait me rencontrer et visiter la maison. Nous fixâmes un rendez-vous pour le lendemain.
Le visiteur n’était pas très grand, mais assez musclé. Il n’avait presque pas de cheveux, et il avait une grande cicatrice qui partait du cou jusqu’à l’épaule. Nous fîmes le tour de la maison. Malgré l’état désastreux de ma maison, il semblait satisfait et prêt à l’acheter. Pendant que je lui préparais un petit verre de limonade, l’acheteur regardait par la fenêtre. Il scrutait mon terrain du regard. Ensuite, nous prîmes place à la table pour discuter. Après avoir vidé son verre d’un trait, l’homme me demanda pourquoi je vendais ma maison aussi chère. C’est à ce moment que je lui dis que j’étais certaine que seul celui qui avait tué mon fils aurait intérêt à acheter mon horrible maison à ce prix incroyable. Il leva les yeux vers moi. Trop tard, la limonade était bue. L’homme s’effondra sur le sol.
LE MONDE EST PETIT Par Charles Roberge
C’est en étant en retard au travail un lundi matin de février que j’ai échappé mon café un lait et deux sucres sur une femme dans la rue. Je venais tout juste de revenir d’un voyage humanitaire d’un mois en Afrique. Ce fut le plus beau jour de ma vie, un jour pluvieux où tout va de travers et on a envie que d’une chose, rester dans son lit. Elle fut le rayon de soleil de ma journée. Je me rappelle encore le premier regard que Maria m’a jeté. Un regard furieux auquel je n’ai pu résister. Pour me racheter, je l’ai invité prendre un café le lendemain à mon restaurent préféré. Nous avons discuté longtemps. J’étais perdu dans ses beaux yeux bleus. Au cours des jours, semaines et mois suivants, nous nous sommes fréquentés très souvent et nous sommes même devenus un couple.
Au cours des cinq années qui suivirent, Maria et moi avons beaucoup avancé. Ensemble, on s’est installé en banlieue de Montréal. C’est ainsi que je vis le plus grand bonheur. Quand deux personnes s’aiment beaucoup, ils savent qu’ils sont faits l’un pour l’autre. À ce moment, j’ai décidé de la demander en mariage et elle accepta aussitôt. Dans les mois qui suivirent, nous avons même décidé de faire un enfant. Nous avons tenté plusieurs fois sans arrêt, mais jamais le test de grossesse ne s’est montré positif. On ne savait plus quoi faire, alors on est allé consulter un médecin. Et me voilà aujourd’hui, dans le cabinet froid du médecin, je passe des tests pour savoir si je suis propice à donner la vie. Après les tests, le médecin m’affirma que tout est normal. Je suis maintenant soulagé, cependant, je pense à ma femme qui passe le même test. Une heure plus tard, je la retrouve qui pleure à l’entrée. Son test révèle qu’elle ne pourra jamais avoir un enfant. Deux jours plus tard, nous discutons des possibilités que nous avons, malheureusement la seule qui restait était d’adopter un enfant. Je suis plutôt d’accord, et elle partage le même avis que moi.
Maria et moi sommes à la recherche de l’enfant parfait. Après plusieurs jours de recherche intense, Maria me propose d’adopter un enfant en Afrique. Je suis très emballé à l’idée d’un enfant en
Afrique, car j’y suis allé il y a quelques années et ce fut le plus beau voyage de ma vie! Une semaine après, je suis en Afrique avec ma femme dans une orphelinat. Dans le fond de la pièce se trouvait un tout petit garçon bien calme, je fais signe à Maria de le regarder. Elle savait aussi bien que moi que ce petit garçon allait être notre garçon. Sur la route de l’aéroport, je vois au loin plusieurs femmes dans la décharge de Dandora. Mon attention s’est tout de suite porté sur elles. Elles sont environ une dizaine, toutes habillées de la même façon, des vêtements faits de draps de plusieurs couleurs, on voit bien qu’elles n’ont pas de quoi s’acheter des vêtements. Elles sont majoritairement vêtues de rouge, avec un bandeau sur la tête pour protéger du soleil. Ces femmes ont l’air exténuées. Elles sont toutes salies par la poussière et la boue. Elles ramassent tout ce qui est bon pour réutiliser. À la fin de la journée, elles peuvent aller fouiller dans cette décharge. Le portrait de la scène est très saisissant. Un ciel avec un soleil couchant, avec ces courageuses femmes au milieu de tous ces déchets.
De retour à la maison, c’est avec joie que moi et Maria avons accueilli le petit Basile dans notre demeure. Basile est un enfant très sage, nous l’adorons. Il grandit très vite, Maria et moi n’avons jamais été aussi heureux ensemble, nous avons maintenant notre propre famille. Pendant son enfance, il aimait beaucoup jouer aux voitures, à l’adolescence il était un merveilleux athlète de basketball. Puis un jour, pendant que je regardais la télé, Basile me dit qu’il désire aller au Kenya afin de retrouver ses vrais parents. Je suis resté la bouche ouverte en forme de «O» pendant ce qui me sembla une éternité sans savoir quoi répondre.
Basile est maintenant parti pour un mois au Kenya. Il a promi à Maria et moi de nous écrire chaque semaine. Après une semaine, sa lettre disait qu’il n’avait rien trouvé, mais qu’il allait bien et que le voyage était très enrichissant. La deuxième lettre, par contre, disait qu’il avait trouvé sa mère, leurs retrouvailles furent extrêmement bouleversantes selon Basile. Dans sa lettre, il expliquait que sa mère l’avait abandonné en raison de son manque d’argent, qu’elle était très pauvre et n’avait pas l’argent pour lui offrir ce dont il avait besoin. Cependant, j’attends toujours la troisième lettre. Maria
et moi commençons à craindre le pire.
Enfin, lors d’un après-midi bien calme, quelqu’un sonne à la porte. Intrigué en me demandant qui cela peut bien être à cette heure, j’ouvre la porte et voilà Basile droit devant moi qui me dit: «Papa? Tu es mon vrai père!» C’est alors que je viens de me rappeler mon aventure lors de mon premier voyage au Kenya.
LA CHAMBRE EN BLANC Par Samuel Vachon
Mercredi. Aujourd’hui nous sommes mercredi. Voilà la première pensée qui m’effleure l’esprit alors que je me réveille dans une pièce d’un blanc immaculé, une pièce qui inspire un sentiment de deuil. Une pièce qui, malgré mon absence totale de souvenirs à son sujet, me semble étrangement familière. Ce sentiment de déjà-vu est d’autant plus important lorsque je me rappelle ma première pensée : aujourd’hui, nous sommes mercredi. Pour une raison que j’ignore, cette situation m’est insupportable. Le fait d’être dans cette salle vide, parfaitement cubique, d’être aussi nu que le plus démuni des démunis et le fait que nous soyons mercredi, surtout le fait que nous soyons mercredi, tout cloche. Un son me sort de mes réflexions : un bruit de porte qui s’ouvre. Porte qui est par contre introuvable sur les murs. Ou plutôt qui « était » introuvable, car elle apparaît à ce moment devant moi. En sort un homme fait tout de blanc, comme la pièce et comme le peu de ce que je peux voir de l’extérieur. Il arbore une sorte de masque, à moins que... non c’est impossible. Cette absence de traits totale ne peut être son vrai visage! Ce doit être un masque, il est tout à fait illogique qu’aucun visage ne se trouve là où il devrait logiquement y en avoir un! Je constate aussi qu’il est lui aussi nu, mais qu’il ne possède aucun sexe. Seulement son corps, dans sa forme la plus élémentaire. Malgré son absence d’organe sexuel, je devine que ce doit être un homme par son imposante carrure. Je m’attends au pire : après tout, lorsque l’on se réveille dans une salle vide d’un blanc si pur qu’il donne des maux de tête à quiconque le regarde et qu’un homme de stature imposante se dresse devant nous, homme que l’on ne connaît pas, il est tout à fait normal de présumer le pire des scénarios. À ma grande surprise, rien ne se produit. Rien. Niet. Zéro. Nada. Il reste aussi immobile qu’une statue, chose ironique, car il possède la carrure d’une statue. Je décide alors de prendre un risque, chose surprenante puisque je ne suis pas quelqu’un d’aventurier. En fait, de mémoire je ne suis pas grand chose : mes souvenirs sont assez confus. Aucun souvenir de mon nom, de mon âge, de
mon apparence ou d’évènements récents. Je suis même surpris d’apprendre que je ne suis pas aventurier : il y a quelques secondes, c’était encore un mystère pour moi. Un autre mystère, peut-être plus important au moment présent, est l’identité de mon inquiétant visiteur. Je continue lentement mon avancée vers lui. Mes pas sont lourds, comme l’atmosphère qui plane présentement dans la pièce qui me retient comme prisonnier. Encore quelques mètres et je l’atteins. Je pousse ma chance à sa limite : je tente de le toucher avec ma main. Est-ce par simple curiosité enfantine que je tente ce geste irréfléchi? Je n’en ai aucune idée, mais ce que je sais c’est que je regrette immédiatement cette décision. C’est avec force que son bras agrippe le mien et qu’il tente de me traîner en dehors de la chambre blanche. J’ai beau résister, mais sa force corrèle avec son imposante stature. Il m’amène dans une sorte de corridor, très difficile à différencier de la chambre par leur étrange ressemblance. Nous marchons pendant ce qui semble une éternité, une éternité extrêmement répétitive, car après tout, il n’y a aucune porte ni plus d’un ton de couleur différent dans ce chemin rectangulaire. Si ce n’était de l’unique ouverture que j’aperçois au loin, je pourrais jurer que nous avons marché sur place tout ce temps. Rapidement, nous bifurquons vers la droite pour entrer dans une pièce identique à celle de mon réveil, à un détail près. Ce détail, c’est un imposant miroir qui trône en plein centre du mur central, où, pendant un très bref instant, je peux apercevoir mon reflet, qui jusqu’à maintenant était perdu quelque part dans les confins de ma mémoire : j’ai l’air vieux. Mes longs cheveux grisonnants qui tombent sur mes épaules me le font vite remarquer, tout comme mon regard vide, que la jeunesse a quitté à jamais. Mon aspect hagard y est aussi pour quelque chose, ainsi que ma posture qui évoque celle d’un homme qui en a vécu beaucoup. J’ai à peine le temps de redécouvrir ce physique dont j’avais effacé toute trace de mon esprit qu’il disparaît de l’immense glace pour laisser place à l’image d’un lit. Un lit avec un vieillard étendu de tout son long et branché dans une multitude d'appareils qui tous l’air d’une extrême importance pour son état de santé, qui m’a l’air ma foi précaire. Ses traits sont malheureusement impossibles à discerner. Des gens apparaissent alors près de lui. Des gens qui m’ont tous l’air mornes, des gens à
qui la vie a sûrement été très dure. Ils penchent tous vers lui, lui tiennent la main, même que certains pleurent. Ce doit être quelqu’un d’important pour qu’ils lui démontrent tant d’affection. À ce moment, un autre homme entre dans la pièce et va rejoindre les autres personnes bien installées autour du vieil homme. Lui aussi doit être important, car tous se retournent vers lui et ont l’air d’écouter attentivement ce qu’il dit. Malheureusement, tout ce qu’il dit m’est inaudible, couvert par les bruits des pleurs et des lamentations de toutes les personnes présentes. Sans plus attendre, je me retourne vers l’homme qui m’a mené ici, mais je me rends vite compte qu’il n’est plus là et que l’ouverture par laquelle nous sommes entrés a disparu. Comme je déduis que toute sortie est impossible, je me retourne vers le miroir et constate, à ma grande surprise, que tout l’attroupement qui s’était formé autour de l’homme présumé malade est disparu, et qu’il ne reste plus que le nouveau venu. Il s’approche du lit d’une façon calme, presque assurée, même déterminée. D’une lenteur extrême, il s'arc-boute pour saisir une sorte de long fil qui se rend jusqu’au mur. Sans hésiter, il tire dessus et l’arrache de son support mural. Un sentiment étrange s’empare alors de moi, comme si toute sensation quittait mon corps au même instant. Ce n’est ni agréable ni désagréable : si ce n’était du contact entre le sol et mes pieds que je sens lentement disparaître, je ne m’en rendrais même pas compte. Je continue de fixer le miroir, étant incapable de bouger un seul de mes membres, et je peux voir le docteur, c’est le mot qui surgit dans mon esprit à cet instant précis, écrire quelque chose sur un calepin, même que je réussis à voir le texte en question avant de tomber dans un abysse profond : «Date de décès, mercredi le 24 décembre 2008».
Mercredi. Aujourd’hui nous sommes mercredi. Voilà la première pensée qui m’effleure l’esprit alors que je me réveille dans une pièce d’un blanc immaculé, une pièce qui inspire un sentiment de deuil.
AFFRONTER SA RÉALITÉ Par Laurie Shink Je me trouvais dans ce long corridor blanc et froid. Les murs sont tous pareils, ils ne comportent aucune couleur. Dans ce corridor règne une ambiance sombre. Il y a plusieurs portes dans ce corridor, mais elles sont toutes fermées et barré à clé. Les gardes se promènent sans cesse pour vérifier que personne ne sort de ces portes. Le plancher est fait de tuile, la plupart d’entre elles sont brisées. La tuile est de couleur froide, souvent elle est sale, d’ailleurs ici tout est sale. Le gouvernement n’accorde pas beaucoup d’importance aux fous qui habitent cet endroit. D'ailleurs il n'y a pas beaucoup de personnes qui accordent de l'importance aux patients de la psychiatrie. Nous n’avons donc pas d’argent pour rénover les lieux. Cet endroit est tellement déprimant que même les personnes normales deviennent folles. À cause de tous les mythes, la société pense que les personnes qui restent à cet endroit sont fous et dangereux , mais ce n'est pas le cas. Il y a quelques patients dangereux, mais ils sont loin de représenter la majorité des patients de l'hôpital. Moi, tous les jours, je lutte pour ne pas devenir comme eux, je lutte pour ne pas perdre la raison. En fait je travail ici, vous avez raison de penser que je n'ai pas choisi le meilleur emploi, moi aussi je pense cela parfois, mais il n’y avait pas beaucoup de possibilités qui s’offraient à moi. J’aime m’occuper des patients et je me considère chanceux de pouvoir quitter cet endroit. Je n’imagine pas comment sont les nuits ici. Je suis content de ne pas faire les chiffres de nuit, car j’ai entendu dire par les médecins que les patients étaient plus agités et que c’était vraiment effrayant. Bref, je suis content d’avoir la vie que j’ai, car comme j’ai pu le réaliser à plusieurs reprises nous n’avons pas tous cette chance. J'avançai vers le bureau du médecin pour commencer mon quart de travail. Il était environ huit heure du matin, je commençai ma journée. Lorsque j'avançai, je vis un des patients qui était couché au sol. Son pied était attaché avec un chaîne de métal sur une colonne qui se trouvait dans le corridor. L’homme a du être incontrôlable, donc les médecins l’ont attaché. L’homme portait son pyjama d’été, le même que tous les autres patients. Il est composé d’un short à carreaux bleu marine et blanc et d’un chandail à manche courte blanc. L’homme qui était étendu par terre était de
race noir. Il cachait son visage dans ses bras, car il ne voulait pas que les autres patients le voient dans cet état, il ne voulait pas être reconnu. Je ne m’arrêtai pas pour l’aider, car si je le détachais, je me ferais chicaner par les médecins parce que je n’ai pas l’autorisation de faire cela. Moi je dois suivre les médecins. Lorsqu’ils ont fini leur tournée, moi je vais dans la chambre des patients et je parle avec eux pour m’assurer qu’ils n’ont rien oublié et que les patients n'auraient pas de question supplémentaire. Je suis comme un infirmier, sauf que moi je ne donne pas les médicaments aux patients ni les vaccins. Il était trois heure de l'après-midi. J'avais presque fini ma journée et je n'arrêtais pas de penser à mon lit qui m'attendait chez moi. Aujourd'hui avait été une journée comme les autres. J'étais allé voir plusieurs patients avec le docteur Tremblay. Dans tout l'hôpital, c'était lui mon préféré. C'était d'ailleurs le seul avec qui je travaillais. Il est très gentil et attentionné avec tous ses patients. Je me suis fait dire par une infirmière l'autre jour qu'il accordait même des permissions spéciales à ses patients lorsqu'ils ne faisaient pas de crise. Par exemple, il avait droit à une deuxième part de dessert ... Lorsque je regardai ma montre de nouveau il était quatre moins le quart, je décidai donc de me rendre à la salle des infirmiers pour me changer. Lorsque je pénétrai dans la salle, l'infirmière m'attendait. Elle avait plein de médicaments dans les mains. Elle s'adressa à moi et me dit : " Le docteur Tremblay m'a dit de vous donner vos médicaments de ce soir et il m'a également dit que si vous les preniez sans faire de crise vous auriez une deuxième part de dessert au souper de demain."
UN VOL ENSOMMEILLÉ Par Emilie Ruel-Côté L’avion laissait une traînée de poudre blanche dans un ciel d’un bleu azur. Une lumière douce et orangée filtrait à travers les hublots, annonçant la fin de la journée. Une mer de feuillus s’étendait sous l’appareil et s’animait sous les vents chauds de juillet. Le bourdonnement du moteur était le seul bruit audible dans la cabine, celui-ci couvrant le ronflement paisible d’Alexandre, le copilote. Les boutons du tableau de bord clignotaient de temps à autres, d’un rouge, d’un bleu, d’un orange et parfois d’un jaune. Les sièges étaient vides et les porte-bagages également. Aucune hôtesse de l’air n’avait pris ce vol. L’avion traversait le territoire canadien, ayant atterri à Toronto quelques heures auparavant, et se dirigeait vers l’aéroport de Montréal. Arthur fixait l’horizon de ses yeux noisette, ses mains agrippant fermement les commandes. Ses cheveux grisâtres étaient cachés sous une casquette à l’effigie de la compagnie aérienne qui l’engageait et il portait son uniforme bleu marine de pilote. Les conditions extérieures étant favorables, il avait retiré son microphone lui permettant de communiquer avec les contrôleurs. N’ayant pas dormi depuis 48 heures et n’ayant plus les mêmes capacités que lorsqu’il avait vingt ans, Arthur tentait de combattre le sommeil, ses paupières se faisant de plus en plus lourdes. Il enviait son collègue. Le visage jeune, sans aucune ride, les cheveux bruns en broussaille, son uniforme déboutonné, Alexandre dormait à ses côtés, une coulée de bave au coin de la bouche. Le pilote, un homme plutôt timide et réservé, n’osait pas réveiller son coéquipier afin que celui-ci l’assiste dans sa tâche. Il comptait donc les minutes qui les séparaient de l’aéroport Pierre-Elliott Trudeau. Heureusement, il n’en restait que quarante-trois. L’atmosphère paisible de la cabine se fit soudain de plus en plus pesante et l’esprit d’Arthur s’engourdit. Un rideau noir tomba sur les yeux du pilote. Arthur se réveilla. Il était couché sur un sol de terre noire, parsemé ça et là de mousse verte. Une gigantesque clairière s’étendait sous ses yeux. Les nombreux conifères s’agitaient sous une brise légère. La nuit commençait à prendre possession du ciel, celui-ci prenant différentes teintes de gris. L’atmosphère se refroidissait de minute en minute. Un gros ours brun était visible à la lisière de la forêt. Sa fourrure était tachée de terre et des feuilles recouvraient son dos. Ses longues griffes noires grattaient le sol et ses petits yeux sombres fixaient les arbres, à la recherche de quelque chose à se mettre sous la dent. Une odeur de bois humide, d’aiguilles de sapin et de fumée flottait dans l’air et un crépitement, semblable à celui d’un feu de camp, enterrait les gazouillements des oiseaux. L’homme tourna la tête pour regarder en arrière de lui et ce qu’il vit le pétrifia. L’avion s’était écrasé
à une cinquantaine de mètres de lui, n’étant plus qu’un amas de tôle blanche cabossée. Des morceaux de vitre et de métal étaient éparpillés un peu partout autour de la carcasse de l’appareil. Les dernières flammes d’un feu qui s’était allumé dans le moteur finissaient de s’éteindre et un nuage de fumée noire se désintégrait peu à peu dans l’atmosphère. Arthur s’affola, son pouls augmentant dangereusement. Il ferma les yeux quelques minutes, puis les ouvrit. Il était terrifié. Il s’était bel et bien endormi en pilotant et s’était écrasé au milieu de nulle part. Une vague d’angoisse le submergea. Comment allait-il se sortir de cette situation ? Allait-il mourir dans cette clairière ? Comment allait-il survivre, si personne ne venait à sa rescousse ? Reverrait-il sa femme ou ses enfants ? Il remarqua alors une forme humaine, couchée près d’un débris de métal, non loin de l’avion. Le coeur d’Arthur fit un bond dans sa poitrine. La distance qui le séparait d’Alexandre l’empêchait de savoir si son ami était encore vivant. Le pilote se leva. Il ressentit une douleur intense dans le bas de son dos, comme si une arme avait sectionné sa colonne vertébrale. Il tenta de marcher, mais sa jambe gauche le faisait souffrir terriblement. Guidé par l’inquiétude et l’adrénaline, il serra les dents, boita jusqu’au corps et se laissa tomber près de son ami, épuisé. Celui-ci le fixait de ses grands yeux noirs, le visage crispé. Sa poitrine se soulevait péniblement, un souffle faible s’échappant de sa bouche. Ses mains exerçaient une pression sur le côté gauche de sa poitrine, un cercle sombre marquant son uniforme. Un morceau de vitre pointu gisait près de lui, taché de rouge. Arthur se sentit défaillir. Il avait tué son coéquipier. Tout était de sa faute. Il ne voulait plus vivre. Il désirait mourir. Il sentit une main sur la sienne et regarda Alexandre. Ce dernier savait que le pilote ne pouvait rien faire pour le sauver. La trousse de secours avait sûrement pris feu et il n’y avait aucune ville, aucun hôpital et aucun médecin dans les parages. Le copilote était destiné à mourir. Arthur serra la main de son ami dans la sienne et le regarda tendrement. Les deux coéquipiers restèrent dans cette position pendant un bon moment. L’air se refroidissait, les papillons de nuit voletaient autour d’eux et les animaux nocturnes sortaient peu à peu de leur cachette. Lorsqu’Alexandre poussa son dernier souffle, la pénombre avait pris possession de la clairière. Arthur se leva péniblement, les larmes coulant sur ses joues, puis se mit à marcher sans but dans la forêt. Tous ses membres le faisaient souffrir, mais il restait indifférent à la douleur. Marcher l’aidait à penser. En effet, il planifiait. Fixant le sol brun de ses yeux injectés de sang, il évaluait les
différentes façons qui lui permettraient de mettre fin à ses jours et les classaient selon leur efficacité. Un bruit étrange et anormal lui fit relever la tête. Devant lui s’étendait les gratte-ciel d’une ville, bruyante et pleine de vie. Alexandre aurait pu être sauvé. Arthur plongea alors dans une déprime profonde.
LE JOLI PETIT CHAPERON ROUGE Par Alec Ross-Girard
Myrtille Galowski était une jeune fille de cinq ou six ans, l’image parfaite de la petite fille angélique selon les contes: elle avait les yeux bleus et de longs cheveux blonds bouclés qui lui descendaient en cascade dans le dos lorsqu’elle ne les attachait pas. Elle avait un sourire à faire fondre tous les coeurs, et tout le monde l’adorait, parfois certains croyaient même que les animaux trouvaient cette fillette trop mignonne et qu’ils l’adoraient eux aussi du premier coup d’oeil. À chaque fois qu’elle pleurait, tout le monde accourait afin de la consoler et de mettre fin à ses larmes qui gâchaient tellement cette magnifique petite fille. Les autres avaient aussi tendance à prendre le blâme pour ses fautes, ne désirant pas entacher l’image si angélique qu’elle donnait. Myrtille était d’une naïveté et d’une innocence d’enfant que l’on trouve très rarement sauf dans les contes de fées ou des les histoires supposément si parfaites. Elle adorait se promener dans les bois, et adorait plus que tout son petit chaperon rouge que son père lui avait donné lors de son quatrième anniversaire. Elle vivait dans une famille assez humble et qui ne désirait pas plus que ce qu’elle avait, et qui habitait dans une petite maison de bois rond au pied d’une montagne. C’était une montagne solitaire entourée de collines et de forêt verdoyantes composées de sapins et de diverses conifères. Ses flancs étaient ébréchés et déchiquetés, ils avaient la forme d’une énorme pointe de flèche enfoncée dans les cieux ,et dans les constellations le soir. Son sommet était constamment enneigé et des rafales de vents emmenaient quelque fois de la neige du sommet et créait un voile blanc qui enveloppait la montagne et lui conférait un aura de mystère. Son père était un bûcheron connu de toute sa communauté pour sa bravoure et sa bonté d’âme, tandis que sa mère, elle, était un fantôme pour les gens cette communauté: elle ne sortait que très rarement de sa petite cabane, et encore, elle ne restait que dans les environs de celle-ci.
C’était le début de l’automne, les vents et les pluies n’avaient pas encore pointé le bout de leur nez,
et le climat était encore très doux pour cette saison. C’était le matin, et Myrtille comme à son habitude, était dehors afin d’observer les oiseaux et de profiter de la merveilleuse température extérieure, quand son père cria son nom. Il lui demanda de s’habiller chaudement et de prendre le panier de nourriture et de médicaments que sa mère avait préparé pour sa grand-mère vivant dans les bois environnants. Il lui dit aussi que dans le panier il y avait un petit pic-nic au cas où elle aurait un petit creux en cours de chemin. Elle regarda à l’intérieur du panier par pure curiosité, et découvrit que son pic-nic était composé de quelques tranches de pain de ménage avec de la confiture aux fraises sauvages. Elle tâta le panier et vérifia qu’elle avait bel et bien un couteau pour tartiner ses tranches de pain. Myrtille enfila son chaperon, et pris le panier que son père lui tendait. Il lui rappela très clairement le chemin à suivre pour se rendre à la maison de sa grand-mère, mais elle n’écoutait que distraitement, car elle écoutait les oiseaux chanter à l’extérieur, et hochait de la tête sans prendre attention aux conseils avisés de son père. Ensuite, elle partit en gambadant et en chantonnant. Elle débordait de joie, et elle rencontra plusieurs connaissances sur la route qui lui sourirent et lui dirent bonjour. Elle leur répondit d’un aimable sourire. Le jour passait pendant que Myrtille gambadait et prenait son temps pour se rendre chez sa grand-mère, s’arrêtant pour cueillir une fleur qu’elle trouvait jolie, ou même pour tout simplement écouter le merveilleux chant des oiseaux. Au milieu du trajet, elle vit un magnifique papillon bleu, et elle se lança à sa poursuite. Ne prêtant guère attention à l’endroit où elle allait, elle pourchassa le pauvre petit papillon à travers la forêt pendant environ une dizaine de minutes, pour se rendre compte à la fin qu’elle était perdue et ne se rappelait pas par quel chemin elle était arrivée là. La nuit commençait à tomber, et Myrtille commençait de plus en plus à avoir peur. Elle continua d’avancer avec anxiété dans la direction qu’elle pensait être la bonne. Plus les couleurs de la forêt s’évanouissaient avec le soleil et laissait place aux teintes sombre de gris et de noir, plus elle croyait entendre des craquements s’éveiller au coeur des ténèbres. Puis soudainement, elle entendit un grognement derrière elle. Elle se retourna lentement, en tremblant de tous ses membres et en tentant tant bien que mal de se convaincre que ces bruits ne provenaient pas d’une créature comme dans les histoires effrayantes que son père lui racontait. Elle ne vit que deux crocs étincelantes et des yeux jaunes à vous faire évanouir de terreur.
Elle couru de toutes ses forces dans la direction opposée de ce monstre, tout en tentant de retenir ses larmes qui lui coulaient le long de ses joues et les hoquets qui lui empêchaient de respirer normalement. Elle trébucha sur une racine par inattention, et échappa son panier à ses côtés. Myrtille, terrorisée, se retourna sur le dos croyant ses dernières minutes à vivre enfin venues. Elle voulait savoir quelle créature allait l’emmener avec elle dans les ténèbres. Elle vit un énorme loup au pelage gris hirsute s’avancer vers elle. Elle ferma les yeux et pria pour que ça se passe rapidement et sans douleur. Alors qu’elle pouvait sentir l’haleine nauséabonde de la bête, elle réalisa que le loup avait le museau dans le panier et qu’il mangeait avidement les tranches de pains qui devait lui servir de pic-nic. Elle ria d’anxiété en même que d’un certain soulagement. Elle s’approcha doucement du loup, et lui toucha le coup. La bête ne réagit pas à ce contact, alors elle entreprit de caresser son pelage et de se coller contre lui afin de garder sa chaleur, car la température commençait à chuter dangeureusement. Le loup se fichant éperdument de ce contact, continua son festin inhabituel. Repu et épuisé, le loup s’allongea à l’exact même place où il était et s’endormit. La nuit passa tel un songe dont on ne se rappelle pas le déroulement, elle passa très rapidement aux yeux de Myrtille qui dormait à poings fermés. Le lendemain, elle se réveilla bien avant le loup, et en profita pour se dégourdir les muscles. Elle chercha ensuite dans son panier afin de trouver quelque chose qui pourrait lui remplir la panse et lui faire oublier la faim qui la tenaillait depuis la journée précédente. Elle ne remarqua ni la confiture ni les restants de la tarte aux pommes destinée à sa grand-mère, mais bel et bien le couteau enfoui sous les miettes de pain. Elle l’empoigna, et sentit le métal entre ses doigts, cette sensation de pouvoir qu’elle n’avait jamais senti auparavant. Soudain, il lui vint une idée. Elle enjamba le loup, et lui trancha le coup grâce au couteau tout en lui chuchotant à l’oreille: «Tu sais, j’adore vraiment la couleur rouge, pas toi ? » Alors que la bête affolée tentait de se débattre, se vidant de son sang et venant tout juste de se réveiller, Myrtille profitait du spectacle tout en souriant. Quand la bête ne bougea plus, elle enleva son joli petit chaperon et le trempa dans le liquide vital dont la couleur l’attrayait tellement. À ce même moment, son père qui l’avait cherché toute la nuit arriva et ...
La partie était finit et la soirée avait été longue. L’équipe avait gagné quatre à deux contre leurs rivales. Les coéquipiers étaient sur le point d’embarquer sur un vol qui les ramèneraient à leur ville natale seulement a 3h de vol au sud. Ce qu’ils ne savaient pas, c’est que cela allait être leur dernier vol à vie. Steve, le capitaine de l’équipe, avait embarqué dans l’avion en dernier et il avait remarqué un légère fissure sur le fuselage de l’avion, mais il ne porta pas attention et entra dans l’avion la tête vide.
Ce vol était un vol de routine pour les pilotes d’air Alaska. Bill et Tom étaient des partenaires de longue date parcourant le route entre Anchorage et Seattle, le domicile de l’équipe. Ils faisaient cette route plusieurs fois par semaine, donc pour eux, ils allaient revenir vite fait a la maison sans aucun tracas. Ils allaient sûrement soit dormir ou jouer avec sa nouvelle console portative a un jeu qu’il adorait, un jeu de survie en forêt très réaliste
Pendant la première moitié du vol, tout était sous contrôle. La température était calme et les joueurs dormaient confortablement sur les sièges, vu qu’ils était les seuls passagers a bord. Entrant dans la région de Vancouver, les pilotes sont surpris par une mauvaise tempête qui les font dévier de leur route vers le nord est, les ramenant vers le Yukon.
Plus rien, tout était noir. Il ne voyait plus rien et il n’avait aucune sensation plus bas que son dos. Tout ce qu’il pouvait percevoir était ses coéquipiers criant le martyr un peu partout autour de lui. Pourtant il y à 2 minutes, il était entrain de rêver confortablement dans son avion en route pour aller revoir sa famille. Tout à coup, il eut une révélation. Tout s’aligna dans sa tête. La craque au bas du fuselage, l’annonce de tempête, les cris, la douleur et le froid. Ils s’étaient écrasé où qu’ils supposaient être aux milieu de nulle part.
En regardant autour de lui, Steve prit en considération son environnement où il devra survivre avec ses coéquipiers jusqu'à l'arrivée des secours qu’il espérait allaient arrivées le plus vite possible. Tout autour de lui, tout ce qu’il voyait était une étendue de neige et de forêt avec juste en face de lui, un pic rocheux a la forme d’un nez crochu. Cella lui rappelait son voyage en Allemagne où il avait vu une montagne
similaire surnommée le Cervin. Il avait maintenant un but très clair en tête. Essayer de monter le plus haut possible pour être retrouvé plus facilement par les secouristes. Mais avant son périple d’escalade, il devait vérifier s’il allait avoir de l’aide de ses coéquipiers ou que le pire pourrait arriver: il serait tout seul.
Comme il avait prévu, il était le seul survivant de l’écrasement. Il allait devoir se débrouiller tout seul et essayer de ses rappeler du mieux qu’il pouvais, ses jeunes années passées chez les scouts. Tout d’abord, il devait établir un plan avec le but d’escalader la montagne. Il avait quelques rations trouvées parmi les ruines de l’avion. Avec ses rations, il avait un petit brûleur, un chaudron, une couverte de survie et cinq mètres de corde. Son séjour chez les scoutes lui avait permis de maîtriser quelques techniques plus tôt rudimentaires sur la survie en forêt, mais jamais il avait appris à les utiliser pour une question de vie ou de mort à des températures à vous glacer le sang.
Quelque jours passât et Steve trouvait le fait de survivre de plus en plus dur. Ses rations étaient sur le point d’être inexistantes. Il avait extrêmement froid et il n’avait même pas couvert le quart de la distance avant d'arriver à la montagne. De plus, il devait non seulement arriver à la montagne mais il devait aussi l’escalader.
Steve regrettai de plus en plus son idée d’escalader la montagne. Son ambition avait encore une fois pris le dessus. Ce qu’il pensait qui était un jeu d’enfant était difficile. Il aurait dû y penser et abaisser son niveau au commencement vu qu’il n’avait pas beaucoup d'expérience.
La nuit tombée, il décida de monter son campement au flanc de la montagne. Il avait bien été averti de faire attention aux ours polaires qui rodaient autour a ce temps de l’année. Il prépara son souper et alla se coucher. Au matin, il réalisa que son campement avait été envahit par des ours durant la nuit. En se retournant, il n'eût pas la temps de se défendre et se fit dévorer par un ours.
GAME OVER... Il savait qu’il aurait dû abaisser la difficulté depuis le début. Bon, un peu de sommeil
lui ferait du bien.
Marc-Antoine Dion
LA FEMME QUI EMMENA LA PLUIE Par Gabrielle Harvey
Une nouvelle loi venait d’être appliquée. C’était un pas de plus vers l’égalité des sexes, car les femmes auraient aussi le droit de venir chercher des objets dans la décharge de Dandora, une banlieue de Nairobi, au Kenya. Par contre, elles n’y auraient accès que le matin, à la levée du jour et lorsque les hommes commenceraient à arriver, elles devraient quitter les lieux. Une nouvelle année venait de commencer, il faisait des chaleurs insupportables, l’air n’était pas très humide, les sols étaient très secs. Un avantage d’avoir accès à la décharge uniquement en début de journée, les femmes n’auraient pas à endurer les durs rayons du soleil tout au long de leurs emplettes.
Il fallait fouiller avec acharnement pour risquer de trouver un objet réutilisable, qui n’avait pas été détruit avec le temps ou tout simplement parce que l’endroit était immonde et aucunement propre. Il fallait être rapide aussi, car les bijoux, les sacs, les vieux oreillers, ou tout objet ayant un minimum de valeur avaient très rapidement disparu. Malheur aux deux personnes qui trouvaient le même objet au même moment, car tous les coups étaient permis. Beaucoup d’hommes et de femmes se blessaient ou tombaient malades à la suite de leur visite à la décharge, les piètres conditions sanitaires et sécuritaires de l’endroit en étaient la cause.
Un matin, l’air était frais, il y avait même une petite brise. En sortant de leur maison, les femmes apprécièrent de se lever tôt pour profiter de la journée qui s’annonçait belle. Comme à l’habitude, elles commençaient leurs recherches, tout en contemplant le levé du soleil. Les couleurs étaient moins vives que la journée précédente, le rouge vif était remplacé par un rose pâle et le jaune éclatant par une couleur jaune qui se rapprochait plus du blanc. Au moment où le soleil allait enfin monter dans le ciel, les femmes virent une silhouette au loin qui marchait dans leur direction. Personne ne put spécifier de qui il s’agissait. Elle s’arrêta enfin de marcher, et elles purent toutes la
dévisager. C’était une grande femme noire aux cheveux noués en arrière de sa tête avec un bandeau vert olive, probablement usé avec les années passés. Elle était bien bâtie, ses vêtements semblaient bien ajustés. Son haut rouge rayé blanc était déchiré au niveau des bras, ce qui lui permettait de les y glisser. Son pantalon brun pâle était très sale. Elle fit un pas de plus, et son regard se fixa à l’horizon. Elle serra les lèvres et plissa les yeux, comme si elle se concentrait sur quelque chose. Aussitôt, le ciel commença à s’assombrir, et la pluie commença à tomber. Le ciel gronda quelques coups et un gros éclair déchira le ciel.
Toutes les femmes coururent se mettre à l’abri, à l’exception de l’étrangère. Comme si la pluie ne l’atteignait pas, elle commença à chercher des objets et à remplir le sac de paille qu’elle tenait dans sa main gauche. Le lendemain matin, le même scénario se produisit, et la semaine continua de cette façon. Un jour, la femme ne se présenta pas le matin. Il ne plut pas de la journée. Les habitants de la banlieue commencèrent à se poser des questions. La semaine suivante se déroula de la même manière, la femme emmena la pluie et le jour qu’elle ne se présenta pas, il ne plut pas. Un groupe se forma et ils discutèrent de la situation.
- Il faut faire quelque chose, cette femme nous porte malchance! - Je suis d’accord. C’est comme si elle voulait garder la décharge à elle seule. - Il faut lui dire de partir. La décision était prise, une femme nommée Aiydi irait parler à l’inconnue.
Le matin suivant la réunion fut le pire de tous. La pluie tombait avec force, les coups de tonnerre furent plus fort qu’à l’habitude et les éclairs perçaient le ciel sans arrêt. Les éléments étaient déchaînés, comme si la rage contrôlait la nature. Les habitants étaient terrifiés. Ils savaient que c’était un châtiment, car la dame les avait entendus et elle voulait leur faire payer. Personne ne parla de la mystérieuse étrangère pour la journée, et le lendemain, le temps fut plus clément, il brumassait un peu. Les femmes purent aller à la décharge le matin, mais cette fois, la dame y était
avant elles. Elles commencèrent à avoir peur, alors elles baissèrent toutes les yeux. Cela dura pour des mois. Les hommes et les femmes commencèrent à aller à la décharge en même temps, car la pluie était souvent plus forte durant la journée.
Depuis plus d’une semaine, la femme se présentait à la décharge, et il ne pleuvait plus. Les habitants se dirent que la femme n’était plus en colère et que la vie normale allait pouvoir recommencer. En fait, le mois de juin venait juste de commencer, donc la saison des pluies était terminée.
LA RÉMANENCE D’UN AMOUR Par Dominique Plourde
Par un beau jour d’octobre, Annabelle se préparait pour aller à l’école comme à tous les jours. Par contre, aujourd’hui, elle avait une grande nouvelle à dire à ses amies. Elle avait attendu toute la fin de semaine pour pouvoir leur annoncer. En arrivant à l’école, elle courut les rejoindre et leur dit, avant même de les avoir saluées, qu’elle avait enfin rencontré le garçon de ses rêves. Annabelle nageait dans le bonheur. Cela faisait longtemps qu’elle voulait avoir un amoureux avec qui elle pourrait avoir une histoire plus sérieuse. Ils faisaient beaucoup d’activités. Avec lui, elle se sentait enfin complète. Leur amour se percevait dès qu'ils étaient ensemble. À l'instant où leur regard se croisait, leur monde s’arrêtait. Ce garçon, Jack, représentait tout pour elle. C'était un garçon mystérieux, avec des cheveux noirs, sportif avec des muscles bien définis. De quoi se faire remarquer à coup sûr par la gente féminine. Annabelle pensait et rêvait de lui à chaque minute de sa vie. Elle aimait tout de lui, son odeur, sa personnalité, sa présence, son apparence,etc. Vraiment tout, de son regard perçant aux baisers passionnés qu'ils partagaient. Jack était attaché à la jeune femme tout autant qu'Annabelle l'était à lui. Il ne jetait pas même un furtif regard aux autres filles. Les deux jeunes gens se voyaient aussi souvent qu'ils le pouvaient. Le plus beau dans leur couple était qu'ils savaient régler leurs différends dans le calme grâce à la maturité acquise tout au long de leur relation. Ils formaient un couple parfait. C'est pour cette raison que plusieurs personnes les jalousaient.
Après plusieurs mois de relation, Annabelle était toujours follement amoureuse de lui. Elle avait complètement délaissé ses amies pour passer tout son temps aux côtés de l’homme qu’elle aimait. Un vendredi soir, Jack devait aller la chercher chez elle pour aller voir un film au cinéma. Ils s’étaient donné rendez-vous à dix-neuf heures chez Annabelle. Aimant son amoureux du plus profond de son être, Annabelle attendait avec impatience l’arrivée de Jack. Le temps passait. Elle attendait, en se disant qu’il devait avoir une bonne raison pour être en retard, car il était habituellement très
ponctuel. Il était maintenant vingt-deux heures trente et la jeune fille n’avait toujours pas de nouvelles de Jack et il ne s’était pas encore présenté. La mère d’Annabelle, Marthe, était descendue rejoindre sa fille qui attendait désespérément Jack. Elle lui dit tendrement qu'il ne viendrait pas, qu'il ne viendrait plus. L’adolescente ne voulait pas croire sa mère. Elle savait qu’il ne pouvait pas l’abandonner. Cédant à la fatigue et à l’insistance de sa maman, Annabelle alla se coucher.
Le lundi matin, pour aller à l’école, Annabelle avait mis son bracelet préféré. Jack lui avait donné lors de leur voyage en France. C’était un soir d’automne très sombre, devant la tour Eiffel, à Paris, il y avait tellement de brume qu’elle ne distinguait pas très bien ce que lui offrait son amoureux. Au dessus d’eux, il y avait un arbre qui ajoutait une touche de lyrisme à la scène. Cette journée aussi, son amoureux n’était pas présent à l’école. Elle ne s'en inquiétait pas, car elle avait un message sur son téléphone cellulaire que Jack lui avait laissé en essayant de la contacter. Seule, Annabelle s’isolait de plus en plus. Personne ne venait lui parler comme s’ils avaient peur de la brusquer. Annabelle ne s’en rendait pas compte. Elle vivait dans son propre monde qui tournait autour de Jack. Cette nuit-là, elle avait fait un affreux cauchemar. Dans ce dernier, Jack était mort. Elle s’était réveillée au petit matin en pleurs. Sa mère, qui s’inquiétait pour son unique fille, essayait, comme à chaque fois, de la consoler du mieux qu’elle pouvait. Elle avait fini par arrêter de penser à ce rêve sans en faire de cas et sans chercher à l'analyser.
Après plusieurs mois de hauts et de bas, Marthe en avait plus qu’assez de cette situation. Elle s'inquiétait désormais pour sa fille qui ne semblait se rendre compte de rien. Elle se décida donc de l'amener voir un professionnel.Toutes les deux, elles s'y rendirent. Une fois arrivées, Annabelle attendait l'heure de son rendez-vous dans la salle d'attente et Marthe, qui avait déjà besoin d'aller se faire un petit rafraîchissement, partit aux toilettes. De loin, le professionnel entendait Annabelle parler avec quelqu'un qu'il ne voyait pas. - Mon beau, on pourra y aller après. - ...
- Oui, bonne idée. Je t'aime. Il avait entendu seulement des bribes de conversation. Concluant que les deux personnes avaient fini de discuter, il fit appeler Annabelle dans son bureau. Ne sachant pas comment aborder la chose dans ce genre de situation, le spécialiste se dit qu'il valait mieux y aller directement à l'essentiel. -Alors Annabelle, depuis quand est-il décédé ? La jeune femme, qui ne savait pas de qui il parlait, le regarda avec un air perplexe, ne sachant pas quoi répondre.
IDIOTIE HUMAINE Par Raphaelle Lessard
L’annonce que je venais de voir me donnait l’envie de recommencer la natation. «Inscrivez-vous d’ici le 30 septembre et courez la chance de gagner une magnifique expédition pour deux à Hardangervidda, en Norvège!» L’image qui accompagnait le petit texte était tout à fait sublime. J’eus un coup de foudre avec les magnifiques courbes des dunes de neige. Le ciel d’un bleu éclatant, accompagné de quelques nuages, ainsi que le soleil plombant parfaitement sur la neige m’attira à un tel point que je m’obligeai presque à m’inscrire au cours de natation pour pouvoir gagner ce fameux voyage. Les personnes habillées de couleurs vives me suppliaient pour que je vienne les rejoindre dans leur expédition en ski de fond. Je devais aller les rejoindre, je devais gagner ce voyage, mais le plus important, je devais m’inscrire à ces cours de natation. J’étais confiante, j’allais gagner le voyage de mes rêves. J’appelai sur le champs mon amie Élizabeth pour qu’elle s’inscrive avec moi et lui expliquai que nous pouvions gagner un voyage et que nous irions ensemble. Après tout, j’avais maintenant deux chances de gagner !
Onze heures trente minutes. Nous étions sur le bord de la piscine. L’instructeur nous expliqua quelques règles de sécurité et nous suggéra d’aller chercher nos lunettes de plongée. Arrivée dans le vestiaire, je vis une jeune femme aux longs cheveux blonds parler avec la responsable du vestiaire. Elle avait l’air tant désespérée. Je pouvais remarquer dans son visage d’un blanc presque translucide qu’elle avait seulement le goût d’éclater en sanglots. En me rapprochant de mon casier, j’entendis un brin de la conversation de la jeune femme et de la vieille responsable du vestiaire ayant un énorme surplus de poids. -Mais madame! Je suis certaine que c’est mon casier. -Je vous le répète encore, je ne peux pas couper votre cadenas. C’est un règlement. -Oui, mais madame, je ne peux pas repartir chez moi en maillot de bain, il fait -20෫ C dehors!
-Je ne peux pas couper votre cadenas, c’est le règlement. Arrêtez de me le demander. Je ne couperai pas votre cadenas! J’étais désemparée pour la jeune femme. La responsable du vestiaire n’était pas le genre de femme à être douce avec les gens. Elle lui parlait avec un ton agressif. Je priais pour ne pas avoir à lui parler. J’étais presque terrifiée par celle-ci. Ne me souciant plus de leur conversation, je pris mes lunettes de plongée à mon casier et je retournai à mon cours de natation.
Le cours terminé, j’allai à mon casier pour récupérer mes effets personnels et pouvoir me rhabiller. Je pris mon cadenas dans mes mains et fis mon code. 38-21-30. Mon cadenas ne s’ouvrit pas. Je réessayai encore. 38-21-30. Mon cadenas ne s’ouvrait toujours pas. Je demandai à Élizabeth de tenter d’ouvrir mon cadenas, mais le résultat était le même, mon cadenas ne s’ouvrait pas. Nous décidâmes d’essayer ma combinaison sur tous les cadenas comme le mien dans la rangée, mais je savais d’avance que ça allait être une longue tâche. Je possédais le cadenas le plus standard. Celui que tout le monde avait, celui qui n’était pas assez unique, celui que personne ne veut avoir dans cette situation. J’avais ce cadenas de couleur argent avec une roulette de couleur noir, ce cadenas qui était facile à se procurer, celui qu’on trouve à chaque coin de rue, ou presque.
Lorsque j’étais rendue à mon cinquième cadenas et Élizabeth à son quatrième, la responsable du vestiaire, celle qui était plutôt grognonne, passa à ce moment dans la rangée où moi et mon amie nous trouvions. Je pensai lui demander de couper mon cadenas, mais je décidai de continuer mes tentatives puisque je savais qu’elle ne voudrait pas. Je le savais parce que j’avais vu la jeune femme lui demander plus tôt. Je savais déjà la réponse et j’aimais mieux ne pas l’entendre par la grosse dame.
Après vingt minutes de tentative, je pris mon courage à deux mains et je décidai d’aller parler à la vieille dame que je redoutais énormément. Elle me faisait peur avec son visage sévère, ses cheveux ébouriffés et grisonnants, son nez de sorcière et son regard assassin. Elle avait l’air encore plus
grincheuse que tout à l’heure. Je savais déjà ce qu’elle allait me répondre, mais peu importe. Je devais tenter ma chance. -Bonjour madame! Puis-je vous demander un service? -Oui, mais dépêche-toi. Je dois aller plier les serviettes. -Ça fait maintenant vingt-cinq minutes que je tente d’ouvrir mon cadenas et je ne suis toujours pas capable. Pourriez-vous me le couper s’il-vous-plaît? -Non, je ne coupe pas de cadenas. -S’il-vous-plaît madame, je suis certaine que c’est mon casier, mais je n’arrive plus à l’ouvrir. -Non, c’est un règlement. Je ne coupe aucun cadenas! -Mais madame, je ne peux pas repartir en maillot de bain chez moi! -Ce n’est pas mon problème. Moi je ne coupe pas de cadenas, c’est le règlement. Désespérée, je regardai la vieille dame et décidai d’aller appeler mes parents pour qu’ils m’apportent des vêtements. Je me retournai pour ne plus faire face à la responsable du vestiaire et je partis vers le téléphone public tout humide. -Attendez!, fit la vieille sorcière. Je me retournai sur le champs. La dame était devenue plus calme, moins sévère. Elle n’avait plus son air de vieille grognonne. -J’ai coupé un cadenas tout à l’heure et j’ai dû remettre un cadenas sur la case puisque ce n’était pas la case de la personne, c’est peut-être votre cadenas que j’ai coupé.
CAUCHEMAR INVERSÉ Par Corinne Reny
Dehors, le vent soufflait sur les hautes montagnes de la Suisse recouvertes d’une poudre blanche. Seule la lune éclairait cette montagne qui entraînait avec elle de longues traînées blanchâtres qui couvraient la vision. Du haut de celle-ci, les cris des patients déchaînés, violents et dangereux de l’hôpital psychiatrique se faisaient entendre malgré le souffle des rafales. Il y avait présence de bourrasques qui sifflaient, et lorsqu'elles marquaient une pause, des cris, des râlements pouvaient être perçus. Chaque nuit, un hurlement de douleur, des éclats de verre et de fenêtres et la résonance de la clôture électrique faisaient croire qu’il y avait un nouveau prisonnier mort en tentant
de
s’échapper
de
souffrances physiques et
psychologiques
interminables. À
quatre-mille-quatre-cent-soixante-dix-huit mètres d’altitude, un vieil homme confiant, fort, voulant savoir tout, mais pauvre et délabré, habitait au sommet de la montagne, sombre et obscure, à l’écart de tous et sursautait à chaque cri provenant de cet hôpital. Par contre, la hauteur et les rafales que faisait la poudre blanche ne lui permettaient pas d'apercevoir ce qui se passait au bas de celle-ci. Plus les jours avançaient, plus les beuglements étaient nombreux et l’inquiétude de l’homme s’accentuait. Un jour, à la recherche d'une réponse à ces questions, l’homme décida d’entreprendre un long voyage dans la périlleuse et dangereuse montagne. Inexpérimenté, mais confiant, l’homme tenta sa chance et risqua sa vie en commençant cette aventure. Malgré son inquiétude alarmante, il amassa ses pauvres provisions, se prépara à descendre et à affronter les défis qu’il aurait à combattre.
En ce matin venteux, frisquet, et poudreux, il décida de partir malgré les mauvaises conditions. L’homme, vêtu d’un manteau imperméable jaune canari, de souliers de course vert et rouge et d’un chapeau de paille brunâtre qui ne s'agençait pas du tout avec le reste, partit à destination du bas de la montagne. Son habillement ne favorisait pas ce genre d’expédition hivernale, mais sa curiosité prenait le dessus et se força à y aller. Après quelques minutes de marche dans ce charme
environnemental opalescent, il était déjà trempé, glacé jusqu’aux os, à cause de cette poussière opaque qui tombait du haut du ciel et celle qui lui soufflait au visage par les rafales froides et constantes. Il n’avait pas d’autre choix que de retourner se changer et se réchauffer dans sa cabane endommagée par les bourrasques. L’homme y resta une dernière nuit avant de l’abandonner une seconde fois pour avoir une réponse. Ses questionnements rongeaient ses pensées à toute heure de la journée. L’inquiétude le guettait encore une fois à cause de l’échec de la première fois. Avec le foyer au bois, les couvertures chaudes et la cabane chaleureuse, il se réchauffa, tant lui-même que ses idées d’explorateur expérimenté avec un instinct de survie incroyable. La fatigue le mit dans un profond sommeil où il rêva d’une belle expédition chaleureuse et réconfortante.
Mais rapidement, il se fit réveiller par les cris les plus intenses et stridents qu’il n’avait jamais entendus. Les hurlements étaient si forts que le vieillard se couvra les oreilles de tout ce qui trouvait sous sa main. C’était les cris de détresse qu’il attendait. Dès cet instant, son sac étant déjà prêt, il s’habilla avec plusieurs épaisseurs sur lui pour éviter d’échouer de nouveau dans son expédition froide et extrême. L’homme partit rapidement et franchissait les obstacles à toute allure. L’homme sautait par dessus les racines d’arbre qui lui nuisaient, ne voyait pas les traînées rouges vives qui lui coulaient le long des bras et des jambes et le coeur battant, la sueur au front, il dût s’arrêter après avoir franchi un seul petit kilomètre de descente pour respirer l’air frais hivernal. La lune commençait à s'éclipser, laissant place au soleil. Le vent frisquet et ces rafales extrêmes se levaient pour nuire à sa vision. Il sentit le froid monter en lui et la respiration d’une bête près de lui. L’haleine de celle-ci dégageait une forte odeur, chaude et humide. Les bruits que fit l'ours sonnaient comme un grondement saccadé. Le claquement des dents et des os de l’homme était perceptible à des kilomètres à la ronde. La sueur lui coulait le long du visage, des bras et des jambes. Malgré la journée froide des temps hivernaux, il était mouillé par la peur. Tranquillement, sans faire de mouvements brusques, l’homme se retourna. La petite bête, presque mignonne, mais effrayée par la carrure de l’homme, s'enfuit à toute vitesse sans faire ni grondement, ni cri, ni même un petit son. Un jeune ours perdu
dans ce paysage hallucinant et uniforme de neige éblouissante par le soleil. Cette peur lui fit changer ses idées, mais l'épuisement le gagnait.
Malgré tout, le vieillard continua son chemin en faisant attention où il mettait les pieds. Les écorchures et le sang coagulé couvraient son corps et la perte de chaleur se faisait de plus en plus facilement. Les glaçons se formaient sur son corps et l’emprisonnaient dans ces mouvements comme un détenu dans sa prison. Mais chaque nuit, des râlements étaient perceptibles de plus en plus fort, ce qui augmentait la jauge d’anxiété du vieil homme. Après plusieurs jours de marche et d’épuisement, il ne lui resta plus que quelques mètres de descente à faire. Les vents se faisaient de plus en plus forts, les hurlements étaient difficiles à entendre du sol, même si l’homme s'approchait de l’endroit. Seules les étoiles éclairaient le bas de la montagne et la lune, cachée par les nuages sombres et noirs, ressortait que pour éclairer le haut de la montagne maintenant déserte. Plusieurs heures d'attente furent nécessaires avant que l'homme se décida à y jeter un coup d'œil par crainte de voir ce qu’il allait trouver. Mais enfin, le vieillard se décida à regarder, toujours aussi inquiet et déséquilibré, faufilé derrière un arbre pourri, abîmé par le temps et couvert d'une substance gluante à en donner la chair de poule.
Ces yeux étaient ronds comme des billes, sa bouche grande ouverte, une hachure de salive lui coulait le long du menton. Il avait tort depuis le début. Ils avaient du plaisir à leur faire souffrir et leur faire subir ce qu’ils ont dû endurer en étant dans cet hôpital psychiatrique. À l'intérieur comme à l'extérieur, les scènes macabres dignes d'un film classé violence extrême étaient visibles. La haine se faisait sentir dans l'hôpital psychiatrique, chaque coup d'oeil émiettait son courage. Sur le sol marbré de rouge, les corps inertes semblaient flotter, se détacher de la neige malgré leur pâleur cadavérique. Ce n’était pas les patients qui essayaient de se sauver et qui se faisaient torturer, mais bien les gardiens qui se faisaient faire des souffrances physiques et psychologiques par les patients déchaînés.
ÉPIDÉMIE Par Lucas Turpin « C’était un soir comme n’importe quel autre, je finissais mes tests sur les échantillons de sang que j’avais pris durant la journée. Le laboratoire était vide, tout le monde était parti. Les espaces de travail étaient propres, le concierge venait de laver les comptoirs en granit noir. Les lumières étaient fermées dans la plupart des salles, les seules sources de lumières provenaient de mon bureau et de l’entrée du centre de recherche. Il ne restait que moi et comme tous les soirs, le concierge me confia la charge de fermer les lumières et de verrouiller la porte avant de partir. Le centre de recherche était grand et comprenait une douzaine de laboratoires, une cinquantaine de bureaux pour un total d’une centaine de personnes des quatre coins du globe qui s’affairaient à leurs différents projets. Le centre était particulièrement achalandé durant la journée, mais à cette heure tardive, il n’y avait plus un chat. Je me sentais bien et moins pressé lorsque le centre était vide et mon esprit était plus clair. Je ne m’habituerais jamais à travailler sous la pression. À ce moment là, je me sentais bien et relaxé, mais je ne savais pas ce que le destin avait en banque pour moi dans les prochaines minutes. Depuis les épidémies de grippes de 2067, le budget pour la recherche de vaccins avait monté en flèche en quelques mois. Ça faisait du bien de savoir que je ne me retrouverais pas à la rue parce qu’il n’y avait pas assez de fonds. Les jours avaient été incertains pendant plusieurs années depuis les avancées dans le domaine de l’hygiène et des maladies parce que il n’y avait plus le besoin pour des chercheurs comme moi, on se croyait invincible, on croyait que les bactéries et les virus avaient disparus de notre environnement pour de bon. Le seul problème était que l’on remarquait une baisse inquiétante de l’activité du système immunitaire dans près de 90% de la population. Alors que je rangeais mes tablettes électroniques dans ma valise, j’entendis le tintement distinctif de la clochette sur la porte. Je croyais que tout le monde avait fini pour la journée. Ce devait être quelqu’un qui a oublié quelque chose dans son bureau. Je sortis de mon bureau, mis la clé dans la serrure et puis ce fut le néant, je vous jure monsieur l’inspecteur je ne me souviens de rien! - Qu’est-il arrivé ensuite? - Je me réveillai sur le sol, on m’avait attaché là avec une chaîne autour de mon pied gauche, on m’avait dépouillé de mes vêtements, bref il ne me restait que mes sous-vêtements et on m’avait mis une camisole de force. - Avez-vous plus de détails sur l’endroit où vous étiez retenu? - Le sol était en grande tuiles de marbre blanc, les murs étaient faits de béton comme les vieux batiments du Secteur 5, la poutre sur laquelle j’étais enchaîné était faite d’une très grosse planche de bois, je n’en avais jamais vu auparavant comme ça, une poutre de soutien en bois. Je croyais que le règlement empêchait une telle chose de nos jours. L’endroit était sale et poussièreux, on aurait dit que personne ne l’avait lavé depuis plusieurs années. Tout était recouvert d’une couche de gris qui donnait à l’endroit un air lugubre ainsi qu’une ambiance de mort. Tout était silencieux lorsque je me suis réveillé, le seul son provenait de ma respiration difficile. J’essayai de me lever, mais mes jambes ne voulaient pas me soutenir. Alors que je regardais avec plus d’attention autour de la salle, je remarquai une note sur le mur en face de moi et il y était écrit : Tu ne m’enlèveras pas mon règne! Je ne comprenais pas, je n’avais fait de mal à personne, j’avais remboursé mes dettes depuis plus d’un mois maintenant. C’est alors qu’une porte s’ouvrit, un homme en complet entra et me dit très simplement : «Vos recherches ont été bien utiles, maintenant vous pouvez retourner chez vous.» On me jeta dehors, avec seulement mes sous-vêtements, je retournai chez moi m’habiller et je me suis aussitôt précipité ici.
Alors qu’est-ce qui se passe maintenant monsieur l’inspecteur? - Nous allons mener une enquête et tenter de trouver les gens qui vous ont fait ça. Pour l’instant nous allons vous raccompagner chez vous et installer des drones de sécurité. » Le lendemain, on retrouva plus de quarante morts partout à travers la ville. Le seul point commun, ils étaient tous mort d’une grippe plus violente que jamais auparavant. À peine quelques heures plus tard, l’épidémie était annoncée et des mesures extrêmes de protection furent mises en place. La souche avait été modifiée génétiquement et rien ne pouvait l'arrêter. Sur un vol privé par dessus l’océan Atlantique, un homme en complet riait en écoutant les nouvelles.
LE MOUTON NOIR par Laurent Savard J’aime mon travail. La plupart des journée en temps qu’infirmière sont agréables et calmes à l’HPS, l’Hopital Psychiatrique de Sydney. Contrairement à ce que pense la majorité du monde, il n’y a pas vingt-quatre heures sur vingt-quatre une émeute de fous crachant et criant partout. Deux patients sur trois sont pratiquement normaux avec une petite déviation mentale, du genre problème de personnalité ou bipolarité. On pourrait comparer ce lieu à un hôpital normal, mais en beaucoup plus calme dû au faible achalandage et au manque d’urgences médicales. Jusqu’à ce jour, je n’ai encore jamais été témoin d’un «code rouge», c’est-à-dire d’un cas où tout le personnel de l’HPS doit évacuer l’établissement, sauf bien sûr les agents de sécurité ainsi que la police. Évidemment, ça ne s’est produit qu’une seule fois dans l’histoire des hôpitaux psychiatrique et c’est arrivé en Corée du Nord. Je ne crois pas que ça m’arrivera un jour, mais tout de même, il y a un risque. Aujourd’hui, je me prépare à rencontrer le directeur le l’hôpital pour donner mes propositions, mes opinions et mes commentaires sur le départ d’un des patients, Rimo, un homme d’origines jamaïquaines qui souffrait de schizophrénie assez sérieuse. Son cas a été traité de traitements neuroleptiques et des médicaments lui ont été prescrits. Maintenant, je crois qu’il est en fin près à partir, car son comportement s’est nettement amélioré et il commence à interagir socialement avec les autres. À la fin de l’après-midi, je sors du bureau de M. Sheldon, le directeur. Tout est terminé, Rimo peut quitter l’HPS. Il est devant moi et en versant une larme, je lui dis: - Félicitation Rimo, tu peux partir maintenant. À condition que tu prennes tes médicaments deux fois par jour, comme ici. Au revoir, tu a été formidable dans ta guérison. - Merci beaucoup, Mme Riley. Et il part avec son linge et ses affaires, seul devant le monde. Il s’en sortira sans mal, j’en suis sûre. Le lendemain matin, c’est encore très calme, surtout avec le départ d’un de mes patient. Il ne se passe rien durant toute l’avant-midi. Puis, vers 14h30, un nouveau patient est arrivé. Il est de taille moyenne, peau noire, cheveux courts, yeux brun, bref tout ce qu’il y a de normal. Il passe dans le corridor devant moi et entre dans sa nouvelle chambre. Puis, l’infirmier qui l’a accompagné me dit:
- Il s’appelle Basile, âge inconnu ainsi que sa famille. La police l’a retrouvé dans la rue hier soir. Il ne parle pas, ne sourit pas et n’a aucune expression faciale. Ils ont réussi à trouver son nom grâce à l’étiquette de son manteau: il y était écrit en crayon permanent Basile. Je vous laisse avec, Mme Riley. C’est à ce moment là que je suis rentrée dans sa chambre, puis j’ai constaté qu’il n’avait effectivement aucune expression faciale. Juste en le regardant, on aurait dit qu’il a quelque chose à dire au fond de lui, mais qu’il n’ose pas le dire ou bien qu’il ne peut le dire. Puis, je casse la glace d’un ton calme et amicale. - Bonjour Basile, je me nomme Loria Riley et je m’occuperai de toi durant... Pendant que je parle, il se couche dans son lit et s’endort aussi vite. Alors, pour ne pas paraître comme une infirmière qui ne sait pas quoi faire, je continue ma phrase du même ton. - Demain tu passeras une évaluation psychologique avec le docteur Simon Ganavero pour savoir ton problème. Passes une belle nuit. Le jour après, je suis arrivée juste à temps pour voir Basile sortir du bureau du docteur Ganavero. ll avait la même expression faciale que hier après-midi. Il s’est rendit de lui même à sa chambre, puis je décide de rentrer dans le bureau du docteur pour lui demander comment ça s’était passé. - Et puis? - Rien de rien de rien, non de Dieu! me répondit-il découragé presque en criant. C’est impossible, je n’ai même pas réussi à lui faire dire un seul mot. Et il n’est pas muet, car les tests de la résonance magnétique indiquent qu’il n’a aucune disfonctionnalité d’un lobe dans le cerveau et aucun traumatisme! Il est totalement normal psychologiquement, mais je sens qu’il a un problème ou qu’il faut se préoccuper de son cas. Je le sens dans ses yeux peut-être je n’en suis pas si sûr... Presque effrayée, je décide de quitter sur-le-champ pour aller voir ce que Basile fait dans sa chambre. Puis soudain, je le vois debout, dos à moi. Dès que j’entre, il se retourne et me regarde d’un air furieux pendant trente secondes. Puis, il monte ses mains près de son visage, comme s’il a des griffes. Sous ma plus grande surprise et plus grande peur, il dit: - Autre fois, les brebis du champ étaient incapables devant ceux qui se croient fermiers. Mais
maintenant, leur meneur, le mouton noir, est enfin arrivé pour montrer aux fermiers ce qu’ils sont vraiment: l’infériorité! Soudain, le système de lumières du bâtiment en entier tombe en panne. Je coure pour voir dans le corridor, puis toutes les portes sont ouvertes, incluant celles des chambres des patients. Personne n’était à cet étage. Je me retourne et Basile n’est plus là! Je descend au rez-de-chaussée et sous mon grand étonnement et ma plus importante frayeur, tous les patients sont là, se battant avec les agents de sécurité, qui semble se faire dominer de façon grave. Puis, on sonne l’alarme. - CODE ROUGE À TOUT LE PERSONNEL. IL FAUT ÉVACUER LE BÂTIMENT PAR LES SORTIES DE SECOURS LES PLUS PRÈS. JE RÉPÈTE CODE ROUGE. J’étais en panique totale, j’étais paralysée par la peur et envahie par le doute. Soudain, je vois Basile à travers les dizaine de visages. Il sourit de façon démoniaque. Je m’évanouis. Je me réveille sur un lit d’hôpital avec un mal de tête souffrant. L’infirmière entre dans ma chambre puis me dit que tout l’HPS a été incendiée et que tous les patients sont portés disparus. C’est alors que j’allume: les fermiers c’est nous et les moutons, ce sont les patients incapables. Et donc, Basile est le mouton noir...
PRIS AU PIÈGE Par Félix Gonthier
Cela fait maintenant environ deux mois que nous sommes ici. Mon frère et moi. Les ressources se font rares. Le 10 février 1912, cela faisait deux semaines que nous étions en expédition au Groenland. Un camping normal dans le grand Nord. Un soir, nous nous sommes endormis sur une plaque de glace. Le lendemain nous nous sommes réveillés en plein milieu de l’Atlantique. Je le sais parce que selon mes calculs du courant, nous nous dirigeons vers le Sud. Nous avons nommé notre “iceberg” (il faut bien passer le temps) “La fin”. Sûrement parce que celui-ci sera notre dernier endroit de vie. Au début, nous étions paniqués. Après quelques heures, nous avons pris sur nous. Nous avons construit un campement. Nous avons creusé un trou et nous avons mis une bâche par dessus. Avant le début de notre expédition, nous avions de la nourriture pour environ trois mois. Il en reste donc pour deux semaines. Pour l’eau, on s'était dit que l’on avait qu’à faire fondre des morceaux de glace. Nous avons nos piolets pour la casser. La première fois sur l’iceberg fut la plus épeurante. Mon frère y était allé. On ne savait pas où briser la glace. Dans le bas de l’iceberg? Non, une fissure aurait pu se créer. Sous nos pieds? Non. Même raison. Nous avons donc trouvé une partie surélevée de l’iceberg. Elle avait l’air d’un gros prisme à base rectangulaire. C’était une journée ennuagée. Ça rendait la tension encore plus grande. Lorsqu’il a commencé, je me tenais à l’écart. Ensuite, il m’a crié de venir vers lui parce que, selon lui, il n’y avait pas de risque. Je me méfiais tout de même. On ne sait jamais. Lorsque je fût assez proche pour qu’il me parle normalement, il me dit de rapporter les morceaux de glace au campement. Je rapportai un morceau au campement, mais j’avais peur de me retourner et ainsi le perdre de vue. Au cas où il lui arriverait quelque chose. On ne sait jamais. Le camp était à au moins cinq-cent mètres. Je marchais et je me retournais sans arrêt. Nous nous sommes maintenant habitués à cette routine. Il brise, je rapporte. Nous faisons ça chaque matin. On s’y connaît en survie et l’hydratation est cruciale si l’on veut rester en vie le plus longtemps possible. Un avion pourrait passer au dessus de nous et nous secourir à tout moment. On ne sait jamais. On garde espoir. Nous avons déjà essayé de nous faire un radeau de fortune. Ce fut un échec: nous n’avons pas le bon
matériel pour cela. En plus, encore selon mes calculs, nous sommes vraiment en plein milieu de l’Atlantique. Ça prendrais trop de temps. On aurait le temps de mourir de déshydratation avant. Appeler quelqu’un? Pas de réseaux.
Tout ça pour dire qu’aujourd’hui, nous sommes presque morts. Et oui, c’est la triste réalité. Nous savons environ il y a combien de temps que nous nous sommes “égarés”, mais à part ça, nous avons perdu toute notion du temps. Parfois des choses nous redonnent espoir, mais cet espoir est éphémère. Hier soir une aurore boréale nous a redonnée un peu de vie. Quel spectacle! Le mélange des couleurs était parfait. Au début verte, ensuite bleue pour ensuite passer au rouge. C’était magnifique. On espère revoir la même chose ce soir. On ne sait jamais. Ce soir, il fait particulièrement froid. J’estime à peu près moins 35 degrés Celsius. Nos sacs de couchage nous garderont au chaud. On l’espère. Ils sont quand même fait pour le Grand Nord. Nous avons mangé de la viande déshydratée (comme d’habitude). Nous gardons le meilleur de la nourriture pour la fin. Le début de la fin commence demain. J’ai hâte. Mais pas vraiment en même temps. Nous venons de discuter ce que nous allons faire lorsque nos réserves de nourritures seront finies. On a opté pour une mort rapide plutôt qu’une mort longue. Nous n’attendrons pas de mourir de faim. Nous allons trouver quelque chose pour mettre fin à nos jours à partir du moment où nous n’aurons plus de nourriture. On espère encore voir arriver les secours. On ne sait jamais. Sur la pensée négative de notre mort, nous allons nous coucher. On s’installe confortablement. Mon frère s’endort en premier. Comme d’habitude. Les heures passent. Après environ quatre heures je me lève. Je marche autour du campement. Je m'éloigne jusqu’au bord de notre “iceberg”. Même si je sais que celui-ci sera sûrement mon dernier endroit de vie, j’apprécie le paysage qu’il me procure. L'Atlantique partout autour de moi. C’est magnifique. Mais déprimant en même temps. Je retourne au camp et mon frère est réveillé. On marche jusqu’à un des coins de notre morceau de glace. Selon ma boussole, de ce coin, nous regardons au Nord ou à l’Ouest. Nous regardons longuement vers le Nord. Nous parlons de notre famille. Comme ils doivent s’inquiéter. Tout à coup, il arrête de parler et me tapote le bras. Je le regarde et me pointe l’ouest. J'aperçois un bateau à moins de cinq-cent
mètres de nous et la dernière chose que je vis est le nom gravé sur ce bateau: “Titanic”.
PISTER LES SOUVENIRS Par Laurie Lecomte
Einstein s’était enfuit dans la forêt. Je ne l’avais pas vu et je le cherchais plutôt dans le chalet. Lorsqu’il réapparut derrière la porte avant, je ressentis le soulagement d’un enfant qui attendait le retour d’un parent parti à la guerre.
À l’école, je n'aimais pas fréquenter les autres garçons de mon âge, car à tous les jours, chacun avait une nouvelle blague au sujet de mes cheveux bouclés, de mes jambes trop courtes ou de ma passion pour les mathématiques. Lui, Einstein, n’en faisait pas de cas.
Lorsque j’avais douze ans, mes parents m’avaient fait la surprise; je me souviens de leur sourire lorsqu’ils me demandèrent de choisir mon nouvel ami parmi quelques chiots aux oreilles pointues. J’avais décidé d’adopter celui qui m’observait tout seul, dissimulé derrière un meuble. Celui qui était mis à part, comme moi.
Einstein m’aimait, je l’aimais aussi et il aimait mes parents. J’ai toujours en tête ces soirées passées à étudier un problème de géométrie ou d’algèbre avec mon père et Einstein, roulé sur le canapé, en grignotant du maïs soufflé tous les trois. Que j’arrive à la solution ou pas n’avait aucune importance; mon père déposait sa main sur mon épaule et m’encourageait à continuer, à donner tout ce que j’avais lorsque je cherchais à comprendre.
Malgré cela, je ne pus jamais voir ce qui le rendait si détestable aux yeux de ma mère. Après des mois de décharges d'engueulades, de pleurs et de débats, mon père quitta notre maison et comme ma mère le voulut, il disparut de ma vie à ce moment. Que je lui parlais doucement ou en insistant sans cesse, Maman détournait toutes mes questions. Elle se contentait de me rappeler que nous étions tous plus heureux ainsi.
Je vivais donc désormais avec ma mère et mon chien, sans savoir ce que mon père était devenu. Je n’arrivais pas à engloutir la vérité; pourquoi avait-il choisi de se cacher alors qu’il tenait à moi et à Einstein? J’étais toujours là, à l’adorer et l’attendre. Depuis quelques années, Einstein m’était donc bien plus qu’un compagnon à poils; à mes yeux, malgré la réalité, il était celui qui restait à mes côtés, qui m’écoutait, qui me comprenait, qui partageait mes peines et mes bons coups, qui ne m’abandonnait jamais.
Mais cet après-midi de l’été de mes quinze ans, en vacances au chalet, il était parti et il était revenu en soirée, sans que je sache pourquoi.
Cela ne m’importait peu; Einstein était là, aussi aimable et jovial qu’à son habitude. Le lendemain, comme toujours, nous nous amusions à lancer des balles dehors. Ce que je voyais autour du chalet était la plus belle scène de nature: le bâtiment émergeait d’une mer verdâtre feuillue et épineuse sur le flanc ouest de la montagne, surplombant le lac vivant qui siégeait sous ses pieds. Il reprenait l’image que donnait le ciel, depuis son teint clair du matin jusqu’à son voile nocturne, criblé de minuscules pores scintillants.
Quelques jours après, encore une fois, Einstein se mit à courir entre les arbres, sans que je puisse m’en apercevoir. J’arpentai la propriété et constata qu’il répétait le même manège que la semaine précédente: il m’attendait près de la porte avant.
Pendant un mois, mon chien continua de jouer son étrange jeu. Comme il rentrait au chalet à chaque fois, cela ne me tracassait pas. Je savais bien qu’Einstein ne faisait qu’explorer les environs du bâtiment. Je remarquais souvent qu’il laissait sa langue rosée parcourir ses babines, comme s’il avait grignoté un gâterie ou que je lui avais laissé les dernières miettes de mon goûter.
Cependant, au mois d’août, comme je voyais la fin des vacances s’approcher, je pensai au fait de devoir quitter Einstein en matinée pour aller à l’école et de devoir patienter jusqu’à la fin de la journée pour revoir mon meilleur ami. L’idée de le perdre s'immisça alors dans mes songes. C’est à cet instant que je commençai à craindre pour mon chien. Je pris conscience que dans la forêt, autour de nous sur la montagne, les escarpements rocheux perchés très hauts, les mammifères carnassiers à l’appétit de survie et les campeurs malveillants pouvaient tous voler la vie d’Einstein. Si c’était le cas, il enlèveraient aussi la lumière de la mienne.
De fait, le soir suivant, Einstein ne revint pas. Les images de la veille me foudroyèrent quelques secondes et sans réfléchir, je m’enfonçai dans le tricot d’arbres serré et sombre, en n’entendant que mon coeur qui m’assaillait de coups douloureux à la poitrine.
Je sautais par dessus les racines et les plantes comme une bête enragée; je criais le nom de mon chien, comme pour le réveiller s’il était déjà trop tard. Je percevais chaque craquement, chaque soupir, chaque grognement, mais j’ignorais les miens; j’étais un animal à l’affût. Lorsque je me retrouvais au sol, mes jambes me forçaient à me redresser et à avancer. Je ne voyais pas tous mes membres qui se secouaient ni les traînées rouges qui les recouvraient.
À un moment, je ne voyais plus rien et je ne percevais plus mon propre corps. Lorsque que la forêt réapparut autour de moi, je m'aperçus de mes tremblements, de mes larmes et de la noirceur. J’étais étalé au sol, à quelque part dans la forêt et je ne savais pas où je me trouvais, ni Einstein. J’ignorais depuis combien de temps j’avais quitté le chalet. Je compris que j’avais fait une bêtise et que seul avec moi-même, je ne m’en sortirais probablement pas mieux que mon chien. Immédiatement, je m’en voulus de ne pas avoir cherché à arrêter Einstein plus tôt. Pourquoi l’avais-je laissé prendre plaisir à s’aventurer sans moi? Nous étions tous les deux coincés entre les arbres par ma faute.
Malgré tout mon orgueil, je ne pouvais retenir mes pleurs faibles et m’empêcher d’imaginer ce que
les bras acérés et tordus des arbres dissimulaient; une bête énorme prête à bondir, dont la mâchoire pouvait me fracasser et broyer les os? Autant n’en savoir rien. Je compris à cet instant que regarder un film horrifiant n’avait rien à voir avec la vraie terreur, celle qui me posséda lors de cette nuit d’août, celle qui me fit vouloir mourir, dans la nuit, loin de ma famille et d’Einstein.
Mais j’avais tort, une fois de plus; il apparut en courant et en sautillant comme un fantôme, sans que je m’en rende compte. J’étais convaincu de l’avoir perdu. Si moi je ne pouvais retrouver Einstein, lui me rejoignit avec sa bonne mine aimable, renifla mes plaies et s’assit sur les rochers, m’observa d’un oeil rusé et m’attendit. Saisi d’une onde de chaleur rassurante, je m’assurai que la tache velue et enjouée était bel et bien mon chien. À cet instant, la forêt me sembla s’éclaircir et s’ouvrir, les étoiles du ciel plus belles et le sang dans mes plaies se figer. Einstein ne m’aurait jamais fait cela. Il était bien plus que mon meilleur ami.
Il restait cependant à nous tirer de notre situation. Après tout, nous devions retrouver notre chemin! Encore une fois, Einstein se montra plus malin que moi; il était juché au même endroit, me consolait de ses yeux affectueux. Il se mit à aboyer, se leva et bifurqua à sa droite, tout en m’implorant de le suivre de son regard d’ami.
Je fis ce qu’il me demandait et m’engageai
à sa suite, à travers les branches sinueuses et
entremêlées. Einstein paraissait savoir où se diriger, tandis que j’étais complètement déboussolé. Mais comme tout ami, je lui faisais confiance. J'eus une pensée soudaine pour ma mère; elle devait être possédée par la terreur, elle aussi.
C’est alors que tout près, j'aperçus une forme aiguisée et rectangulaire, quoique vague. Je pus alors distinguer un bâtiment; Einstein m’avait guidé jusqu’à d’autres humains ! Nous allions pouvoir rentrer au chalet! Je me disais qu’il y aurait des gens, là, dans la résidence, à qui je pourrais demander quelques indications pour retourner chez nous. J’allais venir à bout de cette nuit. Il
commençait à faire un peu plus clair et mes jambes peinaient moins à me supporter.
Un véhicule rouge et cabossé me confirmait que les lieux étaient habités. Une fois sur la propriété, je pris une pause, m’arrêtai au bas des escaliers, tandis qu’Einstein, lui, les franchit en trombe, se posta devant la porte et se mit à la tapoter avec ses griffes. Quand celle-ci se mit à craquer et à se rabattre vers l’arrière pour dévoiler une forme étrangement familière, j’eus le souffle coupé.
L'homme donna quelques caresses amicales à Einstein, lui tendit quelques grains de maïs soufflés qu’il entreprit aussitôt de dévorer; il les attendait. La personne s’avança en haut des marches, ramena une main sur sa bouche et la retira quelques secondes après, me laissant voir un sourire à la fois enfantin et terrorisé: - Est-ce que... Bon sang, tu as grandi! Oh! Fred, si ta mère... Je ne voulais pas... Non, je suis désolé! Il ne retint pas ses larmes. Moi non plus. Je ne sus quoi dire. Einstein, grâce à ses explorations, nous avait réunis.
UNE AFFAIRE OUBLIÉE Par Maxime Laurent J'étais à Paris ce jour là. J'étais en voyage d'affaire. Mon nom est Basil et je suis le propriétaire de la compagnie S.M.P., qui est mondialement reconnue depuis quelques années. Nous étions une des trois compagnies dominantes le commerce de la production du pétrole (suivant très près Ultramar). Je m’étais permis de payer le voyage sous le compte de la compagnie pour avoir un voyage avec toutes dépenses payées (hôtel 5 étoiles, nourriture et transport). Je devais aller rencontrer nos principaux concurrents pour discuter et pour essayer de s'entendre, car il y avait trop de mal entendus sur notre marché et nous devions essayer d'au moins s'entendre sur le prix d'un baril d'essence. Ce voyage a donc permis à ma compagnie de surmonter les difficultés économiques qui régnaient et de continuer son succès. J'ai toujours été un très bon négociateur. Après plusieurs années à la tête de cette compagnie, j'ai appris à bien gérer l'argent et suis donc quelqu'un, évidement, qui possède beaucoup d'argent et je vis bien avec cela. J'étais (et je suis toujours) en pleine forme et j'avais une santé d'enfer! Je voyageais aussi avec Bobicho, un ami qui était toujours prêt à voyager avec moi et qui m’accompagnait souvent dans mes voyages d'affaires. Il me rappelait toujours à quel point j'étais généreux de lui payer le voyage, d'être son ami et de pouvoir lui servir de personne qui ne l'abandonnerait jamais. J'ai toujours été quelqu'un de généreux malgré le fait que je suis riche, je ne cherche pas à être plus haut que la société. Bref, je voyageais avec Bobicho en contexte d'affaire et les voyages étaient toujours aussi merveilleux. Nous étions arrivés à destination. Le vol avait duré plusieurs heures et nous devions repartir le lendemain quelques heures après la réunion. Après avoir marché hors de l'aéroport et pris le taxi, nous sommes arrivés à l'hôtel. Nous avons sorti nos bagages, nous nous sommes installés et nous sommes sortis prendre un verre au bar qui était à deux rues de l'hôtel. La réunion n'était que le lendemain à 15h30 et il était 22h30 lorsque nous sommes arrivés au bar. J'étais en pleine forme comme d'habitude. La soirée était superbe, l'ambiance était parfaite et nous avons pu boire quelques verres. Nous avons peut être même bu quelques verres de trop, car nous nous sommes endormis au bar et nous y sommes restés jusqu'à 5h du matin. J'avais terriblement mal à la tête et je ne me sentais plus bien. Nous sommes alors sortis du bar pour retourner à notre hôtel. C'était la première fois que je voyais les alentours de la tour Eiffel désert. La journée s'apprêtait à commencer et le soleil se cachait derrière les nuages. La rue dans laquelle je me trouvais était très sombre. J'ai remarqué alors qu'une seule personne marchait dans la même direction que nous. Il n’était pas possible de discerner des détails sur l’homme, seulement sa silhouette. La brume qui couvrait Paris était très épaisse à ce
moment de la journée. Tellement épaisse qu’il était facile de perdre les traces de l'homme dans la brume. Il était sous un arbre et avait l’air petit à coté du gigantesque conifère. Il avait l’air mystérieux dans son grand manteau noir. Il était assez maigre, mais il n'avait pas l'air d'un type qui ne pouvait pas se défendre. Nous pouvions clairement voir tous les trois la tour Eiffel, qui se tenait grande malgré l’épaisse brume. Nous arrivions de plus en plus près de notre hôtel et l'homme avait ralenti. Nous l'avions dépassé. Je le trouvais de plus en plus louche et il commençait à me faire peur. J'ai commencé à marcher plus rapidement tout en regardant nerveusement autour de moi. Bobicho a lui aussi regardé. L'homme a disparu soudainement et nous ne l'avons jamais revu. Soulagé, nous sommes rentrés à l'hôtel pour ce reposer un peu. Il était 5h15 du matin et nous étions fatigués. C'était l'heure de dormir. Nous nous sommes réveillés à midi et nous sommes, moi et Bobicho, allé manger au célèbre restaurant McDonald’s. Nous avons chacun mangé comme des rois. Un vrai festin (joyeux festin avec le petit jouet, qui était à ce moment une poupée de Dora et Diego). Nous avons ensuite visité la tour Eiffel ainsi que les alentours. Après deux heures d'explorations, nous sommes allés visiter les célèbres musées d'art de Paris. Nous avons à peine visité deux musées (environ la moitié de chaque) et il était déjà le temps de partir à l'aéroport pour ne pas manquer le vol 19h15 pour retourner à Québec. Le temps passait si vite ! J'ai donc rentré avec Bobicho et discuté à propos de ce court voyage. Nous avions hâte de revoir nos enfants et notre femme. Après quelques heures de vol et quelques longues minutes de transport en voiture, j'étais rendu à la maison. Le lendemain, mes enfants étaient contents de me revoir. Même si mon absence avait été brève, je leur avais manqué. Ils m'ont demandé de leur raconter mon voyage, mais je n'avais bien évidemment rien de bien excitant à leur raconter. Ma femme m'a alors demandé : Comment s'est déroulée la réunion avec Ultramar, chéri ? C'est à ce moment que je me suis rendu compte que j'avais totalement oublié d'assister à la réunion, qui était la principale raison pour aller à Paris cette journée la.
LE FILM DE MA VIE Par Laurence Brousseau Le ciel ombragé couvre complètement le sol de Paris. Ce sol, noir, dure et froid. Un sol extrêmement vieux. Je peux voir la pierre décolorée et effritée par l’achalandage quotidien. Aucune ombre en vue. La place publique s’est vidée, aucun signe de vie. Je suis seule, sous cet arbre dépouillé de ses feuilles. De petits bourgeons annoncent le début du printemps. Les nuages sont lourds et l’air est chaud et humide. La tour Eiffel s’offre à moi. Je la contemple dans toute sa splendeur. Grande, mince et couverte par la noirceur, je la regarde. Les mains dans les poches de mon chandail noir, je réfléchie. Je recule de quelques pas et m'assois sur le banc qui me semble antique et usé par le temps. Un couple assis à côté de moi se lève et s’éloigne. Je suis maintenant seule. Je sais bien que traîner a cette endroit par une heure pareille est très risqué. Plusieurs viols et meurtres ont lieus ici. Pourtant tous les soirs je reviens. Tout à coup, la peur m’envahie. Comme à tous les soirs. Je me mets à courir dans les ruelles de Paris pour retourner le plus vite possible à mon appartement. Des gens me suivent en courant. Je tremble de peur et la clef peine à rentrer dans la serrure de la porte. Enfin. Je me couche sur le dos, habillée. Je fixe le plafond, blanc et moisi par endroit. Les murs jaunes délavés m’étouffes. J'entends le bruit des fuites d’eau provenant du plafond tomber lentement dans le sceau. La peinture s'effrite. Malgré les très fortes lumières qui m’entourent j’essaie de rester concentrée. Je fais semblant de m’endormir et enfin ma journée est finie. Et le lendemain, la même chose. La pression sur mes épaules et les lumières aveuglantes. Je suis encore sur la place publique et je regarde les gens passer. Et puis dans mon dos je sens une pression. Je panique. Cette pression. Elle me transperce. Comme une aiguille qui transperce le tissus. J’ai mal. Comme si un coup de couteau venait de me pénétrer la peau. Je me bouge de tous les sens et cette douleur persiste. Prise de panique je donne mon bras un élan et essaie de chasser cette chose. Je me tortille, je crie. Les gens me regardent, mais personne tentent de m’aider. D’ailleurs je ne comprends pas. Je me fais agresser et personne ne se soucie de moi. Je me décide enfin. Je prend mon courage à deux mains et enfin, je réussi à l'assommer. Je me retourne vers lui, nous nous regardons dans les yeux. Nous
ĂŠclatons de rire. Et puis, une voie nous crie: COUPEZ!
Le second passage Par Gabriel Chapadeau
Je me nomme Robert Coldman, commandant d’une escadrille d’avions dans l’armée américaine. Nous sommes en 1942 durant une guerre qui sévit mondialement. Il est 5 h 30 du matin et, à 11 h, nous allons faire une patrouille aérienne au-dessus de la mer. Un porte-avion allemand est entré dans le territoire occupé par l’armé américaine au front italien et nous voulons le repérer pour faire un raid aérien. Il est maintenant 9 h 30. Dans 1 h 30, nous allons partir pour notre patrouille aérienne. Mes hommes et moi savons que c’est dangereux, mais tout le monde a hâte de partir. Nous savons que si nous le repérons, les Italiens n’auront plus de support aérien pour au moins une semaine, ce qui va nous permettre de continuer notre avancée sur l’Italie. À 11 h 30, pendant la patrouille, je remarque qu’il y a du mouvement sur l’eau à notre droite. Je plonge pour m'approcher davantage et ce que je vois est impressionnant, probablement le plus gros porte-avion que j’ai jamais vu. Sans m’en rendre compte, je me suis fait repérer et les Allemands envoient une trentaine d’avions pour m'abattre. Tout de suite, je communique la position à mon escadrille et elle l’a communique à la base. Je me remets en formation de combat avec mon escadrille et on se prépare à se défendre. Nous nous mettons en diagonal, moi étant le point le plus en avant dans un ciel nuageux. Nos ailes sont proches et nos hélices tournent à plein régime pour avoir la plus grande vitesse pendant le combat. Une bataille aérienne de 38 minutes exactement s’en suit. Durant le combat, je remarque un avion étranger et je le prends en chasse. Je n’ai jamais vu durant ma vie un avion aussi rapide. Je me dis alors que c’est un nouvel avion allemand. Je le perds de vue, mais il revient vers moi. Avant qu’il ne puisse faire quoi que ce soit, je prends de l’altitude et je redescends en l’ayant en plein dans ma ligne de tire et puis je l’abats. Trois heure plus tard, le raid aérien est lancé sur le porte-avion et il coule. Notre escadrille a reçu l’ordre de rentrer avant le raid, mais après le combat pour que nous puissions nous reposer, car
nous avions fait un gros travail, soit de découvrir la position du porte-avions et abattre plusieurs de leurs avions sans n’avoir perdu aucun homme. Le lendemain, je rédige mon rapport de mission, heureux de ne pas avoir perdu d’homme, mais triste de ne pas avoir participé au raid contre le porte-avions. Je comprends qu’on nous ait fait revenir, car nous n’aurions pas pu rentrer sinon étant donné que nous n’avions plus assez de carburant. En 1944, le général m’a demandé d'essayer le nouvel avion. J’étais toujours en Italie et l’endroit que j’ai choisi pour voler est l’endroit où j’ai fait mon combat il y a deux ans. J’ai choisi cet endroit, car ça a été un point tournant pour les combats en Italie, car nous avons avancé comme nous n’avions jamais avancé et nous avons repoussé la ligne au-delà des frontières italiennes. 10 h 45 décollage, 11 h je mets le cap sur l’endroit destiné à mes essais. Midi, je suis arrivé à destination. Il me semble que je revois le combat comme un retour en arrière. Je vois les avions passer et se battre autour de moi. Je me revois en train d'abattre cet avion allemand pendant que les autres faisaient des poursuites. Je me revois prenant en chasse l’avion inconnu qui allait à une vitesse extrême, mais aujourd’hui je me demande si nos avions vont à la vitesse de cet étrange avion. Je sors du rayon de combat et je décide de refaire un passage même si ce n’était pas prévu. Je veux seulement revoir l’endroit de ce fameux combat une dernière fois. Je me lance dans ce nouveau passage. Je me revois il y a deux ans en train de prendre de l’altitude pour atteindre cet étrange avion. En regardant autour de moi, je remarque quelque chose de bizarre. Je vois tous les combats sous tous les angles sans même que je les ai vus. Je regarde autour de moi cherchant l’avion en question sans le trouver. Je lève les yeux et tout ce que je vois c’est l’avion dans lequel je me tenais il y a deux ans. À l’instant précis, je me rends compte que l’avion que j’ai abattu il y a deux ans c'était...
UN VENDREDI QUI TOMBE À L’EAU Par Mireille Trottier (DRING!) La cloche qui sonne marque le début de ma fin de semaine. Cette lourde cloche qui marque les lundis ennuyants, les mercredis heureux et les vendredis fous. Anormalement courte, celle-ci marque le début de ma liberté. Le début de la fin de semaine. Je longe le corridor en souriant et en courant pour parvenir à ma case. Dans quelques minutes, je suis libre. C’est vendredi. Le vendredi. Le jour où mes parents me laissent la maison. À moi seul. Je vais faire tout ce que je veux sans qu’il y ait cette mégère qui me demande mille et une corvées. À moi la liberté. Je regarde les gens qui sourient, car eux aussi ils sont heureux de la fin de semaine qui approche. Jamais ils ne le seront autant que moi. J’ai prévu une fin de semaine de rêve. Un vrai trip de gars incluant de la nourriture qui ne peut pas être plus grasse et des jeux vidéo à en faire de l’insomnie. J’ai l’impression d’avoir des papillons dans le ventre et les yeux bien ouverts. J’ai des fourmis dans les jambes et j’ai envie de courir partout dans la ville de Québec pour crier que je suis le chanceux à qui ses parents lui ont confié la maison. J’ouvre ma case et je prends mon sac ainsi que mon manteau. Je salue les quelques personnes autour de moi et je sors de l’école. J’ai mal aux joues et je me rends compte qu’un sourire plus grand que jamais est dessiné sur mon visage. L’avantage d’être en cinquième secondaire est d’avoir ma propre voiture. Une superbe Audi que mes parents m’ont offerte pour mes dix-sept ans. J’aimerais ouvrir le toit ouvrant pour que le vent passe en filet dans mes cheveux et pouvoir profiter de ce sentiment de liberté au maximum, mais l’hiver étant l’hiver, le toit ouvrant attendra. Je file à toute allure pour arriver chez moi. Ma maison étant dans la forêt, elle a l’avantage d’être immense, luxueuse, mais aussi fenêtrée de fond en comble. Je la trouve super belle, mes parents, eux, super chère. Les objets qui s’y trouvent sont luxueux et la décoration un peu excessive. Mais cela est mon opinion, car ma maison figure sur toutes les revues de décoration rendant ma mère super fière. Je descends de ma voiture. Soudain, je m’arrête et j’observe le paysage aux alentours. Et là, j'aperçois la chose qui me fera probablement le plus rire de ma vie. Dans ce paysage hivernal, de petites branches brunes ont réussi à se frayer un
chemin dans l’épaisse couche de neige. L’oxygène aux alentours est pure et je sais qu’en approchant mon doigt des branches, elles seront rudes et sèches. L’odeur d’une fine brise qui commence en fin de soirée se loge dans mes narines. La neige est blanche. Très blanche. Comme si elle était pure. Quelques bourgeons se logeaient sur le peu de branches qui tapissaient le sol. Ils étaient faibles et semblaient ne jamais vouloir éclore. Au milieu de ce décore hivernal banal, se trouve un écureuil. Sa tête est complètement enfouie sous la neige et sa queue couverte de poil sort en dehors avec ses pattes. Cette scène ressemble étrangement aux films Ère de glace dans lequel un écureuil fait plein de folies pour retrouver sa noix. Je ne pus m’empêcher de rire à un point tel que j’étais couché sur le dos complètement hypnotisé par cette scène qui avait autrefois marquée mon enfance. L’écureuil est réellement coincé dans cette position. Après avoir ri seul comme un fou, je décide d’aller à l’intérieur afin de commencer la fin de semaine que j’ai planifiée depuis toujours. Je vais me chercher un bol de chips et m’installe sur mon fauteuil positionné devant la fenêtre. L’écran géant devant moi projette le film Hangover. Certaines parties se déroulent la nuit donc l’écran devient souvent noir. Pendant que l’écran est complètement noir, la télévision devient miroir et me renvoie une image de moi. Beau bonhomme. Mais la télévision ne renvoie pas seulement une image de moi. Dans la fenêtre située juste derrière moi, je vois un homme. Il a environ quarante ans et il me fixe. Mes membres se mettent à trembler. Je sens ma mâchoire qui claque légèrement. Je réfléchis vaguement et rapidement pour en venir à une conclusion : pourquoi un homme me fixerait-il? Je suis persuadé qu’il va me tuer, voler ma maison ou j’imagine une foule de scènes possibles. Je regarde une deuxième fois pour être certain que mon imagination ne me fait pas faux bond. Il est vraiment là. J’en suis certain. J’ai maintenant des sueurs froides et je suis incapable de me lever du fauteuil sur lequel je suis assis. Mes yeux fixent avidement l’écran de télévision. Je ressens un mélange d’adrénaline et de peur profonde. Je ne sais pas quoi faire. C’est la panique. Je dois prendre une décision rapidement. Que faire? Crier? Courir? Sur un coup de tête, je me lève naturellement. Je longe le corridor menant à la salle de bain et j’entre dans celle-ci. J’appelle le 911. Je me trompe quatre fois de numéro tellement mes doigts
tremblent de peur. Pendant qu’une voix féminine rassurante me parle au bout du fil, j’entends un bruit de porte. J’avais oublié de verrouiller la porte. L’homme devait être entré. Ça y est, il me cherche. Je supplie la police de venir au plus vite. Je suis totalement paniqué. Je cherche une cachette. Je deviens complètement fou. Trahi par la peur. Ma virilité : au diable! J’attends dans la salle de bain, tremblant de peur. Je crois sentir une présence. Qu’est-ce que cet homme me veut? Il va me tuer. Me torturer. Ma fin de semaine de rêve est fichue. Mes parents vont s’en vouloir de m’avoir laissé seul. Ils vont le poursuive en justice. Ils vont pleurer pour ma mort. La police va-t-elle arriver? Vais-je mourir? Je dois me battre. La dame de la police m’a dit de rester là. Depuis quand j’écoute les adultes? Mes mains tremblent. Elles sont plus moites que jamais. J’entends le tintement d’une sirène. La police est là! Elle est là! Je sors de la salle de bain. Cours. Et je vais vers la police. Je leur explique brièvement la situation. Ils me demandent si je vais bien. Ils disent que je suis blême. Ils entrent. Ils ne trouvent personne. Aucune trace de pas dans la neige près de la fenêtre. Aucune preuve. Il n’est plus là. Puis, les policiers me crient de venir. Dans la maison, entre la fenêtre et le fauteuil : une flaque d’eau.
COUP DE TÉLÉPHONE Par Eve Ehouarne
C’est une nuit comme toutes les autres pour elle, mais pas pour moi. Cette nuit est la nuit qui va définir le reste de mon existence, si je vais continuer de vivre dans le malheur ou si je vais trouver la route menant au bonheur. L’amour, la mort, l’espoir, la haine, tellement d’émotions confondues... Cette fois, elle ne m’échappera pas.
Cette femme avec qui je vis est tout simplement parfaite. Aimée de tous, pleine de joie de vivre, avec un rire cristalin, généreuse, toujours prête à aider qui que ce soit, mais surtout riche. Riche à en sauver tous les pauvres des rues de Paris. Et c’est tout ce que je veux. Ce que nous voulons, moi et la vraie femme de ma vie, car j’ai une maitresse qui se cache derrière cette femme dont je déteste l’existence, mais avec qui j’ai dû me marier pour plaire aux désirs d’argent de ma merveilleuse dulcinée et contre qui nous avons formuler ce plan fantastique pour avoir tout son argent. Cela fait des années que nous nous sommes préparés, nous sommes prêts à attaquer.
Il y a plusieurs années, mon amoureuse m’a annoncé que nous n’avions pas assez d’argent pour vivre comme elle le désirait, et que si je désirais la garder, il me fallait suivre son plan, que j’ai tout de suite suivi pour pouvoir rester avec elle. Je devais charmer cette femme pour ensuite la marier et la tuer pour hériter de tout son argent. De cette façon, nous aurions assez d’argent pour vivre riches jusqu’à notre mort.
La charmer fut un jeu d’enfant. J’ai joué la carte de l’homme qui ne s’intéresse nullement à l’argent et elle est littéralement tombée dans le panneau. Après quelque mois au lit, je l’ai finalement demandée en mariage et elle a immédiatement accepté. Cette partie du plan plaisait moins à ma douce, mais c’était la seule chose à faire.
Maintenant que cela fait un an que nous sommes mariés, ma belle m’appelle à chaque semaine pour savoir où en est rendu le plan, mais je lui ai dit que je ne savais comment organiser cela. Elle m’a dit d’aller chez le notaire pour léguer notre héritage l’un à l’autre, moi aussi à elle, car ça fait plus crédible, et que, de cette façon, personne ne se doutera de notre plan. Maintenant, il est grand temps de le mettre en action. Cela ce passe ce soir.
L’atmosphère est parfaite. Même les rues les plus fréquentées de Paris sont vides à cause de la pluie et de la brume. Les arbres ont l’air tristes, les branches vers le bas comme s’ils allaient nous captuer dans leurs feuilles. La tour Eiffel n’est visible qu’à moitié tellement les nuages sont bas, le sol est humide et la façade des grands immeubles semble plus grise qu’à l’habitude. L’Arc de Triomphe est peu entourée d’automobile contrairement à son habitude et les quelques touristes la contemplant sont couverts d’un manteau et se dépèchent à rentrer. Personne ne verra, personne ne le dira.
Je l’ai invitée dans un des plus grands restaurants de Paris qui se situe dans un quartier reculé, il sera donc facile de sortir et de l’ammener dans un coin. Je lui volerai ses bijous et son argent pour faire croire à un vol qui a mal tourné et je vais lui tirer une balle en plein coeur. La pauvre, folle de moi, ou plutôt de l’image qu’elle s’est faite de moi, elle ne s’y attend pas du tout, elle me croit amoureux d’elle jusqu’au oreilles et prèt à donner ma vie pour elle, mais elle ne réalise pas à quel point ce sera elle qui donnera sa vie pour moi.
J’ai espoir et confiance que tout se passera comme prévu. J’aime tellement ma douce que cette femme que j’ai épousé me répugne et cela ne me cause aucune peine de prendre sa vie pour plaire à celle qui est l’élue de mon coeur. Tout va bien se passer, et bientôt nous serons heureux ensembles dans la grande maison que nous avons prévu acheter. Une balle pour une maison, le compromis est bon, non?
Nous venons de rentrer dans le restaurant. Les serveurs sont souriants, les plats ont l’air délicieux, mais il me tarde de sortir. Elle n’arrête pas de parler, mais qu’elle arrête bon sang! Mange qu’on en finisse! Maintenant que le moment approche, je sens que je vais peut-être craquer, je ne sais plus comment je vais procéder. Et puis zut, j’improviserai.
Cela fait vingt minutes que j’ai fini mon plat. Elle n’a pas fini et veut un dessert, quelle ingrate! Elle retarde tous mes plans! Je suis sensé rejoindre ma douce à minuit, elle ne sera pas contente d’attendre pour moi. Parle, parle, de toute façon, d’ici une heure, tu ne le pourras jamais plus...
Nous sortons enfin du restaurant. Elle ne semble pas dérangée du fait que nous prenions un chemin qu’elle ne connait pas, elle en semble même heureuse. Pourquoi les femmes trainent-elles toujours leur sacoche partout? Ça fait du bruit cette breloque, il me faut m’en débarasser. Je m’approche pour la lui enlever, je lui prend le bras gauche et je sens une douleur au bas ventre qui me transperce. Je baisse les yeux et je vois un trou de sang. Lorsque je les relève, je la vois qui m’observe, les larmes aux yeux mais résignée, et qui me dit:
“La prochaine fois que t’essaye d’avoir une riche pour plaire à ta maitresse, assure-toi que personne n’écoute au téléphone!”
UN SILENCE DE MORT Par Rosalie Talbot Dans son immense sous-sol avec ses deux divans disposés pour un « L » devant la télévision assez vieille à l’écran poussiéreux et sa petite table en bois ronde où on y avait déposé un grand verre d’eau fraîche presque à rebord, un père faisait une discussion sérieuse à l’ambiance froide et peu chaleureuse à sa fille aînée. Le sous-sol était devenu aussi sombre qu’une salle d’interrogatoire dans un poste de police, le planché était en tuiles de céramique très froides, les murs bleus et ternes avaient l’air encore plus décolorés que d’habitude et rester assis sur le divan devenait insupportable et inconfortable. « Qu’est-ce qui te tracasse le plus ma chérie? » Elle répondit par un long silence, des larmes perlaient sur ses joues. Elle fixait tristement le sol et ses genoux sans poser un regard sur son pauvre père qui lui demandait ce qu’il n’allait pas. « C’est l’école qui te met dans cet état, n’est-ce pas? Je sais que ce n’est pas facile le secondaire, j’ai moi aussi dû passer par cette étape comme Maman et tout le monde », continua-t-il calmement. Il ne s’attendit pas à avoir une réponse directe de sa fille qu’il connaissait depuis des années comme étant réservée et pas très bavarde, spécialement quand on lui demandait des nouvelles de sa journée et comment elle se sentait. « Ton problème n’est pas impossible et peut être réglé, tu sais. » Il fit une pause pour laisser le temps à sa fille de réfléchir avant de continuer. « Je veux t'aider, mais saches que la solution-miracle n'existe pas. » Elle ne bougea pas d'un poil, elle gardait sa position comme pétrifiée sans même dire un mot. On pouvait aisément la qualifier de statue de pierre. « Bien que je t'aide à sortir du mieux que je peux de ton problème, il faudra que tu acceptes de sortir de ta zone de confort. » Il prit une gorgée d'eau. Son regard était concentré sur sa fille. Il commençait à être tard et la fatigue se mettait à l'œuvre. L'heure avançait et le tic tac de l'horloge résonnait à chaque seconde qui devenait de longues et interminables minutes. « Ce n'est pas nous qui devrons faire tout le travail pour toi. Je suis certain que tu t’en doutais depuis déjà un bon moment, mais je dois te l’avouer, c’est toi qui auras faire les plus gros efforts. » Il prit une grande inspiration pour rendre ses pensées plus claires. Ça n'a jamais été facile de convaincre sa fille à agir, peu importe qui lui demandait. Elle resterait quand même dans sa bulle ou plutôt renfermée dans sa carapace couverte d'épines. Ainsi personne ne pouvait l'approcher ou lui parler. Sa fille était comme un porc-épic ou un hérisson : timide, craintive, ne voulant rien savoir des autres, renfermée...
« Le plus difficile sera de faire le premier pas. Il y aura bien sûr des réussites et des échecs, mais il ne faut pas s'attarder que sur les échecs. Il faut garder la tête haute et continuer sa vie malgré les embûches. » Puis, il se souvint d'un très bon exemple qui lui avait raconté maintes fois. « Te souviens-tu du trou au beau milieu de la route? Tu sais, ce tout petit trou au beau milieu de ton chemin que tu ne peux pas quitter des yeux et qui t'empêche d'avancer. Ce minuscule trou qui est ton problème. Il faut simplement le contourner tandis que le problème, lui, il faut le résoudre. » Cela faisait déjà un bon moment qu'il parlait. Sa fille ne lui avait dit aucun mot depuis le tout début de la conversation. Elle restait muette laissant le silence envahir toute la salle. « Pourquoi ne nous as-tu pas dit ton problème avant pour qu'on puisse t'aider? Est-ce parce que tu n'avais pas confiance en moi et nous, ta famille? Ça me rend triste de voir ma propre fille souffrir ainsi. Non seulement à moi, mais à tous tes cousins, tes oncles et tes tantes, ta famille… et même tes quelques amis, j’en suis convaincu », insista le père pour remonter le moral de sa fille adorée. Il baissa la tête en signe de défaite, sa fille resta inconsolable. Il contempla sa fille un long moment. Rien n’avait changé, mis à part le verre d’eau désormais rempli qu’à moitié. Il se leva lentement et jeta un dernier coup d’œil à la posture courbée de son enfant. « Même si j’essaie de te redonner raison, rien ne te fera changer d’avis, je suppose. » Le père tourna les talons s’éloigna de la pièce. À mi-chemin de l’escalier qui menait à l’étage supérieur, il ajouta : « Dommage que tu aie abandonnée si vite, je croyais en toi pourtant. J’espère que tu auras entendu et réfléchi à mes paroles. J’aurais tellement voulu passer plus de temps à te parler. Je dois me rendre à l’évidence, tu as perdu tout espoir. » Il était déchiré de devoir laisser sa fille toute seule pour aller rejoindre le reste de la famille qui s’apprêtait à souper. « De plus, sans prévenir, tu as décidé de régler ton problème à ta manière et tu nous as laissé un trou parmi la famille. Tu as ingéré des somnifères en énorme quantité et tu t’es endormi sans te réveiller. Tu t’es laissé mourir dans une mort paisible, au moins, tu t’es suicidée. Cette réalité nous marque tous au fer rouge et nous hante dans notre tristesse. Nous procèderons aux funérailles sous peu et, ne t’inquiète pas, il y aura effectivement du monde qui viendront pleurer sur ta tombe, je te le promets. », conclut-il avant de monter.
- Petite note discrète de dernière minute par l’auteure : Je tiens à souligner que cette nouvelle m’est inspirée d’un fait vécu par quelqu’un que je connais bien, mais qui a été romancée pour les lecteurs. Cette note a pour but d’informer tous lecteurs de ce texte pour qu’ils « respectent » le contenu de ce document. Merci de votre compréhension chers lecteurs et chères lectrices. - Rosalie.
OÙ SUIS-JE Par Philippe Blais
Bekasi, Indonésie. 26 décembre 2004, 9h03. On m’appelle. Moi, Kusumo, 27 ans, yeux bleus et cheveux blond. Avec mon mètre et 80, oui, je suis grand. On m‘a toujours demandé pourquoi je suis comme ça. Les gens de mon peuple, les Indonésiens, sont généralement brun aux yeux tout aussi bruns. Oui, on m’appelle. C’est mon frère, mon idiot de frère qui, pour la mille et unième fois a fait quelque chose. Mais quelque chose de mal, très mal. On me dit qu’il est emprisonné au centre de Yayasan Galuh. Il a mangé le visage d’un homme, car celui-ci lui a dit qu’il était dans le chemin.
9h37. Je suis arrivé à Yayasan Galuh. Je suis étonné de voir dans quel pétrin mon frère s’est fourré. Je ne suis jamais allé dans cet endroit. J’en ai entendu parler, ça oui, cet endroit est très connu, mais pas pour les bonnes raisons. Cet édifice, aussi inoffensif peut-il avoir l’air, renferme les criminels les plus dangereux d’Océanie. Je rentre, je suis stressé à l’extreme. J’ai peur d’affronter mon frère, encore plus peur d’affronter sa réaction quand il comprendra que je ne le ferai pas sortir. Pas cette fois-ci. Il crevera dans cette prison, dans cet asile de fou, parce que, oui, c’en est un.
Je demande à voir mon frère. - Je viens voir Sagato Kahumi, dis-je. - Vous avez 5 minutes, dit le gardien.
La porte qui mène à mon frère s’ouvre enfin. La vision que j’ai me détruit: mon frère, attaché par la cheville gauche à un poteau de soutien de la structure. Je vois facilement qu’il a été humilié, probablement par d’autres détenus qui sont plus dangereux encore que lui. S'il n'était pas mon frère, je rirais. Mais malheureusement, c’est le cas. Il est habillé d’une jupe écossaise, du genre d’un kilt, et il porte une camisole de femme. Il a l’air détruit, mais incroyablement fou. Je ne dois pas, je ne peux pas oublier le but de ma visite: dire à mon frère qu’il devra vivre l’intégralité de sa peine, et mourir
ici s’il le faut. J’entends à la radio qu’il y eu un tremblement de terre dans l’océan Indien, un séisme puissant, d’une magnétude de 9,2 sur l’échelle de Richter. Je m’en contrefous. On dit aussi qu’il y aura des victimes, mais bon, tant pis pour eux. Je m’approche de mon frère, il est détruit, mais je vois très bien la folie sur son visage. J’ai peur, peur de mon propre frère.
-Kusumo!! me crie-t-il. - Sagato, tais-toi, je suis pas venu ici pour te faire sortir, je suis venu pour te dire que tu vas rester ici jusqu’à ta mort, dis-je. -Mais pourquoi?!?! -Tu as mangé un mec! Il se tait, enfin. Je suis heureux qu’il soit enchaîné, parce que sinon, je serais sa prochaine victime. Il est fou de rage, je le vois. S'il le pouvait, il me mangerait. Il me tuerait, lentement mais surement.
Je vois que les infirmiers et les docteurs s’agitent de plus en plus dans la pièce voisine. Je ne comprends pas trop, mais bon, il doit y avoir quelqu’un, un de ces fous, qui a besoin qu’on le pique. Je suis quand même heureux de ma vie, je n’ai peut-être pas le meilleur salaire, pas de petite amie, et même pas beaucoup d’amis tout court, mais au moins j’ai toute ma tête, et ça, personne ne peut me l’enlever. Mon frère me fixe, mais ne me parle pas. Tout à coup, après m’avoir regardé de fond en comble, il me dit: -Je vais sortir d’ici, et tu le sais. Je me suis sorti de plusieurs prisons sans problème, et quand je te retrouverai, tu vas mourir, je te le promets. Ou sinon, tu vas le payer, parce que je ne ferai pas cette sentence au complet, frèrot.
Tout à coup, une des infirmières crie. Elle crie des choses que personnes n’a l’air de comprendre. En gros, ce que je comprends, c’est: -PRÉPAREZ-VOUS...SÉISME...DANGER...ABRITEZ-VOUS...
Je crois faire un cauchemar, je vais devoir passer la nuit dans un asile...
Tout à coup, le bâtiment se met à vibrer de façon étrange. De l’eau arrive par les portes. J’aperçois des poutres qui tombent du toit. Je vois des gens qui en reçoivent sur la tête, et puis... Plus rien.
...
Bekasi, Indonésie. 28 décembre 2004, 12h47. On m’appelle. Moi, Kusumo, 27 ans, yeux bleus et cheveux blond. Avec mon mètre et 80, oui, je suis grand. On m‘a toujours demandé pourquoi je suis comme ça. Les gens de mon peuple, les Indonésiens, sont généralement brun au yeux tout aussi bruns. Oui, on m’appelle. L’infirmière me dit que quelqu’un vient me voir. Mon frère paraîtrait-il. Depuis quand ai-je un frère? Depuis que je me suis réveillé, ici, au centre psychiatrique de Suryani, on me dit que j’ai tué quelqu’un. Je lui aurais mangé le visage parce qu’il était dans le chemin. Avant, j’étais dans un autre centre psychiatrique, celui de Yayasan Galuh. Je ne me rappelle plus de rien, mais je me dis que si je suis ici, c’est qu’il y a une raison. Mon frère arrive. Il a l’air étrange. Il doit être déconcerté de me voir dans cette état.
Il arrive près de moi, s’accroupit, et me dit: -Je te l’avais dit, je ne ferais jamais ma sentence. C’est ma vengeance. -Quoi?!?! Mais pourquoi dis-tu ça!?!? dis-je.
Il s’en va.
Dehors, je vois Sagato, mon frère, qui s’en va. Il ne m’aidera pas, je n’aurais pas dû tuer cet homme. Sagato s’en va. Il ne me soutiendra pas, même après ce tsunami. Non, mon frère me laisse tomber. Mon frère jumeau.
LE MEILLEUR AMI Par Antonin Balleux-Lamoureux
Enragé et attristé, je finis d’écrire un bref résumé de ma vie, et le relus avant ma mort: Je n’ai aucun avenir. Je ne choisis rien. Je n’aurais jamais dû naître. Chaque matin je me lève, espérant ma libération de cette tâche éternelle, cette tache qui me colle à la peau.
Quand j’étais jeune, j’ai vécu dans une maison qui nous appartenait, à papa, maman et moi. Un jour, alors que je jouais avec mon ami, des hommes portant des bâtons tueurs et des robes rouges arrivèrent. Je ne les avais jamais vus auparavant ! Ils me faisaient très peur, parce qu’il restaient toujours trop sérieux. De plus, ils n’étaient pas gentils avec les gens. Quelques temps plus tard, papa me dit que nous partirions en bateau avec ces hommes en rouges. Je ne voulais pas. Je lui ai dit tout ce que je pouvais, je me suis débattu, mais il n’y avait rien à faire.
Le voyage fut long. Arrivé là-bas, nous fûmes séparés de maman et échangés contre des bouts de papiers et des pièces de métal. Papa fit tout pour que nous restions ensemble, mais hélas, il échoua...
Avant qu’on me vende, j’étais tout de même heureux, parce que j’avais maman et papa avec moi, mais maintenant je n’ai plus que Basil, mon meilleur ami. Je l’ai rencontré quand je suis arrivé à la maison de mon acheteur. Basil a un traitement quotidien semblable au mien, excepté quelques privilèges de plus, étant donné qu’il est là depuis plus longtemps et qu’il n’est pas noir comme moi. Il faut aussi savoir qu’il est plus vieux.
Chaque jour, nous nous levons très tôt. Le travail dans le champ de blé commence pour moi. Je suis en charge d’une partie des champs et je m’en occupe de février jusqu'à novembre. Mais je ne m’ennuie pas l’hiver pour autant! Le maître, celui qui m’a acheté, me trouve toujours du boulot.
Basil, lui, a des tâches légèrement différentes. Parfois, il a la chance de s'occuper des enfants: il joue avec eux et veille à ce qu’ils ne se blessent pas. L’autre jour, le but de leur jeu était de l'attraper! De temps en temps, il va avec le maître de la maison pour chasser la perdrix. S’ils font une bonne chasse, il lui laisse manger une de ses nombreuses proies, ce qui était tout un honneur et une chance, vu la mince ration de nourriture que nous avions quotidiennement.
Malgré cela, Basil reste comme moi. Nous mangeons tous les deux les mêmes aliments, buvons la même eau et partageons nos plats. Après chaque jour de dur labeur, nous allons dans l'abri que nous avons agrandi durant mes premières nuits, avec le peu que nous avions, et nous dormons dans celle-ci. Elle est en piètre état: des trous laissent entrer le vent froid et la pluie, ce qui me réveille régulièrement en pleine nuit et le plancher de boue est parfois tout mouillé et collant. Les conditions sont difficiles!
La balle qu’on m’avait tiré dessus commença à m’affaiblir de plus en plus. Mes vêtements, entièrement tachés de sang glacé, déchirés et usés par le temps, les voyages, les aventures, ne pouvaient plus rien contre les bourrasques de vent glaciales qui transperçaient mes blessures récentes, et meurtries. Ma peau toute grise , et rouge par endroit, me rappelait que j’avais besoin d’un bain, et qu’un peu de soleil ne me ferait pas de mal.
Je levai les yeux, et regardai pour la dernière fois le magnifique paysage où je vécus les six dernières années de ma vie: la montagne qui me faisait face était imposante. Je me sentais peu à peu perdre la vie, gelé par la beauté époustouflante de la nature. La montagne avait un aspect mystérieux et noble: elle était faite de pierres sombres, pointues, affilées par le temps, le vent et les nombreuses tempêtes de neige et de pluie. Un grand manteau blanc d’hiver couvrait en partie ce mont majestueux. Il régnait sur la région environnante, sur les grands pins et le peu d’arbres dépourvus de feuilles, comme un roi sur son royaume et son peuple. Soudainement, la neige qui le couvrait s'envola dans un élan brusque, et forma un rideau blanc d’illusions qui me fit rêver à la suite, à la
mort. Devais-je avoir peur de celle-ci, ou était-ce une libération? Ma réflexion fut stoppée par un petit point qui s'agitait au loin. Un petit garçon?... non... un animal à quatre pattes! Il arrivait en courant dans ma direction. Je le reconnus aussitôt: c’était le chien de mon maître, qui avait survécu à la fusillade. Je me collai à mon bon compagnon qui reprenait son souffle. Avant de rendre l'âme, je sentis le besoin de lui dire quelque chose: - Bon chien... j'espère que tu sauras survivre, Basil...