La Bible Steampunk - extrait

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« L e

pa s s é e s t u n f u t u r q u i e s t d é j à a r r i v é . » B r u c e S t e r l i n g , c o au t e u r de L a M achin e à di ffér ence s.

Splendidement illustré, cet ouvrage vous invite à un voyage extraordinaire à la conquête du steampunk, univers alliant science et merveilleux dans un xix e siècle futuriste. Mouvement d’abord littéraire qui compte Jules Verne et H.G. Wells parmi ses illustres pionniers, le steampunk se réinvente sans cesse depuis la révolution industrielle, au sein d’une communauté internationale d’artistes et de créateurs revisitant la grande ère victorienne. Par son abondante iconographie et les nombreuses interventions des personnalités du genre, ce guide indispensable vous fera découvrir la richesse de toute une culture en expansion. Entre châteaux ambulants et dirigeables baroques, plongez dans une histoire revue et corrigée par les adeptes du monde entier, via les romans, le cinéma, les œuvres d’art et les reconstitutions historiques. À la fois enquête, manifeste et Bottin mondain, cette bible explore le passé et le présent du steampunk… pour mieux imaginer son avenir.

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Colette Carrière, Arnaud Demaegd et Marie-Aude Matignon Design de couverture : © Abrams Image ISBN : 978-2-35294-725-7

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BIBLE STEAMPUNK Dirigeables, corsets, lunettes d’aviateur, savants fous et littérature étrange : guide illustré d’un monde imaginaire Jeff VanderMeer avec S.J. Chambers

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Colette Carrière, Arnaud Demaegd et Marie-Aude Matignon Avec la contribution de Desirina Boskovich, Libby Bulloff, G.D. Falksen, Rick Klaw, Jess Nevins, Jake von Slatt, Bruce Sterling et Catherynne M. Valente

B rag e l o nn e


S.J. Chambers dédie ce livre à Josh Johnson, Aleks Sennwald et à ses parents Joseph et Sonja Chambers. Jeff VanderMeer dédie ce livre à Ann VanderMeer, Leslie Anne Henkel, Matt Staggs, Jake von Slatt et à son agent qui le supporte depuis si longtemps, Howard Morhaim.

Collection dirigée par Stéphane Marsan et Alain Névant

Ce livre est également disponible au format numérique

Titre original : The Steampunk Bible Copyright © 2011, Jeff VanderMeer Originellement publié en langue anglaise en 2011 par Abrams Image, une marque de ABRAMS Tous droits réservés pour tous pays par Harry N. Abrams, Inc. © Bragelonne 2014, pour la présente traduction ISBN : 978-2-35294-725-7 Bragelonne 60-62, rue d’Hauteville – 75010 Paris E-mail : info@bragelonne.fr Site Internet : www.bragelonne.fr Achevé d’imprimer en janvier 2014 Dépôt légal : février 2014 Imprimé en Italie 35294725-1


Sommaire Contents ///////////////////////////////

C’est un univers mécanique, Victoria

Mesure de la masse critique du steampunk - 6 Un voyage imaginaire vers le passé

Les origines du steampunk chez Verne, Wells et la révolution industrielle - 16 Automates métalliques, dirigeables baroques et univers mécaniques

Fictions, récits graphiques et secrets de l’histoire - 46 Du Forevertron à la Fusée Raygun et au-delà

Création, art, artisanat et légitimité esthétique - 90 Permanentes, lunettes d’aviateur, corsets, guitares mécaniques et navires volants imaginaires

Mode, accessoires, musique et sous-culture steampunks - 130 Lanternes magiques, armadas de robots, diapasons géants et châteaux ambulants

Le steampunk au cinéma et à la télévision - 176 Le futur du steampunk

Les rouages d’horloge, les corsets mécaniques et les dirigeables suffiront-ils ? - 200 À propos des auteurs Remerciements Index

- 220

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C’est un

univers mécanique, VICTORIA ///////////////////////////////

Mesure de la masse critique du steampunk ///////////////////////////////


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« À demi aveuglé par les projecteurs, j’ai regardé le public depuis la scène. Combien de gens y avait-il ? Mille ? Cinq mille ? Impossible à dire. Ce qui était sûr, c’est que nous étions tous steampunks. Certains portaient des costumes victoriens aussi complets qu’exacts ; d’autres, plus nombreux encore, combinaient vêtements d’époque, accessoires punks et gothiques, et divers éléments typiques de la littérature pulp ou des aventuriers de séries B. L’assistance arborait corsets, gilets, jupes, kilts, sahariennes, hauts-deforme et lunettes protectrices, et ce, sans distinction de sexe. J’étais loin d’être à l’aise, mais je n’étais pas seul : le groupe steampunk Abney Park était sur scène avec moi. Je me suis tourné vers le chanteur, Captain Robert, et lui ai demandé : “On y va ?” Plié en deux au-dessus de la console, il farfouillait dans les câbles. Il s’est retourné, a souri, et a répondu : “Quand tu veux !” » Jake von Slatt, Convention californienne du steampunk, San José, octobre 2008 ///////////////////////////////////////////////////////

Au moment où Jake von Slatt, fondateur du Steampunk Workshop, montait sur scène, le mouvement avait déjà atteint sa masse critique à la suite de la publication de l’article de Ruth La Ferla, « Le Steampunk : d’un monde à l’autre », dans la colonne Style du New York Times du 8 mai 2008. Si le papier peinait à décrire l’impressionnant épanouissement de ce mouvement rétrofuturiste, puisant ses racines dans la fascination pour l’ère victorienne et l’œuvre de Jules Verne, il eut le mérite de présenter le steampunk à un grand public et, sans doute, de lui donner une légitimité. Tout à coup, des projets comme la Cabane dans l’arbre steampunk de Sean Orlando (page précédente) devinrent les fers de lance d’une esthétique qui ne s’adressait plus à une élite ; les bricoleurs comme von Slatt étaient désormais des rock stars. Depuis l’invention du terme steampunk par l’auteur K.W. Jeter en 1987, le mouvement avait plusieurs fois failli exploser au grand jour. Pourtant, cela prit plus de trente ans. D’une certaine manière, pour accéder à la véritable popularité, il devait prendre ses distances avec ses

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racines littéraires et s’intégrer au vaste monde. En effet, la majorité des gens qui se réclament aujourd’hui du steampunk n’ont pas lu sa littérature et prennent modèle sur l’histoire, les médias visuels, et les fashionistas à l’origine de cette sous-culture dès les années 90. Qu’est-ce que le steampunk ? Le présent ouvrage explore la question, mais voici, en guise de première réponse, une équation que j’ai créée pour la couverture d’un carnet du designer anglais John Coulthart : Page prÉcÉdente

Steampunk = Savant fou [invention (vapeur × dirigeable ou homme de métal / style baroque) × cadre (pseudo) victorien] + politique progressiste ou réactionnaire × récit d’aventures

La Cabane dans l’arbre steampunk, création de Sean Orlando, photographiée par Zach Wasserman au festival Burning Man

J’admets que cette description est quelque peu second degré, voire restrictive, mais elle résume bien l’attrait de la fiction steampunk et du mouvement qu’elle a engendré. Il s’agit d’abord d’un regard vers le passé et le futur. Ensuite, le steam­punk évoque l’aventure et le désir de décou­­­­verte. Enfin, il utilise des techno­­­­­logies différentes et obso­­­­lètes pour parler de l’avenir. Ces quinze dernières années, le steampunk, au départ mouvement litté­­raire, est devenu un mode de vie et un aspect de la culture pop. Son esthétique a imprégné les films, les comics, la mode, l’art et la musique et apporte sa saveur à des événements emblématiques comme la Maker Faire et le festival Burning Man. De plus, l’adjectif « victorien » est désormais si malléable qu’il ne renvoie plus aux limites historiques du règne de la reine Victoria (1837-1901). Pour un steampunk, il peut inclure l’ère édouardienne qui a suivi (1901-1910) ou servir de fourre-tout pour évoquer la révolution indus­ trielle. Poussé à l’extrême, le terme peut renvoyer aux clichés dénués de fondements historiques popularisés notamment par le cinéma. Il arrive parfois que les créateurs s’appuient aussi sur des influences extérieures à l’ère victorienne. Le nombre d’or, la voiture escar­­­­ got de Jon Sarriugarte et de Kyrsten

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Couverture du carnet de John Coulthart présentant l’équation steampunk

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Le nombre d’or, de Jon Sarriugarte et Kyrsten Mate

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Mate, s’inspire des marionnettes françaises, d’une scène des romans du Dr Dolittle et du concept de nombre d’or, dont on pense depuis la Renaissance qu’il représente mathématiquement un idéal de beauté. Si l’inspiration ne vient pas toujours de la littérature, c’est peut-être parce que les adeptes vivent leur propre fiction. Il est fréquent que les artistes et les partisans du mouvement s’inventent une identité steam, ou « steamsonnalité », ainsi qu’une mythologie personnelle. Cet élément essentiel de la transformation, qui emprunte énormément à la culture des jeux de rôle, ne relève pas de la frime ; il s’agit de la contribution d’individus pleins de tendresse pour cette culture, mais aussi d’un moyen pratique de se mettre dans un état d’esprit créatif. Ces derniers temps, le steampunk a dépassé le cadre de la culture populaire ; les créateurs sont devenus de véritables activistes qui utilisent des technologies viables, progrès dont le SteamPunk Magazine britannique est un fer de lance. Le mouvement attire des gens de divers horizons politiques, de différentes origines ethniques ou sociales. La popularité du steampunk – son rythme de croissance incroyable, quasi viral – fait l’objet et se nourrit de nombreux reportages dans les médias nationaux et internationaux, notamment dans des publications comme le New York Times, Newsweek, Wired, Popular Science et Nature.

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Chacune met un aspect spécifique en avant : la colonne Style du Times s’intéresse principalement à la mode vestimentaire steampunk. Les magazines de technologie parlent de ceux qui fabriquent et modifient des objets à la façon victorienne. La revue Nature, quant à elle, a choisi le point de vue des sciences et de l’éducation : « Le steampunk est à la science ce que les reconstitutions de batailles de la guerre de Sécession sont à l’histoire… les gens impliqués – souvent des scientifiques et des ingénieurs – s’intéressent à l’histoire des sciences. Leur méthode consiste à recréer, en convertissant des lampes électriques en lampes à pétrole ou en fabriquant des appareils télégraphiques pour taper en morse des contenus Internet. Leur engagement devient d’autant plus satisfaisant qu’il est personnel et tangible. » (6 mars 2008) Dans ses meilleurs jours, le steampunk est positif et exhaustif dans ses perspectives, et encou­­ rage une imagination utile, fondée sur la fantaisie et l’aspect pratique des créations. Si certains cherchent uniquement à s’évader en utilisant le décorum de l’ère victorienne sans regard pour l’impérialisme et les inégalités sociales qui avaient cours à l’époque, beaucoup consi­­­ dèrent leurs propres efforts comme un moyen de mettre en avant le meilleur de la période tout en corrigeant ce qu’elle avait de pire. Aujourd’hui, il existe des enclaves steampunks dans le monde entier, ce qui donne à cette culture un caractère véritablement international. Qu’est-ce qui pousse tant de gens à adhérer au mouvement ? L’attrait pour le steampunk dépasse le cadre de la mode vestimentaire, de l’écriture ou de la création. Le public qui assistait au concert d’Abney Park et au discours de von Slatt est peut-être venu pour la musique ou la mode mais, s’il reste, d’après von Slatt, c’est « grâce à cette envie de bricoler par soi-même, dans ce monde où l’on ne peut même pas réparer soi-même sa voiture quand elle tombe en panne ». Cette envie, qu’elle reste à l’état de projet ou soit suivie d’actes, a attiré un large éventail de populations au-delà des artistes, musiciens et auteurs déjà reconnus par les médias. On trouve dans le mouvement des anarchistes qui donnent à leur économie fondée sur le troc une saveur résolument steampunk, des «  bricoleurs  » qui œuvrent pour construire un futur steampunk, des gens adroits qui se font un peu d’argent en vendant leurs produits faits main sur Internet et des artisans qui vivent des appareils complexes mais fonctionnels qu’ils fabriquent pour de riches mécènes. Les adeptes sont des gens engagés qui agissent au lieu de se contenter de rêver et de parler, ce qui fait toute la différence entre une sous-culture qui perdure et une autre qui passe comme une simple mode.

Ci-dessus

Gâteau de mariage steampunk

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Steampunk : Guide de l’utilisateur Par Bruce Sterling Auteur, avec William Gibson, de La Machine à différences, roman fondateur du steampunk, Bruce Sterling comptait aussi parmi les premiers cyberpunks. Il a révolutionné la science-fiction et la culture populaire avec des œuvres comme Les Mailles du réseau et a rassemblé les nouvelles cyberpunks de l’anthologie classique Mozart en verres miroirs. L’extrait suivant de son essai Steampunk : Guide de l’utilisateur explique la relation complexe qu’il entretient avec l’esthétique.

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Représentation d’un mécaéléphant par le peintre russe Vladimir Gvozdev

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Les gens aiment le steampunk pour deux raisons. D’abord, les costumes cool et étranges déroutent les réactionnaires. Ensuite, les décors sont magnifiques. La révolution industrielle a vieilli. Les machines que les romantiques considéraient comme sataniques nous semblent aujourd’hui romantiques. Si vous aimez vous déguiser, tant mieux. Vous êtes probablement jeune, et donc, vous avez des pro­­­ blèmes identitaires. Tout en faisant semblant d’être pompier, docteur ou avocat, suivant les goûts de vos parents, il faut vous assurer d’avoir essayé quelques identités totalement impossibles. Le steampunk va vous y aider, car jamais vous ne pourrez être un véritable humain du xixe  siècle. Vous ferez d’inté­­­­­­­ ressantes rencontres avec d’autres jeunes qui par­­ tagent votre vague insatisfaction quant au statu quo moderne. Gardez-les bien serrés contre votre poi­­ trine à fanfreluches de velours ; ils vous en appren­­­ dront plus que tous vos enseignants réunis. Élargir le spectre de votre identité vous sera utile quand, dans votre vie future, vous serez forcé de devenir ce que vos parents n’auraient jamais pu imaginer. Tel sera sûrement votre destin. Ils sont nés au xxe  siècle ; bientôt, leur monde semblera encore plus mort, plus étrange et plus lointain que celui du xixe siècle. Si le xixe était brut, limité et bruyant, le xxe a été désastreusement porté sur l’éphémère. Je vous conseille de considérer vos outils, jouets et possessions comme des curiosités destinées à la poubelle à recyclage. Imaginez-vous recommencer à zéro dans un environnement matériel radicalement différent, et habituez-vous à l’idée… Les jeux costumés et autres batifolages distrairont et satisferont quatre-vingt-dix pour cent des gens impliqués dans le mouvement. Toutefois, il se pourrait que vous fassiez partie des dix pour cent de gêneurs qui ne se contentent pas d’être des figurants, mais participent à la création de la scène. Franchement, les poids lourds du steampunk sont plus « punks » que « steam » : ce sont des bricoleurs originaux déterminés à arracher les moyens de production aux grosses entreprises abrutissantes qui ne conçoivent la culture que sous forme de produits cellophanés.

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Les steampunks sont des artisans modernes qui cherchent à promouvoir les méthodes de travail fondées sur des technologies archaïques. Un bricoleur steampunk qui refuse de vous révéler comment il fabrique ses réalisations n’est qu’un frimeur. Cherchez des gens créatifs qui sont prêts à vous aider et ne vous laisseront pas creux, vidé et trahi. Il y en a. Vous en êtes peut-être un. /

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Les grandes leçons du steampunk ne concernent pas le passé. Elles portent sur l’instabilité et la dimension éphémère de notre époque. De nombreux objets et services quotidiens ne sont pas durables… Une fois dépassés, ils sembleront aussi bizarres et archaïques que les hauts-de-forme, les crinolines, la lanterne magique, les automates mécaniques, l’absinthe, les cannes et les pianos pneumatiques avec leur rouleau de papier. Notre société repose sur la technologie. Quand nous nous amusons, sournois comme des pilleurs de tombes gothiques, avec nos méthodes dépas­­ sées, nous nous préparons en secret à la mort de la technologie moderne. Si le steampunk est populaire, c’est parce que les gens comprennent inconsciem­­ ment que notre mode de vie est déjà mort. Nous sommes des somnambules gouvernés par des rapaces dogmatiques, des magnats fossilisés mais sur­­ armés qui nous dépouillent et nous forcent à vivre comme des cadavres. Le steampunk est une jolie manière de gérer la vérité. Le héros des funérailles est déjà mort. Il n’a aucune idée de ce qui se passe. Les funérailles sont un spectacle pour les vivants. Le steampunk est une pièce historique lugu­­ bre. Ce genre de spectacles insuffle de la vie dans les éléments plaisants du passé, comme les affaires des aristocrates dandys, les gadgets exotiques en laiton, les échanges guindés et la lingerie un peu perverse. Ils taisent tout ce que le passé a de sombre, de sinistre, de laid, d’écœurant, de honteux et de catastrophique. Mais quand on réveille les morts, ils se déplacent avec leurs bagages. Nous ne pouvons pas faire grand-chose pour le passé, mais il ne faut jamais cesser d’en attendre quelque chose car, comme Czeslaw Milosz a eu la sagesse de le dire, le passé tire son sens de ce que nous faisons à l’instant même. Il a tendance à nous coller à la peau, à ne jamais partir bien loin, voire à s’inviter. S’y réfugier comme dans une boule à neige pour ne plus voir nos nombreuses insatis­­factions envers notre présent si dangereux est un acte volontaire qui changera notre avenir. Car tout a déjà été tenté. À de nombreuses reprises. Regardez de près, ne tressaillez pas, et vous verrez que tout figure dans le dossier. Donc, ne vous moquez pas de ceux qui vous ont précédé, sauf si vous avez le courage d’affronter vos propres illusions. Le passé est un futur qui est déjà arrivé.

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Le générateur électrostatique de Jake von Slatt, connu sous le nom de machine de Wimshurst

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Steampunk, recueil de nouvelles (Tachyon Publications, 2008) Ci-contre

Vue nocturne de la Cabane dans l’arbre steampunk, au festival Burning Man. Photographie de Nick Winterhalter

Venant du monde de la fiction, ma femme Ann et moi-même n’avions qu’une connaissance limitée du mouvement lorsque nous avons sorti Steam­­ punk, en 2008. Ce recueil contenait des nouvelles d’auteurs emblématiques comme James Blaylock, Michael Moorcock et Neal Stephenson. Mais au cours de manifestations steampunks, nous avons assisté à une intéressante interfécondation : les gens qui avaient intégré le mou­­­­ vement grâce à la mode ou au cinéma sans avoir entendu parler de nos auteurs ont acheté le livre pour en savoir davantage sur l’historique ; de notre côté, nous nous sommes immergés dans cette sous-culture en rencontrant des personnages clés comme von Slatt, en écoutant leurs enseignements (l’article du New York Times avait d’ailleurs facilité ces rencontres, puisque notre anthologie était sortie le même mois, ce qui attira l’attention sur elle). Étions-nous en retard à la fête ? Non. À vrai dire, la plupart des adeptes font partie du mouvement depuis moins de dix ans, voire moins de cinq. L’authenticité dépend de l’ima­­­­gination que vous mettez dans ce que vous entreprenez et de l’énergie dont vous faites preuve dans vos créations, qu’il s’agisse de vête­­ ments, de bijoux, de machines ou de simples histoires autour de votre steamsonnalité. C’est peut-être cela, le vrai pouvoir du steampunk : il permet l’évasion et le pragmatisme, encourage à la fois à rêver et à agir. L’inventivité de la communauté progresse à un rythme tel qu’un livre ne peut dresser qu’un portrait fragmenté de son passé, de son présent et de son futur potentiel. Ma coconspiratrice S.J. Chambers et moi espérons que cet ouvrage vous inspirera et vous ravira. Nous espérons aussi qu’il sera un point de départ pour vous permettre d’en savoir plus sur le mouvement, et vous aider à trouver une manière unique et personnelle de vous y impliquer. Si le soleil s’est couché sur la Cabane dans l’arbre, le jour du steampunk ne fait que commencer. Jeff VanderMeer, Tallahassee, Floride, 2010

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