Halo : Les Fantômes d'Onyx - extrait

Le programme Spartan-II a été dévoilé. Les histoires de super-soldats repoussant des milliers d’attaques Covenant sont entrées dans la légende.

Mais combien reste-t-il de Spartans ? endant que Master Chief défend une Terre assiégée et que Pcroisades des myriades de factions Covenant poursuivent leurs pour éradiquer l’humanité, la « Section Trois »,

une cellule ultrasecrète de l’espionnage des forces navales, élabore un plan afin de donner un peu de répit à l’armée.

Pour cela, elle aura besoin de centaines de soldats… et d’un Spartan supplémentaire.

Pratiquement déserte, la planète Onyx est l’endroit idéal pour un tel plan. Mais quand Master Chief détruit Halo, quelque chose s’éveille dans les profondeurs d’Onyx. Une ancienne technologie Forerunner ressuscite et la Navy se lance dans une course contre les Covenants pour la récupérer et changer ainsi le cours de la guerre.

Mais une fois revenue à la vie, cette force aura peut-être ses propres plans…

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Grégory Bouet ISBN : 978-2-8112-1307-7

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© 2014 Microsoft Corporation. All Rights Reserved.

Microsoft, 343 Industries, the 343 Industries logo, Halo, the Halo logo, are trademarks of the Microsoft group of companies.

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Dans le même univers, chez Milady, en poche : Halo : 1. La Chute de Reach 2. Les Floods 3. Opération First Strike 4. Les Fantômes d’Onyx La Saga Forerunner : 1. Halo Cryptum 2. Halo Primordium 3. Halo Silentium

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Eric Nylund LES FANTÔMES D’ONYX Traduit de l’anglais (États-Unis) par Grégory Bouet

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Milady

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Milady est un label des éditions Bragelonne

Ce livre est une œuvre de fiction. Les noms, les personnages, lieux et événements sont les produits de l’imagination de l’auteur ou utilisés de manière fictive.

Titre original : Halo®: Ghosts of Onyx Copyright © 2006 by the Microsoft Corporation All Rights Reserved.

Microsoft, Halo, the Halo logo, Xbox, and the Xbox logo are trademarks of the Microsoft group of companies.

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© Bragelonne 2014, pour la présente édition ISBN : 978-2-8112-1307-7 Bragelonne – Milady 60-62, rue d’Hauteville – 75010 Paris E-mail : info@milady.fr Site Internet : www.milady.fr

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Pour les fans de Halo, partout dans le monde.

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R emerciements Je remercie tout d’abord, et tout particulièrement, mon auteure d’épouse, Syne Mitchell, et mon fils, Kai. Pendant plusieurs mois, ils ont dû supporter les coups de gueule d’un écrivain aux prises avec sa date butoir. Sans leur aide, leur amour et leur compréhension, personne n’aurait jamais eu l’occasion de lire une seule de mes lignes.

Juste après, arrivent les « Quatre Bungies » (Brian Jarrard, Rob McLees, Frank O’Connor et Joseph Staten), qui participèrent au développement du récit et scrutèrent minutieusement chaque nuance du manuscrit – un incalculable nombre de fois.

Je remercie également mon agent, Richard Curtis, pour son calme et sa pondération, ainsi qu’Eric Raab et Tom Doherty de Tor Books, pour leur flair éditorial et leur soutien constant.

Je suis reconnaissant à Dana Fos et Matt Whiting, des Microsoft Game Studios User Experience et, au sein de l’équipe du Microsoft Licensing Group, à Alicia Brattin, Alicia Hatch, Nancy Figatner, Brian Maeda, Steve Schreck et Edward Ventura.

Enfin, j’adresse une dédicace particulière à Mercury Eric et aux nombreux fans qui m’ont écrit.

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Eric Nylund North Bend, Washington, août 2006

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Le fichier médical de Linda apparut sur un écran aux côtés de la liste de tous les Spartans : elle listait l’état médical actuel de chaque Spartan. Il ne restait plus beaucoup de Spartans valides, la majorité maintenant BLESSÉS AU COMBAT ou PORTÉS DISPARUS. —Aucun mort? murmura le Dr Halsey. (Elle effleura l’entrée concernant le Spartan 034.) Il est indiqué que Sam est porté disparu. Pourquoi une telle information ? Il est mort en 2525.

— Directive Neuf-Trois-Zéro de la Section Deux du SRN, lui expliqua Cortana. Lorsque le SRN a été mis sous les feux des projecteurs avec le programme SPARTAN-II, la décision fut prise que les rapports concernant les pertes Spartans pourraient provoquer une importante baisse du moral. C’est pourquoi chaque mort Spartan est listé comme blessé au combat ou porté disparu, afin de maintenir l’illusion que les Spartans ne meurent pas.

— Les Spartans ne meurent pas ? murmura-t-elle. (Le Dr Halsey s’extirpa du siège en le faisant pivoter et repoussa violemment les écrans sur le côté.) Si seulement c’était vrai.

HALO : Opération First Strike, page 372

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PROLOGUE La victoire de la compagnie Bêta sur Pegasi Delta

1135 heures, 3 juillet 2545 (Calendrier militaire) / Système 51 Pegasi-B, zone cible apache, planète Pegasi Delta.

L

a nacelle orbitale entra en collision. Son enveloppe métallique se déchira et projeta des gerbes d’étincelles.

Dans son cocon de titane, de feuilles de plomb et de revêtement furtif ablatif, SPARTAN-B292 vit de noirs phosphènes exploser dans son champ de vision et eut un goût de sang dans la bouche. Sa dernière bouffée d’air se comprima dans ses poumons.

Son entraînement prit le relais : il mit en pièces la carcasse déformée de la nacelle et cligna des yeux à la vive lumière bleue.

Quelque chose clochait. 85 Pegasi-914A était censé être un faible soleil jaune. Celui-ci était d’un bleu électrique, d’un bleu de plasma incandescent.

Il sauta et roula sur le côté comme la fournaise le submergeait. Les couches extérieures de son armure d’infiltration semi-assistée bouillonnèrent et pelèrent, telle la peau après un méchant coup de soleil. « L’entraînement, lui avait dit le Lieutenant Ambrose. Ton entraînement doit s’intégrer à ton instinct. Exerce-toi jusqu’à

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ce qu’il pénètre au plus profond de tes os. » Tom réagit sans réfléchir ; une vie passée à se former prit la relève.

Il leva le canon de son fusil d’assaut MA5K et tira sur la trajectoire de l’éclair plasma, tout en s’assurant de balayer bas.

Sa vision s’éclaircit et, tandis qu’il rechargeait son arme par réflexe, il put enfin distinguer la surface de Pegasi Delta.

C’était un véritable enfer : des rochers écarlates, un ciel orange et envahi de poussière, les traces d’une bonne dizaine de traînées et de cratères et, trente mètres devant lui, le sol était imprégné du sang pourpre de Jackals.

Il sortit son arme de poing et se dirigea prudemment vers les extraterrestres vaincus. Il y en avait cinq, qui arboraient de graves blessures aux membres inférieurs. Il fit éclater leurs crânes de vautours, s’agenouilla, les soulagea de leurs grenades à plasma et arracha les générateurs de champs de force qu’ils portaient aux avant-bras.

Même s’il était équipé d’une armure complète d’agent Infiltré Semi-Assistée (plus communément désignée sous le nom d’ISA par les technophiles de la Section Trois), ses plaques renforcées et ses panneaux photoréactifs ne pouvaient essuyer que de faibles dommages avant de cesser de fonctionner. Néanmoins, les textures de camouflage de l’armure crépitèrent, finirent par se stabiliser et se fondirent à nouveau dans le paysage rocailleux.

Chaque SPARTAN-III avait été spécialement formé à l’utilisation des équipements ennemis ; Tom allait par conséquent improviser. Il fixa un des boucliers jackals sur son avant-bras. C’était une protection de très grande qualité, tant que l’on n’oubliait pas de s’accroupir derrière elle et de couvrir ses jambes – une tactique que des soldats du CSNU plus imposants auraient eu du mal à mettre en œuvre.

L’écran de sa plaque faciale s’anima, couche transparente de symboles topologiques verdâtres et fantomatiques : cent kilomètres au-dessus de lui, le Satellite Tactique Furtif de

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Reconnaissance Aérienne (ou STFRA), gros comme une balle de base-ball, avait établi la liaison.

Un point clignotant apparut, qui indiquait sa position : cinq kilomètres au sud de l’objectif principal.

Il scruta l’horizon et, au loin, aperçut indistinctement la ville-usine des Covenants. Étalées sur la surface rocailleuse tel un château de rouille doté de cheminées géantes, ses entrailles étaient envahies de spires bleues palpitantes de plasma. Derrière l’usine, s’étendait le littoral lavande d’une mer toxique.

D’autres points apparurent dans son collimateur… une dizaine, une vingtaine, puis des centaines. Le reste de la compagnie Bêta était en ligne. Ils étaient deux cent quatrevingt-onze. Neuf d’entre eux n’avaient pas survécu, soit à la rentrée soit aux assauts des forces Covenants, avant de pouvoir s’extirper des nacelles. À l’issue de la mission, il allait consulter le tableau de service afin d’identifier leurs pertes, mais, en attendant, il refoula ses sentiments dans un recoin de son esprit.

Il poussa un soupir de soulagement quand les huit X qui représentaient le Rôdeur d’exfiltration Black Cat apparurent succinctement à l’écran, avant de disparaître. C’était le seul moyen pour eux de quitter cette planète après l’opération TORPEDO. Un texte défila sur son moniteur : « ÉQUIPE FOXTROT CAP SUR LE VECTEUR ZÉRO HUIT SIX. APPORTEZ FLANQUEMENT À L’ÉQUIPE INDIA. » Répondre était inutile. Les ordres émanaient du STFRA, et rompre le silence radio aurait dévoilé leur position.

Trois points se mirent à clignoter, et des chiffres minuscules firent leur apparition. B091, c’était Lucy. B174, c’était Min. Et B004, c’était Adam. Ses amis. Le groupe d’assaut Foxtrot.

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Il bondit, choisit un affleurement rocheux sous lequel se protéger et attendit qu’ils le rattrapent.

Afin de rester concentré sur sa tâche et de ne pas se laisser distraire par le rythme effréné de ses pulsations cardiaques, il fit une fois de plus le point sur l’opération TORPEDO. Pegasi Delta abritait une raffinerie de Covenants. La mer de ce monde minuscule était particulièrement riche en deutérium et en tritium, isotopes qu’ils utilisaient pour la fabrication de leurs réacteurs à plasma. L’usine traitait ces matériaux et ravitaillait les vaisseaux en carburant. Cela faisait de cette entreprise Covenant installée aux frontières du CSNU une cible de la plus haute importance, car elle permettait à l’ennemi d’accéder facilement à l’espace humain.

Des opérations avaient déjà été menées en vue de la neutraliser. Du Sous-espace, le CENTCOM du CSNU lui avait envoyé des bombes nucléaires, mais le plutonium créait un effet de Vavilov-Tcherenkov en réintégrant l’espace conventionnel, ce qui rendait tous les revêtements furtifs et les chapes de plomb inutiles. Les Covenants les avaient rapidement détectés et mis hors d’état de nuire.

De la même façon, trop de bâtiments Covenants se trouvaient à proximité de la lune pour que l’on pût les pilonner de loin avec des bombes nucléaires à vitesse réduite, en plein espace conventionnel. Et on ne pouvait davantage envisager une invasion régulière, ni même une intervention des Troupes de Choc Aéroportées Orbitales. Le CSNU ne disposait que d’une seule chance de démolir l’usine avant que l’ennemi ne rassemble ses forces défensives.

Alors, ce fut eux que l’on envoya.

Il y avait de cela sept heures, les trois cents Spartans de la compagnie Bêta avaient quitté le All Under Heaven, avant d’être propulsés dans le Sous-espace. Ils avaient voyagé dans des nacelles de débarquement orbitales furtives à longue portée ; sans protection, ils avaient supporté les terribles

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nausées dues à la transition vers l’espace conventionnel, et avaient littéralement été chauffés à blanc lors du périple ardent qui les avait conduits à la surface de Pegasi Delta. À en juger par le chaleureux accueil que leur avaient réservé ces cinq Jackals, Tom était bien conscient que ses compagnons et lui avaient été repérés, mais les Covenants n’avaient peut-être pas encore pris connaissance de l’ampleur des manquements à leurs règles de sécurité. Il allait devoir agir promptement, tirer avantage de tous les éléments de surprise dont il jouissait encore, faire sauter l’usine et, si possible, les cibles secondaires que constituaient les dépôts de munitions et les réserves de méthane.

Il leur était encore possible d’y parvenir. Il fallait qu’ils y parviennent. La destruction de cette usine allait tripler la longueur des liens de ravitaillement des Covenants vers l’espace régi par le CSNU. C’était exactement la chose pour laquelle Tom s’était entraîné depuis l’âge de six ans : des années d’étude, d’exercices et de manœuvres militaires. Mais tout cela allait peut-être se révéler insuffisant.

Il entendit le gravier crisser, se retourna vivement, canon relevé, et vit Lucy.

Engoncés dans leurs armures, tous les SPARTANS-III se ressemblaient. Les motifs mouvants des brouilleurs de l’ISA étaient composés d’un tiers de cotte de mailles version légionnaire, d’un tiers de matériau tactique et d’un tiers de revêtement caméléon. Tom parvint néanmoins à reconnaître la démarche lente et prudente de Lucy.

Il plaça deux doigts sur son casque, lui adressant ainsi le salut muet et séculaire des Spartans. Elle lui répondit par un imperceptible hochement de tête.

Tom lui tendit un générateur de bouclier Jackal et deux grenades à plasma.

Adam fit ensuite son apparition, et Min, dix secondes après lui.

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Une fois leurs boucliers usurpés installés, Tom exécuta une série de vifs gestes de la main à l’attention du groupe d’assaut Foxtrot, leur intimant de se déployer en arc large.

Discrets, mais rapides.

Le tonnerre gronda, le ciel s’enflamma et une ombre les recouvrit, avant de disparaître aussitôt. Deux chasseurs Covenants, des Séraphins si l’on en croyait leur fuselage en forme de larme, survolèrent leur cachette à grand fracas.

Une décharge de plasma explosa cent mètres derrière eux, déflagration infernale tourbillonnante dont les ondes se précipitèrent droit sur eux.

Tom bondit sur le côté, activa son bouclier Jackal et le positionna entre lui et les flammes de trois cents degrés qui auraient pu dévaster son ISA comme elles l’auraient fait d’une motte de beurre. Sous l’effet des radiations, le champ de force devint translucide et la peau de ses paumes se couvrit d’ampoules.

Le plasma les dépassa… se dispersa… et s’évapora.

L’atmosphère se rafraîchit.

Le soutien aérien des Covenants était déjà entré en action, et cela aggravait amplement la situation.

En un clin d’œil, Tom passa d’un affichage TACMAP à la résolution TEAMBIO. Tous les membres du groupe d’assaut Foxtrot exhibaient des pouls et des pressions sanguines par trop élevés, mais tout restait dans le vert. Tous étaient en vie. Parfait.

Il se précipita. La discrétion n’était plus de mise. Se rendre à l’usine, où personne ne pourrait plus les mitrailler, était tout ce qui importait.

Derrière lui, Lucy, Adam et Min se mirent à l’alignement et couvrirent le rude terrain à grandes et puissantes enjambées, à une vitesse d’au moins trente kilomètres par heure.

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Des ovales écarlates apparurent sur le TACMAP de Tom : des Séraphins revenaient à la charge. Ils étaient plus nombreux… trois… six… dix.

Tom regarda rapidement de chaque côté et vit ses camarades, des centaines de Spartans, cavaler sur le terrain accidenté. La poussière soulevée par leur charge envahissait l’atmosphère et venait se mêler à la fumée produite par les dernières décharges de plasma.

Trois Spartans, à la traîne, se retournèrent, s’arc-boutèrent, leurs lance-missiles M19-B SAM à la main, et firent feu. Les missiles fusèrent, laissant derrière eux des erres de vapeur.

Le premier rebondit sur le bouclier d’un Séraphin et explosa sans l’endommager, mais parvint tout de même à le faire entrer en collision avec son binôme. Les deux vaisseaux cabriolèrent et perdirent cinquante mètres d’altitude, avant de récupérer. En revanche, leurs proues éraflèrent le sol, ce qui dissipa leurs boucliers affaiblis, et ils finirent violemment en soleil.

Les deux autres missiles atteignirent leurs objectifs et en surchargèrent les boucliers, les laissant recouverts de suie, mais intacts. Tom vit les Séraphins interrompre leurs approches offensives.

C’était une petite victoire.

Tom ralentit et observa les six Séraphins restants plonger pour libérer leurs charges à plasma, avant de redresser, décrire des tonneaux et disparaître dans la brume.

Chaque bombardement de plasma donna naissance à d’aveuglantes rafales saphir, comme alimentées par le feu d’un soleil bouillonnant. En atteignant le sol, ces rafales explosèrent et se déployèrent vers l’avant, propulsées à la vitesse de trois cents kilomètres à l’heure par la quantité de mouvement et la dilatation thermique.

Un mur de flammes surgit sur la gauche de Tom, et des zébrures bleues et blanches parcoururent les panneaux

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brouilleurs de son ISA. Mais il resta sur place, incapable de quitter des yeux les cinq autres feux qui assiégeaient des dizaines de Spartans.

Le plasma perdit en intensité, mais restait bouillonnant, puis l’atmosphère se rafraîchit et les nuages se muèrent en une morne brume grise qui laissa derrière elle un sol vitrifié et craquelé, jonché de fragments d’os calcinés.

Sur la CARTAC, des dizaines de points cessèrent de clignoter.

Lucy dépassa Tom à toute allure. La voir le remit brusquement d’aplomb, et il se mit à courir lui aussi.

Le moment de s’inquiéter viendrait plus tard. L’heure de la revanche, aussi. Une fois qu’ils auraient fait sauter cette usine, ils auraient tout le temps de penser à régler les comptes.

Tom ajusta la mise au point de sa CARTAC et la dirigea vers la cible principale. Elle ne se trouvait plus qu’à cinq cents mètres.

Au cœur de cette usine grande comme une ville, l’aura bleue était par trop intense pour que l’on pût la regarder directement. Cette aura projetait des ombres funestes par le réseau de tuyaux et la forêt de cheminées. Le bâtiment avait une superficie d’un kilomètre carré, et ses cheminées s’élevaient à trois cents mètres d’altitude, ce qui était parfait pour les tireurs d’élite.

Tom s’efforça d’accélérer sa course, devant Lucy, Adam et Min, tout en exécutant une série de zigzags. Ils comprirent la manœuvre et l’imitèrent.

Des rafales de plasma s’abattirent non loin de son pied.

Il se faufila, reculant puis avançant, dans une débauche de trajectoires imprévisibles. Ses doutes au sujet de la présence de tireurs d’élite étaient fondés.

Il esquiva, continua de courir et plissa les yeux pour observer les abords de l’usine. Sa visière réagit automatiquement et zooma au quintuple.

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Une autre menace couvait, celle des bordures lumi­­ nescentes et changeantes de champs de force : des boucliers Jackals. Et, dans l’obscurité, le regard arrogant d’un Élite Covenant en armure pourpre, qui ne baissait pas les yeux.

Tom dérapa, s’immobilisa, s’empara du fusil de précision qu’il portait en bandoulière et regarda dans le viseur. Il calma sa respiration laborieuse. Un éclair de plasma crépita sur son ISA et lui roussit les chairs, mais il ignora la douleur, juste irrité que cette décharge lui ait fait momentanément perdre son objectif. Il attendit la fraction de seconde cruciale qui séparait ses battements de cœur et appuya sur la détente.

La force de l’impact fit tournoyer l’Élite sur lui-même.

Les joints de ses protections de cou volèrent en éclats. Tom tira une seconde fois et le cueillit dans le dos. Une gerbe de sang turquoise éclaboussa les conduites. À la périphérie de l’usine, des Jackals surgirent des ténèbres et se dispersèrent derrière les tuyaux et les tubes de plasma.

Il y en avait des centaines. Des milliers.

Tous ouvrirent le feu.

Tom roula au sol et partit s’aplatir dans un renfoncement.

Adam, Min et Lucy suivirent son exemple, les canons de leurs fusils relevés devant eux, prêts à tirer.

Des éclairs de plasma et des fragments de cristal s’entrecroisaient au-dessus de la tête de Tom – il y en avait trop pour les éviter. L’ennemi n’avait pas besoin de voir les Spartans. Il lui suffisait de truffer chaque centimètre cube d’air de projectiles mortels. Son groupe d’assaut était acculé et allait représenter une cible facile au prochain passage des Séraphins.

Comment les Covenants avaient-ils pu organiser aussi rapidement une telle contre-attaque ?

Auraient-ils été détectés plus tôt, leurs nacelles de débarquement se seraient fait vaporiser sur le chemin. À moins que le groupe d’assaut de Tom n’ait eu l’extrême malchance

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d’arriver sur place alors qu’un vaisseau-capitale était à quai sur le site de l’usine. Sans se faire repérer ? Le STFRA aurait-il pu ne pas avoir détecté un objet de cette taille ?

Une des leçons du Lieutenant Ambrose lui revint en mémoire : « Ne dépends pas de la technologie. Les machines se brisent facilement. » Sa liaison COM crépita : — Les M19 SAM exécutent la manœuvre Bravo, marquage au cibleur laser. Que tous les autres groupes d’assaut se tiennent prêts.

Tom comprit aussitôt : ils avaient besoin de couverture.

Et la seule couverture disponible se trouvait dans l’usine.

Sur le champ de bataille, six traînées de vapeur fusèrent en direction de l’usine. Les M19 SAM détonèrent quand ils touchèrent les conduites et les lignes de plasma, et soulevèrent de formidables nuages de suie et d’étincelles turquoise.

Le tir ennemi se fit moins nourri.

C’était l’ouverture qu’ils attendaient.

Tom se releva avec souplesse et se précipita dans le plus épais nuage de fumée. Le groupe d’assaut Foxtrot lui emboîta le pas.

Tous les autres Spartans s’élancèrent également, des centaines de silhouettes en armure furtive, chargeant et mitraillant les Jackals stupéfaits telle une vague de soldats fantômes aux effusions sombres – entre mirage et cauchemar.

Ils poussèrent un cri de guerre qui vint momentanément couvrir le vacarme des explosions et des coups de feu.

Tom hurla à l’unisson, pour ceux qui avaient péri, pour ses amis et pour le sang de ses ennemis. Le tumulte était assourdissant.

Les Jackals rompirent les rangs, s’apprêtèrent à fuir et furent abattus dans le dos, car leurs boucliers ne les protégeaient plus.

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Mais des centaines d’autres tinrent leur poste et associèrent leurs boucliers en vue de former une phalange impénétrable.

Tom guida le groupe d’assaut Foxtrot par les ténèbres enfumées de l’usine. Il dénicha un tuyau de la taille d’un séquoia, qui laissait écouler des perles d’eau condensée mêlées à un liquide de refroidissement de couleur verte, et s’abrita derrière lui. Il distingua Lucy, Adam et Min, noyés dans la purée de pois, qui s’abritaient eux aussi. Il transmit ses ordres par des gestes frénétiques de la main : C’est la curée.

Il tournoya, son fusil MA5K braqué devant lui, et se retrouva nez à nez avec un Élite Covenant dont les mandibules s’écartaient en une odieuse parodie de sourire. Le monstre avait une épée énergétique dans une main et un pistolet à plasma dans l’autre.

Il fit feu et virevolta.

Tom esquiva les arcs mortels d’énergie, cala son pied entre les membres inférieurs trop écartés de son adversaire, poussa et tira en même temps.

L’Élite s’étala de tout son long et Tom suivit sa trajectoire en noyant l’interstice de son casque sous une grêle de balles.

Le groupe d’assaut Foxtrot le rattrapa, laissant six Jackals morts dans leur sillage, leurs dépouilles brisées telles des poupées de chiffons.

Une série de détonations sourdes et des éclairs de chaleur se firent sentir derrière eux : des grenades à plasma.

Les Jackals et les Élites se mirent rapidement à découvert, comprenant peut-être qu’il serait suicidaire d’affronter les Spartans dans un espace restreint.

Des milliers de Covenants se confrontèrent à deux cents Spartans en combat ouvert. Des balles traçantes, des fragments de cristaux, des éclairs de plasma et des boucliers aveuglants semèrent le chaos.

Les SPARTANS-III se déplaçaient avec une rapidité et des réflexes tels que les Covenants étaient complètement

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perdus. Ils esquivèrent, tranchèrent cous et membres et, armés des épées énergétiques qu’ils arrachaient à leurs ennemis, taillèrent dans leurs rangs jusqu’à ce que le champ de bataille soit sillonné de rivières de sang bleu et cramoisi.

Tom hésita, déchiré entre l’envie de pénétrer davantage à l’intérieur du complexe industriel et le choix qui consistait à exécuter sa mission et retourner sans délai aux côtés de ses camarades. On n’abandonnait pas ses amis.

Le ciel s’assombrit, et les nuages prirent une teinte gris acier.

La liaison COM de Tom crépita : — Oméga Trois. Exécution immédiate ! IMMÉDIATE !

Cela le pétrifia sur place. « Oméga Trois », c’était le code-catastrophe, un ordre qui intimait de déguerpir à tout prix.

Mais pourquoi ? Ils étaient en train de l’emporter.

Tom vit alors les nuages se déplacer. Seulement… ce n’étaient pas des nuages.

D’un coup, tout lui apparut limpide : la raison pour laquelle les Covenants étaient si nombreux, et aussi pourquoi les monoplaces des Séraphins, vaisseaux conçus pour les affrontements spatiaux, les bombardaient.

Sept croiseurs Covenants sortirent des nuages. Mesurant plus d’un kilomètre de long, leurs coques oblongues et bulbeuses voilèrent le champ de bataille de leur ombre.

Si ces vaisseaux avaient stationné en formation pour se ravitailler dans le complexe, le STFRA avait pu interpréter ces gigantesques structures comme faisant partie de l’usine.

— Nous devons leur venir en aide, murmura Lucy dans le TEAMCOM. — Non, réfuta Min avec un petit geste de la main. Ordre Oméga.

— Pas question qu’on se sauve, intervint Adam.

— Effectivement, convint Tom. On ne va pas se sauver.

L’ordre est… erroné.

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En dépit des contrôleurs de température de son ISA, il était glacé jusqu’aux os.

Des dizaines de Séraphins furent largués et formèrent un essaim. De sombres colonnes luminescentes apparurent sur l’abdomen de chaque croiseur : des rayons tracteurs desquels des centaines d’Élites se déployèrent sur le champ de bataille.

— Cela dit, on ne peut rien faire pour eux, sur ce coup-là, chuchota Tom. La moitié des membres de la compagnie Bêta se retourna pour faire face à cette nouvelle menace. Aucune chance de l’emporter, même pour des Spartans, mais ils allaient tout de même gagner du temps pour que le reste d’entre eux puisse se mettre à couvert.

Néanmoins, parvenir à le faire était une tactique plutôt risquée. Sept croiseurs Covenants jouissaient d’une puissance de feu suffisante pour abattre même deux cents Spartans. Ils pouvaient leur interdire tout mouvement, envoyer des milliers de soldats en renfort ou encore vitrifier la lune entière sans quitter leur orbite si l’envie les en prenait.

Il n’y avait plus qu’une solution.

— Le cœur, leur dit Tom. Il reste l’objectif de notre mission, et c’est la seule arme efficace dont nous pouvons disposer.

Un bref silence s’installa, puis trois voyants verts appa­­­ rurent sur son écran : ses amis avaient compris ce qu’il demandait, et ils lui signifiaient leur assentiment.

Le groupe d’assaut Foxtrot se précipita dans un ensemble parfait à l’intérieur de l’usine, esquivant conduites et nacelles de ravitaillement.

Une escouade de six Élites, accroupie derrière un enchevê­­ trement de canalisations, avait pris position devant eux.

Tom lança une poignée de grenades à concussion pour les désorienter, mais ses camarades continuèrent de courir.

Tout retard, même pour engager le combat avec un adversaire

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susceptible de leur tirer dans le dos, pourrait leur faire perdre leur unique chance.

Les Élites survivantes récupérèrent et firent feu.

Adam chuta, une main agrippée aux fragments de cristal qui venaient de pénétrer son armure avant de lui perforer le bas de la colonne vertébrale.

— Courez ! glapit-il en leur faisant de grands gestes. Je les retiens !

Tom ne décéléra pas. Adam savait ce qu’il fallait faire : poursuivre le combat jusqu’à l’épuisement.

Le cœur se trouvait cent mètres devant eux. Impossible de ne pas le repérer : sa visière se polarisa au maximum, mais il était si éclatant qu’il resta difficile de le regarder sans cligner des yeux. Haut comme un immeuble de dix étages, il palpitait tel un cœur démesuré, incrusté de composants électroniques cristallins et nourri par les canalisations et les conduites fumantes de liquide refroidissant. C’était une merveille complexe d’ingénierie extraterrestre, mais, avec un peu de chance, cela pourrait leur servir pour y pénétrer.

— Les conduites principales de liquide refroidissant se trouvent là et là, hurla Tom dans le TEAMCOM en pointant le doigt. Je m’occupe de la soupape de vidange.

Il gagna la partie inférieure du cœur.

Les voyants verts de Lucy et Min clignotèrent sur son écran.

L’écran de Tom se remplit de parasites, produisit un petit bruit sec et s’éteignit totalement. Le réacteur plasma, avec son champ électromagnétique sans cesse changeant, faisait des ravages dans les composants électroniques.

Il dénicha la soupape de vidange, mécanisme gros comme un vaisseau de débarquement Pélican, juste sous la chambre principale. Il tira le cordon de carbone thermite et en fit deux fois le tour. Puis, il amorça et activa la charge. Un éclair

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aveuglant parcourut l’alliage Covenant en crépitant et réduisit la soupape en grumeau de métal.

Tom jeta un bref regard à Lucy. Elle installa une charge explosive sur l’une des deux conduites principales de liquide refroidissant qui venaient alimenter le réacteur, avant de configurer le minuteur du détonateur.

Min était lui aussi en train de régler son minuteur… avant de disparaître brutalement dans une assourdissante explosion de fumée. Le cœur était plus éblouissant que le soleil. Des émanations de liquide refroidissant jaillirent en chuintant des canalisations rompues, et des alarmes retentirent.

— Non ! hurla Lucy.

Elle passa à toute allure devant Tom en direction du nuage toxique tourbillonnant de liquide refroidissant. Il l’attrapa par le poignet et la fit s’arrêter sans ménagement.

— C’est fini, dit-il. Le champ d’EM doit avoir déclenché la charge.

Elle se libéra de son étreinte à grand-peine.

— Il faut qu’on quitte les lieux, déclara-t-il.

Elle hésita, faisant un pas de plus vers Min. La structure portante gémit et commença à fondre et s’affaisser sous la pression du cœur surchauffé.

Lucy se retourna vers Tom, hocha la tête, et ils sortirent de la salle en courant, s’enfonçant davantage dans le complexe, à travers une jungle d’étançons et de conduites sifflantes, pataugeant dans des lacs bouillonnants de liquide refroidissant.

La charge déposée par Lucy explosa et fit taire les alarmes du réacteur.

Même alors que Tom et Lucy couraient à en perdre haleine et tournaient le dos au réacteur, son éclat se fit deux fois plus intense comme il atteignait quasiment la phase supercritique.

Il était impossible de la supporter, même avec une visière polarisée, et Tom ferma presque totalement les yeux.

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Ils passèrent un angle, glissèrent sur la rampe d’un escalier très raide et gagnèrent une passerelle en saillie. Cinq cents mètres plus bas, un océan venait s’écraser contre les falaises rocailleuses.

Lucy se tourna vers l’usine, puis vers Tom. Elle lui tendit la main.

Il la prit.

Ils sautèrent.

En pleine chute libre, Tom lutta, jambes battantes. Lucy lâcha sa main et se raidit. Il l’imita et mit ses pieds en pointe une fraction de seconde avant d’atteindre l’eau.

L’impact l’étourdit, puis il eut un goût de sel dans la bouche : il étouffait dans l’eau qui inondait son casque. Il s’efforça de regagner la surface. Le revêtement de son ISA se bomba : il prenait l’eau et cela l’alourdissait considérablement.

Il remonta enfin à l’air libre, battant aussi fort des jambes qu’il le put pour garder la tête hors de l’eau. Puis, il s’empara brusquement de la touche de relâchement de son casque et tira dessus. À côté de lui, Lucy, hors d’haleine, avait elle aussi ôté son casque.

— Regarde, fit-il en désignant le sommet des falaises d’un hochement de tête.

De sa position, Tom distinguait les croiseurs Covenants qui survolaient le champ de bataille. Des colonnes de lasers fusaient des rangées d’armements latérales des vaisseaux et s’abattaient sur ses camarades Spartans. La puissance de feu développée ici était normalement utilisée pour les combats entre vaisseaux-capitales… Qui pourrait survivre à cela ?

Un nouveau soleil fit son apparition. Le cœur du réacteur avait atteint la phase supercritique, et le monde fut baigné d’une intense lueur. Les croiseurs se froissèrent et se déformèrent, les alliages de leurs coques s’évaporant sous les assauts de l’extrême chaleur.

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La proéminence rocheuse fut réduite à l’état de décombres en fusion.

— À terre ! hurla Tom. Lucy et lui disparurent sous la surface de l’eau et plongèrent pour se soustraire à la surpression et au souffle cuisant de l’explosion. Son armure détrempée allait peut-être lui sauver la vie, désormais.

Au-dessus, l’eau se faisait vaporiser en grandes gerbes lumineuses. Des gouttelettes de roche et de métal liquides s’abattirent autour de lui. La chaleur était étouffante… Puis, Tom sentit comme une serre s’emparer de lui et se contracter, jusqu’à ce que son monde ne soit plus que ténèbres.

Tom gisait au sol, haletant. Après l’explosion, ils avaient failli se noyer, mais ils étaient parvenus à se débarrasser de leurs armures et, enfin, épuisés, avaient regagné le rivage à la nage et avaient contourné le champ de bataille pour rejoindre les collines.

Lucy et lui avaient réussi à atteindre le point d’extraction numéro six, là où il avait repéré l’un des vaisseaux furtifs d’exfiltration.

Aucun renfort Covenant ne fit son apparition. Tous avaient été abattus quand le réacteur avait explosé.

L’opération TORPEDO était un succès… mais cette réussite avait coûté la vie à tous les autres membres du contingent de la compagnie Bêta.

Ne restait plus de l’usine, des croiseurs Covenants et des forces au sol de la compagnie Bêta, qu’un cratère vitrifié de quatre kilomètres de diamètre. Pas d’ossements, pas même un panneau brouilleur d’ISA. Plus rien. Des murmures dans la brise.

Lucy, tremblante, fit halte contre la coque du Black Cat et commença à redescendre maladroitement le flanc de la colline.

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— Tu vas où ?

— Voir s’il y a des survivants, répondit-elle à voix basse.

(Elle avança davantage, incertaine.) Foxtrot. Nous devons aller voir.

Personne n’avait survécu. Ils avaient vérifié toutes les fréquences COM et exploré le littoral et les collines, sur le long chemin silencieux du retour. Il ne restait plus personne de vivant.

Lucy était minuscule. Tout comme Tom, elle n’avait que douze ans, mais, avec son mètre zéro six et ses soixante-dix kilos, Lucy faisait partie des plus petits SPARTANS-III. Démunie de son ISA et de ses armes, sa pâle silhouette uniquement protégée d’une modeste gaine intégrale, elle paraissait encore plus menue.

Tom se leva et l’enlaça délicatement. Elle était secouée de spasmes.

— Tu es en état de choc.

Il dénicha une trousse de premiers soins et lui injecta le cocktail médical standard contre le stress post-traumatique.

— Les survivants…, chuchota-t-elle.

— Il n’y en a aucun, dit-il. Il faut qu’on parte d’ici. Dans quatre heures, les condensateurs du Black Cat seront vides et nous ne pourrons plus faire le saut en Sous-espace.

Elle se tourna vers lui, les yeux écarquillés et embués de larmes.

— Comment peux-tu affirmer que nous sommes en vie ?

Tom était en vie. Il en était certain. Mais, comme il portait une dernière fois son regard sur le champ de bataille crépitant de Pegasi Delta, il comprit qu’une partie de lui avait disparu ce jour-là, en même temps que la compagnie Bêta.

Il aida Lucy à monter à bord du Black Cat et ferma l’écoutille.

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Les moteurs du Sous-Rôdeur vrombirent puissamment, avant de ne plus produire qu’un murmure. Le bâtiment s’éleva et se dressa vers les cieux. Il faisait de plus en plus sombre.

Lucy avait demandé à Tom s’ils étaient bel et bien vivants, et cela serait ses dernières paroles. Désarticulation vocale post-traumatique, finiraient par déclarer les experts. Et, bien qu’une fois de plus déclarée apte à servir, elle allait garder le silence, refusant ou ne pouvant plus parler, toute sa vie.

Au fil des années qui allaient suivre, Tom allait réfléchir chaque jour à la dernière question de Lucy. Comment peux-tu affirmer que nous sommes en vie ? Tous les Spartans étaient en deuil, ce jour-là.

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P remière

partie

L ieuten a n t A mbrose

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C hapitre

premier

1647 heures, 1er mai 2531 (Calendrier militaire) / 111 Système Tauri, camp de New Hope, planète Victoria.

J

ohn, SPARTAN-117, bien qu’engoncé dans une demi-tonne d’armure MJOLNIR, progressait tel un spectre dans la pénombre des sous-bois.

Le garde affecté au périmètre de la base de New Hope tira sur sa cigarette, aspira une ultime bouffée et se débarrassa du mégot.

John se projeta brusquement en avant dans un bruissement, enroula son bras autour du cou de la sentinelle, qu’il tordit avec un petit bruit sec.

La cigarette du garde toucha le sol.

Non loin, les criquets reprirent leur chant nocturne.

John transmit son statut au reste de la Blue Team. Quatre voyants LED verts clignotèrent sur son écran, l’informant que les autres soldats déployés à la périphérie avaient été neutralisés.

Le prochain objectif, c’était la porte de livraison, l’endroit le plus fragile du système défensif de la base rebelle. Le corps de garde disposait de deux hommes à l’extérieur, de deux sur le toit et d’un nombre plus important à l’intérieur. En dehors de cela, toutefois, la base jouissait d’un dispositif de sécurité impressionnant, même selon les critères Spartans : détecteurs de mouvements et senseurs sismiques, trois périmètres de

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gardes, des chiens bien dressés et, dans les airs, des drones de classe Mako.

John fit clignoter son voyant de statut vert : c’était le signal qui intimait de passer à la phase suivante.

Le soleil couchant atteignait juste l’horizon quand les gardes postés sur le toit du bunker furent pris de convulsions et s’effondrèrent telles des poupées de chiffon. Ce fut si rapide que John ne put déterminer lequel avait été la première victime de Linda. Un battement de cœur plus tard, les deux hommes affectés au sol avaient été supprimés eux aussi.

John et Kurt se précipitèrent vers le corps de garde.

Kelly courut en tête, parcourut les trois cents mètres qui la séparaient du toit et le gagna d’un seul bond. Puis, elle ouvrit les conduits et y déposa des grenades assourdissantes.

Kurt se posta devant la porte et couvrit l’arrière, aux aguets. John attendit de l’autre côté de la porte blindée en acier, une main sur la poignée, un pied calé contre le mur. À l’intérieur, trois coups sourds se firent entendre.

John tira un grand coup et arracha littéralement la porte et son châssis de l’acier qui renforçait le mur.

Kurt entra, sa mitrailleuse M7 crachant par rafales de trois balles.

John fit son apparition un instant plus tard et estima les dangers en un clin d’œil. Trois gardes avaient déjà été abattus. Derrière eux, des rangées de moniteurs de sécurité diffusaient des centaines de vues de la base.

Sept survivants étaient assis à une table de jeu et récupéraient des effets des grenades. Leurs armes de poing étaient à moitié sorties de leurs étuis.

Calmement, John élimina chaque homme d’une balle dans la tête.

Plus rien ne bougeait.

Kelly se laissa tomber devant la porte et roula à l’intérieur, son arme relevée devant elle.

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— Système de sécurité, leur chuchota John.

Fred et Linda apparurent peu après et remirent la lourde porte en place dans son châssis.

— Dehors, tout va bien, déclara Fred.

Kelly prit place devant la rangée de moniteurs et produisit un pad tactile. Puis, elle chargea le groupe de logiciels d’infiltration informatique du SRN. Kurt pianota sur le clavier et désigna la note adhésive collée sous l’un des moniteurs.

— Ils nous donnent même le mot de passe, fit-il en secouant la tête.

— Ça marche, marmonna Kelly. On peut aussi faire ça à la coule. Le protocole de mise en boucle des moniteurs est lancé, à présent. Il n’y aura rien entre moi et la cible.

Pendant ce temps, Kurt étudiait les nombreux angles de vue et les sous-systèmes qui apparaissaient sur les écrans.

— Aucune alarme n’a été déclenchée, annonça-t-il.

Il observa une pause et porta son attention sur un groupe de gardes qui déchargeaient des caisses de munitions d’un Warthog. Un de ces hommes laissa maladroitement tomber une caisse, sur le flanc de laquelle on pouvait lire : MUTA-AP-09334.

John n’avait pas ordonné que l’on compulse les sous-systèmes, mais il ne l’avait pas non plus interdit. Ce que Kurt était en train de faire aurait pu déclencher l’alerte rouge dans le poste de commandement de la base.

John n’était pas sûr que cela soit une bonne idée d’utiliser SPARTAN-051, Kurt, pour remplacer Sam au sein de la Blue Team. D’un côté, c’était un Spartan extrêmement compétent.

L’Adjudant-chef Mendez avait pour routine de lui confier le commandement de la Green Team lors des exercices, et il l’avait souvent emporté face à la Blue Team de John. Mais de l’autre côté, pour un Spartan, il manquait fort de discipline. Il prenait le temps de bavarder avec tous ses collègues, et même

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avec les personnels non Spartans qui les formaient et les ravitaillaient. En tant que soldat professionnel pris en tenaille entre deux guerres (la première, contre des rebelles retranchés, et la seconde, qui les opposait à des extraterrestres xénophobes jouissant d’une technologie infiniment supérieure à la leur), Kurt gaspillait énormément de temps et d’énergie à se faire des amis.

— Caméras et détecteurs mis en boucle, déclara Kelly en décrivant un petit cercle avec son index. On a quinze minutes, avant que les chiens et les drones ne soient relevés et ravitaillés en carburant. Nous n’aurons donc à ne nous occuper que des gardes.

— Bougez-vous, tout le monde, intima John à son équipe.

Kurt hésita, les yeux toujours rivés sur les moniteurs.

— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda John.

— J’ai une drôle d’impression, murmura Kurt.

Cela préoccupa John. Personne n’avait commis d’erreur, et aucun signe n’indiquait que l’ennemi avait réagi à leur présence. Mais Kurt avait la réputation de savoir renifler les traquenards. John avait été plusieurs fois la victime de son intuition, pendant l’entraînement.

Il adressa un signe de tête au moniteur toujours vide de tout signal anormal.

— Explique.

— Les gardes qui déchargent ce Warthog. On dirait… qu’ils se préparent à quelque chose. On peut tromper les systèmes de sécurité et les machines, ou bien on peut les configurer pour qu’ils racontent n’importe quoi. Mais les gens, c’est une autre histoire.

— Je comprends, dit John. On va rester aux aguets, mais on doit coller au programme. Allez, on bouge.

Kurt se leva et jeta un œil derrière lui, vers le moniteur, comme ils sortaient du corps de garde.

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Les Spartans se faufilaient d’ombre en ombre, ici contour­­nant un entrepôt, là progressant par les quartiers des officiers, pour enfin, une fois parvenus au centre de la base, se rapprocher d’un second entrepôt. Ce bâtiment était cerné de trois barrières, sur lesquelles figuraient des écriteaux prétendant que la cour de gravier qui se trouvait au-delà était minée.

Huit gardes patrouillaient le périmètre. Un Warthog modifié était stationné sur le côté ; on l’avait coupé en deux, et une nouvelle section médiane, pouvant apparemment transporter dix hommes au combat, y avait été soudée. Cela suffirait.

John produisit une minuscule baguette et la pointa sur le bâtiment. Le compteur de radiations indiqua un niveau au sol cent fois supérieur à la normale pour cette planète.

Cela confirmait que leur cible principale se trouvait à l’intérieur : trois ogives nucléaires FENRIS. Dans ce secteur, les dernières batailles menées contre les Covenants avaient quasiment épuisé les réserves de matériaux fissiles du CSNU. Les insurgés en avaient eu vent (ce qui démontrait que les capacités de leurs services de renseignement étaient considérables), et ils étaient entrés en contact avec le CENTCOM local afin de lui faire une proposition plutôt hardie : ils affirmèrent avoir dérobé les ogives et prétendirent avoir des patients atteints du syndrome de Borren en leur sein et désirer bénéficier de l’expertise ainsi que des produits pharmaceutiques que seuls les médecins du CSNU étaient en mesure de prodiguer.

Le CENTCOM avait répondu qu’il allait étudier la question.

Ce qu’il fit, avant d’envoyer la Blue Team récupérer les ogives et, si l’occasion se présentait, abattre les chefs rebelles qui croiseraient leur chemin.

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John fit signe à son équipe de se déployer autour du bunker et de s’embusquer pour se débarrasser des gardes. Des voyants verts d’assentiment clignotèrent sur son écran. Kurt fut le dernier à activer le sien. Ses réticences étaient palpables.

John adressa un bref signe de la main puis désigna le Warthog, lui intimant ainsi de faire en sorte qu’il soit prêt à démarrer séance tenante.

Kurt opina du chef.

Le « sentiment » de Kurt, selon lequel quelque chose clochait, était contagieux. John n’aimait pas ça, mais il refoula ses inquiétudes. La Blue Team était en position.

John ôta la bandoulière de son fusil et mit en joue. Il donna le signal du départ et vit deux gardes s’effondrer.

Comme d’habitude, Linda avait été rapide et efficace.

John leur fit signe de poursuivre la manœuvre.

La Blue Team se faufila à l’intérieur, balayant des yeux les recoins sombres du bâtiment.

L’endroit était vide, à l’exception des portants d’acier qui maintenaient les trois caissons coniques abritant les ogives. Le compteur de radiations de John lui indiqua sans conteste que leurs charges n’étaient pas constituées d’explosifs conventionnels.

Il désigna Kelly et Fred, un des portants, puis le Warthog garé à l’extérieur. Ils hochèrent tous la tête.

Kurt fit clignoter un voyant rouge.

Nul Spartan n’utilisait le voyant rouge à moins d’avoir une bonne raison de le faire.

— On annule, dit John. On se barre. Tout de suite.

Il fut pris de vertiges.

Puis il vit Linda, Fred et Kelly tomber à genoux.

Les ténèbres l’engloutirent.

John se réveilla en sursaut. Chacun de ses muscles le brûlait, et son crâne lui donnait l’impression d’avoir été passé

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au laminoir. C’était bon signe : cela signifiait qu’il était encore en vie.

Il se raidit pour lutter contre une formidable pression.

Il cligna des yeux afin de s’éclaircir la vue, et constata qu’il était assis contre un mur, toujours à l’abri dans le bunker haute sécurité.

Les ogives étaient encore là, elles aussi.

Puis, John discerna un commando d’une dizaine d’hommes dans l’entrepôt. Ils l’observaient. Ils relevèrent le canon de leurs mitrailleuses calibre 30, le calibre de prédilection des forces rebelles. Surnommées les « machines à confettis », elles manquaient grossièrement de précision, mais à bout touchant, cela n’allait pas poser de problème.

Le reste de la Blue Team s’allongea, le visage contre le sol de béton. Des techniciens vêtus de blouses s’accroupirent au-dessus d’eux et prirent une vidéo numérique haute définition de la scène.

John se crispa dans son armure devenue inerte. Il lui fallait rejoindre ses coéquipiers. Étaient-ils morts ?

— Inutile de lutter, fit une voix.

Un homme aux longs cheveux gris se présenta devant John.

— Mais essayez si ça vous chante. Nous vous avons posé des colliers inhibiteurs de neurones, à vous et à vos camarades. C’est l’équipement standard que réserve le CSNU aux criminels dangereux. (Il sourit.) Je serais prêt à parier que si vous n’en portiez pas, vous pourriez, et seriez fort enclins à, me réduire en bouillie dans ma fabuleuse armure.

John garda le silence.

— Détendez-vous, dit l’homme. Je suis le général Graves.

John connaissait ce nom. Howard Graves était l’un des trois hommes que l’on pensait à la tête du front rebelle unifié.

Sa présence en ces lieux n’avait rien d’une coïncidence.

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— Vous souffrez d’une décompression trop rapide, c’est la maladie des caissons, expliqua-t-il. On s’est servis d’une plaque antigravité, une vieille technologie qui n’a jamais percé, mais pour ce que l’on voulait faire, c’était l’idéal. Une émission concentrée a trompé les senseurs de vos armures, et ils vous ont affirmé que vous vous trouviez dans un environnement soumis à 10 g. En conséquence, ils ont accru votre pression sanguine afin de vous garder en vie, ce qui vous a rendus brièvement inconscients.

— Vous avez tout manigancé, dit John d’une voix rauque.

— Vous autres Spartans nous avez plutôt ralentis dans nos efforts pour libérer les mondes frontières, déclara le général. » L’an dernier, c’était la station Jefferson dans la ceinture d’astéroïdes d’Eridanus ; il y a aussi eu notre contre-torpilleur Origami ; il y a six mois, c’était le tour de notre manufacture d’explosifs, suivi de l’incident survenu en Micronésie et des soucis subis par notre cellule de saboteurs sur Reach. Avant de voir les vidéos, je n’y croyais pas. Tout avait été commis par le même quatuor. D’aucuns affirmaient que la Blue Team n’était qu’un mythe. (Il donna de petits coups secs sur la visière de John.) Tu m’as l’air assez tangible à mon goût, toi.

John lutta, mais il aurait tout aussi bien pu se trouver enseveli sous des tonnes d’acier. Le collier neural neutralisait tous les signaux transmis par son épine dorsale et en redirigeait l’informatique autonome vers son cœur et son diaphragme.

Il lui fallait se concentrer. Avait-on posé des colliers à tous les membres de son équipe ? Oui. Chaque Spartan exhibait une grosse attache à la base du cou, qui recouvrait entièrement leurs ports d’interface IA. Graves était particulièrement bien renseigné sur leur équipement.

Minute. John observa minutieusement ses camarades paralysés : Kelly, Linda et Fred. Kurt manquait.

— Comme vous avez sûrement dû le supposer, poursuivit Graves, tout cela a été accompli pour votre bien. Nous avons

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rassemblé à grand-peine nos matériaux fissiles et nous sommes assurés de le faire assez négligemment pour que même votre SRN en soit avisé. Nous avons prévu l’envoi de la Blue Team. Je suis assez satisfait que l’on puisse deviner aussi facilement les stratégies de vos chefs.

Un jeune commando approcha et salua son supérieur.

— Les senseurs externes sont en ligne, mon général, chuchota-t-il nerveusement.

Graves fronça les sourcils.

— Exfiltrez-moi ces prisonniers. Faites sonner l’alerte générale. Vérifiez les ogives et ordonnez aux transporteurs de…

Un formidable vrombissement retentit. Succinctement, John discerna des reflets de métal tourbillonnant à l’entrée.

Il n’eut qu’une fraction de seconde pour comprendre qu’il s’agissait d’une mine antipersonnel Asteroidea à huit branches.

Un amas de gravier en enrayait la détente de pression, juste avant qu’elle n’explose dans un fracas de tonnerre.

Des scories métalliques cliquetèrent et rebondirent sur l’armure de John.

Tous ceux qui étaient présents dans la salle se recroque­­ villèrent sous l’effet du souffle et de la grêle d’éclats.

Six soldats de commando, blessés de toutes parts et les oreilles sanguinolentes, se levèrent, prêts à tirer. Ils secouèrent vivement la tête pour reprendre leurs esprits.

Le Warthog modifié stationné à proximité du bunker percuta la double-porte béante.

L’entrepôt tout entier trembla sur ses fondations.

Les soldats de commando ouvrirent le feu et se préci­­ pitèrent vers l’entrée.

Le Warthog s’ébranla puis, dans un crissement, passa en marche arrière avant de revenir se jeter contre la porte. Les murs en tôle ondulée hurlèrent, gauchirent et, dans une gerbe

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d’étincelles, le véhicule emboutit sa section médiane dans le bâtiment telle une reine termite sur le point de lâcher ses œufs.

Les commandos déchargèrent leurs « machines à confettis » et dévastèrent la coque blindée du Warthog.

Le haut de la section médiane s’ouvrit, et trois autres mines antipersonnel prirent leur essor, tournoyant tels des jouets d’enfants. Toutes atterrirent à un angle du bunker… et explosèrent.

Des fragments de métal en fusion décimèrent les commandos.

Kurt bondit et abattit les trois hommes qui bougeaient encore. Puis, il se précipita auprès des Spartans et les libéra de leurs colliers.

Kelly se releva, bientôt suivie de Fred et Linda.

D’un coup sec, Kurt arracha le collier de John. Il fut parcouru de picotements, mais ses muscles répondaient à nouveau. Il fit jouer ses membres. Les nerfs n’avaient subi aucun dommage permanent.

— On peut jeter la discrétion aux orties, maintenant, déclara John. Kurt, tu vas piloter le Warthog. Et vous, Kelly, Linda et Fred, vous allez me charger ces ogives aussi vite que possible.

Tous acquiescèrent.

John rejoignit le général Graves. Un éclat de tôle ondulée s’était logé dans son crâne.C’était fâcheux. Graves connaissait les secrets de la structure du commandement et des services de renseignement des rebelles, des secrets que John n’avait pu qu’entrapercevoir. Leurs capacités avaient été gravement sous-estimées. Étant donné la menace imminente plus importante que représentaient les Covenants, John se demandait comment les rebelles allaient finir par réagir : attaquer un CSNU affaibli par la guerre qu’il mène face à des extraterrestres, ou combattre un ennemi commun de l’humanité ?

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Il ignora ces réflexions stratégiques plus vastes, se concentra sur l’aspect tactique et aida Kelly à disposer la dernière ogive dans la partie médiane blindée du Warthog.

Chargé des bombes et des cinq Spartans en armure, le bas de caisse du véhicule traînait au sol. John grimpa à l’arrière, Kurt pilotait, et ils accélérèrent laborieusement dans la direction opposée à l’entrepôt désormais sécurisé.

— Vitesse de croisière jusqu’à la zone de récupération, ordonna John.

Kurt alluma la radio du Warthog, qui émit un flot de bavardages confus : « L’unité Un ne répond pas. Coups de feu reportés. Un homme à terre ! Transporteur blindé verrouillé.

On ouvre le feu ? Confirmez… Confirmez ! Que toutes les unités convergent. Maintenant ! » — Tout le monde sur le centre ! hurla John.

Des rafales de balles perforantes criblèrent le Warthog, pénétrèrent son flanc comme du papier et entaillèrent les enveloppes des ogives.

— Derrière les ogives ! s’emporta Fred.

John, Kelly, Fred et Linda se blottirent derrière les missiles.

Avec ironie, ces ogives nucléaires allaient leur fournir leur meilleure défense. Leurs enveloppes étaient surrenforcées, à la fois pour contenir les radiations, endiguer la fureur d’un petit soleil quelques fractions de secondes et accroître le rendement thermonucléaire.

John porta son regard sur le siège du pilote. Kurt se recroquevilla davantage, afin de constituer la plus petite cible possible. Il était en train de risquer sa vie pour les ramener tous sains et saufs.

Le Warthog crachait de la fumée, mais sa vitesse atteignit lentement les quarante kilomètres à l’heure. Des vibrations aiguës se firent entendre dans le moteur. Un pneu éclata, et le véhicule fit une embardée à droite, puis à gauche.

Kurt reprit le contrôle du véhicule et poursuivit sa route.

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Les tirs de balles perforantes se firent moins pressants, puis cessèrent.

— Accrochez-vous ! rugit Kurt en rétrogradant.

Le Warthog défonça le grillage de fils barbelés rasoirs, traversa des champs de gravier et s’enfonça dans la forêt.

— Route 32-B jusqu’à la zone de récupération, dit Kurt. « Route » était une désignation plutôt inventive. Ils manquèrent de finir en tonneau, fauchèrent des arbres, dérapèrent et projetèrent des décalitres de boue.

— Des drones ! s’écria Kurt.

— Ouvrez l’écoutille, ordonna John.

Kelly et Fred désassemblèrent les panneaux du toit de la section médiane.

John sortit la tête et repéra trois chasseurs drones Mako qui se ruaient sur eux, chacun lesté d’un gros missile. Le Warthog ne survivrait pas à un choc frontal. Même un tir mal ajusté pouvait venir à bout d’un essieu.

Linda se releva à la vitesse de l’éclair, fusil déjà en main, l’œil dans le viseur.

Ils ouvrirent le feu.

Le drone de tête partit en fumée et s’écrasa dans les arbres.

Le drone suivant redressa le nez, vacillant. Il libéra son missile et vira de bord. Une traînée de vapeur et de feu fusa, et un missile se précipita vers eux à une allure effrayante.

Linda tira, déchargeant ses balles aussi rapidement que la chambre de son arme pouvait les libérer. Le missile se mit à chuter en vrille… mais il était encore sur la bonne trajectoire.

— Zone de récupération à trois cents mètres, annonça Kelly en consultant sa tablette. Le comité d’accueil nous a repérés.

— Dis-leur qu’on a le colis… et qu’on a besoin d’un coup de main.

— Bien reçu, confirma-t-elle.

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Le missile était à deux kilomètres de là… et il se rappro­­ chait à toute allure.

Devant, la forêt se muait en marécage. Dans un vacarme de tous les diables, un Pélican s’éleva au-dessus de la cime des arbres, et ses deux mitrailleuses crachèrent un nuage de balles en uranium appauvri sur le missile. Elles le firent exploser dans une gerbe de flammes et de vapeur.

— Tenez-vous prêts à la récupération, Blue Team, conseilla le pilote via la liaison COM. On a des monoplaces hostiles en vue. Alors, accrochez-vous et révisez bien vos protocoles zéro g.

— Vérification de l’intégrité des combinaisons, ordonna John.

Il se souvint de Sam, et de la façon dont son ami s’était sacrifié, décidant de rester à bord d’un vaisseau Covenant assiégé, car sa combinaison n’était plus pressurisée. Si une seule balle perforante parvenait à pénétrer leur MJOLNIR, ils se retrouveraient dans les mêmes sales draps.

Le Warthog, qui vomissait de noirs nuages de fumée, fit halte à grands fracas.

Le Pélican s’installa au-dessus de lui et s’y amarra de très près.

Tous les membres de la Blue Team firent clignoter leurs voyants verts, et John se détendit. Cela faisait longtemps qu’il retenait son souffle.

Le Pélican souleva le Warthog chargé de Spartans et d’ogives, dans les airs.

— Préparez-vous, conseilla le pilote. Signaux en approche sur le vecteur zéro sept deux.

L’accélération secoua violemment John, mais il ne faiblit pas, soutenant les ogives nucléaires d’une main, l’autre posée sur le flanc perforé du Warthog. À l’extérieur, la limpide lueur bleue céda la place à l’obscurité, et la voûte céleste se peupla d’étoiles scintillantes.

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— Rendez-vous avec le Bunker Hill dans quinze secondes, annonça le pilote du Pélican. Préparez-vous, saut en Sous-espace imminent. Destination Hors-système.

Avec précaution, Kurt quitta le siège du pilote et vint rejoindre ses camarades dans la section médiane.

— Tu as fait du bon boulot, lui dit Fred. Comment as-tu su que c’était un piège ?

— Grâce aux gardes qui déchargeaient les munitions contenues dans le Warthog, expliqua Kurt. Sur le moment, j’ai vu ce qu’il se passait, mais j’ai failli le prendre en compte trop tard. Ces caisses de munitions étaient marquées comme renfermant des balles perforantes. Toutes. Personne n’a besoin d’autant de balles de cette sorte si ce n’est pour s’en prendre à un groupe de tanks légers…

— Ou une escouade de Spartans, dit Linda, qui venait de se joindre à eux.

— Nous, fit observer Fred.

Kurt secoua sombrement la tête.

— J’aurais dû le comprendre plus tôt. J’ai failli tous nous faire tuer.

— Tu as sauvé tout le monde, tu veux dire, dit Linda en lui donnant un coup d’épaule.

— La prochaine fois que tu as un pressentiment comme celui-là, fais-m’en part et assure-toi que j’ai bien compris, lui dit John.

Kurt opina du chef.

John s’interrogeait sur les « pressentiments » de cet homme, sur sa connaissance instinctive et subconsciente des dangers. L’Adjudant-chef Mendez les avait tous fait travailler si dur, des cours relatifs à l’intégration d’un groupe d’assaut et à la priorisation des cibles au combat à mains nues, en passant par les tactiques sur le champ de bataille, que l’ensemble faisait désormais partie intégrante d’un bagage de réflexes du plus haut niveau. Mais cela ne signifiait pas que les impulsions

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biologiques sous-jacentes de ces combattants n’avaient aucune valeur. Bien au contraire.

John posa une main sur l’épaule de Kurt, à la recherche des bonnes paroles à prononcer.

Comme d’habitude, Kelly énonça les sentiments que John aurait été incapable d’exprimer.

— Bienvenue dans la Blue Team, Spartan. On va faire une chouette équipe.

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À suivre...