La Direction des Affaires Scolaires (DASCO) et la Direction des Affaires Culturelles (DAC) de la Mairie de Paris La Maison du Geste et de l’Image et le Collège La Grange aux Belles présentent
la foule Un projet artistique des élèves de la classe d’accueil et NSA
La Direction des Affaires Scolaires (DASCO) et la Direction des Affaires Culturelles (DAC) de la Mairie de Paris La Maison du Geste et de l’Image et le Collège La Grange aux Belles présentent
la foule Un projet artistique des élèves de la classe d’accueil et NSA
Projet artistique encadré par Gamzé Atay Petit, Sophie Bekesi Enseignantes en français Hélène gaudy écrivain Bruno Dieudonné Photographe Dans le cadre d’une résidence L’art pour grandir (Direction des affaires scolaires et Direction des affaires culturelles)
ont participé à ce projet Classe NSA
Classe d’Accueil
Sofia BERKANE Abderrahmane CISSOKHO Aïssatou DIALLO Alexandre DOS SANTOS PEDROSA Khled ELWAKIL Aïssata GASSAMA Hamidou KANTE Alhassane KONATE Djibril KONATE Iyad OBEID Caroline RIAUT Oumar SOW Fatouma TOURE Namory TRAORE
Favour Ayoola Amadou Dia Mamadou Diallo Hamet Diarra Pauline Dong Anass Elkortobi Petra Ilic Yang Yang Jia Leonardo Kabongo Mohamed Konate Achour Saifi Kenza Saifi Adrien Saint-Pierre Amara Senane Laliam Sila Leonardo Silva kadydiatou Soare Abigael Temesgen Edomyas Temesgen Zijue Xie Yuru Xu Yixin Zheng
Comment créer l’envie d’écrire, comment transformer les images en mots qui deviennent des phrases puis des histoires ? Tout commence par une observation en ouvrant les yeux vers le monde qui nous entoure dans une gare. L’aventure continue par des prises de photos, Bruno fait découvrir le champ visuel en plongée, en contre-plongée, en plan large ou serré. L’individu, que l’on ne voit jamais, est dans la foule et de la foule on va l’extraire. Dans ces histoires d’enfants, il va devenir un personnage. Hélène fait découvrir le hors champ en faisant deviner le passé et le futur de ses personnages. Ces deux artistes composent un duo qui permet aux élèves allophones de mieux s’approprier la langue française en leur demandant d’observer, de réfléchir et d’imaginer puis d’écrire. Ce sont des habitudes scolaires que ne possèdent pas mes élèves de la classe NSA. Parmi eux, nombreux ont longtemps été privés de l’école et d’autres ne maîtrisaient pas l’alphabet latin en arrivant. En leur demandant d’imaginer et de s’exprimer librement, Bruno et Hélène leur proposent une autre approche pédagogique, ludique mais solidement structurée. Fatouma, malienne de 17 ans, disait au début : « dire ce qu’on voit est bien, mais pourquoi imaginer ce qui n’existe pas ? ». À la fin, elle a réussi à donner plein d’idées. Et Oumar, très fier d’écouter l’histoire qu’ils ont créée, lue par Hélène dans un silence absolu, émerveillé comme s’il venait de regarder un film d’action, a dit « Mais s’il vous plaît ! On ne peut pas le publier ? ».
Nous avons lu un texte proposé par Hélène concernant le désir de tout décrire dans la ville afin d’évoquer la notion de point de vue. Pour notre travail, nous sommes allés à la gare du Nord. Les élèves ont beaucoup aimé manipuler l’appareil et ont essayé de répondre à la consigne donnée par Bruno : prendre la foule en photo. Mais il ne fallait pas oublier que dans la Foule, il y a des individus ! Il fallait aussi prendre des notes pour décrire le lieu, les gens. C’était un travail très intéressant, les élèves ont ouvert leurs yeux et ont commencé à décrire leurs sensations. En salle informatique, ils ont retranscrit leurs notes en petits textes qu’Hélène a ensuite fusionnés pour écrire un long texte qui nous a paru soudainement très poétique ! Avec Bruno, les élèves ont constitué des catégories de photos et ont réfléchi aux images qui avaient un lien : vue générale, portraits, images graphiques, images évoquant le temps. Les élèves ont choisi une photo dans la catégorie portrait. Ils ont commencé par décrire la personne qui peu à peu est devenue un personnage. La dernière séance a été consacrée à la finalisation des textes, la constitution d’un panneau de photographies et la réflexion sur la présentation de notre travail. Les élèves sont tous d’accord pour dire qu’ils ont « appris des choses » avec Bruno et Hélène. Nous les remercions pour leur travail, leur professionnalisme et leur sympathie.
Gamzé Atay Petit
Sophie Bekesi
Passer du collectif à l’individuel, de la foule à l’individu, voilà ce que nous avons exploré avec la classe d’accueil et la classe NSA du collège La Grange aux Belles à Paris. Pour cela, nous nous sommes d’abord rendus à la gare du Nord : nous voulions voir la foule et la prendre comme point de départ pour travailler l’observation, les sensations. Pour ces élèves, la France est un pays nouveau et le français, une langue à investir. L’apprentissage de la foule et de tout ce qui va avec — bruits, images, odeurs, mouvement, souvenirs, visages saisis à la volée —, c’est donc aussi celui du regard et de la langue : comment mettre des images et des mots sur tout ça ? Avec des textes de Georges Perec, de Joy Sorman qui s’est immergée pendant une semaine dans cette même gare du Nord, avec des photographies de Paul Graham, Massimo Vitali, Albin Millot, avec, surtout, de la pratique sur le terrain et en classe, on a appris à faire des images, à les regrouper, à les comprendre, à en tirer des mots et des histoires. La gare du Nord, ce vivier de micro-événements, spectacle pour qui sait rester assez un moment immobile, nous a permis d’aborder plusieurs questions : est-ce qu’inventer, c’est mentir ? Quel est le lien entre la foule et la solitude ? Et comment se servir de ce qu’on vit pour se donner le droit d’imaginer ? Hélène Gaudy
Chaque projet artistique est une façon pour moi de guider les élèves dans une démarche émancipatrice pondérée par mon regard. Du collectif à l’individuel, du singulier au pluriel, chacun devient acteur de son discours pour multiplier et confronter les entités singulières. Expérimenter le médium photographique pour arriver à créer une photographie "expérience", tel est le chemin dans lequel j’ai essayé de les amener. B.Dieudonné
#1 La Foule Gare du Nord Pour écrire, pour faire des photos, pour inventer, on part toujours du monde qui nous entoure. On en saisit des bribes, qui deviennent matériau. La première chose à faire, c’est donc de sortir et de regarder, d’être sensible aux détails. Avec un appareil photo, un cahier et un stylo, nous sommes devenus les spectateurs attentifs de la foule. Prise de note et prises de vues se sont conjuguées pour aboutir à des composition de textes et d’images : le puzzle collectif des regards de chacun.
Il y a beaucoup de gens à la Gare du Nord, des policiers, des gens riches. Il fait soleil. La lumière apporte du bonheur aux gens. Elle transperce les vitres et fait des dessins magiques sur le sol. On dirait des projecteurs de cinéma. Il y a une dame qui porte des habits bizarres — une capuche avec une jupe. Une personne louche, de la musique, une dame qui fume, elle porte des chaussures à talons, elle a beaucoup de valises. Des filles blondes qui sont belles, avec de beaux habits. Trois filles qui fument. Un jeune homme porte son fils sur le devant. Des gens comme des fourmis. Une femme asiatique parle avec son mari. Ils regardent les gens. Ils ne bougent pas. Ils ont beaucoup de valises. Jaune, bleu, noir. Un sac orange. Le monsieur a mis ses lunettes. Ils ont l’air fatigué. Peut-être qu’ils viennent de Londres ou qu’ils attendent quelqu’un. Une maman range le nounours de sa fille dans son sac. Il y a un homme avec un pantalon mais pas de haut. Il est grand et maigre. Il a les cheveux blonds. Son pantalon est sale. Il a posé des habits à côté de la poubelle. Il se gratte. Il a l’air d’avoir faim. Il regarde quelque chose là-bas. Il a l’air fatigué. La lumière est très forte. Il a des moustaches. Il a fermé ses yeux comme les yeux des Chinois.
J’ai vu une petite fille perdue au milieu des gens. Un homme qui porte plein de vêtements sur lui, six t-shirts, quatre pantalons. Des gens qui attendent le train comme si ça allait tomber du ciel. Pourquoi les gens ne bougent pas du tout ? Ils restent sur place. Des hommes qui travaillent, un homme gros, marrant, il a des vêtements bleus et un sac noir. Des policiers habillés bizarrement, une petite dame vieille. Un homosexuel. Des gens qui font signer une pétition. Des hommes chauves. Des femmes qui font des crêpes. Une installation avec de la fumée. Les gens me font penser à des cailloux. J’ai vu un militaire que j’ai pris en photo. Des étrangers qui viennent visiter Paris. Des anglais. Beaucoup de couleurs, des fleurs magnifiques, des fleurs rouges, blanches, des feuilles vertes, roses, violettes, jaunes, allongées. Une dame qui dort à côté de sa fille, des affiches de Iphone5S, des affiches colorées, un handicapé et son chien, des boutiques, des enfants avec leurs parents. Des gens qui attendent comme s’ils étaient au cinéma. Un piano, un pigeon. La cabine sert de cachette.
En face de moi il y a une belle femme, des couples en train de manger, des Chinois qui attendent le train sur le quai. Une dame avec des cheveux violets. On dirait un arc-en-ciel avec ses habits rouges, jaunes, bleus, marron, blancs, verts, orange. Un monsieur qui joue de la musique d’amour. Un TGV bleu, blanc, rouge, les couleurs de la France. Les parasols du café me font penser à la plage. Il y a beaucoup de gens, beaucoup de bruits. La voix d’une dame qui fait des annonces au micro. Le bruit des travaux. Une machine qui parle, des gens qui achètent du chocolat, des gens qui partent en voyage, la sonnerie du train, l’odeur des voitures. Des gens qui marchent, des gens habillés en bleu, des contrôleurs, des gens au café, un tapis roulant, des gens qui dorment par terre, beaucoup de gens qui voyagent, des gens qui mangent en marchant. La foule, des poussettes, une femme avec des cheveux noirs. Il y a des trains. Des gens qui achètent un ticket. Du soleil, des cris.
La Gare du nord est très vaste Je vois un train bleu Un piano Une petite dame avec un foulard — elle mesure un mètre Un monsieur fait le ménage Je vois un militaire avec un grand pistolet Il y a une statue sans visage Un point rouge sur le front d’une dame Des écritures en arabe et des contrôleurs qui contrôlent les tickets Il y a des TGV et beaucoup de guichets Des trains, toutes destinations Je vois une femme avec une valise violette, la police, des mots : « tourisme » Dans la gare, il fait froid et il n’y a pas de lumière On voit des personnes noires, des personnes blondes Des voyageurs attendent Peut-être que ce sont des touristes qui viennent pour la première fois, ou des gens venus de pays étrangers pour commencer une nouvelle vie D’autres partent dans d’autres pays comme l’Allemagne, la Belgique Il y a des gendarmes qui surveillent partout et des écrans qui indiquent l’heure de départ des TGV et des plaques qui indiquent la voie Il y a beaucoup de boutiques où on vend des gâteaux, des hommes qui portent des guitares sur le dos On voit un piano et des garçons jouer ensemble Une famille qui arrive à Paris avec ses bagages Et une œuvre d’art Et un monsieur qui filme l’œuvre d’art Il fait trop froid Il y a la foule, ils ont tous des sacs Il y a des voyageurs et des touristes, des Allemands Et j’ai vu des filles voler une vieille dame Il y a un ascenseur, le monde en marche C’est comme un film mais différent parce qu’après une demi-minute, le monde change Un garçon chante avec ses amis Il y a beaucoup d’hommes habillés en blanc et des femmes en rouge Il y a une femme âgée et un jeune homme qui prend un café Il y a un mari qui donne la main à sa femme et ils parlent, ils sont heureux d’être ensemble Il y a une vieille qui est pressée de prendre son train qui est en retard Il fait froid dans la gare
Les gens grelottent de froid Le train est blanc, rouge et gris Il y a une mère avec son enfant Les mendiantes demandent de l’argent Deux femmes sont en colère parce que les gens n’ont pas donné beaucoup d’argent Il y a deux messieurs qui font la sécurité Il y a une femme qui explique à une autre femme comment prendre le métro Il y a une femme qui écoute de la musique Il y a des gens qui montent l’escalator et des gens qui regardent en bas Les Stewart parlent d’or et ont des capuches vertes Près des lumières, il y a des dames qui sont dérangées par nos photos Il y a beaucoup de gens qui sortent de la Gare du Nord Il y a des gens qui fument et qui parlent avec leurs copines Des gens qui mangent, qui font du commerce Il y a des gens qui ne veulent pas qu’on les prenne en photo Il y a beaucoup de choses dans les rues de Paris qu’on ne voit pas bien Les gens attendent au feu rouge Je vois de vieux hôtels et beaucoup de cafés Il y a une grande rue qui s’appelle la rue de Dunkerque À côté de cette rue, il y a un hôtel Kyriad et un tabac Il y a un groupe de pickpockets qui changent d’habits pour ne pas être repérés Le temps est beau, la rue est sale Il y a des foules fantastiques C’est un souvenir Quand je prenais le train pour aller en Italie C’était le soir Je dormais dans le train À l’aube, je me suis réveillée Quand je suis allée aux toilettes, j’ai vu le ciel qui avait beaucoup de couleurs C’était la première fois que je voyais le ciel avec autant de couleurs Il y avait du rose, de l’orange, du jaune, du vert, du bleu clair et du bleu marine Comme un arc-en-ciel J’ai regardé les gens acheter des légumes, des fruits et des baguettes J’ai vu un palmier vert Une femme avec une valise rouge Un immeuble en verre Des ascenseurs Des indications Des trains
#2 La Femme disparue Trois images, c’est déjà une séquence. D’abord, on voit un couple. Puis, sur la dernière photo, la femme n’est plus là : évaporée, effacée. Où a-t-elle bien pu disparaître ? À partir de cette situation qui entraîne une histoire, on entre dans les images, on en extrait chaque personne pour en faire un personnage auquel on va prêter notre voix. Comme au théâtre, on utilise l’oralité pour donner de multiples versions d’une même histoire. Et si j’étais cette femme, où est-ce que j’irais ?
L’homme japonais Je viens du Japon avec ma femme. Je suis là depuis ce matin, je ne connais personne. Je regarde partout, je ne sais pas où aller, je demande à tout le monde, les gens me disent qu’ils ne savent rien. Moi, j’attends. Avec ma femme, on visite Paris. J’ai trouvé la Tour Eiffel très grande. Les Champs Elysées sont étranges, il y a beaucoup de monde, on entend toutes les langues. À Paris, il y a plein de maisons qui sont très belles. À Belleville, j’ai vu des restaurants chinois et des filles chinoises très sympas. Je veux rester ici parce qu’il y a de belles femmes. J’ai vu beaucoup de femmes blondes, avec des yeux bleus, douces, charmantes, avec de belles chaussures à talons hauts. Je suis au Paradis, pourquoi je ne suis pas venu me marier ici en France ? Je parle un peu français, je sais dire « bonjour » et « au revoir ». Je vois un jeune homme jeter quelque chose qui brille par terre. Un diamant ? La gare du Nord est vraiment magnifique. Je demande à ma femme d’aller me chercher à manger. Elle, elle ne veut pas. Elle ne répond même pas. Elle est jalouse. Elle a un regard bizarre. Quand je regarde une autre femme, ma femme me regarde toujours bizarrement. Mais quand elle regarde les garçons, moi je regarde ma femme bizarrement aussi.
Le Syrien en survêtement blanc D’habitude, je prends le métro, ligne 4, pour rentrer à la maison. Je suis très fatigué. Je veux dormir jusqu’à demain. Je travaille toute la journée, dans le bâtiment. Je travaille dur. Mais aujourd’hui, je vais partir au Sénégal avec mon ami. C’est la fête. Pendant un mois, je vais me reposer et ne pas travailler. Le Sénégal, c’est beau. On va manger du Tiep. Mon ami m’a dit, le Tiep, c’est trop bon. Là-bas, je ne vais pas peindre, je vais dormir. Le Sénégal, ça doit être magnifique. Il y a plein de fruits et des animaux que je n’ai jamais vus dans la vie. Mon ami m’a raconté plein d’histoires sur les forêts. Je vais aller à la plage. Il fera chaud. L’eau sera blanche et bleue. Je suis content d’aller là-bas même si je ne parle pas le wolof. Je ne parlerai qu’avec mes amis. L’eau sera salée. Au Sénégal, on ne gagne pas sa vie comme ici. Comment je vais faire ? Je n’ai rien dit à ma famille, donc je n’ai rien emporté. Je vais acheter des vêtements là-bas. Je veux me débarrasser de tout mon passé. Il ne me reste rien. J’ai jeté ma carte Sim par terre. Des gens m’ont vu, un homme et une femme japonais. Ils n’ont pas bougé pas. Ils avaient l’air perdu.
L’homme noir en noir Je m’appelle John. Je vais à l’aéroport acheter un billet d’avion pour rentrer chez moi au Sénégal. Ils m’ont donné rendez-vous à 15h30 mais il est déjà 16h, je suis en retard. Toute la journée, j’ai dormi. Après, j’ai couru plus vite qu’Hussein Bolt. Les gens me regardent bizarrement. Je dois aller au Sénégal avec mes trois amis, un Syrien, un Sénégalais et un Ivoirien. On va aller au Sénégal pour manger du Tiep. C’est du riz rouge avec des tomates et du atchéké, à base de manioc, des légumes, des carottes, du chou, du poulet ou du poisson. Des grands poissons frits dans l’huile. Ça sent encore meilleur que le grec. En regardant cette femme qui fait la queue avec ses deux sacs, en train de chercher de l’argent pour acheter ses billets, je pense à ma femme. Elle lui ressemble. Elle a la même coiffure et les mêmes yeux. Je préfère le Sénégal à Paris. Là-bas, il y a ma femme, mais aussi mes cinq enfants, trois garçons et deux filles. On attrape les ânes dans la forêt. Il y a des moutons, des vaches, des tigres. S’il y a une fête, tout le monde est invité. On danse beaucoup. On chante pour danser. On met des tatouages. On va aux champs. Mon ami a jeté quelque chose par terre. Je lui ai demandé ce que c’était. Il m’a répondu : j’ai jeté mon passé. Je vais courir plus vite, j’ai peur de rater l’avion.
La femme avec deux sacs et une capuche en fourrure Mon fils est parti sans autorisation. Il a quatorze ans. Il est parti parce que je n’étais pas gentille avec lui. Je me suis mal comportée. Je regrette. Pourquoi j’ai été méchante avec mon fils ? Il me manque trop, j’ai envie de le voir. Il est parti chez ma mère en Allemagne. Je suis arrivée gare du Nord mais je n’ai pas de billet de TGV. J’ai demandé à un monsieur, il m’a dit qu’il fallait que je fasse la queue. J’ai demandé, combien le billet ? Il m’a dit, ça coûte 100 euros. J’avais même pas cinquante centimes. Après, j’ai eu honte. Je n’ai pas d’argent, je suis perdue. J’étais en train de pleurer quand une vieille dame avec son mari m’a dit, pourquoi vous pleurez comme ça ? Parce que je veux aller voir ma mère pour ramener mon fils. Elle m’a demandé si elle pouvait m’aider. J’ai dit, oui, bien sûr. Mais comment ? Vous pouvez acheter les billets pour moi. J’ai trouvé une dame très gentille, comme je n’en avais jamais vu. Elle m’a donné de l’argent en plus du billet. Je vais voir mon fils, je suis très contente.
La dame au manteau rouge Je regarde les gens. Je vais prendre le train. Je suis avec mon mari qui est fâché parce que je ne marche pas assez vite. On a beaucoup de valises. Elles sont pleines d’argent, de diamants, de montres, d’or, de chaussures, de bijoux, de vêtements de marque. Hier, on a cambriolé une maison. On a tout caché dans les valises. On connaissait les propriétaires. On connaissait toutes les cachettes. On était voisins, ils avaient confiance en nous. On avait gardé leur maison pendant les vacances. Maintenant, on est obligés de déménager avec tout ce qu’on a volé. Les valises sont tellement lourdes que je me suis arrêtée et j’ai vu une dame qui pleurait. Je lui ai demandé ce qu’elle avait, elle m’a raconté qu’elle voulait rejoindre son fils en Allemagne mais qu’elle n’avait pas d’argent. Je vais lui payer son billet, je n’aime pas voir quelqu’un pleurer.
La femme qui attend son amoureux Je me suis fait belle, j’attends mon amoureux. Je vois beaucoup de gens qui achètent des billets, de belles femmes, un vieux monsieur et une vieille dame. Ils ont l’air généreux, ils donnent de l’argent à une femme. Moi aussi, j’aimerais vivre une belle histoire. J’entends du piano, des machines qui parlent, des téléphones, le bruit des trains, le bruit des pas. Ça sent le parfum, et des mauvaises odeurs. Je vois un monsieur avec cinq valises, un autre avec des chiens. J’ai très froid, je vais remettre mon manteau. On ne verra plus mes beaux habits. Maintenant, je me trouve moche. S’il ne vient pas, peut-être qu’il est parti avec une autre femme. Ou peut-être qu’il a eu un accident. Je me sens mal. Il y a un monsieur japonais qui me regarde. On fait du mime pour se parler. Je ne comprends pas tout mais je le trouve beau. Je pense que je lui plais. Si mon amoureux est parti avec une autre femme, moi aussi je vais partir avec lui. Il ne vient pas ? Tant pis pour lui.
La femme japonaise Je suis dans le train. J’attends qu’il parte. Je vois des gens qui rentrent et qui sortent des trains. J’entends le bruit des moteurs, des gens qui crient, des sirènes comme des violons. Je pense à mon voyage. Ça sera comment, là-bas ? Je me sens bien. Je vais à Londres pour une nouvelle vie. Je n’y suis jamais allée, c’est ma première fois. Je vais voir la Reine, Big Ben, plein de restaurants, une grande roue, de belles statues, un grand palais, le bus à deux étages, il y aura beaucoup de gens, beaucoup de bruit, des soldats qui ne bougent pas, j’ai envie de m’amuser, de me lâcher, de parler anglais, de connaître des gens, de gagner de l’argent, de changer de style de vie. Là-bas, ma vie sera différente, magnifique. à chaque fois que je verrai un homme japonais, je me rappellerai de ma vie de femme au foyer, quand je nettoyais la maison, quand je m’occupais de mon mari, de ma tristesse. à force de sortir, j’oublierai. Je vais devenir une femme libre.
#3 Portraits rêvés À partir de détails, de l’expression, de l’allure des gens qu’on observe, on bascule dans la fiction : inventer la vie de ceux qui, grâce à la photographie, nous ont laissé une trace.
Contaminée par le mal Je vois une femme âgée qui est habillée tout en blanc. On la voit de loin. On dirait qu’elle vient du Paradis. Elle ouvre les portes de l’Enfer et elle commence à être contaminée par le mal parce qu’elle a un sac noir et une barrette noire. Elle ne veut pas y entrer, mais elle est obligée. Elle a honte et les autres la regardent de travers. Puis elle devient entièrement noire comme eux. Elle devient méchante. Elle ne se reconnaît pas.
la femme brune Elle ressemble à une Italienne. Elle attend peut-être son amoureux et elle lui envoie un message pour savoir où il est. Elle est en train de fumer parce que son amoureux est en retard. Peut-être qu’elle va partir avec son amoureux en Italie. Il y a quelque chose qui fait une ombre sur le mur. Elle est sérieuse. Elle est très belle. Son amoureux a peut-être rompu avec elle, parce que son visage est triste.
La dame patiente Dans la gare du Nord, je vois une dame qui attend son mari. À treize heures, elle essaie de l’appeler parce qu’il est en retard mais il ne répond pas. Alors elle va prendre ses enfants à l’école. Elle s’appelle Maria. Elle est mariée avec deux enfants. Son mari s’appelle Roman Elle travaille dans une boulangerie. Son mari travaille dans le métro. Elle est très gentille. Elle aime beaucoup les enfants. Mais elle est stressée à cause de son mari. Elle ne l’aime pas. Elle a envie de divorcer parce qu’il lui crée tout le temps des problèmes. Il ne répond jamais à ses appels. Elle en a marre de tout ça alors elle dit, c’est la dernière fois.
Madame Stefani Madame Stefani est professeur de français à l’université Leonardo. Elle est à la gare du nord. Elle attend son amoureux. Elle lui a envoyé un message pour lui dire qu’elle est déjà arrivée et qu’elle l’attend. Elle l’attend tranquillement en écoutant de la musique. Dans dix minutes, son amoureux arrivera. Elle va être très contente et lui faire un bisou. Après, ils vont rentrer chez eux. Tranquillement.
L’homme qui prend des photo Il y a un homme qui est venu à Paris pour un mois de vacances. Il est arrivé à gare du Nord avec sa moto. Il prend des photos. Il est habillé avec des vêtements d’hiver mais il fait très chaud. L’homme est très content de venir ici parce qu’il n’avait jamais vu Paris. Il est venu tout seul grâce à son travail. Il est serveur aux Pays-Bas. Il pense que Paris est plus belle qu’Amsterdam.
La femme impatiente Cette femme est âgée. Elle a soixante ans, elle est française. C’est une femme impatiente. Elle a l’air méchante. Elle est dans une gare, attendant son mari. Elle mange un croissant parce qu’elle a trop faim. Elle n’aime pas du tout le froid alors elle porte toujours un gros manteau sur elle. Elle travaille dans un secrétariat médical. Elle regarde le panneau d’affichage pour voir à quelle heure son mari arrive. Derrière elle, il arrive, avec ses cheveux blancs et sa valise. Il est en train de pleurer d’émotion parce que ça fait trente ans qu’il n’a pas vu sa femme. Ils s’embrassent et rentrent chez eux.
Lina et Lena Lina et Lena ont pris leur petit déjeuner. Elles sont allées à gare du Nord pour rejoindre leur meilleure copine qui vient de Londres. Lina et Lena ont attendu longtemps mais leur copine n’est pas venue. Alors, elles ont acheté des billets pour aller la rejoindre à Londres. Mais leur copine était juste derrière elles, cachée par le panneau. Lina et Lena ont pris le train pour aller à Londres. Leur copine a pris le taxi pour aller chez elles. Cinq heures plus tard, Lina et Lena sont arrivées à Londres et y sont restées pour toujours.
Lina et Lena Lina et Lena ont pris leur petit déjeuner. Elles sont allées à gare du Nord pour rejoindre leur meilleure copine qui vient de Londres. Lina et Lena ont attendu longtemps mais leur copine n’est pas venue. Alors, elles ont acheté des billets pour aller la rejoindre à Londres. Mais leur copine était juste derrière elles, cachée par le panneau. Lina et Lena ont pris le train pour aller à Londres. Leur copine a pris le taxi pour aller chez elles. Cinq heures plus tard, Lina et Lena sont arrivées à Londres et y sont restées pour toujours.
Le garçon assassin La mère du garçon est chinoise. Donc, son visage a les traits chinois, mais ses yeux sont bleus comme le ciel. Il peut parler huit langues. Il est beau, sa peau est blanche et tendre, ses cheveux sont noirs d’ébène. Sa mère est une beauté céleste. Son père est un espion, le garçon est le subordonné d’un mécanisme international. Le garçon est un assassin mais il ne tue jamais d’honnête homme. Il est le premier assassin du monde. Si quelqu’un le tue, il gagne cent millions de dollars américains, mais personne ne peut l’assassiner. Tous ceux qui ont essayé sont morts. Maintenant, plus personne n’accepte cette tâche. Son identité n’a jamais été exposée.
La femme énervée Je vois une femme qui est très pressée. C’est pour cela que la photo est floue. Elle porte des lunettes noires et un t-shirt vert. Elle a une veste bleu nuit et un sac un peu doré. Elle me fait penser à une sorcière parce qu’elle a un gros nez.
La femme qui va à Londres C’est une femme qui a pris son billet sur Internet. Elle veut aller à Londres chez son ami. Elle attend sa mère pour partir ensemble. Le train part à 12h, mais elle est venue en avance, à 11h. Sa mère n’est jamais allée à Londres. Elles sont très contentes de voir une très grande ville. La dame parle peu anglais mais elle va apprendre vite. Elle imagine que c’est une belle ville, avec beaucoup de lumières et des décorations.
L’enfant Il y a un enfant qui veut donner un petit coup de main à sa mère pour mettre son pied dans sa chaussure. Sa sœur le regarde bizarrement. Il est très rigolo. Il a un grand sac. Il est très petit. Je crois que la chaussure de sa mère n’est pas à la bonne taille.
La femme inconnue Cette femme marche sur le trottoir à côté du bus. Elle marche vers la gare mais je ne sais pas si elle va à Londres ou si elle va prendre le métro. Peut-être qu’elle est énervée. Peut-être qu’elle est avocate. Peut-être qu’elle est dans une agence de sécurité. Peut-être qu’elle est écrivain. Peut-être qu’elle est conductrice de train. Peut-être qu’elle est aussi conductrice de taxi. Peut-être qu’elle ne voit pas très bien. Peut-être qu’elle est mariée. Peut-être qu’elle a des enfants. Peut-être qu’elle a des petits-enfants. Peut-être qu’elle a des cousines. Peut-être qu’elle est riche. Avec peut-être, on peut parler de l’avenir, et du passé, et du présent. Avec peut-être, on peut parler de l’imagination.
Les voyageurs Sur cette photo, je vois un jeune homme avec sa maman. Le jeune homme porte une écharpe rayée comme le t-shirt de sa maman. La veille dame a l’air fatiguée par son voyage. Elle ressemble à son fils. Ils viennent d’Italie pour passer les vacances à Paris parce que Paris, c’est une ville touristique. Ils discutent pour rester un mois de vacances à Paris.
Le vieil homme Le personnage principal est l’homme qui est au milieu de l’image. Il a l’air vieux. Il a teint ses cheveux parce que ses cheveux et sa barbe ne sont pas de la même couleur. Il regarde une jolie dame. La dame lui lance des regards sensuels. Il est bouche bée.
Les agents de sécurité Sur cette photo, je vois des agents de sécurité. Ils sont noirs et ils portent des vêtements orange et gris. Ils sont venus du Cameroun pour trouver du travail. Je vois quelqu’un qui passe avec sa valise et les agents de sécurité le regardent. Peut être qu’ils sont jaloux de lui parce qu’il a un bon travail.
L’homme fatigué Il est assis parce qu’il est très fatigué. Il a pris trop de soleil. Le vieil homme a rendez-vous à l’hôpital pour ses yeux avec le docteur Moritti. Il va lui conseiller de ne pas trop regarder la télé et de ne pas trop rapprocher une feuille quand il lit. Si le monsieur ne suit pas ces conseils, il deviendra aveugle. Un an plus tard, il sera content parce qu’il verra bien. Il ira à l’hôpital remercier le docteur Moritti parce qu’il lui a sauvé la vie. Il reprendra sa vie sans problème.
Les amis Ils sont amis. Ils s’embrassent parce qu’ils se sont rencontrés après une longue séparation. Après, ils rentrent à la maison pour le dîner. Il va rencontrer sa famille. Ils vont aller au cinéma. Après, ils vont aller manger. Ils vont visiter le musée du Louvre. Ils vont voir la Joconde. Puis, ils vont visiter la Tour Eiffel. La Tour Eiffel est vraiment magnifique !
L’homme fâché C’est un vieil homme habillé avec un blouson bleu. Il est fâché parce qu’il n’a pas de cigarette. Il fait des allers et retours. Quand quelqu’un passe à côté de lui, il lui demande une cigarette ou de la monnaie pour en acheter. L’homme a besoin d’une cigarette parce qu’il s’est bagarré avec sa femme qui le trompe avec son directeur. L’homme est fâché. Il veut se venger et tuer l’amant de sa femme car il ne supporte pas sa vie. Il n’a pas peur d’aller en prison.
#4 Photographie et temps "L’écrivain est travaillé par l’angoisse de la page blanche. Le photographe est, au contraire, submergé par un flux permanent de choses prêtes à être photographiées. Postez-vous dans la rue et ça n’en finit jamais. Ça vient à vous, tout le temps, de partout. Le problème est de savoir qu’en faire." Paul Graham
Résidences d’artistes l’Art pour grandir Afin de développer des liens entre établissements scolaires et institutions culturelles, la Ville de Paris a mis en place un programme éducatif destiné à favoriser l’accès des jeunes Parisiens à la culture et à ses institutions : l’Art pour grandir. C’est dans ce cadre que la direction des affaires scolaires et la direction des affaires culturelles développent des résidences afin de permettre aux collégiens de s’initier et de pratiquer des disciplines artistiques (théâtre, cirque, danse, musique, chant, arts numériques, photographie, arts de la rue, marionnette, écriture, littérature, poésie, bande dessinée, cinéma, sculpture, peinture) ainsi que de découvrir et de se familiariser avec des lieux culturels. La Maison du geste et de l’image est une association loi 1901, soutenue par la Mairie de Paris (Direction des Affaires Culturelles), le Rectorat de Paris (Délégation académique aux arts et à la culture) et la Région Île-de-France.