INSTITUT SUPERIEUR DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION
L’ECONOMIE DE LA TELEVISION
Pr. ABDELMAJID FADIL
Année universitaire : 2013-14
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CHAPITRE I - La TV : une «économie singulière » Comme toutes les activités culturelles, la TV est une économie de la singularité. Elle se distingue par la nature de son produit, son marché et ses modes de financement. Sa production déroge aux théories de la valeur admise par les économistes. La valeur marchande de ses produits est indépendante de ses coûts de production. C‟est une industrie de coûts fixes qui assemble des matériaux spécifiques, qui fait appel à différents talents et compétences pour produire des prototypes, et qui fait intervenir différents acteurs. C‟est une industrie qui coûte chère et qui nécessite de lourds investissements. La pénétration de la TV s‟est opérée à des dates différentes selon deux modèles variés : l‟un privilégiant le marché et la concurrence, l‟autre le service public où la TV est assimilée à un bien collectif destinée à remplir une mission d‟information, d‟éducation et de divertissement. Les enjeux de son fonctionnement ne sont pas seulement économiques, mais aussi d‟essence politique. Sous diverses pressions, notamment le progrès technique et la montée de la concurrence, les systèmes télévisuels ont évolué vers une économie mixte faisant appel de plus en plus à des recettes commerciales. L‟économie de la TV est alors organisée autour de l‟audience. Le prix de la marchandise télévisuelle dépend de cette audience. L‟échange est basé sur la reconnaissance des faveurs qu‟accorde le public aux programmes des chaînes. Par conséquent, la programmation est soumise à cet objectif et au dictat de l‟audimat. Les programmes se taillent alors la part du lion du budget d‟une chaîne et constituent les principaux coûts. Ils déterminent en définitive la réussite ou l‟échec d‟une chaîne. La maîtrise du coût de la grille devient un enjeu majeur. Pour couvrir les charges croissantes, les chaînes ont opté pour des sources de financement variées dans lesquelles la publicité tient une place privilégiée. Ce qui a donné lieu à une controverse centrée sur la légitimité des chaînes publiques à recourir à la publicité.
1.1 – Les singularités des entreprises télévisuelles La télévision est une entreprise de nature particulière disposant de certaines spécificités du fait qu‟elle regroupe du travail culturel et du travail industriel et œuvre dans le domaine de la communication. Les entreprises télévisuelles ne constituent pas, pour autant, un ensemble homogène ; elles présentent à la fois de profondes différences et plusieurs points communs. La diversité des modèles, des statuts, des conceptions et des fonctions va influencer le contenu des programmes diffusés et leurs méthodes d‟organisation et de travail. On trouve à l‟échelle internationale une multitude d‟entreprises très différenciées par leurs tailles, leurs caractéristiques et leurs exploitations, mais qui sont néanmoins liées par un certain nombre de traits communs spécifiques résultant de la singularité de leur produit et de leur marché. Les conséquences de la présence du travail culturel et artistique sont à l‟origine de quelques spécificités qui caractérisent les biens culturels1 et les industries culturelles1. 1
Pour ces spécificités voir Yves EURAD, « les déterminants des consommations culturelles », in Economie et culture, vol. 1, les outils de l‟économiste à l‟épreuve, la Documentation Française, Paris 1987, pp 125-135. 1 Pour A. GIRARD, il y a industrie culturelle, lorsque la représentation d‟une œuvre est transmise ou reproduite par les techniques industrielles. In Revue Futur biles, n° 97, 1978. Ce concept développé par l‟école de Francfort pour dénoncer l‟invasion de champ de la culture par le capital est un des sujets importants du débat sur la culture à l‟ère industrielle. Pour un bref compte rendu, voir à ce sujet : - P. FLICHY, Les industries de l‟imaginaire, P.U.G. INA, 1980 - B. MIEGE, HUET, ION, LE FEBVRE, PERON, Capitalisme et industries culturelles, P.U.G. Grenoble 1978, réédité 1986.
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Cette présence du travail artistique et culturel va se traduire dans la fonction des objectifs de l‟entreprise qui vont, selon le degré de conciliation entre l‟aspect industriel et culturel, au-delà du seul souci de la rentabilité, et vont peser sur la nature des programmes diffusés et sur les conditions d‟équilibre financier de l‟entreprise. Ainsi, si le diagnostic qu‟A. Malraux réservait jadis au cinéma, “ c‟est un art, mais c‟est aussi une industrie ” est communément admis pour la télévision, il est aussi admis que l‟entreprise de télévision fonctionne comme une entreprise ordinaire. On trouve la réunion des facteurs de production classiques (capital, travail, matières premières), des formes variées d‟entreprises et une division de travail assez poussée. Les entreprises de T.V. proprement dites, c'est-à-dire les chaînes, les stations ou les networks, n‟assument généralement qu‟une fraction du procès global à savoir l‟assemblage des programmes et leur habillage dans une grille de programmation, alors que d‟une manière générale la production des programmes et la diffusion est assurée par des entreprises audiovisuelles spécialisées qui ne dépendent pas toujours de chaînes. En dépit des idéaux relatifs à la liberté d‟expression, du pluralisme, de l‟éducation, l‟entreprise de TV est aujourd‟hui de plus en plus soumise aux mécanismes du marché. La production est offerte sur le marché comme n‟importe quelle marchandise et on assiste à une conquête de plus en plus marquée du grand capital dans la sphère de la communication audiovisuelle. Toutefois, bien que l‟activité de ces entreprises s‟insère dans un ensemble technicocommercial classique, il n‟en demeure pas moins que la diversité de différents modèles socioéconomiques du développement de la T.V et la nature de leur produit leur confèrent certaines particularités qui les distinguent des autres industries et dont il faut tenir compte tant au niveau de la gestion que de la finalité.
1.1.1 – Prédominance de la “ culture du flot ” et produit périssable Contrairement à d‟autres produits culturels qui répondent à la logique de l‟édition2, la télévision a emprunté le modèle économique de la radio qui fait partie de ce que P. Flichy appelle la “ culture de flot ” 3 qui se caractérise par l‟obsolescence de ses produits et la continuité de sa diffusion. Ainsi, une grande part des programmes télévisés se consomme au moment de leur diffusion et lorsqu‟ils sont rediffusés, ils perdent une partie de leur audience et donc de leur valeur. L‟autre caractéristique de la culture de flot est que “ les œuvres diffusées ne sont pas indépendantes, elles s‟intègrent dans une programmation, leur sens est en partie donnée par l‟émission qui les précède et celle qui les suit. La grille de programmes est donc l‟élément central de la culture de flot ”.4 -
A. MATTELART et J.H. PIEME, Télévision enjeux sans frontières, P.U.G, Grenoble 1980, B.MIEGE, Les industries de contenu face à l‟ordre informationnel, collection « communication en plus », PUG, Grenoble, 2000. 2 Dans le secteur de la culture, l‟auteur distingue 5 logiques différentes : la logique de l‟édition des marchandises culturelles, la logique de la production de flot, la logique de l‟information écrite, la logique de la production des programmes informatisés, et la logique de la retransmission des spectacles vivants, in B. MIEGE, P. PAON, J.M. SALAÜN, L‟industrialisation de l‟audiovisuel, des programmes pour les nouveaux médias, éd. Aubier, Paris 1986. 3
Patrice FLICHT, Les industries de l‟imaginaire, op.cit. p. 38 Patrice FLICHY, “ Les nouveaux médias entre la culture de flot et une édition diversifiée ”, in Bulletin de l‟IDATE, n° 17 octobre 1984, pp. 381-387. 4 Idem. p. 382
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Le principe de la culture de flot est comme son nom l‟indique est la fluidité des programmes. La TV est assimilée à “ un robinet d‟images ”5 où les programmes sont à la disposition du téléspectateur à tout moment sans possibilité de tarissement et sans aucune charge conséquente outre l‟achat du récepteur. Cette particularité n‟est pas propre à la TV puisqu‟elle caractérise d‟autres activités économiques organisées et distribuées sous forme de réseaux comme l‟eau, le téléphone, l‟électricité, le gaz, toutefois, à la différence de ces activités, la TV généraliste de masse n‟est pas rémunérée au débit, car le téléspectateur “ ne paye pas proportionnellement à son utilisation ”.6 1.1.2 - Nature du produit et du marché La nature du produit de la TV, et son marché, sont encore sources de confusion du fait qu‟ils présentent des imperfections et des anomalies comparativement aux modèles les plus classiques connus par les économistes. Il est connu qu‟en économie libérale, le marché joue un rôle régulateur pour toute industrie. Mais, dans la TV de masse généraliste (hors péage), la relation entre l‟offre et la demande n‟est pas directe du fait de l‟absence d‟un véritable marché de consommateurs. A l‟image de la presse, les entreprises télévisuelles proposent ce que l‟on appelle un « produit joint » : ce produit incorpore à la fois un contenu médiatique susceptible d‟attirer une audience et un espace publicitaire susceptible d‟attirer des annonceurs qui veulent atteindre cette audience La marchandise produite par les entreprises télévisuelles qui s‟apparente à un service ou à un produit immatériel est offerte à un double marché : au public des téléspectateurs sans contrepartie monétaire et aux annonceurs à titre onéreux. Ce que vendent les entreprises de TV aux annonceurs, c‟est la possibilité de toucher un spectateur qui est pour eux un futur consommateur potentiel de leurs produits. Autrement dit, la TV vend surtout de l‟audience, le prix de la marchandise est par conséquent fonction de cette audience. Ainsi, l‟économie de la TV est une économie spécifique dont le marché rémunérateur est constitué par des agents non-consommateurs de son produit mais, qui payent pour capter à un moment donné l‟attention des consommateurs réels. L‟échange est donc basé sur la reconnaissance des faveurs qu‟accorde le public aux programmes d‟une chaîne. On est en présence d‟une “ sorte d‟économie de troc où téléspectateur offre une partie de son temps de loisir contre des programmes de TV. ”7 Ainsi, la valeur d‟échange de la marchandise réside dans sa consommation par un public, lui-même vendu aux annonceurs. Tout tient donc à sa valeur d‟usage.8 Certains auteurs comme Paracuellos estiment que le terme de marché appliqué à la TV gratuite est impropre. Elle est une invention des instituts de sondage qui désignent par l‟expression “ part de marché ”, la proportion des téléspectateurs ayant regardé, une émission ou une chaîne sur une période donnée, et qu‟il est plus juste de parler d‟un “ pseudo marché ”9.Cette caractéristique n‟est pas propre à la TV puisqu‟on la trouve dans d‟autres médias supports de publicité, comme la presse, l‟Internet avec une différence cependant, c‟est que ces médias sont conçus pour être achetés directement par le public, ce qui n‟est pas le cas de la TV de masse surtout privée. Aussi, Carlo Freccero considère que “ la TV commerciale est l‟unique forme de marchandise de l‟industrie culturelle qui en réalité réalise sa valeur en
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Jean Charles PARACUELLOS, La télévision, clés d’une économie invisible, la Documentation française, Paris 1993, p. 60 6 Jean Charles PARACUELLOS, La télévision, clés d’une économie invisible, la Documentation française, Paris 1993, p. 60 77 J M. SALAÜN, op.cit. p. 133. 8 Carlo FRECCERO, “ la valeur d’usage de l’audience ”, in Médias pouvoirs, n° 76, Avril-juin 1986 9 J.C. PARACUELLOS, op. Cité, p. 24 et p. 71.
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étant consommée ”10. C‟est un produit spécifique qui “ ne peut rentrer sous l‟étiquette de “ marchandise ” que par extension. En effet, la TV tend à promouvoir la vente de véritables marchandises, mais elle ne produit pas elle-même de vraies marchandises11. Ce constat est partagé aussi par l‟universitaire américain de gauche Dallas Smythe, pour qui l‟audience est la forme marchandise des produits de communication dans le capitalisme contemporain. Quant aux programmes “ ils ne servent qu‟à recruter une audience potentielle et à maintenir son attention ”12. Cette particularité de l‟offre et de la demande est à nuancer en fonction du régime des entreprises de TV. Elle se vérifie beaucoup pour les organismes de la TV commerciale financés uniquement par la publicité dont la grille de programmes n‟est qu‟un sous-produit destiné à capter le plus grand nombre de téléspectateurs. Le véritable produit donc qui sert de valeur d‟échange est l‟audience. Tout le problème pour la chaîne ici, est de concilier deux finalités qui ne sont pas convergentes mais qui sont techniquement liées et dépendantes, car la demande de l’un (les recettes publicitaires) est étroitement conditionnée par l’importance de l’autre (l’audience.) La chaîne doit donc tenir compte dans sa stratégie commerciale du nature biface du marché et de cette dualité de sa marchandise (valeur d‟usage et valeur d‟échange) ; elle doit définir ses objectifs et sa programmation en fonction des attitudes présumées de ces deux “ clients ” afin de parvenir à un équilibre acceptable. On se trouve donc dans une situation d‟effets de réseau croisés : la satisfaction des agents sur une des faces du two-sided market dépend de la demande sur l‟autre face du marché. Et, c‟est ici qu‟un véritable problème de cercle vicieux se pose : la croissance des coûts nécessite un recours accru à la publicité dont la croissance des recettes dépend de la croissance de l‟audience, laquelle peut cependant fléchir à cause de la présence de trop de publicité. -
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Pour les organismes de TV publiques, grosso modo, deux cas de figure se présentent : Les chaînes n‟ayant pas recours à la publicité comme la BBC où pour lesquelles les recettes publicitaires sont marginales, comme ARTE ou France 5, ne sont pas soumises aux pressions du marché puisque leur financement est assuré par des fonds publics et leur programmation répondent à des objectifs culturels, éducatifs fixés par les pouvoirs publics. Ce sont surtout des télévisions d‟offre et de faible audience. Les chaînes à financement mixte qui sont légion se conforment à des objectifs fixés par leur tutelle, assignés dans un cahier de charges qui déterminent les multiples missions de service public à accomplir à travers une programmation enrichissante respectant le pluralisme et la diversité, et donnant une place aussi bien au divertissement qu‟au culturel. Mais, les contraintes du marché ne sont pas totalement absentes, elles sont liées aux besoins de financement et donc à l‟importance de la contribution publique dans le financement. Dans l‟ensemble, ces chaînes essayent de concilier des impératifs antagoniques et sont placées dans une situation contradictoire tiraillée entre les attentes des annonceurs et les exigences des pouvoirs publics, d‟autant plus que dans beaucoup de pays les missions de service public restent floues et imprécises pour en déduire une ligne directrice. Le résultat est que les missions de service public notamment dans le culturel et l‟éducation permanente sont souvent compromises, et les chaînes publiques sont l‟objet de critiques à la fois des protagonistes et de défenseurs du service public. Enfin, les chaînes de péage qui sont financées par des abonnements introduisent dans l‟économie de la TV les règles ordinaires du marché puisque ces chaînes comptent en
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C. FRECCERO, op.cit., p. 16 Idem 12 Cité par Jacques W. OPPENHEIM, Code : TV à la carte, éd. Edilig. Coll. Médiathèque, Paris, 1988, p 146. 11
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premier lieu sur leurs abonnés pour équilibrer leur compte. Par conséquent, leur programmation est entièrement tournée vers ce but et vise à conquérir de nouveaux abonnés et surtout ne pas en perdre. Mais, là aussi, on peut rencontrer des variantes où le marché direct coexiste avec le marché de l‟audience et où les droits payés par l‟abonné “ n‟achètent pas l‟absence de publicité ”13. On constate donc, que la TV est un secteur très particulier, traversé par des clivages disposant d‟un marché et d‟un produit particulier, marché connaissant des imperfections et des anomalies en raison d‟une relation indirecte entre l‟offre et la demande, et produit s‟apparentant tantôt à un service et tantôt à un bien immatériel en fonction du point de vue dont on se place : côté des annonceurs ou côté des spectateurs. De là viennent, d‟ailleurs, les difficultés à définir ce que produit réellement la TV (des émissions, des programmes, un service, des objets audiovisuels…) dans la mesure où chaque élément retenu ne rend compte que d‟une partie parfois négligeable de l‟activité d‟une chaîne. Ceci amène Paracuellos à considérer une chaîne de TV comme “ un distributeur à domicile de produits audiovisuels ”14 et que le “ produit de la TV en tant qu‟activité commerciale est la relation avec le téléspectateur ”.15 En fait, les difficultés de la marchandise télévisuelle proviennent du fait que le produit télévisuel s‟apparente de ce que la théorie économique qualifie de bien collectif, c'està-dire, un bien présentant des caractéristiques telles que dès lors qu‟il est fourni à un individu, il est fourni à tous les autres. Autrement dit, un bien pour lequel toute appropriation est impossible, car il est indivisible16. Cette indivisibilité et cette inappropriation des biens collectifs constituent l‟un de leurs caractères permanents. Elle signifie que dès qu‟un service est mis en place, chacun peut en consommer autant qu‟il veut sans exclure ni en priver personne, contrairement aux biens traditionnels appelés “ biens privatifs ” qui au fur et à mesure que s‟imposent certains consommateurs, d‟autres se trouvent exclus. Un tel bien pose évidemment un problème aux économistes libéraux et à la théorie néoclassique : celui de la détermination de son prix dans la mesure où sa gratuité déroge aux règles traditionnelles du marché notamment le principe de l‟exclusion par les prix. Les individus varient la quantité des produits achetés en fonction des prix et des préférences, ce qui réalise sous certaines conditions l‟allocation optimale des ressources. Mais, dans le cas de la TV, la nature du produit, l‟indivisibilité de l‟offre entraîne les consommateurs à ne pas révéler leurs préférences. Les procédures favorisant l‟expression des préférences sont inadaptées et ont des limites car le taux d‟audience ne peut être confondu avec un indice de satisfaction comme le souligne à juste titre plusieurs auteurs17. Par ailleurs, selon la célèbre loi de l‟offre et de la demande, l‟équilibre optimal est atteint à un niveau de production et de prix tel que le coût marginal de production d‟une unité supplémentaire est égal à la propension marginale à payer pour obtenir cette unité supplémentaire. L‟optimum en requiert que le produit soit vendu à son coût marginal. Ceci implique que dans la TV le prix du marché doit être égal zéro puisque le coût marginal est 13
J.C. PARACUELLOS, op.cit. p. 87. .14 J.C PARACUELLOS, op.cit., p. 50 15 Ibid., p. 49 16 Les exemples classiques cités dans la littérature économique sont la défense nationale, les services d‟un phare et la TV, pour ce dernier cas, voir : Pierre KOPP, Télévisions en concurrence, Anthropos, Paris, 1990 17 Ainsi pour P. KOPP “ il est infondé de confondre préférences des consommateurs et taux d‟écoute, car un programme n‟est offert qu‟une fois, et son audience dépend de l‟heure de diffusion et non d‟un besoin intrinsèque du spectateur ”, op.ci.t p. 42. On trouve la même idée chez A. LE DIBERDER et N. COSTE CERDAN : “ l‟audience de la TV est donc le produit de l‟arbitrage opéré par chaque individu-téléspectateur dans l‟affectation de son temps disponible et non pas le reflet de ses goûts intemporels, en dehors de toutes contraintes ”, op.cit. p. 42.
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égal à zéro. On relève ainsi la défaillance du mécanisme du marché puisque, d‟un côté, le producteur du bien doit recouvrir les coûts engagés si l‟on veut que le bien soit produit, et de l‟autre côté, l‟optimum économique veut que le bien soit vendu à un prix nul, ce qui aboutit en fin de compte à ce qu‟il ne soit pas produit18. Par conséquent, il devient impossible de procéder à une allocation optimale d‟un service télévisuel gratuit, comme le souligne à raison P. Kopp, “ lorsque la TV offre un service non marchand, l‟inexistence d‟un système de prix rend difficile la détermination exacte du volume et de la nature optimum de services devant être produit ”19. Il faut noter que même en introduisant l‟exclusion par le prix par l‟instauration d‟un système de péage, il n‟est pas certain qu‟on aboutit à l‟optimum économique, car il ne résout pas les problèmes d‟allocation optimale et de tarification, autrement dit, l‟existence d‟un prix n‟implique pas que ce prix s‟impose, ni qu‟il soit optimal. Beaucoup d‟auteurs pensent “ que faute d‟une hypothétique concurrence parfaite et compte tenu des rendements croissants d‟échelle, la tarification au coût marginal est impossible ”20, contrairement à la thèse défendue par K. Koford, qui pense qu‟une TV gratuite peut arriver à une allocation optimale des ressources sans intervention de l‟Etat et qu‟il suffit pour cela de “ traiter la TV gratuite comme une TV payante fonctionnant selon la règle de la maximisation du profit, mais dont le prix serait acquitté sous la forme d‟un ajout publicitaire au programme ”21. Bref, les difficultés de l‟analyse de la TV tiennent à son caractère de bien collectif distribué gratuitement quel que soit la nature de l‟offre : privée ou publique. Les économistes adeptes du marché ont essayé de résoudre le paradoxe de l‟allocation optimale des ressources en élaborant une théorie de l‟Etat qui ne remet pas en cause la suprématie du marché et où la question de bien collectif trouvera une solution dans la confrontation entre une offre de service public de la part de l‟Etat et une demande de la part des citoyens, le point d‟équilibre étant le prix fiscal (la redevance) que les citoyens consentent à payer. Toutefois, la TV dispose, comme le souligne P. Kopp, d‟une caractéristique spécifique, “ l‟appartenance à la catégorie des biens collectifs est réellement indépendante de la nature publique ou privée des firmes productrices ”22. L‟analyse ne peut, donc, être menée uniquement par le biais de l‟économie publique car elle est inadaptée à l‟analyse de l‟offre télévisuelle des entreprises privées qui cherchent à maximiser le profit en distribuant gratuitement leurs produits. De surcroît, les chaînes publiques fonctionnement selon des règles qui s‟éloignent de plus en plus de celle de l‟administration publique, du fait qu‟elles cherchent à compenser la baisse des contributions publiques par une course à l‟audience afin de maximiser les recettes publicitaires. L‟économie de la TV ne dépend pas, donc, totalement des lois habituelles du marché et son analyse doit être entreprise en tenant compte de la spécificité du produit et des particularités de son marché qui échappe en partie aux lois de l‟offre et de la demande.
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Voir à ce sujet. P. KOPP, op. cit., ainsi que Jean-Louis BLANCHART, “La radiodiffusion de service public est-elle soluble dans l’économie”, in Revue de l‟UER Diffusion, été 1999. 19 P. KOPP, op. cité p. 24 20 Ibid p. 42 21 K. KOFORD “ Was free TV a Price control that increased consumer’s welfare ”, Quartely Review of Economics and Business, printemps 1984, vol. 34 , pp. 67-77. Voir la discussion de cette thèse in P. KOPP, op.cit. pp. 32-41. 22 P. KOPP, op. cité. p. 6
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1.1.3-
Les seuils du marché
L‟entrée dans le marché de TV est extrêmement difficile, car c‟est un marché à haut risque, exigeant de lourds investissements et dans lequel le succès reste aléatoire en raison de son étroitesse et de l‟intensité de la concurrence qui déborde de plus en plus les frontières. Sa pénétration n‟est tentée que par les personnes ou les groupes disposant d‟importants moyens financiers. A titre de comparaison avec la presse, le rapport des investissements est d‟environ 1 à 5023. C‟est pourquoi ce secteur a été envahi par des outsiders venant d‟autres activités n‟ayant rien à voir avec la communication, mais disposant, néanmoins de solides assises financières leur permettant de prendre un tel pari. Il s‟ensuit comme on le verra plus loin, une transformation des rapports de force entre le secteur public et le secteur privé, l‟introduction de logiques gestionnaires et de modes de rationalité étrangères à la communication, et l‟émergence de conglomérats s‟appuyant sur un processus de valorisation du capital aussi bien dans le hardware que dans le software et une diversification des activités. En outre, la TV est une industrie capitalistique caractérisée par une obsolescence rapide du matériel et des produits qui bute pour son expansion sur plusieurs obstacles restreignant son champ de valorisation comme le degré de culture pour la diffusion de certains émissions, le temps de loisir dont dispose l‟individu qui est inélastique, et la concurrence forte des autres médias et industries culturelles. Le cycle de vie des produits est très court comparativement aux autres industries et la saturation est rapide. Ainsi comme le souligne N. Toussaint, “ En un siècle, l‟attraction des consommateurs s‟est fait sur tous les produits de l‟information soit par un phénomène de transfert (de la presse écrite vers la radio puis la TV), soit par un phénomène de renouvellement (de la TV en noir et blanc vers la TV couleur.) Mais avec le temps on remarque que le taux de saturation absolu ou relatif est atteint de plus en plus sous l‟influence des deux effets (transfert et substitution) ”24 . 1.1.4- Particularité comptable La comptabilité de la TV se démarque de celle des autres entreprises du fait que les entreprises télévisuelles fonctionnent selon des règles différentes inhérentes à leur activité. Les conventions et les hypothèses comptables qui peuvent être retenues par une chaîne pour l‟établissement de ses comptes peuvent différer d‟un pays à l‟autre et à l‟intérieur de même pays. La composition du chiffre d‟affaires est variable et son mode de calcul brut ou net, en raison du nombre de prélèvements obligatoires, peut aboutir à des chiffres sensiblement différents. De même, la notion de résultat qui dans une entreprise classique peut être appréhendée en comparant le prix de vente d‟une unité et son coût, n‟est pas facilement assimilable au niveau d‟une chaîne, dans la mesure où la correspondance des produits et des charges n‟est assurée que de manière indirecte à travers la grille de programmation, et dans la mesure aussi, où le coût de programme diffusé est sans rapport avec le taux d‟audience.(*) Aussi, “ le résultat d‟une chaîne n‟est donc pas la somme des bénéfices réalisés sur
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N. COSTE-CERDAN “ chaînes thématiques européennes : airbus ou concorde ? ” in Bulletin de l‟IDATE, n° 37, 1984, p. 517. 24 Nadine TOUSSAINT, L’économie de l’information, que sais-je ? n° 1701, PUF, Paris 1978, p. 15, réédité sous le titre, L’économie des médias, 8ème édition, janvier 2011. (*) Certaines émissions de plateau dont le coût horaire est relativement faible peuvent parfois drainer des audiences supérieures à des œuvres audiovisuelles, dont le coût horaire est plus élevé. A cela, il faut ajouter la différence de prix entre les émissions achetées et celles produites par les chaînes.
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une multitude de ventes individuelles. Il est la différence pour une grille donnée entre les recettes générées par cette grille et le coût des émissions diffusées”25 Il s‟ensuit que la notion de consommation de programmes est appréciée en France différemment selon deux approches : une approche traditionnelle qui transpose les règles retenues par l‟industrie cinématographique où les programmes sont comptabilisés en fonction de leur nature juridique comme des immobilisations incorporelles et qui après leur diffusion passent en charges selon un système dégressif au prorata de leur diffusion sur une base forfaitaire, et une approche nouvelle s‟alignant sur la pratique contractuelle des chaînes qui opère un classement au bilan des droits audiovisuels en distinguant entre :
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les droits de diffusion (parts antenne) acquis à l‟extérieur ou liés à la production propre ou déléguée.
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les autres droits dont dispose la chaîne en tant que producteur ou coproducteur (part producteur)26.
Les parts d‟antenne qui sont directement liées à l‟activité de diffusion et représentent donc un élément du coût, doivent apparaître comme des stocks, alors que les parts producteurs que représente l‟investissement fait par la chaîne pour se procurer des recettes sur une longue période correspondent à des véritables immobilisations.
En fait, la notion d‟investissement audiovisuel reste floue quelle que soit l‟approche adoptée du fait des difficultés qui surgissent quant à l‟insertion temporelle des droits audiovisuels dans les comptes, qui est inhérente aux différentes phases dans lesquelles un programme prend corps, et qui se traduit par la distinction dans les comptes entre les engagements (signature du contrat pour un programme), les avances ou les acomptes (acceptation de la copie antenne), les droits incorporels (ouverture des droits). Par conséquent, la notion comptable d‟investissement en programmes telle qu‟elle figure dans le tableau de financement d‟une chaîne est différente :27 - du total des montants décaissés au cours de l‟exercice pour acquérir le programme, - du total des sommes engagées par les chaînes, - du total des sommes figurant en réalisation du budget des chaînes publiques, - du montant figurant sur la ligne “ acquisition d‟immobilisations incorporelles ” pour les chaînes optant pour l‟approche traditionnelle. - du montant figurant au titre des emplois en “ stocks en cours ” pour les chaînes optant pour l‟approche moderne. Ainsi, les particularités du produit et du marché se répercutent sur la comptabilité des entreprises, rendant leurs comptes complexes, et qui supposent pour être analysés correctement, la connaissance des règles régissant cette activité, de même qu‟une certaine relativité et plasticité envers les chiffres avancés par les chaînes de TV.
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Dominique LEDOUBLE, “ Comment se comptent les milliards de la télévision ? ”, Médias pouvoirs, N°16, Nov- déc 1989, p. 151. 26 Ibid, p. 152 27 Ibid, p. 155
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1.1.5- L’immixtion du politique Enfin, une autre particularité de la TV qui sans être aussi spécifique que les précédentes n‟en est pas moins pleine de conséquences sur l‟économie de la TV, c‟est l‟immixtion des pouvoirs publics. De tout temps les pouvoirs publics sont intervenus dans le secteur de la TV en raison des caractéristiques propres de ce bien : rareté de la ressource hertzienne, indivisibilité de la production, rendements constants, existence d‟effets externes. A ces motifs économiques, se sont ajoutés pour certains Etats des raisons d‟opportunité politique. Cette intervention, s‟est caractérisée dans de nombreux pays par la création d‟une ou plusieurs chaînes publiques, souvent en situation de monopole, et dans de nombreux pays en voie de développement ces chaînes sont encore alimentées directement par le budget de l‟Etat. Les pouvoirs publics agissent de manière directe ou indirecte sur l‟économie de ce média en favorisant certains types d‟informations ou modèles télévisuels, en permettant ou non certains procédés (TV par satellite, par câble, cryptée, numérique..), ou certaines formes d‟entreprises (publiques ou privées), soit en réglementant certains prix ou tarifs (télécommunications, les abonnements, les droits de douane, les taxes…), soit en réglementant plus ou moins strictement certaines activités (publicité, la concurrence, la concentration), sans oublier les autres moyens dont ils disposent tels que la répartition des fréquences, le délit en matière d‟information, la censure. En bref, il existe indéniablement des liens entre la politique et le média TV qui ne sont pas toujours apparents mais qui pèsent sur l‟économie de la TV.
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1.2 - Traits généreux du système économique télévisuel La TV est une activité complexe multidisciplinaire qui relève du modèle de flot organisé en filière, empruntant le savoir-faire des autres industries culturelles et les créations artistiques et journalistiques. Cette filière est organisée autour de trois marchés : En aval, on rencontre deux marchés où la TV se vend deux fois : - D‟une part, à ceux qui le consomment (les téléspectateurs), qui souvent sans contrepartie monétaire (si on exclut la redevance et les abonnements) ont accès à des images ordonnées en grille de programmation. Ce marché est qualifié par Paracuellos de pseudo-marché dans la mesure où l‟échange n‟est pas sanctionné par un déboursement de la part du consommateur. - D‟autre part, à ceux qui utilisent son pouvoir médiatique en vue de capter les faveurs du public. Il s‟agit ici du marché des entreprises, des annonceurs et publicitaires. En amont, il y a le marché primaire où les chaînes de TV s‟approvisionnent en matières premières et en produits préexistants pour composer leurs programmes. On trouve différents genres allant de produits préexistants comme les films, les téléfilms, les feuilletons, les documentaires, à des éléments de diverses natures qui conditionnent la réalisation de certaines émissions : œuvres littéraires et musicales, droits de retransmission des manifestations sportives, théâtrales ou culturelles, formules de jeux, services d‟agences d‟informations ou d‟images. C‟est un marché de ressources composé d‟intermédiaires, de producteurs indépendants (de programmes originaux ou d‟occasion, de flux ou de stock) et de l‟industrie de cinéma, qui donne les parts producteurs et les parts d‟antenne de la chaîne, et qui conditionnera en partie la qualité de service offert au public. Évidemment, les conditions d‟obtention de ces ressources constituent un élément essentiel de l‟économie de la TV. Ces marchés sont caractérisés par des degrés plus ou moins élevés de concurrence entre les entreprises où parfois les lois de marché ne s‟appliquent pas harmonieusement donnant lieu à des paradoxes et des dysfonctionnements au niveau des prix et des coûts. Le marché des ressources est le plus souvent concurrencé du côté des offreurs de programmes et il est plus ou moins “ monopsoniste ” du côté des acheteurs de programmes. Alors, que le marché d‟audience peut connaître plusieurs situations : concurrence quand plusieurs entreprises se partagent l‟audience, oligopole cartellisé ou sans accord de cartel et parfois monopole28. Mais ce dernier cas a tendance à disparaître de nos jours en conséquence du processus de libéralisation de l‟audiovisuel. La filière télévisuelle, centrée autour du hertzien terrestre est organisée autour de quatre métiers : le producteur, l‟éditeur de programme ou chaîne de TV, les transporteurs (du signal), l‟industriel de l‟électronique grand public. Avec l‟apparition du câble, du satellite et le développement de la TV numérique, un cinquième métier fait surface : l‟exploitant commercial d‟un bouquet de programmes qui commence à prendre de l‟importance et plus de pouvoir. Cette filière fait intervenir une multitude d‟acteurs disposant chacun d‟un rôle déterminé dans une division de travail poussée qui établit les distinctions entre les diverses activités et qui trouve son origine aux Etats-Unis. -
28
La chaîne (station ou réseau) : acquiert les droits de la diffusion de certains programmes, les ordonne et agence dans une grille de programmes en introduisant dans P. KOPP, op. cit. p. 87
11
cette grille ses propres productions (information, émissions de plateaux, jeux, bandes d‟autopromotion…) et en les “ habillant ” de génériques, d‟interludes, de jingles et de spots publicitaires. -
Les régies publicitaires : se chargent de la vente de l‟espace publicitaire de la TV et assurent la bonne fin de cette vente à l‟annonceur. On rencontre trois formes principales :
les régies intégrées à la chaîne, assimilées à un département de vente de l‟entreprise ; les régies filialisées qui sont les plus courants, comme c‟est le cas pour la Régie de la SNRT commercialise tout type d'espaces publicitaires (classique et parrainage) sur les différents supports TV et Radio de la Société Nationale de Radiodiffusion et de Télévision. les régies indépendantes qui sont externes et sans lien capitalistique avec les chaînes, et sont, souvent, dépendantes de certaines agences de communication. Le rôle des régies est très important non seulement au niveau de la procuration des recettes publicitaires mais, aussi au niveau de la programmation où elles disposent d‟un pouvoir influant sur la politique de programmation. Elles fixent les tarifs de commercialisation des espaces publicitaires et fonctionnent en étroite collaboration avec les programmateurs.
-
Les agences de communication sont les conseillères directes des annonceurs qui s‟occupent de la conception et de la création de la campagne de communication et du choix des supports (le média planning) en fonction des objectifs marketings fixés. Elles sont aujourd‟hui parties prenantes du mouvement d‟industrialisation, de marchandisation et de globalisation de la culture et sont prises, selon J.M. Salaün, « dans une dialectique parfois contradictoire : en tant que sociétés de service elles doivent répondre à la demande des annonceurs, c'est-à-dire présenter des produits de vente ; en tant qu‟industries culturelles elles doivent vendre des créations de l‟esprit »29.
-
Les instituts de sondage qui par différentes méthodes sociologiques (enquête, entretien) et électroniques (Audimétrie) relèvent et mesurent l‟audience pour l‟ensemble des intervenants (exemple, Médiamétrie, Ipsos, Sofres, Nielsen). Leur rôle dans le paysage audiovisuel est devenu fondamental dans la mesure où l‟économie de la TV commerciale est aujourd‟hui essentiellement fondée sur la mesure de l‟audience.
-
Les producteurs audiovisuels constituent un bloc hétéroclite rassemblant de grosses firmes (les Majors de cinéma) et des petites entreprises sans envergures souvent éphémères créées pour répondre à une demande de production spécifique ou occasionnelle.
-
Les distributeurs sont considérés comme “ les grossistes de l‟audiovisuel ”30, ils jouent un rôle crucial dans la filière en tant qu‟intermédiaires entre les producteurs et les chaînes. Ils constituent des catalogues des droits de diffusion et les commercialisent fréquemment en paquets en intégrant quelques programmes de grande valeur avec un lot de programmes de bas de gamme.
L‟ensemble de ces acteurs constitue donc une filière organisée en différentes strates économiques et technologiques où chaque intervenant contribue à son niveau et à sa façon dans l‟élaboration du produit final.
29 30
J.M. SALAÜN, op.cit. p. 98. A. LE DIBERDER, N-C. CERDAN, op.cit. p. 17
12
1.3-
Les modèles prédominants :
La spécificité politique et culturelle de la TV dans différentes régions du monde rend difficile toute approche globalisante de l‟économie de la TV, bien qu‟il soit possible de dégager quelques tendances convergentes. Les différences au niveau du fonctionnement et des moyens de financement font ressortir une variété de modèles aux caractéristiques différentes et une diversité de l‟organisation de la TV. Cette variété de modèles reflète “ les conceptions diverses et pas toujours explicites qui prévalaient à leur naissance ”.31 En Amérique, où règnent la concurrence et la libre entreprise, la TV a été conçue sur une base essentiellement commerciale comme ce fût le cas auparavant de la radio, alors que dans les pays européens, la TV a été influencée par les différentes formes d‟immixtion de l‟Etat dans son fonctionnement et son économie. Ce qui a donné lieu, après une période de monopolisation à un système mixte privé-public où s‟imbriquent à des considérations économiques des préoccupations politiques et socioculturelles. Comme le souligne beaucoup d‟auteurs, c‟est la conjonction de plusieurs facteurs qui dessinent l‟architecture du système télévisuel. Ce sont des facteurs historiques, politiques, sociodémographiques et géographiques qui président à son organisation. La taille du pays, la densité de la population et sa répartition, l‟unicité et la diversité ethnique, linguistique et culturelle, la donne technologique, les standards adoptés, la réglementation, sont parmi les facteurs qui participent à la définition de l‟architecture des systèmes audiovisuels. Ce sont ces facteurs qui ont donné lieu à des conceptions diverses et pas toujours explicites du rôle de socialisation de la TV et de ses fonctions d‟information, d‟éducation et de divertissement. Ainsi “ l‟architecture d‟un système télévisuel résulte d‟un nombre élevé d‟arbitrages entre des soucis contradictoires ”32 et non d‟un déterminisme naturel, et “ il n‟existe pas d‟ordre naturel de la télévision ”33. En ce sens, le développement de la TV en Europe s‟est fait d‟une façon différente de celui des Etats-Unis, mais cela n‟empêche pas que ses structures d‟organisation subissent “ les influences des modèles dominants qui se répercutent sur les pratiques professionnelles et le contenu des productions audiovisuelles ”.34 Un survol rapide de ces modèles est riche d‟enseignements pour comprendre les différentes conceptions du développement de la TV dans le monde et ses conséquences sur l‟économie de la TV et sur le rôle dévolu à l‟Etat et aux autorités de régulation dans le façonnage des paysages audiovisuels. 1.3.1- Le modèle américain La TV américaine est un lieu d‟expérimentation riche d‟expériences et qui sert souvent de référence en raison de son ancienneté35, des pratiques de consommation des téléspectateurs, l‟importance et l‟organisation de ses différents marchés et le contexte juridique et réglementaire. C‟est un système où c‟est le marché qui domine et qui offre un modèle de rationalité économique différente de celui des pays de l‟Europe où l‟on tend à faire de l‟audiovisuel un outil culturel spécifique. C‟est “ une véritable industrie : on y vend des
31
J-C PARACUELLOS, op.cit. p. 15 A. LE DIBERDER, NCOSTE CERDAN, op.cit. p. 22. 33 ibid., p. 23. 34 Jacques W. OPPENHEIM, op.cit. p. 14. 35 Il s‟est développé entre 1945 et 1955 dix ans avant l‟Europe. 32
13
produits à l‟aide de techniques de marketing les plus sophistiquées et selon des méthodes d‟expertise et d‟évaluation poussées à l‟extrême ”36. Mais s‟est un système qui n‟est pas exempt de paradoxes. Ce pays, fief de libéralisme a assuré le développement de cette industrie jusqu‟au dans les années 50 ans en s‟appuyant sur un dispositif anti-concentration extrêmement coercitif. Avec l‟accentuation de la concurrence et la nécessité de disposer de programmes de fortes potentialités d‟audience pour pouvoir faire face, la TV américaine est devenue non moderniste et marquée par l‟uniformise, le mimétisme et la répétition comme le souligne Pasquier : “ plus elle s‟est avancée sur la voie de la modernité économique, moins elle a favorisé l‟innovation en matière de contenus et d‟habillage. La variété des genres télévisuels présents dans la grille de la TV commerciale hertzienne aux Etats-Unis est incroyablement limitée ”37. 1.3.1.1-
L’importance du marché
Les Etats-Unis comptent à la fin des années 90 quelques 280 millions de téléviseurs avec environ 97 millions de foyers équipés d‟un téléviseur dont près de 73% ayant au moins deux récepteurs. 97,5% de foyers sont connectés aux services de TV par câble en juin 2002 et 65,3% y sont effectivement abonnés, soit 68,8 millions de foyers. A ceux-ci s‟ajoute près de 21,1 millions d‟abonnés aux autres services de distribution notamment aux bouquets de TV par satellite (18 millions abonnés).38 La part du marché du câble reste prédominante, elle tend cependant à se stabiliser alors que le satellite connaît ces dernières années une certaine dynamique au détriment d‟une baisse accentuée de la réception hertzienne.
Tableau 1 : Evolution des modes de réception des foyers américains en % 1996
1997
1998
1999
2000
2001
Réception terrestre
19.3
17.2
16.0
13.5
9.0
6.1
Satellite
14.0
15.5
16.6
18.5
21.7
22.9
Câble
66.7
67.3
67.0
68.0
69.3
71.0
Source : IDATE News, N°65, mars 2003
L‟industrie audiovisuelle américaine connue sous le terme plus large “ Entertaimement ”, a généré en 2002 près de 88 milliards de dollars de dépenses chez les consommateurs américains (9,52 milliards pour le cinéma, 20,3 milliards pour le secteur de la vidéo, 48 milliards pour les abonnements aux services de diffusion TV par satellite et câble et 12 milliards pour l‟achat de produits musicaux) et plus de 78 milliards de revenus publicitaires39. Avec 60 milliards de dollars d‟investissement publicitaires en 2011, la TV 36
Dominique PASQUIER, La télévision américaine, éd. Ecomédia, 1990, p. 9. Idem, 38 F.C.C, Ninth annual report, 31 décembre, 2002. 39 “Le secteur de l’audiovisuel aux Etats-Unis ”, Ambassade de France aux Etats-Unis, mission économique de Los Angeles. Fiche de synthèse, aout 2003. 37
14
arrive la tête des autres médias et près de la moitié de ces investissements reviennent à la TV locale. Graphique 1 : Investissements publicitaires nets par média aux Etats-Unis
Source : IREP Suite à l‟avènement des technologies numériques, le contenu de la communication est en pleine mutation générant à la fois de lourds investissements, des alliances complexes, de nouveaux débouchés commerciaux, mais aussi des incertitudes sur les échéances, les coûts et le marché. 1.3.1.2 – Multiplicité de diffuseurs Le local constitue la base de l‟organisation du système télévisuel américain. Le pays est partagé en 210 marchés télévisuels locaux40(division faite par l‟institut de sondage Nielsen pour ses indices d‟audience), qui en fonction de leur densité démographique peuvent regrouper un nombre plus ou moins élevé de diffuseurs. En 2011, 5 marchés locaux représentent à eux seuls 19% de foyers américains (New-York, Philadelphie, San Francisco, Dallas, Chicago). On dénombre actuellement, 5 stations nationales hertziennes organisées en réseaux (les networks), près de 1712 stations hertziennes locales dont une grande partie appartiennent aux networks (dites owenad and operated : ONO), un réseau public réunissant près de 350 stations locales affiliées et plus de 200 chaînes retransmises par câble ou satellite dont le nombre ne cesse de croître. A cela, il faut ajouter le développement ces dernières années des opérateurs de plates-formes numériques diffusées par satellite. Cette impressionnante diversité et multiplicité des diffuseurs ont posé, selon Pasquier, un problème de fond : “ comment respecter la spécificité de chaque marché local tout en satisfaisant aux exigences de taille de l‟audience qui régissent toute entreprise télévisuelle ? ”. C‟est là, où réside l‟originalité du modèle américain, qui a apporté des solutions à ce dilemme en établissant une organisation basée sur un système de relations contractuelles extrêmement sophistiqué, “ qui permet à l‟industrie de programmes d‟avoir la couverture nationale qui lui
40
Un marché local est composé de 20 à 30 countries (cantons)
15
est nécessaire pour être rentable, tout en préservant en partie l‟autonomie des décideurs locaux ”41. En ce sens, les chaînes de ce pays sont organisées en réseaux commerciaux. Le système télévisuel s‟articule ainsi autour de grands réseaux (les Networks), un mini réseau de stations indépendantes, un réseau de service public (P.B.S) et des réseaux câblés qui se subdivisent en service de base et un service de paiement à la séance (pay-per-view). 1.3.1.2.1- Les Networks Les Networks fonctionnent selon un principe d‟affiliation, régit par un contrat d‟exclusivité qui permet à la station affiliée de diffuser les programmes offerts par la tête de réseau et de bénéficier d‟une compensation financière pour son temps d‟antenne. En contrepartie, le network dispose de ressources tirées de la vente d‟espaces publicitaires de la station à des annonceurs nationaux. La station garde, toutefois, la possibilité en dehors des tranches horaires réservées aux networks (essentiellement le prime time) de diffuser les programmes et les annonces de son choix. La concurrence s‟exerce donc à deux niveaux : entre les networks sur le plan national et entre les stations sur le plan local, ce qui fait que la situation diffère beaucoup d‟une région à l‟autre. Le F.C.C (Federal Communication Commission), qui est l‟agence gouvernementale chargée de la réglementation en matière de communication, définit un network par une durée de programmation minimale de 15 heures en prime time diffusée à destination d‟un réseau de stations locales lui appartement en propre ou affiliées et représentant au total une couverture d‟au moins de 75% de foyers TV42. Le Network doit viser une couverture télévisuelle maximale de ses programmes avec au moins une station par marché local et optimiser sa couverture publicitaire en nombre de foyers TV. Au fur et à mesure que la taille du marché se rétrécit, la proportion des stations affiliées augmente dans la mesure où ces stations ne peuvent pas générer dans leurs petits marchés suffisamment de ressources publicitaires locales pour équilibrer leurs comptes, et être viables économiquement. Elles sont donc, “ condamnées à jouer un rôle de relais pour le marché publicitaire national, ce qui passe nécessairement par une affiliation ”.43 Les networks sont donc, des réseaux de stations reliées par satellites afin de recevoir, à partir d‟une source unique des programmes communs et des messages publicitaires. Ils couvrent la quasi-totalité du territoire (99%), regroupent donc chacun entre 180 et 220 stations et conformément aux obligations de la loi must carry, ils sont aussi retransmis sur le câble. Le nombre de stations en propre du Network oscille entre 10 et 20% de l‟ensemble des stations affiliées. Longtemps dominé par trois réseaux (ABC, CBC, NBC), le marché est désormais constitué de cinq réseaux avec l‟arrivée de Fox en 1986, d‟UPN et WB en 1995, mais le 18 septembre 2006 ces deux derniers (UPN et WB) ont fusionné pour former The CW. En 2001, les ressources publicitaires de la TV hertzienne se sont élevées à près de 38 milliards de dollars contre 41 milliards en 2000. Dans ce total, la part des networks s‟élève à 18,6 milliards contre 20,3 milliards en 2000. Bien que leur part de marché continue de 41
PASQUIER, op.cit. p. 18. Didier MATHUS, Les évolutions actuelles du paysage audiovisuel américain, rapport d‟informationn°1161, Assemblée Nationale, France, Novembre 1999, p. 11. 43 PASQUIER, op.cit. p. 19 42
16
s‟éroder face aux chaînes de câble, les networks, notamment ABC, CBC NBC et Fox représentent toujours la principale force de l‟industrie des contenus télévisés. En 20011, les 4 réseaux historiques plus CW ont obtenu une part d‟audience totale de 24,6% et ils ont accaparé 33 Mds dollars d‟investissements publicitaires. Graphique N°2 : Parts d’audience des 20 principales chaînes américaines ensemble de la journée44 en 2011 (2ans et +)
Source : Eurodata Tv / Nielsen media rechearch, in : CSA, la production de fiction aux Etats-Unis, juillet 2011 La force principale de ces entreprises réside dans ce qu‟elles sont dans le giron de conglomérats contrôlant de véritables groupes multimédias45, produisant du papier, du son et des images, et disposant de solides ressources financières pour acquérir les stations des marchés porteurs des grandes agglomérations urbaines (New York, Los Angeles, Chicago, 44
L‟ensemble de la journée ne prend en compte que la diffusion réelle et elle exclut : les programmes diffusés localement, les programmes en syndication, les programmes payants 45
En janvier 2012, la propriété des réseaux est la suivante : American Broadcasting Company (ABC) : Walt Disney Company Columbia Broadcasting System (CBS) : CBS Corporation National Broadcasting Company (NBC) : General Electric Fox Broadcasting Network (Fox) : Fox Entertainment Group (News Corporation) The CW Television Network (The CW) : CBS Corporation etTime Warner
17
etc.). La logique du système fait que toutes les stations indépendantes ayant une forte audience ou une position géographique intéressante subissent la convoitise des groupes multimédias qui tenteront de s‟en emparer46. 13.1.2.2- Les stations indépendantes En plus des grands réseaux, on trouve de mini réseaux de stations indépendantes, qui pour s‟imposer dans un marché relativement saturé doivent composer l‟intégralité des programmes qu‟elles diffusent en jouant sur la spécialité par thème ou par genre et en accordant une place majeure aux spécificités locales (actualités, les talkshows, les compétitions sportives régionales.) Les stations indépendantes appartenant à des groupes de communication, peuvent lorsqu‟elles atteignent un certain niveau de développement, être transformées par leur groupe en stations affiliées comme l‟on fait les derniers venus sur le marché des networks (Fox, UPN, WB) A côté des indépendants “leaders” disposant des moyens de leurs politiques et de programmes originaux, les petites stations indépendantes ont une politique de programmation peu ambitieuse axée sur des rediffusions et des programmes “ d‟occasion ” de la syndication47. Celle-ci est un marché formé sur des transactions individuelles avec les stations locales par des producteurs – distributeurs indépendants (les syndicateurs), portant sur des programmes déjà diffusés par un network ou une chaîne câblée. Toutefois, les Majors assurent elles-mêmes la syndication de leurs programmes, et les networks, commencent à faire de même depuis l‟abrogation des fin-synrules (voir plus loin la réglementation). La syndication constitue donc un fonds de programmes, où se fournissent les stations indépendantes ou affiliées en fonction de leurs besoins. Son développement a été favorisé par la règle PTAR (Prime time access rule) interdisant aux stations affiliés de s‟approvisionner pour plus de trois heures auprès des networks pendant les quatre heures du prime time, ce qui suscitait une demande d‟émissions, par les stations locales, laquelle rencontrait justement une offre de la part des producteurs voulant rentabiliser au maximum leurs émissions, sur les networks. Face à la puissance des networks et au développement de leurs activités de producteurs et de la concurrence, les stations indépendantes, en situation de faiblesse, essayent de riposter en cherchant à mettre en commun leurs moyens par la mise en place de mini réseaux permanents ou ponctuels basés sur une proximité locale ou sur la définition d‟une cible spécifique, d‟où l‟apparition de divers réseaux ethniques (notamment hispanophones) et religieux. Il faut signaler que sur le plan juridique, il n‟y a pas de différence entre stations affiliées et stations indépendantes. L‟objectif dans tous les cas est de servir les intérêts de la communauté locale et c‟est ce principe qui est à la base de l‟octroi ou de retrait des licences d‟exploitation délivrées par la F.C.C
46
En vertu des lois anti-trust, les réseaux ne peuvent pas être propriétaires de toutes les stations qui leurs sont affiliées mais seulement 39% de ceux-ci. 47
La syndication est un mot anglais qui désigne la pratique consistant à vendre le droit de reproduire un contenu ou de diffuser un programme à plusieurs diffuseurs. Le système de la syndication a été créé par la presse écrite américaine, les syndicates vendant leur production (cartoons, comic-strips, chroniques, etc.) à plusieurs journaux locaux.
18
1.3.1.2.3- Le câble Il constitue indiscutablement la révolution télévisuelle la plus importante de ces dernières années aux Etats-Unis tant par la densité des abonnements que par le statut de média autonome qu‟a conquis le câble avec son expansion vertigineuse à partir du milieu des années 70. Avec 69 millions d‟abonnés en 2002 et un taux de pénétration aux alentours de 67%, le marché de câble américain est le plus important du monde. Il représente un chiffre d‟affaires de près de 49,5 milliards de dollars, soit près de 30% des recettes totales de l‟industrie audiovisuelle. Tableau N° 2: Evolution des revenus et du cash-flow de l’industrie du câble aux Etats-Unis de 1998 à 2002 (en millions de dollars) 1998
1999
2000
2001
2002*
66.1
67.3
68.5
68.6
69.0
68.9
69.1
69.3
67.3
67
Revenus du “ basic ”
21 831
23 135
24 729
27 031
28 492
Revenues “premium ”
4 758
4 696
5 115
5 617
5 533
Revenues Pay Per View
514
721
751
993
1 143
1 675
2 000
2 430
2 430
2503
Télé achat
175
205
239
260
284
Analogique avancé et numérique
445
919
1 088
2365
3 379
Internet haut débit, téléphone par câble et services interactifs
133
542
1 164
2 835
5 602
Equipement et installation
2 631
2 424
2 451
2,463
2 491
Total des revenus
32 162
34 642
37 967
43994
49 427
Revenus par abonné
486,57
514,74
554,26
641,31
716,3
Cash flow
14 900
15 597
15 764
16 683
18 806
46.3
45
41.5
37.9
38
Abonnés au câble basic (millions) Taux de pénétration (%)
Publicité locale
Cash-flow/total des revenus en %
* Estimation Source: FCC, Ninth annual report, December 31, 2002, p.15 Le câble aux Etats-Unis montre de manière éclatante l‟interaction des facteurs techniques, économiques, juridiques et politiques. Bien qu‟étant deux supports différents, le câble et le satellite ont bénéficié d‟une dynamique combinée. Le satellite a permis au câble non seulement d‟abolir les distances en se franchissant de la télédistribution locale, mais aussi de s‟approvisionner en programmes et d‟élargir son audience. Le cadre juridique est un élément important dans l‟institution du paysage télévisuel américain. Il est assez significatif du comportement américain, où pragmatisme, groupes de pression divers, pouvoirs de justice décentralisés et partis au pouvoir arrivent par touches successives à modifier assez largement le paysage audiovisuel. C‟est un secteur qui a connu 19
d‟importantes batailles juridiques dont les enjeux restent essentiellement économiques. Ainsi, en supprimant les obligations portant sur les contenus, en libérant les prix des abonnements, en déréglementant les tarifs des gros réseaux câblés, en restreignant l‟obligation de distribution de toutes les chaînes existantes localement (must carry) et en interdisant dans un premier temps toute implication dans le câble aux networks, aux compagnies de téléphone et aux stations de TV locale dans leurs zones d‟implantation, la F.C.C a favorisé l‟essor de câble après avoir freiné au départ son expansion pour préserver l‟équilibre financier et la viabilité économique de plusieurs chaînes. Aujourd‟hui, le câble attire des investisseurs de différents horizons. La plupart des investisseurs dans le câble ont des intérêts croisés dans les différents secteurs de la communication. Ils sont à la fois opérateurs de réseaux et opérateurs de services avec des participations dans plusieurs chaînes. Tel est le cas des groupes Time-Warner, News Corporation, Viacom, etc. De même, en autorisant en juillet 1992, les compagnies régionales de téléphone à transmettre sur leurs lignes des programmes de TV par câble, et en leur permettant d‟entrer à hauteur de 5% au maximum dans le capital des chaînes de télévision, la concurrence est désormais totale. Les câblo-opérateurs peuvent offrir des services téléphoniques et les compagnies de téléphone proposer des services vidéo. Par conséquent, le câble continue à se développer par rapport aux networks et son audience ne cesse de croître. Le résultat est un foisonnement de chaînes en tous genres et une tendance à la concentration. 1.3.1.2.4- Le réseau public La TV de service public reste un secteur marginal par rapport aux networks. Il a été créé en mars 196748 à la suite de débats critiques soulevés de toutes parts contre les dérives de la TV commerciale et des recommandations de la commission Carnegie49. Les stations de TV publiques sont regroupées dans un réseau, le Public Broadcasting Service (P.B.S) qui s‟occupe de la gestion du service et des choix des émissions diffusées par le réseau. A l‟inverse des networks, le PBS n‟est pas régi par un principe d‟affiliation, mais fonctionne comme un regroupement de stations qui acceptent de diffuser les programmes produits par les autres stations ou ceux achetés par la tête du réseau, et elles payent leur tête de réseau pour obtenir les programmes, sans publicité, qu‟il met à leur disposition. Chaque station opère comme une entité indépendante disposant d‟une programmation autonome. Les programmes sont produits localement (entre 50 et 80%) par les stations ellesmêmes, le reste est fourni par des productions indépendantes ou acheté à l‟étranger (BBC) ou coproduit avec des partenaires européens (RTVE-ZDF-ARD) ou australiens. Le réseau est à la fois fédéral et décentralisé ; il approvisionne les stations en programmes et il leur offre un débouché pour leurs émissions présentant un intérêt national. PBS achète les programmes à travers une coopérative de stations (Station Program Coopérative) qui détient elle-même un budget propre d‟achat. Les émissions délaissées ou moins fréquentes dans la grille de la TV commerciale, comme les émissions pour enfants, éducatives, culturelles, de société, d‟information, les documentaires, les retransmissions d‟œuvres théâtrales ou musicales sont 48
Date à laquelle le Congrès adopte la loi sur la radiodiffusion publique le public Broadcasting Act qui instituait la Corporation For Public Broadcasting, instance fédérale chargée de la répartition des crédits alloués au secteur. 49
Voir Francis BALLE, Médias et société, éd. de Montchrestien, Paris, 1995. pp. 355 à 357.
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favorisées. Les émissions scolaires touchent ainsi plus de 30 millions d‟enfants et près de 2 millions d‟enseignants50 notamment via "Adult Learning Service" partenariat entre stations publiques et 2000 collèges et universités offrant des services de télé-enseignement aux étudiants et "PBS K-12 Learning Services", programmes à usage des classes du secondaire. On compte près de 355 stations locales affiliées appartenant à des associations locales, des universités ou des écoles, des églises, des municipalités, des groupements communautaires sans but lucratif51. Toutefois, seule une vingtaine de ces stations exercent un rôle majeur en matière de production nationale. Les plus importantes se situent dans les grandes villes à l‟image de WNET-channel 13, située à New York qui dispose d‟un budget de plus de 100 millions de dollars provenant pour 30 % de donations, 20% du parrainage, 30% de la vente de programmes à d‟autres stations du réseau, 10% de subventions de Fondations accordés pour des programmes déterminés et 10% de subventions publiques52. Le financement de ses activités demeure, pour PBS un souci majeur. Par exemple, en 1995 le budget d‟exploitation du réseau s‟élève à deux milliards de dollars dont près des trois quarts proviennent des stations affiliées et seulement 14% du CPB. Les fonds publics ont tendance à diminuer et ont fait appel de plus en plus au parrainage, au mécénat d‟entreprise et aux donations des téléspectateurs. Pour pallier cette crise de financement, des tentatives provenant du Congrès ont proposé d‟aligner le service public sur la TV commerciale par l‟introduction de la publicité et le recours à la vente aux enchères des licences, mais ces tentatives ont été battues en brèche par les fervents défenseurs du service public53. En outre, le développement dans le câble de chaînes thématiques ayant un contenu proche de ceux de la TV publique complique la situation et remet en cause l‟identité de la TV publique. Le PBS s‟est démarqué des TV commerciales en construisant une identité basée sur une image culturelle et éducative. Cette particularité ne tient plus face à des chaînes câblées ayant plusieurs millions d‟abonnés et diffusant des programmes semblables ou proches comme c‟est le cas pour Bravo (film d‟art et d‟essai), Discovery Channel (documentaires), The Learing Channel (éducation), etc. Pour le moment, PBS a su canaliser une audience stable, en dépit de la mise en concurrence accrue des chaînes culturelles du câble. Son poids est plus important que son audience réelle sur le plan de la circulation des idées, des débats, de la culture et l‟éducation. Il représente en moyenne 5% de l‟audience américaine, pourcentage très inférieur à celui des grands networks, mais reste supérieure à celui des principales chaînes du câble comme CNN (0,8%)54.Son influence est certaine dans le pays : il touche près de 100 millions de foyers («on air and on line»), certains «pics» de prime time atteignent 4 à 5% de l‟audience et plusieurs émissions phares (séries et talk-shows dont «Charlie Rose», «The Lehrer show») participent du débat d‟idées aux Etats-Unis. Bref, Le réseau public essaye de refaire son identité dans un paysage télévisuel en pleine évolution en se lançant dans des services interactifs et de la TV numérique, qui constitue pour lui une opportunité de mieux cibler son offre de programmes, en se positionnant par une déclinaison des chaînes thématiques dans les créneaux relevant de son ressort, et répondant de façon plus adaptée aux attentes du public et à ses fervents défenseurs. Mais, le passage au numérique nécessite des investissements importants et un coût qui peut être un obstacle pour plusieurs stations. 50
Didier MATHUS, op.cit. p. 13. Plus de la moitié (51%) de ses membres est constituée d'organisations communautaires, 32% d'universités et collèges, 12% d'autorités d'Etat et 5% d'autorités locales ou d‟éducation 52 Ibid. 53 F. BALLE op.cit. p. 357. 54 D. MATHUS op.cit. 51
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1.3.1.3- La régulation du système télévisuel Le cadre juridique dans lequel évolue l‟industrie audiovisuelle se caractérise par une révision régulière, dans le sens d‟une libéralisation croissante. Il privilégie la confrontation ouverte des antagonismes et le débat public et il s‟adapte en fonction de la modification des équilibres existants. Les années 80 ont été marquées par l‟assouplissement, voir la suppression, de nombreux règlements adoptés auparavant par la F.C.C. Mais ce processus de déréglementation est compensé par une action régulatrice privilégiant le recours au pouvoir judiciaire pour protéger les consommateurs. Il y a ainsi selon F. Balle “ plus de concurrence avec moins de règlements spécifiques: les dispositions anti-concentration, applicables à tous les secteurs de l‟activité économique, occupent le terrain laissé vacant par la politique de déréglementation, moins de règles mais des règles plus efficaces ”55. Ainsi l‟autorité de tutelle du secteur audiovisuel (F.C.C) n‟est qu‟un des rouages d‟une régulation plus complexe où s‟entrecroisent et s‟équilibrent les influences de l‟exécutif, du législatif et du judiciaire56. La F.C.C. a été créée par une loi de 1934 “ la communication Act ”, afin de réglementer le vaste domaine des télécommunications et de l‟audiovisuel et appliquer la législation adoptée par le Congrès. Ses décisions sont soumises au contrôle des tribunaux. Composée de 5 juges nommés par le président des Etats-Unis, elle est chargée de : - veiller au respect de la libre concurrence : attribution des fréquences et des licences et leur renouvellement, approbation des rachats et des fusions, surveillance des tarifs d‟abonnement. - faire respecter l‟intérêt public dans les médias : pluralisme, indécence et qualité des programmes, production des programmes locaux, place des minorités, - baliser l‟évolution du secteur par le choix des normes techniques : exemple le passage en tout numérique. La loi sur les télécommunications adoptée en février 1996 a confié de nombreuses tâches à la F.C.C qui portent aussi bien sur l‟industrie du câble que la propriété des médias, la violence à la TV, la radio et le secteur des télécommunications au sens large. Elle s‟inscrit dans la perspective de la convergence et fait entrer le secteur dans un processus de libéralisation permettant à tous les acteurs la possibilité de s‟offrir tous les services. Elle inverse aussi très largement les effets de la loi “ cableact ” de 1992 en s‟en remettant à la concurrence des compagnies des télécommunications pour discipliner la tarification du câble et autorise les câblo-opérateurs à s‟introduire sur le marché local du téléphone. Le régime de propriété des médias a également été assoupli et les règles anti-concentration allégées. Les principales mesures de réglementation se rapportent à la diffusion télévisuelle peuvent se résumer ainsi : 1.3.1.3.1- Propriété des médias : Le mariage entre deux réseaux nationaux reste prohibé (dual network rule). Il est possible pour un même groupe d‟exploiter deux stations sur les différents marchés (UHF et VHF), à condition que subsiste au moins huit opérateurs différents où que l‟acquisition soit justifiée par les difficultés financières de la société achetée. Un network a donc la possibilité
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F. BALLE, op.cit. p. 348. Voir à ce sujet, Jean Paul SIMON, “ Tirs croisés sur la F.C.C. ”,Médias pouvoirs, n° 29, janv.- mars 1983, pp. 55-62. 56
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de détenir un maximum de 26 stations TV57 et le seuil d‟audience nationale accessible à un seul réseau est porté à 35% contre 25% auparavant. Le “ duapolyrule ” prévoit qu‟un groupe ne peut posséder qu‟une seule station de TV par marché. Mais cette règle est souvent contournée par la mise en place de Local Marketing Agreements (LMA) selon lequel le network est en réalité opérateur de la station sans en être propriétaire. En matière de concentration multimédia, le “ one-to-a marketrule ” prévoit : - l‟interdiction depuis 1975 pour un groupe de posséder au sein d‟un même marché à la fois une station TV ou de radio et un journal, - l‟interdiction depuis 1980 de tout rapprochement financier entre une station de TV VHF et une station de radio desservent le même marché, Par contre, l‟interdiction de détenir conjointement une station de TV hertzienne et un réseau câblé sur la même zone de diffusion a été supprimée. 1.3.1 .3.2- Production et vente de programmes Les rapports entre production et diffusion de programmes télévisuels ont toujours été structurés et réglementés, la F.C.C. craignait une trop grande emprise des networks. - Les “Financial Interest and Syndication rules ” (Fin-Synrules) adoptées en 1970, interdisaient aux networks d‟avoir un intérêt financier dans les programmes qu‟ils ne produisaient par eux-mêmes, de vendre eux-mêmes leurs programmes sur le marché de la syndication après quatre années d‟exploitation, et elles limitaient la part du temps d‟antenne consacrée par les networks à leurs productions propres. L‟objectif de ces lois était d‟empêcher les networks de conserver leurs meilleurs programmes et de refuser de les céder aux stations indépendantes ou de refuser de diffuser les programmes dans lesquels ils n‟avaient pas d‟intérêts financiers. En bref, ces lois visaient à séparer les fonctions de producteur et de diffuseur et par là même à protéger les droits de producteurs sur les programmes (production et exploitation) - Le “Prime time access rule” (PTAR) Adoptée en 1972, elle empêchait les stations affiliées sur les 50 premiers marchés locaux de s‟approvisionner pour plus de trois heures auprès des networks pendant les quatre heures du prime time. Autrement dit, obligation pour ces stations de réserver la première heure du prime time à des productions indépendantes. L‟objectif est donc de limiter la diffusion des programmes commandés par les networks et à ouvrir les heures de forte audience aux producteurs indépendants. Ces deux règles ont beaucoup influencées les structures de la production et distribution télévisuelle, favorisant la production indépendante, le développement des Majors hors la production cinéma58 et l‟essor de la syndication. Mais, face à l‟affaiblissement des networks et l‟érosion de leur audience en conséquence de la concurrence acharnée du câble, ces deux règles ont été progressivement assouplies à partir de 1991 et finalement abrogées, respectivement en novembre 1995 et août 1996.
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La limitation de la concentration a commencé en 1951 par l‟application de la “ 7-7-7 ” rule qui interdit à une même personne ou groupe de posséder 7 stations de radio AM, 7 stations de radio FM et 7 stations de TV. A cette réglementation s‟est substituée en 1984 la “ 12-12-12 ” rule. 58 Les 6 principaux studios de production de séries de Tv, filiales des Majors du cinéma, concentrent 90% des investissements du secteur.
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1.3.1.3.3- La concurrence entre opérateurs . La règle du Must curry, instaurée par le câble act de 1984, oblige les réseaux câblés à retransmettre les signaux des TV locales recevables dans une communauté donnée, afin de préserver la disponibilité des services de diffusion locaux au public abonné ou non abonné. Cette règle, qui réduit la capacité technique des réseaux à offrir de nouveaux services, a été contestée par les câblo-opérateurs, suscite d‟importantes controverses entre ceux-ci et les diffuseurs hertziens et elle se révèle très délicate pour les autorités de régulations59. Son extension à la diffusion satellitaire pose des problèmes sur lesquelles les régulateurs doivent se prononcer. En effet, le Satellite Home ViewerAct (1988) limite la retransmission par un opérateur satellitaire de stations hertziennes locales aux seuls foyers ne les recevant pas de manière “ acceptable ”, ce qui donne lieu à des litiges posés par le sens qu‟on doit donner à la définition d‟une réception acceptable et à des polémiques entre les câblo-opérateurs, et les plates-formes satellitaires. Pour les signaux numériques, la transmission par câble des chaînes locales n‟a pas été rendue obligatoire par la F.C.C., estimant que dans la phase de transition, on ne pouvait demander de transmettre à la fois les signaux analogiques et les signaux numériques. . Program accès rule La règle d‟accès aux programmes (1992), interdit aux chaînes détenues par les câbloopérateurs de passer des accords de retransmission exclusifs sur les réseaux câblés. Son objectif est de faciliter la reprise des chaînes câblées dans les bouquets satellitaires. Mais, cette règle pose aussi quelques difficultés dans la mesure où elle ne concerne pas les nouveaux acteurs souhaitant accéder à ces programmes, comme les diffuseurs par micro-ondes (MMDS) ou les expériences de câble des opérateurs de télécommunication. De même, de nombreux groupes, autres que les câblo-opérateurs ont développé des chaînes thématiques qui peuvent, elles, passer des accords de retransmission exclusifs. Parallèlement certains networks jouent sur leur pouvoir de refuser leur retransmission sur un réseau câblé (retransmission consent) pour y imposer les nouvelles chaînes créées par leurs maisons mères60. C‟est pourquoi, de nouveaux textes sont en préparation afin d‟interdire totalement les accords exclusifs de retransmission, ainsi que le recours au consentement de retransmission. Enfin, il faut signaler que plusieurs règles ont été fixées par la F.C.C. pour protéger l‟intérêt public, notamment l‟obligation pour les networks de diffuser trois heures par semaine d‟émissions à caractère éducatif destinées aux enfants, la mise en place en 1997 d‟une signalétique de programmes et l‟insertion à partir de janvier 2000 dans tous les téléviseurs en vente d‟une puce antiviolence “ V-chip ” commandant un système de blocage d‟accès, sous contrôle des parents, dont la F.C.C. a déterminé les caractéristiques. Le marché publicitaire est un marché de pure négociation (absence d‟obligation de publication des tarifs) et il se caractérise par peu de régulation (pas de restriction en volume mais plutôt d‟ordre moral, par exemple sur les armes à feu, le sexe, etc.)
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En juillet 1987, la Cour fédérale de Washington jugea la règle de must curry anticonstitutionnelle à la suite d‟un procès retentissant, mais sans que cela donne lieu à son abrogation puisqu‟elle a été confirmée par la Cour Suprême en 1997. 60 D. MATHUS, op. cit. p. 7.
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Les enjeux de la réglementation sont nombreux en ce moment ; plusieurs points restent en débat notamment : - la règle de “ must curry ”, selon le président de NAB (National Association Broadcasting) E.O Fritts, seulement 10% des chaînes terrestres numériques sont repris sur le câble ; - la concentration et la propriété des médias, particulièrement la possession simultanée des chaînes et des journaux, celles des stations de radio et de TV, le duopole au niveau local et l‟audience maximale d‟un network (35%). Sur ces questions la F.C.C., sous l‟impulsion de son président ultralibéral Michael Powell, a pris, en juin 2003, des décisions accélérant la déréglementation, et consolidant la concentration des médias et la formation de mastodontes médiatiques. L‟organisation en réseau des systèmes télévisuels n‟est pas propre aux Etats-Unis. On rencontre le système de network ou réseau dans plusieurs autres pays comme le Canada (CBC ou CTV), le Japon (Asahi, Fuji), l‟Australie (réseaux privés : Nine, Seven, Ten, réseaux publics : ABC et SBS et trois réseaux à abonnement, Foxtel, Optus et Austar), et sous des formes moins pure, comme au Mexique (Télévisa), au Brésil (RedeGlobo), en Grande Bretagne (ITV), en Allemagne (ARD et ZDF)61. Toutefois, comme le soulignent A. Le Diderber et N. Coste Cerdan : “ dans chaque cas il manque au dispositif un point essentiel : l‟indépendance juridique des stations affiliées au réseau ”62, car pour la plupart des exemples, contrairement au cas américain, les stations affiliées n‟ont pas la possibilité de se dégager du réseau, si elles jugent le service rendu non performant. 1.3.2- Les modèles européens La pénétration de la TV en Europe s‟est opérée à des dates variables mais selon un modèle similaire63. L‟analyse des systèmes télévisuels fait apparaître une diversité de situations tant au niveau des modes de financement qu‟au niveau de l‟organisation, de la gestion et du contrôle. Toutefois, il est possible de mettre à jour certains points communs à l‟ensemble des pays : - La plupart d‟entre eux se placent sous le double régime du monopole public et de service privé. Le premier implique la propriété par l‟Etat des infrastructures de diffusion et de programmation qui répond à une tradition ancienne de maîtrise par la puissance publique du spectre hertzien, considéré comme un bien rare, et comme un secteur hautement stratégique de la sécurité nationale. Guidé par le principe d‟intérêt général, les Etats se sont mis en devoir d‟une part de ne pas abandonner la TV aux intérêts privés et aux seules forces de marché afin d‟assurer son libre accès à l‟ensemble des citoyens, et d‟autre part, d‟assigner à la TV une triple mission : informer, éduquer et distraire. La TV publique européenne est donc à son essence “ le reflet d‟un projet volontariste pédagogique et centralisateur ”. 64 - La montée en puissance des chaînes privées et une ouverture plus large à la concurrence à la suite d‟un processus de démonopolisation et de déréglementation, qui va affecter à la fin des années 70, de façon diverse, les services publics de TV. Ce processus est soutenu par un 61
Voir à ce sujet : UNESCO, Rapport sur la communication dans le monde 1999, particulièrement le chapitre 11 sur la TV, pp 200-285. 62 In A. LE DIBERDER et N. COSTE CERDAN, La Télévision, op.cit. p. 21. 63 Voir à ce sujet : - F. BALLE, Télévision, médias et société, op.cit. - René BONNELL, La vingt cinquième image : une économie de l’audiovisuelle, Gallimard, Paris, 1989. - André LANGE, J.L. RENAUD, L’avenir de l’industrie audiovisuelle européenne, Média Monograph n° 10, Institut Européen de la Communication, Université de Manchester, 1988. 64 A. LE DIBERDER, N. COSTE-CERDAN, op. Cité, p. 34.
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développement rapide des technologies de communication notamment dans le domaine de la diffusion, dont l‟un des conséquences est la multiplication des canaux de diffusion et l‟élargissement des marchés audiovisuels. - l‟émergence d‟un droit audiovisuel communautaire qui tend à harmoniser les politiques de régulation des Etats, à soutenir la concurrence, à établir une politique audiovisuelle communautaire et le cadre réglementaire général pour l‟exercice des activités de radiodiffusion télévisuelles dans l‟Union européenne. 1.3.2.1- Hétérogénéité des situations nationales dans le secteur public Bien que traduisant des objectifs semblables dans la plupart des pays européens, la TV de service public est loin de présenter un paysage homogène. Elle se caractérise par une grande hétérogénéité de situations au niveau des statuts, des organisations et des modes de financement. 1.3.2.1.1- Statuts et organisation Selon les cas, les organismes publics de radiodiffusion sont soit intégrés fournissant à la fois des services de radio et de TV, soit spécialisés dans la TV ou la radio. Ainsi la RAI et la BBC sont des holdings regroupant dans un même organisme l‟ensemble des activités audiovisuelles publiques, radio et TV, nationales et internationales. La TV publique allemande est bipolaire avec l‟ARD (radio et TV) et la Z.D.F. (TV), alors que le secteur public espagnol se compose de la RTVE (radio et TV) et des chaînes régionales autonomes. Le secteur public français est éclaté en plusieurs sociétés nationales de radio et de TV : ARTE France, RFO, Radio France, RFI et l‟INA (l‟Institut National de l‟Audiovisuel) et une société holding France Télévisions S.A, devenue récemment entreprise unique, qui réunit des activités diversifiées et complémentaires comprenant d‟une part, 5 chaînes nationales métropolitaines (France 2, France 3, France 4, France 5 et France Ô, accessible en France métropolitaine et en Outre-mer) ainsi qu‟un réseau ultramarin : le Réseau Outre-mer 1ère, diffusé 24 heures sur 24 dans tout l‟Outre-mer (9 stations Pays-1ère) et d‟autre part plusieurs filiales de production, de communication et de gestion de droits dérivés. Le degré d‟autonomie, dont dispose ces organismes, est variable selon les cas. Au Royaume-Uni et en Allemagne, le statut comme le financement de la TV publique, leur assurent une large indépendance. Celle-ci découle pour le cas britannique, en partie de l‟existence de deux instances relativement autonomes qui jouissent d‟une grande liberté en matière de décision, de nomination aux postes à pouvoir et de programmation : le Board of Governors pour la BBC et l‟IBA (independant Broadcasting Authority) devenue par la suite I.T.C. (Independant Television Comittee) pour les stations privées65. Quant à la TV allemande, elle a bénéficié des modalités de l‟organisation politique territoriale qui accorde une large autonomie aux Landers. Ce qui a donné lieu à une structure décentralisée où la compétence en matière de radiodiffusion des programmes nationaux relève des Etats Fédérés66.
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Depuis janvier 2007, un Trust de 12 membres, nommés par la Reine et sélectionnés dans les milieux professionnels par le DCMS (équivalent du ministère de la culture) est en charge des orientations de la BBC : indépendance, haute qualité des programmes, impartialité des nouvelles. Il est là pour défendre les intérêts du contribuable qui paie la redevance, assurer l‟ouverture et la transparence, adopter des procédures rigoureuses d‟autorisation de nouveaux services en s‟assurant qu'ils génèrent une plus-value pour le service public 66 Voir P. BOUDGAUST, A. FRENCEL, “ l’Allemagne sous le signe de la diversité ” in Revue de l‟UER, Diffusion, été 1999.
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Les dernières réformes de la BBC (1996) vont d‟ailleurs dans le sens d‟une décentralisation des décisions budgétaires et d‟une responsabilisation des unités de programmes ou des pôles de profit67. En Italie, en France et en Espagne, l‟augmentation de la part de la publicité dans le financement a permis, paradoxalement, à chaque chaîne de disposer d‟un espace d‟autonomie budgétaire, mais au prix d‟une dépendance accrue vis-à-vis du marché publicitaire et de ses contraintes. Sur la question des nominations des dirigeants, les situations les plus diverses coexistent, depuis la nomination directe par le gouvernement (du P.D.G. en Espagne et des membres de conseil d‟administration de la BBC en Grande Bretagne) ou par les instances de régulation (C.S.A. en France), jusqu‟à l‟interdiction inscrite dans la loi faite au gouvernement allemand d‟intervenir dans cette nomination, mais, en fait, comme le note une étude de C.S.A., plus que le mode de désignation, c‟est la stabilité des dirigeants et la durée de leur mandat qui apparaissent déterminants et indissociables de l‟indépendance administrative et financière68. Le déficit chronique de la RTVE se traduit par un rythme rapide de démission des présidents, alors que l‟exemple allemand et britannique témoigne d‟une relative stabilité. Quant aux parts revenant à la régulation, à la réglementation ou autorégulation, les différences entre les pays apparaissent fortes. En Allemagne et en Grande Bretagne, la loi ne fixe que les principes généraux qui devraient être précisés au cas par cas par les instances de régulation ou dans le cadre de conventions passées entre ces instances et les opérateurs de TV. Ce système permet une large autonomie d‟initiative, y compris budgétaire, aux responsables de TV publique, et donc une meilleure exécution des missions de service public comparativement aux organismes publics où ces missions sont encadrées par des obligations et des cahiers de charges fixes. 1.3.2.1.2- Modes de financement La plupart des pays ont recours à des sources multiples de financement dans lesquelles en général les ressources publiques prennent le devant sur les recettes commerciales. Le financement de la TV, constitue une autre forme de la diversité du secteur public européen(*). La redevance reste la forme la plus classique de financement des organismes de radio et de TV. Tous les pays européens, à l‟exception de l‟Espagne, de Luxembourg, de Monaco ont recours à la redevance sous une forme ou une autre. La redevance TV a également été supprimée au Portugal (qui conserve la redevance Radio), aux Pays-Bas et récemment dans la communauté flamande de Belgique. Dans ces cas, la subvention directe supplie à la redevance. A côté de la redevance, des subventions sont octroyées par les pouvoirs publics pour des raisons d‟équilibre budgétaire ou dans le cadre de contrats avec l‟Etat en contrepartie de services spécifiques, en particulier les services de diffusion internationale (exemple TV5, RFI…). D‟après, les données de l‟Observatoire européen de l‟audiovisuel (OEA) portant sur l‟année 2000 69, la Finlande est le pays où les recettes publiques (redevance + subventions) sont proportionnellement les plus importantes (94,5% des recettes de la TV finlandaise YLE), viennent ensuite la Grèce 67
Voir le rapport du groupe de travail présidé par M. Gavyn Denis sur les perspectives de financement de la BBC dont un large résumé en français est annexé au rapport d‟information du Sénat n° 162 fait par M. Claude BELOT sur “ le financement de l’audiovisuel public ” janvier 2000. 68 “ La TV publique en Europe “ la Lettre de la CSA, n° 111. Décembre 1998. (*) On étudiera, plus loin en détail, les modes de financement, on se contentera de souligner ici les principales caractéristiques. 69 Observatoire européen de l‟audiovisuel. “ la situation financière des organismes publics de radio-TV en Europe Sud tend à se dégrader ”. Communiqué de presse, Strasbourg, le 5 avril 2002.
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(environ 90%), la Suède (88,4%). L‟Allemagne, la France et le Royaume-Uni ont des proportions de financement public très proches de la moyenne européenne avec respectivement 79,7%, 65,9% et 65,4%, mais avec des dispositifs extrêmement différents des répartitions des ressources entre les diverses entreprises publiques. La part des recettes commerciales ne cesse de prendre de l‟importance passant de 28,4% du total des recettes en 1995 à 32,3% en 2000, au détriment des recettes publiques dont la part, bien que prépondérante soit tombée de 69,1% en 1995 à 65,4% en 2000. Certains organismes tels que Channel Four en Grande Bretagne, tirent l‟intégralité de leurs revenus des recettes commerciales, alors que dans d‟autres, la proportion des recettes commerciales dépasse les recettes publiques comme c‟est le cas de la RTVE (Espagne), de la RTE (Irlande), de l‟ORF (Autriche). D‟un autre côté, les moyens financiers dont disposent les TV publiques européennes sont très inégaux. En Allemagne, le budget de l‟ARD s‟élève à6315,8 M€ et celui du ZDF à 1958 M€(les recettes publicitaires des chaînes publiques allemandes sont très restreintes et représentent près de 8,5%). Au Royaume-Uni, le budget de la BBC est de 6194,9M€ (les chaînes publiques ne peuvent pas avoir recours à la publicité)70. Le chiffre d‟affaires du BBC représente plus de 13 fois le chiffre d‟affaires de la TV suédoise, près de deux fois et demi celui de France Télévision et plus de 2 fois celui de la RAI. La disparité des ressources entre les TV publiques tienne à deux facteurs : le niveau de la redevance et les conditions d‟accès des chaînes publiques au marché publicitaire. 1.3.2.2 – L’essor des télévisions commerciales : En Europe, la pénétration de la TV privée s‟est opérée à des dates variables et n‟a pas obéi partout au même scénario. C‟est en Grande Bretagne que se produit la première expérience de privatisation avec la concession d‟émettre accordée en 1954 à un réseau d‟entreprises locales financées par la publicité : ITV. Les autres pays attendront entre 20 et 30 ans pour emprunter cette voie, tentant de faire coexister un secteur public et un secteur privé avec un recours de plus en plus fréquent aux financements privés. C‟est ainsi qu‟à partir de 1967 que l‟Allemagne et l‟Italie ont vu naître des stations privées, suivis par la France en 1982, la Belgique en 1987, l‟Espagne, la Grèce, les Pays-Bas et la Suède en 1989,etc. Ces pénétrations ne se sont pas opérées de manière uniforme mais avec une certaine anarchie en Italie, par retouches législatives en France, de manière subreptice en Belgique et en Hollande (envahissement des ondes étrangères) et par des lois en Espagne et en Grèce 71. Sous la pression de la vague de déréglementation qui a déferlé sur la plupart des pays d‟Europe Occidentale, les monopoles publics ont volé en éclats. Les règles de la concurrence se sont généralisées conduisant à la constitution de groupes puissants, à la diversification et l‟internationalisation des activités audiovisuelles. L‟audiovisuel européen est alors le champ des vastes mouvements de capitaux, de rachats d‟entreprises, de prises de participation et d‟alliances qui sont autant de signes de redéploiement des stratégies de groupes de communication. On assiste à une entrée en force dans le champ de la communication audiovisuelle de nouveaux acteurs industriels et financiers72 qui cherchent de nouvelles opportunités de profits et de valorisation pour leurs capitaux, par le biais d‟une stratégie globale où “ les parts de marché s‟apprécient au niveau international et les profits engendrés 70
France Télévisions, direction des relations internationales, dossier : le tour du mondes de télévisions publiques Voir à ce sujet, F. Balle, op. cité, R. BONNELL, op.cit. 72 Voir à ce sujet les dossiers suivants : - “ l’Europe des TV privées ”, in la revue de l‟INA, Dossiers de l‟audiovisuel, n° 21, sept.-oct. 1988, la documentation française -Dossier : “ Médias: les nouveaux venus ”, in Médias-pouvoirs, n° 15, aout-sept. 1989. 71
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par les positions conquises dans certains pays permettent les coûts d‟entrée dans des marchés plus concurrentiels ”73. Cependant, deux défis attendent ces nouveaux investisseurs, atteindre une taille suffisante pour jouer un rôle directeur dans la production et surtout la diffusion des programmes et acquérir la maîtrise dans l‟approvisionnement en produits stratégiques pour réaliser des taux d‟audience élevés74. Le marché est aujourd‟hui bien cerné et les intervenants sont bien connus. Ils ont pour nom, Murdoch (News Corporation), Bertelsmann, Berlusconi (Fininvest), Vivendi, Lagardère, Bouygues… Cette stratégie de placement dans un secteur où les perspectives de rentabilité s‟estompent vers des activités plus porteuses de profit s‟est illustrée surtout en France, où des entreprises de bâtiment et travaux publics (Bouygues) ou spécialisées dans la distribution d‟eau (la Générale des Eaux -Vivendi- et la Lyonnaise des Eaux) ou dans les transports (Chargeurs S.A) ou dans l‟armement (Matra), sont devenues parties prenantes dans l‟audiovisuel. Leur point commun, c‟est que ce sont des sociétés dont l‟activité dépendait en grande partie de l‟obtention de marchés publics ou de concession de service public. Cette vague de privatisation a été facilitée par les opportunités technologiques (en matière de fréquences, de TV cryptée, de câble et de satellite), économiques (financements privés, perspectives de nouveaux marchés) et politiques (intrusion permanente des politiques, lourdeur bureaucratique, corporatisme, etc.) Le modèle économique de la TV commerciale “ gratuit ” qui s‟est propagée partout à la suite de ce mouvement de déréglementation repose sur la publicité et son corollaire l‟audience qui fait loi dans l‟organisation de la grille de programmation. Sa logique repose sur l‟exploitation des synergies existantes entre les industries de biens de consommation et la TV, où le téléspectateur est à la fois consommateur de programmes télévisés et de biens et services offerts par les entreprises. La filière télévisuelle se double d‟une filière de commercialisation de produits de grande consommation. L‟exemple le plus illustrant de cette recherche systématique de la connexion de ces deux filières revient au groupe Fininvest en Italie et en Espagne. Les chaînes commerciales de ce groupe appliquent une tarification de spots publicitaires en fonction de l‟augmentation des ventes de l‟annonceur et non pas en fonction du temps de diffusion dans la grille de programmes comme c‟est le cas en général75. Autrement dit, le prix des messages est indexé sur le chiffre d‟affaires réalisé par l‟annonceur et calculé par pallier des recettes générées par la publicité. La logique marchande fait donc loi. Les stations s‟emploient à élaborer, par le biais de la programmation, des produits de forte audience afin de maximiser leurs recettes publicitaires. Mais cette stratégie se traduit par une inflation généralisée des coûts notamment des programmes- que l‟augmentation des ressources du secteur ne suffit pas à compenser en raison de l‟étroitesse relative du marché publicitaire. D‟où des fins tragiques pour certaines chaînes (la 5 en France), et dans la foulée de cette évolution, on passe dans la plupart des pays pour la diffusion généraliste terrestre, de la concurrence à un marché oligopolistique où domine trois ou quatre entreprises. Cette évolution, se fera en concomitance avec une autre évolution tendant à fragmenter l‟audience et à exploiter des niches de marchés porteurs. L‟utilisation des satellites et le développement fulgurant des technologies numériques vont desserrer la contrainte de 73
Bernard GUILLOU, “ les forces à l’œuvre dans l’audiovisuel ”, in Les Dossiers de l‟Audiovisuel, n° 21, p. 23 Idem. p. 26. 75 Voir à ce sujet : P. MUSSO et G PINNEAU, L’Italie et sa TV, éd. INA/ champs vallon, 1990. Y. ACHILLES (avec la collaboration de Jacques IBANEZ BUENO), Les télévisions publiques en quête d‟avenir, Collection “ Communication, Médias et sociétés ”, PUG, Grenoble, 1994. 74
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diffusion en multipliant les canaux de diffusion et de réception donnant lieu à des chaînes thématiques qui ciblent un public spécifique et qui conduisent à la constitution de “ bouquets ” regroupant plusieurs chaînes. L‟importance de ce marché comme on le verra plus loin sera croissant aussi bien en termes d‟audience qu‟en termes de recettes, mais des incertitudes subsistent quant à la viabilité de son modèle économique. 1.3.2.3- L’émergence d’une politique et d’un droit audiovisuel européen. La politique audiovisuelle de l‟Union européenne est apparue tardivement dans l‟histoire de la construction européenne. Ni le traité de Rome (1957), ni l‟acte unique (1976) engendrant le marché intérieur européen ne font référence à l‟audiovisuel, pas plus qu‟à la culture, parmi les compétences de la communauté européenne76. Il fallait attendre le traité de Maastricht (7 février 1992) pour qu‟une telle compétence apparaisse dans les textes constitutifs de l‟Union européenne77. Entre temps, cette compétence s‟est développée implicitement au fil des années dans le cadre des principes de la libre prestation des services, de la liberté d‟établissement, de la libre circulation des biens et des personnes et de la libre concurrence (Art. 59) grâce à une interprétation de la Cour de justice des Communautés européennes visant à étendre les principes du traité de Rome au secteur audiovisuel. (Arrêt Sachi 1976). La politique audiovisuelle européenne a commencé à prendre forme avec le démantèlement progressif des monopoles nationaux de radiodiffusion, le développement de nouvelles technologies de diffusion et l‟intensification du déficit de la communauté dans ses échanges avec les Etats Unis en matière de programmes audiovisuels. Ces facteurs inciteront les institutions européennes à développer plusieurs initiatives, notamment: en juin 1984, présentation d‟un livre vert sur l‟établissement du marché commun de radiodiffusion (Com. (84) 300 Find) premier texte communautaire important où l‟audiovisuel y présenté par son double caractère économique et socioculturel78. L‟adoption par le Conseil à cette date des résolutions concernant le développement d‟une industrie européenne des programmes, la lutte contre la piraterie audiovisuelle et l‟harmonisation des règles relatives à la diffusion des produits cinématographiques par les différents médias. En 1985, dans le livre blanc sur l‟achèvement du marché intérieur, la Commission annonçait plusieurs initiatives visant à ouvrir à la concurrence le marché de l‟audiovisuel et à promouvoir la télévision à haute définition (TVHD).
76
Voir à ce sujet : - Serge REGOURD, “ l’Europe et sa réglementation de l’audiovisuel ” in Cahiers français, la documentation française, n° 266. mai-juin 1994, pp. 63-75. - Kennett DYRON, “ les politiques audiovisuelles européennes : les leçons des années 80 ”, in Médiapouvoirs, n° 20, octobre-déc. 1990 pp 95-104. - Danielle BAHU-LEYSER, “ la politique audiovisuelle européenne : les illusions perdues ”, in communication et stratégie, n° 100, pp. 197-217. 77 L‟article 128 du traité de Maastricht dispose : 1 – la Communauté contribue à l‟épanouissement des cultures des Etats membres dans le respect de leur diversité nationale et régionale. 2 – L‟action de la Communauté vise à envisager la coopération entre Etats membres et, si nécessaire, à appuyer et compléter leur action dans les domaines suivants : (…) - La création artistique et littéraire, y compris dans le secteur audiovisuel ”. 78 Par la suite, d‟autres principes politiques ont été définis dans le prolongement de l‟adoption d‟un livre vert sur la convergence entre les secteurs des télécom, des médias et des technologies de l‟information, et d‟une communication relative aux lignes directrices de la politique audiovisuelle de la Communauté à l‟ère numérique.
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Le texte principal qui pose le cadre réglementaire général pour l‟exercice d‟activités de radiodiffusion télévisuelle dans l‟Union européenne est constitué par la directive n° 89/554/CEE dite Télévision sans frontière (TVSF), adoptée le 3 octobre 1989 et entrée en vigueur en 199179 et modifiée une première fois en 1997. Ce directive ne s‟appliquait qu‟aux activités télévisuelles (analogique, câble, satellite) et visait la réalisation de deux objectifs : - Créer un marché commun de la radiodiffusion télévisuelle à travers la mise en place des conditions propices à la libre circulation des émissions de TV dans la communauté et une harmonisation minimale des législations des Etats membres. - Encourager le développement de l‟industrie des programmes dans les Etats membres. Mais afin de prendre en compte les développements technologiques (convergence technologique) et les changements intervenus dans la structure du marché de l'audiovisuel, une révision de cette directive s‟est avérée nécessaire. C‟est ainsi, que le 11 décembre 2007 le Parlement européen et le Conseil ont adopté une nouvelle Directive (2007/65/CE ) qui a pour nom: «Services de médias audiovisuels sans frontières» qui opère une distinction entre: -
les services linéaires, qui désignent les services de télévision traditionnelle, l'internet, la téléphonie mobile que les téléspectateurs reçoivent passivement et; les services non linéaires, c'est-à-dire les services de télévision à la demande que les téléspectateurs choisissent de visionner (services de vidéo à la demande, par exemple).
-
Selon cette différenciation, la présente directive: -
modernise et simplifie le cadre réglementaire des services linéaires;
-
introduit des règles minimales pour les services non linéaires, notamment en matière de protection des mineurs, de prévention de la haine raciale et d'interdiction de la publicité clandestine80.
Conclusion Au terme de ce chapitre, on a vu que la TV est une activité particulière en raison des spécificités de son produit et marché. Son économie déroge aux lois classiques du marché et fait appel à une multitude d‟acteurs dont les intérêts ne sont pas toujours convergents, mais où chacun, en raison d‟une division de travail assez poussée, contribue à son niveau et à sa façon dans l‟élaboration du produit final. C‟est une industrie de prototypes, onéreuse où les coûts de production et de diffusion, notamment les coûts fixes, sont relativement importants.
79
Modifiée une première fois en 1997, la directive TVSF fait à nouveau l‟objet d‟une procédure de réexamen dont les modalités ont été définies lors du conseil des ministres de la culture des 15 pays de l‟Union européenne le 23 mai 2002. 80 Voir à ce sujet : Directive n° 2007/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2007 modifiant la directive 89/552/CEE du Conseil visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l’exercice d’activités de radiodiffusion télévisuelle
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CHAPITRE II - LES COUTS DE LA TELEVISION
La TV est une activité qui coûte de plus en plus chère et qui exige des investissements beaucoup plus importants que les autres activités de communication. A titre d‟exemple, en 2005, la BBC dispose d‟un budget de près de 6,2 milliards d‟euros, France TV de 2,7 milliards, ZDF 1,8 milliards, alors que pour la RTVE le budget n‟est que 900 M euro, RTE (Irlande) 400 M euro et pour la TV belge (RTBF) seulement 300 M euro. Les coûts d‟une chaîne de TV vont varier en fonction de plusieurs facteurs, notamment la diversité des modèles, des objectifs poursuivis, des systèmes techniques, des formes juridiques de propriété, de la durée de la programmation et l‟étendue de l‟aire géographique couverte. Par conséquent, la structure des coûts est assez difficile à isoler, car les produits proposés et les situations, différent considérablement d‟une chaîne à une autre. La variable principale d‟un budget d‟une chaîne réside dans le coût des programmes qui composent sa grille. Aussi les frais de programme occupent une part prépondérante, alors que les frais du personnel et les frais de diffusion occupent la majeure partie des autres dépenses. Pour apprécier ces coûts, on va s‟appuyer sur les données disponibles dans certains pays industrialisés, notamment la France, qui vont nous permettre d‟esquisser un tableau sur les diverses postes d‟exploitation d‟une chaîne de TV. Nous allons mettre l‟accent d‟avantage sur la programmation dans la mesure où les programmes se taillent la part du lion et constituent l‟enjeu majeur qui détermine en définitive la réussite ou l‟échec d‟une chaîne. Nous utilisons aussi, comme référence le modèle dominant de TV, celui de la TV de masse généraliste qu‟elle soit publique ou privée, qui subit la même logique économique dès lors qu‟elle opère sur un marché concurrentiel et qui dispose des caractéristiques et des contraintes de fonctionnement qu‟on trouve aussi dans les autres types de TV.
2.1- Les programmes La mise en concurrence de la TV a abouti dans la plupart des pays à un allongement progressif de la durée de programmation. Il n‟y a pas longtemps les chaînes ne diffusaient en gros que douze heures par jour, mais avec la montée de la concurrence, la nécessité de créer de nouvelles plages publicitaires donnant la possibilité aux annonceurs de conquérir le public disponible sur les périodes creuses et l‟arrivée des chaînes thématiques, elles ont passé à de nouveaux créneaux horaires de 18 à 20h pour aboutir à une couverture de 24h/24, comme c‟est le cas aujourd‟hui, de la plupart des chaînes. Cette augmentation du volume global de la programmation provoque évidemment une demande accrue en programmes, qui a pour effet une hausse notable des coûts de programmation. Une part non négligeable de la grille de programmation d‟une chaîne n‟engendre pas de grosses dépenses pour celle-ci à l‟exception des coûts de diffusion. C‟est le cas des émissions “ institutionnelles ” qui sont imposées à la chaîne comme les discours du chef de l‟Etat, les débats parlementaires, les émissions religieuses, les activités gouvernementales, les élections… qui dans certains cas et certains pays peuvent prendre des dimensions disproportionnées considérables. A cela, il faut ajouter les écrans publicitaires, les bandes d‟annonces d‟auto promotion des programmes de la chaîne, les petits programmes 32
quasi invisibles que sont les génériques propres à la chaîne, les interludes, etc., et enfin les rediffusions de certaines émissions et surtout des films qui sont devenues une pratique courante avec l‟explosion de la durée de programmation. Ainsi, N. Coste Cerdan et A. Le Diberder, en raisonnant à l‟époque où les chaînes ne diffusaient en moyenne que 14 heures/jour, constatent que pour faire 5000 heures de TV, il suffit en gros à une chaîne de se procurer 3000 nouvelles heures par an81.
2.1.1 – Problématique de la programmation Les chaînes de TV se caractérisent et se distinguent par leur politique de programmation, c‟est-à-dire le choix des programmes diffusés et les moments de diffusion. Si les mécanismes de programmation sont presque identiques dans la plupart des chaînes, les choix de programmes, qui sont à la base des productions audiovisuelles, répondent cependant à des considérations multiples et variables selon les chaînes : recherche de l‟audience, missions de service public, contraintes budgétaires ou publicitaires, stratégie de différenciation ou d‟imitation, etc.82. La construction de la grille est, aussi, pré conditionnée dans large mesure par un ensemble de contraintes horaires imposées par les rigidités propres au domaine de l‟information, et par les obligations réglementaires imposées aux chaînes.83 Toute politique de programmation cherche à concilier entre les exigences de l‟audience et l‟objectif de rentabiliser cette audience. La programmation procède en général par trois étapes : -
Définition de la ligne éditoriale et de la politique de programmes de la chaîne. Cette politique est tributaire de la position de la chaîne dans le paysage audiovisuel et des moyens dont elle dispose. Une grande chaîne n‟hésite pas à engager de gros moyens dans la production qui maximisent l‟audience et les recettes publicitaires, alors qu‟une chaîne modeste optera pour le recyclage de produits audiovisuels existants. Ainsi, on peut investir des montants très inégaux pour nourrir l‟audience d‟une chaîne et atteindre l‟objectif de l‟équilibre indispensable des recettes et des dépenses à des niveaux très différents. A titre d‟exemple, le coût de la grille de Canal+ en 2012, c'està-dire le total des charges afférentes à l‟ensemble des programmes diffusés au cours de l‟exercice, a atteint 1143 M €, contre 935,5 M € pour TF1, 812 M € pour France 2, 867 M € pour France 3, 346,9 M € pour M6 et 144,5 M € pour France 584. Le rapport du coût de la grille de TF1 représente près de trois fois celui de M6 et près de neuf fois celui de France 5, cela se traduit sur l‟audience et la publicité. TF1 reste, en 2012, la première chaîne française en matière d‟investissement publicitaire (42% des recettes publicitaires nettes) et sa part d‟audience s‟élève à 22,7% sur les individus de 4 ans et plus.
-
La traduction des choix et des options retenues dans une grille de programmes, où on attribue à chaque type de programmes des cases horaires des jours de la semaine. Les programmes de forte audience prévus en prime time sont ceux qui définissent le mieux les points forts de la politique des programmes. Mais, la logique économique joue, au
81
In, La Télévision, op.cit. p. 55 Voir à ce sujet, Michel SOUDAN, “ les programmes audiovisuels : de la production à la diffusion ”, in, Cahiers français, n° 266, mai juin 1994, La Documentation française, pp . 24-30 83 Voir à ce sujet: P. FLORENSON, M. BRUGIERE, D. MARTINET, Douze ans de Télévision : 1974-1986, Commission Nationale de la Communication et des Libertés (CNCL), collection « Les Etudes de la CNCL », La Documentation française, Paris 1987, pp.85 à 117. 84 CNC, l’économie e la télévision (2003-2012), p.38, in. «Les études du CNC » », novembre 2013. 82
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niveau de chaque programme et pour chaque émission, le souci de rendement reste présent partout85. -
La planification précise des émissions qui seront diffusées dans les cases de la grille, en tenant compte de l‟état des stocks, des commandes, des accords avec les producteurs, réalisateurs, animateurs, et en prévoyant à l‟avance des programmes de substitution pour palier à toute possibilité de défaillance. La construction d‟une grille de programmes est un art délicat qui obéit à certaines grandes règles connues à la plupart des chaînes, en particulier :
-
Nécessite de la création d‟un lieu de familiarité avec le téléspectateur, à travers une régularité des rendez-vous quotidiens et hebdomadaires et une adaptation des programmes au besoin du public et sa disponibilité.
-
La recherche d‟un public de masse nécessite la diversification des programmes, afin de capter et fidéliser un public diversifié, ceci conduit “ à passer d‟une réflexion sociologique à une approche en termes de marketing”86, en s‟intéressant moins au public qu‟à l‟audience particulière de telle ou telle émission.
-
Un programme doit générer de l‟audience et ne pas faire fuir vers d‟autres chaînes une part de cet auditoire, autrement dit, il doit disparaître. Le maintien d‟un programme est donc décidé en fonction de sa capacité à maximiser le rapport ressources publicitaires / coût des programmes. Ceci amène à promouvoir en prime time les émissions les plus populaires, et à éliminer celles qui s‟essoufflent ou reculent face à la concurrence. Le Prime time a ainsi institué le régime de la fiction, du sport et du divertissement87. Une TV généraliste de masse a intérêt à couvrir tous les champs, car c‟est une activité à coûts fixes, toute recette marginale après le dépassement du point mort, constitue un bénéfice marginal. C‟est pourquoi, le choix d‟une émission supplémentaire s‟opère à travers l‟évaluation entre son coût de production et les recettes escomptées par cette émission.
Dans ce contexte, la fonction de programmateur dans une chaîne est stratégique et de premier ordre. C‟est de ses choix (programmes à acheter, à produire, tranches horaires, changement de programmes, etc.) que dépend la production de l‟audience. Ce qui suppose une remarquable connaissance des ressources en programmes de sa chaîne et ceux diffusés par la concurrence, et un réel savoir de tout ce qui touche le marché de programmes, le petit écran et le public. Il doit adapter le temps de la TV, la durée, le rythme et le thème des émissions à celui des téléspectateurs et des exigences des annonceurs. C‟est à lui que revient la résolution de l‟équation économique de l‟activité de la chaîne et ses décisions rejaillissent sur l‟équilibre de l‟ensemble. Il doit donc faire preuve d‟audace et de prudence tout à la fois, séduire et intéresser le public à travers des programmes adéquats et attrayants. Sa grille doit former un tout homogène sur lequel s‟ancre l‟identité de la chaîne offrant des repères de démarcation par rapport à la concurrence. Les différentes fonctions sont rarement regroupées au sein d‟un même service dans une chaîne de TV, mais sont confiées à des équipes spécialisées: “certaines se préoccupent d‟analyser de l‟audience, d‟autres de vérifier l‟application du cahier des charges, le respect de la moralité ou simplement celui de la loi, et d‟autres encore sont chargés des 85
Monique DAGNAND, “ L’art de construire la grille de programmes ”, in L’état des médias, La DécouverteMédias-Pouvoirs- CFPJ, 1981, p. 57. 86 Ibid. p. 59 87 R. BONNELL, La vingt-cinquième image, op.cit. p. 317.
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achats de programmes ou de lancement de productions nouvelles, d‟autres afin de démarcher des annonceurs ”.88 La programmation est considérée ainsi, “ comme un métier sous contraintes: ressources financières, état du marché, disponibilité des acteurs (…) réglementation diverse”89, mais l‟argent constitue la contrainte la plus importante qui conditionne les investissements dans les programmes et qui différencient les chaînes riches et les chaînes pauvres.
2.1.2- Diversification de l’offre et des genres La diversification des médias a entraîné une diversification des contenus, mais différentes études montrent qu‟il n‟existe pas de corrélation linéaire entre l‟augmentation du nombre de diffuseurs et le volume de production supplémentaire, sauf pour les programmes nécessaires à la constitution de l‟identité d‟une chaîne comme les programmes d‟habillage (logos, génériques, auto-promotion) et les programmes de flux qui servent à alimenter de façon continue le petit écran.90 Pour composer sa grille, une chaîne a le choix entre plusieurs genres: le journal, les magazines, les débats, les dramatiques, les feuilletons, les variétés, les jeux, etc. Les genres, eux-mêmes sont stratifiés dans de plus vastes catégories: information, divertissement, fictions, et évoluent d‟une année à l‟autre. TableauN°3:Structure de l'offre TV par genre de programmes (%) 2000
films fictions TV jeux variétés journaux télévisés magazines et documentaires sport émissions jeunesse publicité divers Total
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 4,3 4,2 5,0 4,8 4,9 4,8 4,8 4,8 4,6 4,6 4,6 4,7 20,5 20,6 18,7 17,9 17,7 19,3 18,9 18,7 18,8 18,1 16,3 25,5 8,1 3,8 3,8 4,7 5,8 7,1 7,1 6,0 6,2 7,2 8,0 8,2 5,5 7,1 8,6 8,0 7,8 7,0 7,7 7,2 7,3 6,7 5,6 5,4 5,2 2,3 5,6 6,0 5,7 6,0 6,0 6,2 5,9 5,8 5,5 5,6 36,3 29,6 31,5 32,6 33,8 33,2 31,0 31,4 30,8 31,0 32,4 33,3 3,2 2,0 3,9 3,2 3,6 2,9 3,2 2,5 3,2 2,5 3,2 2,4 8,0 10,0 8,1 7,6 6,9 7,9 8,0 8,3 8,6 9,0 8,5 9,0 6,9 7,7 7,2 6,6 7,0 7,2 7,3 7,1 7,1 7,2 6,6 6,4 6,2 7,8 5,9 5,8 5,9 5,9 7,1 7,2 7,3 7,3 6,8 6,9 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0
Source : Médiamat-Médiamétrie, individus de 4 ans et plus.
Tableau N°4: Structure de la consommation TV par genre de programmes (%)
films fictions TV jeux variétés journaux télévisés magazines et documentaires sport émissions jeunesse publicité
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
7,3 25,2 7,1 5,1 14,2 18,2 6,5 3,2 9,1
7,0 24,8 8,5 4,3 15,3 20,4 4,8 2,7 8,2
6,8 23,6 9,6 4,4 14,7 19,7 5,6 3,0 8,5
6,3 23,2 10,5 4,3 15,6 19,8 4,6 3,2 8,6
6,4 22,1 10,6 5,2 15,3 19,1 5,2 3,2 8,7
6,5 24,6 9,7 4,5 14,9 19,6 4,1 3,2 8,7
5,6 25,3 9,1 5,0 14,3 18,6 6,2 3,0 8,7
5,4 25,2 9,9 5,1 14,0 19,8 4,5 3,1 8,8
5,1 25,1 10,8 4,0 14,1 20,2 5,3 2,6 8,7
5,2 25,4 11,9 4,0 13,7 20,9 4,1 2,5 8,6
88
J. M. SALÜN, A. qui appartient la TV, op.cit. pp. 147-148. Michel SOUCHON, op.cit. p. 27. 90 Voir Jean Denis BREDIN, les nouvelles télévisions hertziennes, rapport au premier ministre, La Documentation française, Paris, 1985, pp. 134-135 89
35
2010 4,7 22,7 12,6 4,0 13,4 21,6 6,0 2,1 9,4
2011 5,5 26,8 9,8 4,5 11,1 22,2 3,8 3,7 9,2
divers Total
3,5 3,4 4,1 4,1 4,0 4,0 4,1 4,2 4,2 4,2 4,1 3,7 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0
Source : Médiamat-Médiamétrie, individus de 4 ans et plus.
Tableau N°5 : l’offre des programmes sur 2M en 2005 Catégories des programmes Nombre Pourcentage d’heures de diffusion 1750 20% Feuilletons et séries 1579 18% Documentaires 1211 14% Magazines 952 11% Cinéma 750 9% Dessins animés 456 5% Journaux télévisés & reportages 701 8% Sport 324 4% Publicité 241 3% Jeux 315 3% Musique et spectacle 62 0.07% Religion 27 0.03% Théâtre 416 4.9% Autres (promotion, habillage,…) 8784 100.0% Total Source : Etude sur les conditions de Développement du secteur audiovisuel ASESA-CGEM, Nov. 2005
On voit que les genres les plus prisés sont en premier lieu, la fiction puis l‟information et le divertissement. Cette offre n‟est cependant, pas consommée dans les mêmes proportions. Un décalage important apparaît entre l‟offre de certains programmes et leur consommation réelle qui trouve son explication dans les horaires de diffusion. Les programmes diffusés en période de grande écoute bénéficient d‟un « effet grossissant » en termes de consommation, alors que ceux diffusés en « day time » bénéficient d‟un effet contraire. Ainsi, en 2012, les magazines et les documentaires ont représenté 30,8 % des programmes proposés mais, ils n‟ont été consommés qu‟à hauteur de 23,7 %, alors que les jeux augmentent beaucoup leur consommation (3,8 % des proposés contre 9,8 % consommés). Le meilleur exemple de cet effet déformant est la publicité qui, bien que ce soit un genre non attrayant et non apprécié, dispose cependant, d‟une part de consommation plus importante que l‟offre. D‟ailleurs, comme le souligne R. Le Champion et B. Donard : « l‟indicateur TV offerte / TV consommée appelle une remarque : les genres proposés ne reflètent qu‟imparfaitement le contenu : un film de Jean Luc Godard ou de Lars Von Trier se classera dans la même catégorie qu‟un film de série B, bien qu‟il ne soit pas vraiment du même genre »91.
91
R. LE CHAMPION et B. DONARD, op.cit. p.81
36
Graphique N°3 : Offre et consommation télévisuelle selon le genre de programmes en France (%)¹
Chaque genre répond à des besoins de consommation ponctuels ou durables et obéit à des traditions et à des techniques de production et d‟organisation, que l‟industrialisation de l‟audiovisuel impulsée par la TV, a renforcé. La diffusion des fictions, notamment américaines, se concentre sur des cases plus porteuses, ce qui se traduit par une consommation de plus en plus forte. C‟est le genre le plus apprécié des téléspectateurs représentant, en France, 25,7% de la consommation télévisuelle hertzienne en clair en 2012. Dans tous les pays de l‟Union européenne, la fiction (séries, feuilletons, comédies de situation, pièces de théâtre, téléfilms, films d‟animation et de cinéma) représente la majeure partie de la production de la TV publique, sauf en France et au Portugal, où elle est dépassée par la catégorie “autres” (culture, éducation, documentaires, programmes pour enfants et d‟animation), ainsi qu‟aux Pays-Bas où la production des programmes d‟information est légèrement supérieure92. Pour bien comprendre l‟économie des programmes et afin de suivre et d‟observer l‟évolution du coût de chaque genre de programme, les économistes distinguent traditionnellement entre deux catégories de programmes: les programmes de flux et les programmes de stock. - Les programmes de flux correspondent généralement aux programmes non stockables, éphémères qui sont conçues pour un seul passage télévisé, et qui n‟ont pas de valeur d‟actif au-delà de leur première diffusion. On regroupe dans cette catégorie, les émissions liées à l‟actualité (information, sport) ainsi que les émissions ayant un caractère fugitif comme les émissions de jeux, de plateau, les variétés et dans une moindre mesure les “reality-show”, qui sous certaines conditions peuvent être rediffusées. Prévus pour une courte exploitation, rarement rediffusables, ces programmes sont entièrement financés par les chaînes de télévision, produites avec les moyens propres des diffuseurs et font appel à des 92
Voir à ce sujet : -Eurostat, « statistiques en bref », thème 4 -24/2002 - CSA : Etude sur la fiction de journée et d’avant soirée, les études du CSA, juin 2013
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producteurs indépendants ; ils bénéficient donc d‟un financement relativement important pour assurer la rémunération du producteur. - Les programmes de stock correspondent à des genres plus intemporels, peu liés à l‟actualité, peuvent être stockés et rediffusés. Leur cycle d‟exploitation, contrairement aux premiers, s‟étale sur une période assez longue permettant au producteur de couvrir le coût de production et à réaliser un profit. On prête ainsi aux programmes de stock une valeur artistique qui leur confère un statut privilégié dans la hiérarchie des programmes. Plus une chaîne dispose de programmes de stocks et plus son actif est valorisé. C‟est pourquoi ces programmes sont l‟objet d‟une concurrence internationale ardue, et beaucoup de pays encouragent leur production, et imposent certaines réglementations pour leur diffusion et production (les quotas, programmes MEDIA, etc.). Ces programmes correspondent en France à ce que l‟on appelle « œuvres audiovisuelles »93, ils sont constitués principalement d‟œuvres de création, de documentaires, de dessins animés, de fictions télévisées, de certains magazines culturels hors plateau et certaines retransmissions. Ils ont en plus la particularité, comme on le verra plus loin, de ne pas être intégralement financés par les diffuseurs. Les chaînes de télévision sont commanditaires et n‟assurent qu‟une partie du coût soit en tant que coproducteurs soit en préachetant les droits de diffusion. Le reste est assumé par les sociétés de production audiovisuelle et les aides à la production d‟œuvres audiovisuelle. Ainsi selon le CNC, l‟investissement des chaînes dans le financement de la production audiovisuelle et cinématographique s‟est élevée à 1 157,2 M€ en 2012 (dont797,6 M€ dans la production audiovisuelle aidée et359,6 M€ dans le financement des films cinématographiques) contre 843,7 M€ en 2003, soit une progression de 37,2 % (+17,6 % en euros constants94. Toutes les chaînes dépendent d‟apports extérieurs de programmes pour constituer leur grille, à travers l‟achat de matériaux tout faits, fabriqués par d‟autres chaînes ou par des organismes spécialisés. Ainsi, en France, “la commande intervient en amont de la production, sous forme de participation de la chaîne au financement de l‟œuvre (part antenne et part producteur.) L‟achat est effectué en aval de la production après que l‟œuvre a été entièrement financée et éventuellement diffusée par une chaîne française ou étrangère”95. Cette distinction entre programmes de stock et programmes de flux, a « l‟intérêt de mettre l‟accent sur le rapport du temps, principal défi que la TV doit résoudre dans son processus d‟industrialisation: comment concilier le temps de flot à celui de la production audiovisuelle ? »96. Elle reflète aussi la division pratiquée dans le monde des programmes où seuls les programmes de stock sont soumis à de fortes surenchères et à une concurrence de plus en plus accrue.
93
La définition de l‟œuvre audiovisuelle se fait par la négative : “ constituent des œuvres audiovisuelles, les émissions ne relevant pas d‟un des genres suivants; œuvres cinématographiques de longue durée, journaux et émissions d‟information : variétés, jeux, émissions autres que de fiction majoritairement réalisés en plateau, retransmissions sportives, messages publicitaires, télé-achat, auto-promotion services de télétexte.” C‟est cette définition qui sert de base pour le calcul des quotas. Elle diffère sensiblement de celle retenue par le CNC pour être éligible au compte de soutien notamment pour 3 grands genres: divertissement, les spectacles et magazines, ainsi que celle de DTSF qui est beaucoup plus large. Voir à ce sujet: “Consultation relative à la définition de l‟œuvre audiovisuelle », La lettre de la CSA, janvier 2002. 94 CNC, l’économie de la télévision, op.cit. 95 CSA, “ Télévision: le coût de la programmation », les études de la CSA, juillet 1983, p. 39 96 J.M. SA LAÜN, op.cit., p. 154.
38
Il faut signaler que cette distinction entre programmes de stock et programmes de flux, bien que présentant un intérêt certain au niveau de la gestion du temps, elle n‟est pas toujours pertinente dans la mesure où certaines genres tels que les variétés et les actualités par exemple sont, souvent archivés et revendus. A l‟inverse, certaines fictions datées ou dépourvues de valeur patrimoniale ne sont jamais rediffusées, et pourront être considérées comme des programmes de flux. C‟est pourquoi, il est préférable d‟opérer une répartition classique par genres, où on distingue les produits audiovisuels selon leur nature par “famille” de produits97. L‟objet est de comprendre la logique économique de la programmation, et ses conséquences sur la production télévisuelle.
2.1.3 – Structure des coûts de programme La grille de programmation n‟aura pas le même coût selon qu‟elle comporte des programmes achetés ou originels, des programmes de flux ou de stocks. L‟économie de la chaîne et sa gestion dépendent donc de la quantité respective de chacun de ces programmes, autrement dit, du choix effectué par la chaîne entre créer elle-même ses propres programmes ou bien recourir aux achats de matériaux préexistants fabriqués par d‟autres diffuseurs ou des organismes spécialisés.
2.1.3.1- Les coûts de la création C‟est le genre du programme qui va déterminer les coûts en fonction de l‟importance du nombre de personnes nécessaires à sa confection, des charges salariales (salaires et cachets), des décors et costumes utilisés, des lieux et surtout des procédés de tournage (vidéo ou films.) Tous ces éléments pèsent sur le budget, exercent une influence et aboutissent à des coûts variables, comme cela ressort des tableaux suivants relatant l‟évolution du coût horaire des œuvres audiovisuelles en France. Tableau N°6 : Evolution du coût horaire moyen des œuvres audiovisuelles (en €) 2005 Fiction Animation Documentaire Magazine culturel Spectacle vivant
772 900 577 800 152 000 83 700 161 500
2006 854 600 543 400 160 900 94 200 150 700
2007
2008
2009
857 500 562 600 156 300 62 800 160 400
813 000 585 400 156 400 78 700 151 800
883 300 573 800 155 100 79 300 155 900
2010 928400 552 900 161 100 81 600 159 700
3122
2012
972 000 611 800 145 600 81 400 148 700
869 500 609 200 149 900 72 900 131 700
Source : CNC, la production audiovisuelle aidée, septembre 2011(N°319) et avril 2013.
2.1.3.1.1- La fiction La fiction est le genre dont le coût horaire est le plus élevé et elle est de loin le genre privilégié par les chaînes, puisqu‟elle représente 26 % de l‟offre totale de programmes des chaînes98, concentre en 2012, 58,6 % des investissements totaux (66,1% en 2003) réservées par les diffuseurs à la production d‟œuvres audiovisuelles99, et représente plus de 60 des 100 meilleures audiences en 2009 et 2010. 97
Christine JORGER, “le coût des programmes audiovisuels”, in Bulletin de l’IDATE, 1982. Il faut signaler que plus d la moitié de l‟offre de fiction disponible sur les chaînes gratuites est concentré sur les antennes des chaînes de TNT : TMC (17%), France 4 (16%), NT1 (13%), NRJ 12(13%) ; In, CSA, La fiction sur les chaînes nationales gratuites : chiffres clés 2005-2010, Les publications du CSA, 2011. 99 CNC, La production audiovisuelle aidée, avril 2013. 98
39
Des différents genres de programmes audiovisuels, la fiction est le genre le plus recherché pour la fidélisation de l‟audience. C‟est un produit qui ne s‟use pas et qui constitue depuis longtemps la clef de voûte de l‟industrie des programmes aux Etats Unis. Mais c‟est un produit aléatoire qui suppose des coûts de production élevés sans jamais offrir des garanties de succès. Ses coûts sont élevés du fait que la création s‟apparente dans le cas de la fiction télévisuelle à celle du cinéma, œuvre avec laquelle, elle partage les mêmes contraintes, le même savoir et le même personnel. Elle exige beaucoup de dépenses de conception (écriture de scénario, recherche des interprètes, élaboration des décors et des costumes, composition musicale, repérage des lieux du tournage..), du tournage (une grande variété de compétences techniques et artistiques), et de production (tirage, montage, mixage)100. La production d‟une fiction nécessite plusieurs mois de préparation et de travail, ce qui se répercute en partie sur ses coûts. Ces coûts varient cependant en fonction des formats. Les stratégies de formats de fiction sont également très différentes de pays à pays. En effet le « format » qui représente le mode de découpage et de sérialité des fictions exprime les habitudes de narration, de production et de communication des images spécifiques à chaque pays. Eurofiction101 distingue entre cinq formats de fiction: * Anthology ou collection: ce sont des fictions différentes les unes des autres en termes de personnage comme d‟équipes de réalisation, mais qui ont en commun un titre générique. * Minisérie: Il s‟agit d‟une suite de 2 à 6 épisodes d‟une même fiction. * Sérials: cette catégorie n‟est présente significativement qu‟en Royaume-Uni où on distingue deux variantes: les open serials et les closed sérials (au moins sept épisodes). * Séries: ce sont des épisodes bouclés avec les mêmes personnages d‟une fois sur l‟autre . 102
Envisagés sous l‟angle des structures des logiques de production, ces formats peuvent être regroupés en deux grandes catégories. La fiction unitaire: les téléfilms et leurs dérivés (Anthology et minisérie) qui se situent dans des procédures de travail classique (écriture, tournage, post production) proches de
100
N. TOUSSAINT, L’économie de médias, op. Cité. p. 56. INA, « Eurofiction économie : économie de la fiction télévisuelle en Europe », étude réalisée à la demande du OEA et du CNC, éditions 1999, 2001, 2003. 102 Le CNC adopte dans ses publications les mêmes définitions de formats : - Un unitaire est une fiction unique ou composée, pour les besoins de la diffusion télévisuelle, de deux parties dont l‟histoire est bouclée. Les unitaires de format court sont des programmes unitaires dont la durée est généralement inférieure à 30 minutes. - Une série est une suite de fictions composées d‟éléments communs (tels que les personnages et les décors). - Un feuilleton est une série dans laquelle l‟histoire se poursuit d‟un épisode à l‟autre. Les séries de format court sont des séries dont la durée par épisode est inférieure à 15 minutes. - Une mini-série est définie comme une série comprenant au moins trois épisodes et n‟étant pas destinée à être prolongée. (in La production audiovisuelle aidée en 2012) - Une collection correspond à un ensemble de fictions réunies autour d‟un même sujet, d‟un même auteur ou d‟une même ambition artistique et qui n‟intègrent pas d‟éléments récurrents. Selon J. M. PIEMME, la série « désigne un ensemble d‟épisodes constituant chacun une entité narrative complète et/ ou un même personnage (ou groupe de personnages) revient d‟épisode en épisode avec une périodicité qui n‟excède pas la semaine » alors que le télé feuilleton concerne « des récits dont l‟intrigue s‟étale sur plusieurs épisodes et qui ne trouve son terme qu‟à la fin de la succession de ceux-ci », in, La propagande inavouée, Union générale d‟édition, 1975 p. 23. 101
40
celles de cinéma, même s‟il existe en France par exemple une séparation assez stricte entre les deux secteurs. La fiction sérialisée (séries et sérials) est un genre spécifiquement télévisuel qui fait l‟objet d‟une fabrication en série dite « industrielle » permettant de réaliser à terme des économies d‟échelle. L‟important volume de produits finis et la continuation sur la durée en sont les caractéristiques principales qui la distinguent de la première catégorie. Elle est courant aux Etats-Unis de distinguer dans la fiction sérialisée deux grandes catégories de programmes: les comédies de situation (sitcoms) et les séries d‟aventure action qu‟on désigne communément sous le terme de dramas. Les premières tournées en studio sur support vidéo ont un format d‟une demi-heure, alors que les seconds ont des épisodes de soixante minutes et sont tournés avec des décors extérieurs sur support film Cette distinction entre fiction unitaire et fiction sérialisée rejoint d‟ailleurs celle qui a prévalu dans l‟étude du CSA sur la production audiovisuelle103 où on opère une distinction entre fiction lourde et fiction légère sur la base du format et du coût de production. La fiction légère est généralement de 26 minutes, et elle est l‟objet d‟une fabrication en série permettant de réaliser à terme des économies d‟échelle, alors que dans la fiction lourde, la durée atteint 90 minutes et plus rarement 52 minutes. Le coût de production de la fiction légère est très nettement inférieur à celui de la fiction lourde dans la mesure où ce genre fait appel à des infrastructures et des procédures de travail « industrielles » Ainsi en 2012, en France , le coût horaire de la fiction s‟établit en moyenne à 1, 526 M€ pour les collections, 1, 520 M€ pour les unitaires de 90 minutes, 1, 434 M€ pour les séries de 90 minutes, 1, 307 M€ pour les séries de 52 minutes, 360,6 K€ pour les séries de 26 minutes, 297,4 K€ pour les séries de format court et 212,8 K€ pour les unitaires de 52 minutes. Tableau N°7 : Coût horaire de la fiction selon les formats (en milliers euro) 2008 2009 2010 2011 unitaires de format court 363,1 336,1 353,5 334,9 unitaires de 52 minutes 1 210,0 876,6 641,3 unitaires de 90 minutes 1 399,1 1 461,7 1 466,1 1 487,5 séries et feuilletons 699,4 766,4 768,1 872,9 collections 1 742,0 1 367,1 1 601,7 1 434,8 séries de 90 minutes 1 304,1 1 422,7 1 393,0 1 431,5 mini-séries de 90 minutes 1 272,1 1 589,3 1 279,5 2 046,0 séries de 52 minutes 1 132,8 1 170,0 1 259,8 1 305,6 mini-séries de52 minutes 1 122,1 1 173,1 1 199,9 1 035,4 séries de 26 minutes 327,7 304,5 284,2 303,6 mini-séries de 26 minutes 415,5 890,3 séries de format court 340,2 261,2 317,7 344,3 Total 813,0 883,3 927,3 972,0
2012 315,5 212,8 1 520,9 776,6 1 526,4 1 434,7 1 307,3 360,6 297,4 869,5
Source : CNC, La production audiovisuelle aidée 2012, avril 2013, p. 28
On constate au niveau des formats une démarcation entre les chaînes privées et publiques. Pour les premières, le format 52 minutes est devenu le premier tant en volume horaire qu‟en volume financier alors que pour les chaines publiques, ce format n‟arrive qu‟en deuxième place en volume financier car celles-ci continuent de donner la priorité au format de 90 minutes. 103
CSA, Les coûts de la programmation, op.cit.
41
Graphique N°4 : Répartition par format en volume horaire Chaînes publiques
chaînes privées
Source : CSA, étude sur la fiction de journée et d’avant-soirée, op.cit. Pour 2012, selon les données du CNC concernant la production aidée, les devis des œuvres de fiction se situent à 667,4M€ pour une production totale de 768 heures, ce qui donne un coût horaire moyen des 869.500 € pour un apport horaire moyen de diffuseur de 467.500 € /heure, soit un taux de financement de 70,05 %104. Les diffuseurs investissent donc, beaucoup dans la fiction et ils renforcent leur participation dans le financement de ces programmes. le groupe France Télévisions représente à lui seul 54,68 % des dépenses engagées par l‟ensemble des groupes dans la production de fiction en France. Tableau N°8 : Investissements des chaînes dans la fiction Heures apport des coût horaire apport initiées1 diffuseurs (M€)** (K€)* horaire (K€)*
Chaînes publiques nationales Chaînes privées nationales gratuites Chaînes payantes Chaînes locales Services en ligne TOTAL
2011 459
2012 438
2011 302,96
2012 255,61
2011 911,8
2012 787,4
2011 657,5
2012 581,6
2011 72,1
2012 73,9
216
275
170,71
172,25
1131,0
1025,5
788,6
690,7
67,9
67,4
89 8 1 774
40 7 8 768
62,61 0,49 0,12 536,90
38,11 0,48 1,03 467,47
981,7 192,7 118,7 972,0
969,8 288,1 236,0 869,5
670,8 42,3 92,3 688,1
481,6 44,9 132,3 596,6
68,3 22,0 77,8 70,8
49,7 15,6 56,0 68,6
*En tant que premier diffuseur **Tous rangs de diffusion confondus
Source : CNC, La production audiovisuelle aidée en 2012, avril 2013, p.2
104
taux de financement (%)
CNC, La production audiovisuelle aidée en 2012, op.cité
42
Graphique N°5 : Financement de la fiction en France en 2012
7%
3%
9% Diffuseurs CNC 10,7%
Producteurs français Etranger 70%
Autres
Source : CNC, La production audiovisuelle aidée en 2012, op.cit., p.20
Ces coûts sont évidemment beaucoup plus importants aux Etats-Unis où le budget moyen par épisode dans une chaine de câble varie de 1,5 à 2,5 millions de dollars et tend vers le double dans les networks (3 à 4 millions de dollars)105. Dans les chaînes des pays moins riches, ces coûts sont beaucoup inférieurs et sans commune mesure avec ceux des pays industrialisés106. Ainsi d‟après l‟appel d‟offres lancé par les deux chaines marocaines (Al Oula/SNRT et 2M/Soread) en 2013 pour la production de programmes à leur profit, le budget estimatif proposé pour la réalisation d‟un téléfilm de 90mn est respectivement de 1,120 millions de dirhams pour Al Oula ce qui donne un coût horaire moyen de l‟ordre 746.667 dirhams, et de 1 million de dirhams pour 2M soit un coût horaire moyen de 666.700 dirhams. Ce coût est de loin inférieur à la confection d‟une heure de télénovela au Brésil ou Mexique. S‟agissant de la structure des coûts de la fiction, elle est identique à celle du cinéma107 : -
Environ 55% de frais de personnel dont 14% pour l‟interprétation et 30% pour les techniciens
-
Environ 45% de frais techniques divers (studios, pellicule, laboratoires) et de frais généraux.
De 1997 à 2010, les charges ont augmenté fortement (46 %). L‟analyse de l‟évolution par nature de dépenses fait apparaître une hausse particulièrement importante des cachets. Le total des postes « personnel », « interprétation » et « charges sociales » constitue 52,4% des coûts contre 48 % en 1997 comme cela apparaît d‟après le tableau suivant :
105
CSA, la production de la fiction aux Etats-Unis, Commission de réflexion sur l‟évolution des programmes, juillet 2012, 106 Voir l‟étude réalisée par Emmanuel COCQ au profit de l‟UNESCO, « les coûts de production des œuvres audiovisuelles, » 107 N. TOUSSAINT, op. cit. p. 56.
43
Tableau N°9: Evolution des dépenses de fiction (en M €)
Les dépenses Droits artistiques Personnel Interprétation Charges sociales Décors et costumes Transport, défraiement, régie Moyens techniques, laboratoire Assurances et divers Frais généraux Imprévus TOTAL
2009 46 153,2 81 110,8 52,8 56,5
2010 45,7 163,6 81,7 109,7 57,3 61,5
2011 52,4 175,3 92,0 121,8 62,5 62,9
2012 47,4 161,3 80,4 103,2 56,3 60,5
54,3
59,4
68,3
59,9
19,1 45,9 34,6 664,3
21,5 44, 0 33,2 677,7
23,3 50,7 43,2 752,4
16,2 41,7 40,5 667,4
Source : CNC, op.cit.
2.1.3.1.2 – L’animation Les coûts de l‟animation sont aussi relativement élevés dans la mesure, où un film d‟animation nécessite la mise en œuvre de différentes techniques et exige beaucoup de main d‟œuvre qualifié. La chaîne de fabrication implique une division de travail plus importante et plus contraignante pour la réalisation de volumes importants, et elle fait beaucoup appel à la sous-traitance internationale, notamment celle des pays asiatiques (Corée du sud, la Chine..), ainsi qu‟à la coproduction internationale en raison de l‟importance des investissements nécessaires à sa confection. Aussi, les fourchettes de devis pour la production d‟un épisode de 26 minutes sous-traitée dans les pays asiatiques se situent en 2001 entre 70.000 et 105.000 dollars.108 L‟animation est un genre apprécié dans la mesure où il représente ce que les programmateurs attendent d‟un programme jeunesse; elle est fédérateur pour les 4-10 ans, rediffusable plusieurs fois sans perte de valeur et créateur de flux de revenus secondaires (les droits dérivés). L‟animation est considérée comme « un investissement porteur à cause de sa longévité, de sa capacité à voyager au-delà des frontières nationales, et de son potentiel en flux de revenus secondaires, du marché de la vidéocassette, de l‟édition, du jouet et des accords de licence »109. L‟animation du style japonais envahit de plus en plus les grilles de programme pour la jeunesse de la plupart des chaînes du monde. Aux Etats Unis, le succès de Pokémon a relancé le genre ces dernières années. Les dessins animés japonais comme Digimon, Dragon Ball, Yu-gi-oh, Pygmalion, Naruto et bien d‟autres sont critiqués dans beaucoup de pays, en raison de leur caractère violent. Malgré cela, ils trouvent de preneurs dans la mesure où ils répondent à un besoin de programmes peu coûteux et à un intérêt croissant pour la commercialisation d‟émissions plus ciblées (droits dérivés). A titre d‟exemple, un épisode de Pokémon coûte environ 100.000 $, tandis que la fabrication aux Etats Unis d‟un épisode de dessin animé américain est estimée à environ 500.000 $. Aussi, les dessins animés sont principalement diffusés sur les nouveaux réseaux de WB et de Fox, et sur
108 109
La production de série d‟animation, CNC, juin 2003, pp. 32-33. Rapport du Screen Digest sur l‟animation, the challenge for invistitors, janvier 2001
44
les réseaux de câble Cartoon Network, qui a diffusé une douzaine de séries d‟animation japonaises lors de la saison 2000.110 Contrairement à la fiction et au documentaire, les diffuseurs en France, interviennent peu dans le financement des œuvres d‟animation et les investissements connaissent de fortes variations d‟une année à l‟autre. Mais, depuis 2004, leurs investissements progressent. Ainsi en 2006 et 2009, ils ont investi près de 56 M€ dans la production de programmes d‟animation aidés par le COSIP. Tableau N°10 : Investissements des chaînes dans l’animation Heures apport des coût horaire apport taux de initiées diffuseurs (K€)* horaire financement (M€)** (K€)* (%) 2011 761
2012 721
2011 29,87
2012 22,23
2011 594,7
2012 650,1
2011 166,5
2012 181,2
2011 28,0
2012 27,9
711
62
18,79
10,93
666,7
694,2
128,6
129,7
19,3
18,7
81
107
9,05
16,07
539,5
536,6
64,9
92,0
12,0
17,1
1
4
0,16
0,22
193,7
238,1
33,6
25,1
17,3
10,5
Services en ligne
-
3
-
0,24
-
262,8
-
78,6
-
29,9
TOTAL
133
2 98
57,88
49,67
611,8
609,2
137,1
135,4
22,4
22,2
Chaînes publiques nationales Chaînes privées nationales gratuites Chaînes payantes Chaînes locales
*En tant que premier diffuseur **Tous rangs de diffusion confondus
Source : CNC, Le marché de l’animation en 2012, p.14, juin 2013
Les postes de production d‟un film d‟animation captant la majorité des dépenses sont : Les dépenses de rémunération (droits artistiques, personnel, interprétation, charges sociales) qui absorbent 49,7% du total suivi par les dépenses techniques (moyens techniques, frais de laboratoires) 32,2 % et les autres dépenses 18% Tableau N°11: Evolution des dépenses de l’animation (en M €) Les dépenses
2009
Droits artistiques
2011
2012
15
14
7356
7157
Personnel
53.1
46.9
3251
8151
Interprétation
2.9
3.9
355
153
Charges sociales
26
22.8
2858
2353
-
-
0,2
-
Transport, défraiement, régie Moyens techniques, laboratoire
2.9 69.8
2.6 3357
3.4 1152
3.3 3156
Assurances et divers Frais généraux Imprévus TOTAL
9.9 12.5 7.0 199.1
9.9 11.4 6 .4 177 .0
9.2 12.8 10.7 217.3
6.0 12.4 11.2 181.8
Décors et costumes
Source : CNC, op.cit. 110
2010
Cecilia FEILITZEIN, Catherine BUCH, op; cité.
45
Les diffuseurs ont des obligations de contribuer à la production d‟animation afin d‟assurer un niveau plancher d‟investissement pour un secteur fragile. Seules TF1 et M6 ont des obligations précises depuis 1997. TF1 a ainsi l‟obligation de consacrer 0,6 % de son chiffre d‟affaires pour la production de dessins animés, alors que pour M 6 le volume de commandes est de 1 % du chiffre d‟affaires. Pour France 2 et France 3, il n‟existe pas d‟objectifs chiffrés, mais les conseils d‟administration déterminent pour les chaînes publiques un volume de commandes minimales d‟animation ou de fiction jeunesse, fixé en 2001 à 85 heures pour France 3 et 75 heures pour France 2. Ainsi, les diffuseurs n‟investissent pas beaucoup dans l‟animation, le cumul des devis des programmes d‟animation est inférieur d‟un tiers à celui des documentaires et deux fois et demi moins élevé que celui des fictions. Malgré cela, la France est considérée comme un pays performant au niveau de l‟animation. Elle est le premier producteur européen et l‟animation est le premier poste d‟exportation des programmes télévisuels. Ce contraste entre les investissements des diffuseurs dans l‟animation et une industrie nationale d‟animation florissante s‟explique par deux facteurs essentiels: Un soutien accru de l‟Etat aux structures de production actives sur le marché international, par la mise en place en 1982 d‟un plan d‟action (plan images) en vue de soutenir le potentiel de production et d‟agir sur la demande et l‟offre, et l‟institution en 1986 du COSIP dont les aides sont d‟un apport essentiel dans le financement des films d‟animation. En 2012, les apports du CNC couvraient 20,2 % des devis contre 19,4 % en 2011111. L‟internationalisation de la production des dessins animés qu‟on peut appréhender à travers les données suivantes du CNC: les apports étrangers représentaient 23,1% des devis de programmes d‟animation en 2012 contre 28% en 2011 et 45,6% en 2001. Ainsi 226 heures de programmes aidées en 2012, soit 75,6 % du volume total produit, correspondent à des coproductions avec l‟étranger. Les apports étrangers en amont de la production se font en majorité par le biais de la coproduction, mais également en prévente Tableau N°12 : Financement de l’animation (en M €) 2008 2009 2010 2011 2012 Financements français
108,7 149,9 138,4 156,4 139,8
producteurs français
24,9
31,6
30,9
39,8
37,7
préventes en France
6,4
12,2
9,5
6,1
5,5
diffuseurs
40,1
56,0
50,7
57,9
49,7
SOFICA
2,1
3,7
2,9
5,5
3,0
CNC
30,4
35,6
15
16,4
13
autres
4,7
3,7
5,7
5,1
7,2
Financements étrangers
42,9
51,4
42,5
60,9
42,0
coproductions étrangères
25,7
31,1
31,3
43,4
23,2
préventes à l’étranger
17,2
20,2
11,3
17,4
18,8
Total des financements
151,6 201,3 181,0 217,3 181,8
Source : CNC, op.cit.
111
CNC, La production audiovisuelle aidée en 2012, op cit.p.50
46
Graphique N°6 : Financement de l’animation
3,20% 3% 27% Diffuseurs
23%
CNC Producteurs français Etranger Autres Prévente en France 21%
20,20%
Source : CNC, La production audiovisuelle aidée en 2012, op.cit. p.50
Ainsi l‟animation est un genre très internationalisé et très dépendant envers l‟étranger. Les diffuseurs ont tous développé une politique de coproduction et de pré vente avec l‟étranger. Les partenaires sont constitués de pays qui ont les moyens d‟investir et qui ont développé des structures assez solides de création et de fabrication dans le domaine de l‟animation. Jusqu‟au début des années 90, les coproductions provenaient du Japon, du Canada et des États Unis, mais un renversement de tendance a eu lieu après au profit des coproducteurs européens (notamment avec l‟Allemagne) à la suite de la mise en place par l‟Europe d‟un organisme spécifique de soutien à l‟industrie de l‟animation (Cartoon)112. Il faut toutefois souligner, que la logique de la coproduction internationale, qui, sauf exception, s‟impose aux producteurs se traduit par l‟obligation de ventiler la fabrication en fonction des accords de coproduction et à la nécessité de mobiliser des financements complémentaires associés à la localisation du travail dans certains territoires. Elle aboutit, selon un rapport de la CNC, à des incohérences et des surcoûts: « l‟efficacité supposée du montage financier n‟induit pas de la même façon celle de la ventilation des tâches, au contraire. Le prix à payer est „‟quasi systématiquement „‟ une complexité accrue. La rupture de la chaîne technique pose nécessairement des problèmes de transport, de vérification, éventuellement de changement de support et de compatibilité entre les équipements des uns et des autres d‟où, nécessairement, une productivité moindre »113 Le caractère international de la production des dessins animés s‟explique aussi par la nature du genre qui se prête à une bande son originale dans chaque langue, contrairement à la
112
Voir à ce sujet Lélia MAURELLET, L’internationalisation du dessin animé, partie 2, ch.2 ( la coopération européen, un facteur de développement), op. cité. 113 CNC, La production de dessins animés, op.cit. p.39
47
fiction. En plus « les personnages animés ont aussi la réputation de franchir aisément les frontières culturelles »114. Par ailleurs, non seulement une série d‟animation jouit de réels espoirs de ventes sur le marché international, mais elle peut aussi engendrer des recettes supplémentaires sur le marché national après les cycles de diffusions acquises par les premières chaînes commanditaires du programme dans la mesure où « destinés à un public jeune qui se renouvelle constamment, les dessins animés peuvent être rediffusés à intervalles réguliers espacés de quelques années seulement, sans donner l‟impression défavorable d‟un programme déjà vu et usé »115 . Certaines séries peuvent par conséquent avoir de longues durées de vie, ce qui est tout à fait exceptionnel dans les autres genres. Certaines chaînes thématiques pour enfants se sont mêmes spécialisées dans la rediffusion de ces séries (exemple Manga du groupe ABSAT). De surcroît, l‟économie de la production d‟animation se caractérise non seulement par l‟importance du financement international, mais aussi par la diversification des sources de financement. Pour rentabiliser le coût élevé des programmes d‟animation, il faut multiplier les sources de revenus notamment les ventes à l‟étranger et les produits dérivés. Comme les durées d‟amortissement sont parfois longues, un producteur doit atteindre en moyenne 3 à 4 ans pour rentabiliser son investissement. Les américains et les japonais ont depuis longtemps compris que la rentabilisation des séries d‟animation ne peut être assurée par les seules exportations des séries, et ils ont développé des politiques de droits dérivés, c‟est à dire l‟exploitation commerciale des personnages des séries animés sous forme de jouets et autres produits116 . Les flux financiers, comme on le verra plus loin, sont considérables, tout en étant mal connus, « d‟une part, ils ne participent pas directement au financement du programme, d‟autre part, ils sont étalés dans le temps après la diffusion de l‟émission »117. Ils sont aussi inégalement répartis, parce qu‟ils ne concernent que les séries à grand succès. Le grand nombre de séries produites oblige les fabricants à choisir des valeurs sûres pour limiter les risques. Ainsi, sur 30 à 35 séries animées diffusées en France, deux ou trois sont sujettes à une politique de droits dérivés. La notoriété de certains personnages est telle que la rentabilité de la série est rapidement assurée, par exemple les droits dérivés de Babar ont permis de financer 53 % du coût de la série et ceux de Tintin l‟ont remboursé à 83 %118. Cette imbrication entre une logique commerciale et des programmes destinés aux enfants, a certes permis, dans certains pays comme la France, à pallier la faiblesse des budgets de programmes jeunesse des chaînes, notamment publiques Il n‟en demeure pas moins que cette situation montre le caractère tributaire de la sphère publique d‟une logique marchande et pousse à s‟interroger sur la légitimité de l‟aide publique à certaines séries animées, comme le souligne à juste titre Myriam Bahuaud: « Les industries de TV du dessin animé et du jouet sont structurées par les mêmes lois de fond: une logique culturelle, une logique technique et une logique économique. Elles doivent composer avec des logiques indissociables et sont donc à la recherche d‟un compromis plus ou moins fragile différent d‟une industrie à une autre. Ensemble, elles élaborent des stratégies qui déclinent les mêmes personnages et leur univers sur différents supports et elles tentent de conquérir les mêmes destinataires: les enfants »119. 114
Pierre JEZEQUEL, « L‟introuvable économie des programmes », in les Dossiers de l’audiovisuel, N°108, mars/avril 2003 115 Ibid. 116 Ce point sera détaillé dans le chapitre réservé aux sources de financement 117 Pierre JEZEQUEL, op.cit. 118 Lélia MAURELLET, L’internationalisation du dessin animé, op. cit. p.13 119 Myriam BAHUAUD, « Les émissions jeunesse conçues pour promouvoir les produits dérivés », op. cit.
48
En bref, on voit qu‟à côté des ventes à l‟international et du marché secondaire de la vidéo cassette et des DVD, les bénéfices réels de l‟industrie télévisuelle pour enfants proviennent des accords de licences (licenssing) et des produits dérivés (merchandising).
2.1.3.1.3 – Les autres produits audiovisuels D‟autres types de création ont des coûts en moyenne plus faibles. C‟est le cas : des documentaires et magazines, les variétés et les jeux, etc. Les documentaires et magazines constituent des genres visant à fournir un certain regard sur le monde et d‟approfondir certains sujets. Ce sont des émissions qui se détachent de l‟actualité immédiate cherchant à rapprocher certaines régions lointaines et à informer plus longtemps que ne peuvent le faire les journaux télévisés. Ils utilisent comme matière brute les produits finis ou semi- finis déjà réalisés par d‟autres diffuseurs après une adaptation du montage et les commentaires, ce qui se répercute sur les coûts. Les thèmes abordés sont multiples et varient d‟un lieu à un autre, ils traitent pratiquement de tous les domaines (les sciences humaines, exactes et techniques, médicales, économiques, naturelles, etc.). En France, d‟après la CSA120, les documentaires scientifiques dont ceux traitant des sciences humaines, sont largement présents sur les chaînes publiques, alors que les chaînes privées privilégient le thème de la vie moderne et économique (activités professionnelles, l‟environnement, protection du patrimoine, les loisirs, etc.) - Les documentaires représentent une part importante de l‟offre des programmes des chaînes, ils occupent la deuxième position après la fiction et constituent même la clé de voûte de la programmation de France 5. Les chaînes françaises réservent une importante enveloppe financière à la production de ce genre d‟émission. En 2012, elles couvraient près de 51% des devis (contre 48,8% en 2011) soit un apport horaire moyen de 73,7 M€. Les chaînes nationales en clair ont investi 177,58 M€ dans la production de documentaires contre 147,89 M€ en 2011 soit une hausse de plus de 20 %. L‟apport des chaînes publiques dans ce genre représente 64,4 % des investissements de l‟ensemble des diffuseurs (respectivement 42,6 % et 61,2 % en 2011) ; elles financent ces programmes à hauteur de 48,8 %et elles sont à l‟initiative de 44,1 % des heures de documentaire aidées. Les chaînes privées nationales ont investi 33,78 M€ pour 602 heures de programmes soit 19,02 % de l‟ensemble des investissements des chaines nationales. Pour les chaînes payantes, le documentaire constitue un genre privilégié. Elles totalisent 24,8 % de l‟ensemble des heures commandées par les diffuseurs et 16 % des investissements de ces derniers dans ce genre (respectivement 28,4 % et 17,3 % en 2011) Tableau N°13 : Les commandes des diffuseurs en documentaire Heures apport des coût apport initiées1 diffuseurs horaire horaire (M€)** (K€)* (K€)*
Chaînes publiques nationales chaînes privées nationales gratuites chaînes payantes 120
taux de financement (%)
2011 1 136
2012 1 290
2011 115,97
2012 143,80
2011 201,3
2012 210,7
2011 99,8
2012 109,7
2011 49,5
2012 52,1
494
595
31,93
33,78
105,5
94,5
64,2
56,0
60,9
59,2
758
724
32,81
35,66
104,6
106,3
39,5
45,0
37,8
42,3
CSA, « La diffusion des documentaires sur les chaînes hertziennes en 2000 »
49
chaînes locales
258
294
8,26
9,36
103,6
106,7
25,0
25,4
24,1
23,8
services en ligne
18
18
0,20
0,62
61,1
86,1
9,5
28,9
15,5
33,6
autres chaînes Total
2 2 665
1 2 921
0,23 189,40
0,06 223,29
139,7 145,6
136,4 149,9
4,9 68,1
6,9 73,7
3,5 46,8
5,1 49,2
*En tant que premier diffuseur **Tous rangs de diffusion confondus
Source : CNC, Le marché du documentaire en 2012, p.13, juin 2013.
Ce sont en particulier ARTE et France 5, en raison de leur vocation, qui se distinguent dans ce genre d‟émission en programmant un nombre important de documentaires inédits touchant tous les domaines et en provenance, en partie, de pays hors l‟Union européenne, offrant ainsi une meilleure exposition à travers des cases régulières et des créneaux horaires faisant une large part au prime time, alors que dans la plupart des autres chaînes la diffusion est majoritairement nocturne. Les documentaires ont un coût réduit en raison de l‟absence d‟acteurs, de décors et de faible effectif des équipes de tournage. En 2012, selon le CNC, le coût horaire moyen de ces programmes atteint 149.900 € pour un apport horaire des diffuseurs de 73.700 €, soit un taux de financement de 47 % en moyenne. En vingt ans, le coût horaire moyen du documentaire varie entre 117.000€ (1995) et 271.400 € (1990). En tendance, il baisse malgré la légère reprise de ces dernières années qui s‟explique en particulier par le développement du « docufiction » et de documentaires de 90 minutes à destination de la première partie de soirée.121 Graphique N°5: Evolution du coût horaire moyen du documentaire
Source : CNC, Production audiovisuelle aidée en 2011, op. cité
Concernant la structure des coûts de production des documentaires, l‟essentiel des dépenses est constitué par les charges afférentes au travail de recherche, les déplacements et les achats d‟archives, ainsi qu‟aux opérations de montage. Par conséquent, les rémunérations accaparent plus de 50 % des dépenses. Les coûts du personnel concentrent 28,2 % de l‟ensemble des dépenses de production du documentaire en2012. Ils sont suivis par le poste « moyens techniques, laboratoires », qui capte 19,7 % des dépenses totales (19,5 % en 2011). 121
Source : CNC, Production audiovisuelle aidée, op. cité .
50
Les charges sociales constituent le troisième poste de coût pour les producteurs de documentaire, avec une par relativement stable à 15,4 % des devis totaux (15,7 % en 2011). Tableau N°14 : Evolution des dépenses de documentaires (en M €) Les dépenses 2011 2012 Droits artistiques 43,9 49,0 Personnel 108,7 123,4 Interprétation 2,4 3,0 Charges sociales 60,8 67,3 Moyens techniques, laboratoire 75,8 86,1 Décors et costumes 1,6 2,6 Transport, défraiement, régie 37,5 43,4 Assurances et divers 11,7 12,9 Frais généraux 26,8 30,6 Imprévus 18,9 19,5 TOTAL 388,1 437,9 Source : CNC, Le marché du documentaire en 2012, p.13, juin 2013.
- Les magazines constituent un genre qui regroupe des émissions variées principalement, des émissions de plateau et celles à base de reportages, lorsqu'ils remplissent certaines conditions (majoritairement tournées hors plateau), ils peuvent être considérés comme des œuvres de création bénéficiant de l‟aide et être comptabilisés dans le cadre de la contribution obligatoire de diffuseurs à la production audiovisuelle. Traitant souvent des thèmes d‟actualité, les magazines d‟intérêt culturel ont en général une valeur patrimoniale limitée pour les chaînes ; leur coût horaire moyen est globalement moins élevé que celui des documentaires (81 600 €). Néanmoins, en France, les chaînes les financent très largement et délèguent davantage la responsabilité de leur production à des sociétés qui sont leurs filiales à l‟instar de M6 (C, Production, métropole Production)122. L‟apport des diffuseurs en 2013, représente 73,75% des financements. Ils apportent en moyenne 62 800 € par heure de magasine aidée. Le taux de financement moyen des chaînes est de 81,:%. Tableau N°15: Les commandes des chaînes en magazines Heures initiées
apport des diffuseurs (M€)**
coût horaire (K€)*
apport horaire (K€)*
taux de financement (%)
2011 344
2012 427
2011 17,75
2012 21,67
2011 105,6
2012 90,8
2011 66,9
2012 68,6
2011 63,4
2012 75,5
Chaînes privées nationales gratuites
34
35
0,29
0,37
30,5
29,8
13,0
15,1
42,5
50,6
Chaînes payantes
226
:7
5,33
1,99
56,8
34,8
44,3
20,2
78,0
58,0
Chaînes locales
67
42
0,55
0,45
30,3
41,2
7,6
5,6
25,1
13,6
Services en ligne
:
-
0,04
0,20
222,3
-
0,8
-
0,4
-
TOTAL
546
578
23,96
24,67
81,4
72,9
49,2
51,7
60,4
70,9
Chaînes publiques nationales
*En tant que premier diffuseur 122
CSA, La production d‟œuvres audiovisuelles, op.cit. p. 34.
51
**Tous rangs de diffusion confondus
Source: CNC, la production audiovisuelle aidée en 2012, avril 2013, p.74
- Le divertissement est un genre en progression, qui est utilisé par certaines chaînes, telle que Canal+, aux heures diffusées en clair, comme un moyen d‟identification avec notamment différents rendez-vous réguliers (exemple: les guignols, les Robins des bois). Le coût horaire moyen des divertissements en 2001 s‟établit à 202 000 Eu / heure et le taux de financement par les chaînes se situe à 88 % du coût total. Dans le divertissement, les jeux et les variétés tiennent une place centrale. Ils ont longtemps constitué l‟un des pôles les plus fédérateurs d‟audience. Ce sont en général des émissions répétitives commanditées pour des plages horaires précises qui ne se prêtent pas facilement à la rediffusion, qui sont conçues pour les besoins exclusifs d‟une chaîne, et où l‟animateur joue un rôle central du fait que la valeur commerciale de ces émissions repose essentiellement sur le talent de celui-ci. C‟est pourquoi, en général la production de ce type d‟émission est l‟objet d‟une production indépendante de la part d‟une entreprise spécialisée, dont le responsable est parfois l‟animateur lui-même, qui en a alors la maîtrise totale et qui en cas de succès accroît sa valeur commerciale et lui assure une certaine continuité. Cependant, comme le souligne Paraccuellos, « si le lancement d‟une nouvelle émission de variétés ou de jeux est une opération à haut risque, sa réussite peut assurer de confortables revenus pendant de longues années. Elle n‟est cependant pas à l‟abri de l‟usure du temps. Savoir renouveler progressivement ses formules est donc un des secrets du métier »123. Ainsi, si l‟offre de musique à la TV a fortement cru au cours de la décennie 90 du fait de l‟explosion du nombre de chaînes thématiques musicales, l‟analyse de cette offre fait apparaître une régression de la place des chaînes hertziennes, un certain déséquilibre entre les genres au profit des musiques actuelles et une inégalité dans les modes d‟exposition124. La musique classique et le jazz sont diffusés, en général, en troisième partie de soirée car il s‟agit, pour la majorité des chaînes, d‟une « programmation de contrainte qui doit beaucoup au respect des obligations réglementaires et qui recueille de faibles audiences. »125 Les émissions de variété ont connu, pour leur part, une baisse très nette dans la plupart des chaînes126. L‟explication réside dans le fait que les émissions de variétés sont des programmes de flux assez coûteux ; s‟ils présentent l‟avantage d‟offrir des rendez-vous assez fédérateurs et permettant une double coupure publicitaire, il n‟en demeure pas moins que ce sont des programmes non rediffusables à court et moyen terme qui sont le cadre d‟une rationalisation des coûts de la grille, et à partir du moment où ces programmes voient leur audience baisser, ils se sont raréfiés au profit du divertissement à caractère musical. En outre, du fait que ces programmes ne sont pas considérés comme des œuvres audiovisuelles127, ils ne peuvent bénéficier ni de l‟aide du COSIP (compte de soutien à l‟industrie des programmes), ni être valorisés dans les quotas de diffusion et de production. Par ailleurs, leur coût de fabrication est très élevé pour leur permettre de trouver place en deuxième soirée. A cela, il faut ajouter, que face à la rareté d‟artistes de variétés capables de fédérer un large public, conséquence de la segmentation des goûts musicaux, les diffuseurs ont tendance à privilégier 123
J-C PARACUELLOS, La TV : clé d’une économie invisible, op.cit. p.128 Voir La Lettre du CSA, « musique et TV: état des lieux », N°124-janvier 2000 125 Idem 126 TF1, qui était la chaîne qui diffusait le plus d‟émissions de variétés en 1990 (279 heures), constitue le cas le plus flagrant de cette baisse, puisqu‟elle n‟a diffusé en 2001 que 26h50mn, contre 34h50mn en 2000 et 51h35mn en 1999, Cf. CSA, « bilan de TF1, année 2001 » 127 Voir CSA, « consultation relative à la définition de l’œuvre audiovisuelle », janvier 2002 124
52
une programmation plus ponctuelle basée sur des « événements » afin d‟éviter les phénomènes d‟usure et de saturation. D‟où la difficulté grandissante pour un grand nombre d‟artistes d‟accéder à la TV, vecteur essentiel à la promotion de leurs œuvres, car ils ne trouvent pas leur place dans les émissions de variétés de première soirée. En ce qui concerne les jeux, ce sont des programmes qui réalisent de bons scores d‟audience, séduisants pour les annonceurs car ils sont considérés comme un bon investissement, et intéressants pour les diffuseurs en raison de leur rapport coût / audience relativement bas. Ils peuvent être programmés quotidiennement se présentant alors sous un format court (1/2 heure) ou de façon hebdomadaire s‟apparentant alors à une fiction exigeant beaucoup de moyens. Toutefois, à la différence de la fiction, les jeux sont conçus de telle manière qu‟ils n‟exigent pas autant d‟attention que celle-ci, ils peuvent être suivis auditivement et ne réacquièrent que quelques coups d‟œil. Depuis le développement de chaînes commerciales, on assiste à la multiplication des jeux spectacles récompensés par des lots ou des gains attrayants. Ce sont des jeux d‟argent auquel on peut gagner des montants importants. Les formules sont nombreuses, qui pendant une demi-heure, mêlent divertissement, effets spéciaux et musique, suspens et rire, hasard et test d‟astuce ou de connaissance. Les plus célèbres qui ont fait leurs preuves partout dans le monde, sont d‟origine américaine. Citons à titre d‟exemple: « La roue de la fortune » (the Wolrd of fortune), « Le juste prix » (the Price is right), etc. Ils sont, en général, programmés à des moments stratégiques, en pré prime time, afin de servir de « locomotives pour les journaux télévisés »128. Ils sont pour les chaînes un excellent substitut aux autres genres de programmes, peu coûteux et qui allient performances et coût permettant la réalisation de larges économies d‟échelles. Ils sont fabriqués par quelques firmes au 1/10 ème du prix d‟une demi-heure d‟une série129. Ils reviennent à quatre fois moins chères qu‟un soap opéra et « les coûts peuvent être amortis en produisant cinq émissions par jour et en les diffusant sur cinq jours de la semaine »130. De surcroît, « par leur structure très souple, complètement malléable à la publicité, les jeux télévisés offrent une gamme très diversifiée d‟intervention publicitaire »131; ils se prêtent aussi bien au parrainage et ils sont utilisés par les chaînes comme un moyen de compenser les limitations réglementaires imposées au volume de publicité. Aussi, leur véritable vocation est-elle parfois détournée à des fins purement mercantilistes. C‟est pourquoi, les jeux sont souvent regardés avec suspicion par les autorités de régulation en raison des irrégularités observées dans ces émissions. Ainsi, dans sa conclusion d‟une étude publiée sous sa direction par le service des programmes de la CNCL (Commission nationale de la communication et des libertés) en 1989, Daisy Golard constate: « La place désormais centrale des cadeaux objets de consommation présentés, films et annonces en empruntant tout ou en partie à des techniques publicitaires peut inciter à considérer certaines émissions comme des „‟produits‟‟ dont la véritable vocation est en partie (ou entièrement) détournée »132. Les sondages pratiqués dans certains pays tendent à montrer une très bonne mémorisation des marques cadeaux par les téléspectateurs et le bon rendement publicitaire dans les jeux télévisés, car « tout produit au-delà de sa valeur d‟usage, transformé en „‟récompense‟‟ par la magie de la compétition et du „‟jeu télévisé‟‟, devient un bien qui se mérite et cette dimension valorise à la fois le produit et celui qui l‟offre »133. 128
MediasPouvoirs, N° 18, p.41 PASQUIER, Les Etats Unis et leur TV, op. cit. p.151 130 MediasPouvoirs, N° 18, p.41 131 Ibid., p.48 132 Ibid. 133 In Maroc Hebdo, la nouvelle économie 129
53
Les jeux ont enregistré une forte progression sur l‟antenne des chaînes commerciales. Le volume de leur diffusion a plus que triplé entre 2000 et 2003134. Cette hausse est due, comme on l‟a déjà souligné, du net accroissement de l‟offre d‟émissions de télé réalité (Star Academy, Nice people, Koh-Lanta, L‟île de la tentation, Fear Factor, Zone rouge, le Maillon faible, etc.)135. - Les investissements dans le spectacle vivant sont constitués essentiellement des captations de différents spectacles avec ou sans public ayant lieu en direct ou non. Il en va ainsi des concerts, des ballets, des pièces de théâtre, des opéras, des cirques, des spectacles d‟humoristes. Ce sont en général les chaînes publiques qui investissent le plus dans ce genre puisque leurs investissements représentaient, en 2013, 18,:8M €, pour un apport horaire moyen à 63.000 €. Elles concentrent ainsi 68,53% de l‟ensemble des apports des diffuseurs sur le genre et 41,3% des heures aidées. Le Coût horaire moyen du spectacle vivant se situait en 2013 à 142.700 €, et la couverture financière par les chaînes ne représentait que 32,5% du devis de production du genre.136 Tableau N°16 : Les commandes des chaînes en spectacle vivant Heures initiées
2011
apport des diffuseurs (M€)**
coût horaire (K€)*
apport horaire (K€)*
taux de financement (%)
2011
2012
2011
2012
2011
2012
2011
2012
21,15
18,97
195,2
187,8
65,1
62,0
33,4
33,0
Chaînes publiques nationales Chaînes privées nationales gratuites Chaînes payantes
394
201 2 280
30
52
2,40
1,97
161,9
112,9
74,1
31,1
45,8
27,6
249
144
3,58
3,28
111,7
98,7
15,8
14,1
14,1
14,3
Chaînes locales
78
92
4,43
5,92
92,0
80,7
24,1
19,4
26,2
24,1
Services en ligne
70
129
1,28
2,32
91,7
90,7
14,5
13,5
15,8
14,9
Autres chaînes TOTAL
1 621
697
0,06 32,90
32,47
70,4 148,7
131,7
23,6 42,8
35,2
33,5 28,8
26,7
*En tant que premier diffuseur **Tous rangs de diffusion confondus
Source: CNC, la production audiovisuelle aidée en 2012, avril 2013, p.62
Selon les genres du spectacle vivant, les captations de spectacles musicaux représentent toujours 70,8% des heures du spectacle vivant suivi par le théâtre avec 21,1% alors que les autres genres demeurent marginaux (5 % pour la danse et 1,6% pour le cirque) en raison de leur coût horaire assez élevé. Tableau N°17 : Coût horaire moyen des genres du spectacle vivant heures
Coût horaire
3122 3123 3122 134
3123
En 2003, l‟offre de TF1 de ce genre de programmes s‟est accrue de 236h32min par rapport à 2002 se situant à 1171he42min 135 Voir, CSA, Bilan de la société privée Tf1, année 2003, septembre 2004. 136 CNC, la production audiovisuelle aidée en 2012, op.cit., p.60
54
450
509
124,7 118,4
146
119
101,9 106,0
contemporaine
2
3
105,8
92,4
hip hop / rap / électro
10
10
90,3
86,0
jazz
62
107
88,3
77,9
monde / traditionnel
67
52
100,8
92,3
opéra
78
103
247,1 217,2
variété / rock
86
115
102,0
Cirque
6
13
305,2 326,5
Danse
25
29
267,3 193,6
Théâtre
123
132
199,6 150,5
Autres spectacles
17
15
186,8 136,5
621
697
148,7 131,7
Musique dont classique
Total
95,4
Source: CNC, la production audiovisuelle aidée en 2012…. op.cit. p.67
Quant aux journaux d’information, il est difficile de donner des coûts du fait que leur confection amalgame des inputs issus d‟agences d‟information nationales ou internationales, obtenus par le biais de l‟abonnement des chaînes à ces agences ou par l‟intermédiaire de divers organismes de TV (UER, ASBU, etc.) ou d‟interviews et reportages propres à la chaîne. C‟est pourquoi ils peuvent atteindre souvent, selon N. Toussaint, un prix comparable à celui des magazines ou des documentaires, surtout lorsqu‟ils font appel à des présentateurs vedettes qui drainent une vaste audience et dont la rémunération est élevée s‟apparentant à celle d‟un acteur de cinéma.137 Par ailleurs, il faut souligner que la transmission et la diffusion de n‟importe quelle manifestation engendre des coûts techniques, ainsi que le paiement des droits aux organisateurs, producteurs et interprètes. Dans ce cadre, le sport constitue un exemple éloquent dans la mesure où les droits de diffusion des grandes manifestations sportives, fortement génératrices d‟audience, sont l‟objet d‟une vive concurrence aux enjeux financiers très importants.
2.1.3.1.4–Les droits de diffusion des évènements sportifs La formation des prix des droits de diffusion se fait dans le marché secondaire qui regroupe les diffuseurs et les organismes sportifs ou les intermédiaires ayant déjà acquis les droits auprès d‟eux. Les règles du jeu et les rapports de force ont fortement évolué dans le temps, au gré des variations entre le nombre des offreurs et des demandeurs. La cartellisation de l‟offre et la diversification de la demande à la suite des développements récents du secteur, ont favorisé, ces dernières années, la position des offreurs. Ainsi, les grandes 137
N. TOUSSAINT, L’économie des médias, op.cit., p. 57.
55
manifestations sportives mondiales, comme les jeux olympiques et la coupe du monde de football, sont négociées dans une situation de monopole: d‟un côté un offreur unique (la CIO ou la FIFA), de l‟autre une multitude de demandeurs (les diffuseurs de tous les pays). Au niveau de chaque pays, on trouve fréquemment un marché de la forme de monopole contrarié où une ligue nationale est l‟offreur unique face à un nombre restreint d‟acheteurs: les diffuseurs du pays. Le renforcement de la position des instances sportives est dû non seulement à l‟augmentation du nombre de chaînes, favorisée par la révolution numérique, mais aussi à la politique de segmentation de l‟offre au point que les négociations portent sur des segments (lots) spécifiques selon que la chaîne souhaite proposer le spectacle sportif en clair ou en crypté, en direct ou en différé, en intégralité ou en résumé, en diffusion hertzienne, câblée ou satellitaire, par abonnement simple ou paiement à la séance. Il s‟en suit qu‟un même événement peut être proposé en vente sous des formes diverses et vendu plusieurs fois. A titre d‟exemple, pour les droits de retransmission du championnat de France de football pour la période 2004-2007, l‟offre de mise en chère de la Ligue de football professionnel (LFP) concernant la ligue 1 a été proposé en trois lots: la retransmission directe (lot1), un match décalé et un magazine (lot2), le paiement à la séance (lot3)138. Par conséquent, il n‟y a pas lieu de s‟étonner de l‟inflation des droits de retransmission que l‟on constate à tous les niveaux et à chaque négociation de contrat. Dans une étude publiée en 2010 par la société d‟étude PricewaterhouseCoopers139, il ressort que les droits de retransmissions des évènements sportifs représentent 23,1 milliards de dollar, soit 20% du chiffre d‟affaires total du marché du sport et qu‟ils connaitront d‟ici 2013 une croissance annuelle moyenne de l‟ordre de 3,7 %. Cette croissance est imputée à la région Afrique du Nord et Moyen Orient où les droits télévisuels consacrés au sport par les diffuseurs passeront de 9,95 Md$ en 2009 à 11,854 Md$ en 2013140.comme cela apparaît dans le tableau suivant : Tableau N°18 : Evolution des droits de diffusion des évènements sportifs (en M$) 2005
5002
5002
5002
2009
200:
2021
3122
3123
3124
Amérique du N
7 714
7 041
8306
8303
9366
8606
9741
9295
10664
9578
Europe MENA
8 422
8341
10551
10097
11839
9951
12366
10683
13463
11854
Asie Pacifique
2 9 02
2850
3254
3188
3575
3527
3298
3729
4056
4010
Amérique Latine
798
835
956
947
994
988
1171
1136
1212
1266
Total
19 736
19067
23067
23535
25774
23072
27206
24843
29395
26708
Croissance
+3,7
-3,4
+21,0
-2,03
+9,51
-10,5
+17,9
-8,7
+18,3
-9,1
Source :PriceWaterHouseCoopers 138
Voir le journal Le Monde du 15/1/02 et du 19/1/02 PriceWaterHouseCoopers, “Back on Track ? The Outlook for the global sports market to 2013”, juin 2010 140 Il faut signaler qu‟une étude d‟Eurostaf réalisée en 2001 évaluait le marché mondial des droits sportifs à 48,4 milliards d‟euros pour l‟année 2000. L‟augmentation enregistrée est imputée essentiellement à l‟Europe où les droits consacrés au sport par les diffuseurs sont passés de 2,6 MM € en 1998 à près de 3,8 MM € en 2000. Le directeur de l‟étude, Jean Michel Kehr conclut: « la TV s‟est substituée à la vente de tickets comme première source de financement du sport professionnel. Elle est devenue la condition sine qua non pour l‟organisation des grands événements sportifs » Eurostaf, Les droits sportifs à la télévision, juillet 2001, cité in, Sport de haut niveau et argent, op.cit. p.46 139
56
Par conséquent, la demande de sport pour nourrir les programmes et les points audimat a connu une progression exponentielle et a engendré dans les pays industrialisés une véritable bulle financière, qui a nourri la masse salariale des athlètes, des sports dominants, les revenus des intermédiaires et le chiffre d‟affaires des grands clubs. Aussi, depuis le milieu des années 90, les TV sont confrontées à une explosion généralisée des coûts d‟acquisitions des épreuves sportives retracée dans les tableaux ci-dessous : * Les Jeux olympiques Tableau N°19 : Evolution des droits de retransmission des Jeux olympiques d’été
(en M$ courants) Années
Ville organisatrice
Droits TV mondiaux
Droits TV EtatsUnis
Chaîne bénéficiaire
Droits TV Europe
1960
Rome
1,178
0,5
CBS
0,67
1964
Tokyo
1,578
1
NBC
0,38
1968
Mexico
9,750
4,5
ABC
1
1972
Munich
17,792
7,5
ABC
1,70
1976
Montréal
34,862
25
ABC
4,50
1980
Moscow
101
85
NBC
5,95
1984
Los Angeles
287
225
ABC
19,80
1988
Séoul
403
300
NBC
28
1992
Barcelone
636
401
NBC
90
1996
Atlanta
898,2
456
NBC
250
2000
Sydney
1331,6
715
NBC
350
2004
Athens
1.497,5
793
NBC
400
2008
Pékin
1.714,7
894
NBC
460
Source: Revue Diffusion (UER), Hiver 2000-2001 p. 25 et Jean François Bourg et Jean Jacques Gouguet, Analyse économique du sport, PUF (collection « pratiques culturelles »), 1998, réed. décembre 2000
On constate que les droits ont connu une progression vertigineuse de trois chiffres en 1968 (+550 %), en 1976 (+194 %), en 1984 (+184 %) avant de revenir à une croissance importante à deux chiffres à partir de 1988 qui s‟est graduellement baissée pour atteindre plus de 18 % en 2008. Pour les pays européens (UER), la croissance a été plus importante pour les jeux de Los Angles en 1986 (+230 %), de Barcelone en 1992 (+250 %) et d‟Atlanta en 1996 (+177 %). Les droits de l‟édition 2008 (TV, internet et téléphone portable) qui ont été reportés par la chaîne chinoise CCTV ont engendré pour le CIO des recettes dépassant 2,3 Md$ et ceux de l‟édition 2012 à Londres ont atteint 3,91 Md$141. 141
Voir : - Mustapha KARKI, Football et droits de retransmission : un enjeu de taille, Revue Echanges, juillet 2008, p.48 - Le CIO, ce mystérieux groupe qui gère dans l'ombre les Jeux Olympiques, in atlantico, 9aout 2012 Read more at http://www.atlantico.fr/pepites/cio-mysterieux-groupe-qui-gere-dans-ombre-jeuxolympiques-445574.html#c0cpA4ShmObaxGor.99
57
En 1996, l‟UER a conclu pour les droits Eurovision un accord couvrant tous les jeux Olympiques de 2000 à 2008 pour une somme de 1.445.360.000 dollars, offre retenue par le CIO malgré une proposition bien plus élevée de Rupert Murdoch (News Corporation), le magnat de la TV à péage (2 milliards de dollars, soit 38 % de plus)142. Depuis 1988, c‟est le réseau américain NBC qui détient les droits qui ont été multiplié par 2,9 sur les vingt dernières années. La masse des droits de TV bénéficie en partie aux fédérations internationales qui en perçoivent un pourcentage. Leur montant est passé de 8 M $ en 1980 (cumul des jeux d‟été et d‟hiver) à 255 M $ en 2000143. * La coupe du monde de football La coupe du monde de football a connu une évolution encore plus frappante dans des conditions de commercialisation similaires. Les droits mondiaux de retransmission qui se situaient à 34 M $ en 1978 sont passés à 1.090 M $ en 2002 et seront de 1.330 M $ en 2006. Tableau N°20: Droits mondiaux de la coupe de monde de football (en M)
1978 Argentine
1982 1986 1990 Espagne Mexique Italie
1994 USA
1998 2002 Jap. 2006 France /Corée Allemagne
Dollars
34
55
70
135
150
350
1.090
1.330
Fr. suisse
-
39
49
95
115
135
1.200
1.600
Source : CSA, op.cit. Jusqu‟à une date récente, la plupart des grandes manifestations sportives internationales comme les J.O ou la coupe du monde de football étaient diffusées sur des TV en clair. Les chaînes se regroupaient au sein de l‟UER pour acquérir les droits de retransmission de ces événements. Cet organisme qui compte en son sein essentiellement des chaînes publiques disposait en Europe d‟une envergure financière supérieure à celle des groupes privés. Mais en 1996 s‟est produit un changement majeur, pour la première fois, devant le refus de l‟UER de verser d‟avantage à la FIFA que les 92 M € convenus en 1987 pour la coupe du monde de 1998, celle-ci a cédé l‟exploitation des droits de retransmission des coupes du monde de 2002 et 2006 à un opérateur privé, le groupe allemand Kirsch en association avec la société suisse ISL (International Sport & Leisure)144 pour la somme de 1.700 M €. Elle a obtenu de ce groupe une garantie de versement minimum de 890 M € pour la seule coupe du monde de 2002. Un tiers de cette somme devrait être rétrocédé au Football mondial via les Fédérations nationales (237 M € sur quatre ans) ou les confédérations continentales (70 M €). Le groupe Kirsch avait pour principale activité d‟acheter et de revendre des droits audiovisuels. Le sport lui est apparu comme une source de profit nouvelle. Ayant acquis les droits, il les cède par la suite par « appartements », pays par pays réalisant ainsi des gains substantiels145. En raison d‟un endettement excessif, ce groupe a déposé son bilan146,
142
Wilfried VERLINDE, « Les J.O », revue Diffusion UER, hiver 2000-2001 Sport de haut niveau et argent, op. cit. p.46 144 En mai 2001, profitant de la faillite de la société ISRM / ISL, Kirsch est devenu l‟unique propriétaire des droits mondiaux des 22 compétitions. Voir le journal Le Monde du 12 /10/ 02 145 Les seules recettes de la revente des droits de l‟épreuve 2002 ont permis de rentabiliser l‟achat. Ainsi, les droits ont été revendus 198 millions en Espagne, 126 millions en Allemagne, 910 millions en Amérique du Sud, 68 millions en Corée, 255 millions en Angleterre, et 154 millions en Italie, in Le Journal Le Monde du 29 /06/02 143
58
toutefois, sa filiale de droit suisse Kirsch Sport qui comptait dans son portefeuille outre les droits de la coupe du monde de football de 2006, le championnat d‟Allemagne de football (la Bundestliga) acquis pour 1.500 M€, et certaines épreuves de la coupe du monde de ski, représentait l‟une des filiales bénéficiaires du groupe, ce qui fait que différents repreneurs se sont proposés pour l‟acquérir. Pour illustrer la formidable évolution des prix, il faut rappeler qu‟en 1987 les cinq grandes unions des télédiffusions mondiales avaient acheté les droits de retransmission télévisuelle des trois coupes du monde de 1990, 1994 et 1998 pour moins de 854 M € 147. De même, en France Tf1 a versé 168 M € pour acquérir les droits de retransmission de la coupe du monde de 2002 et une partie de celle de 2006, alors qu‟en 1998, l‟ensemble des chaînes françaises n‟ont versé pour l‟intégralité des transmissions que 7,6 M€148. La coupe du monde de football constitue une source de revenus importante pour la FIFA. Cette dernière a réalisé lors de la compétition de 2010 en Afrique du sud, un chiffre d‟affaires de 3 655M$ (non compris les recettes de billetterie) dans lequel les produits des droits de diffusion de TV représentent près de 66% (2 408M$), suivi des droits du marketing avec un montant de 1 072M$. Tableau N°21 : Produits de la FIFA de la coupe du monde 2010 (en M$)
Source : Rapport financier de la FIFA 2010, p.37
Il faut signaler que pour améliorer ses recettes, la FIFA a commercialisé la compétition de 2010 directement aux diffuseurs alors que pour celle de 2006 ce sont des agences intermédiaires qui s‟occupaient de la commercialisation. L‟Europe représente la principale source de ces recettes. Tableau N°22 : Recettes de diffusion TV de la FIFA par région (2007-10) 2010 2009 3119 3118 3118-3121 Europe Asie et Afrique du Nord Amérique du Sud et Central Amérique Nord et Caraïbes Reste du Monde Transaction en nature Autres recettes
334 089 157 625 85 528 51 767 34 425 0 110 954
354 142 146 673 83 550 53 090 17 796 5 728 1
146
308 550 113 183 80 100 52 875 11 309 2 353 1
292 443 86 000 80 100 53 252 8 166 1 1
Le journal Le Monde du 27/4/02 R. LE CHAMPION, B DONARD TV de pénurie, TV d’abondance, op. cit. p. 181 148 Sport de haut niveau et argent, op.cit. p.47 et La lettre du CSA n°126 147
59
1 289 224 503 481 329 278 210 984 71 696 8 081 110 954
Commissions de vente Total produits de diffusion TV (coupe du monde) Autres compétitions FIFA TOTAL PRODUITS DIFFUSION TV
-59 244 715 144
-38 042 622 937
-18 285 550 085
1 519 961
-115 571 2 408 127
2 834 717 978
27 020 649 957
5 399 255 484
4 563 524 524
39 816 2 447 943
Source : Rapports financiers de la FIFA 2008,2009 et 2010.
La croissance rapide des droits fragilise la rentabilité économique de la diffusion des événements sportifs par les chaînes financées par la publicité. Le potentiel publicitaire de beaucoup pays n‟est pas extensible à l‟infini. L‟amortissement de l‟acquisition des droits de diffusion doit donc chercher de nouvelles sources de financement. C‟est la raison pour laquelle les chaînes vivant de la publicité peuvent être tentées de ne couvrir que partiellement cet événement cédant l‟exclusivité aux chaînes de péage susceptibles de faire payer la note à leurs abonnés. Il y a donc une limite économique à cette inflation, c‟est la capacité des diffuseurs à péage ou en clair à financer les droits. Les surenchères ont peut-être aujourd‟hui atteint leurs limites, beaucoup de diffuseurs annoncent qu‟ils commencent à perdre de l‟argent en retransmettant des événements sportifs. Il faut, en effet, rappeler qu‟en dix ans, les droits pour le football ont été multipliés par 35 en Angleterre, par 19 en France, par 10 en Allemagne et par 7 en Espagne149. En Grande Bretagne, parmi les raisons ayant précipité la faillite d‟ITV Digital, les droits de retransmission de football anglais sont pour quelques choses. En 2002, la chaîne ne parvenait plus à assumer les charges de ces droits, elle avait déjà perdu 1.290 M€ alors que son contrat avec le championnat anglais courait jusqu‟à 2004. Devant le refus de la Ligue anglaise de renégocier le contrat qui portait sur les droits de retransmission des rencontres D2, D3 et D4, la chaîne a déposé son bilan mettant fin à son activité. Par ailleurs, en France, pour les J.O de Sidney, Canal + et TF1 ont renoncé à partager l‟achat des droits de retransmission avec France TV estimant que les décalages horaires entre la France et l‟Australie ont pour conséquence des diffusions la nuit ou à des horaires très matinaux et ne peuvent par conséquent être rentables vu le coût excessif des droits. La question du retour sur investissement dans les acquisitions de droits sportifs est donc déterminante pour la rationalité des dépenses des chaînes. Et pour mesurer la rentabilité économique immédiate de leur investissement les diffuseurs doivent procéder à l'examen des marges nettes de diffusion de programmes sportifs. Or, d‟après une récente étude du CSA150, depuis le début des années 2000, les résultats enregistrés par les éditeurs de services de télévision lors de la retransmission des compétitions les plus médiatiques du calendrier sportif (Coupe du Monde et Championnat d'Europe des Nations de football, Jeux olympiques d'été) montrent leur difficulté à dégager une marge bénéficiaire de leur diffusion télévisuelle, comme le montre le graphique ci-dessous, établissant la différence entre les recettes commerciales et les coûts d'acquisition et de production des retransmissions :
149
Sport de haut niveau et argent, op.cit. p.51 CSA, Sport et télévision : quels défis pour le régulateur dans le nouvel équilibre gratuit-payant ?, in ; les études de la CSA, juin 2011. 150
60
Graphique N°8 : Marge nette de diffusion de la coupe du monde, de l’euro de football et des JO
Cette dégradation de la rentabilité des investissements dans les compétitions sportives les plus importantes est encore plus frappante dans le cas des éditions de 2006 et 2010 de la Coupe du monde de football, qui se sont déroulés dans des régions (Allemagne et Afrique du Sud) permettant de diffuser un grand nombre de rencontres à des heures d'audience favorables, contrairement à l‟édition de 2002. Graphique N°9 : Décomposition de la marge nette de diffusion de la coupe du monde du football
L‟autre grande manifestation internationale récurrente, le championnat d‟Europe de football, a connu à son tour une flambée des prix. Les droits pour l‟Europe de ce championnat ont été multipliés par 43 fois passant de 3,2 M Francs suisses en 1980 à 140 M Francs suisses en 2000 soit une croissance de 4.275 % au cours de 20 années. Pour ceux de 2004, l‟UER aurait surenchéri à 487,8 M € contre 426,8 M € proposé par Kirsch associé à la société londonienne des droits sportifs Octaqui, soit plus de 5 fois le prix payé pour le championnat de 2000.151 Les autres disciplines de portée internationale génèrent des recettes infiniment moindres. Au niveau de chaque pays, Le football demeure le sport le plus populaire, le plus présent à la TV et qui réalise les meilleurs scores d‟audience. La place des autres sports est variable selon les pays. L‟arrivée de nouvelles chaînes de TNT dans beaucoup de pays n‟a pas 151
CSA, op.cit.
61
changé la donne, puisque ces nouveaux services tendent à reproduire les schémas de programmation des chaînes historiques au lieu se positionner sur une offre alternative de programmes sportifs et des disciplines peu exposées en télévision, comme cela ressort du cas de la France : Graphique N°10 : Offre de sport en France en 2010 repartie par disciplines
(en volume horaire)
Source : CSA, Sport et télévision : quels défis pour le régulateur dans le nouvel équilibre gratuit-payant ?, Op.cit., p.17
A ce sujet, les écarts observés entre les pays traduisent des disparités fortes au niveau des ressources dont disposent les diffuseurs pour acquérir les droits, dans le nombre des chaînes concernées et dans la stratégie des acteurs en présence. Les droits sur le football constituent l‟enjeu d‟une concurrence de plus en plus rude entre les chaînes et représentent le principal poste de dépenses en matière des droits sportifs. Cette importance du foot peut être appréhendée aussi par le biais des sommes avancées par les chaînes pour l‟acquisition des droits de football par saison, que reflètent le tableau et le graphique suivants : Tableau N°23: Les plus gros contrats des droits télévisés en Europe (en M $)
Angleterre - Premier league (saisons 2001-2004)
707,36
Italie - Série A (saisons 1999-2005)
466,49
UEFA - Champions league (saisons 1999-2003)
428,38
Allemagne - Bundestliga 1 (saisons 2000-2004)
312,52
62
Espagne - Liga (saisons 1998-2003)
304,90
France - Première division (saisons 2001-2004)
210,38
Source: Cabinet Deloitte et Touche Sport 2001, cité in Sport de haut niveau et argent, op. cité. p.50 Graphique N°11 : Les droits télévisés du foot dans 5 grands championnats d’Europe en 2014
En France, trois éléments vont concourir au bouleversement audiovisuel et à façonner les relations entre le sport et la télévision: La fin du monopole (1974), le déplafonnement des ressources publicitaires (1982) et la montée de la concurrence entre les chaînes. Ces différents facteurs vont contribuer à augmenter considérablement la montée des droits de football. La première vague des hausses, interviendra avec la création de Canal + et elle s‟est accentuée tout le long de la décennie 90 avec l‟émergence et le développement des chaînes thématiques qui vont favorisées de nouveaux modes de commercialisation. La mise aux enchères par lots, introduite par la LNF en 1999 a provoqué une augmentation spectaculaire des droits. Les sommes versées par les diffuseurs sont passées de 122 M euros pour la saison 1998-99 à 351 M en 2001-02, pour atteindre 748,5 M euros pour l‟offre concernant la période 2016-20 comme le montre le tableau suivant : Tableau N°24 : Evolution droits télévisés de la ligue 1et 2 (non inclus les droits vendus à l'étranger) Période
Taux de Bénéficiaires croissance + 15,09 Canal+
Période
1998-99
Montant annuels 122
Montant annuels 391
Taux de Bénéficiaires croissance Canal+
1999-00 2000-01
243 275
+ 95,08
Canal+ Canal+
653 668
+2,30 -8,9
Canal+ TPS Canal+ Orange
Canal+
2005-08 2008-12 12 2012-16
2001-02
351
+12,18
607
+ 23,03
+ 40,45
Canal+
2016-20
748,5
Canal+, BeIN Sport Canal+, BeIN
2002-03
362
2003-04
380
+ 74,13
Canal+
2004-05
Sport
Les droits de la période 2008-2012 ont été commercialisés par la LFP sous la forme de 12 lots afin de répondre aux besoins de nouveaux acteurs dans la filière et ont été cédés le 30 janvier 2008 pour un montant de 668 M € conjointement à Canal+ (465M €) et Orange63
France télécom (203M€)152.Canal+ a conservé de la sorte sa main mise sur les principales compétitions de la ligue 1, alors qu‟Orange s‟est octroyé la diffusion en exclusivité de la rencontre de Ligue 1 décalée au samedi soir. Main en juin 2011, un nouveau concurrent doté de solides ressources, la chaîne sportive Al-Jazzera, qui pour assurer des programmes à ses nouvelles chaines destinées à l‟Europe« BeIn Sport 1et 2 », a acquis sur la période 2012-2016, les droits de deux rencontres décalées de Ligue 1 par journée, pour un montant de 90 millions d'euros ainsi que le lot concernant les six matches de Ligue 1 proposés en paiement à la séance (pay-per-view), pour une somme qui n'a pas été officialisée. Canal + conserve toutefois les deux meilleures affiches du dimanche soir et du samedi à 17 heures, qu'elle a obtenues au printemps dernier pour un montant de 420 millions d'euro153. De même BeIn Sport a racheté en mars 2014 de la part du Groupe TF1, détenteur exclusif des droits de la Coupe du Monde FIFA 2014, le droit de diffuser l'intégralité des 64 matches de la compétition, dont 36 en exclusivité. TF1 a conservé l‟exclusivité de la diffusion en clair des 28 matchs dont ceux de l'Equipe de France, des huitièmes de finales, des quarts de finale, les deux demi-finales et la finale154. Ainsi, si au début des années 70, la TV française ne participait que marginalement au financement du football (environ 1 %), elle contribue aujourd‟hui largement dans ce financement avec en moyenne plus de 60 % du budget des clubs D1 et près de 50 % de celui des équipes de D2, contre 12% dans le rugby et 2% dans le handball155. Les pays en voie de développement, à leur tour, n‟ont pas échappé à la flambée des prix. La Coupe d‟Afrique des Nations (CAN) 2004, organisée à Tunis, a été l‟objet d‟une surenchère de la part de la chaîne ART détentrice des droits de commercialisation de la compétition pour le Moyen-Orient et le Maghreb. Elle a exigé, à titre d‟exemple, des deux chaînes nationales marocaines (TVM et 2M) le déboursement de la somme de 500.000 dollars (5 millions de DH) pour la retransmission en différé des 32 rencontres. Les deux chaînes ont estimé exagérer un tel montant et ont demandé l‟intervention des pouvoirs publics, qui ont à leur tour saisi la société source «Sportfive», du Français Jean-Claude Darmon, détentrice à l‟origine des droits. Finalement, un accord a été trouvé, qui a réduit le montant définitif à près de 350.000 euros (près de 3,9 millions de DH) en contre partie de la transmission par les deux chaînes nationales, des matchs nationaux seulement et à avec un commentaire en langue française uniquement156. Les termes de cet accord visent à sauvegarder l‟exclusivité de la chaîne ART sur la CAN 2004 et à ne pas contrarier sa stratégie visant par la monopolisation de droits de diffusion à augmenter le nombre d'abonnés arabes à son bouquet satellitaire. La même surenchère s‟est reproduite lors de la coupe du monde de 2006, ce qui a poussé les chaînes marocaines à se limiter uniquement à la retransmission de la demi-finale et de la finale, et lors de la CAN 2008 et 2010 et la coupe du monde 2010, le Maroc n‟a pas pu transmette ces pétitions en raison des sommes élevées exigées par les détenteurs des droits (ART et Al Jazzera).
152
Mustapha KARKI, op. cit. Maxime Goldbaum, Médias : le football gratuit, une espèce en voie de disparition, Le Monde.fr du 26.03.2012 154 Communiqué du groupe TF1 du 14 mars 2014 155 La proportion change selon la capacité des clubs à générer d'autres sources de revenus. Les « gros » réussissent dans ce domaine mieux que les petits. En 2010, un club comme Rennes se situait dans la moyenne (59%), Nice était bien au-delà et donc ultra-dépendant (66%), tandis que l'OM et le PSG affichaient une moindre dépendance (respectivement 50% et 39%). Voir le dossier sur la question in Maxifoot: http://www.maxifoot.fr/football/article-13410.htm 156 Voir à ce sujet les journaux du mois de janvier 2004, notamment, L’Economiste, N° 1690- 23 janvier 2004 153
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Il est fort probable que certains pays, comme le Maroc, auront des difficultés dans le futur proche pour transmettre les prestigieuses compétitions internationales, surtout après la mainmise de la chaîne qatarie Al-Jazira Sport( renommée depuis 2014 BeIn Sport) sur tous les produits footballistiques disponibles sur le marché : achat auprès de l‟UEFA des droits audiovisuels, tous supports confondus (terrestre, satellite, câble, internet, téléphone portable) de la région Moyen Orient- Afrique du Nord (23 pays) du championnat d‟Europe des nations ainsi que la Ligue des champions pour la France sur la période 2012-2015157, et auprès du Groupe TF1 des droits de la Coupe du Monde 2014 et de la FIFA des droits de la coupe du monde 2018(Russie) et 2022 (Qatar). Au-delà des différences dans les montants, les écarts observés entre les pays renvoient aussi à des différences dans l‟organisation des marchés nationaux et dans le rôle des différents acteurs concernés par la retransmission des championnats nationaux. Les droits sont en général partagés en parts sensiblement égales entre les chaînes en clair et les chaînes à péage, par surenchères successives, négociés directement avec les instances sportives (France) ou avec des agences chargées de les commercialiser auprès des clubs comme c‟est le cas en Allemagne. Il s‟ensuit, selon l‟étude du CSA, que : « dans un marché que les sociétés de commercialisation des droits tendent à constituer en marché européen, de telles disparités dans la nature des acteurs dominants et dans les montants financiers contribuent à entretenir les surenchères et à générer des conflits d‟intérêts. Elles rendent de plus en plus fragiles les équilibres et les régulations établies au niveau national notamment en ce qui concerne la répartition du produit des droits télévisés entre les „‟grands clubs‟‟ européens et les autres ».
2.1.3.1.5 – Le financement de la production des œuvres audiovisuelles Les coûts élevés de la production des programmes originaux incitent les diffuseurs à la mise en œuvre de plusieurs stratégies pour le financement de ces programmes notamment, la recherche du soutien public à la production à travers une adaptation des projets aux conditions d‟éligibilité du compte de soutien, et le recours à la coproduction. Celle-ci peut s‟opérer soit entre diffuseurs et producteurs nationaux, soit entre diffuseurs et producteurs internationaux. Elle a pris beaucoup d‟importance dans l‟animation où le financement repose en grande partie sur les investissements étrangers qui couvrent une part importante du coût de devis. Le tableau suivant, concernant le financement de la production audiovisuelle aidée en France en 2012 montre que la fiction demeure le genre le mieux financé par les diffuseurs (70%), suivi par le documentaire (51%) alors que la contribution étrangère est importante au niveau de l‟animation (23%). Tableau N°25: Financement de la production audiovisuelle aidée en France en 2012
Fiction En M € Apports des producteurs 59,8 Apports des diffuseurs 467,5 CNC 71,9 Apports étrangers 47,0 Autres 21,1 Total 667,4
documentaire
En % En M € 8,96 68,4 70,05 223,3 10,77 87,0 7,04 19,5 3,16 39,4 100 437,9
157
animation Spectacle vivant
En % En M € 15,62 37,7 50,99 49,7 19,87 38,8 4,45 42,0 9,00 12,7 100 181,8
En % En M € 20,74 23,5 27,34 32,5 21,34 26,5 23,10 6,6 6,99 2,8 100 91,9
En % 25,58 35,36 28,83 7,18 3,05 100
Voir à ce sujet : Maxime GOLD BAUM, Al-Jazzera ébranle le paysage audiovisuel sportif français, in. Le Monde.fr du 09.12.2011.
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Source : CNC, la production audiovisuelle aidée en 2012,
Pour produire des programmes originaux, les diffuseurs ont tendance à commander la réalisation de ces programmes à des sociétés indépendantes, c'est-à-dire à des producteurs indépendants des chaînes de TV. Cela permet aux diffuseurs, d‟une part de bénéficier de prix compétitifs et de conditions de travail souvent plus souple qui permettent des standards de coûts moins élevés, et d‟autre part de remplir en même temps les obligations d‟investissement imposées par la DTSF (Art. 5) et les pouvoirs publics tendant à réserver une fraction majoritaire de la production de programmes à des sociétés indépendantes, à l‟instar des textes réglementaires prises aux Etats-Unis (les Fin-Syn et la PTAR) visant la promotion d‟un secteur de production extérieur aux diffuseurs. Au Maroc les cahiers des charges des deux chaînes nationales SNRT (article 15) et 2M (article 11) 158imposent aux deux chaînes de faire appel aux prestations d‟entreprises de production externes installés au Maroc et employant des compétences à majorité marocaines et de leur réserver des quotas de production calculés sur la base du temps global consacré à la production nationale. Les chaînes sont appelées à opérer un équilibre entre la production interne et externe (avec la possibilité d‟une marge d‟erreur de 10%), comme suit : -
30% réservé à la production externe prête à diffuser (PAD), 10% réservé à la coproduction entre les chaînes et les producteurs, 60% réservé à la coproduction interne
En Europe les critères d‟indépendance s‟apprécient en se basant d‟une part, sur les participations au capital: pas plus de 25% du capital de producteur détenu par un diffuseur et inversement, et d‟autre part sur l‟activité réelle du producteur: un producteur fournissant plus de 90% de sa production à un même diffuseur sur une période de trois ans est considéré comme non indépendant159. En fait, le critère d‟indépendance est apprécié différemment, ce qui fait que les rapports producteurs/diffuseurs recouvrent selon les genres des programmes, selon les pays, et selon les chaînes des réalités souvent éloignées. Il en découle différents cas de figure : producteur isolé, producteur intégré à un groupe, producteur dans l‟orbite du diffuseur.160 Ainsi, d‟après une étude de l‟Observatoire Européen de l‟Audiovisuel, le poids de la production indépendante dans la fiction est inégal dans les grands pays industrialisés. L‟Europe latine privilégie la production indépendante puisque celle-ci dispose de plus de 80% de part de marché en production de fiction, alors que les pays anglo-saxons lui accordent une place significative certes mais minoritaire161. Par ailleurs, l‟objectif culturel de diversité recherché par le renforcement des structures de production indépendante est loin d‟être atteint, dans la mesure, où la plupart des sociétés de production ne fournissent qu‟une chaîne ou qu‟un seul programme de manière épisodique. Les commandes des chaînes aux sociétés de productions indépendantes s‟opèrent à travers l‟acquisition : -
des parts antenne donnant aux diffuseurs l‟exclusivité de droit de diffusion pendant une durée et pour un nombre de fois donné.
158
Bulletin officiel, N° 6093 du 22 octobre 2012, p.5500 pour SNRT et 5539 pour Soread-2M Pierre JEZEQUEL, “ la production indépendante, une interrogation sans frontière ”, in Les Dossiers de l’audiovisuel, n° 105, sept octobre 2002 (production indépendante et création audiovisuelle), La Documentation française. 160 Voir à ce sujet, P. JEZQUEL, « La production indépendante… », op. cité. 161 OEA & INA, Economie de la fiction télévisuelle, Strasbourg, 2000 159
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-
Des parts producteurs faisant de diffuseur un coproducteur de l‟œuvre qui détient un droit à recettes proportionnel à son investissement.
Pour les œuvres audiovisuelles, cette distinction retenue effectivement dans les contrats n‟est vraiment pertinente que dans les pays pouvant donner des retours sur investissement importants, c'est-à-dire des pays disposant d‟un second marché et de performances au niveau de l‟exportation de produits audiovisuels, comme c‟est le cas aux Etats-Unis. Pour les films de cinéma, la distinction est en revanche importante dans la mesure où la plupart des films ont un cycle d‟exploitation plus long et une nette valeur commerciale en cas de réussite; ce qui donne lieu à des retours sur investissement importants aux filiales de coproduction des chaînes. La question d‟indépendance a, donc, des conséquences économiques majeures relatives au problème de partage des droits d‟exploitation, notamment les droits de distribution internationale, les droits sur un second marché intérieur (câble et satellite), et les droits de rediffusion sur l‟antenne du premier diffuseur. A l‟exception de la France, où les droits sont essentiellement détenus par les producteurs, dans les autres pays européens les droits sont surtout détenus par les diffuseurs qui supportent l‟essentiel du coût de production. Cependant, le développement des chaînes thématiques et la croissance des perspectives de ventes du secteur de la production indépendante, des revendications de partage des droits commencent à se manifester un peu partout, et des pratiques de partage au bénéfice des différents acteurs commencent à se répandre.
2.1.3.2- Les achats d’émissions L‟ampleur des coûts de création empêche de nombreux diffuseurs ayant des ressources financières limitées à produire des programmes originaux. L‟essentiel de leur programmation reposerait alors sur les programmes achetés auprès d‟autres institutions audiovisuelles. Or, acheter le droit de diffuser une émission qui a déjà été diffusée coûte infiniment moins chère que d‟en commander une nouvelle162. Par conséquent, une TV ayant de faibles moyens aura en première analyse, presque toujours intérêt à diffuser des programmes préexistants. L‟achat permet donc de réaliser des économies appréciables car l‟acheteur bénéficie d‟un prix inférieur au coût de production puisqu‟il s‟agit de produits, déjà partiellement ou entièrement amortis. En moyenne, le rapport entre création et achat étant de 1 à 10 au moins163 pour une audience au moins équivalente et souvent bien supérieure. Ainsi, en 2004, le budget de la division de production du RTM s‟estimait à près de 37 M DH dont 24 MDH destinés à la fiction (4feuilletons, 8 téléfilms et 2 sitcoms), 11 MDH pour produire des magazines et documentaires et 2 MDH consacrés aux variétés164. Pour 2M (Soread), les montants engagés dans la production et coproduction en 2007 ont atteint plus de 81MDH165. Ce sont donc des budgets très modestes par rapport aux standards internationaux. L‟approvisionnement en émissions et programmes peut se faire par différents canaux : -
Soit, par des négociations au jour le jour entre divers organismes internationaux (UER-Eurovision, ASBU, ABU, etc.) particulièrement pour les programmes d‟actualités et les informations télévisées.
162
Selon Jean-Denis BREDIN, l‟économie obtenue s‟élève parfois jusqu‟à 200 fois moins par rapport au coût de production ; in, Les nouvelles TV hertziennes, op.cit. p. 109. 163 . N. TOUSSAINT, L’économie des médias, op.cit. p. 62 164 Etude sur les Conditions de Développement du secteur audiovisuel, op. Cite 165 Rapport de la cour des comptes de 2009, p.288.
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-
Soit, par le bais d‟échange ou de ventes de programmes par le canal d‟organismes spécialisés ou lors des foires ou festivals. La circulation internationale des programmes s‟organise autour de quelques lieux d‟échange où se rencontrent distributeurs et diffuseurs. On peut citer à titre d‟exemple : 166
-
Le MIP-TV : Marché international des programmes de TV qui se tient en France en avril.
-
Le MIP COM : Marché international des programmes pour la TV, le câble, le satellite et la vidéo qui se tient en France en octobre.
-
Le MIFED, Marché international multimédia du cinéma et de la TV qui se tient en Italie (Milan) en octobre.
- AFM (Americain Film Market), foire commerciale qui se tient en janvier aux Etats Unis (Los Angeles.) - NATEPE (National Association of Television Programm Excutives) qui organise une foire commerciale en mars. -
Monté Carlo en février.
Le prix de ces programmes varie théoriquement au prorata de l‟audience potentielle ou réelle, ce qui les rend extrêmement attractifs pour les petites chaînes soucieuses de transformer leurs charges fixes en coûts variables. En fait, le prix des programmes dépend dans une large mesure du degré de concurrence entre les chaînes candidates à l‟acquisition et cherchant l‟exclusivité, ce qui déclenche parfois des surenchères et une flambée des prix. L‟exemple de la fameuse série Dallas, à l‟époque de l‟émergence des chaînes privées, a défié la chronique dans ce sens et se donne toujours comme exemple. En Grande Bretagne, à cause de la surenchère opposée par le réseau ITV pour l‟achat de cette série, elle a été commercialisée à la BBC au prix de 60.000 £ l‟épisode, alors que cette chaîne les obtenait jusqu‟alors pour la moitié de ce prix. De même, en Italie, pour obtenir “ Dallas ” et “ Dynastie ”, le groupe Fininvest “ fait monter le baromètre de 30.000 dollars en moyenne le prix de l‟épisode à 180.000 dollars. Les déterminants des prix des programmes achetés sont donc loin de se résumer à la seule taille de l‟audience potentielle ou réelle, critère pourtant avantageux pour les petites chaînes ou les chaînes thématiques, “ ils intègrent des variables exogènes telle que l‟intensité de la concurrence, difficilement maîtrisable pour une chaîne de TV ”167. Les prix de vente ne sont pas homogènes, ils dépendent de plusieurs facteurs notamment, le coût de production, le degré d‟amortissement du produit, le nombre de foyers potentiels touchés par ce programme lié au nombre de téléviseurs du pays d‟origine de la chaîne acheteuse, la durée de cession des droits, le nombre de rediffusion et enfin l‟heure prévue de sa diffusion.168 Ainsi le même programme sera commercialisé à un prix différent selon qu‟il s‟agit d‟une TV de pays riches ou pauvres, d‟une petite ou grande chaîne. Par exemple, la réalisation de chaque épisode de Dallas, coûtait la bagatelle somme de 700.000 $ dont 2500 dollars pour chaque acteur principal et entre 50.000 et 75.000 pour Larry Hagmann qui incarnait le rôle de J.R. Cette somme considérable est amortie par la seule diffusion du téléfilm aux Etats-Unis. Cela permet à World Vision entreprises, société chargée de sa distribution de facturer ce feuilleton à des prix variables qui vont pour certains pays 166
A. LANGE & Jean-Luc RENAUD, L’avenir de l’industrie audiovisuelle européenne op.cit. p. 276. N. COSTE-CERDAN, “ chaînes thématiques européennes : Airbus ou concorde ” in, Bulletin de l’IDATE. 168 N. COSTA-CERDAN, A.LE DIBERDIER, La Télévision, op.cit. p. 61. 167
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industrialisés jusqu‟à 50.000 francs suisses l‟épisode, alors que la Côte d‟Ivoire a acheté la série pour moins de 6000 Fr. suisse.169 Les différents marchés mondiaux des programmes sont dominés par la production américaine qui éclipse les autres producteurs. Les Américains ont, très tôt, perçu l‟intérêt qu‟ils pourraient tirer de la mise en concurrence des TV dans le monde et de la nécessité d‟une production industrielle, laquelle suppose production des séries, standardisation, division du travail, rationalisation des coûts, et rentabilité pour alimenter les réseaux du monde entier. Bien qu‟ayant un prix de revient moyen plus élevé que les producteurs européens, leurs programmes sont cependant cédés à des prix plusieurs fois inférieurs à des programmes équivalents pour une audience égale et souvent bien supérieure. Ceci s‟explique par la dimension de leur marché intérieur qui permet le recouvrement de l‟investissement sur leur propre territoire, permettant aux producteurs américains d‟être plus compétitifs par le prix que les films provenant d‟autres pays. La vente à l‟étranger ne constitue donc qu‟un supplément de rentabilité pour le producteur et les produits sont donc vendus à des prix “ d‟occasion ”. Par conséquent, le coût de production, ne devra pas être évalué en fonction d‟un seul marché, mais en fonction de divers marchés potentiels. Par ailleurs, pour écouler les divers programmes, les distributeurs américains ont recours à diverses pratiques de commercialisation notamment, la vente par paquet ou lot (black booking), sortes de package de programmes regroupant de nombreux programmes de bas de gamme avec un nombre réduit de produits à forte espérance d‟audience, la vente à l‟aveuglette (blind booking) où le client achète un programme sans avoir pu le visionner. Ces pratiques se sont largement généralisées et elles sont de plus en plus adoptées par les distributeurs européens pour commercialiser leurs programmes sur le marché mondial.170 La place dominante des Etats-Unis en tant que fournisseur mondial des programmes ne cesse de se consolider. Ainsi, le déséquilibre des échanges audiovisuels entre les Etats-Unis et l‟Europe continue de s‟aggraver. Le déficit européen s‟élevait en 2000 à 8,2 milliards de dollars, les recettes américaines en droits de TV ont augmenté de 15,9% la même année, bien que la diffusion de programmes américains par les chaînes de TV européennes ait diminué en volume.171 L‟utilisation des programmes américains consiste essentiellement en des programmes de fiction télévisuelle et des films de cinéma. Le volume de leur diffusion par les chaînes de TV d‟Europe occidentale en 2001 a atteint 320.239 h ce qui représente 3% d‟augmentation par rapport à 2000172. En 2010, l‟offre de la fiction sur les chaînes françaises en clair a atteint 29 979 heures (contre 34 148 h en 2008 et 32 276h en 2009) dont 46% est d‟origine américaine, 17% européenne et 35% française et 2% divers173. Il faut noter cependant, que le marché mondial des programmes tend à se diversifier, du fait de l‟émergence d‟autres régions du monde comme fournisseurs de programmes. Tel est le cas de l‟Australie dont la production de séries devient très industrielle, du Japon grand fournisseur de dessins animés et qui pratique des prix très compétitifs, du Brésil et du Mexique avec leurs télénovelas qui ont pénétré le marché européen après avoir 169
JOËLLE STOLZ, “ Les Algériens regardent Dallas ”, in Les nouvelles chaînes, PUF (Paris) et Cahiers de l‟IUED (Genève), 1983. p. 224. 170 A. LANGE et J-L. RENAUD, L’avenir de l’industrie audiovisuelle européenne, op.cit., p. 284. 171 O.E.A., communiqué de presse, Strasbourg, 3 avril 2002. 172 O.E.A., communiqué de presse, Strasbourg 28 janvier 2003. 173 CSA, La fiction sur les chaînes nationales gratuites, chiffres clés 2005-2010.
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conquis celui des pays du Tiers-monde et des pays de l‟Europe de l‟Est, de l‟Egypte, la Syrie et la Turquie grands pourvoyeurs de séries pour le monde arabe. Par contre l‟usage des programmes en provenance des pays du Tiers-monde dans les pays industrialisés est quasiment nul.174 D‟une manière générale, la possibilité d‟acquérir des programmes à des prix très bas pousse les TV à recourir de plus en plus aux achats et à l‟importation de séries américaines. Ces produits sont d‟autant plus intéressants pour les chaînes commerciales qu‟ils peuvent être obtenus sans aucun décaissement par le biais du barter qui est un système d‟échange de programmes contre l‟espace publicitaire, qui a beaucoup favorisé la diffusion des fameux “ soap operas ” produits par les lessiviers américains (voir plus loin p.137). Dans l‟achat des programmes, le film de cinéma tient une place centrale, dans la mesure où l‟achat du droit de diffusion d‟un film présente une sérieuse économie pour les finances des chaînes tout en assurant une large audience et des recettes publicitaires élevées. Pour certaines chaînes, le film représente le principal genre programmé, il est devenu le noyau central de la programmation présentant 30,4% de l‟offre de programmes sur ARTE en 2002 et 45,9% sur celui de Canal+ en 2006175 . En 2013 les chaînes nationales françaises (TF1, France 2, France 3, Canal+, France 5, M6, Arte, Direct 8/D8, W9, TMC, NT1, NRJ12, LCP Assemblée Nationale, France 4, Direct Star/D17, Gulli, HD1, 6ter, Chérie 25) ont diffusé 4893 œuvres cinématographiques. En dix ans, le nombre de diffusions de films a donc progresse de 41,1 % en raison de l‟augmentation du volume de diffusion sur les chaînes de la TNT176 . Graphique N°12 :
Diffusion des films sur les chaînes nationales françaises (%)
Le recours au film a soulevé, au départ, une vive polémique entre les producteurs du cinéma et les diffuseurs dans la mesure où les premiers s‟estiment lésés par la TV. C‟est pourquoi dans les pays européens et surtout en France, les cahiers des charges des chaînes 174
Ainsi durant les années 1996-2001, 54 films des pays du pourtour méditerranéen et membres de l‟Union européenne ont fait l‟objet d‟une redistribution commerciale dans au moins un Etat de l‟Union européenne. Ces 54 films ont réalisé 3,5 millions d‟entrées dans l‟Union, soit une part de marché de 0,084%, Les quatre principaux exportateurs sont la Turquie 59 films, l‟Egypte et Israël (8 films) et le Maroc (7 films). In, André LANGE (observation européenne de l‟audiovisuel), “ la distribution des films européens et des films des pays Tiers sur le marché de l‟Union européenne ”, rapport pour la conférence “ le secteur cinématographique et audiovisuel dans l‟Union européenne et les pays Tiers ”. Madrid 18-19 avril 2002, p. 18. 175 CSA, “ Bilan 2002 des chaînes nationales ”, in La lettre du CSA n° 165, Août-Sept. 2003. et CNC, bilan 2006 176 CNC, l’économie de la télévision (2003-2012), novembre 2013, p.30
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imposent aux diffuseurs certaines obligations : une contribution au fond de soutien du cinéma, limitation de nombre de films étrangers par rapport au total de films diffusés et de nombre de diffusion, interdiction de diffusion certains jours de la semaine, coproduction de longs métrages. 177 Au Maroc les cahiers des charges des deux chaînes nationales SNRT (article 16) et Soread-2M (article 12) imposent aux deux chaînes de participer dans la production cinématographique nationale sous forme de financement de la production ou des préachats. La SNRT doit ainsi annuellement produire ou acquérir 12 longs métrages marocains et au moins 24 courts métrages, alors que pour 2M les quotas sont successivement 10 longs métrages et 15 courts métrages178. En matière de financement, les chaînes de télévision en France apportent une part prépondérante, essentiellement sous la forme des préachats de droits de diffusion et de parts de coproduction, variant de 30 à 40 % du budget initial, alors que les producteurs financent 20 à 30 % du budget des films, les aides diverses représentent 10 à 15 % de ce budget et les apports extérieurs s‟élèvent environ à 15 %. Au total, ces sources de financement couvrent près de 90 % du budget nécessaire pour produire un film, les 10 % restants peuvent provenir d‟apports ou de mandats étrangers Tableau N°26 : Le financement de films d’initiative française (en%)
Source : CNC, la production cinématographique en 2012, les études du CNC, mars 2012, p.29
177
Il importe de rappeler que conformément à la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, les éditeurs de services, autres que les services de cinéma et les services de paiement à la séance, ne peuvent diffuser chaque année civile plus de 192 œuvres cinématographiques de longue durée. Ce chiffre ne peut excéder 144 œuvres lorsque la diffusion intervient en tout ou partie entre 20h30 et 22h20. Par ailleurs, ces services sont autorisés à diffuser 52 films recommandés Art et Essai supplémentaires (non comptabilisés s‟ils sont diffusés aux heures de grande écoute). Les chaînes de cinéma ne peuvent diffuser chaque année plus de 500 films de long métrage différents et chacun de ces films ne peut être diffusé plus de sept fois pendant une période de trois semaines consécutives. Pour plus de détail, Voir à ce sujet : FADIL Abdelmajid, Vers une nouvelle économie de la TV, thèse de doctorat d‟Etat en économie, Faculté de droit Souissi, février 2005 178
Bulletin officiel, N° 6093 du 22 octobre 2012, p.5500 pour SNRT et 5539 pour Soread-2M.
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On constate ainsi que les chaînes participent massivement au financement de cinéma. Les investissements des chaînes en clair sont constitués à hauteur de 67% de préachats de droit de diffusion et leur apport moyen par film dépasse un million d‟euros. Il faut signaler que les chaînes ne se contentent pas d‟acheter des programmes, elles importent aussi des genres, des formats et des formules dont les droits d‟utilisation sont cédés par les producteurs américains en échange de spots publicitaires. Tel est le cas depuis longtemps de certains jeux comme “ la Roue de la fortune ” propriété du fabricant de détergent anglo-hollandais UNILEVER ou encore du “ Juste prix ”. Mais depuis 2001, un nouveau format de “ télé réalité ”, mariant jeux et divertissement cumule les records d‟audience et fait partie des programmes les plus recherchés. Plusieurs pays l‟ont déjà diffusé et, partout, le scénario a été le même : le succès s‟est amplifié de semaine en semaine pour finir en apothéose : 40 millions de spectateurs sur le Fox aux Etats-Unis179. La formule est vendue par les Américains en franchise avec tous ses ingrédients, c'est-à-dire, les jeux de lumière, la posture de l‟animateur, l‟aménagement du studio, du plateau, la manière de poser les questions, la musique, la dramaturgie, etc. La plupart des règles des formats sont intangibles, et charge pour l‟acquéreur de produire l‟émission à l‟identique avec ses propres techniciens et un animateur choisi par lui. Depuis quelques années, les formats de télé réalité se multiplient et envahissent les horaires stratégiques des chaînes. Les plus célèbres en France portent le nom de Loft Story, Star Academy, Pop Star, Koh-lanta, le Maillon faible, le Fabuleux destin de, Four Facto, etc.. Pour un droit très variable, qu‟Etienne Mangeotte, vice PDG de TF1, évalue entre 15.000 et 30.000 Eu180 par diffusion au début de soirée, la chaîne réalise de forts scores d‟audience et d‟importantes recettes publicitaires, en plus d‟une partie des droits dérivés attachés au genre (communications téléphoniques, ventes de CD…) . Par ailleurs, la hausse des coûts des programmes entraîne, en plus des achats, une tendance à remplir la grille des programmes avec des productions moins coûteuses, parmi lesquelles les émissions de plateau tiennent une place de choix. Ces émissions constituent des palliatifs pour résoudre la difficulté des coûts croissants de production ou d‟achats de programmes de fiction. Mais, elles présentent en général, l‟inconvénient de n‟être pas rediffusables, ni exportables. Leur coût ne peut donc être amorti dans le long terme. Selon A. Lange et C. Renaud, “ la préférence accordée à ce type d‟émissions découlera souvent d‟une impossibilité d‟investir dans le long terme ou d‟une faible capitalisation ”181 . Toutefois, certaines émissions de plateaux peuvent avoir du succès et optimiser ainsi le ratio coûtaudience, exemple d‟Apostrophes, du Grand Echiquier, etc. Ainsi, au niveau des programmes, l‟univers télévisuel présente deux cas de figure extrêmes : - Des chaînes riches produisant beaucoup de programmes originaux parmi lesquels figureraient de nombreuses émissions de stocks. C‟est le cas notamment des TV des grands pays industriels (BBC, ARD-ZDF, France télévision, TF1..) où la création représente une part importante du budget des chaînes. - Des chaînes pauvres, alimentées essentiellement de programmes bradés, achetés, à faible durée de vie ou obtenus gratuitement dans le cadre des programmes d‟aide et de coopération (les programmes allemands de Transtel, du Canal France International, de la TV canadienne…) ou fournies par des organisations internationales pour commémorer certaines 179
Revue Challenges, du 3/4/2003, p. 7. Ibid. 181 A. LANGE et L. RENAUD, L’avenir de l’industrie audiovisuelle européenne, op.cit. p. 107. 180
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journées internationales. Ainsi, pour la chaîne marocaine 2M, la part de la production nationale représente 13% au niveau de la première diffusion et 24% globalement.182
2.2 - Les autres coûts 2.2.1-La diffusion La diffusion des programmes constitue la seconde composante importante des charges d‟une chaîne de TV. A côté de la diffusion hertzienne, l‟acheminement du signal au téléspectateur peut se faire aussi par le biais du câble et du satellite. La diffusion hertzienne183 qui constitue la méthode la plus classique de distribution conserve toujours une part essentielle de la réception de la TV dans la plupart des pays, même si le réseau hertzien terrestre est peu susceptible d‟extension, en raison du niveau des investissements élevés qu‟il exige et de la rareté des fréquences184. C‟est un choix technique et économique pertinent pour couvrir les villes et les zones plus faiblement peuplées. Toutefois, elle devient onéreuse lorsque le relief d‟une zone est particulièrement accidenté car de nombreux émetteurs deviennent nécessaires. Avec le développement des techniques de compressions numérique et l‟abandon de l‟analogique par plusieurs pays on assiste à une évolution du paysage hertzien terrestre. La diffusion hertzienne numérique terrestre a fait la preuve de sa qualité et de sa pertinence. Les deux autres modes de diffusion prennent de plus en plus d‟importance ces dernières années, et réalisent un fort taux de croissance en raison de leurs atouts en matière de l‟offre multi-chaînes. Elles disposent de différents avantages qui permettent de considérer qu‟à terme, leurs offres seront plus complémentaires que concurrentielles, même si leur rivalité est bien réelle aujourd‟hui. Le satellite n‟a pas de limites géographiques, permet la couverture intégrale du territoire, surtout les zones d‟ombres, notamment en montagne où le relief gène la réception hertzienne, et offre une plus grande variété de programmes. Il est extrêmement avantageux pour les diffuseurs en matière de coût et il constitue pour les pays disposant de vastes étendues et qui n‟ont pas suffisamment d‟infrastructure au sol, une solution économique pour la couverture de leur territoire. Mais son accès est relativement coûteux pour le téléspectateur qui doit s‟équiper en matériel de réception. La télévision par satellite utilise des satellites spécifiques placés en orbite dite « géostationnaire » (c'est-à-dire une orbite située à 35 786 km d'altitude au-dessus de l'équateur)185. Chaque satellite de télévision présente des caractéristiques très différentes, 182
Ministère de la Communication, op.cit. Dans ce système des émetteurs locaux reçoivent les programmes de télévision (par divers moyens de télécommunication tels que le satellite, la fibre optique, les faisceaux hertziens ou simplement en recevant le signal d‟un autre émetteur TNT) et les réémettent. 183
184
Le nombre de chaînes de télévision qui peuvent être diffusées par la voie hertzienne terrestre est limité d‟une part par le nombre de canaux et d‟autre part par le brouillage d‟un canal par un autre. 185
Il importe de souligner que la rareté des ressources en positions orbitales et en fréquences est à la fois d'origine physique et réglementaire : -
Les positions disponibles sont en effet limitées à un nombre compris entre 120 et 180 : la nature géostationnaire des satellites leur impose d'être alignés au-dessus de l'Equateur, et il est nécessaire de respecter un écart de 2° à 3° entre des satellites émettant aux mêmes fréquences pour éviter les interférences. Or plus la distance entre l'émetteur (le satellite) et le récepteur (la parabole) est courte, meilleure est la qualité de la transmission, paramètre déterminant pour l'utilisation qui peut en être faite
73
notamment en termes de capacités (c'est-à dire de ressource disponible pour diffuser des chaînes de télévision). Les capacités de communication d‟un satellite sont fixées par le nombre de transpondeurs et leur largeur de bande, c‟est-à-dire la gamme de fréquence qu‟ils peuvent traiter. Techniquement, certains peuvent offrir jusqu‟à une cinquantaine de transpondeurs de 36MHz et présentant chacun une capacité de 38 à 50 Mbps186 selon les technologies de compression et de diffusion (soit l'équivalent d'environ 10 à 20 chaînes en qualité standard par transpondeur). Le câble ne couvre qu‟une partie de territoire d‟un pays. Il vise, en général, un public urbain, dans des zones où la densité du peuplement justifie économiquement la création d‟un réseau. Il permet une interactivité de haut niveau, au contraire de la réception directe, grâce à la voie de retour, et il présente également l‟avantage d‟offrir une plus grande souplesse à l‟opérateur qui veut contrôler “le robinet” des programmes. Mais son installation nécessite de lourds investissements qui sont à l‟origine de sa non généralisation à tous les pays et qui explique en partie l‟échec de plan câble dans certains pays. Il faut enfin signaler l‟existence d‟autres modes de distribution permettant d‟accéder aux programmes de la TV comme: - la TV par ADSL (Asymmetric Digital Subscriber Line)187 qui offre la possibilité de recevoir une offre de TV via un opérateur Internet, mais dont les contraintes spécifiques de ce réseau limitent actuellement la disponibilité de ce type d'offre aux zones essentiellement urbaines puisque l'abonné doit être suffisamment proche du central téléphonique dont il dépend pour pouvoir bénéficier de la réception du flux TV (il faut être à moins de 2,5km du central pour accéder à la TV sur ADSL)188. Mais : la position la plus attrayante pour desservir un territoire donné est donc sur la longitude de ce point. C'est pourquoi certains opérateurs font coexister plusieurs satellites sur une position. - L'attribution et la coordination des positions orbitales géostationnaires et des fréquences se font dans le cadre d'une réglementation édictée par l'Union Internationale des Télécommunications (UIT). Or jusqu'à peu, la règle d'attribution était celle du « premier arrivé, premier servi », l'UIT enregistrant simplement les demandes. Ceci a provoqué une pénurie en fréquences, car certains États ont développé des pratiques de stockage. En conséquence, une réforme de la réglementation a eu lieu en novembre 1997 : désormais, l'UIT vérifie la capacité du projet à aboutir et ne réserve la place allouée que pour sept ans, aux termes desquels elle est libérée si le projet n'est pas concrétisé. Les autorisations sont données pour une durée de 15 ans et sont généralement renouvelées de façon standard. Il est à noter qu'une dose de planification a été introduite dans ce système d'attribution : chaque État membre se voit réserver une position orbitale et cinq canaux de fréquences pour les services de radiodiffusion et les services de télévision directe, qu'il peut attribuer à sa guise. Les dispositions visant à lutter contre la pénurie de fréquences restent cependant modérées : certains préconisent l'adoption d'une caution financière garantissant la réalisation du projet 186 Megabits par seconde = Taux de transfert des données qui atteint un million de bits par seconde 187 L‟ADSL est une technique de communication qui permet d'utiliser une ligne téléphonique d'abonné pour transmettre et recevoir des signaux numériques à des débits élevés, de manière indépendante du service téléphonique proprement dit. Les services de télévision distribués utilisent la technologie dite « d‟encapsulation IP », technologie répandue sur Internet sous le nom « IPTV ». La distribution de l‟IPTV s‟appuie sur une architecture multicast (distribution point-multipoint) et non broadcast (caractéristique des réseaux hertziens terrestre et satellite). 188 Les services de télévision distribués par ADSL requièrent un certain débit descendant, c‟est-à-dire du réseau vers l‟abonné, d‟environ 1,5 à 5 Mbps selon les choix du fournisseur d‟accès à internet, afin de garantir la qualité de l‟image reçue par l‟abonné. Or le débit descendant, dont l‟abonné dispose, décroît rapidement lorsque la distance de l‟habitat de l‟abonné à son nœud de raccordement augmente. Cf. à ce sujet : IDATE, Les modalités de réception de la TV numérique dans les zones qui pourraient ne pas être couvertes pat la TNT, décembre 2009, p.24
74
-
pour remédier à ce problème (demandes de débits toujours plus élevés), plusieurs dérivés de l‟ADSL ont été développés permettant un accès étendu à des débits supérieurs à 4 Mbps et favorisant ainsi le développement des offres d'accès à l‟IPTV (ADSL, ADSL2+, VDSL, VDSL2) les techniques de diffusion micro-ondes dites MMDS (Multichanal, Multipoint, distribution System) qui sont parfois présentées comme une solution de complémentarité (ou de concurrence) par rapport aux trois autres supports.
Les différents systèmes de diffusion signalés ne s‟excluent pas entre eux, ils peuvent être combinés en vue d‟acheminer les programmes aux téléspectateurs. Ainsi, un signal émis par satellite peut être basculé sur câble ou ondes hertziennes et inversement. Il est à rappeler qu‟en Europe, le satellite et le câble bénéficient de pénétration très contrastée. D‟une manière générale, ces deux supports se sont développés depuis de nombreuses années dans les pays du Nord de l‟Europe (Benelux essentiellement) alors que ceux du Sud ont privilégié la diffusion hertzienne. La situation de mode de réception de la TV diffère donc d‟une région à l‟autre et d‟un pays à l‟autre. En Europe, la voie hertzienne reste le principal mode de réception de la TV (51%), alors qu‟aux Etats-Unis, 68% des foyers TV ont la télévision par câble. Mais au sein de l‟Europe, on trouve de grandes disparités entre les pays. Aux Pays-Bas et en Belgique, plus de 90% de foyers TV étaient raccordés à des réseaux câblés en 2001, en Suisse et Luxembourg, le taux dépasse 70%, par contre, en Grèce, Italie, Islande, Espagne, la plupart des foyers TV (entre 79 et 97%) doivent s‟en remettre principalement à la TV terrestre. L‟Autriche et l‟Allemagne sont les Etats dans lesquels la proportion de foyers TV équipés pour la réception satellite est la plus importante (45% et 38% respectivement)189. En France, à la fin du premier semestre 2011, 16,3 millions de foyers (sur les 26,8 millions de foyers équipés de téléviseurs) recevaient la télévision numérique par voie terrestre soit une part (60,8%) supérieure aux autres modes de réception numériques réunis, comme cela apparait dans le graphique suivant : Graphique N°13 : Mode de réception de la TV en France (en%)
Source : A.C.C.e.S, CNC, CSA, DGMIC, SNPVT, « guide des chaînes numériques », mars 2013, p.17
189
Eurostat, « statistiques en bref », op.cit.
75
Les facteurs qui président au choix des supports de diffusion sont multiples, au premier rang desquels on peut citer les objectifs attendus en matière d‟audience (locale, nationale, internationale), les critères géographiques et démographiques (étendue du territoire à couvrir, la nature du site géographique, la densité de la population, type d‟habitat, etc.), le nombre de chaînes à diffuser, etc. Les coûts de diffusion vont donc dépendre de ces différents paramètres ainsi que du support de diffusion choisi, comme cela apparaît à partir du tableau suivant qui nous donne une analyse comparée des systèmes de diffusion classiques : Tableau N°27 : Analyse comparée des divers systèmes de diffusion SYSTEME
ELEMENTS DE COUTS
FACTEURS DE VARIATION
Système hertzien
Emetteurs Réémetteurs Antenne Pylône Dépense de génie civile
Puissance Nombre de chaînes Distance Géographie (montagne) Urbanisme (immeuble élevé)
Système satellite
Conception du satellite Création Lancement Station en sol (émissions/ réception)
Puissance Nombre de canaux Choix du système satellite (télécommunication ou diffusion directe)
Système Câble
Centre d‟exploitation (tête de réseau) Cerciage et raccordement (réseau de transport et de distribution) Génie civil Maintenance
Nombre de canaux Type de câble (coaxial, optique) Circonférence et taille de la zone Nombre de foyers Densité et type d‟habitat (collectif ou individuel, ville nouvelle ou ancienne) Disponibilité infrastructure
VARIATION DES COUTS EN CAS DE : A) EXTENSION DE L‟AUDIENCE SUR UNE ZONE DONNEE B) EXTENSION DE ZONE a) Coût total fixe Coût marginal nul b) Coût croissant Coût marginal très élevé
a) Coût total fixe Coût marginal nul b) Sans signification
a)
Coût total croissant Coût marginal constant (coût de raccordement) b) Coût total croissant c) Coût marginal très élevé
DOMAINES A APPLICATIO N MAXIMALE
RYTHME DE MONTEE DE CHARGE, % DE POPULATION COUVERTE
services régionaux dans les zones à habitat dense et moyennement dense et zone de plaines Services nationaux et internationaux dans toutes zones notamment zone à habitat dense et zone montagneuse Nombreux services locaux dans une zone urbaine à habitat dense
2 ans pour 90 % 4 à 5 ans pour 98 %
100 % de couverture après lancement sur une zone définie (règlements internationaux)
40à 50 % en 10 ans 80 % en 20 ans
Source : TDF et divers, in : Nadine TOUSSAINT, L’économie des médias, op.cit., p.72
Ainsi pour la diffusion hertzienne, ce sont les caractéristiques propres au site (hauteur du pylône notamment), la provenance du signal qui sera diffusé par l‟émetteur (satellite ou autre émetteur terrestre), ou encore la puissance d'émission, qui vont déterminés les coûts qui peuvent aller du simple au double selon les caractéristiques de l'installation et selon les 76
sociétés, comme le montre le tableau suivant concernant les coûts de l‟infrastructure d‟un site TNT : Tableau N°28 : les coûts de l’infrastructure d’un site TNT
Il importe donc, de distinguer dans les coûts de diffusion entre les investissements et les coûts proprement dits de diffusion. Les premiers présentent un poids lourd en période de démarrage, alors que les seconds qui concernent les charges d‟entretien, de location et d‟amortissement ne représentent qu‟une part modeste du budget d‟une chaîne. Aussi, ce qui coûte cher dans la diffusion, ce n‟est pas la transmission mais la distribution finale auprès des téléspectateurs qui suppose un important équipement en émetteurs et réémetteurs190 On relèvera ici, que beaucoup de radiodiffuseurs ne sont pas eux-mêmes exploitants de réseaux de distribution, ni prestataires de services de transmission. Ainsi, selon une enquête du service de l‟information stratégique de l‟UER, la liste des pays qui sont propriétaires et exploitants d‟un réseau terrestre pour la transmission de leurs services de TV s‟établit comme suit : ORF (Autriche), RTBF (Belgique), YLE (Finlande), ARD (Allemagne), ERT (Grèce), RAI (Italie), RTE (Irlande), et VRT191. En France, malgré la libération du secteur de l a diffusion, TDF reste le principal opérateur national de diffusion du signal de télévision, qui assume pour plusieurs chaînes à la fois le transport (alimentation des sites de diffusion avec le signal des chaînes) et la diffusion des programmes des chaînes nationales de manière conjointe via son réseau hertzien terrestre et satellitaire. Les tarifs de service de télédiffusion sont fixés selon des modalités qui prennent en considération le nombre et la puissance des réémetteurs, l‟étendue du territoire, le volume de diffusion… Ainsi en 2002, la tarification du service de télédiffusion par TDF coûtait au groupe France Télévision 162 M € par an, soit 7,4% des charges d‟exploitation du groupe (dont 87% de coûts pour le service de diffusion et 13% pour le service de transport)192. De tels montants ne sont atteints qu‟en raison de la règle propre au service public, d‟une desserte aussi complète que possible du territoire, règle qui ne peut se concrétiser que grâce à la mise en place d‟un réseau dense d‟émetteurs et de réémetteurs. Ce qui conduit à une très forte concentration des coûts pour la couverture des zones reculées et à relief accidenté
190
On peut imaginer l‟ampleur des investissements d‟une chaîne nationale lorsqu‟on sait que pour couvrir 88% de la population marocaine, le réseau de diffusion de la RTM est constitué de 46 émetteurs de grande puissance, de 99 centres de réémetteurs de faible puissance, de 45 relais de transmission et de 45 stations de télécommunication par satellite. In Ministère de la communication, “ quelques données et chiffres ”, op.cit. 191 UER, “ Financement de la radiodiffusion de service public ” département juridique, document DAJ/Mwsl, 9/M/2000 p. 9 192 Patrice LANDES, Loi de Finances 2004, Assemblée nationale, rapport n° 1110 de la commission de Finances de l‟économie générale et du plan.
77
(zones d‟ombre), qui n‟abritent que quelques habitants193. Or, en matière de diffusion, la théorie des rendements décroissants se vérifie, car on constate que les coûts de diffusion croissent plus vite que la population touchée à mesure qu‟on cherche à couvrir l‟intégralité de la population d‟un pays. Il se pose alors la question de savoir s‟il est “utile de couvrir une vaste zone et si le public touché permet d‟équilibrer les dépenses engagées pour l‟atteindre”194. C‟est pourquoi au niveau des TV privées qui raisonnent en termes de rendement, la diffusion privilégie les grandes agglomérations urbaines et les localités à forte densité de peuplement, et on ne cherche pas à couvrir les zones d‟ombre. Par conséquent, les droits relatifs à la diffusion ne sont pas de la même proportion que pour une chaîne publique, astreinte par son cahier de charges à desservir l‟ensemble du territoire, en corrélation avec le principe de l‟égalité d‟accès au service public. Aussi la part relative de la diffusion est plus élevée pour les chaînes publiques que pour les chaînes privées comme cela ressort du tableau suivant : Tableau N° 29 : Evolution du coût de diffusion des chaînes françaises en clair (en M €) Les années 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
Chaînes publiques France 2 France 3 77,19 76,36 72,03 73,57 68,28 74,77 70,23
74,34
Chaînes privées TF 1 M6 58,7 34,9 58,9 32,9 58 34,7 54,5 34 56,3 34,2 54,5 34 56,0 34,1 57,2 56,5 34,6 54,9 37,1 53,6 54,2 54,0 51,5 44,9 25,7 17,8
Source : rapports financiers des chaînes
Les territoires de vaste ampleur posent donc des problèmes spécifiques qui, élèvent le coût du réseau terrestre (hertzien ou câble), du fait que le coût marginal d‟un téléspectateur supplémentaire, hors de la zone de diffusion, est très élevé. Ici on trouve une situation économique comparable à celle de la presse. En définitive, les coûts de diffusion occupent dans le budget d‟une chaîne de TV une proportion qui varie entre 5 et 8% 195pour une chaîne nationale et plus de 10% pour une TV locale.196 193 194
N. TOUSSAINT, op.cit. p. 59. 7,8% pour M6 et 4,6% pour TF1 en 2001, 7,6% pour France TV en 2002. 196 MM. Michel FRANCAIX- Jacques VISTEL, Les télévisions locales, rapport remis au Ministre de la culture et de la communication le 10 novembre 1998, la documentation française, 165 pages 195
78
Cependant, la dérégulation qui affecte l‟économie mondiale de la communication et la mise en concurrence de différents prestataires de services de diffusion jouent en faveur de la baisse de tarifs de diffusion. Ainsi, lors de la négociation de son contrat avec TDF, le groupe France télévision a obtenu une réduction significative des frais de diffusion : avec une hypothèse de glissement annuel des prix de 1,5%, le contrat devrait dégager sur la période 2002 -2005 un montant cumulé d‟économie d‟environ 47,4 M € , soit 8,3% du montant total du contrat durant cette période, par rapport à ce qu‟aurait coûté la prestation dans les conditions non renégociées du contrat antérieur.197 En outre, avec le développement des techniques de compression numérique et de la TV numérique de terre, le coût de diffusion devrait se trouver fortement allégé et on estime qu‟il pourrait être divisé par quatre. 2.2.2- Le personnel Les coûts du personnel varient en fonction de degré d‟intégration de la chaîne. Les petites stations qui se limitent à la fonction de programmation comme, c‟est le cas de la plupart des chaînes thématiques ou locales, fonctionnent en général avec moins de 20 personnes, alors que la majorité des grandes chaînes emploient un personnel nombreux et en général les chaînes publiques emploient plus de personnel que les chaînes privées. Au 31/12/2012, l‟effectif « équivalent temps plein » du groupe France TV s‟établit à 10 500198 alors que pour le groupe TF1 il s‟élève à 3990 et pour le groupe M6 il représente 2 197 (dont 716 pour Métropole TV). Dans ces effectifs, la part prépondérante revient aux techniciens et cadres administratifs, alors que les journalistes sont relativement peu nombreux: (28,7% pour France TV, 15,7% pour le groupe TF1 et 116,4% pour M6). Tableau N°30 : Répartition du personnel permanent du groupe France TV par catégorie professionnelle
30/6/2011
Employés
Maîtrise
Cadres
Journalistes
Total permanent
Total *intermittent
222
1699
4279
2532
8732
2073
Total 10805
30/6/2012 117 1673 4625 2587 2165 9002 11167 Source : Martine MARTINEL, rapport d’information n° 1393 sur le projet d’avenant au contrat d’objectif et de moyens de France Télévision, Assemblée Nationale, 25 sept.2013, p.15 Tableau N°31 : Répartition du personnel permanent du groupe TF1 par catégorie professionnelle
2010
2011
2012
ETAM – Employés, Techniciens et Agents de Maîtrise
1033
987
986
Cadres
2431
2457
2377
618
678
627
4082
4122
3990
Journalistes TOTAL 197
Patrice LANDE, rapport n° 1110, op.cit. Il faut signaler que le COM (contrat d‟objectif et de moyens) prévoyait une stabilité des effectifs en 2011 et 2012, suivie d‟une « inflexion du volume global de l‟emploi sur la période 2013-2015 ». Or les effectifs ont augmenté de 1,8% en 2012 en raison d‟un recours accru aux non permanents. Cf. Martine MARTINEL, AVIS n°252 présenté au nom de la commission des affaires culturelles et de l‟éducation sur le projet de loi de finances pour 2013, assemblée nationale, 10 octobre 2012.. 198
79
Source : TF 1, document de référence 2010(p.24), 2012 (p.251)
Tableau N°32 : Répartition du personnel permanent de Métropole TV par catégorie professionnelle
Employés Maîtrise Cadres
Journalistes Total Total Total permanent *intermittent
2009
58
120
278
56
542
150
692
2010
57
124
284
91
556
142
998
2011
50
133
297
95
575
125
700
2012
58
136
312
99
605
111
716
*
équivalent temps plein
Source : M6, document de référence (2010, p.241 2012, p.230)
En outre, les chaînes font appel toujours à de nombreux collaborateurs engagés au cachet pour une ou plusieurs missions qui concernent des activités variées répondant à un besoin spécifique dans le domaine artistique, technique ou d‟information. Selon une étude en la matière concernant le secteur public de l‟audiovisuel199, il ressort que le recours à l‟intermittence sous la forme du contrat d‟usage est très fréquent dans le secteur public. Il représentait en 2002 pour les neuf sociétés de l‟audiovisuel public, en moyenne près de 21% du total de l‟offre de travail soit l‟équivalent de 534.381 jours de travail par an. Son poids et sa proportion par rapport au travail des permanents est considérable dans les sociétés dont l‟effectif permanent dépassait le millier200.Le ratio entre les effectifs ETP moyens non permanents et les effectifs totaux a atteint 18,2% en 2012 contre 19,1% en 2011, 17,7% en 2010 et 16% en 2009201.Quant à Tf1, il dispose d‟un taux plus faible soit 8,4% pour le groupe et moins de 3% pour la chaine en 2012. L‟intermittence concerne dans ce dernier cas plus particulièrement Tf1 Production et Eurosport202 La part des dépenses occasionnées par le personnel est délicate à évaluer, du fait qu‟il existe dans beaucoup de chaînes des personnes payées au cachet et dont la rémunération, en raison de leur compétence ou notoriété, n‟obéit pas aux barèmes de salaire de l‟entreprise203. En 2012, les charges du personnel de France TV s‟élevaient à 895,8 M€, ce qui représente 34,7% des charges opérationnelles du diffuseur et 30,89% du chiffre d‟affaires du groupe204. Pour la chaîne TF1, les charges du personnel représentaient 214,8 M€ (dont 147,1 M€ pour 199
Bernard GOURINCHAS, Le recours à l’intermittence dans l’audiovisuel public, rapport au ministre de la culture et de la communication, janvier 2004. 200
Selon cette étude, France 2 recourt à l‟intermittence d‟abord pour ses productions internes y compris Stade 2 (56,5%), ensuite pour l‟information, y compris l‟actualité sportive des journaux télévisés (37,2%). France 3 fait appel à l‟intermittence en premier lieu pour ses activités régionales d‟information et de production interne à hauteur de 58,2% du recours total de la chaîne, vient ensuite la filière production (2,8%), l‟antenne nationale (16,2%) et la rédaction nationale (5%). Quant à France 5, qui n‟édite aucun journal télévisé, ni ne dispose de la faculté, au terme de son cahier de charges, de produire les programmes qu‟elle met à l‟antenne, ses recours à l‟intermittence sont limités, et concernent pour l‟essentiel l‟habillage de l‟antenne et son animation, ou les opérations de vérification en amont de la diffusion. 201
Il est paradoxal de constater une augmentation des effectifs alors que les deux dispositifs de départs volontaires à la retraite mis en place par France TV en 2007 puis en 2009-12 auraient dû conduire à une baisse. 202 TF1, document de référence, p.252 203 Le débat soulevé par les cachets faramineux accordés par les chaînes françaises à certains animateurs producteurs dans le but d‟augmenter l‟audience est toujours d‟actualité. 204 France télévisions, Rapport annuel 2012
80
traitements et salaires), soit 14,81% des charges d‟exploitation et 14,08% du chiffre d‟affaire de la chaîne, alors que pour l‟ensemble du groupe les charges du personnel représentent 423,9 M €205. Tableau N°33 : les charges du personnel des groupes TF1 et M6(en M€) M6 2011 Salaires et traitements Charges sociales Participation et intéressement Autres charges de personnel Rémunération dont le paiement est fondée sur des actions Total
TF 1
-
-
2011 296,6 104,4 11,9 3,7 1,0
249,4
252,9
432,8
153,4 64,9 11,9 19,1
2012 157,8 65,9 8,3 20,9
2012 292,3 120,1 9,0 1,8 0,7 423,9
Source : document de référence 2012 de TF 1(p.138) et de groupe M6 (p.179)
Tableau N°34 : Evolution des charges du personnel de France télévisions(en M€)
Charges de personnel (a) Chiffre d’affaires(b) (a)/(b)
2004 717 2742,9 28,1 %
2005 792,3 2711,0 29, 2%
2006 815,3 2856,5 28, 5%
2007 857,2 2927,7 29,3 %
2008 840,8 2750,3 30,6 %
2009 864 3016,1 28,6 %
2010 883,8 3140,0 28,1 %
2010/2004 + 23,26 + 14,47
Source : comptes financier
Tableau N°35: Evolution des dépenses du personnel de France télévisions
Source : Cour des comptes, op.cit.
D‟une manière générale, le personnel de la TV en Europe bénéficie de statut avantageux et de salaires moyens largement supérieurs à ceux des autres activités économiques. Ainsi pour le groupe TF1, la rémunération brute moyenne annuelle a évolué comme suit : Tableau n°36: Salaire brut annuel moyen par catégorie professionnelleCDI de TF1 en € 2010 2011 2012 ETAM 35 203 36 577 37 102 Cadres 63 875 64 349 65 737 Journalistes 71 120 70 658 70 803 Toutes catégories 58 712 60 026 61 302 Source: TF1, document de référence 2012, p.256. 205
Tf 1, document de référence 2012.
81
Pour les chaînes publiques, seule ARTE et France 5, qui ne sont pas couvertes par les conventions collectives applicables à l‟audiovisuel, octroient des rémunérations globalement plus faibles, mais qui demeurent très convenables comparativement aux autres secteurs économiques. Dans le cas du Maroc et en ce qui concerne SOREAD 2M, il ressort du rapport annuel de la cour des comptes de 2009 que : La chaîne a opté, pendant plusieurs années, pour le recours à des free lances (journalistes, correspondants, techniciens,…), au lieu des permanents, vu la nature des tâches exécutées, qui ne nécessitent pas une présence à temps plein dans la société. La fixation des salaires du personnel se fait en l‟absence d‟une grille dûment validée par le Conseil d‟Administration. L‟analyse de la grille des salaires appliquée au 31 décembre 2007, fait ressortir, pour la même fonction, des différences entre les salaires minima et les maxima qui peuvent dépasser le triple, comme le montre le tableau suivant : Tableau N°37: Disparités salariales dans 2M en DH
Source : Rapport annuel de la cour des comptes 2009, p.29
2.3 –Le coût de la grille 2.3.1-Définition et intérêt de la notion : La mesure des charges d‟une chaîne de TV peut être appréhendée en observant l‟évolution du coût de la grille des programmes. Cet agrégat qu‟on trouve dans les informations financières normalement communiquées par une chaîne de TV, n‟est pas défini sur un plan comptable, car c‟est un indicateur de comptabilité analytique spécifique à un secteur d‟activité. Il englobe toutes les dépenses liées directement aux programmes diffusés, autrement dit l‟ensemble des coûts d‟acquisition des programmes diffusés, quelle que soit leur nature. Il permet de visualiser et de mesurer le coût de l‟offre quotidienne, hebdomadaire et annuelle des programmes. Il constitue avec l‟audience, l‟un des paramètres économiques le plus observé pour évaluer la situation d‟une chaîne. Il permet de suivre l‟évolution du coût de la grille et le poids de chaque genre de programme. Par conséquent, “ la structure du coût de
82
la grille reflète la stratégie de programmation ”206 d‟une chaîne et montre l‟effort financier du diffuseur en matière de programmes. Cependant, le coût de la grille ne doit pas être confondu avec celui des investissements réalisés dans l‟année pour l‟acquisition ou la production de programmes ; ces derniers ne faisant évidemment pas nécessairement l‟objet d‟une diffusion au cours du même exercice, et certains ne sont même jamais diffusés. En plus, qu‟elle que soit la chaîne étudiée, il ne tient pas compte de frais engendrés par la diffusion des programmes tels que, par exemple, les versements des sommes dues aux ayants droits au titre des droits voisins207. Par ailleurs, il faut souligner que les chaînes ne disposant pas toujours d‟une complète liberté de dépenses. Elles sont soumises aux termes de la réglementation et de leur convention avec les autorités de régulation à des obligations de production et de diffusions qui pèsent parfois sur leurs choix en matière de programme, mais elles gardent, en général, suffisamment d‟autonomie pour orienter leurs dépenses dans le sens voulu. En France, cette notion, a pris de l‟intérêt avec l‟émergence de chaînes privées pour qui la nécessite d‟équilibrer, au moins dans le principe, coût des programmes et recettes publicitaires leur a imposé, dès leur création, de définir précisément le coût de la grille. Pour parvenir, elles ont opté pour ce même outil : le coût des programmes diffusés à leur valeur d‟amortissement comptable, calculé sur la base de leurs coûts directs de production ou d‟achat, et augmenté de frais de structure qui leur sont liés 208. Ce coût, donné par la comptabilité analytique des chaînes, connaît cependant quelques différences de méthodes dues au fait que tous les diffuseurs ne retiennent pas dans les mêmes proportions les frais de structure. Il semble, selon la CSA, que c‟est TF1 qui soit la chaîne qui affecte le plus systématiquement les frais généraux au coût de la grille. Pour les chaînes publiques, la notion est apparue tardivement ; elles ont longtemps raisonné en termes d‟enveloppe budgétaire (c'est-à-dire en termes de dépenses de programmes), sans possibilité de cerner minutieusement le coût des programmes diffusés. Cependant, elles disposaient d‟un tableau de bord précisant le coût global annuel des programmes diffusés. Annexé aux bilans et comptes de résultat, il englobait le coût de tous les programmes diffusés à l‟antenne à leur valeur d‟amortissement comptable, quelle que soit leur origine de production. Mais à la différence de la notion de coût de la grille, son calcul ne retient pas systématiquement les frais de structure qui leur sont liés. Ce n‟est qu‟avec la modernisation de leur outil de gestion au début des années 90, que les chaînes publiques ont été en mesure de définir le coût de leur grille à l‟identique des chaînes privées en incluant outre les dépenses affectées aux programmes, une partie des frais de structure de la chaîne. Ces différences de méthodes incitent à la prudence lors de l‟analyse et la comparaison des situations entre les chaînes, d‟autant plus qu‟un autre facteur dont on a déjà parlé, s‟ajoute au problème de la divergence des définitions : c‟est celui des différences de méthode d‟amortissement des programmes. Le coût des grilles, varie artificiellement en fonction de la méthode adoptée : plus un programme est amorti rapidement, plus son coût de première diffusion est élevé et inversement. Ainsi, pour TF1, la plupart des programmes sont consommés à 100% dès leur première diffusion et par conséquent sortis de l‟actif de la société, quelle que soit l‟étendue des droits patrimoniaux à l‟exception de :
206
R. LE CHAMPION et B. DONARD, Télévision de pénurie, télévision d’abondance, La Documentation française, Paris 2000, p.91 207 CSA, Télévision : Le coût de la programmation, in Les études de la CSA, Paris, juillet 1993,p.23 208 Ibid., p.24
83
-
les coproductions déléguées d‟une durée unitaire égale ou supérieure à 52 minutes qui sont amorties à 80% lors de la première diffusion et 20% à la seconde.
-
Les achats de droits de télédiffusion de films longs métrages, téléfilms, séries et dessins animés qui sont amortis pour moitié (50%) lors de la première diffusion, et l‟autre moitié à la seconde209.
Pour France TV, depuis 1991, il utilise un taux d‟amortissement largement admis sur le plan international, notamment en Europe (Royaume-Uni, Espagne, Italie, Allemagne) et aux Etats-Unis; les programmes acquis pour plusieurs diffusions sont affectés d‟un taux d‟amortissement de 66% à la première diffusion et de 34% à la seconde, alors que les programmes de flux sont amortis à 100% à la première et souvent unique diffusion210. Sur cette base le coût de la grille des chaînes françaises a évolué comme suit : Tableau N°38
: Evolution du coût de la grille des chaînes hertziennes françaises (M€)
Source : CNC, l’économie de la télévision 2003-2012, novembre 2012, p.38
Graphique N°14
209 210
: Evolution du coût de la grille des chaînes hertziennes françaises (M€)
TF 1, rapport financier 2002, annexe des comptes consolidés, p.35 CSA, Télévision : le coût de la programmation, op.cit., p.25
84
Source :CSA, les chiffres clès del’audiovisuel français, 1er semestre 2013
Le coût de grille des chaînes publiques est en croissance régulière, atteignant, en 2012 près de 812 M€ pour France 2, 867 M€ pour France 3, et 144 M€ pour France 5, alors que celui de M6, après une croissance régulière depuis 10 ans, il se stabilise en 2012 à 347 M€, en hausse de 3,9% par rapport à 2011. A contrario, le coût de grille de TF1 est tendanciellement en baisse après 2006, toutefois TF1 dispose toujours du budget le plus important. Il représente près de trois fois celui de M6 et près de huit fois celui de France 5. 2.3.2 – Coût de la grille et stratégie de programmation A volume de diffusion comparable, des grandes disparités se dessinent entre les chaînes en clair au point qu‟il semble difficile d‟établir une comparaison entre elles. Il conviendra cependant de s‟interroger sur les implications de ces disparités sur les stratégies de programmation des chaînes. 2.3.2.1- Les chaînes publiques La structure du coût de la grille des chaînes publiques met en lumière l‟importance des moyens affectés et la place centrale de l‟information et des magazines dans la programmation. Les chaînes du groupe offrent ainsi aux heures de grande écoute la plus grande diversité des programmes et privilégient les programmes régionaux, les émissions de découverte et de décryptage, les émissions culturelles, les sports, les programmes destinés à la jeunesse et tous les genres de création, comme cela ressort du tableau ci-dessous : Tableau 39 : Coût de la grille de France TV (en M €)
Information nationale Sport national Programme national Programme régional (France 3 et OMP) Dépréciation et fins de droits Total coût de la grille
2012 236,9 198,4 1088 567,6 17 2107,9
Source : France TV, rapport annuel 2011
La programmation des trois chaînes publiques est construite autour de trois axes définis par leurs cahiers de missions et des charges : offrir des programmes variés et complémentaires, et être la référence en matière d‟éthique et de qualité de programmes. La diversité des programmes : France 2 a pour mission de proposer au public une programmation généraliste et diversifiée, ce dont elle essaye de s‟acquitter en respectant un certain équilibre des genres. Les trois genres majeurs que sont les documentaires et les magazines, l‟information et les divertissements se partagent de façon quasi égale à peu près65 % de l‟ensemble de la diffusion de la chaîne (successivement 24 %, 22 % et 19 %) 211 . Sur France 3, la diversité est manifeste aux heures des grandes écoutes où certains genres (magazines, documentaires et fiction) occupent une place de choix. France 4, dont la vocation est d'attirer et de fidéliser un public jeune, consacre 60% de sa programmation à la diffusion de la fiction. Pour France5, dont la mission est très spécifique, favoriser l‟accès au savoir, à la
211
Les bilans du SCA année 2010 d, France télévisions p.14.
85
connaissance, à la formation et l‟emploi l‟a conduit à privilégier les documentaires et les magazines qui constituent 80% de sa programmation. La complémentarité : se décèle dans la place privilégiée accordée à l‟information régionale sur France 3 qui représente plus de 40% du coût de sa grille, ainsi que dans les émissions destinées à la jeunesse où, chacune des chaînes publiques cible un public précis : France 2 s‟adresse d‟avantage aux adolescents, France 3 cible les 6-12 ans alors que France 5 offre des programmes de qualité aux tout-petits. Mais, cette complémentarité peut s‟apprécier d‟avantage si ces chaînes arrivent à une harmonisation de leur grille, ce qui n‟est pas le cas pour le moment. Etre la référence en matière d‟éthique et de qualité de programmes : le bilan de ce troisième objectif est contrasté et des efforts doivent être fournis. Toutefois, les chaînes publiques se distinguent des chaînes privées en programmant un nombre important d‟émissions culturelles, de documentaires mais l‟heure tardive de leur diffusion sur France2 et France3 constitue un handicap comme l‟a souligné l‟écrivain Catherine Clément dans son rapport sur le sujet212. -
2.3.2.2- Les chaînes commerciales Pour les chaînes commerciales, un des éléments majeurs de leur réussite passe par une maîtrise de l‟évolution du coût de leur grille. - La structure du coût de la grille de TF1 révèle une diversité de programmes. Tous les genres sont représentés. En première position, viennent les coûts la fiction audiovisuelle qui domine la programmation et dont l‟offre représente, avec l‟ animation, plus de 39 % du temps d‟antenne de la chaîne , suivi de loin par la catégorie « divertissements, musique et spectacle » dans laquelle les jeux tiennent une place centrale et les documentaires / magazines dont la part a relativement baissée. Le coût de l‟information est stable (+2,4%), tandis que les émissions pour la jeunesse poursuivent leur baisse (-12% pour 2002, et de 1997 à 2002, ils ont baissé de près de 88%). Avec un coût de la grille de 905,5 M€ en 2012, TF1 dispose de la grille la plus chère des chaînes françaises en clair. De 2000 à 2010, le coût de la grille a augmenté de 28%. Mais la croissance a été forte, lors de l‟exercice 2006 qui a dégagé un surplus de 140,7 M€, soit une croissance de 15,3%. Cette forte croissance est imputable à la forte augmentation du coût du sport en raison de la retransmission par la chaîne de la Coupe du monde de football dont le coût s‟est élevé à 113,6M€. Pour M6, le coût de la grille est relativement peu diversifié en raison de sa concentration pendant plusieurs années sur certains genres (fiction, musique) et l‟absence
212
Pour Catherine CLEMENT, la culture est offerte aux Français à l‟heure où ils dorment, or « la culture est le reflet de la vie », en s‟en privant, « la TV publique se décervelle elle-même sans le vouloir », et elle suggère dans les 111 pages de son rapport plusieurs recommandations, comme la création « d‟une nouvelle fonction dans l‟organigramme de France TV. Un directeur des arts et de la culture, une personne en charge du dialogue avec les arts, au même niveau hiérarchique que le directeur de la stratégie des programmes », de « définir un pacte clair entre l‟Etat actionnaire et France TV au sujet de l‟audience moyenne acceptable en fonction des exigences culturelles des programmes, l‟actionnaire acceptant une légère baisse d‟audience ». In, La nuit et l’été : quelques propositions pour les quatre saisons, rapport remis au ministre de la culture et de la communication, sur l‟évaluation, l‟analyse et les propositions concernant l‟offre culturelle à France TV , La Documentation française, Paris, 2002, 115 pages
86
d‟autres, comme le sport213. Mais les années 2005 et 2006 ont été caractérisées par une prise de décision stratégique visant à investir significativement dans de nouveaux programmes, notamment, le sport. Ainsi, depuis 2006, M6 commence à diffuser des compétitions internationales à forte audience214. Les deux genres historiquement prépondérants dans les programmes sont la fiction télévisuelle qui représente plus de 30% de l‟offre des programmes et, le divertissement, la musique et spectacle qui détiennent plus de 32% (dont 22% consacré à des émissions musicales). La place de l‟information est minime. - Pour Canal +, le coût de la grille est composé à plus de 80% par le cinéma et le sport qui constituent les deux genres forts de la chaîne sur lesquels est basée la programmation de la chaîne. Les montants affectés à l‟acquisition des droits de diffusion sont indexés sur les chiffres d‟affaires, puisque selon la réglementation, la chaîne doit consacrer 21% de son chiffre d‟affaires de l‟année précédente à des achats d‟œuvres cinématographiques (dont 12% pour les œuvres européennes et 9% pour les œuvres d‟EOF)), soit pour l‟année 2009 une obligation de 355 M qui n‟a été réalisée qu‟à hauteur de 95% et qui devait être rattrapée l‟année suivante. Tableau N° 40 : Evolution des engagements financiers de Canal+ en matière de programmes (en M €) 2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
Droits de diffusion de films et programmes TV Droits sportifs
1051
1001
983
979
826
791
821
920
1120
610
163
984
773
439
1946
1588
Autres programmes
193
163
152
159
169
134
142
144
Satellites / transmissions Total
2364
1774
1298
2122
1768
1364
131 3040
97 2750
Source: Rapports financiers annuels de Canal+
2.3.3-Marge brute de la grille A partir d‟une présentation analytique des comptes des chaînes, il est possible de mettre en évidence un indicateur de la rentabilité économique à savoir la marge brute de la grille. Celle-ci est obtenue en retranchant du chiffre d‟affaire d‟un diffuseur les dépenses liées directement à l‟antenne, c'est-à-dire :
213
Le refus de son adhésion à l‟UER qui est en Europe l‟un des gros détenteurs de droits sportifs, ne lui permettait pas de participer à la surenchère des droits, et par conséquent, à ne pas diffuser pratiquement d‟événements sportifs, à l‟exception, des courses de moto sur circuit qui constituaient depuis 1993 l‟essentiel de ce genre sur la chaîne. Cependant, depuis 2000, ce contrat a été abandonné à France télévision. Dès lors, les émissions sportives de M6 ne représentaient plus que 27 heures (0,3% du volume total) en 2001 et 25h48 mn en 2002 (0,3%). 214 En 2006, M6 a diffusé 31 matchs de la Coupe du monde de football et elle acquit également les droits de diffusion des trois derniers tours décisifs de la Coupe de l‟UEFA et la finale de la Coupe d‟Europe pour trois ans et plus. Ceci s‟est traduit par une augmentation du coût de la grille de 44,1M € dont 27 M€ au titre de l‟acquisition des droits télévisés Coupe du monde (hors frais techniques) et 17,1 M€ sur les autres programmes. (Rapport financier de M6, année 2006, p.114).
87
- le coût de la grille, - le coût de la régie : les commissions des régies publicitaires, - les coûts de diffusion des programmes et du transport du signal par faisceaux hertziens et satellite, - les droits d‟auteurs versés aux sociétés d‟auteurs au titre de l‟utilisation du répertoire des ayant droits qu‟elles représentent, - le coût des taxes spécifiques à l‟activité télévisuelle, dont la principale en France, est celle destinée à alimenter le COSIP géré par le CNC. Le ratio marge brute de la grille/chiffre d‟affaires peut également être interprété comme un indicateur de rentabilité. Ainsi, pour les chaînes commerciales en clair, la marge brute de la grille a évolué comme suit : Tableau N°41: Marge brute de la grille de TF 1 (en M €) Chiffre d’affaires publicitaires (CA) - Coût de la régie - Taxes (CNC) et droits d‟auteur - Coût de diffusion = Recettes nettes disponibles - Coût de la grille = Marge brute de la grille (MBG) MBG / CA en %
2005 1647,5
2006 1707,9
2007 1718,3
2008 1647,3
2009 1429,4
2010 1549,8
2011 1504,1
2012 1402,8
86,5 144,9 54,9 1361,2 919,4 441,8
80,9 151,4 53,6 1422 1060,1 361,9
81,1 156,7 54,2 1426,3 1024,2 402,1
79,0 150,9 54,0 1363,4 1032,1 331,3
71,7 141,7 51,5 1164,5 926,9 237,6
75,9 148,8 44,9 1280,2 951,2 329,0
75,2 149,0 25,7 1254,2 905,5 348,5
73,5 144,1 17,8 1167,4 935,5 231,9
26,8
21,2
23,4
20,11
16,62
21,23
23,17
16,53
Source: rapports financiers annuels de TF1 Tableau N°42 : Marge brute de la grille de M 6 (en M €) Chiffre d’affaires publicitaires brut (CA) - Coût de la régie - quote-part M6, taxes et droits d'auteurs, coût de diffusion = Recettes nettes disponibles - Coût de la grille = Marge brute de la grille (MBG) MBG / CA en %
2005 640,5
2006 664,3
2007 688,1
2008 668,5
2009 614,9
2010 678,4
2011 686,2
2012 657,6
120,8
119,0
129,5
123,9
130,1
129,9
121,3
112,4
519,9 258,4 261,5 40,83
545,3 302,5 242,8 36,5
558,6 299,1 259,5 37,7
544,6 347,0 197,7 29,6
484,8 303,5 181,3 29,5
548,5 319,8 228,7 33,7
564,9 333,9 231 33,7
545,2 346,9 198,3 30,1
2011 1846 34 144 34 1634 1035 599 32,45
2012 1878 33 139 35 1671 1143 528 28,11
Source: Rapports financiers annuels de M6 Tableau N°43: Marge brute de la grille de Canal+ (en M €) Chiffre d’affaires (CA) - Coût de la régie - Taxes (CNC) et droits d‟auteur - Coût de diffusion = Recettes nettes disponibles - Coût de la grille = Marge brute de la grille (MBG) MBG / CA en %
2005 1512 17 150 49 1296 971 325 21,5
2006 1612 19 160 54 1379 1100 279 17,3
2007 1740 22 168 66 1484 1107 377 21,67
2008 1813 26 139 85 1563 1071 492 27,14
2009 1817 26 137 90 1564 999 565 31,09
Source: Rapports financiers annuels de Canal+ 88
2010 1843 30 125 76 1612 998 614 33,31
La rentabilité opérationnelle des chaînes commerciales en clair et très satisfaisante. Avec un chiffre d‟affaires de plus de deux fois inférieur à celui de TF1, M6 dégage une rentabilité de près de 45% supérieur à celle de TF1, en raison de ses coûts directs modestes. TF1 a connu depuis 2006 une baisse de la marge brute de la grille, en raison d‟une très forte croissance de son coût de la grille non compensé par une croissance similaire de son chiffre d‟affaires publicité. Par conséquent, la marge brute de la grille tombe de 26,8% en 2005 à 16,6% en 2009 pour se stabiliser, suite à un effort d‟optimisation de la programmation 215; à 21,23% en 2010, taux qui témoigne malgré cela, d‟une bonne rentabilité de la chaîne, et qui est comparable à la performance des années 2006 et 2008. Mais en raison d‟une conjoncture défavorable et la poursuite de la montée en puissance des chaînes de la TNT, l‟année 2012 a connu un essoufflement des investissements publicitaires ce qui s‟est traduit par un recul important de la marge brute de la grille. Pour les chaînes publiques, on peut à partir du compte analytique du “ diffuseur ” pour l‟ensemble du groupe France TV, calculer la marge brute de la grille, en retranchant du total du chiffre d‟affaires diffusion, les charges liées à l‟antenne. On obtient pour 2005 et 2006, années pour lesquelles on dispose d‟indications, le tableau suivant : Tableau N°44: Marge brute de la grille de France TV (en M€) 2005 Redevance 1796,8 Publicité 660,0 Parrainage 78,2 Divers 17,5 Total chiffre d’affaires diffusion 2552,4 55,2 - Coût de la régie 117,9 - Versements compte de soutien 103,5 - Versements droits d’auteur 198.2 - Coût de diffusion = Recettes nettes disponibles 2071,2 1765,6 - Coût de la grille = Marge brute de la grille (MBG) 305,6 MBG / CA en % 12,0 Source: France TV, rapport financier 2006
2006 1834,4 706,4 83,4 16,8 2640,9 65,4 122,2 107,2 201,5 2139,4 1813,5 325,9 12,3
L‟analyse de la marge brute de la grille du groupe des chaînes publiques, fait ressortir une relative amélioration de la performance économique du secteur publique, la marge brute de la grille augmente de plus de 6%, alors que le ratio marge brute/CA reste relativement stable, quant au résultat opérationnel, il a baissé de 10,2% entre 2005 et 2006 passant de 23,3 M€ à 20,9 M€. 2.3.4- L’évolution de la performance du coût de la grille Pour les chaînes commerciales financées essentiellement par la publicité, la maîtrise du coût de la grille est particulièrement importante au regard de la part d‟antenne, notamment celle concernant la cible commerciale des ménagères de moins de 50 ans, la plus convoitée par les annonceurs. L‟étude de la performance du coût de la grille par rapport à cette part permet d‟expliquer la stratégie de développement des chaînes commerciales face à l‟évolution de la concurrence et de l‟audience.
215
51,3 millions d‟euros d‟économies ont été réalisés en 2009 et 53,3 millions en 2010.
89
Les deux tableaux suivants, nous donnent l‟évolution de la performance de coût de la grille de TF1 et M6 : Tableau N°45 : Evolution de la performance du coût de la grille de TF 1
Coût de la grille en M€ Part d‟audience (%) .4 ans et plus . Ménagères –50ans Valeur de la part d‟audience* . 4 ans et plus . Ménagères –50ans
1993
2000
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
598
741,2
919,4 1060,1 1042,2 1032,1 926,9 951,2
905,5
935,5
41,1 41,2
33,4 36,3
32,3 36,2
31,6 35,3
30,7 34,8
27,2 30,9
24,5 28,1
23,7 26,7
22,7 25,5
14,40 14,50
22,20 20,80
28,46 25,4
33,50 30,03
33,95 29,95
37,94 35,51 38,82 33,40 31,08 31,67
38,21 33,91
41,21 36,69
26,1 29,8
*Coût de la grille / la part d‟audience : ce ratio indique combien coûte un point de part de marché en fonction de la cible choisie
Source : CSA, bilans des chaînes et rapports financiers de TF1après retraitement
Tableau N°46 : Evolution de la performance du coût de la grille de M 6 Coût de la grille en M€ Part d‟audience (%) .4 ans et plus . Ménagères –50ans Valeur de la part d‟audience . 4 ans et plus . Ménagères –50ans
1993 108,2
2000 187,4
2005 258,4
2006 302,5
2007 299,1
2008 347,0
2009 303,5
2010 319,8
2011 333,9
2012 346,9
11,2 14,9
12,7 18,1
12,6 19,1
12,5 19,3
11,5 16,4
11,0 17,5
10,8 17,2
10,4 16,5
10,8 17,2
11,2 17
9,66 7,26
14,75 10.35
20,5 13,52
24,2 15,67
26,00 18,23
31,54 19,83
28,1 17,64
30,75 19,38
30,92 19,41
30,97 20,4
Source : CSA, bilans des chaînes et rapports financiers de M6 après retraitement
Pour TF1, on constate que malgré une croissance continue du coût de la grille, la chaîne a enregistré une baisse requise de l‟audience qui est passé pour le téléspectateur âgé de 4 ans et plus de 41,1% en 1993 à 33,4% en 2000 et 22,7% en 2012 soit une baisse de près de 11 points en 12 ans. La diminution de la part de la ménagère de moins 50 ans fut du même ordre (-10,8 points). Cependant, étant donné que la part d‟audience sur la cible la plus recherchée par les annonceurs est devenue supérieure à la part d‟audience globale, la valeur du point de part de marché sur les ménagères de moins de 50 ans est désormais moins chère que sur les 4 ans et plus. Ce constat incite la chaîne à cibler son offre de programmes à destination des publics les plus “ rentables ”, et à axer sa programmation sur les cibles marchandes (hausse du divertissement et recours aux jeux et programmes de télé réalité). Aussi, malgré la baisse de la part d‟audience de la chaîne, sa rentabilité sur les cibles marchandes est plus forte que sur l‟ensemble de son public. Pour M6, l‟évolution du coût de sa grille correspond à la croissance de son audience, constituée principalement de jeunes et adultes (15 à 49 ans) à dominance féminine. La performance du coût de la grille révèle la rigueur de la gestion de la chaîne. Sans recourir à la surenchère en matière d‟achat de programmes, elle a obtenu du succès en pratiquant la contre programmation et en diffusant des programmes peu onéreux. La valeur de la part d‟audience a connu une évolution notable les dernières années, elle est inférieure de plus de 16 points de celui de TF1 pour la cible ménagère de moins 50 ans.
90
Conclusion : La TV est une activité dont les coûts progressent constamment. En raison de la concurrence que se livrent les chaînes commerciales pour améliorer les parts d‟audience, la maîtrise du coût de la grille est difficilement maîtrisable. La production de films, de documentaires, de fictions subit une inflation exponentielle, de même que l‟achat de droits cinématographiques ou des programmes sportifs, puisque les contrats d‟exclusivité portant sur des événements fédérateurs ne cessent de s‟alourdir. Aussi, faire fonctionner une chaîne généraliste est de plus en plus onéreux et nécessite le recours à une multitude de sources de financement.
91
CHAPITRE III : LE FINANCEMENT ET SES CONTRAINTES
La TV est une industrie coûteuse dont les charges ne cessent de croître, son financement présente des caractéristiques très éloignées de celles de la plupart des autres activités. L‟essentiel de ses ressources provient en effet, non de la vente directe de ses services aux téléspectateurs (à l‟exception de la TV à péage), mais de la vente aux annonceurs d‟espaces publicitaires et de fonds publics. Les particularités de son produit et de son marché traduisent divers modes de financement, et il en résulte une diversité de sources de financement et des divergences entre les pays dans le financement des organismes de TV publics. Aux Etats-Unis, fonctionne le modèle “ commercial pur ” où les networks tirent l‟essentiel de leurs ressources du marché publicitaire, alors qu‟en Europe coexiste le système commercial pur avec un système de financement mixte : publicité et fonds publics. La prédominance de financement mixte en Europe trouve son explication dans les éléments suivants :216 . Dans beaucoup de pays, une seule source de financement ne suffit pas à couvrir l‟ensemble des charges pour le fonctionnement du service public de TV. . Le recours à une seule source de financement accroît le risque de dépendance de radiodiffusion et met en péril la bonne exécution de son mandat. . La combinaison de différentes sources de financement peut stimuler le degré d‟attention portée aux divers aspects du mandat de service public. . Un système de financement mixte est considéré comme fiable dans un environnement en pleine mutation où certaines sources risquent de s‟épuiser brusquement alors que d‟autres s‟accroissent et que de nouvelles apparaissent. Le choix du système de financement est une question importante et problématique qui se pose avec acuité pour les organismes de radiodiffusion publics, car, selon les sources de financement utilisées, la capacité de radiotélévision public à remplir son mandat et ses missions se trouveront renforcés ou atténués. C‟est aussi un important moyen d‟influencer les activités des organismes publics de radiodiffusion et en particulier le contenu de leurs programmes. En effet, le financement détermine le contenu, plus un organisme de TV est-il tributaire de la publicité ou de parrainage, plus il obéit à l‟audimat et aux exigences des annonceurs, d‟où des conséquences sur la grille de programmes où s‟inscriront de préférence les émissions fédérateurs d‟audience, alors que les programmes réputés plus “ difficiles ” (culturelles ou concernant certaines minorités) seront absents. Dans ce contexte, le radiodiffuseur aura du mal à offrir des programmes de qualité et à se démarquer de l‟offre des radiodiffusions privées. La situation n‟est pas non plus sans risque, pour le radiodiffuseur dépendant essentiellement de fonds publics, car là aussi, il y a risque que les pouvoirs publics ou les partis politiques se servent de ce “ levier ” financier pour influencer la ligne éditoriale et la programmation de certaines émissions ou exercer des pressions sur les conduites 216
UER, Financement de la Radiodiffusion de service public, département juridique, 9 novembre 2000, p. 3
92
journalistiques par l‟instauration de l‟autocensure ou l‟auto adaptation. “ Le système de financement est donc un des facteurs qui détermine comment et dans quelle mesure la mission de service public s‟accomplit ”217. Aussi, le système de financement devrait être stable et sûr, assurant aux organismes de TV les ressources nécessaires pour l‟accomplissement de leur mission d‟une façon adéquate avec les exigences et les objectifs de service public. Il ne devrait pas les exposer aux aléas du marché, ni aux pressions politiques ou étatiques. Il devrait être dynamique pour leur permettre d‟être compétitifs et capables de relever le défi de la concurrence des TV commerciales et des nouveaux médias, dans un environnement économique, technique et juridique en pleine évolution. Dans les pays européens, un consensus s‟est fait jour selon lequel, les services publics de radiodiffusion doivent disposer d‟un cadre de financement approprié et fiable, et que le financement public fait partie intégrante des systèmes de radiodiffusion publique. Plusieurs textes juridiques et politiques ont confirmé cette position. Citons à titre d‟exemple : . La résolution sur l‟avenir du service public de radiodiffusion adoptée à Prague en 1974 qui reste une référence en la matière et, qui pose pour les Etats la nécessité de maintenir et, si nécessaire, d‟établir un cadre de financement sûr et approprié garantissant aux organismes de radiodiffusion les moyens nécessaires à l‟exécution de leurs missions. Elle reconnaît aussi, la possibilité de recourir à diverses sources de financement : redevance, subventions publiques, publicité parrainage, produits de ventes des productions audiovisuelles, etc. . La Recommandation n° R (46) 10 du Conseil de l‟Europe concernant la garantie de l‟indépendance du service public de la radiodiffusion qui pose des gardes fous concernant le pouvoir de décision des autorités publiques, les critères servant à fixer le montant du financement, la continuité de financement, le contrôle financier, etc. . Le Protocole d‟Amsterdam de 1987 sur le système de radiodiffusion publique des Etats membres, qui fait partie du traité communauté européenne, entrée en vigueur le premier mai 1989, et qui réaffirme qu‟il appartient aux Etats d‟organiser la radiodiffusion de service public, d‟en définir la mission et de pourvoir à son financement. Il définit aussi, les sphères de compétence des institutions européennes et des Etats membres dans ce domaine, notamment dans le domaine d‟application des règles de concurrence (surtout pour la question des aides de l‟Etat). Ce qui précède explique l‟importance du financement public dans les pays européens. Il constitue en 2012, dans les plus grands pays européens, 26,53% de l‟ensemble des revenus de la TV dans ces pays derrière les abonnements (39,89%) et la publicité (33,6%), comme cela apparaît dans le tableau suivant : Tableau N° 47 : Ventilation du chiffre d’affaires de la télédiffusion dans les 5 grands pays européens Evolution des recettes d'abonnement (Md€) Allemagne Espagne France Italie Royaume-Uni TOTAL Recettes d’abonnement /total revenus TV (%)
2007 4,0 1,4 5,1 2,4 4,6 17,5 35,0
217
Ibid. p. 4.
93
2008 4,1 1,4 5,6 2,7 4,9 18,7 37,7
2009 4,2 1,4 5,9 2,9 5,2 19,6 40,0
2010 4,4 1,4 6,2 3,2 5,5 20,7 39,43
2011 4,5 1,4 6,6 3,1 5,9
21,5 39,89
2012 4,7 1,5 6,6 2,6 6,3
21,7 39,45
Evolution des recettes de la redevance et des subventions publiques (Md€) Allemagne Espagne France Italie Royaume-Uni TOTAL Recettes de redevance /total revenus TV (%)
2007 4,6 0,8 1,9 1,6 2,9 12,8 25,6
2008 4,5 0,5 2,1 1,6 3,0 11,7 23,6
2009 4,8 0,7 2,4 1,6 3,0 12,5 25,5
2010 4,8 1,8 2,6 1,7 3,1 14,0 26,67
2011 4,6 2,3 2,5 1,7 3,2 14,3 26,53
2012 4,8 1,9 3,3 1,7 3,2 14,9 27,09
2009 3,7 2,4 2,9 4,4 3,5 16,9 34,49 49,0
2010 3,7 2,6 3,1 4,5 3,9 17,8 33,9 52,50
2011
2012
4,1 1,9 3,6 4,4 4,1 18,1 33,58 53,9
4,7 1,5 3,3 2,6 6,3 18,4 33,45 55
Evolution des recettes publicitaires nettes (Md€) Allemagne Espagne France Italie Royaume-Uni TOTAL Recettes publicitaires /total revenus TV (%) TOTAL RECETTES TV
2007 4,2 3,3 3,5 4,7 4,0 19,7 39,4 50,0
2008 4,0 3,0 3,4 4,9 3,9 19,2 38,7 49,6
Source : IDATE
En France, les revenus des chaînes de télévision sont estimés à 9 473 M€ en 2012 dans lesquelles les abonnements représentent 35,3%, la publicité 35,2% alors que la contribution à l‟audiovisuel public (redevance) et la dotation budgétaire de l‟Etat, destinées aux chaînes publiques, composent 29,5 % des revenus totaux. Graphique N°15 : Le financement des chaînes de TV en France
Ainsi, les grands flux des ressources des TV existantes peuvent être schématisés de la sorte en prenant l‟exemple des chaînes françaises en 2012.
94
Schéma 1 : Les flux de ressources des chaînes françaises en 2012 Financement amont (Publicité et parrainage) 1402,8 M€
Financement amont (Publicité et parrainage) 372, 2 M €
Financement latéral (Redevance) 2527,8 M€
Financement latéral (Néant)
France TV 2900M€
Antenne TF 1 1402,8 M€
Financement aval (Néant)
Financement aval (Néant)
Financement amont (publicité et parrainage) 161M€
Canal + 1878M€
Financement Latéral (Néant)
Financement aval (Abonnement) 1 680 M €
On constate que les deux principales sources de financement de la TV proviennent du public (redevance et abonnement) et des recettes publicitaires. Leur importance diffère en fonction du statut juridique des chaînes (public ou privé) et du type de diffusion adopté (clair ou crypté). La connaissance de ces modes de financement qui prédéterminent la composition du paysage audiovisuel d‟un pays et de leurs contraintes est nécessaire pour la compréhension de l‟économie de la TV, et pour saisir les mutations en cours dans l‟économie des entreprises audiovisuelles.
3.1 –Le financement par le public La contribution du public au financement des services télévisuels s‟apparente le plus souvent à un “ droit d‟usage forfaitaire ”218 , dans la mesure où le montant ne dépend pas de l‟usage qui en est fait. Deux formes principales prédominent : la redevance et le produit des abonnements aux services payants.
3.1.1 –La redevance La redevance constitue la forme historique de financement de service public de radiodiffusion et elle est, aujourd‟hui encore, la plus répandue. La plupart des pays européens l‟ont adopté à l‟exception de l‟Espagne, de Luxembourg et du Portugal (qui la conserve pour la radio). Elle inclut tous les types de contribution ou de taxes spéciales, qu‟elle que soit leur 218
N. TOUSSAINT, L’économie des médias, op.cit. p. 106
95
désignation dans la loi nationale, auxquelles sont assujettis les téléspectateurs ou les auditeurs détenteurs en général d‟un récepteur de TV ou de radio 219. Son montant est assimilé à une taxe parafiscale220 et voter par le parlement. Dans certains pays, c‟est une taxe qui s‟ajoute à la facture d‟électricité et calculée parfois en pourcentage du montant de cette facture. Selon Jean-Denis Bredin, la philosophie à la base de la redevance “ peut être analysée à partir de trois logiques différentes : celle du financement public d‟une activité publique ; celle de la compensation par l‟Etat des contraintes de service public qu‟il fait peser sur des organismes, selon un schéma classique pour les services publics à caractère industriel et commercial ; celle enfin de la tarification aux usagers de leur accès à un ensemble de prestations ”221. A l‟origine, la redevance était conçue comme un paiement dû à l‟Etat pour avoir le droit de recevoir les services de radiodiffusion. Mais, de nos jours, avec la consécration du principe de la liberté d‟information (Art. 10 de la convention européenne du droit de l‟homme), il serait inconcevable de conditionner la réception des services de radiodiffusion à l‟obtention d‟une autorisation de l‟Etat. De ce fait, la redevance est actuellement considérée comme une contribution spéciale pour financer la TV ou la radio ou encore comme une sorte d‟impôt affecté totalement ou partiellement, au financement de la radiodiffusion de service public. Les foyers détenteurs de récepteurs de radio ou TV doivent s‟acquitter de cette taxe même s‟ils ne reçoivent pas en fait ou ne souhaitent pas recevoir les services de radiodiffusion publique222. C‟est cet élément de solidarité qui fait la différence entre la redevance et les abonnements payés aux fournisseurs de TV à péage. La redevance ne peut à elle seule pourvoir à la totalité des besoins financiers des services publics de TV dans la mesure où le montant de la redevance ne peut croître indéfiniment et qu‟elle doit rester socialement acceptable. Ce n‟est qu‟au Royaume Uni (BBC), en Allemagne (ARD-ZDF), en France (FTV), en Norvège (NRK), en Suède (STV), en Finlande (YLE) et en Grèce, qu‟il semble possible de couvrir une grande part des besoins financiers de la TV à l‟aide du seul produit de la redevance, alors qu‟ en Espagne et l‟Irlande, la publicité reste la principale source de revenus. 3.1.1.1- Le produit de la redevance 3.1.1.1.1 – Le montant de la redevance Etant obligatoire, la redevance a besoin d‟une assise légale. Le montant de la redevance est ainsi spécifié dans la loi et s‟il ne l‟est pas, du moins les critères et les modalités de fixation seront-ils normalement définis dans la législation. Dans la majorité de pays, c‟est le parlement qui fixe le montant pour un certain nombre d‟années ou pour une période
219
La plupart des pays font une distinction entre la redevance TV et la redevance radio. Exceptionnellement, on trouve des redevances pour la radio (Portugal) ou uniquement pour la TV (Finlande, France). 220 Le caractère de taxe parafiscale a été confirmé à plusieurs reprises en France par la jurisprudence du Conseil constitutionnel et par celle du Conseil d‟Etat. Ainsi dans sa décision du 11/8/1960, le Conseil constitutionnel stipule ” cette redevance qui, en raison tant de l‟affectation qui lui est donnée que du statut même de l‟établissement en cause, ne saurait être assimilée à un impôt, et qui, eu égard aux conditions selon lesquelles elle est établie et aux modalités prévues pour son contrôle et son recouvrement, ne peut d‟avantage être définie comme une rémunération pour services rendus, a le caractère d‟une taxe parafiscale ”. 221 JD. BREDIN, Les nouvelles télévisions hertziennes, op.cit. p. 83. 222 L‟assujettissement à la redevance est indépendant de l‟usage effectif qui est fait du téléviseur. En particulier, un redevable ne peut prétendre s‟exonérer du paiement de la taxe en soutenant que son téléviseur a été modifié de telle manière qu‟il ne peut recevoir les chaînes publiques de TV ; la redevance présente en effet le caractère d‟une taxe et n‟est pas la contrepartie exacte d‟un service rendu.
96
illimitée, et dans d‟autres c‟est le gouvernement223 ou un ministère qui s‟en charge. Ce n‟est donc pas le prestataire du service public qui décide en la matière. Le montant de la redevance doit s‟adapter, en général, aux besoins nécessaires à l‟exécution des missions de service public, en tenant compte, toutefois des revenus escomptés par d‟autres sources de financement (publicité et parrainage). La comparaison entre plusieurs pays fait ressortir que le taux de la redevance est plus élevée dans les petits pays à plusieurs régions linguistiques ou à système décentralisé, ce qui obéit à la logique économique de la nécessité d‟une masse critique de ressources. En 2013, la redevance s‟établit par exemple à 65 € en République tchèque, à 114 € en Italie, à 179€ au Royaume-Uni, à 217 € en Allemagne et 384 € en Suisse. Graphique16 : montant de la redevance en Europe en 2012
Cependant, pour mesurer l‟intensité de l‟effort financier public il est préférable de rapporter les recettes totales de la redevance à la population et au PIB. Il résulte que l‟effort financier du public varie du simple au triple entre l‟Allemagne et l‟Italie comme cela ressort des deux tableaux suivants : Tableau N° 48 : Evolution des recettes de la redevance audiovisuelle par habitant en euro
France Royaume-Uni Italie Allemagne Suède en % du PIB
France Royaume-Uni Italie
1997 31,7 51,1 21,1 65,9 38,8
1998 32,6 54,6 21,6 66,5 37,7
1999 34 58,4 21,7 68,2 39,9
2000 38,1 65,4 21,9 71,3 40
2001 40,4 68,3 22,1 74,2 43
1997 0,15 0,26 0,12
1998 0,15 0,25 0,12
1999 0,15 0,25 0,11
2000 0,16 0,25 0,11
2001 0,16 0,26 0,10
223
En France par exemple, le taux de la redevance est déterminé par décret en Conseil d‟Etat, alors que le parlement autorise sa perception et approuve sa répartition entre les différents organismes du secteur public.
97
Allemagne Suède
0,29 0,16
0,29 0,16
0,29 0,16
0,29 0,14
0,30 0,16
Source: Ph. COSTE, « Analyse comparée des stratégies des radio TV de service public », in colloque « les défis de la transparence dans le secteur audiovisuel», OEA, Strasbourg, 17 janvier 2003
La fixation du montant de la redevance devient de plus en plus problématique. Si en principe, rien ne s‟oppose à l‟indexation du niveau de la redevance sur l‟évolution des besoins du service public, où sur celle de l‟inflation, les gouvernements et parlementaires de différents pays chargés d‟en fixer le montant ont toujours cherché à éviter ou à limiter l‟augmentation pour des raisons politiques dues essentiellement à l‟impopularité de cette taxe. Ainsi les débats en France sur le montant de la redevance sont permanents, la diminution de 6,4% décidée en 1987 à la suite de la privatisation de TF1 ayant créé un précédent. Elle relevait, selon R. Bonnel, “ d‟avantage de l‟improvisation démagogique que d‟une décision prise en charge des besoins économiques du secteur public ”224. Aussi, a-t-elle été rapidement suivie par des augmentations constantes, 35% de hausse entre 1990 et 2000 alors que l‟indice du prix pour la même période n‟a évolué que de 18,9%. En revanche, sur les années 2001-2003, le montant de la redevance n‟aura augmenté que de 1,8% pour une inflation sur la même période de 4,5% soit une diminution de 2,7% sur 3 ans.A compter du 1er janvier 2009, le montant de la redevance (appelé contribution à l‟audiovisuel public225) est indexé chaque année sur l‟indice des prix à la consommation hors tabac, arrondi à l‟euro le plus proche. Il est fixé ainsi à 131€ en métropole et à 84 € dans les départements d'Outre-Mer. Tableau N° 49: Evolution du taux de la redevance en France en euro Années TV en noir et blanc TV en couleur DOM 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2009 2010 2011 2012 2013
Montant 54,12 55,49 56,86 59,46 61,74 65,55 68,45 68,45 71,8 72,61 73,02 73,02 74,31 74,31 supprimé
Evolution +3,49 +2,5 +2,5 +4,5 +4 +6,2 +4,5 +5 +1,2 +0,9 +1,9 -
Montant Evolution 84,15 +3,56 86,29 +2,5 88,42 +2,5 92,38 +4,5 94,20 +4 102,14 +6,2 106,71 +4,5 106,71 +-112,09 +5 113,42 +1,2 114,59 +0,3 114,59 116,51 +1,8 116,51 116,51 118,00 +1,7 75 121,00 +2,5 78 123,00 +1,7 79 125,00 +1,6 80 131,00 +3,2 84 Source: Projet de loi de Finances, Assemblée Nationale, France
224
R. BONNELL, La vingt cinquième image, op.cit. p. 314. L‟article 29 de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision 225
98
Le fait qu‟une décision politique (émanant normalement du parlement) doive être prise afin d‟adapter la redevance à la hausse des dépenses, expose les chaînes publiques au risque de pressions politiques. C‟est pourquoi, de nombreux pays essayent de rendre le processus décisionnel aussi objectif et transparent que possible, en engageant d‟une part, des concertations avec les organismes concernés, comme le souhaite la recommandation du Conseil de l‟Europe signalée précédemment et en prévoyant d‟autre part, des mécanismes automatiques pour éviter la dépendance par rapport à des prises de décision ad hoc, notamment le mécanisme de l‟adaptation automatique à l‟inflation226. Force est d‟admettre cependant, que ce mécanisme se révèle souvent insuffisant dans la mesure où les coûts des diffuseurs augmentent généralement à un rythme plus rapide que dans le secteur économique en général, ce qui normalement devait conduire à une augmentation des taux de la redevance à un niveau plus haut que le taux d‟inflation227. Ainsi, l‟indexation automatique du barème de la redevance sur l‟indice du prix ou sur un autre indice ne garantit pas l‟augmentation des ressources des diffuseurs publics suivant un rythme cohérent avec leurs besoins. 3.1.1.1.2 –Les exonérations Dans le cadre du principe général de solidarité, il existe normalement des cas où l‟on peut être dispensé de payer la redevance ou bénéficier d‟un allégement de taux. Dans la plupart des pays, ces exonérations ou allégements ont été prévus pour des considérations sociales au bénéfice des ménages dont le revenu annuel est au-dessous d‟un certain seuil ou pour les personnes qui bénéficient de l‟aide sociale. D‟autres raisons comme, l‟âge, l‟invalidité, le chômage et la retraite ouvrent le droit à des exonérations ou à des réductions. La moins-value des diffuseurs, du fait de ces exonérations et réductions, est compensée souvent par des dotations budgétaires comme c‟est le cas en France et en Irlande. En France, en application du nouvel article 1605 bis du code général des impôts modifié par la loi de finances initiales pour 2005, sont dégrevées de la redevance audiovisuelle l‟ensemble des personnes qui sont actuellement dégrevées de la taxe d‟habitation. Ainsi, sont exonérés de la redevance sous certaines conditions228, les personnes âgées de plus de 60 ans , les mutilés et invalides civiles ou militaires atteints d‟une infirmité ou d‟une invalidité de taux maximum de 80%, et certains établissements habilités à recevoir les bénéficiaires de l‟aide sociale, les établissements hospitaliers ou de soins, et les associations caritatives qui recevaient à titre d‟hébergement des personnes en situation d‟exclusion, l‟ensemble des personnes morales de droit public pour leurs activités non assujetties à la TVA, et les appareils de TV utilisés par les organismes de TV, les établissements d‟enseignement et de recherche, les membres du corps diplomatique, certains locaux administratifs, etc.. Au total, sur près de 24,5 millions de comptes de redevance, plus de 5 millions sont exonérés de la taxe en 2006, et les dégrèvements de redevance pour motifs sociaux pris en charge par le budget général s‟élèvent à 509 millions d‟euros. Ces 226
UER, Financement de la radiodiffusion de service public, op.cit. p. 123. En février 2000, la Grande-Bretagne a annoncé qu‟il prévoyait dans 18 années à venir une hausse de la redevance de 1,5% supérieur aux taux de l‟inflation. 228 Parmi les conditions, on peut citer : - être titulaire de l‟allocation supplémentaire de fonds de solidarité vieillesse, - vivre seul ou avec son conjoint et, le cas échéant avec des personnes à charges ou avec des personnes non imposables à l‟impôt sur le revenu, - ne pas être passible de l‟impôt de solidarité sur la fortune, bénéficiaire du revenu minimum d‟insertion Voir à ce sujet : Direction de développement des médias (D.D.M.), dossier thématique sur la redevance. 227
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dégrèvements sont imputés sur le programme Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État de la mission Remboursements et dégrèvements 3.1.1.1.3- Le recouvrement Compte tenu du contexte historique de la redevance, il n‟est pas étonnant que son recouvrement ait souvent été confié, dans le passé aux PTT nationales. Mais cette solution a perdu sa légitimité avec l‟évolution de la nature de la redevance, qui d‟une taxe de télécommunication est devenue un outil de financement de la radiodiffusion, la séparation des fonctions réglementaires et opérationnelles dans le secteur des télécommunications et les déréglementations des PTT qui sont passés d‟une situation de monopole à une multitude de sociétés commerciales sur un marché libéralisé. Les options de recouvrement qui se présentent actuellement sont les suivantes : - Recouvrement par les diffuseurs eux-mêmes ou par un organisme de recouvrement spécialement créé par eux même, comme c‟est le cas en Allemagne, en Norvège, en Suède, au Danemark, en Croatie, en Slovaquie, en Slovénie et en Israël. Le cas de l‟Allemagne est à cet égard intéressant, la redevance y est perçue par une centrale crée par les diffuseurs publiques « la G.E.Z » (Gebühreneinzugs zentrale der öffentlich-rechtlichen Rundfunkanstalten in der Bundesrepublik Deutschland « Centrale de collecte de la redevance des établissements de radiodiffusion de droit public en république fédérale d'Allemagne »). Depuis janvier 2010, la redevance est fixée à 17,98 € par mois et par foyer (215,8€ /an) 229. En moyenne 7,5% de foyers sont exonérés. Les établissements formulent eux-mêmes leurs demandes de financement qui sont ensuite examinés par une commission d‟experts indépendants, à la fois des diffuseurs et des pouvoirs politiques, la D.E.F (commission pour l‟évaluation des besoins budgétaires des diffuseurs). - Recouvrement par les pouvoirs publics, notamment l‟administration fiscale comme c‟est le cas en France ou bien les autorités de régulation comme en Belgique. - Perception par des tiers chargés par la loi du prélèvement de la taxe, notamment les postes/télécommunications comme c‟est le cas de la Pologne, la Hongrie, la république Tchèque et l‟Italie ou les compagnies d‟électricité lorsque la taxe est calculée au prorata du montant de la facture d‟électricité. Cette forme particulière de la perception de la redevance a été adoptée par les pays, connaissant un taux élevé de fraude, pour améliorer le rendement de la redevance. C‟est le cas de la Grèce, la Turquie, la Macédoine, l‟Algérie, l‟Egypte, Le Maroc, La Tunisie, etc. - Perception par des tiers mandatés à cet effet dans le cadre d‟une procédure de marché public. De ces différentes méthodes de recouvrement, le recours aux compagnies d‟électricité semble être un bon moyen pour augmenter le rendement de la taxe, notamment dans les pays dont l‟infrastructure administrative est peu développée et qui connaissent un taux élevé de fraude. Pour le Maroc, ce système a été institué par la loi de finances de 1985 dans son article 17 qui stipule : “ Il est institué une contribution au profit du budget annexe de la RTM, à la charge des abonnés du réseau d‟électricité pour usage domestique ou commercial. 229
Signalons que depuis début janvier 2013, le système de paiement de la redevance audiovisuelle (Rundfunkbeitrag) a changé en Allemagne. Celle-ci n‟est plus perçue sur chaque récepteur radio, télévision et/ou ordinateur détenu mais elle est prélevée par foyer, quel que soit son équipement et le nombre de personnes qui y vivent. Ainsi, il n‟existe plus qu‟un seul et unique montant perçu par foyer (17,98 € par mois). Les recettes de la redevance sont réparties depuis 2010 comme suit : 7,5 milliards d‟euros pour ARD (5,5 milliards), ZDF (1,8 milliards) et la Deutschlandradio (près de 200 millions) ?
100
- Le taux de cette contribution est fixé à 5 centimes par KWh consommé par les abonnés… - La contribution est recouvrée par l‟office national de l‟électricité et par les régies autonomes de distribution d‟eau et d‟électricité dans les mêmes conditions que celles prévues pour le recouvrement du montant de la facture relative à la consommation d‟électricité. - La contribution n‟est pas due si la consommation facturée pour une période d‟un mois est inférieure ou égale à 50 kWh. Le montant de la contribution ne peut excéder 10 DH par période de facturation de un mois et les RADE sont tenus de verser au trésor à la fin de chaque mois, les sommes effectivement perçues par eux au titre de la contribution. - Les conditions de la rémunération des services par l‟ONE et les RADE, à l‟occasion du recouvrement de la contribution sont déterminées par conventions passées entre l‟Etat et les organismes précités. ”230 Cette contribution est appelée, depuis juillet 1997 (la loi des finances 1997-98), Taxe pour la Promotion du Paysage Audiovisuel National (TPAN) et son taux à être revalorisé. “ Le taux de la taxe est fixé par kWh comme suit : -
la tranche de 0 à 100 kWh : 0,10 DH
-
la tranche de 101 à 200 kWh : 0,15 DH
-
au-dessus de 200 kWh : 0,20 DH
Toutefois, le montant de la taxe ne peut excéder 100 DH par période de facturation d‟un mois… ”231 Il importe de souligner que dans la loi de finances de 2012, on a élargi le périmètre des exonérés, puisque désormais est exonéré « tout abonné dont la consommation la facturée pour une période d‟un mois est inférieur ou égale à 200 KWh, ainsi que les ménages à faible revenu disposant d‟un compteur commun et les bénéficiaires du programme d‟électrification rural global.232 Le produit de cette taxe ainsi que ceux provenant de la taxe sur la publicité radiodiffusée233 (instituées par l‟Art. 20 de la même loi de finance) sert à alimenter le fonds pour la promotion du paysage audiovisuel national. La situation de ce fonds en octobre 2013 était la suivante : Tableau N° 50: Situation du compte Taxe pour la Promotion du Paysage Audiovisuel National (octobre 2013)
Fonds collectés TPAN
Dépenses
108.600.946,60 SNRT
100.000.000
Taxe sur la publicité
38.361.430,89 Centre Cinématographique Marocain
75.000.000
Report d’exercices antérieurs
62.525.073,59 MAP
26.000.000
Total
209.487.451,08
Total
230
201.000.000
Bulletin officiel du Maroc, n° 3766 du 2 janvier 1985. Article 19 la loi des finances 1997-98, bulletin officiel du Maroc, n° 4495 bis du 30 juin 1997. 232 Article 10 bis de la Loi de finances pour l'année budgétaire 2012. Numéro 6048, 25 joumada II 1433 (17 mai 2012). 233 Le taux de cette taxe est fixé à 5% du chiffre d‟affaires, hors taxes, réalisé par les organismes chargés de programmer les campagnes publicitaires sur les antennes des stations de radio et de TV. 231
101
Source : Ministère de la communication, présentation du projet du budget du secteur de la communication 2013-14
Le recouvrement par le biais des compagnies d‟électricité risque de devenir problématique et de se compliquer dans l‟avenir en raison de la tendance à la libéralisation du marché de l‟électricité et la remise en cause du monopole. 3.1.1.2 –La répartition de la redevance La redevance, ne finance pas que les radiodiffuseurs. Une partie du produit de la redevance trouve parfois d‟autres affectations servant par exemple à financer les activités des autorités de régulation des médias (Allemagne), des programmes d‟aide aux productions et aux archives audiovisuelles (INA en France) ou l‟extension de la couverture des transmissions terrestres (l‟exemple de TDF dans le passé) ou encore à alimenter le budget général de l‟Etat. Pour ces raisons, de nombreux pays (à l‟exception de l‟Allemagne et le Danemark) ont fait en sorte que les ressources de la redevance n‟aillent pas directement aux radiodiffuseurs publics, mais transitent par le budget de l‟Etat ou pas un fonds spécial. En France, avant la réforme de 2005, le service de la redevance audiovisuelle (S.R.A.) qui était un service de trésor public chargé de la collecte de la redevance, versait le produit de la taxe sur un compte d‟affectation spéciale (n° 90215), inscrit au budget du ministère de l‟économie, des finances et de l‟industrie. Ce compte alimentait, deux fois par semaine, les organismes de l‟audiovisuel public autorisés par le parlement à recevoir la redevance. Les crédits de remboursement des exonérations étaient inscrits au chapitre 46-01 du budget des services généraux du premier ministre et versés au compte d‟affectation spécial. De cette manière, les organismes publics de l‟audiovisuel ne sont alimentés que par le compte d‟affectation spéciale et non par le budget de l‟Etat, à l‟exception des organismes publics de l‟audiovisuel extérieur qui reçoivent un financement public exclusivement (TV5, CFI) ou majoritairement (RFI) imputé sur les crédits budgétaires du ministère des affaires étrangères. Mais depuis 2005, l‟affectation aux organismes du service public de l‟audiovisuel se fait via un nouveau compte d‟avances (Avances à l‟audiovisuel public). Ce compte est crédité d‟une part, du produit de la redevance lors de sa perception en novembre, d‟autre part, des crédits correspondants à la compensation de l‟Etat des dégrèvements pour motifs sociaux. Les versements aux organismes de l‟audiovisuel public sont effectués tous les mois, de manière à ce que la réforme soit neutre pour leur trésorerie. Tableau N° 51 : Evolution de la ressource publique issue de la contribution à l'audiovisuel public (ex-redevance)
Source : DGMIC, in. CNC, l’économie de la télévision 2003-2012, novembre 2012, p.9
102
Schéma 2 : Dépenses de redevance en 2012
Redevance collectée 2816 M€
Frais de recouvrement 28,2 M€
TVA 67,70 M€
France Télévisions 2091,6 M€
2304,54 Montant net de redevance collectée (TTC) 2 787,8 M€
Recettes de redevance disponibles 3290,4 M€
RFI /AEF
Radio France 612,3 M€
165,8 M€
Remboursement de dégrèvement (HT) 502,60 M€
Arte 262,6M€
INA 90,5 M€
Ainsi, les prévisions de 2,8% recettes pour 2012 sont sensiblement identiques à celles inscrites en loi de finances pour 2012, soit 2 816 M€. De ce montant il faut déduire les frais de collecte de la redevance qui s‟élèvent à 28,2 M€ ce qui donne des recettes nettes de redevance d‟un montant de 2787,8 M €. Si on ajoute le remboursement de dégrèvement d‟un montant de 502,60 M€, au total, les ressources allouées par la mission Avances à l‟audiovisuel public aux organismes de l‟audiovisuel public représentent 3 290,40 M€ TTC (soit 3 222,7 M€ hors TVA). Le montant de la redevance finance huit sociétés ou groupes d‟entreprises de l‟audiovisuel public composé de groupe France Télévisions (France 2, France 3, France 4, France 5, et du réseau RFO), d‟Arte France, de Radio-France, de Radio France Internationale (RFI) et de l‟Institut national de l‟audiovisuel (INA). Il est réparti entre elles selon les propositions définies dans le cadre de la loi des Finances. Tableau N° 52: Répartition du produit de la redevance entre les organismes publics (2003- 2012)
103
Source : DGMIC, in. CNC, l’économie de la télévision 2003-2012, novembre 2012, p.10
Il est à signaler que le montant des recettes de la redevance perçu par France TV jusqu‟au 2007 est sensiblement équivalent au coût de la grille du groupe. Ce qui veut dire que chaque euro issu de la redevance est investi dans l‟achat et la production des programmes, ainsi que dans le soutien à la création. Les sommes collectées sont versées aux diffuseurs conformément à la clé de répartition, au fur et à mesure de leurs encaissements. Elles subissent par conséquent des fluctuations des rentrées de la redevance, dues aux variations saisonnières du nombre d‟achats des récepteurs, des dysfonctionnements de l‟économie lors des grèves, ainsi que des comportements des redevables dont les réticences se manifestent souvent par des retards de paiement et la tendance à la fraude, ce qui risque de provoquer des difficultés de trésorerie pour les diffuseurs. 3.1.1.3- Le débat sur l’évolution de la redevance 3.1.1.3.1 - Les avantages et les inconvénients De longue date, la redevance suscite des débats très vifs et des critiques dont certaines méritent d‟être relativisées. Les principaux avantages avancés pour défendre la redevance sont : - Le produit de la redevance est sûr, stable et prévisible, moins volatile que les autres sources de financement. - Le bénéficiaire dépend moins des recettes publicitaires, et donc de la dictature de l‟audimat, et des subventions publiques. Par son caractère automatique, le diffuseur n‟est pas sujet aux humeurs des autorités politiques, ni aux fluctuations des cycles économiques. - Elle garantit au service public l‟assise financière stable dont il a besoin pour planifier et aussi pour prendre certains risques et concevoir des formes plus “ distinctives ” d‟émissions. - Elle crée une relation directe et un lien additionnel entre les diffuseurs et leurs auditeurs et téléspectateurs. Quant aux inconvénients avancés par ses détracteurs, ils sont multiples : - Les recettes sont statiques et le potentiel de croissance est très faible du fait des difficultés à augmenter le taux et, compte tenu d‟une assiette non extensible, puisque dans la majorité des pays, presque tous les foyers sont équipés de récepteurs. - Les hausses du montant de la redevance sont impopulaires et politiquement difficiles à gérer. - En l‟absence de mécanismes adéquats garantissant une prise de décision objective et en toute indépendance, l‟adaptation périodique de la redevance à l‟évolution des besoins des diffuseurs crée une dépendance vis-à-vis des pouvoirs politiques. - Le recouvrement de la redevance est difficile à organiser et donne lieu à un important taux d‟évasion. Selon les données de l‟UER, ce taux est de l‟ordre de 5 à 6 % dans certains pays d‟Europe occidentale (Grande Bretagne, Pays-Bas) et de plus 30% dans les pays d‟Europe centrale et orientale.234 234
UER, Financement de la radiodiffusion du service public, op.cit. p. 13
104
En France, la réflexion sur la redevance et son devenir a fait l‟objet de plusieurs rapports successifs235 qui ont soulevé plusieurs critiques. Ces critiques sont résumées dans le titre que M. Migaud a réservé à la partie concernant la redevance dans son rapport : celle-ci est qualifiée comme “ un exemple d‟impôt archaïque, injuste et coûteux à gérer. ” -
La redevance serait archaïque car la TV n‟est plus consommé en utilisant uniquement un récepteur classique, mais il peut l‟être sur un micro-ordinateur via l‟Internet, ou sur un moniteur vidéo, voire un téléphone portable, sans pour autant être redevable.
- La redevance serait injuste car : . C‟est un impôt non progressif et d‟une grande complexité : les défauts sont multiples et bien connu, les règles d‟exonération sont trop complexes et mal articulés et son assiette est contestable pour de nombreux motifs. . C‟est un impôt fraudé qui fait l‟objet d‟un taux de fraude très élevé pour une fiscalité moderne. Selon le rapport de l‟inspection générale des finances (IGF), le taux de fraude s‟établissait à 16,7% dont 10,9% pour les résidences principales et 65,9% pour les résidences secondaires. - La redevance serait particulièrement coûteuse à gérer : D‟une part, sa nature parafiscale interdit l‟utilisation des pouvoirs de communication, prévus en faveur des services fiscaux vis-à-vis d‟autres sources de renseignement, ou l‟organisation de contrôle sur place permettant de vérifier l‟existence ou non d‟un téléviseur dans le logement considéré. D‟autre part, son faible montant rend difficile le recours aux processus de recouvrement forcés qui s‟avéraient rapidement disproportionnées. Toutes ces raisons font que sa collecte par un service spécialisée conduit à un coût proportionnel excessif. L‟IGF a estimé le coût total de la perception de la redevance à 140 M€. Cette somme inclut le coût direct du service de la redevance (70 M€) ainsi que le coût du recouvrement contentieux et l‟imputation des frais généraux du ministère de l‟économie, des finances et de l‟industrie. 3.1.1.3.2.3 – Sa réforme en France :l’adossement à la taxe d’habitation Cette réforme s‟est déroulée en deux étapes : - 2004 : année de transition : pour se conformer à la loi organique, le projet de loi de finances 2004 prévoyait que la redevance actuellement taxe parafiscale, est remplacée par une “ imposition de toute nature ”236, mais sans modifier l‟imputation du produit correspondant, ni le taux, ni les bénéficiaires de son produit. Les principaux changements proposés visaient l‟octroi au service de la redevance de nouveaux moyens de contrôle pour lutter plus efficacement contre la fraude à travers trois mesures principales : le croisement des fichiers des opérateurs de TV payantes avec les fichiers du service de la redevance; la taxation 235
Citons notamment ceux de : - Didier MIGAUD, Le recouvrement de l’impôt, rapport d‟information de la mission d‟évaluation et de contrôle de la commission des finances de l‟Assemblée Nationale, document n° 2543 du 12 juillet 2000. - André BARILARI, Le coût, l’efficacité et les perspectives d’évolution du service de la redevance, rapport d‟enquête de l‟Inspection générale des Finances, n° 99M 029-01, Novembre 1999. - Patrice MARTIN-LALANDE, Rapport sur le projet de loi des finances 2003,op.cit. - Claude BELOT, Le financement de l’audiovisuel, rapport d‟information (n° 162) du Sénat, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, du 18 janvier 2000. 236 P. MARTIN-LALANDE, rapport n° 1110 sur la loi des finances 2004, op.cit.
105
systématique des résidences secondaires (par la suppression pour les récepteurs de ces résidences de l‟obligation de détention permanente, source importante de fraude); le renforcement des sanctions applicables en cas de fraude. L‟efficacité de ce programme de contrôle s‟est heurtée cependant à un obstacle juridique, car la commission nationale de l‟informatique et des libertés a émis un avis défavorable sur le principe d‟une transmission exhaustive et systématique au fisc des fichiers des abonnés à la TV payante. Aussi, lors de l‟examen à l‟Assemblée Nationale, ce dispositif a été refusé et la question du devenir de la redevance restait entière. Selon P. Martin-Lalande, rapporteur spécial, “ la consolidation de la redevance en tant qu‟imposition de toute nature, conservant l‟essentiel des caractéristiques les plus critiquées et les plus critiquables, ne peut être considéré comme une solution définitive ”237. Aussi, la commission des finances a pris position en faveur d‟une réforme profonde de la redevance à compter de l‟exercice 2005. - 2005 : l‟adossement à la taxe d‟habitation : la loi de finances pour 2005 (n°2004-184 du 30 décembre 2004) réforme la redevance audiovisuelle en adossant son recouvrement à celui de la taxe d‟habitation et c‟est les trésoreries qui sont, désormais, chargées de ce recouvrement238. Les caractéristiques essentielles de la redevance sont maintenues, notamment la détention d‟un appareil récepteur de télévision ou d‟un dispositif assimilé permettant la réception de télévision au sein du foyer, quel que soit le lieu de résidence (principale ou secondaire). La redevance est désormais gérée à partir du fichier de la taxe d‟habitation, collectée par les centres d‟impôt en charge du recouvrement de ces taxes : les avis de paiement des deux taxes figurent sur un même document, où elles sont clairement distinguées, et leur règlement fait l‟objet d‟un paiement unique, ce qui permet de réaliser des économies de gestion substantielles en émettant et en traitant un seul titre interbancaire de paiement. Comme existait déjà pour la taxe d‟habitation, ce paiement peut être plus largement fractionné et mensualisé.239 Cette réforme présente trois avantages : La réduction du coût de gestion de la collecte de la redevance : les économies de coût de collecte obtenues grâce à la réforme de la redevance s‟élèvent à environ 100 millions d‟euros, dont environ 50 millions d‟euros au titre des frais prélevés par l‟État et environ 50 millions d‟euros au titre des autres frais (coûts immobiliers pour 1.400 agents, coûts d‟huissiers…). L‟alignement des dégrèvements de redevance audiovisuelle pour motifs sociaux sur ceux de la taxe d‟habitation, ce qui permet d‟une part, de simplifier et de rendre plus lisible le régime des dégrèvements de redevance, et d‟autre part, d‟élargir très significativement le champ des personnes exonérées. Le renforcement des contrôles à travers la conservation des moyens de contrôle de l‟ancien système et l‟instauration de nouvelles mesures pour améliorer le recouvrement et lutter efficacement contre l‟évasion fiscale. Ainsi, le nouveau système maintient l‟obligation de déclaration de vente d‟un téléviseur incombant aux vendeurs, mais il ouvre également la possibilité à l‟administration fiscale de 237
Ibid. Voir la présentation générale de la réforme de la redevance (loi de finances 2005) dans le dossier thématique sur la question, dans le site de la Direction du développement des médias (www.dgmic.gouv.fr) 239 Rappelons que le taux de mensualisation pour la taxe d‟habitation est aujourd‟hui de l‟ordre de 30 %. Le redevable y gagne donc en simplification des formalités et en facilités de paiement 238
106
demander aux établissements diffuseurs ou distributeurs de services payants de programmes de télévision les éléments des contrats de certains de leurs clients strictement nécessaires à l‟établissement de l‟assiette de la redevance audiovisuelle (identité du client, adresse, date du contrat). Désormais, toute personne physique imposée à la taxe d‟habitation au titre d‟un local meublé affecté à l‟habitation (que la résidence soit secondaire ou principale), doit s‟acquitter de la redevance s‟il détient un ou plusieurs appareils de télévision ou assimilés au 1er janvier de l‟année. Cette condition de détention d‟une télévision est regardée comme remplie dès lors que le contribuable n‟aura pas indiqué dans sa déclaration de revenus ne pas détenir de téléviseur dans sa résidence principale ou secondaire.240 Ainsi, on constate de ce qui précède, que les difficultés de recouvrement de la redevance incitent les Etats à chercher des voies pour pallier aux défauts du dispositif de collecte. Pour certains, le fait de payer la facture d‟électricité, voir la taxe d‟habitation semble être générateur de paiement de la redevance audiovisuelle. Pour d‟autres, comme les PaysBas, ils ont préféré le remplacement de la redevance par une taxe spéciale ajoutée à l‟impôt sur le revenu.241
3.1.2 - Le produit des abonnements aux services payants La contribution volontaire, que sont l‟abonnement ou le paiement à la consommation, s‟inscrit dans une logique qui ne relève plus de l‟économie traditionnelle de la TV, mais d‟une logique économique semblable aux autres secteurs économiques où le prix est déterminé par l‟offre et la demande. Ce lien direct entre l‟offre et la demande est un facteur plein de conséquences sur le fonctionnement de la TV payante et sur sa stratégie de programmation. La formule “ pay per view ” (PPV) où le téléspectateur paye en fonction de sa consommation est l‟aboutissement de cette logique. Le péage expose la programmation et les ressources des chaînes à la sanction du marché. En contrepartie, c‟est un moyen de financement direct qui exclut toute médiation. Cette forme de financement de la TV s‟est répandue grâce au développement des canaux de communication par le câble et le satellite qui ont facilités l‟individualisation de l‟usage des médias à l‟heure où, après une ère de communication massive et indifférence de la télévision hertzienne généraliste, le marché avait besoin de se segmenter242. De la vient le succès des différents formules de TV à péage dans le monde et plus tard celui de la consommation à la séance (PPV)243. A l‟origine, ce système a été lancé aux Etats Unis sur les 240
Concrètement, le contribuable ne détenant pas de télévision coche une case nouvelle dans la déclaration de revenus, déclarant ainsi sur l‟honneur ne pas détenir de télévision au 1 er janvier de l‟année, que ce soit dans sa résidence principale ou dans sa résidence secondaire 241 Entré en vigueur le 1/1/2000, ce système garantit au secteur public un montant fixe de financement indexé au taux d‟inflation et intégré dans l‟impôt sur le revenu. 242
R. BONNELL, La vingt cinquième image, op.cit. p. 399. Voir à ce sujet : . J.W. OPPENHEIM, Code : TV à la carte, op.cit. . R. BONNELL, La vingt cinquième image, op.cit. . Josette BONTE, La télévision à la carte aux Etats-Unis, PUF, collection que sais-je ? N° 3063, 1996. * On peut considérer que c‟est avec le lancement de H.B.O (1972) du groupe TIME que naît la TV payante bien que la première expérience remonte à 1966 (STV). 243
107
chaînes thématiques distribuées par câble* et elle s‟est répandue ensuite en Europe et dans le reste du monde dans les années 80 avec le lancement de Filmnet en Finlande (1982), Téléclub en Suisse allemande (1983) de Canal+ en France, de Première en Angleterre, de Filmnet en Hollande et Belgique (1984), de M-Net en Afrique du Sud, de VCC en Argentine, de Filmnet au Danemark (1986) etc. Son développement est fondé sur la diversité des services offerts, la particularité de la programmation, ainsi que la satisfaction des abonnés qui doivent mensuellement s‟acquitter de leurs abonnements pour recevoir les programmes de leurs choix. Il y a un lien étroit entre le taux de l‟abonnement et le taux de pénétration de la chaîne. Les recettes totales des chaînes sont donc fonction de ces deux taux, ainsi que du nombre de foyers potentiels. L‟essor du câble et du satellite présente des situations inégales à l‟échelon international. Selon l‟IDATE244, en 2010, le marché mondial de la télévision à péage compte 690.2 millions de foyers abonnés, en hausse de 7.6% sur un an. Avec plus de 490 millions de foyers, le câble concentre l‟essentiel des abonnements. Néanmoins, son poids dans le marché de la Pay TV décline tendanciellement puisqu‟il passe 79.5% des abonnements en 2007 à 71.5% en 2010. A contrario, le satellite accroît sa part relative puisque ce mode de réception passe de 17.8% du total des abonnements en 2007 à 22.3% en 2010, soit 154.1 millions d‟abonnés. Sur la même période, l‟IPTV gagne plus de 24 millions de foyers et sa part relative progresse de 3 points à 5.0%. Enfin, la télévision terrestre passe de 3.6 millions de foyers abonnés en 2007 à 4.5 millions en 2010, avec un poids relatif stagnant autour de 0.6%. La progression en valeur absolue de la télévision terrestre payante s‟explique par le développement en Europe d‟offres sur la TNT, comme au Royaume-Uni, en France, en Italie ou encore en Scandinavie. Graphique N°17 : Foyers abonnés à une offre TV par mode de réception dans le monde (en millions de foyers)
Source : IDATE News 561 du 31 aout 2011
Sur le plan géographique, on constate que, 372.8 millions de foyers souscrivant une offre de télévision à péage dans le monde en 2010 se situaient en Asie/Pacifique (soit près de la moitié des foyers TV de la zone). L'Europe vient en seconde position avec 22,7% de foyers 244
IDATE News 561 du 31 aout 2011
108
abonnés, suivie de l'Amérique du Nord avec 16,7%, de l'Amérique latine avec 5,3% et de la zone MENA avec1.6%. Sur la période 2007-2010, la zone MENA et l'Amérique latine enregistrent les plus fortes progressions, avec une croissance de respectivement 50,0% et 53,1% des foyers abonnés. Sur les marchés plus matures d'Europe et d'Amérique du Nord, les foyers abonnés progressent à un taux de croissance annuel moyen de respectivement 6,8% et 1,5% sur la même période. En Asie/Pacifique, les foyers abonnés ont augmenté de 33,6% entre 2007 et 2010245. Dans la région Europe, Moyen Orient et Afrique du Nord, sur les 129,3 millions de foyers satellite, 51,4 millions (39,7 %) sont abonnés à des bouquets numériques payants, contre 41,9 millions en 2008. L‟Europe de l‟Est enregistre la plus forte croissance avec +63,5 %, passant de 10,7 millions en 2008 à 17,5 millions en 2010 de foyers satellite abonnés à une offre de télévision payante. Ceci reflète l‟essor de nouveaux bouquets sur des marchés jusquelà largement dominés par la réception en clair. Cette croissance est particulièrement forte en Russie, en Pologne, en Roumanie et en Tchéquie.246 La Pologne et la Russie représentent à elles seules respectivement 34,8% et 26,8% des foyers d‟Europe centrale et de l‟Est. Graphique N°18: Nombre de foyers satellite abonnés en Europe de l’Ouest
Graphique N°19 : Nombre de foyers satellite abonnés en Europe de l’Est
245
IDATE News 561 du 31 aout 2011
246
Eutelsat, la réception de la Tv par satellite en Europe, Moyen Orient et Afrique du Nord, Observatoire bisannuel des foyers satellite/câble , septembre 2010.
109
Source : Eutelsat, Observatoire bisannuel des foyers satellite/câble septembre, 2010
En France, à la fin du premier trimestre 2011, on estime à14, 7 millions le nombre de foyers qui recevaient une offre numérique de télévision payante, soit 54,8% des foyers TV. Tableau N°53 : Foyers recevant une offre numérique payante (31 décembre 2011)
Selon le guide des chaînes numériques247, les abonnés à une offre payante de télévision ont un profil sociodémographique sensiblement différent de celui de l‟ensemble des individus équipés de télévision. La différence la plus notable se situe au niveau de la proportion de CSP+ chefs de ménages, qui est très supérieure chez les abonnés ainsi que chez les foyers avec enfants et les classes d‟âge 4-14 ans et 35-49. De même on note une surreprésentation des hommes et que l‟offre payante est plus importante dans les communes rurales. Ainsi, partout où elle a été mise en place, cette forme de financement de la TV a connu un développement rapide notamment dans les années 90. Cependant en raison des difficultés rencontrées par les opérateurs des plates-formes de TV au début du nouveau millénaire et l‟accroissement de la concurrence, les revenus de la TV par abonnement croissent moins rapidement que durant la fin des années 1990. Malgré cela, ils accaparent une part non négligeable des revenus de la TV (31% en Europe et 44% aux Etats-Unis) qui ne cesse de s‟améliorer. Selon l‟IDATE248, les revenus de la télévision à péage progresseront de 21.3% entre 2013 et 2018, pour atteindre 220.2 milliards EUR en 2018. Tableau N°54 : Taux de croissance des revenus de TV par abonnement
Revenus d‟abonnement des 5 grands pays européens (M €) % de croissance
2002 14,5
2003 15
2004 16
2005 18,2
2006 19,3
2007 17,5
2008 18,7
2009 19,6
-
3,44
6,6
13,7
6,04
-11,9
6,8
4,8
2010 2011 2012 20,7 21,5 21,7
5,6
3,86 0,93
Source : IDATE
La croissance du marché de la TV à péage en France s‟explique par la remarquable croissance du nombre des abonnés au satellite dont le nombre a été multiplié par près de 7 247 248
CSA, CNC, SNPTV, DGMIC, ACCeS, guide des chaînes numériques, février 2011 IDATE, marché de la TV et de nouveaux services vidéo, décembre 2013,
110
fois de 1986 à 2002. Mais ces dernies années c‟est l‟ADSL qui enregistre des taux de croissance importants. Par conséquent, la TV payante constitue aujourd‟hui la principale dépense audiovisuelle des ménages en France. Les frais d‟abonnement représentent une part importante de leur budget. Ainsi, en 2012 les ménages français ont dépensé plus de 8 milliards d‟euros pour des programmes audiovisuels et cinématographiques. Parmi ces dépenses 3,267 milliards ont été consacrés uniquement aux abonnements à la TV payante (câble, satellite, ADSL, canal+) contre 2,551M€ en 2000. Rapportée par foyer, la dépense annuelle moyenne en programmes audiovisuels et cinématographiques représente près de 293,7 € dont 121,7 € pour la TV payante (41 € en 1990), 74,5€ pour la redevance, 47,6€ pour les achats de places de cinéma et 40,8€ pour les achats et locations de vidéogrammes préenregistrés249. Passant de 27% en 1990 à plus de 41% en 2012, la TV payante s‟est ainsi imposée comme le premier poste de dépenses des ménages dans ce domaine, devant la vidéo, la redevance et le cinéma. Tableau N°55: Evolution des dépenses des ménages français en programmes audiovisuelles En M €
1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 249
Abonnements (1)
0 0 0 0 15 79 273 502 660 825 892 1 063 1 177 1 352 1 475 1 618 1 725 1 804 2 120 2 403 2 551 2 691 2 801 2 841 2 895 2 990 3 157 3 245
Vidéos (2)
79 278 490 517 495 399 479 540 626 758 955 1 135 1 196 1 236 1 282 1 361 1 318 1 280 1 296 1 301 1 051 1 245 1 478 1 772 2 049 1 889 1 737 1 543
Vidéo à la demande (VàD)
Redevance" (3)
/// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// /// 14 29
422 469 559 624 712 817 839 750 740 776 879 941 1 099 1 114 1 179 1 264 1 383 1 396 1 371 1 467 1 572 1 573 1 572 1 603 1 677 1 734 1 763 1 764
Bilan 2012, les dossiers du CNC, n° 326 Mai 2013, p.52
111
Cinéma
430 529 631 671 682 665 674 577 554 561 583 592 601 689 654 690 726 789 913 823 894 1 021 1 030 996 1 139 1 031 1 121 1 062
Total hors VàD
931 1 276 1 680 1 813 1 904 1 960 2 266 2 369 2 579 2 920 3 309 3 731 4 073 4 391 4 589 4 933 5 153 5 269 5 700 5 994 6 068 6 530 6 881 7 212 7 760 7 644 7 778 7 614
Total y compris VàD
931 1 276 1 680 1 813 1 904 1 960 2 266 2 369 2 579 2 920 3 309 3 731 4 073 4 391 4 589 4 933 5 153 5 269 5 700 5 994 6 068 6 530 6 881 7 212 7 760 7 644 7 792 7 643
2008 3 351 1 414 53 2009 3 256 1 406 97 2010 3 267 1 402 152 2011 3 335 1 232 219 2012 3 340 1 121 252 /// : absence de résultat due à la nature des choses.
1 863 1 892 1 949 2 007 2 045
1 142 1 236 1 309 1 374 1 306
7 770 7 790 7 927 7 948 7 812
7 823 7 887 8 079 8 167 8 064
(1) : Canal+, câble et satellite (estimation). (2) : données GfK-SEVN retraçant les achats et locations de vidéogrammes pré-enregistrés. Jusqu’en 2003, le périmètre des ventes intègre les hypermarchés, les grandes surfaces spécialisées et la vente par correspondance. À partir de 2004, les ventes en kiosque sont exclues. (3) : Contribution audiovisuel public (part "audiovisuel") ex-redevance audiovisuelle, part télévisuelle
Source : IDATE- Canal-GVK-SEVV-LFI-NPACNC,
Graphique N°20: Evolution des dépenses des ménages français en programmes audiovisuelles
Historiquement, la TV payante en France s‟est imposée d‟abord par la diffusion hertzienne terrestre avec le lancement en mars 1984 de la chaîne cryptée Canal+. Aujourd‟hui, elle utilise quatre supports de diffusion numérique250 : l‟hertzien terrestre, le câble, le satellite, l‟ADSL. Canal+ est la première chaîne en Europe à faire le pari d‟une programmation payante consacrée très majoritairement au cinéma et sport, et qui a rencontré le plus de succès. Ainsi le nombre total d‟abonnés à Canal+ France, qui inclut les clients de l‟opérateur en France métropolitaine mais aussi dans les DOM et en Afrique, s‟élevait en 2012 à 11,4 millions, dont 5,5 millions d‟abonnés à Canal+ et 5,9 millions à CanalSat. En 250
A partir du 26 novembre 2011, il y a eu extinction totale de l‟analogique
112
France, le groupe Canal+ compte 9,7 millions d‟abonnés à ses offres de télévision payante en 2012, en recul de 0,8 % par rapport à 20011 (9,8 millions). Sur un chiffre d‟affaires total des chaînes payantes de 3 342 M€, Canal + en représente plus de la moitié (1 878M€) soit 19,8% du chiffre d‟affaire total du secteur de la TV (9 473M€)251. Tableau N° 56 : Evolution du chiffre d’affaires de Canal+ (M€)
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
CA abonnements Publicité/ parrainage Autres produits Total
1 410
1 445
1 432
1 392
1 348
1 377
1 466
1 581
1 636
1 603
1 595
1653
1680
101,0
72,0
73,0
68,0
84,0
91,0
99,0
111,0
128,0
132,0
148,0
159
161
78,0
62,0
71,0
17,0
18,0
44,0
47
48,0
49,0
40,0
44,0
34,0
37,0
1589
1 578
1 576
1 477
1450
1 512
1 612
1740
1813
1775
1787
1846
1878
Source : comptes annuels
Graphique N°21 : Evolution du nombre d’abonnés et des recettes d’abonnement de Canal+
Les abonnements composent 89,5 % du chiffre d‟affaires de Canal+, contre 8,6 % pour la publicité et 2,0 % pour les autres revenus. La publicité ne représente qu‟une part minime, aussi pour l‟équilibre des comptes, le prix de l‟abonnement doit-il être à un niveau permettant de couvrir la quasi-totalité des changes252. Canal+ a exporté son modèle aussi bien en Espagne (avec une grande réussite), qu‟en Belgique (avec une réussite mitigée), sans compter des incursions en Afrique (Canal horizon) et dans certains pays de l‟Europe centrale (Pologne). D‟autres expériences des chaînes payantes n‟ont pas rencontré le même succès (Telepiù en Italie, Filmnet en Suède, 2M au Maroc, etc.) Signalons enfin que la télévision payante a été marquée en 2012 (juin) par l‟arrivée d‟un nouveau venu sur le marché, le bouquet BeIN Sport (groupe Al Jazzera) à 11€. Composé de deux chaînes et huit canaux événementiels dédiés au sport, il a pu acquérir de nombreux droits sportifs (Euro 2012, Jeux Olympiques, Ligue 1, Ligue des Champions, NBA, etc.) et affirme compter un million d‟abonnés moins de six mois après son lancement. Si on 251
CNC, l’économie de la télévision 2003-2012, op.cit. En 2012, les recettes d‟abonnement Canal+ sont en hausse de 1,6 % à 1 680 M€, en raison de l‟augmentation des tarifs d‟abonnement. 252
113
ajoute à cela, la concurrence des offres gratuites et probablement bientôt de Netflix et des bouquets quasi gratuits des FAI ainsi que la montée en puissance de l‟ADSL, le modèle économique de Canal+, essentiellement généraliste, se trouve potentiellement déstabilisé et exigera une refonte pour pouvoir faire face aux mutations en cours et à ces différents défis.
3.2 –La publicité Symbole de la société de consommation, la publicité fait de plus en plus partie intégrante de l‟économie du marché. C‟est un rouage important de l‟économie et elle participe puissamment à son développement. Elle crée des marques, elle les fait vivre, elle contribue à mettre en relation l‟industrie et les services et leurs consommateurs.253 Elle est l‟émanation d‟un type d‟organisation sociale caractéristique des pays industrialisés qualifiée par R. Rochefort de “ démocratie mercantile ”254. Par la multiplication de l‟offre qu‟elle permet, par la diffusion de l‟information économique et par sa contribution à la “ transparence ” des marchés, elle facilite l‟accès du consommateur aux produits et aux marques à un plus grand choix. Elle est un élément essentiel de ce droit de choisir dans une économie de concurrence. Elle est considérée par M. Dagnaud comme : “ Fille de l‟économie de marché, chantre de l‟individualisme et du narcissisme de la petite différence, complice de la communication de masse, elle symbolise une société où les actes de consommation, loin de se résumer à la satisfaction d‟un besoin, incluent plaisir, projection, marque identitaire, immersion dans les mythologies contemporains ”255. Il ne nous appartient pas ici d‟apprécier l‟ensemble du phénomène, nous nous contenterons d‟examiner les aspects économiques généraux renvoyant à l‟abondante littérature sur le sujet pour une étude détaillée. Nous nous attacherons surtout à l‟étude de l‟interaction entre la publicité et la TV, sa place dans le financement des chaînes, l‟interdépendance de leurs rapports et d‟indiquer les points d‟approche et de divergence. Les rapports sont, d‟ailleurs de nature ambiguë et complexe : pour la TV et les autres médias, la publicité est une ressource alors que pour les annonceurs, elle est un investissement256. Aussi, si les intérêts des deux protagonistes convergent souvent, ils ne confondent pas cependant, car l‟un est au service du public et l‟autre au service des producteurs. C‟est dire combien sont fortes les liens réciproques entre les deux intéressés qu‟illustre l‟intégration réussie de la publicité dans le paysage médiatique de plusieurs pays. La publicité est omniprésente dans tous les médias, elle est devenue un partenaire essentiel, joue un rôle prépondérant dans le financement de médias. Tous deux forment un couple indissociable, traversant des périodes de crise et entretenant parfois des relations conflictuelles qu‟illustre d‟ailleurs bien cette expression attribuée à Albert Bayet : “ la presse a une épouse : la liberté, elle a une maîtresse : la publicité ”.
253
“ La publicité au secours de l’économie », in La lettre A.A.C.C. (Association des agences conseils en communication), Novembre 2001. 254 “ Pour se développer, la société de consommation implique une solvabilité aussi générale que possible et contribue de ce fait d‟une certaine manière à la cohésion sociale. C‟est ce qui a permis son démarrage et c‟est indispensable à sa survie. C‟est par ce biais qu‟elle participe au principe démocratique, non pour des raisons politiques, mais pour des motifs de nature mercantile ”, in Robert ROCHEFORT, La société des communicateurs, Paris, O. de Jacob, 1985, p. 98, cité par Monique DAGNAUD, Enfants, consommation et publicité télévisée, in La Documentation française, note et études documentaires, n° 5166 janvier 2003. 255 Monique DAGNAUD, Enfants, consommation et publicité télévisée, op. cit. p. 7. 256 Bien qu‟en comptabilité, la publicité est considérée comme une charge et non comme une dépense qui s‟amortit sauf exceptions, économiquement elle s‟assimile à un investissement. Ainsi, A. GRANGE CABANE définit la publicité comme „‟un investissement par lequel un annonceur s‟efforce de passer un message destiné à un certain public en fonction d‟objectifs ”, in : Publicité et audiovisuel, Presse universitaire d‟Aix Marseille et Economica, 1993, p. 57.
114
3.2.1 - Le marché publicitaire dans son contexte international La publicité dans le monde est un phénomène essentiellement occidental. Pour se rendre compte quelques repères : - Les dépenses de publicité dans le monde ont atteint 557 milliards $ en 2012 soit une augmentation de 3,2 % par rapport à 2011257. L‟essentiel des investissements publicitaires dans les grands médias est détenu par les pays industrialisés. L‟Amérique du Nord arrive en tête avec un marché estimé en 2013 de près de 176,1 milliards de dollars (33,5 % du total mondial) dont plus de 165 milliards pour les Etats Unis (31,6 % du total mondial), suivi par l‟Asie pacifique avec près 130,5 milliards (24,8%), l‟Europe de l‟Ouest avec 117 milliards (22,2% du total), l‟Europe Centrale et Orientale avec près 40,4 milliards (7,7%), l‟Amérique Latine avec près de 36,9 milliards (7% du total), le Moyen-Orient et l‟Afrique du Nord avec près de 12,3 milliards (2,3%). Le reste du monde, qui regroupe la majorité des pays du Tiersmonde, représente à peine 2,3%, soit près de 12,3 milliards de dollars258. Tableau N° 57 : Répartition géographique des investissements publicitaires dans le monde Tableau N° 52 : Evolution du marché mondial publicitaire (TV, presse, radio, cinéma, affichage et Internet - en millions de dollars) Zone (MM$) 2009 2010 2011 2012 Amérique du Nord 156,556 160, 556 164,768 170,475 Dont Etats-Unis 151,519 Europe de l’Ouest 100,327 105,392 109,094 113,116 Asie Pacifique 100,129 107,863 112,877 122,216 Europe centrale et orientale 26,801 18,488 31,332 35,519 Amérique du Sud 25,331 29,140 31,445 33,864 MENA 10,618 11,156 11,166 11,703 Reste du monde 9,432 9,348 10,147 11,169 Marché mondial 428,421 451,943 470,829 498,0625
2013 176,118 165,903 116,926 130,511 40,423 36,909 12,354 12,347 525,587
Source : ZenithOptimedia, Avril 2011 Tableau N°58 : Les dix premiers marchés publicitaires (en M$) La conversion monétaire à 2010 les taux moyens. 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Les dépenses publicitaires USA Japon Chine Allemagne Royaume-Uni Brésil France Australie Italie Canada
2010 151665 46153 26122 23791 18086 14716 12564 11414 10296 9891
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
257
Les dépenses publicitaires USA Japon Chine Allemagne Royaume-Uni Brésil France Australie Russie Canada
2013 165469 47392 39127 25505 19954 18237 13604 13134 12756 11450
Sources : Coe-Rexecode 22.04.2013 | GlobalAdViewPulse - Nielsen - Campaign 22.04.2013 | Irep - France Pub 2012 258 Selon les récents résultats de son étude publié en avril 2014, Zenith Optimedia prévoit que le marché publicitaire mondial renoue avec la croissance puisqu‟il devrait croître de 5,5% en 2014, et de 5,8% en 2015, pour atteindre 6,1% en 2016. Les investissements publicitaires devraient être dopés en 2014 par trois évènements qui profiteront plus particulièrement à la télévision : les JO d'hiver, le Mondial de football et les élections de mimandat aux Etats-Unis
115
L‟évolution des dernières années a été marquée par deux faits majeurs: - La montée en puissance de l‟Asie Pacifique, dopée par la croissance exponentielle du marché chinois. La Chine est désormais classée au troisième rang dans le monde, et s‟approche rapidement du Japon classé deuxième position. - La croissance de la publicité en ligne qui pèse déjà plus lourd que le segment de la publicité magazines et devrait atteindre à l‟horizon 2013 les 94,5 MM$ dépassant la part des journaux. La comparaison entre les différents pays, en tenant compte de la place de la publicité dans le PIB, ne manque pas d‟être éloquente, qu‟il suffit de souligner que dans les pays industrialisés, les investissements publicitaires représentent entre 1,4 et 2,6 % du PIB et qu‟ils représentent à peine 0,6% du PIB au Maroc et près de 1% en Egypte. Autre référence significative pour rendre compte du poids des dépenses publicitaires d‟un pays, est le niveau de dépenses par tête d‟habitant. Il varie de 180 à 300 € en Europe et il est de près de 7 € au Maroc. Tableau59 : Place des investissements publicitaires par rapport au PIB et par habitant. Maroc Tunisie Egypte Japon Europe USA Investissements / PIB 0,6% 0,06% 1% 2,4% 1,5-2,5% 2,7% Investissements/ habitant 7,5 € 2,1 € 60 € € 180-300 € +400 € Source : ZénithOptimédia et Régie 3 Graphique N°22: dépenses publicitaires dans les médias en pourcentage du PIB
Si on se limite aux grands pays industrialisés, les recettes publicitaires dans les grands medias ont évolué comme suit :
116
TableauN°60: Evolution des recettes publicitaires dans les grands médias (en M€)
Zone euro
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
Allemagne
17 618
17 833
19 204
19 169
17 391
18 331
18 779
18 854
France
9 820
9 944
12 070
11 816
10 325
13 65
13 800
13 322
Italie
9 613
9 966
9 511
9 616
8 467
8 817
-
-
Espagne
6 549
7 050
7 998
7 007
5 631
5 850
-
-
PAYS BAS
3 714
3 792
4 670
4 588
3 979
-
-
-
Belgique
2 450
2 488
2 697
2 737
2 749
2 939
-
-
Grande Bretagne
21 237
21 884
20 617
15 255
14 565
16 647
16 942
18 477
USA
132 175
136 228
114 213
112 315
93 010
107 555
105 710
119 114
JAPON
29 961
29 821
28 065
26 915
33 335
32 117
33 131
37 037
CHINE
-
-
-
-
14 165
19 11
25 944
27 735
Hors zone euro
Source : IREP, in, AACC, chiffres clés, 2011 et 2012
On relève ainsi l‟inégale répartition des investissements publicitaires dans le monde, leur concentration dans quelques pays industrialisés et l‟étroitesse du marché publicitaire dans beaucoup de pays sous-développés. Le cas du Maroc est à cet égard significatif. Malgré sa croissance en valeur absolue, puisque le montant des dépenses publicitaires est passé de 40 MDH en 1976 à près de 2,7 milliards en 2005, il reste néanmoins en deçà du niveau souhaité, peu développé, sous investi au regard de certains pays de même niveau de développement et beaucoup insuffisant pour financer les médias. Les causes du sous-investissement sont dues à l‟imbrication de plusieurs facteurs, notamment : L‟investissement publicitaire est dominé par les grandes firmes multinationales ce qui fait qu‟une dizaine d‟annonceurs totalisent 60 % des dépenses publicitaires dans l‟audiovisuel. Les PME, qui représentent 92 % du tissu économique marocain, demeurent encore en retrait de la communication et de ses outils. La distribution moderne reste encore assez peu développée malgré les efforts déployés ces dernières années. Faiblesse du pouvoir d‟achat et de la consommation. Une profession peu structurée caractérisée par une pénurie de certaines compétences (commerciaux et créatifs) et par un manque de transparence. Absence depuis longtemps d‟outils d‟analyse de référence 3.2.2- L’importance des recettes publicitaires dans le financement de laTV 259 259
Il importe de souligner l‟existence de divergence dans les chiffres relatifs aux recettes publicitaires de la TV. La rémunération des différents intermédiaires (agences de communications, les régies …) correspond souvent à l‟écart entre les dépenses des annonceurs et les recettes effectivement perçues par les chaînes. D‟un autre côté, les évaluations disponibles sur les recettes publicitaires présentent, sous des intitulés identiques, des chiffres qui
117
La vente d‟espaces publicitaires est dans beaucoup de pays la source principale des revenus de la TV, et sa part dans le chiffre d‟affaires des chaînes tend à croître. Le développement de la TV payante n‟a pas réduit le poids de la publicité dans le financement de la TV, et contrairement à plusieurs prévisions, l‟Internet n‟a pas non plus produit des effets négatifs et n‟a affecté que faiblement la structure du marché publicitaire. Bien entendu, la TV n‟est pas le seul média à bénéficier de la publicité, d‟autres la concurrencent. Les publicitaires distinguent habituellement entre les grands médias qui comprennent outre la TV, la radio, la presse, l‟affichage (publicité extérieure) et le cinéma, et les “ hors média ” tels que la publicité sur les lieux de vente (PLV), le mailing, les envois à domicile, la promotion des ventes, la publicité directe (ou marketing direct), les jeux, l‟envoi de produits gratuits, les foires, salons d‟exposition, l‟insertion dans les annuaires etc. Il s‟ensuit qu‟au niveau de la répartition de ces investissements, on peut dégager deux constats : d‟une part, dans l‟ensemble des pays européens à l‟exception de l‟Italie, la presse continue encore à dominer le marché des médias, puisque sa part, malgré sa régression au profit de la TV, représente encore près de 50% des investissements dans les médias, d‟autre part, le hors médias accapare une part importante des dépenses des annonceurs qui dépasse dans plusieurs cas les 50%. Tableau N°61: Evolution des recettes publicitaires dans les grands médias Journaux Magazines Télévision Radio Cinéma De plein air Internet
2009 97354 43776 163484 31917 2099 27830 54700
2010 95945 43810 179601 32259 2310 29926 63690
2011 93750 43201 189412 33025 2440 31721 72176
2012 93253 43094 202712 34397 2593 34042 82818
2013 92892 42992 214968 35604 2746 35689 94967
* Total
421161
447541
465724
492910
519857
Source : ZénithOptimédia Le déséquilibre entre les médias et le hors média est dû en partie à la différence de leur statut : la publicité dans les médias est fortement réglementée, celle dans le hors média l‟est beaucoup moins. Elle s‟explique aussi, selon une étude de la CSA, par un développement des stratégies pluri médias par rapport au tout télé : « la progression du hors média confirme une certaine redistribution des investissements publicitaires des annonceurs, au profit d‟action plus ciblées que celles que permettent les grands médias nationaux »260. Les conséquences de cette évolution sur les recettes publicitaires de la TV restent pour l‟instant limitées dans la mesure où elles ne se traduisent pas par une baisse globale de ces recettes. Le déséquilibre au sein des médias s‟explique notamment par les conditions d‟accès au marché publicitaire où dans maints pays les contraintes et les limitations imposées à la TV sont très importantes.
correspondent à des définitions, des typologies, des nomenclatures différentes, sans que l‟on puisse toujours percevoir l‟origine des discordances constatées : recettes brutes ou nettes ? provisoires ou définitives ? évaluations comptables ou prévisions ? etc. A cela s‟ajoute les incertitudes dues à des différences de méthodologie concernant le mode de recueil de l‟information : exploitation du bilan, réponse à un questionnaire, enquête par sondage…Aussi, si on ne prend pas garde, l‟analyse peut être biaisée. Il faut donc prendre les chiffres comme des indicateurs de tendance et les situer dans leur contexte. 260 CSA, “ Audiovisuel et publicité ”, in la Lettre du CSA, n° 106, juillet 1998.
118
3.2.2.1-Cas du Maroc Au Maroc, la structure du marché publicitaire se distingue de celle des pays européens, par la prépondérance des investissements via les médias qui représentent, en 2005, 53,2% du total des dépenses publicitaires réalisées au cours de cette année, contre 46,8% pour le hors média. La TV détient une place privilégiée puisqu‟elle occupe la première place avec 56,9% des parts de marché médias et plus de 30% du total des investissements publicitaires. Tableau N°62: Evolution des investissements publicitaires en millions dirhams 1988 1996 2001 2005 Montant PDM Montant PDM Montant PDM Montant PDM 106 53 290 38,67 640 32 840,0 30,3 Télévision 30 15 98 13,o7 254 12,7 295,3 10,6 Presse 24 12 45,5 6,07 102 5,1 110,7 4,0 Radio 7 3,5 25,3 3,37 145 7,25 225,9 8,1 Affichage 0,8 0,4 1,2 0,16 4 0,2 4,4 0,2 Cinéma 167,8 83,9 460 61,33 1145 57,25 1476,3 53,2 Total grand médias 32,2 16,1 290 38,66 855 42,75 1298,7 46,8 Total hors médias 200 100 750 100 2000 100 2775 100 Total général Source: Régie3 Ces estimations diffèrent de celles fournies par le Groupement des Annonceurs du Maroc (GAM) qui avancent des montants très élevés, qu‟il faut à notre avis relativiser, dans la mesure où ils proviennent d‟un travail de pige (relevé systématique) qui ne tient pas compte des remises concédées par les médias ni des espaces offerts gratuitement et dont la valeur peut atteindre jusqu‟à 50% notamment au niveau de certains médias. Graphique N°23 : Evolution des investissements publicitaires bruts par média entre 2006 et 2010 (en Kdhs)
Source : imperium Media
119
Graphique N°24 : Evolution des investissements publicitaires bruts par média au Maroc (en DH)
Source : GAM/ IMPERIUM
Une comparaison de la structure du marché publicitaire marocaine avec celle de certains pays développés fait ressortir les caractéristiques suivantes : Une structure de répartition des investissements publicitaires stable depuis plusieurs années ; La prédominance de la part de la TV ; La régression de la part de la presse au profit de la radio et de l‟affichage ; Le Maroc est, apparemment, le seul pays au monde à consacrer à l‟affichage une part très importante des investissements publicitaires (20,3 %) ; La radio avec 23,43% de part de marché occupe une place supérieure à celle qu‟on observe dans ces pays ; La place du cinéma ne cesse de se détériorer. Du fait de fluctuations conjoncturelles, la progression de recettes publicitaires n‟a été ni régulière, ni homogène. D‟une manière générale, la TV a beaucoup moins souffert que les autres médias des retombées des crises économiques sur le marché publicitaire. On peut distinguer dans l‟évolution des rapports entre la TV et la publicité au cours des dernières années, quatre périodes aux profils sensiblement différents : - 1988-2000 : cette période est marquée par un essor rapide des investissements publicitaires à la TV, alimenté notamment par l‟explosion des budgets publicitaires des opérateurs de la téléphonie mobile. Ainsi, de 1991 à 2001, en 10 ans, les recettes publicitaires de la TV ont été multipliées par quatre. - 2001-2003 : tassement puis recul des investissements publicitaires en raison d‟une récession de l‟activité économique, un enlisement de la bourse, en plus du marasme provoqué par l‟attentat du 11septembre, etc. - 2004-2010 : renouement à partir de 2004 avec une croissance à deux chiffres (près de +30%), due à une conjoncture favorable (JO d‟Athènes, championnat d‟Europe des Nations 2004, Coupe d‟Afrique des Nations), et qui s‟est relativement confirmée en 2005 (+ 11%). 120
-
2011-2013 : tassement puis recul des investissements publicitaires suite à la crise économique et du marasme boursier
Les recettes publicitaires de la TV ont toujours connu une croissance plus forte que les autres médias sauf en 2009. Le financement de 2 M est assuré pour l‟essentiel par les recettes publicitaires dont le montant a plus que doublé entre 2003 et 2008 et qui représentaient plus de 80% du financement de la chaîne en 2007 et 100% en 2008, alors que la contribution de l‟Etat restait minime et se fait notamment par le biais des versements du Fonds de soutien à l‟audiovisuel dont les montants ont atteint jusqu‟à 2007 un cumul de plus de 1,12 milliards DH. Dans son contrat programme signé avec l‟Etat en 2010, pour une période de 4ans, il est prévu un financement public de 7% tablant pour la publicité pour financer le reste. Tableau N°63 : Evolution des principaux indicateurs financiers de 2M (2003-08)
Source : Rapport de La cour des comptes, p.287
Pour la SNRT, le financement est assuré pour une grande part par les fonds publics. Les recettes publicitaires représentaient un peu moins de 20% de son budget de fonctionnement. Dans son contrat programme de 3 ans avec les pouvoirs publics, il est prévu un financement par la publicité à hauteur de 15 à 16% et autour de 85% comme subvention publique. Ainsi 84% du budget d‟investissement 2014 du ministère de la communication revient à la SNRT et 6,19 % à 2M. Graphique N°25 : Répartition du budget d’investissement 2014 du ministère de la communication
121
La progression des recettes publicitaires de la TV s‟explique par l‟augmentation continue de la durée des espaces publicitaires qui, en ce qui concerne 2M, a progressé de près de 53% entre 1999 et 2001, passant d‟un volume quotidien moyen de 30mn40s à près de 46mn46s. Cette progression est particulièrement nette sur la tranche horaire 19h-22h (access prime time et prime time) qui mobilise plus de 37% du temps d‟antenne alloué à la publicité 3.2.2.2 – Cas de la France La publicité télévisée qui drainait en 1987 mois de 25% des recettes publicitaires des grands médias, en mobilise en 2012 plus du tiers (35%( des dépenses des annonceurs dans les grands médias). En 2012, le marché publicitaire plurimédia a atteint 27,888 milliards d‟euros bruts, dont 9,8 milliards générés par la TV. Graphique 26 : Parts de la TV dans les investissements publicitaires
En 2012 la télévision confirme sa place de premier média publicitaire et demeure le média de référence en France. Graphique 27 : Répartition des investissements publicitaires selon les médias
122
Il est nécessaire de rappeler que si l'évolution des investissements plurimédia, mesurés dans leur majorité en données brutes (prix publiés appliqués aux volumes commercialisés) donne une indication importante des tendances et des répartitions des investissements par média, il convient néanmoins de rester prudent dans l'interprétation de ces données qui diffèrent des chiffres nets (prix effectivement payés par l'annonceur au support média après remises), dont les écarts peuvent être significatifs en fonction des médias, et qui peuvent aussi évoluer en fonction de la conjoncture économique comme cela apparait dans le graphique suivant : Graphique N°28 : Evolution des recettes publicitaires des chaines
Source : IREP (net), Kantar Media (brut), in. CNC, économie de la TV, op.cit., p12.
Ainsi entre de 2007 à 2012, en termes brut, les investissements publicitaires (hors parrainage) de la télévision ont augmenté de 34,3 %, soit 2,3 milliards d'euros supplémentaires, principalement au bénéfice des nouvelles chaînes de la TNT, mais en termes net, les recettes publicitaires des chaînes de télévision ont diminué de 8,5 % tombant de 3,6 milliards d‟euros à 3,33 milliards. Du fait de fluctuations conjoncturelles, la progression de recettes publicitaires n‟a été ni régulière, ni homogène. D‟une manière générale, la TV a beaucoup moins souffert que les autres médias des retombées des crises économiques sur le marché publicitaire, notamment celui qui a frappé l‟économie mondiale au début des années 90 en conséquence de la première guerre du Golfe. On peut distinguer dans l‟évolution des rapports entre la TV et la publicité au cours des dernières années, quatre périodes aux profils sensiblement différents :261 - La 1ère période (1987-92) est celle qui s‟ouvre avec la création de la Cinq et de M6 et la privatisation de TF1. Elle est marquée par une vive croissance de l‟offre publicitaire et une rapide progression des investissements publicitaires à la TV. Elle a surtout bénéficié aux chaînes privées, mais elle s‟est avérée globalement insuffisante pour financer l‟ensemble des chaînes. Son infléchissement à partir de 1990 a participé dans la disparition de la Cinq. - La seconde période (1992-97) a suivi la disparition de la Cinq, avec l‟arrivée d‟ARTE puis de la Cinquième. On est alors passé de 3 chaînes privées et 2 chaînes publiques à 2 chaînes privées et 4 chaînes publiques. Cette période se caractérise par une croissance beaucoup plus modérée des recettes publicitaires de la TV, en dépit d‟une forte augmentation 261
Pour plus de développement concernant les deux premières phases, voir : CSA, Audiovisuel et publicité op. cité.
123
de la durée des espaces publicitaires offertes, notamment sur les chaînes publiques. “ Le redéploiement des investissements des annonceurs sur quatre chaînes généralistes au lieu de 5 a cependant permis à chacune d‟elles, prise isolément, de connaître une forte progression de son chiffre d‟affaires publicitaire en dépit de la morosité de l‟environnement 262 économique ”. - De 1999 à 2008, une nouvelle période est entamée, caractérisée par un nouveau défi pour les chaînes généralistes, et qui trouve son origine dans les mutations en cours dans le paysage audiovisuel mondial, et qui a eu des effets sur le rythme de croissance du chiffre d‟affaires des chaînes. Ces mutations ne concernent pas que la France, mais l‟ensemble des pays. Trois facteurs contribuent dans ce sens : . La montée en puissance des chaînes thématiques appelées à attirer une part de plus en plus importante de l‟audience et donc des recettes publicitaires au détriment des chaînes généralistes. . Les perspectives ouvertes par la TV numérique hertzienne ainsi que l‟émergence de nouveaux supports et de nouvelles formes de publicité issue de la convergence PC- TV Internet attirant d‟ores et déjà une part significative des budgets publicitaires. . Augmentation, fin décembre 2008, de la durée moyenne de publicité, de 6 à 9 minutes pour les «chaînes historiques » et de 9 à 12 minutes pour les chaînes du câble et du satellite ainsi que pour les nouvelles chaînes TNT ; . La tendance d‟adoption de stratégies publicitaires plus diversifiées, afin de pallier la probable baisse d‟efficacité de la publicité télévisée due à l‟encombrement croissant des écrans et à l‟érosion de l‟audience des chaînes leaders. Le développement des nouvelles technologies participe dans l‟adoption de stratégies d‟actions plus ciblées que celles que permettent les grands médias et à favoriser le marketing direct ou relationnel. La progression des hors média confirme cette redistribution des investissements publicitaires des annonceurs au profit d‟actions plus centrés et ciblées. Dans ce contexte, la publicité traditionnelle est appelée à disparaître progressivement au profit de systèmes innovateurs et de création impulsifs, ce qui pourrait se répercuter négativement sur le découpage budgétaire classique entre médias et production jusqu‟à présent à l‟avantage des premiers.263 - Depuis 2009, signalons deux mesures importantes : . Autorisation en mars 2009d‟une seconde coupure des œuvres cinématographiques et audiovisuelles pour les chaînes privées. . Suppression en janvier 2010 de la publicité entre 20 heures et 6 heures sur les chaînes publiques qui s‟est traduite, au cours de cette année, par l‟augmentation des parts de marché de nouvelles chaines TNT (+7points), de TF1 (+5points) et M6 (+2points).Entre 2003 et 2012, les recettes publicitaires ont diminué de 47,6 % pour France Télévisions. D‟une façon générale l‟impact de ces différents facteurs et mesures sur les ressources publicitaires des chaînes hertziennes, a été limité dans un premier temps puisqu‟il s‟est traduit jusqu‟au 2007 par une croissance moindre et non d‟une diminution globale des recettes publicitaires. Les recettes de la TV ont évolué mieux que les autres médias, avant que le ralentissement de la croissance économique, suite aux différentes récessions qui ont secoué l‟économie mondiale depuis 2001, ne produise un nouveau tassement de la progression des recettes publicitaires. 262
CSA, Audiovisuel et publicité, op.cit. p. 3 Voir à ce sujet, Bernard PETIT, “ la publicité de demain : du spectateur “ otage ” ou spectateur“ acteur ” ? , in La semaine de la publicité, Paris du 24 au 27 novembre 2003. 263
124
Ainsi de 2005 à 2012, les investissements publicitaires bruts (hors parrainage) de la télévision ont augmenté de 55 %, soit 3,2 milliards d'euros supplémentaires, principalement au bénéfice des nouvelles chaînes de la TNT. Entre 2009 et 2012, les ressources publicitaires des chaînes nationales historiques ont progressé de 8% tandis que celles des nouvelles chaînes de la TNT ont progressé de près de108% et celles des chaînes thématiques du câble et du satellite de28 %264.Cependant, la majorité des chaînes de la TNT appartiennent aux groupes historiques (M6 et W9, Canal +) qui récupèrent donc d‟un côté ce qu‟ils perdent dans certains cas de l‟autre. Graphique 29 : Evolution des parts de marché publicitaires selon les catégories de chaines de TV
Le poids de la publicité dans le financement des chaînes historiques n‟a donc pas régressé avec le développement des chaînes payantes puisque 90% des ressources mobilisées auprès des annonceurs allaient aux chaînes nationales (60%) et de la TNT (30%). Cette manne financière profite en premier lieu aux chaînes privées qui accaparent 66,3% du marché publicitaire du petit écran bien que de 2008 à 2012, la part des investissements publicitaires bruts toutes chaînes confondues effectués sur TF1, M6 et France Télévisions (France 2, France 3 et France 5) a diminué. Sur ce terrain TF1, leader en taux d‟écoute, a collecté en 2012 près de 42% des recettes publicitaires nettes de la TV (37% brut)265. Cependant, à mesure que son audience s‟érode, sa part du marché publicitaire tend à régresser, également en raison de la concurrence régulière de la part de M6 (19,4% net et 17% brut de part de marché) et la montée en puissance des chaînes de la TNT qui cumulent 15,7% des recettes totales.
264
CSA, chiffres clés de l‟audiovisuel français, 2ème semestre 2013 Selon R. Le Champion et B. Danard, “ il n‟existe aucun autre exemple en Europe d‟opérateur privé bénéficiant d‟une position aussi forte ” In, TV de pénurie et TV d’abondance, op. cit. p. 57. 265
125
Tableau N° 64 : Evolution des recettes nettes de publicité et de parrainage des chaînes*(en M€)
*France Télévisions à partir de 2008 Source : rapports financiers des chaînes
Dans le secteur public, les recettes publicitaires ne représentent plus en 2012 que près de 12,83 % du total des ressources alors qu‟elles représentaient avant 2008 de 25 à 30%. Deux décisions prises par le gouvernement français au début de ce millénaire ont eu des répercussions de baisse sur les recettes publicitaires : Celle prise en 2000 visant la réduction de la durée maximale des écrans publicitaires par heure glissante (de 12 à 10 mn en janvier 2000, puis de 10 à 8 mn à partir de janvier 2011) qui s‟est traduite au départ (2001 et 2002) par une relative baisse de recettes publicitaires. Celle prise en janvier 2010 interdisant la publicité après 20heures sur les chaînes publiques. L‟évolution comparée des recettes publicitaires et celles de la redevance dans les ressources de France TV dans la décennie 90 fait apparaître une progression rapide de la publicité. Ainsi de 1992 à 1987, les recettes publicitaires de France 2 et France 3 ont augmenté de 1,9 milliards de francs (289,6 M€), alors que leurs recettes de redevance et autres contributions publiques diminuaient. La part de la publicité dans leur financement est passée de 40 à 52% pour France 2 et de 19 à 33% pour France 3.266 Cette croissance des ressources est due en partie à l‟augmentation de la durée de la publicité qui a cru de plus de 138% pour France 3 et de 54% pour France 2. L‟accroissement de la durée de la publicité n‟est pas propre aux chaînes publiques, il concerne l‟ensemble des chaînes. Ainsi, durant cette période, la durée totale de la publicité sur les chaînes hertziennes en clair est passée de 4h30mn par jour à 7h par jour soit une hausse de 66%. Cet accroissement est particulièrement significatif sur la tranche horaire 19-22h qui mobilise plus de la moitié des recettes publicitaires. Dans le même temps, les dépenses des annonceurs dans la TV n‟ont progressé que de 26%, d‟où un durcissement de la concurrence entre les chaînes par l‟entremise de leur régie qui se traduit par des pratiques commerciales plus agressives et plus diversifiées donnant lieu à une multiplication des remises et des abattements divers, dont les taux sont passés de 31% en 1992 à 40% en 1997 sur toutes les chaînes selon les données fournies par le CSA.267 Cette situation est à rapprocher de celle que connaissent les TV publiques allemandes et britanniques, de taille semblable, mais qui disposent de ressources globales nettement plus
266
Michel FANSTEN, “ le poids déterminant de la publicité dans le financement de la TV ”, in Dossiers de l’audiovisuel, n° 99, sept-oct. 2001, La Documentation française. 267 CSA, « audiovisuel et publicité », op.cit. Dans son étude, la CSA attire l‟attention sur ce phénomène ” les stratégies commerciales des régies reposent sur une panoplie impressionnante d‟abattements par rapport aux prix affichés, destinés tout à la fois à préserver les acquis et à séduire des annonceurs. ”
126
élevées que les chaînes françaises en ne faisant appel que peu ou pas du tout aux recettes publicitaires. Tableau N° 65 : Financement des chaînes de télévisions publiques en 2005 Redevance
Fonds publics
Publicité/
Autres*
Budget (MM€)
parrainage ZDF
85,3%
BBC
73,2%
FTV
65,9%
RTBF
52,9%
RAI
52,3%
RTE
42,7%
RTVE
0%
0,1%
6,4%
8,2%
1,8
5,7%
0%
21,1%
6,2
0%
28,6%
5,5%
2,7
0%
24,5%
22,6%
0,3
0%
39,6%
8,1%
2,8
6,2%
44,5%
6,8%
0,4
9,9%
82,5%
7,6%
0,9
total
*Revente de programmes, produits dérivés, prestations techniques, location de plateaux, etc.
Ainsi, la BBC et l‟ensemble ARD-ZDF disposent d‟un budget représentant plus que le double de celui de FTV. Si on ajoute à la BBC, Channel Four et S4C, que les britanniques considèrent comme relevant du service public, et à l‟ensemble ARD-ZDF les autres entreprises de l‟audiovisuel public comme la Deutsche Welle (DW), l‟écart sera encore plus important. Ces différences s‟expliquent, comme on l‟a déjà signalé, par la faiblesse du montant de la redevance en France comparativement aux autres pays et qui, en outre, n‟ont pratiquement pas d‟exonérations. Les écarts sont encore plus flagrants si on prend en compte les recettes publicitaires de la TV toutes chaînes confondues. (Voir tableau n°45). Ces écarts tiennent, selon Monique Dagnaud à des différences de traditions dans ce domaine, ainsi qu‟un rapport entre la publicité dans les médias et le hors média plus favorable dans ces pays qu‟en France, mais aussi à une réglementation moins restrictive en ce qui concerne les secteurs interdits.268 3.2.3. – La course à l’audience : fondement de la TV commerciale La répartition inégale des investissements publicitaires entre les médias et à l‟intérieur de chaque média s‟explique par les critères de choix des supports publicitaires des annonceurs qui privilégient, tantôt, le nombre de téléspectateurs quand la publicité concerne un produit de grande consommation et tantôt des cibles “ rentables ” permettant de toucher au moindre coût un maximum d‟acheteurs. Ainsi, les plans médias des annonceurs sont établis à partir de deux considérations essentielles : les caractéristiques socio-économiques et démographiques des audiences effectives ou virtuelles des différents médias et l‟approche plus ou moins subjective diversement fondée sur les possibilités des différents supports quant à leur capacité de concrétiser et de réaliser les objectifs recherchés. La TV présente plusieurs avantages pour les annonceurs, c‟est un média qui permet de véhiculer des messages instantanément à l‟ensemble de la population d‟un pays, il est perçu comme étant le plus fédérateur autour de la famille et on lui prête l‟effet d‟exercer une fascination sur le public, et il apparaît aussi comme le média le plus efficace en terme de mémorisation publicitaire269. Elle a le défaut d‟être relativement chère, de manquer de 268 269
Monique DAGNAUD, op. cité p. 72. Voir à ce sujet :
127
précision pour certaines cibles dans la mesure où elle ne permet pas d‟individualiser au maximum la réception et de n‟être pas ouvert à tous les secteurs d‟activité (les secteurs interdits). Les annonceurs cherchent en général à limiter les incertitudes de leurs achats d‟espaces et à privilégier par conséquent les médias dont l‟audience est établie et contrôlable. Ce comportement a longtemps privilégier la presse, qui dispose d‟un lectorat plus stable et mieux contrôlé que ne l‟est le public de la TV. Selon JC. Paracuellos, “ La valeur donnée par les annonceurs à une heure de lecture d‟un quotidien ou d‟un magazine était supérieure à celle d‟une heure passée devant la télévision, dans le rapport de treize à un en France et de sept à un aux Etats-Unis”270. Globalement, les produits de grande consommation de masse comme les produits alimentaires, d‟entretien, les télécommunications font le gros des annonceurs à la TV. 3.2.3.1 – La mesure de l’audience: de forts contrastes entre les pays La TV doit prouver par des enquêtes et des sondages l‟importance de son public, ses caractéristiques et le degré de sa performance en tant que support, à travers la fourniture de données sur son audience. Pour plus de transparence, dans certains pays, ces données sont fournies par des organismes spécialisés créés par les intéressés à l‟image de Médiamétrie en France, qui est une société tripartie spécialisée dans la mesure de l‟audience 271 ou encore du CESP (Centre d‟Etudes des rapports publicitaires) qui est un organisme interprofessionnel d‟audit et de contrôle des études d‟audience. L‟économie de la TV est donc aujourd‟hui essentiellement liée à la mesure de l‟audience, qui détermine à court et moyen terme l‟évolution de recettes publicitaires. L‟ensemble des acteurs du secteur audiovisuel cherche par ce biais à mesurer leurs performances, de cerner au mieux les profils et les attentes, au travers d‟informations homogènes, fines, complètes et réactives. C‟est le cœur du métier pour le monde de la communication : . Pour les chaînes, l‟audience sert à évaluer leur programmation, à apprécier le succès des émissions diffusées et à suivre le goût du public. . Pour les régies, les résultats d‟audience justifient et déterminent la meilleure façon de faire la promotion de leurs espaces. . Pour les annonceurs et les publicitaires, les résultats d‟audience permettent de savoir si leurs cibles ont été atteintes et servent à établir des “ plans médias ” efficients, et à élaborer des stratégies d‟achat d‟espace. . Dans la même logique, les producteurs l‟emploient pour suivre les performances de tous les genres de programmes produits par leurs concurrents, pour anticiper la demande, l‟adapter au goût du public et proposer aux chaînes les émissions en vogue, comme c‟est le cas actuellement des “ télé réalités ”272. Ils se servent de plus en plus de ces mesures pour SNPTV (Syndicat National de la Publicité télévisée), Etude sur la TV et l’image de la publicité à la TV en Europe, deuxième baromètre 7/02/02. - Efficacité publicitaire, in Vu à la télé, Lettre d‟information du SNPTV, octobre 2003. Documents disponibles sur le site www.snptv.org. 270 Jean-Charles PARACUELLOS, La télévision, clefs d’une économie invisible, op. cit. p. 99. 271 Le capital de Médiamétrie est détenu à 35% par des chaînes de TV (TF1, France2, France 3 : 10,75% chacune, Canal+ : 1,40%, la Cinquième : 1,29%), à 27% par des radios, à 35% par des publicitaires, à 2,79% par l‟INA et à 0,44% par Jacqueline AGLIETTA PDG de Médiamétrie. 272 Ainsi, actuellement en France, trois producteurs monopolisent une partie de la grille des programmes des TV généralistes : ENDEMOL France, Thierry ARDISSON et Réservoir Prod, de Jean- DELARUE, grâce à leur
128
demander une indexation à la hausse de leur rémunération et de leurs budgets artistiques273 car, plus une émission marche, plus son budget augmente et plus elle obtient d‟audience. La mesure de l‟audience répond donc aux besoins de différents intervenants de la filière, grâce à des instruments très sophistiqués qui s‟affinent sans cesse. C‟est une donnée indispensable à la gestion des chaînes dont une partie sinon, le quasi-totalité du financement provient de la publicité. C‟est aussi un paramètre pour le choix des programmes et l‟appréciation du goût du public. Les mesures de l‟audience sont très développées, surtout dans les pays industrialisés, dans la mesure où elles sont liées au marché publicitaire et au développement des TV commerciales privées et donc à la situation économique du pays. Par conséquent, “ il serait utopique de tenter de cerner la nature de l‟audience pour des continents comme l‟Afrique et l‟Asie ”, 274 pour des raisons politiques et d‟ordre économique.275 Différents systèmes de mesure d‟audience coexistent qui reposent grosso modo sur l‟analyse occasionnelle ou permanente de l‟attitude d‟un échantillon fixe (panel) des ménages ou d‟individus, mais les outils et leurs modalités de mise en œuvre varient276. Une des plus anciennes méthodes est l‟enquête par courrier ou téléphone qui repose sur les déclarations des personnes interrogées. Mais le bouleversement introduit dans le paysage audiovisuel par le développement des chaînes privées et l‟ouverture de l‟offre publicitaire qui l‟accompagne, va entraîner le remplacement de ce type d‟enquête par l‟audimétrie. Celle-ci correspond à l‟ensemble des procédés de recueil d‟information réalisée à l‟aide d‟un audimètre, sans l‟intervention d‟un enquêteur. Elle permet de prendre en continu et avec un délai de mise à disposition très court (du jour au lendemain) des données d‟une grande finesse de résolution. En France, la mise en place et la gestion d‟un panel automatique sous le nom d‟Audimat a débuté en 1981 par l‟adoption d‟un système d‟audimétrie passive qui rend compte de l‟audience au niveau de fonctionnement des téléviseurs (mise sous tension, extinction, canal), mais ne mesurait pas le comportement des individus au sein du foyer, ce qui justifiait le maintien en parallèle du panel postal. En 1989, un nouvel audimètre plus performant est mis en place par Médiamétrie, le Médiamat, de la technologie dite “ à bouton poussoir ”, qui permet d‟appréhender l‟audience au niveau individuel grâce à une télécommande comportant des touches individuelles affectées à chaque personne et permettant de déclarer sa présence devant le téléviseur.277 Ce système permet donc de connaître avec précision, outre le nombre de téléspectateurs regardant la TV à un moment donné, leur profil socio démographique, mais sa fiabilité passe par une déclaration volontaire de la part de chaque individu, acte qui peut être entaché d‟erreur.
mainmise sur plusieurs émissions de flux : jeux, magasines, talk-shows et divertissement. Voir à ce sujet Le Monde du 21/6/03 p. 21 et Challenges du 3/4/2003 p. 7. 273 Isabelle GOUGENHEIM, Yves d‟HEROUVILLE, la Télévision, op.cit. p. 23. 274 Valérie GANNE, “ Les audiences des télévisions dans le Monde ” in, L’état des médias, op. cit. p. 176. 275 Au Maroc, de temps à autre, des études d‟audience sont effectuées à la demande de divers intervenants mais au niveau de la presse elles suscitent toujours des polémiques et des réactions plus ou moins virulentes de la part des parties qui s‟estimaient lésées par les méthodes utilisées. Pour la TV, 2 agences Audio média et Grégagie publient des taux identiques d‟audimat pour les 2 chaînes qui sont concurrencées par les chaînes satellitaires. 276 Voir à ce sujet Marc MINON, “ la mesure d‟audience TV en Europe : une normalisation qui s‟annonce difficile ”, in L’état des médias, op. cit. pp. 180-184. 277 En 2003, le panel Médiamat se composait de 3100 foyers représentatif de la population française, soit 8.000 individus âgés de 4 ans et + organisés en 24 cibles différents et correspondant aux besoins formulés par les clients de Médiamétrie. Le recueil de l‟audience est fait à la seconde près.
129
En effet, cet outil présente l‟inconvénient d‟assujettir les membres des foyers pénalisés au bouton poussoir, ce qui à terme peut susciter de la lassitude chez eux et aboutir à des non déclarations et à des habitudes d‟écoute les faisant diverger de l‟attitude. Malgré ses défauts, Médiamat, reste pour le moment le seul thermomètre à mesurer la “ fièvre ” du paysage audiovisuel français. Il permet aux différents acteurs de transformer les données brutes d‟audience en un outil d‟aide à la décision. Reconnu par l‟ensemble de la profession, Médiamétrie est aujourd‟hui en situation de monopole pour la mesure d‟audience en direct. Les projets concurrents (Nielsen, Sofres et CESP) ayant échoué. Elle ne cesse de créer de nouveaux outils pour mieux connaître les autres utilisateurs du téléviseur (jeux et magnétoscopes), câble et satellite (Média cabsat) et l‟utilisation d‟Internet (Cybermétrie). Le Maroc a opté pour le même système de mesure à travers la signature, le 25 juillet 2006, d‟une convention entre le Centre Interprofessionnel de l‟Audimétrie (CIAUMED)278 et la société Marocmétrie279 dont le principal actionnaire est Médiamétrie France. Ce système dont l‟installation (28 mars 2008) a pris du retard au départ en raison de problèmes liés à la constitution du panel280, utilise une nouvelle technologie, le « watermarking audio »281 qui permet l‟identification de la chaîne regardée et offre la possibilité, d‟une part d‟identifier les réseaux de distribution d‟une même chaîne, qu‟ils soient terrestres ou satellitaires, analogiques ou numériques et d‟autre part, de mesurer dans l‟avenir la réception en différé et la réception mobile de la télévision, qui ne manqueront pas de se développer. 3.2.3.2 – Evolution de l’audience Il n‟existe pas de méthodologie commune aux différents outils audiométriques connus en Europe, ce qui fait que les mêmes outils peuvent donner lieu à des utilisations très variées. Ainsi, en vaut-il, par exemple de la définition du téléspectateur ou du choix des cibles, des tranches d‟âge, de la définition de la “ durée d‟écoute ”. Cependant avec l‟internationalisation de la TV et des opérateurs du sondage (Nielsen, Sofres, AGB, etc.) et l‟européanisation des campagnes publicitaires, des progrès ont été réalisés qui vont dans le sens de la normalisation européenne de la mesure de l‟audience et de l‟harmonisation des méthodes de recueil, de traitement et de présentation de l‟information. La consommation de la TV est tributaire du taux d‟équipement en télévision et surtout des modèles culturels qui diffèrent d‟un pays à l‟autre282. Ainsi, en Europe, région de tradition et de cultures anciennes, on regarde nettement moins la TV qu‟en Amérique du Nord ou en Australie, pays neufs où l‟histoire est plus récente. Même, au sein de l‟Europe des différences de consommation existent entre l‟Europe 278
CIAUMED est composé de la SNRT, la SOREAD (2M), Régie3, la GAM (groupement des annonceurs), et l‟UACC (union des agences de consultation en communication) 279 Marocmétrie est une société de droit marocain associant LMS-CSA, CSA et Metric line qui a été créé le 20juin 2006 Le panel de Marocmétrie est composé de767 foyers équipés d‟un audimètre et d‟une télécommande contenant une touche spécifique pour chaque membre de la famille (même les invités ont droit à leurs propres touches) leur permettant de déclarer sa présence dans une pièce où un téléviseur est allumé. 280
281
Le « watermarking audio » consiste à dissimuler au sein d‟un contenu audio une marque qui peut être ensuite retrouvée lors de la réception quel que soit le moyen de transmission (terrestre, satellite, câble, ADSL, numérique, analogique) et l‟équipement de réception. L‟audimètre fournit trois données :l‟ horodatage (heure et type de diffusion live ou différé), le canal de diffusion (satellite, hertzien, internet), et le contenu (feuilleton, magazine, émission de divertissement…) qui sont par la suite traitées, quotidiennement et mensuellement, avant leur publication. 282 Voir Valérie GANNE, “ Les audiences des TV dans le monde ”, op. cit.
130
du Nord où la durée d‟écoute individuelle (DEI) est faible et l‟Europe du Sud avec une DEI élevée.283 Au 1er semestre 2013, le temps moyen passé à regarder la TV aux Etats-Unis est de 4h53mn,ce qui correspond à 1h36mn de plus que la moyenne mondiale (3h17mn) et 98mn de plus que la valeur relevée dans l‟Union Européenne (3h55mn), 85 mn de plus que l‟Amérique Latine (3h28mn), 74 mn de plus que l‟Afrique (3h29mn), 2h08mn de plus que la part de la zone Asie-Pacifique (2h45 en moyenne) et 2 mn de moins que la valeur revenant au Moyen Orient à savoir 4h55mn. Graphique N° 30 : durée d’écoute mondiale
Par ailleurs, Eurodata tv Worldwide précise que, sur un panel de 50 territoires étudiés dès 2002, la progression de la durée d‟écoute quotidienne est de 21 minutes en 10 ans pour atteindre une moyenne de 3h55. (+3 minutes en un an). Sur 20 ans, la durée d‟écoute jour individu a progressé de plus d‟une heure dans certains pays dont la France et les Etats-Unis mais uniquement de 20 minutes au Royaume Uni où la durée d‟écoute était déjà particulièrement haute il y a 20 ans284. Ainsi, contrairement à certaines prévisions, la multiplication des écrans (mobiles, ordinateurs, smartphones ou encore tablettes) n'a pas freiné l'audience de la télévision. Bien au contraire, avec le développement des évènements sportifs planétaires285, et la multiplication des univers narratifs sur différents médias, ils ont développé de nouveaux usages de consommation renforçant la puissance du média télévision. 283
La DEI ou valeur d‟écoute est le temps moyen passé devant la TV par l‟ensemble des individus, composant la population étudiée. Elle peut être calculée pour une émission, une tranche horaire ou l‟ensemble de la journée. Elle est exprimée en heures et minutes ou seulement minutes. 284 See more at: http://www.mediaunautreregard.com/2013/03/26/television-levolution-de-la-duree-decoutemondiale/#sthash.CAYh9OBL.dpuf 285 En 2010 la finale du championnat de football américain a établi un record historique, sur CBS, avec 106,7 millions de téléspectateurs pour 69 % de parts d'audience. Très loin devant la cérémonie des Oscars, qui n'a réuni " que " 42 millions de téléspectateurs.
131
Parmi ces nouveaux usages, le visionnage des programmes en différé vient soutenir la croissance de la durée d'écoute de la télévision dans le monde 286. Une pratique que les audimétries nationales commencent à prendre progressivement en compte287. Malgré l‟existence de certains problèmes de comparabilité, il est intéressant de noter, d‟une part, que La France avec l‟Allemagne présente la durée d‟écoute par individu la moins élevée des cinq principaux marchés européens (, Espagne, Grande-Bretagne, Italie), d‟autre part, que les Etats membre de l‟UE ayant les temps moyens le plus élevés {Italie (4h14), Espagne (4h16) et la Grèce 4h33} conservaient une durée moyenne inférieure à celle des Etats-Unis. La Roumanie constitue une exception puisqu‟elle détient le record avec près de 5h30. Les téléspectateurs de l‟Autriche et de Luxembourg passaient apparemment le moins de temps devant le petit écran. Graphique N° 31 : durée moyenne d’écoute par individu
La différence des moyens de mesures rend difficile la comparaison des répartitions d‟auditoire. Le cœur de l‟audience de la TV en Europe, comme aux Etats-Unis, reste classiquement les femmes aux foyers, notamment les ménagères de moins 50 ans, responsables des achats principale cible publicitaire, et les personnes âgées. Si on se limite au cas de la France, on constate, selon l‟Institut Médiamétrie, qu’en 2013, les Français ont regardé la télévision en moyenne chaque jour 3 heures et 46 minutes en live ou différé sur le téléviseur contre 3h24mnen 2006 et 3h17mn en 2001. A cela, s‟ajoutent 7 minutes de consommation sur les autres écrans - ordinateur, Smartphone ou tablette - ou en rattrapage quel que soit l‟écran288. Les plus gros consommateurs de la TV restent les +50 ans
286
D‟après Médiamétrie (Global TV octobre-novembre 2010), une personne sur six âgée de 15 ans et plus regarde occasionnellement la télévision en direct sur un ordinateur (fixe ou portable ) 287Ainsi,
en Belgique et en Irlande où le différé a été intégré à la mesure d'audience en 2010, la durée d'écoute a augmenté respectivement de 10 et 11 minutes par rapport à 2009. En France le différé a été intégré à la mesure le 3 janvier 2011 et 9 pays supplémentaires l'intègreront d'ici 2013, portant à 23 le nombre de pays mesurant le différé. 288
Médiamétrie, l‟année TV 2013, communiqué de presse, 30 janvier 2013
132
avec 5h02mn par jour en 2012 contre 3h19 mn pour les 15-49 ans et 2h15mn pour les 4-14 ans. Graphique N°32: Evolution de la consommation du média TV en France
L‟écoute de la télévision est marquée par une forte saisonnalité. Entre le mois de janvier et le mois d‟août, la durée d‟ coute quotidienne moyenne par mois décroît alors qu‟elle progresse entre août et décembre. Le mois d‟août constitue le mois au cours duquel la durée d‟écoute de la télévision atteint son niveau le plus bas Graphique N°33 : Evolution de la durée d’écoute en France
L‟évolution de l‟offre sur une période de 20 ans fait ressortir que la TV est l‟un des premiers loisirs des français à domicile. La durée d‟écoute des français a augmenté de manière significative de près de 50 mn ans. Contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas les enfants qui regardent le plus la TV. Les enfants de 4 à 14 ans passent en moyenne 2h15mn par jour devant le petit écran; c‟est près de 50% moins que les 15 ans et plus (3h58mn), et quasiment deux fois moins que les individus âgés de plus de 50 ans (5h02).
133
Sur une journée moyenne, deux pics de consommation de la télévision apparaissent : en milieu de journée et en début de soirée. Graphique 34 : Evolution du taux moyen d’audience par tranche horaire
Source : Médiamétrie, Médiamat -MMW, France métropolitaine, plus de 4 ans équipés de téléviseurs
La répartition des parts d‟audience289, fait ressortir, la poursuite de la fragmentation des audiences avec la croissance notable des chaines de la TNT. En effet, Depuis 1995, tandis que les parts d‟audience (PdA) des chaînes hertziennes historiques baissaient, on a assisté à deux phénomènes : - la montée de la PdA des chaînes du câble et du satellite, qui a progressé d‟environ 8 points entre 1995 et 2004 ; - puis, à partir de leur lancement en 2005, la forte croissance des nouvelles chaînes de la TNT gratuite (hors chaînes locales), qui captent près de 22% de PdA en 7 ans. Parallèlement, la part d‟audience nationale des chaînes historiques continue à baisser passant 89,1 % à 66,7 % en dix ans (-22,4 points). Avec 22,7 % de part d‟audience sur les individus âgés de 4 ans et plus en 2012, TF1, qui est depuis plusieurs années en tête, demeure la première chaîne nationale, devant France 2 (14,9 %), M6 (11,2%) et France 3 (9,7%). Elle dispose d‟une durée d‟écoute individuelle de 3h50mn et un taux moyen d‟audience290 de 3,6% soit plus de 2,1 millions de téléspectateurs 289
Part d‟audience ou part de marché est le nombre de personnes ayant vu une émission ou une tranche horaire comparée au nombre de personnes regardant la TV pendant le même temps. Donc part d‟audience = durée d‟écoute d‟une chaîne/durée d‟écoute globale. La somme des parts d‟audience fait 100. 290 Taux moyen d‟audience ou audience moyenne correspond au pourcentage d‟individus du panel présents devant la TV pendant les différentes périodes de l‟émission, en moyenne de ces périodes. Ce taux est en relation avec la DEI car l‟audience moyenne d‟un “ moment ” correspond à la DEI de ce “ moment ” divisé par la durée de ce “ moment ” (c‟est la moyenne arithmétique de l‟audience des différents instants mesurés). Rappelons que l‟audience moyenne est le seul indicateur qui peut être multiplié par la valeur du point d‟audience. L‟augmentation de la valeur du point suit la même croissance que celle de la population française et de son équipement télévisuel. En 2012 la valeur d‟un point d‟audience est:
134
en moyenne par jour. La domination de TF1 se révèle aussi dans le classement des meilleures audiences de l‟année, en recueillant 88 des 100 meilleures audiences de l‟année 2012 et en étant la seule chaîne à rassembler avec le Bal des Enfoirés13,3 millions de téléspectateurs. Tableau N° 66 : Evolution des parts d'audience des chaînes hertziennes (ensemble journée, 4 ans et plus) (%)
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
France 2 France 3 France 5¹ Arte¹ Chaînes publiques² TF1 M6 Canal+ Chaînes privées Autres TV (TNT) Total
22,1 16,8 4,1 3,1 42,3 33,4 12,7 4,1 50,2 7,5 100,0
21,1 17,1 4,1 3,0 41,7 32,7 13,5 3,6 49,8 8,5 100,0
20,8 16,4 5,1 3,0 41,1 32,7 13,2 3,5 49,4 9,5 100,0
20,5 16,1 6,4 3,4 41,3 31,5 12,6 3,7 47,8 10,9 100,0
20,5 15,2 6,7 3,7 40,7 31,8 12,5 3,8 48,1 11,2 100,0
19,8 14,7 6,9 3,4 39,4 32,3 12,6 3,6 48,5 12,1 100,0
19,2 14,7 6,8 3,1 38,7 31,6 12,5 3,4 47,5 13,8 100,0
18,1 14,1 6,5 3,2 36,9 30,7 11,5 3,4 45,6 17,5 100,0
17,5 13,3 5,5 2,8 34,8 27,2 11,0 3,3 41,5 23,7 100,0
16,7 11,8 5,1 2,5 32,1 26,1 10,8 3,1 40,0 27,9 100,0
16,1 10,7 4,7 2,1 30,1 24,5 10,4 3,1 38,0 31,9 100,0
14,9 9,7 3,3 1,5 29,4 23,7 10,8 3,1 37,6 34,8 100,0
14,9 9,7 3,5 1,8 29,9 22,7 11,2 2,9 36,8 33,3 100,0
Source : Médiamétrie-Médiamat.
Graphique 35 : Evolution des parts d'audience des chaînes hertziennes
Comme on peut le constater, les dernières années n‟ont pas été favorables aux chaînes historiques dont les audiences se dégradent progressivement au profit des chaînes de la TNT291. - individus âgés de 4 ans et plus:
1% =589 380
291
Ainsi, aux Etats-Unis et en Espagne les chaînes historiques ne cumulent plus que 50% de l‟audience TV générale, les 50% restant étant partagées entre les nouvelles chaînes : Audience cumulées des chaînes de complément en 2012 : UK : 47,9%, Espagne : 49,3% En Allemagne, France et Italie, ces chaînes dites complémentaires se partagent désormais plus d‟un tiers de l‟audience générale : Part d‟audience cumulée des chaînes complémentaires en 2012 : France : 35,1%, Allemagne : 35% & Italie : 34,2%. Aux Pays-Bas, les chaînes historiques s‟en sortent mieux puisque les autres chaînes ne cumulent « que » 28,7% des audiences.
135
En ce qui concerne le Maroc, dont la mesure d‟audience par Marocmétrie a débuté en mars 2008, les chiffres d‟audience des chaînes publiques dont on dispose, révèlent qu‟en 2013, la durée d‟écoute individuelle des marocains est de 3h26 mn et que durant le mois de Ramadan elle dépasse à 4h. En novembre 2013, la part d‟audience des 7 chaînes nationales (Al Aoula, 2M, Al Maghribia, Al Aoula Internationale, 2M Monde, Arriyadia et Tamazight), est de 42,1% en moyenne en journée et de 48% en soirée (entre 20h50 et 22h30). C‟est 2M et Al Oula qui détiennent les scores les plus élevés comme cela ressort du tableau suivant : Tableau N° 67 : Répartition de l’audience selon les chaînes en 2013 Journée 3h-27h Soirée 20h50-22h30 2M
27,2 %
22,4 %
Al Oula
9,6 %
18,7 %
Al Maghribia
3,1 %
3,6 %
Autres chaines SNRT
2,2%
3,3%
57,9 %
52 %
Autres chaines
3h27
Durée d‟écoute
Source : CIAUMED Une comparaison avec les audiences réalisées par les chaînes publiques d‟autres pays en 2010 montre que le Maroc réalise le score le plus élevé devançant la RAI, France TV, BBC, ARD-ZDF, etc., comme cela ressort du graphique suivant : Graphique 36 : Benchmark audiences chaînes publiques en soirée
Source : Eurodata 2010
Ces données laissent les observateurs perplexes, surtout lors du mois du Ramadan où les chaines marocaines battent le record d‟audience, mais parallèlement, ils prouvent que la proximité favorise les chaines nationales car le téléspectateur, partout dans le monde, a toujours, d‟une manière générale, exprimé un besoin de proximité par rapport aux programmes de la TV. D‟ailleurs la production marocaine occupe de bonnes places dans le palmarès top 10 des programmes diffusés à côté des feuilletons mexicains et turcs. Cependant, ces chiffres doivent être relativisés à double titre :
136
-
-
D‟une part, les chaînes satellitaires ne sont pas signées et donc pas soumises à un audimètre ; les données les concernant proviennent d‟une enquête de terrain et ne sont donc pas de même qualité. D‟autre part, la comparaison avec les pays développés a des limites en raison des différences au niveau de la taille des marchés, de l‟intensité de la concurrence des chaînes privées dans ces pays, des habitudes de consommation des téléspectateurs, de la montée en puissance des nouvelles chaînes, etc.
En outre, il importe de souligner que la part d‟audience ne traduit pas la qualité d‟un programme car son objectif est de mesurer l‟audience et de déceler les plages horaires les plus rentables pour les annonceurs. Cette logique aboutit au dictat de l‟audimat qui peut aller à l‟encontre des missions de service public. 3.2.3.3 – Audience et recettes publicitaires Les fluctuations de l‟audience se retrouvent plus ou moins accentuées dans l‟évolution des recettes publicitaires mais d‟une manière inégale. Ainsi, TF1 dont la part d‟audience a baissé de près de 11 points entre 2000 et 2012 passant de 33,4% à 22,4% en 2012 a vu sa part de marché publicitaire passer de 58,2% à 36,5 % pour les mêmes années. Dans le même temps, France 2 dont l‟audience n‟a baissé que de près de 7 points (de 22,1% à 14,9%) voyait sa part de marché publicitaire baissait beaucoup plus passant de 12,7% à 2,9%. Tableau N°68 : parts d’audience et parts de marché en 2012 parts d’audience (PA)
parts de marché (PM)
TF1
22,7
36,5
1,61
M6
11,2
16,9
1,51
France2
14,9
2,9
0,19
France3
9,7
1,5
0,15
France 5
3,5
0,3
0,08
Canal+
2,9
1,9
0,65
Ratio PM/PA
Le ratio PM/PA est donc de 161 % pour Tf1 et il est dans des proportions proches pour M6 (151%), tandis que les chaînes publiques perçoivent des recettes publicitaires inférieures beaucoup de ce que leurs parts d‟audience pourraient laisser supposer (19% pour France2, 15 % pour France3 et seulement 8 % pour France5). Aussi, la relation entre l‟audience et les recettes publicitaires n‟est pas automatique. Cet écart entre parts d‟audience et parts de marché publicitaire s‟explique par des logiques des annonceurs et une réglementation contraignante : En effet, l‟existence d‟une « prime au leader » est un phénomène classique de l‟économie de TV qu‟on rencontre dans beaucoup de pays mais qui est particulièrement fort dans le cas français. Elle s‟explique, selon le sénateur Ph. Leroy par plusieurs causes dont la suivante apparaît essentielle : « l’audience moyenne importe peu pour les annonceurs qui recherchent pour la plupart à acheter des écrans puissants de « prime time ». Or 80% des
137
100 plus fortes audiences d’une année se retrouvent sur TF1 »292. Cette constation rejoint celle faite par Corinne Bouygues pour expliquer les performances de TF1, qui avec 32,7% de parts d‟audience en 2001 drainait près de 50% des recettes publicitaires : “ ce qui importe ce n’est pas tant l’audience des programmes, que l’audience des écrans publicitaires auprès des publics cibles des annonceurs ”. L‟effort commercial nécessaire à une chaîne et à sa régie pour accroître ou maintenir une part de marché n‟est donc pas moins important pour le secteur public que pour le secteur privé, mais la liberté pour adapter le contenu de la grille de programmes aux exigences des annonceurs ou aux rigueurs financiers du moment est beaucoup plus grande pour le second que pour le premier. Jusqu‟en 1999, secteur public et secteur privé en France étaient soumis aux mêmes règles en matière de publicité : 10% maximum du temps d‟antenne sur l‟ensemble de la journée et 12 minutes maximum en heure glissante, mais avec une différence de taille, l‟interdiction pour les diffuseurs publics de couper les émissions par des écrans publicitaires. Cette différence selon M. Fansten, est loin d‟être négligeable puisqu‟elle a abouti à ce que un point d‟audience rapporte en moyenne deux fois plus à une chaîne privée qu‟à une chaîne publique. En effet, en 1992 par exemple, l‟ensemble TF1-M6 avec 51,3% des parts d‟audience recueillait 1 143 M € (7,5 milliards de francs) de recettes publicitaires, soit 22,3 M€ (146M FF) par point d‟audience. L‟ensemble France 2-France 3 avec 37,8% d‟audience collectait 426,8 M € (2,8 milliards FF), soit 11,3M € (74 M FF) par point d‟audience. En 2002, le pôle privé avec 38% de parts d‟audience obtenait 4 915,2 M€ de recettes publicitaires, soit 129,3 M€ par point d‟audience. Le pôle public avec 28,5% percevait 506,2 M€ soit 17,76 M€ par point d‟audience. Il en résulte un écart croissant des ressources entre les chaînes publiques et le leader TF1 devenue chaîne de référence de paysage audiovisuel français. Cette différence d‟adaptabilité à la concurrence fait que paradoxalement les chaînes publiques apparaissent plus vulnérables que les chaînes privées aux fluctuations du marché publicitaire. Cette situation s‟explique par la nature aléatoire du produit qu‟offre la TV aux annonceurs. Une chaîne de TV offre aux demandeurs d‟espaces publicitaires une audience réalisée (mesurée en temps téléspectateurs), et comme l‟audience réalisée ne pourrait être mesurée qu‟ex post, une chaîne de TV offre également une audience espérée aux annonceurs. Cette dernière est anticipée par la chaîne ex ante, avant diffusion de programmes et résulte du choix de programmation. Ainsi pour valoriser l‟espace publicitaire offerte aux annonceurs, les programmateurs doivent donc faire en sorte que l‟audience à un moment donné devienne prévisible avec une marge d‟erreur aussi faible que possible, car les montants des tarifs publicitaires y dépendent. Une fois, le message publicitaire diffusé, si l‟audience réalisée s‟écarte trop de l‟audience espérée, les tarifs peuvent être révisés grâce à des mécanismes d‟assurance prenant en compte l‟audience effectivement réalisée. Une chaîne qui peut garantir une audience stable peut, toute une saison, sur des tranches horaires données, vendre bien ses espaces (en volume et en coût), qu‟une chaîne obtenant des résultats d‟audience irréguliers et incertains sur les mêmes tranches horaires. Aux Etats-Unis et dans d‟autres pays (notamment l‟Italie), pour répondre aux besoins de sécurité des annonceurs, les TV garantissent de plus en plus fréquemment une audience minimum à travers l‟offre d‟écrans supplémentaires, lorsque l‟audience n‟atteint pas le seuil convenu. Par conséquent, “ ce que la TV vend à l‟annonceur, ce n‟est plus alors un espace de communication à l‟intérieur d‟un programme donné, c‟est la communication d‟un message à
292
Philippe LEROY, L’ouverture de la publicité télévisée aux secteurs interdits : quels équilibres entre déréglementation et pluralisme. Rapport d‟information N°413, Sénat, 21 juin 2005, p.26
138
un nombre donné de téléspectateur ”293. Pour rapprocher l‟audience espérée de l‟audience réalisée, les diffuseurs essayent de créer dans la grille des programmes des rendez-vous forts et de cultiver les habitudes du public par une programmation régulière et originale qui coûte chère. Aussi, le coût total de programmation d‟une chaîne croît linéairement avec son audience maximale294. Corrélativement, c‟est en fonction de l‟audience que les TV fixent les prix de leurs espaces publicitaires, qui varient selon la durée, l‟emplacement choisi (tranches horaires), la date choisie (week-end ou jour de la semaine) et le degré de fidélité du client Ainsi, en mars 2008, le tarif net d‟un message de 30 secondes le dimanche à 20h40 était d‟environ 50 000 € sur TF1 et 33 500 € sur France 2. Le coût du média télévisuel est donc élevé, même si, en valeur absolue, il permet de toucher, en un instant donné, un maximum d‟individus. Graphique 37 : Coût d’un spot de 30 secondes un dimanche vers 20h40
Dans ce contexte, la programmation et la conception des programmes visent à maximiser les recettes publicitaires. Il faut non seulement conquérir le plus large public, mais le retenir le plus longtemps possible, et enfin le fidéliser de jour en jour, pour proposer aux annonceurs l‟audience constante et fine qui facilite le média planning. Critère décisif dans l‟économie de la TV commerciale, l‟audience devient aussi un critère de légitimité des chaînes publiques. Toutefois, le secteur public qui ne dépend de la publicité que pour une partie de ses ressources ressent moins cette nécessité, qui peut d‟ailleurs être contradictoire avec certains de ses objectifs ou de ses obligations comme celle de s‟adresser à des publics minoritaires.
293
J-C PARACUELLOS, La télévision, clés d’une économie invisible, op. cit. p. 91. Voir à ce sujet : Marc BOURREAU, M. dans GENSOLLON, J. PERANS, “ Les économies d’échelle dans l’industrie des médias ” ENSET. oct. 2001. 294
139
Aussi, son audience est plus fluctuante que celle des chaînes privées, ce qui se reflète sur ses tarifs publicitaires qui sont moins élevés que ceux du privé. 3.2.4. – Les contraintes réglementaires Afin d‟assurer à l‟échelle européenne, de façon complète et adéquate la protection des intérêts des consommateurs que sont les téléspectateurs, la publicité télévisée a été soumise à un certain nombre de règles minimales qui trouvent leur traduction dans la directive télévision sans frontières (DTSF)295 qui, pour intégrer les services non linéaires, fut remplacée le 11 décembre 2007 par une nouvelle Directive ( 2007/65/CE ) qui a pour nom :«Services de médias audiovisuels sans frontières» (Toutefois, cette directive laisse aux Etats la facilité de fixer des règles plus strictes ou plus détaillées pour les organismes de TV relevant de leur compétence296. La directive a été transposée dans les réglementations internes de chaque Etat, et nombreux sont ceux ayant adopté sur certains aspects, dont la publicité, des mesures plus précises et plus contraignantes pour les diffuseurs. La publicité fait partie des aspects législatifs qui font l‟objet de traitements différenciés selon les pays. Pour évaluer l‟intensité et la pression publicitaire qui s‟exercent sur les téléspectateurs, il est nécessaire d‟analyser brièvement le cadre général de réglementations européennes, en la matière. 297 Les mesures de protection de la directive concernent quatre aspects essentiels : - La protection du consommateur par le biais des principes d‟identification de la publicité ou de la séparation de spots publicitaires par rapport aux programmes. - La protection de l‟intégrité des œuvres audiovisuelles est assurée par l‟insertion de spots de publicité ou de télé achat entre les émissions ou par les règles d‟interruption des programmes. - La protection des mineurs est assurée par le biais des dispositions de l‟Art 3 sexies (Art. 16 de DTSF) précisant que la publicité télévisée ne doit pas porter un préjudice moral ou physique aux mineurs et doit de ce fait, respecter certains critères. - La protection de la santé est garantie par l‟interdiction de faire de la publicité pour les produits du tabac, par les restrictions à l‟encontre des produits médicamenteux disponibles sans prescription médicale et des boissons alcoolisées (l‟Art 3 sexies de SMASF et art. 13, 14, 15 de DTSF). 3.2.4.1- Les règles de base La publicité est définie comme toute forme de message télévisé diffusé contre rémunération ou paiement similaire, ou à des fins d‟autopromotion, par une entreprise publique ou privée, dans le cadre d‟une activité commerciale, industrielle, artisanale ou de 295
Directive n° 89/554/CEE dite Télévision sans frontière (TVSF), adoptée le 3 octobre 1989 et entrée en vigueur en 1991et modifiée une première fois en 1997. Ce directive ne s‟appliquait qu‟aux activités télévisuelles (analogique, câble, satellite). 296 L‟article3.1 stipule « Les États membres ont la faculté, en ce qui concerne les fournisseurs de services de médias qui relèvent de leur compétence, de prévoir des règles plus détaillées ou plus strictes dans les domaines couverts par la présente directive, sous réserve que ces règles soient conformes au droit communautaire» .297 Pour plus de détails voir à ce sujet : - CARACT CRYSTAL & BIRD and BIRD, “ Etude sur le développement des nouvelles techniques publicitaires ”, rapport final fait à la demande de la Commission européenne, avril 2000 et les rapports nationaux en la matière, le tout disponible sur le site de la commission européenne : www.europa.eu.int/comm/avpolicy/stat/studies.en.html Christine HOQUET, “ Régime juridique de la publicité et du parrainage télévisé : un cadre réglementaire équilibré ”, in Les Dossiers de l’audiovisuel, n° 99. sept-oct. 2001. - CSA, Publicité, parrainage et téléachat à la TV et à la radio, in les brochures du CSA, avril 2002
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profession libérale, dans le but de promouvoir la fourniture, moyennant paiement, de biens ou de services ou des droits et d‟obligations. La publicité ne doit pas porter atteinte au respect de la dignité humaine, exempte de toute discrimination raciale, sexuelle ou de nationalité, et toute incitation à des comportements préjudiciables à la santé, à la sécurité des personnes et à la protection de l‟environnement298. La publicité et le téléachat doivent être aisément identifiables et être distingués par des moyens optiques et ou acoustiques, ne peuvent qu‟exceptionnellement être isolés, et ne doivent pas utiliser des techniques subliminales299. La publicité clandestine300 est prohibée en ce qu‟elle est susceptible d‟induire le public en erreur. Il en est aussi du placement du produit, qui est considéré dans la majorité des pays, comme de la publicité clandestine, faute de respecter l‟identification de la publicité. Ces règles ont pour objet d‟assurer à la fois la protection du consommateur en vue d‟éviter toute confusion entre la publicité et les programmes, et le respect par les chaînes, et indirectement les annonceurs, les règles de déontologie. L‟ensemble de ces principes généraux existent dans les législations des Etats membres301 et même sont parfois plus détaillés que la directive. Ainsi, aux Pays-Bas, la publicité télévisuelle comprend non seulement les messages mais aussi les expressions publicitaires susceptibles d‟influencer le public d‟une manière positive en ce qui concerne un commerce en particulier. En France, parmi les mesures spécifiques on trouve l‟obligation d‟utiliser la langue française dans l‟ensemble des émissions et messages publicitaires et l‟interdiction pour les personnes présentant régulièrement les journaux télévisés et les magazines d‟actualité d‟intervenir ni verbalement, ni visuellement dans les messages publicitaires Au Maroc, on retrouve grosso modo les mêmes dispositions : Les séquences publicitaires, radiophoniques et télévisés, doivent être aisément identifiables comme telles et nettement séparées du reste du programme, avant comme après leur diffusion, par des génériques ou des jingles spécifiques aux séquences publicitaires, et d‟une durée minimale de 4 secondes pour les services télévisuels et de 2 secondes pour les services radiophoniques autorisés à diffuser des séquences publicitaires, reconnaissables à leurs caractéristiques optiques et/ou acoustiques. Lesdits génériques ou jingles ne doivent pas comporter de publicité, ni permettre l‟identification d‟un quelconque parrain. En dehors des séquences publicitaires, les chaines s‟interdisent tout type de présentation verbale ou visuelle, de manière explicite ou implicite, de marchandises, de services, du nom, de la marque ou des activités d‟un producteur de marchandises ou d‟un prestataire de services dans des programmes, lorsque cette présentation est faite de façon intentionnelle dans un but publicitaire non explicite et risque d‟induire le public en erreur sur la nature d‟une telle présentation. Une présentation est considérée comme intentionnelle notamment lorsqu‟elle est faite contre rémunération ou toute autre forme de paiement. Elles s‟interdisent également la diffusion de messages publicitaires produits par ou pour des partis politiques ou des organisations syndicales, qu‟ils donnent lieu ou non à des paiements. 298
Art.12 de DTSF et Article 3 sexies de SMASF Par publicité subliminale, on entend tout message visant à atteindre le subconscient du téléspectateur par l‟exposition très brève d‟images en vue de la promotion d‟un produit, d‟une marque, d‟une cause ou d‟une idée. 300 C‟est toute présentation verbale ou visuelle de marchandises, de services, du nom, de la marque ou des activités d‟un producteur ou d‟un prestataire de services, dans des programmes dans un but publicitaire intentionnellement ou par maladresse. 301 Au Maroc aussi, l‟ensemble de ces principes a été transposé dans la loi N°77-03 relative à la communication audiovisuelle. Voir bulletin Officiel, N° 5288 du 23 hija 1425 (3février 2005). 299
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Sont également interdits de diffusion les messages publicitaires non respectueux des personnes en raison de leur origine, de leur sexe, de leur appartenance ou non à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, notamment en les associant à des images, des sons ou des scènes susceptibles de leur attirer le mépris ou le ridicule public. A l‟exception des programmes de téléachat, si un numéro de téléphone ou une adresse Internet (ou tout autre type de contact) est mentionné dans un message publicitaire, il ne doit en aucun cas permettre, en le composant ou en s‟y connectant, de passer directement commande du bien ou du service promu dans le message. La présence de cette mention dans le message publicitaire doit être uniquement un moyen pour le public d‟obtenir plus d‟informations sur ledit bien ou service ou, éventuellement, de laisser ses coordonnées afin d‟être contacté ultérieurement. Les diffuseurs doivent informer systématiquement le public et de manière aisément visible pour leurs services télévisuels, et audible pour leurs services radiophoniques, du prix à payer pour l‟utilisation d‟un service télématique ou téléphonique surtaxé présenté à l‟antenne 3.2.4.2 – Les contraintes quantitatives La France est l‟un des pays d‟Europe qui dispose d‟une réglementation la plus restrictive en matière de diffusion de la publicité sur les chaînes privées, s‟agissant de la limitation du volume ou du nombre de coupures possibles dans les œuvres audiovisuelles. Dans la DTSF, le volume global des messages était limité selon deux critères : -
Un plafond de 15% de la diffusion quotidienne de programmes soit 9 mn en moyenne par heure.
-
Une limitation par tranche horaire qui ne doit pas dépasser 20% par heure soit 12 mn pour une heure donnée.
La plupart des Etats appliquaient ces règles de la directive aux chaînes commerciales. Cependant, on relevait quelques éléments de distinction résumés dans le tableau suivant : Tableau N°69 ; Comparaison des réglementations européennes en vigueur avant la transposition de la SMASF
France
Royaume-Uni
Allemagne/Es pagne
Italie
6 min/h en moyenne (chaînes hertziennes)
7 min/h en moyenne (chaînes hertziennes privées)
9 min/h moyenne
en
9 min/h en moyenne (chaînes hertziennes)
Limitation horaire de la publicité
12 glissante privées)
12 min/heure d‟horloge
12 min/heure d‟horloge
11 min/heure d‟horloge (chaînes privées)
Règles générales d’insertion de la publicité
Au moins 20 min entre deux coupures
Règle spécifique pour les œuvres audiovisuelles et cinématographiques
Une seule coupure est autorisée sur les chaînes privées en clair (sauf dérogation accordée par la CSA pour les œuvres de plus 150 min
Limitation quotidienne publicité
de
la
min/heure (chaînes
Diffusion de la publicité entre les parties autonomes ou au cours des interruptions dans les émissions qui en comportent (dont le sport) Dans les œuvres de plus de 90 min : une coupure par tranche de 45 min pendant les 90 premières minutes 3ème coupure si le programme dure plus de 110
142
La directive SMASF a introduit des assouplissements sur les règles de diffusion de la publicité portant sur : - le passage de la mesure de la durée de publicité de l‟heure glissante à l‟heure d‟horloge ; - le déplafonnement de la durée quotidienne de la publicité, dans la limite de 12 minutes (Publicité et téléachat) par heure d‟horloge ; - la suppression de la règle des 20 minutes séparant deux écrans publicitaires ; - l‟autorisation d‟une seconde, voire d‟une troisième, coupure publicitaire dans les œuvres audiovisuelles et cinématographiques ; - la modification des règles du placement de produit. Tableau N°70 : Dispositions des directives TVSF et SMASF
Limitation quotidienne la publicité
de
Limitation horaire de publicité
la
Règles générales d’insertion de la publicité
Directive Télévision Sans frontières
Directive européenne Services de
(TVSF)
Médias Audiovisuels
6 min/h en moyenne (chaînes hertziennes)
Disposition supprimée
12 min/heure glissante (chaînes privées)
12 min/heure d‟horloge
Au moins 20 min entre deux coupures dans les émissions comportant des interruptions naturelles
Disposition supprimée
Diffusion de la publicité entre les parties autonomes dans les émissions qui en comportent et dans le sport)
Règle spécifique selon les genres
Disposition supprimée
Une interruption publicitaire dans les œuvres de plus de 45 min, une deuxième interruption dans les œuvres d‟au moins 90 min. Au-delà de 90 min, la tranche de référence est de 20 min.
Suppression des dispositions d‟insertion dans les séries, feuilletons, documentaires et émissions de divertissement.
Dans les émissions pour enfants, les JT, les magazines d‟information politique, les documentaires et les émissions religieuses, pas de coupure si le programme dure moins de 30 min.
Interruption une fois par tranche de 30 min des films conçus pour la télévision, œuvres cinématographiques, journaux télévisés et programmes pour enfants de plus de 30 min.
S‟il est plus long :
Pas d‟interruption publicitaire des programmes pour enfants de moins de 30 min et des services religieux.
-au moins 20 min entre 2 coupures situées dans les interruptions naturelles -ou diffusion de la publicité entre deux parties autonomes s‟il en comporte
143
Ainsi au niveau de la France, les règles de diffusion de la publicité peuvent être résumées comme suit : 1) En ce qui concerne l‟insertion des écrans publicitaires : - Une période d'au moins 20 minutes doit s'écouler entre deux interruptions successives à l'intérieur d'un programme, -Les œuvres cinématographiques et audiovisuelles ne peuvent pas faire l'objet de plus de deux interruptions publicitaires. Et pour les œuvres cinématographiques, elles doivent se limiter à une durée de 6 minutes au total. -Interdiction d‟interruption publicitaire d'une œuvre audiovisuelle ou cinématographique par France Télévisions, et par les services de télévision en ce qui concerne une œuvre cinématographique. - l‟insertion publicitaire doit s‟opérer en harmonie avec le contenu du programme afin d‟éviter l‟interruption impromptue et prématurée d‟une allocution, d‟une interview ou d‟une prestation musicale. Mais lorsqu‟une émission dispose de parties autonomes ou des intervalles, les messages publicitaires peuvent être insérés entre ces parties autonomes ou dans ces intervalles sans limitation du nombre d‟interruptions. 2) En ce qui concerne le temps d‟antenne consacré à la publicité, la limitation diffère en fonction de la nature des chaînes :
Pour les chaînes privées, le temps d‟antenne consacré à la publicité est encadré différemment selon leur mode diffusion :
-
Sur les chaînes diffusées par voie hertzienne terrestre (c‟est-à-dire la TNT), il est limité à 9 minutes par heure en moyenne quotidienne sur l‟ensemble des périodes de programmation au cours desquelles cette diffusion est autorisée, et à 12 minutes pour une heure d‟horloge donnée302.
-
Sur les chaînes distribuées par câble, par ADSL ou diffusées par satellite, la durée consacrée à la publicité est fixée par voie conventionnelle avec le CSA. Elle ne peut excéder 12 minutes pour une heure d‟horloge donnée.
Pour les chaînes publiques, les règles encadrant la durée des messages publicitaires sont plus strictes : la publicité ne peut dépasser 6 minutes par heure en moyenne quotidienne, ni 8 minutes pour une heure d‟horloge donnée. En outre, depuis le 5 janvier 2009, les chaînes de France Télévisions (France 3 Régions et Outre-mer 1ère exceptées) ne doivent plus diffuser de publicité de marques de 20 heures à 6 heures du matin. Cette interdiction ne s‟applique qu‟à la publicité et ne concerne donc pas les messages d‟intérêt général, les publicités génériques (pour faire la promotion de la pomme, des produits laitiers, etc.) ou les parrainages, qui peuvent continuer à être diffusés.
Deux assouplissements principaux du régime publicitaire applicable aux éditeurs de la TV sont intervenus en 2010 :
302
Afin de favoriser leur essor, les nouvelles chaînes de la TNT bénéficient de règles allégées pendant un délai de sept ans à compter de la date du début des émissions, le temps consacré à la publicité étant seulement limité par le plafond de douze minutes par heure d‟horloge donnée. A l‟issue de ce délai, elles devront également respecter la durée de neuf minutes par heure en moyenne quotidienne.
144
Premièrement, le placement de produit a été autorisé dans des conditions définies par le CSA dans la délibération qu‟il a adoptée le 16 février 2010303. Cette délibération dispose que le placement de produits est autorisé dans les œuvres cinématographiques, les fictions audiovisuelles et les vidéomusiques sauf lorsqu‟elles sont destinées aux enfants.
En second lieu, suite à l‟ouverture à la concurrence et la régulation de certains secteurs du marché des jeux d‟argent et de hasard en ligne organisée par la loi du 12 mai 2010304, la diffusion des communications commerciales en faveur d‟un opérateur de jeux et de hasard légalement autorisé a été organisé .Les éditeurs de TV doivent, pour y bénéficier, satisfaire aux conditions définies par le CSA dans la délibération qu‟il a adoptée le 27 avril 2010305, ainsi qu‟aux dispositions du Décret du 8 juin 2010 qui les oblige à informer les joueurs quant aux risques liés à la pratique du jeu306.
Au Maroc, c‟est la HACA (Haute Autorité de la Communication et l‟Audiovisuel) qui veille au respect par les diffuseurs de règles déontologiques et peut notamment sanctionner la diffusion d‟une publicité trompeuse, portant atteinte à la dignité de la personne humaine ou à l‟ordre public, portant préjudice aux mineurs ou encore de nature à choquer les convictions religieuses, philosophiques ou politiques des téléspectateurs. La limitation des coupures et du volume de la publicité sont fixés par le cahier des charges des deux chaînes nationales de la manière suivante307 : 1- En ce qui concerne l‟insertion des écrans publicitaires : -
-
-
Les séquences publicitaires peuvent être insérées entre les émissions ou au sein des émissions. Toutefois à l‟instar de la directive, sont interdites de coupure publicitaire les programmes destinés aux enfants de moins de 10ans, les journaux et magazines d‟information ainsi que les émissions d‟autres genres se rapportant à l‟exercice de droits politiques et les émissions religieuses. Une période d‟au moins 20mn, doit s‟écouler entre deux interruptions successives à l‟intérieur d‟une même émission. Dans les retransmissions des compétitions sportives, de spectacle et d‟événements comprenant des intervalles, les séquences publicitaires sont insérées entre les parties autonomes composant le programme ou dans ces intervalles. Les messages d‟intérêt général répondant aux critères de la publicité non commerciale telle que définie au paragraphe 5 de l‟article 2 de la loi n° 77-03 sur la communication audiovisuelle ainsi que les messages non publicitaires de promotion d‟événements culturels marocains peuvent être diffusés en dehors des séquences publicitaires et leur
303
Délibération n° 2010-4 du 16 février 2010 relative au placement de produit dans les programmes des services de télévision. Version finale 5 mars 2010. 304 La loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 305 Délibération n° 2011-09 du 27 avril 2011 relative aux conditions de diffusion, par les services de télévision et de radio, des communications commerciales en faveur d'un opérateur de jeux d'argent et de hasard légalement autorisé 306
Décret n° 2010-624 du 8 juin 2010 relatif à la réglementation des communications commerciales en faveur des opérateurs de jeux d'argent et de hasard ainsi qu'à l'information des joueurs quant aux risques liés à la pratique du jeu. 307
Article 180 du cahier de charges de la SNRT et article 49 du cahier des charges de Soread 2M
145
durée n‟est pas comptabilisée dans les volumes publicitaires autorisées pour chacun des services édités par les chaines. Le volume sonore des séquences publicitaires ne doit pas excéder le volume sonore moyen du reste des programmes pour chaque service concerné.
-
2- En ce qui concerne le temps d‟antenne consacré à la publicité : -
Chaque séquence publicitaire ne peut excéder une durée de 6mn à la TV (pour la radio : 5 mn par heure en moyenne annuelle et 10 mn au cours d‟une heure). Pour une heure glissante, la durée totale des séquences publicitaires ne peut excéder 12mn pour Al Oula (SNRT) et 16mn pour 2M. Toutefois, pendant le mois de Ramadan, ce plafond est porté respectivement à 14 mn et 18 mn.
-
En bref, la plupart des Etats appliquent la limitation horaire à 12 mn. Or cette mesure a une implication plus forte que le plafond de la diffusion quotidienne, dans la mesure où elle fixe le volume publicitaire maximum autorisé lors des moments de forte écoute. 3.2.4.3 - La protection des mineurs308 La directive comprend des règles spécifiques quant à la protection des mineurs, son article 3. sexities (1.g) (Art. 16 DTSF) stipule que : La publicité ne doit pas porter préjudice moral ou physique aux mineurs et doit, de ce fait, respecter les critères suivants pour leur protection : a) Elle ne doit pas inciter directement les mineurs à l‟achat ou location d‟un produit ou d‟un service, en exploitant leur inexpérience ou leur crédulité. b) Elle ne doit pas inciter directement les mineurs à persuader leurs parents ou des tiers d‟acheter des produits ou les services faisant l‟objet de publicité. c) Elle ne doit pas exploiter la confiance particulière que les mineurs ont dans leurs parents, leurs enseignants, ou d‟autres personnes 309 d) Elle ne doit pas, sans motif, présenter les mineurs en situation dangereuse. La directive offre ainsi un cadre adéquat et flexible pour l‟adaptation des mesures nationales dans ce domaine, et effectivement plusieurs pays ont adopté des mesures plus strictes et des dispositions plus spécifiques visant à limiter la pression publicitaire à l‟égard des enfants. Ces aménagements portent sur quatre éléments: la cible de la publicité, l‟enfant prescripteur, les interférences entre programmes et messages publicitaires et la proximité en temps entre spots publicitaires et programmes pour enfants : La cible de la publicité : La Suède se distingue par sa réglementation stricte en la matière. Elle est le seul pays à instaurer une interdiction totale de la publicité s‟adressant aux mineurs310. Dans les autres pays, cette interdiction n‟existe pas mais on trouve cependant, des recommandations éthiques 308
Pour approfondir cette question voir : L'étude réalisée pour la Commission Européenne par le cabinet BIRD and BIRD et l‟ICMA, Etude sur l’impact de la publicité et le télé-achat sur les mineurs, mars 2000 Monique DAGNAUD, op. cité 309 On retrouve les mêmes principes au Maroc dans l‟article 2 de la loi sur la communication audiovisuelle se rapportant à la publicité interdite et dans les cahiers de charge de SNRT (Art. 182/2) et 2M (Art.52/2) 310 Selon le professeur Erling BJURSTON dont les travaux ont servi à élaborer la loi, les enfants sont incapables de distinguer un message commercial d‟un autre message avant 10 ans. Ce n‟est qu‟à partir de 12 ans qu‟ils parviennent à comprendre le but d‟une publicité. Voir Courrier de l’Unesco, Septembre 2001
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la concernant dans les textes s‟inspirant de la directive. Ainsi, en France, par exemple, la recommandation enfant de Bureau de Vérification de la Publicité (BVP) fixe les règles déontologiques qui s‟appliquent à tout message publicitaire diffusé en France, qu‟il que soit sa forme, lorsqu‟il met en scène des enfants ou s‟adresse à eux. L‟action du BVP intervient en général avant la diffusion des messages dans le cadre de la procédure de conseil, dans le but de prévoir des comportements dangereux ou antisociaux..
L’enfant prescripteur :
- En France le Décret du 24 janvier 1987 interdit l‟utilisation des enfants et adolescents en tant que prescripteurs d‟un produit ou d‟un service et en tant qu‟acteurs principaux d‟un message publicitaire pour un produit ne les concernant pas directement, c‟est à dire non destiné à la consommation familiale ou non consommé principalement par eux. Ces dispositions ont été assouplies par le décret du 27 /3 /1992 auquel s‟est substitué311, toutes fois les émissions de téléachat ne peuvent faire intervenir des mineurs de seize ans (art.26) - Au Danemark, depuis 1997, une loi prise en application de la directive précise que “les enfants de moins 14 ans ne peuvent figurer dans des publicités télévisées que s‟ils apparaissent comme des éléments naturels du décor, ou si leur présence est nécessaire pour expliquer ou démontrer l‟utilisation d‟un produit spécifique à l‟enfant. - ITC (Indépendant Télévision Commitee) indique, “ les enfants ne peuvent pas être utilisés pour présenter des produits ou des services qu‟ils ne pourraient pas acheter euxmêmes ” - L‟Espagne a introduit une disposition proche : les enfants ne peuvent être les personnages centraux des publicités sauf pour les produits les concernant qu‟une liste limite.
Les interférences entre les programmes et publicité
- En France, afin d‟éviter les confusions induites par la multiplication des jeux, des parrainages et des spots publicitaires, dans et autour des programmes pour enfants, les diffuseurs doivent veiller à ce qu‟il n‟ait aucune interférence entre le nom du parrain ou d‟une de ses marques et celui d‟une émission pour la jeunesse ou d‟un élément de celle-ci. La mention du parrain doit être discrète et de taille modeste ; les génériques situés à l‟intérieur des programmes jeunesse doivent compter une durée minimale de quatre secondes. - En Grande Bretagne, les codes de l‟ITC interdisent de diffuser dans la journée (avant 21h) des publicités dans lesquelles apparaîtront des personnages présents dans les programmes pour enfants et faisant la promotion de produits ou de services concernant strictement les enfants. identiques.
Les pays scandinaves (Suède, Norvège, Danemark) ont pris des mesures
- L‟Allemagne, le Norvège l‟Autriche et la Communauté Flamande (Belgique) ont interdit d‟interrompre par de la publicité un programme destiné aux enfants. - L‟Italie a adopté la même mesure pour les dessins animés.
La proximité en temps entre publicité et programmes pour enfants
311
Décret n° 92-280 du 27 mars 1992 pris pour l'application des articles 27 et 33 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
147
La Suède, la Norvège, le Danemark et la Communauté Flamande interdisent la présence publicitaire autour des programmes pour enfants, mais sur un mode plus ou moins précis : le délai n‟est pas spécifié en Suède, il est de 10 minutes en Norvège, de 5 minutes en Flandre, de 1mn50s au Danemark pour la chaîne publique TV2 pour les émissions visant les enfants de moins 8 ans et qui s‟étend aux enfants de moins 12 ans pendant le week-end et les vacances (disposition abrogée en 2001 avec l‟arrivée au pouvoir d‟un nouveau gouvernement). En Grande Bretagne, l‟ITC interdit de faire de la publicité pour des produits dérivés liés à des programmes pour enfants deux heures avant ou après ces programmes. La Grèce interdit de faire de la publicité en faveur des jouets de 7h à 22h. Par ailleurs, une grande majorité des Etats ne limitent pas la publicité s‟adressant aux enfants, mais réglemente de manière précise le contenu de cette publicité. Par exemple, aucune publicité ne peut inciter les enfants à pénétrer dans des endroits qu‟ils ne connaissent pas ou à parler avec des étrangers; la publicité en faveur des confiseries doit faire figurer un symbole représentant une brosse à dents sur l‟écran (Grande Bretagne, Danemark) , protection des enfants d‟images violentes ou à caractère sexuel, interdiction des jouets violents ou exaltant la violence (Espagne, Grèce, Communauté Flamande). Enfin plusieurs législations insistent sur la nécessité que les spots publicitaires respectent les valeurs sociales notamment l‟idée que la possession d‟un produit puisse donner une supériorité sur les autres (Grande Bretagne, Danemark, France, Maroc, etc.). 3.2.4.3- Les secteurs interdits La directive interdit un certain nombre de secteurs, comme le tabac, les médicaments sur prescription médicale et encadre la publicité télévisée pour les alcools (respect de critères spécifiques notamment protection des mineurs). La plupart des pays européens n‟ont pas ajouté de secteurs interdits, sauf la Finlande en ce qui concerne les alcools forts et la France qui constituait une exception dans la mesure où dans sa réglementation, avant janvier 2004, figurait d‟avantage de secteurs interdis. Pour certains produits les interdictions sont liées à des motifs d‟ordre public et de protection de la santé publique et ressortent de dispositions législatives comme : Les armes à feu sauf sur les chaînes thématiques consacrant plus d‟un tiers de leurs programmes, hors publicité, à des émissions relatives à la chasse, à la pêche ou au tir sportif. L‟assistance juridique, sauf au titre de la publicité collective. Le tabac ou les produits de tabac. Les loteries prohibées. Les médicaments remboursables et soumis à prescription médicale. La publicité politique. Ce dispositif réglementaire est complété, en France, par l‟interdiction au terme de l‟article 8 du décret du 27 mars1992 qui dans sa rédaction applicable jusqu‟au 1er janvier 1994 précise : “ est interdite la publicité concernant, d‟une part, les produits dont la publicité télévisée fait l‟objet d‟une interdiction législative, et d‟autre part, les produits et secteurs économiques suivants : - boissons comprenant plus de 12° d‟alcool - édition littéraire - cinéma
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-
presse distribution, sauf dans les départements et territoires d‟Outre-mer ainsi que les collectivités territoriales de Mayotte et..... ”
Les justifications de l‟exclusion de certains secteurs de la publicité télévisée répondaient à des soucis de protection d‟intérêts économiques particuliers, ainsi qu‟à des objectifs pour favoriser le pluralisme et la diversité culturelle. L‟exclusion de la distribution visait à privilégier d‟autres supports publicitaires dans la mesure où elle permettait que les recettes issues du secteur de la distribution soient réservées à la radio et à la presse notamment régionale. Pour la presse, il s‟agit de préserver l‟existence d‟entreprises de petites tailles face à la concentration, et une certaine éthique économique dans un secteur construit sur des principes de solidarité professionnelle et une certaine défiance à l‟égard du marché. Pour le cinéma enfin, la diversité culturelle est invoquée; l‟exclusion de la publicité est destinée à éviter que les acteurs les plus importants mettent à mal les plus faibles, compte tenu du coût élevé de la publicité télévisée, et que soient ainsi favorisés des phénomènes de concentration qui profitent surtout aux distributeurs de films américains, seuls capables d‟investir de gros budgets pour la promotion de leurs produits. Ces interdictions ne faisaient pas l‟unanimité. Elles étaient dénoncées par les annonceurs, la Commission Européenne, et même le CSA s‟est prononcée à plusieurs reprises pour l‟ouverture du secteur de la distribution à la publicité télévisée sur les chaînes locales, condition majeure à leur développement. Dans le même sens, M. Francaix et J. Vistel dans leur rapport sur les télévisions locales dressaient une critique sévère des secteurs interdits312. A la suite d‟un long processus de concertation entre les différents acteurs concernés, ces interdictions ont été modifiées à compter du 1er janvier 2004 par le décret n°2003-960 du 7 octobre 2003 : L'interdiction concernant la presse a été levée, et celle concernant la distribution et l‟édition ont été assouplies de manière plus ou moins importante. L‟ouverture à la distribution est intervenue le 1er janvier 2004 sur les chaînes locales, du câble et satellite et sur la TV numérique dès son lancement, et le 1er janvier 2007 pour les chaînes analogiques hertziennes. S‟agissant de l‟édition littéraire, l‟ouverture a été partielle et a concerné, à compter du 1 er janvier 2004, uniquement les chaînes du câble ou diffusées par satellite. En conclusion, au terme de ce bref panorama réglementaire de la publicité télévisée, on peut formuler quelques remarques : * La directive est un instrument de coordination de certaines dispositions relatives à l‟exercice d‟activités de radiodiffusion télévisuelles et de ce fait plusieurs Etats ont adopté des règles plus détaillées et plus restrictives en matière de publicité. * La France se distingue par le nombre relativement élevé de secteurs interdits et par le non coupure des œuvres audiovisuelles et cinématographiques sur les chaînes publiques, et par une limitation restrictive de la durée maximale de l‟écran publicitaire. * L‟Allemagne, la Grande Bretagne et la France entretiennent des chaînes publiques pour lesquelles la publicité est totalement absente (Grande-Bretagne) ou partiellement lors de prime time (France TV après 20h), le dimanche et pendant les vacances scolaires. (Allemagne).
312
FRANCAIX Michel et Jacques VISTEL, Les télévisions locales, rapport remis au Ministre de la culture et de la communication le 10 novembre 1998, La Documentation française,165 p.
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* Le secteur privé est soumis à moins de restrictions que le secteur public. Au prime time, le volume publicitaire est presque identique sur tous les réseaux privés généralistes alors que les réseaux publics présentent un visage distinct : pas de publicité au Royaume-Uni, en Allemagne (après 20h, le dimanche et vacances scolaires), et en France (après 20h) alors qu‟en Espagne, Italie la publicité est relativement intense. * Les pays dotés de services publics sans publicité ou très limités, sont ceux qui parallèlement encadrent beaucoup la présence des messages publicitaires à l‟égard des enfants sur les écrans. La Suède mène à ce sujet une politique offensive313, et elle s‟est dotée d‟un arsenal juridique qui tente d‟adoucir par divers moyens la pression publicitaire autour des programmes pour les plus jeunes * Les effets de la réglementation relative à la durée et la place de la publicité dans les programmes sont très importants. Ainsi, la limitation portant sur la durée maximale de publicité autorisée dans une heure donnée est plus contraignante que celles qui ne s‟intéressent qu‟à la durée moyenne, puisqu‟elles fixent le volume publicitaire maximum autorisé lors des moments de forte audience (Access time et prime time). De même, celles qui précisent les horaires de diffusion autorisés le sont encore d‟avantage (Allemagne). Les restrictions relatives aux coupures à l‟intérieur des programmes qui privent les annonceurs d‟une audience captive fortement appréciée et recherchée entraînent dans certains pays la constitution de longs “ tunnels ” entre les programmes, dont l‟audience technique est moins sûre. Elle en résulte une perte d‟efficacité du média vis-à-vis de la publicité, qui est de nature à faire baisser le prix moyen de l‟espace s‟il „y a pas parallèlement une réduction de l‟offre globale. Ainsi, selon Paraccuelos “ protéger le consommateur de la télévision des excès de la publicité est une tâche délicate. Il est permis de se demander si cette sollicitude a un sens parce qu‟elle s‟applique à des télévisions purement commerciales et si, dans ce cas, la régulation du volume publicitaire ne doit pas être laissée aux téléspectateurs eux, qui sont libres de se détourner des programmes charriant trop de publicité ”314.
3.3 - D’autres sources de financement En dehors des deux principaux modes de financement que sont la redevance et la publicité, les chaînes de TV peuvent recourir à d‟autres sources de financement dont l‟importance varie d‟une chaîne à l‟autre, et selon qu‟elles appartiennent au secteur public ou privé. Dans l‟ensemble, ces recettes ne constituent pour les chaînes qu‟un apport complémentaire.
3.3.1- Le financement par l’Etat Dans la plupart des pays, les organismes de TV publiques n‟ont pu démarrer que grâce à des fonds publics, et leur fonctionnement fût par la suite assuré essentiellement par la redevance. Mais, dans les pays où la redevance n‟existe pas (exemple : Bulgarie, Estonie, Lettonie, Lituanie, Hongrie, etc.) ou présente un montant trop faible pour constituer un important apport de fonds, la subvention directe supplée à cette absence. Les fonds publics sont constitués, soit de crédits émanant du budget général de l‟Etat, de fonds spéciaux, de programmes d‟aide, mais aussi de mesures ad hoc telles que les augmentations du capital, les aides à la restructuration. En effet, ces fonds s‟avèrent souvent nécessaires pour la mise en œuvre de procédés nouveaux comme c‟est le cas pour la TNT, ou pour prendre en charge les organismes en difficulté (combler le déficit, augmentation du capital), ou pour remplir des 313 314
Voir à ce sujet : Monique DAGNAUD, op. cité. C .PARACUELLOS, La télévision, clés d’une économie invisible, op cité. pp.108-109
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objectifs ou de services spécifiques fixés dans des contrats avec les pouvoirs publics, comme c‟est le cas en particulier des service de diffusion internationale (TV 5, RFI, etc.)315. Pour être stable et sûre, ce type de financement doit avoir une base légale claire qui prévoit le niveau de financement pour une période appropriée. Le faire de dépendre de décisions budgétaires annuelles ou de mesures ad hoc crée souvent un climat d‟insécurité qui risque de pénaliser les organismes publics dans leurs prévisions et projets d‟investissement, d‟autant plus que cette forme de financement évolue en fonction de choix politiques. Ainsi, l‟engagement du gouvernement espagnol à compenser les pertes de recettes de la RTVE face à la concurrence, n‟a jamais permis à ce groupe de remonter la pente et son déficit n‟a cessé de croître pour atteindre fin 1999 à près 4,6 milliards euros316. De même, en Francela suppression de la publicité a également fragilisé France Télévisions en rendant son financement aléatoire et illisible. En effet, pour compenser les pertes de recettes publicitaires de l‟entreprise en soirée, la réforme de 2009 a introduit le principe d‟un financement complémentaire de France Télévisions par des crédits du budget de l‟État. Or,le gouvernement de l’époque se refusant à augmenter la redevance au-delà de son indexation, il a mis en place deux taxes dont le rendement ne permet pas de financer la dotation budgétaire versée à France Télévisions : une taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision et une taxe sur le chiffre d‟affaires des opérateurs de télécommunication. Tableau N°71 : Bilan de la suppression de la publicité pour le budget de l’Etat (en M€)
Source : Assemblée Nationale, rapport d’information N°1393 de Mme Martine MARTINEL sur le projet d’avenant au COM de France Télévision 25 sept 2013
Ainsi, compte tenu de la situation très dégradée des finances publiques, loin de sécuriser le financement de l‟entreprise, ce mécanisme a exposé France Télévisions aux ajustements effectués sur le budget de l‟État qui se sont traduits en 2012, par exemple, par un recul des ressources publiques du groupe de 27 millions d‟euros par rapport aux hypothèses du COM317. Aussi, ce type de financement ne se subsistera que de manière marginale dans les pays européens, mais il constitue pour certains pays en voie de développement, dépourvues de recettes commerciales, un moyen d‟appoint important. A titre d‟exemple, en Bulgarie, les 315
La France finance les 2/3 du budget de TV 5. Sa contribution au budget 2001 (89,32 M Eu au total) est de 59,6 M Eu pour un financement des gouvernements suisse, belge, et canado-québécois de 18,14 M € et des ressources propres s‟élevant à 11,58 M €. Voir à ce sujet, rapport du gouvernement sur l‟action audiovisuelle en application de l‟article 79 de la loi de finances 1997, Projet de loi de finances 2002 316 Voir à ce sujet : Valérie MAGNAN BILLAUDEAU, “ Espagne, Grèce, Portugal : sous financement face aux défis technologiques ”, in Diffusion, UER, été 1999, p.22 317 Mme Martine MARTINEL, Avis N° 252 de l‟Assemblée Nationale, op.cit.
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subventions budgétaires couvrent, avant leur suppression à partir de 2003, 55 à 60 % de la totalité des besoins de la TNB, mais il est prévu qu‟à partir de 2003. En Slovaquie, le budget de l‟Etat intervenait pour près de 18 % dans le financement. En Hongrie, les radiodiffuseurs publics bénéficiaient du remboursement des frais de diffusion de leurs programmes318. 3.3.2- Le parrainage Le parrainage est une technique promotionnelle distincte de la publicité. Il promeut la marque plutôt que les produits. Il est défini par la directive comme « toute contribution d'une entreprise publique ou privée ou d'une personne physique, n'exerçant pas d'activités de fournisseur de services de médias ou de production d'œuvres audiovisuelles, au financement de services de médias audiovisuels ou de programmes, dans le but de promouvoir son nom, sa marque, son image, ses activités ou ses produits » (article 1 k)).319 Le parrainage consiste donc à utiliser le potentiel médiatique d‟un événement pour associer à l‟événement le nom d‟une marque. Il fait partie de ce qu‟il est convenu d‟appeler la “ communication d‟entreprise ”, il vise à mettre en valeur l‟image de marque globale d‟une entreprise, sans que le contenu de l‟émission financée ne renvoie explicitement à la nature des activités du parrain. Le but recherché est avant tout de construire une image de marque ou d‟entretenir la notoriété de l‟entreprise. Il a longtemps fait l‟objet de réticences de la part des pouvoirs publics, dans la mesure où il est considéré comme un moyen de contourner les interdictions relatives à la publicité. Mais, dans le contexte général de déréglementation et de la recherche de nouvelles formes de financement de la TV, le parrainage a pris de l‟importance. En 2012, Selon l‟IREP / France-Pub, les recettes publicitaires de la TV ont atteint 3,337 Md€ dont 182 M€ en parrainage, soit5,45 % alors que dans l‟ensemble des dépenses de communication des annonceurs, le parrainage représentait 830 M€, soit 2,67% du total. Pour France TV, il représentait en 2010 près de 15,46 % des recettes publicitaires et 2,3 % du chiffre d‟affaires total. Tableau N° 72 : Chiffre d’affaires diffusion de France TV SA (en M €)
Source : France TV, rapport financier 2010, p.53
318
Voir à ce sujet : - “ le financement de la radiodiffusion de service public dans un échantillon d’Etats d’Europe centrale et orientale ”, in revue IRIS de juin 2002, OEA - IMCA, Etude du paysage audiovisuel et des politiques publiques des pays candidats dans le secteur audiovisuel, étude faite pour le compte de la Commission européenne, (DG EAC/59/02), mars 2004. 319 On trouve la même définition en France dans le décret du 27 mars modifié. Voie à ce sujet : CSA,Publicité parrainage et télé-achat à la TV et à la radio, in Les brochures de la CSA, avril 2002
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Graphique 38 : Chiffre d’affaires net facturé du parrainage de France Télévisions SA (en M €)
Source : France TV, rapport financier 2010, p.35
Le parrainage dans la TV peut revêtir deux formes principales : Parrainage de diffusion : participation au financement de la couverture télévisée d‟un événement ou d‟une manifestation ; Parrainage de production : participation au financement d‟un programme produit ou acheté par le radiodiffuseur. Ainsi, le parrainage peut avoir une importance particulière dans certains genres de programmes. C‟est le cas dans la diffusion des films cinématographiques et les téléfilms, les jeux et les concours (remise de prix), et dans le sport. Dans ce dernier cas, le parrainage peut porter sur l‟organisation de la manifestation elle-même à travers, par exemple, la fourniture des services de chronométrage et d‟affichage des résultats, ou la retransmission télévisuelle, comme il peut faire l‟objet d‟une action coordonnée, et s‟inscrit dans un concept intégré de communication commerciale à travers la publicité télévisée avant et après l‟événement, pendant les interruptions réglementaires et de plus en plus pendant l‟action. En France, le parrainage a permis ces dernières années le développement d‟un nouveau type de programmes : les programmes courts320. Initiés au départ par les marques de la grande distribution (Auchan, Intermarché, Leroy Merlin), mais aujourd‟hui même ceux qui ont accès à la publicité n‟hésitent plus à parier sur le genre. En témoigne la diversité des secteurs actuellement représentés : on trouve l‟automobile, les parfums, les boissons, l‟énergie et même les lessiviers. En 2011, les programmes courts parrainés ont représenté 178 heures contre 183 en 2010. Malgré cette baisse (5,4 %), le filon reste rentable pour les annonceurs, et les chaînes en tirent de substantielles recettes. Selon l'Institut de recherches et d'études publicitaires, ils représentent 5,6 % des montants investis par les annonceurs, soit 195 millions d'euros. Ces investissements progressent plus vite que ceux des espaces classiques (14,7 % contre 11 %). Cet engouement pour les programmes courts s‟explique : du côté des chaînes par l‟intérêt économique qu‟ils représentent pour elles, puisqu‟ils ne leur coûtent rien et entrent dans les quotas de productions originales dans la mesure où ils sont assimilés à des programmes ;
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Le premier programme parrainé ( la météo) est apparu sur l'antenne de TF1 en 1988.
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du côté des annonceurs, c‟est une manière nouvelle de faire de la publicité, qui leur permet de communiquer différemment et de véhiculer un autre message en s‟appropriant certains thèmes tels que la préservation de l‟environnement, la protection de la santé, l‟initiation à l‟art, ou en se calquant sur l‟actualité sportive, les fêtes du calendrier ou les sorties du cinéma321.En plus, c'est un moyen leur permettant de contourner la loi interdisant à la télévision la publicité sur la distribution. Pour le service public (France TV), depuis l'arrêt de la pub après 20 heures sur ses antennes, il est devenu très friand de ce type de programmes.
Le parrainage revêt donc un intérêt certain pour les chaînes et pour l‟ensemble du circuit de production des programmes télévisés en quête de financement, à fortiori quand il s‟agit d‟acquérir à des prix d‟or des droits de première diffusion d‟œuvres audiovisuelles ou encore d‟événements sportifs. Mais, il présente un risque d‟ingérence possible des sponsors dans le contenu ou la grille de programmation. La sauvegarde de l‟indépendance éditoriale figure parmi les dispositions réglementaires des différents Etats. Ainsi, conformément à la directive (Art.3 septies), il est précisé dans la réglementation de la plupart des pays que les programmes télévisés parrainés doivent être clairement identifiés en tant que tels par le nom et / ou le logo du parrain au début et / ou la fin des programmes, que les émissions parrainées ne doivent pas inciter à l‟achat et qu‟elles ne doivent pas porter atteintes à l‟indépendance du fournisseur du service média comme pour le placement de produit, que les journaux télévisés et les émissions d‟information politiques ne peuvent être parrainés, que les Etats peuvent interdire la diffusion d‟un logo de parrainage pendant les programmes destinés aux enfants, et que certaines activités sont interdites de parrainage comme le tabac (interdiction totale), les médicaments et l‟alcool (interdiction partielle). Au Maroc, on trouve dans le cahier des charges des chaînes nationales l‟ensemble de ces principes, et en plus, il est signalé les partis politiques et les syndicats ne peuvent pas parrainés un programme et que les émissions parrainées par un même parrain ne peuvent excéder 10% (20% pour Médi1TV) de l‟ensemble de la grille des programmes hebdomadaire et que, lorsque le parrainage est destiné à financer une émission de jeu ou de concours ou une séquence de ce type au sein d‟une émission, des produits ou services du parrain peuvent être remis gratuitement aux bénéficiaires à titre de lots. La référence au parrain ne doit en aucun cas s‟accompagner de citations de nature argumentaire, ni inciter directement à l‟achat ou à la location des produits ou services du parrain ou d‟un tiers. Cependant, des différences marquantes existent entre les pays, comme l‟a relève l‟étude sur le développement des nouvelles techniques publicitaires commandée par la Commission européenne322.Elles concernent : - L‟emplacement du message parrainé : dans le générique du programme parrainé, avant et / ou après le programme ou les coupures publicitaires, dans une bande annonce du programme parrainé, dans un spot d‟autopromotion voire même pendant le programme parrainé. - Le contenu du message parrainé : mention du nom et / ou logo du parrain, présentation du produit de parrain, information sur le parrain ou ses produits, association du parrain avec une mention visuelle ou acoustique, avec des images fixes ou animés voire avec un slogan323. 321 Ibid. 322
Pour plus de détail, voir : CARAT CRYSTAL, BIRD and BIRD, Etude sur le développement de nouvelles techniques publicitaires, op.cit., pp.60 à 66 323 Ainsi, en France la loi précise que la mention du parrain doit rester “ ponctuelle et discrète ”, et interdit l‟identification d‟éléments sonores ou graphiques de la marque ou la référence directe aux produits ou services
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- La durée du message : limitée ou illimitée. 3.3.3-Le bartering ou troc de programmes Ce mode de financement permet au diffuseur d‟acquérir des programmes qu‟il finance, en tout ou partie, par la cession d‟espaces publicitaires aux annonceurs. Considérant que l‟audience qu‟ils visent doit leur être apportée, par des programmes répétitifs visant un public particulier, certains gros annonceurs lient par avance leurs messages à des programmes correspondant à leurs propres critères, et dont ils sont assurés des conditions futures de diffusion324. Les annonceurs deviennent de la sorte de véritables producteurs, qui cèdent leurs droits sur les programmes aux diffuseurs moyennant l‟emplacement de leurs messages publicitaires. Cette formule nommée barter syndication n‟est pas nouvelle, puisqu‟elle s‟est développée, depuis 1980, aux Etats Unis au niveau des séries et des jeux. D‟ailleurs, les Soap Operas tirent leur nom de ce qu‟ils étaient à l‟origine réalisés grâce au financement des grands lessiviers américains. Selon A. Lange et J-L. Renaud, il existe deux formules :325 Une agence de publicité approche, pour ses clients, un producteur ou un distributeur de programmes et achète les droits de diffusion pour un certain nombre de pays ou finance une partie de la coproduction d‟un programme en partageant les droits. Elle distribue ensuite les programmes du catalogue en sa possession sur le marché, contre rémunération ou un temps d‟antenne équivalent ou supérieur au montant des droits. L‟accord entre le diffuseur cédant l‟espace publicitaire et l‟agence est ensuite confirmé avec le client. L‟agence, qui ne possède pas de programmes, contacte un distributeur et quand elle trouve un programme pouvant intéresser un de ses clients, elle peut demander au distributeur de réaliser un montage de parrainage ou de troc. L‟annonceur devient dans ce cas coproducteur de programme. L‟accord barter porte, en général, sur des paquets de programmes négociés entre les détenteurs de catalogue, les diffuseurs, l‟agence de publicité et les annonceurs locaux ou internationaux. Son objectif est d‟améliorer le ciblage de l‟audience et un meilleur coût des dépenses publicitaires. Ce mécanisme était pratiquement inconnu des opérateurs européens jusqu'à très récemment, et n‟a été expérimenté que de façon totalement sporadique. Mais, une prise de conscience de son intérêt, pour faciliter la circulation des programmes européens dans des pays qui connaissent des difficultés financières, commence à voir le jour dans les instances européennes. Selon Sylvie Forbin326, ce système permettra, notamment aux pays d‟Europe centrale et orientale d‟acquérir à un moindre coût des programmes européens de qualité, et de remplir ainsi les obligations européennes auxquelles ils ont accepté de souscrire dans la perspective de leur intégration à l‟Union européenne. Le bartering est largement pratiqué par les diffuseurs des pays en voie de développement, à faible marché publicitaire, et ne disposant pas de structures efficientes de commercialisation de l‟espace publicitaire. Les deux chaînes marocaines font largement appel à ce dispositif pour leur approvisionnement en programmes. 2M, en particulier, s‟est distinguée ces dernières années par un recours massif à ce type de programmes, pour combler les vides de la grille de programmation engendrés par le passage au numérique et la diffusion en continu. Mais ce procédé n‟est pas exempt de défauts. En plus de risque de dans les programmes, alors qu‟en Belgique (communauté flamande), il est permis de montrer un produit et d‟utiliser des signes visuels ou acoustiques associés au parrain 324 J.C.PARACUELLOS, op cité. p.100 325 A. LANGE et J-L. RENAUD, op.cit.p.191 326 Sylvie FORBIN ; “ Radiodiffuseurs d’Europe centrale et orientale ; comment mettre en application la politique des quotas de diffusion européens ? ”, in DIFFUSION, été 1999, p.26
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dépendance d‟un seul fournisseur, et de danger d‟ingérence de la part des annonceurs dans la programmation, il pousse aussi certaines chaînes à brader leur espace publicitaire. Il peut aussi donner lieu à des mécanismes frauduleux et de procédés douteux de facturation de programmes à des prix faramineux, qui cherchent à habiller des échanges de marchandises et de contrats léonins et non réglementaires profitant à certains intermédiaires327. 3.3.4 - Le télé achat Autre forme de financement importé des Etats Unis, les émissions de télé achat sont apparues en Europe avec l‟émergence d‟un secteur privé dans la TV. Utilisé dès 1990 par des petites chaînes italiennes, il s‟est développé surtout à partir de 1987. Le télé achat fait aujourd‟hui partie intégrante de la programmation des chaînes privées. Non prévu par la DTSF de 1989, son introduction constitue l‟un des axes importants de la réforme de 1997. Il est défini comme « la diffusion d‟offres directes au public en vue de la fourniture, moyennant paiement, de biens ou de services, y compris de biens immeubles, de droits et d‟obligations » (article 1.l)). Par des moyens visuels ou auditifs d‟une durée minimale ininterrompue de quinze minutes, le téléachat doit être clairement identifié (article 18 bis). La limite des trois heures destinées au téléachat en ce qui concerne les chaînes qui ne sont pas exclusivement réservées à ce genre de programmes est supprimée. Toutes les règles relatives à la publicité télévisée s‟appliquent au téléachat. Au Maroc, seule Médi1TV est autorisée actuellement à diffuser des émissions de télé-achat dans la limite de deux heures par jour. En vue de prévenir une programmation excessive, en nombre et en durée, ces émissions ne peuvent avoir une durée unitaire inférieure à 15mn et ne peuvent être diffusées qu‟entre minuit et 11h et, dans la limite d‟une heure entre 14h et 16h. Les émissions de télé-achat doivent être clairement annoncées comme telles et elles ne peuvent comporter l‟indication d‟une quelconque marque, ni être interrompues par des séquences publicitaire. Afin d‟éviter que le télé-achat ne soit un moyen détourné pour un annonceur d‟assurer, en sus des campagnes publicitaires, la promotion de ses biens ou services, les émissions de télé-achat ne peuvent comporter l‟indication d‟une quelconque marque.
Le télé achat associe trois métiers différents : la production audiovisuelle d‟émissions de télé achat ; la vente par correspondance, c‟est à dire la gestion des commandes et l‟envoi de produits ; la recherche de produits, leur achat au meilleur prix, leurs tests et leur gestion.
Cette activité est fortement encadrée par la loi notamment, en ce qui concerne les conditions et les horaires de diffusion. Le télé achat présente pour les diffuseurs un double avantage : Les sociétés de télé achat, filiales des chaînes, se rémunèrent par l‟intermédiaire d‟une marge sur la vente des produits, alors que les diffuseurs se rémunèrent selon deux systèmes : 327
Voir à ce sujet les informations diffusées par la presse marocaine sur les transactions de 2M dans le cadre du batering. On apprend que 80 % des séries acquises par la chaîne proviennent d‟un seul fournisseur Fouad Antoun par le biais d‟agences publicitaires (dont 70% sont le fait d‟une seule agence Starcom, ex Adcom media), et que les prix facturés des séries triplent quelques fois par rapport au marché et doublent quasi systématiquement, pour plus de détail sur le sujet voir : Le dossier du Journal hebdo du 13 au 19 octobre 2001 Demain hebdo du 13 au 19 octobre 2001 Journal Libération du 17 octobre 2001 Journal Al Alam du 22 octobre 2001
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- Soit, la société de télé achat leur verse une redevance par émission diffusée, méthode choisie par les chaînes de câble en France ; - Soit, la chaîne de TV perçoit un pourcentage sur les ventes comme le font TF1 et M 6. Canal + a adopté dans ce domaine une stratégie différente en créant une structure Canal Club qui s‟occupe de la production des émissions de télé achat pour les chaînes thématiques, ainsi que de l‟achat et de la vente de produits.328 3.3.5- Les droits dérivés Les droits dérivés résultent de “ la cession de droits d‟adaptation de tout ou partie des éléments caractéristiques d‟une émission par la fabrication d‟objets d‟art appliqué (jeux, jouets, panoplie), l‟édition de disques, de cassettes ou de livres ”329. Ce sont surtout les personnages de films d‟animation ou les programmes pour jeunesse qui donnent lieu à différentes exploitations commerciales mais, c‟est une pratique qui n‟est pas spécifique à l‟animation. L‟exploitation des droits dérivés est une pratique ancienne330, et les droits dérivés sont apparus en Europe avant les T.V commerciales, car ils sont considérés, même dans les instances publiques, comme une source de financement complémentaire331. Les intérêts convergents des différents intervenants dans l‟animation (services jeunesse, sociétés d‟animation et industries de jouet) et leur complicité mutuelle ont favorisé l‟installation d‟une logique commerciale et son corollaire la séduction. Les enfants sont de plus en plus le centre d‟intérêt de la stratégie des responsables de marketing des industries pour enfants, notamment les jouets, qui trouvent dans la programmation jeunesse un terrain fertile pour la promotion de leurs produits par le biais de la publicité, du parrainage et l‟utilisation de la notoriété d‟un dessin animé. De plus en plus, la vente de licences pour l‟exploitation des produits dérivés intervient en amont dans le processus de production, les principaux personnages de nouveaux dessins animés tendent à être des jouets que les firmes lancent ou viennent de lancer sur le marché. Il ne s‟agit plus, selon A.et M. Mattelart, “ du jouet comme produit dérivé classique d‟une série de télévision ou d‟un dessin animé tel que l‟avait imaginé l‟industrie Disney, mais d‟une fusion synchrone du marché et du programme de télévision.”332 Autrement dit, dans un nombre croissant de cas, la production d‟une série animée apparaît elle-même comme le produit dérivé d‟une opération commerciale : un jeu vidéo (Les Pokémon de Nintendo), un jeu d‟Internet (Bionicle de Lego) ou une gamme de jouets (les Transformers de Hasbro).333 328
R. Le CHAMPION et B. DONARD, op. cit.p.105 N. TOUSSANT, L’économie des médias, op. cité. p.113 330 Il est coutume de faire remonter le premier produit dérivé d‟un programme audiovisuel à une bouillotte “ blanche neige ”, proposée par Walt Disney il y a plus de 55 ans. En France, la série Thierry La Fronde, avec ses albums et célèbres figurines, marque l‟émergence de cette activité. Son envol sera donné au niveau mondial par la trilogie Stars Wars ; l‟emploi du terme merchandising au sens de cession de licence et de droits dérivés semble apparaître à cette occasion. 331 Cf. à ce sujet : - Myriam BAHUAUD, Dessin animé, jouet, des produits dérivés, Paris, le Harmattan, 2001 - Myriam BAHUAUD, « Les émission jeunesse conçues pour promouvoir les produits dérivés », in Dossiers de l‟audiovisuel, N° 1058, mars-avril 2003 - Myriam BAHUAUD, « Les stratégies de droit dérivés : entre logiques publique et commerciale. Le cas des produits dérivés pour enfants et des programmes télévisés français », in colloque Bilatéral franco-roumain / CIFSIC, Bucarest, 28 juin- 2 juillet 2003 - Lelia MAURELLET, L’internationalisation du dessin animé, mémoire de maîtrise, IFP, Paris 2, 1998 332 Michèle et Armand MATTELART, Le carnaval des images, op.cit. p.53 333 M. DAGNAUD, op.cit. p.84 329
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Ainsi, Pokémon, dessin animé syndiqué qui est à l‟origine un jeu vidéo, s‟est développé pour devenir un secteur industriel international qui produit cartes de jeu, bandes dessinés, figurines en plastique animaux domestiques virtuels, jouets en peluche, tee-shirt et disques compacts, avec des ventes de l‟ordre de cinq milliards de dollars en 1999, en seulement trois ans d‟existence.334 En France, Pokémon a permis à TF 1 de réaliser ses meilleures audiences auprès de 4 / 10 ans et à l‟ensemble “ des franchisés Pokémon ”de dépasser 150 millions euros de chiffre d‟affaires sur le marché français en 2000335. Ces résultats, ne sont pas un cas isolé, d‟autres dessins animés antérieurs ont réalisé des résultats appréciables : les Schtroumfs, les Tortues Ninja, Babar, les Télétubbies, Némo, etc. Dans un contexte d‟internationalisation de la production et des marchés, des fusions et intégrations, qui concerne aussi bien l‟industrie de jouet que l‟ensemble du secteur de la communication, la pratique du merchandising336 touche toutes les tranches de la programmation, et elle est susceptible de connaître une extension, car la rentabilisation des programmes n‟est plus assurée que par la vente à l‟étranger, ou à d‟autres chaînes, mais se fait au travers de supports différents : des jouets aux vêtements , du livre au multimédia. L‟internationalisation génère donc un double profit par l‟intermédiaire du merchandising, et les produits dérivés font de plus en plus partie du processus de production des programmes. Cette stratégie permet aux producteurs et distributeurs des programmes de réduire les prix de cession aux diffuseurs, qui contribuent pour leur part, à la notoriété et au succès commercial des produits dérivés337. Ils se convertissent ainsi en des “ wagons promotionnels ”, et pour cela, ils peuvent d‟ailleurs être intéressés sous une forme ou une autre au merchandising. De telles pratiques, où la distinction entre publicité et programme tend à s‟estomper, commencent à se développer dans d‟autres genres ou programmes (sports, variétés, jeux, télé réalité, etc.), en association avec d‟autres types de production (disques, Cdrom, vêtements), voire en partenariat avec d‟autres modes d‟expression qui semblaient jusqu‟à maintenant à l‟écart de cette forme de promotion (concours Barbie du meilleur spectacle de danse amateur).338 Avec la généralisation de la numérisation, le début du millénaire a vu ainsi, le triomphe de nouvelles émissions de divertissement “ hybrides ” qui, combinent fiction, réalité, jeux, documentaires, reportages spectacles, et une panoplie d‟ingrédients générateurs de revenus : parrainage, renvoi à d‟autres supports payants ( Internet, téléphonie, chaînes de câble, etc.)339. Ces émissions colonisent maintenant les horaires stratégiques des chaînes du monde. Reproduisant la formule américaine de Big Brother, avec une adaptation locale en 334
Cecilia FEILITZEN, Catherine BUCH , “Outlooks on children, Youth and media, UNESCO-International clearing housse on children, Yerbook, Gôteborg, Nordicom 2001, in Les Dossiers de l‟audiovisuel, N° 108 335 M. DAGNAUD, op.cit.p.8 336 On désigne généralement par merchandising (marchéage), l‟ensemble des techniques destinées à améliorer la présentation des produits dans un espace donné. 337 Ainsi comme l‟exprimait, il y a très longtemps un représentant de l‟industrie de jouet (G. Mills) : «il y a encore peu de temps, nous sortions un produit que des spots publicitaires se chargeaient d‟annoncer. Les enfants demandaient le produit après avoir vu la publicité. A présent, au lieu de se voir confinée à un spot de 30 secondes, notre firme crée des personnages sur la base de produits, tels que l‟ours un tel, et le biscuit un tel et cela dans des programmes d‟animation qui durent une demi-heure. Le rendement est bien plus intéressant » Busnissweek dun25 mars 1985, cité par M.et A. MATTELART, op. cit.p.53 338 Cf. à ce sujet M. DAGNAUD, op. cité. p.85 339 Cf. à ce sujet : - Les comptes rendus de la journée d‟étude réalisée par l‟INA sur le thème : « Les temps télévisuels : étude des cas autour de big brother », INA, Paris 4 juillet 2002 - Victor SAMPEDRO, « Les nouveaux genres de la télévision commerciale et leurs effets sur le public », in séminaire d‟experts sur la « Convention européenne sur la TV transfrontière dans un environnement en pleine mutation », Palais de l‟Europe, Strasbourg, 2001, Disponible sur le site du Conseil de l‟Europe : http//www. oec.int/T/F/Droits de l‟homme/Media/2_T-TT/3_textes et documents/T-
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fonction des réactions du public, elles ont permis aux chaînes qui les ont lancées de progresser en parts d‟audience notamment auprès du jeune public, en conséquence de la production de ces programmes. Ces émissions ont pour noms, entre autres, Loft Story, Star Academy, Pop Star, etc.), elles illustrent une nouvelle économie des programmes. Par leur sollicitation aux téléspectateurs pour choisir ou éliminer les candidats Loft Story, par exemple, a suscité 20 millions d‟appels téléphoniques en France. A 0,56€ l‟appel, France télécom, la chaîne et le producteur se sont ainsi répartis 11,2 milliards d‟euros : France Télécom en prenant la moitié, M 6 et Endemol se partagent le reste. Avec Star Académie, la chaîne aurait enregistré plus de 1,2 millions d‟appels par soirée lors des dernières émissions. A cela, il faut ajouter les recettes provenant de la vente des deux CD issus des deux émissions qui ont atteint le “ sommet des hits ” avec deux millions de CD vendus en deux mois, et qui relèvent le pouvoir d‟influence de ces émissions sur le jeune public. Tf1, qui a repris par la suite le flambeau de Star Academy, a remporté à son tour, par le biais de cette émission un grand succès. Par le biais de ces émissions, les TV généralistes deviennent, selon M. Dagnaud, “ des vitrines pour des activités marchandes sur des supports filiales de leur groupe. C‟est une sorte d‟économie globale liant l‟antenne à des produits et des services (en particulier sur d‟autres médias filialisés) qui se met en marche. ”340 On constate, ainsi, que la mondialisation du marché et la concurrence accrue des chaînes privées commerciales, ont conduit à des modifications des formats d‟émissions, à des allégements des grilles de programme, et à une imbrication entre une logique commerciale et des programmes destinés aux jeunes qui se traduit par l‟adoption par les diffuseurs de politique de merchandising. Dès lors, “ les produits dérivés utilisent la TV pour vivre, mais ils participent également à la vie de ce média ”341. Ce constat montre non seulement, le caractère particulier de la TV mais aussi son rôle complexe avec les autres marchandises culturelles, que souligne P. Flichy, lorsqu‟il affirmait “ la TV se nourrit de marchandises culturelles mais en même temps contribue à leur notoriété ”342. C‟est un média qui “ ne se contente pas d‟informer sur différentes marchandises culturelles mais, elle en achète certaines (souvent à bas prix) pour les retransmettre au public. Elle est à la fois un marché non négligeable et une condition d‟accès au marché. ”343
3.3.6- Autres recettes commerciales D‟autres recettes peuvent venir accroître les produits d‟exploitation d‟une chaîne. Ce sont, entre autres, les ventes de programmes, la fourniture de service (de production, de transmission, etc.), l‟édition de presse et électronique. Il peut s‟agir de revenus de transfert de bénéfices des filiales commerciales ou d‟entreprises communes. En effet, depuis plusieurs années, la diversification des portefeuilles d‟activités des chaînes, notamment commerciales, constitue un relais de croissance indispensable au développement des groupes de TV. Le poids des activités de diversification au sein des chaînes de TV varie selon l‟évolution du périmètre de consolidation de chacun des groupes. Les activités de diversification des chaînes commerciales couvrent des domaines très variés, exploitant et valorisant, le plus souvent en synergie, les complémentarités qui peuvent exister avec l‟activité de base de la société mère. C‟est ainsi que, la plupart des chaînes ont développé des activités en amont, à savoir, des activités liées à la production et à l‟acquisition des programmes en vue de s‟assurer l‟exclusivité de certaines compétences et de valoriser l‟exportation, et les droits des 340
M.DAGNAUD, op.cit. p.85 M.BAHUAUD, in Les Dossiers de audiovisuel, op.cit. 342 P.FLICHY, Les industries de l’imaginaire, op.cit.p.76 343 Ibid., p.78 341
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productions audiovisuelles et cinématographiques, et des activités en aval qui valorisent la marque de la chaîne ou son savoir-faire344. Les principaux domaines de diversification concernent : la production audiovisuelle, la distribution des programmes, l‟édition de phonogrammes, l‟édition électronique, l‟édition de vidéogrammes, la presse, l‟édition de chaînes thématiques, la TV numérique et le télé achat. Ainsi le chiffre d‟affaires consolidé du groupe TF1, pour 2012, s‟établit à 2 620,6M € dont 1 402,8 M€ de chiffre d’affaires publicitaire de la chaîne TF1 et 1217,8 M € de chiffre d’affaires des diversifications (845,1 M € hors publicité). Pour M6, les ressources issues de la diversification représentent 38,7 % du chiffre d‟affaires du groupe, soit 536,3 millions d‟euros contre 27 % en 2001, soit 235,9 millions d‟euros en 2001. Tableau N°73: Part de la diversification dans les produits d’exploitation des groupes TF1 et M6 TF 1 2009 1 604,6 1 429,4 175,2
Recettes de publicité - TF1 - Autres supports Recettes de diversification Chiffre d’affaires
2010 1 793,3 1 549,8 243,5
M6 2012 1 775,5 1 402,8 372,7
760,1 2 364,7
829,1 2 622,4
845,1 2 620,6
Recettes de publicité - M6 - Autres supports
2009 611,9 605,6 6,1
2010 677,9 646,2 31,7
2012 664,0 647,1 16,9
Chaînes numériques Recettes de diversification
147,1 617,1
168,9 614,9
186,1 536,3
Chiffre d’affaires
1 376,6
1 461, 7
1386,6
Source : Rapports financiers 2010 et 2012 de TF1 et M6
Pour l‟instant, la participation des filiales de la TV numérique et de l‟Internet au résultat des groupes de TV reste déficitaire, en raison de lourds investissements engagés mais, ce sont des créneaux porteurs indispensables au développement futur des chaînes, qui leur permettront de se positionner dans le marché de la TV numérique et d‟exploiter pleinement les opportunités de la numérisation et de la convergence. Pour le secteur public, le cadre juridique de beaucoup de pays est souvent un frein à la diversification et à la mise en place d‟entreprises communes et d‟alliances avec des sociétés commerciales. Il n‟empêche que, les mutations en cours dans l‟audiovisuel, incitent les pouvoirs publics à consolider le périmètre des groupes publics, et à l‟adapter à l‟environnement numérique afin de préserver la mission de service public de radiodiffusion. Les chaînes publiques se lancent de plus en plus dans l‟édition de chaînes thématiques, l‟édition électronique, participent au lancement de plates-formes numériques, et créent des filiales de production et de distribution.
344
R. Le CHAMPION et B. DONARD, op.cit. p.103
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Conclusion Face à la diversité des sources de financement, les diffuseurs ont opté pour des solutions variées et l‟éventail des cas est très large d‟un pays à l‟autre, qu‟au sein d‟un même pays. Le recours à une pluralité de sources est une réalité dans presque tous les pays européens. Mais, ce recours comporte le risque d‟une déstructuration des missions de service public, d‟autant plus élevé que le poids de financement publicitaire est important. Certains pays refusent le financement par la publicité (Royaume-Uni, Suède, Norvège..) et d‟autres l‟adoptent (Espagne, Portugal). Il est l‟objet, au niveau européen, d‟un controverse qui a atteint son point culminant, par les plaintes déposées par les groupes audiovisuels privés, pour concurrence déloyale, contre les groupes publics (Murdoch contre la BBC, Berlusconi contre la RAI, l‟association des TV privées allemandes contre l‟ARD et ZDF, TF1 contre France 2 et France 3, les chaînes privées espagnoles Télécinco et Antenna 3 contre la RTVE). Ces plaintes contestaient la légitimité des chaînes publiques à avoir accès au marché publicitaire, ou à diffuser des programmes de même nature que ceux des chaînes privées. Devant ces controverses, certains suggèrent d‟établir un clivage net en affectant la redevance aux seules radiotélévisions publiques et de réserver la publicité aux seuls radiodiffuseurs privés. D‟autres conseillent l‟affectation de certaines ressources à certaines émissions : les recettes de redevance seraient affectées prioritairement aux missions de service public (définies par le cahier de charges), la publicité ira aux activités concurrentielles, et les subventions seront réservées à certains services (archives, diffusion internationale et scolaire). La direction de la concurrence de l‟Union européenne estime que seuls, deux types d‟obligations de service public peuvent justifier un financement public : les obligations imposées spécifiquement aux chaînes publiques (couverture nationale, standards technologiques, limitation publicitaire, obligations de contenu ) et les obligations supplémentaires, liées à la fourniture de services associés à la nature publique des diffuseurs (information, éducation, culture, programmes régionaux ou destinés aux minorités). Le financement accordé doit correspondre au coût effectif du respect de ces deux obligations. Ceci conduit à remettre en cause la légitimité de diffusion par les chaînes publiques de certaines émissions concurrentielles des chaînes privées comme, le sport et les jeux. Les Etats membres ont manifesté leur opposition à une telle approche, souhaitant s‟en tenir à “ un principe de transparence de financement des chaînes publiques ”, chaque Etat gardant la responsabilité de définir comme il l‟entend “ le périmètre de service public ”345. C‟est ce qu‟a confirmé la résolution adoptée par les ministres de la culture européenne le 17 novembre 1998 à Bruxelles : “ il appartient à chaque Etat membre de définir et d‟organiser le mandat de service public et les systèmes de financement correspondants ”. Face à l‟augmentation générale des coûts de la TV, le recours à un financement multi sources n‟a rien de surprenant. La saturation du parc des récepteurs, la réticence des pouvoirs publics à augmenter le montant de la redevance ainsi que les difficultés liées à son recouvrement tendent à limiter structurellement l‟apport de ce type de ressource. Les recettes publicitaires aident alors les chaînes publiques à maintenir à bas niveau le montant de la redevance, et elles garantissent indépendance et proximité du public à ces services de radiodiffusion qui, aujourd‟hui comme demain, ne doivent pas se laisser confiner dans une 345
Michel FANSTEN, « Financement de la TV publique en Europe », op.cit.
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niche culturelle et pédagogique. Les différents types de financement ont chacun ses avantages et ses inconvénients, leur usage combiné peut maximaliser les avantages, pour autant que soit fait intelligemment en tenant compte du cadre juridique, économique et politique des différents pays et marchés. L‟équilibre entre les différentes sources de financement de la TV résulte donc à la fin, des lois auxquelles obéissent ses marchés et des mesures de régulation qui influenceront son développement. Toutes fois, l‟action régulatrice ne peut affecter le cours naturel de l‟évolution que dans des limites de plus en plus étroit, car le financement fait de plus en plus appel au marché et au téléspectateur consommateur. La question posée dans tous les pays du bon équilibre entre ressources publiques et ressources commerciales ne peut que prendre une dimension nouvelle avec les perspectives ouvertes par la TV numérique dans lequel le péage tienne un rôle central. Ce dernier, par la multiplication des programmes thématiques destinés à des segments de public précis favorise le passage d‟une TV généraliste de masse à une TV fragmentée. Il remet en cause les mécanismes particuliers qui règlent encore l‟économie de la TV (financement en amont et financement latéral) et la rapproche de ceux régissant les autres activités commerciales et industrielles entamant, ainsi, une refonte de l‟économie de la TV346.
346
Voir à ce sujet, FADIL Abdelmajid, Vers une nouvelle économie e la TV, op.cit.
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Liste des tableaux Tableau N°1 : Evolution des modes de réception des foyers américains en %....................................14 Tableau N° 2: Evolution des revenus et du cash-flow de l’industrie du câble aux Etats-Unis de 1998 à 2002 (en millions de dollars)…………………………………………………. 19 TableauN°3: Structure de l'offre TV par genre de programmes (%)…………………………………….. 35 Tableau N°4: Structure de la consommation TV par genre de programmes (%)………………………..35 Tableau N°5 : l’offre des programmes sur 2M en 2005…………………………………………………… 36 Tableau N°6 : Evolution du coût horaire moyen des œuvres audiovisuelles (en €) ……………….…39 Tableau N°7 : Coût horaire de la fiction selon les formats (en milliers euro)………………………… ..41 Tableau N°8 : Investissements des chaînes dans la fiction …………………………………………………42 Tableau N°9 : Evolution des dépenses de fiction (en M €)……………………………………………….. .44 Tableau N°10 : Investissements des chaînes dans l’animation…………………………………………… 45 Tableau N°11: Evolution des dépenses de l’animation (en M €) ………………………………………….45 Tableau N°12 : Financement de l’animation(en M €) ………………………………………………………46 Tableau N°13: Les commandes des diffuseurs en documentaire ………………………………………….49 Tableau N°14 : Evolution des dépenses de documentaires (en M €)…………………………………….. 51 Tableau N°15: Les commandes des chaînes en magazines …………………………………………….…..51 Tableau N°16 : Les commandes des chaînes en spectacle vivant …………………………………………54 Tableau N°17 : Coût horaire moyen des genres du spectacle vivant …………………………………….54 Tableau N°18 : Evolution des droits de diffusion des évènements sportifs (en M$) ……………………56 Tableau N°19 : Evolution des droits de retransmission des Jeux olympiques d’été ……………………57 Tableau N°20: Droits mondiaux de la coupe de monde de football (en M) ………………………… 58 Tableau N°21 : Produits de la FIFA de la coupe du monde 2010 (en M$)………………………….. 59 Tableau N°22 : Recettes de diffusion TV de la FIFA par région (2007-10) ……………………………..59 Tableau N°23: Les plus gros contrats des droits télévisés en Europe (en M $) ………………………...62 Tableau N°24: Evolution droits télévisés de la ligue 1et2 ………………………………………………..…63 Tableau N°25 : Financement de la production audiovisuelle aidée en France en 2012 ………………65 Tableau N°26 : Le financement de films d’initiative française (en%) ……………………………………71 Tableau N°27: Analyse comparée des divers systèmes de diffusion ……………………………………. .75 Tableau N°28 : les coûts de l’infrastructure d’un site TNT ……………………………………………....77 Tableau N° 29 : Evolution du coût de diffusion des chaînes françaises en clair (en M €) ……………78 Tableau N°30 : Répartition du personnel permanent du groupe France TV par catégorie Professionnelle……………………………………………………………………………… .79 Tableau N°31 : Répartition du personnel du groupe TF1 par catégorie professionnelle…………… .79 Tableau N°32 : Répartition du personnel de Métropole TV par catégorie professionnelle ………….80 Tableau N°33 : les charges du personnel des groupes TF1 et M6(en M€)………………………….. 81 Tableau N°34 : Evolution des charges du personnel de France télévisions(en M€)………………… 81 Tableau N°35 : Evolution des dépenses du personnel de France télévisions ……………………………81 Tableau N°36: Salaire brut annuel moyen par catégorie professionnelle CDI de TF1 en € …………81 Tableau N°37: Disparités salariales dans 2M en DH 82…………………………………………………..82 Tableau N°38 : Evolution du coût de la grille des chaînes hertziennes françaises (M€)…………….. 84 Tableau N° 39: Coût de la grille de France TV (en M €) ……………………………………………….…85 Tableau N° 40 : Evolution des engagements financiers de Canal+ en matière de programmes ……..87 Tableau N°41: Marge brute de la grille de TF 1 (en M €) …………………………………………………88 Tableau N°42: Marge brute de la grille de M 6 (en M €) …………………………………………… 88 Tableau N°43: Marge brute de la grille de Canal+ (en M €)……………………………………….. 88 Tableau N°44: Marge brute de la grille de France TV (en M€) …………………………………………. 89 Tableau N°45 : Evolution de la performance du coût de la grille de TF 1……………………………… 90 Tableau N°46: Evolution de la performance du coût de la grille de M 6 ………………………………..90 Tableau N° 47: Ventilation du CA de la télédiffusion dans les 5 grands pays européens……… ……. 93 Tableau N° 48 : Evolution des recettes de la redevance audiovisuelle …………………………………. 97
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Tableau N° 49: Evolution du taux de la redevance en France en euro…………………………………..98 Tableau N° 50: Situation du compte TPPAN………………………………………………………………..101 Tableau N° 51: Evolution de la ressource publique issue de la contribution à l'audiovisuel public 102 Tableau N° 52: Répartition du produit de la redevance entre les organismes publics (2003- 2012) 134 Tableau N°53 : Foyers recevant une offre numérique payante (31 décembre 2011) …………..…. 110 Tableau N°54 : Taux de croissance des revenus de TV par abonnement ……………………………...110 Tableau N°55: Evolution des dépenses des ménages français en programmes audiovisuelles…….. 111 Tableau N° 56: Evolution du chiffre d’affaires de Canal+ .……………………………………………..113 Tableau N° 57: Répartition géographique des investissements publicitaires dans le monde…………115 Tableau N°58 : Les dix premiers marchés publicitaires (en M$) ……………………………………….115 TableauN°59 : Place des investissements publicitaires par rapport au PIB et par habitant……….. 116 TableauN°60: Evolution des recettes publicitaires dans les grands médias (en M€) …………. ….. 117 Tableau N°61: Evolution des recettes publicitaires dans les grands médias …………………………. 118 Tableau N°62: Evolution des investissements publicitaires en millions dirhams…………………….. 119 Tableau N°63 : Evolution des principaux indicateurs financiers de 2M (2003-08) …………………..121 Tableau N° 64: Evolution des recettes nettes de publicité et de parrainage des chaînes…………… 126 Tableau N° 65: Financement des chaînes de télévisions publiques en 2005…………………….…… 127 Tableau N° 66 Evolution des parts d'audience des chaînes hertziennes ……………………….…. 135 Tableau N° 67: Répartition de l’audience selon les chaînes en 2013 ……………………………….…136 Tableau N°68 : parts d’audience et parts de marché en 2012 ……………………………………….….137 Tableau N°69 : Comparaison des réglementations européennes en vigueur avant la transposition de la SMASF ………………………………… …………………………………………….….142 Tableau N°70 : Dispositions des directives TVSF et SMASF …………………………………………… 134 Tableau N°71 : Bilan de la suppression de la publicité pour le budget de l’Etat (en M€) ……..........151 Tableau N° 72: Chiffre d’affaires diffusion de France TV SA (en M €) ……………………………… 155 Tableau N°73: Part de la diversification dans les produits d’exploitation des groupes TF1 et M6 ...160
Liste des graphiques Graphique 1 : Investissements publicitaires nets par média aux Etats-Unis…………………………..…15 Graphique N°2 : Parts d’audience des 20 principales chaînes américaines en 2011…………………..17 Graphique N°3 : Offre et consommation télévisuelle selon le genre de programmes en France ……. 37 Graphique N°4 : Répartition par format en volume horaire …………………………………………….…42 Graphique N°5 : Financement de la fiction en France en 2012 …………………………….…………….43 Graphique N°6 : Financement de l’animation …………………………………………………………….…47 Graphique N°7: Evolution du coût horaire moyen du documentaire …………………………………..…50 Graphique N°8 : Marge nette de diffusion de la coupe du monde, de l’euro de football et des JO….. 61 Graphique N°9 : Décomposition de la marge nette de diffusion de la coupe du monde du football… 61 Graphique N°10 : Offre de sport en France en 2010 repartie par disciplines ………………………….62 Graphique N°11 : Les droits télévisés du foot dans 5 grands championnats d’Europe en 2014……. 63 Graphique N°12: Diffusion des films sur les chaînes nationales françaises (%)................................. 70 Graphique N°13 : Mode de réception de la TV en France (en%) ………………………………………..75 Graphique N°14: Evolution du coût de la grille des chaînes hertziennes françaises (M€)…………… 84 Graphique N°15: Le financement des chaînes de TV en France …………………………………….…… 94 Graphique N°16 : montant de la redevance en Europe en 2012 ………………………………………….97 Graphique N°17: Foyers abonnés à une offre TV par mode de réception dans le monde………...... 108 Graphique N°18 : Nombre de foyers satellite abonnés en Europe de l’Ouest……………………….. .109 Graphique N°19 : Nombre de foyers satellite abonnés en Europe de l’Est …………………………… 109 Graphique N°20: Evolution des dépenses des ménages français en programmes audiovisuelles … 112 Graphique N°21 : Evolution du nombre d’abonnés et des recettes d’abonnement de Canal+ ….… 113 Graphique N°22: dépenses publicitaires dans les médias en pourcentage du PIB …………………... 116 Graphique N°23: Evolution des investissements publicitaires bruts par média entre 2006 et 201… 119
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Graphique N°24: Evolution des investissements publicitaires bruts par média au Maroc…………...120 Graphique N°25 : Répartition du budget d’investissement 2014 du ministère de la communication……………………………………………………………………………121 Graphique N°26: Parts de la TV dans les investissements publicitaires ………………………………. 123 Graphique N°27 : Répartition des investissements publicitaires selon les médias…………………… 122 Graphique N°28: Evolution des recettes publicitaires des chaines ……………………………………. 123 Graphique 29: Evolution des parts de marché publicitaires selon les catégories de chaines de TV 125 Graphique N°30 : durée d’écoute mondiale ………………………………………………………………. 131 Graphique N° 31 : durée moyenne d’écoute par individu …………………………………………….…132 Graphique N°32: Evolution de la consommation du média TV en France …………………………… 133 Graphique N°33 : Evolution de la durée d’écoute en France ………………………………………….. 133 Graphique 34: Evolution du taux moyen d’audience par tranche horaire …………………………… 134 Graphique 35: Evolution des parts d'audience des chaînes hertziennes ……………………………… 135 Graphique 36 : Benchmark audiences chaînes publiques en soirée……………………………………. 167 Graphique 37 : Coût d’un spot de 30 secondes un dimanche vers 20h40………………………….….. 139 Graphique 38 : Chiffre d’affaires net facturé du parrainage de France Télévisions SA (en M €).. 153
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