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HMONP Agence d’architecture, vers un modèle collaboratif ? Agence d’architecture, rompre avec des codes archaïques.



HMONP Agence d’architecture, vers un modèle collaboratif ? Agence d’architecture, rompre avec des codes archaïques.

Camille Deslandes sous la direction de Monsieur Noël Carat Mémoire de soutenance à l’Habilitation à la Maitrise d’Oeuvre en son Nom Propre - Juin 2021 présenté sous la forme de Validation des Acquis Professionnels Ecole Nationale d’Architecture Paris Val de Seine


REMERCIEMENTS

Je tiens avant tout à remercier mon directeur d’étude Noël Carat pour son soutien et ses conseils tout au long de cette année. L’enseignement de qualité dispensé par la formation HMONP de l’école Paris Val de Seine a pu nourrir mes réflexions et a représenté un réel plaisir intellectuel, merci donc aux enseignants et à l’administration de l’école. Je remercie tout particulièrement, Nathalie Bloedé pour ses relectures et corrections, sa patience et ses encouragements ; le Collectif Sens et Léna pour m’avoir accordé cet échange si inspirant ; Angélique, Claire, Clémence, Dominika, Farah, Juliette, Kamil, Margaux, Mélissa et Pierre pour les nombreuses discussions constructives, leurs références qui ont enrichi mon propos et leur écoute. Enfin, j’exprime toute ma reconnaissance à mes parents qui ont toujours soutenu mes projets professionnels. Je dédie ce mémoire à ma maman, qui n’aura pas pu connaître l’aboutissement de mes études.


SOMMAIRE INTRODUCTION

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A. Agence d’architecture : constats 1. Un modèle de fonctionnement Formation Accès à l’emploi et contrats Différents types de structure Méthodes de gestion de projet et de production

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2. La résultante d’un modèle économique défini ? Loi du marché Temps de production, commandes et montage d’opérations Gestion des ressources financières et de la masse salariale

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B. Agence d’architecture : enjeux 1. Qualité architecturale

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2. Qualité environnementale

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3. Rapport de production, enjeux sociaux et humains

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C. Agence d’architecture : vers un modèle collaboratif hybride 1. Un modèle collaboratif inspiré

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2. Des sociétés coopératives et collectifs d’architectes SCOP SCIC Collectifs

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3. Modèle de demain, démarche personnelle

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CONCLUSION

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INTRODUCTION

Depuis 6 ans, suite à l’obtention de mon Diplôme d’Etat d’Architecte, j’ai été employée dans 4 structures de type “agences d’architecture”. J’ai toujours eu la perspective de présenter mon Habilitation à la Maîtrise d’Oeuvre en son Nom Propre après quelques années d’expérience afin de mieux comprendre les mécanismes de ce métier complet et complexe, les confronter avec l’expérience déjà acquise sur le terrain, les comprendre avec recul pour ainsi prétendre les appliquer, en mon nom propre, dans un futur proche. Ma première expérience professionnelle s’est faite à Copenhague, durant une année, dans une jeune agence avec laquelle j’ai surtout collaboré au travers de concours d’équipements publics et de logements. La culture et le mode de vie scandinaves mais aussi l’organisation de cette structure, ont sûrement été mon premier “modèle à suivre”, objectif professionnel qui ne me quittera plus depuis mon départ du Danemark. Structure horizontale, pensée fédératrice des associés transmise à l’équipe grâce à l’organisation, la communication, l’écoute et l’intégration des nouveaux collaborateurs au sein de l’agence, le travail m’a semblé un moyen commun pour développer le même objectif, celui de construire grâce à une pensée partagée. A mon retour en France, rapidement embauchée dans une agence parisienne spécialisée dans les équipements recevant du public, j’ai découvert la réalité de la profession durant trois ans. Chargée de deux projets d’environ 2000m2, peu armée pour affronter cette réalité, j’ai vite été confrontée à l’autonomie. Le gérant de cette agence ayant donné le ton dès les premiers mois : il ne souhaite plus être dans la réalité du dessin et des projets. Directement confrontée aux problématiques diverses des études et des chantiers de ces projets, j’ai beaucoup appris et développé des relations de confiance avec les intervenants. Néanmoins, j’ai fait le constat d’un manque de collaboration au sein même de la structure dans laquelle je travaillais. Riche et déterminante, cette expérience sera la base de mon propos pour ce mémoire et de mes réflexions pour la suite de ma carrière. J’ai quitté cette agence, et les projets dans lesquels je m’étais investie durant trois années, dans l’espoir de pouvoir trouver un plus grand épanouissement dans une structure plus jeune, que j’imaginais plus dynamique et collaborative.

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Les deux expériences suivantes, dans lesquelles j’ai pu continuer de développer mes connaissances dans de nouveaux domaines, n’ont fait que renforcer le sentiment constant du manque de collaboration et de bienveillance au sein des structures qui m’accueillaient. Suite à cette expérience, j’ai été embauchée pour prendre la charge de projets et gérer tous les aspects des phases d’études de ces derniers. J’ai très vite fait face à un manque d’autonomie, de confiance, et à une communication bancale qui m’ont semblé peu efficaces pour le bon avancement des projets dont j’avais la charge. Cette communication, j’ai également pu la retrouver à plus large échelle dans la gestion de ces agences : peu de transparence sur les contrats des projets, transmissions incomplètes des informations sur les projets, peu de reconnaissance ou encore pressions professionnelles et personnelles lors de points. Confrontée à ce que j’ai perçu comme des dysfonctionnements d’agence, qu’ils soient en termes de décisions de projets et/ou de production d’équipe, je n’ai cessé de me poser cette question : pourquoi les agences d’architecture fonctionnent-elles sur ce même mode de gestion des projets et de production ? Chacune de ces expériences, à sa manière, n’a fait que renforcer un questionnement sur l’exercice de la profession au sein des structures dites “agence d’architecture” dans lesquelles je travaillais : pourquoi ces structures n’évoluent-elles pas avec la société actuelle qui m’entoure ? Est ce que le fonctionnement des agences d’architecture est en adéquation avec la qualité architecturale vers laquelle nous aspirons ? Outre l’expression de la culture, l’architecture porte un caractère social. Un Architecte, en tant que professionnel se doit de prendre en compte les besoins humains, ceux des utilisateurs et usagers futurs, et maîtriser les aspects environnementaux et techniques. De la même manière, la production architecturale ne peut se faire sans les moyens humains et le rapport de production déployé. Comme rapport de production j’entends la qualité du travail produit, la responsabilité de chacun mais aussi la qualité de l’environnement de production proposée au sein des structures et dans lesquelles évoluent les architectes.

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Les réflexions diverses de la formation HMONP, les séminaires, les interventions variées et les constats de mes précédentes expériences ont alimenté mon sujet de mémoire et ont permis de cerner le questionnement de celui-ci. Compte tenu des changements sociétaux, des visions plurielles, des évolutions du métier d’Architecte, ne gagnerait-on pas en productivité et en créativité en travaillant avec un modèle plus collaboratif ? N’existe-t-il pas des formes d’exercice de la profession plus en adéquation quant à la collaboration, la prise en compte de questionnements fondamentaux, l’expression de la culture mais aussi de la qualité architecturale ? Il semble qu’une nouvelle génération d’Architectes, accompagnée d’un mouvement social profond (crise environnementale, conscience économique et sociale) cherche à développer leurs savoirfaire différemment. Des modèles collaboratifs réapparaissent au sein de la profession d’Architecte. L’idée n’est pas nouvelle, sous la forme d’une société civile coopérative, l’Atelier d’Urbanisme et d’Architecture voit le jour à l’aube des années 1960 dans l’optique d’une collaboration entre professionnels de la construction en disposant de services communs. Comment et sous quelles conditions un mouvement sociétal peut engendrer un nouveau mode de fonctionnement des structures d’architecture ? Afin de développer mon propos, j’ai construit cette réflexion en trois temps. La première partie de ce mémoire exposera les constats et les questionnements que j’ai pu me poser durant mes six premières années d’exercice. La seconde partie tentera de poser les enjeux de la profession tels que je les vois dans ma future vie professionnelle en tant qu’Architecte. Enfin, la troisième et dernière partie proposera des nouveaux modes de production et d’organisation des structures d’architecture. Dans ce mémoire, je ne prétends en aucun cas dresser le tableau des agences d’architecture. Je propose une autre vision sur le mode d’exercice actuel des agences. Une vision qui m’est propre, propre à ma génération, une vision faite de constats, d’enjeux et de réflexions pour des modes d’organisations hybrides, qu’une nouvelle génération d’architectes pourrait faire émerger reliant les grands principes de collaboration adaptés à la société actuelle.

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PARCOURS PROFESSIONNEL

2015

Obtention du Diplôme d’Etat d’Architecte - Paris Val de Seine Aout

Architecte junior - Norroen - Copenhague, Danemark

2016 Avril

2017

Architecte chargée de projet - Atelier Architecture Lalo - Paris Mobilier et agencements intérieurs d’un cinéma de 18 salles 10000m2- Vélizy Construction neuve d’un hôtel 3 étoiles 3000m2 - Rungis

2018

Réhabilitation de bureaux en une auberge de jeunesse 1500m2 - Kremlin Bicêtre

2019 Avril

2020

Architecte chargée de projet - SAME Architectes - Paris Construction neuve d’un immeuble de bureaux 25000m2- Villejuif

Janvier

Architecte chargée de projet - Hubert Godet Architectes - Paris Construction neuve d’un complexe hôtelier 4 étoiles 15000m2- Tremblay-en-France

2021

Mars

Architecte chargée de projet - Axel Schoenert Architectes - Paris

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A. Agence d’architecture : constats

1. Un modèle de fonctionnement

La première partie de ce mémoire porte sur des constats strictement personnels et/ou partagés lors de discussions avec des ami.e.s, collègues, connaissances, tou.te.s professionnel.le.s dans le milieu de l’architecture. Selon l’enquête Archigraphie 2020 1, publiée par le Conseil National de l’Ordre des Architectes, les diplômés de 2015 sont entre 10 et 20% à s’être réorientés. Pourquoi sont-ils si nombreux à quitter le cadre de la profession d’Architecte ou à chercher une nouvelle manière d’exercer leur formation initiale ? Pour quelles raisons de nombreux autres posent-ils les mêmes constats concernant leur salariat dans les structures qui les accueillent ? J’ai pu constater que les jeunes diplômés se retrouvent souvent dans les mêmes situations conflictuelles quant à leur entrée dans la profession. J’ai tenté de comprendre les raisons de ces dérèglements. Formation au métier d’architecte Bien que la réforme des études de 2008, et le passage du diplôme d’Architecte Diplômé Par Le Gouvernement (DPLG) au diplôme d’Architecte Diplômé d’Etat (ADE) puis Habilité à la Maîtrise d’Oeuvre en son Nom Propre (HMONP) ait redistribué les cartes concernant la formation des Architectes et notamment leurs formations aux problématiques entrepreneuriales, certaines écoles d’architecture continuent la formation d’Architectes/artistes ou Architectes façadiers : qui ne s’intéressent qu’à l’esthétique du projet et non à son contenu. Pourtant, la part de la création dans le métier d’Architecte aujourd’hui est minime par rapport au temps passé sur un projet d’architecture. Habitués à produire sans relâche, jusqu’à élaborer le meilleur projet dans leurs ateliers à l’école, les étudiants n’ont aucune notion de la gestion, de l’organisation de leur temps de production. A moins d’avoir effectué des stages en agence plus nombreux et plus longs que ceux imposés par les écoles, les étudiants ne sont pas préparés à la réalité de leur future profession. Contrairement à nos voisins allemands et suisses, qui développent des études d’Architecte/ingénieurs, les écoles d’architecture françaises sont essentiellement axées sur la création et les sciences humaines et peu sur la technique et la compréhension économique du secteur de notre profession. Le processus de gestion politique et

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1 - «Archigraphie ; Chiffres et cartes de la profession d’architecte», étude réalisée par le CNOA, Décembre 2020


administrative semble manquer de plus en plus cruellement à l’enseignement et ainsi creuse le fossé entre les études et la réalité du quotidien des agences d’architecture. De nouvelles formations intégrées aux écoles d’architecture et parallèles au diplôme conférant le titre d’Architecte voient le jour. C’est le cas de l’école Paris Val de Seine qui, depuis la rentrée 2020, propose un deuxième cycle en apprentissage conduisant au Diplôme d’Etat d’Architecte. Ce cycle, sur trois années d’études, couplé à un contrat d’apprentissage au sein d’une structure professionnelle à raison de trois jours sur cinq, propose une formation destinée à l’insertion dans le monde du travail, de la maîtrise d’œuvre et de la recherche. Accessible aux étudiants ayant obtenu leur licence d’architecture, elle permet un parcours personnalisé et une mise en situation professionnelle sur une plus longue durée que les stages obligatoires du cycle Master du cursus traditionnel. Pour l’année 2021-2022, une quarantaine d’étudiants s’y sont inscrits, ils seront suivis par trois coordinateurs pédagogiques. Ces nouvelles formations n’illustrent-t-elles pas la prise de conscience collective du changement de l’exercice de la profession des Architectes ? Sans pour autant remettre en question la totalité de notre formation, des adaptations commencent à être mises en place dans ce sens afin de mieux préparer les jeunes Architectes à répondre aux attentes d’une société en pleine évolution. Accès à l’emploi et contrats On observe aujourd’hui que ces jeunes diplômés mettent de plus en plus de temps à trouver leur premier emploi. En 2010, quand 84% d’entre eux trouvaient un emploi dans les six mois suivant leur diplôme, ils sont 74% à en faire autant en 2015 1. A moins d’avoir fait un stage dans une agence débouchant sur un emploi, les Architectes fraîchement diplômés sont face à la loterie de l’emploi pour leur première embauche. Je m’intéresse ici aux conditions que leur offrent les agences d’architecture les employant.

1 - «Archigraphie ; Chiffres et cartes de la profession d’architecte», étude réalisée par le CNOA, Décembre 2020

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CONTRAT FREELANCE activité en qualité de travailleur indépendant : pas de lien de subordination avec le client régime social et régime fiscal de la micro-entreprise clause de non-concurrence pour protéger le client contrôle et sanction en cas de salariat déguisé : peine d’emprisonnement jusqu’à 3 ans, amende de 45000€, paiement de salaire et ses cotisations sociales sur la base d’un poste équivalent, interdiction d’accès à la commande publique

CONTRAT A DUREE DETERMINEE - permet d’employer une personne pour une durée convenue à l’avance et pour un motif précis - durée maximale : 18 mois - periode d’essai : 2 semaines pour un CDD de moins de 6 mois ou 1 mois maximum - peut être renouvelé à condition d’une durée maximale du contrat n’excèdant pas 18 mois - indemnité de fin de contrat égale à 10% du montant de la rémunération totale brute perçue si l’employeur ne propose pas de CDI à l’issue du contrat CDD

ANNONCE D’EMPLOI TYPE L’agence X, située à Paris, recherche un.e jeune Architecte pour un CDD de 6 mois renouvelable. Expérience (3 ans minimum) en ERP 5 et 4 pour travailler sur les différentes phases d’études des projets en cours. Compétences requises : Maitrise des outils informatiques : Autocad, Photoshop, Indesign, Sketchup Autonomie, organisation, rigueur et capacité à travailler en équipe, maitriser les délais. Poste à pourvoir en Juin 2021. Rémunération selon profil.

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A - Travail dissimulé par dissimulation d’un emploi salarié, Article L. 8221-5 du code du travail, legifrance.gouv.fr B - Contrat à Durée Déterminée, https://www.lecoindesentrepreneurs.fr/contrat-a-duree-determinee-cdd/ C - Offre d’emploi type pour un architecte “junior” postée sur le site Archibat


Généralement peu formés à la réalité de la gestion de projet au sein d’une agence structurée, les jeunes diplômés acceptent le premier contrat proposé en toute connaissance de cause : il faut démarrer quelque part, faire son expérience et apprendre au maximum “sur le tas”. Nombreuses sont les agences proposant des contrats de freelance à cette masse salariale peu renseignée sur ses droits et à l’affût de la moindre offre. Le contrat freelance permet, dans un premier temps de grossir leur salaire, grâce à la déduction de charges sociales. Les missions du salarié restent les mêmes, avec des horaires identiques à des contrats standards, les heures supplémentaires pouvant être effectuées par l’Architecte freelance ne sont pas rémunérables ou rattrapables puisque ces contrats induisent que la mission doit être réalisée, quelles que soient les horaires effectuées. Les agences, à l’inverse, embauchent des jeunes diplômés en assumant la responsabilité de les former aux tâches qu’ils n’ont pas eu à traiter dans leurs études. Le système justifie ainsi la faible rémunération proposée à ces jeunes actifs. A cela s’ajoute la règle, devenue quasiment systématique, des Contrats à Durée Déterminée. En France, 87% des embauches se font en contrat à durée déterminée en 2019, tout corps de métier confondu 2. Les Architectes n’y font pas exception, on observe que les agences, parfois même les plus structurées et d’envergure, sont nombreuses à proposer des Contrats à Durée Déterminée cumulés au maximum de ce qu’autorise le code du travail. Certaines contournent même la loi du travail en créant plusieurs sociétés et ainsi s’autorisent le cumul de six CDD (2x3 contrats à la suite) et donc plus de dix-huit mois. Les offres d’emploi et leurs annonces sont formelles : expérience minimum, bonne maîtrise des logiciels, connaissances techniques sur des phases de projet ou des types de construction. Les jeunes diplômés sont-ils à même de répondre à ces annonces et comment arrivent-ils à se faire une place dans le monde du travail alors même que les écoles ne proposent pas de réelles mises en situation professionnelle, préparations à l’élaboration d’un dossier de Permis de Construire, ou même de formations pratiques suivies sur des logiciels de plus en plus techniques et élaborés ?

2 - «Evolution de la part des CDI/CDD, de 1993 à 2019», article réalisé par Partageons l’echos, Octobre 2020

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Différents types de structure Dressons un état des lieux non-exhaustif des différents types de structure couramment nommées agence d’architecture. Souvent liées à la taille des agences, ces structures reflètent l’organisation interne qui y est mise en place et la position de leurs employés. Par cette réflexion, j’établis une comparaison avec les structures dans lesquelles j’ai pu travailler. STRUCTURE PYRAMIDALE RH / JURISTES

COMMUNICATION

STRUCTURE PLURI-ORBITALE

STRUCTURE ORBITALE

STRUCTURE HORIZONTALE

COMMUNICATION

STRUCTURE LINEAIRE COMMUNICATION

ACCES AUX CONTRATS PRESIDENT / ASSOCIES

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DIRECTEURS D’AGENCE

CHARGES DE PROJETS

ASSISTANTS DE PROJETS


Méthode de production et de gestion de projet Les agences d’architecture mettent en place différentes politiques hiérarchiques et de gestion de production interne. Comment les salariés trouvent-ils leur équilibre entre les agences qui ne délèguent aucune responsabilité et celles qui, à l’inverse, déchargent toute la masse de production ainsi que toute la gestion de projet sur des architectes non-expérimentés et sans assistance ? Comment les rapports hiérarchiques et de production peuvent-ils être positionnés au cœur des préoccupations des agences ? Le modèle des agences d’architecture est-il la résultante d’un modèle économique qui laisse trop peu de temps pour s’intéresser aux sujets humains ? On observe que la conception architecturale restant un travail collaboratif, ce travail ne pourrait se produire sans les salariés que comptent les agences d’architecture. Il semble essentiel de prendre en compte les besoins et moyens humains au même titre que ceux financiers et de production. Que peut-on dire de la politique de transparence concernant les contrats de maîtrise d’œuvre signés entre les Architectes et les maîtrises d’ouvrage ? Nombreuses sont les agences encore frileuses de laisser accès libre à leurs employés à ces contrats. J’ai été confrontée à cette problématique dans une agence dans laquelle j’avais la charge de projets. Le gérant de cette agence a pour habitude de stocker les contrats de maîtrise d’œuvre qu’il signe avec ses clients dans un serveur à part, non accessible aux architectes travaillant dans la structure. Peu présent aux réunions, il aura fallu que la maîtrise d’ouvrage m’envoie personnellement le contrat signé avec mon propre employeur afin que je puisse tenir le planning des phases d’études annexé au contrat et échanger avec les bureaux d’études, selon les modalités dudit-contrat. Pour quelles raisons ? Si le caractère financier en termes d’honoraires perçus par les agences peut être tabous, il existe des façons simples de supprimer ces pages dans les contrats tout en gardant ces derniers accessibles. Il est essentiel, pour un architecte, qu’il soit chargé de projet ou assistant de projet, qui travaille sur un dossier et est amené à interagir avec les différents intervenants (Bureaux d’Études, Maîtrise d’Ouvrage, …) de pouvoir connaître le contenu des contrats qui vont structurer les rendus, le caractère et le degré

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d’importance des échanges avec tel ou tel intervenant. On observe pourtant, qu’au sein des agences d’architecture, que ces contrats soient dans un serveur “Administration” accessible seulement à une partie des salariés de l’agence, à savoir les gérants et les services administratifs travaillant directement avec les honoraires et les facturations des projets. L’enjeu est intéressant, les Architectes salariés ayant connaissance de ces contrats paraissent plus crédibles lors des échanges avec les intervenants, mais surtout les clients. Ils gagnent en autonomie et accélèrent le temps de production d’un projet tout en apportant confiance mutuelle entre les parties. Enfin, que dire de la culture de la charrette, mise en place dès les études au sein des écoles d’architecture. Profitant d’un mythe perduré par les ateliers et leur système hiérarchiques “des Anciens et des Nouvôs”, violemment mis à mal récemment par des articles de presse poussant les administrations à s’exprimer sur ces sujets, la culture de la charrette reste présente dans nombre d’agence d’architecture. Il faut toujours pousser plus la création du projet et le temps de production, même si cela n’est pas rémunéré, ni par le client, ni, par effet domino, par l’employeur auprès des salariés. A considérer que le salarié soit engagé et accepte ces horaires à rallonge, ne pourrait-il pas y avoir un respect de ses qualités professionnelles ? Souvent déclenchées par une charge de travail importante sur une courte durée, les charrettes permettent le travail de plusieurs employés en un seul. En effet, un salarié va pouvoir, grâce aux nombreuses heures supplémentaires travaillées, produire les documents de plusieurs, sur un temps finalement égal, puisqu’il travaillera deux journées en une seule. Si certaines agences d’architecture mettent en place un système de récupération de ces heures supplémentaires ou de paiements de ces dernières, il n’en est pas de même pour toutes les agences. Les agences comptent donc sur la motivation et l’investissement sans limite de leurs salariés. “Basée sur une vocation d’Architecte-artiste, dépendant du rapport de la production personnelle, de la liberté de création et du dépassement de soi, la vision de l’architecture comme une œuvre capable d’engendrer des émotions est de plus en plus déconnectée de la réalité.” 3.

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3 - «Les architectes au défi de la ville néo-libérale», citation de Véronique Biau, Parenthèses Eds, Mai 2020


Or, les Architectes sont de plus en plus nombreux à ne plus accepter ce système. Les jeunes générations ont une autre vision de leur vie quotidienne, décentrant le travail de leurs priorités, exigeant des conditions moins précaires, et s’ils acceptent ce “métier de passion” en réalisant de nombreuses heures supplémentaires, osant demander des compensations. Et si ces horaires semblent inévitables au sein de la profession, quelles solutions mettre en place auprès des salariés pour valoriser cet effort partagé au sein des agences ?

UNE CHARETTE une charette est une tâche devant être accomplie dans un temps défini «ÊTRE CHARETTE» apparue au XIXe siècle, elle fait référence aux étudiants architectes de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts

Pour remettre leurs projets d’architecture dessinés sur de grands formats, les étudiants empruntaient des charettes à des charbonniers. Les rendus y étaient déposés et transportés depuis les ateliers jusqu’à la salle Melpomène de l’Ecole où ils étaient jugés. Pendant l’entre-deux-guerre, des courses de charette étaient organisées par les ateliers et portant le nom de course du Charette Club

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2. La résultante d’un modèle économique défini ?

Les agences d’architecture sont confrontées à une double problématique : le caractère “novice” des jeunes diplômés arrivant sur le marché, qu’elles doivent continuer de former aux réalités de leur quotidien ; le caractère de plus en plus exigeant des commandes et des clients. Elles doivent donc trouver un équilibre et tentent de tirer leur épingle du jeu. POINTS ESSENTIELS DE LA LOI N°77-2 sur l’architecture du 3 Janvier 1977 - l’architecture est une expression de la culture - monopole des architectes pour les construcions publiques et de particuliers - création de conseils d’Architecture de l’Urbanisme et de l’Environnement pour l’égalité - réorganisation de la profession et de l’Ordre des Architectes Loi du marché La loi du 3 janvier 1977 affirme que “l’architecture est une expression de la culture” et que, “la création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion dans le milieu environnant, le respect du paysage naturel et urbain ainsi que du patrimoine sont d’intérêt public”4. L’inscription dans la loi du caractère de l’intérêt public de l’architecture lui ouvre la voie de la société civile, de la démocratie des citoyens, d’une conception de l’architecture pour tous et de l’utilité sociale de l’architecture. La loi trace ainsi un cadre conceptuel et symbolique, en affirmant que l’architecture est une expression de la culture, elle renforce une valeur sociale et culturelle. Globalement, et suite aux conflits entre les acteurs de la construction et l’opinion publique qui ont conduit à l’élaboration de cette loi, cette dernière développe des valeurs de protection du paysage ainsi que des engagements sociétaux et environnementaux. On peut considérer qu’elle a permis de renforcer et d’accroître les missions et les champs d’intervention des Architectes, en plus de créer un conseil supérieur de l’architecture représentatif de la société civile. Pour autant peut-on dire qu’elle assure toujours ce rôle de protection de la profession aujourd’hui ?

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4 - «Loi n°77-2 sur l’architecture», 3 Janvier 1977


Temps de production, commandes et montage d’opérations Très souvent idéalisée, l’architecture est encore réduite à l’acte de construire des objets architecturaux aux formes diverses dans le cadre de la commande publique. Or la commande privée aux situations de projets plus ordinaires et aux conditions très contraintes restent encore la majorité des projets d’architecture auxquels la plupart des jeunes Architectes vont être confrontés dans leur carrière. Les écoles d’architecture continuent de former des architectes axés sur la culture architecturale et la recherche de créativité, mais peu sont préparés à la réalité des promoteurs immobiliers qui aujourd’hui ont pour objectif de définir la ville sous le seul prisme de la rentabilité. Les montages économiques font les projets d’architecture, notamment dans la commande privée, lesquels sont réalisés par les promoteurs. Quelles négociations se mettent en place au travers des contrats avec les Architectes ? Trop souvent, il existe peu de marge de manœuvre. De plus, les calendriers sont contraints. Les projets ne pouvant pas prendre du retard, certains Architectes ne peuvent plus exercer l’architecture comme une expression de la culture et alors deviennent dessinateurs pour les maîtrises d’ouvrage qui ne peuvent pas encore construire elles-mêmes ce qu’elles financent. Associée à la montée des exigences normatives, la commande privée amène une forte exigence de profit et de processus, à laquelle les agences d’architecture ne savent pas faire face en termes de rendement. Non préparées au rythme quasi industriel et financier de ces maîtrises d’ouvrage, elles perdent du terrain sur le marché de la construction, souvent au profit de bureaux d’étude composés d’ingénieurs, mieux formés à tous les enjeux techniques et environnementaux actuels et/ou d’assistance à maîtrise d’ouvrage, plus efficaces dans le management et le process d’un projet. Le processus de la commande et du projet d’architecture semble loin des idées véhiculées pendant les études et en dehors du cadre de la profession. Que pourraient faire les agences pour sortir de ce système qui semblent les dépasser ? Que peuvent mettre en place les agences pour conserver leur pertinence sur le marché et préserver les nouvelles générations de collaborateurs ?

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M A I T R I S E D ’ O U V R AG E PROMOTEUR parfois intermédiaire MOD AMO assistance moa

BC bureau de contrôle

BET environnemental

SSI coordinateur incendie CSPS coordinateur sécurité

ARCHITECTE

BUREAUX D’ETUDES BET 1 fluides

BET 2 structure

BET 3 sécurité

M A I T R I S E D ’ O E U V R E

AMO = Assistant Maîtrise d’Ouvrage BC = Bureau de Contrôle BET = Bureau d’Etude Technique CSSI = Coordinateur Systèmes de Sécurité Incendie CSPS = Coordinateur Sécurité Protection et Santé MOA = Maîtrise d’Ouvrage MOD = Maîtrise d’Ouvrage Déléguée MOE = Maîtrise d’Oeuvre

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paiement prestation intellectuelle


Gestion des ressources financières et de la masse salariale “Les Architectes se sont laissés dévorés par leur passion et on voit toute une génération qui dirige en marchant sur la tête.” 5 Avec ces règles de la construction, trop souvent imposées par des maîtrises d’ouvrage peu soucieuses de la qualité architecturale qu’elles livrent, comment les agences d’architecture mettent en place leurs réponses ? Ont-elles seulement la maîtrise de ces réponses face à la pression de la commande et le besoin de contracter avec les maîtrises d’ouvrage pour développer leur structure ? Si aujourd’hui la rentabilité d’une société d’architecture tient sur la compression de ses charges de masse salariale, la réponse est claire : bien que pouvant avoir du travail pour plusieurs employés sur un temps donné, la société n’embauchera que la moitié et profitera des situations citées plus haut, à savoir maximiser les temps horaires de chaque salariés proposer des contrats précaires et ainsi rentrer dans les coûts. Ajouté à cela, les facturations des missions d’Architectes peuvent souvent être payées sur un temps long, les agences sont dans des situations de fragilité et de déséquilibre au niveau de leur trésorerie. Le calendrier électoral est lui aussi un enjeu majeur pour la gestion interne des agences d’architecture. Amené à créer les cycles d’embauche au sein des structures, dû aux nombreux projets immobiliers fluctuant en fonction des équipes élues. On observe de plus en plus de frilosités de la part des maîtrises d’ouvrages qui lancent les opérations mais aussi des architectes : aucun projet ne sera lancé avant mais également après une échéance électorale. Les embauches et durées des contrats sont donc déterminées en fonction d’un facteur encore plus éloigné des agences d’architecture, mais contraintes de suivre ces calendriers. Autre gouffre financier pour les jeunes agences d’architecture, que sont les concours. Souvent non rémunérés, les Architectes doivent travailler sur un projet avant même d’avoir remporté son contrat. Ainsi ils doivent fournir le travail en 2 temps, d’abord son idée, puis sa conception, si bien

5 - «Architecte, quand l’image du métier de rêve s’éffondre», Enquête Les Echos, Sophie Szpirglas, Janvier 2021

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sûr le concours est remporté. Malgré le caractère chronophage de ces concours et appels d’offres à déposer, les primes de contrepartie sont peu rémunératrices et surtout non à la hauteur des efforts fournis et de la production humaine déployée pour les réaliser. Ces concours semblent mieux gérés par les agences installées, qui peuvent tirer profit d’une organisation du temps de production et qui sauront arrêter leur production et profiter de leur expérience et références. De manière générale, les agences ne sont pas seules responsables des constats de cette partie de mémoire. Elles semblent prises dans un système économique et politique qui les dépassent et les poussent à répéter des processus de production. Les collaborateurs salariés de ces agences doiventils pour autant payer le prix fort de ces contraintes ?

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B. Agence d’architecture : enjeux

La loi sur l’architecture du 3 Janvier 1977 est introduite par cette mention : l’architecture est une expression de la culture. Les propos précédents sur le contenu des études d’architecture confirment ce point : l’architecture est une profession de culture, les étudiants y sont formés pendant leurs études, ces dernières sont riches, reconnues et appréciées en ce sens. La sixième année, dite HMONP, vient quant à elle compléter le cursus des Architectes en orientant les étudiants vers les questions entrepreneuriales de gestion d’agence et de projet. Les agences d’architecture, face aux exigences toujours plus grandes, auraient tendance à délaisser cette expression de la culture pour mécaniser les processus de création et de production des projets. La nouvelle génération d’Architectes ne retrouve plus, dans l’exercice de la,profession, ce pourquoi elle a choisi cette orientation. Ces trois entités sont pourtant les bases fondamentales des Architectes : le cadre réglementaire, la formation et le lieu de production de l’architecture. Peut-on retrouver un lien fédérateur entre ces trois fondements ?

1. Qualité architecturale

“L’œuvre architecturale, c’est la mise en scène (art) et en équations (science) du « plein » (façades, planchers, murs, toit) vecteur d’esthétisme, et du « vide » (volume où nous vivons, où nous travaillons). Ne sacrifions pas tout l’un à tout l’autre.” 6 En termes de commande, on peut dire que l’œuvre architecturale est rare. Elle ne fait en tout cas pas partie de la majorité des commandes des agences d’architecture. Par conséquent, certaines commandes nécessitent plus de technicité, voire plus de rentabilité, à la demande des maîtrises d’ouvrage et au détriment, parfois, de la qualité architecturale. Puisque sans commande, pas de projet d’architecture, il faut pouvoir trouver un terrain d’entente. Outre l’esthétisme d’un projet architectural, sa pérennité est sans doute le caractère le plus important du dit projet. Indépendamment des mouvements de style, des matériaux en vogue, un projet architectural de qualité doit pouvoir traverser le temps et proposer des espaces intelligemment articulés. L’architecture ne doit pas oublier son caractère social, celui de proposer à des usagers des espaces de vie dans lesquels ils évolueront peut-être une grande partie de leur existence. A cela s’ajoute le caractère sociétal de l’architecture,

6 - «Viser la qualité architecturale», Article de Bernard Roth, Revue Constructisme, Novembre 2002

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qui doit sans cesse questionner les codes, les modes de vie. La situation sanitaire actuelle en est un exemple parfait, le quotidien des usagers évolue sans cesse. Comment les projets architecturaux s’adaptent pour proposer des réponses à ces évolutions ? Je parle par exemple du recours quasi systématique au télétravail dans de nombreux emplois. Habitués à construire des immeubles de logements, mais aussi de bureaux, neufs, répondant à des normes et des codes économiques imposés par les maîtrises d’ouvrage, les usages de ces logements et ces bureaux ne sont plus en adéquation avec ces constructions. Le logement neuf impose des surfaces trop petites pour permettre à un couple avec enfant de télétravailler depuis chez eux ; les bureaux se construisent encore en nombre alors que les entreprises mettent en place massivement le télétravail et tendent à le maintenir : les travailleurs désertent leur lieu de travail pour investir leur logement. Les Architectes doivent faire face au questionnement de ces usages, et par conséquent ont une responsabilité dans l’évolution de ces constructions. Il est primordial de pouvoir échanger avec les maîtres d’ouvrage sans jamais oublier les usagers des bâtiments que l’on construit. Mon questionnement porte sur l’importance de se positionner quant aux commandes. Je travaille actuellement sur un projet de restructuration d’un immeuble de bureaux dans le 11e arrondissement de Paris. Cet immeuble héberge une école mais sa destination a été déclarée comme bureau. Les études ont nécessité une demande d’agrément auprès de la DRIEA qui n’a pas encore accepté le dossier pour cause de non compensation de surface en logement. La maîtrise d’ouvrage, n’ayant aucun intérêt économique à réaliser de la surface de logement, ne mettra pas en place les demandes et passera par un relationnel pour contourner ces recommandations du Pacte de Paris et ainsi transformera son immeuble comme voulu. A l’heure où Paris lance la révision et le renouvellement de son Plan Local d’Urbanisme pour l’application des dix objectifs du Pacte pour la construction parisienne, demandant entre autre la construction systématique d’un pourcentage de logement lors d’une construction de bureaux, mais également, prônant la réversibilité des constructions, quel rôle l’Architecte peut-il apporter pour préserver la qualité architecturale de projets aujourd’hui commandés par des maîtrises d’ouvrage parfois peu intéressées ?

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De la même manière, la maîtrise des projets est essentielle. Outre la qualité technique des dossiers des projets et notamment ceux des phases Projet (PRO), intégrant tous les détails architecturaux et techniques pour la bonne exécution des chantiers, la maîtrise de celle-ci est essentielle. Ainsi, certaines agences d’architecture intègrent des entités, en général externalisées, telles l’économie des projets, le pilotage et la coordination des projets, ou encore des bureaux d’études. De cette collaboration, se met en place un retour à une profession plus générale, intégrant de nombreux savoirs mais aussi développant une synergie créative et technique dans un seul but : la qualité architecturale. De plus en plus “privés de chantier” 7, les Architectes sont nombreux à ne plus suivre que la conformité architecturale de leur projet. La loi de 1977 précise pourtant que la mission de l’Architecte ne peut pas se résoudre à la seule conception du projet architectural. Seulement, aujourd’hui, beaucoup de contrats de maîtrise d’œuvre, et notamment dans la promotion immobilière privée, sont des contrats de conception qui ne couvrent pas la mission complète du projet. Reprenant l’article 3 de la loi et son avant dernier alinéa, on peut retenir que “même si l’Architecte n’assure pas la direction des travaux, il doit être en mesure de vérifier et s’assurer que les documents d’exécution et les ouvrages en cours de réalisation respectent bien les dispositions du projet architectural” 8. Cette disposition, poussée souvent par les maîtres d’ouvrage dans une problématique de rémunération des phases d’exécution, tend les Architectes à se cantonner aux études du projet architectural et laisser la direction de l’exécution des travaux à de grands groupes du BTP ou des maîtres d’oeuvres d’exécution, perdant ainsi la maîtrise de la réalité des chantiers et de la construction. Or l’Architecte, s’il n’est pas constructeur, doit savoir construire, doit justifier d’une qualité architecturale mais aussi d’une qualité de réalisation pour gagner en crédibilité. Il me paraît par conséquent essentiel de revenir aux fondamentaux et tout faire pour pouvoir garder le suivi de la réalisation des chantiers des projets que l’on peut dessiner en tant qu’agence d’architecture. Les projets futurs, en phase de conception et ce dès les phases d’esquisse, n’en seront que plus qualitatifs, puisqu’ils bénéficieront de l’expérience technique des précédents projets, eux même, suivis en chantier.

7 - «Les possibilités d’une ville, conversation entre les architectes Paul Chemetov et Rudy Riccioti», Emission France Culture Les Matins du 19 Mai 2021 8 - «Loi n°77-2 sur l’architecture», 3 Janvier 1977

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2. Qualité environnementale

Cet été 2021, prônant une révolution dans l’art de construire, la France s’apprête à remplacer la Réglementation Thermique “RT 2012” par la Réglementation Environnementale “RE 2020” afin de construire plus écologique, émettre moins de carbone, réaliser des économies d’énergie et/ou encore utiliser des matériaux bio-sourcés. Des formations pour anticiper et concevoir avec la RE 2020 sont proposées par des organismes, tant les réglementations sont toujours plus complexes. Quels sont les acteurs, les enjeux, les conséquences de ces réglementations toujours plus contraignantes pour les architectes ? Critiquée par les acteurs de la construction et notamment des syndicats tels la Fédération Française des bâtiments, la Fédération des Promoteurs Immobilier de France ou encore l’union sociale pour l’Habitat, la RE 2020 est estimée, à terme, avoir une conséquence trop coûteuse pour les acquéreurs, notamment des logements. En cause : les nouvelles règles, les nouveaux matériaux à utiliser, les nouveaux procédés, trop contraignants et qui gonfleraient les prix des opérations immobilières et des chantiers. A l’inverse, Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au Logement, estime que “des bâtiments qui consomment moins en gestion et dans le processus de construction seront aussi des économies pour les propriétaires” 9. Visant une réduction de 30% de consommation en chauffage par rapport à la réglementation précédente, la ministre ajoute que ces nouvelles règles développeront une industrialisation des processus de construction, permettant de conserver le coût des logements au même niveau. Présente depuis plusieurs décennies, la démarche environnementale a très tôt été au cœur des préoccupations des Architectes, urbanistes et paysagistes. Aujourd’hui, la requalification écologique de la construction qualifiant les projets contemporains “d’architecture verte”, “d’urbanisme écologique” ou encore “d’architecture durable”, ne permet plus de distinguer les enjeux et les pratiques face à la crise environnementale croissante. Préférant l’expression “architecture bioclimatique” 10 à celle “d’architecture écologique”, l’Architecte Nicolas Michelin, fondateur et directeur de l’agence ANMA (Agence Nicolas Michelin et Associés), décrit produire “autant que possible, des bâtiments “naturels, peu motorisés, c’est-à-dire auxquels on n’aurait pas ajouté des panneaux, des capteurs, etc., mais qui sont conçus en fonction du vent, de la pluie et du soleil.”

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9 - «Une nouvelle règlementation environnementale dans la construction», Emission France Inter d’Olivier Marin L’urbanisme de demain du 9 Janvier 2021 10 - «L’écologie en architecture et urbanisme : entre normes et pratiques», Entretien réalisé par Yaël Kreplak et Barbara Turquier avec Nicolas Michelin, pour la revue Tracés, Revue de sciences humaines 22, 2012


La prise de conscience invite les acteurs de la construction à prendre position et à davantage composer avec l’environnement, les besoins et les très nombreuses réglementations. “nous devons envisager la fragilité de la planète et de ses ressources comme une opportunité pour l’innovation dans la conception, plutôt que comme une forme de légitimation technique à des solutions conventionnelles. Par extension, les problèmes auxquels nos régions et nos villes font face seront l’occasion de définir une nouvelle approche. Imaginer un urbanisme qui ne se résume pas au statu quo, cela requiert une sensibilité nouvelle, qui soit propre à intégrer et à s’adapter aux conditions nécessairement conflictuelles de l’écologie et de l’urbanisme. C’est là le terrain de l’urbanisme écologique” 11 Parfois contradictoires, souvent très contraignantes, les normes environnementales que les Grenelle I et II ont apportées ont permis l’émergence d’une réelle conscience écologique et l’implication des acteurs de la construction. Côté promotions immobilières et maîtrises d’ouvrage, les subventions et l’imposition de ces normes ont permis aux commanditaires des projets architecturaux l’intégration de critères environnementaux et les commandes de bâtiments basse consommation dit BBC, alors que quelques années auparavant ils les auraient refusé car trop coûteux et peu rentables. Pour autant construit-on systématiquement des bâtiments de qualité avec ces normes ? Car aujourd’hui, les nombreuses normes environnementales ont des contradictions, pour avoir des certifications dites “Haute Qualité Environnementale”, il est acceptable d’utiliser, par exemple, des moteurs toujours plus puissants, mais qui permettent une consommation énergétique plus basse à moyen terme et suffiront à décrocher la certification. Ces certifications poussent certains Architectes à parler de véritable “Lobby de l’énergie verte”, déplaçant ainsi le problème environnemental vers des enjeux politiques et économiques. Les grandes villes mettent en place des “Plans”, des “Pactes” ou encore des “Points” à suivre autant que possible par les concepteurs des projets. Seulement ces demandes, toujours plus contraignantes, sont contre-productives et tendent à la conception et à la réalisation de bâtiments peu qualitatifs : respecter des surfaces imposées dans des bâtiments toujours plus compacts, apporter toujours plus de

11 - «L’écologie en architecture et urbanisme : entre normes et pratiques», Citation traduite de Mostafavi Mohsen et Doherty Gareth, Ecological Urbanism, Lars Müller Publishers, 2010, dans la revue Tracés, Revue de sciences humaines 22, 2012

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luminosité mais restreindre au maximum les fenêtres, trop coûteuses économiquement. Il n’est pas rare aujourd’hui d’entendre un Architecte dénoncer la propre conception des logements qu’il conçoit jusqu’à décréter qu’il n’habiterait jamais dans un logement neuf de ce type. La remarque pose une problématique de taille : et si les Architectes ne croyaient plus en leur propre conception, poussés par des réglementations toujours plus contraignantes ? La prise de conscience est donc bien enclenchée, mais la réalisation de celle-ci reste encore trop entre les mains d’acteurs économiques et politiques, dont la position ne va pas dans le sens de la qualité environnementale et architecturale. Les normes sont essentielles pour l’évolution générale des constructions environnementales, pour être perspicaces, il faudrait qu’elles puissent être modulables et remises en question par les architectes directement, et ce de manière pertinente. Car il est du ressort des concepteurs de la construction, Architectes, urbanistes, paysagistes, dont c’est le cœur de métier, d’élaborer ces normes. Non engagés politiquement et économiquement, ils seraient à même de répondre à des questions d’usage et de construction. La conception bioclimatique dont fait échos Nicolas Michelin ne se résume pas au simple projet d’architecture de type bâtiment. Afin de répondre aux mieux aux enjeux de la qualité environnementale, il est essentiel d’ouvrir la réflexion à l’échelle de l’îlot, du quartier, de la ville et ainsi concevoir avec une planification douce, permettant l’évolution des projets. De même, la collaboration entre les acteurs de la construction, de la conception à l’exécution d’un projet, quelle que soit son échelle, devient une pratique incontournable.

3. Rapport de production, enjeux sociaux et humains

“Dans la production sociale de leur existence, les hommes nouent des rapports déterminés, nécessaires, indépendants de leur volonté; ces rapports de production correspondent à un degré du développement de leurs forces productives matérielles. L’ensemble de ces rapports forme la structure économique de la société, la fondation réelle sur laquelle s’élève un édifice juridique et politique, et à quoi répondent des formes déterminées de conscience sociale.”12

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12 - «Zur Kritik der politischen Ökonomie» (Critique de l’économie politique), Karl Marx, Œuvres I - Économie I, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, p. 269 à 452, traduction par M. Rubel et L. Évrard.


Comment la nouvelle génération d’Architectes peut-elle s’identifier à cette citation, que leur renvoie-elle ? Que serait l’agence d’architecture sans ceux qui dessinent les projets alors que les associés de ces structures tentent de décrocher de nouveaux contrats avec tous les aspects que nous avons évoqués plus haut ? Car, derrière les projets phares des agences sur médiatisées, mais aussi de plus modestes tailles, se cachent un grand nombre de collaborateurs salariés, impliqués dans la conception et la livraison de projets, parfois publiés et honorés. Les agences sont de plus en plus nombreuses à présenter leurs collaborateurs sur leur site internet, conscientes de la nécessité de communiquer au sujet de leurs outils de production et de leurs moyens humains. On peut d’ailleurs poser la question de ce qu’illustre une agence d’architecture qui ne communique jamais au sujet de ses collaborateurs et de quelle reconnaissance et collaboration véritable elles mettent en place dans le travail quotidien de la structure. Outre la reconnaissance auprès des collaborateurs, cette communication rassure les maîtrises d’ouvrage, qui peuvent connaître rapidement les capacités de production de l’agence, le roulement ou non en termes de ressources humaines, les collaborateurs à qui ils auront à faire durant les temps des projets. Stratégie commerciale autant que qualité sociale, les collaborateurs salariés trouvent de plus en plus leur place et ainsi commencent à faire valoir leurs qualités technique et économique au sein des structures. Partie prenante des projets de l’agence face à un système complexe, les collaborateurs sont prêts à s’investir ou monter leur propre structure en reprenant ou non des codes qu’ils ont observés. Un enjeu d’héritage se met donc en place pour les agences d’architecture. La nouvelle génération d’Architectes semble aujourd’hui redistribuer les cartes des fonctionnements traditionnels des agences d’architecture. Les Architectes qui arrivent dans le monde du travail ne veulent plus mettre de côté leur vie sociale et familiale en faveur de leur profession. Le changement s’observe de manière générale, et chez toute une génération. Le climat politique, environnemental, sociétal installé depuis quelques années pousse une génération d’Architectes à développer des modèles pluridisciplinaires et trouver des solutions qui articulent vie professionnelle et vie personnelle. Le modèle scandinave, largement publié pour son mode de vie, reste un exemple.

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Dès leur plus jeune âge, les danois pratiquent à l’école des cours de confiance en soi. De même, une année de césure entre la primaire et le collège leur permet d’expérimenter des projets personnels toujours dans cette optique d’épanouissement personnel avant tout. La perspicacité du système à fait ses preuves, aujourd’hui en tête des nationalités les plus heureuses, les danois savent conjuguer vie personnelle et vie professionnelle. Les journées de travail sont adaptées selon les besoins de chacun, y compris au sein des agences d’architecture. Les salariés sont plus épanouis, plus efficaces et une meilleure entente règne au sein des entreprises. Grâce à la formation HMONP, de plus en plus de collaborateurs salariés s’investissent sur le sujet de l’entreprise et de sa gestion autant qu’ils sont investis dans un projet architectural dont ils ont la charge. Alors que les grandes structures se positionnent encore trop souvent et de manière pyramidale dans un système de séparation de la gestion d’agence et des projets d’architecture, scindant ainsi les collaborateurs même de l’entreprise en pôle gestion et architecture, des agences plus modestes en taille pratiquent une politique globale de transparence et de communication à propos de l’économie de la structure. Cette stratégie ne permet-elle pas une meilleure collaboration entre les associés et les salariés, de même qu’un plus grand investissement dans les projets ? Si ce sujet est vrai concernant le mode de gestion administrative et économique des agences d’architecture, il l’est, à plus petite échelle, au sujet des suivis de projets. La transparence dans les contrats, les documents administratifs des projets et l’implication des collaborateurs architectes doivent être d’ordre général, pour un travail plus efficace. Les enjeux des projets mais aussi de la structure sont mesurés avec tous les paramètres nécessaires. Ainsi le collaborateur gagne en confiance, en autonomie tout en ayant le devoir de rapporter les sujets auprès de sa hiérarchie et la possibilité de communiquer avec cette dernière. Constatant les décisions politiques, les enjeux urbains et économiques, est-il du pouvoir des agences d’architecture de modifier les comportements et les règles ? Nommés Maîtres d’œuvre et régulièrement décrits comme chefs d’orchestre, les Architectes semblent pourtant relégués à la dernière roue du carrosse, peu écoutés et valorisés par les acteurs de la construction toujours plus enclins à la

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rentabilité des projets. Cette réalité se répercute sur les collaborateurs salariés. Que peuvent mettre en place les agences pour préserver l’héritage et l’avenir des Architectes ? La passion de la profession pour les études, le retour au modèle du savoir-faire et du savoir-construire anime une nouvelle génération d’architectes qui basculent les codes sans attendre les changements de pouvoirs politiques et économiques.

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C. Agence d’architecture : vers un modèle collaboratif hybride

Face à la montée en puissance des enjeux environnementaux, des principes sociétaux et entrepreneuriaux, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à se tourner vers des modèles plus collaboratifs. Les agences d’architecture mais aussi les Architectes indépendants n’y font pas exception. Nous parlions en début de mémoire d’une formation d’Architecte/artiste dans les écoles, creusant ainsi le fossé entre la réalité de la profession d’Architecte et le rêve des études d’architecture. Et si cette génération d’Architectes, dans ce rejet du fonctionnement des agences, souhaitait réinventer un modèle d’organisation de la profession ? COLLABORATIF du latin « cum laborare » : travailler avec/ensemble action de collaborer, traduit, dans une approche sociologique, les nouvelles façons d’agir collectivement fondées sur des relations de pair à pair entre des protagonistes formants des ensembles mal délimités, mouvants, sans cesse recomposés COOPERER du latin « cum operari » : opérer avec fabriquer de ses mains, travailler à plusieurs, oeuvrer dans un seul but

1. Un modèle collaboratif inspiré

Rappelons que la création de modèle d’agence collaborative d’architecture n’est pas liée à la nouvelle génération d’Architectes que nous citons dans ce mémoire. Engendré par le mouvement sociétal et politique de la période historique de Mai 1968, on peut citer le modèle de l’Atelier d’Urbanisme et d’Architecture, dit AUA. Premier atelier à rassembler Architectes, architectes d’intérieurs, ingénieurs, urbanistes et sociologues autour d’un projet commun, tout en entretenant des relations étroites avec la politique et la culture, l’AUA, “était un mélange de collectif, d’atelier de projet pluridisciplinaire et de famille de substitution à géométrie variable.” 13 Fondé en 1960 par l’urbaniste Jacques Allégret et actif jusqu’en 1985 l’Atelier est rejoint notamment par les Architectes Jean Perrottet, Jacques Kalisz,

13 - «AUA, une architecture de l’engagement» Article AMC de Margaux Darrieus, Octobre 2015

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Henri Ciriani, Paul Chemetov et Jean et Maria Deroche, l’architecte d’intérieur et créatrice de mobilier Annie Tribel, le paysagiste Michel Corajoud, l’urbaniste Jean-François Parent ou encore le scénographe Valentin Fabre. Imaginé comme une alternative aux agences traditionnelles et aux bureaux d’étude techniques, écosystème favorable au développement de recherches et de laboratoires de projets, l’Atelier d’Urbanisme et d’Architecture assume un fort engagement politique et social et plus qu’un atelier, c’est une expérience collective, de projets menés en communs, de recherches collaboratives, … L’héritage laissé par l’AUA est grand et inspire encore une génération de professionnels, qu’ils y aient travaillé ou non. La cité de l’architecture leur aura dédié une exposition à l’hiver 2015-2016 : Une architecture de l’engagement : AUA (1960-1985). Citons également l’Atelier de Montrouge (ATM) qui s’est démarqué avant tout par son principe associatif. Fondé en 1958 par les quatre Architectes Jean Renaudie, Pierre Riboulet, Gérard Thurnauer et Jean-Louis Véret pour qui le choix correspondait à une volonté de partage, de réflexion collective, voire d’ouverture à la collaboration pluridisciplinaire. De manière plus générale et moins liée à l’architecture, on observe que ce sont les mouvements politico-sociaux qui développent et mènent à la revendication de nouvelles méthodes de production. Les rejets en masse de systèmes capitalistes trop contraignants expliquent les changements ou tentatives de changements au travail et dans les sociétés. Citons succinctement le travail de Luc Boltanski et Eve Chiapello14 dans lequel les auteurs expliquent que depuis la période de 1968 jusqu’au milieu de la décennie suivante, critique artiste et critique sociale se conjuguent pour dénoncer l’exploitation capitaliste et l’aliénation dans un ensemble de revendications qui expriment à la fois l’allergie au travail, les mauvaises conditions de travail, et une demande d’autonomie. Les problématiques actuelles étaient donc déjà présentes. Seulement, le capitalisme aurait absorbé la critique sociale et politique émergente des années post 1968 : revendication d’un épanouissement au travail, créativité, autonomie dans la gestion des projets, …) au profit d’une nouvelle forme de capitalisme distribuant un nouvel esprit de responsabilités sur les travailleurs. Ainsi, le projet de l’entreprise devient le projet du travailleur, engendrant des responsabilités et une pression accrue. Plus récemment, de nouvelles démarches voient le jour. C’est notamment le cas du système de

14 - «Le nouvel esprit du capitalisme» Luc Boltanski et Eve Chiapello, Gallimard, 1999

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l’holacratie.15 Terme formalisé en 2007 par Brian Robertson pour son entreprise de logiciel informa tique américaine, le système se donne pour objectif de mettre au point des mécanismes de gouvernance plus efficaces et rappelle les systèmes d’autogestion comme alternative au capitalisme des années 1970. Dérivé des mots “holarchie” et “holons” introduits dans les années 1960 par le romancier Arthur Koestler dans son livre “The Ghost in the Machine”. Une holarchie est une structure complexe dans laquelle chaque sous-système est à la fois autonome et dépendant de la structure plus large dans laquelle il s’insère. Pour Koestler, les systèmes pyramidaux qui se sont imposés comme la norme dans les organisations et dans les sociétés humaines sont sources de violence et d’inefficacité, et mettent l’avenir de l’humanité en péril. L’holacratie prône les principes d’auto-organisation. Souvent comparée à la sociocratie, elle s’appuie sur des processus de décisions précis et structurés, accordant un rôle central à la raison d’être de l’organisation et des cercles qui la composent. Les entreprises sont nombreuses à adopter ce système de gouvernance qui supprime la hiérarchie pour laisser plus d’autonomie aux salariés. C’est le cas notamment d’entreprises comme Danone ou encore l’usine automobile française Favi. Le système repose sur des bases sociales : les salariés sont indépendants et autonomes, chacun a pleine possession de son travail et de ses responsabilités, les idées d’organisation pour l’entreprise sont mises en commun et la vie personnelle des individus n’est pas un sujet tabou déconnecté du monde professionnel. Enfin, des entreprises d’architecture hybrides sont observées. C’est le cas du studio CIGUË, fondé en 2003 par trois Architectes. Le studio a démarré en tant qu’entreprise de menuiserie axant ses projets dans la conception-réalisation. L’équipe décrit sa démarche comme une : “pratique transdisciplinaire aux croisements de la pensée, de la fabrication et de la poésie”. En constante évolution, le studio travaille aujourd’hui sur de nombreux concept stores dans le monde entier en tant qu’Architectes. On observe par ailleurs que leur site présente une équipe sans architectes associés ou fondateurs, ce qui illustre une volonté d’appartenir à un groupe de travail, une collaboration, une équipe, un studio : une entité.

15 - «Holacratie», Définition wikipédia

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2. Sociétés coopératives et collectifs d’architecture

Société Coopérative Ouvrière de Production - SCOP Originellement issues des revendications sociales des travailleurs à la fin du XVIIIe siècle, les sociétés coopératives visent à une réconciliation du travail et du capital en s’appuyant sur une gestion démocratique de l’entreprise. Il existe différents types de coopératives, différenciés par leurs tailles, leurs objectifs et leurs formes. La SCOP, obligatoirement accompagnée de la mention “Société Coopérative Ouvrière de Production d’architecture” selon le site de l’Ordre des Architectes, est une société commerciale qui se distingue des sociétés classiques par une détention majoritaire du capital et du pouvoir des décisions par les salariés. Dans une SCOP, tous les salariés ont vocation à devenir associés. La SCOP est une de ces structures coopératives qui a vocation à encadrer le travail. Si les premières expérimentations du modèle sont apparues au XIXe siècle avec les premières coopératives ouvrières, en France, c’est la loi du 10 septembre 1947 portant sur le statut général de coopération qui réglemente les coopératives et la loi du 19 juillet 1978 qui régit les SCOP. On observe trois principes déterminant le fonctionnement d’une SCOP : le premier porte sur le statut des associés en tant que salariés majoritaires de la société. Les associés coopérateurs doivent travailler dans l’entreprise et sont des associés majoritaires puisque détenant au moins 51 % du capital et 65 % des droits de vote. Le deuxième est relatif au mode de “gouvernance”, qui se veut démocratique et respectueux des valeurs sociales, et ce dans une approche égalitariste. La répartition des voix en assemblée générale n’est pas proportionnelle à la répartition du capital, mais suit la règle d’une personne égale une voix. Enfin, le troisième principe est l’affectation des bénéfices : la loi en prévoit trois attributions obligatoires : les réserves, à hauteur de 15 % du bénéfice net, le fonds de développement et l’attribution aux salariés dite « parts travail », à hauteur d’au moins 25 % du bénéfice net et le capital plafonné à 33%. En 2020, selon la SG SCOP16, la France compte plus de 3600 sociétés coopératives.

16 - Site internet SC SCOP https://www.les-scop.coop/chiffres-cles

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Le modèle d’entreprise coopérative séduit les Architectes au tournant des années 1970 et connaît un regain d’intérêt dans les années 2000. Si en 1980 elles sont au nombre de 10, en 2019, on compte 70 sociétés coopératives ouvrières de production d’architecture. Au sein d’une SCOP, la hiérarchie devient théoriquement horizontale, dissolvant le lien de subordination entre salariés-associés et simples salariés. La responsabilité du bon fonctionnement de la structure n’incombe plus seulement aux associés, elle devient une préoccupation de tous. Dans le cadre juridique comme dans les discours, c’est la dimension collective qui occupe la place la plus importante. Tous les associés sont mis sur un pied d’égalité, ils possèdent chacun une voix à l’Assemblée Générale. Les bénéfices et les salaires sont répartis de manière équitable. Le profit est partagé sous la forme de participations et d’intéressement entre tous les salariés (selon un coefficient lié au temps de travail et à l’ancienneté), les salariés associés pouvant toucher des dividendes. Une part est également mise de côté pour contribuer aux réserves de la structure, pour consolider ses fonds propres et assurer sa pérennité. Le partage du pouvoir pousse à une plus grande autonomie des membres de l’agence qui mesurent concrètement les conséquences de leurs décisions sur son fonctionnement. Cette situation ne peut fonctionner que dans un contexte de confiance mutuelle qui va stimuler les employés, en faire de véritables acteurs, investis dans l’organisation de la structure et moteurs de son développement. Il est alors important que les coopérateurs soient porteurs d’une vision commune de l’organisation du travail et de la collaboration mais aussi d’une même posture de l’architecte et de la production architecturale. Parallèlement, la SCOP se nourrit de la diversité des personnalités qui la constituent, la multiplication des associés permettant d’avoir une grande diversité d’approches, de propositions, de multiplier la recherche de nouveaux projets et de réseaux Enfin, tous les associés sont censés apporter de nouvelles commandes et participer ainsi au développement de la structure. De par ces aspects, le statut de SCOP pourrait être garant d’une grande stabilité et pérennité et expliquerait la progression de la création des SCOP d’architecture de ces 10 dernières années. Des questionnements peuvent cependant apparaître quant à ce mode de collaboration : comment intégrer de nouveaux jeunes architectes pour qu’ils puissent perpétuer les SCOP mises en place ? Comment renouveler une commande qui reste une démarche de réseau ? Comment développer une

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structure de ce type et continuer à employer ? C’est ce que ATELIER 15, situé à Ivry-sur-Seine met en avant. L’agence, par peur de dénaturer la qualité de leurs échanges, ne souhaite pas intégrer plus que ses 12 salariés-associés actuels, mais préfère s’agrandir d’une autre manière : en développant le réseau de solidarité des SCOP (scop d’architecture mais aussi interprofessionnelles), ce qui leur permettrait de faire appel à des structures complémentaires pour des missions ponctuelles. 17 Société Coopérative d’Intérêt Collectif - SCIC Fondée sur l’intercoopération entre acteurs d’un même territoire, la SCIC, société coopérative d’intérêt collectif est une entreprise qui a pour objet la production ou la fourniture de biens et de service d’intérêt collectif qui présentent un caractère d’utilité sociale. Elle crée une forme hybride entre l’association et la société commerciale. La Scic permet d’impliquer dans le développement de ces projets l’ensemble des “parties prenantes” : les salariés, les producteurs du service,les bénéficiaires, clients, fournisseurs, bénévoles, collectifs de toute nature... Des logiques d’intérêt qui peuvent être parfois contradictoires : celles des usagers, des salariés ou encore celles de la communauté locale, se retrouvent dans la gouvernance même de l’entreprise. En ce sens, la SCIC invente une entreprise nouvelle, qui permet à des acteurs différents de faire converger leurs logiques pour développer un territoire. Elle offre ainsi une nouvelle forme de partenariat public / privé, un cadre propice aux recherches autour de l’économie sociale et solidaire. Citons notamment Faire Ville, SCIC née de la transformation de l’association 1901 AEREA (Actions, Etudes et Recherches sur l’Architecture, l’habitat et la ville) début 2016. Elle regroupe 6 “collèges” participants : Les collectivités publiques, les opérateurs immobiliers, des organismes à but non lucratif, des experts et professionnels de l’architecture, des personnes physiques bénévoles et des salariés ou mandataires. Elle a notamment été à l’origine de la réalisation d’une dizaine de projets d’habitat participatif autour de Toulouse.18

17 - «Comment faire face à la fluctuation de la commande ? vers une métamorphose des formes de l’exercice de l’architecte.», Propos receuillis par Lisa Armone Caruso pour son mémoire de HMONP, Juin 2016

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Collectifs Le terme collectif ne correspond à aucune forme juridique, il est donc empreint d’une grande opacité. Il s’agit d’un groupement informel qui réunit autant des personnes physiques que des personnes morales autour de valeurs et d’actions communes : le partage d’une démarche, de processus de création, d’une posture. En réalité il s’agit là d’une façade derrière laquelle se cachent des entités juridiquement autonomes. L’association CONSTRUIRE est un exemple que nous pouvons citer. Fondé par l’Architecte Patrick Bouchain et Loïc Julienne avec Nicole Concordet, Sébastien Eymard, Chloé Bodart et Denis Favret, l’atelier Construire se décrit “Foncièrement anticonformiste, et pratique une architecture « HQH » pour « Haute Qualité Humaine », développant les chantiers ouverts au public, véritables actes culturels, la remise en question permanente des normes, et la valorisation de la maîtrise d’usage au cœur du projet.”19 Les membres du collectif fonctionnent au travers d’une géométrie interne variable et se créent leurs propres règles, leurs propres codes, leurs propres mécanismes. Selon le projet, le lieu, la temporalité, les compétences requises, plusieurs membres se regroupent sous une convention de co-traitance. Il n’y a donc pas de liens financiers directs entre les membres du groupement, ceux-ci n’existant qu’avec la maîtrise d’ouvrage. Les différentes structures ne sont pas associées mais cotraitants conjoints, généralement avec mandataire solidaire. Quand le projet se révèle apporter trop de travail pour le nombre de personnes contractuellement impliquées, un contrat de sous-traitance avec d’autres membres de la structure informelle peut être réalisé, en rétrocession d’honoraires (sans sous-traiter la conception). Ces structures qui se veulent pluridisciplinaires, cherchent des formes de coproduction, valorisant le triptyque maîtrise d’œuvre, maîtrise d’ouvrage, maîtrise d’usage, favorisant l’inclusion des habitants dans le processus de conception et de construction. Dans le champ professionnel, les “collectifs d’architectes” sont désormais présents dans tous les projets de grande ampleur qui se respectent, preuve en est tous les appels à inventer et réinventer les villes et métropoles. Beaucoup de collectifs revendiquent une volonté de “se frotter au réel” qui s’exprime par un regain pour l’artisanat et la valorisation d’une dimension citoyenne de l’intervention de l’architecte. Ils multiplient les actions à l’échelle 1, cherchant à démocratiser la profession, devenant les instigateurs de nouveaux projets, de nouveaux usages grâce à une démarche

19 - Site internet CONSTRUIRE Architectes http://construire-architectes.over-blog.com/5-en-resume.html

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programmatique préalable et à un long travail de négociation auprès des institutions publiques et des usagers. Les collectifs revendiquent une pratique solidaire et partagée de l’architecture. Ce qui fait le collectif, c’est que les acteurs se considèrent en association et agissent comme tels. Dans le cadre de la rédaction de ce mémoire, j’ai pu rencontrer le Collectif Sens20. Association de six Architectes indépendants, le collectif revendique une “colocation d’entreprises d’architecture”. Au sein du même espace, chacun met en commun ses ressources techniques et graphiques ainsi que ses retours d’expérience. Une matériauthèque commune a été mise en place dans l’espace de travail. L’idée est de grandir individuellement avec la force et le soutien du collectif. Les Architectes indépendants partagent les mêmes principes mais souhaitent garder leur propre structure : “le partage d’une vision architecturale mais aussi d’une vision de gestion d’agence est difficile”. Récemment publiés suite à l’appel à projet “Et demain on fait quoi ?” du Pavillon de l’Arsenal, les six Architectes revendiquent leur volonté de développer un collectif de recherche. Impliqués dans les questions fondamentales des valeurs humaines au sein de projets d’architecture, ils développent des supports communs, tels qu’une charte à l’attention des maîtrises d’ouvrage, dans l’objectif de profiter du poids du collectif pour toucher une clientèle, commune ou non, qui leur permettra de perpétrer ces principes fondamentaux. Les architectes le savent bien : “les choses doivent bouger à un autre niveau : les promoteurs, les règles des Plan Locaux d’Urbanisme, les contrats, …” Si l’idée du collectif est stimulant, les six Architectes mesurent leur propos en décrivant la difficulté de la mise en commun tout en conservant sa propre indépendance, le manque de temps pour le faire, et le “côté tétanisant et stressant du fait de devoir tout gérer d’un coup”. Tous ne portent pas la même ouverture quant à la possibilité de créer une structure commune : “le modèle de co-traitance fonctionne bien, l’arrivée de projets de plus grande échelle posera peut-être la question.”

19 - Page Instagram de Collectif Sens https://www.instagram.com/collectifsens/

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Pour s’insérer dans les mécanismes classiques d’accès à la maîtrise d’œuvre, les collectifs proposent la mutualisation de leurs savoirs, de leurs réseaux et de leurs expériences individuelles face aux maîtrises d’ouvrage qui pourtant leur préfèrent encore les statuts juridiques clairement identifiables. Auprès de la nouvelle génération d’Architectes, les collectifs représentent une nouvelle forme d’association, moins contraignante, une sorte de plateforme collaborative permettant de s’appuyer les uns sur les autres et de co-traiter directement les uns avec les autres si besoin pour des projets nécessitant plus de production.

3. Modèle de demain, démarche personnelle

S’il existe de nombreuses façons d’exercer la profession d’Architecte, mes expériences professionnelles, cette dernière année de formation HMONP et mes réflexions personnelles ont précisé ma démarche. Avant tout, je souhaite faire le choix de la “maîtrise d’œuvre” au travers de ses missions complètes. Ce choix n’implique pas seulement le processus de conception et/ou de construction, mais la profession d’Architecte dans sa globalité, à savoir me responsabiliser pleinement et à toutes les étapes : dans la proposition de nouvelles démarches, dans les échanges avec les différents intervenants, dans la production de nouveaux projets, dans la gestion humaine, administrative et économique d’une structure dite d’architecture. Convaincue de la ressource de propositions pour le futur que représentent les Architectes, qu’ils ont la capacité de faire émerger des solutions aux nouvelles problématiques d’usage, d’environnement et de société, mais qu’ils ne peuvent y arriver seuls, je souhaite orienter ma démarche vers la concrétisation d’une structure collaborative, intégrant ainsi une réflexion globale pour les projets. Depuis quelques mois, l’idée d’une collaboration avec d’anciens collègues chemine et rejoint cette volonté d’exercer différemment de mes précédentes expériences professionnelles. Dans une société en pleine mutation, cette collaboration se voudrait plurielle et pluridisciplinaire. Elle pourrait réunir

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paysagistes, Architectes, ingénieurs, artistes ou consultant foncier, au sein d’un groupe de professionnels de la construction responsables et engagés. Non forcément associés les uns aux autres, ces collaborateurs au sein de ce collectif permettraient le partage d’expérience, la mise en commun d’outils graphiques, administratifs et économiques, de connaissances diverses afin d’économiser en temps, de mutualiser les savoirs et ainsi être plus réactifs et efficients dans les méthodes de production des projets. La structure viserait à s’organiser autour d’un plateau collaboratif libre, responsabilisant ainsi chaque acteur de celle-ci et proposant une réelle transparence d’équipe auprès des maîtrises d’ouvrage, des intervenants extérieurs et des visiteurs curieux. J’imagine une structure ouverte, comme un plateau flexible, un lieu de rencontres culturelles et techniques proposant les liaisons nécessaires aux interlocuteurs des projets : usagers, constructeurs, artistes, techniciens, commanditaires, …. Dans la perspective d’une collaboration structurée avec des associés, et sur le principe d’une société coopérative, la hiérarchie tendrait à être lissée pour disparaître. Les nouveaux collaborateurs pourront prendre part économiquement à la société et ainsi avoir le même poids de proposition et de décision que les fondateurs. En gardant toujours à l’idée de grandir en collaboration, la répartition des plus-values se ferait de manière équitable, ce qui renforcerait l’esprit collaboratif de la structure et les confiance mutuelle auprès de ses acteurs. Enfin, l’accès à la commande, que j’analyse comme une des parties les plus compliquées, qui peut rapidement remettre en question les principes initiés à la création d’une structure comme celle-ci, se ferait de manière raisonnée. Il s’agirait de viser, et de démarcher, des maîtrises d’ouvrage sensibles aux principes édictés en amont, ouvertes aux méthodes collaboratives et aux sujets sociaux et environnementaux. Les premiers projets devront pouvoir consolider une certaine vitrine pour gagner en crédibilité et en visibilité, analyser une situation sociétale et environnementale en pleine transition et proposer une nouvelle production de l’architecture en adéquation avec des partenaires solides. Ce modèle se devra d’être au service d’un projet architectural, urbain ou paysager, d’un discours sociétal, de principes environnementaux. Plus globalement, il portera une éthique professionnelle et personnelle qui résonne auprès de toute une génération d’architectes.

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CONCLUSION

Pour conclure, le rapport de production des Architectes se caractérise aujourd’hui par la dépendance à des exigences extérieures toujours plus contraignantes ainsi que par la multiplication des acteurs au sein du processus de la commande. La nouvelle génération d’Architectes, face aux contraintes, aux mouvements politiques et sociétaux tente de trouver une manière de s’imposer dans le processus de construction. Cela passe par la définition et la revendication d’une action sociale, un savoir environnement spécifique qui semble essentiel pour se réapproprier l’exercice d’Architecte. La discipline de l’architecture est pluridisciplinaire et collaborative, elle renvoie aussi bien à l’art, qu’à l’ingénierie, à la sociologie, à l’économie, au droit. Ainsi c’est un tout, elle ne peut perdurer sans les éléments “satellites” et inversement. Dans ce contexte, l’inter-professionnalité est mise en avant comme un moyen de faire face à la concurrence. Les métiers de l’architecture s’étendent, s’infiltrant dans de nouveaux domaines, cherchant à se réapproprier des missions qui leur avaient été enlevées précédemment et à s’en approprier de nouvelles. La conquête d’autres disciplines participe enfin à renforcer le rôle de l’Architecte, coordinateur du projet. Frédéric Laloux, dans son ouvrage Reinventing organizations, s’intéresse au fonctionnement de nos organisations. Constatant que les entreprises sont de moins en moins en phase avec nos attentes et nos besoins et présentant des modèles sur le principe de la coopérative, Laloux décrit un système où les hiérarchies sont mises à plat et l’humain au centre de tout, tous égaux, d’une seule voix. Le modèle est inspiré de la nature,rien ne fonctionne sans l’autre entité, tout fonctionne en choralité. Les aspirations à de nouveaux modes de fonctionnement, en corrélation avec la société actuelle, émergent d’une génération entière de plus en plus concernée par les sujets de leur quotidien. Peut-on pour autant considérer ces nouveaux modes de fonctionnement comme de parfaits modèles sans faille ? On peut imaginer la limite du système de gestion de ces entreprises dans la processualisation à outrance, l’uniformisation jusqu’à la négation de l’individu alors même que l’objectif était le contraire. Les structures d’architecture, inspirées de ces modèles et prenant appuis sur des bases fondamentales de droits humains, sociétaux et environnementaux, de coopération et de collaboration, pourront-elles croître et préserver le système mis en place en ce sens ? On peut poser la question de la

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limite de ce modèle et du risque de retomber dans un modèle traditionnel où les acteurs de la structure seraient à nouveau contraints de mettre en place des systèmes hiérarchiques et économiques poussant la structure à son développement. Ainsi, la taille des commandes et des projets doit-elle rester à échelle humaine afin de préserver le modèle collaboratif des structures et ses principes ? Faudrait-il, comme certaines SCOP d’architecture, limiter en nombre ses collaborateurs et ses projets pour ne pas retomber dans des modèles qui semblent dysfonctionner ? La problématique est d’autant plus importante que faire l’impasse sur les plus grandes commandes et les plus gros projets et chantier permettraient aux grands majors de la construction et aux promoteurs immobiliers de récupérer totalement ce marché et ainsi “doubler” définitivement le rôle de l’architecte ... Ainsi il me semble important de garder toujours à l’esprit les principes pour lesquels l’Architecte exerce sa profession, ses convictions et ses combats.

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BIBLIOGRAPHIE ARTICLES

- BIAU Véronique & LANTIER François, “La qualité architecturale, acteurs et enjeux”, Cahier RAMAU numéro 5, octobre 2009 - DARRIEUS Marion, “L’architecte salarié, cet inconnu au bataillon”, Le Moniteur, 11 mai 2020 - DARRIEUX Margaux, “AUA, une architecture de l’engagement” AMC, octobre 2015 - DELAUNAY Fanny & GOURVENNEC Estelle, “Les Scop d’architecture : un modèle de coopération ?”, Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère, 28 décembre 2020 - DEGIOANNI Jacques-Franck, “Les femmes remontent la pente dans les agences”, Le Moniteur, 25 décembre 2020 - KREPLAK Yaël & TURQUIER Barbara, “L’écologie en architecture et urbanisme : entre normes et pratiques. Entretien avec Nicolas Michelin.”, revue Tracés numéro 22, 2012 - MARTIN Raphaël, “Evolution de la part des CDI/CDD, 1993 à 2019”, Partageons l’échos, 26 octobre 2020 - ROTH Bernard, “Viser la qualité architecturale”, revue Constructisme, novembre 2002 - VAIRET Florent, “Architecte, quand l’image du métier de rêve s’effondre”, Les Echos, 7 janvier 2021 - YA+K, “Collectifs d’architectes (?)”, Urbanews, 16 juillet 2018

ENTRETIEN - Entretien dans les locaux du Collectif Sens, à Paris

ETUDES ET MEMOIRES

- “Archigraphie : Chiffres et cartes de la profession d’architecte”, Conseil National de l’Ordre des Architectes, décembre 2020 - ARMONE-CARUSO Lisa, “Comment faire face à la fluctuation de la commande ? vers une métamorphose des formes de l’exercice de l’architecte.”, HMONP Paris La Villette, 2016 - LANQUETTE Jean-Paul, “Guide des sociétés d’architecture”, Conseil National de l’Ordre des Architectes

EMISSIONS ET DISCOURS

- France Culture, “Les Possibilités d’une ville: conversation entre les architectes Paul Chemetov et Rudy Riccioti”, émission Les Matins, diffusée le 19 mai 2021 - France Inter, “Une nouvelle règlementation environnementale dans la construction”, émission L’urbanisme de demain, olivier Marin, diffusée le 9 janvier 2021 - RIESTER Franck, Ministre de la culture, “Discours prononcé à l’occasion de l’ouverture des journées nationales de l’architecture”, octobre 2019

LIVRES

- BIAU Véronique, “Les architectes au défi de la ville néo-libérale”, - BOLTANSKI Luc & CHIAPELLO Eve, “Le nouvel esprit du capitalisme”, Gallimard, 1999 - CHESNEAU Isabelle, “Profession Architecte”, 2e édition, Editions Eyrolles, 2021 - LALOUX Frédéric, “Réinventing Organization”, Diateino, 2014

SITES INTERNET

- Blog Construire architectes : construire-architectes.over-blog.com - Ordre des architectes : www.architectes.org - Page Instagram Collectif Sens : www.instagram.com/collectifsens - Site de FAIRE VILLE : www.faire-ville.fr/faire-ville-aera/ - Site officiel de l’administration française : www.service-public.fr - Service Public de la Diffusion du Droit : www.legifrance.gouv.fr - Site de SC Scop : www.les-scop.coop/chiffres-cles - Site du Studio Cigüe : cigue.net

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Camille Deslandes sous la direction de Monsieur Noël Carat Mémoire de soutenance à l’Habilitation à la Maitrise d’Oeuvre en son Nom Propre - Juin 2021 présenté sous la forme de Validation des Acquis Professionnels Ecole Nationale d’Architecture Paris Val de Seine


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