Campagnes Solidaires 301

Page 1

CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:48

Page 1

Campagnes solidaires Mensuel de la Confédération paysanne

N° 301 décembre 2014 – 5,50 € – ISSN 945863

Relocalisation

Photo : Georges Bartoli

Penser global, manger local !

1 000 vaches Un appel pour être - cette fois - entendus Grands projets inutiles Sivens vu du Larzac


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:48

Page 2

Sommaire Dossier

Penser global, manger (autant que possible) local ! 4 Vie syndicale Actualité 6 Procès de l’industrialisation de l’agriculture Les bonnes questions Un appel pour être - cette fois - entendus 8 Grandes cultures Une campagne en demi-teinte 9 Industrialisation de l’agriculture Un nouveau monstre en Touraine 10 Grands projets inutiles Sivens vu du Larzac Points de vue 11 José Bové Des nanos pour le Tafta ? Agriculture paysanne 12 Vendée Une installation individuelle, mais pas sans les autres ! 13 Rhône C’était viable ! Internationales 14 Colombie L’impossible commerce équitable 16 Envie de paysans ! Franche-Comté Envie de sols vivants ! Pays Basque Lurrama, la « ferme Pays Basque » est paysanne Alsace Une visite de ferme qui donne envie ! Culture 17 Pour une mort digne des animaux Annonces 18 Le salon de l’enfumage

Mines de plombs

Partout, les paysans de la Conf’ sont mobilisés FACE à la dérive de l’agriculture vers un système sans paysan, voué à l’exportation et À LA production d’une alimentation standardisée. Ces combats, nous les menons avec vous, et pour vous. L’agriculture nous concerne tous, car c’est de notre alimentation qu’il s’agit ! Nous nous battons, ensemble, malgré la RÉPRESSION contre un modèle, mais surtout pour un projet : l’agriculture paysanne, garante de création d’emplois agricoles, de territoires vivants, d’un environnement respecté, d’une alimentation de qualité. Ce projet n’est pas celui de la compétitivité à tout prix, devenue le seul mot d’ordre de nos gouvernants, c’est celui du vivre ensemble, du vivre bien, de LA SOLIDARITÉ. Pour cela, nous avons aussi besoin de votre soutien financier.

2 \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

Les textes publiés dans Campagnes solidaires peuvent être reproduits avec indication d’origine à l’exception de ceux de la rubrique Point de vue qui sont de la responsabilité de leurs auteurs et pour lesquels un accord préalable est requis. Campagnes solidaires est imprimé sur du papier recyclé


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:48

Page 3

On l’ouvre L’industrialisation de l’agriculture doit être combattue de tous les côtés

D

Josian Palach, paysan dans le Tarn-et-Garonne, secrétaire national

Mensuel édité par : l’association Média Pays 104, rue Robespierre – 93170 Bagnolet Tél. : 01 43 62 82 82 – fax : 01 43 62 80 03 campsol@confederationpaysanne.fr www.confederationpaysanne.fr www.facebook.com/confederationpaysanne Twitter : @ConfPaysanne Abonnements : 01 43 62 82 82 abocs@confederationpaysanne.fr Directeur de la publication : Laurent Pinatel Directeur de la rédaction : Christian Boisgontier Rédaction : Benoît Ducasse et Sophie Chapelle Rédaction, secrétariat de rédaction : Benoît Ducasse Maquette : Fascicule Dessins : Samson Diffusion : Anne Burth et Jean-Pierre Edin Comité de publication : Jo Bourgeais, Michel Curade, Véronique Daniel, Florine Hamelin, Jean-Claude Moreau, Josie Riffaud, Geneviève Savigny, Véronique Léon Impression : Chevillon 26, boulevard Kennedy BP 136 – 89101 Sens Cedex CPPAP n° 1116 G 88580 N° 301 décembre 2014 Dépôt légal : à parution Bouclage : 27 novembre 2014

Durant cette année 2014, la Confédération paysanne a croisé le fer avec l’agriculture industrielle appliquée aux ruminants, à travers les actions menées contre l’usine des 1 000 vaches, dans la Somme. Ce modèle, déjà très présent pour l’élevage des monogastriques (porcs, volailles), ne doit pas s’appliquer aux animaux capables de valoriser la matière première la moins onéreuse qu’est l’herbe. C’est la Conf’ qui dénonce les dérives de l’évolution de l’agriculture durant ces cinquante dernières années, dérives encouragées par l’utilisation d’énergies fossiles jusque-là abondantes et peu onéreuses. Ce combat est cohérent et en lien direct avec celui contre les OGM ou les dérives du commerce international. Le réchauffement climatique, la dégradation de la qualité de l’eau et de l’air sont autant de sujets sur lesquels l’agriculture industrielle agit aussi négativement. C’est à nous, paysans, de nous lever, de nous faire entendre par les décideurs avec l’appui de nos concitoyens responsables, et de porter auprès de nos voisins un projet d’agriculture paysanne qui respecte la nature, les hommes qui la façonnent et transmettent aux générations futures une planète viable. Pour se faire entendre, la Confédération paysanne doit utiliser des méthodes pas toujours légales, mais légitimes. Ces actions ne peuvent se réaliser que grâce à des militants motivés, s’exposant dans notre organisation sociétale à une répression judiciaire souvent sévère. La force de notre syndicat est de compter dans ses rangs des éclaireurs de conscience qui travaillent et vivent de la terre. Nos messages peuvent ne pas être compris de tous les actifs de la production agricole dans un environnement où le « chacun pour soi » tend à se développer. Mais les questions alimentaires et environnementales prennent de plus en plus d’importance dans la société, et il est important que la Conf’ porte le témoignage, l’analyse et les propositions de ces acteurs à la source que sont les paysans. L’industrialisation de l’agriculture doit être combattue de tous les côtés, aussi par des mesures fiscales. Ces cinquante dernières années, la fiscalité a été favorable à l’investissement, base de l’industrialisation. Il est urgent d’orienter la fiscalité en faveur de l’emploi paysan. C’est possible, et la Confédération paysanne y travaille actuellement. En toute cohérence avec ses autres combats.

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014 / 3


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:48

Page 4

Vie syndicale

Des paysans japonais à Bagnolet Le 13 novembre, une délégation de paysans japonais, délégués de la chambre nationale d’agriculture en voyage d’étude en Europe, ont été reçus au siège de la Confédération paysanne par Marie-Noëlle Orain, secrétaire générale et Emmanuel Aze, membre du comité national. Ils souhaitaient connaître les positions de la Conf’ sur divers sujets, de la formation des prix et du revenu des paysans à l’installation et à la transmission des fermes.

Contre une usine à tomates en Charente-Maritime Dans un communiqué de presse publié le 17 novembre, la Confédération paysanne de Charente-Maritime exprime son opposition à la mise en place, près de Rochefort, d’une nouvelle « ferme-usine » destinée à produire près de dix mille tonnes de tomates par an grâce à la chaleur fournie par un super-incinérateur. Les porteurs du projet de serres sont trois associés : la société Chambertin, dirigée par le président d’une des plus importantes entreprises du BTP de la région, un exploitant agricole producteur de noisettes sur 40 hectares, et la société hollandaise A + G Van Den Bosch, spécialisée dans les tomates hors sol. Au total, 44 hectares de terres agricoles seraient acquis par « Les Jardiniers charentais » (si !) et 17 hectares, dans un premier temps, construits sous forme de serres de six mètres de haut. Pour la Confédération paysanne, « les conditions de production vont engendrer non seulement des besoins en eau et en produits chimiques,

mais aussi une qualité douteuse destinée à approvisionner les grandes surfaces à des prix encore plus bas. Dans les emplois créés, combien le seront effectivement ? Dans quelles conditions de travail ? Que vont devenir les producteurs locaux ? Quel bilan énergétique peut-on en attendre ? Car, pour brûler des ordures ménagères riches en humidité, il faudra beaucoup d’énergie fossile (gaz ou pétrole). Quelles conséquences sur l’environnement et le réchauffement climatique ? D’un côté, on stérilise définitivement des terres agricoles à grands coups de barrages, d’aéroports, de LGV… et d’un autre, on invente des projets inutiles qu’on impose aux populations sans concertation, sans étudier correctement des solutions alternatives et pour le profit de quelques industriels avides de profit immédiat et de subventions publiques, avec la complicité des pouvoirs publics. »

Manifestation en octobre contre le projet de super-incinérateur à Échillais, près de Rochefort. Le projet est mené par Vinci, la firme de BTP qui porte celui d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes… Le projet d’usine à tomates est couplé à celui du super-incinérateur.

4 \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014


27/11/14

19:48

Page 5

Vie syndicale

En Picardie aussi, les paysans ont de l’avenir On est bien en Picardie, mais loin de l’usine des 1 000 vaches. Et loin de la fatalité qui pourrait sembler s’abattre sur la région

et ses

vastes

plaines désolées. Prenons Mélanie. Elle a remplacé le 1er janvier de cette année son beaupère parti à la retraite. Elle n’est pas arrivée seule aux côtés de son mari : un autre couple s’est installé à la même date, diversifiant la ferme (lait avec transformation, céréales, maraîchage). Un départ pour trois arrivées sur le même site, ça peut être ça aussi, la Picardie. Le documentaire pour Internet « Les paysans ont de l’avenir » donne d’autres exemples de paysans et acteurs ruraux qui portent dans leur région un autre modèle que celui, mortifère, de l’agriculture industrielle. Ce « webdoc », comme on dit, clair, beau (oui, aussi) et pédagogique, est à voir sur le site de la Confédération paysanne, ou directement sur : lespaysansontdelavenir.fr

Chaîne de solidarité pour les apiculteurs des Pyrénées Les Pyrénées – l’Ariège et les Pyrénées-Orientales surtout – ont été fortement touchées par les mortalités d’abeilles cette année. La commission apicole de la Confédération paysanne s’associe à la Fédération française des apiculteurs professionnels (FFAP) pour organiser une collecte d’essaims sur cadres afin de reconstituer un cheptel dans les départements impactés. Est fait appel à tous les apiculteurs pouvant donner un ou plusieurs essaims de type Dadant, bio ou conventionnel. Cette chaîne de solidarité permettra, c’est en tout cas l’espoir et l’objectif, de sauver les exploitations les plus décimées. Les essaims seront acheminés fin mars 2015 et nous devons organiser les choses avant le 15 décembre. Merci de répondre avant cette date. Contact : nicolas.gy@nordnet.fr

L’Ardèche et l’Isère agricoles hors-Tafta Le 21 novembre, à l’initiative de la Confédération paysanne, la chambre d’agriculture de l’Ardèche a adopté, à l’unanimité, une motion demandant l’arrêt des négociations sur le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (plus connu aujourd’hui sous le nom-acronyme de Tafta) et l’ouverture d’un débat parlementaire sur tout projet d’accord de ce type. Plus généralement, la motion demande la transparence des négociations pour tout projet d’accord, avec l’ensemble des acteurs concernés (agriculture, services, industrie), le respect des règles européennes (sanitaires, traçabilité, protection de l’environnement, sociales), la reconnaissance réciproque et non équivoque des règles de protection des origines géographiques et des cahiers des charges de qualité, l’équilibre dans les volumes en jeu et la prise en compte des filières en place, le renforcement de l’identification des produits (étiquetage, IPG, AOP…) pour l’information des consommateurs… Le même jour, la chambre de l’Isère votait elle aussi à l’unanimité une motion similaire proposée par la Confédération paysanne. Contact : confpays07@wanadoo.fr

Le ruraleur

CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

Le ruraleur

Balaize ! « La troisième révolution agricole et alimentaire » ne fait pas peur à Xavier Beulin. C’est un peu comme le mot politique célèbre : « Ces événements-là nous dépassent, feignons d’en être les organisateurs ! » Après avoir tapé sur le gouvernement qui distribue probablement les nitrates à la volée uniquement pour embêter le brave agriculteur que chacun est, après avoir à cet effet envoyé des manifestants déverser des lisiers ici et là (en fait, toujours sur des bâtiments publics, comme si l’ennemi était le fonctionnaire de l’administration !), après avoir distribué l’appellation de « djihadistes verts » à ceux qui n’ont pas la même notion de développement durable que lui, voilà donc le président de Sofiprotéol et néanmoins président de la Fnsea (casquettes les plus connues) en organisateur de la révolution agricole et alimentaire (1) : « faire des échanges où tous les acteurs économiques de la chaîne alimentaire se retrouveraient ». Et qui sont ces acteurs? Il s’agit des « semenciers, producteurs, transformateurs, transporteurs, distributeurs, restaurateurs et consommateurs ». Je ne sais si la préséance donnée aux semenciers est fortuite ou indicative d’une orientation qui n’écarte pas les OGM. Je ne sais ce qu’en pense le consommateur qui aurait effectué une malencontreuse démarche à la préfecture le jour de la décharge de lisier. Je ne sais ce qu’on dirait dans les médias de « l’Open Agrifood » si celui-ci s’était produit en même temps que la décharge de lisier précédemment envisagée. Je ne sais si Danone et Leclerc auront l’audace de dire qu’ils prennent leur feuille de route économique à l’Open agrifood. Je ne sais finalement pas grand-chose. Mais Xavier Beulin sait, lui. Il sait trouver des finances publiques pour faire la pub de Leclerc et Danone tout en badigeonnant les préfectures. Balaize, le mec ! (1) cf. p. 20, Open Agrifood, Orléans, 20 et 21 novembre 2014. 25 novembre 2014

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014 / 5


Écobrèves Climat : ça bouge… un peu Alors que le rapport des scientifiques du Giec (cf. CS n° 300) annonce des lendemains qui déchantent, les instances politiques s’agitent un peu à la vue du sommet mondial sur le climat, fin 2015 à Paris-Le Bourget. Ainsi la France a adopté, en première lecture, la loi sur la transition énergétique prévoyant de réduire de 40 % ses émissions de CO2 d’ici 2030. L’Union européenne a repris cet objectif fin octobre, de même que celui de pourvoir à cette échéance 27 % de ses besoins par les énergies renouvelables. Mais l’UE ne représente que 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Les ÉtatsUnis et la Chine – qui a eux deux représentent plus de 45 % des émissions de CO2 de la planète – annoncent ce mois-ci une réduction de leurs émissions de 26 à 28 % d’ici 2025 pour les ÉtatsUnis, la Chine s’engageant, elle, à… « réduire son pic d’émission d’ici 2030 ». En attendant, les Chinois sont priés de prendre des masques ! Le sommet de 2015 aura du mal à atteindre des objectifs que le Giec juge indispensables…

La manif contre tout Après l’impact médiatique du procès confédéré contre l’usine des 1000 vaches, à Amiens le 28 octobre, la Fnsea-Ja voulait reprendre la main. Ce qu’elle a tenté de faire le 5 novembre. Quoi de plus facile que de mobiliser contre les réglementations, l’administration, les contrôles, les règles environnementales et autres directives nitrates ? Le poujadisme est très tendance du temps qui court. Ça évite de poser les questions sur l’agriculture de demain.Alors, fumier et lisier à volonté, devant ou sur les bâtiments administratifs, voire la permanence des écolos, ça défoule. Par contre, écraser des ragondins qui n’ont pas pris la direction espérée, comme ça s’est passé à Nantes, ça fait tâche… et c’est médiatique, mais pas dans le sens recherché! Une mobilisation nationale beaucoup plus modeste qu’indiquée: la Fnsea annonce 36000 manifestants, mais c’est sans doute en considérant qu’un tracteur vaut dix manifestants. N’empêche, Beulin va encore exercer son pouvoir de nuisance auprès du gouvernement.

Écobrèves

CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:48

Page 6

Actualité Procès de l’industrialisation de l’agriculture

Les bonnes questions Après le 28 octobre et le procès de neuf militants poursuivis suite à deux actions syndicales sur le site de la ferme des 1000 vaches, dans la Somme, où en sommes-nous des « relations » de plus en plus étroites entre la Confédération paysanne et la Justice ?

L

e 28 octobre, lorsque le tribunal correctionnel d’Amiens, après 9 heures d’audience, a mis fin aux débats, nous imaginions revenir trois mois plus tard dans cette même salle afin de connaître le jugement. Que nenni! Il nous était annoncé qu’à 20 heures ce même jour, nous serions informés de notre sort. Je ne reviens pas, bien évidement, sur la lourdeur des peines, mais la rapidité des délibérations (à peine une heure) a de quoi interroger. Alors que, généralement, le temps est pris pour réanalyser le dossier à la lumière et des témoignages et des auditions des prévenus devant de tribunal, là, tout laisse à penser que les éléments apportés par nos avocats, par nos quatre témoins et par nous-mêmes n’ont pas été entendus. Peu importe, c’est une décision de Justice et, parce que nous avons confiance dans les institutions de notre pays, nous la respectons, malgré son arrière-goût de je-nesais-quoi qui a du mal à passer… Alors, forts de nos convictions, forts de notre légitimité, persuadés que nos actions sont justes et pertinentes, nous avons décidé de faire appel des peines prononcées. Appel, donc! Un appel pour faire quoi? Un appel, une nouvelle procédure, pour faire valoir nos droits, pour clamer que – oui ! – nous avons confiance en la Justice, celle qui protège les plus faibles, les plus démunis des exactions des plus gros ! Un appel pour alerter une nouvelle fois l’opinion publique sur cette dérive intenable de notre agriculture, de notre système alimentaire. Non, nos fermes ne sont pas des usines ! Non, l’alimentation des citoyens ne doit pas être standardisée, industrialisée !

6 \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

Par la question alimentaire, la Confédération paysanne s’inscrit dans la lutte contre les exclusions, des paysans comme des citoyens. Il y a, parmi nous, ceux dont on dit qu’ils ne sont pas assez « compétitifs » pour rester ou devenir paysans, ceux que les politiques publiques poussent dehors en favorisant invariablement l’agrandissement, l’accaparement des moyens de production entre les mains de quelques-uns, la concentration des productions. Cette poursuite de la compétitivité touche la société tout entière, et l’alimentation en est un symptôme: ceux qui sont exclus de la répartition des richesses n’ont pas droit à une alimentation de qualité. N’oublions pas que l’heure est au pessimisme le plus absolu. Le « c’est la crise, on n’y peut rien » est de mise alors que notre pays reste la 5e puissance économique mondiale.

Alors, oui, le problème de la répartition dans ce pays est posé par la Confédération paysanne, et l’alimentation doit être au cœur de nos mobilisations. Puisque la Confédération paysanne continue à imposer les questions qui dérangent, la police, elle, « fait son travail ». Je suis à nouveau convoqué, cette fois pour une vitre brisée lors de l’occupation du siège social de Ramery SA le 12 septembre 2013, ouvrant donc une nouvelle procédure, et la pression s’accentue auprès de responsables locaux de la Conf’. Pourquoi un tel acharnement ? Pourquoi vouloir « casser » la Confédération paysanne ? Nous posons de bonnes questions et ça dérange ? Ok, ok… Moi, ça me donne envie de continuer ! Pas vous ? n Laurent Pinatel, porte-parole national


27/11/14

19:48

Page 7

Actualité

Un appel pour être - cette fois - entendus Avocate des Neuf d’Amiens, Lætitia Peyrard revient sur son engagement auprès des paysans poursuivis et analyse le procès du 28 octobre.

J’

ai défendu avec mes confrères, Me Grégoire Frison et Me Guillaume Combes, les neuf prévenus lors de l’audience devant le tribunal correctionnel d’Amiens, le 28 octobre 2014. J’avais déjà en 2012, aux côtés de Me Chantal Jullien, défendu neuf agriculteurs (dont Laurent Pinatel) cités devant le tribunal correctionnel de Saint-Étienne pour avoir, au moment de la crise laitière en 2009, déversé du lait sur plusieurs bâtiments de la Cité de l’Agriculture. J’avais été touchée par la détresse de ces paysans confrontés à cette grave crise laitière, le prix de leur lait notamment acheté par les industriels ne leur permettant plus de vivre de leur travail. Défendre les neuf personnes poursuivies pour avoir agi dans le but de dénoncer les dangers de

l’usine des milles vaches, c’est pour moi porter la parole de ceux qui n’acceptent pas de se résigner. La Justice leur reproche : • de ne pas avoir accepté le prélèvement de leur ADN ; • d’avoir, le 11 au 12 septembre 2013, dégonflé 27 pneus d’engins sur le site de l’usine et inscrit un tag géant sur le chantier en construction (désormais invisible car recouvert d’une dalle) ; • d’avoir le 28 mai 2014, démonté en partie la salle de traite de l’usine pour apporter certaines pièces au ministre de l’Agriculture. Le 28 octobre, après avoir interrogé chaque prévenu sur son implication, après avoir entendu les témoins cités pour expliquer les dangers de l’usine des milles vaches, après avoir entendu deux salariés de la SCEA Cote de la Justice (cf. encadré), après avoir entendu la plaidoirie de l’avocat de la partie civile, le réquisitoire du ministère public et les plaidoiries des avocats des neuf prévenus, le tribunal a pris environ une heure pour réfléchir à ces débats et prendre sa décision. À l’issue de ce délai, le délibéré : tous coupables, condamnés à des peines d’emprisonnement avec sursis (de 3 à 5 mois) et une amende de 300 euros pour ceux

ayant refusé le prélèvement d’ADN. Le tribunal a décidé de ne pas retenir l’état de nécessité, c’est-àdire qu’il a considéré que l’usine des milles vaches ne constituait pas un danger imminent qui justifierait la commission d’une « infraction ». Plus largement, il a retenu qu’aucun combat ne justifie de transgresser la loi. Alors qu’il lui était demandé de considérer ces actions comme légitimes et symboliques, le tribunal a retenu leur illégalité et leur gravité. Il a, en conséquence, condamné les prévenus comme des délinquants ayant porté gravement atteinte à la propriété privée. Tant les arguments juridiques développés que les explications données sur les raisons de ces actions n’ont pas été retenus : c’est pour ces raisons qu’il a été décidé de faire appel de la décision rendue. Il appartiendra à la cour d’appel qui doit rejuger l’intégralité du dossier (1) de s’interroger tant sur la légitimité de ces actions que sur la participation effective des neuf personnes que la Justice a choisi de poursuivre parmi l’ensemble des personnes présentes lors de cette dénonciation collective. n Lætitia Peyrard, avocate au barreau de Saint-Étienne (1) À l’heure du bouclage, nous ignorons la date du procès en appel (NDLR).

Rameryfications

À Nîmes, lors d’un rassemblement de soutien aux Neuf d’Amiens, le 28 octobre, jour de leur procès. Plusieurs rassemblements de ce type se sont tenus ce jour-là, dans des villes très éloignées de la Picardie, comme encore Saintes ou Nice.

La société civile d’exploitation agricole (SCEA) Côte de la Justice est propriétaire des murs de l’usine des 1 000 vaches, de 180 hectares de terre autour et du méthaniseur (plus exactement du futur méthaniseur, puisqu’il n’est pas encore construit). 51 % des parts de la société appartiennent à Michel Ramery, les 49 % restant étant détenus par la société MR Finances, MR comme… Michel Ramery. Le cheptel est lui la propriété de la société civile laitière (SCL) « Lait pis carde », également employeur des salariés de l’usine, dont l’un des quatre gérants est… Michel Ramery. La SCL – qui loue l’outil à la SCEA – regroupe les troupeaux des divers agriculteurs ou autres sociétés agricoles associés : deux, bientôt quatre, une douzaine ambitionnée dans les prochains mois. En amont, ça a été plus direct : c’est Michel Ramery lui-même qui a déposé le permis de construire de l’usine, et Éric Mouton, le maire de Buigny-Saint-Maclou, la commune sur laquelle elle est construite, qui en a fait les plans puisque, ça tombe bien, il est architecte…

Écobrèves

CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

Écobrèves Une participation dénoncée La FGA-Cfdt dénonce la fermeture des chambres d’agriculture le 5 novembre, en soutien à la manifestation de la Fnsea-Ja. Elle regrette la confusion des genres « qui va plutôt contribuer à décrédibiliser les chambres, tant auprès des agriculteurs que des pouvoirs publics ». Le syndicat en profite pour rappeler « son opposition totale aux revendications de la Fnsea, comme la TVA sociale ou le maintien des exonérations de cotisations sur les emplois saisonniers agricoles ».

L’agroécologie simplifiée Sensible aux coups de menton de Xavier Beulin, Stéphane Le Foll annonçait la veille de la « manif contre tout » du 5 novembre la mise en place d’une « mission pour des contrôles moins contraignants pour l’agriculture ». Cette mission est confiée au préfet de Bretagne lequel – selon le Canard enchaîné –, malgré une double annulation par le tribunal administratif d’un arrêté préfectoral autorisant une porcherie usine (23000 porcelets/an) a renouvelé le décret en faveur de la mégaporcherie, sûrement au nom de la simplification administrative. La simple déclaration jusqu’à 2000 porcs – au lieu de 400 précédemment –, c’est aussi par simplification… La mission va sûrement ajouter des facilitations. C’est sans doute au nom de l’agroécologie que Le Foll a plaidé et obtenu de Bruxelles l’éligibilité aux aides du « verdissement » de la Pac… de la monoculture du maïs, par le biais d’un couvert hivernal, ce dont se réjouit la Fnsea. La « mission » ne manquera pas d’élargir le champ du possible de l’agroécologie…

L’Apli en AG L’association des producteurs de lait indépendants (Apli), affiliée à l’European Milk Board (EMB), tenait son AG le 20 novembre, dans l’Ille-etVilaine. Elle poursuit son travail d’’organisation transversale et vient de conclure un contratcadre avec la laiterie Bongrain, « équilibré » selon l’association, avec des avancées sur la durée et le renouvellement. Quant au prix garanti, ça reste la pierre d’achoppement !

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014 / 7


Écobrèves Les cancers chez les paysans Selon une enquête de la MSA, les risques de cancers chez les agriculteurs sont inférieurs à la moyenne parce que « le tabagisme y est beaucoup moins fréquent », mais… certains cancers touchent particulièrement les paysans ! Ainsi les arboriculteurs au contact de pesticides sont plus sujets au cancer de la prostate, mais aussi du poumon. Les éleveurs de bovins ont deux fois moins de risques de cancer du poumon, mais les insecticides pour traiter les animaux favorisent les cancers de la prostate. D’autres cancers sont spécifiques aux paysans, tel le mélanome de la peau chez les femmes. Ces résultats proviennent d’une étude lancée en 2005 dans onze départements auprès de 180000 professionnels. L’étude se poursuit afin « de regarder dans les années à venir les activités agricoles à risque »… La MSA ne semble pas pressée de reconnaître ce qui pourrait relever de la maladie professionnelle : les pesticides sont pourtant clairement identifiés.

Monsanto indemnise des agriculteurs Habituellement Monsanto attaque en justice aux ÉtatsUnis et au Canada les producteurs qui se retrouvent pollués accidentellement par des OGM. Cette fois, la situation est inverse. Suite à la découverte d’un blé OGM non autorisé dans l’État d’Oregon (USA), certains pays, notamment le Japon, avaient suspendu leurs importations. Des agriculteurs américains avaient porté plainte suite à la contamination de récoltes en 2013. Pour éviter le procès, Monsanto a accepté de payer 2,375 millions de dollars d’indemnisation pour les producteurs ayant vendu du blé pollué aux OGM en 2013. Si ce blé avait été autorisé, la peine aurait été inversée. D’où l’intérêt de s’opposer aux autorisations !

Écobrèves

CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:48

Page 8

Actualité

Grandes cultures Une campagne en demi-teinte pour les céréaliers Une production mondiale record en blé et maïs : la campagne 2013/14 a été placée sous le signe de l’abondance… et de prix en retrait. En France, les aléas climatiques se sont ajoutés aux aléas économiques.

D’

une façon générale, les producteurs en grandes cultures subissent deux aléas + un. L’un de ces aléas est celui des marchés : partout cette année, dans les pays exportateurs, les récoltes sont bonnes en volume, la production est supérieure à la consommation et un stock de report conséquent se dessine pour la fin de campagne. Les cours du blé et du maïs sont donc logiquement tirés vers le bas (l’orge n’est pas dans ce cas de figure, mais en est quand même un peu tributaire). L’autre aléa est climatique. Les conditions de fin de culture et de récolte – températures fraîches et pluies estivales – ont altéré la qualité meunière d’une partie des blés français et européens, de façon telle que certains marchés à l’exEn France, la récolte de blé tendre cette année est évaluée à 37,5 millions de tonnes, en hausse de 1,8 % par rapport à l’année dernière. La production se situe au-delà du niveau moyen des récoltes 2009 à 2013 (+ 5,5 %) et atteint un niveau inégalé depuis une dizaine d’années. Selon une note de FranceAgriMer, publiée mi-novembre, à l’exception du blé dur, les prix actuels des grandes cultures conservent une importante décote, comparés à ceux relevés à la même période les quatre précédentes campagnes. Pour le blé tendre, les orges fourragères et le maïs, les prix fermes actuels sont inférieurs de près de 20 % à ceux relevés en octobre 2013. Pour le triticale, la décote atteint 30 %.

8 \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

port ne sont plus accessibles, ou difficilement. La situation n’est cependant pas partout pareille. Certaines régions, à l’Est de la France, ont plutôt subi une sécheresse au printemps, cependant que l’Ouest a été moins impacté par la dégradation de la qualité meunière (en Poitou-Charentes, les blés sont de bonne qualité meunière). L’abondance de blé qui ne peut être valorisée qu’en alimentation animale, dans un contexte où la récolte de maïs a été abondante, a entraîné les prix vers le bas. La différence de prix entre un blé fourrager et un blé meunier, qui était en moyenne de deux à trois euros par tonne, est passée sur cette campagne dans une fourchette de 20 à 40 euros par tonne. En général, un aléa climatique est compensé par un aléa de marché, mais cette année, ils s’additionnent. Il faut noter par ailleurs que le prix des betteraves à sucre et du colza a aussi beaucoup baissé, celui des pommes de terre s’effondrant. Les producteurs sont aussi « victimes » de trois années… de bons

revenus qui les ont poussés à « optimiser fiscalement », c’est à dire à défiscaliser leurs revenus en investissant de façon importante. Le machinisme agricole en a bien profité, beaucoup d’investissements matériels ont été avancés, uniquement pour des raisons fiscales. Mais aujourd’hui, ces cultivateurs doivent faire face à une trésorerie nettement amoindrie et/ou à des remboursements d’emprunts conséquents. De plus, certains producteurs imposés socialement (MSA) en moyenne triennale ont la « malchance » de payer avec les revenus d’une mauvaise année des cotisations calculées sur des années à fort revenus. Ce dernier point est rarement mis en avant. Il est très facile (et vrai) de dire que la situation économique est actuellement difficile pour les producteurs en grandes cultures, mais on oublie de dire que la moyenne des revenus sur les quatre dernières années pour ces mêmes cultivateurs est supérieure aux autres systèmes de production. n Gilles Menou, paysan en Eure-et-Loir


27/11/14

19:48

Page 9

Actualité

Industrialisation de l’agriculture Un nouveau monstre en Touraine Avec la fin des quotas en avril prochain, combien de fermesusines vont pousser dans nos campagnes ? Zoom sur un projet de demande d’augmentation d’effectifs d’animaux en Touraine, bien représentatif de la course qui s’engage vers l’industrialisation de l’agriculture.

P

rès de Tours, un gaec de trois frères a déposé à la préfecture une demande d’extension de son élevage. Le projet veut doubler le troupeau laitier en passant de 200 vaches à 420 vaches laitières et 140 génisses, et quadrupler la production de taurillons en passant de 50 à 200 unités. Ce n’est pas tout : il y a déjà un troupeau de 1200 chèvres et chevrettes sur l’exploitation. Argumentant leur projet, les trois associés se considèrent comme « les sauveurs de la déprise laitière en Touraine ». L’arrêt des quotas leur donne des ailes… Dans le dossier est mentionnée la création… d’un seul emploi. Le plan d’épandage prévoit une surface de 890 hectares, répartis sur sept communes, dont la plus éloignée est à 20 km, en zone humide qui plus est. La Confédération paysanne de Touraine ne pouvait que réagir. En quelques jours, le syndicat a présenté ses revendications auprès du commissaire enquêteur. Aux côtés des positions des associations de défense de l’environnement apparaît ainsi dans l’enquête publique la parole de paysans opposés au projet. Nous avons ensuite organisé le 3 novembre une manifestation devant la mairie de la commune concernée, Monts. Une bonne couverture médiatique a permis de mettre ce dossier à la une des journaux. Pour animer la manifestation et faire le tour des différents pro-

Le 3 novembre à Monts, la Confédération paysanne de Touraine a invité les manifestants à s’exprimer point par point sur le projet de ferme-usine, puis a donné sa position sur ce projet aux antipodes de l’agriculture paysanne.

blèmes posés par l’industrialisation de l’agriculture, nous avions préparé plusieurs questions : « Une ferme-usine, ça sauve l’emploi ? Un besoin de lait en quantité ? Un moyen de garder des territoires vivants ? Un risque pour l’environnement ? Concentration des animaux, concentration des nuisances ? Agriculture industrielle et agriculture paysanne peuvent cohabiter ? »

Enjeux en jeu Le jeu des « vrai/faux » a permis une très bonne participation du public, beaucoup de discussions, de prises de position point par point. Et un effet stimulant pour les habitants de la commune qui se sentaient bien seuls jusque-là, et dont plusieurs ont salué la prise de position de paysans. A été également discutée la création d’un collectif pour être capable, comme pour l’usine des 1000 vaches dans la Somme, de se mobiliser rapidement et efficacement si ce projet (et d’autres…) menaçait de démarrer. La manifestation a été l’occasion pour le syndicat de dénoncer une fois encore les effets pervers de l’industrialisation de l’agriculture : course aux volumes, destruction

de l’emploi paysan, dévitalisation des territoires que cela entraîne. Des citoyens s’inquiètent des nuisances sonores et olfactives d’une telle ferme. Ce fut l’occasion de rappeler notre grande inquiétude sur le respect du plan d’épandage, vu l’éloignement des terres. Notre inquiétude est d’autant plus forte que nous avons l’exemple d’une ferme similaire dans le sud du département qui ne respecte pas son plan d’épandage, l’administration ne parvenant visiblement pas à la contraindre à respecter cette obligation légale. Ici, comme dans la Somme, la question est simple : peut-on accepter la disparition de quatre exploitations de cinquante vaches laitières au profit d’un tel projet ? Et ici comme dans la Somme, les citoyens présents à la manifestation de Monts (qu’ils soient paysans ou non), ont répondu haut et fort: pour des territoires vivants, pour l’emploi, pour l’environnement, pour la qualité de l’alimentation, il vaut mieux des paysans nombreux et répartis sur le territoire plutôt que quelques fermes-usines ! n Hervé Bedouet et Frédéric Gervais, éleveurs laitiers en Indre-et-Loire

Écobrèves

CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

Écobrèves Des faucheurs chez Limagrain C’est pour dénoncer – entre autres – la recherche sur le blé OGM qu’une centaine de faucheurs a occupé le 6 novembre les locaux de Limagrain, à Chappes (Puy de Dôme). « On est venu faire une inspection citoyenne », ontils déclaré. Rien de cassé, du moins du côté de Limagrain, car pour les faucheurs il n’en a pas été de même. Une centaine d’adhérents de la Fnsea ont vandalisé leurs voitures : pneus crevés, peintures rayées et autres dégradations, sous l’œil bienveillant des gendarmes, eux aussi appelés à la rescousse ! Au cours de l’occupation, une rencontre s’est tenue avec deux dirigeants. Discours habituels : « Les OGM, c’est pour produire plus, avec moins de ressources » et « La coexistence de toutes les cultures, OGM et non-OGM, peut et doit être respectée ». La preuve en est faite par Monsanto (cf. p. 8) !

Sapin « soulage » les actionnaires Le ministre des Finances, Michel Sapin, a indiqué le 31 octobre que le gouvernement s’opposait à un amendement, adopté quelques jours plus tôt par l’Assemblée nationale, prévoyant d’assujettir les dividendes versés par les sociétés anonymes aux cotisations sociales. Cette annonce vient après une vive réaction du Medef. « Un amendement qui n’est pas compris, c’est un amendement qui est mauvais », a justifié le ministre. C’est vrai ça, les travailleurs qui voient une partie de leur travail confisquée par la finance ne comprendraient pas qu’on réduise les profits par des cotisations. Il n’y a que des gauchistes pour penser cela ! Jo Bourgeais

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014 / 9


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 10

Actualité

Grands projets inutiles Sivens vu du Larzac

L’

acharnement de quelques-uns à défendre ce projet bancal du barrage de Sivens interpelle. « Pour un gouvernement et dans un État de droit, il est hors de question de céder à la violence, notamment quand il s’agit de projets qui préparent l’avenir » prétend Manuel Valls… Et pourtant, l’écotaxe, projet d’avenir pour freiner les transports routiers polluants, n’est-elle pas passée à la trappe suite aux actions « musclées » des Bonnets rouges (Fnsea y compris), alors qu’elle avait été votée à la quasi-unanimité à l’Assemblée nationale ? (…) Le barrage serait déclaré d’utilité publique. Piètre classement quand on sait par expérience que les déclarations d’utilité publique (DUP) sont décidées par un commissaire enquêteur souvent potiche, qui dit rarement le contraire de celui qui l’indemnise : l’État. On sait aussi par expérience que les bulldozers sont toujours plus rapides que la justice : rappelons-nous le barrage de Fourogue lui aussi dans le Tarn, construit mais… jugé illégal après sa construction (1). D’ailleurs, l’utilité publique n’est souvent qu’un habillage : « Le camp du Larzac est indispensable à la Défense nationale », clamait sans cesse à Rodez le préfet-perro-

quet des années 1970. Or le camp ne s’est jamais agrandi, la Défense nationale ne s’est pas écroulée, et maintenant l’on ferme camps et casernes. La DUP ressemble à la raison d’état, « raison que l’on invoque quand on fait quelque chose de contraire à la loi ou à la justice » (ancienne édition du Larousse). En fait, il ne faut jamais oublier que la légalité ne peut s’imposer à la légitimité.

diversifiée, et par endroits le doublement de la population agricole ! Des agriculteurs tarnais prétendent avoir besoin de l’eau du barrage. Il est à noter qu’ils ont vécu jusqu’à maintenant sans, d’une part, et que d’autre part dans vingt ou trente ans, l’agriculture d’aujourd’hui n’aura plus cour, les changements climatiques obligeant à changer les pratiques.

Rassemblement en mémoire de Rémi Fraisse, jeune opposant au barrage de Sivens, le 2 novembre 2014 sur le site du projet de construction, dans le Tarn

En tout cas, grâce à la décision courageuse de François Mitterrand en 1981, ce projet a été abandonné, et le Larzac est devenu laboratoire pour une agriculture nouvelle : les trois quarts en bio, une gestion collective de 7 500 hectares, une agriculture très

Pour un projet global de territoire, au profit de tous les paysans Le 14 novembre, la Confédération paysanne du Tarn participait à la rencontre entre les syndicats agricoles et les experts du ministère de l’Environnement, auteurs du rapport sur la pertinence du barrage de Sivens. La Confédération partage les constats et analyses des experts : projet surdimensionné, mal financé, anachronique, destructeur… Le 18 novembre, la Commission européenne annonçait le lancement d’une procédure d’infraction contre la France pour violation des directives environnementales sur ce dossier. Le projet, auquel manquaient déjà deux des près de dix millions d’euros de financement, pourrait se voir retirer deux autres millions via l’Union européenne et le programme Feader. « Le 14 novembre, nous avons défendu un projet global pour les 200 paysans de la vallée », précise Christophe Curvale, le porte-parole de la Confédération paysanne du Tarn. « On ne peut accepter de voir près de dix millions d’euros d’argent public dilapidés pour seulement 30 exploitants. D’autant que le projet date de 1969 et ne correspond plus aux besoins et enjeux d’aujourd’hui. Depuis 40 ans, 183 retenues collinaires ont été réalisées sur le bassin. On peut donc largement optimiser l’existant. Maintenant, le problème, ce n’est pas l’eau, mais le revenu des paysans et l’installation. D’où la nécessité d’un projet global de territoire, pour tous, et non la crispation BD sur un vieux projet idéologique. »

10 \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

Quand des pro-barrage de Sivens s’expriment dans les médias, on voit bien qu’ils ne raisonnent pas dans une vision à vingt ans, mais ils sont hélas encore dans celle d’il y a vingt ans. Étrange décalage. Reste un dernier point qui pose question, c’est la notion de conflit d’intérêt entre des élus tarnais et la Compagnie d’aménagement des coteaux de Gascogne, juge et partie, comme l’évoquaient il y a peu France 3 Midi-Pyrénées et le Canard Enchaîné du 5 novembre. En clair… ce dossier ne l’est pas. Tout remettre à plat est plus que nécessaire. Quant aux autorités coupables de ce désastre humain et écologique, l’Histoire les jugera sans complaisance. Si seulement les projets d’aujourd’hui étaient plus souvent étudiés à la lumière de l’expérience du passé… n Léon Maillé, paysan retraité du Larzac (1) Cour administrative d’appel de Bordeaux, 1999.


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

1/12/14

9:45

Page I

Dossier

Penser global, manger (autant que possible) local !

M

argaret Chan, directrice générale de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à l’ouverture de la deuxième Conférence internationale sur la nutrition, du 19 au 21 novembre à Rome : « Le système alimentaire mondial ne fonctionne plus, à cause de sa dépendance à une production industrialisée de nourriture toujours moins chère et mauvaise pour la santé. » Notre charte de l’agriculture paysanne porte, elle, comme un de ses principes, d’« assurer la bonne qualité gustative et sanitaire des produits ». La qualité d’un produit est fondamentalement la conséquence de son mode de production : taille d’atelier, niveau d’intensification, modes d’élevage et de culture, utilisation des intrants… La qualité n’est pas subjective ; au contraire, elle doit être officiellement reconnue, identifiable et vérifiable par le citoyen.

Relocaliser, c’est produire ici Les consommateurs font confiance aux fruits et légumes cultivés localement, selon une récente étude de l’office FranceAgriMer. Maintenir et installer des maraîchers partout devrait être une priorité. Mais dans les faits, les surfaces mises en culture diminuent dans les régions traditionnelles de production, sans aide couplée de la Pac pour soutenir ces productions.

Relocaliser, c’est aussi « vendre pas loin » Plus ou moins loin, c’est selon… La population urbaine croît et 6 000 tonnes d’aliments par jour sont nécessaires à une ville de dix millions d’habitants. Pour nourrir la population de l’Ile-de-France, il faut en terre agricole six fois la surface de celles utilisées aujourd’hui dans cette région. Le

local est « au plus près », pas forcément toujours « là ».

Relocaliser, c’est le soutien aux circuits courts de proximité, mais pas que… La relocalisation concerne aussi les circuits longs, ce qui pose les questions de la maîtrise de la décision dans les coopératives, de la disparition des collectes de lait dans les zones de montagne… Du local à un peu plus loin, la relocalisation nécessite le soutien aux magasins de producteurs, aux marchés paysans, aux plateformes de vente aux collectivités locales, notamment pour la restauration collective. Maintenir, soutenir des fermes qui produisent une alimentation de qualité, maillent et font vivre les territoires, négocier en leur faveur, c’est défendre des mesures adaptées sur les réglementations liées à la production et à à la transformation. C’est défendre les produits fermiers, veiller à ce que les soutiens du second pilier de la Pac (celui dédié au développement rural) accompagnent les projets des paysans (plancher d’aide, plafond, dimensions collectives…). C’est par exemple le soutien à l’abattage de proximité, aux circuits de commercialisation et à leur promotion. n Judith Carmona, paysanne dans les Pyrénées-Orientales, secrétaire nationale

Numéro cofinancé par l'Union européenne Les avis exprimés dans ce dossier n’engagent que leurs auteurs et et ne sauraient être considérés comme constituant une prise de position officielle de la Commission européenne. Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

/I


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page II

Dossier Une diversité d’expériences, mais un fondement commun : la proximité, le lien social

Relocalisation L’autonomie alimentaire implique des solidarités inter-territoriales Une métropole comme Rennes peut-elle nourrir ses habitants en s’approvisionnant localement ? Sur quelle surface ? C’est l’objet d’une étude prospective conduite par la sociologue Catherine Darrot (1). Face à une demande urbaine exponentielle en matière de produits frais à forte valeur sociale, cette ingénieure agronome plaide pour le développement massif de la logistique intermédiaire. Entre 2010 et 2013, vous avez dirigé une étude prospective imaginant des scénarios de modèle agricole local à l’horizon 2020 et 2030, avec les étudiants du Master Agriculture durable et développement territorial d’AgroCampus Ouest. Qu’est-ce qui vous a amené à conduire cette étude sur Rennes Métropole ? Le contexte était propice. Rennes a choisi de maintenir une ceinture verte, ce qui permet de poser des questions sur l’agriculture périurbaine de manière plus intéressante qu’ailleurs. D’autre part, les circuits courts n’avaient pas autant décollé il y a dix ans. À l’époque, notre équipe a été interpellée sur trois aspects : premièrement, que les circuits courts concernent de faibles volumes économiques et demandes de consommation ; deuxièmement, que ce modèle ne peut pas nourrir la population ; et enfin, que soutenir politiquement un modèle relocalisé revient à tuer les emplois bretons. Nous avons donc construit avec mon collègue de Rennes Métropole en charge de l’agriculture une hypothèse de scénario basée sur ces constats-là. Puis nous avons exploré le potentiel de relocalisation en regardant les effets sur ces trois paramètres : consommation, volume alimentaire et emplois. Vous avez ainsi demandé à vos étudiants de calculer la surface nécessaire pour nourrir les habitants de Rennes Métropole… Oui, et ils ont travaillé sur deux scénarios : un scénario tendanciel – dans lequel la production demeure conventionnelle et le régime alimentaire à l’identique – et un scénario de relocalisation maximisé, dans lequel les modèles alimentaire et productif changent. Dans ce deuxième modèle, la production est biologique, les rations animales sont basées sur des ressources locales, les volumes de produits animaux consommés sont abaissés, les transports réduits au maximum pour répondre aux exigences d’une ville postcarbone… Les étudiants ont également proposé de mettre en culture les trames vertes

urbaines et ont montré que l’on pouvait gagner 2 500 hectares dans la métropole ! À quelles conclusions – partielles – sont parvenus vos étudiants ? Il apparaît qu’en faisant toutes ces modifications, nous pouvons doubler le potentiel d’autonomie alimentaire de Rennes Métropole – passer de 20 à 40 %. Selon le modèle tendanciel, il faut 0,30 hectare pour nourrir un habitant, contre un peu moins de 0,20 hectare par habitant dans le modèle d’autonomie. Selon l’étude, il n’y a pas de risque de disette si l’on doit un jour relocaliser complètement.

libre entre leur potentiel agronomique et leur bassin de population. Il faut donc réfléchir à des systèmes basés sur des échanges avec des territoires qui ont cherché à maximiser leur autoproduction. En clair, développer les solidarités interterritoriales. Quelles sont selon vous les conditions nécessaires pour développer massivement des circuits courts paysans ? Il n’y a pas assez d’offre aujourd’hui par rapport à la demande urbaine en attente de produits plus frais à forte valeur sociale. Et l’accessibilité de ces produits est un vrai pro-

La ceinture verte de Rennes Métropole.

Ce modèle est-il transposable à d’autres territoires ? La technique est transposable mais le modèle doit être refait selon les lieux car les potentiels agronomiques ne sont jamais les mêmes. Aix-Marseille par exemple a un potentiel agronomique assez peu élevé autour de son centre-ville, et un bassin de population plus fort que Rennes. Le problème de l’autonomie alimentaire se pose pour un tel territoire. En revanche, nous avons transposé le scénario à Strasbourg qui a un fort potentiel agronomique, et nous arrivons à des conclusions ressemblant à celles de Rennes. Des territoires comme ceux-là auraient sans doute vocation à exporter des aliments vers des territoires comme Aix-Marseille qui connaissent un déséqui-

II \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

blème. L’enjeu est de massifier l’offre, ce qui implique d’optimiser la logistique intermédiaire, depuis la transformation jusqu’aux modes de commercialisation. Il s’agit de créer une logistique territoriale qui permette de gérer des quantités de produits conséquentes afin de gérer la demande urbaine. Cela suppose d’être capable de transformer une grande quantité de produits et de les acheminer jusqu’à des lieux de consommation de manière à favoriser leur accessibilité. L’autre aspect, c’est évidemment le levier des aides publiques qui est déterminant pour orienter la production. n Recueillis par Sophie Chapelle (1) Ingénieure agronome, enseignante – chercheure en sociologie à AgroCampus Ouest, responsable de l’unité pédagogique Sciences humaines et territoires.


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page III

Dossier

P’tit Gibus Épicerie paysanne mobile : une mutualisation originale de la commercialisation En région Centre, une forme innovante de commercialisation en circuits courts a vu le jour, portée par des producteurs désireux de garder le contact direct avec leur clientèle, tout en se réservant du temps de travail sur leurs fermes.

Photo : P’tit Gibus

L

e projet de P’tit Gibus remonte à 2011. Au départ, trois producteurs au Sud de la Touraine soulèvent le problème de la distribution de leurs productions. Ils contactent d’autres paysans, tous soucieux de vente directe. Parmi eux, Michel Galopin, éleveur-fromager. « Notre premier objectif était de mutualiser la vente en embauchant une personne, avec un roulement de producteurs », explique-t-il. « Nous voulions garder le contact direct avec nos clients tout en n’étant pas là à chaque fois. » Leur projet de départ est une épicerie paysanne mobile. « Nous pensions à un bus qui allait vendre dans les villages où il n’y a plus d’épiceries, d’où le nom de P’tit Gibus. » Mais la crainte de devoir passer beaucoup de temps sur les routes pour pouvoir faire du chiffre les amène à faire évoluer le projet. Constitués en association collégiale, les producteurs cherchent des lieux dans l’agglomération de Tours afin de rationaliser les déplacements. L’agglomération leur propose finalement un emplacement abrité. « Nous avons acheté un camion, fabriqué une remorque pour mettre les produits des dix producteurs et développé notre site internet pour les commandes en ligne, précise Michel Galopin. Notre gamme couvre toute l’épicerie : huile, miel, fromages de chèvres ou de vaches, lait, canards, poulets, pains, farines, madeleines… L’idée c’est que le client puisse trouver tout ce qu’il cherche. » Le P’tit Gibus a embauché une salariée qui se charge de récupérer les produits sur les

Le P’tit Gibus est une épicerie paysanne mobile. Ici à Tours.

fermes et assure la vente aux côtés d’un pro- chargés, et notre manque de disponibilité est ducteur. L’association livre désormais sur un problème. Créer une synergie est un véricommande et dispose d’un emplacement table enjeu mais notre volonté d’avancer coldans la ville de Saint-Cyr. « Nous voudrions lectivement reste intacte. » n Sophie Chapelle vendre sur les marchés, mais cela implique d’être inscrit au registre du commerce et de Plus d’infos : www.ptitgibus.com perdre le statut associatif. Tout n’est donc pas Du mode de transport aux courtes distances réglé », observe Michel Depuis la révolution industrielle, et encore plus depuis la seconde Galopin. Qui a fait le guerre mondiale, l’agriculture française a connu de profondes choix, comme l’en- transformations : recours aux intrants chimiques, spécialisation semble des membres de des régions en termes de productions (plaines céréalières, zones l’association, de multi- d’élevage…), diminution du nombre et agrandissement des fermes et, avec le pétrole bon marché, explosion des transports de marplier les débouchés. chandises. Dans les années quatre-vingt, la prise de conscience des « Nous n’avons pas limites de ce modèle, surtout environnementales, se développe. d’emprunt et nous nous La forte augmentation du prix du pétrole et la dépendance aux développons douce- transports routiers, avec son lot de pollutions et l’artificialisation ment. Les emplois du des terres agricoles au profit des infrastructures, renforcent cette temps de chacun des prise de conscience. D’où les actions en faveur de la relocalisation producteurs sont assez des productions et des échanges alimentaires.

Près de 6 700 exploitations engagées dans des points de vente collectifs Les magasins de producteurs sont des espaces de commercialisation physiques gérés par des collectifs de producteurs, qui proposent leurs produits à la vente. Qu’ils fonctionnent en remise directe et avec la présence des producteurs à la vente, comme dans le cas des points de vente collectifs, ou avec une part d’achat revente ou de dépôt-vente, ces modes de commercialisation en circuits courts sont en plein développement. Selon la fédération nationale des Civam, les points de vente collectifs concernaient en 2010 près de 6 700 exploitations en France, sur les 67 000 commercialisant tout ou partie de leur production en circuits courts. Source : Fédération nationale des Civam

Pour autant, comme le souligne Bertrand Schmitt, chercheur à l’Inra (1), l’impact environnemental des transports dépend davantage des modalités que des distances : une lourde péniche sera moins polluante que le nombre de camions équivalents sur les mêmes parcours cumulés, et un cargo aura un faible impact au regard du volume de marchandises transportées. Parallèlement à la diminution globale des transports, la question des « derniers kilomètres » de livraison est le nouveau défi à relever, car c’est dans les courtes distances que la pollution du transport routier est la plus forte au kilomètre parcouru. Avis aux locavores ! Benoît Ducasse (1) Dirigeant depuis juin 2013 la Délégation à l’expertise scientifique collective, à la prospective et aux études (DEPE) de l’Inra, Bertrand Schmitt participait au séminaire « Localisation », organisé par la Confédération paysanne et l’Inra à Arras (Pas-deCalais), les 21 et 22 octobre 2014.

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

/ III


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page IV

Dossier Maintenir et développer des outils structurants, de la production à la distribution

Bretagne Ces éleveurs qui luttent pour sauvegarder des abattoirs publics Roger Dagorne est éleveur laitier et en vente directe à Plouguernével, dans les Côtes-d’Armor. Avec d’autres producteurs, ils se sont constitués en association afin de reprendre la gestion de l’abattoir public et relancer l’économie locale. De sérieuses menaces de fermeture ont pesé ces dernières années sur l’abattoir intercommunal de Rostrenen. Que s’est-il passé ? Cet abattoir est en régie directe depuis 2003, au niveau de la communauté de communes du Kreiz-Breizh (CCKB). Mais il était en déficit : la CCKB devait renflouer le budget de l’abattoir tous les ans, ce qui est interdit pour les activités économiques, et envisageait de s’en désengager. Avec d’autres éleveurs, nous avons rencontré la CCKB pour lui rappeler que ce service ne pouvait pas disparaître. Nous sommes situés dans une zone rurale assez pauvre, où beaucoup de

familles produisent, vendent et consomment leur propre viande. Supprimer cet abattoir revenait aussi à les mettre en difficultés. La communauté de communes a donc accepté dans un premier temps la réalisation d’un audit… Elle a effectivement confié un audit à un cabinet spécialisé qui a souligné plusieurs points faibles dans la gestion de l’abattoir : un seuil de rentabilité insuffisant compte tenu des volumes traités, des soucis d’organisation, des politiques tarifaires non adaptées et des sous-produits pas assez bien valorisés. La position du cabinet, c’était de confier

l’abattoir à une société de droit privé. Nous avons donc décidé de créer une association d’utilisateurs dans le but de promouvoir l’intérêt de cet abattoir et de rassembler d’autres paysans pour créer une SCIC (1), lancée il y a un an. Une bonne centaine de producteurs a apporté des parts sociales et nous avons collecté environ 22 000 euros. Où en est le projet aujourd’hui ? Notre SCIC devrait prendre en charge l’abattoir au printemps 2015. Un conseil d’administration a été élu pour assurer la gestion. L’avantage de la SCIC est la démocratie dans la prise de décision, le

respect des personnes et une certaine forme de solidarité et de partage. L’outil va rester la propriété de la CCKB. Notre but est que cet abattoir reste public. Nous avons un abattoir privé situé à 50 km où les tarifs sont plus élevés. Or, travailler uniquement avec un abattoir privé signifie la possibilité pour ce dernier d’augmenter ses tarifs comme il veut. Sauvegarder l’abattoir public de Rostrenen, c’est donc une manière de sauver des petites fermes en vente directe. Dans un territoire fragile, chaque emploi a une valeur inestimable. n Recueillis par Sophie Chapelle (1) Société coopérative d’intérêt collectif.

Loire Créer des abattoirs pour répondre à un vrai besoin de proximité Comment est né le projet d’abattoir d’Andrézieux-Bouthéon ? Cela fait suite à la privatisation de l’abattoir de Saint-Etienne en 2008. Les groupes Sicarev et Despinasse ont repris l’outil et l’ont spécialisé en bovins. La chaîne ovine a été arrêtée en juillet 2010, puis ce fut au tour de la chaîne porcine en juin 2011. Nous sommes une trentaine de producteurs, ainsi que deux grossistes et trois bouchers, à avoir été mis dehors. Une solution temporaire d’abattage des porcs et des moutons a été trouvée. Mais cela implique de faire 80 km pour abattre. Nous passons de 26 centimes le kilo de carcasse sur les porcs à 50 centimes, à cause des transports… C’est là qu’est née l’idée de créer un abattoir de proximité au Sud du département. Il en existait déjà un dans le Nord de la Loire et nous ne voulions surtout pas créer de la concurrence.

Photo : Famille Margot

Jean-François Margot est éleveur de porcs à Saint-Genest-Malifaux, dans la Loire. Avec d’autres éleveurs, bouchers et grossistes, ils ont créé un abattoir de proximité qui devrait être lancé début 2015.

Le nouvel abattoir d'Andrézieux-Bouthéon qui devrait débuter ses activités début 2015.

Quelles structures vous ont accompagné dans le montage du projet ? Nous avons d’abord contacté la chambre d’agriculture pour gérer le projet. Puis nous avons visité des petits abattoirs de proximité, rencontré des communautés de communes… Nous avons finalement trouvé un

IV \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

terrain constructible, mais ça n’a pas été facile. C’est finalement sur la commune d’Andrézieux-Bouthéon qu’a pu aboutir notre projet et en cela nous remercions le maire, M. Chalk, qui nous a accueillis et proposés la location d’un bâtiment. L’investissement immobilier est porté par le Syndicat intercommunal pour les parcs …/…


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page V

Dossier …/… d’activités d’Andrézieux-Bouthéon. Nous avons créé une société d’actions simplifiées (1) qui prend en charge le matériel pour l’abattoir – 530 000 euros, dont 40 % de subventions. Les producteurs seront maîtres de cet outil qui devrait démarrer en février 2015 et faire tourner cinq emplois. Nous projetons l’abattage de 1 000 tonnes de porcs et plus de 200 tonnes en production ovine.

Quelles sont les conditions de réussite de ce projet ? Pour être crédible auprès des banques, 35 producteurs et trois bouchers ont amené un capital de 154000 euros, et deux grossistes 25000 euros chacun. Cela fait maintenant deux ans que le capital est versé. Heureusement que nous sommes restés soudés, car il y avait une forte pression des autres abattoirs pour que notre projet ne se fasse pas !

Au moment de la présentation du dossier à la région où siègent toute la profession ainsi que les métiers de bouche, le soutien de la chambre d’agriculture a été déterminant. Ce projet d’abattoir répond à un vrai besoin de proximité. Et garantit notre indépendance par rapport aux grands abattoirs. n Recueillis par Sophie Chapelle (1) SAS APAB (société par actions simplifiées pour l’abattoir de proximité d’Andrézieux-Bouthéon).

Terroirs sur la Route Un service mutualisé de livraison de produits fermiers en Loire-Atlantique Depuis quelques années, le manque d’organisation logistique des circuits courts est souvent mis en avant comme un frein majeur à leur développement et à leur performance énergétique et environnementale. Un défi que des producteurs de Terroirs 44 ont cherché à relever, en partenariat avec l’atelier de découpe De la Terre à l’assiette.

É

viter de perdre du temps et de gaspiller de l’énergie en se croisant sur les routes, tout en faisant vivre le réseau, tel était l’objectif du groupe de producteurs qui a initié la réflexion il y a 6 ans. Déjà rodés aux projets collectifs, ils se sont lancés sans idée préconçue ni référence : si les coûts du transport de tomates à travers l’Europe semblent bien maîtrisés, les enjeux et spécificités de la livraison fermière de proximité sont un domaine bien inconnu des experts. Notre collectif de producteurs est

donc parti en exploration, avec l’appui de Terroirs 44, de compétences extérieures et de financements publics. À l’issue de cette phase, deux tournées hebdomadaires ont été mises en place à partir de septembre 2010. Quatre ans plus tard, le camion frigo de Terroirs sur la Route sillonne le département quatre jours par semaine pour livrer les retours de découpe chez des éleveurs, ainsi que pain, viandes, légumes, et autres produits d’une quinzaine de producteurs dans une diversité de lieux de vente : magasins à la ferme, points de vente collectifs, Biocoops, artisans, restauration collective… Ces livraisons occupent aujourd’hui un temps plein. Le financement, après avoir bénéficié d’une aide à l’emploi, est assuré par la facturation faite aux producteurs, incluant aussi « coûts du camion » et frais de structures. Cette facture rebute certains producteurs, qui n’ont pas l’habitude de comptabiliser le temps passé en livraison

individuelle, et de chiffrer leurs coûts de distribution. Mais pour les habitués, la régularité du service, le temps ainsi dégagé, la rigueur qu’il a apporté sur l’exploitation, ou encore la possibilité d’accéder à de nouveaux marchés, sont autant d’acquis sur lesquels ils ne feraient pas marche arrière. L’activité est une section de la Cuma De la terre à l’assiette, statut apparu assez vite comme une évidence pour des paysans habitués à mutualiser ainsi du matériel. Mais il est susceptible d’évoluer pour permettre le développement d’une activité plus conséquente, à même de s’adapter aux nouveaux besoins générés par des outils structurants à l’étude: projet d’abattoir en lien avec l’atelier de découpe, projet de légumerie associé à la structure d’insertion Accès-réagis. Cela doit aussi faciliter l’optimisation par les volumes, credo de la logistique ! n Anne-Sophie Bouveret, Terroirs 44

Des plateformes collectives pour répondre aux demandes des collectivités Carte nationale des plateformes collectives d'organisations économiques de producteurs qui visent à fournir en produits bio et locaux les collectivités locales. Norabio

MB 35

BDD IBNS FD IDF

BBE MB 56 MB 44 MB 53 SCIC Le bio d’ici MB 85

MBCA

PBL Solibio

Self Bio Centre Bio a Pro MBE MB Lim

La bio d’ici ABD

MBIAB

Isle Mange Bio MB 47 RB MP

Agribio Provence

AB 06

Comment passer à une dynamique supérieure ? Depuis les années 2000, le réseau Fnab (1) travaille sur la structuration de la filière. « Il y a dix ans, les filières de l’agriculture biologique n’étaient pas prêtes pour répondre aux demandes de la restauration collective, appuie Julie Portier, de la Fnab. Nous avons poussé la création d’organisations collectives de producteurs bio, “les plateformes”.» Aujourd’hui, la Fnab dénombre 26 plateformes couvrant 70 % des départements, susceptibles de fournir des produits biologiques locaux en restauration collective. Elles ont pour particularité d’être des structures issues de l’économie sociale et solidaire – souvent sous forme de SCIC – ou des associations. Les prix sont maîtrisés par les producteurs. La SCIC Manger Bio en Champagne-Ardenne par exemple, facilite le travail des gestionnaires en assurant la prise des commandes, la logistique et la facturation. La SCIC Resto Bio Midi-Pyrénées approvisionne régulièrement des sites, allant de 50 à 27 000 repas par jour. « En retour, les collectivités doivent garantir des débouchés, souligne Julie Portier. Pour gagner en échelle, nous avons besoin de vrais partenariats entre producteurs et collectivités. » SC

© FNAB

(1) Fédération nationale d’agriculture biologique des régions de France. www.fnab.org

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

/V


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page VI

Dossier Coopérer pour valoriser les savoir-faire et les ressources d’un territoire

Herriko, une filière pour le pain basque Paysans, meuniers et boulangers collaborent pour proposer un pain de qualité dont toutes les étapes de production sont réalisées au Pays Basque. Sur un territoire où la monoculture de maïs est importante, l’introduction du blé permet aussi de préserver la qualité des sols grâce aux rotations de cultures.

Philippe Begards, boulanger à Bayonne, Nicole Larroulet, responsable de la minoterie d'Ustaritz, et Félix Noblia, paysan à Bergouey : Herriko est une belle démarche territoriale.

se situe à un niveau plancher de 240 euros la tonne. « Si le cours du blé est au-dessus de ce niveau, un bonus nous est accordé, s’il est au dessous, ce prix nous est garanti. On sait donc qu’on ne perdra pas d’argent, à moins que notre récolte ne soit pas panifiable, mais ça, on ne peut pas le maîtriser », précise Félix Noblia.

Coopérer Une question de posture et d’apprentissage ? L’alimentation doit être l’affaire de tous : paysans, artisans, consommateurs, salariés, élus, etc. C’est à partir de ce constat que se développent de plus en plus de projets associant différentes parties prenantes. En France, une panoplie de statuts permet de coopérer dans le même projet, notamment avec la création des SCIC (1). Mais, si le statut est le cadre choisi pour exprimer au mieux le projet, il ne garantit, ni la qualité de la coopération, ni l’atteinte des objectifs. Ces derniers doivent être, au préalable, clairement identifiés, partagés et déclinés sur des choix d’organisation cohérents. Travailler les postures de la coopération est aussi essentiel : lorsqu’un collectif composé de paysans, salariés et consommateurs statue sur le prix du kilo de pommes, par exemple, les intérêts de ces catégories doivent être pris en compte, mais aussi l’intérêt du collectif lui-même, qui dépasse la somme des catégories. Cela demande à chacun de se situer au-delà de son point de vue habituel de paysan, salarié ou consommateur et d’adopter une posture décalée, de construction d’une entité commune. Seuls la connaissance, la confiance et l’apprentissage mutuels le rendent possible. François Monat (1) Le statut de Société Coopérative d’Intérêt Collectif, créé en 2001, permet par exemple d’associer des collectivités au projet.

VI \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

La filière utilise la variété de blé Apache, et depuis un an la variété Illico également. « C’était une demande des minoteries de démarrer avec des variétés reconnues. Mais nos objectifs sont d’utiliser des variétés locales, plus résistantes aux maladies. Les minotiers sont ouverts à ces évolutions », indique Emmanuelle Bonus, technicienne à Laborantxa Ganbara, la chambre d’agriculture alternative basque qui suit la démarche (cf. CS n° 277). Un cahier des charges fixe les conditions de production et de fabrication pour tous les maillons de la filière. Pour les paysans, il s’agit notamment d’un usage très restrictif des pesticides ou encore de l’interdiction de cultiver du blé deux années de suite sur la même parcelle. Des contrôles d’un organisme externe seront mis en place prochainement. Les boulangers sont aussi satisfaits : « Les gens qui goûtent le pain Herriko l’adoptent, ou en tout cas y reviennent régulièrement », commente Philippe Begards de la boulangerie La Petite Bayonnaise, à Bayonne. n Source : Maritxu Lopepe, journaliste à Laborari (n° 1078), journal d’ELB, syndicat paysan basque membre de la Confédération paysanne.

Photo : Georges Bartoli

Photo : Laborari

D

epuis cinq ans que la démarche est lancée, le blé Herriko a atteint cette année sa plus forte récolte : 130 tonnes de blés, récoltées sur 33 hectares, ont pris cet été la direction des minoteries de Mauléon et Ustaritz. Paysan à Béhasque, Alain Claverie, est parmi les premiers engagés dans la démarche : « Ici, c’était une terre à blé autrefois, on semait du ray-grass ensuite. Quand le maïs semences est arrivé, tout a été chamboulé, il fallait en faire partout. On a matraqué les sols. Quand j’ai entendu que la filière Herriko se créait, je l’ai de suite intégrée. Avec des cultures tournantes, on limite l’érosion, on a une meilleure qualité du sol. Chez moi, c’est flagrant, le maïs vient aussi mieux de la sorte. Et en tant que paysan, c’est valorisant de produire quelque chose qui sera consommé par les gens du pays. » La filière Herriko regroupe à ce jour sept paysans, deux minoteries et trente boulangers du Pays Basque. « Le groupe de paysans est à peu près le même depuis le début. Il a volontairement été limité jusqu’ici, jusqu’à ce que l’on maîtrise bien la production et aussi en fonction des débouchés qu’il y avait. Aujourd’hui, de nouveaux paysans souhaitent intégrer la filière, on va commencer à ouvrir », explique Félix Noblia, paysan à Bergouey. Le prix du blé, qui tient compte des charges moyennes de l’ensemble des cultivateurs,


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page VII

Dossier

Restaurer les passerelles entre éleveurs et artisans bouchers

G

érard Poisson, éleveur et cogérant de l’atelier de découpe De la Terre à l’Assiette, à Nozay, en Loire-Atlantique, et Joseph Brûlé, un des derniers bouchers-abatteurs du département (1), parlent d’une même voix : il faut rassembler producteurs et artisans dans une même dynamique en faveur des filières courtes, et d’un projet d’abattoir de proximité aujourd’hui soutenu par le conseil général. De son côté, Terroirs 44, association de producteurs fermiers, fait le constat des limites de son champ d’action, la vente directe : développer les circuits de proximité passe nécessairement par une coopération entre tous les acteurs de

l’alimentation, permettant de valoriser les savoir-faire de chacun, d’optimiser les outils, et de répondre aux exigences de qualité de consommateurs de plus en plus nombreux. Tous les acteurs de cette dynamique (2) s’accordent rapidement sur les bénéfices des relations directes entre éleveurs et artisans. Mais ils prennent vite la mesure de résistances diverses – et parfois virulentes – exprimées sur le terrain entre des professions qui se sont développées en se tournant le dos, soumises chacune de son côté au bulldozer de la grande distribution. Il faut un peu de temps pour reconstruire des passerelles…

C’est pourquoi depuis deux ans, les partenaires multiplient les initiatives : rencontres sur les fermes et en boutique, valorisation de partenariats « exemplaires » à l’occasion de la semaine nationale de l’artisanat, interventions auprès des apprentis, annuaire de producteurs souhaitant travailler avec des artisans… Tous sont convaincus que de fil en aiguille, le maillage finira par se tisser. n Anne-Sophie Bouveret, Terroirs 44, www.terroirs44.org (1) Joseph Brûlé est président de la Confédération générale de l’alimentation au détail (CGAD) des Pays-de-la-Loire. (2) avec également l’UPA : Union professionnelle des artisans (UPA) et Cap44, coopérative qui œuvre à la promotion de l’agriculture paysanne, à l’initiative de la Confédération paysanne.

Photo : Georges Bartoli

Liège se fabrique une ceinture aliment-terre Mettre sur pied une filière complète d’alimentation locale et durable à Liège, pour que les consommateurs locaux s’alimentent majoritairement en aliments locaux, c’est le projet de la Ceinture aliment-terre liégeoise (CATL), lancée fin 2013.

L’

idée : mettre en réseau tous les acteurs actuels et potentiels du circuit court de Liège et des environs. Soient les agriculteurs, transformateurs, distributeurs, groupements d’achats mais aussi l’agence de développement économique, les acteurs éducatifs, sociaux et culturels. « On veut créer une souveraineté alimentaire liégeoise, pour une alimentation plus saine, plus respectueuse de l’environnement, mais aussi créatrice d’emplois locaux non délocalisables », résume Christian Jonet, coordinateur de l’association Barricade, l’une des chevilles ouvrières de la CATL. « Il y a déjà beaucoup de projets existants et une masse d’acteurs prêts à se mettre en mouvement dans ce sens. On veut mettre en place, ensemble, une stratégie pour que ce qui était hier margi-

nal et éparpillé devienne désormais significatif et relié. C’est aussi le projet d’une alliance ville-campagne : la campagne nourrit la ville, et la ville soutient la campagne par ses choix de consommation, d’épargne et d’investissement. » Pour définir sa stratégie et ses plans d’actions, la CATL se base sur des méthodes participatives d’intelligence collective. Elle a déjà organisé deux journées de travail, réunissant chacune 150 participants. Ils ont défini ce qu’ils voulaient, selon la technique du forum ouvert proposée lors de la journée de lancement, en novembre 2013 : l’animateur a invité les participants à proposer des ateliers de réflexion en lien direct avec la Ceinture alimentterre liégeoise… En tout, 42 ateliers ont été proposés. En vrac : l’accès à la terre, le financement participatif des initiatives, la place des coopératives dans les circuits courts, le rôle de la (grande) distribution, l’ouverture aux agriculteurs conventionnels, le rôle des pouvoirs publics, la gestion de l’offre (entre déficits et excédents), les « paysages comestibles » à vocation pédagogique, la formation des nouveaux producteurs, les

actions de sensibilisation de la population liégeoise. CATL veut surtout aboutir à des projets concrets. De nombreux existent déjà, d’autres émergent ou sont dans les cartons : des cantines scolaires et des restaurants en circuit court ; des coopératives de producteurs (ex: coopérative Point Ferme, projet Les Compagnons de la Terre…) ; une mutualisation des investissements ou des infrastructures pour accompagner les porteurs de projet au sein d’une couveuse d’entreprises (ex : Point Vert, à Strée) ; des outils pour sensibiliser et partager les savoirs… « Il faut trouver ou créer les maillons pour que cette filière se mette en place, pour faire

“système”. On essaie de nouvelles choses, on innove socialement et techniquement, en organisant aussi des convergences avec le monde de la recherche et de l’enseignement, pour débloquer certains nœuds qui font que l’agro-industrie occupe encore toute la place », explique Benoît Noël, du Groupement régional économique des vallées de l’Ourthe et de l’Amblève, autre partenaire du projet. L’objectif est de soutenir ces alternatives, les outiller, les relier, les faire grandir. Pour que d’ici quelques années, David batte Goliath. n Source : Christophe Dubois, CC Journal Symbioses, n° 103, 3ème trimestre 2014, www.symbioses.be

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

/ VII


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page VIII

Dossier Circuits courts & solidarités

Accessibilité Dans la Drôme, un réseau de solidarité locale est en marche Une nouvelle voie dans l’aide alimentaire s’est ouverte dans la Drôme ces derniers mois. Retours sur un projet co-construit par le Civam de la Drôme et le Gesra – Groupement des épiceries sociales et solidaires en Rhône-Alpes.

«

L’idée a émergé à l’automne 2013 avec un administrateur qui nous a confié vouloir faire quelque chose autour de l’aide alimentaire » explique Perrine Tavernier, coordinatrice du Civam 26 (1). Elle entre en contact avec le Gesra, groupement des épiceries sociales et solidaires en Rhône-Alpes. « Il nous paraissait fondamental de s’appuyer sur des structures-relais proches de valeurs d’éducation populaire, promouvant la participation des bénéficiaires, avec un accompagnement social des personnes », souligne Perrine. Le Gesra, association reconnue d’intérêt général, répond favorablement à la sollicitation. « Nous travaillons sur le sujet de l’agriculture depuis longtemps, confirme Véronique Bouché, chargée de développement. Nous cherchions à déterminer la manière de faire entrer les fruits et légumes dans les épiceries, alors même que les publics en précarité ont du mal à en consommer. » Le Gesra et le Civam 26 définissent communément un projet qui permette d’alimenter en légumes locaux et de qualité les

épiceries de la Drôme. Deux maraîchers proposent de mettre à disposition une petite partie de leur terrain. « Il n’était pas question que ce soit un sacrifice pour eux, ni une charge de travail trop lourde », tient à préciser Perrine Tavernier. C’est sur la base des besoins déterminés par les épiceries et en prenant en compte les contraintes de production des agriculteurs, que sont mis en culture des pommes de terre, carottes, choux et courges. En retour, dans une logique de sensibilisation, les épiceries mettent en place des ateliers participatifs et collectifs ouverts à tous. « Les bénéficiaires viennent sur la ferme et participent à des temps intéressants d’une heure et demie environ, comme les temps de semis ou de récolte en commun », illustre Véronique Bouché. «Ce sont vraiment des activités pédagogiques, des moments de rencontres avec l’agriculteur qui trouve là une rétribution en termes de sens et d’échanges, précise Perrine Tavernier. Il n’y a aucune obligation, c’est basé sur le volontariat. » Si le bilan est en cours, Perrine Tavernier avance que plus de deux tonnes de pommes

de terres auraient été produites, 800 kg de carottes et environ une tonne de courges, avec l’appui de trois maraîchers en bio (2). Ces produits finaux sont récupérés chez l’agriculteur par les épiceries qui les revendent à 10 % environ du prix moyen du marché. « L’argent issu de la vente devrait permettre aux épiceries d’autofinancer leurs semences pour l’année prochaine, se réjouit Perrine Tavernier. On se dirige vers un projet autonome, notamment vis-à-vis de la région Rhône-Alpes qui avait financé pour la première année du projet les semences, plants, engrais verts et petit matériel. » Si la démarche pourrait à terme essaimer sur d’autres départements, sa force tient en la mise en place d’un véritable réseau de solidarité locale, riche de convivialité, de plaisir et d’accessibilité. n Sophie Chapelle (1) Centre d’Initiative pour Valoriser l’Agriculture et le Milieu rural de la Drôme. (2) L’agriculture biologique n’était pas un critère pour ce projet, mais en l’occurrence, seuls des maraîchers bio se sont portés volontaires.

Solidarités Installation en maraîchage : « Le soutien de l’amap a été déterminant » Comment garantir que les paysans, notamment les petits maraîchers, puissent vivre avec des revenus décents ? Une question difficile à laquelle a bien voulu répondre Morgan Ody.

E

Morgan Ody, à droite, aux côtés d'amapiens, en avril dernier.

VIII \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

lle s’est installée en maraîchage sur un hectare il y a maintenant deux ans, dans la commune de Brech (Morbihan). Morgan Ody livre une amap (1) qui comprend une cinquantaine de familles, ainsi qu’un marché sur la commune. « L’amap s’est montée autour de mon projet en 2009 et m’a accompagnée dans l’installation », confie-t-elle. L’accompagnement se traduit sous formes diverses : chantier de plantation de haies, organisation de réunions pour déterminer la manière dont seront fixés les prix, sensibilisation pour recruter d’autres amapiens… Et ça marche ! De trente paniers en …/…


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page IX

Dossier …/… 2012, Morgan est passée en 2014 à 45 paniers. « Avoir un salaire versé sur toute l’année est très sécurisant. L’amap me permet également de gagner énormément en termes de temps de travail », souligne Morgan. Qui fait le choix de compléter sa distribution sur un marché « pour plus de sécurité ». Morgan dégage en moyenne un revenu net d’environ 500 euros par mois. « Ce n’est pas le Graal et j’en suis bien consciente », appuiet-elle. Mais le rapport entre-temps de travail et revenu en maraîchage se révèle pour le moins « compliqué ». « L’amap devrait permettre d’atteindre le Smic mais il faut

voir le nombre de paniers que cela implique, observe Morgan. Soit on augmente le prix du panier avec le risque que cela soit trop cher : on ne va tout de même pas vendre des carottes à 5 euros le kilo ! Soit on augmente le nombre de paniers livrés, et je suis la première à ne pas vouloir fournir 80 familles: cela représente un temps et une charge de travail que je n’ai pas envie d’avoir. » Morgan a donc décidé de miser sur la mutualisation et le troc. « Avec deux autres maraîchers, nous réalisons des chantiers chaque lundi. On se file des coups de main et on s’échange aussi nos surplus: si quelqu’un

n’a pas de salade par exemple, on s’entraide. » Une majorité de ses clients sont sur la commune de Brech, ce qui entraîne également un bel élan de solidarité. « L’année précédant mon installation, nous avons monté un groupement foncier agricole (GFA) dans lequel on retrouve beaucoup d’amapiens ». Le GFA a permis d’acheter 19 hectares et un bâtiment agricole permettant l’installation d’une chevrière. Pour Morgan, c’est certain : « le réseau des amaps est efficace et essentiel ». n Sophie Chapelle (1) Association de maintien pour l’agriculture paysanne

Le local solidaire Le lien entre producteurs et consommateurs d’une même région prend naturellement bien des formes. Ainsi les journées de solidarité organisées par le réseau des amaps du Pays Basque en juillet (1). Le 4 juillet, de violentes intempéries ont provoqué des dégâts considérables. La solidarité s’est rapidement mise en œuvre, comme ici, à Halsou, chez Maritxu Irumé et Eric Amestoy, maraîchers et producteurs de piments. Voisins et « amapiens » étaient nombreux les 11 et 14 juillet pour redresser les parcelles de piment endommagées. (1) Réseau des associations pour le maintien de l’agriculture paysanne au Pays Basque : www.inter-amap-pays-basque.org

Outils partagés Coopérer en maraîchage diversifié À Sarzeau, dans le Morbihan, des maraîchers ont mis en place une coopération sur la production et la vente.

J

ulien Hamon s’installe en 2007 avec son collègue sur 18 hectares en location. La ferme est composée de trois ateliers : maraîchage, boulange et poules pondeuses. En 2008, les paysans rejoignent une organisation collective de maraîchers existant depuis les années quatre-vingtdix. À leur arrivée, cela fait trois fermes, distantes de 20 à 25 kilomètres. Cette organisation fonctionne quatre ans et fournit

quatre stands de marché à la semaine et deux amaps. La gamme de cent légumes est divisée entre les fermes. Le pain et les œufs sont aussi mutualisés pour une partie de la vente. Des outils sont partagés. « L’entrée dans cette organisation nous a permis de monter assez vite dans notre chiffre d’affaires, dès notre installation », explique Julien. « La rotation des légumes entre les fermes est également un plus agronomique. Cela nous permet aussi de nous concentrer sur notre production. » Malgré ces atouts, les trois fermes mettront fin à leur collaboration: « L’éloignement était un problème au niveau logistique et il était dif-

Exemple de rotation

Ferme A

Ferme B

Produits une année sur deux sur chaque ferme : les produits en vis-à-vis sont les produits considérés comme équivalent.

• Salades • Tomates classiques • Pommes de terre nouvelles • Haricots verts • Choux • Ail/Oignons/Échalotes • Musquet et Butternut • Céleris • Carotte de conservation • Panais/Rutabaga • Mâche

• Radis • Tomates cerises et anciennes • Poivrons, Aubergines • Pomme de terre • Petits pois • Poireaux • Potimarron et Courges • Betterave • Carotte primeurs • Maïs doux • Côte de Bette

Produits qui restent sur la • Artichauts, rhubarbe, pains et • Courgette et fraises même ferme pour équilibrer œufs les chiffres d’affaires.

ficile à trois de répartir équitablement les chiffres d’affaires réalisés », commente Julien. Persuadés de l’intérêt de la démarche, les maraîchers de Sarzeau rebondissent sur une coopération naissante avec de jeunes installés de leur commune. « Des collègues se sont installés en 2010 en même temps que s’est créé un marché alimentaire sur la commune. Plutôt que de devenir concurrents, nous avons commencé à travailler ensemble sur le même principe que le collectif dont nous faisions partie. » Depuis mars 2014, les deux fermes partagent la gamme de légumes et vendent ensemble sur un marché et une amap. La répartition est basée sur des équivalences en terme de chiffre d’affaires et de familles de produits. Une année sur deux, la gamme de légumes change de ferme. « Cette nouvelle association est plus à taille humaine et plus locale, et nous passons beaucoup moins de temps à la commercialisation », commente Julien. L’initiative est révélatrice d’un souhait grandissant des maraîchers bio de trouver un équilibre entre passion du métier et bien-être au travail. De multiples exemples existent en France. La Fnab publie un recueil d’expériences de mutualisation téléchargeable sur : www.fnab.org. n Danielle Broekarts, Groupement des agriculteurs biologiques 44

Campagnessolidaires solidaires• •N° N°301 301décembre décembre 2014 2014 / IX Campagnes


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page X

Dossier Viabilité et pérennité des circuits courts : quels enjeux, quels soutiens ?

Pérenniser les circuits courts « alternatifs » dans un contexte concurrentiel La demande sociétale pour consommer « autrement », au début des années 2000, a entraîné un renouveau des circuits courts. Dans le sillage des amaps, une multitude d’associations, de coopératives et d’entreprises ont vu le jour.

L

es institutions et collectivités ont intégré le mouvement des circuits courts, notamment dans le cadre de la restauration collective (1). Puis les grandes enseignes ont commencé à s’intéresser à l’affichage de produits locaux dans leurs étals, et aux bénéfices afférents en termes d’image. Pour « capter des cibles qui délaissent les hypermarchés, la plupart des enseignes ont repensé leurs magasins, changé leurs noms et leurs assortiments » (2). Aujourd’hui, les « produits locaux » ne sont plus un marché de niche (3). Dans ce contexte, se pose la question de la pérennité des initiatives pionnières, construites sur des finalités principalement éthiques ou politiques, et non pas pour « gagner des parts de marché ». Car sur un plan purement économique, elles ont des fragilités : d’une part, elles n’ont pas la capacité financière de leurs nouveaux concurrents ; d’autre part, elles ne sont pas forcément outillées pour répondre à la volatilité des consommateurs qui peuvent être séduits par d’autres

offres jugées plus pratiques, plus complètes. Sur le court terme, les circuits courts alternatifs les plus fragiles doivent bien sûr asseoir leur modèle économique, en travaillant sur la communication, les prix, les marges, la logistique ou les modes de décision (4). Sur le plus long terme, ils peuvent aussi jouer sur la crédibilité de leur démarche et la richesse de leurs liens sociaux. Tout d’abord, en améliorant cette démarche commerciale et en l’expliquant mieux. D’un côté pour marquer leur différence sur les valeurs portées, et d’un autre pour répondre aux demandes des consommateurs qui sont compatibles avec ces valeurs. Par exemple, en ajoutant des agrumes en hiver (5), ou en partant d’emblée sur des gammes complètes, y compris non alimentaires (6). Ensuite, les circuits courts alternatifs pourraient gagner beaucoup à coopérer davantage, à l’échelle de leur territoire. C’est pourquoi sur Lyon, par exemple, une vingtaine de structures se rappro-

chent pour créer un partenariat (7), qui permettrait à ses membres de mutualiser des activités tout en conservant leur identité : formation des salariés, organisation d’événements de promotion, logistique, etc. L’impulsion de ce type de dynamique nécessite un soutien de la collectivité. Mais l’enjeu est important, car en reliant vraiment notre agriculture et notre alimentation, les circuits courts « alternatifs » les bousculent dans le bon sens. n François Monat, Ardear Rhône-Alpes (1) Exemple du Plan Barnier en 2009. (2) Stratégies Magazine n° 1542. (3) 40 % des consommateurs achètent « souvent » des produits locaux, et 70 % le font davantage depuis 2 ans. Ils le font pour 25 % dans les GMS soit autant qu’en vente directe (enquête Ipsos, février 2014). (4) C’est ce que proposait en 2014 un diagnostic conduit par Gilles Chabanet pour des organisations lyonnaises. (5) Exemple De la ferme au quartier à Saint-Etienne (www.delafermeauquartier.org). (6) Exemple de la Super Halle d’Oullins (Rhône), SCIC associant un magasin de producteurs, une épicerie bio et un traiteur (www.lasuperhalle.fr). (7) De type « Pôle territorial de coopération économique » – voir www.lelabo-ess.org.

Des abattoirs innovants au plus près des fermes Comment répondre aux attaques de tous bords – parfois violentes – contre la consommation des produits animaux qui mettent en péril l’élevage de nos régions ?

nature des sols, du climat…). Le lien du sol à l’animal étant posé, une réflexion s’ouvre sur l’existence et le devenir de celui-ci.

N

Nos vaches, nos moutons, nos cochons, sans oublier poulets et autres volatiles, élevés en liberté, sont bien les preuves vivantes de ce « bonheur » animal ! Pour autant, toute vie ayant une fin, et une des composantes de l’activité agricole étant aussi économique, les animaux de nos élevages sont destinés à finir dans les assiettes des consommateurs. Il faut ainsi passer par une phase critique qui est la mise à mort de

ous qui élevons nos animaux avec amour et attention, avons toujours défendu un modèle de production qui protège l’animal et permet à un territoire de vivre. L’occupation, l’ouverture et l’entretien des espaces forment un socle fondamental de l’élevage. Sans élevage, il n’y a plus de territoires accessibles, principalement dans les zones dites défavorisées (à cause du relief, de la X

« Il n’est pas de bonne viande sans vache heureuse »

\ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

l’animal. Or, celle-ci doit être pratiquée dans le respect et la dignité dus à un être vivant. C’est pourquoi, en collaboration avec l’Inra et en concertation avec d’autres partenaires, la Confédération paysanne souhaite proposer aux éleveurs – à travers un projet de recherche et développement en train de se mettre en place – des outils d’abattage qui permettraient de tuer l’animal au plus près de son lieu de vie et dans des conditions acceptables par tous. Ces outils, qualifiés « de proximité », adaptés aux particularités des territoires et aux espèces concernées, éviteraient beaucoup de souffrances autour de la mort de l’animal. Souffrance pour l’animal dûe au transport sur de plus

ou moins longues distances, au déracinement, à l’attente et la promiscuité avec d’autres espèces sur les lieux d’abattage – tout cela créant un stress pouvant impacter la qualité des viandes. Mais aussi souffrance morale de l’éleveur qui, au plus proche de son animal, intériorise la souffrance endurée par celui-ci. Un projet innovant donc pour relocaliser, c’est-à-dire rapprocher des élevages des unités d’abattage adaptées, garantissant aux consommateurs qualités sanitaire et organoleptique des viandes. Et enfin, permettant aux éleveurs d’accompagner leurs animaux jusqu’au « noir passage ». n Yves Pierre Malbec, éleveur de mérinos dans le Lot


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page XI

Dossier

Champagne-Ardenne Des élus mobilisés en faveur de la relocalisation de l’agriculture Patricia Andriot, élue écologiste, est en charge de l’économie sociale et solidaire au conseil régional de Champagne-Ardenne. Elle précise la politique mise en œuvre par la région pour encourager les circuits courts. modèle agricole à une déconnexion entre économie réelle et spéculative. Rapprocher la production du consommateur, c’est remettre la main sur l’économie réelle, et créer les conditions pour que la valeur ajoutée reste sur les territoires. Les enjeux sont aussi écologiques face à un modèle polluant, émetteur de gaz à effet de serre, coûteux en termes de liens sociaux et de vie dans les campagnes. Nous sommes sur une agriculture de grande exportation en Champagne-Ardenne, et plutôt en retard par rapport aux défis climatiques.

Vous soutenez avec l’élu socialiste Roland Daverdon, délégué à l’agriculture, la tenue d’un colloque en mai 2015 sur la place des produits fermiers dans les politiques agricoles et alimentaires. En quoi la promotion des circuits courts est-elle un enjeu clé ? C’est un enjeu de transition économique global. Nous sommes confrontés dans le

De quelles manières la région soutientelle les circuits courts ? Les circuits courts sont un écosystème qui nécessite une approche globale, de l’amont à l’aval. Nous essayons de soutenir la demande en finançant les lycées qui favorisent la consommation de produits bio et locaux dans leurs cantines, mais aussi la formation aux intendants et cuisiniers afin d’encourager les changements de pratiques. Nous soutenons aussi l’offre en travaillant sur l’organisation des producteurs avec la mise en place de la SCIC Manger bio en Champagne-Ardenne. Enfin, nous travaillons les systèmes de production en amont : mise

en place d’un répertoire des métiers et savoir-faire, financement d’un GIEE (1), labellisation par des systèmes de garantie participatif, en vue que l’agriculture se relocalise. Vous êtes vous penchés sur la question des systèmes alimentaires territorialisés ? C’est discuté dans le budget 2015. Nous demandons des diagnostics territoriaux qui permettront d’estimer ce qui est consommé et produit sur le territoire. À partir de là, les territoires pourront proposer des actions afin d’accroître les circuits courts locaux. Quels sont les écueils principaux à cette relocalisation ? Il y a un risque de conforter le système par des actions qui ne seraient que des effets vitrine, permettant juste de se donner bonne conscience tout en maintenant des politiques agricoles qui soutiennent l’agriculture industrielle. Le plus difficile, c’est la volonté politique, la formation, la rencontre entre acteurs qui ont des intérêts différents… L’enjeu est bien de changer les mentalités. n Recueillis par Sophie Chapelle (1) Groupement d’intérêt économique et environnemental.

Italie Bientôt une loi sur l’agriculture paysanne ?

P

lus de 1,5 million de fermes couvrent l’Italie, dont 80 % sont des micro et petites entreprises. C’est sur elles que se fondent un patrimoine d’une grande richesse et la biodiversité de la production agricole italienne. En 2009, un groupe d’associations a lancé une campagne populaire pour soutenir ce modèle d’agriculture, avec des règles distinctes de celles conçues pour l’agriculture industrielle. 24 associations ont aujourd’hui rejoint notre campagne, dont ARI (Associazione rurale italiana) et AIAB (1), toutes deux membres de la Coordination européenne Via campesina. Outre la reconnaissance de la spécificité de l’agriculture paysanne, nous demandons des règles appropriées pour l’accès à la terre, les

semences paysannes, l’agroécologie, la transformation des produits, le marché local, les démarches administratives et fiscales, et les aides publiques. En 2010, nous avons rédigé un texte qui transforme en proposition de loi le contenu

de la pétition. Trois ans plus tard, nous avons abouti à l’élaboration de nouvelles « Lignes directrices pour une loi sur l’agriculture paysanne » que nous avons présentées au Parlement le 10 octobre 2013 (cf. photo). Notre proposition a même été discutée cette année au sein du comité italien de l’Année internationale de l’agriculture familiale et paysanne. Trois textes de lois ont été préparés par des parlementaires et seront débattus dans les prochains mois. Nous ne manquerons pas de suivre ces travaux afin que soit approuvée une loi cohérente avec nos propositions. n Roberto Schellino, ARI (1) AIAB est une grande organisation de producteurs biologiques en Italie.

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

/ XI


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page XII

Dossier

Produits fermiers Du développement enchanté à la vigilance Produits fermiers, vente directe, circuits courts… Mais aussi : produits de ma ferme, marché paysan, produits du terroir… Le vocabulaire ne manque pas pour désigner des productions appelées à répondre à une demande sociétale forte pour des produits de qualité et de proximité, mais qui cache en réalité de sérieuses disparités.

Q

uoi de commun entre les fromages fermiers issus de la production laitière de mes 80 brebis, et la crème « fermière » vendue dans les grandes et moyennes surfaces et sur les marchés de la région par un agri-manager de la plaine de Caen, dont les 400 vaches ne pourront jamais assouvir leur besoin naturel du pâturage ? L’abandon en 2005 du projet de décret fermier initialement prévu dans la loi d’orientation agricole de 1999, a confirmé le vide juridique autour des mentions valorisantes que sont « produit fermier » ou « produit de ma ferme », participant par là-même à leur récupération par l’agriculture non paysanne, par les chambres d’agriculture, la Fnsea et l’industrie agro-alimentaire. Aussi, chacun comprendra l’importance du présent dossier de Campagnes solidaires : la Conf’, ce n’est pas que ça, mais les produits fermiers et la vente directe sont indissociables de son projet d’agriculture paysanne. Face au syndicat majoritaire qui, via son réseau « Bienvenue à la ferme » et un cahier des charges souple, entend bien se passer de tout autre label, face également à certains conseils régionaux qui veulent développer leur propre marque (« Sud de France », « Sud-Ouest »), sans trop de contraintes là aussi, la Confédération paysanne doit être impliquée sur tous les fronts, afin d’obtenir une définition (législation) des produits fermiers, qu’elle soit nationale (loi d’avenir agricole) ou européenne (règlement qualité). L’enjeu de cette mobilisation revêt d’autant plus d’importance que de nombreux jeunes, notamment non issus du milieu agricole, confrontés aux difficultés de l’accès au foncier, développent des projets de valorisation de leur production par la transformation et la commercialisation la plus directe possible. Notre rôle, essentiel, est de préserver ces « vrais » producteurs fermiers, créateurs de lien social, pratiquant le plus souvent une agriculture biologique et paysanne sur de

petites fermes, parfois collectivement, des appétits sans fin de ceux qui, non contents de cumuler le foncier, les droits à produire et les primes Pac, se verraient bien aujourd’hui profiter de la plus-value fermière. Mais les chantiers ne s’arrêtent pas là : outre cette indispensable reconnaissance, il nous faut aussi obtenir une adaptation des normes d’hygiène pour les fermes et ateliers fermiers impliqués dans les circuits courts. Nous devons également poursuivre nos réflexions sur le maintien et la réimplanta-

tion d’abattoirs de proximité, ainsi que sur la création d’abattoirs mobiles ou à la ferme, outils indispensables au développement de la vente directe et des circuits courts. Enfin, la Confédération paysanne doit obtenir la création d’un véritable office fermier transversal à l’ensemble des filières, dont le rôle serait de proposer des politiques adaptées et spécifiques à la production fermière. n Patrick Hamelin, paysan dans le Calvados

Commission Relocalisation : défendre les producteurs fermiers Le travail de la commission Relocalisation a été relancé à l’occasion des rencontres européennes SEADS (Espagne-Autriche-France) sur les circuits courts en 2011 et 2012. Cette commission, qui rassemble des Confédérations paysannes départementales et des associations, a pour objectif premier la défense des producteurs fermiers. Aujourd’hui, plusieurs travaux sont en cours : la reconnaissance de la production fermière dans les instances politiques, la mise en œuvre d’une réglementation adaptée par les services vétérinaires et des fraudes dans tous les départements et le développement de politiques territoriales favorables à une relocalisation des productions alimentaires. En 2013, nous avons coordonné 4 réunions inter-régionales sur les alternatives à l’abattage industriel. Le résultat est la base du livre coordonné par Jocelyne Porcher, directrice de recherche à l’Inra de Montpellier, « Livre Blanc pour une mort digne des animaux » (cf. p. 17). Ce travail de réflexion est en train de prendre corps sur les territoires au travers d’un projet « partenariat innovation » intitulé : « Abattoirs de proximité et respect de l’animal. Reconquérir les territoires et les esprits ». Ce projet sera conduit par la Fadear (1) et rassemblera l’ensemble des acteurs économiques des filières viandes – éleveurs, gestionnaires d’abattoirs, bouchers, consommateurs. Enfin, le prochain temps fort de la commission est l’organisation d’un colloque européen dans le cadre de la campagne « Envie de paysans ! » Cet événement aura lieu les 4 et 5 mars 2015 en Haute-Marne. Il sera l’occasion de débattre et de proposer à une échelle européenne des outils nécessaires au développement des produits fermiers sur les territoires, ainsi que des fermes les produisant. Nous souhaitons qu’à l’issue du colloque, les participants rentrent avec des pistes d’actions permettant de développer et de pérenniser les productions fermières sur leur territoire. Jean-Jacques Bailly, paysan en Haute-Marne

NB : toute nouvelle personne est la bienvenue dans la commission Relocalisation. Contact : jjmbailly@free.fr (1) Fédération associative pour le développement de l’emploi agricole et rural.

XII \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 11

Points de vue

Des nanos pour le Tafta ? Dès les premiers mois de 2015, l’utilisation des nanomatériaux dans notre alimentation pourrait être facilitée. Europe et États-Unis poussent en ce sens, de part et d’autre de l’Atlantique. Coïncidence ? Par José Bové, eurodéputé.

L

e 28 mars 2011, le Parlement européen votait massivement contre la réglementation sur les nouveaux aliments qui devait permettre l’introduction sur le territoire de l’Union européenne de la viande clonée et des nanotechnologies. Trois ans de travail des lobbies de l’agroalimentaire balayés par un vote. Les grandes multinationales ont décidé de se retrousser les manches et de repartir à l’attaque. La Commission européenne s’est remise au travail. Suivant le vieux principe du « diviser pour mieux régner », elle a décidé de séparer le dossier du clonage, considéré comme hypersensible, de celui des nanotechnologies. Fin décembre 2013, elle a rendu public sa nouvelle proposition de « Règlement relatif aux nouveaux aliments ». L’ambition est d’aboutir à la mise en place d’une réglementation européenne avant la fin de l’année 2015 permettant l’utilisation des nanotechnologies dans l’alimentation. Cela pourrait aller très vite : dès février, le Parlement pourrait avoir à voter en plénière le Règlement proposé par la Commission. Les lobbies de la planète se retrouvent à la manœuvre. L’Ilsi, qui regroupe les 400 plus grandes entreprises de l’agro-industrie, a créé un groupe de travail qui sur sa page d’accueil a bien du mal à cacher son enthousiasme : « Il y a un potentiel énorme pour les nanotechnologies pour créer de nouveaux matériaux et de nouveaux composés dans de nombreux domaines. » Le 7 octobre dernier, Marta Baffigo, employée par Cargill, parlait au Parlement européen au nom de Food and Drink Europe, lobby de l’agro-alimentaire européen. Ces exigences étaient simples : accélérer le processus d’autorisation des nanotechnologies, le simplifier et le raccourcir, afin de permettre un meilleur retour sur investissement. Le 6 avril 2011, soit une semaine après le rejet du texte par le Parlement, l’Efsa, l’agence de sécurité sanitaire de l’Union européenne, reconnaissait ne pas disposer des moyens scientifiques et humains pour évaluer la toxicité des nanotechnologies. La réponse de la Commission a été des plus simples : on s’en passera. L’Efsa ne pourra pas réaliser d’études toxicologiques et devra

se contenter, comme elle le fait depuis sa création, d’utiliser les données fournies par l’entreprise demandant l’agrément de son produit. Par ailleurs, elle sera tenue de ne pas divulguer ces résultats. L’opacité sera donc totale. Arrivé à ce stade, une question se pose : mais à quoi servent les nanotechnologies dans notre assiette? Un exemple: certaines entreprises versent du dioxyde de titane dans le lait pour que le blanc des yaourts soit plus blanc et, selon un rapport récent des Amis de la Terre États-Unis, plus de 80 produits alimentaires contiennent déjà Invisibles à l’œil nu, les nanomatériaux laissent parfois leur présence par les accroches publicitaires, tels ces aliments des nanomatériaux. On deviner aux « saveurs inédites »… Philosophe et journaliste d’investigation, voit là la même auteur d’enquêtes s’intéressant tout particulièrement à la santé, à l’enmanœuvre que pour les vironnement et au lobbying industriel, Roger Lenglet s’est penché sur le OGM ou autres poules sujet. Éditions Actes Sud, mars 2014, 240 pages, 22 euros aux œufs d’or : beaucoup de profits en vue, aucun scrupule à pas- conduite non contraignants à l’usage des ser outre le temps nécessaire pour étudier entreprises. l’impact de ses nouveaux produits, pourDe là à voir dans ces efforts de part et tant si peu indispensables. Dans ces condi- d’autre de l’Atlantique une action concertions, peu étonnant que la Food and Drug tée pour faciliter la signature de l’Accord Administration, l’équivalent de l’Efsa aux de libre-échange Tafta, il n’y a qu’un pas. USA, ait sorti en juin 2014 des codes de Que je franchis allègrement. n

Extension du domaine des nanos Les nanomatériaux sont vraiment tout petits : moins d’un nanomètre de diamètre, soit un millionième de millimètre. Si petits qu’ils peuvent traverser les parois de nos cellules. Petits, mais partout. En agriculture, on peut les retrouver dans l’encapsulage d’engrais, permettant de ne libérer les matières actives qu’au-delà d’une certaine température. Ou dans des pesticides afin de ne déclencher la matière active qu’à partir d’un certain degré d’humidité. Les firmes sont pleines d’espoirs dans leurs travaux sur les emballages alimentaires qui, en tirant sur une languette, réchaufferaient ce qu’ils contiennent, ou sur des produits qui, vaporisés, permettraient de ralentir le flétrissement des fruits sur les étalages des grandes surfaces… Si la molécule de dioxyde de titane est déjà dans notre alimentation, c’est parce qu’elle est considérée comme un colorant, le E171. Elle a un rôle très utile à notre société : elle rend les bonbons plus brillants et permet à certains chewing-gums de blanchir les dents… Peu d’études ont été menées sur le sujet, et encore moins d’études indépendantes. Cependant, quelques scientifiques alertent l’opinion estimant qu’il ne faut surtout pas aller trop vite avec les nanomatériaux et prendre tout le temps nécessaire pour faire les études indispensables. Mais le temps, pour les firmes, c’est de l’argent. Un site pour en savoir plus : http://veillenanos.fr Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014 / 11


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 12

Agriculture paysanne

Vendée Une installation individuelle, mais pas sans les autres ! Isabelle Boucard s’est installée au printemps 2013 comme productrice de viande bovine en vente directe, à Treize-Septiers, en Vendée. Son installation a été facilitée par une transmission progressive et un réseau local dynamique.

I

ssue du milieu agricole, Isabelle s’est tout d’abord orientée vers des études de communication et vers l’animation pédagogique avec des enfants. Mais l’envie de se rapprocher de la nature et de donner plus de sens à son travail est plus forte, et elle entame en 2007 un BPREA « Polyculture-élevage biologique » près de Rennes. La réalisation du diplôme en alternance lui permet d’être embauchée par le groupement d’employeurs pour l’insertion et la qualification (GEIQ) « Entraide rurale » et d’être ainsi salariée dans plusieurs fermes en temps partagé. La formule lui permet de multiplier les expériences professionnelles afin de peaufiner son propre projet d’installation. Le choix d’une installation en viande bovine s’impose rapidement. Au-delà de l’aspect non négligeable de la souplesse du travail qui lui permet de le concilier avec sa vie de famille, Isabelle voit dans cette production la possibilité de mettre plus facilement en place un système herbager économe et respectueux de l’environnement.

Anticiper les changements Après quelques mois de voyage, elle s’inscrit au répertoire départ-installation en Loire-Atlantique. Une extension de recherche vers les départements voisins lui permet de trouver la ferme qui correspond à ses attentes. « Celle de Jean-Michel Champain était idéalement située, explique-t-elle, dans un village dynamique, avec plusieurs paysans et un magasin de producteurs à quelques mètres de la ferme. Pour quelqu’un dont la vente directe était au cœur du projet, c’était parfait ! » Le stage de parrainage débute en juillet 2012. Dès cette époque, des changements importants sont entamés : changement de race, développement de la vente directe… « Jean-Michel s’est renseigné sur la viabilité et la cohérence de mon projet, le fait de changer de race, de s’orienter vers la vente directe alors qu’il était en circuit long, de passer en bio… Il avait une réelle

Isabelle Boucard sur la ferme où elle s’est installée en avril 2013.

envie de transmettre et que le projet perdure. Une fois cette étape passée, il a respecté mes choix, m’a accompagnée de son mieux dans la transmission de son outil de travail, en acceptant de le voir progressivement se transformer. » Isabelle s’installe le 1er avril 2013. Elle rachète le cheptel bovin, les bâtiments et le matériel. Aujourd’hui, la majorité des terres sont en prairies. Elles permettent à la nouvelle paysanne, avec les dix hectares de mélange céréalier qu’elle produit, d’avoir une autonomie fourragère, de la naissance à l’engraissement. Le magasin de producteurs de la Gourinière, créé en 2007, est issu de la longue tradition de vente directe dans le village. « Nous accueillons environ 170 clients par semaine et quand on vous parle de relocalisation de l’économie, ici ce ne sont pas des paroles en l’air : 90 % de nos clients habitent à moins de cinq kilomètres ! » Les quatre fermes du village y vendent leurs produits: volailles de plein air, porc, légumes et viande bovine. 20 à 25 autres paysans des environs livrent le magasin, le tout complété par un rayon d’épicerie. Ce qui permet aux clients de trouver de tout, du moins tout ce qui se mange ! Il est ouvert quatre demijournées par semaine, géré en coresponsabilité par les quatre fermes de Treize-Septiers. Le magasin a permis à Isabelle de développer très rapidement l’aspect vente directe de son projet, en commercialisant dès la première année la moitié de ses animaux. Aujourd’hui, il représente environ deux tiers de ses ventes, complétées par le « Comptoir du Champ », à Montbert (Loire-

12 \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

Atlantique) (1) et par trois amaps de l’agglomération nantaise (2). « Les échanges de créneaux horaires pour le magasin, les chantiers moissons en commun ou les coups de main ponctuels sont de mise au village, comme dans beaucoup d’autres où l’on a encore la chance d’avoir des voisins qui font le même métier que soi. Mais de manière plus formelle, il est important d’intégrer des organisations professionnelles telles que les Cuma, les Civam ou les syndicats, pour rencontrer ses pairs, échanger sur ses pratiques, bénéficier d’une veille politique… » : Isabelle a beau être paysanne à titre individuel, son travail et son projet s’inscrivent bel et bien dans une dynamique collective. n Lili Robert, animatrice de la Confédération paysanne de Vendée (1) www.comptoirduchamp.com (2) Nantes est à une cinquantaine de kilomètres de TreizeSeptiers.

Quelques chiffres n SAU : 57 hectares. n Productions végétales :

• 47 hectares de prairies ; • 10 hectares de mélange céréalier (blé, pois, féverole, triticale). n Productions animales : • troupeau de Limousines ; • 40 vaches allaitantes ; • 10 bœufs et 25 à 30 veaux par an. n Un emploi. n Aides a l’installation : • DJA : 12 500 euros ; • prêts bonifiés MTS/JA : 250 000 euros ; • aide à la conversion bio : 6 000 euros.


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 13

Agriculture paysanne

Rhône C’était viable ! Gilles et Annie Sauzion sont paysans au Sud de Lyon, céréaliers-meuniers-boulangers. Une affaire qui tourne bien avec l’emploi d’un boulanger salarié, malgré les avis officiels négatifs à leur installation, il y a quinze ans.

«

Votre projet n’est pas viable. » Voilà ce qu’entendent Gilles et Annie Sauzion à la chambre d’agriculture, lors de leur installation en 1999. Il faut dire qu’alors, ils projettent seulement de reprendre les 25 hectares du père de Gilles, en céréales, vaches allaitantes, pommes de terre et foin. Avant 1999, Gilles et Annie n’étaient pas dans l’agriculture. Gilles avait certes passé un brevet technique agricole et, depuis tout petit, il donnait des coups de main sur l’exploitation familiale pour les foins ou la paille, mais il travaillait dans le tourisme et Annie faisait des petits boulots (recensement agricole…). « Je commençais à m’ennuyer dans le tourisme. Quand mon père a pris sa retraite, ça a été un déclic. On s’est lancé ! » raconte Gilles. Et Annie de préciser : « Pour nous il n’était pas envisageable de faire une agriculture autre que biologique. » Les Gaec entre époux n’étant pas encore permis, ce sera une exploitation individuelle, avec Annie

comme salariée. Une installation sans les aides. Les Sauzion ne font pas de pain tout de suite. Le foin est vendu en petites bottes à des éleveurs. Les céréales sont vendues à la coopérative et à des éleveurs bio du coin. Pour faire de la valeur ajoutée, ils produisent de la fleur sèche coupée, à la mode à l’époque, avec vente en gros. En 2002, le point de vente collectif Uniferme, près de chez eux, cherche un paysan-boulanger. « C’est ce qui nous a permis de nous lancer dans le pain. On a pu investir, dans un four, un fournil, un moulin… Sans ça, on ne se voyait pas faire les marchés. »

Deux nouveaux métiers Les Sauzion découvrent alors deux nouveaux métiers « sur le tas » : la meunerie et la boulangerie. Ils s’équipent d’un bon moulin à pierre (en granit) fabriqué par des paysans boulangers passionnés, dans le Tarn. « L’écrasement du grain est très lent, ce qui fait qu’on peut gar-

Il y a six ans, Gilles et Annie ont embauché Franck (à gauche) comme boulanger, pour une « meilleure qualité de vie ».

Quelques chiffres • 60 hectares en fermage, assez regroupés : 14,5 hectares de prairies et 45,5 hectares de terres. • Moisson par une entreprise, foin vendu sur pied. • 30 tonnes de blé et 7 tonnes de seigle transformées par an, 5 fournées de pain par semaine, du mercredi au dimanche. • Vente locale, dont 91 % au point de vente collectif Uniferme (une permanence/semaine), 4 % de vente de céréales en gros (Coopérative agricole dauphinoise, CAD). • Aides Pac : 13 390 euros, dont 6 691 euros de primes bio, 8 548 euros de DPU (50,78 DPU d’en moyenne 168 euros) – CA : 132 000 euros – Prélèvement privé : 2 000 euros par mois.

der le germe du blé, cela évite la surchauffe », explique Gilles, qui apprécie la « musique » de son moulin tournant toute la journée. Pour le pain, ils se forment chez deux boulangers, un traditionnel du coin et un ami du Sud-Ouest. Ils créent leur propre recette en s’inspirant des deux autres. « La première semaine, on a tâtonné. Le levain ne prenait pas bien » se remémore Annie. Dès lors, l’exploitation se spécialise dans les céréales. Finies les bottes, le foin est vendu sur pied. Aujourd’hui, la ferme rassemble 60 hectares, dont 45 labourables sur lesquels Gilles a instauré une rotation sur trois ou quatre ans: blé, seigle ou triticale, trèfle (sous couvert). Le trèfle est parfois fauché et échangé avec des éleveurs contre du fumier composté. Il est parfois moissonné pour être ressemé. Mais la plupart du temps, il sert d’engrais vert pour le blé qui suivra. « Le blé semé derrière un trèfle est plus beau, il y a moins besoin de désherber » explique Gilles. Avec une moyenne de 38 quintaux à l’hectare, l’agriculteur ne cherche pas tellement le rendement. « Mon objectif, c’est de limiter les intrants et d’avoir assez de seigle et de blé pour fabriquer notre pain. » Gilles est également un adepte de la semence de ferme et fait parfois du triage à façon pour des collègues. « J’ai aujourd’hui mon propre mélange de semences, dont une part en variétés de pays, que j’ai sélectionné et qui s’est bien adapté à mon terroir. » En 2008, après des années passées à se lever très tôt (démarrage du fournil à 3h30), Gilles et Annie ont fêté la fin du remboursement du prêt du fournil en embauchant Franck. Véritable boulanger de métier, celui-ci travaille tous les matins, du mercredi au samedi, et un week-end sur deux. Cela permet aussi à Gilles et Annie de prendre dix jours de vacances l’été, une semaine au printemps, et des grands weekends de temps en temps. Le couple va maintenant réaménager l’espace de stockage de grain, peu pratique avec le passage de la route départementale à proximité immédiate. Et ils commencent à réfléchir doucement à la transmission, après avoir entendu pendant quinze ans que leur projet n’allait pas tenir. Pas viable, comme projet ? Il y a pire. n Samuel Richard, animateur de la Confédération paysanne du Rhône

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014 / 13


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 14

Internationales

Colombie L’impossible commerce équitable Durant trois années passées à travailler avec un groupe de caféiculteurs colombiens, Jules Hermelin, étudiant en anthropologie, a souvent entendu cette phrase : « Le commerce équitable, ça n’existe pas… » Il tente d’en comprendre la signification.

L

a coopérative de producteurs de café biologique Cachimbos est créée en 1996, dans les montagnes pré-andines colombiennes du Cauca, au sud de Cali. Deux organismes, l’agence allemande de développement GTZ et la Fédération nationale des caféiculteurs colombiens (FNCC), en sont à l’origine. Pendant sept ans, le groupe de producteurs reçoit des aides nationales et internationales. En 2003, il devient complètement indépendant financièrement. Au sortir d’une longue crise du marché du café (2000-2004), il profite de son expérience dans l’agriculture bio pour adhérer aux principes du commerce équitable. Si une partie des membres continue de produire du café biologique, tous doivent désormais répondre aux cahiers des charges de la FLO (1).

Le café équitable est payé plus cher… à la coopérative Selon les normes de la FLO, l’acheteur de café équitable doit payer la matière première au-dessus du cours international. Le prixplancher est d’1,60 dollar US par livre. Green Moutain Coffee Roaster, l’unique client

« équitable » (2) de Cachimbos, achète le café en fonction du cours de la bourse de New York, auquel il ajoute systématiquement 0,65 dollar US par livre. Dans le contrat envoyé à la coopérative, il assure que le prix ne descendra pas au-dessous de 2,25 dollars par kilo. Avec cet argent, la coopérative doit couvrir les frais d’exportations (emmagasinage, tri et transport jusqu’au port), ses coûts de fonctionnement généraux et, bien sûr, acheter le café à ses producteurs. Au final, le prix reversé à ces derniers n’est pas si différent du marché courant. La coopérative leur octroie une prime immédiate de 5 000 pesos colombiens (COP) par arroba – unité de mesure équivalente à 12,5 kg – ainsi qu’une prime proportionnelle au total de leurs ventes sur l’année.

Payer la qualité du café, une pratique courante en Colombie Concrètement, un producteur moyen vend entre 30 et 50 arrobas par an à la coopérative. Et pour les paysans du Cauca, 5 000 COP représentent un aller-retour à la ville la plus proche (30 minutes de trajets) et un kilo de viande rouge. On présente souvent le commerce équitable comme le sauveur potentiel des petits paysans pauvres. Mais en Colombie, cela fait plus d’un demi-siècle que les caféicul-

teurs livrant du bon café sont payés au-dessus du prix courant. Dans le village où j’ai passé plusieurs mois, la Fédération nationale des caféiculteurs et les nombreux acheteurs privés payaient eux aussi au-dessus du cours officiel selon les qualités gustatives et environnementales du café. Depuis de longues décennies, la FNCC possède un barème tarifaire en fonction de la qualité que sont venus étoffés les accords avec Rainforest et Nespresso AAA. Quant à eux, les acheteurs privés sont des intermédiaires spécialisés dans la commercialisation de café de haute qualité. Dans ce cas, la majoration peut alors atteindre 30 000 pesos au-dessus du cours officiel.

L’acheteur domine toujours la relation commerciale Quand cette année, Cachimbos a essayé de vendre plus de quatre conteneurs de cinq tonnes de café chacun à Green Moutain Coffee Roaster, elle s’est faite poliment rabrouer. Le torréfacteur étasunien s’approvisionne aussi auprès des autres grandes coopératives de producteurs de la région, pour laquelle il est le seul opérateur en label équitable, position de force s’il en est. Avant d’exporter la totalité de la récolte, la coopérative doit envoyer un échan-

Encore une crise l’an dernier En février 2013, une grève de plusieurs semaines a paralysé les régions caféières de Colombie. Menacés par la baisse du cours du café, couplée à des forts taux d’endettement et des coûts de production élevés, les caféiculteurs se sont fortement mobilisés pour réclamer au gouvernement que les dettes soient annulées et que baisse le prix des intrants industriels. En tant que coopérative, Cachimbos est restée à l’écart. Certes, quelques producteurs ont participé aux manifestations et des membres de la direction se sont impliqués dans les assemblées et les groupes de discussion qui entourèrent et suivirent la mobilisation. Mais la coopérative ne s’est pas impliquée en tant que collectif dans le rapport de force qui opposait les caféiculteurs au gouvernement et aux dirigeants de la Fédération nationale des caféiculteurs colombiens.

En quinze années de présence dans le Cauca, au sud de la Colombie, les coopératives de producteurs continuent d’exporter une matière première à faible ajoutée, restant majoritairement dépendantes du marché international.

14 \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 15

Internationales

tillon représentatif, à partir duquel les techniciens de Green Moutain réalisent une évaluation de la qualité. Si le résultat ne correspond pas au barème établi par le torréfacteur, la commande peut parfaitement être annulée ou le prix d’achat réévalué. Unique acheteur de café équitable de Cachimbos, c’est lui qui rédige les contrats commerciaux, et la coopérative n’a d’autres choix que de se plier à ses conditions. Et au vu de la supériorité du volume de production des autres coopératives, le poids de Cachimbos est très faible au moment de négocier les contrats, sa capacité de négociation vis-à-vis de son acheteur extrêmement réduite.

Cultivateur de café colombien : La grande majorité des caféiculteurs de Cachimbos, même en bio ou équitable, pratique la monoculture du café et ne possède que très peu de cultures vivrières.

Les normes de production : la peur d’être exclu de la niche marchande Un des effets préoccupants des certifications bio et équitables au sein de la coopérative est la rupture qui s’instaure entre les simples membres et les dirigeants. Les caféiculteurs savent qu’en cas de nonconformité de leur ferme lors d’une inspection, ils sont susceptibles d’être sanctionnés ou même exclus. Lorsque les ingénieurs de la coopérative visitent leur exploitation, ils leur disent ce qu’ils veulent entendre et leur montrent ce qu’ils veulent voir. Alors même que les « ingénieurs » sont des paysans formés récemment au contrôle et au suivi des fermes, une scission s’opère. Les producteurs vivent le respect des normes comme l’imposition de mécanismes

de contrôle de leur travail. Ils mentent, détournent la vérité et refusent d’appliquer la traçabilité à la lettre parce qu’ils ne veulent pas risquer l’exclusion.

Une monoculture d’exportation peut-elle être « verte et équitable » ? Il ne faut pas tirer de conclusions générales à partir d’un seul cas particulier, ni fustiger le commerce équitable dans son ensemble sur la seule base de l’expérience de Cachimbos. Cependant, quelques points mériteraient une réflexion au sein du mouvement du commerce équitable. En quinze années de présence dans cette région de la Colombie, les coopératives de producteurs continuent d’exporter une matière première à faible ajoutée, restant

Les torréfacteurs ont pris les rênes de la filière Le café vendu par les caféiculteurs colombiens est un café dit « pergaminé ». Les exportateurs éliminent les impuretés et la fine pellicule qui enveloppe chaque graine. Les torréfacteurs achètent ce café « vert » (parfois après qu’il soit passé entre plusieurs mains), le toastent, le moulent et l’empaquettent. Huit négociants internationaux et cinq torréfacteurs se partagent plus de 50 % du marché mondial. À la bourse de New York, 15 000 ou 20 000 kg fictifs, de « cafés futurs », sont échangés pour un kilo de café qui transite véritablement. La prédation se double aujourd’hui d’instruments et de mécanismes de contrôle du risque-prix que tous les acteurs de la filière mettent en œuvre. Depuis la fin, en 1989, du Pacte des Quotas qui réglait l’offre et la demande internationale, le marché a connu une libéralisation généralisée qui s’est traduite par un accroissement du pouvoir des torréfacteurs.

strictement dépendantes du marché international. Les quelques rares séances ponctuelles de sensibilisation à l’agroécologie ne suffisent pas à stopper l’accélération de la spécialisation agricole enclenchée par la caféiculture colombienne vingt ans auparavant. La grande majorité des caféiculteurs de Cachimbos, même en bio ou équitable, pratique la monoculture du café et ne possède que très peu de cultures vivrières. Les paysans consacrent leur temps et leur énergie au développement de stratégies de maintien au sein du commerce international, au détriment de l’action politique. Là réside peut-être l’enseignement majeur de ce constat amer : « le commerce ne peut pas être équitable ». Tant qu’ils seront dépendants d’un marché d’exportation largement aux mains de géants de l’agroalimentaire, ils ne pourront dégager de marge de manœuvre suffisante pour véritablement discuter de l’organisation de la filière et, donc, de leur production. n Jules Hermelin (1) Fairtrade Label Organisation – Organisation fondée en 1997, regroupant 28 organisations dont Max Havelaar France. (2) « Green Moutain Coffee Roaster répond au cahier des charges de FT USA. En 2011, FT USA s’est séparé de FLO international. Néanmoins, pour les organisations de producteurs, le cahier des charges reste similaire. (site FT USA).

Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014 / 15


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 16

Pas de bonne bouffe sans paysans !

Franche-Comté Envie de sols vivants ! Salle comble le 7 novembre à Valdahon, dans le Doubs, pour la conférence de Claude et Lydia Bourguignon. Agronomes, le couple de chercheurs est toujours passionnant à entendre lorsqu’il parle de la vie et de la biodiversité des sols. La conférence était organisée par la Confédération paysanne du Doubs, dans le cadre de la campagne « Envie de paysans ! »

Pays Basque Lurrama, la « ferme Pays Basque » est paysanne Plus de 20 000 visiteurs du 14 au 16 novembre à Biarritz pour Lurrama, la grande manifestation annuelle de l’agriculture paysanne du Pays Basque qui, cette année, pour sa neuvième édition Accueillait la campagne « Envie de paysans ! » Tous les publics ont convergé vers Lurrama, des scolaires (photos) aux citadins, en passant par les jeunes en formation agricole et les 840 convives du banquet du dimanche. La foule, les animaux, c’est comme au Salon de l’Agriculture à Paris, sauf que ce n’est pas le même type d’agriculture qui s’y présente… L’événement conduit cette année sous le thème « Sauvons l’agriculture paysanne et familiale » avait pour parrain l’agronome Valentin Beauval, paysan confédéré (à la retraite) en Pays-deLoire, et pour invités les paysans des confédérations de Savoie.

#

#

Portugal « Envie de paysans ! » en Europe Le 23 novembre, plus de 1 500 paysans de la CNA (Confederacio national da agricultura), syndicat agricole portugais membre la Coordination européenne Via campesina (ECVC), se sont réunis près de Porto autour de la Pac et de l’agriculture familiale lors d’un séminaire inscrit dans la campagne « Envie de paysans ! » L’objectif de ce séminaire : informer et de clarifier les nouvelles mesures de la politique agricole européenne réformée et leurs implications directes sur l’agriculture familiale. Deux représentantes du comité national de la Confédération paysanne étaient présentes (Marie-Pierre Calmels et Véronique Léon). Deux autres membres d’ECVC qui relaient également la campagne « Envie de paysans ! » dans leur propre pays étaient de la partie : ARI (syndicat agricole italien) et EHNE (syndicat agricole basque), apportant ainsi un témoignage sur les implications directes de cette nouvelle Pac dans différents pays européens.

16 \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

A


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 17

Culture

Pour une mort digne des animaux

P

aru le mois dernier, Le livre blanc pour une mort digne des animaux repose sur les résultats d’une enquête collective menée en 2013 auprès de 66 éleveurs de toute la France, dont des adhérents de la Confédération paysanne. Ils témoignent de leur volonté d’assumer la mort de leurs animaux. Ces éleveurs, souvent en circuits courts, revendiquent le droit « d’accompagner » leurs bêtes, jusqu’au bout. Leur travail ne se limite pas à nourrir, à soigner mais bien à vivre avec elles, chaque jour, de la naissance… à la mort. Pour les auteurs – Jocelyne Porcher (INRA), Élisabeth Lécrivain (INRA), Nathalie Savalois (UMR (1)) et Sébastien Mouret (UMR) –, il y a urgence à défendre l’élevage. Et défendre l’élevage, c’est d’abord défendre des alternatives à l’industrialisation de l’agriculture : « Le processus d’industrialisation de l’élevage opéré à partir du XIXe siècle avec l’objectif de “nourrir le monde” a effectivement permis un accès plus facile à l’ali-

#

mentation dans les pays occidentaux, mais il a participé à détruire l’agriculture paysanne dans de nombreux pays. » Plusieurs rapports d’expertise, dont un de la FAO publié en 2006, accusent l’élevage d’être responsable de l’effet de serre et de l’accélération de la déforestation. Les médias ont abondamment repris ces critiques, en y ajoutant la question de la souffrance animale… sans jamais différencier les productions animales et l’élevage. Dans ce livre, les auteurs parlent d’éleveurs et leur laissent la parole. Les témoignages sont divers mais disent tous la nécessité « de mettre en place des alternatives aux abattoirs industriels » pour que l’élevage paysan perdure et conserve son sens. « Le moment de leur mort, que nous décidons seul, doit être organisé de manière respectable et digne, pour eux et pour nous ». n Olivier Bel, Éleveur dans les Hautes-Alpes (1) Unité mixte de recherche « Innovation et développement dans l’agriculture et l’agroalimentaire ».

Livre blanc pour une mort digne des animaux, ouvrage collectif, préface de la philosophe Élisabeth de Fontenay, Les éditions du Palais, 23 x 21 cm, octobre 2014, 110 pages, disponible en librairie, ou à commander auprès de la Confédération paysanne (18 euros, frais d’envoi inclus) : contact@confederationpaysanne.fr

S’abonner à Campagnes solidaires, c’est participer à l’émergence d’« autres mondes possibles » Ou avec le bulletin d’abonnement à retourner sous enveloppe timbrée avec votre chèque à l’ordre de Campagnes solidaires au 104, rue Robespierre – 93170 BAGNOLET N° 301

Campagnes solidaires Mensuel de la Confédération paysanne

TARIFS : Annuel (11 numéros) : 42 € 6 numéros : 22 € Soutien, collectivité et étranger : 55 € (ou plus)

#

Nom ______________________________ Prénom __________________________________ Adresse _____________________________________________________________________ Code postal _____________Ville _______________________________________________ Profession_________________________Téléphone ________________________________ Courriel : ____________________________________________________________________

Ou avec le mandat de prélèvements sepa ci-dessous à retourner en y joignant un relevé bancaire (RlB) ou postal (RIP) au 104, rue Robespierre – 93170 BAGNOLET

Nom ______________________________Prénom ____________________ Adresse_______________________________________________________ Code postal Ville __________________________________ J’autorise l’établissement teneur de mon compte à effectuer sur ce dernier les prélèvements correspondant à mon abonnement. En cas de litige, je pourrai en faire suspendre l’exécution par simple demande à l’établissement teneur de mon compte.

Nom et adresse de l’établissement teneur du compte à débiter: Établissement/Agence _________________________________________ Adresse_______________________________________________________ Code postal _____________Ville_________________________________

Sauf ordre contraire ce virement est d’une durée illimitée.

Je vous prie de bien vouloir présenter en faveur de Média Pays sur le compte référence ci-dessous les sommes correspondant à mon abonnement:

Fait à......................................

(le 5ème jour du premier mois)

Signature :

le............................................

Tous les quatre mois

r 14 € ou r 18 € Soutien, collectivité et étranger

Annuellement

r 42 € ou r 55 € Soutien, collectivité et étranger

(à la date du renouvellement)

IBAN Association bénéficiaire : Média pays – Numéro national d’émetteur : FR96ZZZ492109

BIC

Ou sur le site de la Confédération paysanne : www.confederationpaysanne.fr Tél. : 01 43 62 82 82 – abocs@confederationpaysanne.fr Les informations contenues dans la présente demande ne seront utilisées que pour les seules nécessités de gestion et pourront donner lieu à l’exercice du droit individuel d’accès aux informations dans les conditions prévues par la délibération N° 80 du 1/4/80 de la CNIL.


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 18

Annonces Les petites annonces sont payantes, sauf celles qui concernent l’emploi, les recherches et propositions d’installation, et toute autre demande à but non lucratif. Tarif : 8,5 € les six lignes + 1,5 € par ligne supplémentaire (30 caractères par ligne). Pour les tarifs publicitaires, contacter : Média Pays – 104, rue Robespierre – 93170 BAGNOLET Tél. : 01 43 62 82 82

Emploi - stages - formation Offres • Finistère - Ferme lait bio cherche stagiaire motivé - 06 87 22 02 61 - Aude - L’Association pour le développement de l’emploi agricole et rural (Adear) recherche un(e) responsable administratif-compta Gestion des taches administratives de l’association et animation de formations compta-gestion - Diplôme de niveau Bac + 2 (BTS, DUT…) minimum type gestion d’entreprise, comptabilité/gestion, une expérience en comptabilité et fiscalité agricole serait un plus - Permis B. Véhicule disponible - CDI - Temps partiel de 24 heures hebdomadaire évoluable vers un temps plein en fonction des financements - Basé à Limoux avec déplacements occasionnels - Salaire brut en fonction de l’expérience (montants définis par la convention collective de la Confédération paysanne de 23500 euros brut/an) - A pourvoir fin janvier 2015, réponse avant le 31 décembre - CV et lettre de motivation à: adear.11@free. fr Demandes • Toutes régions - Étudiant en BPREA maraîchage bio jusqu’en juin 2015, je suis d’ores et déjà à la recherche d’un emploi a compter de cette date, en tant qu’ouvrier agricole ou autre - L’idéal serait d’acquérir une expérience de 3 ans avant de me lancer en tant qu’exploitant agricole (je cherche d’ailleurs des terres) - Je suis ouvert à toutes sortes de proposition, sur l’Aveyron où je réside ou ailleurs - ibasa94@yahoo.fr

• Toutes régions - Je recherche des emplois saisonniers en maraîchage (de la production au conditionnement/vente) ou en production fruitière (récoltes, taille), ou encore en gîte/ferme-auberge (tous travaux pendant périodes d’affluence) - J’ai de l’expérience dans ces domaines particulièrement en maraîchage Motivation: j’ai un projet d’installation ou d’association en agriculture bio ou/et gestion de gîte d’étape - brimortier@yahoo.fr • Toutes régions - Pas tout neuf mais motivé, 55 ans, exp paysanne (élevage et salariale cultures), adroit et débrouillard en travaux d’atelier, cherche emploi chez paysan-ne, formule entraide + activité perso (agricole ou mécanique) envisagée, ou salarié groupement d’employeurs ou assoc nature - Possibilité d’habitat, même à rénover, apprécié 0677931296

Association - installation transmission Offre • Tarn-et-Garonne - Exploitation maraîchère à vendre : 3,20 ha, 2,67 ha de terres cultivées dont 0,2 ha de raison de table - Groupé - Conversion AB en cours (terminée en mars 2015) - Bâtiment d’exploitation multifonctionnel (280 m2) en bon état, avec chambre froide Serres opérationnelles (x2) : total de 960 m2 pour la production de légumes - Maison d’habitation habitable de suite (150 m2) - Cession de l’ensemble en vente uniquement: 240000 €- 0670306803 - jeanguylene@wanadoo.fr

• Pyrénées-Atlantiques - Ferme à transmettre 26 ha: 8 ha de terre cultivable, 35a de vigne, 4 ha de bois taillis, 13,5 ha de prairie - Les terres sont groupées autour des bâtiments - Habitation de 150 m2 sur deux niveaux - Accolée à la maison on trouve une grange d’environ 180 m2 au sol avec un fenil à l’étage. Un gîte de groupe de 300 m2 environ est adapté aux personnes à mobilité réduite (34 couchages) - ABDEA, 05 59 30 28 36 • Bourgogne, limite Centre - Agriculteur offre gratuitement corps de ferme, avec 2 ha et un logement, pour élevage ou maraîchage, étudie toute proposition - 0632076973 0386454381 • Deux-Sèvres - Cherche associé-é pour transmission - Départ retraite 1/1/2017 - Gaec à trois sur 143 ha en fermage, avec 100 VA, 80 JB, 3500 couples de pigeons, 30 ha de céréales pour autoconsommation, 10 ha de mais, 4 ha de luzerne + 20 ha -Possibilité de parrainage 0678600753 - ber.billy@hotmail.fr • Deux-Sèvres - Ferme horticole cherche repreneur - Exploitation actuelle : 800 m2 serres en verre, 4 tunnels de 400 m2, tout en vente directe. - Possibilité de poursuivre la production, de faire du maraîchage, de la production de semences, sur 4 ha - Parrainage ou formule progressive souhaitée (arrêt de l’exploitant fin 2015 puis de sa conjointe fin 2017) - Possibilité de logement à louer à proximité - Toute proposition étudiée - 0549065299 - mons.pollen@wanadoo.fr • Vosges - Ferme à céder d’ici 2-3 ans pour départ retraite - Actuellement élevage ovin lait, avec transf. yaourts et fromages de brebis en AB - bergerie.draimont@orange.fr 03 29 25 34 22 • Creuse (Bas-Berry) - Ferme d’élevage à reprendre: 73 ha dont 40 % de prairies naturelles avec bon parcellaire - Deux blocs distants de

1 500 m - Vastes bâtiments d’exploitation: 2 hangars à fourrage et 3 stabulations libres plus bâtiments traditionnels en bon état - Maison d’habitation traditionnelle 100 m2 avec chauffage central bois, grenier et jardin potager - Libre à partir de janvier 2015 (à confirmer) - Pas de matériel ni troupeau à reprendre, donc toute liberté pour bâtir des projets - Le propriétaire est un GFA familial - Les sept sociétaires souhaitent vendre 370 K€- Projet agriculture paysanne autonome exigé, si besoin avec plusieurs porteurs, montage à discuter - Environnement encore préservé, développement local à bâtir - 06 69 03 61 90 marjomaurette@no-log.org • Cantal (Sud) - A vendre, ferme en AB, 400 m d’alt., implantée sur 8,6 ha mécanisables et d’un seul tenant - Possibilité de reprendre la production actuelle de cochons plein air avec transformation et vente directe (réseau commercial bien établi) - Maison d’habitation au cœur de la ferme (140 m2, totalement rénovée en 2011, 3 ch) - Bâtiments agricoles: une grange aménagée pour stockage du grain et production d’aliment de ferme pour les animaux, cellier et atelier, un bâtiment neuf polyvalent (2014) en bois de 240 m2, un ancien bâtiment polyvalent, 100 m2, actuellement aménagé en maternité, un garage et un hangar en tôle, commode pour travaux de bois de chauffage - Vue immense et splendide 0471466879 ou 0632889841 • Morbihan - Ferme à céder d’ici un à trois ans, pour raison de santé Vaches laitières + céréales, 120 ha - Ferme opérationnelle - A Ploerdut 06 86 95 57 65 gilbert. m-a@hotmail.fr • Morbihan - Ferme à reprendre d’ici un an: porcs et lait à égalité, 100 ha, bâtiments et maison d’habitation. Reprenable en l’état, prête à fonctionner - Au Croisty - 0297516444 - jeamand@orange.fr

Dystopia, vers le livre Vous avez été nombreux à apprécier le projet Dystopia, présenté – très partiellement – en dossier dans notre numéro de l’été dernier. C’est pourquoi nous publions cet appel amical des auteurs : « Depuis un an et demi, nous travaillons à un projet sur l’agriculture industrielle qui associe deux écritures : les mots sont un miroir de la réalité telle que nous la percevons, fragmentée, éparse, au fil de l’actualité. Les images sont de l’ordre de la prédiction : voilà demain, si… Si rien ne change dans l’orientation actuelle de l’agriculture. Rémi Fraisse a été tué par les forces de l’ordre le 25 octobre parce qu’il contestait le projet de barrage de Sivens dans le Tarn. À Amiens, en première instance, des opposants à l’usine des 1 000 vaches ont été condamnés. L’agriculture industrielle, intensive et d’exportation est défendue avec acharnement par tous ceux qui refusent de voir ce qu’ils ont sous les yeux. Notre projet s’appelle Dystopia. La production a été rendue possible par un financement participatif. Reste la post-production, c’est-à-dire en particulier un livre qui doit être édité aux éditions Le bec en l’air à Marseille. Nous avons besoin de votre aide pour boucler le budget et assurer la parution prévue en février 2015. En achetant dès maintenant cet ouvrage à un prix préférentiel et en diffusant cet appel dans vos réseaux, vous nous aiderez à porter ce débat sur la place publique : quelle agriculture et quelle alimentation pour demain ? Merci d’avance. » Alexa Brunet, photographe, membre du collectif Transit et Patrick Herman, journaliste presse écrite

Le livre au tarif de 25 € (au lieu de 28 € prix public), frais de port offerts pour la France métropolitaine. Règlement par chèque à l’ordre de : Le Bec en l’air Le Bec en l’Air – 41, rue Jobin – Friche la Belle de Mai – 13003 Marseille Renseignements : contact@becair.com

18 \ Campagnes solidaires • N° 301 décembre 2014

• Morbihan - Ferme à reprendre d’ici un an - Porcs naisseurs engraisseurs + Bovins viande (en GAEC), 90 ha (dont 50 en propriété) - A Plumeliau - 0297518727 • Morbihan - Ferme à céder - 26 ha (ferme laitière système herbager) + bâti + maison d’habitation + longère à rénover - Ouvert à toute proposition - A Quistinic - 0297517258 ou 0634077064 • Doubs - Recherche des partenaires pour une exploitation collective de maraîchage en traction asine et d’élevage ovin, en plus des petits fruits, des vergers, des chèvres, des poules et des ruches - Projet militant, écolo - Nous recherchons des personnes expérimentées qui ont envie d’aller au champ (1 km) en vélo 2,5 ha labourable, tunnels froids + pâtures, vergers et bois - Habitat collectif sur place - 0381841250 champlibredelods@orange.fr • Mayenne - Gaec avec 3 associés recherche candidat(e) polyvalent(e) (compétences en lait et suivi de cultures) pour préparer un départ en retraite de l’un des associés - Ferme de 42 ha en production laitière (270000 l en conversion bio) et un atelier maraîchage bio diversifié en vente directe (1 ha en plein champ et 1500 m2 sous serre) - A 20 km de Laval - Période de salariat possible avant installation - 0243696318 gaecdelacailletiere@hotmail.fr • Loire-Atlantique - A céder ferme faitière en bio dans le Nord du département - 40 ha et 212000 l - Système herbager - Parcellaire groupé et site fonctionnel - Tout le matériel est en cuma - Atelier de transformation en fromage sur le site - Les cédants possèdent un gîte qui pourrait être cédé à la reprise selon les projets - Ouverts à tout type de projets et de production qui permettent une ou plusieurs installations (possibilité d’association si souhaité) - soizic. gueguen. cap44@orange.fr (référence 44.029) • Loire-Atlantique - 7 ha de terres à vendre dans le Nord-Est du département - Actuellement en prairies, à vendre avec des dépendances (hangar 400 m², granges 200 m²) et la maison (71 m², 2 ch) - Site adaptable à toutes productions possible sur cette surface soizic. gueguen. cap44@orange.fr (référence 44.061) • Aude - AV ferme bio en pleine activité: maraîchage (1,5 ha) + pommiers (2,5 ha) - maison 180 m2 BE Bâti agricole (200 m2) - Un seul tenant, irrigable (rivière) + un hectare de prairie lesaresverts@gmail.com • Ardèche (Sud) - Cherche successeur cause départ à la retraite fin 2015 - A reprendre : 5,5 ha de vignes bio en coopérative, 50 porcs transformés et vente en magasin de producteurs - 04 75 36 68 23 • Côtes-d’Armor - Cherche repreneurs pour ferme laitière en bio depuis 18 ans, avec 75 ha et 35 vaches races rustiques, terre groupées, système herbager, autonomie alimentaire - Transformation d’une partie du lait en fromage typés (gruyère, tomme et pâte molle), réseau de vente en place Étudions toutes propositions, capitaux limités, transmission progressive en CPI ou salariat, projet pour couple possible, maison indépendante sur place - 0630350222

• Saône et Loire (Sud) - Vends bâtiments agricoles (miellerie et atelier de transfo 100 m2 rénovés en 2011, hangar clos, grange) et maison attenante sur 7000 m2 de terrain - Présence d’une source captée, prairie tout autour - Possibilité poursuite activité apicole ou autre création (petits fruits, transfo, accueil…) - amap à proximité – 0678923775 • Loire (Sud) - En zone de montagne, Gaec à 4 associés, 63 ha, vaches (35) et chèvres (18) laitières, en AB, fromages vendus en direct - Nous recherchons 2 personnes suite au départ de 2 d'entre nous - Compétences souhaitées : transf. fromagère ou élevage, polyvalence - Faible capital à reprendre, période transitoire souhaitée, secteur dynamique - thierry.ballandraud@orange.fr 0477391146 - 0477397709 Demandes • Bretagne - Nous sommes 2 porteuses de projet, actuellement en activité en production caprine avec transformation à Belle-Ile - Notre bail se termine début 2016 et nous souhaiterions nous installer prochainement sur le continent - Nous sommes à la recherche d’une ferme comprenant un bâtiment d’élevage, un hangar à fourrage et au moins une maison d’habitation - Pour être autonome dans cette production, il nous faut environ 25 ha de foncier. Notre zone géographique de recherche : Sud Morbihan, Ille-etVilaine (région de Redon) et le Finistère-Sud - Morgane: 0625173139 ou Emmanuelle : 06 49 47 09 54 • Toutes régions - JH 24 ans, très motivé avec plusieurs projets, recherche sur l’ensemble de la France une ferme à transmettre avec un élevage ovin ou caprin et/ou avec des parcelles de forêt Je peux expliquer mon projet par téléphone au : 06 26 15 55 75 • Moitié sud de la France - Jeune couple, formé et expérimenté, cherche une maison avec au moins un hectare irrigable, en location, location-vente ou vente à terme, pour s’installer en maraîchage, plantes aromatiques et médicinales et petit élevage - Étudie toutes propositions - adrien.fourel@gmail.com - 0475081110 - 0640420016

Animaux - Matériel • Pays-de-Loire/Afrique - Recherche pour le Togo tracteur MF OCC 165 16P 275 + moteur Perkins AD4203 pour 158 MF - Pour formation agricole - Arcade 44 - 06 16 67 36 45 • Franche-Comté - Pour installation en février 2015, cherche tracteur maraîchage (15000 euros max) et serres tunnel largeur 5 mètres 06 01 83 81 01

Divers • Yonne - Paysan, retraité fin 2014, dispo pour aide bénévole chez éleveuse - Région et situation indifférentes - 03 86 45 43 81 06 32 07 69 73 • Aude - Paysanne depuis 6 ans dans ferme brebis viande bio, porc plein air et petite basse-cour, propose logement contre coup de main à la ferme - Idéal pour retraité ou couple retraités, ou ancien berger, ou couple souhaitant se tester avant installation - 40 minutes de Narbonne - Possibilité de création ateliers petit élevage (lapins, poulets,…) 04 68 46 25 19 belle.garrigue.florence@gmail.com


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 19

VOUS VOU S ÊTES INDEMNISÉ IN NDEMNIS SÉ EN CA CAS AS D’ALÉA CLIMATIQUE CLIMA AT TIQU UE

JE E FAIS FAIS A F FACE AC ACE À MES BAISS BAISSES ES

DE D E RENDEMEN RENDEMENT NT Un aléa climatique et ce ce sont vos rendements qui chutent ou o bien une culture à ressemer. ressemer. Comment Com mment faire face ? A risques et protégeons Avec vec l’Assurance Climats, Climatss, nous vous proposons des garanties personnalisées et adaptées à vos risques votre compte d’exploitation d’exploita ation sur la base de vos rendements. rendementts. Contactez un conseiller dédié pour po our un diagnostic personnalisé et gratuit.

Assurance e Climats à retrouver sur grou groupama-agri.fr upama-agri.fr Pour les conditions et les lim limites mites des garanties se reporter re eporter au contrat. Caisse régionale d’Assurances Mutuelles Mutu uelles Agricoles Groupama - Entreprise régie par le Cod Code de des Assurances - Document et visuels non contractuels contractu uels - Crédits photos : Shutterstock - Being - Septembre e 2013.

CNCM - 88/90 RUE CARDINET - 75847 PARIS CEDEX 1

UNE BANQUE QUI APPARTIENT À SES CLIENTS, ÇA CHANGE TOUT. CNCM - 88/90 RUE CARDINET - 75847 PARIS CEDEX 1

Le Crédit Mutuel, banque coopérative, appartient à ses 7,5 millions de clients-sociétaires. Il n’est pas coté en bourse, ne peut être racheté et n’a qu’un seul intérêt à défendre : celui de ses clients. C’est la raison pour laquelle le Crédit Mutuel vient d’être élu pour la 7e fois en 10 ans, n°1 de la relation client*.

*1er prix du Podium de la Relation Client dans le secteur banque. Enquête réalisée par BearingPoint et TNS Sofres en décembre 2013 auprès de clients/usagers d’entreprises/ administrations, issus d’un échantillon de 4 000 personnes.


CS 301.qxd:CS actu 245.qxd

27/11/14

19:49

Page 20

Le salon de l’enfumage L’agro-industrie veut enterrer l’agriculture paysanne. À Orléans, le 20 novembre, les paysans ont célébré un enterrement symbolique de leur agriculture afin de dénoncer la mascarade d’Open agrifood, grande opération de com orchestrée ce jour-là par Xavier Beulin, sur ses terres.

M

élanger les contraires, brouiller les pistes, mentir tellement pour qu’à la fin on ne sache plus reconnaître le vrai du faux… Avec un nom incompréhensible mais branché, Open Agrifood poursuit bien ce but : enfumer. Ce 20 novembre, à Orléans, Xavier Beulin, agriculteur local et président de la Fnsea, a vu grand : dans le théâtre de la ville, toute la journée et celle du lendemain, des débats et ateliers animaient un événement au sous-titre des plus ronflant – « Forum international de l’agriculture, de l’alimentation et de la distribution responsables » – et au slogan ravageur et ambitieux, parlant de « révolution agricole et alimentaire ». En bon libéral, le patron de Sofiproteol a quand même assuré ses arrières en récoltant 250 000 euros de subventions publiques pour garantir avec ses partenaires (Leclerc, Cargill et Mac Donald, entre autres) le succès de son coup médiatique. 21 organisations citoyennes – dont la Confédération paysanne – ne s’y sont pas trompées et sont venues dénoncer une opération lourdement dommageable pour l’intelligence et l’intérêt collectifs. Avec infiniment moins de moyens, et sans subvention, elles ont invité la population orléanaise à un apéro devant le théâtre d’Open Agrifood, afin de discuter des vraies attentes de la société pour l’agriculture de demain. Et célébrer ce qu’est véritablement l’objectif de ce grand salon de l’enfumage : l’enterrement de l’agriculture paysanne ! « À une époque de supercherie universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire », écrivait George Orwell dans son roman 1984, annonciateur de notre époque et de sa confusion au service des pires dérives. Comme quoi, de révolution, ou plutôt de révolte, il était donc bel et bien question. n BD Photos : Olivier Tétard


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.