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Les lodges ne désemplissent plus
–tendance Boostés par la pandémie, les lodges sont plébiscités. Confort, design et authenticité expliquent ce succès. L’exemple du Valais.
Dans une optique de conservation du patrimoine, la tendance est aux constructions écologiques et aux rénovations de vieilles bâtisses et lieux insolites destinés à la location. Raccards et mazots sont devenus ainsi des logements prisés des plus curieux. Ce phénomène s’est amplifié avec l’arrivée de plateformes de réservation comme Airbnb qui facilitent l’accueil d’hôtes par des non-professionnels. Le panel d’hébergements valaisans proposé sur cette plateforme avait déjà augmenté de 471% entre octobre 2014 et mi-janvier 2017. La crise du coronavirus a renforcé ce trend.
© Riechsteiner Micha
DES CHIFFRES ÉLOQUENTS
Avec plus de 18 millions de nuitées annuelles, le Valais représente une destination privilégiée pour les amateurs de nature et de montagne. Outre les lodges, le secteur de la para-hôtellerie valaisan accueille beaucoup plus d’hôtes que partout ailleurs en Suisse. Or, plus de 77% des nuitées du canton sont comptabilisées hors du secteur hôtelier: 46,9% des hôtes séjournent dans des résidences secondaires, 30,8% dans des établissements de para-hôtellerie et 22,3% dans des hôtels. LES RAISONS DU SUCCÈS
De plus en plus, les hôtes actuels sont à la recherche d’une expérience, davantage que d’un simple logement. Ils aspirent à se déconnecter et à se ressourcer en pleine nature. Pour cela, ils privilégient des habitations qui offrent liberté et espace. Souvent encouragés par l’importance croissante de la durabilité, ils désirent en outre voyager de manière écoresponsable. Ils sont plus enclins à s’éloigner des villes pour profiter du grand air. Au-delà de la pandémie, cette quête d’authenticité devrait perdurer pour les hôtes suisses et étrangers.
inspi ration
–whitepod
Les Cerniers www.whitepod.com Sur les hauts de Monthey, on découvre ce hameau composé de 18 luxueux igloos de toile (les «pods») et de 9 chalets (les «Swiss Cabins») auxquels s’ajoute une brasserie d’alpage, le tout avec une splendide vue en sus.
–anako lodge
La Forclaz www.anakolodge.ch Au fond du Val d’Hérens, d’anciennes bâtisses agricoles ont été sauvées de la démolition, puis transformées en deux raccards, trois granges et deux greniers résidentiels. Leur aspect extérieur fleure bon l’authentique, alors que - surprise - l’intérieur adopte un design contemporain.
–le hameau de colombire
Crans-Montana www.colombire.ch Implanté sur les hauts de la station, le mayen «Plan-Mayen» est confortablement aménagé pour accueillir deux personnes. Le soir, un panier gourmand peut être déposé directement devant la porte. D’autres mets de la carte saisonnière sont à déguster sur réservation.
un modèle vertueux
« les tsablos » à Vercorin www.lestsablos.com
Propriétaires d’un lodge alpin à Vercorin, Corinne et Samuel Delalay incarnent l’état d’esprit qui anime ces hébergeurs d’un nouveau type. Tous deux ont un emploi «standard» (l’une dans l’univers médical et l’autre dans les infrastructures énergétiques) et tous deux se sont découvert une passion pour l’accueil. «Ce mayen a appartenu à mon grand-père, puis à mon père. Lorsque j’en ai hérité, il était très délabré. Nous avons commencé à le rénover nous-mêmes, mais les coûts étaient élevés et le résultat n’était pas convaincant» se souvient Samuel. En 2016, décision est prise d’en faire un véritable projet à la fois immobilier, familial et entrepreneurial. Un architecte est alors engagé par leurs soins. Les bases du futur lodge sont définies. «Nous sommes passionnés d’architecture et de design. Mais nous savions surtout ce que nous ne voulions pas», nuance Corinne. En raison de la Lex Weber, les critères à remplir pour être habilités à restaurer ce mayen avaient varié. Leurs démarches ont été de ce fait longuement entravées. Leur dossier ne cessera d’errer d’offices en administrations, jusqu’à rejoindre Berne. À l’issue de deux ans de procédures, le lancement de la rénovation est enfin autorisé. Désormais, les sympathiques bricolages des débuts ne sont plus à l’ordre du jour. Après bien des travaux arrivera le jour tant attendu des portes ouvertes inaugurales. Nous étions en 2019.
LE SUCCÈS AU RENDEZ-VOUS
Avec un peu de recul, ces efforts au long cours ont-ils été payants? À en croire les taux de remplissage enregistrés depuis l’inauguration, il semblerait bien que oui. Les résultats dépassent en effet largement les objectifs que s’était fixés le couple. Ils ne s’y attendaient pas. «Notre entourage a été étonné par notre démarche. Notre priorité
L’authenticité n’exclut pas le ludique, comme le prouve ce filet.
consistait, de fait, à sauvegarder le patrimoine familial», témoigne Samuel. L’aspect commercial leur apparaissait uniquement comme le moyen d’atteindre cet objectif. Il n’en demeure pas moins que le professionnalisme est crucial pour eux: leur lodge, ils ne laissent à personne le soin de le préparer pour leurs hôtes. Ils le bichonnent comme s’ils allaient y séjourner eux-mêmes. «Nous n’avons pas un boîtier à code où se trouveraient les clés. Nous sommes toujours présents pour souhaiter la bienvenue à nos clients. Nous ne comptons pas nos heures, mais nous ne savons pas faire autrement», assure Corinne. Un panier avec des produits de la région est systématiquement offert. Leurs hôtes se montrent sensibles à ce geste. Covid oblige, ces vacanciers étaient principalement issus de Suisse ces derniers mois, avec une part marquée de Vaudois, Genevois et Zurichois.
BIEN DANS SON TEMPS
Le mayen devenu lodge leur offre un confort 2.0 avec wifi, aménagements intérieurs de qualité et places de parc. Le fait de pouvoir louer dès deux nuits démocratise l’accès à ce lieu préservé. Quant aux réservations, elles se font par AirBnB et via la plateforme de l’Office du tourisme de Vercorin. Le marketing passe, lui, par les réseaux sociaux, Facebook et Instagram en tête. Plus inattendu, les Delalay se sont adjoint les services d’influenceurs. «Et ça marche! Pour l’instant, nous couvrons nos frais. Nous n’écartons pas l’idée d’un éventuel nouveau projet, mais nous voulons que cette aventure reste avant tout un plaisir», assurent d’une même voix ces néoentrepreneurs à l’enthousiasme communicatif.