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Commerce
Hospitalité L’APPART’HÔTEL FAIT SON NID À MORGES
Sous le nom de nonanteneuf, deux jeunes entrepreneurs lancent une chaîne d’appartementshôtels près d’Aigle (VD) avec des développements en 2023 à Lausanne et Genève. Une formule d’avenir vu la pénurie de personnel hôtelier et de logements urbains.
Le bâtiment tout neuf offre quelque 26 studios et 26 suites aux voyageurs. DR
«La période post-covid a bouleversé les habitudes. On l’a vu avec la fermeture des hôtels et des restaurants», explique le Genevois Nicolas Montagner, 28 ans, un ancien étudiant de la HES-SO de Sierre qui s’est lancé il y a cinq ans déjà avec un ami d’études, Andreas Fischer, dans la gestion d’appart’hôtels: «Vous réservez votre chambre sur une application (réd: Coucou&Co ou Nonanteneuf), vous fournissez votre identité et les données de votre carte de crédit. Ensuite votre téléphone permet l’ouverture automatique de la chambre ou de la suite (2 lits et un canapé-lit) qui comprend salle de bain avec douche, cuisine toute équipée, TV, wifi, etc. Coucou&Co opère et réceptionne les clients depuis son pôle opérationnel à Sierre, bien entendu le personnel de nettoyage effectué une fois par semaine est sur place.» A Morges, à l’avenue des Plans 12, un bâtiment tout neuf offre depuis le 1er novembre quelque 26 studios et 26 suites au voyageur autonome, intéressé par une formule très flexible répondant aux critères hôteliers d’un 3 étoiles. Il est possible d’y dormir 2 nuits minimum et jusqu’à 6 ou 12 mois avec un tarif dégressif. Le prix peut atteindre 2000 francs par mois pour un studio et 2500 à 2800 francs pour une suite de deux pièces. La formule s’adresse aussi bien à des entreprises qui veulent loger du personnel pour une courte période, à des étudiants de l’EPFL ou de l’UNIL tout proches, à des pères ou mères en instance de divorce, voire des militaires en déplacement. Avantage économique, on peut se faire à manger sans passer par la case resto, même si un établissement est ouvert au pied du bâtiment.
Un projet de bachelor La chaîne nonanteneuf est une filiale de Coucou&Co, basée à Sierre, où Nicolas Montagner et Andreas Fischer ont effectué leurs études de tourisme: «C’était même mon projet de bachelor, rigole le jeune entrepreneur d’origine genevoise qui emploie aujourd’hui une douzaine de collaborateurs travaillant au siège du groupe. On peut même déverrouiller la porte à distance pour celui qui a oublié son téléphone!» Vu la demande pour cette formule d’avenir, les jeunes entrepreneurs songent à franchiser la formule pour d’autres investisseurs. Comme pour la plupart des hôtels, les murs appartiennent à des investisseurs immobiliers alors que la gestion est effectuée par la chaîne d’appart’hôtels. Coucou&Co est la société de gestion gérant pour le compte du propriétaire qui a mis l’immeuble à disposition. C’est le cas du nouvel emplacement de Morges, situé face au lac avec vue sur les Alpes françaises et pas très loin de l’autoroute (protégé par une isolation phonique bien étudiée). Ouvert il y a à peine un mois, le taux d’occupation dépasse les 50% et pourrait atteindre les 80 à 90% pendant les Fêtes. Les promoteurs ne pensent pas entrer en concurrence avec les hôteliers de la place qui ne jouent pas dans la même catégorie: «On ne s’adresse pas aux touristes qui rêvent de nuits romantiques», commente Nicolas Montagner. En revanche, il souligne le manque de collaboration des services d’urbanisme de la commune vaudoise qui ont mis près d’un an à décerner l’autorisation d’exploiter.
Nicolas Montagner, co-gérant
Collaboration inédite
DU MOBILIER CRÉÉ PAR DES DÉTENUS
Vélos, malles et autres objets récupérés chez des particuliers ont été métamorphosés en prison genevoise pour devenir des meubles design vendus dans la brocante du Centre social protestant.
Dans l’univers opaque des établissements pénitentiaires de Champ-Dollon et La Brenaz, à Genève, un projet à la fois unique et utile a été mis sur pied. Le concept: confier des objets «démodés», donnés par des particuliers, aux détenus de ces deux prisons pour qu’ils leur offrent une seconde jeunesse. C’est ainsi que les ateliers de menuiserie ont vu un vélo se transformer avec originalité en horloge murale ou encore des planches de snowboard devenir un banc art déco. Le tout vendu désormais au magasin de la Renfile, ouvert l’an dernier sur 2200 m2, au cœur de l’espace Tourbillon (Plan-les-Ouates).
Échange gagnant-gagnant Une démarche nommée «Cellules grises» qui offre de multiples retombées positives. Tout d’abord pour le Centre social protestant (CSP), à l’origine de cette initiative. Les profits générés par ces ventes permettront ainsi de financer les actions sociales gratuites du CSP qui, en échange, fournira des livres, des vêtements et des jeux de société aux prisonniers. «Cette collaboration est exemplaire à plus d’un titre. Elle s’inscrit dans un cycle d’économie circulaire et se base sur un troc qui bénéficiera à chacune des parties, et non sur des échanges monétaires», s’est réjoui le conseiller d’Etat genevois, Mauro Poggia lors de la présentation officielle de la première gamme de meubles, début décembre. En effet, ce projet solidaire profite également aux artistes, les détenus, puisqu’à travers ce but commun qui se veut fédérateur lors des exercices manuels, les dizaines de travailleurs ont l’occasion d’acquérir des compétences professionnelles qui leur seront utiles à leur sortie, notamment pour leur réinsertion future. Un doublé payant qui fait figure de pionnier et risque d’en inspirer plus d’un. J.M.
Des objets «démodés» sont confiés aux prisonniers pour qu’ils leur offrent une seconde jeunesse. DR
Shop in shop
STELLA McCARTNEY LANCE SES PREMIÈRES BOUTIQUES
Bongénie cible en priorité la clientèle étudiante, donc Genève et Lausanne.
Logiquement, la créatrice vient d’ouvrir fin novembre ses premières boutiques (des corners très bien placés) au sein des Bongénie Grieder de Genève et Lausanne, soit dans deux villes ayant une forte population étudiante. Dans la logique de Stella McCartney qui a toujours été végétarienne, ses sacs à main n’utilisent ni cuir, ni fourrure, ni peaux d’animaux. Sa nouvelle collection, S-Wave, est fabriquée à partir d’une alternative au cuir animal à base de raisin, à partir de déchets provenant de vignobles italiens. Codirecteur de Bongénie Grieder, Loïc Brunschwig a inauguré ce corner et relevé que l’année 2022 n’a pas été l’année de reprise tant souhaitée. «Nous sommes encore à -5% par rapport à 2019 pour les magasins physiques. Par contre, le digital continue sa croissance à deux chiffres. Il représente désormais 20% du chiffre d’affaires global. Les magasins physiques souffrent en effet d’un manque de clientèle chinoise et russe», a-t-il précisé. S.G.
Portrait
PELICHET, EN ROUTE VERS LE RENOUVEAU
L’heure du changement a sonné pour le spécialiste du déménagement, du transfert et de l’archivage. Ce fleuron genevois installé depuis 1891 vise désormais plus loin, plus grand et plus haut de gamme.
Rares sont les entreprises qui ont su traverser les âges, les époques et subsister depuis 1891. Parmi elles, le Genevois Pelichet s’est, pour sa part, bâti un socle pérenne autour de trois métiers (le déménagement, le transfert et l’archivage). Des métiers qui n’ont pourtant plus rien à voir avec ceux d’antan. Il y a d’abord les cartons que l’on transportait dans le coffre d’une 4 CV qui occupent aujourd’hui 4 camions, mais aussi les déplacements qui se sont étendus au fil du temps, passant de 5 à 50 voire 5000 kilomètres, tandis que des milliers de documents tiennent à présent dans une simple clé USB... Face à de tels bouleversements, la société historique (voir encadré) a décidé de prendre un virage complet, à l’image de ce nouveau marché. Portrait.
Un secteur qui bouge Aider la famille Broquet à déménager des Acacias pour aller à Meyrin ou un magnat de l’immobilier de Cologny vers sa nouvelle demeure londonienne, transférer les bureaux et les machines d’une PME dans d’autres locaux, comme ceux des nombreux organismes internationaux, stocker Régis Serriere, directeur international de Pelichet. DR
L’entreprise a été fondée en 1891 à Genève. DR l’armoire d’un aïeul mais aussi les archives ultraconfidentielles d’une banque... La liste des services que propose Pelichet n’en finit pas et s’adapte à une demande qui évolue sans cesse. «Rien que depuis la pandémie, la saisonnalité des déménagements s’est transformée. Tandis que le pic était auparavant cadré de mai à septembre, on carbure désormais de mars à octobre. Sans parler des bureaux qui se vident au profit du télétravail et des contrats d’expatriés qui se multiplient mais se raccour-
PELICHET, EN ROUTE VERS LE RENOUVEAU
Le siège est désormais situé dans la zone industrielle de Meyrin.
DR
cissent. Ce à quoi s’ajoute le délai de réponse à une demande de document de la Confédération, qui s’est vu réduire de 48h à 24h, orientant d’autant plus l’archivage vers le numérique», décrit Régis Serriere, directeur stratégique chez Pelichet. Des changements de taille, surtout quand on sait que certaines administrations conservent jusqu’à 13 kilomètres d’archives dans leurs sous-sols. Si bien qu’avec le manque chronique d’espaces de stockage à Genève, Pelichet et ses concurrents (Balestrafic, Harsch...) ne se marchent en aucun cas dessus. Une aubaine de nos jours. «Il y a également un créneau florissant pour le Fine Art, étant donné que le Port Franc est plein à craquer, tout le monde cherche des dépôts sécurisés», souligne Régis Serriere.
Le rachat comme tremplin De nouvelles perspectives qui ont donné un coup de fouet à Pelichet. Après avoir tourné une première page de son histoire, cette entreprise familiale, d’abord aux mains de cinq générations successives puis rachetée en 2011 par le groupe mondial Mobilitas, prend le pli dès 2020, affichant pleinement ses ambitions renouvelées. Une équipe de direction toute neuve prend alors les commandes de l’institution avec Stéphane Disant à sa tête. Issu du monde de l’hospitalité, le dirigeant se fixe dès lors un premier objectif de développement de l’offre Premium (clientèle à haut niveau de confidentialité). De son côté, en tant que directeur stratégique, Régis Serriere se voit chargé, l’an dernier, d’une mission d’envergure: poursuivre l’implantation géographique de Pelichet. «Fortement présents en Suisse romande, nous nous sommes déjà installés ces derniers mois à Orbe et à Paris, puis nous serons a priori dès le printemps prochain à Bâle, Zurich/Zug et Bern. Fort d’un large réseau de partenaires dans plus de 100 pays, il s’agissait dorénavant d’exister en propre dans des agences, au plus près de la clientèle» précise-t-il. Une croissance externe qui occupe Pelichet mais ne l’empêche pas de s’affirmer sur d’autres projets.
De la suite dans les idées Celui de regrouper ses sites genevois à Satigny par exemple. Un programme d’ampleur pour la société qui compte pour le moment six entrepôts (dont l’un de 1500 m2 inauguré récemment) et 55 collaborateurs. Mais ce qui emploie grandement Régis Serriere et ses équipes, c’est l’impact écologique indéniable de la branche. Difficile d’avoir la main verte lorsque l’on transporte, emballe et détruit au quotidien. Malgré tout, Pelichet tente de corriger le tir. «Outre la plantation d’arbres en Afrique, que l’on a mise en place pour chaque palette d’archivage reçue, nous réduisons au maximum l’emballage d’objets et sommes en train de changer complètement le parc de véhicules en électrique ou le moins polluant possible (pour les camions). Mais surtout, nous recyclons les bureaux», indique le responsable. Appelée «Green Attitude», cette action instaurée en mars 2021 consiste à proposer aux sociétés qui changent de locaux et désirent jeter leur ancien mobilier, de le donner à une autre, qu’il s’agisse de 60 ou 500 pièces. Un cercle vertueux où les entreprises jouent le jeu et Pelichet les intermédiaires. Sur tous les fronts, le Genevois poursuit donc sur sa lancée, ce qui se traduit par une augmentation non négligeable du chiffre d’affaires. Alors que celui-ci stagnait depuis quelques années autour des 10 millions de francs, il devrait atteindre cette année 14,1 millions de francs et 15,2 en 2023. Pelichet est donc bien parti pour durer, faisant cap cette fois-ci vers son bicentenaire. Julie Müller
Plus de 130 ans d’histoire
L’entreprise de transport La Genevoise, de son nom d’époque, est fondée en 1891, aux Eaux-Vives, par Albert Pelichet. Tandis que l’hiver ce dernier livre du charbon et du bois de chauffage, l’été il délocalise les grandes familles qui rejoignent leurs résidences estivales avec leur mobilier. Dès 1900, le piano est à la mode dans les milieux aisés, il en transportera jusqu’à 20 par jour. La deuxième génération de Pelichet remplace la précédente en 1918, puis la troisième s’installe, incarnée par Andrée Pelichet et son époux Edouard Borgstedt. Mais la Seconde guerre mondiale éclate et les camions sont alors réquisitionnés sur le front d’Europe de l’Ouest. Passé cette triste période, Genève est en pleine expansion avec l’essor des Nations Unies et l’arrivée des Organisations internationales qu’il faut installer. Jean-Jacques, le quatrième héritier, un anglophone aguerri, aidera les multinationales (telles que Caterpillar) à prendre racine dans le canton et Pelichet à s’exporter dans le monde entier, notamment en Asie. Son fils, Yann, reprendra ensuite le flambeau avant de vendre l’entreprise au groupe mondial Mobilitas en 2011.