La place de l'architecture vernaculaire dans un territoire sinistré

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LA PLACE DE L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE

DANS UN TERRITOIRE SINISTRÉ :

DE SA REVALORISATION À SA (RE)INTÉGRATION COMME OUTIL DE MITIGATION DES RISQUES

ÉTUDE DE CAS : PROJET RECONSTRUIR DESDE LA TIERRA DANS LES VILLAGES DE TEZOATLÁN ET ZACATEPEC, OAXACA, MEXIQUE

CAROLINA RAMOS LÓPEZ

École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris-Belleville

Diplôme de Spécialisation en Architecture

« Architecture et Risques Majeurs »

Promotion 2016-2018 Mémoire de DSA

La place de l’architecture vernaculaire dans un territoire sinistré : de sa revalorisation à sa (re)intégration comme outil de mitigation de risques.

Étude de cas : Projet Reconstruir desde la Tierra dans les villages de Tezoatlán de Segura y Luna et Santiago Zacatepec, Oaxaca, Mexique

Membres du jury:

Cyrille HANAPPE

(Directeur pédagogique du DSA RM)

Pascal CHOMBART DE LAWE

(Directeur scientifique du DSA RM)

Sarra KASRI

(Professeur encadrant)

Auteur du mémoire :

Carolina RAMOS LÓPEZ

Date de soutenance :

17 décembre 2018

Image de couverture Figure 1. Dégâts sur une habitation en pisé à Zacatepec Photo : Auteur

A mi madre y a Julien, por ser dos apoyos constantes, sinceros y llenos de amor.

Avant propos

Je suis originaire de la Ville de Mexico et diplômée de la Facultad de Arquitectura de la Universidad Autónoma de México en 2015.

Mon pays est sous la menace permanente de différents aléas propres à sa localisation géographique : séismes, cyclones, tsunamis, inondations et d’autres. Ceux-ci, joints à une vulnérabilité sociale, provoquent constamment des pertes humaines et matérielles.

Pendant mes études de licence, j’ai participé en tant que volontaire au sein de l’ONG Un techo para mi país, actuellement Techo, une organisation de développement née au Chili et de nos jours présente dans toute l'Amérique Latine. J’ai pris part de la première phase de leur projet : la construction d’habitations temporaires, pour des populations vulnérables, qui avaient pour objet de répondre à leur droit à une habitation avant d'ensuite les accompagner dans le processus de construction d'un logement permanent.

Plus tard, pendant mon stage professionnel, j’ai fait partie part de l’équipe du projet de recherche «  Sistema de Infraestructura Educativa Emergente Multi‑región » (Système d’Infrastructure Éducative d’Urgence) au sein de mon université et en partenariat avec le CONACyT (Le Conseil National pour la Science et la Technologie) et le Ministère de l’Éducation. L’objet de ce projet était de développer un prototype de salle de classe d’urgence afin d’être préparés, en tant que pays, à d'éventuels désastres naturels et de pouvoir rétablir rapidement, et de façon appropriée, les activités scolaires suite à des catastrophes naturelles très fréquentes .

Ces deux expériences antérieures m’ont marquée de manière très positive et m’ont poussée à continuer dans ce domaine des risques majeurs et des projets humanitaires. J’intègre alors le DSA Risques Majeurs en 2016 afin d’approfondir mes connaissances sur ces sujets. Maintenant que je conclu ce cycle d’apprentissage je souhaite continuer ma pratique sur le terrain dans des projets communautaires impliquant un travail au côté des populations.

Remerciements

Je tiens à remercier toutes les personnes qui ont rendu possible la production de ce document.

Tout d'abord, je voudrais remercier ma directrice de mémoire, Sarra Kasri, qui est toujours à l'écoute et une professeur énormément engagée. Merci Sarra de l'intérêt que tu as porté à ma mise en situation professionnelle dès le début et que tu as conservé pendant l'écriture de ce mémoire. Merci pour ton enseignement et tes conseils.

Je remercie mes collègues et amis du DSA pour l’ambiance de camaraderie au sein de notre groupe. J’ai passé de très bons moments avec vous pendant ces trois semestres. Un grand merci parce que, grâce à vous, je pus améliorer mon français.

Je remercie tous mes collègues et amis du projet de reconstruction. De l’équipe de « la direction », à toi Gaby pour ton amitié, pour les fous rires, pour m’avoir préparé le meilleur gâteau d’anniversaire et pour toutes les aventures oaxaqueñas. De l’équipe Mixteco, à Mayra pour m’héberger à chaque un de mes passages à Huajuapan, à Goyo, Anaïs, Julián, Ángel, Anita y Karen pour les moments de convivialité et de détente. Merci Jean et Manu de avoir partagé avec moi vos connaissances avec enthousiasme, pour les longues conversations et la bonne colocation lejos de la ciudad. Chez les mixes, dioskujo'yi à la kish Mariana et aux mishos Juls, Tony et Eric de m’avoir inspirée par votre investissement et votre passion pour ce projet, merci d’avoir accéléré mon intégration à Zacatepec par vos conseils et vos cours de langue mixe.

Merci aux villageois de Tezoatlán et Zacatepec car, au sein de vos villages je me suis toujours senti bien accueillie, merci pour toutes les preuves d'affection, pour toutes les tasses de café et les repas que vous avez partagés avec moi. Un merci tout spécial à ceux qui, en plus, m’ont offert leur amitié : Doña Juanita,Doña Clarita, Doña Rosita, la famille Blas. Merci Doña Mari de m’avoir appris l’art du métier à tisser et Don Beto pour vos visites au chantier et parce que vous n'avez jamais hésité à me transmettre vos savoir-faire.

Julien, merci pour ton aide à chaque étape de cette formation, de la préparation de mon dossier de candidature jusqu’à ce moment. Tu m’as accompagnée tout le long du parcours, aux meilleurs et aux moins bons moments ainsi que dans chacune des démarches administratives (cela est une vraie preuve d'amour). Merci d'être mon correcteur de style et de français, merci de relire tous mes documents et de les corriger, mais surtout merci de me soutenir avec de la patience à tout moment.

Merci à ma famille car à la distance, et malgré celle-ci, vous me montrez votre support et votre amour. Merci maman d'être mon inspiration.

Sommaire INTRODUCTION 10 CONTEXTE Le Mexique, frappé par deux séismes .............................................................................................. 14 Les catastrophes Impact des séismes à Oaxaca Situation socio-géographique de l’État de Oaxaca ............................................................................ 17 Richesse culturelle, complexité géographique et administrative Sismicité de l’État de Oaxaca ........................................................................................................... 20 MISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE La structure d’accueil ...................................................................................................................... 24 Projets sociaux représentatifs Structure de l’agence Principes de confortement parasismique appliqués par l’agence sur des habitations en terre Mes missions ................................................................................................................................... 30 Les chantiers au premier village : Tezoatlán de Segura y Luna La maison de Don Amancio La maison de Doña Juanita Relevé de la maison de la famille Luengas L’identification de possibles bénéficiaires du programme de reconstruction dans le deuxième village : Santiago Zacatepec MÉMOIRE ET RECHERCHE Définition de l'architecture vernaculaire ........................................................................................ 56 Analyse de l’architecture vernaculaire à Tezoatlán .......................................................................... 57 La culture mixteca Le village de Tezoatlán de Segura y Luna

Les cultures constructives locales

Composantes de la typologie en adobe à Tezoatlán

Catalogue photographique d’exemples de cultures constructives à Tezoatlán

Analyse de l’architecture vernaculaire à Zacatepec .......................................................................... 80

La culture mixe

Le village de Santiago Zacatepec

Les cultures constructives locales

Composantes des habitations vernaculaires à Zacatepec

Catalogue photographique d’exemples de cultures constructives à Zacatepec

Les influences externes et les pratiques actuelles à Tezoatlán et Zacatepec ....................................102

Le projet « Reconstruire à partir de la terre » suite aux séismes de septembre 2017 .....................103

Début d’un projet collaboratif de reconstruction

Les acteurs

L’organisation du projet au sein de l’agence Réflexions au tour du projet

CONCLUSIONS 126 BIBLIOGRAPHIE 130 TABLE DES SIGLES 133 TABLE DES ANNEXES 141 ANNEXES 143

Nous vivons à une époque de changements constants et toujours plus rapides. Lorsqu'ils concernent l’urbanisme et l’architecture, ces changements, combinés avec la globalisation, l’industrialisation, la modernisation et l’homogénéisation culturelle, provoquent de plus en plus une perte du « sens du site » : on trouve désormais des constructions similaires sur différents territoires de la planète, et bâties avec les mêmes matériaux, dont la production et le transport ont également des conséquences écologiques. On les retrouve au nord comme au sud, dans les grandes villes comme dans les milieux ruraux, en plaine comme en montagne et ainsi de suite, dans des milieux qui n’ont rien à voir les uns avec les autres. Ces constructions ignorent les conditions particulières de chaque site et ne répondent pas de façon adaptée aux enjeux socioculturels.

Parallèlement, il est une architecture qui est présente partout dans le monde : l’architecture vernaculaire. Celle-ci, à la différence des constructions mentionnées ci-avant, est le résultat des différentes contraintes et considérations locales qui la configurent et la déterminent. Les cultures constructives vernaculaires sont le résultat du contexte spatial et temporel dans lequel elles s’inscrivent. Elles sont, par conséquence, bien différentes les unes des autres. Comme l’indique Torres (2009), d’un côté elles sont déterminées par des considérations physiques telles que le climat et les ressources locales disponibles

mais également, et de façon tout aussi importante, par des aspects socioculturels immatériels tels que les croyances, les traditions, les coutumes et les fêtes. Enfin, les moyens de production ont également leur influence : dans chaque région se développe une activité économique principale qui oriente la production de l’habitat.

Les considérations naturelles comprennent également les aléas naturels. Dans les régions exposées aux risques, les producteurs de l'habitat vernaculaire ont développé, à travers de l'observation et de l'expérimentation, des stratégies pour cohabiter avec ces phénomènes. Ils ont intégré dans leur conception des habitations de détails et dispositifs constructives particulières, ainsi que des comportements sociaux stratégiques afin de prévenir ou réduire leur vulnérabilité face à des éventuels désastres naturels.

(Caimi, 2014)

De nos jours, les risques naturels menacent de plus en plus de territoires occupés par l’homme, non seulement à cause de l'expansion de ces derniers mais aussi eu égard à l'augmentation de l'occurrence des phénomènes extrêmes, qui semblent survenir avec des intensités maximales en croissance. Nous sommes dès lors amenés à nous questionner sur les conséquences et les influences de la globalisation et des pertes du « sens du site » quant à l'augmentation des vulnérabilités et des dommages ?

Introduction

D'autre part, au cours des dernières décennies, les usagers-producteurs des cultures constructives vernaculaires, dans une tentative d'amélioration de leur qualité de vie et en suivant les vagues de la modernité, ont commencé à mépriser leurs traditions architectoniques et à les remplacer par des constructions d'influence externes et importées, desquelles ils méconnaissent la plus part du temps les systèmes constructifs et la mise en œuvre. Il est ainsi très courant de trouver de nos jours dans des communautés à fortes caractéristiques vernaculaires, des constructions basées sur des systèmes hybrides avec beaucoup de défauts de construction et de mise en œuvre. Ces constructions ne sont pas en mesure de résister aux éventuels risques, ce qui augmente la vulnérabilité globale de ces communautés.

Pour ma mise en situation professionnelle, j’ai passé quatre mois dans l’État d’Oaxaca (Mexique), territoire à forte concentration et diversité ethniques, dans un contexte de reconstruction post-séisme. Je dois admettre que bien qu’étant dans mon pays, je me suis confrontée à un territoire jusqu’alors totalement inconnu pour moi. En effet, Oaxaca est un territoire extrêmement compliqué du fait de sa géographie mais surtout de sa richesse et diversité culturelle. C’est un territoire avec une multitude d’exemples de fabrication de l’habitat vernaculaire confrontés à des problématiques actuelles.

Dans ce contexte, ma mise en situation professionnelle s'inscrit dans une mission de reconstruction de deux villages, Tezoatlán et Zacatepec dans l'État d'Oaxaca, qui ont subi des dégâts lors des séismes de septembre 2017. En effet, j'ai eu l'opportunité de collaborer avec Arquitectos Artesanos, une structure d'architectes qui revalorise les techniques et les savoirfaire locaux.

Comment reconstruire en considérant l'architecture vernaculaire dans un territoire sinistré et en cohérence avec le « sens du site » ?

J’ai décidé par conséquent d’écrire mon mémoire sur la place de l’architecture vernaculaire dans un territoire sinistré comme outil de mitigation des risques. Et, c’est à travers des cas concrets de diagnostics, de chantiers, de relevés et de situations inédites d'échange avec les habitants et de multiples acteurs de cette reconstruction, que je vais tenter de restituer la complexité du rôle de l'architecture vernaculaire. Cette dernière concerne à la fois la reconstruction technique et matérielle mais surtout l'intégralité du processus de régénération et revalorisation immatérielle et culturelle.

Figure 2. Dégâts dans une habitation à Zacatepec Murs en pisé détruits Photo : Auteur
Première partie Contexte

LE MEXIQUE, FRAPPÉ PAR DEUX SÉISMES

Les catastrophes

Le Mexique a été frappé par deux séismes les 7 et 19 septembre 2017. Celui du 7 septembre, avec une magnitude de 8,2 Mw, a eu lieu dans le Golfe de Tehuantepec : 14,761º de latitude et -94,103º de longitude (côte pacifique du Mexique) à une profondeur de 45,90 km.1 Ce séisme est le plus fort en magnitude jamais enregistré au Mexique2, ex-æquo avec le séisme de 1932 dans l’État de Jalisco. Et, en particulier, plus fort que le plus tristement mortifère des séismes ayant touchés le Mexique, que fut le séisme du 19 septembre 1985 et qui avait détruit une grande partie de la ville de Mexico.

Celui du 19 septembre, survenu jour pour jour 32 ans après ce séisme de 1985, a eu une magnitude de 7,1 Mw et son épicentre se trouvait entre les États de Puebla y Morelos : 18,40º de latitude et -98,72º de longitude à une profondeur de 57 km.3

Selon les informations officielles du gouvernement, plus de 190 000 immeubles, dont environ 170 000 logements, ont été endommagés par ces deux catastrophes dans 8 États du pays : Chiapas, Ciudad de México, Estado de México, Guerrero, Morelos, Oaxaca, Puebla et Tabasco.4

En réponse, le gouvernement a mis en place un plan d’action en trois étapes. Dans un premier temps, un

travail d’urgence : la mise à l’abri de la population. Cela commence par la Declaratoria de Emergencia (déclaration de l’état d’urgence) et la Declaratoria de Desastre Natural (déclaration de l’état de catastrophe naturelle) qui sont nécessaires pour que le gouvernement puisse utiliser des fonds du Fondo para Desastres Naturales FONDEN (fond pour les catastrophes naturelles). Grâce à ces fonds, l’État peut mener à bien les opérations de recherche et sauvetage, l’installation de tentes d’urgence (soins médicaux, distribution d’eau et de nourriture, des vêtements, etc.), le rétablissement de l’eau et de l’électricité, le déblaiement des décombres, etc. La seconde étape consiste à recenser les dégâts pour finalement mettre en place l’étape de reconstruction. Cette dernière utilise également des fonds du FONDEN, lequel a débloqué 8 917 460 000 MXN (entre 350 et 450 millions d’euros5) sur l’ensemble des États touchés pour la reconstruction des logements suite à ces deux tremblements de terre.

En parallèle à cette réponse gouvernementale, une entraide citoyenne, spontanée et de grande envergure, s’est mise en place, essentiellement dans la capitale.

À cela s’est ajoutée l’aide d’organisations privées, aussi bien nationales qu’internationales. C’est dans ce contexte d’aide privée qu’Arquitectos Artesanos a conduit ses projets de reconstruction qui seront détaillés plus loin dans ce mémoire.

1 Servicio Sismológico Nacional, UNAM., 2017, Reporte Especial : 7 de septiembre de 2017, Tehuantepec (M 8.2), 2017, p. 1

2 Depuis 1900, date du début des mesures des séismes dans le pays . Donnée obtenu du catalogue de séismes du Servicio Sismológico Nacional du Mexique.

3 Servicio Sismológico Nacional, UNAM., 2017, Reporte Especial : 19 de septiembre de 2017, Puebla-Morelos (M 7.1), p. 1

4 Présidence du Mexique, 2017

5 Nous donnons une fourchette car le montant en euros dépend du t aux de change.

14 I. C ONTEXTE

États affectés le 07/09/2017

États affectés le 19/09/2017

1 Mexico

2 État du Mexique

3 Morelos

4 Guerrero

5 Puebla

6 Oaxaca

7 Chiapas

8 Tabasco

Figure 3. Épicentres des séismes de septembre 2017 et les États affectés

Élaboration propre

Source: Site de la présidence du Mexique et SSN

Pictogramme : Earthquake by arif fajar yulianto from the Noun P roject

Impact des séismes à Oaxaca

Localisé entre les deux séismes, l’État de Oaxaca a été le plus affecté avec 65 044 logements touchés, ce qui représente 38% des logements comptabilisés par le recensement officiel comme endommagés par les deux séismes6 sur l’ensemble du pays.

La plupart des dommages se concentraient dans la región del Itsmo (sud-est de l’État) et dans la región Mixteca (nord-ouest de l’État). Les aides

gouvernementales, ainsi que celles provenant des initiatives privées (associations et entreprises), se sont très rapidement focalisées sur ces deux régions, en particulier sur la región del Itsmo à cause du fort impact du séisme du 7 septembre.

Le ministère de la Secretaría de Desarrollo Agrícola, Territorial y Urbano SEDATU (Ministère du Développement Agricole, Territorial et Urbain) a déclaré que la population touchée obtiendrait une indemnisation en fonction des dommages subis par

6 Selon le recensement officiel des logements affectés par les sé ismes du septembre 2017.

15 I. C ONTEXTE
Océan Paci que S7 07/09/2017 8.2Mw, 23h49 S19 19/09/2017 7.1Mw, 13h40 1 2 4 3 5 6 7 8
Golfe du Mexique

Source :

Source :

Pictogramme

Carte base : Site du SEDATU,

Pictogramme

16 I. C ONTEXTE Golfe du Mexique Océan Paci que S7 Oaxaca Chiapas Guerrero Puebla Morelos État du Mexique Mexico Tabasco S19 S7 S19 100 km Itsmo Sierra Norte Mixteca
Figure 5. Localisation de Oaxaca par rapport aux séismes Élaboration propre SSN : Earthquake by arif fajar yulianto from the Noun P roject Figure 6. Carte des régions de Oaxaca et des municipios affectés par les séismes 2017 : Earthquake by arif fajar yulianto from the Noun P roject Figure 4. Recensement officiel des logements affectés par les séismes de septembre 2017 Site du SEDATU, 2017

leur immeuble : dommage partiel ou perte totale. Ensuite, pour la reconstruction, qu’il s’agirait d’un processus d’auto-reconstruction « assistée », où les bénéficiaires pourraient acheter les matériaux et payer la main-d’œuvre grâce à l’argent reçu, et où des entreprises sociales offriraient un support technique à la population.7

SITUATION SOCIO-GÉOGRAPHIQUE DE L’ÉTAT DE OAXACA

Richesse culturelle, complexité géographique et administrative

L’État de Oaxaca se localise dans le sud du Mexique et est limitrophe, au nord, de l’État de Veracruz, au nord-ouest de celui de Puebla, à l’est de Chiapas, à l’ouest de Guerrero et au sud de l’Océan Pacifique. Avec une extension de 93 757 km2, il représente 4,8% de la superficie du Mexique et se place ainsi en cinquième position des États les plus grands du pays. La population est de 3 967 889 habitants et sa capitale est la ville de Oaxaca de Juárez.

Sa géographie est dominée par plusieurs chaînes montagneuses qui occupent une part conséquente de son territoire. La capitale Oaxaca de Juárez est sise plus ou moins au centre de l’État, dans une cuvette à 1 500 mètres d’altitude qui correspond à la région ethno-culturelle (voir ci-après) appelée à juste titre Valles Centrales. De part et d’autre de cette vallée se dressent des sommets : au nord et à l’est ceux de

la chaîne de montagne Sierra Madre de Oaxaca, qui donnent ensuite sur les plaines du nord de l’État de Oaxaca, et au sud et à l’ouest ceux de la chaîne Sierra Madre del Sur qui débouchent ensuite sur une plaine étroite bordée par l’océan Pacifique.

Cette contrainte géographique provoque une occupation territoriale très éparse — ce qui était déjà le cas à l’époque coloniale — et constitue un obstacle à l’intégration politique et sociale de la population. Cet éparpillement a conduit à la division politico-administrative la plus compliquée du pays : il s’agit de l’État ayant le plus grand nombre de municipios8, à savoir 570, soit un quart des municipios de tout le Mexique. Ce découpage excessif rend difficile la gestion des communautés par l’État de Oaxaca et par le pays, et a un impact sur l’application des politiques territoriales, sur le développement et sur la gestion des risques mais renforce en revanche la gouvernance au niveau local par des groupes et associations communautaires.

La densité de population est de 42 habitants par km2 sur l'ensemble du territoire de l’État mais sa distribution est très hétérogène. Elle est élevée dans une quinzaine de villes et faible, voire très faible, sur le reste de l’État : la moitié de la population habite dans des communautés de moins de 2 500 habitants, qui sont en majorité en zones rurales.

Oaxaca est également l’État avec la plus grande diversité ethnique et linguistique du Mexique. Les ethnies au Mexique sont reconnues en fonction de critères linguistiques. La Comisión Nacional para

7 SEDATU, 2017

8 Cellule basique de division territorial et d’organisation polit ique et administrative au Mexique selon l’article 115 de la Constitución de los Estados Unidos Mexicanos. En France, la division administrative la plus proche serait l e canton.

17 I. C ONTEXTE

el desarrollo de los pueblos indígenas (Commission Nationale pour le développement des peuples indigènes) reconnait actuellement soixante-huit (68) ethnies locutrices de langues indigènes sur la totalité du territoire mexicain. Sur celles-ci, seize (16) se trouvent dans l’État de Oaxaca :  amuzgo, chatino, chinanteco, chocholteco, chontal de oaxaca, cuicateco, huave, ixateco, mazateco, mixe, mixteco, nahua, triqui, zapoteco et zoque. 9 Il convient d’ajouter à ces seize ethnies les populations afro-mexicaines10 qui ne parlent pas de langues indigènes. Il faut d’autre part signaler que l’on peut trouver, dans une même ethnie linguistique, des variations dialectales créant depuis de petits problèmes de communication entre communautés d’une même ethnie jusqu’à une complète incompréhension. De ce point de vue, l’on pourrait considérer qu’existent à Oaxaca autant de cultures que de communautés (Ordoñez, 2000).

La distribution géographique de ces groupes ethniques ne suit pas de limites géographiques naturelles. Les territoires des grands groupes ethniques de Oaxaca s’étendent sur plusieurs types de géographies, de la côte et son climat chaud à la montagne et son climat froid. Cette condition induit l’utilisation de produits et matériaux différents par des populations distinctes d’une même ethnie — y compris pour la fabrication de l’habitat vernaculaire — et, par conséquent, influence la façon d’habiter. Toutes ces différences ont créé, depuis l’époque pré-hispanique, une complexe mosaïque d’ambiances et de cultures à Oaxaca ainsi qu’au sein de certaines ethnies.

Dans les années trente, une division en sept (7) régions

9 CDI, 2015

ethno-culturelles a été mise en place par le gouvernement dans le but de préserver les traditions. Cette division existe toujours, afin d’améliorer la planification de l’État, et compte désormais huit (8) régions :  Cañada, Costa, Itsmo, Mixteca, Papaloapam, Sierra Sur, Sierra Norte et Valles Centrales

93 343 km²

4,8% du territoire national

3 967 889 habitants

3,3% de la population nationale

570 municipios 23% du pays

Mixteca

Dans sa population...

32% parlent une langue indigène (moyenne nationale : 7%)

4% ne parlent pas espagnol

Costa

Source : Recensement INEGI 2015

10 Les afro-mexicains ne sont généralement pas reconnus au Mexique comme une ethnie. Cependant, l’Instituto Nacional de Estadística y Geografía (INEGI) a pour la première fois considéré l’ethnie afro-mexicai n lors de son recensement du 2015.

18 I. C ONTEXTE
Figure 7. Oaxaca au sein du Mexique : données statistiques Élaboration propre Figure 9. Division politico-administrative de Oaxaca : 570 municipios Source : INEGI 2010 Figure 10. Cartographie des ethnies indigènes à Oaxaca Source : CDI Figure 8. Relief de l’État de Oaxaca et pricipales villes Source : INEGI 2012
Oaxaca Divis ón
www.cuentame.inegi.org.mx Fuente: INEGI. Marco Geoestadístico Municipal 2010, versión 5.0 Nota: Las divisiones incorporadas en este mapa corresponden al Marco Geoestadístico del INEGI Pueb a Veracruz de gnac o de a L ave Ch apas Océano Pac ico Guerrero 50 25 75 Mazateco Náhuatl Itsmo Costa Valles Centrales Sierra Norte Cañada Papaloapam Sierra Sur Mixteca
Figure 11. Division territoriale de Oaxaca par régions ethno-culturelles Élaboration propre
municipal

SISMICITÉ DE L’ÉTAT DE OAXACA

Sur les dix-sept (17) plaques tectoniques que compte le globe, cinq (5) coupent ou longent le territoire mexicain : les plaques Nord-américaine, Caraïbe, Pacifique, Rivera et Cocos.

Lorsqu'une plaque océanique rencontre une plaque continentale, la plaque océanique, qui est plus dense, passe sous (subduction) la plaque continentale et plonge dans le manteau terrestre.

Pour cette raison, les plaques océaniques Rivera et Cocos s'enfoncent sous la plaque continentale Nord-américaine.

La plaque Rivera plonge au niveau des États de Jalisco et Colima, et la plaque Cocos au niveau des États de Michoacán, Guerrero, Oaxaca et Chiapas. Cette zone est appelée la zone de subduction mexicaine et il s'agit de la zone de plus haute sismicité du pays. Le territoire de Oaxaca est par conséquent constamment touché par des séismes.

On peut observer sur les figures page suivante, l'activité sismique du Mexique sur les trois dernières années et l'on peut constater que la plupart des épicentres se situent sous l'État de Oaxaca, et que ceux de plus fort magnitudes ont eu lieu dans les États de Oaxaca et de Chiapas.

NORD-ANDES

20 I. C ONTEXTE
COCOS
NORD-AMÉRIQUE RIVERA PACIFIQUE CARAÏBE PANAMA
Figure 12. Carte de plaques tectoniques au Mexique Source : SSN
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Figure 13. Sismicité au Mexique en 2015 Source : SSN Figure 14. Sismicité au Mexique en 2016 Source : SSN Figure 15. Sismicité au Mexique en 2017 Source : SSN Figure 16. Pendant le déchargement d’un approvisionnement de bois De gauche à droit : Marcos, Elba, moi, Tony et Eric Photo : Julio Rosas Avendaño

Mise en situation professionnelle

Deuxième partie

Au moment de définir un projet pertinent de mise en situation professionnelle, afin de mettre en pratique les connaissances acquises durant le DSA, j’ai pris en compte deux critères. Premièrement, je souhaitais mener ma pratique au sein de projets se déroulant sur le terrain. Les trois semestres du DSA furent très enrichissants et nous ont formés à différents sujets liés aux risques majeurs ainsi qu'à l’architecture coopérative et humanitaire, et j’avais donc une forte envie d’appliquer et transporter toutes ces connaissances théoriques au terrain et de passer à l’action. Deuxièmement, j’étais très fortement intéressée par un travail au sein de communautés défavorisées. Enfin, j’ai toujours été intéressée par le risque sismique et j’ai donc orienté mes recherches dans ces directions.

Au moment de mes recherches pour ma mise en situation professionnelle, mon pays vivait un épisode post-séisme. Je me rappelle très bien le moment où j’ai appris que le Mexique avait été frappé par le séisme du 7 septembre, l’un des plus puissants jamais enregistrés. Mes amis me racontaient leur vécu : ils n’avaient jamais ressenti de tremblement aussi puissant. J’ai regardé les informations et ai réalisé l’ampleur des dégâts causés. À peine deux semaines plus tard, un nouveau séisme faisait tomber plusieurs bâtiments à Mexico, ma ville d’origine. Cette fois-ci, ma première préoccupation fut de savoir si mes proches allaient bien. Les heures passèrent et je pouvais observer dans les médias une forte et spontanée mobilisation citoyenne. J’avais extrêmement envie de me rendre sur place et de me joindre à toutes ces actions de coopération. C’est six mois plus tard, dans le cadre de ma mise en situation professionnelle, que j’allais trouver l’opportunité de le faire.

J’ai contacté par email différentes agences travaillant sur des thématiques autour de l’architecture vernaculaire et des projets de reconstruction, dont l’agence Arquitectos Artesanos qui développe au Mexique des projets d’architecture traditionnelle avec des techniques et des savoir-faire locaux dans une zone à forte sismicité et l’une des régions affectées par les séismes. Je leur ai donc demandé si l’agence travaillait actuellement sur un projet de reconstruction et s’ils avaient un poste à me proposer. J’allais recevoir une réponse positive aux deux questions : ils avaient commencé en décembre un projet de reconstruction dans deux régions de l’État de Oaxaca et, si je le souhaitais, je pouvais rejoindre l’équipe. J’ai alors étudié ce projet et son adéquation avec mes critères de recherche, et j’ai rapidement décidé d’aller au Mexique pour m’installer à Oaxaca et mettre au plus vite la main à la pâte.

Ma mise en situation professionnelle s’est déroulée durant quatre mois, entre début mars et début juillet 2018, au sein de deux communautés rurales.

Dans cette partie du document, je décrirai mes missions et mes activités principales au sein de l’agence pendant ces quatre mois. Dans un troisième chapitre, j’approfondirai les sujets auxquels je me suis intéressée pendant cette mise en situation professionnelle.

24 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE

LA STRUCTURE D’ACCUEIL

Arquitectos Artesanos est un cabinet d’architecture mexicain basé dans la ville de Oaxaca, capitale de l’État du même nom, situé dans le sud-est du Mexique. Le cabinet a été fondé par Juan José Santibañez, il y a une vingtaine d’années.

Juan José Santibañez est un architecte âgé d'une soixantaine d'années et originaire de la ville oaxaquaine de Huajuapan de León dans la région Mixteca. Dans son enfance, il accompagnait son père, qui était marchand, dans différents villages de la région. C’est à cette époque qu’il a eu ses premiers contacts avec l’architecture vernaculaire. Au fils du temps, il remarque une rapide évolution de sa ville natale, influencée par des matériaux « modernes », qui ont commencé à arriver dans la région après la construction de la route panamericaine dans les années trente et conduit au « développement » de la ville. Très rapidement, sa ville va perdre son image traditionnelle, remplacée par des bâtiments commerciaux en béton. Il va noter aussi, mais toutefois a un rythme moins élevé, des changements au sein des petits villages qu’il visitait avec son père.

Une fois devenu architecte, il va décider de lutter contre cette perte d’identité régionale en exerçant l’architecture comme un métier artistique tout en revalorisant les savoir-faire de l’architecture vernaculaire.

Juan José et son agence travaillent en communication directe avec des artisans spécialisés : des peintres,

des maçons, des charpentiers et des menuisiers qui maîtrisent des techniques de construction vernaculaires, ainsi qu’avec des producteurs artisanaux de matériaux de construction.

L’agence, se développe des projets privés mais également des projets sociaux qui y représentent un pôle très important. Ces derniers ont pour objet le renforcement des liens de différentes communautés avec leur environnement et leurs traditions, qui ont tous deux été souffert au cours des dernières années à cause d'influences extérieures.

Les principes de Juan José et son équipe sont, pour citer ses propres mots (traduits de l’espagnol11) : « retrouver l’origine de l’architecture comme une expérience communautaire et en dialogue avec les rythmes naturels et culturels de chaque site. C’est pour cette raison que nous travaillons avec des connaissances et matériaux locaux. Nous entendons faire une architecture qui naît du site, des gens, des coutumes [...] nous aspirons à être comme les anciens Tlayoltehuani, terme qui en náhuatl12 signifie celui o celle qui, avec son cœur, fait des choses divines. »

Projets sociaux représentatifs13

Mujeres de arcilla (Les femmes d’argile)

En 1999, un projet social est né de la volonté et de l’initiative de seize femmes originaires de San Miguel Amatitlán (région Mixteca de Oaxaca) qui se sont rapprochées de l’architecte Santibañez pour lui demander des conseils afin de construire leurs

11 Depuis http://arquitectosartesanos.org/site/nosotros.

12 Langue amérindienne. C’est la langue indigène la plus parlée du Mexique avec 1,58 millions de locuteurs selon le recensement d e l’INEGI de 2010.

13 Informations complémentaires disponibles en espagnol sur le sit e de l’agence.

25 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
26 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Projet Mujeres de arcilla De haut en bas, de gauche à droite Figure 17. Excavation Figure 18. Fabrication des adobes Figure 19. Moulage et séchage des adobes Figure 20. Suivi de chantier Figure 21. Pose de tuiles Figure 22. Maison terminée Photos : Marcela Toboada © Arquitectos Artesanos

maisons.

Un travail d’équipe a été mis sur pied entre les femmes et l’architecte. Les premières se sont organisées afin de réaliser elles-mêmes les travaux du chantier, en s’entraidant. La mission de l’architecte, quant à elle, était de diriger et de suivre le chantier ainsi que de concevoir les logements. Pour se faire, il s’est basé sur le modèle des maisons traditionnelles tout en apportant quelques modifications afin de les optimiser.

La construction des maisons a été réalisée sur deux années grâce à l’effort conjoint des deux parties au projet. Celui-ci a utilisé techniques de construction, ressources et matériaux locaux, avec un budget très modeste.

Ce premier projet est à l’origine du pôle de projets sociaux qui s’est alors développé au sein de l’agence.

La Casa de Chiname (La maison Chiname)

Le plus représentatif de ces projets sociaux est le séminaire permanent d’auto-construction : «  La Casa de Chiname ».

Ce projet est ouvert et propose – à toutes les personnes intéressées par l’auto-construction, les projets participatifs et les techniques de construction vernaculaires – de participer à des ateliers et des chantiers de courte durée dans la région Mixteca.

Le projet doit son nom au type le plus humble de maisons vernaculaires construites dans les montagnes de la région : une cabane avec des parois en roseau et une toiture en jonc ou paille.

Les communautés rurales du Mexique se trouvant, malheureusement, souvent dans une situation

d’abandon et de précarité, le but, à travers les actions du projet, est d’améliorer la qualité de vie des personnes dans ces situations tout en mettant en avant leurs traditions et leurs connaissances constructives d’antan.

Suite aux séismes du septembre 2017, la Casa de Chiname englobe le nouveau projet «  Reconstruir desde la tierra ». Étant donné que celui-ci demande beaucoup de temps et de ressources, humaines et matérielles, les ateliers de courte durée furent mis en pause.

27 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Projet La Casa de Chiname Figure 23. Volontaires sur le chantier Photo : Mario Martínez Ledezma © Arquitectos Artesanos

Structure de l’agence

Juan José Santibañez

Architecte fondateur et directeur

Edgar Mota Pacheco

Architecte administrateur sur les chantiers

Victor Uribe León

Architecte conducteur des travaux sur les chantiers

Benjamín Ramiro Cortéz

Architecte dessinateur projeteur

Ángel Félix Rámirez Carmona

Architecte dessinateur projeteur

María Yelaui Santibañez Rodríguez

Architecte projetrice et coordinatrice du projet de reconstruction de la Sierra Mixe

Sol Santibañez Rodríguez

Dessinatrice d’objets et administration

Damián Leverkus

Architecte projeteur et coordinateur des projets de Pluma Hidalgo

Mario Mártinez Ledezma

Architecte projeteur et coordinateur des projets de la Sierra Mixteca

Équipe d’architectes

Collaborateurs

Alberto Martínez

Producteur de brique rouge

Antonio López

Maçon en chef

César Chávez

Agronome, spécialiste en paysage

Fernando Padilla

Dessin industriel

Ignacio Sánchez

Charpentier

Pedro Fernández Bautista

Spécialiste en polissage des surfaces

Severo Ramírez

Spécialiste en bauge (Mur Bláa)

German Santos y Edu Luna

Forge

Adrián Mártinez

Plombier–électricien

Juan Pablo Acevedo

Ingénieur structures

entre autres...

28 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE

Principes de confortement parasismique appliqués par l’agence sur des habitations en terre

Travail structural de la terre et principaux dommages rencontrés suite à un séisme

Pour effectuer une intervention appropriée, il faut dans un premier temps comprendre les systèmes constructifs en terre.

Les constructions en terre travaillent structurellement en compression. Il s’agit de murs porteurs où les charges provenant de la toiture et celles de leur propre poids (charges statiques) descendent verticalement tout le long de ceux-ci, vers les fondations. C’est pour cette raison qu’il s’agit de murs épais (plus de 40 cm).

Quand un séisme se produit, les constructions sont soumises à des sollicitations multidirectionnelles (charges dynamiques). Les murs supportent, en plus de leurs propres charges verticales, des charges perpendiculaires à leur plan. Les dommages les plus fréquemment causés par un séisme sur les constructions en terre sont des fractures verticales dans les angles et des chutes de parties de mur. Les premières vont apparaître, lors d’un séisme, si les coins ne sont pas correctement joints et assemblés. Les secondes se produisent si les murs dépassent un rapport « épaisseur sur hauteur » de sept. Les parties supérieures des murs sont alors susceptibles de tomber. De plus, la partie triangulaire au sommet des murs pignons n’ayant pas d’appui transversal, elle est plus fragile et risque également de tomber lors d’un séisme.

Une partie non négligeable des dommages sont liés à une mauvaise mise en œuvre (défauts dans la fabrication des adobes, mauvais appareillage

P S P
Figure 24. Transmission de charges d’un système en murs porteurs Figure 26. Décente de charges dans un mur en terre
muro divisorio muros de carga viga o trabe Columnas o Castillos
Figure 27. Désarticulation des angles lors d’un séisme

des briques), à un manque d’entretien ou à des interventions imprudentes.

Principes de confortement appliquées par l’agence

Les deux principes de base pratiqués par l’agence sont, le renfort horizontal et le chaînage.

Les renforts horizontaux dans les coins, appelés « agrafes », évitent la séparation des murs au niveau des coins et des jonctions en « T », et évitent ainsi le décollement et la chute de murs lors d’un séisme.

Les agrafes peuvent être de grandes pièces de pierre, des briques ou des pièces en béton armé, et font la longueur de deux pièces d’adobe de chaque coté du mur.

La mise en place d’un chaînage dans la partie supérieure du mur va, elle, aider à une bonne répartition de la descente de charges et à distribuer les efforts de façon uniforme sur tous les murs en cas de séisme. Les éléments de la charpente vont s’appuyer directement sur le chaînage assurant ainsi un meilleure continuité entre la toiture et le mur. Le chaînage peut se faire avec des poutres en bois ou en béton armé.

Ainsi, l'ensemble de ces principes permet à la construction de travailler comme un seul élément et évite que ses différentes composantes ne se désolidarisent.

Figure 31. Agrafage en béton armé à l’intersection des murs
muro divisorio muros de carga viga o trabe Columnas o Castillos
Illustrations : María Santibañez © Arquitectos Artesanos Figure 29. Intervention couramment appliqué hybridant des systèmes en portique de béton armé et en terre

MES MISSIONS

Dès mon arrivée à l’agence, j’ai eu mon premier entretien en personne avec le directeur de l’agence afin de définir mes missions. Le projet de reconstruction est réalisé dans deux régions : la région Mixteca et la Sierra . Jusque là, j’avais été en contact principalement avec la dessinatrice d’objets de l’agence, chargée également de quelques questions administratives, qui m’avait dit que je pourrais travailler sur le projet de la Sierra Mixe. Cependant, l’agence essayait précisément ces jours-là d’effectuer une réorganisation des tâches dans l’autre région. L’architecte coordinateur pour la Mixteca avait de multiples responsabilités à sa charge : chaque semaine il devait faire le tour des trois villages sur lesquels l’agence intervient, ce qui représente entre quatre et cinq heures de déplacement aller-retour pour chaque village, où il avait des réunions avec les architectes conducteurs de travaux14 sur place et vérifiait l’avancement des chantiers, il devait aussi s’occuper de questions administratives et logistiques telles que l’approvisionnement hebdomadaire en matériaux et, pour finir, lui-même était l’architecte conducteur de travaux de l’un des villages. On me propose donc d’aller là-bas afin de réduire sa charge de travail en prenant le poste d’architecte conductrice de travaux dans le village de Tezoatlán. J’allais passer trois mois sur place, où le travail était de consolider des logements endommagés principalement par le manque d’entretien et par de plus anciens séismes. Pour mon dernier mois de stage, j’allais demander à être envoyée au village de Zacatepec, situé dans la dans Sierra Mixe où la reconstruction portait sur des dégâts consécutifs aux deux séismes de 2017.

14 Au Mexique, il existe le poste d’Arquitecto residente de obra. À la différence des suivis de chantier en France, au Mexique un arch itecte doit être sur place à plein temps. Je traduis ce terme en franç ais par « Architecte conducteur de travaux ».

1 Oaxaca de Juaréz

2 Huajuapan de Léon

3 Mariscala de Juaréz

4 Tezoatlán de Segura y Luna

5 Santiago Zacatepec

31 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
1 Oaxaca de Juaréz 2 Huajuapan de Léon 3 Mariscala de Juaréz
1 5 2 3 4
4 Tezoatlán de Segura 5 Santiago Zacatepec
Sierra Norte Mixteca
Villages du projet Villages du projet Figure 32. Villages du projet Reconstruirdesdelatierra Pictogramme : Map Marker by Kaique Amorim from the Noun Project
1 5 2 3 4
Mixteca
Sierra Norte Villages du projet Villages du projet - MSP

Les chantiers au premier village : Tezoatlán de Segura y Luna

Durant les trois mois dans ce village, mon travail en tant qu’architecte conductrice de travaux s’est focalisé sur des missions propres à l’organisation et au suivi de chantiers : réaliser des relevés, faire les démarches administratives nécessaires pour l’approvisionnement en matériaux commerciaux (gravier, sable, chaux, ciment, bois, etc.), trouver la façon d’approvisionner le chantier avec les matériaux locaux (terres, excréments d’âne et de cheval, roseaux, bois, etc.), être sur le chantier, ainsi qu'élaborer des compte-rendus hebdomadaires. Pour la prise de décision concernant les chantiers, toute question technique devait passer par Mario, l’architecte coordinateur de la région. À cette fin, il assurait au moins une visite par semaine par chantier.

Ces chantiers avaient pour objet le renforcement d’habitations vernaculaires endommagées par des séismes antérieurs à ceux de septembre de 2017, le manque d’entretien, des interventions incompatibles avec la construction d’origine ou bien liés à des défauts de construction, dus à la perte des connaissances sur les constructions traditionnelles et les savoir-faire locaux, ce qui est de plus en plus fréquente comme nous l'avons déjà mentionné.

Ce travail à été très enrichissant dans la mesure où j’ai pu approfondir sur la question du confortement parasismique dans des constructions vernaculaires, principalement sur des habitations en terre crue. Également, parce que j’ai eu l’opportunité de travailler au côté de maçons et d'ouvriers sur le chantier, ce qui m’a permis d’établir une relation d’apprentissage réciproque avec eux. J’ai aussi pu établir des contacts

avec des villageois qui conservaient encore des savoir-faire locaux.

La maison de Don Amancio

Il s’agit d’une maison de plus de quatre-vingts (80) ans, située à la sortie de Tezoatlán, sur le chemin menant au cimetière. Cette habitation a été abandonnée après que son ancien propriétaire et constructeur est décédé. Durant trente ans, ses murs sont restés exposés aux intempéries, sans toit les protégeant ni entretien.

En 2017, les nouveaux propriétaires avaient l’intention de la démolir afin de construire à cet emplacement une épicerie en parpaing.

À l’époque, l’agence avait fini la restauration d’une grande hacienda dans le centre-ville du village et elle organisait en permanence des séminaires de La casa de Chiname à Tezoatlán. Cela faisait quatre ans qu’un architecte était sur place dans le cadre de la réalisation de ces projets. L’agence avait donc déjà une place importante au sein du village et elle allait réussir à intervenir auprès des propriétaires afin de conserver cette habitation et de la restaurer avec des techniques traditionnelles.

L’agence va alors démarrer la restauration durant l’un de ses ateliers de construction de courte durée avec un groupe d’étudiants en architecture. Les volontaires ont fabriqué des adobes et ont rehaussé le niveau de la maison, ils ont également posé des agrafes de renforcement en brique au quatre coins de la maison. Des maçons ont fini cette première intervention avec la coulée d’une poutre en béton sur tout le périmètre des murs, comme chaînage.

32 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE

Je suis arrivée au début de la deuxième phase de la reconstruction. Au niveau de la charpente, des fermes en acier venaient d’être montées ainsi que la panne faîtière.

Suivi de chantier, main-d’œuvre : étudiants CRAterre

Pendant le premier mois du chantier, j’ai eu l’opportunité de collaborer avec deux étudiants du DSA « Architecture de terre », Jean et Manu, qui travaillaient en tant que maçons avec l’agence, dans le cadre de leur mise en situation professionnelle. Leur mission durant ce mois était de construire les murs d’une nouvelle extension de la maison d’origine, qui servirait de salle de bains. Pour cela, ils ont fabriqué deux-cents (200) adobes en utilisant la terre du terrain, ils ont bâti une fondation en pierre pour recevoir les murs et ils ont monté les murs avec les

adobes réalisés.

J’ai eu l’occasion de participer au chantier avec eux et, par conséquent, ils m’ont transmis des connaissances sur les constructions en terre. J’ai eu ainsi un premier contact avec cette matière : j’appris à identifier ses différents composants et que la proportion de ceux-ci peut varier énormément d’une terre à une autre. De ce fait, on ne construit pas de la même manière avec toutes les terres, chacune a ses propres qualités et limites. Pour bâtir avec la terre d’un site en particulier, on peut soit suivre une méthodologie essai-erreur afin de déterminer les bonnes proportions de cette terre avec les autres matériaux pour la fabrication d’adobes et des autres systèmes constructifs, soit découvrir les savoir-faire locaux à travers l’identification de leurs détenteurs.

33 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 33. État de la maison de Don Amancio à mon arrivée à Tezoatlán Photo : Auteur

Concernant la construction avec des adobes, ils m’ont montré comment les poser et les appareiller, comment assurer la verticalité du mur pendant sa construction, comment préparer du mortier et comment effectuer une bonne application de celui-ci.

Il me parait important de signaler que nous avons ressenti que notre présence et notre travail sur le

chantier, en tant que personnes étrangères au village mais aussi du fait de notre approche axée sur notre intérêt pour les constructions locales – plutôt que sur nos connaissances concernant les risques et les constructions en terre – a attiré l’attention des villageois et les a rendus curieux quant à notre intérêt pour les constructions anciennes de ce petit village. Ils s’approchaient de nous pour nous poser des questions sur la reconstruction, quelques-uns nous donnant des conseils en permanence, d’autres se souvenant de l’époque où tous habitaient dans des maisons comme celle-ci, en nous disant que ce type de maisons étaient plus fraîches que les nouvelles constructions en béton et bien d’autres commentaires.

Cette même curiosité va se développer chez un chef-maçon de Tezoatlán, Poncho, avec qui l’agence travaille depuis quatre ans. Il s’agit d’un homme qui a vécu aux États-Unis et qui, à son retour, a décidé d’exercer le métier de maçon. Très rapidement, il va devenir l’un des plus importants de la région grâce à la qualité de son travail. Cependant, il ne travaillait à l’époque et comme la plupart des maçons de nos jours, que dans la construction de nouvelles habitations en parpaing ou béton. Quand je suis arrivée, cela faisait déjà un moment que l’agence travaillait avec lui et avait commencé à le former dans des techniques traditionnelles de construction. Il était très curieux et reconnaissait l’importance de récupérer les connaissances et les savoir-faire locaux. Avec nous, il s’est toujours montré intéressé par ce que nous pouvions apporter sur le sujet.

34 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 34. Pose d’adobes avec du mortier terre-sable Photo : Auteur

PROYECTO DESPUÉS DE LOS SISMOS DE 2017

PROYECTO

DE LOS SISMOS DE 2017

35 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
SIERRA MIXE Y MIXTECA BAJA CASA 03 DOÑA JUANITA C A 5.38 1.85 0.25 3.93 0.80 0.45 10.63 1.93 8.70 0.95 0.40 1.20 0.30 1.50 Corredor N.P.T ±0.00 Acceso 2.81 1.15 0.95 1.15 7.23 1.98 0 1 10.63 1.20 0.45 3.65 4.60 2 10.65 10.35 1.43 8.70 0.45 C B A 7.23 7.58 0.90 2.62 2.17 0.45 0.60 5.38 1.85 0.25 0.60 B Tienda Sala Cocina/Comedor Recámaras Baño Acceso Acceso 8.25 N.P.T -0.02 4.93 7.58 0.65 0.60 1.15 2.40 3.20 3.05 1.50 4.93 1.50 Jardín Jardín N.P.T -0.17 N.P.T +0.13 N.P.T -0.15 N.P.T -0.02 PLANTA ARQUITECTÓNICA ESC: 1:50 ÁREA CONSTRUIDA: 97.4m2
SIERRA MIXE Y MIXTECA BAJA CASA 03 DOÑA JUANITA Calle Corredor Jardín CORTE Y-Y` ESC: 1:75 PEND. 30% PEND. 30% N.P.T±0.00 N.P.T±0.40 N.P.T±2.85 N.P.T+2.20 N.P.T+1.94 N.P.T -0.17 1.00 0.65 0.64 0.64 0.64 0.64 0.65 C B A 7.27 1.85 5.42
DESPUÉS
Figure 35. Projet proposé par l’agence Projet  : Mario Martínez Ledezma © Arquitectos Artesanos

in

locaux. Ceux - ci préparent le mur pour recevoir une couche d’enduit ou, s'il n'y a pas de pose d'endui t, ralentissent l’eau de pluie et l’érosion des murs causés par celle-ci. Les tuiles sur la gauche, dans la partie haute du mur, furent posées comme ouvertures de ventilation.

36 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 36. Assemblage du mur d’origine et du nouveau mur Trois adobes différents :  adobe d’origine (en bas à droite), adobes fabriqués et posés lors d’un séminaire Chiname (en haut à droit e), adobes fabriqués par étudiants CRAterre (à gauche) Figure 37. Murs de la salle de bains terminés Le détail des morceaux de tuile à la jonction des adobes est spiré d’exemples Photos : auteur

Atelier d’enduits en terre

Les enduits en terre ne sont pas utilisés à Tezoatlán. Traditionnellement, soit les adobes des habitations restaient apparents, soit celles-ci étaient recouvertes de chaux. De nos jours, le ciment est couramment utilisé pour enduire les logements. Cela est très mauvais pour les murs en terre car, bien qu’ils aient la propriété de réguler l’humidité, le ciment est un revêtement étanche qui les empêche de rejeter la vapeur d’eau et provoque des pathologies à l’intérieur des murs, telles que de l’érosion dans la partie basse du mur. Cela les rend très vulnérables face aux séismes car cela affaiblit les capacités portantes.

Afin de profiter de la curiosité des habitants et des maçons, Jean et Manu ont proposé d’organiser un atelier d’enduits sur ce chantier.

L’objectif de l’atelier était de faire face aux problèmes causés par l’utilisation d’enduits en ciment dans la région en sensibilisant différents publics (architectes, maçons, villageois, propriétaires) sur les risques de ne pas permettre aux murs en adobe de respirer, en leur faisant découvrir les revêtements en terre et leurs avantages, en formant les maçons pour qu’ils reprennent ce chantier avec des connaissances sur le sujet mais surtout pour qu’ils puissent les utiliser sur d’autres chantiers dans le futur.

Nous avons alors fait un travail de préparation en amont. Nous avons fait des tests, avec la terre du terrain mais également avec d’autres terres des alentours qui nous ont attirés par leurs couleurs, afin de trouver les bonnes proportions pour les enduits. Nous allions montrer trois différentes couches d’enduit : de nivellement, de finition et de

Différents

37 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 38. Préparations en amont de l’atelier d’enduits mélanges à mettre dans la grille de proportions Photo : Jean Viton Figure 40. Manu (bas) et Jean (haut) posent la couche d’enduit de finition après le test de proportion Elle devait être sèche pour poser un « sgraffito » le jour de l’atelier Photo : auteur Figure 41. Test et préparation de la structure du torchis Ossature bois-roseau, 4 volumes de terre en état liquide, 1 volume de crottes d’âne non tamisées, 2 volumes de paille Photo : Emmanuel Stern Figure 39. Résultats de la grille de proportions Proportions pour la 2è couche d’enduit  : 1 volume de terre humide, 3 volumes de sable, 2 volumes de crottes d’âne Photo : auteur

décoration. Nous avons donc posé des couches des premiers enduits afin que les participants puissent poser sur celles-ci les couches suivantes le jour de l’atelier.

Deux sessions de l’atelier furent organisées. Pour la première session, les architectes travaillant sur la reconstruction dans d’autres villages de la Mixteca sont venus, ainsi que Mario l’architecte coordinateur de la région. Ont participé également Poncho le chef-maçon, Don Memo le charpentier, le propriétaire Don Amancio et ses filles Doña Irma et Doña María, Don Beto, un villageois qui a coinseillé Jean et Manu pendant la fabrication des adobes avec les savoir-faire qu’il conserve encore et, finalement, un maçon qui ne fait pas partie de l’équipe de Poncho, mais qui a entendu les rumeurs de cet atelier et a décidé de venir.

La deuxième session fut consacrée aux artisans maçons. Quelques maçons de l’équipe de Poncho et lui-même sont venus. Les architectes du village Mariscala (un village à 2h de Tezoatlán) ont également amené certains de leurs maçons et un producteur d’adobes. Une architecte hollandaise, volontaire à ce moment dans l’agence, est également venue.

L’atelier consistait en une partie de présentation des participants, une partie théorique pour expliquer brièvement les composants de la terre, la capacité des murs en adobe à réguler l’humidité et les risques de les empêcher de réaliser ce travail en utilisant des enduits en ciment. Puis une explication sur comment faire des preuves avec de la terre d’un terrain quelconque afin de trouver une bonne formule à utiliser comme enduit. Les participants auraient ainsi la base pour faire eux-mêmes leurs propres preuves dans le futur, tant pour des enduits comme pour d’autres techniques

de construction en terre.

Pour la partie pratique, nous répartissions les participants sur les différents postes d’activités, l’idée étant que tout le monde participe à l’ensemble des activités. À chaque poste, ils rentraient d’abord en contact avec la matière en préparant les formules correspondant aux différentes couches d’enduit. Ils la mélangeaient avec les pieds ou les mains. Ensuite, ils l’appliquaient sur les murs selon la technique appropriée à chaque couche.

Pour le deuxième atelier, un poste a été ajouté : une structure en torchis afin de présenter aux maçons ce système constructif.

Les deux ateliers se sont déroulés dans une ambiance très agréable et décontractée. Nous avons clôturé les deux ateliers avec un repas sur le chantier.

38 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 42. Repas clôturant l'atelier Photo : auteur
39 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 45. Moi, en charge du poste « sgraffito » Application à la truelle de la 3è couche d’enduit Photos : Auteur Figure 46. Tour d’inspection des dommages dans le village Mur délabré du fait de l’utilisation d’un enduit en ciment Figure 43. La partie théorique, le jour de l’atelier pour maçons Tour de présentation des participants Figure 44. Poste de couche d’enduit de nivellement Préparation du mur avant la pose de l'enduit

De gauche à droit, de bas en haut

Figure 47. Architecte participant taillant la couche de terre de la frise

Pour le dessin de la frise nous nous sommes inspirés d'un agave planté en face de la maison

Figure 48. Maçon posant l’enduit de finition

Figure 49. Maçon posant l’enduit de finition

Figure 50. Des maçons remplissant l’osature du torchis

Ils utilisent un mélange de terre humide et de paille

Figure 51. Préparation de l’enduit de finition

Pieds nus, deux architectes et Poncho mélangent la formule

Figure 52. Préparation d’enduit du nivellement

Doña María, la fille du propriétaire bat la formule pieds nus

Photos : auteur

40 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE

Suivi de chantier, main-d’œuvre : des maçons locaux

Sur les deux mois suivants, j’ai travaillé avec l’équipe de maçons de Poncho. Durant cette période, j’ai continué à participer de temps en temps au chantier.

Les objectifs suivants, pour la maison de Don Amancio, étaient de bâtir les colonnes et monter la poutre du couloir extérieur, de poser la charpente, de percer les ouvertures des fenêtres et la porte d’accès à la salle de bains pour finalement revêtir la maison.

Un autre principe de l’agence dans la reconsolidation d’habitations traditionnelles est la récupération et

Profilé U

Panneaux contreplaqué

réutilisation de matériaux afin de respecter au maximum les pièces d’origine. Pour la charpente de cette habitation, nous avons utilisé quelques chevrons récupérés de l’ancienne toiture et d’autres neufs pour ceux qui avaient été complètement endommagés. Avant de les monter et afin de les protéger contre l’humidité et les insectes, les premières ont été curées par le charpentier selon la technique locale : l’immersion dans une bassine d’eau bouillante contenant des herbes amères. Pour les deuxièmes, nous avons réalisé la technique de bois brûlé. Les chevrons sont ancrés par le bas au ferraillage du chaînage avec du fil de fer et sont reçus en haut par un profilé U soudé à la panne faîtière.

Tuile en terre cuite Plafond en roseau

Parpaing Chevron 3"

Fil de fer

Béton

Ferraillage 4 tiges Ø 3/8" cadre Ø 1/4"

Peinture à la chaux

Enduit chaux 20mm

Enduit terre-paille 30mm

Bloc d'adobe 40 x 25 x 10

Mortier terre-sable

Sousbassement en pierre maçonnée

Carrelage en argile cuite

Dalle en béton 5cm

La toiture se compose de panneaux en contreplaqué pour le plafond de l'intérieure de la maison et de roseau pour celui du couloir extérieur. Ces éléments sont cloués à la charpente, puis recouverts par une couche d’étanchéité en carton bitumé et des tuiles sont posées par-dessus comme couverture. L'une des modifications appliquées par l’agence aux toitures traditionnelles, mis à part l’emploi du carton bitumé, est l’utilisation d’un mortier à la chaux afin d'éviter le glissement de tuiles. Celui-ci est appliqué sous les tuiles du courant, de façon à les fixer au plafond. Il est également utilisé pour coller les tuiles du couvert toutes les six ou sept rangées.

En ce qui concerne les revêtements, le mur d’entrée a été enduit de terre car il était protégé par le toit du couloir.

À l’intérieur, les deux murs pignons ont été également enduits avec de la terre. Les trois murs extérieurs restants ont été enduits à la chaux.

Pour cette deuxième partie du chantier, Don Beto, un paysan d’environ 50 ans, m’a suivi avec des conseils sur les techniques de construction locales ainsi que dans l’obtention de matériaux non commerciaux.

41 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Panne faîtière 2 tubes rectangulaires 2x4" Figure 53. Coupe de détails constructifs
42 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 55. Pose des chevrons À droite, ceux réutilisés. À gauche, les neufs. Figure 54. Colonnes et poutre du couloir extérieur Figure 56. Pose du plafond Panneaux de contreplaqué et roseau Figure 57. Pose des tuiles et du carton bitumé Fixation des tuiles avec du mortier à la chaux Photos : auteur
43 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Photos en haut : auteur ; photos en bas : Mario Martínez Ledezm a Figure 60. Enduits et ouvertures de ventilation Figure 61. Enduits en terre à l’entrée Figure 59. Pose de l’enduit de nivellement Figure 58. Début du percement sous le linteau posé préalablement

La maison de Doña Juanita

Il s’agit d’une parcelle familiale sur laquelle on trouve plusieurs habitations : la pièce principale, constituant le dortoir de Doña Juanita et sa fille ainsi qu'un salon, est une construction traditionnelle bâtie par son père. On trouve également deux nouvelles constructions en parpaing, l’une est l’habitation de son fils et de sa famille, l’autre est un dortoir additionnel. La cuisine, est un espace partagé entre elle et sa belle-fille, ouverte sur le patio et couverte par des tôles. Chaque famille a sa propre salle de bains. Sur la parcelle, il y a une autre construction en adobe qui appartenait à son oncle et que son fils vient d’acheter pour la démolir afin de créer une place de parking.

La pièce principale manquait d’entretien essentiellement au niveau de la toiture. Les tuiles étaient déjà déplacées et sans protection étanche. Quelques voliges avaient subis des dégâts et d’autres avaient pourris. La mission serait de démonter tuiles et voliges afin remplacer les éléments endommagés, curer les voliges, poser une couche de carton bitumé comme étancheité et reposer les tuiles en les fixant avec du mortier. Au

moment de l’inspection de la charpente, nous avons constaté qu’une partie de la panne faîtière avait été rongée par les termites et qu’elle ne pouvait plus supporter les charges de la toiture. Nous avons donc du démonter également les chevrons afin de la remplacer.

En ce qui concerne les murs, nous avons constaté que plusieurs couches de peinture à l’huile les couvraient. Nous avons alors décidé d’enlever ces couches empêchant le mur de jouer son rôle de régulateur d'humidité et de les repeindre avec de la peinture à la chaux. Cette peinture à été préparée selon les techniques locales : en ajoutant du nopal (figuier de Barbarie). La bave de ce cactus rend la peinture plus fixante et évite que l’on se tache avec de la chaux en s’appuyant sur le mur.

Doña Juanita était sceptique quant à la peinture à la chaux. Elle nous a proposé de payer une peinture commerciale, car elle pensait que notre choix été lié à une question budgétaire. De plus elle ne voulait pas des murs blancs. Nous lui avons expliqué les réelles raisons de cette décision et que nous pouvions peindre avec de la chaux selon ses

44 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 62. Remplacement de la poutre faîtière Figure 63. Pose des chevrons Figure 64. Pose de voliges
45 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Photos : auteur Figure 69. Façade d’accès Figure 68. Première couche de peinture blanche Figure 70. Premiers meubles Figure 65. Pose de tuiles Figure 66. Grattage de la peinture à l’huile Figure 67. Préparation de la peinture à la chaux

goûts. Sur la façade extérieure nous avons peint une frise avec des motifs de vélos car son fils est réparateur de vélos.

À la fin de ce chantier son fils s’est rapproché de nous pour nous demander une intervention sur la maison en adobe que jusqu’au mois précédent, il avait l’intention de démolir.

46 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Photo : auteur Figure 71. Habitation traditionnelle du fils de Doña Juanita Elle est à l'abandon depuis déjà quelques années

Relevé de la maison de la famille Luengas

Pour mon dernier mois, j’ai été également assigné à faire le relevé de la maison de Rubén Luengas, un musicien originaire de la ville de Mexico, dont les parents sont originaires de Tezoatlán.

Il a toujours été très investi dans les affaires du village, il promeut énormément la culture locale et a créé une école de musique il y quelques années en centre-ville du village. Sa famille possède une grande maison traditionnelle qui a subi des modifications au cours du temps afin de l’adapter à de nouveaux usages. La famille a fait toutes les modifications en essayant de respecter au maximum les traditions architectoniques et en suivant les techniques de constructions locales. Néanmoins, elle a fini par être constituée en bonne partie des éléments étrangers. De nos jours les parents de Rubén logent dans deux dortoirs construits à côté de l’habitation d’origine, mais cette dernière n’est plus utilisée que quelques jours par an. Rubén s’est par conséquent rapproché de l’agence afin de mettre sur pied un projet de reconsolidation, de nettoyage des éléments et volumes non originaux et de transformation de la maison en un musée de la musique régionale et folklorique.

À cet effet, j’ai effectué un relevé de l’état actuel de la maison. Pendant cette mission je me suis chargée de faire un relevé très précis, afin de comprendre et d'étudier les éléments architectoniques des habitations traditionnelles. Cela m'a permis de mieux comprendre les cultures constructives locales.

47 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 73. Volume de la salle à manger Figure 72. Exposition d'instruments musicaux dans la salle principale
48 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE
Figure 74. Notes graphiques du relevé Illustrations  : auteur Détail de toiture Détail de colonne d'adobe Coupe transversale au niveau du porche Coupe longitudinale au niveau de la transition toilettes - salle principale Coupe transversale de la salle principale

Coupe transversale 1/150

Plan du Rez - de - Chaussée 1/150

Pièces ajoutées à la maison d’origine

Coupe longitudinale 1/150

49 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE Y1 X1 X1 Y1 X1 X1 Y1
Figure 75. Plans du relevé de la maison Luengas

L’identification de possibles bénéficiaires du programme de reconstruction dans le deuxième village : Santiago Zacatepec

Pour mon dernier mois de stage, je vais demander à être envoyée au village de Santiago Zacatepec, dans la Sierra Mixe. Bien que j'ai eu, dans la Mixteca et plus particulièrement à Tezoatlán, mon premier contact avec les cultures constructives vernaculaires, les constructions en terre, le confortement parasismique dans des habitations traditionnelles, ainsi que avec différentes acteurs et phases du projet de reconstruction, j’ai voulu continuer à m’enrichir avec d’autres exemples de fabrication de l’habitat vernaculaire de l’État de Oaxaca. D'autant que j’ai considéré qu'il me manquait encore à comprendre la globalité de ce projet. De plus, j’avais entendu dire que l’équipe de travail de la Sierra Mixe se confrontait à une multitude de contraintes très particulières et différentes de celles de la Mixteca. Pour ces raisons, j’avais un intérêt particulier à être envoyée là-bas.

L’équipe de travail était la même depuis le démarrage du projet en décembre 2017. La coordination se faisait à distance, depuis la base de l’agence dans la ville de Oaxaca, pendant que quatre architectes sur place menaient les travaux et étaient en contact direct avec la mairie et la population. Trois architectes faisaient les suivis de chantier et un quatrième était chargé de l’administration et des commandes de matériaux. N’ayant donc un poste pour d'architecte conductrice de travaux pour moi, la coordination m’a demandé d’identifier de possibles bénéficiaires pour le projet de reconstruction.

Suite aux séismes, la mairie avait fait un recensement des habitations endommagées. Les habitations

avaient été classées selon leurs dommages de la façon suivante : partiellement endommagée, encore habitable; endommagée partiellement, non habitable; totalement endommagée, perte totale. À partir des résultats obtenus, la mairie avait sélectionné trente-quatre (34) habitations totalement endommagée (perte totale) pour bénéficier du projet de reconstruction. Le reste des critères de sélection étant inconnus de l'agence.

Suite à différentes contraintes sur les premiers six mois du projet, au moment de mon arrivée douze (12) familles avaient refusé l’aide et ma mission serait donc la de trouver de possibles remplaçants. Je les détaillerai plus tard dans ce mémoire, mais la cause principale de ces refus fut, le mécontentement de quelques familles suite à la décision prise par l’agence de reconsolider les habitations dont la structure n’avait pas souffert de dommages considérables, au lieu de continuer avec la proposition initiale qui était la construction d’une nouvelle habitation. D’autres familles n’étaient pas en capacité de remplir deux des conditions imposées par la fondation et l’agence pour bénéficier du projet : apporter une partie de matériaux pour la construction (le gravier, les cailloux et le sable) ainsi que la nourriture pour main-d’œuvre. Enfin, d’autres familles trouvaient trop long le temps d’attente avant que ce ne soit leur tour.

On m’a donc donné le recensement effectué par la mairie, et la consigne de rendre visite aux habitations classées comme endommagées partiellement (pas habitable) et endommagées complètement (perte totale) afin de constater si la gravité des dommages était bien celle indiquée par la mairie et de repérer des cas susceptibles de rentrer dans la liste de bénéficiaires. Ces cas devaient être en mesure de remplir les conditions mentionnées au paragraphe précédent.

50 II. M ISE EN SITUATION PROFESSIONNELLE

Pendant quatre semaines, j’ai parcouru le village et j’ai visité une soixante-dizaine d’habitations. Le parcours a été très intéressant car il m’a permis de repérer de première main les dommages qu’un séisme peut provoquer dans des habitations en terre et de constater que malheureusement celles avec les dégâts les plus importantes furent celles qui avaient souffert des interventions imprudents avec des éléments structuraux étrangers aux systèmes locaux. Cela m’a également permis de repérer les dynamiques socio-culturales du village ainsi que les pratiques économiques. Je constatais aussi une énorme résilience de la majorité du village à travers l’attitude et l’esprit joyeux des gens dans leurs activités quotidiennes, et à travers les différentes méthodes qu’ils appliquaient pour revenir à la normale et rétablir leurs lieux d’habitation. Une grand partie de la population n’a pas la capacité économique de réparer ou reconsolider sa maison, mais j’ai pu observer que même avec des matériaux très précaires (non locaux), beaucoup d’entre eux construisaient des habitations, temporaires et permanentes, d’autres cherchaient à emprunter des maisons appartenant à leurs proches et d’autres ignoraient simplement les dégâts, faisaient de petites réparations, et continuaient à vivre dans leur logement.

Dans d'autres cas, j’ai pu observer un certain espoir de recevoir une aide gouvernementale, une aide que n’est jamais arrivée à Zacatepec, ce qui ralentissait leur processus de résilience.

Pour cette mission, j'ai opté pour une approche plus sociale qu’architecturale. Durant mes visites, je me suis concentrée sur les conditions économiques et familiales afin de repérer les cas les plus vulnérables et ayant une grande nécessité de faire partie du

projet. Je n’avais pas de questionnaire fixe mais durant mes visites, j’essayais de créer des moments de convivialité avec les interviewés et à travers de conversations plutôt informelles, de recueillir le plus d’informations possibles sur l’organisation familiale, les membres et leurs activités, les conditions de vie, l’activité économique du soutien familiale, etc. À côté de cela, je faisais une observation du logement afin d'évaluer également si son état physique augmentait la vulnérabilité de la famille.

Je considère important de mentionner que la langue fut parfois une barrière car, dans ce village, la langue maternelle n’est pas l’espagnol. Ce serait difficile à expliquer mais on trouvait toute fois une façon de communiquer.

À la fin du parcours, j’ai pré-sélectionné seize (16) habitations, mais ce ne serait pas à moi, ni à l’équipe de travail, de définir la liste finale. La mairie voulait en effet faire une relecture de mon rapport car, dans le village, la participation de la population dans les activités et au développement communautaire est fondamentale, et une famille qui n’est pas coopérative avec le reste du village ne pourrait prétendre profiter d’une aide externe.

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Figure 76. Dégâts sur une maison suite aux séisme S7 La maison avait subi une intervention avec poteaux et poutres e n béton Figure 78. Maison détruite lors du séisme S7 Figure 79. Dégâts sur une maison suite aux séisme S7 La maison avait subi une intervention avec poteaux et poutres e n béton Figure 77. Famille affectée par le séisme S7 Au fond, les murs restants après le séisme Photos : auteur
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Photos : auteur Figure 83. Fabrication d'adobes pour réparation propre Figure 82. Réparation d'un mur avec des bâches Figure 80. Maison construite après les séismes, avec des tôles Figure 81. Maison construite après les séismes, avec du parpaing Figure 84. Typologie d'habitation vernaculaire à Zacatepec Système constructif en terre : torchis Photo : auteur

partie Mémoire et recherche

Troisième

DÉFINITION DE L'ARCHITECTURE VERNACULAIRE

Il a été tenté à plusieurs reprises, de définir et encadrer l'architecture vernaculaire, depuis la deuxième moitié du XXe siècle, lorsque les architectes ont commencé à s'y intéresser et à reconnaître ses qualités et ses atouts, comparé à l'architecture fabriquée par des professionnels.

L'architecture et les cultures constructives vernaculaires constituent le fil conducteur de ce travail. Elles sont à la fois l'objet d'étude mais également le point d'inspiration et le produit du projet de reconstruction dont je fais une analyse. C'est pourquoi, je vais entrer dans le sujet tout en essayant de définir les composantes de cette architecture. Je citerai quelques auteurs afin de comprendre la complexité de la convergence ces composantes.

Tout d'abord, cette architecture n'est pas une expression propre à un site ou une culture en particulier. Elle est le résultat du contexte spatial et temporel dans lequel elle s’inscrit, et le produit de constantes expérimentations. Ses expressions qui prennent forme tout autour du monde, sont par conséquent toutes bien différentes les unes des autres.

Comme Torres (2009) l'affirme, les cultures constructives vernaculaires sont d’un côté déterminées par des considérations physiques et naturelles. Le climat et les aléas naturels déterminent les exigences de protection, tandis que les matériaux dépendent des ressources locales disponibles et de ceux-ci dépendent à la fois les technologies appliquées et la mise en œuvre.

Mais il ajoute que la forme et la disposition des habitations vernaculaires ne dépendent pas uniquement de ces facteurs mais également, et de façon tout aussi importante,

par des aspects socioculturels immatériels tels que les croyances, les traditions, les coutumes et les fêtes. En fait, dans certains cas, ces derniers peuvent avoir une influence majeure sur la configuration de l'habitat.

Les caractéristiques spécifiques d’une culture, ses modes de vie, ses valeurs et idéaux ont leur influence sur l’organisation spatiale de la société à ses différentes échelles.

Enfin, les moyens de production ont également une influence : dans chaque région se développe une activité économique principale qui oriente la production de l’habitat.

L'on peut alors parler d'une harmonie régnant entre l'homme, son environnement et sa culture (Basset et Thonier, 1984).

56 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE

ANALYSE DE L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE À

TEZOATLÁN

La culture mixteca

Les mixtecos sont la quatrième ethnie indigène du Mexique en termes de nombre et répresentants après les náhuas, les mayas et les zapotecos. Dans leur langue, ils s’appellent eux-mêmes les Ñuu Savi, le « Peuple de la pluie ». Les ancêtres des mixtecos se sont installés dans le nord-ouest de l’actuel État de Oaxaca. Les aztèques ont appelé cette région Mixlán, « Endroit de nuages », et depuis l’arrivée des espagnols au Mexique, elle est connue comme la région Mixteca

Le noyau familial constitue l’unité sociale de base. Il s’agit d’une organisation patriarcale : le père est le chef de famille, le responsable de la prise de décision et la source des finances familiales. Cependant, l’expatriation d’une partie non négligeable de la population masculine tend à remettre en cause cette organisation : l’absence des hommes fait que ce rôle, au sein du noyau familial et communautaire, échoit de plus en plus aux femmes.

De même, le mode d’habitation mixteco suit une organisation patriarcale : les couples de jeunes mariés construiront leur nouvelle maison dans la parcelle des parents du marié ou près de celle-ci.

Un phénomène qui a actuellement un fort impact sur la culture mixteca est l’expatriation. Les conditions de précarité et le manque de travail dans la région ont obligé les mixtecos à chercher des solutions et de nouvelles opportunités loin de leur territoire d’origine, 15 Recensement officiel de l’INEGI de 2010

et ce depuis les années cinquante. De nos jours, la région Mixteca est l’une des zones du pays où la maind’œuvre se délocalise le plus : les mixtecos sont l’ethnie indigène migrant le plus vers le nord du Mexique et aussi l’une des plus présentes aux États-Unis. Ces migrants se déplacent à Mexico pour travailler dans la construction ou dans les États du nord du Mexique pendant les saisons de récolte et, aux États-Unis, comme main-d’œuvre agricole, dans des usines ou dans la restauration. Néanmoins, les mixtecos conservent un sentiment d’appartenance à leur communauté d’origine au travers d’un contact permanent. Dans leurs nouvelles résidences, ils s’organisent en associations qui promeuvent des événements culturels et la collecte de fonds à fin d’améliorer les conditions de vie et les services dans leurs villages. L’expatriation est quelque chose de si importante que dans certaines communautés, émigrer est la norme car la seule façon de participer au développement des villages et à la célébration des fêtes patronales, à travers l’argent régulièrement envoyé.

Le village de Tezoatlán de Segura y Luna

Tezoatlán de Segura y Luna se situe dans la région de la Mixteca Baja. Il s’agit d’un village de montagne sis à 1 520 mètres d’altitude et ayant une population de 2 324 habitants15. Il se trouve à proximité de la ville de Huajuapan de Léon, à environ une heure en voiture. Cette dernière est traversée par la route panaméricaine et, de ce fait, Tezoatlán est un village très bien desservi bien qu’étant de taille modeste.

Le climat est subtropical humide16, avec une température moyenne de 21ºC et de fortes précipitations pendant

57 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
16 Cela correspond au climat subtropical humide Cwa selon la class ification des climats de Köppen.

l’été.

Vers 1450, des groupes indigènes mixtecos se sont installés dans le village de Santa Rosa, à proximité du fleuve Río Salado. En 1600, leurs terres sont passées aux mains des caciques espagnols qui ont pris le contrôle des activités agricoles et commerciales. Puis aux alentours de 1680, en raison des conflits entre les villageois et les caciques espagnols, une partie de la population a émigré et s’est installée dans ce que l’on connaît aujourd’hui comme Tezoatlán. La population est de nos jours essentiellement métissée.

Historiquement, les gens du village exerçaient les métiers d’agriculteur, de muletier, de fabricant de tuiles d’argile ou d’artisan spécialisé dans la fabrication de chapeaux de paille, de jouets, de chaussures ou de tapis

(tisserand). Malheureusement, l’artisanat à Tezoatlán a peu à peu disparu. Actuellement, on y trouve encore des agriculteurs qui, grâce à la construction du canal en 1952, peuvent cultiver tout au long de l’année et plus uniquement durant la saison des pluies. Aujourd’hui, l’économie locale dépend en grande partie du système de remesas : les expatriés envoient régulièrement des fonds pour soutenir leur famille, améliorer la qualité de vie et contribuer au développement du village. Ce phénomène d’émigration, principalement de la population masculine entre 15 et 60 ans, fait que l’on trouve beaucoup de femmes ayant un rôle actif dans l’économie de la communauté en tant que commerçantes, tandis que les hommes qui sont restés mais ne sont pas agriculteurs travaillent dans la construction en tant que maçons, charpentiers ou

58 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 85. Vue panoramique de Tezoatlán Vue depuis la colline Las Peñas Photo : auteur

forgerons.

La religion joue un rôle très important dans la vie de la communauté. Les fêtes et les cérémonies communautaires ont une origine catholique. Chacun des sept barrios (quartiers) du village délègue à certains de ses habitants, appelés mayordomos, l’organisation de la fête annuelle en l’honneur du saint patron du quartier. Cette charge étant considérée comme un grand privilège, les barrios changent chaque année leurs mayordomos. Pendant ces célébrations, se déroulent des calendas : des processions accompagnées d’orchestres et de feux d’artifices. La fête générale du village, en hommage au Señor de la Capilla, a lieu le quatrième vendredi de Carême. Durant une semaine, le village se transforme en une sorte de grand marché où l’on trouve des stands de pièces d’artisanat, de nourriture et d’objets de tout type. Pendant cette fête, ont lieu des festivals d’orchestres et de danses traditionnelles, et c’est à cette occasion que les expatriés reviennent passer quelques jours dans leur village d’origine.

Environnement, ambiance et infrastructure

Tezoatlán est enclavé dans un paysage de montagne très accidenté et plutôt sec, qui reverdit avec les premières pluies de juin. Prédominent dans la végétation les cactacées, les mezquites (Prosopis), les sabinos (cyprès de marais mexicain) et les roseaux. À quelques pas du centre ville de Tezoatlán, une rivière s’écoule, dans laquelle l'on trouve des roseaux.

L’ambiance du village est tranquille, les activités commencent très tôt le matin, vers 5h, avec des annonces journalières à la population de la part de la mairie ou de l’église. Ces communications se font à travers des haut-parleurs situés dans l’église de

chaque barrio.

En ce qui concerne l’architecture du village, on peut encore observer des habitations vernaculaires mais l'on trouve également des constructions montrant de fortes influences extérieures.

Plusieurs maisons du village, appartenant à des personnes qui n’habitent plus Tezoatlán, ne sont habitées que sur les périodes de vacances, c’est-à-dire à peine deux semaines à l’année.

À Tezoatlán, on trouve trois écoles primaires, un collège, deux lycées et même une université. Il y a également trois jardins d’enfants, un centre de santé, un poste de police, un magasin communautaire, une halle, et une agence de transfert d’argent. Tous sont des établissements publics. Dans le centre-ville, se trouvent le bâtiment de la mairie (qui abrite aussi un musée et une bibliothèque), un terrain de sport polyvalent et un grand jardin avec son kiosque. Chaque quartier du village a son église et, à la sortie du village, se trouvent deux cimentières.

Le village offre à ses habitants les services de base : eau potable, drainage, et électricité. Le réseau de communication a été amélioré récemment avec la construction d’une antenne de téléphonie mobile. Quelques habitants ont aussi un accès internet.

L’intégralité de la voirie du village est pavée. En périphérie, on trouve des routes en terre qui mènent aux terrains de culture.

59 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
60 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 86. Fontaine d’eau potable à Tezoatlán, 1944 File d’attente pour l’approvisionnement d’eau au pied de l’anci en kiosque. Figure 87. Assemblée de la population Tezoateca En arrière - plan, on observe l’architecture traditionnelle du village : all ées couvertes, toiture inclinée avec des tuiles. Photos : auteur
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Figure 88. Mairie de Tezoatlán En arrière plan, le terrain polyvalent et la décoration de la f ête patronale. La Mairie fut construite en 1944 selon un modèle de portique très courant au Mexique, héritage de l’architecture es pagnole et mozarabe. Figure 89. Centre Ville de Tezoatlán Le kiosque actuel en béton et les jardins. Photos : auteur
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Figure 90. Voirie à Tezoatlán Rues pavées du centre Figure 91. Voies extérieures non pavées Voies extérieures desservant les champs agricoles. Figure 92. La rivière La rivière hors période de crue Photos : auteur

Les cultures constructives locales

« Ils ont chanté […] devant chaque porte et par ces paroles, ont demandé l’aide du peuple tout entier pour construire leur maison. »

« Cantaron […] en cada puerta y con estas palabras solicitaron la ayuda del pueblo entero para construir su casa. »

Castellanos, H., Santibañez, M.(2015), La casa viva, Oaxaca : México.

Les typologies d’habitation vernaculaire à Tezoatlán et ses alentours comprennent des modèles très simples et modestes composés d’un seul volume de base rectangulaire (en général de 4 mètres par 6), d’autres constitués d’un volume dortoir et de volumes complémentaires plus petits pour la cuisine et les toilettes, et en fin des modèles plus complexes avec des portiques, deux étages ou des coursives commerciales.

La forme d’habiter à Tezoatlán, comme chez la plupart des peuples mixtecos, est collective : au sein d’une même parcelle familiale, on peut trouver différents volumes d’habitation, séparés les uns des autres et habités par différents noyaux familiaux, qui délimitent un patio commun où peuvent (ou non) se trouver d’autres volumes servant de pièces communes (souvent la cuisine et/ou les toilettes, lorsque celles-ci sont partagées).

La façon de construire était, à une époque, également collective et coopérative : avec l’aide de membres de la famille et d’amis, les gens construisaient en quelques jours leur maison avec les matériaux disponibles sur place. Cette façon de travailler en communauté est appelé tequio

La Casa Chiname est la typologie la plus modeste : il s’agit d’une structure poteau-poutre et d’une charpente en bois, les poteaux étant des troncs ancrés au sol au tiers de sa hauteur. Les murs se composant de roseaux posés verticalement. Par le passé, la toiture des plus humbles était recouverte par des feuilles de palmier, aujourd’hui l’on peut trouver également quelques exemples avec des tuiles d’argile cuites. De nos jours ce modèle est très rare et est utilisé pour la cuisine, les toilettes ou des fonctions complémentaires à l’habitat : stockage et enclos, entre autres.

D’autres typologies vernaculaires utilisent des systèmes constructifs en terre crue tels que l’adobe ou le bahareque (torchis) pour les murs. Les propriétés d’amortissement thermique de la terre permettent d’avoir du confort tout au long de l’année.

En ce qui concerne la toiture, elle est à deux pentes et conserve la charpente en bois et l’utilisation de tuiles. Ces dernières vont également contribuer au confort thermique, tandis que l’inclinaison assure l’écoulement des eaux de pluie durant l’été.

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Figure 93. Procédure de construction collective Illustration ©María Santibañez. Castellanos H., Santibañez, M.  (2015). La casa viva (pp. 29). Oaxaca, México.

Composantes de la typologie en adobe à Tezoatlán

Plafond en roseau, todiche ou tejamanil ou voliges. Tuiles et faîtage en terre cuite superposés. Il est conseillé de respecter une inclinaison de 30% en vue de la pose de tuiles.

Des fermes constituent les éléments principaux, ils s’appuient sur les murs latéraux. Des pannes et des chevrons reposent sur les fermes.

Murs en adobe de 40cm d’épaisseur. Linteaux de portes et fenêtres en bois.

En terre compacte, dalle de béton ou carrelage en terre cuite.

La fondation et la base des murs sont en pierre maçonnée. La base s’élève jusqu’au 30-50 cm au-dessus du niveau du sol.

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1. Fondation 3. Murs 2. Sol 4. Charpente 5. Toiture Figure 94. Axonométrie de la typologie en adobe Source  : élaboration propre

Murs et soubassements

Murs en adobe

Briques de terre crue façonnées à la main ou moulées à l’état plastique, puis séchées à l’air libre (Fontaine, 2013). La terre utilisée ne doit contenir ni cailloux ni graviers étant donné les petites dimensions des moules. Elle ne doit pas non plus être trop argileuse pour éviter les fissurations au séchage. Afin de minimiser ces dernières, on peut également y rajouter du sable ou des fibres végétales. (Anger et Fontaine, 2009)

À Teozatlán les adobes sont appareillés horizontalement dans la plupart des constructions mais l'on peut trouver également quelques exemples de murs avec les adobes posés verticalement. Pour les aider structurellement, ils sont contraints dans une structure en bois. Ces murs sont utilisés comme murs de séparation.

Soubassements

Les murs sont posés sur un soubassement de pierres maçonnées avec une mortier à la chaux. La fondation s'enfonce jusqu'à 40 cm dans le sous-sol et s’élève jusqu’à 30-50 cm.

Agrafes

Ce détail n’est pas présent dans toutes les constructions vernaculaires néanmoins, quelques maisons avaient des grosses pierres enfoncées dans les adobes réalisant le travail de liaison aux coins.

À Tezoatlán, les crottes d’âne étaient la fibre traditionnellement utilisée dans la fabrication des adobes. Elles étaient un produit abondant du fait du métier de muletier exerçait à une époque par les habitants du village.

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Figure 95. Appareillage des adobes Figure 96. Mur des adobes verticales Figure 97. Base de pierre maçonnée Figure 98. Agrafes de pierre en angle Photos : auteur

Toit et plafond

Tuiles en argile cuite

À une époque, elles étaient produites directement à Tezoatlán avec de la terre argileuse et des excréments d’ânes. De nos jours, l’approvisionnement vient de la récupération sur les maisons dont le toit est remplacé par une dalle en béton.

Carrizo

Le carrizo (roseau) pousse à proximité de la rivière de Tezoatlán.

Il est coupé puis pose alors qu’il est encore vert afin d’éviter qu’il ne casse lorsqu’on le cloue.

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Figure 99. Exemple de toiture en tuiles Figure 101. Axonométrie de pose de tuiles Figure 100. Pose de tuiles Figure 102. Champs de roseau Figure 103. Pose du roseau Photos : auteur

Todiche

Il s’agit d’un bâton qui est extrait de l’intérieur du cactus órgano, endémique de la région Mixteca.

Ses principales qualités sont sa résistance au fil du temps et son étanchéité.

De nos jours, son extraction est rare en raison de la difficulté du processus et des restrictions sur son exploitation dans la région.

Tejamanil

Ces sont des lattes de bois d’oyamel d’environ 1cm d’épaisseur et 40 cm de long.

Avant de les deposer il faut les curer : un traitement local pour protéger le bois contre les insectes et l’humidité. Il consiste à immerger les lattes dans une préparation d’eau et d’une herbe amère, le chocolatillo ou le yacutuchi, en ébullition

Selon les croyances locales, toutes les fibres végétales, ainsi que les bois utilisés dans la construction, doivent être coupés pendant la phase de lune décroissante car le cycle de la lune aurait une influence sur le niveau de sève dans les fibres : durant ces jours‑là, le niveau de sève baisse et se concentre dans les racines, ce qui va permettre au bois de ne pas conserver d’eau et donc de sécher plus rapidement. Cela le rendrait également plus résistant.

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Figure 104. Plafond de todiche Figure 105. Cactus órgano Figure 106. Pose de tejamanil Figure 107. Plafond de tejamanil Photos : en haut : auteur, en bas à gauche : Julián Gónzalez, en bas à droite : Ángel Chávez

Éléments en bois

Morillos

Les morillos sont des pièces en bois de section circulaire, entre 7-10 cm de diamètre. Ils sont traditionnellement utilisés comme chevrons dans la charpente des habitations traditionnelles.

De haut en bas, de gauche à droite

Bois de sabino

Bois de sabino ou cyprès de marais mexicain. Il s'agit d'un bois très durable et résitant. Ce type de bois était utilisé tant pour la fabrication des meubles que des portes et des fenêtres. De nos jours, son exploitation est contrôlée en raison de sa croissance lente et, pour s’approvisionner avec ce type de bois, il faut recourir à la récupération de matériaux.

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Photos : auteur Figure 108. Arbre de mezquite Figure 109. Morillos récupérés Figure 110. Fenêtre de sabino Figure 111. Porte de sabino Photos : auteur

Détails et finitions

Linteaux

De grandes pièces en bois se posent au-dessus des ouvertures des portes et fenêtres. De même la façon que le reste des éléments en bois, les linteaux sont curés selon la technique locale.

Ventilations

Il n’est pas très recommandé d’avoir de grandes ouvertures dans les murs en adobe car cela diminue les capacités portantes du mur. C’est pourquoi, on ne trouvera pas beaucoup de fenêtres dans les maisons traditionnelles. Pour contribuer à la ventilation et à l'éclairage des habitations, de petites ouvertures triangulaires, formées avec les adobes, sont très courantes.

Accrochages

Des morceaux de tuile sont posés à la jonction des adobes. Ceux-ci préparent le mur pour recevoir une couche d’enduit ou si aucun enduit n'est posé, ralentissent l’eau de pluie et l’érosion des murs causés par celle-ci.

Enduits

Une couche d’enduit à la chaux couvre la plupart des habitations traditionnelles afin de les protéger des intempéries.

Peinture à la chaux

Elle est préparée tout simplement avec de l’eau et de la chaux. La technique locale suggère d'ajouter de la sève de figuier de barbarie afin de la rendre plus fixante.

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Figure 112. Linteau en maison abandonée Figure 113. Ouverture typique Figure 114. Tuiles entre les adobes Figure 115. Préparation de peinture à la chaux Photos : auteur

Catalogue photographique d’exemples de cultures constructives à Tezoatlán

Casa Chiname

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Figure 116. Extérieur de la maison Chiname Murs en roseau et toiture à deux pentes en tuiles Photo : auteur
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Figure 117. Extérieur d'une typologie en adobe Adobes apparentes, toiture à deux pentes en tuiles de terre cui te
Maison en adobe
Photo : auteur
72 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 118. Intérieur d'une typologie en adobe Charpente en bois, plafond en roseau et murs enduits à la chaux Photo : auteur
Maison en adobe

Maison en adobe reconsolidé

73 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Photos : auteur Figure 119. Reconsolidation et réinterprétation faits par un maçon local L'ensemble de la maison conserve des éléments locaux Figure 120. Détail de toiture La charpente est une structure métallique

Maison en adobe

74 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Photos : auteur Figure 121. Maison en adobe enduite L'environnement commence à être envahi par des habitations étra ngères Figure 122. Détail de toiture

Maison en adobe à usage mixte : résidentiel - commercial

75 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Photos : auteur Figure 123. Extérieur et entrée du magasin La maison n'a plus la fonction commerciale mais le fils des pro priétaires conserve l'état original de la bâtisse Figure 124. Intérieur du magasin Comptoir et étagères en bois de sabino

Maison en adobe avec porche

76 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Photos : auteur Figure 125. Façade principale Murs et colonnes en adobe, toiture à deux pentes en tuiles Figure 126. Porche et cuisine au fond Charpente en bois, plafond en todiche, sol en carrelage de terre cuite
77 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 128. Intérieur de la maison La maison a souffert des modifications pour s'adapter à un usag e plus "moderne" : notamment le mezzanine et les toilettes au fond de la photo Figure 127. Niche - autel Photos : auteur

Maison en adobe reconsolidée

78 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Photos : à gauche Mario Ledezma et à droite auteur Figure 129. Typologie en adobe avec porche Habitation reconsolidée par l'agence Arquitectos Artesanos. Figure 130. Porche et cuisine au fond Cuisine ouverte sur le couloir
79 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 131. Porche intérieur, patio et dortoirs au fond Les nouveaux dortoirs suivent la typologie traditionnelle Figure 132. Mise en valeur d'éléments traditionnels À gauche, le metate était utilisé par les femmes pour moudre le maïs et préparer la pâte des tortillas. Photos : auteur

ANALYSE DE L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE À

ZACATEPEC

La culture mixe

Les mixes sont une ethnie indigène habitant dans le nord-est de l’État de Oaxaca dans une partie de la Sierra Norte. Le territoire s’étend sur une surface de 4 668 km2. Le paysage se caractérise par une topographie très accidentée et par la présence de montagnes, de cascades, de ruisseaux, des nuages et d’une végétation forestière luxuriante. Cependant, en fonction de l’altitude, l’orientation des montagnes on peut trouver des variations climatiques sur le territoire. Dans les bases altitudes du territoire la topographie est plate et une végétation de savane prédomine.

La région mixe est composé de 19 municipios. Les conditions géographiques du territoire des mixes les a maintenu isolés pendant de longues périodes de l’histoire, fait qui leur a permis de conserver de fortes coutumes ainsi que la préservation de leur langue : le Ayuuk 17 . Ils s’appellent eux-mêmes Ayuukjä’äy « le peuple du langage fleuri ».

Ils ne furent jamais conquis militairement mais le furent évangéliquement par des dominicains et, de nos jours, ils pratiquent une religion syncrétisme de la religion catholique et des pratiques préhispaniques : lors des cérémonies pour des rituels de fertilité, mortuaires et de guérison ont lieu des invocations aux divinités indigènes en association à des prières chrétiennes et des sacrifices d'oiseaux.

La base de l'organisation sociale est le noyau familial nucléaire et patriarcale. Après s’être unis18, les couples construisent leur nouvelle maison dans une parcelle héritée, séparée de la maison parentale, et deviennent complètement autonomes. Quand les parents sont âgés, ils ne s'occupent pas spécialement d'eux et il n'est pas étrange de trouver de vieux vivant seuls.

À l'échelle communautaire, les mixes basent leur organisation sociale sur une idée de collectivité et de charges sociales : le tequio est un service social obligatoire et non rémunéré que tous les habitants mixes doivent accomplir. Il s'agit d'un travail au profit du bien-être commun. Les charges sociales sont d'une telle importance que si un individu n'a pas achevé une charge attribuée par la société, il peut être révoqué de son droit de vote et de parole à l'assemblé communautaire.

Les autorités locales sont élues selon une procédure traditionnelle : durant des assemblées communautaires lors desquelles les habitants font un vote directe. Les assemblées peuvent durer plusieurs jours.

Dans la culture mixe, la musique joue un rôle très important. Il s'agit de l'expression artistique qui les caractérise. Dans toutes les communautés mixes, il y a un,voire deux ou trois orchestres philharmoniques spécialisés dans des genres locaux et folkloriques. Les mixes intègrent les orchestres depuis tout petits et prennent des cours de musique quotidiennement. Des écoles de musique indigènes très reconnues dans le pays sont basées dans cette région.

17 Elle est parlée par le 95,25% de la population. Source : Panora ma sociodemográfico de Oaxaca 2015

18 Le concubinage est aussi très pratiqué chez les mixes.

80 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE

Les fêtes célébrées sont dédiées à un patron local et sont de grande importance car elles renforcent les liens internes ainsi que ceux avec les communautés voisines. Les différentes commissions d'organisation sont la charge de personnes désignées par la communauté. Pendant les jours de fête, des orchestres voisins invités sont accueillis par des familles locales et font des concerts dans ses habitations de leurs hôtes. Les concerts se prolongent par de grands repas partagés. Le dernier jour de fête, tous les orchestres font un concert ensemble dans le centre ville et chacun joue à son tour les meilleurs morceaux.

Une anecdote plutôt personnelle que je voudrais intégrer dans cette partie sur la culture mixe, c'est qu’en mangeant avec quelques familles de Zacatepec, j'ai pu me rendre compte que la collectivité et le partage sont des valeurs fondamentales de leur quotidien. Au Mexique, il y a toujours des tortillas sur la table lors des repas. Elles sont individuelles

et chaque personne prend autant de tortillas qu'il veut lors de son repas,: une fois prises, elles deviennent « celles de » la personne. Mais à Zacatepec, c’est différent. Là-bas, les tortillas sont très grandes, elles se placent au milieu de la table et tous mangent d’une seule et même tortilla. Je n'avais jamais vu — et encore moins vécu — cela, et c'est un geste qui m'a beaucoup touchée. De plus, c’est vivre ce type de situations et comportements qui m’a permis de comprendre les traditions collectives à l'échelle de leur organisation sociale.

Le village de Santiago Zacatepec

Le village de Zacatepec a des caractéristiques propres très particulières. Tout d’abord il se situe dans une région montagneuse d'accès très difficile à 1395 mètres d’altitude et a une population de 2,151 habitants19. La situation économique de l'ensemble du village est très précaire.

81 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 133. Vue panoramique de Santiago Zacatepec Photo : auteur
19 Recensement officiel de l’INEGI de 2010

Le climat est semi-chaud20 avec des précipitations tout le long de l'année (1500 – 3000 mm par an). La température oscille entre 16 et 26 dégrés et la présence d'un dense brouillard est l'une des caractéristiques locales.

Les habitations sont éparpillées dans et de les montagnes et de ce fait le village n’est pas compact mais plutôt éparse et étendu sur une topographie très accidentée. L'on peut marcher longtemps dans la végétation avant de croiser des groupes d’habitations. La différence d’altitude entre les quartiers du haut et ceux du bas est d'environ deux-cents (200) mètres. La zone la plus dense est le centre-ville, situé dans une plaine à environ mi-hauteur entre le haut et le bas du village. S'y trouvent les bâtiments administratifs et communautaires : la mairie, le marché municipal, le centre de santé, un hôtel qui sert d’habitation aux étrangers qui viennent travailler à Zacatepec (professeurs, médecins, etc). On trouve également une école primaire, un terrain de sport et un auditorium polyvalent qui vient d’être construit. L’église du village est également située dans cette zone. D'autres écoles publiques sont situées dans le bas du village : une deuxième école primaire, l'école secondaire ainsi que le lycée.

Les services que compte le village sont très basiques et d'une qualité toute relative.

Zacatepec est traversé par la route qui la dessert et qui relie les peuples mixes avec l’État de Veracruz. Mais, en ce qui concerne le reste de la voirie, les habitations sont desservies par des sentiers étroits non pavées et avec une forte pente.

Le village compte un réseau d’électricité. En revanche, l'eau est récupérée des sources de la montage et amenée au village par des tuyaux qui fonctionnent par gravité. Il n'y a pas non plus de système d'évacuation des eaux usées : dans les habitations, des fosses sceptiques sont utilisées, la plupart de celles-ci ne sont pas étanches. La principale activité économique du village est l’agriculture, historiquement pratiquée en tant que culture d’autoconsommation. Ils vendaient ou échangeaient alors seulement l’excédent de leur production. Jusqu’à il y a environ quatre ans, le produit principal, après le maïs qui a toujours été la base de l’agriculture et de l’alimentation au Mexique, était le café mais une épidémie a pratiquement tué les caféiers et les habitants sont rentrés dans une époque de crise. Quelques personnes font également l’élevage de volaille, principalement du poulet et dinde. Il n'y a pas d'autres animaux pour la consommation, pas de bœuf ou de porc.

À côté de cette activité, la plupart des gens font de la cueillette de fruits et légumes sauvages. Pour cela ils font des longs et éprouvants trajets à pied, jusqu’à 6 heures aller-retour, pour se rendre dans ce qu’ils appellent leurs fermes. Ils descendent toute la colline pour remonter la montagne d’en face, où l'on trouve des parcelles avec de petits terrains cultivés (avec du maïs, des haricots, etc), et une multitude d'arbres fruitiers (bananiers, avocatiers) et des constructions de stockage. Ils font la récolte de leurs cultures et cueillent sur des arbres sauvages, se reposent un peu avant d'entamer la marche de retour chargés des produits collectés à l'aide d'un mecapal21. La famille complète contribue à cette activité pendants

20 Correspond au climat océanique Cfb selon la classification des climats de Köppen.

21 Vocable d'origine nahuátl. Bandeau tissé qui se pose sur le front. On attache aux extrémités une charge que repose sur le dos du porteur.

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Figure 136. Vue du bas de village Figure 137. Sentiers partant de la route principale Figure 134. Vue depuis le bas du village Figure 135. Tortilla mixe et les vues de la montagne Photos : auteur
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Figure 139. La route que traverse le village À la fin du village elle n'est plus pavée Figure 140. Sentiers d'accès aux maisons Voies extérieures desservant les champs agricoles. Figure 138. La route que traverse le village Photos : auteur
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Figure 143. Orchestre mixe. Concert dans une habitation mixe Figure 142. Vue de l'auditorium récemment construit Figure 144. Orchestre mixe. Concert dans le centre - ville Figure 141. Vue du centre - ville depuis l'hôtel Photos : à gauche : Mariana Ibarra, à droite : Julio Rosas
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Figure 147. Élevage de dindes Figure 146. Gabino et Marcos transportent des bananes à l'aide du mecapalpour les mettre en vente Figure 148. Café grillé qui sera mis en vente Figure 145. Femme portant du bois de chauffage à l'aide d'un mecapal Photos : auteur

que les femmes vendent les produits à l’extérieur du marché municipal. Ce qui n'est pas vendu reste pour la consommation familiale.

Ils utilisent le même système de charge avec du mecapal pour ramener de bois de chauffage pour la cuisine.

Les cultures constructives locales

À la différence des complexes d'habitations mixtecos, composés de constructions habitées par des membres d’une famille élargie, à Zacatepec les constructions d’une même parcelle appartiennent à un seul noyau familial de base : parents et enfants. Sur la parcelle, on trouve différentes constructions séparant souvent les fonctions dortoirs des fonctions alimentaires et sanitaires. Il n'existe pas de limites physiques entre les parcelles voisines.

À Zacatepec, l’utilisation de la terre est également récurrente dans la construction d’habitations vernaculaires. La technique la plus couramment utilisée est le pisón (pisé), mais l'on peut également trouver des typologies en bahareque (torchis) ou en pierre maçonnée. Les typologies sont de base rectangulaire, d'environ quatre (4) par six (6) mètres. À cause de contraintes liées aux procédures constructives et/ou à l'équipement disponible pour la mise en œuvre, il est très courant de rencontrer des murs combinant deux techniques distinctes. À l'intérieur, les parties privées sont séparées de l'espace public par des rideaux, au-dessus de la structure de la charpente, un petit grenier est formé pour stocker de grain et du bois de chauffage. Un coin de la maison est spécialement dédié à un autel catholique. D'après les études faites au Mexique par Valeria Prieto en 1978 (cité par Torres, 2009) les autels sont la représentation du

syncrétisme espangol-prehispanique. La vie religieuse de la famille "paysanne" est leur tradition plus importante : les autels occupent alors le coin le plus décoré et propre du logement. Les saints exécutent les miracles des pluies que font le maïs pousser et protègent la famille, ils sont donc les habitants les plus importants.

Quant à la toiture, elle est à deux pentes avec une charpente en bois. Le recouvrement de toiture était traditionnellement en zacate, une espèce de longue paille qui malheureusement n'est plus disponible dans la région. Il ne reste aucun exemple de toiture utilisant ce matériau. Son usage a été remplacé par celui de la tôle.

À une époque, la procédure de construction était collective entre voisins et proches de la famille, et prenait environ une semaine. Mais cette entraide sociale a été affaiblie après les premières expatriations durant lesquelles des habitants découvriront le métier de maçon. De nos jours, une aide éventuelle doit être rémunérée.

Avant la construction, ou dans le cas d'une intervention importante, un rituel sacrificiel appelé la costumbre (coutume) a lieu : l'offrande du sacrifice est composée par de poussins, d'une ou deux volailles (poules, coqs ou dindes), d'œufs, de cigarettes, de mezcal22 et de petites boulettes de pâte de maïs. Le chef de famille dirige une prière aux divinités prehispaniques et aux saints catholiques en langue mixe en levant les offrandes vers le ciel. Les membres de la famille ainsi que la main-d’œuvre participent au rituel. À chacun des angles de la maison, un poussin vivant accompagné des autres éléments de l’offrande est enterré, puis arrosé avec le mezcal. La volaille est égorgée et son sang utilisé pour arroser le centre de la maison. La cérémonie finit avec un repas durant lequel la volaille sacrifiée est consommé.

est élaborée spécifiquement à partir de l'agave bleu, il s'agit do nc d'une variété de mezcal.

87 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
22 Boisson alcoolisée élaborée à partir de l'agave. La tequila

Composantes des habitations vernaculaires à Zacatepec

1. Base du mur. Fréquemment en pisé

2. Partie haute du mur avec un deuxième système. Habituellement en adobe

3. Charpente en bois

4. Toiture en tôle

5. Espace commun

6. Grenier. Une utilisation des voliges posées au-dessus de la charpente est optionnelle.

7. Autel

Tapial ou pisón

Le tapial ou pisón (pisé) est une maçonnerie de terre relativement graveleuse comprimée à l'intérieur d'un coffrage à l'aide d'une masse en bois ou par piétinement. (Basset et Thoner, 1984).

Plus l'on avance en hauteur dans la construction du mur, et plus il est difficile de comprimer la terre sans l'aide d'un échafaudage. De ce fait, et parce qu'à Zacatepec ils ne possèdent pas cet équipement ils changent de système. Les parties hautes du mur sont en adobe ou torchis.

Ils n'ont pas non plus énormément de bois pour les coffrages. Ils construisent donc chaque côté du logement successivement. Cela a pour conséquence que les murs ne sont pas continus, et par conséquent, faibles dans les angles.

88 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE 2 3 4 7 5 6 1
Photos : auteur, illustration : María Santibañez Figure 149. Typologie la plus couramment rencontrée Figure 150. Intérieur d'une maison mixe Figure 151. Mur en pisé et adobe Figure 152. Construction du pisé

Bahareque

Le bahareque (torchis) est un mélange de terre et de paille coupée ou de bouses. Ce mélange est appliqué sur une armature faite de pieux verticaux et d'un tressage de branchages. Dans ce cas, la terre ne joue qu'un rôle de remplissage. (Basset et Thoner, 1984).

Murs en pierre

Pierres maçonnées avec un mortier en terre.

89 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Photos : auteur Figure 153. Mur en pisé et bahareque Figure 154. Détail de bahareque Figure 155. Mur en pierre maçonnée Figure 156. Détail de mur en pierre
90 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 157. Complexe d'habitation mixe À droite une construction incomplète, à gauche le dortoir et au fond la cuisine Figure 158. Extérieur du volume d'une cuisine mixe La structure de la toiture et indépendante des murs Figure 161. Autel Figure 160. Toilettes Figure 159. Intérieur d'une cuisine mixe La charpente sert à stocker le bois de chauffage Photos : auteur
91 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 164. Prières lors du rituel Figure 165. Offrande enterrée Figure 162. Animal présenté pour offrande lors du rituel Figure 163. Sang de l'animal sacrifié sur les éléments de la charpente Photos : auteur

Catalogue photographique d’exemples de cultures constructives à Zacatepec

Habitation en pisé et adobe

92 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Photos : auteur Figure 166. Parcelle avec une habitation - cuisine et un dortoir Figure 167. Habitation en pisé

Habitation en adobe

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Figure 168. Porche et entrée de la maison Figure 169. Volume formant un "L" Photos : auteur
94 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Photos : auteur
Parcelles mixes
Figure 170. Volume dortoir en terre et cuisine en tôle Figure 171. Volume dortoirs et de cuisine en terre

Cuisine en torchis

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Photos : auteur Figure 172. Volume du cuisine en torchis et tôle Figure 173. Façade de la cuisine

Habitations en adobe

96 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 174. Prototype avec porche Figure 175. Prototype avec porche Photos : auteur

Habitations à deux étages dans le centre ville de Zacatepec

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Photos : auteur Figure 176. Façade d'accès au première étage Figure 177. Façade principale et accès au RDC

Habitations en pierre

98 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 178. Habitation en pierre maçonnée Figure 179. Habitation en pierre endommagée lors du séisme S7 Photos : auteur

Habitation en adobe

99 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 181. Façade principale Figure 182. Entrée et porche Photos : auteur Figure 180. Habitation à deux pièces. Elle été endommagée à cause de forts vents

Habitation à deux étages dans le centre-ville de Zacatepec

100 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Photos : auteur Figure 184. Accès depuis le patio Figure 183. Entrée principale et porche

Contrastes culturels

101 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 185. Accès à un cimetière à Tezoatlán Figure 186. Cimetière à Zacatepec Photos : auteur

LES INFLUENCES EXTERNES ET LES PRATIQUES

ACTUELLES À TEZOATLÁN ET ZACATEPEC

Comme mentionné antérieurement dans ce document, cela fait quelque temps que les habitants-fabricants de l’architecture vernaculaire ont commencé à remplacer leur héritage et leurs traditions architecturales dans une volonté de faire la place à la modernité. Les cultures constructives vernaculaires sont, malheureusement, liées à la précarité et ce n’est pas différent à Tezoatlán et Zacatepec. Au travers de la construction de nouvelles habitations avec des matériaux industrialisés, les gens cherchent à améliorer leur qualité de vie et laisser derrière les conditions de pauvreté d’antan.

D'un coté, Tezoatlán est de nos jours un village très immergé dans l’utilisation du parpaing, du ciment et du béton. Ce sont des matériaux très facilement trouvables dans le centre ville chez les fournisseurs locaux de matériaux, et ils sont vus dans l’imaginaire collective, comme les meilleurs matériaux soit pour rendre sa maison plus résistante, soit pour se faire construire une habitation neuve. Ils sont utilisés bien que leurs prix soient élevés car leur utilisation contribue également à réduire le temps d’entretien que les matériaux locaux demandaient.

Une très forte influence de l’expatriation vers les États-Unis peut également être observée. La population travaillant là-bas envoi régulièrement de l’argent au village pour y construire ses habitations selon le modèle américain. Celles-ci sont, par contre, construites avec du béton car une construction en bois comme aux États-Unis serait plus chère. Ils passent toute une vie éloignés de leur village d’origine pour revenir trente ans plus tard habiter la maison de leurs rêves.

Dans d’autres cas, probablement plus défavorisés que les précédents, les habitants démolissent leurs maison pour construire progressivement des habitations en parpaing, que ne rompent pas totalement le modèle vernaculaire, car elles conservent certains éléments tels que charpente et toiture.

De l'autre coté, à Zacatepec la population n'est profite pas des mêmes « avantages ». Là-bas, étant donné l'éloignement des grandes villes et l'accès difficile au village, les fournisseurs triplent voire quadruplent les prix des matériaux. La population a des conditions de vie plus difficiles et l'économie locale ne permet pas la construction d'une habitation en béton ou en parpaing. Ils ont en revanche accès, à un autre type de matériau, disons moins résistant et moins luxueux : la tôle galvanisée. Ces tôles ont commencé à être utilisées il y a environ trente ans, elles ont d'abord remplacé le zacate dans la toiture, mais après elles ont fini par remplacer tous les systèmes de construction en terre  : avec un peu de bois pour monter une structure, ils recouvrent les murs avec des tôles. Les savoir-faire locaux ont commencé à disparaitre et construire avec des tôles ne requiert pas de connaissances spécifiques, et si elles tombent à cause d'un désastre, il est plus aussi plus facile de les remonter. Les tôles ont dès lors été utilisés partout à Zacatepec : dans les habitations, les dortoirs, les cuisines, les toilettes. La population pouvant acheter d'autres matériaux est très réduite.

C’est ainsi que ces villages ont changé son image traditionnelle petit à petit avec des constructions que n’ont rien à voir avec leur environnement, ni dans l’utilisation des matériaux locaux disponibles, ni dans la dimension symbolique.

D’autres pratiques influencées par des constructions

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étrangères sont les interventions sur les maisons traditionnelles avec des éléments empruntés à d’autres systèmes constructifs. Il est très courant de trouver des habitations hybridées entre le système de murs en adobe et des structures en béton : la toiture à deux pentes est remplacée par une toiture plate coulée en béton, et des poteaux-poutres également en béton armé. D’autres constructions sont elles, faites en adobes mais en imitant une structure de colonnes. Toutes ces modifications ont pour objet de les rendre plus « résistants ».

Cela est très dangereux pour principalement deux raisons : d’abord structurellement, car les murs en terre ne fonctionnent plus comme prévu et ils ne sont pas en mesure de répondre aux sollicitations sismiques, mais surtout car cela développe chez les habitants une fausse « sensation de sécurité » qui altère leur perception des désastres et constitue une barrière à une correcte prévention face à un éventuel désastre naturel.

Ces problématiques se répètent, à quelques différences près, par tout dans le monde.

Tout cela, annonce-t-il la fin de l'architecture vernaculaire à Zacatepec et Tezoatlán, à Oaxaca, au Mexique ou dans le monde ?

Les influences externes, ont-elles affaibli, également les structures sociales ?

Quel est notre rôle en tant que professionnels de l'architecture, face à cette crise ?

103 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 187. Commerce de matériaux constructifs sis dans une maison en adobes
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Figure 190. Habitations hybridée Figure 191. Habitation avec des colonnes en adobe Figure 188. Habitation construite selon un modèle américain Figure 189. Habitation en parpaing suivant la forme de la typologie traditionnelle Photos : auteur
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Figure 194. Habitations construite avec de tôles Figure 195. Habitation hybridée Figure 192. Habitation construite en parpaing après les séismes Figure 193. Habitations en parpaing et en tôles Photos : auteur

LE PROJET « RECONSTRUIRE À PARTIR DE LA TERRE » SUITE AUX SÉISMES DE SEPTEMBRE 2017

L’agence Arquitectos Artesanos, au travers du projet social La Casa de Chiname, travaille depuis décembre 2017 sur le projet «  Reconstruir desde la tierra » (Reconstruire à partir de la terre).

Début d’un projet collaboratif de reconstruction

L’une des associations privées qui se sont impliquées dans les reconstructions à Oaxaca fut la fondation Alfredo Harp Hélu Oaxaca (FAHHO). Cette fondation fut crée à l’initiative de l’homme d’affaires mexicain Alfredo Harp Helú, l’un des hommes les plus riches du pays, qui est lié affectivement à l’État de Oaxaca où il vit depuis quelques années. La fondation a l’intention de lutter contre la pauvreté et, dans le même temps, promeut l’éducation, le sport, la culture et les savoir-faire de cet État du pays.

Durant la période d’urgence qu’ont été les premiers jours après les deux séismes, la fondation a distribué des vivres, des vêtements, des médicaments et des tentes dans des communautés affectées. Elles a aussi parcouru les différentes zones touchées afin de mettre sur pied un programme de reconstruction après la crise. Une fois les lieux d’intervention définis, elle a fait appel à différents architectes qui promeuvent les valeurs de l’architecture vernaculaire et traditionnelle pour qu’ils y interviennent.

Il s’agirait d’un projet collaboratif entre la fondation, les mairies des communautés, les architectes et les bénéficiaires. C’est ainsi qu’ils commencèrent

à travailler ensemble sur ce projet avec l’idée que « la vraie reconstruction se fait à partir des valeurs propres de chaque région ».

Les acteurs

- Fondation Alfredo Harp Elu Oaxaca

Elle remplit le rôle de maître d’ouvrage et a donné des fonds pour reconstruire une trentaine d’habitations par village, soit 250 000 à 300 000 MXN par logement (environ 11 000 à 13 000 euros23). Cet argent est destiné à l’achat des matériaux, des outils, et aux salaires des architectes. La fondation a assigné au cabinet Arquitectos Artesanos les villages où il interviendra et lui a demandé de travailler en collaboration avec les mairies des villages concernés.

- Les Mairies

Elles ont fait, indépendamment du projet de reconstruction de la fondation, le recensement des dommages présents dans leur village afin de déterminer à quelle aide gouvernementale chacun avait le droit. Cette aide étant de $15 000.00 MXN (entre 650 et 750 euros) pour les habitations endommagée partiellement, et $120 000.00 MXN (5 200 et 6 000 euros) pour les habitations totalement endommagée (perte totale) Cette aide fut « distribuée » sous forme de cartes qu'ils pouvaient échanger chez des fournisseurs de matériaux concessionnaires du gouvernement — il s’agissait bien sûr des matériaux industrialisés — et, de ce fait, les personnes touchées ayant une maison traditionnelle se trouvaient déconcertées quant à ce qu’elles devaient faire (ne pas utiliser les fonds, acheter des matériels industriels et donc rendre leur

23 Nous donnons une fourchette car le montant en euros dépend du t aux de change.

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maison hybride, reconstruire totalement leur maison avec ce matériel industriel, …) et abandonnées. Les mairies furent contactées par la fondation pour leur proposer de faire partie du projet et aider ainsi les personnes possédant ce type de maisons. Les fonds apportés par la fondation ont été versés directement aux mairies de chaque village, celles-ci travaillant en tant qu’administratrices de ces fonds.

- Arquitectos Artesanos : direction et administration

La direction et l'administration de l'agence sont en contact direct avec la fondation. L'administration fait la demande des fonds aux mairies pour l’achat des matériaux et leur donne en retour toutes les factures et preuves d’achat ainsi que des comptes-rendus hebdomadaires sur l'avancement des chantiers.

- Arquitectos Artesanos : coordinateurs et architectes conducteurs des travaux

Les architectes sur place dans les différents villages prennent les décisions concernant le projet architectural et le chantier. Ils demandent l’approbation des coordinateurs lorsqu’ils en ressentent le besoin sur un sujet donné. Ils sont également le contact direct avec les bénéficiaires : ils se mettent d’accord avec eux pour la réalisation des travaux.

- Les bénéficiaires

Les bénéficiaires furent identifiés à partir des recensements faits par les mairies. Les architectes ont visité les maisons traditionnelles touchées et on choisi les bénéficiaires en prenant en compte une condition imposée par la fondation : pour pouvoir profiter de l’aide, il fallait être en possession d’une habitation traditionnelle endommagée par l’un des séismes. Par maison traditionnelle se comprend une maison faite

$ financement :

matériaux, outils, architectes

MAIRIES

$ transfert

- rapport d’avances

- audits fiscales

- compte-rendus

- factures

Administration

Architectes

Bénéficiaires

Pictogrammes

Main-d’œuvre

$ salaire

Chantier

107 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 196. Diagramme d’organisation des acteurs du projet de reconstruction Source : élaboration propre : City hall, house by Artem Kovyazin from the Nou n Project ; truck, construction, tradesman, wheelbarrow by "Made by Made" from the Noun Project

selon les techniques et traditions architectoniques locales et avec des matériaux régionaux. De plus, celle-ci ne doit pas présenter de modifications ou d'altérations dans sa structure d’origine par des systèmes ou matériaux étrangers. La fondation, en contre partie de l’aide donnée, demandait aux bénéficiaires de chercher et payer la main-d’œuvre. Ils pouvaient également faire eux-mêmes partie de la main-d’œuvre eux-mêmes. En fonction de la situation socio-économique des bénéficiaires, certains pouvaient recevoir une aide supplémentaire de la fondation, totale ou partielle, afin de couvrir ces frais de main-d’œuvre. Le cas échéant, le cabinet devait se charger de faire la demande de ces fonds auprès des mairies et de rémunérer les travailleurs. Cette aide complémentaire fut utilisée tout particulièrement dans le village Santiago Zacatepec, où la situation économique de la communauté est particulièrement précaire et où aucun des bénéficiaires n’est en mesure de financer la main-d’œuvre. La fondation a par conséquent couvert ces frais pour les habitants de ce village.

- La main-d’œuvre

Bien que l'agence travaille avec de la main-d’œuvre déjà spécialisée pour ses projets privés, dans le cas de ce projet de reconstruction, et du fait du mode de financement et des conditions imposées par la fondation, les ouvriers engagés par les familles bénéficiaires ne sont, dans la plupart des cas, pas formés aux techniques de construction traditionnelles.

d’Oaxaca : la Sierra Mixe, dans le village de Santiago Zacatepec, et dans la Mixteca, dans la ville de Huajuapan de León et le village de Mariscala de Juárez.

Dans le même temps, dans le village de Tezoatlán de Segura y Luna, qui se trouve également dans la région Mixteca, ils font des interventions sur des habitations traditionnelles endommagées par d’autres facteurs que les derniers séismes : principalement le manque d’entretien, les mauvaises pratiques influencées par des constructions en béton et les dommages causés par des séismes antérieurs.

Le cabinet a fait des propositions d’intervention en fonction des dommages présents dans chaque village.

C’est ainsi que dans la Mixteca, où les dégâts étaient partiels, le projet serait de faire une évaluation des habitations et de les consolider selon les besoins individuels. Par contre, dans la Sierra Mixe, où les dégâts étaient plus importants, ils ont proposé de construire trente-quatre (34) nouvelles habitations selon un prototype développé antérieurement par l'agence.

L’organisation du projet au sein de l’agence

L’agence, sise dans la ville de Oaxaca de Juárez, intervient dans deux régions distinctes de l’État

L’agence étant un cabinet de petite taille, elle n’avait pas les effectifs suffisants pour mener à bien la mission au moment de s’engager avec la fondation. Elle a donc dû embaucher dix architectes pour les envoyer dans chacun des villages. Elle a choisi des architectes ayant participé à des séminaires de la Casa de Chiname pour accomplir les travaux. Elle a organisé un week-end de présentation du projet durant lequel les architectes ont été répartis dans les différents villages. En décembre 2017, ils se sont installés sur place et commencèrent leur mission.

Avant de démarrer le projet, l’agence a fait des rencontres avec les autres acteurs du projet dans

108 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE

Direction

Arq. Juan José Santibañez

assistante de direction

Arq. Gabriela Pérez

Administration

Arq. Edith Rodríguez

TEZOATLÁN DE SEGURA Y LUNA

Arq. Mario Martínez

Arq. Carolina Ramos*

(*temporairement)

coordination mixteca

Arq. Mario Martínez

HUAJUAPAN DE LEÓN

Arq. Nestor Hernández

Arq. Mayra Pimentel

Arq. Julián González

MARISCALA DE JUÁREZ

Arq. Ángel Chávez

Arq. Karen Cambrón

Arq. Ana Lozano

coordination sierra mixe

Arq. María Santibañez

SANTIAGO ZACATEPEC MIXE

Arq. Tony Mendoza

Arq. Mariana Ibarra

Arq. Eric Pérez

Arq. Julio Rosas

109 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 197. Diagramme d’organisation au sein de l'agence en mars 2017 Source : élaboration propre

chacun des villages : notamment avec la mairie afin d'entamer les démarches administratives et financières, et avec les bénéficiaires, pour la réalisation des travaux.

Interventions à la Mixteca

Les travaux dans les trois villages mixtecos sont coordonnés par un architecte que habite dans la région, au village de Tezoatlán depuis quatre ans. Il travaillait sur place sur un projet de réhabilitation d'une grande hacienda du centre-ville et sur les ateliers temporaires d'auto-construction au moment de séismes. Maintenant il coordonne le projet de reconstruction dans la région Mixteca. Il fait des déplacements entre les trois villages pour vérifier l’avancement sur des chantiers et orienter les architectes sur les méthodes de reconsolidation les plus adaptées à l'état des logements. C'est lui qui

prend les décisions finales concernant le projet de reconsolidation et les chantiers.

1. Huajuapan de Léon

Huajuapan est l'une des villes les plus grandes et importantes de la région mixteca. Il s'agit d'une ville qui a perdu son image traditionnelle en raison du commerce, des expatriés, et en général à de fortes influences externes. Il reste très peu d'habitations locales dans le centre-ville.

Trois architectes travaillent sur la reconsolidation de seize (16) habitations ainsi qu'a la rehabilitation du musée régional de la ville, le MUREH. Quelques-unes de ces maisons furent construits il y a cent-cinquante (150) ans et ont une valeur historique et patrimoniale inestimable. Lors du tour d'inspection des habitations endommagées, l'agence en a repéré quelques-unes qui en raison de leur taille nécessiteraient un budget

110 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 198. Carte de localisation des villages du projet « Reconstruir desde la Tierra » Source : élaboration propre Pictogramme : Map Marker by Kaique Amorim from the Noun Project 1 Oaxaca de Juaréz 2 Huajuapan de Léon 3 Mariscala de Juaréz 4 Tezoatlán de Segura y Luna
1 5 2 3 4 Sierra Norte Mixteca
5 Santiago Zacatepec Villages du projet Villages du projet - MSP

et un temps d'intervention doublés.

Les problématiques sur les chantiers son très particulières mais elles se résolvent au fur et au mesure que ceux-ci avancent.

Mariscala est un petit village situé à deux heures de route de Huajuapan.

Dans la municipalité de Mariscala, l'agence à commencé le projet avec la reconsolidation de sept (7) habitations, trois dans le centre-ville, dont la maison paroissial et deux petites habitations en adobe. Les quatre autres son situées dans la communauté de San Miguel Tiuxe formé d'une dizaine de familles et séparée du centre-ville de Mariscala par une rivière qui les isole complètement pendant la saison des pluies.

La problématique particulière à ce village a été, dès le début, l'entêtement d'une grande partie de la population. Des personnes n'ont pas voulu participer au projet à cause de son approche traditionnelle et locale. Ils ne faisaient pas confiance à l'agence et ceux qui ont accepté l'aide l'ont fait sans être complètement convaincus. De même, l'agence avait l'impression que la mairie constituait plus un obstacle qu'autre chose. Les démarches administratives vis-à-vis des autorités locales étaient plus compliquées que dans le reste des villages.

Les trois architectes conducteurs des travaux ne se sont jamais sentis à l’aise au sein de Mariscala. Ils ne restaient que le temps strictement nécessaire dans le village et le quittaient dès qu’ils en avaient l’opportunité. Il faisaient leur travail avec du recul et

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2. Mariscala de Juárez Figure 199. Rehabilitation du musée régional de Huajuapan
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Photos : auteur Figure 201. Construction d'une maison à Mariscala Figure 200. Visite de la maison paroissiale à Mariscala

en essayant de ne pas trop s’imprégner de l'ambiance négative du village. Les travaux avançaient malgré cette situation et les architectes restaient intéressés aux techniques de construction locales. Ils ont participé à l'atelier d'enduits en terre organisé à Tezoatlán pendant ma mise en situation professionnelle et ils ont même invité les ouvriers de leurs chantiers à participer à l'atelier.

En fait, l'une des contraintes communes à l'ensemble de villages est liée à la procédure de recrutement et de financement de la main-d'œuvre, effectuée par les familles bénéficiaires. Bien que l'agence ait son propre réseau d'ouvriers spécialisés dans les techniques de constructions traditionnelles, l'effectif de ce réseau restait insuffisant pour ce projet. Les familles choisissent les ouvriers en fonction des leur budget et, en même ils ne sont pas en mesure de financer une main-d'œuvre spécialisée. Les architectes travaillent donc avec des ouvriers dont la plupart ne maîtrise pas les savoir-faire locaux ni les systèmes de construction en terre. Quelques-uns refusent même parfois de mettre en œuvre certaines techniques, car ils les considèrent « faibles ». Cependant, les architectes profitent de cette situation pour convertir les chantiers en « centres de formation », où les ouvriers apprendront ces techniques en les mettant en place. De même, pour les habitants, les habitations resteront un exemple de ce qui peut être fait pour reconsolider leurs maisons et pour les entretenir.

3. Tezoatlán de Segura y Luna

En plus de son travail de coordinateur dans les villages de Huajuapan et Mariscala, l'architecte coordinateur a la mission de suivre les chantiers de reconsolidation à Tezoatlán. Lui et son travail au village sont déjà

connus et il maîtrise déjà bien la culture locale ainsi que les traditions et techniques architectoniques traditionnelles. Il compte également avec de la main d'œuvre spécialisée car il a déjà formé un groupe de maçons locaux en lesquels il a toute confiance pour mener à bien les chantiers.

Le soucis principal est qu'entre toutes ses activités, les aller-retours entre les villages, qui lui prennent la plupart de son temps, la multitude de chantiers qu'il supervise, il néglige parfois quelques taches.

Dans l'organisation du projet, l'agence n'as jamais contemplé qu'elle aurait besoin également d'un architecte chargée de ce village.

Interventions à Santiago Zacatepec

L'équipe de travail à Zacatepec est formée par d'une coordinatrice basée dans la ville de Oaxaca plus de quatre architectes qui mènent les travaux sur place. L'un des quatre est plutôt chargé des questions administratives : faire passer les commandes de matériaux, avoir un contrôle des matériaux stockés à la cave, administrer le budget des chantiers, déclarer la main-d’œuvre auprès de la mairie afin d'arranger les rendez-vous de paiement, élaborer les contre-rendus et rapports hebdomadaires et mensuels. Quant au reste des architectes, ils effectuent les suivis de chantier de deux ou trois habitations chacun.

La mairie du village a fait, avant et indépendamment ce projet de reconstruction, un recensement des habitations endommagés suite aux séismes. Une fois le projet établi entre la mairie et la fondation, une commission de fonctionnaires municipaux a choisi les trente-quatre (34) familles bénéficiaires du projet à partir de la classification des dommages présents

113 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE

sur les habitations, mais également en fonction de l'implication sociale des habitants au sein de la communauté.

Étant donné que les logements sélectionnés étaient tous classées comme totalement endommagées (perte totale), l'agence a décidé d'intervenir en construisant les nouveaux logements selon le prototype développé pour le projet Las mujeres de arcilla (Les femmes d’argile, Figure 202). Ils l’ont légèrement modifiée pour l’adapter à la culture mixe et aux techniques des construction locales.

Démarrage du projet

Avant son arrivée au village et le démarrage du projet, l'agence s'est introduite auprès des bénéficiaires lors d'une réunion à la ville de Oaxaca : elle a présenté sa démarche de respect des savoir-faire locaux et des cultures constructives vernaculaires. Elle a expliqué la proposition d'intervention ainsi que la procédure d'organisation : les familles seraient organisées en cinq (5) groupes d'intervention différents et la construction de chaque prototype devrait prendre environ dix (10)

semaines. Ainsi, les architectes conducteurs des travaux suivront deux chantiers chacun pendant deux mois et demi afin de finir les trente-quatre (34) habitations en un an de projet. Les familles furent également averties sur leurs responsabilités au sein du projet : elles devraient amener sur leur parcelle le gravier, le sable et les cailloux nécessaires à la construction du logement. Quant au reste des matériaux, ils seraient fournis par l'agence. Ils devraient également s'occuper de choisir les ouvriers pour leur chantier. Dans le cas particulier du village de Zacatepec, où la population n'était pas en mesure de financer la main-d’œuvre, c'est la fondation qui couvrait les frais. Néanmoins le montant fixé restait réduit par rapport à la rémunération habituellement payée, et les familles bénéficiaires devraient apporter petits déjeuners et déjeuners aux ouvriers pour compenser ce fait.

Les gens du village étaient sceptiques quant à la décision de construire les habitations avec des systèmes en terre, ils considéraient que le béton était une meilleure solution car ils ont le sentiment qu’il

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Figure 202. Prototype du projet Femmes d'argile © Arquitectos Artesanos. Projet  : Juan José Santibañez

s’agit d’un matériau plus résistant. Le béton étant hors de leur budget, ils le méconnaissent et ne sont pas habitués aux constructions l’utilisant. Ils voyaient dès lors justement ce projet comme l’occasion de se faire payer du béton et donc aussi celle de vérifier leur théorie selon laquelle il est plus résistant.

C'est pourquoi l'agence leur a proposé de construire un premier prototype modèle afin de leur montrer les étapes de construction et les renforcements appliqués aux systèmes locaux.

Prototype proposé par l'agence pour la reconstruction à Zacatepec

Il s'agit d'une habitation formée de deux parties : une partie publique et de service, et une privée avec trois chambres. Chaque section est formée par l’intersection des deux arcs. Les toilettes, la salle de bains, la cuisine et la salle à manger se situent dans la partie publique. Dans la cuisine, le système de chauffage à bois de la plaque de cuisson sert également à chauffer l'eau de la douche, laquelle se trouve dans la pièce adjacente.

Le prototype est composé par deux systèmes déjà connus par les villageois : le pisé pour la base des murs et l'adobe pour rehausser le niveau de ceux La fondation est en pierre maçonnée suivi par une arase sur lesquelles les murs se posent directement afin d'éviter que l'humidité ne monte par capillarité et détériore leur capacité portante. Les murs sont renforcés par la présence des arcs et par des chaînages sur tout leur contour : un chaînage intercalé entre le pisé et l'adobe ainsi qu'un deuxième chaînage de cloison.

L’une des modifications par rapport à la mise en œuvre traditionnelle du village et ayant pour objet

le renforcement des murs est de construire les coins et les « T » d'une seule pièce afin d'assurer leur continuité horizontale, au lieu de bâtir chaque côté de la maison de manière indépendante, comme cela se fait normalement à Zacatepec. Pour garantir une bonne connexion entre ces éléments et le reste du mur, les premiers sont en partie construits en diagonal comme l'on peut le voir sur la Figure 203. Cela évite l’apparition de fractures verticales au niveau des angles lors d'un séisme.

La toiture est à deux pentes avec un plafond en voliges de bois massif et une couverture en tuiles de terre cuite.

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Figure 203. Connexion entre les coins et le reste du mur

Toiture

Plafond en voliges et toit en tuiles de terre cuite.

Charpente

Chevrons en bois à 61 cm.

Arcs

Deux arcs en brique renforcent la structure portante.

Murs

Base de 80 cm en pisé, chaînage intermédiaire en béton armé de 10 cm d'épaisseur, deuxième partie des murs en adobe maçonné avec du mortier terre-chaux, puis un deuxième chaînage de cloison en béton armé de 15 cm d'épaisseur.

Sol

Sol en terre compactée et carrelage en terre cuite.

Fondation

Fondation en pierre maçonnée plus arase de béton armé de 30 cm d'épaisseur.

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Figure 205. Étapes de construction du prototype © Arquitectos Artesanos Figure 204. Composantes du prototype

Des conflits liés au prototype

Lors de la construction du prototype modèle, plusieurs contraintes sont apparues.

Dès le début, il y a eu un conflit avec les propriétaires de ce logement : les travaux des fondations avaient été finis et les architectes effectuaient à coté des preuves avec la terre du site afin de trouver les bonnes proportions pour la fabrication des adobes et du pisé. Le lundi matin, ils ont constaté à leur arrivée que les propriétaires avaient mis en place du ferraillage à tous les angles de la maison. Bien qu'ils aient accepté le projet proposé par l'agence, ils tentaient obstinément de forcer les architectes à utiliser des poteaux en béton armé pour renforcer la construction. Toutes les discussions pour tenter de les convaincre sur la consolidation conseillée par l'agence ayant échoué, celle-ci a dû abandonner le chantier au milieu et retirer la famille du projet.

Il fallait donc recommencer un nouveau prototype. Pour ce chantier, les contraintes furent surtout liées à un manque de renseignement sur la localité : les ressources disponibles, les cultures constructives, les conditions actuelles des habitations et des parcelles, et les conditions climatiques.

Les tests d'adobe n'ont rien donné. Les fortes et constantes pluies n'ont pas permis le séchage de ceux-ci et, pendant trois semaines, les architectes ont attendu les résultats avant de finalement envisager d'autres options. Quant au pisé, il séchait mais cela prenait beaucoup de temps. Les villageois sont habitués à ces conditions climatiques, c'est pourquoi ils ne construisent qu'au printemps, quand les pluies sont moins abondantes. Ce projet étant prévu pour ne durer qu'une année, l'agence ne pouvait se permettre

de faire de même et a donc dû chercher des solutions permettant de construire tout au long de l'année. Celles-ci impliquaient l'utilisation de matériaux n'ayant pas besoin de sécher sur place, mais cela voulait dire que la reconstruction ne pouvait être réalisée uniquement avec des ressources locales. Plusieurs options furent débattues, en essayant de respecter au maximum les valeurs du projet, dont la fabrication des adobes dans une autre localité et son approvisionnement sur site. Pour cela, il fallait trouver pas très loin un emplacement et un producteur d'adobes. Cette option a été déclinée et finalement le matériau choisi pour remplacer les adobes fut la brique en terre cuite.

Ce second prototype avait été commencé en janvier et à mon arrivé à Zacatepec au mois de juin il n'avait pas encore été terminé. Parallèlement, les architectes avaient commencé d'autres chantiers et, à chaque fois, de nouveaux « imprévus » se présentaient. Dans quelques cas, la dimension de la parcelle ne correspondait pas à celle du prototype, ils devaient donc proposer des variations du projet à une taille adaptée. Dans d'autres cas, les bénéficiaires refusaient l'utilisation de tuiles car il s'agit d'un matériau qui n'as jamais été produit à Zacatepec, et qui n'est pas disponible sur place s'il y a besoin de remplacer des pièces ou les entretenir. Ils demandait alors l'utilisation de tôles. Les approvisionnements en matériaux prenaient également énormément de temps : les matériaux à Zacatepec peuvent coûter quatre fois plus cher qu'à Oaxaca et cela obligeait les architectes à se fournir là-bas puis tout apporter à Zacatepec afin de rester dans le budget du projet. Tout cela ralentissait ou arrêtait les chantiers. En somme, tous ces soucis empêchaient le projet de démarrer complètement.

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À ce moment-là, une visite du directeur et de la coordinatrice du projet fut organisée afin de prendre des décisions importantes et rentrer dans les délais. Lors de la visite, ils ont fait un tour d'inspection des habitations des familles bénéficiaires. Ils ont constaté que la mairie avait classé quelques habitations comme totalement endommagée (perte totale). Alors qu'elles pouvaient être reconsolidées. L'agence avait fait l'erreur de faire une proposition de reconstruction basée sur cette classification sans jamais avoir pris le temps de constater les dégâts pour elle-même, ni même avoir fait une visite du site.

Elle va décider alors de changer la proposition initiale et de reconstruire en fonction des les conditions de chaque habitation. Ainsi, les habitations n'ayant pas souffert de dégâts importants seraient reconsolidées, tandis que par celles qui effectivement étaient totalement endommagées le prototype serait construit. Il serait plus rapide pour les architectes de mettre en place ce mode d'opération plutôt que de lutter à chaque fois avec les contraintes du prototype. Mais cette décision a eu également son impact auprès de la population car il avait été dit aux bénéficiaires qu'il leur serait construit une habitation neuve. Par conséquent, ceux dont la maison serait finalement reconsolidée ont été très déçus et certains ont même reçu cela comme une injustice et un traitement inégal comparé à leur voisin dont la maison serait reconstruite entièrement. De ce fait, en plus du retard sur les dates d'intervention, quelques bénéficiaires ont commencé à s’impatienter et à ne plus attendre leur tour. Ils on'nt donc pas continué à participer au projet et l'agence à dû les remplacer.

Implication des architectes conducteurs des travaux

Malgré tous les contretemps et imprévus les architectes sur place ont réussi à rattraper une grande partie du temps perdu. Je considère important de préciser que tant la coordinatrice de la région que le directeur de l'agence faisaient leur supervision à distance et qu'à la différence de la mixteca, où le coordinateur était plutôt présent, les architectes conducteur des travaux se sont retrouvés tout seuls, isolés dans la montage avec des moyens de communication limités, à essayer de résoudre les problématiques survenues. C'est un fait que le démarrage du projet a été dur mais ils étaient à tel point impliqués dans le projet et la reconstruction, qu'une fois les obstacles surmontés, ils ont très rapidement avancé sur les chantiers. Ils maîtrisaient maintenant la mise en œuvre du prototype et les techniques de construction en terre, ainsi que la culture locale et les choses progressaient très rapidement. Ils travaillaient tous les quatre dans une ambiance de coopération et avec un esprit de travail en équipe.

À travers de petites actions ils ont réussi à s'intégrer au le village, ils ont appris quelques phrases en langue mixe et ils les pratiquaient avec les habitants et les maçons. Ils ont réussi à gagner leur confiance et même à créer des liens d'amitié qui les ont permit de

Au moment de mon départ ils étaient le groupe le plus avancé avec quatorze (14) habitations terminées, entre les prototypes et les maisons reconsolidés.

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119 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 206. Prototype modèle fini Figure 207. Entrée et couloir Figure 208. Toilettes et salle de bain Figure 209. Cuisine et plaque de cuisson Figure 210. Salle à manger et bénéficiaires Figure 211. Chambre meublée Figure 212. Mobilier dessiné pour le prototype Photos : auteur

Réflexions au tour du projet

Dans le cadre d’un projet de reconstruction, chaque acteur lit le territoire différemment et intervient en fonction de ces propres déductions. Pour ce qui concerne ce projet, les acteurs étaient locaux : ils connaissaient et maîtrisaient la complexité du territoire. Cependant, les différences culturelles entre les diverses ethnies du projet furent plus importantes que ce qu'avaient prévu la fondation et l’agence au démarrage du projet.

L’agence connait très bien le territoire de la région mixteca, elle y travaille depuis longtemps et, par conséquent, maîtrise les traditions architectoniques ainsi que la culture locale. En revanche, ce n'est pas le cas dans la région mixe. L’un des points discutables de leur proposition d’intervention sur ce village fut le fait d’amener un prototype conçu initialement pour une région complètement différente, des conditions climatiques aux modes de vie et traditions, et de faire uniquement des modifications afin de l’adapter à la technique de construction en terre locale, sans avoir pris le temps d’approfondir sur les conditions locales, les temps de mise en œuvre, ni de constater l’ampleur réel des dégâts sur place.

Il n’est pas facile de mettre en place un projet de reconstruction avec une démarche purement locale et vernaculaire. Il existe des contraintes liées, par exemple, au type de financement. Dans le cas présent, l’agence se trouvait limitée quant à l’utilisation de matériaux locaux en raison des justificatifs de dépenses qu’elle devait présenter aux mairies et à la fondation. L’utilisation de matériaux locaux implique parfois des méthodes d'approvisionnement qui ne permettent pas l'obtention de justificatifs pour l'administration. De ce

fait, l'agence s’est inclinée à plusieurs reprises au sujet de l’achat de matériaux industriels en acceptant de traiter avec des fournisseurs permettant l'obtention de factures. Ces décisions impliquaient également que ces matériaux devaient être ensuite acheminés dans les villages ce qui, pour ceux très éloignés et difficile d'accès, ralentissait ou arrêtait constamment les chantiers.

En ce qui concerne les conditions imposées par l’agence, particulièrement celle d’intervenir uniquement sur les maisons traditionnelles sans modifications dans leur structure d’origine, cela a, de mon point de vue, exclu une multitude de cas où il eût été très intéressants de sensibiliser les propriétaires quant aux fausses idées de « sécurité » qu’apportent les systèmes hybrides selon eux. Intervenir sur ce type de maisons n'aurait pas seulement permis de récupérer le patrimoine architectonique mais aurait également eu un impact sur la revalorisation de l’architecture vernaculaire.

J’ai pu de même observer que les interventions et les résultats dans les deux régions étaient différents en fonction de l’implication et de l’insertion des architectes conducteurs de travaux dans les villages. À Zacatepec, les architectes avaient réussi à s’intégrer dans le village et à avoir un avis favorable de la population quant à leur travail et les techniques utilisées pour la réalisation des travaux. De plus, ils avaient créé des liens forts avec des villageois et les ouvriers, ce qui avait poussé le projet et donnait des résultats très favorables et plus rapides par rapport à la mixteca, où les chantiers prenaient plus de temps à se terminer. L’accompagnement des coordinateurs a eu également son influence sur les chantiers. D’un coté, les architectes de la mixteca dépendaient énormément de l’avis favorable du coordinateur avant

120 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE

de mettre en place des travaux ou des interventions. Ils manquaient d’indépendance et de liberté décisionnelle et cela provoquait par conséquent du retard sur les chantiers. D'un autre coté, la coordinatrice des mixes n'était pas sur place et plutôt absente, les architectes avaient de ce fait la complète liberté de prendre les décisions sur leurs chantiers et ils ont su réagir face aux différentes problématiques causées par la manque de renseignement en début de projet. Les contraintes dans un projet de reconstruction de ce type sont nombreuses. La mise en place d’une démarche locale et coopérative peut devenir complexe mais quoi qu'il en soit, si l’on parvient à rétablir la vie des gens de façon respectueuse de leur culture et de leur environnement, l'on réussira également à renforcer les savoir-faire locaux, liens les sociaux et à mettre en valeur les traditions architectoniques vernaculaires.

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Figure 213. Habitation rehabilité selon besoins individuels

Habitation construite selon prototype

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Figure 214. Pose de chevrons Figure 215. Pose de voliges Photos : auteur

Habitation construite selon prototype

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Figure 216. Maçonnerie des adobes Figure 217. Construction des arcs Photos : auteur

Habitations construites selon les besoins individuels

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Figure 218. Pose de la charpente Figure 219. À la fin du chantier Photos : auteur

Habitation construite selon les besoins individuels

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Figure 220. Vue extérieure, pose de la charpente Photos : auteur Figure 221. Vue intérieure, pose de la charpente

Conclusions

La mondialisation affecte les êtres humains de différentes manières et l'une d'elles est liée à la façon dont nous réagissons et intervenons face à un désastre naturel, et comment nous aidons les populations touchées par celui-ci. Durant nos cours du DSA, nous nous sommes questionnés à diverses occasions sur les solutions mises en œuvre par les ONGs, les associations internationales et les gouvernements qui, en raison d’une volonté (louable) d’aider rapidement ces populations, interviennent sur ces territoires sinistrés de façons discutables du point de vue de l'adéquation de ces solutions au milieu et à la culture locale, entre autres choses. N'ayant pas vraiment d'autre possibilité, les populations, n'ont d'autre choix que d'ajouter à leur processus de résilience ce nouveau facteur qu'est l'adaptation à un habitat inconnu. Et ils se retrouvent en général seuls pour effectuer ce travail d'adaptation, abandonnés par les constructeurs de ces habitats qui les laissent sans orientation, ni suivi, dès qu'ils finissent leur travail purement matériel.

Y a-t-il d'autres solutions ?

Nous sommes, en tant qu'architectes, en mesure de nous questionner sur ce type d’interventions et de proposer des solutions plus respectueuses de sa population, de leur culture et de l’environnement.

L’une des ces solutions est à chercher du côté des cultures constructives locales, lesquelles intègrent dans leur conception des dispositifs sociaux et constructifs permettant aux habitants de « cohabiter » avec les aléas et les phénomènes naturels, en réduisant leur vulnérabilité face à ceux-ci et ce, en harmonie avec toutes les autres composantes naturelles et culturelles de ces cultures constructives. C’est pourquoi, leur revalorisation et re-intégration au sein d’un territoire sinistré, qui plus est dans le cadre d’un projet de reconstruction, peuvent jouer un rôle très avantageux. De plus, de telles cultures constructives s’appuient sur les savoir-faire locaux, tout en les renforçant, répondent aux modes de vie et aux besoins de la population, et utilisent des ressources disponibles sur place.

Durant ma mise en situation professionnelle, j’ai pu observer de près le projet de reconstruction «  Reconstruir desde la tierra » qui intégrait justement ces notions de culture constructive locale et de culture constructive vernaculaire comme principes de base pour la réalisation des travaux. Ce projet a pris place dans l’État de Oaxaca au Mexique, qui s’étale sur une géographie très accidentée, ce qui rend très complexes sa gouvernance et son administration. La multiplicité des autorités locales y a rendu difficile la mise en place d’un programme de reconstruction suite aux séismes

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de 2017. En fait, les aides du gouvernement se sont limitées à allouer de l’argent à quelques communautés affectées sans réellement faire un suivi sur l’utilisation de ces ressources et encore moins des chantiers. Ceci a eu pour conséquence d'inciter à l’auto-construction non dirigée, ce qui a aboutit a de piètres résultats.

D’un autre côté, la diversité ethnique de ce territoire a généré au fil du temps une atmosphère de grande richesse culturelle au sein de la population. Les oaxaqueños sont en général des personnes très sensibles à la culture et à la conservation des traditions et du patrimoine historique et architectural. Sur la base de ces principes de conservation, plusieurs projets ne dépendant pas du gouvernement sont nés afin d’aider les populations touchées et de reconstruire des habitations ainsi que des immeubles patrimoniaux, en respectant les traditions architectoniques. Des fondations, des associations et des agences d’architecture locale ont réagi et ont commencé à mettre en place des projets de reconstruction locaux et communautaires. J’ai eu l’opportunité de rencontrer et collaborer avec l’un de ces acteurs : le cabinet

Arquitectos Artesanos. Ma mise en pratique chez eux m’a permis d’élargir ma vision sur le processus de reconstruction : les acteurs, les défis et contraintes pour le mettre en place, mais également les qualités (et les limites) de la démarche coopérative et de

l’approche régionale.

Quel est le défi principal de la mise en œuvre d'un projet intégrant l'architecture vernaculaire ?

Dans le cas qui nous concerne (et comme dans d'autres territoires sinistrés où il est tenté d’appliquer les principes d'une culture constructive locale), le projet s’est confronté à un mépris des cultures constructives locales d'une partie des habitants. La destruction ne se limitait pas aux dégâts physiques : dans l’imaginaire de la population, ces constructions sont de piètre qualité et ils les voient comme largement inférieures aux constructions « modernes ». Cette façon de voir les choses traduit une perte des valeurs traditionnelles et il fallait donc faire un travail de « reconstruction immatérielle » qui portait sur la revalorisation de l’héritage et sur la présentation des avantages des constructions vernaculaires par rapport aux constructions modernes.

Il fallait dans le même temps travailler sur la reconstruction physique des habitations endommagées en utilisant des techniques de construction locales sans forcément les reproduire à l’identique. Et cela aidait également le travail de reconstruction immatérielle. En effet j'ai pu observer au cours de ce processus un phénomène très

127 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE

intéressant : ces deux reconstructions se déroulaient parallèlement et elles s’alimentaient l’une à l’autre en permanence. Par exemple, le fait que l’architecture vernaculaire soit en « crise » implique que les détenteurs des savoir-faire locaux et la main-d’œuvre maîtrisant les techniques de construction traditionnelles sont en nombre limité pour la reconstruction matérielle. Mais cet état de fait a pu être tourné en atout pour l'objectif de reconstruction immatérielle, via des dispositifs de revalorisation de l’héritage vernaculaire : les chantiers furent utilisés en permanence comme des centres de formation pour les maçons qui, dans ce type de villages, sont devenus les nouveaux concepteurs et fabricants de la ville. C'est pourquoi, si l’on parvient à leur faire maîtriser des techniques de construction vernaculaires, qu’ils se les approprient et qu’ils les mettent en place, cela génère un changement qui va au-delà de la simple reconstruction de quelques habitations endommagées. Les résultats positifs dans le processus de reconstruction immatérielle dépendent en grand partie de ceux obtenus pendant la reconstruction matérielle et d'une correcte réinterprétation des valeurs locales et culturelles.

Quel rôle peut jouer l'architecte dans ce processus ?

Dans ce type de processus, l’architecte peut remplir le rôle d’accompagnateur et de conseilleur. Il a les compétences pour faire des apports contribuant au renforcement des éléments structuraux ainsi qu'à l’intégration d’autres matériaux et procédés (non nécessairement locaux mais offrant par exemple des atouts face aux contraintes climatiques) qui permettent d’accélérer le processus constructif et de rétablir ainsi le plus rapidement possible le mode de vie des familles. Il peut également promouvoir et

mettre en place des dispositifs de revalorisation des techniques locales. Cependant, en tant qu'acteur étranger, il doit se baser sur une lecture approfondie du territoire, depuis l'ampleur des dégâts jusqu’à une analyse détaillée de la culture locale et des conditions particulières du site, afin de faire des propositions adaptées au contexte.

L'étude de l'intégration de l'architecture vernaculaire dans des projets de reconstruction mérite, à mon sens, de se voir dédier plus de temps de recherche. L'architecture vernaculaire et les cultures constructives sont en elles-mêmes un sujet complexe, avec une multitude d'exemples tout autour du monde, et chaque situation post-catastrophe à ses propres conditions, qui lui sont particulières. Au travers de ce document, mon but est de donner quelques pistes sur la compréhension de la dimension immatérielle de l'architecture vernaculaire et son application à des projets de reconstruction.

Les connaissances acquises pendant la formation de DSA ainsi que durant mon expérience chez Arquitectos Artesanos furent très enrichissantes. Je souhaite pouvoir les mettre en pratique dans mon avenir professionnel, pouvoir faire partie de projets communautaires et de mitigation des risques.

128 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
129 III. M ÉMOIRE ET RECHERCHE
Figure 222. La maison de la famille Blas De gauche à droite : la mère de Gabino, maçon, Antelmo, Juvenal , Elba, Eric, Bety, Mariana, Hidalia, Gabino, Tony, Juls et moi. Photo : Julio Rosas Avendaño

OUVRAGES ET ARTICLES

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131

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132

Table des sigles

CDI. Comisión Nacional para el Desarrollo de los pueblos Indígenas

FAHHO. Fundación Alfredo Harp Helú Oaxaca

FONDEN. Fondo de Desastres Naturales

INEGI. Instituto Nacional de Estadística y Geografía

SEDATU. Secretaría de Desarrollo Agrario, Territorial y Urbano

SSN. Servicio Sismológico Nacional

UNAM. Universidad Nacional Autónoma de México

133

Liste des figures

134 FIGURE 1. Dégâts sur une habitation en pisé à Zacatepec 4 FIGURE 2. Dégâts dans une habitation à Zacatepec 12 FIGURE 3. Épicentres des séismes de septembre 2017 et les États affectés 15 FIGURE 4. Recensement officiel des logements affectés par les séismes de septembre 2017 16 FIGURE 5. Localisation de Oaxaca par rapport aux séismes 16 FIGURE 6. Carte des régions de Oaxaca et des municipios affectés par les séismes 16 FIGURE 7. Oaxaca au sein du Mexique : données statistiques 18 FIGURE 8. Relief de l’État de Oaxaca et pricipales villes 19 FIGURE 9. Division politico-administrative de Oaxaca : 570 municipios 19 FIGURE 10. Cartographie des ethnies indigènes à Oaxaca 19 FIGURE 11. Division territoriale de Oaxaca par régions ethno-culturelles 19 FIGURE 12. Carte de plaques tectoniques au Mexique 20 FIGURE 13. Sismicité au Mexique en 2015 21 FIGURE 14. Sismicité au Mexique en 2016 21 FIGURE 15. Sismicité au Mexique en 2017 21 FIGURE 16. Pendant le déchargement d’un approvisionnement de bois 22 FIGURE 17. Excavation 26 FIGURE 18. Fabrication des adobes 26 FIGURE 19. Moulage et séchage des adobes 26 FIGURE 20. Suivi de chantier 26 FIGURE 21. Pose de tuiles 26 FIGURE 22. Maison terminée 26 FIGURE 23. Volontaires sur le chantier 27 FIGURE 24. Transmission de charges d’un système en murs porteurs 29 FIGURE 25. Transmission de charges d’un système en portiques 29 FIGURE 26. Décente de charges dans un mur en terre 29 FIGURE 27. Désarticulation des angles lors d’un séisme 29 FIGURE 28. Relation d’élancement 29 FIGURE 29. Intervention couramment appliqué hybridant des systèmes en portique de béton armé et en terre 30 FIGURE 30. Agrafages dans les coins et chaînage supérieur 30 FIGURE 31. Agrafage en béton armé à l’intersection des murs 30
135 FIGURE 32. Villages du projet Reconstruirdesdelatierra 31 FIGURE 33. État de la maison de Don Amancio à mon arrivée à Tezoatlán 33 FIGURE 34. Pose d’adobes avec du mortier terre-sable 34 FIGURE 35. Projet proposé par l’agence 35 FIGURE 36. Assemblage du mur d’origine et du nouveau mur 36 FIGURE 37. Murs de la salle de bains terminés 36 FIGURE 38. Préparations en amont de l’atelier d’enduits 37 FIGURE 39. Résultats de la grille de proportions 37 FIGURE 40. Manu (bas) et Jean (haut) posent la couche d’enduit de finition après le test de proportion 37 FIGURE 41. Test et préparation de la structure du torchis 37 FIGURE 42. Repas clôturant l'atelier 38 FIGURE 43. La partie théorique, le jour de l’atelier pour maçons 39 FIGURE 44. Poste de couche d’enduit de nivellement 39 FIGURE 45. Moi, en charge du poste « sgraffito » 39 FIGURE 46. Tour d’inspection des dommages dans le village 39 FIGURE 47. Architecte participant taillant la couche de terre de la frise 40 FIGURE 48. Maçon posant l’enduit de finition 40 FIGURE 49. Maçon posant l’enduit de finition 40 FIGURE 50. Des maçons remplissant l’osature du torchis 40 FIGURE 51. Préparation de l’enduit de finition 40 FIGURE 52. Préparation d’enduit du nivellement 40 FIGURE 53. Coupe de détails constructifs 41 FIGURE 54. Colonnes et poutre du couloir extérieur 42 FIGURE 55. Pose des chevrons 42 FIGURE 56. Pose du plafond 42 FIGURE 57. Pose des tuiles et du carton bitumé 42 FIGURE 58. Début du percement sous le linteau posé préalablement 43 FIGURE 59. Pose de l’enduit de nivellement 43 FIGURE 60. Enduits et ouvertures de ventilation 43 FIGURE 61. Enduits en terre à l’entrée 43 FIGURE 62. Remplacement de la poutre faîtière 44 FIGURE 63. Pose des chevrons 44
136 FIGURE 64. Pose de voliges 44 FIGURE 65. Pose de tuiles 45 FIGURE 66. Grattage de la peinture à l’huile 45 FIGURE 67. Préparation de la peinture à la chaux 45 FIGURE 68. Première couche de peinture blanche 45 FIGURE 69. Façade d’accès 45 FIGURE 70. Premiers meubles 45 FIGURE 71. Habitation traditionnelle du fils de Doña Juanita 46 FIGURE 72. Exposition d'instruments musicaux dans la salle principale 47 FIGURE 73. Volume de la salle à manger 47 FIGURE 74. Notes graphiques du relevé 48 FIGURE 75. Plans du relevé de la maison Luengas 49 FIGURE 76. Dégâts sur une maison suite aux séisme S7 52 FIGURE 77. Famille affectée par le séisme S7 52 FIGURE 78. Maison détruite lors du séisme S7 52 FIGURE 79. Dégâts sur une maison suite aux séisme S7 52 FIGURE 80. Maison construite après les séismes, avec des tôles 53 FIGURE 81. Maison construite après les séismes, avec du parpaing 53 FIGURE 82. Réparation d'un mur avec des bâches 53 FIGURE 83. Fabrication d'adobes pour réparation propre 53 FIGURE 84. Typologie d'habitation vernaculaire à Zacatepec 54 FIGURE 85. Vue panoramique de Tezoatlán 58 FIGURE 86. Fontaine d’eau potable à Tezoatlán, 1944 60 FIGURE 87. Assemblée de la population Tezoateca 60 FIGURE 88. Mairie de Tezoatlán 61 FIGURE 89. Centre Ville de Tezoatlán 61 FIGURE 90. Voirie à Tezoatlán 62 FIGURE 91. Voies extérieures non pavées 62 FIGURE 92. La rivière 62 FIGURE 93. Procédure de construction collective 63 FIGURE 94. Axonométrie de la typologie en adobe 64 FIGURE 95. Appareillage des adobes 65
137 FIGURE 96. Mur des adobes verticales 65 FIGURE 97. Base de pierre maçonnée 65 FIGURE 98. Agrafes de pierre en angle 65 FIGURE 99. Exemple de toiture en tuiles 66 FIGURE 100. Pose de tuiles 66 FIGURE 101. Axonométrie de pose de tuiles 66 FIGURE 102. Champs de roseau 66 FIGURE 103. Pose du roseau 66 FIGURE 104. Plafond de todiche 67 FIGURE 105. Cactus órgano 67 FIGURE 106. Pose de tejamanil 67 FIGURE 107. Plafond de tejamanil 67 FIGURE 108. Arbre de mezquite 68 FIGURE 109. Morillos récupérés 68 FIGURE 110. Fenêtre de sabino 68 FIGURE 111. Porte de sabino 68 FIGURE 112. Linteau en maison abandonée 69 FIGURE 113. Ouverture typique 69 FIGURE 114. Tuiles entre les adobes 69 FIGURE 115. Préparation de peinture à la chaux 69 FIGURE 116. Extérieur de la maison Chiname 70 FIGURE 117. Extérieur d'une typologie en adobe 71 FIGURE 118. Intérieur d'une typologie en adobe 72 FIGURE 119. Reconsolidation et réinterprétation faits par un maçon local 73 FIGURE 120. Détail de toiture 73 FIGURE 121. Maison en adobe enduite 74 FIGURE 122. Détail de toiture 74 FIGURE 123. Extérieur et entrée du magasin 75 FIGURE 124. Intérieur du magasin 75 FIGURE 125. Façade principale 76 FIGURE 126. Porche et cuisine au fond 76 FIGURE 127. Niche - autel 77
138 FIGURE 128. Intérieur de la maison 77 FIGURE 129. Typologie en adobe avec porche 78 FIGURE 130. Porche et cuisine au fond 78 FIGURE 131. Porche intérieur, patio et dortoirs au fond 79 FIGURE 132. Mise en valeur d'éléments traditionnels 79 FIGURE 133. Vue panoramique de Santiago Zacatepec 81 FIGURE 134. Vue depuis le bas du village 83 FIGURE 135. Tortilla mixe et les vues de la montagne 83 FIGURE 136. Vue du bas de village 83 FIGURE 137. Sentiers partant de la route principale 83 FIGURE 138. La route que traverse le village 84 FIGURE 139. La route que traverse le village 84 FIGURE 140. Sentiers d'accès aux maisons 84 FIGURE 141. Vue du centre-ville depuis l'hôtel 85 FIGURE 142. Vue de l'auditorium récemment construit 85 FIGURE 143. Orchestre mixe. Concert dans une habitation mixe 85 FIGURE 144. Orchestre mixe. Concert dans le centre-ville 85 FIGURE 145. Femme portant du bois de chauffage à l'aide d'un mecapal 86 FIGURE 146. Gabino et Marcos transportent des bananes à l'aide du mecapal pour les mettre en vente 86 FIGURE 147. Élevage de dindes 86 FIGURE 148. Café grillé qui sera mis en vente 86 FIGURE 149. Typologie la plus couramment rencontrée 88 FIGURE 150. Intérieur d'une maison mixe 88 FIGURE 151. Mur en pisé et adobe 88 FIGURE 152. Construction du pisé 88 FIGURE 153. Mur en pisé et bahareque 89 FIGURE 154. Détail de bahareque 89 FIGURE 155. Mur en pierre maçonnée 89 FIGURE 156. Détail de mur en pierre 89 FIGURE 157. Complexe d'habitation mixe 90 FIGURE 158. Extérieur du volume d'une cuisine mixe 90 FIGURE 159. Intérieur d'une cuisine mixe 90
139 FIGURE 160. Toilettes 90 FIGURE 161. Autel 90 FIGURE 162. Animal présenté pour offrande lors du rituel 91 FIGURE 163. Sang de l'animal sacrifié sur les éléments de la charpente 91 FIGURE 164. Prières lors du rituel 91 FIGURE 165. Offrande enterrée 91 FIGURE 166. Parcelle avec une habitation-cuisine et un dortoir 92 FIGURE 167. Habitation en pisé 92 FIGURE 168. Porche et entrée de la maison 93 FIGURE 169. Volume formant un "L" 93 FIGURE 170. Volume dortoir en terre et cuisine en tôle 94 FIGURE 171. Volume dortoirs et de cuisine en terre 94 FIGURE 172. Volume du cuisine en torchis et tôle 95 FIGURE 173. Façade de la cuisine 95 FIGURE 174. Prototype avec porche 96 FIGURE 175. Prototype avec porche 96 FIGURE 176. Façade d'accès au première étage 97 FIGURE 177. Façade principale et accès au RDC 97 FIGURE 178. Habitation en pierre maçonnée 98 FIGURE 179. Habitation en pierre endommagée lors du séisme S7 98 FIGURE 180. Habitation à deux pièces. Elle été endommagée à cause de forts vents 99 FIGURE 181. Façade principale 99 FIGURE 182. Entrée et porche 99 FIGURE 183. Entrée principale et porche 100 FIGURE 184. Accès depuis le patio 100 FIGURE 185. Accès à un cimetière à Tezoatlán 101 FIGURE 186. Cimetière à Zacatepec 101 FIGURE 187. Commerce de matériaux constructifs sis dans une maison en adobes 103 FIGURE 188. Habitation construite selon un modèle américain 104 FIGURE 189. Habitation en parpaing suivant la forme de la typologie traditionnelle 104 FIGURE 190. Habitations hybridée 104 FIGURE 191. Habitation avec des colonnes en adobe 104
140 FIGURE 192. Habitation construite en parpaing après les séismes 105 FIGURE 193. Habitations en parpaing et en tôles 105 FIGURE 194. Habitations construite avec de tôles 105 FIGURE 195. Habitation hybridée 105 FIGURE 196. Diagramme d’organisation des acteurs du projet de reconstruction 107 FIGURE 197. Diagramme d’organisation au sein de l'agence en mars 2017 109 FIGURE 198. Carte de localisation des villages du projet « Reconstruir desde la Tierra » 110 FIGURE 199. Rehabilitation du musée régional de Huajuapan 111 FIGURE 200. Visite de la maison paroissiale à Mariscala 112 FIGURE 201. Construction d'une maison à Mariscala 112 FIGURE 202. Prototype du projet Femmes d'argile 114 FIGURE 203. Connexion entre les coins et le reste du mur 115 FIGURE 204. Composantes du prototype 116 FIGURE 205. Étapes de construction du prototype 116 FIGURE 206. Prototype modèle fini 119 FIGURE 207. Entrée et couloir 119 FIGURE 208. Toilettes et salle de bain 119 FIGURE 209. Cuisine et plaque de cuisson 119 FIGURE 210. Salle à manger et bénéficiaires 119 FIGURE 211. Chambre meublée 119 FIGURE 212. Mobilier dessiné pour le prototype 119 FIGURE 213. Habitation rehabilité selon besoins individuels 121 FIGURE 214. Pose de chevrons 122 FIGURE 215. Pose de voliges 122 FIGURE 216. Maçonnerie des adobes 123 FIGURE 217. Construction des arcs 123 FIGURE 218. Pose de la charpente 124 FIGURE 219. À la fin du chantier 124 FIGURE 220. Vue extérieure, pose de la charpente 125 FIGURE 221. Vue intérieure, pose de la charpente 125 FIGURE 222. La maison de la famille Blas 129

Table des annexes

ANNEXE 1. Prototype Zacatepec : Plan de Rez-de-chaussé

ANNEXE 2. Prototype Zacatepec : Coupes longitudinales

ANNEXE 3. Prototype Zacatepec : Coupes transversales

ANNEXE 4. Prototype Zacatepec : Façades

ANNEXE 5. Prototype Zacatepec : Détails constructifs

ANNEXE 6. Prototype Zacatepec (typologie 2) : Plan de Rez-de-chaussé

ANNEXE 7. Prototype Zacatepec (typologie 3) : Plan de Rez-de-chaussé

ANNEXE 8. Prototype Zacatepec : Devis matériaux et main-d'œuvre

Annexes

Plans du Prototype de Zacatepec

A NNEXE 1
A A N.P.T
©Arquitectos Artesanos
A NNEXE 2 1 2 5 4 3
©Arquitectos Artesanos
A NNEXE 3
A B C 0.09
©Arquitectos Artesanos
©Arquitectos
A NNEXE 4 1 2 5 4 3 0.09 C 0.20
Artesanos

©Arquitectos Artesanos

A NNEXE 5
Arco contruído con ladrillo de 14cm x 28 cm x 7 cm; asentado
Muro de ladrillo de 14cm x 24 cm con un grosor de 7 cm;
Firme de 5 cm de tierra mejorada y compactada, para recibir ladrillo de barro
A NNEXE 6
©Arquitectos Artesanos
A NNEXE 7
1.55
©Arquitectos Artesanos

Devis matériaux et main-d'œuvre

Zacatepec Prototype 1 (toiture en tôle)

Concreto prop. 1:4:3 (cto:grava:arena)

Armex 25x10 cm

Concreto prop. 1:4:3 (cto:grava:arena)

6 bts de cto x m3

1 de cto x 5 de grava

1 de cto x 4 de arena

Festermix acelerante (cubeta 19lt)

Festegral impermeabilizante integral para concreto (bto 20kg)

Armex 10x10 cm

Concreto prop. 1:4:3 (cto:grava:arena)

6 bts de cto x m3

1 de cto x 5 de grava

1 de cto x 4 de arena

Festermix acelerante (cubeta 19lt)

Peutvarierselonletypeduchange

©Arquitectos Artesanos A NNEXE 8
TOTALDEOBRA$245,220.78
DESCRIPTION QTÉUNITÉ P/U TOTAL$ TOTAL€ REMARQUES CIMENTACIÓN-FONDATION $5,260.00 228.70€ 43 ml Zapata corrida piedra colada (.25x.30 m) 3.22 m3 Piedra braza mediana o pequeña, o bola quebrada. 1.288 m3 PAGADO POR BENEFICIARIO 3.87 m3 Cemento 1 $3,300.00 $3,300.00 Grava 1.6 m3 $700.00 $1,120.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Arena 1.2 m3 $700.00 $840.00 PRECIO INCLUYE ACARREO CADENADEDESPLANTE $12,636.20 549.40€ 43 ml Cadena de concreto armado (.25x.30 m) 3.22 m3 8 $220.00 $1,760.00 Estribos Vs 1/4" 0.25x0.20m @ 50 cm 0 kg $14.40 $0.00 Alambre recocido 25 kg $17.40 $435.00 Cemento 1 $3,300.00 $3,300.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Grava 1.6 m3 $700.00 $1,120.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Arena 1.2 m3 $700.00 $840.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Clavo 2 1/2" para madera 2 kg $28.00 $56.00 INCLUYE IVA 1.3 cubeta $680.00 $884.00 INCLUYE IVA 1.5 bulto $550.00 $825.00 INCLUYE IVA Tablas de madera para cimbra 0.30x2.50 m 35 $87.00 $3,045.00 INCLUYE IVA Tiras de madera 1" 20 $18.56 $371.20 INCLUYE IVA GRAPASDECONCRETO–AGRAFES $430.33 18.71€ 6 ml Cadena de concreto armado (0.1x0.14 m) 0.1 m3 1 $180.00 $180.00 Cemento 0.05 $182.50 $9.13 INCLUYE IVA Grava 0.08 m3 $700.00 $56.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Arena 0.06 m3 $700.00 $42.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Clavo 2 1/2" para madera 0.5 kg $28.00 $14.00 INCLUYE IVA 0.19 cubeta $680.00 $129.20 INCLUYE IVA
*10,661.77€
*
tn
cto x 5 de grava
x 4 de arena
pzas
6 bts de cto x m3
1 de
1 de cto
tn
pza pza
pza
tn
A NNEXE 8
MUROSADOBE–MURSENADOBE $5,984.14 260.18€ Muros de adobe 30 cm de espesor 0.80 m de altura 10.32 m3 Adobes 520 Cal de piedra 21 bultos $64.00 $1,344.00 Tierra 1.3 m3 Remate muro pisón 1.29 m3 Cemento 7 $182.50 $1,277.50 INCLUYE IVA Grava 0.7 m3 $700.00 $490.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Arena 0.56 m3 $700.00 $392.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Varilla 3/8" 8 $91.83 $734.64 INCLUYE IVA 25 kg $24.00 $600.00 INCLUYE IVA 0.5 cubeta $680.00 $340.00 INCLUYE IVA Clavo 2 1/2" para madera 2 kg $28.00 $56.00 INCLUYE IVA Alambre recocido 25 kg $30.00 $750.00 INCLUYE IVA MURODELADRILLO–MURENBRIQUETERRECUITE $30,006.00 1,304.61€ Muros de ladrillo 28x14x7 cm Tabique rojo recocido 3300 $8.50 $28,050.00 INCLUYE IVA Tierra 6.6 m3 Mortero 2 bultos $125.00 $250.00 INCLUYE IVA Cal 19 $64.00 $1,216.00 INCLUYE IVA Arena 1 m3 $700.00 $490.00 CADENADECERRAMIENTO–CHAÎNAGE $3,118.13 135.57€ 43 ml Cadena de concreto armado (0.1x0.14 m) 0.6 m3 10 $180.00 $1,800.00 Cemento 0.45 $182.50 $82.13 INCLUYE IVA Grava 0.72 m3 $700.00 $504.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Arena 0.54 m3 $700.00 $378.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Clavo 2 1/2" para madera 0.5 kg $28.00 $14.00 INCLUYE IVA 0.5 cubeta $680.00 $340.00 INCLUYE IVA TECHUMBRE–TOIT $11,092.40 482.28€ Lamina galvanizada de 3.66m 30 $322.08 $9,662.40 Pijas con empaque 250 $1.40 $350.00 Cumbrera galvanizada 3m 4 $270.00 $1,080.00 pza 6 bts de cto x m3 btos 1 de cto x 5 de grava 1 de cto x 4 de arena pza Alambron para cangrejos 0.25cm @0.40m Festermix acelerante (cubeta 19lt) pzas burltos Armex 10x10 cm pzas Concreto prop. 1:4:3 (cto:grava:arena) 6 bts de cto x m3 tn 1 de cto x 5 de grava 1 de cto x 4 de arena Festermix acelerante (cubeta 19lt) pzas pzas pzas
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DINTELES(demaderapuertaprincipalyventanas)-LINTEAUX(porteprincipaleetfenêtres)

©Arquitectos Artesanos A NNEXE 8 $3,032.87 131.86€ 3 $359.60 $1,078.80 PRECIO INCLUYE ACARREO 1 $335.87 $335.87 PRECIO INCLUYE ACARREO 1 $431.52 $431.52 PRECIO INCLUYE ACARREO 3 $395.56 $1,186.68 PRECIO INCLUYE ACARREO TECHUMBREVIGASYCOLUMNAS–CHARPENTEETPOUTRESBOIS $39,315.88 1,709.39€ 2 $575.36 $1,150.72 PRECIO INCLUYE ACARREO VIGAS DE 3" X 8" X 18´____5.48 1 $1,294.56 $1,294.56 PRECIO INCLUYE ACARREO VIGAS DE 3" X 6" X 12´____3.66 10 $647.28 $6,472.80 PRECIO INCLUYE ACARREO 2 $575.36 $1,150.72 PRECIO INCLUYE ACARREO POSTES DE 3.05 MT 3 $487.20 $1,461.60 PRECIO INCLUYE ACARREO 600 TABLAS DE 0.75" X 6" X 8´____2.425 200 $127.60 $25,520.00 PRECIO INCLUYE ACARREO VIGAS DE 3" X 6" X 14´___4.28 3 $755.16 $2,265.48 PRECIO INCLUYE ACARREO ACCESORIOS–ACCESOIRES $336.40 14.63€ Perno enroscado de acero de 3/8" 12 cm 3 $58.00 $174.00 INCLUYE IVA Tuercas de 3/8" 40 $2.32 $92.80 INCLUYE IVA Rondanas 40 $1.74 $69.60 INCLUYE IVA COCINA–CUISINE $467.90 20.34€ Muros de ladrillo capuchino .56 m x .89 m h Ladrillo 50 $8.50 $425.00 INCLUYE IVA Mortero 0.02 ton $125.00 $2.50 INCLUYE IVA Arena 0.012 m3 $700.00 $8.40 PRECIO INCLUYE ACARREO Cal 0.5 $64.00 $32.00 ESTUFALORENA–POÊLEÀBOIS $1,955.42 85.02€ 1 $1,250.00 $1,250.00 Ladrillo rojo ladrillo rojo de .13 x .26 x .05 m 50 $8.50 $425.00 Varilla 3/8" 1 $91.83 $45.92 Mortero 1 $125.00 $62.50 Arena 0 m3 $700.00 $140.00 Cal 1 $64.00 $32.00 Sal 2 kg Tierra arcillosa 1 m3 Abono de Burro 1
"D1" : Pzas de 3 1/2" x 8 " x 1.51 m"D1" : Pzas de 3 1/2" x 8 " x 1.51 m pzas "D2" :Pzas de 3 1/2" x 8 " x 1.40 m"D2":Pzas de 3 1/2" x 8 " x 1.40 m pzas "D3" : Pzas de 3 1/2" x 8 " x 1.81 m "D3" : Pzas de 3 1/2" x 8 " x 1.81 m pza "D4" : Pza de 3 1/2" x 8 " x 1.67 m "D4" : Pza de 3 1/2" x 8 " x 1.67 m pza VIGAS DE 3" X 8" X 8´___ 2.44 Pza Pzas Pzas VIGAS DE 3" X 8" X 7´____ 2.12 Pzas Pzas Pzas pza pzas pzas pzas pzas bto Placa metalica 60 x 60 cm calibre 1/8" pzas pzas pza bto bto bte
A NNEXE 8
MADERACARPINTERIA–BOISMENUISERIE $30,468.45 1,324.72€ MurosDivisorios $15,066.60 MANO DE OBRA 1.0 -- $3,568.00 $3,568.00 MATERIALES Tabla 19.2 $239.25 $4,593.60 24 $271.25 $6,510.00 Lija 5 $30.00 $150.00 1 $140.00 $140.00 Clavos 1 $25.00 $25.00 1 $80.00 $80.00 PuertasenMurosDivisorios(2Puertas) $5,667.90 MANO DE OBRA 1.0 -- $2,400.00 $2,400.00 MATERIALES Marco (tabla) 2.4 $239.25 $574.20 Duelas (tablas) 6 $239.25 $1,435.50 Estructura (tabla) 2.4 $239.25 $574.20 Chapa 2 $190.00 $380.00 Bisagra 3" 8 $18.00 $144.00 Pijas y clavos 2 $10.00 $20.00 Lija 2 $30.00 $60.00 2 $40.00 $80.00 PuertaPrincipal $4,496.75 MANO DE OBRA 1.0 $1,600.00 $1,600.00 MATERIALES Marco (tabla) 1.2 $239.25 $287.10 Duelas (tablas) 4.8 $239.25 $1,148.40 4.2 $271.25 $1,139.25 Chapa 1 $190.00 $190.00 Bisagra 3" 4 $18.00 $72.00 Pijas y clavos 1 $10.00 $10.00 Lija 1 $30.00 $30.00 1 $20.00 $20.00 pzas Polín pzas pzas Resistol pzas pzas Resanador pzas pzas pzas pzas pzas pzas pzas pzas Resistol pzas pzas pzas Estructura (polin) pzas pzas pzas pzas pzas Resistol pzas
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©Arquitectos Artesanos A NNEXE 8 $962.60 MANO DE OBRA 1.0 $300.00 $300.00 MATERIALES Tabla 1.2 $239.25 $287.10 1.2 $271.25 $325.50 Lija 1 $30.00 $30.00 1 $10.00 $10.00 Clavos 1 $10.00 $10.00 MuebleLavaboenBaño $1,348.10 MANO DE OBRA 1.0 $350.00 $350.00 MATERIALES Tabla 1.2 $239.25 $287.10 2.4 $271.25 $651.00 Lija 1 $30.00 $30.00 1 $20.00 $20.00 Clavos 1 $10.00 $10.00 Cocina $2,926.50 MANO DE OBRA 1.0 -- $750.00 $750.00 MATERIALES Tabla 4.8 $239.25 $1,148.40 1.2 $239.25 $287.10 2.4 $271.25 $651.00 Lija 2 $30.00 $60.00 1 $20.00 $20.00 Clavos 1 $10.00 $10.00 PISOS–SOL $7,531.85 327.47€ Area total: corredor+ dormitorios+cocina 51.542 m2 Loseta de barro .25x.25.m 805 $6.67 $5,369.35 5 $182.50 $912.50 Arena 100 botes PAGADO POR BENEFICIARIO 1 $1,250.00 $1,250.00 DeckRegadera pzas Polín pzas pzas Resistol pzas pzas Polín Resistol pzas Tablon pzas Polín pzas pzas Resistol pzas pzas pzas Cemento para acentar loceta de barro bto Charola de lámina galvanizada para refagera 1.20 X 1 m pzas
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FOSASEPTICA–FOSESCEPTIQUE $2,624.00 114.09€ 328 $8.00 $2,624.00 Tapas para registros MUFA $292.50 12.72€ 0.5 $220.00 $110.00 PRECIO INCLUYE ACARREO Cemento 1 $182.50 $182.50 INCLUYE IVA TRABAJOSDEPLOMERIA–PLOMBERIE $23,302.32 1,013.14€ 1 $3,955.20 $3,955.20 materiales + mano de obra + acarreo Instalación de calentador de agua con leña 1 $3,812.02 $3,812.02 materiales + mano de obra + acarreo Instalación de fregadero de 78cm x 50 cm 1 $3,361.02 $3,361.02 materiales + mano de obra + acarreo 1 $2,404.02 $2,404.02 materiales + mano de obra + acarreo (NOTA NO
SUMINSTRO DE WC) Instalación de lavabo 1 $2,598.02 $2,598.02 materiales + mano de obra + acarreo (NOTA NO
SUMINISTRO DE LAVABO) Instalación de tina o charola en área de regadera 1 $2,507.02 $2,507.02 materiales + mano de obra + acarreo (NOTA NO INCLUYE SUMINISTRO DE TINA O CHAROLA) Instalación de tubo ventila 1 $982.00 $982.00 materiales + mano de obra + acarreo 1 $881.00 $881.00 materiales + mano de obra + acarreo 1 $847.00 $847.00 materiales + mano de obra + acarreo Instalación de manguera para llenado de tinaco 1 $1,955.02 $1,955.02 materiales + mano de obra + acarreo TRABAJOSDEELECTRICIDAD-ELECTRICITÉ $19,995.00 869.35€ Instalación de alumbrado o lamparas o focos incandescentes 7 $977.00 $6,839.00 materiales + mano de obra + acarreo Instalación de contactos 6 $1,228.00 $7,368.00 materiales + mano de obra + acarreo 1 $3,019.00 $3,019.00 materiales + mano de obra + acarreo Instalación acometida eléctrica a centro de carga interior 1 PZA $2,769.00 $2,769.00 materiales + mano de obra + acarreo Tabicones pza Armex 25 x 10 pza btos Instalación de tinaco rotoplas de 450 lts pza pza pza Instalación de wc pza pza pza pza Instalación de coladera o cespol bote pza Instalación de trampa manual o absorbe olores con tu pvc pza pza pza pza Instalación de acometida eléctrica de mufa y medidor pza
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INCLUYE
INCLUYE

MANODEOBRAALBAÑILERIA:2albañiles,2peones,MAIND'ŒUVRE:2maçons2apprenti-maçons

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A NNEXE 8 HERRERIA–FERRONERIE $9,396.00 408.52€ VENTANA ABATIBLE EN ÁNGULO (1M x 0.61M) 6 $1,392.00 $8,352.00 VENTANA (1M x 0.31M) 1 $1,044.00 $1,044.00 $37,975.00 1,651.09€ SEMANA 1 $2,400.00 SEMANA 2 $2,400.00 SEMANA 3 $4,800.00 SEMANA 4 $1,700.00 SEMANA 5 $3,525.00 SEMANA 6 $4,175.00 SEMANA 7 $4,800.00 SEMANA 8 $4,650.00 SEMANA 9 $4,725.00 SEMANA 10 $4,800.00 pza pza
Carolina Ramos López 2018

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