Dossier Vision durable du journal Les Affaires

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NUMÉRO DU 15 OCTOBRE 2011 LES AFFAIRES | WWW.LESAFFAIRES.COM

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vision durable GESTION DES MATIÈRES RÉSIDUELLES

Des technos qui mènent la vie dure aux déchets Déchiqueter, brûler, nettoyer afin de recycler, de réutiliser ou même de produire de l’énergie : des PME, comme celle d’Alain Boisvert, de Recyclage ÉcoSolutions, repoussent les limites de la gestion des déchets grâce à des technologies qui surprennent.

PHOTO : GILLES DELISLE

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vision durable

Une technologie pour recycler les frigos PAR MARIE LYAN Mieux recycler nos réfrigérateurs et congélateurs énergivores, c’est le défi de Recyclage Ecosolutions, de Laval. Pour cette PME, pas question de se limiter aux normes fédérales actuelles : « Nous voulions aller plus loin que la vidange du système de refroidissement en nous attaquant au problème des CFC et des HCFC », explique Alain Boisvert, président de cette entreprise d’une soixantaine de salariés. Présents dans la mousse de polyuréthane qui sert à isoler les parois des appareils de réfrigération, les CFC et HCFC (des gaz aussi connus sous le nom d’halocarbures) ont un impact important sur l’environnement. « On estime que la pollution engendrée par ces mousses génère les mêmes émissions polluantes qu’une voiture qui circule durant une année », affirme Alain Boisvert. Le problème, c’est que les CFC seraient deux à trois fois plus présents dans la mousse de polyuréthane que dans les liquides de refroidissement habituellement traités. Pour en venir à bout, Recyclage Ecosolutions a établi un partenariat avec le fabricant allemand SEG, qui propose une technologie recyclant près de 96 % des composants d’un réfrigérateur.

L’entreprise québécoise a été la première en Amérique du Nord à bâtir une usine proposant cette technologie. « Il a toutefois fallu l’adapter afin de pouvoir recycler les appareils canadiens, plus imposants et plus solides que leurs homologues européens », ajoute M. Boisvert. Avec ce procédé, près de 550 grammes de CFC peuvent être extirpés de chaque appareil sous forme liquide. Ouvrir de nouveaux marchés Lauréat du prix Pierre-Dansereau de Réseau Environnement pour sa contribution dans le domaine de l’air et des changements climatiques, Recyclage Ecosolutions a mis sur pied un système de nettoyage très complet. Après avoir vidé les huiles et le liquide réfrigérant d’un appareil, ses employés retirent le compresseur puis procèdent au broyage sous atmosphère contrôlée de la carcasse. Les matières lourdes (plastique, aluminium, cuivre, acier) et légères (polyuréthane) sont séparées : les plastiques et les métaux sont triés puis revendus sur le marché du recyclage, tandis que le polyuréthane est affiné puis chauffé, de manière à faire éclater les dernières bulles de mousse. Une fois refroidi et compressé, le polyuréthane se transforme

Recyclage Ecosolutions propose une technologie réutilisant près de 96 % des composants d’un réfrigérateur. en liquide qui pourra être détruit dans un centre apte à supprimer les CFC. Vers une technologie québécoise « Le problème, c’est qu’il existe peu de centres de ce type en Amérique du Nord. Le plus près se situe en Alberta », dit M. Boisvert. C’est pourquoi Recyclage Ecosolutions veut mettre au point une technologie permettant de détruire ces matières dangereuses d’ici 2012. « Nous avons investi 4 millions de dollars dans une recherche sur ce sujet », ditil. Après avoir démontré sa faisabilité à l’échelle pilote, Recyclage Ecosolutions devrait prochainement bâtir une usine dans l’axe Montréal-Windsor, afin de rejoindre le maximum de foyers. L’entreprise y voit là une occasion d’agrandir son marché à tous les appareils en fin de vie, alors qu’il traitait jusqu’ici avec les compagnies d’électricité dans le cadre de leurs programmes de recyclage, comme RecycFrigo d’Hydro-Québec. ■

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« Nous voulions aller plus loin que la vidange du système de refroidissement en nous attaquant au problème des CFC et des HCFC », explique Alain Boisvert, président de Recyclage Ecosolutions, une PME de Laval. PHOTO : GILLES DELISLE

Faire pousser des PME sur les déchets des autres Favoriser le démarrage d’entreprises qui s’approvisionnent à partir des déchets d’autres entreprises : c’est ce que propose le projet d’incu-

bateur de Victoriaville. Évalué à 500 000 $, ce concept qui constitue une première au Québec sera mis en application en janvier 2012. Le Centre de formation en entreprises et recyclage NormandMaurice (CFER) de Victoriaville se chargera d’évaluer le potentiel de commercialisation des matières résiduelles. Des étudiants du centre pourront également trouver un emploi au sein des nouvelles entreprises qui naîtront de ce projet. L’incubateur mettra à la disposition des entreprises en gestation un local de 10 000 pieds carrés, divers services, dont un de secrétariat, ainsi que du personnel pour commercialiser le produit. « Ce projet de start-up permettra d’accompagner de jeunes entreprises depuis leurs débuts jusqu’à la mise en marché, soit une période

d’un an environ », explique René Thivierge, directeur général de la Corporation de développement économique Bois-Francs (CDEBF). L’organisme, qui supervisera le programme, prévoit la création de cinq entreprises d’ici deux ans. Un premier projet est déjà sur la table. Le CFER étudie actuellement les possibilités de donner une seconde vie aux blanchets, cette étoffe de couleur gris clair caoutchouteuse qui se place entre le cylindre porteplaque et le papier dans les imprimeries. Le CFER n’en sera pas à sa première expérience du genre. Le Centre a servi d’incubateur à l’usine de récupération et de traitement des restes de peinture Laurentide (Boomerang), située aujourd’hui dans le parc industriel de Victoriaville. C.H.


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gestion des matières résiduelles

De l’eau usée pour nettoyer les huiles et les plastiques

Le roi de la peinture recyclée

PAR MARIE LYAN

PAR ULYSSE BERGERON

Spécialiste du traitement des eaux industrielles, RPM Environnement a étendu son champ d’action au recyclage des plastiques grâce à une technologie innovante qui lui permet d’utiliser les eaux usées comme ressource. Après avoir travaillé avec différents experts et quelques sociétés de génieconseil, RPM Environnement a mis au point une technique qui lui permet de recycler les plastiques et les huiles depuis 2009. « Cette méthode continue d’évoluer grâce à des efforts de R-D constants », indique Dominic Payette, président de cette société de 60 employés située à Blainville. Le principe ? Les déchets sont ramassés directement auprès des entreprises et ramenés à l’usine pour subir différentes phases (granulation, décontamination, lavage, séchage et emballage) afin d’être valorisés. Ces efforts ont valu à la PME de recevoir le prix EnviroLys du Conseil des entreprises de services environnementaux (CESE) pour son procédé de décontamination et de recyclage des plastiques contaminés aux hydrocarbures. RPM Environnement récupère toutes les matières plas-

Ce qui devait être au départ un organisme communautaire pour jeunes décrocheurs s’est transformé en entreprise à succès. Laurentide re-sources, fabricant des marques Boomerang et Ronaéco, s’est taillé une place de choix dans le créneau de la peinture recyclée. Depuis la création de la marque Boomerang, les ventes de peintures recyclées ont littéralement bondi de... 600 % ! « En 2003, nos ventes se chiffraient à un million de dollars (M$). Aujourd’hui, elles sont de 6 M$ », indique Mario Clermont, directeur général, division recyclage de peinture à la Société Laurentide. La peinture recyclée gagne en popularité. Elle représente désormais de 3 à 4 % des 60 millions de litres de peinture vendus chaque année dans la province. On recycle un million de gallons de peinture chaque année au Québec, soit l’équivalent de trois millions de contenants. « Ce succès est dû à la conscientisation de la population québécoise, mais aussi à la qualité de la peinture », note M. Clermont. Depuis 2001, l’adoption au Québec du Règlement sur la récupération et la valorisa-

RPM Environnement a mis au point une technique qui lui permet de recycler les plastiques et les huiles, dit son président Dominic Payette. PHOTO : G.DELISLE

tiques contaminées aux hydrocarbures qui iraient à l’enfouissement. Elle le fait auprès d’une large clientèle, composée d’industries, de garages automobiles et de municipalités qui ne savent plus quoi faire de leurs bidons vides… « Nous aimerions adapter cette technologie pour recycler des composants chimiques comme la peinture ou les solvants, dans le cadre des nouvelles normes de

rejet aux égouts qui seront mises en place en 2012 », dévoile le président de l’entreprise. Il aimerait réutiliser encore plus de produits dans le cadre de son processus de nettoyage et de valorisation, comme la fibre de papier, le caoutchouc ou le PVC et le PET. « Notre technologie nous permet de traiter les composants chimiques, mais ce n’est pas encore économiquement viable », dit-il.

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Arrivée aujourd’hui à maturité au Québec, l’entreprise continue sa croissance en Ontario et souhaite faire de même dans le reste du Canada, que ce soit par des expansions ou par des acquisitions. Le marché des ÉtatsUnis est aussi dans sa ligne de mire, mais à plus long terme. « Nous devons d’abord être bien placés sur le marché local avant de considérer une telle expansion », conclut M. Payette. ■

tion des contenants de peinture et des peintures mis au rebut a donné un sérieux coup de pouce au secteur des peintures recyclées. Il contraint les fabricants de la province à récupérer les résidus et contenants inutilisés. Pour s’acquitter de leurs obligations, les détenteurs de marques de peinture ont créé Éco-peinture, un label qui assure la perception d’une redevance par contenant de peinture vendu dans la province. Les origines de la création de la peinture Boomerang remontent au début des années 1990. Normand Maurice, un pédagogue et éducateur de Victoriaville, créait alors le Centre de formation en entreprise et récupération (CFER). L’organisme à but non lucratif s’était donné pour mission de recycler les résidus de peinture tout en contrant le décrochage scolaire. L’initiative a attiré l’attention des fabricants québécois. Dès 1998, l’industrie québécoise de la peinture s’est associée au projet en y investissant 1,2 M$. En 2003, Laurentide re-sources achète le centre de traitement de Victoriaville. Depuis deux ans, l’usine produit la marque de peinture recyclée Rona-éco, distribué chez les détaillants RONA. ■

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vision durable

Objectif, en tonnes, de la masse de déchets solides et huileux à traiter par jour sur un porte-avions américain.

Traiter les déchets d’un porte-avions PAR MARIE LYAN La spécialité de PyroGenesis : produire des stations de traitement des déchets autonomes et de petites tailles qui peuvent ensuite être installées sur des porte-avions, des navires ou dans des communautés isolées. « Notre technologie vient d’être acceptée par la marine américaine et devrait être mise en place sur leur prochain porte-avions », explique Gillina Holcroft, directrice des opérations. L’objectif : traiter jusqu’à 5 tonnes de déchets solides et huileux par jour, sans qu’il soit nécessaire d’ajouter un autre combustible. Chez PyroGenesis (dont le nom signifie « régéné-

ration par la chaleur »), on utilise des technologies plasma de pointe pour transformer les déchets en sources d’énergie. « Ce système, baptisé le Plasma Arc Waste Destruction System (PAWDS), est cinq fois plus petit qu’un incinérateur maritime et peut donc être très mobile », dit Gillian Holcroft. À très haute température L’autre système développé par la firme, le Plasma Resource Recovery System (PRRS), permet de traiter tous les types de déchets, y compris les métaux lourds et les matières dangereuses. Déchiquetés puis brûlés à très haute température, ces

rebuts peuvent ensuite servir à fabriquer un vitrifiant pour le béton et le ciment. Ils peuvent aussi être transformés en gaz de synthèse qui servira à produire de l’énergie. Cette technologie, installée en 2008 dans une base aérienne de la U.S. Air Force (USAF), permet de traiter 10,5 tonnes de déchets par jour. L’entreprise participe aussi depuis l’an dernier à un projet de recherche aux Îles-dela-Madeleine, en collaboration avec l’Université de Sherbrooke et le Centre de recherche sur les milieux insulaires et maritimes (CERMIN). Le but : installer un système de gestion des déchets semblable à celui de la USAF, tout en étudiant

la possibilité d’utiliser le vitrifiant obtenu dans le domaine de la construction. « La possibilité de concevoir des réacteurs de grandes ou de petites tailles nous donne un avantage sur le marché, car il est souvent difficile de trouver des technologies de valorisation des déchets à petite échelle », affirme la directrice des opérations. L’entreprise de 46 salariés vise aussi le marché des communautés isolées et des hôpitaux qui génèrent des déchets dangereux. « Nos projets de développement devraient nous amener à recruter davantage au cours des prochains mois », assuret-elle. Début octobre, PyroGenesis a signé une nouvelle entente avec une multinatio-

nale du secteur des mines et de la métallurgie qui pourrait ouvrir la voie à une commercialisation à grande échelle de ses réacteurs à plasma. ■

Gillian Holcroft est directrice des opérations chez PyroGenesis. PHOTO : GILLES DELISLE


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