Habiter aux franges de la Métropole Aix-Marseille
Célia Cadene
Séminaire Carnet Curieux - ENSA Marseille
« A l’intérieur de l’homme civilisé, le sauvage occupe toujours la place d’honneur. »
Henry DAVID THOREAU Philosophe, naturaliste et poète américain - 1817/1862 -
Remerciements Je tiens tout d’abord à remercier Marion SERRE et Rémy MARCIANO, encadrants de ce séminaire Métropole Carnet Curieux. Proposer ce choix de séminaire, c’est une liberté d’expression personnelle offerte à leurs étudiants. Peu de règles, peu de contraintes mais plutôt un imaginaire de possibles. Ce séminaire donne la possibilité de s’ouvrir à de nouvelles choses tant au niveau des champs d’exploration qu’au niveau de la représentation graphique et de l’écriture. Il est enfin possible de prendre (un peu) le temps de tester des styles graphiques de rendu, de diversifier ses lectures, de sortir des périmètres proposés habituellement à l’étude du projet. En cinquième et dernière année, cette liberté encadrée et enrichie fait du bien. Merci. Un grand merci va sans discuter à tous les habitants et acteurs de construction de la métropole de Marseille qui ont contribué à sa création et à son extension, de sa genèse à aujourd’hui. En effet, sans eux, ce vaste terrain incroyable à explorer ne serait pas aussi riche si son identité n’était pas aussi forte. Enfin je remercie mes parents qui m’ont offert une enfance à la campagne tellement belle et agréable que c’est aujourd’hui avec plaisir que je fais entrer cette thématique d’étude au coeur d’une pensée urbaine.
«Je ne devrais peut-être pas en faire autant, remerciements blablabla. Ce n’est ni une thèse ni un mémoire ni encore une publication. Oui mais pourquoi remercie-t-on les gens en général ? - Exprimer à quelqu’un de la gratitude, de la reconnaissance pour ce qu’il fait ou a fait Définition du dictionnaire Larousse.
Me voilà convaincue.
Virée sauvage Emprunter une voiture. Conduire. Se sentir libre d’aller où on le souhaite. Descendre. Rien d’intéressant. Etre en ville. Parcourir deux kilomètres. Etre à la campagne. Marcher. Grimper. Marcher encore. S’émerveiller. Une belle photo. Un grand paysage. Rejoindre la voiture. Prendre l’autoroute. Arriver dans une impasse. Marcher dix minutes. Un autre monde. Un champ labouré. Tourner la tête. Une zone commerciale. Louper la sortie. Des bouchons. La mer. Faire demi-tour. Une surprise. Un cadrage. Descendre. Monter. 500 mètres. Descendre. Monter à nouveau. Une carrière. Une vue incroyable. Rouler. Rouler vite. S’arrêter subitement. Zone interdite. Franchir la limite. Des voies ferrées. Des cheminées. Regarder derrière soi. Marcher. Un lotissement. Un chemin de randonnée. Tourner le dos. Prendre une photo. Se questionner. Un grillage. Un cheval. Parler à un monsieur. Descendre. Une zone industrielle. Etonnant. Un mur très haut. Passer à travers. Une épaisseur construite. Une frange libre. Pour combien de temps encore ?
5 7 8 11
15 19
SOMMAIRE
43 63
79 83 94 115 119
Remerciements Virée sauvage Sommaire Manifeste
Être citadin à la campagne
Habiter le grand paysage
Habiter le paysage du quotidien
Habiter le périurbain
L’urbanisme par secteur
Un territoire, plusieurs typologies bâties
Une ville dévorante de parcelles vides
Étendue des possibles Notice bibliographique raisonnée
Manifeste J’ai roulé, roulé encore. J’ai autant arpenté Marseille en trois jours qu’en trois ans. Au fond, je crois que j’en avais besoin. Me confronter à l’échelle du territoire, élargir mon champ d’investigation et de connaissances. Arpenter la ville pour mieux la comprendre en ayant comme ambition de « réparer » ses périphéries, dont le développement est la résultante de logiques économiques et politiques, elles-mêmes mises en œuvre en fonction des opportunités foncières. Il s’agira ici de comprendre les enjeux territoriaux, urbanistiques et architecturaux de cette rencontre entre ville et campagne, entre naturel et artificiel, entre plein et vide; et ce en fonction des différentes typologies d’interface. Voici précisément l’objet de recherche de ce carnet curieux. Bertrand Folléa, paysagiste urbaniste définit ainsi la rencontre entre ces deux mondes : « La lisière urbaine est l’espace d’interface entre ville et nature en charge de gérer la relation entre les deux. Elle constitue la transition entre l’espace urbanisé ou à urbaniser et l’espace agricole ou naturel. Elle concrétise la limite d’urbanisation par son épaisseur. »1 Et Michel Hoessler, paysagiste biologiste, résume efficacement : « Entre-deux, facteur de tension et porteur de sens. »2 Suite à ces deux définitions, je me suis posée les questions suivantes : - Comment se traduit l’hétérogénéité des typologies de cet espace d’entre-deux, situé entre milieu naturel et milieu urbain ? - Quelles sont les relations que ces deux mondes entretiennent ? - Quels modes de pensée hérités restreignent encore parfois les réflexions de projet des urbanistes et architectes sur l’interaction possible et même indispensable de ces deux milieux ? - Cette difficulté peut-elle s’expliquer par des politiques d’aménagement souvent trop éloignées des enjeux sociétaux, environnementaux et urbanistiques actuels et à venir ? - Y a-t-il des initiatives possibles et des solutions à apporter pour favoriser les échanges et les connexions entre les espaces vides (naturels et anthropisés) et les zones construites aux portes de nos villes (qui représentent les enjeux d’aménagement de demain) ? Peut-être en existe-t-il déjà ? - Quels sont les potentialités d’évolution des lisières actuelles ?
1 FOLLEA Bertrand « Le paysage comme relation » in Les Carnets du paysages, n°21 – Septembre 2011. 2 HOESSLER Michel, entretien «Les limites comme territoires de projets» [en ligne], propos recueillis par Camille PETIT. Disponible sur la plateforme Echanges et récits d’expériences du site internet : www. espritdavant.com 11
Pour répondre à ces questions, j’ai commencé par réfléchir aux mots. Ce que j’aime avec les mots, c’est qu’ils peuvent feindre de signifier la même chose et pourtant, lorsque nous les associons à des images ou à des illustrations, ils prennent pleinement leur sens, un sens qui leur est propre : Limite, seuil, frange, frontière, transition, entre-deux, bande, extrémité, périphérie, bordure, démarcation, orée, imbrication ... autant de synonymes pour qualifier l’interface ville-nature, cet espace de lisière où deux mondes se côtoient sans nécessairement se comprendre. À terme, l’objectif de ce carnet curieux serait peut-être de proposer un nouveau récit pour la périphérie. Une utopie ? Certainement. De l’optimisme ? Encore plus. Je pense que s’intéresser à comment « se termine une ville » c’est avant tout mettre en lumière de nouveaux territoires de projet. La ville semble trop souvent tourner le dos à la nature qui la borde. Avons-nous peur de la nature ? Et pourtant, Simone de Beauvoir disait dans La force de l’âge : «A la fois sauvage et d’accès facile, la nature, autour de Marseille, offre au plus modeste marcheur des secrets étincelants.»3 Le développement des périphéries semble avoir pris en grippe le paysage dans lequel elles s’inscrivent. Et ce, comme si l’opposition entre ville et zone de nature, (anthropisée ou non) était aussi évidente que celle entre densité et étalement urbain. Ces deux notions, à savoir ville et nature, trop facilement jugées comme opposées ne sont que très rarement intégrées ensemble à des projets communs. Nous nous retrouvons aujourd’hui face à un problème auquel les politiques précédentes, faisant l’apologie de l’accession à la propriété en milieu périurbain et de la société de consommation, n’avaient pas pensé : l’incohérence et le caractère inadapté des espaces d’entre-deux créés par cette ville dévorante de parcelles vides. Et parlons un peu de ce vide dont le dessin, en milieu périurbain, prend tout son sens. Dessiner les vides entre les bâtiments de manière consciente permet de leur donner l’importance particulière nécessaire à la révélation d’opportunités de projet. L’idée est donc de montrer comment les mondes cohabitent. Une démonstration. Un inventaire. Développer des séries de cas de lisières morphologiquement similaires et ce à différentes échelles : celle du territoire et/ou celle du quotidien ; pour au final en faire peut-être ressortir des opportunités de projet. Car je suis tout de même étudiante en architecture… le projet nous habite. Pour cela, différentes méthodes sont utilisées : arpenter divers sites pour multiplier les séries, photographier pour saisir les interfaces et leur traduction physique et ce à différentes échelles, travailler en axonométrie afin de montrer simplement comment plusieurs mondes cohabitent sur des franges de territoire plus ou moins épaisses, et enfin se documenter sur des initiatives de projet traitant précisément de cet entre-deux.
3 DE BEAUVOIR Simone, La force de l’âge, Paris : éditions Gallimard, 1960, 624 pages. 12
Suite aux visites sur les différents sites, de Marseille à Aubagne en passant par Berre-l’Etang, j’ai tout d’abord pu préciser ce que j’entendais par «ville» et par «nature». En effet, ces deux notions sont vastes et peuvent englober différents cas. Ainsi, j’ai distingué : - Dans la catégorie «campagne - naturel - vide» : • la nature dite sauvage qui n’est pas domestiquée par l’homme • la nature domestiquée par l’homme qui se traduit par des zones de cultures ou de pâturages • les délaissés urbains qui sont des vides générés par des opérations d’aménagement ; ils peuvent être entretenus par l’homme ou bien nous pouvons observer que la nature y reprend ses droits - Dans la catégorie «ville - artificiel - plein» : • les zones d’habitat qui comprennent trois typologies : l’habitat individuel libre qui s’apparente à de la construction individuelle ne faisant pas partie d’un groupe reconnu comme unité foncière ou non comme par exemple une résidence ou un lotissement, l’habitat individuel groupé qui est un ensemble de maisons individuelles (lotissement ou résidence) et l’habitat collectif. • les zones industrielles et/ou commerciales • les centralités qui se définissent comme des zones urbaines denses au centre des échanges et qui s’opposent aux zones périurbaines dont le développement est moins dense et tentaculaire. À partir de ces distinctions, j’ai pu faire ressortir plusieurs thématiques me permettant ainsi de classifier les lieux sur lesquels je me suis rendue ; et par conséquent, l’analyse de ces kilomètres carrés de territoire m’a permis de mettre en évidence des potentialités de projet. Ainsi, deux parties principales composeront ce carnet curieux. Dans un premier temps, nous nous intéresserons aux manières d’habiter ces périphéries et aux divers enjeux que représentent ces espaces dans un contexte actuel marqué par la crise du logement et l’étalement urbain. Dans un second temps, l’attention sera portée sur l’urbanisation par secteur qui induit une fragmentation de nos territoires et une séparation franche des usages.
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ĂŠtre citadin Ă la campagne
Définitions et état des lieux avant de se lancer Longtemps se sont opposées les notions d’urbain et de rural. Mais cette opposition franche ne peut plus être considérée comme telle aujourd’hui. Des nouveaux concepts sont à associer à ces deux notions fondamentales afin de comprendre les dynamiques de peuplement du territoire. Nous utilisons souvent de manière assez confuse les mots tels que périurbain, rural, urbain sans trop savoir réellement ce qu’ils représentent en matière de statistiques démographiques et d’identité. L’Insee4 nous permet d’y voir plus clair en distinguant trois dimensions lors de ses statistiques: rural/urbain, centre/périphérie et taille de la ville. Le Centre d’observation de la société nous explique sur quels critères l’Insee5 se base pour appuyer ses travaux : «dès que plus de 2000 personnes sont rassemblées dans un espace continu, l’Insee considère qu’il s’agit d’une «unité urbaine». Pour qu’il y ait continuité, il faut que les bâtiments ne soient pas éloignés de plus de 200m.» Ainsi, si l’on s’appuie sur cette définition, la France comptait, en 2008, 50 millions d’urbains (soit 78% de la population) et seulement 14 millions de ruraux (22%). Même si les chiffres parlent d’eux-mêmes, je souhaite ajouter une petite remarque : il me semble que nombreuses sont les personnes considérées comme urbaines alors que leur environnement proche et leurs habitudes de vie se rapprochent plus des personnes considérées comme rurales, comme c’est souvent le cas pour les habitants de petites villes dans les départements ruraux. Mais même si les chiffres de la population rurale me semblent un peu sous-estimés, cela va sans dire que les enjeux démographiques aujourd’hui se concentrent en ville et en périphérie immédiate de celle-ci. L’habitat dit «périurbain», plus diffus, s’explique en partie par le déclin agricole, l’envolée des prix des logements en centre-ville, l’amélioration des réseaux de transport et surtout par une très forte popularité de l’habitat individuel. Pour quantifier ce phénomène, l’Insee distingue les «pôles urbains» de leur «couronne périurbaine» constituée par des communes avoisinantes où 40% de la population travaille dans un pôle avoisinant. Cela représente 15.5 millions de personnes soit 24% de la population totale et ce pourcentage depuis 2008 ne cesse d’augmenter. Enfin, «l’Insee distingue les villes en fonction de leur taille, plus précisément de la taille des emplois qu’elles rassemblent, en trois grandes classes : de 1500 à 5000 emplois, de 5000 à 10 000 emplois et plus de 10 000 emplois. 37,8 millions de personnes (59 % de la population française) vivent dans des grands pôles et 42,1 millions (66 % du total) vivent dans un pôle urbain.»
4 Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques : agence publique 5 Membre(s) du Centre d’observation de la société, « Ville, campagne, périurbain, qui vit où ? », 28 novembre 2013 [en ligne], Disponible sur http://www.observationsociete.fr/territoires/lieu-de-vie_terri/ ville-campagne-periurbain-qui-vit-ou.html#return-note-439-1 Le Centre d’observation de la société a été créé en 2011 par le bureau d’études Le Compas, spécialiste de l’observation sociale des territoires. 17
«À l’intérieur de l’appartement tu oublies que tu vis dans une cage à lapin. La grande baie vitrée du salon occupe toute la façade et offre une superbe vue. J’ai la chance d’occuper un des appartements d’angle du 18ème étage et donc d’avoir plusieurs orientations de vues. J’ai toujours beaucoup de lumière naturelle et jamais de bruit. La vue sur Luminy et les collines est superbe et le matin je prends mon petit déjeuner dans le paysage. Mon regard survole la ville et je n’ai pas l’impression d’habiter en ville. Et aussi, malgré le fait que le bâtiment soit très grand, chaque ascenseur ne dessert que trois autres appartements. Il n’y a pas d’immense couloir qui puisse faire ressentir cette démesure. Le week-end j’aime beaucoup aller me balader au-dessus des bâtiments de Super-Rouvière. On passe d’un endroit surpeuplé à une nature sauvage. J’adore.» Océane6
«Franchement, j’adore vivre ici. La vue n’est jamais la même parce que le ciel change tous les jours. Je ne ressens pas du tout le fait de vivre dans une barre. Dans l’appartement, je perçois le paysage comme un poster, une image.» Emmanuel7
6 Entretien fait avec Océane, habitante de la Résidence La Rouvière, bâtiment D entrée 7, 18ème étage, le 01/12/18 7 Entretien fait avec Emmanuel, habitant de la Résidence La Rouvière, bâtiment D entrée 3, 17ème étage, le 01/12/18 18
Habiter le grand paysage
J’ai commencé mon appréhension des périphéries par le 9ème arrondissement de Marseille, que je connais bien. Rien de plus rassurant que de se tourner d’abord vers une proximité connue. En revanche, j’ai décidé d’explorer les typologies standardisées de l’habitat collectif (la tour et la barre) ; un mode d’habiter que je n’ai jamais expérimenté et que je souhaitais mieux comprendre. Pour explorer ces «machines à habiter»8 j’ai laissé ma curiosité me guider et surtout mes jambes me porter. La hauteur fascine toujours. Bien que 87% de la population française souhaite habiter dans un pavillon avec jardin9, l’habitat collectif à Marseille reflète aussi une façon de vivre avec le paysage, de le comprendre par le simple fait de l’habiter. En témoignent les photographies que j’ai pu prendre en montant sur les collines, mais aussi les paroles d’habitants que j’ai récoltées lors de mes explorations. Comme l’expliquent Océane et Emmanuel, habitants de La Rouvière, la vue est l’une des caractéristiques qui permet de vivre ce grand paysage. (voir ci-contre) L’immeuble collectif reste associé, pour beaucoup de personnes, aux grands ensembles et il est souvent peu apprécié car très connoté idéologiquement. Mais aujourd’hui avec les enjeux actuels et les mentalités qui évoluent quant à la fabrique de la ville, les réflexions sur la compatibilité de la qualité de vie et de la densité avancent vite et se renouvellent sans cesse. L’extension verticale pourrait ainsi bénéficier des changements de représentation et redevenir un potentiel de projet à vivement (re)considérer. L’architecte Yves Lion soutient cette hypothèse en affirmant que : « L’avenir du vivre ensemble passe par les grands ensembles »10
8 Pour paraphraser Le Corbusier 9 DAMON Julien, «Les Français et l’habitat individuel : préférences révélées et déclarées», 21 février 2017, SociologieS. Dossiers, Où en est le pavillonnaire ? [En ligne], Disponible sur : https://journals. openedition.org/sociologies/5886 10 LION Yves, entretien accordé à Demain la ville, site internet, Avril 2013 [en ligne] Disponible sur : https://www.demainlaville.com/yves-lion-lavenir-du-vivre-ensemble-passe-par-les-grands-ensembles/ 19
Dans l’univers d’Océane
La mer comme unique horizon
La tête dans les collines 20
Dans l’univers d’Emmanuel
Un cadrage sur le paysage
Cuisiner avec la nature 21
Le jour, la nuit, c’est toujours une (re)découverte
Parc du Roy d’Espagne Lors de mon parcours aux portes de la ville phocéenne, j’ai souhaité faire une halte aux abords des fameuses tours de la Salette. Éléments phares du paysage urbain marseillais, ces tours de logements marquent la fin du Parc du Roy d’Espagne. Les logements collectifs de cette vaste opération urbaine s’inscrivent dans une des zones les plus vertes de Marseille, au milieu des pins. C’est un véritable tapis vert qui accueille ici ou là des bâtiments. Le Parc National des Calanques est accessible à pied et nous pouvons très rapidement nous retrouver dans un tout autre monde malgré le terrain très escarpé aux abords directs des tours. Les usagers sont à la fois éloignés de l’agitation bruyante de la ville et reliés à celle-ci en étant très rapidement sur des lieux plus denses où ils travaillent. En revanche, le manque de transports en commun desservant cette zone est un inconvénient important, rendant les habitants dépendants de leur voiture. Le 8ème arrondissement de Marseille est l’un des plus convoités. La demande de logements est en constante augmentation. Cependant, le Parc du Roy d’Espagne est situé à proximité immédiate de la limite du Parc National des Calanques et, de fait, est en zone classée «aire optimale d’adhésion». C’est pourquoi son urbanisation est très bien encadrée et réglementée. D’après le dossier de presse des chartes des parcs nationaux11 : «Un parc national, c’est à la fois un territoire, des hommes et un projet.» D’après ce même document, «Pour les communes, mais aussi pour les entreprises et les hommes qui agissent sur leur territoire, adhérer à ce projet collectif, c’est s’engager dans une démarche de cohérence dans la durée (15 ans). Engagement en cohérence avec les orientations négociées dans la charte, notamment en matière d’urbanisme, de circulation et de publicité. Mais aussi et surtout, engagement dans une dynamique collective, sur un projet cohérent, qui valorise leur identité autour d’un monument naturel national.» Ces contraintes, qu’il faut percevoir plus comme des exigences positives (car elles génèrent des propositions architecturales et urbanistiques en accord avec leur site environnant), peuvent être la genèse d’un projet de restructuration urbaine du Parc du Roy d’Espagne, qui s’adapterait à la forte demande de logements actuelle tout en offrant à sa communauté un développement local exemplaire, harmonieux et 11 Dossier de presse «Les chartes des parcs nationaux français» publié par Parcs nationaux de France, Juin 2013 24
durable. Mais malgré ces textes, la pratique est tout autre. Le parc a du mal à gérer cette zone d’adhésion et à en définir le potentiel de transformation tout en préservant sa qualité de zone frontière. C’est pourquoi depuis quatre ans, l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Marseille propose à ses étudiants en workshop de semestre 7 d’aider le parc à réfléchir à des évolutions possibles. De mon côté, en m’appuyant sur les travaux communs des équipes de Jean Nouvel (Ateliers Jean Nouvel), de Jean-Marie Duthilleul (Agence Duthilleul) et de Michel Cantal Dupart (Agence Cantal Dupart) sur le Grand Paris en 2010, je propose une hypothèse de scénario qui transformerait cette lisière que représente le Parc du Roy d’Espagne, entre ville et cœur naturel protégé. Cette proposition s’appuie sur une densification de logements et sur l’introduction de services de proximité en privilégiant l’extension verticale des bâtiments existants. Des initiatives durables et respectueuses de l’environnement sont également avancées comme la production d’énergie grâce à des panneaux solaires et une certaine indépendance vis à vis de la consommation quotidienne de légumes par le biais de serres bioclimatiques. Ainsi, des logements seraient créés et permettraient de répondre à la forte demande. L’ensemble du parc deviendrait plus attractif car mieux équipé en services et en commerces. (cf axonométrie explicative pages 28-29)
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ÉchappÊe belle
PARC NATIONAL DES CALANQUES
PARC DU ROY D’ESPAGNE
EXTENSION DE L’HABITAT
EXISTANT :
SOL SEMI-NATUREL
PROJET :
SOL NATUREL
SOL ARTIFICIEL
ZONE DE CULTURE
TERRAINS DE SPORT
EXTENSION
S
N
COMMERCES DE PROXIMITE
BUREAUX PROFESSIONS LIBERALES
SERRES BIOCLIMATIQUES
EQUIPEMENTS
MARCHE PRIMEUR : VENTE DIRECTE
PANNEAUX SOLAIRES
JARDINS FAMILIAUX
ARRETS DE BUS
Une pensée collective dans un monde de possibles
Résidences Valmont-Redon et Super Valmont Dans cette série thématique «Habiter le grand paysage», ma deuxième étape a été les Résidences Valmont-Redon et Super Valmont dans le neuvième arrondissement. Là encore, ces immeubles de logements collectifs semblent se fondre dans la pinède qui les entoure. Quasiment invisibles depuis l’Avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny, située en contrebas, ces immeubles ont profité d’un interstice pour se nicher au cœur de la nature sauvage. La limite n’est pas physiquement marquée mais le relief empêche toute extension. De petits sentiers pédestres permettent rapidement de prendre de la hauteur. En revanche, là encore, ce confort de vie nécessite une voiture. On n’imagine pas remonter à pied avec ses courses, du boulevard au dernier immeuble de la résidence. La résidence s’inscrit dans une zone à l’habitat essentiellement individuel où les services y sont relativement bien développés. On est ici face à un cas où l’aire d’adhésion du Parc National a permis d’offrir, une fois de plus à plusieurs centaines de ménages, la possibilité de jouir du calme et de la beauté du cadre naturel tout proche, tout en étant rapidement en ville.
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL
LIMITE ENTRE LA ZONE NATURELLE DU PARC ET LA RESIDENCE
Un logement collectif où on ne l’attendait pas
30
Paradis collectif
31
HLM de Luminy Nous nous éloignons maintenant encore un peu plus de l’urbanisation pour nous rendre au pied des neufs petites tours de six étages du complexe collectif de HLM Luminy. Elles sont très peu visibles depuis la route en contrebas menant au campus universitaire de Luminy. Leur implantation est très surprenante car elles sont perdues au milieu de cette pinède dense, à la limite du périmètre du Parc National des Calanques. Encore dans le 9ème arrondissement, l’ensemble des immeubles semble pourtant éloigné de la vie urbaine. L’école en contrebas est le seul service directement à proximité. Ils jouissent d’un cadre exceptionnel et représentent une fois de plus la relation spéciale que Marseille peut entretenir avec sa nature environnante. Leurs habitants sont des citadins qui habitent la nature. C’est à la fois un avantage incroyable et un inconvénient dû à l’éloignement. Des panneaux solaires installés sur chacun des toits assurent leur alimentation en électricité et évitent la pollution visuelle générée par les câbles électriques. Baptiste Lanaspèze et Geoffroy Mathieu expriment très bien dans leur essai Marseille, Ville Sauvage : essai d’écologie urbaine12 ce qui fait l’identité de Marseille. «Dans une ville littorale comme Marseille, on est dehors chez soi, et l’on est chaque jour ailleurs sans avoir besoin de quitter la ville. [...] La limite se brouille entre le dehors et le dedans, entre le privé et le public, entre la ville et la nature - entre le corps et le monde. [...] A Marseille, on pêche, on chasse, on se baigne, on piquenique sur la plage [...] Et tout cela altère forcément un peu le sens qu’on donne au mot «citadin», ainsi que l’horizon qu’on lui propose. [...] La nature, ici, ne saurait être donc comme quelque chose d’extérieur : elle règne partout, dans les rues comme dans les âmes.» Les habitants des HLM de Luminy vivent dans des logements collectifs avec un avantage essentiel souvent réservé au logement individuel : l’accès rapide et facile à la nature sauvage. La photo ci-contre permet de bien s’en rendre compte. Les nombreux sentiers de randonnées passant à quelques centaines de mètres des immeubles et l’implantation en retrait par rapport à la route en contrebas permettent à toutes les générations de profiter de ce cadre en toute sécurité. Malgré le fait que l’ensemble collectif se trouve aux portes d’un immense terrain de jeu naturel (les bâtiments se situent dans l’aire d’adhésion du Parc National des Calanques), la zone manque cruellement d’équipements comme des terrains de sport par exemple qui pourraient être bénéfiques autant pour les habitants que pour l’école.
12 LANASPEZE Baptiste, MATHIEU Geoffroy, Marseille, Ville Sauvage : essai d’écologie urbaine, Arles : éditions Actes Sud, 2012, 202 pages 32
VERS ROUTE DES CRETES
VERS CRETE DES ESCAMPONS
PROJET :
EXISTANT :
SOL SEMI-ARTIFICIEL
SOL NATUREL DU PARC NATIONAL DES CALANQUES
PANNEAUX SOLAIRES
PISTE CYCLABLE
DESTINATION ACCESSIBLE PAR LES CHEMINS DE RANDONNEE
TERRAINS DE SPORT
LOISIRS
«Allez les enfants, on sort prendre l’air !»
Quand la pinède prend part à la vie quotidienne 33
Résidences de La Rouvière et de Super-Rouvière Etienne Ballan, fondateur de l’association Arènes, très active à Marseille, a dit : «J’en fais un principe de méthode : il faut toujours commencer par révéler les qualités du lieu, avant de dénoncer un projet»13 Nous voici à la Rouvière, et même Super-Rouvière ! Ces résidences se repèrent aisément dans leur environnement grâce à leurs barres d’immeubles hautes d’une vingtaine d’étages. Situées pourtant qu’à une dizaine de minutes en voiture des HLM de Luminy, elles offrent à leurs habitants de multiples services de proximité tout en leur permettant l’accès aux collines en moins de cinq minutes à pied. C’est très étonnant. La limite proprement dite n’est pas marquée physiquement par une barrière ou autre et nous pouvons passer de manière très inattendue et rapide d’un milieu urbanisé à forte densité à la nature sauvage du parc. Un kilomètre carré suffit pour nous rendre compte de l’hétérogénéité que prend le bâti dans ce quartier. Le petit immeuble collectif côtoie à la fois les maisons individuelles et les imposantes barres de la Rouvière. Rien ne semble manquer à la Rouvière si ce n’est peut-être de vivre plus intensément ce rapport déjà établi avec le grand paysage. A l’image des immeubles «Nid d’abeille» et «Sémiramis» construits à Casablanca en 1952 par les architectes ATBAT Afrique avec Georges Candilis, Shadrach Woods, Vladimir Bodianski et Henri Piot, les habitants de La Rouvière ont progressivement rempli les vides qui avaient été initialement pensés comme un prolongement extérieur de leur logement. Par manque de place sûrement. Etienne Ballan de nouveau : «Les grands ensemble, on en a hérité ; faisons avec : colonisons-les, modifions-les, transformons-les, approprions-nous-les.» 10 L’idée folle serait donc la suivante, en accord avec les propos précédents : transformer les barres de La Rouvière, leur redonner leur légitimité face à une nature qu’elles dominent. L’objectif n’étant pas d’accentuer cette domination mais au contraire de l’estomper en redonnant à la nature la place à laquelle elle peut aspirer dans le logement : une inspiration, une pause dans une vie urbaine agitée. Il faut renforcer le lien ville-nature en introduisant cette dernière au plus près des urbains. Je pense ainsi à Le Corbusier et à sa fameuse Cité Radieuse ou encore à son théorique immeublevillas où la loggia occupe la place d’or au sein du logement. Généreuse, elle est comme un cadrage sur la nature environnante, une incitation à vivre dehors.
13 Cité par LANASPEZE Baptiste, MATHIEU Geoffroy, in Marseille, Ville Sauvage : essai d’écologie urbaine, Arles : éditions Actes Sud, 2012, 202 pages 34
Skyline
Quand l’architecture rencontre la nature sauvage 35
Passer d’un univers à un autre en quelques minutes
EXISTANT :
SOL SEMI-ARTIFICIEL
SOL NATUREL
ARBRES EXISTANTS
PROJET :
ALTERNANCE DE PLEINS (LOGEMENTS) ET DE VIDES (LOGGIAS)
PANNEAUX SOLAIRES
JARDINS FAMILIAUX
Dans les traces de Le Corbusier
Repenser les périphéries des villes dans le grand paysage Cette partie consacrée à l’habitat collectif et au grand paysage nous a permis de mesurer l’impact que peuvent avoir les immeubles de logement collectifs aux portes de nos villes dans nos manières d’habiter. Aujourd’hui plus que jamais, la transformation de ce patrimoine du XXème siècle14 et la réflexion sur son rôle dans la constitution des villes est un enjeu prioritaire. Les architectes doivent en comprendre et en mesurer les enjeux actuels et inscrire le logement collectif dans une véritable démarche intellectuelle. Nous l’avons évoqué, la densité apportée par le logement collectif fait de celui-ci une typologie architecturale de l’habiter indispensable pour repenser les périphéries des villes. Actuellement, les valeurs qu’il incarne ne sont plus aussi négatives qu’auparavant ce qui le rend plus attractif.
Nous allons maintenant continuer notre parcours en nous intéressant à l’habitat individuel.
14 Thierry Durousseau est l’un des premiers à avoir bousculé la vision et la représentation des grands ensembles en les élevant au rang de patrimoine. Pour aller plus loin, livres : DUROUSSEAU Thierry, Ensembles et Résidences à Marseille 1955 - 1975, 20 années formidables, éditions bik&book, 2009 et DUROUSSEAU Thierry, Architectures à Marseille 1900 - 2013, éditeur Maison de l’Architecture, 2014, 248 pages 41
Habiter le paysage du quotidien
En 2004 le CREDOC (Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de vie) déclarait que la maison individuelle représentait «le logement idéal pour 82 % des Français et qu’être propriétaire de sa maison constitue la combinaison parfaite pour 77 % d’entre eux. Seulement 12 % préfèrent la propriété d’un appartement et 11 %, la location de la résidence principale.» 15 Toujours d’après le centre de recherche, c’est en 2008 cette fois qu’il était annoncé que «83% des locataires qui désiraient accéder à la propriété opteraient pour l’habitat individuel»16. Ces chiffres englobent les trois principales typologies d’habitat individuel à savoir la maison isolée avec jardin, le pavillon résidentiel et la maison de ville accolée. Initialement, la typologie pavillonnaire doit son existence à la bourgeoisie qui était à la «recherche de prestige et de salubrité»17. De plus, d’après Henri Lefevbre, le pavillon est «une conception architecturale qui donne aux habitants la maîtrise de leur habitat : ne pas être dépendant du monde extérieur, maîtriser la sphère du chez soi et de l’intime.»18 En revanche, bien qu’elle soit plébiscitée par une majorité, cette forme d’habitat centré sur le cocon familial peut entraîner un éloignement prononcé vis à vis du monde extérieur.
15 DJEFAL Sabrina et EUGENE Sonia pour le CREDOC Septembre 2004. [en ligne] Disponible sur : https://www.credoc.fr/publications/etre-proprietaire-de-sa-maison-un-reve-largement-partagequelques-risques-ressentis 16 HATCHUEL Georges, DUFLOS Catherine et CROUTTE Patricia, enquête barométrique «Conditions de vie et Aspirations des Français, quelques opinions et aspirations en matière de logement». Document réalisé à la demande du Ministère du Logement et de la Ville. Juillet 2008. [en ligne] Disponible sur : https://www.credoc.fr/publications/enquete-conditions-de-vie-et-aspirations-des-francais-quelquesopinions-et-aspirations-en-matiere-de-logement 17 RAYMOND Henri, DEZES Marie-Geneviève, HAUMONT Nicole, HAUMONT Antoine, L’Habitat Pavillonnaire, éditions L’Harmattan, 2001, 114 pages 18 Extrait de la préface de LEFEVBRE Henri du livre de RAYMOND Henri, DEZES Marie-Geneviève, HAUMONT Nicole, HAUMONT Antoine, L’Habitat Pavillonnaire, éditions L’Harmattan, 2001, 114 pages 43
Un habitat individuel groupé : deux exemples planifiés de l’apologie du chacun chez-soi
Lotissements La Batarelle et La Parade Ma promenade urbaine m’a donc menée à la Batarelle, puis à la Parade, deux lotissements du 13ème arrondissement de Marseille. Le lotissement de La Batarelle accueille les personnes non résidentes avec des panneaux sens-interdit, des inscriptions menaçantes ou d’indication de voisinage attentif, ou encore avec des murs hauts et épais. La limite avec la campagne se traduit ici d’une manière très forte, par de véritables frontières. Beaucoup de maisons tournent clairement le dos au Massif de l’Étoile, ce qui s’explique notamment par l’orientation, celui-ci étant situé au nord des lotissements. Certaines des maisons situées en périphérie du lotissement ont une petite porte donnant directement sur le massif montagneux ce qui témoigne d’une volonté d’interaction avec ce grand paysage. L’échappée furtive vers la nature sauvage à portée de main. Et pourtant, ces portes ne semblent pas trop utilisées car elles sont fermées à double tour, voire même condamnées. Les habitants vont-ils se balader dans ce massif ? Mais également, pourquoi semblent-ils ne plus y aller ? Lorsque je me suis aventurée sur les chemins au nord du lotissement, j’ai croisé à deux reprises des groupes de jeunes à moto-cross. C’était un dimanche, il faisait beau. Ils étaient nombreux et faisaient beaucoup de bruit. C’est potentiellement une des raisons pour lesquelles les habitants accordent autant d’importance à la sécurité des accès principaux de leur maison qu’aux accès secondaires, à l’arrière des parcelles. Ces aménagement architecturaux et signalétiques font directement échos au livre de Oscar Newman Defensible Space Theorie19, dans lequel il établit une relation sine qua non entre hiérarchisation des espaces résidentiels, aménagements architecturaux et facilitation de l’appropriration des espaces grâce à la production de sécurité. De plus, une «surveillance informelle» se met progressivement en place dans le quartier, intégrant les voisins au processus de vigilance. Nous pouvons livrer un constat similaire pour la résidence de La Parade. Il semble n’y avoir aucune interaction entre les deux milieux. Pourtant située à l’extrémité de la ville, au cœur d’un site naturel extrêmement riche, regorgeant de sentiers pédestres, la résidence est cloîtrée et renfermée sur elle-même. Les résidents sont, de plus, totalement dépendants de l’utilisation de leur voiture car ils sont éloignés des services et des commerces. La zone urbanisée constituée seulement de maisons 19 NEWMAN Oscar, Defensible Space : People and Design in the Violent City, Londres, Editions Architectural Press, 1972 44
individuelles et située entre la route principale de Château Gombert et la limite du lotissement de La Parade (large d’environ deux kilomètres) est la preuve d’un étalement urbain à grande échelle. Ces deux lotissements ont été soit pensés autour d’une boucle soit comme une impasse. Ainsi, l’appartenance à une seule et même entité formée de plusieurs unités se renforce spatialement. Face à ce constat, nous pouvons imaginer une hypothèse de scénario concernant les formes de mutations du pavillonnaire actuel. L’habitat individuel est un choix possible avant tout grâce à des ressources financières adéquates. L’objectif n’est donc pas de bousculer ce mode d’habitat en imposant une mixité sociale ou un facteur communautaire idéalisé. Mais ces quartiers pourraient être des terrains d’expérimentation de cohabitation entre urbanisation et nature sauvage car ils s’y prêtent d’un point de vue géographique. La Nantaise d’habitation, Entreprise Sociale pour l’Habitat et filiale d’Action Logement Immobilier est le parfait exemple du commanditaire ouvert aux alternatives en matière de logement social. Elle attend des architectes des réflexions de projet qui vont au-delà des projets faisant référence au logement individuel groupé, intermédiaire ou collectif. Elle commande «un habitat urbain dense et individualisé»20 dont les innovations conceptuelles permettraient de sortir des voies déjà toutes tracées.21 Continuons notre parcours.
Une frontière. Deux mondes 20 Nantaise d’Habitations, Entreprise Sociale pour l’Habitat, Nantes. Disponible sur : https://www.nantaise-habitations.fr/ 21 Pour aller plus loin : site internet du Lab Périurbain, disponible sur : http://www.periurbain.cget.gouv. fr 45
Murs-frontières
SOL SEMI-ARTIFICIEL
SOL NATUREL
ACCES : BOUCLE DE CIRCULATION
MUR : DEMARCATION FRANCHE
VERS MASSIF DE L’ETOILE
Une boucle invitant à faire demi-tour : vous n’êtes pas les bienvenus à La Batarelle
VERS MASSIF DE L’ETOILE VERS MASSIF DE L’ETOILE
SOL SEMI-ARTIFICIEL
SOL NATUREL
ACCES : SERIE D’IMPASSES
MUR : DEMARCATION FRANCHE
SOL SEMI-ARTIFICIEL
SOL NATUREL
ACCES : SERIE D’IMPASSES
MUR : DEMARCATION FRANCHE
RS MASSIF L’ETOILE
Impasse et accès sécurisés : circulez, il n’y a rien à voir à La Parade
Un développement interstitiel, deux morphologies différentes
Le Parc National des Calanques est le premier parc national périurbain à la fois terrestre et marin d’Europe. A Marseille, la nature est toujours très présente. Voici trois axes majeurs qui le prouvent22 : «- Depuis l’invention de la randonnée vers la fin du XIXème siècle, le Parc National des Calanques (reconnu comme tel qu’en 2012) est une véritable référence mondiale en matière de randonnée pédestre. Le sociologue Michel Péraldi oppose la terre (lieu de vie, travaillé par l’usage des hommes qui y inscrivent leur existence) à cet espace à la fois sacralisé et rationalisé, maîtrisé d’en haut, orthonormé dans les cartes, et finalement irréel, que l’on découvre en randonnant : cette «Nature» pure, présumée vierge de toute présence humaine, de toute pratique sociale. L’invention de la randonnée en a fait une des activités emblématiques d’une opposition nouvelle, entre ville et nature, nuançant ainsi l’ancienne relation établie entre ville et campagne. - À l’ère industrielle, la nature a pris part à celle-ci en devenant une simple ressource de l’aventure productrice dans les carrières, les ports et les usines. - La nature à Marseille permet la structuration de la ville mais également de ses mœurs. La bastide de maître comme le cabanon sont deux formes architecturales emblématiques de cette « urbanité rurale » et la traduction spatiales de la coexistence de la ville et de la campagne.» Marseille c’est donc ça, une interaction permanente entre ville et nature. L’une et l’autre semblent s’enlacer pour composer ensemble ce beau territoire.
22 LANASPEZE Baptiste, MATHIEU Geoffroy, Marseille, Ville Sauvage : essai d’écologie urbaine, Arles : éditions Actes Sud, 2012, 202 pages 53
Une faible densité linéaire - Petite devinette A quoi pensez-vous lorsque vous voyez cette photo ?
Pour ma part, j’y vois un petit village provençal, calme et paisible, au pied de collines.
À présent regardons plus attentivement.
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SOL SEMI-ARTIFICIEL
SOL NATUREL
Vaufrèges Il n’y a ni place centrale, ni terrain de pétanque, ni église, ni cimetière, ni même une boulangerie. Et pourtant nous sommes à Marseille, à Vaufrèges, classé en aire d’adhésion, à la limite du périmètre du cœur du parc national. Lorsque nous sortons de Marseille, ce quartier représente vraiment la fin progressive du milieu urbain. Il laisse place doucement à la nature sauvage des collines bordant le 9ème arrondissement et marque le début de la route magnifique du Col de la Gineste menant à Cassis. Le bâti forme un couloir étroit en s’implantant de part et d’autre de la route principale qui le traverse, et ce, sur peu de profondeur. Sur le versant sud se côtoient de belles maisons individuelles avec piscine et jardin alors que sur le versant nord des entreprises sont venues s’implanter de manière assez brutale en creusant dans la roche. En revanche, il n’y a aucun service de proximité. Ce quartier n’existe pas comme tel et s’apparente beaucoup plus aux deux précédentes résidences en formant cette fois un ensemble bâti linéaire. 55
Un étalement diffus et désordonné : La Panouse et Montredon Poursuivons notre exploration. Nous arrivons à La Panouse. C’est un quartier résidentiel composé essentiellement de maisons individuelles qui s’inscrivent dans un tissu peu dense. Les constructions se glissent dans les interstices du relief. La limite d’extension se confond avec le périmètre de protection établi pour le Parc National des Calanques. La limite peut être qualifiée de pérenne car elle ne sera pas amenée à être modifiée. Cette bordure, à la fois contrainte par une géographie et par des limites administratives ne laisse place à aucune extension possible. Et juste après, halte à Montredon qui est un cas très similaire à celui de la Panouse car situé en bordure du Parc National des Calanques. Son usage principal est également résidentiel et nous assistons ici à une «ascension» du bâti vers les collines, rapidement stoppée par des terrains caillouteux et des pentes raides. A l’échelle du quartier, la limite est franche car contrainte par une limite administrative et elle se traduit surtout par de hauts murs de clôture, semblant barricader les habitants chez eux. Au contraire, à l’échelle de la ville, et en regardant le tissu urbain dans son ensemble, la limite semble diffuse car l’empreinte de la zone bâtie diminue progressivement au fur et à mesure que cette dernière se dirige vers les massifs escarpés. Contrairement au Parc du Roy d’Espagne les accès sont très étroits et se terminent pour la plupart en impasse. Engager des restructurations urbaines est donc un véritable enjeu. Le quartier manque cruellement de services de proximité et d’équipements. L’objectif serait donc de se servir de l’existant pour apporter ces avantages qui manquent aujourd’hui.
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SOL SEMI-ARTIFICIEL
SOL NATUREL
FRACTURE DU RELIEF : LIMITE FRANCHE
Montredon : la fracture du relief comme limite
B
EXTENSION DE L’HABITAT
EXISTANT :
SOL SEMI-ARTIFICIEL
SOL NATUREL
BUREAUX PROFESSIONS LIBERALES
COMMERCES DE PROXIMITE
PROJET :
EXTENSION
SERRES BIOCLIMATIQUES
EQUIPEMENTS OU ESPACE PUBLICS : PARC, GYMNASE, TERRAINS EXTERIEURS
La Panouse : un projet pour dynamiser un quartier-impasse
Habiter le périurbain
En 2001, Thomas Sieverts propose un essai sur le Zwischenstadt, dont la traduction française d’«entre-ville» semble ne pas faire ressortir toute la richesse conceptuelle englobée par le terme original. Cette publication laisse de côté la ville historique mainte fois étudiée et porte ainsi toute son attention sur la notion de «périurbain». Dix ans après, il est revenu sur cette réalité urbaine tout juste émergente à l’époque, lors d’un entretien accordé à Métropolitiques, en la définissant et en l’expliquant ainsi: «L’émergence de cette forme urbaine non-planifiée et universelle est le résultat d’innombrables décisions prises de façon non-concertée. En choisissant un lieu d’implantation, de nombreuses familles et petites entreprises cherchent, chacune conformément à son budget, à concilier trois objectifs en conflit entre eux : la proximité avec la nature, la faible distance avec les services répondant à leurs besoins quotidiens (commerces, écoles, médecins, etc.) et le raccordement au réseau régional de communications desservant les aires d’emploi et d’activités de la région. La structure fractale caractéristique des Zwischenstädte est le produit de ces décisions complexes.»23 La plupart des familles dont il parle sont donc usagères d’une ville territoire qu’elles ne semblent pas voir à cause de leur dépendance aux parcours essentiellement viaires et à grande vitesse. Comme le stipule Frédéric Bonnet dans son rapport «Aménager les territoires ruraux et périurbains»24, l’usage de la voiture individuelle est quasi exclusif dans les campagnes périurbaines car elle apporte une certaine fluidité dans les déplacements. Néanmoins, pour ces habitants, l’impact de cette utilisation quotidienne n’est pas sans conséquence sur leur budget et sur leur rythme de vie soumis au temps important passé dans les déplacements. Et on ne parle pas ici de l’impact écologique que cette dépendance génère.
23 Stéphane Bonzani & Stéphane Füzesséry & Thomas Sieverts, Entretien « Entre ville et campagne, l’avenir de nos métropoles », Métropolitiques, 2 mars 2011. [en ligne] Disponible sur : https://www. metropolitiques.eu/Entre-ville-et-campagne-l-avenir.html 24 BONNET Frédéric, architecte Grand prix de l’Urbanisme, «Aménager les territoires ruraux et périurbains», remis à Sylvia Pinel, ministre du Logement, de l’Egalité des territoires et de la Ruralité - 7 janvier 2016 - [en ligne] Disponible en téléchargement sur : http://www.cohesion-territoires.gouv.fr/amenagement-des-territoires-ruraux-et-periurbains-remise-du-rapport-de-frederic-bonnet-a-sylvia-pinel 63
Les questions qui se posent sont donc les suivantes : - Comment pourrait-on s’appuyer sur ce qui existe déjà ? - Ne pourrait-on pas solidifier des mini-centralités, à proximité des pôles de transport? - Quelles sont les solutions potentielles pour adapter usages, échelles territoriales et intérêts sociaux et environnementaux ? À ces questions, plusieurs réponses et notamment celle de Ariella Masboungi et David Mangin dans leur livre Agir sur les grands territoires.25 Celle-ci préconise d’accorder «une importance particulière au vide entre les bâtiments pour offrir des opportunités de qualité urbaine. Dessiner les vides de manière consciente» et de réparer les dégâts de cette ville «du hasard» en suivant six orientations majeures : - Restructurer les fragments résidentiels, industriels et commerciaux déjà là. - Tisser des liens entre les fragments. - Restructurer les infrastructures qui les lient. - Recréer des micros centralités nécessaires. - Redonner goût à la marche à pied au moins au niveau de la proximité. - Rendre acceptables les développements périphériques en les anticipant et en leur donnant forme, sens et structure. Pour engager de telles réflexions, cela requiert en amont de considérer ces territoires comme des territoires à projet et de savoir faire des allers-retours entre la stratégie, qui donne des idées de projet, et les projets concrets qui donnent forme progressivement à une stratégie. Pour palier aux difficultés que peut rencontrer la pratique et la fabrique des territoires périurbains, il est nécessaire de «[Prendre] en compte des mobilités à la bonne échelle de référence, en associant les objectifs de la transition énergétique à ceux des équilibres sociaux»26 Pour cela, avant d’envisager quelconque action sur le périurbain, il est primordial de faire une étude précise locale afin de comprendre les caractéristiques de la zone étudiée comme l’explique Thomas Sieverts dans son entretien avec Métropolitiques: «Toutes les mesures de requalification devraient également tendre vers une meilleure lisibilité et intelligibilité afin de dégager les particularités locales. La lisibilité, permettant la construction d’images mentales et de points de repères, est une condition nécessaire pour créer une disponibilité mentale et par conséquent pour pouvoir percevoir la beauté spécifique de la Zwischenstadt, la beauté étant un facteur essentiel pour retenir l’attention, éveiller l’intérêt et le sens des responsabilités.»
25 MASBOUNGI Ariella, MANGIN David, Agir sur les grand territoires, Antony : éditions Le Moniteur, 2009, 155 pages 26 BONNET Frédéric, «Aménager les territoires ruraux et périurbains», - 7 janvier 2016 - [en ligne] Disponible en téléchargement sur : http://www.cohesion-territoires.gouv.fr/amenagement-des-territoires-ruraux-et-periurbains-remise-du-rapport-de-frederic-bonnet-a-sylvia-pinel 64
Toute la difficulté de tels projets repose sur la pertinence des propositions dans une logique de cohérence entre les échelles. Révéler la structure du paysage, à l’image du travail de Nuno Portas et Álvaro Domingues sur la métropole de Porto qui ont saisi l’opportunité de l’Euro en 2004 et de la construction du nouveau stade pour ajouter des équipements et des services, une station de métro en correspondance avec le chemin de fer, des parkings et une voirie nouvelle qui permet de franchir l’autoroute et de raccommoder la ville. De cette manière : «Il faut avoir toute la structure globale en tête pour dessiner le local, comprendre l’ossature pour y articuler des projets, dans une relation constante entre le micro et le macro.»27 Nuno Portas et Álvaro Domingues Pour relier la ville traditionnelle lente et la ville discontinue rapide, il faut créer des «agrafes» qui leur permettent de communiquer tout en introduisant le facteur temps dans le plan d’urbanisme. Nuno Portas préconise en effet de produire des «plans à régulation variable»18 qui prennent en compte les zones de plus ou moins grandes incertitudes, évitant ainsi de figer les orientations là où on manque de certitudes.
27 Cités dans Agir sur les grand territoires par Ariella MASBOUNGI et David MANGIN 65
Berre l’Etang et Gémenos Toutes ces réflexions ont été induites lorsque je suis sortie de Marseille pour explorer de nouveaux horizons. Je me suis intéressée à des villes moyennes de la Métropole Aix-Marseille où la dualité périurbain/centralité s’observe très bien comme c’est le cas avec Berre-l’Etang ou Gémenos par exemple. Contrainte au nord, à l’est et au sud-est par des massifs montagneux, la ville de Gémenos s’est naturellement étendue en demi-cercle vers l’ouest en suivant principalement le tracé de trois départementales : la D396 et la D2 qui permettent de rejoindre l’A52 au nord et à l’ouest, et la D396 qui part vers le sud. Entre ces axes routiers principaux, les parcelles construites jouxtent des parcelles agricoles. Contrainte au sud par l’Etang-de-Berre et au nord-est par le pôle pétrochimique de Berre, la ville de Berre-l’Etang quant à elle, s’est développée en suivant un schéma radioconcentrique vers le nord-ouest. Dans chacun des cas un kilomètre carré suffit pour se rendre compte de quelle manière la ville se termine en laissant progressivement place à la campagne cultivée. Le tissu d’extension urbaine est hétérogène et se développe de manière tentaculaire. La densité diminue peu à peu au fur et à mesure que l’on s’éloigne du centre ville. Il en est de même pour la taille des constructions ; la présence de la maison individuelle domine lorsque nous nous approchons des zones agricoles. La limite est diffuse et les lisières n’ont pas un avenir défini. Certaines parcelles sont en attentes de construction et donc dans un état transitif., d’autres sont exploitées et cultivées et d’autres encore sont construites. L’étalement urbain est clairement visible même si celui-ci se fait de manière moins violente d’un point de vue de l’imperméabilisation des sols que dans des zones périurbaines soumises à une forte activité industrielle ou commerciale. De nombreux terrains en friche paraissent attendre une construction pendant que des troupeaux broutent paisiblement sur la parcelle d’à côté. C’est ainsi que progressivement les maisons isolées ou les hameaux sont rattachés à l’agglomération.
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Etat transitif - GĂŠmenos -
En attendant que parcelle trouve preneur - Berre-l’Etang 67
Un lycÊe aux portes de la ville - Berre-l’Etang -
À l’image de la proposition de projet pour le Grand Paris de Finn Geipel et son équipe28 qui ont développé une approche soucieuse de l’existant, responsable et attentionnée vis à vis des habitants de ce territoire, l’action qui serait menée sur ces deux villes moyennes de la métropole marseillaise pourrait y être similaire dans ses fondements et ses ambitions. Dans le développement de ces deux agglomérations l’agriculture a sa place à jouer en tant qu’élément structurant de leur périphérie. Frédéric Bonnet s’appuie sur «une trame verte et bleue», ressource fondatrice de quelconque projet territorial29. Le rôle des architectes, urbanistes et paysagistes est de permettre aux habitants des zones périurbaines de renouer avec la campagne environnante à travers la [re]découverte des activités agricoles dont les objectifs s’orientent tant vers de nouveaux usages que vers de nouvelles consommations. Ainsi, des vergers pourraient par exemple retrouver leur place aux abords des villes et la vente directe ou à travers des circuits courts serait privilégiée. De plus, il est temps pour ces communes de penser sérieusement à la forme que doit prendre le futur logement individuel, en s’adaptant aux évolutions sociétales et environnementales actuelles. Le logement individuel doit s’urbaniser, se regrouper, se densifier. La recherche typologique n’est certes pas une priorité pour bon nombre de constructeurs mais les mentalités changent et à condition que leurs aspirations soient pertinentes et convaincantes, les nouvelles formes d’habitat individuel semblent vouées à un intérêt et un développement certains. Des projets peuvent servir de base de référence à la réflexion. Je pense notamment au projet LoNa+30 de Boskop architectes et Sophie Delhay architecte à Nantes, qui réunit en un tissu très dense 55 habitations individuelles (densité : 120 logements/hectare). Patrick Elias, directeur de la construction et du développement pour le bailleur social La Nantaise d’habitations explique : «Il s’agissait de faire émerger des projets expérimentaux et innovants qui conjuguent les qualités d’usage et d’appropriation de la maison individuelle et la densité d’un habitat collectif.» «Le quadrilatère compact alterne 19 bandes de mêmes dimensions (55 m de long par 4,6 m de large), bâties et non bâties. Les premières pour les logements à RDC ou R+1, les secondes pour les jardins privés, les cours communes ou les passages
28 Proposition de projet pour le Grand Paris de Finn Geipel et son équipe [en ligne] Disponible sur https://www.lin-a.com/gallery/lin-project-metropolis-post-kyotto-urban-design-vision-grand-paris/ grand-paris-m%C3%A9tropole 29 BONNET Frédéric, «Aménager les territoires ruraux et périurbains», - 7 janvier 2016 - [en ligne] Disponible en téléchargement sur : http://www.cohesion-territoires.gouv.fr/amenagement-des-territoires-ruraux-et-periurbains-remise-du-rapport-de-frederic-bonnet-a-sylvia-pinel 30 DELHAY Sophie et Boskop Architectes. Documents graphiques et écrits du projet LoNa+. Disponible sur : http://sophie-delhay-architecte.fr/portfolio/lona/ 70
publics. L’habitat, desservi par des venelles transversales, se développe sur quatre bandes juxtaposées. Par le jeu des transparences et des ambiances différenciées, ce dispositif très réglé permet à chaque logement d’avoir une relation unique aux espaces extérieurs. Le jardin en occupe le centre, protégé de tout vis-à-vis. Les pièces sont carrées, de taille quasi identique (15 m2) et non affectées, pour une appropriation totale des occupants. L’une d’elles est indépendante, située de l’autre côté du jardin ou de la terrasse, pour répondre à la diversité des structures familiales ou des modes de vie : accueil d’une personne âgée, bricolage, travail à domicile…»31 Je pense également au projet Villas Vanille32 de l’agence Cusy Maraval Architectes en 2005. Ces 17 maisons à patio sont construites sur des bandes étroites et représentent une alternative à l’étalement urbain dans leur proposition typologique. Enfin, pour en citer un dernier parmi tant d’autres, l’attention peut également se porter sur le projet à plus grande échelle de 170 logements à Saint-Jacques-De-LaLande33 de Harari Architectes.
31 Description tirée de l’article «Habitat Construire une ville compacte» Le Moniteur - 29/09/2008 - [en ligne] Disponible sur : https://www.lemoniteur.fr/article/habitat-construire-une-ville-compacte.1125664?fbclid=IwAR0ZiEEx_iReaE9jSoaHt3581Qwld05ubKLIr42gv60orInEj-kkew3RHYk 32 Documents graphiques et écrits du projet. Disponible sur : https://cusymaraval.com/projet/projet-construit/logement-2/villa-vanille/ 33 Documents graphiques et écrits du projet. Disponible sur : http://harari-architectes.com/?p=821 71
VERGERS
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL
SOL NATUREL ANTHROPISE (AGRICULTURE, FRICHES ETC)
LIMITE DIFFUSE ET EPAISSE : URBAIN -> PERIURBAIN -> ESPACES AGRICOLES
CULTURES
Un développement urbain radioconcentrique - Berre-l’Etang -
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL
SOL NATUREL ANTHROPISE (AGRICULTURE, FRICHES ETC)
LIMITE DIFFUSE ET EPAISSE : URBAIN -> PERIURBAIN -> ESPACES AGRICOLES
Un dĂŠveloppement urbain tentaculaire sur les plaines agricoles - GĂŠmenos -
Repenser les périphéries : densité et connexions pour un habitat individuel réformé L’habitat individuel est très complexe dans sa traduction spatiale et architecturale. Nous l’avons vu, celui-ci peut s’installer sous différentes formes sur nos territoires en ayant des conséquences variées sur ces derniers, notamment lorsqu’il s’implante sur leurs franges, entre ville et nature. Les enjeux sont importants et surtout très diversifiés en fonction des exemples. Ainsi, Ariella Masboungi dans son livre Faire ville avec les lotissements34, nous donne quelques clés pour tenter d’adapter la typologie du lotissement à la ville existante ; l’objectif final étant de «faire ville durable». Aux abords de nos villes, l’objectif prioritaire et de limiter l’étalement urbain et cela passe par une réflexion sur nos manières d’habiter. Nous devons repenser le logement. Une des solutions se trouve peut-être à mi-chemin entre habitat collectif et habitat individuel, privilégiant toujours la densité et les connections entre les centralités et les zones périurbaines. Le développement des lisières doit être pensé et stabilisé de façon à constituer des systèmes de densité raisonnée.
Jusqu’à présent nous nous sommes essentiellement intéressés à nos manières d’habiter aux franges de la ville. Mais chaque individu est amené à travailler, à consommer, à se divertir. Quelles sont alors les interactions qu’entretiennent ces espaces construits nécessaires à ces activités avec la nature qui les entoure ? Quelles sont les caractéristiques des espaces vides qui ont été générés par les infrastructures de transport et l’étalement urbain ? C’est précisément à ces questions que la seconde partie de ce mémoire est dédiée.
34 MASBOUNGI Ariella, Faire ville avec les lotissements, Paris éditions du Moniteur. Juin 2008, 160 pages 77
L’urbanisme par secteur
Définitions et état des lieux avant de se lancer Dès les années 1960, les agglomérations françaises se sont métamorphosées avec la généralisation de la voiture. Des infrastructures routières conséquentes étaient nécessaires pour faire face à ce nouveau phénomène de masse. Ce nouveau mode de déplacement, rapide et pratique, à l’échelle individuelle, a entraîné l’émergence d’un nouvel urbanisme dit commercial. Les loisirs et le pouvoir d’achat ont progressivement pris de l’importance dans la vie des gens et l’aménagement de nos territoires s’est adapté. De grandes enseignes commerciales et industrielles ont commencé à créer d’immenses zones construites en se regroupant autour des nœuds routiers. L’accès facile et rapide aux infrastructures routières et la façade publicitaire que celles-ci représentaient pour les entreprises ont transformé les périphéries des villes. Logiquement, s’en est suivi à partir des années 1970 un étalement résidentiel qui s’est appuyé sur la proximité de ces zones de services concentrés pour se développer. C’est précisément en partant de ces trois constats principaux que David Mangin, architecte et urbaniste français Grand Prix de l’Urbanisme en 2008, a écrit le livre La ville franchisée - Formes et structure de la ville contemporaine.35 Dans ce dernier, il théorise ce qu’il appelle l’urbanisme par secteur. Les infrastructures routières à grande échelle permettent une mobilité importante des véhicules mais en contrepartie elles engendrent le dessin de «secteurs» dans lesquels les usages et les typologies bâties sont clairement séparés : lotissements, zones commerciales, zones industrielles, opérations de grands ensembles etc. Les relations entre ces secteurs sont difficiles et l’usage de la voiture indispensable. Cet urbanisme, caractérisé d’«ordinaire» par David Mangin représente «90% de ce qui se construit, pour l’essentiel à la périphérie de nos villes.»36 C’est pourquoi il dénonce «l’urbanisme de produits qui s’est substitué à un urbanisme de projets : le développement des enseignes franchisées conduit, une fois qu’un prototype architectural et urbanistique a été arrêté, à le reproduire indéfiniment sur l’ensemble du territoire. Ce formatage concerne les centres commerciaux, l’hôtellerie, la restauration, mais aussi bien d’autres domaines».36 Face à cet étalement urbain incessant et toujours plus violent, Eric Charmes, chercheur en sciences sociales appliquées à l’urbain, parle quant à lui d’«émiettement paysager»37 qu’il associe à l’idée nouvelle de «clubbisation» des communes qu’il qualifie donc de «clubs résidentiels où les habitants ne se comportent pas en citoyens mais en consommateurs : ils vivent dans une municipalité non pas en tant que
35 MANGIN David, La ville franchisée - Formes et structure de la ville contemporaine. Paris, Éditions de la Villette. Juin 2004, 480 pages 36 MANGIN David, Pour une ville passante et métisse. Compte rendu rédigé par Elisabeth Bourguinat suite à la séance du 19 mai 2005 lors du Séminaire Vies Collectives organisé par les parrains de l’École de Paris. [en ligne] Disponible sur : http://www.ecole.org 37 CHARMES Eric, La ville émiettée - Essai sur la clubbisation de la vie urbaine. Paris, Éditions PUF (Presses universitaires de France). Janvier 2011, 304 pages. 81
membres d’une communauté politique, mais en tant que membres d’un club fondé sur la jouissance partagée d’un ensemble de biens et de services.» Face à ces constats concernant les périphéries, David Mangin émet trois hypothèses d’évolution possible38 : - «Continuer comme avant» sans prendre en considération les problèmes que posent déjà et poseront davantage dans le futur les voitures : santé publique, dépendance, ressources énergétiques etc. - «Opérer une sorte de retour en arrière radical» en optant pour une généralisation des transports en commun et plus généralement en se concentrant sur un urbanisme écologique. Cette solution paraît idéale mais ne semble pas tout de suite possible. Les réflexions doivent se mener à partir du contexte existant qui n’envisage pas encore sérieusement l’idée de villes sans voiture. - «Bricoler à l’intérieur du premier scénario», hypothèse considérée comme une «utopie concrète». L’idée est donc de s’appuyer sur l’introduction de transports en commun comme le tramway qui permettrait de limiter les enclavements dus à la dépendance directe à la voiture. De plus, «on pourrait aussi essayer de retrouver une géographie à l’intérieur des villes, et notamment dans les périphéries, avec les notions d’agriculture périurbaine, de requalification des voies rapides pour en faire des infrastructures civilisées, qui à leur tour modifieront le système des secteurs et permettront de retrouver des continuités, etc. Il faut aussi accepter le principe d’une densification des villes». En résumé, cette troisième hypothèse permettrait de créer une «ville passante et métisse», c’est-à-dire «une ville où on cesse de juxtaposer des environnements fermés, sécurisés, mais très dépendants de l’automobile, et qui doivent continuellement être contournés pour se rendre d’un lieu à l’autre, et où on limite la vitesse des voies rapides pour les rendre traversables et permettre un accès plus facile à l’école, à la supérette, à l’arrêt de transport en commun.»38
38 MANGIN David, Pour une ville passante et métisse. Compte rendu rédigé par Elisabeth Bourguinat suite à la séance du 19 mai 2005 lors du Séminaire Vies Collectives organisé par les parrains de l’École de Paris. [en ligne] Disponible sur : http://www.ecole.org 82
Un territoire, plusieurs typologies bâties Centre commercial Grand Littoral et ses alentours Mon parcours m’a menée au point de vue situé à côté du Lycée de la Viste, à l’est du Grand Littoral. De là, j’ai pu observer ce complexe démesuré, symbole de notre société de consommation. J’y suis allée à deux reprises : une fois en semaine et une fois un dimanche. La première fois, le lieu grouillait de monde et j’ai assisté durant de longues minutes au balais incessant des voitures qui vont et viennent. Vu d’«en haut», c’était vraiment impressionnant. La seconde fois, je n’ai pas du tout assisté à cela. C’était désert et par conséquent presque effrayant. Sans ses usagers, le bâtiment, englobé par sa trame de parkings était froid et comme abandonné. L’architecture de ce bâtiment peut-être décrite comme une nappe construite, complètement hermétique, grise et sans réflexion esthétique. Le plus grand centre commercial de la région PACA est directement accessible depuis l’autoroute A55 ; et pour que cela soit possible, un important réseau routier secondaire a été mis en place. Le dénivelé, couplé à ces infrastructures a généré cet endroit de nature assez étrange, que l’homme ne semble pas s’être appropriée totalement. Lieu de passage essentiellement, cet espace semble bien aménagé pour le stockage de l’eau. C’est aussi le terrain de base du Parc Foresta de l’association Yes We Camp. Cette vaste zone paraît être le fruit du hasard d’un enchaînement de constructions sans concertation commune dans le but d’obtenir une cohésion d’ensemble. La zone naturelle n’est ni sauvage ni cultivée et possède au contraire un statut bien particulier : celui de vaste espace tampon, planté, entre l’autoroute, la voie ferré, le centre commercial et les habitations. Aux yeux de Jean-Noël Consalès, spécialiste en géographie, urbanisme et aménagement du territoire, cet espace est un «délaissé [qui] n’est pas du vide - c’est à la fois un réservoir de biodiversité ordinaire et un lieu de respiration pour le citadin [...] Et le maintien de ces espaces de respiration est tout à fait compatible avec le genre de densité qu’on a dans cette ville résidentielle. Je suis vraiment favorable au modèle de la «ville en archipel» – îlots de ville successifs entourés de nature.»39 Ce grand espace de consommation s’implante de manière assez violente dans un milieu très hétérogène. Nous assistons ici à une illustration forte du concept de David Mangin de l’urbanisme par secteur. Les autoroutes A55 et A7, la voie ferrée, la départementale D5A, le relief ainsi qu’évidemment le centre commercial et toutes les infrastructures d’accès qu’il induit ont morcelé ce territoire en différentes typologies
39 CONSALES Jean-Noël, article «GR2013 : Penser avec les pieds» in Numéro 10 édité par The Wildproject (Journal of environmental studies), 2011. [en ligne] Disponible sur : https://www.wildproject. org/journal/10-consales 83
de bâti et notamment d’habitat. En effet, à l’est les maisons individuelles et quelques petits immeubles collectifs du quartier de La Viste surplombent le centre commercial. Au nord les grands ensembles dominent avec notamment les immeubles de la Résidence La Bricarde et de la cité de La Castellane. A l’est de cette dernière les maisons individuelles et barricadées de la Résidence Les Hauts de la Pélouque se nichent dans les interstices du reliefs ou sur les flancs escarpés. Enfin, au sud, dans les quartiers de Saint-André et de Saint-Henri, les maisons individuelles côtoient les grands entrepôts et les locaux industriels et commerciaux. À cet endroit, la ville s’arrête de manière un peu anarchique et la zone est très pauvre en commerces et services de proximité ainsi qu’en équipements. Cela s’explique par le fractionnement de ce territoire qui rend tout aménagement et restructuration à grande échelle compliqués... mais pas impossibles ! C’est pourquoi on peut penser, à l’image du travail du Groupe Descartes pour la proposition du Grand Paris, à utiliser les voies routières comme espaces de vie afin d’apaiser les circulations et de ne pas seulement les réserver à la voiture. Cette approche nouvelle des infrastructures et de la logistique pourrait permettre d’articuler différents usages afin de ne pas subir une autre logique sectorielle mais au contraire de les intégrer dans une démarche projectuelle du territoire. Par exemple on pourrait profiter de l’existence des tracés autoroutiers et de ses abords inconstructibles pour y intégrer des transports en commun, idée soumise notamment par Philippe Panerai dans son livre Paris métropole : formes et échelles du Grand Paris.40 De cette manière, cela permettrait d’associer la ville lente traditionnelle à la ville rapide discontinue. De plus, les délaissés aux abords du Grand Littoral ont le potentiels d’être aménagés de façon à apporter de véritables équipements extérieurs. On peut penser notamment à des jardins partagés ou à des ateliers de constructions éphémères développés en partenariat avec Yes We Camp. Les immenses toit-terrasses investis par les éléments techniques du bâtiment pourraient accueillir des panneaux solaires ou des serres bioclimatiques. Les parkings dont l’usage est uniquement destiné au stationnement pourraient se transformer en terrain de sport le dimanche. Ainsi, cela permettraient à des centaines de personnes de se divertir par le sport, au grand air, le week-end. Grâce à ce genre d’actions et de projets, on pourrait limiter les côtés néfastes de l’urbanisme de secteurs en évitant la mosaïque de projets et en se servant de l’infrastructure comme lien identitaire.
40 PANERAI Philippe, Paris métropole : formes et échelles du Grand Paris. Paris Edition de La Villette. 2008, 246 pages. 84
85
«Un lieu de respiration pour le citadin»
EXISTANT :
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL
SOL NATUREL ANTHROPISE (JARDINS PRIVES)
Quand tout se côtoie mais que rien n’interagit
EXISTANT :
SOL NATUREL ANTHROPISE : ESPACES TAMON, DELAISSES
PROJET :
SOL ARTIFICIEL
ARBRES EXISTANTS
TERRAINS DE SPORT
PANNEAUX
ANNEAUX SOLAIRES
JARDINS PARTAGES OU TERRAINS ASSOCIATIFS POUR ATELIER EXTERIEURS
SERRES BIOCLIMATIQUES
CHEMINEMENT PIETON, ROLLERS ETC
CONTINUITE VEGETALE
LOISIRS ET MOBILIER URBAIN
Une implantation violente en milieu hétérogène
L’exemple de l’implantation du Grand Littoral dans un milieu hétérogène nous a permis de bien comprendre le concept d’urbanisme par secteur. Les trois prochains exemples en sont également des illustrations mais dans chacun d’eux, la limite entre l’espace bâti et l’espace naturel est très marquée physiquement et ne fait qu’accentuer cette caractéristique. L’opposition entre deux mondes bien distincts est facilement identifiable.
93
Une ville dévorante de parcelles vides Zone industrielle et commerciale de Plan de Campagne Mon parcours découverte m’a menée d’abord à Plan de campagne. C’est l’exemple parfait lorsque nous parlons d’étalement urbain et de société de consommation. A proximité directe de l’autoroute A51, cette vaste zone commerciale implantée sur un sol entièrement imperméable jouxte des zones naturelles sauvages ou cultivées. Au nord, elle semble volontairement tourner le dos à la pinède et à son côté sauvage, comme si elle ne pouvait pas s’en accommoder. L’ensemble de cette étendue commerciale n’a pas cherché à créer un lien avec cette nature sauvage. Et pourtant, celle-ci aurait pu lui apporter un certain confort au sein d’un cadre de consommation agréable pour les usagers. La limite est franche et sans aucune porosité, malgré aucune contrainte topographique. A l’est de la zone, certaines parcelles agricoles semblent tant bien que mal résister au grignotage des champs par les entrepôts commerciaux ou industriels. L’autoroute A51 fait office de bordure mais ne semble pas suffisante pour stopper cette construction effrénée qui dévore les vides disponibles. Le fait qu’il n’y ait pas de périmètre défini ni de frontière hydraulique, topographique ou viaire suffisamment imposante représente ici un danger pour ces parcelles agricole. L’étalement urbain n’a pas l’air contrôlé. Les petites fermes modestes et maisons individuelles entourées encore de champs semblent fragiles face aux grandes enseignes nécessiteuses de surfaces importantes aux abords des axes routiers majeurs. Je pense que ces grandes zones commerciales auraient tout à y gagner à intégrer la nature en leur sein et à rétablir des connexions entre leur espace lourdement artificialisé et le monde agricole. Le paysagiste Alfred Peter a elaboré «la notion d’agro-parc en mettant l’accent sur une typologie d’entre-deux, intégrant la culture urbaine et l’agriculture en milieu urbain.»41 J’aurais apprécié ma visite de la zone commerciale de Plan de Campagne si j’avais pu à la fois profiter des grandes enseignes commerciales et boire un café après mes achats, à l’ombre d’un pin, dans un coin de nature qui se serait intégré entre les bâtiments commerciaux. La nature pourrait avoir comme rôle de relier les grands magasins pour favoriser la déambulation piétonne plutôt que l’utilisation de la voiture pour se rendre au prochain magasin, 300 mètres plus loin. La végétation pourrait venir coloniser ces espaces imperméables en apportant de l’ombre sur les parkings, des zones de détente ou de jeux pour les enfants en prenant comme exemple la colonisation de la ville par la végétation, développée dans la proposition de l’équipe de Jean Nouvel pour le Grand Paris.
41 Cité par MASBOUNGI Ariella et MANGIN David dans Agir sur les grand territoires, Antony : éditions Le Moniteur, 2009, 155 pages 94
Horizon impermĂŠable
Une jardinerie qui tourne le dos Ă la nature 95
EXISTANT :
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL
SOL NATUREL ANTHROPISE (AGRICULTURE, FRICHES ETC)
ARBRES EXISTANTS
PROJET :
MARCHE PRIMEUR : VENTE DIRECTE
CHEMINEMENT PIETON, ROLLERS ETC
ZONES VEGETALISEES
CONTINUITE VEGETALE
LOISIRS ET MOBILIER URBAIN
Coloniser la zone commerciale par la nature
EXISTANT :
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL
SOL NATUREL ANTHROPISE (AGRICULTURE, FRICHES ETC)
ARBRES EXISTANTS
PROJET :
MARCHE PRIMEUR : VENTE DIRECTE
CHEMINEMENT PIETON, ROLLERS ETC
ZONES VEGETALISEES
CONTINUITE VEGETALE
LOISIRS ET MOBILIER URBAIN
Le vide : élément convoité par les acteurs de l’étalement urbain
Zone industrielle des Paluds à Aubagne Nous voici maintenant à Aubagne. En vue aérienne, cette zone industrielle apparaît comme une tâche dans le paysage. En effet, bordée au sud par une nature sauvage escarpée et au nord par un chemin très étroit bordé de deux fossés profonds dont un accueille un petit ruisseau, la zone toute en longueur d’environ 200 hectares possède des limites clairement identifiables et difficilement extensibles. La démarcation est nette et aucun échange ne se fait entre ce territoire austère et son environnement, d’un côté comme de l’autre. Au nord, des espaces de maraîchage, de culture ou d’élevage font face aux entrepôts. Côté zone industrielle, de hauts grillages indiquent la privacité du lieu et marquent une volonté sécuritaire alors que de l’autre côté, la limite est marquée par un simple talus ou par une haie de hautes plantes d’eau. Le changement d’échelle des éléments construits renforce cette fracture entre ces deux mondes qui s’opposent de manière très forte. Au sein de la zone industrielle, de vastes espaces de stationnement ou de stockage correspondent aux vides qui font la liaison entre les bâtiments de maximum 10 mètres de haut, de façon à créer une nappe au sol entièrement imperméable. C’est un vaste espace utile qui n’a pas d’intérêt à s’intégrer à l’environnement qui l’entoure. Même si ces espaces construits ne nous interpellent plus tant ils sont nombreux sur nos territoires, Michel Corajoud, paysagiste et grand prix de l’urbanisme en 2003, a mis en garde quant à cette imperméabilisation des sols toujours plus gourmande en superficie : «Dans la ville territoire, l’agriculture est devenue le monument de la ville. Par ailleurs, cet espace naturel joue un rôle fondamental comme corridor écologique ; toute artificialisation de ces milieux pose des problèmes à la nature et à l’homme.»42 Et c’est bien comme un espace totalement artificiel que la Zone Industrielle des Paluds s’inscrit dans son paysage. Elle représente une véritable barrière entre l’espace naturel au sud et les espaces agricoles et naturels également, au nord. Il apparaît difficile ici d’imaginer un quelconque scénario d’interaction entre les deux milieux naturels et cette frange bâtie. Au nord, nous avons à faire à deux secteurs d’activités (à savoir agriculture et industrie) qui n’ont nullement besoin de l’autre pour exister. En revanche, il apparaîtrait judicieux de penser à la faune qui occupe les reliefs sauvages environnants en étudiant ses comportements de façon à envisager ou non des percées naturelles dans la zone industrielle (corridor de nature ou tunnel) pour faciliter ses déplacements et lui redonner accès à tous ses territoires naturels.
42 Cité par Bernard POIRIER, maire de Mordelles et vice-président de Rennes Métropole dans le livre de MASBOUNGI Ariella et MANGIN David dans Agir sur les grand territoires, Antony : éditions Le Moniteur, 2009, 155 pages 100
Nature sauvage versus zone industrielle
Espaces agricoles versus zone industrielle 101
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL
LIMITE : GRILLAGES OU MURËTS
Fracture franche
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL ANTHROPISE (AGRICULTURE, FRICHES ETC)
LIMITE : PETIT CHEMIN BORDE DE DEUX FOSSES
Changement d’Êchelle
Pôle pétrochimique de Berre Dernière étape de ce carnet curieux : ma recherche d’exemples de rencontre entre espace bâti et nature m’a conduite jusqu’au Pôle pétrochimique de Berre. Celui-ci s’impose par sa très grande surface (environ 450 hectares) dans un paysage constitué en grande partie par l’étang de Berre au sud et par de grandes surfaces de cultures sous serre ou en plein air au nord. A l’image de la zone industrielle des Paluds, le périmètre du complexe est très nettement marqué ce qui s’explique sûrement ici par la dangerosité de l’activité du site. Les plaines de ce territoire sont parfaitement adaptées à de telles activités, industrielles ou agricoles. Le site pétrochimique semble contraint par la présence de l’eau au sud et de la départementale D21F au nord. Audelà de cette route, les zones agricoles s’organisent et ce jusqu’au plus près de l’Arc et au-delà, rivière qui sert de source d’irrigation et qui se jette ensuite dans l’Étang de Berre. La construction de cette immense zone industrielle traversée par des voies ferrées (qui permettent le transport des marchandises directement depuis le site) et plusieurs routes a engendré la création de divers espaces délaissés. Aucun usage ne leur est attribué et ces délaissés paraissent dans certains cas servir de zone tampon (pour garder une certaine distance entre l’infrastructure et des zones résidentielles par exemple). Les voies ferrées scindent la surface du pôle pétrochimique de Berre en deux, créant des lieux vacants où la nature semble reprendre ses droits. Gilles Clément, jardinier et paysagiste fait entrer les délaissés dans une catégorie plus globale qu’il nomme «tiers-paysage» et qu’il définit ainsi : « Le tiers-paysage concerne les délaissés urbains ou ruraux, les espaces de transition, les friches, marais, landes, tourbières, mais aussi les bords de route, rives, talus de voies ferrées, etc. A l’ensemble des délaissés viennent s’ajouter les territoires en réserve. Réserves de fait : lieux inaccessibles, sommets de montagne, lieux incultes, déserts, réserves institutionnelles : parc nationaux, parc régionaux, réserves naturelles ».43 Baptiste Lanaspèze et Geoffroy Mathieu complète cette définition : «Le tiers-paysage, c’est avant tout ces blancs de la carte : ces espaces qui, sur une carte IGN au 1/25000e, ne sont ni du bâti, ni des champs, ni des voies de communication, ni des zones d’activité. Ce que nous enseigne le tiers-paysage, c’est que la nature n’a pas besoin d’être pure, ancienne, éloignée, pour être naturelle.»44
43 Définition de CLEMENT Gilles. [en ligne] Disponible sur : http://www.gillesclement.com/cat-tierspaysage-tit-le-Tiers-Paysage 44 LANASPEZE Baptiste, MATHIEU Geoffroy, Marseille, Ville Sauvage : essai d’écologie urbaine, Arles : éditions Actes Sud, 2012, 202 pages 107
Limite nette entre agriculture et industrie
La nature reprend ses droits 110
SOL NATUREL ANTHROPISE (AGRICULTURE NOTAMMENT) OU DELAISSES
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL
ARBRES EXISTANTS
Echelle démesurée
SOL ARTIFICIEL
SOL NATUREL ANTHROPISE (AGRICULTURE, FRICHES ETC)
ARBRES EXISTANTS
L’infrastructure et ses délaissés 111
Se réemparer de la question des lisières grâce au projet territorial L’urbanisme de secteur a entraîné de fortes discontinuités de la ville et les périphéries en sont les premières touchées. Les habitants périurbains dépendent de la voiture autant pour leur travail que pour leurs loisirs. De plus, cet urbanisme ordinaire, orchestré principalement par des urbanistes commerciaux, des spécialistes de marketing et des géomètres, entraîne une incompréhension entre la ville et la nature dans laquelle elle s’inscrit. Les lisières urbaines sont trop franches et l’étalement du bâti toujours plus important. Il faut envisager de nouveaux entrelacements pour que ces deux mondes soient à nouveau en cohérence, que l’un serve à l’autre et lui apporte une plus-value et inversement. Pour répondre à cette problématique, David Mangin préconise la revalorisation du projet urbain en (re)créant de la continuité (qui ne veut pas forcément dire continuité du bâti) de façon à : «Privilégier l’urbanisme de tracé plutôt que l’urbanisme de secteur, la ville passante plutôt que la juxtaposition d’environnements sécurisés, la ville métisse plutôt que la ville homogène. Autrement dit, il s’agit de penser les tracés à l’échelle territoriale, les densités en termes de densification, et l’hétérogénéité en terme d’hétérogénèse»45 Marc Dumont, chercheur à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Nantes et auteur d’une thèse de géographie sur les nouvelles pratiques d’aménagement urbain précise ces propos : «Le tracé consisterait à changer d’échelle en passant du projet urbain au projet territorial pour des raisons d’accessibilité aux réseaux de la mobilité, et d’intégration des dispositifs écologiques (enjeux environnementaux qui dépassent le cadre d’un lotissement). Puis, à améliorer la lisibilité de la grande ville, avec la mise en place de
45 MANGIN David, La ville franchisée - Formes et structure de la ville contemporaine. Paris, Editions de la Villette. Juin 2004, 480 pages 112
réelles politiques foncières. Enfin, en offrant une alternative aux projets d’extension des villes visant à créer de l’unité et de la continuité entre les fragments désordonnés résultant de l’étalement urbain. Réfléchir au tracé ce serait également explorer la dimension de la ville passante en développant des voies urbaines (voies paysagères), en répondant aux questions de l’insécurité urbaine par la création de continuité territoriale et non de rupture, en réintroduisant des présences humaines face à l’automatisation. Densifier consisterait ensuite à engager une pratique d’urbanisme de proximité qui ne se confonde pas avec un urbanisme communautariste et passant par deux étapes: une moindre dépendance à l’automobile (équipements de proximité), puis une densification progressive au fil du temps. L’hétérogénèse consisterait quant à elle à redonner davantage de place à l’expression individuelle, à l’intervention des habitants dans la construction de la ville et non à les étouffer sous des packages préfabriqués ou des règles astreignantes, à remettre en cause le visage néo-libéral de la pensée urbaine en promouvant non pas des centres et des périphéries, mais des faubourgs qui représentent la continuité territoriale pour aboutir à un métissage visuel.»46 Ces pistes théoriques représentent une base de réflexion pour les architectes, les urbanistes mais aussi pour les communes et les habitants afin qu’ensemble ils se réemparent de la question des lisières de la métropole d’Aix-Marseille. Ces franges entre ville et nature représentent les enjeux d’aménagement de demain. Elles doivent tenir un rôle important pour soutenir l’attractivité des territoires dans lesquels elles s’inscrivent tout en suivant un schéma directeur d’évolution cohérent avec les enjeux actuels, qu’ils soient sociaux, politiques, environnementaux, d’attractivité etc.
46 DUMONT Marc «Quel urbanisme pour la ville générique ?», EspacesTemps.net site internet, 2004. [en ligne] Disponible sur : https://www.espacestemps.net/articles/quel-urbanisme-pour-la-ville-generique/ 113
Étendue des possibles Quel avenir et quels enjeux pour les interfaces ville-nature en périphérie de nos villes ?
Me voici arrivée à la fin de ce périple. Mais en réalité il commence à peine. Un thème aussi passionnant n’a pas de fin car il se renouvelle sans cesse. Cette conclusion est la fin d’un exercice qui ne représente que le début d’une réflexion. La relation ville-nature est un des enjeux actuels majeurs du développement de nos territoires. Différentes échelles doivent être prises en compte (territoriale, urbanistique, infrastructurelle et jusqu’à celle de l’objet architectural) lorsque professionnels et habitants réfléchissent ensemble à la ville de demain. Lorsque la réflexion se porte sur des franges existantes, les espaces bâtis doivent renouer avec les espaces naturels (anthropisés ou non) qui les ont accueillis, dans le but d’aboutir à une réelle «rénovation urbaine» adaptés aux enjeux actuels. Les nouveaux projets territoriaux et urbanistiques doivent quant à eux, intégrer cette notion dès les premières réflexions afin de ne pas répéter les erreurs du passé qui ont engendré l’urbanisme que l’on connaît aujourd’hui (représenté essentiellement par l’urbanisme par secteur qui ne cesse de se développer). Pour cela, plusieurs concepts et fondements me semblent essentiels : - Tout d’abord, il faut redonner une place à l’agriculture car les urbains, dans l’ensemble, ne sont plus connectés à leur territoire. En effet, la mondialisation a engendré un allongement des chaînes alimentaires et une spécialisation des territoires, autant pour l’élevage que pour les cultures. Nous avons perdu l’échelle humaine dans le secteur agricole ce qui a engendré une forte diminution des échanges de proximité entre consommateurs et acteurs agricoles (éleveurs, cultivateurs, producteurs, maraîchés, apiculteurs etc). De plus, la provenance des produits ainsi que leur qualité ne sont pas toujours garanties. La pollution et l’utilisation abusive des sols que provoque cette forme d’agriculture intensive et détachée sont irréversibles. C’est pourquoi «la conforter [l’agriculture] devient un enjeu essentiel, pour trois raisons en partie contradictoires : afin qu’elle reste une composante essentielle de l’économie, qu’elle soit une barrière à l’urbanisation, mais aussi qu’elle soit un espace de récréation pour les urbains et un lieu d’identité.» 47 Ainsi, nous pouvons encourager les initiatives déjà existantes et développer cette agriculture urbaine et périurbaine sur des terrains en friche, des délaissés, des dents creuses, des toits, des façades etc ; les possibilités sont nombreuses. Mais derrière
47 MASBOUNGI Ariella, MANGIN David, Agir sur les grand territoires, Antony : éditions Le Moniteur, 2009, 155 pages 115
des opérations ponctuelles et souvent à petites échelles (associations, écoles, groupes de voisins), l’enjeu est de réinventer la conception urbaine de ces franges de territoires situées entre nature et espace bâti. Ainsi, c’est à l’étalement urbain qu’on s’attaque à travers une nouvelle relation basée sur les échanges de proximité entre les territoires urbains et les territoires agricoles. Ces initiatives ont aussi des fonctions sociales, environnementale, pédagogique, parfois économiques mais surtout nourricières. Cette relation positive a été expérimentée à Breda aux Pays-Bas. Mark Okhuijsen, responsable développement durable à la ville a écouté et recueilli les doléances de chaque acteur concerné par la proximité de zones agricoles avec des périphéries bâties de la ville. Les nuisances des uns et des autres ont été ainsi clairement énoncées. Il explique : «Par exemple, les paysans se plaignent que les récoltes ne sont pas respectées, soit par les enfants qui jouent dans les champs, soit par les voleurs ; les citadins reprochent aux agriculteurs d’utiliser des produits polluants, de chasser, de faire du bruit avec leurs engins...» Ainsi, grâce à cela, des projets «fondés sur des intérêts communs ont pu être imaginés : construire un réservoir d’eaux pluviales, créer une ferme écologique où travaillent les handicapés et où les enfants des écoles sont accueillis, organiser la vente de produits à la ferme, implanter un centre de congrès dans un château... C’est la dépendance réciproque qui rend les relations acceptables. Et c’est justement cela qu’opère la ville, ensemble d’éléments interdépendants.»48 Les contraintes du monde agricole et les besoins des nouveaux habitants ont pu être pensés et gérés communément de façon à satisfaire chaque acteur. - Ensuite, il me paraît nécessaire d’intégrer davantage la parole et la participation des habitants lors des études de projet et durant tout le processus de conception et de réalisation, à l’image de ce qu’a réalisé la ville de Breda. Je suis consciente que cela nécessite beaucoup de temps et d’organisation mais ces initiatives enrichissent considérablement les idées de projet et surtout permettent de réaliser des actions et des aménagement en cohérence avec leur territoire et leurs usagers. La commune de Saint-Jacques de la Lande en périphérie de Rennes a opté pour ce processus long afin de permettre à tous les acteurs de s’investir pleinement dans la conception d’un parc au cœur d’un nouveau quartier49. Il a permis de recréer une centralité et de faire le lien entre la zone industrielle et les anciens quartiers, au sein d’une commune très éclatée. Les élus accompagnés de paysagistes et d’architectes ont organisé des promenades avec les habitants pour découvrir ces terrains en friche où ces derniers n’allaient jamais. Grâce à ces visites-découvertes sur le site, les gens ont pris conscience de sa richesse : leur regard a été modifié sans même toucher au site. Sensibiliser les gens à cet agrotourisme de loisir peut permettre de trouver la cohésion d’ensemble qui manque parfois. Ces initiatives peuvent être menées également par des collectifs ou des artistes qui permettront d’apporter une autre vision sur le territoire et le paysage. Je pense notamment au collectif SAFI à Marseille 48 Exemple cité et propos recueillis par MASBOUNGI Ariella, MANGIN David, Agir sur les grand territoires, Antony : éditions Le Moniteur, 2009, 155 pages 49 Exemple tiré du film de ARNOLD Françoise, Des villes à la campagne, [Enregistrement vidéo DVD], TS Productions, Paris-Brest Productions et TV Rennes / Rennes Cité Media, 2006. (52 min). 116
qui a développé la thématique du marcheur urbain, de l’arpentage. Geoffroy Mathieu50, photographe, les a accompagnés sur le GR2013 pour laisser une trace de cette autre manière de comprendre la ville, sa ville. Le concept rejoint celui du photographe Teddy Seguin51 qui a travers le partage avec les habitants leur apporte une certaine sensibilisation des milieux. - De plus, Alberto Magnaghi soutient l’idée de considérer le paysage comme un patrimoine collectif qu’il faut préserver. En effet, celui-ci peut jouer sur l’attractivité des villes et sur le bien-être des habitants. Cette idée rejoint la précédente sur certains points comme la nécessité de sensibiliser la population à la richesse que peut apporter la nature en ville ou encore le fait de ne pas forcément sacraliser la nature mais au contraire la comprendre pour mieux penser les interfaces entre espace urbain et espace rural. - Enfin, poser la question de la limite et de son épaisseur pour contrer l’étalement urbain est primordial. «Définir des limites, c’est se donner les moyens d’endiguer la pression urbaine et de gérer de façon économe l’espace non bâti».52 La limite comme projet ; c’est ce qui a été choisi comme approche pour le Schéma de cohérence territoriale de l’agglomération de Montpellier, approuvé en 2006 qui a fait de la limite la règle du jeu du SCoT. Ariella Masboungi et David Mangin nous expliquent : «On construit d’abord la limite afin de créer la tension entre ville et paysage. En «inversant le regard», le document tente de renverser les représentations et d’appréhender le développement urbain non plus du centre vers la périphérie, mais depuis les espaces ouverts, qu’ils soient agricoles ou naturels. En distinguant les «limites déterminées» et les «limites à conforter», le schéma révèle les lisières stables et les lisières qui feront l’objet de projets. L’échelle du SCoT se révèle être la dimension adaptée pour traiter cette question des lisières.»53 Ces idées font partie d’une liste évidemment bien plus longue, mais elles s’intègrent dans une logique commune, basée sur la perméabilité entre l’urbain et les espaces naturels et agricoles. L’enjeu est de coloniser la ville par la nature afin de l’enrichir, dans une idée d’interdépendance entre les deux milieux.
50 Travail photographique 2014-2016. [en ligne] Disponible sur : http://www.geoffroymathieu.com/ la-promenade-du-milieu 51 Travail photographique 2016. [en ligne] Disponible sur : http://www.teddyseguin.com/dotclear/index. php?2017/10/02/55--insulae-nouveau-chapitre-l-ile-castellane 52 PONS Anne, BLAISON Sylvie, COMESSIE Fabienne, Les notes de l’ADEUS (L’Agence de Développement et d’Urbanisme de l’Agglomération Strasbourgeoise) n°111, Lisières Urbaines, Exploration pour construire le dialogue ville-nature. Novembre 2013. [en ligne] Disponible en téléchargement sur : http://www. adeus.org/productions/lisieres-urbaines 53 MASBOUNGI Ariella, MANGIN David, Agir sur les grand territoires, Antony : éditions Le Moniteur, 2009, 155 pages 117
Notice bibliographie raisonnée
Ouvrage / 1 auteur
- DE BEAUVOIR Simone, La force de l’âge, Paris : éditions Gallimard, 1960, 624 pages. - LANASPEZE Baptiste, MATHIEU Geoffroy, Marseille, Ville Sauvage : essai d’écologie urbaine, Arles : éditions Actes Sud, 2012, 202 pages - DUROUSSEAU Thierry, Ensembles et Résidences à Marseille 1955 - 1975, 20 années formidables, éditions bik&book, 2009 - DUROUSSEAU Thierry, Architectures à Marseille 1900 - 2013, éditeur Maison de l’Architecture, 2014, 248 pages - NEWMAN Oscar, Defensible Space : People and Design in the Violent City, Londres, Editions Architectural Press, 1972 - MASBOUNGI Ariella, Faire ville avec les lotissements, Paris éditions du Moniteur. Juin 2008, 160 pages - MANGIN David, La ville franchisée - Formes et structure de la ville contemporaine. Paris, Editions de la Villette. Juin 2004, 480 pages - CHARMES Eric, La ville émiettée - Essai sur la clubbisation de la vie urbaine. Paris, Editions PUF (Presses universitaires de France). Janvier 2011, 304 pages. - PANERAI Philippe, Paris métropole : formes et échelles du Grand Paris. Paris Edition de La Villette. 2008, 246 pages.
Ouvrage / 2 à 4 auteurs
- RAYMOND Henri, DEZES Marie-Geneviève, HAUMONT Nicole, HAUMONT Antoine, L’Habitat Pavillonnaire, éditions L’Harmattan, 2001, 114 pages - Préface de LEFEVBRE Henri du livre de RAYMOND Henri, DEZES Marie-Geneviève, HAUMONT Nicole, HAUMONT Antoine, L’Habitat Pavillonnaire, éditions L’Harmattan, 2001, 114 pages - MASBOUNGI Ariella, MANGIN David, Agir sur les grand territoires, Antony : éditions Le Moniteur, 2009, 155 pages
Internet / site
- Nantaise d’Habitations, Entreprise Sociale pour l’Habitat, Nantes. Disponible sur : https://www. nantaise-habitations.fr/ - Proposition de projet pour le Grand Paris de Finn Geipel et son équipe [en ligne] Disponible sur https://www.lin-a.com/gallery/lin-project-metropolis-post-kyotto-urban-design-vision-grand-paris/ grand-paris-m%C3%A9tropole - DELHAY Sophie et Boskop Architectes. Documents graphiques et écrits du projet LoNa+. Disponible sur : http://sophie-delhay-architecte.fr/portfolio/lona/ - Agence Cusy Maraval et projets. Disponible sur : https://cusymaraval.com/projet/projet-construit/logement-2/villa-vanille/ - Harari Architectes et projets. Disponible sur : http://harari-architectes.com/?p=821 - CLEMENT Gilles. [en ligne] Disponible sur : http://www.gillesclement.com/cat-tierspaysage-title-Tiers-Paysage
Internet / publication ou article d’un site
- HOESSLER Michel entretien «Les limites comme territoires de projets» [en ligne], propos recueillis par Camille PETIT. Disponible sur la plateforme Echanges et récits d’expériences du site internet : www. espritdavant.com
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- Membre(s) du Centre d’observation de la société, «Ville, campagne, périurbain, qui vit où ?», 28 novembre 2013 [en ligne], Disponible sur http://www.observationsociete.fr/territoires/lieu-de-vie_terri/ ville-campagne-periurbain-qui-vit-ou.html#return-note-439-1 - DAMON Julien, «Les Français et l’habitat individuel : préférences révélées et déclarées», 21 février 2017, SociologieS. Dossiers, Où en est le pavillonnaire ? [En ligne], Disponible sur : https://journals. openedition.org/sociologies/5886 - LION Yves, entretien accordé à Demain la ville, site internet, Avril 2013 [en ligne] Disponible sur : https://www.demainlaville.com/yves-lion-lavenir-du-vivre-ensemble-passe-par-les-grands-ensembles/ - DJEFAL Sabrina et EUGENE Sonia «Etre propriétaire de sa maison, un rêve largement partagé, quelques risques ressentis» Septembre 2004. [en ligne] Disponible sur : https://www.credoc.fr/publications/ etre-proprietaire-de-sa-maison-un-reve-largement-partage-quelques-risques-ressentis - HATCHUEL Georges, DUFLOS Catherine et CROUTTE Patricia, enquête barométrique «Conditions de vie et Aspirations des Français, quelques opinions et aspirations en matière de logement». Document réalisé à la demande du Ministère du Logement et de la Ville. Juillet 2008. [en ligne] Disponible sur : https://www.credoc.fr/publications/enquete-conditions-de-vie-et-aspirations-des-francais-quelquesopinions-et-aspirations-en-matiere-de-logement - Stéphane Bonzani & Stéphane Füzesséry & Thomas Sieverts, Entretien « Entre ville et campagne, l’avenir de nos métropoles », Métropolitiques, 2 mars 2011. [en ligne] Disponible sur : https://www. metropolitiques.eu/Entre-ville-et-campagne-l-avenir.html - BONNET Frédéric, Rapport «Aménager les territoires ruraux et périurbains», remis à Sylvia Pinel, ministre du Logement, de l’Egalité des territoires et de la Ruralité - 7 janvier 2016 - [en ligne] Disponible en téléchargement sur : http://www.cohesion-territoires.gouv.fr/amenagement-des-territoires-ruraux-etperiurbains-remise-du-rapport-de-frederic-bonnet-a-sylvia-pinel - Article «Habitat Construire une ville compacte» Le Moniteur - 29/09/2008 - [en ligne] Disponible sur : https://www.lemoniteur.fr/article/habitat-construire-une-ville-compacte.1125664?fbclid=IwAR0ZiEEx_ iReaE9jSoaHt3581Qwld05ubKLIr42gv60orInEj-kkew3RHYk - MANGIN David, Pour une ville passante et métisse. Compte rendu rédigé par Elisabeth Bourguinat suite à la séance du 19 mai 2005 lors du Séminaire Vies Collectives organisé par les parrains de l’Ecole de Paris. [en ligne] Disponible sur : http://www.ecole.org - Article CONSALES Jean-Noël, article «GR2013 : Penser avec les pieds» in Numéro 10 édité par The Wildproject (Journal of environmental studies), 2011. [en ligne] Disponible sur : https://www.wildproject.org/journal/10-consales - Article de DUMONT Marc «Quel urbanisme pour la ville générique ?», EspacesTemps.net site internet, 2004. [en ligne] Disponible sur : https://www.espacestemps.net/articles/quel-urbanisme-pour-laville-generique/ - MATHIEU Geoffroy, Travail photographique 2014-2016. [en ligne] Disponible sur : http://www. geoffroymathieu.com/la-promenade-du-milieu - SEGUIN Teddy, Travail photographique 2016. [en ligne] Disponible sur : http://www.teddyseguin. com/dotclear/index.php?2017/10/02/55--insulae-nouveau-chapitre-l-ile-castellane
Film - ARNOLD Françoise, Des villes à la campagne, [Enregistrement vidéo DVD], TS Productions, Paris-Brest Productions et TV Rennes / Rennes Cité Media, 2006. (52 min).
Revue / article
- FOLLEA Bertrand « Le paysage comme relation » in Les Carnets du paysages, n°21 – Septembre 2011. - PONS Anne, BLAISON Sylvie, COMESSIE Fabienne, Les notes de l’ADEUS (L’Agence de Développement et d’Urbanisme de l’Agglomération Strasbourgeoise) n°111, Lisières Urbaines, Exploration pour construire le dialogue ville-nature. Novembre 2013. [en ligne] Disponible en téléchargement sur : http://www.adeus.org/productions/lisieres-urbaines
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CARNET CURIEUX Célia CADENE
Professeurs encadrants : Marion SERRE Rémy MARCIANO Master 2 S9 - 2018/2019