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Registre des bâtiments et des logements: non à la surenchère

09 août 2016 / no 3100


Service d'information Publication hebdomadaire Rédacteur responsable : P.-G. Bieri, Centre Patronal

9 août 2016 / N° 3100

Registre des bâtiments et des logements: non à la surenchère La mise en œuvre de la nouvelle loi sur les résidences secondaires nécessite un accès aux données du registre fédéral des bâtiments et des logements. Mais la révision de l’ordonnance y relative menace d’aller bien au-delà de ce seul objectif et de créer une vaste source publique de données immobilières pouvant servir d’outil de planification politique.

Un nouveau petit monstre bureaucratique On évoque trop rarement les difficultés de mise en œuvre et les effets collatéraux négatifs des généreuses propositions acceptées en votation populaire. Ainsi de l’initiative contre les résidences secondaires, question émotionnelle où les citoyens se sont laissés convaincre par ceux qui promettaient de protéger les paysages alpins contre un déferlement de béton. La législation d’application de cette initiative a nécessité une révision partielle de la la loi sur la statistique fédérale, laquelle entraîne aujourd’hui une révision de l’ordonnance sur le registre des bâtiments et des logements. Et l’administration fédérale semble vouloir saisir cette occasion pour créer un nouveau petit monstre bureaucratique…

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Pour mémoire, la nouvelle législation sur les résidences secondaires prévoit que, pour déterminer si une commune a atteint ou non le seuil fatidique de 20%, la Confédération se base sur le registre des bâtiments et des logements. Il s’agit donc de créer la base légale pour que l’Office fédéral de la statistique (OFS) puisse utiliser les données dudit registre aux fins de la nouvelle législation. Le type de chaque logement – principal ou secondaire – n’y est toutefois pas indiqué et l’OFS va donc devoir récolter des données supplémentaires.

Mais au lieu de se contenter de ce strict nécessaire statistique, le projet de nouvelle ordonnance mis en consultation – il s’agirait d’une révision totale – envisage de développer un ample «système d’information» sur les bâtiments et les logements, étendu à tous les bâtiments sans usage d’habitation (quel rapport aves les résidences secondaires?) et destiné à devenir un «outil de base pour effectuer de la planification». Le texte propose une liste des différentes «informations» (rubriques) contenues dans le registre, en laissant à l’OFS le soin de définir ultérieurement leurs «caractères» respectifs (sous-rubriques), ouvrant la porte à une recension de données beaucoup plus étendue et complexe qu’aujourd’hui. Enfin, des données individuelles – et non seulement leur synthèse statistique – seront rendues publiques au motif que leur accès doit être simplifié et que «ce ne sont pas des données personnelles au sens de la loi sur la protection des données». Des objectifs allant au-delà de ceux prévus dans la loi On a déjà souvent dénoncé cette fâcheuse tendance de la Confédération – dont on a ici un nouvel exemple – qui consiste à inscrire dans des ordonnances d’application des objectifs allant au-delà de ceux prévus dans la loi. Cette seule raison suffit déjà à rendre inacceptable le projet de révision de Suite au verso


Service d'information

Au lieu de se contenter du strict nécessaire statistique, le projet de nouvelle ordonnance envisage de développer un ample «système d’information» sur les bâtiments et les logements, destiné à devenir un «outil de base pour effectuer de la planification».

l’ordonnance sur le registre des bâtiments et des logements, tel qu’il est présenté aujourd’hui. En l’occurrence, il faut aussi dénoncer l’inflation des données que la Confédération voudrait récolter; aux yeux de l’Etat, tous les renseignements apparaissent toujours «utiles», mais on ne doit pas oublier que cela occasionne des coûts tant pour l’administration que pour les administrés. De même, il n’est pas satisfaisant de voir un registre créé à des fins statistiques transformé en un outil de planification et en une source publique de données immobilières. Non seulement cela n’est pas nécessaire à l’application de la loi sur les résidences secondaires, mais la question se pose aussi de la base légale d’une telle transformation. Le registre des bâtiments et des logements a en effet été constitué grâce à des données récoltées en 2000, dans le cadre du recensement fédéral de la population; les bases légales citées à l’époque prévoyaient certes une utilisation autre que statistique par les autorités cantonales; en revanche, il était exclu que ces données puissent servir à prendre des décisions ou des mesures portant préjudice aux personnes concernées. Il paraît donc contraire à la bonne foi de rendre maintenant ces données publiques en prétendant qu’elles ne portent que sur

des objets, alors qu’il est facile de croiser les informations sur les bâtiments avec celles sur leurs occupants. Une leçon plus générale à tirer Au vu de ce qui précède, il y a lieu de refuser le projet de révision totale de l’ordonnance sur le registre des bâtiments et des logements, et de lui préférer une révision partielle qui se contenterait de mettre en place la base statistique nécessaire à l’application de la loi sur les résidences secondaires. D’une manière plus générale, on devrait tirer une leçon de ce genre de dérive, et y penser lors des prochains scrutins populaires où l’on nous proposera des réglementations d’apparence plaisante, mais dont la mise en œuvre risque de réserver de mauvaises surprises. Le diable se cache toujours dans les détails… Pierre-Gabriel Bieri


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