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Santé

Une odyssée de l’espace L’Atlas mondial de la santé croise avec pertinence des données permettant de visualiser et de comprendre le développement des maladies et des épidémies. La géographie de la santé veut aussi dénoncer et alerter.

Commençons par la conclusion. Elle confirme la validité la démarche et de cette nouvelle édition de l’Atlas mondial de la santé : « Les constats dressés dans le champ de la santé [...] ne sont pas éloignés de ceux élaborés par les spécialistes du changement du climat ou de la perte de la biodiversité. [...] Cette prise de conscience, simultanément scientifique et politique, est essentielle. Elle doit inciter les chercheurs à s’engager davantage dans les débats citoyens, à donner l’état des connaissances, à présenter des alternatives. La géographie peut y participer [...] en dressant l’état des lieux sanitaires, condition d’une transparence démocratique sur l’établissement des orientations, des priorités, consciente qu’il ne peut y avoir de science sans démocratie, et pas de démocratie sans science. » En 1976, Yves Lacoste provoquait, avec sa célèbre démonstration géopolitique selon laquelle « la géographie, ça sert, d’abord, à faire la guerre ». Depuis, la discipline n’a cessé de s’enrichir, au gré des croisements avec de nombreux champs de connaissance, historiques, sociologiques, démographiques. Et plus que jamais, avec les sciences « dures » : climatologie ou sciences environnementales. Simultanément, la « santé » est devenue * Gérard Salem et Florence Fournet, Atlas mondial de la santé, la santé face à ses défis, Autrement, 2020, 95 pages, 24 euros. 46

« Le géographe va chercher à comprendre les processus naturels et sociaux qui expliquent la santé en un lieu, dans la façon dont une société gère son espace, construit son contrôle, révélant ainsi également des microfractures à des échelles nationales ou régionales » un concept « global ». Définie en 1946 par l’Organisation mondiale de la santé comme un « état de complet bien-être physique, mental et social » et considérée comme un droit universel, la santé ne peut plus être appréhendée par les seuls facteurs biologiques ou génétiques propres à chaque individu – qui sont par ailleurs censés relever du secret médical – mais bien par l’examen de l’ensemble des

conditions, locales comme internationales, qui la déterminent : conditions de vie et revenus, qualité de l’eau, proximité d’un établissement de soin ou nombre de médecins dans un département, flux des échanges internationaux, migrations de populations humaines ou animales. Autant de phénomènes qui relèvent de données complexes mais qui, pour certaines, peuvent faire l’objet de représentations et de projections. Les auteurs de l’Atlas de la santé réaffirment ainsi que l’infographie, et plus encore la cartographie ne sont pas que des outils au service des décideurs politiques, mais qu’elles offrent des clés de compréhension de certains phénomènes, en particulier des « facteurs et processus générateurs de disparités spatiales de santé ». Ainsi, la géographie de la santé se donne également pour ambition d’infléchir les politiques en alertant sur les risques, en dénonçant les inégalités, en impulsant d’autres dynamiques territoriales et sociales.

Donner à voir les logiques à l’œuvre pour infléchir d’autres choix Gérard Salem est à la fois géographe, épidémiologiste et urbaniste ; Florence Fournet, entomologiste médicale de formation, a progressivement intégré les approches spatiales à ses travaux, pour faire le lien entre environnement et santé, OPTIONS N° 662 / décembre 2020


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