Salaires-Emplois : Un couple dynamique

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Châtiment De Lyon à Cordoue Un duo de flics à fleur de peau enquête dans les milieux interlopes de la capitale des Gaules, tandis que le rustique El Gordo doit se colleter au terrorisme 2.0.

au Nigeria, aux États-Unis, en Australie et en Espagne, six de ses pontes, grands patrons ou magnats, sont enlevés. Une revendication tombe, celle de l’Internationale des victimes du capitalisme, qui érige sur le Net un tribunal populaire pour crime économique et écologique envers l’humanité. Le jury : la population mondiale, qui doit juste « liker » pour condamner… Sept milliards de jurés ? évite l’écueil du grand spectacle superfétatoire. Non, Frédéric Bertin-Denis ne nous fera pas courir d’un point à l’autre du globe, à la poursuite d’un suspense factice : nos héros réussiront-ils à sauver l’économie mondiale ? Mieux, c’est comme s’il profitait du postulat jubilatoire de son intrigue pour donner naissance à un nouveau sous-genre : le thriller intimiste. Malin, l’auteur condense l’action à Cordoue, lieu du rapt espagnol. L’enquête est confiée à Manolo El Gordete, alias El Gordo (« le gros »), flic adepte de justice sociale autant que de bonne chère et de whiskies rares. Un policier à l’ancienne, pour qui un smartphone, comme toute autre technologie, est l’œuvre du diable (le comble pour quelqu’un chargé de dépister des terroristes 2.0 !) et dont la sensibilité anar le rapproche de ceux qu’il poursuit… Sorti juste avant le premier confinement, voici un roman passé sous les radars. Il n’est pas trop tard pour lui rendre justice. Sa narration nerveuse, alternant procédure policière et faits et gestes des activistes pourchassés (des altermondialistes à l’utopie plus essoufflée que dangereuse) convainc et emporte. À des péripéties prenantes répondent des considérations bienvenues quant aux ravages d’un capitalisme outrancier, ou sur l’Espagne, que le romancier affectionne ostensiblement, polluée par des relents franquistes. Piment résolument humaniste de cette lecture, El Gordo est apparu une première fois dans un lointain roman de 2012. On espère une réédition…

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Tout commence par un radeau à la dérive sur la Saône. À son bord, un corps crucifié et mutilé, qui arbore sur la peau un dessin d’orchidée. En ce dimanche des Rameaux 1998, un homme de 33 ans vient de mourir ainsi… Ouverture percutante, qui n’étonne nullement de la part de François Médéline. Son précédent titre, Tuer Jupiter (2018), ne le voyait-il pas conter l’assassinat d’Emmanuel Macron ? Encore plus gonflé peut-être, dans L’Ange rouge, ses pas se calquent sur ceux de James Ellroy (auteur du mythique Dahlia noir), son icône littéraire. D’aucuns ont invoqué le plagiat, mais c’est bien d’un hommage qu’il s’agit, auquel Médéline insuffle sa personnalité, tout en faisant siens les préceptes emblématiques de son maître : personnages d’exception, cadre urbain souverain, écriture saccadée et répétitive au service de l’ampleur du propos. Hors normes, le duo de la brigade criminelle de Lyon chargé de l’enquête s’affiche assurément ainsi. Le commandant Alain Dubak, déglingué de la vie et de son boulot, a hérité de son passage aux stups – où il consommait les produits qu’il saisissait – une addiction doublée de troubles hallucinatoires. Son adjointe et indéfectible soutien (professionnel et humain) est la capitaine Pirol, dite Mamy. Signes particuliers : ex-boxeuse en surpoids, accro aux sucreries qu’elle ingurgite jour et nuit, perverse dans le maniement du tonfa. Deux êtres intensément fragiles, pour qui la traque du tueur christique aux orchidées, qui va récidiver, s’apparente à celle de leurs fantômes… La ville-théâtre, c’est Lyon. Une métropole que le récit nous dévoile dans une dimension peu gratifiante, comme en témoigne la fabuleuse scène dans les souterrains de la Croix-Rousse. La capitale des Gaules se révèle aussi sociologiquement, leur périple amenant le couple de flics à investiguer dans le milieu des étudiants en Beaux-Arts ou dans celui, glauque, des intégristes et extrémistes de la cité. Porté par un style direct – point de vue de Dubak relaté à la première personne, phrases effilées, au passé composé –, L’Ange rouge installe sa fureur poisseuse en se jouant des clichés du tueur en série. En coda de ce ballet funèbre, de somptueuses dernières pages, tragiques et bouleversantes… Bonne nouvelle : il s’agit là d’un premier opus ; on retrouvera Dubak et Mamy… Cap sur le 9 juin 2022. Sale journée pour la finance internationale. En France, au Japon,

Serge breton

BIBLIOGRAPHIE • François Médéline, L’Ange rouge, La Manufacture de livres, 2020, 510 pages, 20,90 euros. • Frédéric Bertin-Denis, Sept milliards de jurés ?, Lajouanie, 2020, 415 pages, 19 euros. OPTIONS N° 664 / février 2021


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