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N U M EROS ZERO Hors-SĂŠrie

Le Monde change, les ouvriers tiennent Presstalis, un constant renouvellement La guerre des messageries Se diversifier pour survivre Les mags vont bien merci !

Tous sans papiers ?


Sommaire • 3 Une messagerie de presse en constante muta!on • 4 Les chiffres de la distribu!on de la presse • 5 La guerre stérile des messageries de presse • 6 Le Monde change, les ouvriers !ennent • 8 Se diversifier pour survivre • 10 Relay dans la crise ? • 11 La Masterclass de S.Bribard • 12 Ils s’improvisent marchands de journaux

L’édito

par Laura Bruneau et Christophe­Cécil Garnier

PRESSÉS D’EN FINIR ? « En France, la distribu!on de la presse ne se fait pas comme ailleurs ». C’est ce qu’explique Stéphane Bribard, directeur de la communica!on externe de Presstalis. Ce n’est pas sans poser quelques problèmes. Les 500 personnes dont Presstalis s'est séparé en 2013, dans le cadre d'un vaste plan de restructura!on peuvent en té­ moigner. En 2014, ils seront 450 de plus. La société de messagerie de presse doit relever de nombreux défis dans un contexte de crise du pa­ pier qui frappe tous les acteurs. Des kiosquiers, obligés de diversifier leur ac!vité, aux ouvriers de l’imprimerie, qui ont peur de voir disparaître leur ou!l de travail. Et pourtant, ce#e distribu!on spécifique à notre pays permet une diversité formidable comme notre invité le précisait : « si demain vous voulez créer un magazine, vous avez le droit d'être distri­ bué ». Et bien allons­y.

• 13 Distribu!on, mode d’emploi • 14 Les mags vont bien merci ! Directrice de rédac!on : Sarah Benayoun Rédacteurs en chef : Inès Belgacem Mathilde Blin Secrétaires de rédac!on : Christophe­Cécil Garnier Marion Pellé

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Journalistes : Elise Saint­Jullian Maxime François Yacine Taleb Romain Lambic Laura Bruneau Pauline Thuillot Anton Kunin


une messagerie de presse en constante mutation Presstalis est le premier distributeur de la presse en France. Il achemine dans les points de ventes 75 % de la presse na!onale. Média!sé suite à des grèves successives, il mul!plie les efforts pour faire face à la crise de la presse et à l’érosion des ventes depuis une dizaine d’années. Presstalis est créée en 1947, sous le nom de Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne (NMPP). Son objec!f est important : par!ciper à la diffusion de la presse écrite, confor­ mément à la loi Bichet, en diffusant équitablement et na!o­ nalement les !tres. Aujourd’hui, l’entreprise domine son marché. « Presstalis totalise 27 000 points de vente de presse na!onale en France, et 15 000 points de vente en presse quo!dienne régionale » détaille Stéphane Bribard, directeur de la communica!on externe chez Presstalis. Mais pour faire face à la crise, Presstalis a dû se moderniser depuis les années 80 en reme$ant en cause son fonc!on­ nement. Autre évolu!on depuis les années 2000 : la naissance des journaux gratuits et leur influence ont obligé Presstalis à réagir. Depuis les années 90, l’entreprise se voit également concurrencée par les Messageries Lyonnaises de Presse (MLP). En 1999, deux hebdomadaires sont passés du côté des MLP. En 2006 et 2007 les réformes s’accélèrent. Il faut alléger les structures, modifier les règles de fonc!onne­ ment. Mais soixante ans après sa créa!on, le déficit net de Presstalis s’élève à 29 millions d’euros. Les efforts se poursui­ vent avec la volonté de gérer le trop plein d’invendus dans les points de vente, mais aussi de mieux réguler la quan!té et la présence des !tres dans les magasins. Modifica!on de la loi Bichet et aide financière de l’État En 2011, le gouvernement répond aux problèmes de régu­ la!on du système Presstalis en aménageant la loi Bichet. Le texte modifie la gouvernance du système de distribu!on, la composi!on du Conseil Supérieur des Messageries de Presse (CSMP) et met en place l’Autorité de Régula!on de la Distribu!on de la Presse. Ce$e nouvelle organisa!on rend le système plus fonc!onnel et plus réac!f, et permet surtout de mieux faire exécuter les décisions du CSMP. En juillet 2012, des décisions sont prises pour trouver des sources de financement. « Cela s’est concré!sé par un accord tripar!te entre les éditeurs, les pouvoirs publics et Presstalis », souligne Stéphane Bribard. L’État français distribue des aides à la presse qui s’élèvent à 250 millions d’euros pour Presstalis, afin de se restructurer davantage.

Des plans de départs et des fusions Pourtant, cela n’empêche pas en 2013 le départ sur la base du volontariat de 500 personnes sur les 1400 employés. Sui­ vront 500 autres employés en 2014. Une nécessité pour la messagerie, alors que le salaire de ses ouvriers est très élevé, entre 4200 à 5000 euros par mois. « Pour le traitement des magazines, on a dû supprimer plusieurs endroits qui leur étaient dédiés. Il n’y en a plus que 7 sur 40. Le traitement lo­ gis!que est préféré au traitement humain », confie le direc­ teur de la communica!on. « Les camions de Presstalis et de MLP ont dû aussi être mis en commun pour un décroisement des flux. Aujourd’hui, les deux entreprises se livrent mutuellement des exemplaires de leurs !tres », ajoute t­il. Les réformes au sein de l’entreprise passent donc principalement par une réduc!on du personnel. Une constante modernisa!on Pour Stéphane Bribard, c’est aussi aux éditeurs de se remet­ tre en cause, afin de diminuer les coûts de distribu!on de la presse qui font par!e des plus élevés en Europe : « Les ma­ gazines de mots croisés ou les trimestriels de décora!on, par exemple, n’ont pas besoin d’une distribu!on aussi rapide que les quo!diens », es!me t­il. Autre axe de développement : la diversifica!on des produits en vente dans les magasins de presse (bonbons, briquets, stylos, tabac) et la modernisa!on du réseau. « Des e­kiosques ont également été proposés. C’est une applica!on géo­localisée qui se développe et qui perme#ra aux lecteurs de savoir où est le !tre ou le journal qu’ils cherchent et à quelle distance », révèle le directeur de la communica!on. Presstalis s’adapte pour répondre au mieux à ce contexte de crise. Mais il faudra a$endre pour retrouver un équilibre éco­ nomique durable. @EliseStj

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“ PRESSTALIS DISTRIBUE UNIQUEMENT la presse nationale ”

80%

La presse regionale a ses propres reseaux

la Loi bichet du 2 avril1947 assure :

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La guerre stérile des Messageries de presse

Intermédiaires entre ceux qui fabriquent un journal et ceux qui le distribuent, les messageries de presse à la française perme!ent une distribu"on équitable de la presse, indépendamment de la puissance des "tres. Une mission compliquée par une concurrence pas toujours bénéfique. Ce n’est pas un secret : la presse papier a connu des jours meilleurs. Amorcée par l’appari!on des quo!­ diens gratuits, la démoné!sa!on de l’informa!on s’est accélérée à mesure qu’une offre web foison­ nante a émergé. Alors que l’industrie est en train de se réinventer, le print est fragilisé à l’ère du numé­ rique. L’an passé, la majorité des quo!diens a encore vu sa diffusion chuter. Si ce$e situa!on menace l’exis­ tence des !tres, à l’image de Libéra!on, elle boule­ verse également l’équilibre de l’ensemble du secteur. En effet, depuis la loi Bichet de 1947, la diffusion de la presse est assurée par des messageries regroupées en coopéra!ves. Problème : ces dernières, dépen­ dantes des éditeurs, sont financées par une commis­ sion sur les ventes au numéro. Ce qui revient à toucher un pourcentage fixe du prix de chaque !tre de presse vendu. Du coup, le repli du marché pénalise toute la distribu!on. Le rôle crucial des messageries Opératrices de messagerie de l’ensemble des quo!­ diens, les Nouvelles Messageries de la Presse Pari­ sienne ont été rebap!sées Presstalis en 2011. L’entreprise assure la distribu!on de 75 % de la presse hexagonale, faisant le lien entre les éditeurs et les dé­ positaires chargés de répar!r les journaux sur le territoire. Ce système de messagerie, pensé par le législateur pour garan!r un accès équitable à la presse, se heurte à des coûts de fonc!onnement éle­ vés. C’est par!culièrement vrai pour les quo!diens na!onaux dont la distribu!on mobilise chaque jour des moyens logis!ques importants. Le contexte, déjà

difficile, est compliqué par une concurrence imposée par la loi. Il existe en effet une seconde messagerie historique, dénommée Messageries Lyonnaises de Presse (MLP). Celle­ci marche sur les plates­bandes de Presstalis, sans avoir à gérer les contraintes inhé­ rentes à la diffusion des quo!diens qu’elle n’assume pas. Un déséquilibre paradoxal alors que le modèle français est basé sur la solidarité. Un rapprochement inévitable ? Par souci de pluralisme, la diffusion est mutualisée : chaque éditeur de presse par!cipe au financement des messageries à hauteur de ses moyens. Ce méca­ nisme de péréqua!on signifie concrètement que les gros sou!ennent les pe!ts. Mais aussi que les maga­ zines recourant aux services de Prestalis par!cipent au financement de la distribu!on de quo!diens plus touchés que ces derniers par la crise. C’est dans ce$e brèche que les MLP se sont engouffrées pour convain­ cre des clients comme Le Point de les rejoindre. Le Conseil Supérieur des Messageries de Presse, chargé de réguler le secteur, a dû intervenir fin 2012 pour im­ poser, notamment, un partage des coûts entre les messageries. Alors que Presstalis enchaîne les plans sociaux et mobilise des aides publiques, peut­on en­ core se payer le luxe d’une guerre fratricide ? Il sem­ ble que la ques!on mérite au moins d’être posée.

@yacinetaleb3

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Le monde change, les ouvriers tiennent

L’ère du numérique entraîne avec elle la chute d’un secteur phare du monde de la presse : l’imprimerie. La baisse vertigineuse des ventes papiers l’a inévitablement fragilisée et les syndicats ne pèsent plus autant qu’aux belles heures de la presse. Rencontre avec les ouvriers de l’imprimerie du Monde, pour prendre le pouls de ces ouvriers pas comme les autres.

Direction Ivry­sur­Seine. L’accueil est chaleureux. Mais les ouvriers semblent étonnés : « C’est bien que vous vous intéressiez aux impri­ meries, on ne voit pas souvent de journalistes par ici, beaucoup n’en ont même jamais vu », lance l’un d’eux. Il est 10h20, la salle de contrôle est déjà enfumée, de la poussière mêlée à de l’encre noire jonche le sol et les recoins. Il y a quelque chose de magique entre les murs sombres, c’est sans doute parce qu’ici Le Monde renaît chaque matin. Bientôt le journal sera en­ voyé au siège. L’époque où les rotatives étaient installées sous les bureaux de la rédaction est révolue. Dans un vacarme retentissant, l’unique rotative est lancée. Une immense bobine de pa­ pier blanc vient s’étirer de part et d’autre de la machine. Chacun est à son poste, concentré et méticuleux. Les ouvriers du livre contrôlent l’encrage, le res­ pect des couleurs, le calibrage de la typographie. Des centaines de journaux sont jetées à la pou­ belle avant que le résultat soit satisfaisant. Un travail qui demande « précision et rigueur », sou­ lignent les plus anciens.

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« L’ambiance n’est plus du tout la même » Les techniques ont changé. « Les rotatives, le marbre, c’est là vie, c’est là où le journal naît », s’exclamait Jacques Fauvet, ancien directeur du Monde dans un documentaire de Patrice Bon­ nafé daté de 1981. Aujourd’hui, « ça a bien changé, il n’y a plus personne », assure un ou­ vrier. Il travaille à Ivry depuis une quinzaine d’an­ nées. « L’ambiance n’est plus du tout la même », souffle­t­il, nostalgique. Un peu plus tard dans la journée, un autre ouvrier, plus jeune s’inter­ roge : « On se demande bien ce que l’on va de­ venir. Que va­t­on faire de nos métiers ? » Un questionnement révélateur des problèmes qui touchent la presse. Le lent abandon de l’héritage du monde ouvrier En 2011, l’imprimerie a vu ses effectifs passer de 230 employés à 90, et des départs sont encore prévus en 2014. Deux rotatives sur trois ont été fermées. Cette réduction massive des effectifs est le résultat d’un projet industriel porté par les


actionnaires du Monde, MM. Bergé, Pigasse et Niel. Leur volonté était d’imprimer le quotidien en province afin de rendre le journal disponible plus tôt dans les kiosques et de réduire les coûts de distribution. Selon le délégué syndical CGT d’Ivry­sur­Seine, Didier Lourdez, cette nouvelle organisation n’a pas augmenté les ventes. Par ailleurs, la direction du Monde ne souhaite conserver qu’une seule rotative. « Nous avons réglé le problème de la sous­traitance. Au­ jourd’hui le patronat a trois options : la ferme­ ture de l’imprimerie, refaire une imprimerie dédiée au Monde, ou bien un passage au travail de nuit », détaille­t­il.

« Ne pas oublier l’indépendance » Malgré la brutalité des évolutions et leurs in­ quiétudes, les ouvriers du livre n’ont pas le temps de douter : tout en dénonçant une vo­ lonté « politique du patronat » de favoriser la migration vers Internet, le leader syndical pense que ce support a de beaux jours devant lui : « il sert de complément à Internet. Bien sûr on ne peut pas aller contre la technologie mais il ne faut pas oublier qu’il y a une question d’indépen­ dance, c’est très important pour un journal comme Le Monde de posséder son imprimerie ». Malgré ce relatif optimisme, l’avenir de l’impri­ merie demeure incertain. @MaximeFranc

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Se Diversifier pour Survivre Maillon indispensable du secteur de la presse, les marchands de journaux vivent aujourd'hui une crise sans précédent qui fragilise leur commerce. Les ventes baissent et avec elles, le chiffre d'affaires, une situation qu'essayent de contrer ces diffuseurs en proposant de nouveaux produits à leurs clients.

En 2012, 1100 points de vente de la presse ont fermé. Touché de plein fouet par la crise, le secteur du papier s’enfonce sous la pres­ sion des coûts de fabrication, de distribution et de la concurrence. Internet est son princi­ pal rival. Les habitudes des lecteurs évo­ luent, ils délaissent le papier au profit du numérique. Alors qu’il se développe, les ti­ tres, eux, voient leurs ventes reculer de jour en jour dans les kiosques et les Maisons de la Presse. Selon l’OJD, l’Office de Justification de la Diffusion, sur les dix premiers mois de l’année 2013, la diffusion de sept grands quotidiens a chuté : allant de ­16,6 % pour Libération à ­10 % pour L’Équipe et Au­ jourd’hui en France. Une situation rude à vivre pour les éditeurs mais aussi pour les petites mains qui, chaque jour, s’occupent de vendre ces journaux. Pour ne pas mettre la clé sous la porte, les commerçants ont trouvé

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une parade : diversifier les produits qu’ils mettent en vente à l’intérieur de leur com­ merce. La diversification : une planche de salut Un tournant qu’a décidé de prendre Jean­ Marc, 44 ans, gérant d’une Maison de la Presse : « Le magasin a ouvert il y a cinq ans uniquement avec des quotidiens et des maga­ zines. Avec la conjoncture économique ac­ tuelle, mon équipe et moi on a très vite compris qu’il fallait proposer d’autres choses aux clients. » Dès lors, pour augmenter ses revenus et pallier les baisses des ventes, Jean­Marc a décroché un agrément auprès de la Française des Jeux. Ce dernier lui permet d’ajouter à son activité principale un pôle billetterie. Mais le gérant de cette boutique ne s’est pas arrêté là puisque des articles de


papeterie, de librairie et des confiseries se nichent entre les nombreux titres. « Si on pouvait pousser les murs, on installerait une photocopieuse et on proposerait du tabac à la vente », souligne Jean­Marc, « si jamais un de nos voisins vend son activité on agrandit tout de suite, ce ne serait que du bonheur. » Aujourd’hui ce qu’on appelle le « hors presse » représente 80 % de l’activité de ce gérant. Les vendre est une donc nécessité pour les commerçants, ce qui explique la décision du Conseil Supérieur des Messageries de la Presse (CSMP) de statuer à ce sujet et d’adapter son offre en proposant : des ency­ clopédies, du multimédia, des assimilés li­ brairie (comme les affiches, les cartes postales) mais aussi de la para­papeterie. Au total le CSMP propose plus de 9600 réfé­ rences de ces produits. Un chiffre élevé mais qui, en réalité, est largement plus important puisque d’autres marchandises trouvent leur place dans les points de vente. Les coques pour Smartphone, les jouets pour enfants, les jeux à gratter, et les gadgets comme les porte­clés ont leur propre étalage. Des pro­ duits et des services divers et variés qui sont eux­mêmes pris en charge et distribués par les messageries de la presse. Selon le CSMP, Presstalis distribuait en 2012 en moyenne 35 % des références « hors presse » et les Mes­ sagerie Lyonnaise de la Presse 65 %. De nouveaux objets à mettre en rayon, mais pour lesquels les marchands de journaux ne prennent aucun risque avec d’éventuels in­ vendus, puisque les messageries les gèrent elles­mêmes. Des centrales d’achat ont été développées par ces dernières et elles s’ap­ provisionnent auprès de différentes sociétés, comme Dif ’Presse. Cette entreprise est une messagerie de diversification dédiée à ce ré­ seau qui propose de nouvelles familles de produits « hors presse » et qui approvisionne plus de 28 000 points de vente.

presse ne chasse pas le produit presse. Il oc­ cupe en réalité l’espace libéré par les mau­ vaises ventes des quotidiens et magazines. » Il tient notamment à préciser que l’engoue­ ment autour de la diversification existait bien avant la crise, et ce dès 1993 avec l’ar­ rivée dans les points de vente de la Française des Jeux. Aujourd’hui le phénomène est dé­ cuplé par l’importance de la crise, mais en aucun cas ces produits n’ont pris le dessus. Au contraire il s’agit d’une piste de crois­ sance qui pourrait permettre de maintenir en vie plusieurs points de vente alors que la tendance actuelle est à leurs fermetures. Des réflexions sur lesquelles se penche toujours l’UNDP, via une cellule de réflexion mise en place pour parvenir à trouver une solution quant aux difficultés que rencontrent les marchands de journaux.

@MathildeBlin @PaulineThuillot

Les produits divers ne chassent pas la presse Un élément important sur lequel insiste l’Union Nationale des Diffuseurs de Presse. Pour Christian Andrieux, président de l’UNDP de la région Midi­Côte d’Azur, le « hors presse » complète l’offre initiale : « Le hors

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Un Relay dans la crise : « Internet, ça tue tout »

Installés dans des lieux de transports, les Relay occupent une place à part en ma"ère de distribu"on de la presse. Mastodonte historique du secteur, l’enseigne n’est pas épargnée par la crise. Elle tente de se réinventer pour y faire face. Sébastien Billot, 31 ans, attend patiemment les clients derrière sa caisse. Son Relay est situé en face de l'entrée de la gare de Saint­Ouen­l'Aumône, dans le Val­d'Oise. La société de distribution possède plus de 1 000 points de vente dans les gares et aé­ roports français. Dans son kiosque, la presse papier est représentée par un seul petit présentoir. Des ar­ ticles qui intéressent le plus souvent des clients réguliers qu'il connaît bien. « Les fumeurs rappor­ tent gros » Sa clientèle est princi­ palement constituée d'habitants du centre­ ville et de voyageurs. Ce sont les retraités qui lui achètent le plus de journaux et maga­ zines. « Aujourd'hui, les jeunes préfèrent regarder les informations sur leur smartphone. Internet, ça tue tout. » La presse vit une grave crise. Toutefois, son impact est limité sur le commerce de Sébastien. Alors que plus de la moitié des Relay sont déficitaires, ce n'est le cas du sien. Et pour cause : « Le tabac représente 82 % de mes ventes. La presse ne me rapporte plus que 8 % du chiffre d'affaires, c’est moitié moins qu'il y a six ans. Les fumeurs rapportent gros. » C'est un fait, pour compenser les pertes liées à la crise de la presse, Relay tente de vendre des produits annexes comme le tabac. En une heure, Sé­ bastien a vendu 35 paquets de cigarettes et 28 ma­ gazines en tout genre pour seulement 11 titres de presse quotidienne régionale et nationale. Une si­ tuation qui l'amuse. « Une fois, j'allais baisser le ri­ deau et un client est arrivé à temps pour acheter du tabac. Vous me sauvez la vie m’a t­il dit. Pas vrai­ ment, lui ai­je répondu ! »

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Les grèves chez Presstalis : « C'est chiant mais je fais avec. » Les relations entre Presstalis et les points de vente Relay, Sébastien ne les connaît pas précisément. Il sait toutefois que quelques accords entre les deux sociétés existent, limitant notamment le nombre de titres présents en rayon. « Avant, Presstalis envoyait un nombre illimité de titres. Parfois, les rayons débordaient et les invendus étaient nombreux. Pour désengorger les étalages il y a main­ tenant des remises à zéro. » Ainsi, si les ventes d'un maga­ zine sont jugées trop modestes, le produit n'est plus envoyé. Si l'impact de la crise est relatif pour Sébastien Billot, le son de cloche n'est pas le même au niveau natio­ nal. Pour anticiper ses pertes liées à l'émergence de l'information en ligne, Relay s'est mis au numérique en lançant son propre kiosque pour tablettes. La so­ ciété s'est aussi associée au site Internet rueducom­ merce.fr, pour répondre « aux nouvelles attentes des voyageurs », explique Eric Eygasier, directeur des opérations de Relay France. Six bornes viennent d'être installées en gares et pendant six mois, les clients pourront tester l'achat rapide d’autres pro­ duits. Une façon d'anticiper la disparition totale de la presse sous format papier. @romainlambic95


“ IL Y A UNE VRAIE REDÉFINITION DES MÉDIAS, DE LEUR TEMPORALITÉ ET DE LEUR NECESSITÉ . A quoi sert un quotidien ? A quoi sert un magazine? ”

“La situation s’est bien amelioree parce que ce qu’on est en train de faire est

drastique.”

MORCEAUX CHOISIS Directeur de la communication externe chez Presstalis, Stéphane Bribard a donné une masterclass a l’Ecole de Journalisme de Gennevilliers.

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Ils s’improvisent marchands de journaux Pour pallier la raréfac#on des marchands de journaux, de plus en plus de commerçants prennent le relais en proposant quelques #tres de presse à leur clientèle. C’est par exem­ ple le cas à Nantes, où ce$e stratégie connaît des fortunes diverses. La proximité, c’est la voca!on des commerces de quar!er. Ces derniers contribuent à maintenir du lien social au niveau local. Et ils perme"ent à la presse de con!nuer à être largement distribuée malgré la dimi­ nu!on du nombre de kiosquiers.

fléchés et même des magazines pornographiques. Mais en termes de ventes, les plus gros !tres restent Presse Océan et Ouest France, les deux grands quo!­ diens de la région. Dans ce quar!er central, malgré la présence inévitable des quo!diens gratuits Direct Ma!n et 20 minutes, les fidèles lecteurs de la presse 9, rue du Maréchal­Joffre ­ Sur l'enseigne locale ont pris l'habitude d'acheter leur journal ici. Im­ de l’établissement IPO possible pourtant de DOM figurent les mots connaître la part que « Brasserie ­ Café ­ représente la presse Sandwiches ­ Plats à sur le volume des emporter ». Mais une ventes totales de fois à l'intérieur, on re­ l'établissement. Le marque que le choix propriétaire assure en des produits proposés tous cas ne pas être n'est pas tout à fait au courant. Et il re­ celui annoncé. Feng gre"e de ne pas pou­ Chao, le propriétaire voir choisir librement des lieux, vend ici des les !tres qu’il pro­ salades toutes prêtes pose. « C'est Pressta­ dans des boîtes en lis qui a décidé de plas!que jetables, des tout, je n'ai pas de sandwiches longue contrôle là­dessus. » conserva!on, des vins, des boissons en cane"es... et des journaux. Le choix Boulevard Jules­Verne ­ Dernière escale, le Carrefour est restreint : seuls Aujourd'hui en France, L'Équipe et City. Dans ce quar!er résiden!el aux portes de la ville, des mots fléchés sont proposés. Dans ce pe!t com­ les bureaux de tabac se font rares. C'est pourquoi merce­café, la presse est la pe!te dernière : l'établis­ Mar!n Gasthlter, tenancier de ce commerce sous sement est devenu diffuseur il y a cinq mois, après franchise, a décidé d'installer, en face des caisses et que des personnes âgées, clients fidèles de monsieur près du rayon confiserie, un stand de quo!diens na­ Feng, lui ont fait savoir qu'ils lui achèteraient volon­ !onaux : Les Échos, Le Figaro et Le Monde côtoient ici !ers des journaux s'il en vendait. Toutefois, le bilan Charlie Hebdo et Courrier Interna!onal. Toutefois, les est décevant : les jeunes n'ont pas l'habitude d'ache­ ventes sont plus que médiocres à en croire le maître ter leur journal en rentrant chez eux et les seniors ne des lieux : « Ça ne représente rien du tout. » forment pas sa principale clientèle. En contribuant à ce que le plus grand nombre ait accès à la presse, ces alterna!ves aux points de vente 39, quai de la Fosse ­ Ici la situa!on est assez diffé­ classiques remplissent une mission d’intérêt général. rente. Dans ce"e brasserie à deux pas du Musée de Un effort pas toujours récompensé, puisque les re­ l'Imprimerie et de la bibliothèque, on trouve des quo­ ce"es ne suivent pas forcément. !diens na!onaux et régionaux, de grands hebdoma­ daires tels que Le Figaro Magazine et Le Point, des revues sur les voitures et les ordinateurs, des mots @antonkunin

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La distribution de la presse Niveau 1 :

Niveau 2 :

Niveau 3 :

Les Messageries de presse

Les dEPOSITAIRES de presse

Les points de vente

Les messageries confient l’ensemble des titres aà des depositaires de presse

CES

“ Grossistes” ONTVU LEUR NOMBRE DIMINUER. ILS SONT PASSÉS DE 1500 À 130

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Les mags vont bien merci ! Alors que les rumeurs de licenciement se font de plus en plus présentes dans les rédactions à mesure que la presse quotidienne et hebdomadaire souffre, certains magazines ont su trouver une parade en misant sur des modèles économiques nouveaux.

Le papier est en berne. La pente pour faire remonter ses ventes est rude et les grands journaux hexagonaux piétinent en bas de la montagne. Libération est l’exemple le plus mar­ quant de ces dernières semaines. Ses ventes ont littéralement dégringolé. En février, le jour­ nal a accusé une chute de 23,5 % des ventes en kiosque. Cette situation n’est pas isolée. Le Parisien traverse notamment une passe difficile, qui se traduit par un plan de licenciement prévu dans les prochains jours. Autant de témoignages de la crise que traverse actuellement la presse écrite. Une crise qui a certes ébranlé les grands titres, mais qui a moins durement touché la presse magazine. Mensuels et trimestriels ont toujours été les chouchous des Français. Une particularité nationale sur laquelle les groupes de presse savent pouvoir compter. Ils n’hésitent plus à investir, peu importe la conjoncture défavorable.

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Sortir du lot, être original Condé Nast lançait en juin 2013 la déclinaison française du célèbre Vanity Fair. Prisma démar­ rait un peu plus tôt, en 2012, son magazine pour les 25­35 ans : Néon. Ce dernier a reçu le prix de l’innovation du meilleur lancement de magazine pour l’année 2013. Celui qui aime à s’appeler « le magazine des nouveaux adultes » a comme credo « soyons sérieux, restons allu­ més ! ». Une ligne éditoriale innovante, qui se veut créative et moderne avec pour cible une nouvelle tranche de lecteurs. Une originalité qui paye selon H. Rechi, rédacteur chef adjoint du magazine Snatch : « notre marque de fa­ brique c’est le reportage et notre ton décalé et piquant. On joue évidemment là dessus. » Snatch existe depuis maintenant quatre ans. La petite rédaction n’a jamais été rattachée à aucun grand groupe, ce qui lui a valu des débuts difficiles. Le trio à la tête du magazine ne se rémunère que depuis deux ans. « On ras­ semblait ce qu’on gagnait pour payer les piges et les journalistes. Et encore, on paye plutôt


mal par rapport aux féminins. » Les magazines de ces dames bénéficient de fait d’un gros sou­ tien publicitaire. Les annonceurs sont légion à vouloir placer quelques produits entre les mains des Françaises. Les magazines lambda, moins soutenus, ont quant à eux trouvé de nou­ veaux modes de financement. Parier sur la diversification Chez Snatch, les rédacteurs multiplient les cas­ quettes. « On a le magazine, mais derrière on en réalise un second pour un centre commercial et on s’occupe d’une revue pour une marque de vêtements. On fait aussi un dépliant pour un site de crowdfunding », explique Loïc H. Rechi pour qui ce système permet à Snatch de se dé­ velopper. Le trimestriel passe en version men­ suelle en cette fin­février. Un évolution coûteuse mais permise par le travail de diversi­ fication de la rédaction. « Finalement, ça n’est pas le magazine qui nous rapporte de l’argent, mais plutôt nos différents projets. On fait tout ça pour financer Snatch. » Un système qui lui convient et qu’il trouve parfaitement adapté compte tenu des problèmes que traverse la presse papier ces dernières années. « Il faut dé­ velopper de nouveaux modèles économiques. Le milieu évolue et il faut s’adapter. » Même son de cloche du côté de Usbek & Rica, le trimestriel qui « explore le futur ». La ligne éditoriale est de la même façon travaillée avec minutie et le projet est de passer en mensuel. Et pour trouver les financements nécessaires, toutes les commandes sont les bienvenues. De­ puis peu, la rédaction s’est liée à la Gaîté Ly­ rique, le temple du numérique et de l’innovation à Paris, pour créer des réunions communes sur des problématiques dévelop­ pées dans le magazine. « On loue également nos compétences à une municipalité. On réalise le journal de la ville », indique Blaise Mao, ré­ dacteur adjoint de Usbek & Rica. S’adapter pour surmonter la crise « Le milieu a mal vécu l’arrivée du net. Il y a de moins en moins d’argent et il est dépensé de moins en moins bien. En gros, aujourd’hui, il y a une prime aux petits papiers, aux brèves et au journalisme de grande consommation », insiste

Frank Annese, rédacteur en chef de So Foot, dans une interview donnée à RageMag. Dans le paysage des magazines hexagonaux, So Foot est un OVNI, aussi bien pour son ton intello et dé­ calé pour un journal sportif, que par son mo­ dèle économique. Le magazine fêtait ses dix ans en 2012. Applaudi par la profession, So Foot est pourtant parti de loin. « On l’a lancé avec 450 euros. C’est assez rigolo de te dire que tu pars avec zéro, ou pas loin, et que t’arrives quand même à faire un truc qui tient la route. » Et petit à petit la structure s’est développée : « Au départ, personne n’était payé. Puis, quand il y a eu un peu d’argent, on a payé une partie des gens, puis tout le monde. Au début, tout le monde était pigiste, puis après certains sont de­ venus salariés, puis après ça grossit. Là, on va encore embaucher. » Depuis, Franck Annese a crée le groupe So Press, qui comprend les magazines So Film, Doolittle et Pédale. Deux autres titres sont en préparation : So Foot Junior et So­ciété. Pour So Press, tout va bien. Comment fonctionnent­ils ? « Avec un système “ maison ” où toutes les pages sont payées au journaliste, même les pages de photo, qui sont aussi payées au photographe par ailleurs. Et le nombre de pages dépend de la qualité de l’arti­ cle. » La rémunération au nombre de signes est clairement révolue chez So Press. Une dé­ marche controversée, puisque subjective. En d’autres termes, on paye la qualité et non la quantité. D’autre part, Franck Annese em­ bauche en priorité des pigistes de l’équipe, des collègues de longue date. Un système fermé, mais qui fonctionne. Les rédactions de So Press sont également partisanes de la diversification et de la différence. Franck Annese se targue d’ailleurs de produire « autre chose ». Ajoutant : « Dans les groupes de presse ils disent : “ On va lancer un nouveau produit. ” Tu vois, ils ne disent pas : “ On va lancer un nouveau maga­ zine. ” On dit “ c’est un très bon produit de presse. ” Pour moi, c’est le début de la fin : je n’achète pas des “ produits de presse ” ! J’achète des magazines ou des journaux. »

@InesBgc

15 - Numéros Zero - Hors-Série


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Numeros Zero

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