Collection « Les savoirs partagés ® »
36 nuances de palmier à huile
Le Cirad est l'organisme français de recherche agronomique et de coopération internationale pour le développement durable des régions tropicales et méditerranéennes. Il produit et transmet, en partenariat avec ces pays, de nouvelles connaissances, pour accompagner le développement agricole et contribuer au débat sur les grands enjeux mondiaux de l’agriculture, de l’alimentation et des territoires ruraux. Le Cirad bénéficie d'un réseau mondial de dispositifs de recherche et d'enseignement en partenariat et de directions régionales, à partir duquel il mène des activités de coopération avec plus de 100 pays. Il emploie 1 650 agents, dont 800 ingénieurs chercheurs. Son budget s’élève en 2015 à 199 millions d’euros dont les deux tiers proviennent de l’Etat français. Cirad - Direction générale 42, rue Scheffer - 75116 Paris - France Tél. : 33 (0)1 53 70 20 00 Fax : 33 (0)1 47 55 15 30 Web : www.cirad.fr
Depuis 18 ans (1997-2015), l’équipe Savoirs (Service d’Appui à la Valorisation Opérationnelle de l’Information sur la Recherche Scientifique) du Cirad utilise des méthodes pédagogiques adaptées à une transmission efficace des connaissances scientifiques et techniques en direction de publics diversifiés par l’âge, la culture, la langue et le niveau socio-économique. L’enjeu est de faciliter pour les apprenants du Nord et du Sud l’acquisition d’une culture scientifique en reconfigurant des contenus parfois complexes sous des formes attrayantes au niveau de l’écriture, des illustrations, des supports et des liens pédagogiques. Cirad - Savoirs Direction régionale Languedoc-Roussillon TA 178/05 - Avenue Agropolis 34398 Montpellier Cedex 5 - France Tél. : 33 0(4) 67 61 57 88 Fax : 33 0(4) 67 61 59 73 E-mail : espace.idees@cirad.fr Web : http://savoirspartages.cirad.fr/
Collection « Les savoirs partagés ® »
36 nuances de palmier à huile ou un palmier dans tous ses états
Avec ou sans palmier ? Les producteurs Les financiers Les consommateurs Les observateurs Un fédérateur
I
Les contributeurs
Auteurs : Michel LAUNOIS, Françoise CHIRARA,
avec les contributions de : Tristan DURAND-GASSELIN, Alain RIVAL,
et l’appui de : Patrick CARON, Jacques PAGES, Christian PICASSO, François POUGET.
Création, réalisation graphique et mise en page : Françoise CHIRARA.
Sources photographiques : Michel CAZEMAJOR, Françoise CHIRARA, Edmond COLSON, Philippe DE GROOTE, Tristan DURAND-GASSELIN, Alain RIVAL, Harold WILLIAMS.
© CIRAD 2015
ISBN : 978-2-87614-697-6
ISSN : 1620-0705
Les opinions exprimées dans ce compilivre® sont celles des auteurs et ne reflètent pas toutes nécessairement l’opinion des divers contributeurs et de tous les acteurs de la filière du palmier à huile. Tous droits d’adaptation, de traduction et de reproduction par tous procédés, y compris la photocopie et le microfilm, réservés pour tous pays.
II
III © Tristan Durand-Gasselin et Françoise Chirara
IV Source : Michel Launois et Franรงoise Chirara
Préface Les filières agricoles tropicales sont un remarquable lieu d’innovation partagée, d’intégration des connaissances, de diffusion des progrès scientifiques. In fine, elles constituent des vecteurs essentiels pour la lutte contre la pauvreté en milieu rural lorsque les conditions de leur durabilité sont réunies. Au fil de près de 70 ans d’histoire commune et partagée par de nombreux partenaires au Sud, le CIRAD a capitalisé des savoirs multiples sur ces grandes filières, ainsi que sur les hommes et les femmes qui en vivent. L’approche filière reste au cœur du dialogue scientifique, technique et politique que le CIRAD conduit sur le terrain avec les acteurs économiques, mais aussi une clé d’entrée indispensable au développement de recherches les plus innovantes pour favoriser l’augmentation durable de leurs productions. En s’intéressant au palmier à huile dans l’ensemble du monde intertropical, le CIRAD et ses partenaires ont ainsi contribué à améliorer les pratiques agronomiques pour en renforcer la durabilité, à sélectionner un matériel végétal adapté, à comprendre et accompagner les décisions des petits planteurs comme celles des grandes compagnies de plantation, à mettre au point des systèmes de culture plus respectueux de l’environnement et de l’usage des ressources naturelles. Nos chercheurs ont ainsi investi des champs de recherche allant de la génétique moléculaire à l’analyse des flux commerciaux en passant par la compréhension de l’organisation des producteurs et des chaînes de répartition des richesses. Pour le CIRAD, la culture du palmier à huile est emblématique à plus d’un titre : elle est en première ligne dans nos efforts destinés à accompagner les filières agroalimentaires tropicales dans leurs efforts de durabilité ; elle est aussi le lieu d’une intensification écologique de la production dans les espaces agricoles déjà en culture, afin de limiter l’impact des filières sur des espaces naturels riches en biodiversité et menacés. Elle est capable de favoriser des initiatives multiacteurs originales, mobilisant producteurs, transformateurs mais aussi ONG, afin de progresser dans la certification de la durabilité de la filière. Elle est enfin capable de faire sortir de la pauvreté des petits agriculteurs. C’est au sein des grandes filières tropicales que se manifestent les bouleversements en cours dans les rapports Nord-Sud : la mondialisation non seulement des comportements alimentaires mais aussi des flux financiers, l’émergence au Sud de grands groupes agroalimentaires globaux, en parallèle à un ralentissement de la croissance et au rétrécissement des marchés au Nord. Ces changements globaux, profonds et rapides, se surajoutent aux bouleversements climatiques avérés et attendus, en générant autant de questions passionnantes à la recherche. Le CIRAD, ses chercheurs, ses partenaires, ses étudiants se trouvent dans une position privilégiée: acteurs du système de recherche public français et agissant avec un partenariat diversifié au Sud -académique, public, privé-, ils sont les témoins et les accompagnateurs des mutations qui traversent le monde agricole et les sociétés rurales du Sud. Les polémiques autour de l’huile de palme, et plus principalement autour de ses enjeux alimentaires, sociaux et environnementaux, ont traversé les sociétés du Nord, porteuses d’interrogations légitimes sur la préservation de la biodiversité, les comportements alimentaires ou l’impact sur l’environnement. Elles ont révélé des prises de position très marquées, qui montraient souvent un défaut de connaissance des territoires, des acteurs et des enjeux qui permette de comprendre les questions liées à cette filière dans sa complexité, ses interactions et sa diversité. Nous avons jugé utile de dépasser ces oppositions frontales en proposant aux lecteurs de prendre en compte les points de vue de divers acteurs de la filière et de ses adversaires. Le parti pris est de proposer des passerelles entre ces visions pour partager les savoirs disponibles et contribuer ainsi à donner une image plus nuancée mais probablement plus proche des réalités du terrain des questions qui se posent et auxquelles sont exposées les chercheurs et les experts. Le CIRAD a mobilisé son Service d’Appui à la Valorisation Opérationnelle de l’Information sur la Recherche Scientifique (SAVOIRS) pour offrir au lecteur un ouvrage qui lui permette d’établir des liens pédagogiques et cognitifs entre 36 points de vue complémentaires. Notre propos n’est pas de réaliser un inventaire exhaustif des motifs de la controverse, ces derniers n’intéressant notre Institution que par les questions pertinentes qu’ils posent à la Recherche afin d’essayer de les dépasser par des réponses adaptées. Cet ouvrage de la série des Compilivres® donne au lecteur la possibilité d’enrichir son point de vue en choisissant son propre itinéraire de découverte pour observer, comprendre et parfois partager tout ou partie de ceux des autres. La forme pédagogique choisie est évidemment nourrie des résultats de la recherche; elle a pour ambition d’aider à éclairer des citoyens concernés et de participer à l’éveil des plus jeunes aux grands débats qui traversent nos sociétés. Avec ce polyèdre à 36 facettes, notre souhait est de faire connaître les acteurs de cette filière et leurs préoccupations, mais aussi les points de vue de leurs opposants afin de nuancer les avis des contradicteurs comme ceux des promoteurs inconditionnels. Il révèlera au lecteur l’extraordinaire richesse des filières tropicales et leur capacité à interroger chercheurs, ingénieurs, techniciens et citoyens sur des questions fondamentales de développement.
Michel EDDI Président Directeur général du CIRAD
V
SOMMAIRE
Annonce du thème
I
Les contributeurs
II
Préface
V
Sommaire
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VI
VII
AVEC OU SANS PALMIER ? Un botaniste observateur Un agronome intégrateur Un sélectionneur confiant Un architecte modélisateur du végétal Un palmier à huile cultivé Un palmier à huile sauvage Un monde sans palmier à huile ?
1-2 3-4 5-6 7-8 9-10 11-12 13-14
LES PRODUCTEURS Un grand pays gros producteur Un grand planteur vertueux Un producteur de semences certifiées Un ouvrier agricole débutant Un insecte pollinisateur efficace Un pathogène opportuniste Un prédateur déterminé Un grand industriel raffiné Un ouvrier industriel appliqué Un médecin de compagnie Un petit planteur heureux Un écologue opérationnel Un forestier serein
VI
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SOMMAIRE
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LES FINANCIERS Un analyste des marchés porteurs Une société de conseils avisée Un investisseur éthique
45-48 59-50 51-52
LES CONSOMMATEURS Un amateur inconditionnel d’huile raffinée Une diététicienne pondérée Un consommateur bien informé Un buveur raisonnable de vin de palme Une femme africaine respectueuse des traditions
53-54 55-56 57-58 59-60 61-62
LES OBSERVATEURS Un statisticien attentif Un historien scrupuleux Un homme de la forêt déçu Un tigre de Sumatra aux abois Un spécialiste de la biodiversité native Un écologiste activiste Un journaliste multicartes
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UN FEDERATEUR La Round table for Sustainable Palm Oil
VII
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Le point de vue d’un botaniste observateur
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Une herbe géante aimée des hommes Parmi les herbes géantes solidement ancrées dans le sol comme les bambous ou les bananiers, ma préférence va aux palmiers dont le tronc généralement unique appelé « stipe », est couronné de plusieurs dizaines de feuilles composées de folioles. Parmi les espèces les plus utiles aux hommes comme le palmier dattier, le cocotier, le palmier bétel, le palmier ciré, le palmier ivoire, le palmier rotin ou le palmier sucre, figure le palmier à huile qui se plaît dans les régions chaudes et humides. Tous les palmiers appartiennent à l’ordre des Arécales et à la famille des Arécacées ou Palmacées.
Deux cousins qui font de l’huile L’espèce africaine, Elaeis guineensis, décrite par Nicholas Jacquin en 1763, est originaire des pays du Golfe de Guinée. Elle est la mieux connue et la plus cultivée. En comparaison, l’espèce d’Amérique du Sud, Elaeis oleifera (Kunk), est réputée moins productive mais plus compacte et plus résistante à certaines maladies. Elle est donc parfois utilisée pour produire des hybrides interspécifiques. Les deux espèces de palmier à huile produisent des huiles de composition différente, une dans la partie charnue des fruits et une autre à l’intérieur de l’amande.
Le saviez-vous?
• Le palmier à huile est une plante monocotylédone capable de produire de gros fruits gorgés d’une huile restant solide ou semisolide à température ambiante. • Le fruit du palmier est une drupe; c’est un fruit charnu à noyau tel que la pêche, la cerise ou la prune. La graine ou amande est contenue dans le noyau qui est issu de la paroi interne de l’épicarpe. • Le faux tronc est un « stipe ». • Une plantation de palmiers sur sol profond produit de 30 à 40 tonnes de matière sèche par hectare . • La biomasse du régime de fruits ne compte que pour 5% de la biomasse totale de la plante. • Dans des sols très humides, les racines de quatrième rang développent des pneumatophores pour améliorer la respiration.
Côte d’Ivoire © Alain Rival
Les liens pédagogiques
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Fruits des palmiers à huile, entier et en coupe
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AVEC OU SANS PALMIER ? Une herbe qui a du corps
© Alain Rival
La première fois que j’ai déterré le plateau racinaire d’un palmier à huile mature, j’ai été surpris de rencontrer 6 000 à 10 000 racines primaires formant un chevelu très dense. Les racines des rangs 1, 2, 3 et 4 s’étendent dans la couche superficielle du sol jusqu’à 20 mètres du stipe. Certaines s’enfoncent à 6 mètres de profondeur. L’axe vertical du palmier ou stipe est fait de nombreux vaisseaux ligneux et de vaisseaux conducteurs de sève. De croissance d’abord lente, il se développe ensuite plus rapidement et peut atteindre une taille finale de 25 à 30 mètres de haut. Le stipe apporte une résistance exceptionnelle aux coups de vent et sert de réserve à sucre et à eau pour les mauvais jours. La couronne foliaire à silhouette très caractéristique accueille 30 à 45 feuilles, certaines d’entre elles atteignant 10 mètres de long. Chaque feuille est constituée de 250 à 350 folioles attachées sur un rachis central. D’une durée de vie moyenne de 4 ans, elles sont régulièrement remplacées par de plus jeunes.
Des fleurs unisexuées aux fruits plus ou moins charnus Les fleurs mâles exhalent à maturité une forte odeur anisée pour attirer les insectes pollinisateurs. Elles sont regroupées par lot de 400 à 1500 sur chacun des 100 à 300 épis attachés sur un pédoncule de 40 centimètres. Les fleurs femelles émettent elles aussi une odeur anisée similaire durant les 2 à 4 jours pendant lesquels elles sont fécondables. Les insectes pollinisateurs, dupés et chargés de pollen viennent y déposer les grains de pollen d’une durée moyenne de vie de 5 jours sur les pistils de lots de fleurs regroupées par 5 à 30 sur chacun des épis de 6 à 15 centimètres de long. La maturation de l’inflorescence formée de 500 à 3000 fruits demande 6 mois. Chaque régime pèse de 10 à 80 kg. D’évidence, la nature a fait le choix des grands nombres pour augmenter les capacités de survie de cette plante. Chaque fruit est formé d’un fin épiderme ou péricarpe qui recouvre la pulpe ou mésoderme puis la coque ou endocarpe, qui entoure l’amande ou palmiste. Le type dura est pauvre en pulpe et présente une coque épaisse. Le type pisifera est dépourvu de coque est souvent stérile. Le type tenera, issu du croisement des deux autres, est plus riche en pulpe et fertile. Tous les palmiers cultivés aujourd’hui devraient être des variétés issues de croisements dura x pisifera. Au total, le palmier à huile me paraît être l’une des plus surprenantes inventions de la nature pour transformer l’eau, la terre et le soleil en des huiles aux propriétés inégalées, connues des animaux et des hommes depuis des dizaines de millénaires dans les lieux où il pousse naturellement. C’est à la fois une double usine à huile et à biomasse couplée à un réacteur photosynthétique exceptionnel. Les caractères botaniques uniques du palmier à huile vont lui donner beaucoup d’atouts agronomiques : interception du rayonnement lumineux optimisée, photosynthèse hyper-efficace produisant l’énergie nécessaire à la coûteuse synthèse des huiles, système racinaire fasciculé, assurant un excellent ancrage dans le sol, garantissant un excellent retour de biomasse dans le sol et en améliorant la structure. 2
Le point de vue d’un agronome intégrateur
Un peu de patience pour de hautes performances De toutes les plantes oléagineuses comme l’arachide, le cocotier, l’olivier, le colza, le cotonnier, le noyer, le noisetier, le ricin, le sésame, le soja, le tournesol ou le lin, le palmier à huile est le champion de la production d’huile par hectare quand il est planté sur des sols fertiles en régions tropicales humides. Toutefois, l’agronome que je suis recommande d’être patient car la germination dure une centaine de jours, la croissance des jeunes pousses une petite année en soins intensifs sous l’oeil attentif des pépiniéristes, l’entrée en production quelques ans de plus. En retour, le planteur est récompensé par une production régulière à partir de trois années de culture et pour une durée d’un quart de siècle !
Thaïlande © Tristan Durand-Gasselin
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Les liens pédagogiques
Les règles du jeu
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Malgré la plasticité agronomique du palmier à huile, un certain nombre de principes doivent être respectés pour garantir une plantation économiquement viable : choix de la variété la mieux adaptée, respect d’une densité allant en général de 135 à 160 palmiers par hectare, préparation du sol, apports de compléments minéraux ou organiques, surveillance phytosanitaire et traitements en rapport avec la présence d’ennemis des cultures. Nos connaissances d’agronomes sont utiles à chaque étape pour aider l’exploitant à faire les meilleurs choix possibles. Notre devise est l’intensification écologique : gagner en rendement sans compromettre la santé des hommes et de la planète, ni les rendements futurs. D’une vingtaine de tonnes de fruits mûrs cueillis par hectare, les exploitants de Malaisie extraient en moyenne 20% d’huile, le maximum enregistré étant de l’ordre de 25%, sachant que l’on pourrait espérer 30%. En pratique, il est courant d’extraire 4 tonnes d’huile, parfois 7 par hectare en plantation industrielle. En conditions idéales, on peut espérer 10, peut-être 12 tonnes d’huile à l’hectare avec des hybrides d’exception et de bonnes pratiques agronomiques !
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Le saviez-vous?
• Les généticiens ont assuré un gain continu en productivité en huile à l’hectare de 1% par an depuis plus de cinquante ans. Le travail des agronomes s’ajoute à ces performances. • Le fruit grossit pendant 75 jours après la fécondation ; sa chute naturelle a lieu au terme de 6 mois. • La replantation est à entreprendre quand le nombre de palmiers producteurs est de moins d’une centaine de palmiers par hectare ou que 30% d’entre eux sont trop grands pour que l’on collecte les fruits avec de longues perches d’environ 12 mètres. • La compétitivité des plantations industrielles du palmier à huile repose non pas sur une mécanisation efficace mais plutôt sur la disponibilité en main-d’œuvre se satisfaisant encore de bas niveaux de salaire. • On compte actuellement au moins 48 pays candidats au développement de la production de l’huile de palme, tous situés dans la ceinture intertropicale. 3
AVEC OU SANS PALMIER
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Les cultures et les élevages associés Les palmeraies encore jeunes, quand le soleil peut encore passer entre les palmiers, supportent l’association avec d’autres plantes non concurrentes comme le taro, l’arachide, le maïs, l’aubergine, le piment, le cacaoyer, le caféier ou encore des plantes d’ombre. Mais je n’hésite pas à affirmer que la culture exclusive du palmier à huile est celle qui donne les meilleurs rendements même si la mode est au panachage agro-forestier.
ASD © Tristan Durand-Gasselin
Indonésie © Socfindo
© Alain Rival
La compatibilité avec des animaux divagants est toujours délicate car les petits ruminants comme le bétail compactent le sol, endommagent le tissu racinaire superficiel, consomment les feuilles basses, détruisent la plante de couverture et pourraient propager des champignons pathogènes.
Côte d’Ivoire © Alain Rival
Un capital intergénérationnel Une plantation économiquement rentable permet d’offrir à la famille de l’exploitant une vie plus facile et de mieux préparer l’avenir de ses enfants. Ainsi, le palmier à huile quand il est correctement exploité, aide-t-il des petits planteurs à sortir de la pauvreté, parfois en une génération.
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Le point de vue d’un sélectionneur confiant Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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D’un commerce à l’autre La sélection du palmier à huile a commencé quand les colons des comptoirs africains, privés des ressources liées au commerce des esclaves, ont eu pour objectif d’approvisionner les savonneries européennes qui manquaient de suif ou d’huile à mélanger à des cendres. Les populations africaines des pays du Golfe de Guinée ont été encouragées à rapprocher les jeunes plants de palmiers sauvages les plus intéressants de leurs villages et les ont regroupés sur des parcelles se prêtant à la récolte des fruits et de la sève. Les premiers soins culturaux étaient réduits au désherbage saisonnier.
D’Afrique en Asie
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Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
Les liens pédagogiques
La première sélection volontaire au nord de Sumatra date de 1911, à l’initiative de colons Belges. Les plantations en monocultures en Indonésie comme il en existait déjà pour l’hévéa ont été faites par des Néerlandais et des Anglais. Même si la base génétique était réduite, l’effort de sélection a porté dès l’origine sur le nombre de régimes par palmier, le poids des régimes, la taille des fruits et le taux d’extraction d’huile. Plus tard ont été prises en compte la teneur en oléine, la faible croissance en hauteur, la résistance aux maladies, l’aptitude à se développer sur des sols pauvres, la résistance à la sécheresse ou à l’excès d’humidité.
Le saviez-vous?
• Les quatre premiers plants de palmier à huile introduits en Asie ont été plantés dans l’île indonésienne de Java en 1848 dans un but ornemental. • Grâce aux sélectionneurs, les petits planteurs dont la production est de l’ordre de 1,5 tonne d’huile à l’hectare pourraient en espérer 5. • Chaque système d’exploitation a son palmier idéal. • Le choix du palmier cultivé sera différent selon qu’ils sont destinés aux petits planteurs payés au poids des régimes ou aux grands exploitants intéressés aussi par une teneur en huile élevée des régimes. • Le palmier à huile se prête mal au génie génétique car les caractères recherchés ne dépendent pas d’un seul gène. • Produire une huile vierge « Non génétiquement modifiée » est un avantage commercial sur certaines plantes oléagineuses pour quelques années encore. • Une semence améliorée de palmier à huile, c’est actuellement un dollar US d’investissement qui génère plus de 1 200 dollars US de ressources en 20 ans.
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AVEC OU SANS PALMIER
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Des progrès mesurables qui doivent être partagés Selon nous, sélectionneurs du XXIe siècle, l’efficacité des stratégies de sélections actuelles repose sur des échanges réciproques de matériel végétal d’intérêt, les échanges internationaux bénéficiant à la sélection de semences performantes. Même si le processus est lent à cause des cycles longs du palmier à huile, nous revendiquons un progrès génétique de l’ordre de 1% par an, ce qui pousse les planteurs à rajeunir les vergers âgés avec des semences améliorées et certifiées. Actuellement, 220 millions de semences améliorées sont produites dans le monde chaque année, toutes destinées à la création de nouvelles plantations et au renouvellement des anciennes exploitations. En 2014, l’Indonésie y a contribué pour 103 millions et la Malaisie pour 55 millions. Toutes les semences sélectionnées modernes sont des hybrides : le planteur ne peut donc pas utiliser les graines issues de ses propres palmiers et doit en conséquence s’approvisionner auprès de semenciers ou de pépiniéristes certifiés. L’utilisation de semences certifiées est le premier pas vers une production durable car elle permet de bénéficier des derniers progrès de la recherche en génétique et de produire plus, avec la même surface d’exploitation et le même travail.
L’hybridation délicate Pour lutter contre la pourriture du cœur, le palmier africain est croisé avec le palmier Sud-Américain mais le pollen de ces hybrides interspécifiques et intercontinentaux est peu fertile et les inflorescences attirent peu d’insectes pollinisateurs. Les entomologistes n’ont pas trouvé l’équivalent du charançon africain ou des pollinisateurs américains qui partageraient la même passion. Pour le palmier africain, la pollinisation manuelle a été pratiquée en Asie avant l’introduction du charançon africain. Elle serait trop coûteuse en personnel salarié pour être recommandée à nouveau.
D’autres pistes en vue
Thaïlande © Tristan Durand-Gasselin
Liberia © Tristan Durand-Gasselin
Nous cherchons actuellement à augmenter la teneur en acides gras insaturés, en vitamines A et E, à diminuer la teneur en enzymes de la famille des lipases qui acidifient rapidement les fruits coupés. La sélection génétique du palmier à huile est additive : chaque génération vient améliorer les progrès génétiques capitalisés par la précédente. Les chercheurs contemporains préparent des essais en plein champ qui seront analysés par la prochaine génération de chercheurs encore en train d’apprendre à lire, écrire, compter : solidarité intergénérationnelle des hommes et des palmiers.
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Le point de vue d’un architecte modélisateur du végétal Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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? Le saviez-vous? • Environ la moitié des palmiers cultivés ont un système de croissance organisée vers la droite, les autres tournent vers la gauche. • En plantant les palmiers exploités industriellement en quinconce, on obtient à macro-échelle une structure quasi-cristalline dont la régularité est facile à détecter vue du ciel. Elle fait contraste avec les paysages naturels très complexes au plan de la géométrie spatiale . • La nature n’est pas parfaite, il a fallu introduire l’imperfection dans mon modèle pour trouver une ressemblance avec l’original !
Pour moi qui ai des habitudes simplificatrices pour mettre la nature en équations, tout se passe comme si l’ensemble de la structure en double parasol était une unité autonome de production d’huile à partir de la terre et du ciel, un système qui fonctionne d’autant mieux que les espacements entre chaque unité évitent des concurrences vis-à-vis des sources d’ approvisionnements extérieurs (lumière, eau, substances nutritives). Chaque palmier à huile doit disposer d’environ 70 m2 au sol.
Les liens pédagogiques
Deux couronnes sur un axe
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Pour l’architecte biomécanicien que je suis, le palmier à huile est un axe central reliant deux couronnes structurées radialement, celle des racines dans le sol et celle des feuilles sous le soleil à l’extrémité opposée. L’ancrage au sol est assuré par le réseau racinaire à quadruple ramification, plus dense près de la surface qu’en profondeur. Il assure l’approvisionnement en eau et en substances nutritives. L’espace aérien est colonisé par une couronne foliaire radiale pour que les feuilles puissent capter la lumière et réaliser la photosynthèse indispensable à la fabrication métabolique de tous les éléments nécessaires au palmier pour assurer sa croissance et son développement.
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Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
Un double parasol
AVEC OU SANS PALMIER
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Le palmier géomètre Connaissant l’angle de divergence entre deux feuilles consécutives qui varie très peu autour de 136 degrés, le nombre de spires d’ordre 3, 8 ou 13 et orientées généralement vers la droite, le niveau d’insertion sur le stipe, la courbure de la feuille, le nombre de feuilles émises et le rythme de leur production, la modélisation de la palme est une chose maintenant acquise. L’introduction des coefficients de torsions sert à la mise en place des éléments construits. La modélisation des inflorescences puis celle du système racinaire sont validées sur le terrain. Après avoir adjoint au modèle un moteur de croissance, puis quelques moteurs auxiliaires gérant l’aléatoire, le modèle a permis de créer d’abord un palmier à huile virtuel, du méristème apical d’une racine à l’extrémité d’une foliole, puis toute une plantation dynamique avec pour objectif de simuler les effets d’ombrage au sol en fonction de la position du soleil. Je ne suis pas peu fier du résultat.
Cameroun © Betrand Tailliez
Costa Rica © Tristan Durand-Gasselin
Mes plantations virtuelles ressemblent à s’y méprendre à des plantations réelles, surtout depuis que j’ai introduit des mécanismes de variation par tirage au sort dans mes équations mathématiques.
Peinture sur verre façon vitrail
Modéliser pour prévoir Le climat change et les planteurs de palmier s’y préparent. Les biomodélisateurs mettent en relation les changements climatiques comme El Niño et les variations de comportement des palmiers : croissance, développement, productivité en huile. Personnellement, je cherche à introduire le maximum de paramètres d’environnement dans mon modèle de croissance et de développement pour le rendre plus réactif à toutes les variations prévisibles de l’environnement d’une palmeraie. Mon objectif est de fournir aux exploitants un outil mathématique leur permettant d’anticiper les variations de production en fonction de changements climatiques. Cette famille d’équations est l’héritière d’années d’étude sur la physiologie complexe et originale du palmier à huile. 8
Le point de vue d’un palmier à huile cultivé Des rapports très anciens avec les hommes Originaire des pays riverains du Golfe de Guinée en Afrique tropicale humide, j’ai partagé avec des centaines de générations d’hommes mes feuilles, mon tronc principal, mes fruits, mes huiles et ma sève. Les épines de mes feuilles, les bractées florales et apicales dures et piquantes, les ergots de chaque épi de mes inflorescences femelles, les épines apicales de mes inflorescences mâles, les chicots pétiolaires, ne les ont pas découragés. Je dois mon nom scientifique Elaeis guineensis au botaniste Nicholas Jacquin qui m’a décrit en 1763. Il existe une autre espèce appartenant au même genre poussant en Amérique du Sud et en Amérique centrale, Elaeis oleifera (Kunth) Cortès. Elle est parfois croisée avec moi à cause de sa petite taille, de son huile plus équilibrée en acides gras insaturés et surtout pour sa résistance naturelle à la Pourriture du cœur.
Les liens pédagogiques
Bénin © Alain Rival
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le saviez-vous?
• Nommée Elaeis guineensis par des botanistes, je suis la seule espèce de palmiers à être cultivée depuis le XXe siècle en peuplements purs au point que l’on parle d’élaeiculture. • Ma souplesse agronomique est proverbiale car je m’adapte à presque tout, moyennant un ajustement de la production d’huile. • La production de régimes passe de 340 tonnes à l’hectare à moins de 8 quand les conditions ambiantes me déplaisent. • Une inondation temporaire ne me fait pas peur si le drainage du sol est rapide. • Mon faux tronc ou stipe, est un organe exceptionnel de stockage d’eau, de sucres et de minéraux. • Pour faire court, je suis un capteur solaire à haut rendement, un fabricant d’huile performant et un piégeur efficace de gaz carbonique.
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Une domestication fulgurante En moins d’un siècle, le palmier à huile est devenu une plante industrielle. Son huile est passée d’un statut de produit de cueillette et de subsistance à celui de produit d’exportation, dont le prix suit un cours mondial obéissant aux lois des marchés internationaux.
AVEC OU SANS PALMIER
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Mes préférences environnementales Pour me sentir bien, j’ai besoin de 1800 à 2 000 heures d’ensoleillement par an, soit environ 165 heures par mois, une pluviosité de 1800 mm par an à raison de 150 mm par mois en moyenne, d’une humidité relative de l’air supérieure à 75%, d’une température moyenne annuelle de 26°C qui ne descende pas en dessous de 18°C dans les mois les plus froids mais qui peut monter à 33 voire 38°C pendant les mois les plus chauds si l’air est humide. J’apprécie un sol profond, meuble, perméable, à bonne capacité de rétention en eau, naturellement riche en humus et en matières minérales, à pH neutre ou faiblement acide. Je n’aime pas les cuirasses latéritiques, les gravillons ou les argiles. Dans les sols pauvres, j’apprécie des apports raisonnés de potassium, de chore, d’azote, de phosphore, de magnésium, de calcium, de chlore et de soufre. Des compléments en aluminium, bore, cuivre, fer, manganèse, molybdène et zinc me sont utiles à petites doses, si la terre ne me les fournit pas naturellement. Etant doté d’une exceptionnelle activité photosynthétique, je suis capable de maîtriser toute la biochimie du carbone pour fabriquer des corps gras en quantité exceptionnelle.
Du vent dans les palmes Malgré un ancrage au sol solide, je crains les vents violents liés aux dépressions cycloniques car la prise au vent de ma coiffe foliaire est importante. Dans les plantations intensives, les palmiers voisins me protègent. Toutefois, je résiste à des bourrasques violentes grâce à l’élasticité de mon stipe, la partie centrale étant souple par rapport à la périphérie qui est lignifiée. Mes quatre ancêtres déplacés dans le jardin de Bogor en Indonésie ont pu vivre plus d’un siècle, malgré les fameux coups de vent javanais et ils ne sont pas les seuls !
Deux huiles dans le même fruit
Nigeria © Tristan Durand-Gasselin
Dans de bonnes conditions, je produis à maturité presque toute l’année des régimes de fruits qui se gorgent d’huiles, la première de couleur rouge au premier pressage de la pulpe de mes fruits mûrs dite « huile de palme », la seconde de couleur jaune ou orangée, dite « huile de palmiste » lorsque ce sont mes amandes qui sont broyées. Les deux sont de consistance solide à la température ambiante, ce qui explique qu’on les qualifie d’« huiles concrètes » dans les pays tempérés. L’huile de palme représente de 18 à 26% du poids frais d’un régime et l’huile palmiste de 2 à 3%. Je suis le seul végétal au monde a arriver à un tel exploit : fabriquer dans le même fruit deux huiles de composition si différente !
D’autres usages par les hommes En plus des deux huiles et de ma sève sucrée qui fermente naturellement à l’air pour donner le vin de palme, je suis utile aux hommes à de nombreux points de vue. Mes palmes servent à la construction de clôtures légères, de toitures, de paniers tressés et de balais. La carbonisation des coques permet d’obtenir un charbon très utile aux foyers pour faire la cuisine. Même si mon « faux bois » est jugé de mauvaise qualité pour faire des planches, sauf peut-être à la base du stipe, ma cellulose sert à la fabrication de panneaux de particules, et d’adjuvant à la confection de plaques de ciment ou de plâtre. Les fibres et coques brûlées dans des chaudières fournissent de l’énergie aux planteurs et usiniers. La méthanisation des effluents des huileries produit du combustible pour des moteurs thermiques, à moins que l’on ne préfère les répandre comme engrais, avec des rafles compostées et des boues liquides. Du point de vue du palmier à huile domestique, l’homme a un statut ambigu : d’un côté il le protège et le multiplie, d’un autre, il lui vole les huiles de ses fruits quand ce n’est pas sa sève pour fabriquer du vin. Car il sait que dans le palmier à huile, tout est bon. Ou presque. 10
Le point de vue d’un palmier à huile sauvage
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Une grande famille J’appartiens à une famille de palmiers que je crois détentrice de tous les records en termes de taille de graines, de feuilles et de « tiges ». Mes origines remontent à une centaine de millions d’années, à un moment où les plantes à fleurs ont connu un succès planétaire. Notre famille taxinomique a connu un grand nombre d’espèces mais à cause des changements climatiques sévères, je suis resté l’un des rares palmiers africains à pouvoir continuer de prospérer sur ma terre natale, avec ou sans présence humaine.
Mon habitat préféré Je me plais en bordure des forêts primaires, dans les zones de transition avec la savane plus ou moins arborée, le long des cours d’eau, en bordure des marécages. En cas de feux de brousse, je survis le plus souvent grâce aux couches superposées de feuilles persistantes à la base de mon stipe et au fait que ma croissance est assurée par un bourgeon terminal situé généralement hors de portée des flammes, à la différence des « vrais » arbres dont le cambium dans le tronc est beaucoup plus exposé. En outre, la germination de mes graines est plutôt facilitée après un incendie de la strate herbeuse qui atteint facilement une hauteur de 80 centimètres.
Le saviez-vous?
Les liens pédagogiques
Traditionnellement
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En Afrique tropicale humide et depuis des milliers d’années, mon huile rouge entre dans la composition des sauces graines, des sauces au gombo et de plats à base de banane plantain, de manioc ou d’igname. La femme africaine respectueuse des traditions s’en sert pour cuire le poisson ou la viande. Les consommateurs locaux aiment la couleur rouge, le goût affirmé et le fait que cela vienne d’une production directe par pressage des fruits. Dans le commerce triangulaire de plusieurs siècles, des esclaves des pays du Golfe de Guinée ont emporté des graines avec eux pour les replanter dans le Nordeste du Brésil. Depuis, certains plats de ce pays d’Amérique latine sont enrichis d’huile de palme africaine appelée « dendê ». Les gourmets de Salvador ou de Recife au Brésil apprécient la « moqueca » et les « acarajè », dont la couleur et la saveur doivent beaucoup au « dendê ». Au Cameroun, au Nigeria, en Côte d’ivoire, les gourmets urbains aux habitudes alimentaires mondialisées sont, comme partout, à la recherche du goût unique des plats de leur enfance: l’huile rouge leur est alors vendue sur les petits marchés locaux au prix d’une délicatesse prisée, sans aucun rapport avec le cours mondial de l’huile !
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• Certains groupes de chimpanzés ne se contentent pas de manger la pulpe de mes fruits mûrs. Ils ont appris à écraser les amandes entre deux pierres choisies par eux, l’une servant de marteau, l’autre d’enclume, pour manger la graine gorgée d’une autre huile très peu colorée au goût légèrement différent. • Comme l’homme africain a appris très vite à extraire par broyage l’huile rouge venant de la pulpe des fruits, il a rapidement rapproché les jeunes plants de ses cases et débroussaillé autour des palmiers en devenir pour faciliter la croissance, améliorer la production en fruits et y accéder plus facilement quand ils sont mûrs.
AVEC OU SANS PALMIER
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Les jardins de palmiers
Côte d’Ivoire © Tristan Durand-Gasselin
Lorsque l’homme s’est intéressé à moi pour utiliser l’huile de la pulpe de mes fruits, il a choisi les palmiers les plus proches des chemins et a protégé les plantules à proximité des villages en désherbant autour d’elles pour leur éviter une compétition avec d’autres plantes de recrûs forestiers. Le simple transport des régimes de fruits mûrs a eu pour conséquence d’en disséminer une partie le long des chemins, ce qui fut pour moi une occasion de tenter ailleurs d’autres germinations. Ma forte capacité de régénération a permis l’extension naturelle des plantations sub-spontanées plus ou moins jardinées. La capacité de récolte auprès de mes sujets palmistes apprivoisés était à l’époque d’environ 150 à 300 kilogrammes par hectare et par an.
En brousse Je bénéficie toujours d’un statut particulier de la part des hommes des petits villages. Ils évitent de me couper, entretiennent le pourtour de mon pied, grimpent agilement sur mon stipe en s’aidant d’une ceinture de lianes ou de cuir et me reconnaissent au fil d’un itinéraire de collecte qui leur est familier. Certains me sont même reconnaissants d’exister car mon huile a aussi des propriétés antisyphilitiques. Elle retarde les problèmes de prostate et permet de lutter contre le vieillissement de la peau. Les hommes me plantent parfois aux limites de leurs parcelles cultivées pour mieux les borner. Les amateurs de sève comme ceux de cœur de palmier me causent des dommages irréparables, encore qu’ils choisissent de s’en prendre souvent aux palmiers très âgés. En revanche, j’apprécie que les hommes prédateurs protègent mes jeunes plants, source pour eux de futurs profits. Des « vignobles à palmiers » sont plantés au Bénin, où l’on cultive des plants à très haute densité et sur des durées très courtes, avant de les sacrifier pour leur sève. Certains de mes ancêtres restent bien cachés dans des zones reculées entre l’Angola, le Mozambique, les pentes du Mont Cameroun ou Madagascar. Les généticiens modernes, organisent des prospections pour nous découvrir et nous domestiquer. Pourtant, ils auraient déjà fort à faire en exploitant la variabilité aujourd’hui disponible chez les palmiers de culture.
Mes rapports avec les animaux En utilisant une grande variété de pollinisateurs et de disséminateurs de graines, qui ont d’ailleurs changé durant mon histoire, et ceci bien avant l’arrivée des hommes, j’ai constitué des peuplements importants au nord des ensembles forestiers du Golfe de Guinée sur mon continent d’origine, l’Afrique, avec des individus pouvant atteindre 20 à 25 mètres, au stipe de diamètre régulier et une régénération naturelle très active. Tous les animaux amateurs de mes fruits mûrs prennent leur part comme les perroquets et les chimpanzés. Cette ressource alimentaire, riche en provitamine A et en vitamine E, est particulièrement précieuse en saison sèche pour nombre de consommateurs animaux et humains de mes fruits en place ou tombés au sol.
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Le point de vue d’un monde sans palmier à huile Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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? Le saviez-vous? • La réinstallation complète d’une forêt primaire sur un sol dégradé demande sept siècles. Qui pourrait jurer que les pays forestiers souverains sauront attendre autant de temps sans faire de petites coupes ? • En cas de disparition du palmier à huile, environ un milliard d’habitants sur un peu plus de sept verrait ses habitudes alimentaires évoluer et certainement le prix des produits transformés augmenter. • Des milliards d’euros arrêteraient de circuler autour de cette ressource controversée mais renouvelable. • Plusieurs dizaines de millions de personnes dans les zones rurales tropicales perdraient leur emploi.
Une simple hypothèse Imaginons que le monde reste le monde, que la demande mondiale en huiles et graisses végétales soit la même, mais que le palmier à huile ait disparu, victime d’une maladie nouvelle foudroyante ou de l’indifférence brutale des marchés. En quoi notre monde contemporain en serait-il affecté ?
Les liens pédagogiques.
Des effets aux faits
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Le manque d’environ 50 millions de tonnes par an de matière première dans le marché des oléagineux ne va pas faire s’effondrer l’économie du marché planétaire des corps gras. Mais la reconversion à partir d’autres sources d’origine végétale va avoir des conséquences, d’autant plus que la demande croissante en corps gras va accroître le déficit d’environ 5% chaque année. Par quoi va-t-on remplacer l’huile de palme dans les pays les plus gros consommateurs lorsque l’on connaît l’histoire de l’huile d’arachide qui a pratiquement disparu des plats préparés après avoir été la première du marché ? Les pays du Sud auront-il accès à une autre source de lipides aussi nutritive, abondante et bon marché ? De fait, les pays émergents seront les plus touchés car ils auront du mal à satisfaire les attentes en corps gras de leurs populations en expansion démographique et économique. Les pays du Nord seront moins atteints car ils ne consomment que 17% des productions mondiales, chiffre qui peut baisser à cause de la tendance générale à la décroissance économique et démographique et de l’abondance et de la diversité des sources de lipides qu’on y trouve.
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© Alain Rival
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AVEC OU SANS PALMIER
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Des conséquences pour l’emploi
Liberia © Tristan Durand-Gasselin
Environ 5 millions d’employés indonésiens salariés du palmier à huile vont se retrouver au chômage. Comme chacun d’entre eux fait vivre une famille d’environ 5 personnes, 25 millions d’habitants, soit environ 10% de la population de ce pays, se retrouveraient sans ressources, et presque autant dans la Malaisie voisine. Par des calculs indirects concernant 20 pays producteurs sur les 48 offrant les conditions écologiques favorables à la culture du palmier à huile et désireux d’avoir accès à l’or rouge, un minimum de 12 millions de personnes au moins perdraient leurs salaires, entraînant avec eux leurs proches dans la détresse économique, soit environ 60 millions d’individus. Il faudrait sans doute multiplier ce chiffre par trois pour connaître l’importance des populations voyant leurs revenus diminuer, faute d’approvisionnement en huile de palme, car au-delà des producteurs, de très nombreux métiers sont mobilisés dans les transports, les usines, chez les détaillants, les fabricants, dans les banques, pour acheminer l’huile brute ou raffinée jusqu’à l’utilisateur final.
Conséquences des mesures substitutives Les industriels du secteur des corps gras d’origine végétale se tourneraient vers le soja, le colza, le tournesol, l’arachide, le coton, le coprah, l’olive en constatant que le prix à la tonne est toujours plus élevé que celui de l’huile de palme, que les surfaces à planter pour une production substitutive sont toujours plus grandes, que les propriétés physico-chimiques des huiles et corps gras d’origine différente ne sont pas autant appréciées par les industriels, tant dans l’agro-alimentaire que dans l’agro-industrie et que la question des biocarburants n’est pas mieux réglée qu’avant. En outre, il faut 100 fois plus de pesticides pour produire une tonne d’huile de colza que de palmier. Les diététiciens des pays où les obèses représentent 25% des populations se réjouiraient, sans doute à tort dans la durée, mais les nutritionnistes des pays où au moins 25% des habitants sont soumis à la malnutrition ou à la sous-nutrition regretteraient la perte d’une huile si facile à conserver et à mélanger avec d’autres ingrédients pour proposer des rations alimentaires indispensables à des populations en carence lipidique chronique. On trouverait évidemment des solutions techniques pour remplacer l’huile de palme naturellement hydrogénée par d’autres artificiellement hydrogénées, mais la production d’acides gras «trans» réputés cancérigènes serait risquée pour la santé publique, en même temps que le prix de revient irait en augmentant. Les défenseurs des « peuples racines » jubileront un court moment, mais ils s’apercevront que le palmier à huile n’est qu’un élément parmi d’autres qui poussent les gouvernements à sacrifier leurs forêts sur l’autel de la croissance économique. Les plantations non entretenues seront envahies par des forêts secondaires peu intéressantes, à moins que d’autres cultures comme l’hévéa, le cacaoyer ou l’ananas ne prennent la place. On ne rendrait pas pour autant à la Nature les millions d’hectares déforestés et leur irremplaçable biodiversité naturelle. En Afrique de l’Ouest, dans les régions reculées où le palmier à huile fournit un appoint alimentaire très apprécié, les populations orphelines souffriront un peu plus. Certains experts du développement prétendent qu’en cas de disparition du palmier à huile, plusieurs dizaines de millions d’individus seront privés d’emploi. Les amateurs d’huile en trouveront encore en moindre quantité et de qualité différente dans d’autres plantes oléagineuses tandis que les consommateurs d’alcool exerceront leur savoirfaire à partir de la sève sucrée et des grains fermentés d’autres plantes. 14
Le point de vue d’un grand pays gros producteur
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Un poids lourd Alors que le vieillissement des populations de nombreux pays occidentaux menace à terme leur existence propre, nous, Indonésiens, avons la chance d’avoir une pyramide des âges très favorable pour mobiliser un grand nombre d’actifs dans l’économie nationale. Notre population au dernier recensement est de 238 millions, ce qui nous place au 4e rang mondial.
L’or rouge comme vecteur de développement Parmi les moteurs de notre croissance, la filière du palmier à huile représente 6 à 7% de notre produit national brut. Environ 5 millions de familles en vivent directement, soit 25 millions de personnes, plus ceux qui en dépendent indirectement. Comme nos exploitations sont relativement peu mécanisées par rapport à celles du soja, cette activité emploie 30 fois plus de personnes, ce qui contribue significativement à l’emploi en milieu rural et réduit d’autant l’exode vers nos métropoles déjà congestionnées. Près de la moitié de notre production nationale est issue de petites exploitations. Grâce au grand nombre de ces exploitations paysannes, cette culture alimentaire des pays du Sud contribue aussi à lutter contre la pauvreté.
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Les liens pédagogiques
Le saviez-vous?
• Indonésiens du début du XXIe siècle, nous maîtrisons l’inflation, le déficit budgétaire, les taux bancaires et les investissements nationaux et internationaux. Aussi, pourrions-nous avoir l’ambition collective de passer au niveau de l’économie mondiale du dixième rang en 2014 au septième en 2030. • L’huile de palme ajoute une contribution hautement significative à nos recettes d’exportation. Elle est pour nous une source de devises plus importante que le pétrole. • Certains exploitants expérimentés indonésiens et malais exportent leur savoir-faire en créant des exploitations en Afrique comme en Amérique du Sud.
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LES PRODUCTEURS Soyons lucides Conscients des dégâts irrémédiables causés par des implantations excessives aux dépens de forêts, des gaz à effet de serre dus aux feux de forêts et à l’exploitation incontrôlée des tourbières, de l’effort encore insuffisant apporté à la considération des populations autochtones, nous savons aussi que la production à grande échelle d’huile de palme répond à la demande mondiale de besoins en huiles végétales. Tout en étant attentif à l’optimisation de la productivité et à la réduction des impacts négatifs sur l’environnement et sur les hommes, nous ne voyons pas pourquoi nous priverions notre pays souverain d’un moteur de croissance bénéfique pour nos populations et répondant aux besoins légitimes d’autres pays en demande de corps gras d’origine végétale. Evidemment, le modèle de développement parfaitement adapté aux besoins du pays reste à inventer. Les histoires à succès importées dans d’autres pays dans d’autres contextes, pour intéressantes qu’elles soient, ne survivraient pas à un simple copier/coller. Ainsi, l’éradication de la pauvreté rurale est-elle un objectif qui n’a pas toujours été atteint malgré une politique volontariste affirmée, et ce qui vaut pour nos pays vaut aussi pour d’autres. Il reste aussi d’importants progrès à faire dans l’intégration des communautés locales comme dans les choix de vie et dans la redistribution des richesses. Le palmier à huile est au carrefour de nos choix de développement. Faut-il impliquer les citoyens dans les options sociétales? Quelle part faut-il donner au public par rapport au privé ? Un Etat responsable peut-il soutenir une option unique de tout privatiser dans un cadre ultralibéral ? Comment renforcer la participation des Etats dans des structures fédératives comme la RSPO (Round table on Sustainable Palm Oil) car on a peut-être sous-estimé l’importance des options politiques des grands Etats producteurs ? Car les Etats souverains, ici comme ailleurs, ont la responsabilité du cadastre, de l’octroi des concessions, de l’intégration de recommandations sous forme de lois et décrets et la mission incontournable de faire respecter les lois et de punir les contrevenants. L’importance économique de la filière de l’huile de palme a des incidences politiques par le nombre d’acteurs nationaux concernés, les effets transfrontaliers quand les fumées intéressent la sous-région, les bilans carbone au plan international et la protection de grands mammifères devenus rares. Elle entre même dans le champ de la coopération intercontinentale comme tant d’autres productions humaines.
Nigeria © Tristan Durand-Gasselin
Ni plus, ni moins.
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Le point de vue d’un grand planteur vertueux Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Des erreurs surmontées aux comparaisons Aucune entreprise dans un monde de plus en plus interconnecté ne peut vivre trente ans sans faire d’erreur, ni se donner les moyens de les corriger. Sa longévité repose sur les lois de l’offre et de la demande et sa survie, ou mieux son développement, prend nécessairement en compte les attentes du marché et la satisfaction des besoins exprimés par nos acheteurs.
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Le saviez-vous?
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• On reproche souvent aux planteurs de cultiver au détriment de la forêt mais l’ agriculture sur brûlis était traditionnellement pratiquée par les habitants autochtones, sur de faibles surfaces, il est vrai. • On se demande parfois si certains contestataires étrangers aux valeurs culturelles de nos pays n’ont pas trouvé un supplément d’audience en critiquant sévèrement les grands planteurs de palmier à huile. • Tout accroissement d’une demande de 10 millions de tonnes d’huiles végétales doit être couverte par un accroissement de surface de 25 millions d’hectares s’il s’agit du soja, de 20 millions d’hectares pour le tournesol, de 15 millions d’hectares pour le colza et de « seulement » 2,5 millions d’hectares pour le palmier à huile. • Pour mémoire, un million d’hectares correspond à un carré de 100 kilomètres de côté.
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Deux caractéristiques remarquables distinguent notre production d’oléagineux de beaucoup d’autres : environ 40% de la production mondiale viennent de petits planteurs villageois et cette filière ancrée au Sud, non seulement pour satisfaire aux besoins écologiques de la plante, mais aussi à cause des besoins exprimés par les pays émergents ou en développement, à commencer par ceux des pays producteurs et exportateurs des huiles fournies par le palmier, comme l’Indonésie et la Malaisie.
Cameroun © Tristan Durand-Gasselin
Les liens pédagogiques
Tout d’abord, recadrons le thème du palmier à huile par rapport aux autres grandes cultures oléagineuses. Cette plante de rapport qui fait l’objet de controverses de bonne et de mauvaise foi depuis une dizaine d’années couvre environ 15 millions d’hectares de terres (auxquelles s’ajoutent 3 millions d’hectares si l’on compte les palmeraies «naturelles aménagées» du Nigeria, soit 7% seulement des surfaces agricoles dédiées à l’obtention d’huiles et graisses. Le soja occupe à lui seul 61% du reste, le colza 18%, le tournesol 14%. Sur cette fraction de terres agricoles dévolues au palmier, l’huile de palme et l’huile de palmiste couvrent 39 % des besoins mondiaux, soit environ 175 millions de tonnes par an. Ce sont des faits incontournables. Depuis 2001, la production a été multipliée par 2,5.
LES PRODUCTEURS Le changement choisi Du fait de notre expérience, il est certain que les conditions d’implantation des grandes plantations ont substantiellement changé. Au début des années 1960, le gouvernement du pays indépendant où nous intervenons offrait facilement des concessions forestières comme il le faisait tout autant pour d’autres activités comme l’exploitation des minerais ou pour des plantations nouvelles d’hévéa. Nous en tirions très honnêtement deux avantages : un revenu d’amorçage de la plantation en faisant extraire et vendre par des forestiers les essences les plus appréciées sur le marché du bois et un sol fertile favorable à la pousse des jeunes plants en sortie de pépinière. Nous admettons avoir utilisé le feu pour détruire le couvert végétal résiduel, étant premiers utilisateurs du fertilisant naturel que constituent les cendres laissées sur place. Dans les années 2000, nous avons fait évoluer nos pratiques, d'une part car nous avons pris la mesure des conséquences écologiques et humaines de ces pratiques agricoles pionnières, et d’autre part parce que nous avons appliqué d’autres pratiques moins dommageables pour l’environnement naturel qui permettaient d’accroître notre production à surfaces plantées égales : matériel végétal sélectionné, gestion optimale des intrants, mise en place de sessions d’information et de formation chez les petits planteurs associés à notre entreprise, gestion maîtrisée des effluents d’huilerie et j’irai même jusqu’à citer le respect de la chartre formulée par la RSPO et reprise pour partie pour l’élaboration de nos standards nationaux (ISPO en Indonésie, MSPO en Malaisie). Nous avons également pu mesurer l’impact économique de nos bonnes pratiques agricoles. Lorsque l’on sait que les dépenses en engrais constituent plus de la moitié des frais d’exploitation d’une plantation, toute mesure servant à optimiser les apports de fertilisants, majoritairement issus de la pétrochimie ou de sources naturelles à l’avenir limité, a un impact économique immédiat.
Nigeria © Tristan Durand-Gasselin
Certaines plantations vertueuses incorporent désormais plus de 15% de compost issu du recyclage des effluents dans leurs apports d’engrais, réalisant ainsi une économie considérable.
Cameroun © Tristan Durand-Gasselin
Des objectifs bien programmés
Notre premier objectif est d’augmenter la productivité de notre plantation pour la faire passer de 6 à 8 tonnes par hectare dans les prochaines années, sachant que le potentiel maximal doit se situer aux alentours de 18 tonnes. Cet objectif ne pourra être atteint qu’au terme de trois étapes : achat de semences certifiées bien adaptées aux conditions locales et aux débouchés, gestion raisonnée et prudente de la fertilisation, recyclage systématique des effluents. Il a fallu pour cela mieux former et responsabiliser le personnel permanent et occasionnel, et soutenir plus efficacement le réseau des petits producteurs en assurant une formation d’accompagnement destinée à augmenter leurs productivité, donc leurs revenus. Il ne faut pas perdre de vue l’intérêt de fidéliser le personnel des plantations en améliorant constamment l’accès à la santé, à l’éducation et aux loisirs dans et autour de la plantation. Une meilleure reconnaissance sociale et sociétale de notre contribution à la production d’huiles utiles et parfois indispensables dans l’agroalimentaire et l’agro-industrie est aussi pour notre filière un objectif en soi. Le tout est géré en gardant un œil ouvert sur le potentiel offert par les agrocarburants car nos ingénieurs savent obtenir des produits utilisables pour tous les types de moteur à combustion, en lieu et place des dérivés du pétrole. 18
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La suite du point de vue d’un grand planteur vertueux
Un bassin de récolte couplé à une usine L’un des systèmes d’exploitation du palmier à huile qui nous semble promis à un bel avenir associe, autour de l’usine d’extraction, non seulement notre périmètre industriel (le noyau) mais aussi un entourage de petites exploitations que nous y avons associé (le cytoplasme). Comme une cellule en bonne santé, l’association entre le noyau et le cytoplasme est durable et permet un échange équilibré de ressources et de savoirs. Un bassin de récolte fluide et organisé est indispensable pour contourner des contraintes biologiques du palmier à huile. En effet, les fruits frais ont tendance à s’oxyder sous l’action de lipases peu de temps après qu’ils aient été cueillis. Pour préserver les propriétés de l’huile, on a donc tout intérêt à raccourcir le temps séparant la récolte de l’extraction de l’huile avec des moyens technologiques performants.
La formation des hommes pour commencer Ainsi avons-nous pris un certain nombre de mesures concrètes pour soutenir la formation du personnel avec des programmes adaptés à tous les niveaux de qualification et un système d’encouragement et de suivi de tous nos petits planteurs disséminés autour de notre périmètre. J’ai personnellement soutenu plusieurs idées avancées comme d’acquérir des parts dans un système de transports adapté aux besoins de la filière, de financer la construction d’écoles, d’assurer les salaires des enseignants, de proposer des bourses pour les étudiants dont les familles travaillent pour la compagnie, des clubs de sports pour les jeunes, de construire des dispensaires et des hôpitaux avec docteurs en médecine et infirmiers et de mettre en place une assurance accidents-maladies-décès, sans oublier l’ouverture d’une maison de retraite pour nos ouvriers les plus âgés. Grâce à l’appui du conseil d’administration, nous avons pu aussi garantir des salaires supérieurs au standard minimum du pays, créer une instance particulière de gestion des conflits avec les locaux, encourager le recyclage systématique des déchets de récolte et des produits d’extraction sous forme d’engrais ou de sources d’énergies renouvelables et utilisables sur place.
Le maintien d’oasis et de couloirs de biodiversité Dans des zones déconseillées pour la mise en culture comme les tourbières, les forêts inondables ou implantées sur des pentes raides, ou en bord de rivière, nous avons créé des réserves naturelles sur environ 5% de nos parcelles dans lesquelles la biodiversité est étudiée par des étudiants de l’université nationale. Comme la question est complexe, nous allons prendre des avis en provenance de spécialistes de la biodiversité native ou anthropisée pour définir avec eux les aires à sauvegarder en forêts et la taille des couloirs forestiers à maintenir entre elles.
Les liens pédagogiques
Nous recourrons s’il le faut aux compétences d’une organisation environnementaliste internationale ainsi qu’à un bureau d’études pour poser notre candidature à une certification RSPO de plantations de palmier à huile durable, peut-être même biologique sur des parcelles d’essai. Nous avons engagé des discussions préliminaires avec l’université nationale d’Indonésie pour créer un centre de recherches d’accompagnement que nous pourrions accueillir sur notre concession.
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Pour le reste Nous avons rallié la RSPO dès sa création et avons pris des engagements qui seront mis en œuvre progressivement comme une unité pilote de valorisation de la biomasse, une démarche globale conduisant à un renforcement de la lutte biologique contre les maladies et les prédateurs, un suivi de l’empreinte carbone et du cycle de vie, une instrumentation des indicateurs de développement durable.
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Une image à parfaire dans le grand public Il manque un volet de communication efficace pour combattre l’image péjorative qu’ont forgé de notre filière certains groupes de pression économiques, environnementalistes, indigénistes, hygiénistes et contestataires, depuis une dizaine d’années. Le grand public a mémorisé une image négative sur une base émotionnelle et il faut corriger cette image en montrant nos actions concrètes. Un consultant devrait m’aider à définir les mesures correctrices à prendre, peut-être en rédigeant toute une série d’articles contrefeux avec des écritures différentes selon les publics cibles visés. Je serais assez partisan pour ma part du soutien d’actions éducatives dans le premier cycle de la formation des plus jeunes dans les écoles, en prévoyant des dégustations gratuites de produits alimentaires phares contenant de l’huile de palme.
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On ne peut quand même pas contester que le palmier à huile fait vivre une soixantaine de millions de personnes dans le monde dont 25 en Indonésie par exemple. La pauvreté rurale a reculé globalement dans les pays du Sud à palmier à huile, qui consomment une grande partie de leur production. Il faut naturellement donner des réponses argumentées à chacune des critiques qui nous ont été faites, certaines fondées, d’autres de mauvaise foi. J'espère que le journaliste consultant pressenti saura être à la hauteur des enjeux. Sa réponse ne devrait plus tarder car mon informateur m'a dit qu'il se cherchait un avenir.
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Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
Costa Rica © Tristan Durand-Gasselin
LES PRODUCTEURS
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Le point de vue d’un producteur de semences certifiées Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le saviez-vous
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• Tous processus confondus, les progrès de la génétique chez le palmier ont entraîné un gain de productivité à l’hectare de 1% par an depuis plus de cinquante ans. • Le planteur a donc tout intérêt à bien choisir ses nouveaux plants pour rajeunir sa plantation, d’autant que son choix a des conséquences économiques pour les 25 années suivantes. • Les nouvelles variétés apportent non seulement une meilleure productivité et une plus faible croissance en hauteur, mais aussi une tolérance avérée aux trois maladies principales du palmier à huile (fusariose en Afrique, Ganoderma en Asie et en Afrique, pourriture du cœur en Amérique Latine). • Il est impossible de discerner une semence ou un plant sélectionné d’un matériel équivalent tout-venant ramassé sous un palmier. • La certification des réseaux de pépiniéristes distribuant les plants issus de semences améliorées est une étape primordiale pour s’assurer que tous les planteurs, petits ou grands, ont accès aux derniers progrès de la génétique.
La première condition de l’intensification écologique
Les liens pédagogiques
Mon métier est d’améliorer la qualité des semences du palmier à huile par rapport à des critères choisis par les planteurs : certains voudront des fruits plus gros ou se conservant mieux après maturation, d’autres des plantes plus résistantes aux maladies, à l’excès d’humidité ou à la sécheresse ou cultivables en altitude. Autant dire que le cahier des charges varie selon les demandes. Mais il m’arrive aussi de suivre la descendance d’hybrides venant de souches géographiques différentes et de remarquer des propriétés nouvelles comme la résistance au vent, la réduction de croissance en hauteur ou un enracinement plus profond, qui ne manquent pas d’intérêt. Ces caractères sont alors intégrés dans les programmes de sélection.
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Choisir des semences certifiées Dans le schéma idéal, seules les variétés améliorées dont les graines sont certifiées devraient être proposées sur les marchés. Mais lors de mes voyages en brousse, j’ai souvent rencontré des pépinières clandestines qui jouent sur le fait qu’il n’existe pas de différence visuelle entre un plant amélioré et un plant tout-venant à un prix de vente moins élevé. La petite économie réalisée à l’achat fait prendre un risque considérable pendant les deux décennies suivantes car l’exploitant va perdre de l’argent. Les perdants sont souvent des petits planteurs fraîchement reconvertis et encore ignorants de l’existence de points de vente de graines certifiées. Les grosses exploitations soucieuses de la durabilité de leur activité ne prennent pas ce genre de risques. Elles s’approvisionnent aux bonnes sources (stations de recherches, producteurs privés autorisés) ou bien produisent elles mêmes leurs semences hybrides dans des champs semenciers dédiés, soutenus par des essais génétiques. De plus, elles n’hésitent pas à négocier un suivi technique pour faire germer les graines dans des conditions thermo-hydriques optimales, surveiller les pépinières et le repiquage au champ. La sélection génétique suppose l’intervention de plusieurs acteurs pour être conduite à bon terme : il faut savoir échanger en sécurité des graines et du pollen bien identifiés, mettre en place et suivre en continu d’immenses blocs d’essais génétiques et les champs semenciers en rapport, s’inscrire dans un partenariat international sur le long terme et s’assurer de l’existence et de relations durables avec un réseau de pépiniéristes agréés et contrôlés régulièrement. Les approches les plus récentes issues des biotechnologies sont désormais intégrées à la production des semences pour contrôler le lignage par tests ADN, propager in vitro les meilleures variétés ou suivre la présence d’un gène favorable dans une descendance. Le décryptage récent par une équipe internationale de la séquence génétique du palmier a été une avancée décisive pour le développement des applications biotechnologiques. 21
LES PRODUCTEURS L’expérience et les réseaux Afin de valoriser les recherches qui ont permis de créer du matériel végétal de grande qualité et dans la prolongation historique des activités de l’Institut de Recherche sur les Huiles et Oléagineux (IRHO) pendant plus d’un demi-siècle, le CIRAD a créé en 2009 une filiale de droit privé, PalmElit® SAS, en association avec la Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux, Sofiprotéol. PalmElit® propose des variétés résistantes à la sécheresse et qui garantissent une production de régimes et d’huile exceptionnelle, stable et durable. D’autres semences résultant d’une hybridation entre le palmier africain E. guineensis et le palmier Sud-Américain E. oleifera apportent une résistance à la Pourriture du coeur. Par des échanges permanents entre les utilisateurs finaux, le terrain et le laboratoire, PalmElit® parvient à diversifier son offre en mobilisant les dernières avancées de la recherche. Membre de la RSPO depuis fin 2009, PalmElit® recommande l’accroissement de la productivité des superficies plantées, la réduction des pressions exercées sur les zones forestières, la diffusion de matériel végétal résistant aux maladies pour rendre les investissements profitables et durables, l’assurance d’un revenu régulier et constant pour les petits et les grands planteurs, et le respect des aspects sociaux et environnementaux.
Indonésie © Alain Rival
Côte d’Ivoire © Alain Rival
Colombie © Axel Labeyrie
Ces avancées résultent d’une expérience unique dans la conception et la gestion d’ expérimentations en vraie grandeur et en réseaux, avec l’appui de nombreux partenaires investis dans les domaines de la recherche comme du développement, de droit public, de droit privé comme de droit international.
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Nigeria © Tristan Durand-Gasselin
Le point de vue d’un ouvrier agricole débutant
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Un vrai mieux Depuis que j’ai réussi à devenir ouvrier agricole dans une grande plantation de palmiers à huile, ma famille vit beaucoup mieux. Mon statut est bien meilleur que celui des ouvriers sous-traitants. Les ouvriers réguliers les plus anciens ont accès à des logements de fonction et bénéficient de services médicaux gratuits. Ils inscrivent leurs enfants à une école implantée à côté de la plantation. L’instituteur est payé par la compagnie.
Les liens pédagogiques
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Le saviez-vous?
• Les ouvriers agricoles des plantations de palmier à huile vivent mieux que leurs parents et espèrent que leurs enfants pourront faire des études pour jouir définitivement d’une vie meilleure. • L’ascenseur social lubrifié à l’huile de palme a parfois si bien marché que certains projets de développement villageois peinent maintenant à trouver des pionniers de deuxième génération. Les enfants de planteurs sont maintenant pharmaciens, avocats ou ingénieurs. • Certains ouvriers plus âgés ont le projet de devenir petits planteurs lorsqu’ils ont des terres. Il leur faudra attendre au moins cinq ans avant de pouvoir espérer des revenus. • Beaucoup d’entre eux se renseignent sur l’existence de coopératives prospères car ils devinent que s’ils restent isolés, ils ne seront pas toujours en bonne position pour discuter du prix des fruits de palme et évacuer leur production vers l’huilerie.
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Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
Comme je n’ai plus le temps de faire l’entretien de mes parcelles familiales, je les loue à un voisin qui est demandeur en attendant que mes garçons soient assez grands pour prendre la relève. Je gagne en effet 10 fois plus par mois que lorsque j’étais petit producteur de riz. Avec ma bicyclette toute neuve, je fais facilement le parcours de mon domicile à mon lieu de travail.
LES PRODUCTEURS Dans la journée Mes activités sont choisies et contrôlées par un chef d’équipe expérimenté. Il m’a d’abord confié le nettoyage des abords immédiats de chaque palmier sur un rayon d’au moins 1,5 mètre puis le rabattage de la couverture végétale envahissante et l’élimination des mauvaises herbes. Je vais être aussi associé à l’élagage des palmiers pour avoir accès aux fruits regroupés en régimes. Ma prochaine tâche sera d’entretenir le « sentier des souris », un petit chemin de visite qui permet aux équipes chargées de la cueillette de progresser facilement entre les rangées de palmiers, car c’est par ce sentier que sont transportés les régimes mûrs, une fois récoltés.
Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
L’ambiance est agréable même si le travail ne laisse aucun moment pour une petite pause, à l'exception du repas de midi que nous partageons au réfectoire de l’entreprise. Les après-midi sont un peu plus difficiles que les matinées, car il fait chaud et humide dans les bottes de caoutchouc qu’on nous invite à garder aux pieds et sous le casque en plastique. Les gants épais nous protègent des épines acérées qui entourent les régimes de fruits. Sécurité oblige : le médecin inspecteur passe parfois pour vérifier que nos équipements sont conformes aux recommandations.
La formation à d'autres activités Dans quelque temps, je vais suivre des ateliers de formation au bon usage des fertilisants, des herbicides et des insecticides. Mon chef d’équipe pense que je dois aussi apprendre à utiliser correctement les appareils d’épandage et à respecter les doses prescrites par les ingénieurs. Je devrais savoir manipuler les outils de coupe comme le ciseau étroit, le ciseau large, la machette et le couteau malais. Chez les palmiers jeunes, les pédoncules des régimes sont coupés d’un coup de ciseau. Chez les palmiers plus hauts, les régimes sont libérés en utilisant un couteau malais emmanché sur un long bambou ou une perche en aluminium. Il est aussi possible de grimper sur les palmiers comme le font des récoltants africains. Couper ne suffit pas, il faut aussi apprendre à éviter les 30 kg de fruits en grappe qui vont tomber. Dès que je maîtriserai les différentes étapes d’un contrôle qualité très strict, je pourrai peut-être devenir chef d’équipe puisque je sais lire et écrire. La fonction de fécondateur pour la production des semences est hors de ma portée car mon employeur ne s’intéresse pas à cette activité.
En attendant une promotion Dans l’attente de ces formations pratiques, je resterai au sol pour assurer le transport bord-champ des régimes, à moins que des engins tractés par des animaux ou motorisés puissent accéder au plus près des palmiers sans s’y embourber, ni compacter le sol. Lorsque la pluie tombe drue pendant la mousson, nous nous abritons en petits groupes en faisant attention aux serpents. C’est un bon moment pour nous soulager des équipements, échanger de menues nouvelles, respirer un air plus frais et profiter du plaisir d’être ensemble.
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Le point de vue d’un insecte pollinisateur efficace
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le saviez-vous?
Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
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• Pour devenir un agent pollinisateur du palmier à huile, il ne suffit pas d’être attiré par l’odeur anisée des fleurs mâles à maturité comme le sont beaucoup d’espèces de mouches, d’abeilles domestiques ou sauvages, de pinceoreilles, de papillons et même de coléoptères. • Il faut savoir fixer le pollen sur son corps puis visiter les fleurs femelles qui émettent une odeur similaire. Ce portage se fait en toute saison et sur les deux espèces de palmier à huile. • Leurs hybrides attendent encore des insectes candidats à cette fonction. • Le pollinisateur est récompensé par des sécrétions légèrement sucrées, même si celles-ci ne le sont pas assez pour des abeilles et des bourdons.
Des joies et des peines
Les liens pédagogiques
Nous, insectes pollinisateurs du palmier à huile, devons disposer de poils d’un diamètre de 20 à 30 micromètres pour que s’y fixent les petits grains de pollen à surface plutôt lisse.
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Comme la durée de vie d’un grain de pollen est de l’ordre de cinq jours, nous devons circuler rapidement des fleurs mâles aux fleurs femelles, ce qui est rendu possible par le palmier lui-même qui a prévu que les fleurs femelles matures émettent une odeur anisée similaire donc non exactement identique, en relais de celle des fleurs mâles. Il n’est d’ailleurs pas certain que ces odeurs soient exactement les mêmes. Notre travail est facilité par le fait que les stigmates des fleurs femelles arrivant à maturité secrètent un liquide gluant très utile pour retenir les grains de pollen que nous transportons.
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Inflorescence femelle
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LES PRODUCTEURS Un charançon bien placé Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
De mon point de vue de charançon curculionidé du genre Elaeidobius et de l’espèce kamerunicus, la pollinisation du palmier à huile ne peut être laissée ni au vent, bien que certains aient pensé que les grains de pollen pouvaient être disséminés par lui, ni aux hommes qui pratiquaient la pollinisation assistée, ni aux insectes butineurs occasionnels et amateurs dans le métier, car elle doit avoir lieu avec un taux élevé de réussite sous peine d’obtenir des régimes vides de fruits non fécondés. Ma coévolution avec le palmier africain fait qu'il constitue mon habitat favori dans son aire d’origine et qu'il me permet d'assurer tous mes besoins biologiques. Il faut croire que je suis toujours très attiré par les acides organiques et leurs esters d’éthyle comme le lactate d’éthyle, le 2-hydroxy3-méthylbutanoate d’éthyle, l’undécnoate d’éthyle et le 3-méthylthiopropanol, sans parler du 2-phényléthanol ! Ma fonction principale en Afrique tropicale humide est d’assurer la pollinisation croisée du palmier à huile, en échange de quoi il me permet de réaliser sur lui ou à proximité immédiate tout mon cycle biologique, essentiellement sur les inflorescences mâles. C’est un accord avantageux pour les deux parties qui fonctionne depuis des millénaires. En retour, je suis devenu le pollinisateur privilégié du palmier à huile africain de bonne venue, même si je suis de petite taille et discret. En 1981-82, j’ai fait connaissance avec l’Asie du Sud-Est pour remplacer les hommes qui réalisaient la pollinisation assistée, car aucun insecte local ne pouvait prétendre au statut de pollinisateur exclusif. Mon introduction réussie a fait économiser 150 millions de dollars US par an aux planteurs, à la fois par des économies de main-d’œuvre et grâce à une meilleure production de fruits gorgés d’huile. À ma connaissance, je suis resté fidèle à ma plante hôte et n’ai mis en danger aucune autre espèce végétale du cru. Dernièrement, j’ai appris que des coléoptères cousins appartenant à notre famille taxinomique des curculionidés spécialistes du palmier amazonien Elaeis oleifera font l’objet de recherches approfondies pour les attirer vers l’hybride interspécifique qui manque d’auxiliaires naturels pollinisateurs. J’espère qu’ils sauront réussir le portage du pollen aussi bien que nous. Charançon Aleidobius kamerunicus sur inflorecence mâle d’Elaeis guineensis
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Le point de vue d’un pathogène opportuniste
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Des pépinières hospitalières Que nous soyons des bactéries, des champignons du sol dits telluriques, de la moisissure disséminée en surface, des nématodes ou des protozoaires flagellés, nous avons une préférence pour vivre aux dépens des semis du palmier à huile dans les pépinières sauvages ou contrôlées.
Thaïlande © Tristan Durand-Gasselin
Les arrosages fréquents sous une lumière atténuée dans une ambiance chaude créent un milieu qui est très favorable à notre multiplication, d’autant que les plantes-hôtes très jeunes développent moins de mécanismes de défense que les plus âgées ou ont plus d’attraits pour nous.
Les liens pédagogiques
Le saviez-vous?
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• Pour un œil exercé, le port affaissé d’un palmier à huile attaqué par des pathogènes traduit sa souffrance. • La mondialisation des échanges de pollens, de graines et d’agronomes augmente considérablement les risques d’introduction involontaire de pathogènes pouvant affecter gravement le rendement en huile et la longévité des plantations. • Il faut encourager les prospections dans l’aire d’origine du palmier à huile et la découverte de gènes de façon à mieux exploiter de nouvelles résistances génétiques aux pathogènes.
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Curvularia
LES PRODUCTEURS La dispersion assistée Notre dissémination sur l’hôte que constitue le palmier à huile se fait parfois grâce à des insectes vecteurs involontaires comme certains insectes amateurs de sève que sont les punaises et les cicadelles, ou par la contamination de la terre, ou encore par les mains des hommes chargés de l’entretien des jeunes plants. Dans certains cas, l’eau et le vent diffusent les spores de bactéries comme celles de champignons.
Cameroun © Tristan Durand-Gasselin
Côte d’Ivoire © Tristan Durand-Gasselin
Dans tous les cas, les maladies dont nous sommes les causes affectent la croissance de la plante hôte, diminuent l’efficacité du système racinaire, gênent la montée de la sève et altèrent la fonction photosynthétique. Les feuilles d’un plant affaibli se dessèchent, deviennent cassantes ou se nécrosent. Le sujet malade peut devenir contaminant pour ses voisins.
Ganoderma
Fusarium Ganoderma
Des leçons à retenir Chaque implantation nouvelle peut faciliter la prolifération d’un pathogène à partir d’organismes végétaux indigènes, des cultures précédentes comme d’autres palmiers sauvages ou cultivés. Comme il n’est pas envisageable de prévoir des traitements massifs onéreux et polluants comme les fongicides pour lutter contre des pathogènes peu accessibles, la priorité des hommes est de détecter précocement toute maladie nouvelle dont le caractère épidémique est à craindre dans des plantations villageoises ou industrielles. Globalement, la situation phytosanitaire est à peu près stable, chaque continent élaicole abritant une ou deux maladies endémiques, mais elle reste fragile, du fait de l’intensification et de l’extension des pratiques monoculturales. De notre point de vue de pathogènes, l’homme nous a mis en défaut sur trois fronts en exploitant les résistances naturelles de certaines variétés de palmiers : la Fusariose, le Ganoderma et certaines Pourritures du cœur. 28
Le point de vue d’un prédateur déterminé
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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L’écosystème du palmier à huile S’il utilise certains de ses hôtes comme pollinisateurs ou disséminateurs de ses graines en les attirant par des odeurs particulières, s’il semble même capable d’appeler à son secours des ennemis naturels des insectes prédateurs qui lui causent des lésions, le palmier à huile accepte aussi toute une population d’animaux qui trouve sur lui ou sous lui sa nourriture ou s’en sert comme perchoir ou abri. Beaucoup d’entre nous classés parmi les prédateurs par les hommes, avons en réalité une action négligeable sur la production en huile du palmier. Certains des nôtres le soulagent même de nombre de ses parasites ou prédateurs. Il reste vrai que plusieurs d’entre nous altérons la santé du palmier à huile et affectons en conséquence ses capacités de production en fruits. Mais, globalement, une forme d’équilibre avait été trouvée dans les aires africaines d’origine au fil des millénaires entre le palmier à huile et tous les organismes vivant près de lui.
Il est venu de loin Dans les pays en bordure du Golfe de Guinée, nous, prédateurs avérés, attaquons le palmier à huile au niveau des racines, du stipe, des folioles et des fruits. Nos groupes d’insectes les plus investis sont un petit coléoptère dont les larves minent les folioles comme Coelaenomenodera minuta, des chenilles colorées et urticantes de papillons et des chrysomèles sur les feuilles, des coléoptères de la famille des curculionides sur le stipe et les fruits, et d’autres coléoptères de la famille des galérucinés sur les racines auxquelles s’intéressent aussi des chenilles d’une autre famille de papillons, les pyrales qu’on trouve aussi en Asie du Sud-Est.
Les liens pédagogiques
Les prédateurs amérindiens
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En Amérique latine, les feuilles des palmiers à huile sont victimes de chenilles vivant en colonie ou isolément, de curculionidés dissimulés dans un fourreau fait d'excréments, de fourmis coupeuses de feuilles pour alimenter leurs cultures de champignons, de punaises, d'acariens, de scarabées creusant le stipe, comme de lépidoptères s'attaquant aux régimes de fruits.
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Le saviez-vous?
• Environ 15% de la biodiversité forestière native se retrouve dans les plantations industrielles de palmier à huile. Les serpents et les rongeurs tirent généralement beaucoup d’avantages des palmeraies et peuvent y pulluler. En revanche, les gros mammifères s’en éloignent ou en sont chassés. • En Asie du Sud-Est, les rats avaient tendance à envahir les plantations jusqu’à ce que l’introduction de chouettes effraies régule la population des rongeurs pour la ramener à un niveau économiquement acceptable. • Le passage d’une distribution irrégulière et aléatoire du palmier à huile à l’état sauvage à une distribution régulière dans les plantations change la nature de l’équilibre sanitaire. On peut craindre en effet une dissémination épidémique d’un prédateur qui y trouverait des conditions idéales pour y accomplir tout son cycle biologique.
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LES PRODUCTEURS De nouveaux ravageurs asiatiques En Asie du Sud-Est, des chenilles urticantes à couleurs vives se nourrissent des feuilles, d’autres vivent dans des fourreaux faits de débris végétaux et d’excréments. Des sauterelles pondent dans le parenchyme foliaire. Des scarabéidés et des curculionidés creusent des galeries dans le stipe. Des pyrales s’acharnent sur les racines et les fruits. Les hommes nous ont repérés, décrits, donné un nom binomial, le premier de genre, le second d’espèce. Ils connaissent assez bien notre cycle biologique mais peinent à nous atteindre car beaucoup d’entre nous se glissent dans la plante ou opèrent en dessous du niveau du sol.
Colombie © Tristan Durand-Gasselin
Beaucoup des nôtres ont été véhiculés par les hommes à leur insu et se sont acclimatés dans des régions nouvelles pour nous, spécialement en Asie du Sud-Est. Nos effectifs ont été renforcés sur place par des ravageurs originaires de planteshôtes locales comme des palmiers asiatiques indigènes, par exemple.
Des vertébrés peu dangereux pour la culture En vérité, les dommages imputables aux vertébrés sont véritablement peu importants par rapport à ceux infligés par les microorganismes et les insectes, la plupart des animaux chassés par la mise en plantation n’y revenant pas. On peut citer pêlemêle comme prédateurs intermittents et locaux certains rongeurs, des porcs-épics, des serpents, des varans, des rapaces nocturnes, des petits félidés, de grands primates, des éléphants, des cochons sauvages, des singes de types macaque, un vautour palmiste, un écureuil palmiste, des perroquets, l’étourneau des Philippines, le mainate, les tourterelles, des corbeaux, des rats fouisseurs. Mais il n’est pas nécessaire de tuer tous ces locataires témoins d’une nouvelle forme de biodiversité en milieu fortement anthropisé pour espérer un gain significatif de production en huile. Les déserts biologiques sont toujours inquiétants, de notre point de vue. Equateur © Tristan Durand-Gasselin
Sénégal © Françoise Chirara
Indonésie © Françoise Chirara
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Le point de vue d’un grand industriel raffiné
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Deux sources d’huile dans un seul fruit Le palmier à huile est la seule plante à fabriquer deux huiles différentes dans un seul fruit. Nous devons tenir compte de cette particularité d’autant que ces huiles, localisées dans des organes différents du fruit mûr, ont des propriétés physico-chimiques distinctes et ne sont pas utilisées pour les mêmes applications. Cette caractéristique oblige à recourir à des processus d'extraction et de purification adaptés à chacune de ces sources et à les traiter indépendamment. L'huile de palme, de couleur rouge-orangé et à odeur de fleur de violette, se trouve dans la pulpe fibreuse. Elle représente 45 à 60 % de son poids en huile et 90% de la production d’une palmeraie. En plantation industrielle, le rendement annuel atteint 5 000 kg d’huile par hectare. Elle contient de l’acide palmitique (44%), de l’acide oléique (39%), de l’acide linoléique (10%), de l’acide stéarique (5%), et des acides laurique et myristique (2%).
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Une question d’échelle À partir de 1000 kg de régimes de fruits mûrs par heure, nous conseillons un dispositif adéquat d’extraction et de purification de l’huile de type industriel. Selon l’approvisionnement, la taille des installations proposées va d’une mini-usine semi-industrielle livrable en quatre containers de 6 mètres de long chacun, à une installation industrielle couplée à une grande plantation ou à un site de raffinage et de transformation. Comme nous avons aussi des liens avec de petites communautés de planteurs sous contrat qui doivent traiter 600 à 800 kg de régimes par heure, nous leur proposons un ensemble de machines pré-assemblées transportables dans un container de 6 mètres de long. Après installation sur une dalle de béton surmontée d’un toit en tôle, quelques jours suffisent pour rendre l’unité opérationnelle. Les contacts que nous avons au niveau villageois révèlent qu’un simple cuiseur et une presse motorisée animée généralement par un moteur diesel couplé à un décanteur suffisent pour traiter environ 350 kg de régimes de fruits à l’heure. En Afrique, les petits planteurs indépendants utilisent de multiples dispositifs pour entraîner les presses, basés sur l’énergie animale, humaine ou même motocycliste.
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Le saviez-vous?
Les liens pédagogiques
L’huile de palmiste est stockée dans une proportion de 48 à 52%, dans l’amande protégée par une coque très dure. Elle se présente sous forme de graisse jaune à la température de 15°C et ne devient liquide et de couleur blanche qu’au-delà de 25 à 30°C. Elle est composée d’acide laurique (48%), d’acide myristique (16%), d’acide oléique (15%), d’acide palmitique (8%), d’acide linoléïque (3%), et des acides caprique et caprylique, composition qui la rapproche de l’huile de noix de coco. Elle est utilisée pour la fabrication d’huiles de cuisson en mélange à d’autres huiles, de margarine, de graisses à chocolat, de savons, de cosmétiques et en oléochimie.
• Le palmier à huile produit deux huiles différentes, l’huile de palme et l’huile de palmiste. • Dans le traitement de l’huile de palme, le processus d’extraction est distinct du processus de raffinage, dans le temps comme dans l’espace. • Les huiles traitées par les ensembles agro-industriels sont souvent d’une qualité supérieure aux huiles produites à l’échelle artisanale, car toutes les précautions sont prises pour éviter une dégradation qualitative des huiles par acidification en réduisant le temps entre la coupe du régime et l’extraction séparée des deux huiles. • En outre, les huileries de grande capacité sont faciles à contrôler par les systèmes de certification car leurs activités sont bien connues et localisées. • L’huile de palme est une huile vierge obtenue par pression, sans adjuvant, ni solvant. • Un périmètre agro-industriel bien géré est toujours excédentaire en énergie.
LES PRODUCTEURS Des huiles de qualité à séparer Chaque raffineur maîtrise l’ensemble des processus qui permettent de transformer les huiles brutes en huiles adaptées aux différents usages pour lesquels il existe un marché. Sans entrer dans le détail des opérations, j’aimerais décrire les principales étapes de transformation et montrer la cohérence de l’ensemble.
Colombie © Tristan Durand-Gasselin
L’extraction commence par la stérilisation des rafles, qui est obtenue en autoclave à des pressions de vapeur variant de 0,5 à 3 kg par cm2. Cette opération facilite le détachement des fruits et stoppe l’acidification. L’égrappage se fait dans des tambours pour séparer les fruits des rafles qui retournent au champ ou sont compostées. Leur incinération est déconseillée en plein air mais possible dans des fours destinés à produire de la chaleur ou de l’électricité. Le malaxage à une température proche de 100°C pendant une vingtaine de minutes sépare les fibres des noix et libère l’huile des cellules qui la stockent. L’extraction se fait en utilisant des presses à double vis. La clarification des jus bruts est indispensable pour isoler l’huile de l’eau et des matières en suspension. L’objectif est d’obtenir finalement une huile contenant moins de 0,1% d’humidité et de réduire le taux d’impuretés en dessous de 0,01% pour garantir une bonne conservation du produit. Dans la palmisterie, on sépare les noix des fibres pour récupérer séparément les amandes afin d’extraire l’huile de palmiste.
Dans la pratique des raffineurs Le raffinage des huiles brutes, pour en faire des huiles comestibles et commercialisables, est rendu nécessaire pour supprimer les phospholipides, les pigments, les flaveurs étrangères, les acides gras libres et d’autres impuretés diluées ou en suspension. Nos processus chimiques comportent une douzaine d'étapes parmi lesquelles le dégommage, la neutralisation, le lavage à l'eau, le séchage, la décoloration, la filtration, la désodorisation, le refroidissement, une nouvelle filtration puis enfin le stockage de l'huile raffinée. Il nous est possible d’y substituer un processus physique pour obtenir le même résultat avec un peu moins d’étapes de transformation : léger dégommage, décoloration, désodorisation, refroidissement, filtration, stockage de l’huile raffinée. Chaque raffineur a ses recettes pour obtenir le dégommage et un blanchiment en utilisant par exemple de l’acide phosphorique ou des terres de blanchiment. Il a aussi des pratiques particulières pour retenir les terres utilisées et les phospholipides avec un filtre presse. Pour enlever tout goût ou odeurs jugées étrangères à l’objectif de normalisation des cuvées, nous engageons une distillation neutralisante effectuée à environ 260°C et sous vide poussé. Ensuite, nous fractionnons le liquide huileux en deux phases : l’une dite stéarine contient les acides gras souvent saturés à point de fusion élevé, l’autre dite oléine rassemble des combinaisons d’acides gras plus riches en insaturés à point de fusion bas. De là, on peut séparer la stéarine dure de la stéarine molle et passer de l’oléine première fraction à de la superoléine. L’oléine est conditionnée en bouteilles de 1 litre, en bidons de 5, 10, 20 litres ou en fûts de 200 litres ou en vrac selon la demande des transformateurs ou des détaillants. La stéarine est vendue en vrac pour approvisionner les industries telles que les savonneries ou les margarineries. Huile hybride
Le traitement des déchets et des effluents La fibre de palme pressée, les tourteaux obtenus par trituration des amandes des palmistes et les résidus de pulpe déshuilée sont utilisés dans l’alimentation du bétail. Mais nous savons que celui-ci les consomme avec réticence, sauf lorsqu’ils sont en mélange avec d’autres aliments mieux appréciés. Les rafles retournent dans la plantation après avoir subi une étape de compostage pour apporter des éléments organiques et minéraux aux palmiers en cours de croissance et de production. Ce processus permet d’économiser jusqu’à 15% sur l’achat d’engrais venant d’autres sources non renouvelables. Les pertes d’huile au cours des processus sont inévitables même si des contrôles sérieux sont effectués : perte sur les fibres pressées, dans les boues, sur les rafles, sur les fruits non détachés des rafles. Les rejets à l’état brut sont très chargés en matière organique et polluent facilement les terres et l’eau. Le lagunage réduit par évaporation et fermentation la charge polluante des effluents, comme dans les stations d’épuration des grandes villes. On procède désormais à des mises sous confinement avec la pose de bâches en plastique pour récupérer les gaz de fermentation comme le méthane. Ce dernier, une fois purifié, est brûlé dans des chaudières qui font tourner des turbines génératrices d’électricité, très utiles pour les équipements et les villages installés près des palmeraies isolées, mais dont l’excédent peut dépasser les besoins locaux, même étendus aux résidences des ouvriers et des villages voisins. Ils servent aussi à faire fonctionner des motopompes. De plus en plus, les générateurs au biogaz des plantations sont connectés aux réseaux électriques nationaux, comme en Indonésie. Ils soulagent ainsi la consommation nationale en précieux combustibles fossiles. Ainsi, nous parvenons peu à peu à créer un agro-écosystème huilier performant, durable et le moins polluant possible, même si des progrès restent à faire en adaptant les recommandations générales de la RSPO et/ou des réglementations nationales à chaque cas particulier. 32
Le point de vue d’un ouvrier industriel appliqué
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Après le recrutement Après avoir vérifié mon niveau de formation, évalué ma motivation, enquêté sur ma réputation dans mon village tout proche, passé une visite médicale chez un médecin spécialisé dans le suivi de la santé du personnel, j’ai rejoint un groupe de nouveaux employés souvent indonésiens ou pakistanais pour bénéficier d’une double formation dans cette entreprise malaisienne. Grâce à elle, des emplois en monde rural sont pourvus. La première rencontre avait pour objectif de nous aider à comprendre notre juste place dans l’entreprise chargée du traitement des fruits du palmier à huile et de préciser nos droits et nos devoirs. J’ai tout de suite remarqué que les installations industrielles étaient situées au centre de la plantation pour réduire le temps d’acheminement des fruits mûrs et donc éviter leur oxydation.
Les liens pédagogiques
Liberia © Tristan Durand-Gasselin
La seconde session visait à compléter notre préparation pour occuper un ou plusieurs postes en fonction des besoins du moment. C’est à cette occasion que j’ai reçu tout l’équipement de travail: veste et pantalon aux couleurs de l’usinier et à ma taille, badge personnel avec autorisation de circulation restreinte, casque de chantier avec sangle ajustable, lunettes protectrices, chaussures de sécurité avec embout dur protégeant les orteils, oreillettes filtrant les bruits et gants épais. Sous le regard sévère de notre encadreur, nous avons achevé notre transformation au vestiaire avant de faire une première visite de l’huilerie.
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? • Pour supporter les odeurs très fortes, certains ouvriers débutants mettent discrètement un peu de baume du tigre sous les narines mais ils risquent de se brûler la peau. • L’usine moderne dans un océan vert de palmiers obéit à des normes environnementales strictes pour le recyclage de la biomasse et la captation des gaz à effet de serre.
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Le saviez-vous?
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LES PRODUCTEURS Des odeurs et du bruit Ma première surprise a été l’odeur des fruits en maturation et des huiles chauffées pour extraire l’huile résiduelle par pression. Mais comme il n’était pas question de nous doter d’un pince-nez, ni de nous équiper d’un respirateur filtrant, je me suis dit que chacun d’entre nous s’y habituerait facilement. En même temps, le bruit me parut très élevé et de sources diverses. En ajustant avec un plus grand soin mes protections auditives, le bruit de fond devint supportable même si on distinguait encore les voix humaines, les couinements des machines, les jets de vapeur et le vacarme de l’arrivée des wagons chargés de régimes. On nous avertit que l’usine fonctionne jour et nuit et que les trois équipes se relaient quelles que soient les circonstances, chacune travaillant 8 heures. Cette organisation devrait me laisser un peu de temps pour m’occuper de mon potager et de mes volailles et de préparer le prochain combat de coqs. Une salle de sport serait à notre disposition, en dehors des plages de travail, naturellement. Tout en suivant le groupe, je trouvai que l'air était assez difficile à respirer, car il était non seulement chaud et humide mais aussi chargé d'odeurs lourdes. En peu de temps, je sentis la sueur quitter mon corps et imprégner mes vêtements. Heureusement, des ventilateurs géants se mirent en route pendant un moment pour renouveler l’air de cette exploitation. L’encadreur désignait à grands mouvements de bras les différents appareils et réservait à plus tard les explications plus détaillées. Le retour au silence de notre salle de formation nous fit sourire de soulagement.
Costa Rica © Tristan Durand-Gasselin
Du coin de l’œil, j’aperçus la salle de repos des ingénieurs qui buvaient du thé dans une atmosphère climatisée.
Centrifugeuses
Dans le calme
Cameroun © Tristan Durand-Gasselin
Notre instructeur énuméra tout d’abord les objectifs d’un usinier lié à de grandes plantations de palmiers à huile, dispositif complété par de nombreux petits producteurs sous contrat répartis dans les alentours et dont les récoltes sont acheminées par des camions et tracteurs jusqu’à ce site. À partir des régimes fraîchement cueillis et déposés sur une aire plane de stockage pour un maximum d’une demi-journée, l’objectif est de mettre en route toute une chaîne de processus permettant de fractionner un régime de fruits mûrs en rafle, fruits, fibres, noix, jus bruts, huile brute, boues, coques et amandes. 34
La suite du point de vue d’un ouvrier industriel appliqué
Cameroun © Tristan Durand-Gasselin
Equateur © Tristan Durand-Gasselin
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Un processus rigoureux à maîtriser J’ai retenu que sept étapes étaient à parcourir : pesée des régimes, stérilisation, égrappage, malaxage, extraction, clarification et « palmisterie », chacune d’entre elles exigeant des machines particulières et une formation adéquate pour bien s’en servir. On nous expliqua que la production supposait un fonctionnement continu. En conséquence, nous devions apprendre à être polyvalents, même si certains postes exigeaient des qualifications plus importantes ou étaient plus pénibles que d’autres. Après la pesée des drupes et l’enregistrement des poids en référence de l’origine de chaque régime de fruit, l’étape de stérilisation a pour objectif de stopper l’action des enzymes contenues dans les fruits mûrs qui hâtent l’oxydation de l’huile. Elle permet en même temps de détacher les fruits de leurs loges, d’amollir la pulpe tout en la déshydratant un peu et de préparer la séparation de l’amande de la coque. On utilise pour cela des autoclaves, ces stérilisateurs métalliques horizontaux munis de portes et pouvant contenir au moins un wagon de 2 500 kilogrammes de régimes. La vapeur y circule à haute pression pendant une heure et demie avec des alternances de purges brutales précédées par une purge lente.
Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
La cage à écureuil a un tambour égrappoir légèrement décentré qui tourne lentement de façon à faire tomber les régimes 6 à 10 fois pour séparer les fruits des rafles, rafles que l’on peut éventuellement hacher avec une presse spécifique pour en faire des engrais naturels. Les fruits rassemblés sont ensuite malaxés par trituration à 90-100°C dans des cylindres verticaux à double enveloppe de chauffe pour extraire l’huile contenue dans la pulpe. Il faut surveiller à la fois les injections de vapeur, la température, la vitesse et la durée du malaxage et vérifier que la cuve est toujours pleine pour que la presse qui suit soit approvisionnée en permanence. Les presses à double vis entraînent la masse des fruits malaxés jusqu'à une cage perforée pour extraire un mélange d'huiles pour un tiers, d'eau et d'impuretés solides pour les deux autres tiers. En sortie, les jus bruts sont séparés du tourteau constitué d’un mélange de fibres et de noix destiné à l’alimentation du bétail.
Les liens pédagogiques
La clarification du mélange dilué avec de l’eau se fait par décantation à une température soigneusement contrôlée pour que l’huile reste à la bonne viscosité et éviter la formation d’émulsions. La décantation la plus simple a lieu en une vingtaine de minutes dans des cuves maintenues à 90°C. Les impuretés tombent au fond, l’eau est au-dessus en couche intermédiaire et encore un peu mélangée d’huile qu’on récupère avec une centrifugeuse, sachant que l’huile brute reste en surface.
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Cette dernière doit encore être déshydratée pour assurer sa conservation. On fait passer l’huile réchauffée à un peu plus de 100°C en couche mince dans un courant d’air, ou dans des déshydrateurs à vide qui permettent d’obtenir un très bon résultat à moins de 0,1% d’eau dans l’huile, à des températures plus faibles et sans risque d’oxydation.
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Comme l’huile de palme a tendance à être semi-solide à température ambiante, d’où son qualificatif d’« huile concrète », il est parfois nécessaire de la stocker dans des réservoirs chauffés à 45°C, en attente de son transport vers les clients.
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LES PRODUCTEURS Rien ne doit être perdu Notre encadreur nous a bien précisé qu’il restait de l’huile à extraire des noix, une fois qu’elles sont séparées du tourteau broyé, déshydraté et émietté. On collecte les fibres et autres débris végétaux par le passage d’un fort courant d’air. Les sous-produits sont recyclés comme combustible pour les chaudières. Les noix palmistes sont recueillies dans un tambour polisseur pour finir de les débarrasser des fibres qui sont aspirées dans une colonne de stockage et dirigées ensuite vers les chaudières. Les noix propres sont chauffées à 65°C pour que les amandes se désolidarisent des coques par rétraction. Ensuite, les noix sont placées dans des concasseurs à barreaux dont la vitesse de rotation est choisie pour casser le maximum de coques en brisant un minimum d’amandes. Le mélange obtenu est dépoussiéré avant d’utiliser des systèmes physiques ou chimiques pour ne retenir que les amandes qui sont égouttées, stérilisées à la vapeur et séchées à 80°C dans des silos chauffants et ventilés. L’huile de palmiste représente 5 à 10% de l’huile de pulpe en volume. On l'extrait par broyage pour obtenir une pâte qui sera chauffée et déshydratée dans des fours verticaux à étages pour être portée finalement à environ 140°C et ne plus contenir que 2% d'eau. La suite du processus se fait dans des presses à barreaux métalliques à pression plus élevée que celle pour l’huile de pulpe. Il arrive que l’on utilise un produit chimique comme l’hexane pour finir le travail. Le tourteau est épuré du solvant lors d’un passage à la vapeur.
Cameroun © Tristan Durand-Gasselin
L’huile de palmiste est purifiée par décantation ou centrifugation avant d’être stockée dans des cuves chauffées et ventilées identiques à celles qui servent à l’huile de palme, mais avec un marquage spécifique car les destinataires et les usages que l'on peut en faire sont différents.
Raffles sortie usine
Une usine à la campagne Fils de paysan, mes premiers cauchemars seront sans doute remplis de sifflements de vapeur, du bruit des concasseurs, des chuintements des tapis roulants, des appels de poste à poste, des odeurs de fruits broyés et des huiles chaudes, des clignotements des voyants de contrôle, des couinements des avertisseurs sonores, des ronflements des groupes électrogènes et du vertige de défilement des consommations en électricité. Mais je suis impressionné par l’ensemble des connaissances qu’il a fallu mobiliser pour disposer d’une chaîne complète de traitement des fruits du palmier à huile et le professionnalisme des opérateurs chargés du bon déroulement de chaque opération. Les collègues m’ont déjà parlé de stages de formation ultérieurs. Un jour lointain, j’aimerais porter la blouse d’un ingénieur scrutant les écrans de la salle de contrôle. 36
Le point de vue d’un médecin de compagnie
Le saviez-vous?
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• Depuis que la grande plantation de palmiers à huile a requis mes services, ma vie de médecin praticien en zone rurale s’est beaucoup améliorée. J’ai un cabinet médical, des horaires réguliers sauf urgence et je reçois une prime mensuelle et des émoluments en fonction de la nature de chacune des interventions que je suis conduit à faire. • Le fait que je sois autorisé à étendre mon exercice en périphérie de la concession est apprécié par les populations locales et contribue à ma bonne réputation.
Les liens pédagogiques
Côte d’Ivoire © Françoise Chirara
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Un médecin rural salarié En plus de ma clientèle habituelle faite d’agriculteurs, de petits commerçants et de quelques fonctionnaires provinciaux, je consacre maintenant une partie de mon temps aux employés de la plantation de palmier à huile qui n’est qu’à quelques kilomètres de mon cabinet privé.
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On attend de moi une visite d’aptitude avant de recruter un candidat, un contrôle de routine des employés aux postes à risque, une intervention d’urgence en cas d’accident avant de mobiliser des moyens plus importants et une participation à quelques réunions organisées par la direction. Il vient de m’être accordé le droit de porter assistance aux malades du village le plus proche lorsque mes fonctions d’appui à l’entreprise m’en laissent le loisir. Un petit dispensaire-hôpital est en projet et l’on m’a chargé d’évaluer les besoins sanitaires des populations voisines pour un éventuel soutien financier et logistique de la part de la compagnie.
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LES PRODUCTEURS Une responsabilité de l’embauche aux accidents de travail Mon interlocuteur direct est le responsable du personnel. Son objectif est très clairement de ne pas offrir un emploi à une personne de constitution faible ou malade, de réduire au maximum le nombre d’absences pour raisons sanitaires, de prévenir les accidents ou, s’il s’en produit, de tout faire pour éviter les retombées négatives au niveau de la réputation du projet. Pour les ouvriers agricoles, il m’a recommandé de porter une attention particulière à la protection de la tête, des yeux, du visage, des voies respiratoires, des mains, des voies auditives, du corps, des pieds, suite à ses expériences précédentes négatives. Il craint la chute de régimes de fruits de plus de 30 kilogrammes sur la tête ou le pied d’un récolteur, les coupures avec les outils tranchants, les morsures de serpents, les intoxications accidentelles par les herbicides, les maladies en rapport avec le maniement des engrais et des pesticides. Il a insisté sur le fait qu’il était interdit d’utiliser les eaux de drainage mais il n’ignore pas que certains en font d’autres usages en aval : lavage du linge, eau pour le bétail, irrigation de parcelles villageoises limitrophes.
Pérou © Tristan Durand-Gasselin
Comme l’huilerie est sous la responsabilité d’une autre personne, il m’a demandé de la rencontrer afin de m’occuper aussi du suivi sanitaire des ouvriers industriels qui sont soumis à un tout autre environnement.
Soulager les maux Les visites d'embauche ne me causent pas de souci particulier, car il est naturel que l'employeur ait une préférence pour les bien-portants. Pour les accidents, je fais de mon mieux avec les moyens mis à disposition sur place, sauf quand il est nécessaire d’évacuer le blessé vers l’hôpital de la ville la plus proche. Pour les autres pathologies peu fréquentes liées à la pollution de l’environnement ou à la mauvaise utilisation des produits toxiques, je soulage ceux que je ne peux guérir : du collyre pour les yeux injectés de sang, des crèmes sur les eczémas, des antitussifs sur des inhalations malencontreuses. La plupart des ouvriers me saluent aimablement quand ils me croisent. Certains m’ont confié qu’ils aimeraient bien que leurs enfants deviennent infirmiers ou docteurs en médecine. Que peut-on espérer de mieux ?
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Côte d’Ivoire © Philippe De Groote
Le point de vue d’un petit planteur heureux
Bénin © Palmelit
Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Les liens pédagogiques
Des palmiers dans un jardin
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N’ayant que peu de terres à exploiter, j’ai toujours diversifié mes productions pour nourrir ma famille comme mon père l’a fait pour la sienne. Outre les élevages de volailles en plein air et de canards sur une mare, j’ai un jardin potager, des arbres fruitiers dont des bananiers et des manguiers, et quelques vaches généralement confinées dans un enclos proche de ma case. Ma chance est de disposer d’une parcelle à riz que j’ai reconvertie en plantation de palmiers à huile grâce aux aides de l’Etat puis d’un agro-industriel qui a fourni les plants sélectionnés, les engrais et le microcrédit. Dix ans après la création de cette palmeraie familiale, la production en huile dépasse de très loin nos besoins alimentaires, ce qui me permet d’en vendre une grosse part pour acheter des produits que nous ne fabriquons pas : un vélo, du sel, des épices, des allumettes, du pétrole.
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Le saviez-vous?
• La plantation de plusieurs centaines de palmiers à huile suppose l’appui de l’Etat ou d’un opérateur agro-industriel non seulement pour écouler la production, mais pour bénéficier de son aide administrative, bancaire et technique, les conseils des autres propriétaires villageois sous contrat venant en accompagnement. • Le palmier à huile bien exploité rapporte beaucoup plus que le riz, ou parfois le cacao ou même l’hévéa.
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© Françoise Chirara
LES PRODUCTEURS
Une huile décolorée tardivement L’huile de palme de mon enfance était souvent de couleur orange ou rouge. Nous nous en servions pour faire la cuisine même si elle avait un goût âcre et une odeur plutôt forte, mais sa saveur un peu sucrée était incomparable. Ensuite, j’ai remarqué que l’huile était vendue blanchie et sans odeur sur le marché à la suite de divers traitements dans les usines.
Des palmiers introduits dix ans avant Après des années difficiles car j’étais sans revenu pendant la phase de croissance du palmier à huile, j’ai travaillé comme ouvrier salarié dans une exploitation agro-industrielle. Je gagne maintenant dix fois plus d’argent qu’avant. Mes plus jeunes enfants vont à l’école, ma femme a ouvert un petit commerce de bord de piste et j’envisage d’acheter une moto-taxi pour que mon aîné puisse travailler à la petite ville la plus proche. Je vais me procurer une ingénieuse presse artisanale motorisée pour extraire l’huile moi-même plutôt que de confier les fruits à un usinier qui prend une marge trop importante de mon point de vue. Mes voisins me disent que l’extraction sera moins complète mais que le prix final de l’huile extraite compense largement ce manque à gagner, surtout en période de pic de production. En outre, les fruits n’auront pas le temps de s’abîmer pendant le transport et mon huile devrait donc être de bonne qualité. Je prendrai des précautions particulières pour ne pas polluer la rivière avec mes effluents.
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Le point de vue d’un écologue opérationnel
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
Comprendre avant de modifier Pour souligner la volonté de promouvoir une écologie directement utilisable par les planificateurs, j’ai choisi de parler d’ « écologie opérationnelle » dès 1978. Trente-cinq ans après, il ne paraît pas inutile de redéfinir ce concept qui désigne une méthode d’investigation susceptible de fournir des résultats concrets exploitables par le développeur à court, moyen et long terme. L’aménagement d’un territoire en vue de sa mise en valeur agricole comme une plantation de palmiers à huile consiste à remplacer un équilibre écologique plus ou moins ancien et harmonieux comme des espaces forestiers par un agroécosystème supposé mieux répondre aux besoins présents et futurs en corps gras des populations humaines.
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Le saviez-vous?
• Dans l’idéal, toute initiative d’aménagement devrait être précédée d’un inventaire complet des caractéristiques de l’écosystème préexistant pour évaluer l’impact des transformations imposées au paysage, les moyens d’observation à mettre en œuvre et les protections à envisager. • La préservation des tourbières pourrait permettre d’acheter des crédits liés au stockage du carbone. • Les petits planteurs contribuent en 2014 à 33% de la production totale en Malaisie, 35% en Papouasie-NouvelleGuinée, 80% au Nigeria.
Ghana © Tristan Durand-Gasselin
Les liens pédagogiques
La vigilance des écologues associés aux projets de développement devrait être maintenue jusqu’à ce qu’un nouvel équilibre écologique apparaisse, même si c’est au prix d’intrants réguliers. L’idée d’accompagner un développement durable est toujours présente dans ma démarche.
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LES PRODUCTEURS Intensifier sans détruire Il est tout d’abord nécessaire d’identifier de nouvelles terres convenant à la culture du palmier à huile sans que ce soit aux dépens des forêts primaires ou secondaires restantes qu’il convient de préserver impérativement, après les dommages qu’elles ont subis durant les trois dernières décennies. A mon avis, Il faut s’intéresser prioritairement aux terres déjà défrichées, éventuellement utilisées pour d’autres cultures, dont les propriétaires légaux ou coutumiers dûment informés accepteraient une nouvelle exploitation des terres, avec des compensations ou un intéressement acceptables. L’idée d’une mosaïque paysagère permettant un développement durable dans un environnement diversifié est à adapter dans des contextes écologiques variés. Certains parlent de planification du paysage. Toute la difficulté est dans la conversion des mots en actes et le suivi des conséquences attendues et inattendues. Il est évident que l’augmentation de la production en huile de palme et de palmiste au cours de ces trois dernières décennies s’est faite plus par une augmentation des surfaces dédiées au palmier que par une augmentation de la productivité. Il est maintenant possible de viser l’amélioration de la production par hectare par des dispositions variées et complémentaires : prêt à taux privilégié durant les trois premières années de démarrage d’une plantation villageoise avant un remboursement étagé pendant la phase de production, rajeunissement des plantations, choix de semences améliorées, meilleures pratiques culturales, sélection des engrais aux effets les plus bénéfiques et les moins polluants, lutte préventive contre les ravageurs, meilleure formation du personnel au suivi des plantations, réduction des pertes à la récolte, recyclage systématique des déchets végétaux pouvant contribuer à l’amélioration des sols, garantie de durabilité des systèmes de production, amélioration de l’accès aux marchés nationaux et internationaux, meilleur soutien technique et financier aux petits producteurs.
Nigeria © Michel Cazemajor
L’intensification écologique est une des composantes importantes de l’avenir de la filière.
Dans le cas particulier Dans le contexte de l’expansion récente et exceptionnelle des plantations de palmier à huile, il est avéré que beaucoup d’aménagements ont eu lieu sans études environnementales préalables ou accompagnatrices. Toutefois, un certain nombre de conséquences écologiques sont tellement évidentes qu’il est devenu incontournable de les prendre en compte et de les exprimer en termes pragmatiques. Elles sont maintenant obligatoires en incluant les aspects sociaux lorsque la certification RSPO est demandée. 42
Le point de vue d’un forestier serein
Guyane © Françoise Chirara
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le bois d’abord Mon métier est de trouver le bois dont ont besoin nos industries du Nord comme celles du Sud. Dans la plupart des cas, on coupe des forêts plantées par les hommes pour la fabrication de papier, la fourniture de poteaux, de charpentes ou de contreplaqué.
Les liens pédagogiques
Guyane © Françoise Chirara
Maintenant que les forêts primaires ne sont plus très nombreuses dans les régions industrialisées, il faut bien s’intéresser aux forêts tropicales et équatoriales pour extraire le bois qui est indispensable à la réalisation de meubles massifs ou de sculptures d’art, d’autant que ce sont souvent les pays souverains qui nous demandent de valoriser économiquement leurs ressources forestières.
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Le saviez-vous? • Le plus important pour nous, forestiers, est de pourvoir répondre aux besoins exprimés par les pays propriétaires de forêts et de pratiquer une exploitation sélective des essences. • Les cas où nous procédons à une élimination totale de la forêt en vue d’en permettre un autre usage pour l’agronomie ou les mines sont finalement assez rares, même si je dois admettre l’existence de quelques exemples contraires. • La profession des forestiers s’est réorganisée depuis longtemps, si bien que la certification Forest Stewardship Council du bois a été mise en œuvre avant celle concernant l’huile de palme.
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LES PRODUCTEURS Le respect des normes imposées Les concessions qui sont données aux forestiers sont assorties de clauses de plus en plus contraignantes et dans un contexte concurrentiel international plus prégnant. Dans une forêt tropicale, nous ne prélevons que les arbres les plus intéressants au plan économique qui répondent à certains critères de taille, de sorte que les jeunes en place peuvent continuer de grandir. On nous demande aussi de réduire les pistes d’approche et d’extraction des grumes au minimum pour permettre à la forêt primaire de cicatriser rapidement ou à une forêt secondaire de s’implanter. Aussi, n’a-t-on jamais vu un forestier responsable détruire systématiquement toute une forêt pour laisser un terrain nu, à de remarquables et dommageables exceptions près. En règle générale, ce sont les pouvoirs publics qui décident ou non des territoires à sauvegarder en forêt primaire et de ceux qui se prêtent à une exploitation forestière puis agronomique ou minière. En Indonésie, la décision est prise au niveau des districts.
Liberia © Tristan Durand-Gasselin
Il arrive que nos pistes d’accès servent d'approche à d'autres activités comme la prospection minière ou la mise en place de monocultures comme le cacao, l'hévéa, le café, l'ananas ou à l'implantation de nouvelles populations humaines pratiquant l'agriculture pionnière. Mais nous ne sommes pas régulièrement associés à la préparation du terrain, sauf s’il s’agit d’aider à une déforestation secondaire autorisée car nous avons les engins pour la réaliser.
Il faut raison garder Dans le cas particulier de l’exploitation du palmier à huile et de mon point de vue, il est très exagéré de dire que nous avons pris beaucoup d’initiatives dommageables dans les pays du Sud-Est asiatique par exemple. Sur 21 millions d’hectares déforestés en Indonésie depuis 1975 - d’aucuns diraient mis en valeur -, trois seulement seraient dédiés à cette culture. Comme le palmier à huile, ce faux arbre, aime le même type d’habitat que celui occupé par les forêts primaires, il arrive que des planteurs nous demandent d’exploiter la forêt pour disposer d’une mise de fonds de démarrage d’une plantation. Une plantation pouvant durer une trentaine d'années, certains d'entre nous assimilent avec un peu de malice cette forme d'agriculture à une activité forestière de substitution. Il est honnête de dire que ce point de vue est minoritaire et peu défendable, tant au plan de la conservation d’une grande biodiversité, qu’à celui de la captation du carbone.
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Le point de vue d’un analyste des marchés porteurs
Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Une filière encouragée La surchauffe actuelle de la filière du palmier à huile tient à des causes qui déplacent l’intérêt des utilisateurs, soit en défaveur des autres huiles d’origine végétale, soit en faveur de l’huile de palme. De fait, les communautés humaines consomment de plus en plus de graisses à mesure que leur niveau de vie s’élève.
Les liens pédagogiques
Dans les pays industrialisés, près de 30% des individus sont jugés trop gros ou obèses. La même tendance à la prise de poids est observée dans les nouvelles classes moyennes des pays émergents à partir des années 2000. Sans être cynique, j’en conclus que la demande en corps gras ne peut qu’augmenter dans les années à venir.
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Le saviez-vous? • Le palmier à huile produit par unité de surface 6 à 8 fois plus d’huile que les plantes à huile européennes comme le colza ou le tournesol. • Plusieurs dizaines de millions de personnes vivent directement ou indirectement de la filière du palmier à huile. • D’importants efforts sont faits pour rendre durables les plantations du palmier à huile en organisant par exemple le recyclage sur place du maximum d’effluents organiques. Des efforts de même nature pourraient être demandés prochainement à d’autres monocultures.
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La mauvaise réputation des « trans » Les consommateurs ont fini par savoir que les industriels font subir aux huiles de colza ou de soja une hydrogénisation partielle ou totale. Leur objectif est de leur faire acquérir des propriétés de transformation et de conservation appréciées dans l’agroalimentaire. Malheureusement, ces processus conduisent à la formation d’acides gras « trans » potentiellement carcinogènes et dont le rôle dans l’augmentation des risques cardio-vasculaires est prouvé. L’obligation d’affichage de la présence des acides gras « trans » dans plusieurs pays a pour effet de modifier les sources d’approvisionnement en faveur de l’huile de palme qui n’a pas à supporter ce même traitement, les acides gras qu’elle contient étant naturellement hydrogénées. Une raison de plus pour penser que le marché du palmier à huile est porteur et qu’il le restera encore longtemps.
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LES FINANCIERS Parmi les choix substitutifs L’huile de palme offre un intérêt certain pour les industries agroalimentaires étant donné qu’elle est constituée à 50% d’acides gras saturés, 40% d’acides gras mono-insaturés, 10% d’acides poly-insaturés et ne contient pas d'acides gras « trans ». Il n'est donc pas nécessaire de lui faire subir un processus d'hydrogénation puisque ses qualités naturelles satisfont le cahier des charges des transformateurs agro-industriels. Autre avantage de taille, le coût à la tonne est moins élevé que celui de toutes les autres huiles en provenance d’autres plantes oléagineuses. Devant un marché à satisfaire rapidement, la filière de l’huile de palme s’est mise à l’œuvre en mettant en cohérence logistique les planteurs, les usiniers, les négociants, les manufacturiers, les détaillants, les banques et les investisseurs, auxquels s’ajoutent les transporteurs mobilisés à chaque étape des transformations et des livraisons. Comme le palmier à huile trouve son optimum écologique dans une bande d’environ 10 à 15 degrés latitudinaux autour de l’équateur, les pays du Sud sont les mieux placés pour accueillir ou intensifier la culture du palmier à huile. Parmi ceux-ci, la Malaisie et l’Indonésie ont su investir dans cette filière, chacun de ces pays bénéficiant d’un contexte global de croissance économique favorable, d’une population jeune, d’une main d’œuvre mobilisable, d’un accroissement de la demande alimentaire interne à satisfaire, sans parler des besoins industriels, voire d’une ouverture vers les biocarburants. Ces deux pays satisfont à eux seuls près de 90% de la consommation mondiale en huile de palme en 2014.
Des performances remarquables
Thaïlande © Tristan Durand-Gasselin
Je reste étonné de constater que la croissance annuelle de la production a été de l’ordre de 8,5% par an, même si elle s’est faite plus par l’accroissement des surfaces cultivées que par un gain de rendement. On prévoit que la croissance devrait se poursuivre à la cadence de 2,8% par an dans les prochaines décennies.
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La suite du point de vue d’un analyste des marchés porteurs Un monde parfait ? Pas tout à fait. L’expansion de la filière a été la cause directe ou indirecte de la destruction de millions d’hectares de forêts primaires, l’idée étant de s’implanter sur des terres riches et de se servir du bois commercialisable pour financer les travaux de défrichage et de plantation durant les premières années non productives. L’une des conséquences est le remplacement de forêts primaires qui stockaient 150 tonnes de carbone par hectare et par an par des plantations qui n'en retiennent que 30 à 35. La pollution atmosphérique de la Malaisie et de l'Indonésie s'est aggravée à cause des feux de forêts volontaires, autorisés ou interdits, en lien supposé avec l'extension des plantations de palmiers à huile. Des pays voisins subissent une pollution importante de leur atmosphère du fait du transport des particules par les vents dominants puis du rabattage des cendres au sol par les pluies.
Les liens pédagogiques
Cameroun © Tristan Durand-Gasselin
On reconnaît maintenant que des spoliations arbitraires ont eu lieu au détriment de populations natives qui vivaient depuis des temps immémoriaux dans ces forêts, mais ne possédaient pas de titre de propriété au sens cadastral du terme. Il est clair aussi que des employés aux travaux agricoles comme aux travaux usiniers ont pu être exploités au-delà des règles habituellement admises. De plus, ces plantations nouvelles ont réduit d’au moins 90% la biodiversité indigène, en détournant l’usage des eaux saines et en polluant les eaux de surface et des nappes phréatiques par les fertilisants, les pesticides et les effluents d’huilerie, avant que ces derniers ne fassent l’objet d’un traitement spécifique.
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En contrepartie
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Pour moi qui ai une double formation d’économiste et de financier, il est évident que le produit national brut des deux pays grands producteurs que sont la Malaisie et l’Indonésie a sensiblement augmenté grâce au palmier à huile. Des investissements significatifs ont été réalisés pour encourager l’installation de petits planteurs nationaux qui ont vu leurs revenus parfois multipliés par 10 à un moment où la culture du riz ou d’autres cultures de rente comme l’hévéa, le café, le cacao, devenaient moins rentables. Le succès de certains schémas de développement du palmier à huile est tel, que la deuxième génération des petits planteurs déserte la campagne !
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Des attaques ciblées La réussite de la filière du palmier à huile a suscité et suscite encore des jalousies, des interrogations sur sa durabilité et des critiques. On lui reproche sans vraiment le dire de réduire les marchés auparavant accessibles aux huiles provenant de l’arachide, du colza, du soja ou du tournesol, par exemple. Aussi des groupes d’intérêt se sont-ils mis en place dans l’ombre pour répandre le doute dans l’opinion publique occidentale sur l’huile de palme. Ils ont choisi trois angles d’altération de l’image véhiculée par l’huile de palme : l’impact sur la santé publique, les effets sur l’environnement, le traitement des hommes. Des associations de consommateurs, des organisations non gouvernementales environnementalistes et sociales et des médias se sont ralliés à une campagne anti huile de palme pour des raisons qui leur sont propres. Il n’est pas certain que chacune d’entre elles aient pris le temps de comprendre les enjeux planétaires d’une filière globale et complexe. 47
Liberia © Tristan Durand-Gasselin
LES FINANCIERS
Sous l’angle de la santé La progression de l’huile de palme dans des produits de consommation alimentaire courante, spécialement dans les plats cuisinés et les préparations industrielles, a été dissimulée pendant au moins vingt ans aux consommateurs en se cachant sous l’étiquette générique « huiles végétales » sans préciser l’origine. Ce n’est que récemment en Europe que l'on peut lire sur les étiquettes la plante d’origine qui a donné l’huile végétale utilisée. Si l’usage excessif de l’huile de palme dans les produits agroalimentaires industriels pouvait affecter la santé de personnes déjà bien nourries, elle serait sans réels inconvénients pour des populations ayant une alimentation insuffisante ou mal équilibrée en corps gras. Des avis contrastés de médecins, de nutritionnistes, voire de politiques en mal d’audience, ont semé le doute dans le grand public, ce qui était l’objectif, chacun sachant qu’il est très difficile de greffer des informations scientifiques sur des croyances irrationnelles ou mal fondées.
Sous l’angle environnemental La mobilisation a été facile à cause d’évidences très visuelles : le brûlage des forêts, l’expulsion des populations indigènes, la mise en danger de la faune et de la flore, la réduction drastique de la biodiversité dont certaines espèces iconiques comme le tigre, l’orang-outan, l’éléphant, le traitement injuste de certaines catégories socioprofessionnelles, la pollution des sols et des eaux par des intrants agronomiques mal gérés, les maladies induites par de mauvaises pratiques, le bouleversement des paysages forestiers qui n’a pas fini de se poursuivre puisque l’Indonésie par exemple souhaite passer de 8,3 millions d’hectares occupés par le palmier à huile en 2012 à 25 millions d’hectares en 2025.
Sous l’angle du modèle économique La filière du palmier à huile, très consciente des dangers et de l’orchestration en sous-main des campagnes agressives menaçant ses intérêts, a réagi dès 2005 en créant une structure d’autorégulation, la RSPO (Round table for Sustainable Palm Oil). S’il est aisé de reprocher le processus consensuel visant à contenter les principaux acteurs adhérents de la RSPO sur une base encore trop peu contraignante, l’obtention assez facile d’une certification et l’annonce de mécanismes de ségrégation d’huile CSPO sans effets très convaincants, les progrès réalisés satisfont la plupart des parties prenantes. Je suis admiratif de la manière dont la filière de l’huile de palme a montré une grande capacité à s’adapter en fonction des critiques qui lui étaient faites, arguments contre arguments, à s’améliorer sur les aspects qui dépendaient d’elles et à intégrer de nouveaux acteurs et observateurs dans ses plateformes de rencontres nationales et internationales.
Des faits économiques têtus En dépit de tous les reproches que l’on peut faire à cette filière de production, il est juste de reconnaître les acquis suivants : une demande internationale en croissance pour des usages agroalimentaires (80%), industriels (19%) et de fabrication de biocarburants (1%) en 2014, une réduction de la pauvreté dans les deux principaux pays producteurs que sont la Malaisie et l’Indonésie, des dizaines de millions d’emplois directs et indirects pourvus, l’espoir pour d’autres pays d’Asie du Sud-Est, d’Afrique et d’Amérique latine de rejoindre la filière, une contribution à la réduction des carences alimentaires dans les pays en développement. Dispose-t-on de beaucoup d’exemples de réussite pour d’autres filières ancrées au Sud ? 48
Le point de vue d’une société de conseils avisée
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le saviez-vous
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• La cartographie en temps réel est un élément important pour vérifier les usages de la terre dans des pays où le cadastrage est encore imprécis, voire inexistant. • Les transformateurs savent changer d’huiles végétales en cours de production car ils en connaissent bien les caractéristiques physicochimiques et maîtrisent les mélanges. • Le conseil actuel en agronomie intègre les variables environnementales et sociales et adhère au principe de durabilité. Certains avancent même le concept d’agro-écosystèmes intelligents.
Le cœur de cible
Les liens pédagogiques
Notre société de conseil a pour objectif d’apporter un accompagnement agronomique et environnemental aux producteurs du palmier à huile et de les préparer à la certification nationale ou internationale de leur production. En une bonne vingtaine d’années, nous avons capitalisé une expérience précieuse dans plusieurs pays tropicaux intéressés par cette culture rentable.
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Nos agronomes consultants Nos experts du palmier à huile aident au repérage des meilleurs sites du point de vue agronomique, social et environnemental. Ils font des recommandations pour la préparation des sols, le piquetage selon les courbes de niveau en respectant un espace optimal entre chaque palmier, recommandent des plantes de couverture pour les premières années tout en préconisant des mesures contre les plantes invasives et proposent des fertilisants destinés à corriger la qualité des sols pour obtenir de meilleurs rendements. Ils encouragent des entretiens réguliers en dégageant les interlignes et les sentiers de récolte, en pratiquant les andains juste nécessaires pour ne pas déstructurer les sols. Ils apportent aussi des conseils pour lutter contre les ennemis naturels du palmier et proposent un aménagement concerté du paysage dans les parties impropres à la culture (trop humides, trop en pente, trop d'enrochement) pour contribuer à la création de réserves naturelles de faune et de flore.
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Lorsque cela est possible Quand les circonstances s’y prêtent, nous aidons nos ingénieurs-conseils à ouvrir un bureau local et à organiser un réseau de correspondants pour que nous soyons informés des performances des sociétés conseillées en comparaison de celles qui ne le sont pas par nous. Nous augmentons ainsi notre base de données et capitalisons l’expérience des autres en complément de la nôtre.
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LES FINANCIERS Vues du ciel Au fil du temps, nous avons complété les prospections terrestres par des survols aériens avec prise de vues photographiques au-dessus des plantations puis par des images satellitaires. Bien qu’onéreuses, ces dernières sources permettent une cartographie annuelle des surfaces consacrées au palmier à huile car la répartition en lignes des plants et le respect d’un espace constant entre eux est très facile à reconnaître en vue polaire. Avec des spécialistes de l’analyse des données, nous avons mis au point un logiciel qui permet la sélection automatique des surfaces répondant à nos critères et réalisant leur quantification. D’une année à la suivante, nous pouvons aussi suivre la présence ou l’absence de chaque couronne foliaire faisant suite par exemple à des maladies contagieuses ou à des cyclones dévastateurs. Nous pouvons aussi avoir une indication de la photosynthèse et donc de la santé foliaire.
Equateur © Tristan Durand-Gasselin
Depuis peu, des entreprises nous démarchent pour vanter les qualités de drones qui fournissent des détails photographiques incroyablement précis. Le problème est d’obtenir les autorisations de survols de territoires souverains, même si les entreprises cibles sont des plantations privées. Le dossier devrait avancer à la prochaine grande sécheresse ou de fortes inondations en rapport avec le dérèglement climatique en présentant le dossier sous l’angle d’un système précoce pour le suivi des cultures de subsistance et de rente.
Des modèles couplés pour savoir anticiper En partenariat avec des centres de recherche et des universités, nous avons élaboré deux modèles couplés, l’un pour simuler la croissance, l’autre pour prévoir l’impact des changements environnementaux sur la production. L’objectif était de prévoir la production d’huiles afin que la plantation mais aussi le reste de la filière comme les usiniers et les transporteurs puissent s’organiser en conséquence, sans oublier que l’information sert aussi aux vendeurs à maintenir les cours. La modélisation du fonctionnement du palmier à huile et de son rendement en fonction des conditions météorologiques permet de mieux gérer les conséquences d’épisodes secs ou trop humides comme il s’en produit certaines années. En outre, si l’on comprend les variations d’état physiologique de la plante, il est possible d’ajuster le programme de fertilisation aux besoins exacts des palmiers.
Prévoir pour gérer Très vite, nous avons compris que l’affaire économétrique avait deux faces, l’une évidente pour les vendeurs d’huile de palme, l’autre très utile pour les producteurs d’huiles en provenance d’autres sources comme le colza et le tournesol. La problématique est simple : comme la demande d’oléagineux est en hausse de presque 5% chaque année au plan mondial, et que l’offre varie selon les années pour de très nombreuses causes naturelles (conditions météorologiques entre autres) ou maîtrisées par les hommes (arrivée à maturité de plantations jeunes, extension des parcelles, nouvelles variétés plus performantes du point de vue de la production d’huile, nouvelles méthodes d’extraction, réduction des pertes au champ), les lois du marché donnent un avantage à ceux qui peuvent connaître avant les autres la production globale d’huile de palme pour réagir aux fluctuations de prix des huiles végétales d’autres provenances. Le raisonnement est facile à comprendre : si l’on manque d’huile de palme pour couvrir la demande, les utilisateurs seront prêts à payer plus cher l’huile de soja par exemple, pour ne pas arrêter leur système de production. Inversement, si l’huile de palme est abondante, on pourra décider de rogner sur les marges pour se placer en concurrence. Dans un contexte international où tout est fait pour que les huiles soient interchangeables, « si le soja s’enrhume, le palmier éternue ».
Un faux-nez Nous avons créé une filiale à profil « start-up », pour compiler toutes les données historiques dont nous disposons sur les rapports entre l’environnement, les pratiques et la productivité. Grâce aux performances des nouveaux ordinateurs et aux compétences des jeunes informaticiens, notre cellule prévisionniste peut compiler plusieurs dizaines de milliers d'informations par jour. Les résultats sont ensuite transmis en toute confidentialité à nos stratèges qui peuvent décider de la vente de ces informations au plus offrant, une option leur permettant d'avoir accès à des résultats ajustés tous les 10 jours et accompagnés d'une visualisation cartographique à compréhension immédiate. Cette capacité d’anticiper la très grande volatilité des marchés agricoles peut avoir des conséquences si importantes pour les exploitants qu’un groupe international d’investissement dans l’agriculture nous a approché récemment pour racheter notre filiale. Ce sera le premier point de l’ordre du jour du prochain conseil d’administration. 50
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Le point de vue d’un investisseur éthique
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
La rentabilité d’abord À la suite de placements décevants en bourse sur des titres industriels qui n’ont pas tenu leurs promesses et du risque d’investissements toxiques, mon groupe financier a orienté mes activités vers la recherche de placements sur les matières premières agricoles. En réalisant des prospections virtuelles, j’ai découvert la filière du palmier à huile qui m’a paru être un gisement à étudier prioritairement pour orienter les financements de nos membres. Toutefois, il faudra surveiller la dépendance des cours mondiaux entre les huiles végétales et le pétrole brut, constatée depuis l’émergence des agro-carburants.
Une attractivité reconnue
Les liens pédagogiques
Quoique non spécialiste de cette plante, j’ai immédiatement compris que le palmier est une véritable usine à huile naturelle, portée par une filière dynamique et en pleine expansion, animée par des pays émergents majeurs comme la Malaisie et l’Indonésie qui comptent à eux deux 282 millions d’habitants en 2014. Ce corps gras est le moins cher de tous ceux d’origine végétale. Il est très apprécié de l’industrie agroalimentaire pour ses propriétés physico-chimiques. La récolte peut commencer trois ans après le début de la plantation et se poursuivre pendant un bon quart de siècle. La filière est globalisée et fonctionne efficacement de la production à la consommation.
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La seule menace sérieuse serait une surproduction qui ferait baisser les cours ou une catastrophe agro-écologique comme peuvent en connaître toutes les matières premières agricoles.
Des contestations prises en compte
Le saviez-vous?
• Les investisseurs demandent désormais une charte de responsabilité sociale aux entreprises qu’ils souhaitent appuyer, sans renoncer évidemment à un juste retour sur investissement. • Il suffit de 150 palmiers à l’hectare pour obtenir une production moyenne de 5 tonnes d’huile par an en zone tropicale humide. • Signe des temps, la Banque Mondiale vient de renouer avec des investissements sur le palmier à huile, mais sous des conditions strictes.
J’ai pris bonne note de la polémique en cours concernant le palmier à huile. D’après mes renseignements, les menaces de boycott sont suivies de très peu d’effets, aucune autre huile ne pouvant réellement prétendre remplacer à coût égal l’huile de palme dans ses utilisations agroalimentaires. La filière huile de palme a créé la RSPO (Round table for Sustainable Palm Oil) sur la base d’une volonté partagée d’autorégulation. Elle a su s’en servir pour que certains augmentent leurs profits par une meilleure organisation, ouvrir de nouveaux secteurs d’applications et tarir en partie les critiques que l'on pouvait faire sur les triples points de vue de l’environnement, de la santé et des relations avec les populations autochtones.
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LES FINANCIERS Des recommandations parfois détournées La rédaction des 8 principes et des 32 critères RSPO est de mon point de vue béotien un modèle d’écriture consensuelle pour concilier les références vertueuses avec la réalité du terrain. Ainsi par exemple, une société adhérente peut-elle déroger au principe 2 de rendre publics les documents de gestion en estimant que leur divulgation « pourrait avoir des conséquences environnementales ou sociales négatives ». Elle peut aussi prétendre avoir pris en compte un conflit foncier avec les populations autochtones non pas en le résolvant mais « en engageant des procédures de résolution de conflit acceptées par les parties ». Dans le point 3 figure la recommandation de ne plus avoir recours à des feux pour l’élimination des déchets forestiers en renvoyant au point 5 qui permet d’en faire usage si « c’est le moyen le plus efficace et le moins nuisible pour l’environnement de minimiser les risques de graves épidémies de ravageurs et de maladies ». On trouve aussi une remarque au point 4 acceptant que « le contrôle de la toxicité ne s’applique pas aux petits agriculteurs ». Plus loin, il est recommandé de ne pas appliquer les pesticides par voie aérienne sauf « en cas de justification documentée ». Il est aussi indiqué que « la tenue d’un registre de formation ne doit pas être obligatoire pour les petits agriculteurs ». Le point 5 recommande entre autres que « Les petits agriculteurs doivent adopter des mesures pour éliminer les produits chimiques et leurs emballages », ce qui me paraît bien vague ! Il est clair que la recherche d’un consensus aussi large que possible a orienté la rédaction des ces principes et critères.
Un espace de rencontre international Tout bien pesé, je pense que la RSPO est très utile comme plate-forme de dialogue et de négociation consensuelle au sein d’une filière mondialisée, aux acteurs multiples porteurs d’intérêts parfois divergents. Elle a montré sa capacité à désamorcer des attaques organisées par des associations de consommateurs, des organisations non gouvernementales et d’autres groupes d’intérêt en rédigeant de nouvelles recommandations tout en les assortissant d’exceptions et en laissant une large capacité d’adaptation aux réalités nationales.
Dans son état opérationnel, la filière palmier à huile peut devenir celle des deux ors, j’entends l’or rouge pour l’huile de palme et l’or jaune pour l’huile palmiste, pour des groupes financiers comme celui que je représente. Le circuit est validé, les garde-fous sont en place, le marché est demandeur et les deux principaux pays producteurs que sont la Malaisie et l’Indonésie en font des moteurs de croissance dans la durée. Leur réussite économique fait envie à d’autres pays potentiellement bien placés au plan agro-écologique en Afrique et en Amérique latine. La diversification des sources géographiques d’approvisionnement est attendue comme une évidence. Plusieurs dizaines de pays sont prêts à louer des terres arables avec des baux de 99 ans pour accueillir des plantations industrielles ou villageoises de palmier à huile, donnant en retour toute garantie pour régler à leurs niveaux des problèmes de propriété des terres et d’occupation actuelle des sols. Certains acceptent même de louer les services d’une partie de leurs forces de maintien de l’ordre pour garantir la sécurité des plantations. Que peut-on rêver de mieux ? D’autant que les investisseurs privés sont très souvent indispensables au démarrage des projets de plantation si l’on veut réellement éviter de faire appel à « l’argent de la forêt » qui consiste toujours à vendre les bois commercialisables pour financer les travaux d’aménagement, de plantation et de fertilisation pendant les trois premières années. Divers groupes européens expriment clairement leur réticence à soutenir des projets qui ne respecteraient pas a minima les certifications RSPO, voire d’autres critères plus sévères recommandés par les organisations non gouvernementales, internationales et certaines associations de planteurs. La Banque mondiale veut même aller plus loin : définir ses propres critères sur la base desquels se feraient leurs investissements.
Mes recommandations Dans ces conditions, je vais recommander un engagement progressif de nos fonds pour aider à la création de nouvelles plantations hors des zones forestières natives comme plan relais entre la plantation et le début de la production. Il semblerait, sous bénéfice d’inventaire, qu’il y ait du crédit carbone à quérir. Et je vais garder un œil ouvert sur la branche des biocarburants en cas de renchérissement des produits pétroliers. Mon groupe espère des rendements annuels à un chiffre, peut-être à deux pour nos plus gros contributeurs. Naturellement, il n’entre pas dans ma mission de m’interroger sur l’origine des fonds, ma fonction consistant simplement à découvrir de nouveaux pâturages agroalimentaires et agro-industriels pour les faire fructifier. Toutefois, je vais m’assurer de la fourniture d’huile certifiée RSPO durable pour convaincre des actionnaires anxieux d’investir dans un cadre éthique. D’ailleurs, je pourrais aussi proposer le soutien d’une fondation pour faire accéder les petits planteurs à un système coopératif dans le but de leur permettre un accès plus simple à la certification. À chacun son métier. Je crois connaître le mien. 52
Nigeria © Tristan Durand-Gasselin
Les deux ors
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Le saviez-vous?
• Son fondant dans la bouche est en rapport avec le fait que l’huile de palme redevient liquide à la température du corps humain. • La mention « huiles végétales » sur les emballages avait une vertu dissimulatrice d’autant plus efficace que notre inconscient collectif avait accepté en fin du siècle dernier le fait que les huiles d’origine végétale étaient probablement plus saines que les huiles d’origine animale.
Les liens pédagogiques
© Françoise Chirara
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le point de vue d’un amateur inconditionnel d’huile de palme raffinée
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Au risque de déplaire Contrairement aux ennemis du palmier à huile, j'aime l'huile de palme et entends dire pourquoi. Tout d’abord, parce qu’une fois qu’elle est désacidifiée, dépigmentée et déodorisée, son goût est neutre, ce qui permet de l’associer à des substances organoleptiques les plus variées pour l’alimentation humaine. En préparation culinaire, elle ne se dénature pas facilement à la cuisson, résiste longtemps aux mécanismes d'oxydation, de polymérisation et d'hydrogénation, ce qui présente des avantages considérables sur le plan de la conservation des plats cuisinés. Cette qualité est très appréciée au plan industriel mais aussi pour les plats de rue qui peuvent se conserver toute une journée dans des conditions tropicales chaudes et humides. En d’autres termes, les préparations ne rancissent pas aussi vite que des produits utilisant d’autres huiles animales ou végétales. L'avantage est évident pour le vendeur qui peut compter sur une durée de vie plus longue de ses productions mais aussi pour le consommateur que je suis car je prends moins de risques d'intoxication alimentaire. J’évite aussi le désagréable goût rance de l’huile de palme fraîche auquel mon palais caucasien n’est pas accoutumé.
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En mélange avec d’autres huiles ou tout simplement d’autres ingrédients entrant dans la composition des plats cuisinés, l’huile de palme apporte une texture onctueuse aux produits finis qui est très appréciée par la grande majorité des consommateurs dont le gourmet que je suis. Elle serait due au fait que l'huile de palme reste solide à température ambiante, qu’elle garde sa consistance tout en restant souple à des températures à peine plus élevées et qu’elle est physico-chimiquement compatible avec d'autres huiles, sans perdre ses propriétés.
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Bénin © Philippe Amblard
LES CONSOMMATEURS
Un devoir d’information longtemps non satisfait Certes, je n’ai pas vraiment apprécié que l’on m’ait caché pendant de trop nombreuses années l’utilisation croissante de l’huile de palme dans les crèmes glacées, les bonbons, les chocolats, les glaçages en pâtisserie, les boissons à base de café, de thé ou de chocolat, les biscuits croustillants, les barres caramélisées, les pâtes feuilletées, la margarine, d’autant que je ne savais pas qu’il y en avait aussi dans les produits d’hygiène corporelle, les détergents, les « nutriceutiques », les bougies, les produits pharmaceutiques et même les savons métalliques. Pour faire court, j’ai tardivement compris qu’un produit de consommation courante sur dix contenait de l’huile de palme et que nous étions un milliard de consommateurs dans mon cas, ce qui ne console de rien en ce qui concerne les mensonges par dissimulation. À l'origine, m’a-t-on dit, il s’agissait de permettre à un transformateur de changer d’huile en cours d’opérations sans l’obliger à changer d’étiquettes !
© Palmelit
Mais je reprendrai bien une part de cet excellent flan pâtissier !
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Le point de vue d’une diététicienne pondérée
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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A resituer dans un contexte alimentaire Si l’huile parfaite n’existe pas, l’huile de palme, composé naturel utilisé depuis des millénaires par les Africains du Golfe de Guinée, n’a rien de commun avec un poison alimentaire. En qualité de diététicienne, il m’importe de rétablir quelques vérités sur la base de faits bien établis par la science. Cette huile contient beaucoup d’acides gras saturés comme l’acide palmitique (44 %), l’acide stéarique (4,5 %) et l’acide myristique (1%). On trouve ces molécules en proportion comparable dans le beurre sous forme également d’acide palmitique (21,7 %), d’acide stéarique (4,5%) et d’acide myristique (7,5%). Ces deux corps gras contiennent aussi des acides gras mono-insaturés comme l'acide oléique à 38% pour l'huile de palme et 20% pour le beurre, et des acides gras poly-insaturés comme l'acide linoléique à 10% pour l'huile de palme et à 3% pour le beurre. Les dangers diététiques mis en avant par certains groupes d’influence représentant les intérêts de filières oléagineuses concurrentes viennent d’une corrélation statistique supposée, mais démentie par les méta-analyses les plus récentes, entre le taux d’acides gras saturés dans l’alimentation, l’hypercholestérolémie avec un taux de L-cholestérol trop élevé et la surmortalité des obèses des nations industrialisées en lien avec des maladies cardiovasculaires. On a encore besoin d’études épidémiologiques à très grande échelle prenant en compte des facteurs multiples pour acquérir une conviction affermie.
Pour les pays en développement
Les liens pédagogiques
La consommation d’huile de palme brute, la fameuse huile rouge, dans les pays d'Afrique est une source importante de tocophérols dont la vitamine E qui a des vertus antioxydantes et dont le bêtacarotène joue un rôle essentiel dans la biosynthèse de la vitamine A. Malheureusement, elle a aussi une odeur très forte, ce qui oblige les raffineurs à dépigmenter l'huile et à la désodoriser. Cette double opération fait baisser considérablement la teneur de ces deux vitamines lors du raffinage.
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Le saviez-vous?
A ce qu’il me semble, pour les consommateurs d’huile de palme français à raison de 1 kilogramme par individu et par an sur 50 kilogrammes de graisses ingérées, le danger sanitaire n’est pas bien grand. Mais on ne sait rien de ce qui se passerait si tous les pays du Sud prenaient l’habitude d’être approvisionnés uniquement en huile de palme raffinée, incolore, inodore et pauvre en vitamines A et E. En effet, une huile de palme n’a pas du tout les mêmes conséquences métaboliques selon qu’elle est brute ou raffinée, consommée par des populations carencées ou surnutries.
• L’huile de palme, même raffinée, n’est pas une huile de table dans les pays du Nord. • De même que la consommation de beurre est bénéfique pour l’organisme humain quand elle est raisonnable, celle d’huile de palme doit rester modérée. • Pendant presque trente ans, le consommateur n’a pas eu droit à une information claire sur l’origine des huiles végétales qu’il consomme dans les préparations industrielles.
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LES CONSOMMATEURS Les conséquences de l’hydrogénation partielle Les huiles de soja, de colza ou de tournesol pourraient représenter une solution de substitution intéressante à l’huile de palme si on ne leur faisait pas subir un processus d’hydrogénation pour recréer des acides saturés indésirables, à partir d’un support qui contenait surtout des acides gras insaturés, et répondre ainsi aux exigences physicochimiques des industriels. Ce procédé a l’inconvénient de produire des acides gras saturés « trans » à mauvaise réputation cancérigène et cardiovasculaire. L’huile de palme qui est naturellement hydrogénée est plus stable que les autres huiles végétales à forte température. En outre, elle coûte à la tonne 10 à 40% moins cher que les huiles végétales d’autres sources. Elle a aussi des qualités technologiques supérieures du point de vue des industriels de l’agroalimentaire.
© Françoise Chirara
En conclusion provisoire Dans l’état actuel de nos connaissances diététiques, la consommation sans excès de mets préparés avec de l’huile de palme n’est pas plus dangereuse que la cuisine au beurre ou la consommation de charcuterie et de produits laitiers, riches eux aussi en acides gras saturés mais bien ancrés dans les habitudes alimentaires occidentales. L’acheteur des produits alimentaires transformés ou préparés est désormais clairement informé de la présence d’huile de palme et il peut faire le choix personnel de n’en point consommer.
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Le point de vue d’un consommateur bien informé
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le saviez-vous?
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• Après les polémiques autour du sang contaminé, de la vache folle, des lasagnes au cheval, le crédit de la science s’est effrité dans l’esprit du consommateur. Dans le doute, il se méfie des mentions figurant sur les produits, faute de pouvoir construire son opinion sur la base de critères compréhensibles pour lui. • Le détail des quantités et des origines végétales n’est pas indiqué sur les étiquettes car il pourrait trahir un secret industriel, admirable argutie.
Une étiquette sans opinion L’étiquette devrait permettre l’identification précise d’un produit. Pour les produits alimentaires pré-emballés, au-delà de sa taille, de sa forme, de son emplacement, de sa texture, qui sont propres à chaque marque, elle doit respecter des obligations légales : renseigner objectivement le consommateur et ne pas l’induire en erreur. Parmi les mentions obligatoires figure par exemple la liste des ingrédients mis en œuvre par ordre d’importance décroissante, y compris les additifs et les arômes.
Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
Les liens pédagogiques
En ma qualité de citoyen contribuable ayant travaillé dans plusieurs pays tropicaux hébergeant des plantations de palmiers à huile et lecteur de revues faisant écho de controverses, je me suis intéressé, en 2014 aux étiquettes pour orienter mes achats. Je vous invite à sourire, comme moi, du résultat !
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LES CONSOMMATEURS Un inventaire édifiant Après un itinéraire au départ réconfortant avec des appellations du type « huile de palme, huile de palm, huile palmiste, graisse de palme, graisse palmiste, oléine de palme, stéarine de palme », je suis resté perplexe devant des appellations plus générales comme « huile végétale, graisse végétale, huile végétale hydrogénée, mono-di glycéride d'acides gras, monostéarate de glycérol » En ce qui concerne les additifs alimentaires et les agents pour les cosmétiques, j’ai eu l’impression que tout était fait pour qu’un non spécialiste reste en dehors des connaissances utiles. Que l'on en juge par la liste suivante comme premier échantillon :
© Alain Rival
E 160a(ii) β-carotène, E 304 Palmitate d’ascorbile : antioxydant, E 335 (Monopalmitate de sorbitane polyoxyéthylène, Polysorbate 40 (Monopalmitate de polyoxyéthylène (20) sorbitane ; PEG(80) sorbitan palmitate ; Tween (40) : émulsifiant, E 431 Stéarate de polyoxyéthylène 40; Monostéarate de polyoxyéthylène 40 ; Polyoxyl 40 stéarate ; Polyoxyl stearate ; PEG-8 stearate ; polyéthylène glycol monostearate: émulsifiant, E 432 Monolaurate sorbitane de poloxyéthylène 20 ; Monolaurate de poloxyéthylène 20 sorbitane ; Polysorbate 20, E 433 Monooléate de polyoxyéthylène, Polysorbate 80, Monooléate de polyoxyéthylène (20) sorbitane: émulsifiant, E 434 Monopalmitate de polyoxyéthylène sorbitane; Mono palmitate de polyoxyéthylène 20 sorbitane; Polysorbate 40 ; Monopalmitate de sorbitane polyoxyèthylène 20, E 390* Thiodipropionate de distéaryle, E 470* Sels d’acides gras de magnésium: agent de texture, E 471 (Monopalmitine, Monooléine, Monopalmitate de glycérine, Monooléate de glycérine, Mono- et diglycérides d’acides gras, Monostéarate de glycérine, Mono- et di-glycérides d’acides gras, Monostéarine) : émulsifiant d’origines diverses suivant les marques, E 472 (a-f) Mono et diglycéride d’acides gras d’origines diverses : palme, colza, tournesol etc..., E 472a Mono et diglycérides acétylés ; Esters glycéroliques de l’acide acétique et d’acides gras ; Esters acétiques des mono- et diglycérides d’acides gras ; Acétoglycérides, E 472b Esters lactiques des mono et diglycérides d’acides gras; Esters glycéroliques de l’acide lactique et d’acides gras Lactoglycérides, E 472c Esters glyceroliques de l’acide citrique et d’acides gras, Citroglycérides, E 472d Esters tartriques de mono- et di-glycérides d’acides gras, E 472e Esters glycéroliques de l’acide diacetyltartrique et d’acides gras, E 472f Esters acétique et tartrique des mono- et diglycérides d’acides gras, E481 Stéaroyl-2-lactylate de sodium, Lactylates de sodium, Stéaroyllactylate de sodium, E 482 Stéaryl de calcium lactylé : émulsifiant, E 483 Tartrate de stéaryle; Palmitryltartrate de stéaryle: émulsifiant, E 484 Citrate de stéaryle: émulsifiant, E 495 (Palmitate de sorbitane, Monopalmitate de sorbitane. mélange d’esters de sorbitol, de sorbitan et d’isosorbide, Span 40) : émulsifiant, E 572 Stéarate de magnésium ; Sel de magnésium de l’acide octadécanoïque ; distéarate de magnésium: épaississant.
Un jeu de pistes En ce qui concerne les dérivés du palmier à huile utilisés dans le domaine de l’entretien et de l’hygiène, la liste est longue mais d’autres huiles végétales ou dérivés pétroliers peuvent aussi en être la source. On notera toutefois la très grande diversité des produits pouvant avoir un rapport avec l’huile de palme : Acide palmitique ; palmitic acid, palmityl alchohol, acide stéarique, acides/alcool gras - fatty acid/alcohol, agent tensioactif anionique, agent tensioactif ionique, alcool cetylique, alcool stéarique, alcool de Palmityl , palmityl alchohol / alcool palmitique / 1-hexadecanol , aluminum tripalmitate/triisostearate, amonium lauryl sulfate, ascorbyl palmitate, BTMS, polyaminopropyl biguanide stearate, cetearyl, cetyl alcohol, cetyl palmitate, cetearyl alcohol (cetostearyl ou cetylstearyl alcohol) (mélange d’acide stéarique et d’acide palmitique), cetearyl sodium sulfate, cetearyl Isononanoate, cetearyl ethylhexanoate, cetearyl octonoate, dextrin palmitate, decyl glucoside, dipalmioethyl hydroxyethylmonium methosulfate , disodium laureth sulfosuccinate, disteardimonium hectorite, dodecanol, Elaeis guineensis oil, ethylhexyl palmitate, fatty alcohol sulphate, glycerin/glycérine/glycérol, glycéryl myristat, glycol palmitate, hexyldecyl laurate, hydrated palm glycerides, hydrogenated palm, hydrogenated palm glycerides, hydrogenated palm glycerides citrate, hydrogenated palm kernel glycerides, isopropyl myristate, isopropyl palmitate, isostearyl palmitate, laurate sucrose, laureth-7, laureth-2, laureth sulfate ammonium, laureth sulfate sodium, lauryl glucoside, methyl palmitate, myristate d’isopropyl, myristyl myristate, palm glycerides citrate, octyl palmitate, octyldodecanol, octyldodecyl myristate, 2-octyldodecyl palmitate, palm kernel / palm kernel acid, palm kernel oil / PEG-6 Esters, palm oil, palmolein / oléïne de palme, palm stearine, palmitate d’isopropyl, palmitoyl oligopeptide, PEG-3 dipalmitate, PEG 200/100 hydrogenated glyceryl palmitate, PEG-stearate, PPG-15 stearyl ether, potassium palmitate, polyglyceryl-3 palmitate, retinyl palmitate, sodium ceterayl sulfate, sodium dodecyl sulfate, sodium isostearoyl lactylaye, sodium lauroyl sarcosinate, sodium lauryl sulfoacetate, sodium lauryl glucose carboxylate, sodium myreth sulfate, sodium palm kernelate, sodium palmate, sodium palmitate, sodium stearate, sorbitan palmitate, sorbitan stéarate, sucroesters d’acides gras, sucrose distearate, sucrose laurate, sucrose palmitate / sucrose dipalmitate, sucrose polystearate, sucrose stearate, sucrose myristate, steareth -2 et steareth -20, stearamidopropyl dimethylamine, stearic acid / stearic alchohol/ alcool stéarique, stearoyl-2-lactylate de sodium, trihydroxypalmitamindohydroxypropyl myristyl ether, zinc palmitate, sodium lauryl sulfate.
A cette liste qui pour le moins rend perplexe, on comprend que le consommateur curieux mais non instruit dans ce domaine, se sente privé d’une information utile pour prendre une décision responsable. Il perd ses repères traditionnels et ne comprend pas la divergence des avis des experts puisqu’il n’a accès ni au vocabulaire, ni aux concepts. Il paraît que la réglementation européenne va évoluer pour permettre de mieux informer les consommateurs mais en même temps, on me dit que la mention « sans huile de palme » constituant une mise en garde serait illégale en Europe puisqu’elle ne serait pas un risque sanitaire avéré. Je sens monter en moi une légère céphalée.
Deux conclusions provisoires Mes deux conclusions sont d’une très grande simplicité: - La première est qu’il me paraît évident que la chimie industrielle de l’huile de palme se porte bien, même si nombre de ses produits composés, dérivés, agrégés, transformés sont facilement produits à partir de n’importe quelle autre huile végétale. L’oléochimie palmiste a un très bel avenir. - La seconde est qu’un consommateur instruit de la nomenclature chimique a plus de chances de comprendre la subtilité de l’étiquetage qu’un candide comme moi. Faut-il rechercher ou ajouter des critères éthiques, sanitaires, bio, aux mentions déjà portées sur les étiquettes ? Ou disposer d’un appareil électronique pour lire les informations cryptées dans des hiéroglyphes électroniques, genre flash code ? 58
Le point de vue d’un buveur raisonnable de vin de palme
Les liens pédagogiques
Sénégal © Françoise Chirara
Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
Sénégal © Françoise Chirara
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le saviez-vous?
• En Afrique de l’Ouest, du Nord et du Centre, nous savons faire du vin de palme depuis au moins aussi longtemps que les Babyloniens savaient faire du vinaigre à partir de palmiers, c’est-à-dire 5000 ans avant notre ère. • De nos jours, les hommes des villages africains se chargent généralement de la collecte de la sève, les femmes du commerce du vin de palme. • La zone de prélèvement de la sève est recouverte avec des écorces ou des herbes pour éviter d’attirer des insectes et d’autres animaux amateurs de sève sucrée. • Le vin pétillant et acide obtenu est parfois distillé pour obtenir un alcool fort de 60°, le « Koutoukou », aux effets dévastateurs dans les campagnes africaines. 59
LES CONSOMMATEURS Des pratiques traditionnelles Beaucoup de récolteurs extraient la sève du palmier à huile en coupant en haut de l’arbre une partie de l’inflorescence mâle puis en encochant le pédoncule. La sève s’écoule dans un entonnoir réalisé avec des feuilles de palmier avant de rejoindre un récipient propre ou ayant déjà contenu du vin de palme. Le même mode opératoire est appliqué aux palmiers dattiers, aux palmiers raffia, aux palmiers rônier et aux cocotiers. En entretenant plusieurs fois par jour les saignées sur les palmiers à huile que l’on m’a désignés, ce qui m’oblige à chaque fois à une escalade avec une ceinture spécialement conçue pour cela, j’obtiens plusieurs litres de sève par journée. Le problème est que ce prélèvement se fait aux dépens de la production de fruits de l’année. Une fois à bonne hauteur, j’incise le stipe en plusieurs endroits pour récolter la sève dans des récipients accrochés. L’abattage d’un palmier que l’on retaille pour chaque prélèvement est d’après moi une mauvaise pratique car le vin produit est de moins bonne qualité et l’on perd le producteur de sève. Pour stimuler l’écoulement de la sève dans une encoche taillée dans le stipe, l’usage du feu est fréquent chez certains récoltants de ma connaissance.
Ghana © Tristan Durand-Gasselin
La fermentation naturelle commence aussitôt dans le récipient récolteur grâce à l’action de levures naturelles qui décomposent les sucres en gaz carbonique, alcool et molécules énergétiques qu’elles utilisent pour leur multiplication. Il faut souvent mettre un tissu léger dessus pour éviter que des insectes ne s’y noient. En une à deux heures, le vin titre entre 2 et 4° d’alcool. Il est de couleur blanche, laiteux, doux et encore sucré. Après quatre heures, le taux d’alcool peut atteindre 6 à 7°. Au fil des heures, des bactéries entrent en compétition avec les levures. Le vin devient alors pétillant, corsé, parfois âpre ou acide. Il prend une teinte plus foncée. Le taux d’alcool augmente ensuite jusqu’à atteindre 12° en trois jours. L’acidité s’accroît en même temps à cause de la présence d’acides lactique, acétique et tartrique. Le méthanol et le propanol qui viennent d’apparaître occasionnent des maux de tête aux consommateurs de vins vieux.
Le meilleur pour la santé Le vin de palme le plus apprécié est naturellement celui qui est bu peu de temps après la collecte de la sève. Il contient beaucoup d’acides aminés, désaltère et défatigue. Nous sommes environ 10 millions de buveurs occasionnels en brousse comme en ville. De très nombreux dépôts de boissons dans les villages et en périphérie des villes sont approvisionnés en vin de palme, concurrençant parfois la consommation de bière. Cette boisson traditionnelle est tolérée, réglementée ou interdite par les autorités qui aimeraient percevoir les taxes prévues sur les boissons alcoolisées mais qui enragent de ne pas pouvoir mettre un inspecteur auprès de chaque débit de boisson, surtout très loin en brousse. En dehors de cet aspect fiscal, le vin de palme permet à des populations désœuvrées de se procurer quelques revenus pour assurer leur subsistance. Et aux consommateurs raisonnables de combler quelques carences liées à un régime alimentaire monotone, sans compter la régénération de la faune et de la flore intestinales malmenées. En Afrique, les palmiers à huile âgés jouent ainsi le rôle de caisse d’épargne. En cas de grande difficulté économique ou de dépenses imprévues (funérailles), d’heureux évènements (fiançailles, mariage, naissance), ou de besoins immédiats en trésorerie (pour rembourser un microcrédit, acheter un animal), les sujets les plus vieux sont sacrifiés pour produire le vin de palme « bangui » et générer ainsi quelques centaines d’euros par palmier. 60
Des revenus non négligeables Nous, femmes africaines vivant en brousse, assumons souvent dans les villages la responsabilité de l’extraction et de la commercialisation de l’huile de palme qui est une source importante de revenus. Le palmier représente le capital et ses fruits sont les intérêts annuels. Certes, il faut convaincre les hommes jeunes de grimper aux arbres avec une machette pour couper les régimes et nous les apporter. Certains demandent à être payés pour ce travail, ce qui est l’occasion de grandes palabres. D’autres se contentent de compliments et de bons plats en sauce.
Les liens pédagogiques
Côte d’Ivoire © Edmond Colson
Nigeria © Tristan Durand-Gasselin
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le point de vue d’une femme africaine respectueuse des traditions
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Le saviez-vous? • En Afrique, certains habitants des villes n’hésitent pas à faire le voyage en brousse pour s’approvisionner en huile rouge qui a le goût de leur enfance. • On jette parfois une pierre chaude dans l’huile rouge pour lui donner une saveur inimitable. • On n’abat un palmier à huile mature qu’en cas de grandes difficultés. Il sert alors de source de sève pour les fabricants de vin de palme 61
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LES CONSOMMATEURS Dans notre région Nous avons coutume de déposer des lits de palmes au pied des palmiers pour éviter que les grappes de fruits mûrs ne s’abîment à la chute. Ensuite, nous les transportons dans des cuvettes posées sur la tête jusqu’à un lieu proche des cases jugé favorable à la fermentation durant 3 à 4 jours. Quand l’odeur évoque la noix de coco, nous procédons ensemble à la séparation des fruits de la grappe en prenant garde de ne pas nous piquer sur les épines des épillets. Ensuite, nous secouons les fruits sur des paniers tressés pour faire tomber tous les déchets qui peuvent y adhérer. Cette opération achevée, nous préparons un grand fût métallique contenant de l’eau au-dessus d’un foyer pour ramollir les fruits. Après un bon moment de bain chaud, l’extraction de l’huile sera à la fois plus facile et plus complète. Les plus expérimentées d’entre nous décident du bon moment et montrent aux jeunes la manière de le reconnaître. Si les quantités de fruits sont petites, nos meilleures pileuses sur mortier vont se mettre à l’œuvre. En présence d’une grande abondance de fruits, nous choisirons de les fouler aux pieds dans un lieu propice à la rétention de l’huile puis nous ajouterons un peu d’eau.
L’huile extraite Les graines se déposent finalement au fond tandis que la pulpe huileuse surnage. Certaines femmes les broient séparément pour obtenir une huile orange utile à la fabrication de savon de brousse avec la cendre des foyers éteints. Les fibres sont enlevées à la main. La crème huileuse qui se forme en surface est souvent recueillie séparément du reste du liquide pour assurer les soins de la peau. Le reste du liquide est chauffé sur des déchets végétaux comme les rafles ou les rachis des palmes pour séparer par décantation la bonne huile rouge de l’eau. On la met dans une marmite placée sur un feu de bois pour finir l’évaporation de l’eau et éviter son acidification. Cette pratique permet d’obtenir l’huile douce, qui n’a pas le goût âcre des préparations par macération et fermentation longue des fruits. L’huile de la variété dura issue de la cueillette est souvent la plus appréciée par les connaisseurs.
En accompagnement Nous, les femmes, chantons pendant toutes ces opérations pour entretenir notre ardeur au travail tandis que les hommes assis plus loin à l’ombre des cases, échangent des commentaires en mâchonnant des bâtons à dents. Les femmes discutent entre elles des parts revenant à chacune pour leurs besoins propres, et de celles qui assureront la vente du surplus de l’huile rouge au prochain marché. Elles en espèrent des revenus importants en basse saison, car l’extraction artisanale de l’huile est alors plus rémunératrice que la vente des fruits à l’usinier.
Bénin © D. Dufour
L’une de mes compagnes, ayant voyagé plus que les autres, explique que l’on peut obtenir une huile noire en cuisant les amandes de palmier pendant plusieurs heures. Ce jus d’huile est souverain contre le dessèchement de la peau. Il facilite aussi la repousse des cheveux si on pratique des massages prolongés. Les yeux rieurs, elle dit en confidence qu’il vaut mieux faire ces soins quand l’homme est au champ, car l’odeur les fait fuir !
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Le point de vue d’un statisticien attentif
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Des chiffres éloquents J’adore les chiffres et ils me le rendent bien. Ils permettent de quantifier les perceptions, de mesurer les écarts et de rendre objectives les impressions de tendance. La production mondiale annuelle d’huiles végétales hors autoconsommation frôle les 175 millions de tonnes en 2014, ce qui représente la moitié du poids de la communauté humaine adulte sur la planète. Le palmier à huile contribue à lui seul pour 39,4% avec près de 70 millions de tonnes dont 63 tonnes en huile de palme et 7 tonnes en huile de palmiste. Plus de 90% de la production vient d’Asie du SudEst. Elle représente avec l'huile de palmiste 39% de la production mondiale des huiles végétales, le soja 27%, le colza 15%, le tournesol 8%, l'arachide 3%, le coton 3%, le coprah 1% et l'olivier 1%. Les surfaces cultivées en palmier à huile sont passées de 1,5 million d’hectares en 1980 à plus de 18 millions d’hectares en 2014, soit 12 fois plus. Dans la même période, la production a été multipliée par 10.
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• Les plantations de palmiers à huile couvrant 18 millions d’hectares produisent bien plus d’huiles en 2014 que les cultures de soja qui occupent près de 110 millions d’hectares, encore qu’il soit vrai qu’on cultive surtout ce dernier pour ses protéines. • Depuis 2006, les cours des huiles végétales suivent ceux du pétrole brut sans que la possibilité de transformer une partie de la récolte d’huile de palme en agro-carburants suffise à expliquer complètement cette corrélation des marchés.
Colombie © Tristan Durand-Gasselin
Les liens pédagogiques
Le saviez-vous?
Le peloton de tête des pays producteurs représente 95% de la production mondiale avec l'Indonésie à 50%, la Malaisie à 38%, la Thaïlande à 3%, le Nigeria et la Colombie à 2% chacun. D'autres pays sont aussi producteurs émergents : la PapouasieNouvelle-Guinée, les Philippines, le Brésil, l'Équateur, le Pérou, l'Amérique centrale, la Côte d'Ivoire, le Cameroun, le Bénin et depuis peu la République démocratique du Congo, le Liberia, la Sierra Leone et le Kenya.
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Indonésie © Tristan Durand-Gasselin
LES OBSERVATEURS
De gros consommateurs au Sud L’Asie continentale et celle du Sud-Est consomment près de 30 millions de tonnes par an, soit 60% de la quantité totale produite. Parmi les pays utilisant plus de un million de tonnes d’huile de palme par an figurent l’Inde avec 7,8 millions de tonnes, la Chine (6,3), l’Indonésie (5,7), la Malaisie (3,6), le Pakistan (2,2), la Thaïlande (1,5), le Bangladesh (1), le Nigeria (1,2), l’Union européenne (5,2 dont 21% de ses besoins en huiles végétales et à 60% pour les usages alimentaires). En 2015, la consommation individuelle de corps gras devrait atteindre 15 kg/an en Asie et dans le Pacifique, 29 dans les pays européens et d’Amérique du Nord, 20 en Amérique du Sud et presque 9 en Afrique, ce qui laisse prévoir une large marge de croissance de l’ordre de 22 millions de tonnes par an pour les producteurs d’huiles végétales, l’huile de palme et l’huile de palmiste occupant la première place.
À garder en mémoire Pour produire autant d’huile qu’un hectare de palmiers à huile, il faudrait ensemencer 6 hectares de colza, 8 hectares de tournesol ou 10 hectares de soja et souvent utiliser plus de fertilisants, de désherbants et d’insecticides. En outre, la tonne d’huile de palme en 2014 valait 821 dollars US contre 909 pour le soja, 907 pour le tournesol et 1190 pour le coprah.
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Le point de vue d’un historien scrupuleux
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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La recherche des causes Habitué à découvrir dans le passé les racines du présent et familier des amnésies rétrogrades, je me suis demandé si les causes de l’incroyable expansion du palmier à huile ne pourraient pas se cacher dans un passé finalement récent, les acteurs les plus actifs n’étant pas nécessairement ceux que l’on imagine. Le palmier à huile est une plante bien connue des Africains des pays du Golfe de Guinée depuis des millénaires pour les nombreux autres usages que l’on peut en faire, extraction d’huile incluse. La création de plantations dans les régions tropicales humides et équatoriales a été le fait de colons de la fin du XIXe siècle. Ils avaient pour objectif d’approvisionner les pays occidentaux en huiles utilisables dans les savonneries. Au début du siècle suivant, des colons anglais et néerlandais ont introduit l’élaeiculture dans l’Ile de Sumatra aux dépens des forêts primaires en place qui, selon leur perception, ne rapportaient rien. Une logique de même inspiration a conduit à la déforestation quasi-totale de l’Europe et de l’Amérique du Nord.
En l’an 2000
Les liens pédagogiques
Le saviez-vous?
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• Cette filière de production a trouvé son barycentre en Asie du Sud-Est depuis les années 1975 et exploite parfaitement le marché créé par d’autres. • Des extensions en Afrique de cultures industrielles et villageoises du palmier à huile en zone tropicale humide sont à prévoir, portées par des plans nationaux volontaristes, le plus souvent étayés par un partenariat public/privé. • La filière huile de palme tourne à plein régime et n’a plus besoin de trouver de nouveaux clients acheteurs de biocarburants. Les besoins alimentaires et industriels absorbent toute sa production, surtout au Sud. • La demande en huile de palme et produits dérivés continue à croître dans tous les pays, spécialement dans ceux qui sont qualifiés d’émergents comme l’Inde, la Chine, l’Indonésie ou le Pakistan. • Il est souhaitable que les gouvernements des Etats s’approprient les principes et critères RSPO pour construire des systèmes de certification obligatoires s’appuyant sur un cadre législatif clair et appliqué avec rigueur.
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Cette année là, il s’est passé un événement qui n’a pas attiré l’attention des médias mais qui a eu des conséquences énormes à terme. Un groupe d’intérêts liés au commerce des huiles végétales agissant au niveau de la FAO et de l’OMS a infléchi les travaux de la Commission du Codex Alimentarius créé en 1963 pour mettre au point des normes alimentaires, des lignes directrices et des codes d’usages internationaux et harmonisés visant à protéger la santé des consommateurs et à assurer des pratiques loyales dans le commerce des aliments. Sur la base d’éléments nouveaux inconnus du grand public, elle a autorisé en l’an 2000 l’usage de matières grasses végétales dans les produits chocolatés. Malgré la résistance vigoureuse de défenseurs du chocolat traditionnel, les fabricants industriels ont vu un avantage économique immédiat à incorporer des huiles végétales concrètes à leurs préparations d’autant que les produits finis restaient goûteux, se conservaient mieux et donc pouvaient rester bons pour la vente plus longtemps. Une opportunité exceptionnelle venait d’être créée au bénéfice de toute la filière du palmier à huile, mais elle n’aurait eu guère de poids au niveau international si d’autres circonstances n’étaient pas apparues en relais.
LES OBSERVATEURS De la vache folle à l’huile de palme En 2001, la suspension de l’usage des farines animales dans l’alimentation du bétail a fait suite à la crise de « la vache folle ». Cette directive a créé les conditions favorables à l’importation massive de tourteaux de soja et de palmier à huile. En cinq ans, les importations des farines d’origine végétale ont été multipliées par 35. Un nouveau débouché européen aux produits dérivés du palmier à huile pour contribuer au fonctionnement des filières animales venait d’être offert sur un plateau consensuel.
Une obligation d’étiquetage à conséquence L’obligation légale en 2005 de mentionner la présence d’acides gras « trans » sur les produits agroalimentaires commercialisés dans certains états des États-Unis d’Amérique a eu pour conséquence de doubler les importations d’huile de palme dans ce pays grand amateur d’acides gras saturés. Une chance nouvelle pour la filière d’huile de palme qui se dote en même temps d’une instance d’autorégulation, la RSPO (Round table for Sustainable Palm Oil). En 2014, les étiquettes des produits destinés à la vente en Europe doivent identifier la source des corps gras végétaux, ce qui veut dire que la mention floue « Huiles végétales » devrait disparaître au profit du nom des espèces oléagineuses employées (palmier, soja, colza, arachide).
Une juste place dans les agrocarburants
Des coups de pouce successifs
Anxieuse de diversifier la source de ses carburants, l’Union européenne s’engage en 2007 à couvrir 10% de ses besoins en faisant appel aux agro-carburants comme peut en proposer la filière du palmier à huile. Cette dernière investit encore très peu dans ce domaine qui concerne environ 1% de sa production annuelle. Cinq ans après, l’Union européenne s’inquiète de se voir accusée de détourner des aliments pour faire rouler des voitures. Revenant sur sa décision antérieure, elle fixe un nouveau seuil de contribution en agro-carburants à 5%.
En replaçant tous ces événements en suite logique de mon point de vue d’historien, il est évident que la filière du palmier à huile a su saisir toutes les opportunités et en créer d’autres en sa faveur. Il est à noter que les appuis circonstanciels ou concertés sont venus des nations industrialisées. Aussi, me semblerait-il mal venu de leur part d’accuser les principaux pays producteurs du Sud d’avoir bénéficié de ces aubaines, même si plusieurs pays du Sud-Est asiatique s’en servent comme moteur de développement, dans le même esprit que d’autres exploitent leurs mines ou leur pétrole.
Thaïlande © Tristan Durand-Gasselin
L’histoire jugera La filière du palmier à huile est un bon exemple de l’évolution rapide des rapports Nord-Sud. En effet, la production et la consommation d’huile de palme se trouvant majoritairement au Sud en même temps que de nombreux groupes de consommateurs, des accords Sud-Sud ont vu le jour. Par ailleurs, l’histoire récente montre que la polémique autour de cette source d’huile végétale est nourrie par les pays du Nord. Les pays émergents vont bouleverser encore le paysage partenarial du fait que certains d’entre eux sont à la fois producteurs et consommateurs d’huile de palme. Il faudra attendre un peu pour voir comment les flux se stabilisent au niveau mondial car la surproduction est aussi un risque à considérer. Tout bien pesé, il semble honnête de constater que l’histoire coloniale continue de se faire sentir sur la filière, la matière brute étant produite au Sud et les produits manufacturés au Nord. Mais ce système est en train de changer car les pays producteurs investissent maintenant dans les secteurs du transport, du raffinage et de l’oléochimie afin de bénéficier de la valeur ajoutée à la fin de la chaîne de transformation. En outre, dans les pays du Sud à forte croissance comme la Malaisie, la disponibilité en main d’œuvre agricole constitue de plus en plus un facteur limitant réel. Une mise en perspective historique permettra probablement de savoir si la RSPO a enclenché une spirale vertueuse relayée par les Etats ou si elle a pour mission de défendre préventivement les intérêts de ses membres en s’appropriant et ainsi en privatisant des concepts et des biens publics comme la responsabilité sociale, la durabilité des exploitations, le respect des communautés, la responsabilité des entrepreneurs, l’intensification écologique, les pratiques éthiques, l’expérience partagée ou la traçabilité. De mon point de vue, j’ai plutôt tendance à être admiratif de la résilience active de la filière huile de palme qui a su utiliser les ricochets de l’histoire pour trouver de nouveaux débouchés dans les domaines de la consommation alimentaire, des usages agro-industriels et de la fabrication des biocarburants quand elle n’a pas contribué à l’écrire, dans l’ombre comme en pleine lumière. 66
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Le point de vue d’un homme de la forêt déçu
Avant la ruée vers l’huile Dans un passé lointain, il y avait peu de chances pour qu’au cours de notre courte vie, nous rencontrions d’autres peuples. Aussi avionsnous pris l’habitude de nous désigner comme étant « Les hommes de la forêt ». Chasseurscueilleurs nomades, nous trouvions tout ce qui était nécessaire à notre subsistance dans la forêt primaire : de quoi nous nourrir, nous soigner, nous vêtir, nous abriter et même de quoi rêver grâce à des plantes soigneusement choisies par nos chamanes.
Liberia © Tristan Durand-Gasselin
Les liens pédagogiques
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
Chaque matin, nous partions en file indienne et en très petits groupes sur des sentiers qui nous conduisaient à des fruits mûrs, des poissons familiers, des lieux de baignade, des sites de chasse. À notre retour, outre les provisions faites, nous partagions avec ceux de la communauté qui étaient allés ailleurs tous nos étonnements : les traces d’un tigre, l’installation d’une bande de singes, la maturité d’une floraison, la découverte d’une ruche à miel, un nouveau gisement de pierres à polir. C’était une sorte de feuilleton enrichi de nos rêves pour nous préparer aux lendemains.
Le saviez-vous?
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• Hommes de la forêt, nous revendiquons le droit de choisir notre monde, ayant déjà trop souffert des choix des autres. • A Bornéo, sept millions d’hectares sur 75 seront consacrés au palmier à huile dès que nous, hommes debout, auront été déplacés ailleurs. • Nous refusons que des organisations non gouvernementales internationales, régionales ou nationales, parlent en notre nom et qu’elles aient pour objectif de nous maintenir en état de nature comme des animaux dans des parcs naturels.
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Des hommes venus d’ailleurs D’immenses étendues de notre forêt ancestrale, celle pour laquelle nous étions faits, ont été détruites par des hommes venus d’ailleurs. Sans se présenter, sans respecter nos territoires, sans demander notre autorisation, avec des outils puissants, bruyants et nauséabonds, ils ont abattu nos plus beaux arbres pour les emporter avec eux et ont mis le feu au reste. Pendant des semaines puis des mois, les arbres ont brûlé en faisant des bruits d’explosion et de souffrance à arracher le cœur. Innombrables sont les plantes et les animaux, petits ou gros qui ont péri. Les animaux qui le pouvaient se sont enfuis aussi loin que pouvaient les porter leurs ailes et leurs pattes. Les autres ont été incinérés, asphyxiés vivants. Certains des nôtres y ont ajouté leurs cendres. 67
LES OBSERVATEURS Le passage des juristes aux-pieds-nus Lorsque des « parajuristes », qui sont aux juristes ce que les médecins aux pieds nus sont pour des médecins, nous ont demandé de nombreuses années après ce drame ce que nous pensions des plantations de palmiers à huile, nous ne savions pas quoi répondre, car nous n’avions pas de mots pour dénoncer une catastrophe aussi grande. Qui pourrait supporter de vivre confiné dans une réserve aux ressources naturelles limitées, d’être privé de la possibilité de se déplacer aussi librement que ses ancêtres, de regarder des faux arbres étrangers pousser sur les terres de nos aïeux et d’être l’objet de soins plus attentifs que pour nous, de partager le sort des derniers tigres qui pour se venger de trop d’inconfort attaquent parfois l’un des nôtres et de souffrir de maux nouveaux comme des maladies de peau et des ongles, des saignements de nez, des infections oculaires, des ulcères de l’estomac, des problèmes de fertilité et de grossesse, à cause de l’empoisonnement des eaux ?
Des nouvelles d’un autre ciel Un pasteur évangélique qui s‘est déclaré soucieux de sauver nos âmes à défaut de pouvoir soigner nos corps nous a parlé de l’évacuation possible de 5 millions de personnes comme nous pour faciliter un projet de plantation de palmiers à huile. Nous avons eu l’impression que l’avenir du monde est réservé à cette herbe géante venue d’un autre continent et qui est devenue une divinité au bénéfice de laquelle nous devrions être sacrifiés. Nos propres gouvernants nous considèrent-ils comme des citoyens à part entière ? Sommes-nous bénéficiaires de mêmes droits que ceux qui vivent dans les forêts climatisées d’immeubles en béton ? Les normes certifiant la durabilité prennent-elles réellement en compte notre « consentement libre et informé » ? L’avenir de nos enfants n’intéresse plus personne. Nous ne savons même plus ce qu’il faut souhaiter pour eux : doivent-ils oublier nos traditions pour être assimilés aux peuples envahisseurs ou les conserver intactes, au risque de devenir des sujets de curiosité pour des touristes toujours plus nombreux, moins respectueux de nos coutumes et qui volent notre image armés de leurs appareils photographiques impudiques ? Bien que considérés trop souvent comme des citoyens de seconde zone dans certains de nos propres pays, voire des noncitoyens privés d’identité et donc de droit à la propriété, la plupart d’entre nous ne veulent cependant pas être cantonnés à l’image de bons sauvages qu’il faut conserver dans l’état où ils se trouvent, pour les intégrer par exemple dans des parcours d’écotourisme conçus sans notre accord. Mais nous ne voulons plus mourir d’une septicémie après une blessure bénigne, être obligés de n’avoir qu’un enfant car une jeune mère ne peut en porter deux sur son dos, ni être privés d’envoyer nos jeunes dans des écoles. Beaucoup d’entre nous aimeraient dormir dans une vraie maison au lieu d’une case, avoir une motocyclette pour aller au bourg, un réfrigérateur pour conserver le gibier, disposer d’une radio pour écouter les autres mondes ou même d’un téléphone portable pour converser avec eux.
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Qui nous aidera maintenant que notre habitat forestier est menacé de toute part ?
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Le point de vue d’un tigre de Sumatra aux abois
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le saviez-vous? • Nous, tigres sauvages, sommes passés en un siècle de 100 000 individus à moins de 3 000. • A Sumatra, notre habitat naturel, la forêt tropicale, a été réduit de plus de la moitié dans les 25 dernières années.
En chute libre Mes cousins tigres de Bali ont disparu en 1940, de la Mer caspienne en 1970, de Java en 1980. Les hommes escomptent que nous devrions disparaître dans une quinzaine d’années à Sumatra. Pour retarder cette échéance, certains d’entre eux veulent nous placer en captivité comme si la privation de liberté était pour nous un avenir. A les en croire, nous ne sommes plus que quelques centaines dans l’Ile, ce qui accroît les risques de consanguinité. A mon avis, il vaudrait mieux lutter contre les braconniers qui nous vendent aux amateurs de médecine chinoise en pièces détachées : peau, os, dents, griffes, moustaches et même pénis !
© Tristan Durand-Gasselin
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A moins qu’ils ne préfèrent faire taxidermiser nos morts empoisonnés en faux trophées de chasse.
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LES OBSERVATEURS Le territoire confisqué Notre espèce a perdu en quelques années plus de 12 millions d’hectares d’espace vital où nous pouvions trouver l’abri et le couvert puisque nous nous nourrissons de sangliers, de tapirs, de singes et de poissons. Notre repas complet peut représenter 50 kg de viande par jour. Chacun de nos mâles adultes a besoin d’un territoire de chasse de 60 à 100 kilomètres carrés pour bien se nourrir, rencontrer 2 à 3 femelles et assurer sa descendance. Toute réduction de notre espace vital a des conséquences désastreuses pour notre survie.
L’inconfort introduit Les forêts sont exploitées par les forestiers pour certaines essences jugées économiquement intéressantes puis détruites par le feu dans le dessein d’agrandir les plantations industrielles comme celles de palmier à huile, d’eucalyptus, d’acacia ou d’hévéa. Les faux-arbres à huile de palme plantés nous sont indifférents par eux-mêmes mais la manière dont on les cultive pèse très lourd sur notre vie. Nous ne trouvons dans les plantations ni nourriture, ni abri. L’eau qui coule en périphérie est souvent polluée par des engrais ou par des effluents des huileries, même si des progrès sont enregistrés. Plus de poissons, une eau trouble, des chasseurs braconniers qui nous tendent des pièges pour nous capturer ou des employés des plantations qui nous mènent la vie dure pour compléter leurs salaires. Comment survivre ?
Un tigre de compagnie ?
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
Honte à ceux qui nous endorment avec des somnifères puissants cachés dans de la viande servant d’appât avant de nous parquer dans des zoos ou de nous vendre à des amateurs riches sur tous les continents ! Il arrive même que nous soyons loués à la seule condition que l’emprunteur garantisse une surface de confinement au moins égale à 400 mètres carrés ! Je ne parle pas des multiples prélèvements de peau, de sang, de sperme pour les mâles, d’ovules pour les femelles, des inséminations artificielles, des vaccinations inadaptées, des calmants pour que nous n’effrayons pas les touristes, de la nourriture indigne de nous et des soins inappropriés. A ce régime, nous dégénérons de génération en génération, ne gardant que nos favoris blancs et notre robe jaune et rousse rayée de noir pour faire croire que nous sommes encore des fauves de Sumatra. Il est devenu plus qu’urgent de préserver de grands îlots forestiers et des corridors de biodiversité afin que nous puissions assurer notre conservation et notre reproduction dans des biotopes adaptés à nos besoins. Ne peut-on pas envisager pour nous ce qui a été offert aux loups et aux ours d’Europe ? Devons-nous envier le rare ornithorynque d’Australie ou l’abondant moustique tigre?
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Le point de vue d’un spécialiste de la biodiversité native
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Des équilibres naturels Chacun sait maintenant que la biodiversité des forêts tropicales natives est impressionnante, tant par la diversité des espèces animales et végétales que par le nombre d’individus appartenant à chacune d’entre elles, sans oublier les innombrables relations antagonistes et synergiques qui existent entre elles. Les populations humaines adaptées à ces habitats forestiers vivent en osmose avec le milieu ambiant depuis des millénaires en ne prélevant que ce qui est nécessaire à leur maintien.
Les liens pédagogiques
Liberia © Tristan Durand-Gasselin
L’homme résident traditionnel, souvent en équilibre démographique depuis des millénaires, exploite des ressources naturelles renouvelables et contribue aussi aux échanges entre les êtres vivants en servant d’hôtes à certains parasites, en adoptant de jeunes mammifères séparés de leurs parents, en participant à la dissémination des graines par la consommation des fruits, en éliminant les proies les moins rapides et en servant de proies pour d’autres. Même les poisons naturels que les chasseurs-cueilleurs utilisent sont reconnus et dégradés par d’innombrables microorganismes.
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En forêt tropicale du Sud-Est asiatique, d’Amazonie et du bassin du Congo, j’ai rencontré un nombre incroyable d’insectes et de plantes dans la canopée, à tous les étages de la forêt ainsi qu’au sol et dans le sol. Si de gros mammifères y circulent comme des orangs-outans, des tigres, des éléphants, des rhinocéros, de nombreuses petites espèces y vivent jour et nuit. On ne compte plus le nombre de singes, d’oiseaux de paradis, de chauves-souris, de fleurs, de fruits, de lianes, entrevus de jour comme de nuit. L’air chaud et humide est entretenu par des pluies abondantes. D’invisibles ou d’envahissantes communautés prospèrent, s’attaquent, se défendent et échangent des messages sonores, visuels, tactiles, gustatifs et odorants dans l’air et sous terre, au contact comme à distance.
Le saviez-vous?
• Par rapport aux écosystèmes naturels que représentent les forêts primaires en régions tropicales et équatoriales, les plantations de palmiers à huile constituent un écosystème de mutation, car le couvert végétal le précédant est entièrement détruit par les coupes et le feu. • Pour le malheur des forêts ancestrales, le palmier à huile a besoin du même type d’habitat pour grandir dans de bonnes conditions écologiques et donc être en capacité de produire beaucoup d’huile. • S’il est incontestable que la biodiversité locale subit une diminution dramatique par suite de la destruction souvent complète de la forêt primaire, la biodiversité des plantations de palmiers à huile est loin d’être nulle, même si peu d’efforts sont faits pour la connaître. • Des projets d’inventaires se mettent progressivement en place, dans le but de connaître cette biodiversité et d’en utiliser les « services écosystémiques ».
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LES OBSERVATEURS Un déséquilibre introduit Du fait que le rendement escompté par les planteurs doit être le plus élevé possible, le plan type des plantations de palmiers à huile obéit à un schéma standard : un sol déboisé récemment ou naturellement fertile, pas de plantes concurrentes à l’exception de plantes de couverture choisies et contrôlées, le moins de compétition possible entre les individus producteurs, ce qui suppose qu’ils soient régulièrement espacés les uns des autres à une densité moyenne de 150 palmiers à l’hectare et que les axes de drainage et de récolte soient toujours praticables. Le tout aboutit à mettre en place un schéma d’implantation rationnelle qui n’a rien à voir avec un milieu antérieur créé et entretenu par la nature. La destruction brutale par la scie, les engins de coupe et de terrassement, et le feu apportent une perturbation aussi considérable pour l’écosystème préexistant que s’il était inondé à cause de la mise en place d’un barrage. La plupart des êtres vivants n’ont pas d’autre choix que de fuir ou de mourir, très peu pouvant survivre au passage d’un feu et coloniser ensuite les brûlis, d’autant que des engins mécaniques viennent souvent niveler les terres et perturber les couches organiques superficielles du sol. Les êtres vivants qui échappent à l’étouffement par les fumées, aux brûlures et à la crémation ne sont pas sauvés pour autant, car leurs territoires ayant disparu, ils doivent en reconquérir un autre. Comment sera reçu le tigre évadé par des congénères installés avant lui ? Où iront les hommes premiers ? Comment les orangsoutans résidents accueilleront-ils les congénères avec lesquels il faudra partager les ressources ? Que deviendront les graines en place dans les terres brûlées ? Où se déposeront les cendres emportées dans le ciel ou par les eaux de pluie ruisselantes ? À qui serviront-elles ? Même si l’on admet que 15% de la biodiversité native survit en plantation, il est évident pour moi que la répartition de la flore et de la faune est toujours fortement altérée. Il est juste de dire que certains observateurs distinguent des organismes gagnants à cette reconversion de l’utilisation des sols, mais comme le nombre d’espèces perdantes est considérablement plus élevé, il serait de mauvaise foi de s’en réjouir. D’évidence, une plantation de palmiers à huile n’est pas une forêt primaire et ne peut pas même être comparée à une forêt secondaire, bien qu’elle capte plus de gaz carbonique que n’importe quelle autre culture tropicale.
Une grande monotonie paysagère Au sol, la monotonie d’une culture mono-spécifique saute aux yeux du promeneur qui déambule dans ces allées rectilignes où les plants sont souvent placés en lignes parallèles et en hexagones du fait d’une plantation en triangles équilatéraux de 9 mètres de côté. Pour un expert en biodiversité, le milieu est très silencieux, hors le bruit lancinant des palmes dans le vent. En parcourant la même distance en pleine forêt native, la différence de sons, d’odeurs, de couleurs, de saveurs et de grains de surface est considérable. Cette comparaison que j’ai souvent pratiquée fait prendre conscience de l’artificialité de l’écosystème mutant de production en masse de l’huile rouge.
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33 La suite du point de vue d’un spécialiste de la biodiversité native
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LES OBSERVATEURS
Une biodiversité aliénée et partielle Pourtant, une certaine biodiversité existe dans les plantations de palmiers à huile matures. Elle résulte d’au moins trois sources. La première est liée aux actions volontaires des planteurs : préparation des sols pour accueillir les jeunes plants, ensemencement de plantes de couverture, introduction d’insectes pollinisateurs et de chouettes effraies, gardiennage, présence d’ouvriers agricoles et d’éventuels animaux de compagnie. La seconde est en rapport avec les agents pathogènes importés avec les plants, l’introduction involontaire de pathogènes, de parasites, de prédateurs et de déprédateurs du palmier à huile contre lesquels le planteur est obligé d’investir des moyens pour maintenir ces ravageurs de tous types sous un seuil d’impact économiquement supportable. La troisième est due au fait que le nouveau milieu créé intéresse certains des animaux et des plantes qui viennent de la périphérie. On aura ainsi à surveiller les rongeurs, les cochons sauvages, les oiseaux tisserins, les serpents, des criquets, des coléoptères, des chenilles mineuses, certains acariens, des champignons pathogènes et des mauvaises herbes comme Chromolaena odorata, Ottochloa nodosa, Asystasia intrusa, des mimosas envahissants. Chaque organisme intrusif tire un avantage particulier du nouvel écosystème. Les singes macaques viennent se nourrir des fruits comme les sangliers. Les rapaces apprécient les perchoirs. Les insectes pollinisateurs sont attirés par l’odeur anisée des fleurs mâles et femelles du palmier à maturité. Les serpents cobras et boas s’intéressent aux rongeurs et aux batraciens. Les cochons sauvages recherchent les racines, les larves d’insectes et les vers de terre. Les moustiques font la chasse aux hommes pour les piquer. Les adventices profitent des fertilisants normalement destinés aux palmiers. Les chauves-souris y trouvent des perchoirs en hauteur. Les rats-taupes apprécient les racines turgescentes. Les écureuils y découvrent de nouveaux territoires à vivre en trois dimensions. Les voleurs humains sont attirés par les fruits mûrs pour extraire artisanalement de l’huile destinée à la consommation en famille et la revente sur les marchés. Et l’on ne dit rien des intrusions nocturnes d’animaux ne laissant pas de traces, du passage furtif de fauves souhaitant passer d’un lambeau de forêt à un autre, des parfums de la sylve toute proche et des effets de lisière. En outre, j’aimerais insister sur le fait que la microfaune et la microflore du sol sont profondément remaniées par suite des aplanissements avec des engins de terrassement, du creusement des andains, du tassage de la terre au niveau des sentiers de surveillance et de récolte des grappes de fruits, des apports d’engrais organiques et minéraux, des pollutions par les herbicides et les insecticides, du piétinement des ouvriers sur les aires de stockage, de la dépose de déchets végétaux en sortie de moulin devant servir d’engrais vert. La vie dans les couches superficielles du sol s’appauvrit en éléments indigènes, mais elle s’enrichit des déjections des ravageurs du palmier, des spores de champignons pathogènes, des œufs d’insectes pondant dans le sol, des nématodes et des exsudats des racines du palmier. Peu à peu se crée une biodiversité propre aux plantations industrielles du palmier à huile, qui par leur emprise sur le milieu naturel, segmentent l’écosystème natif par une anthropisation croissante. Cet équilibre fragile sera brusquement rompu quand il s’agira de renouveler la plantation vieillissante après vingt ans d’exploitation continue. La recommandation que je pourrai faire repose sur deux énoncés simples : procéder à des inventaires qualitatifs et quantitatifs de la faune et de la flore dans les plantations de palmier à huile industrielles, enrichir cette biodiversité par tous les moyens n’altérant pas significativement la production en huile mais susceptibles de garantir un développement plus durable des exploitations en assurant une meilleure régénération de l’agro-écosystème. J’aimerais personnellement qu’une place soit laissée aux organismes vivants dont on ignore le rôle précis mais qui pourraient trouver dans les plantations ou en lisière de celles-ci des biotopes utiles pour accomplir au moins une partie de leur cycle biologique. Je suis convaincu qu’on commande d’autant mieux à la nature qu’on prend en considération les principes qu’elle met en œuvre tous les jours, sous nos yeux.
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Le point de vue d’un écologiste activiste
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le saviez-vous? • Si l’huile de palme est inoffensive pour la santé comme l’affirment des groupes d’influence, pour quelles raisons en avoir caché pendant plusieurs décennies l’usage dans les plats préparés ? • Pourquoi mélanger l’huile de palme à d’autres huiles végétales qui coûtent plus cher à la tonne importée si elle est réputée être la seule à fournir suffisamment d’acides gras saturés ? • À quoi bon importer une huile de palme du bout du monde puisque l’on dispose de nombreuses autres sources, à moins d’y trouver des avantages économiques et industriels ? • N’est-il pas curieux qu‘on ne parle pas encore de palmiers à huile génétiquement modifiés alors que le soja, le cotonnier et le colza seront bientôt majoritairement OGM ?
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Un devoir d’ingérence Considérant que nous sommes tous colocataires de la planète, notre organisation non gouvernementale internationale estime que nous avons un devoir d’ingérence à chaque fois qu’un écosystème de notre planète est menacé.
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Après une analyse très sérieuse des conséquences de l’exploitation industrielle du palmier à huile dont la production a décuplé en trente ans, notre groupe de citoyens internationalistes éco-responsables estime que la production massive d’huile de palme a des conséquences négatives des points de vue environnementaux, sanitaires et sociaux. 75
LES OBSERVATEURS Contre la déforestation Selon moi, le palmier à huile est le prétexte justificatif de l’action des compagnies forestières qui détruisent des millions d’hectares de forêts primaires dans des pays tropicaux en Asie du Sud-Est, en Amérique latine et en Afrique tropicale. Les bois commercialisables sont extraits et vendus à des pays industrialisés, une partie des gains étant recyclée dans le palmier à huile qui est devenu une plante de rente, voire de rentiers. Les résidus forestiers sont brûlés scandaleusement à ciel ouvert en dégageant des quantités considérables de gaz à effet de serre ainsi que des volumes considérables de cendres pouvant occulter la lumière du soleil pendant des semaines dans les régions au-dessus desquelles ils se déplacent au gré des vents dominants. Personne ne peut passer sous silence la destruction de la faune et de la flore lors de ces incendies gigantesques, pas plus que la détresse des peuples autochtones nomades privés de leurs territoires ancestraux de cueillette et de chasse.
Contre les risques sanitaires Sur le plan de la santé, je pense qu’il y a à dire ! L’huile de palme contient autant d’acides gras saturés que le beurre. Pour les populations des pays émergents tropicaux, elles sont consommées pour moitié sous forme d’huile de table. Dans les pays industrialisés du Nord, cet apport lipidique était jusqu’à récemment souvent dissimulé dans de très nombreux produits de consommation courante sous le terme générique d’huiles végétales, qu’il s’agisse d’huile de soja, de tournesol, de colza, de maïs ou de palme. Or, ces populations humaines, souvent urbanisées et sédentaires, consomment déjà trop de lipides. Les politiques de la santé publique prônent sans grand succès la limitation de leur consommation en graisses saturées car elles aggravent la propension à l’obésité d’une partie des populations, à commencer par celle des enfants et prédispose les adultes aux maladies cardiovasculaires. Le fait que l’huile de palme contienne peu d’acides gras « trans » mauvais pour la santé et qu’il ne soit pas justifié de recourir à l’hydrogénation partielle ou totale en prenant le risque d’en produire plus, ne suffit pas à rassurer. Le marché est organisé de telle sorte qu’aucun d’entre nous n’a la possibilité de ne pas en ingérer, si même, il en fait le choix. Dans l’inconscient des citoyens des pays industrialisés du Nord, l’huile de palme est associée aux mauvaises habitudes alimentaires (« trop gras, trop sucré, trop salé ») car elle a été incorporée à leur insu et pendant plusieurs décennies dans les plats surgelés et les préparations industrielles dont les classes populaires déjà malnutries font grande consommation. L’alimentation de nos animaux de compagnie comme celles de nombreux animaux domestiques intègrerait aussi de l’huile de palme et leur ferait courir de nouveaux risques sanitaires.
Contre l’aliénation des hommes En plus de la spoliation des peuples de la forêt, la petite paysannerie en périphérie des plantations industrielles se trouve déstabilisée dans ses pratiques comme dans ses coutumes. En s’aliénant à la culture intensive du palmier à l’huile, l’agriculteur traditionnel reconverti ouvrier agricole dans les plantations ou ouvrier industriel dans les huileries perd une partie des valeurs culturelles autour desquelles sa vie familiale et sociétale était articulée. Il oublie la pratique de l’agriculture de subsistance et le savoir-faire qui lui permettait une quasi-autosuffisance alimentaire.
Contre le détournement des ressources alimentaires Le fait que 10% de l’huile de palme pourrait être transformé en biocarburant par un processus de transestérification dans le but de produire des esters de méthyle (biodiesel), ou après une réaction catalytique des produits comme l’essence, le kérosène, le gazole est un scandale supplémentaire de détournement des produits alimentaires. On savait déjà qu’une partie de la production de l’huile de palme était orientée vers la fabrication de graisse de forage ou de laminage, résines époxydes (polyuréthanes, polyacrylates), caoutchouc synthétique, émulsifiants, produits aromatiques (imidazolines) ou glycérol. Mais j’ai l’impression que nous ne sommes pas au bout de nos étonnements.
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La suite du point de vue d’un écologiste activiste
Pour la criminalisation écologique Pour toutes ces raisons, notre groupe d’écologistes contestataires a rejoint ceux qui pensent qu’il faut criminaliser la dégradation partielle ou totale, intentionnelle ou non inattentionnelle, d’un écosystème fragile et menacé. Le dossier du palmier à huile est à joindre à d’autres moins connus mais aussi dramatiques. Comme une pétition doit recevoir actuellement un million de signatures pour que la demande soit examinée par le Parlement européen, nous organisons des campagnes de sensibilisation auprès des 511 millions de citoyens européens recensés en 2014 pour qu’ils rejoignent nos rangs. L’objectif est d’obtenir que l’« écocide », néologisme né du rapprochement des termes « écologie » et « génocide » , devienne le cinquième crime international contre la paix après les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les génocides et les crimes d’agression. Il faut absolument disposer des outils juridiques pour poursuivre légalement les entreprises européennes qui sont des acteurs intentionnels de destructions environnementales dans le reste du monde. À mon sens, la pression doit être mise sur le grand public pour déclencher des réflexes de mises en garde par rapport à l’huile de palme et mettre à mal l’image de certaines compagnies du Nord qui s’approvisionnent au Sud pour réaliser de plus gros bénéfices. Les moyens ne manquent pas pour jouer sur la sensibilité du public et nous ne devons pas reculer devant les effets grossissants ou dramatisants.
Les liens pédagogiques
Brésil © Françoise Chirara
Nous pouvons aussi aider les acteurs de la filière à une prise de conscience écologique, car l’urgence environnementale nous oblige à une certaine forme de radicalité, même si j’ai bien conscience que l’exploitation du palmier à huile n’est qu’un élément à prendre en compte dans notre combat de sauvegarde de notre planète.
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LES OBSERVATEURS
La prochaine étape Je le dis clairement : la réforme la plus profonde doit venir des hommes et non du palmier. Il faut les empêcher d’en planter dans des environnements naturels irremplaçables comme les forêts primaires, d’abuser de la faiblesse des peuples indigènes, de polluer l’environnement par négligence, de maltraiter le personnel national employé dans les champs comme dans les usines et les encourager à mieux partager les richesses liées à la commercialisation des huiles de palme et de leurs produits dérivés, en en consacrant une part à la protection des sites naturels hébergeant une faune et une flore spécifiques et une autre part à la restauration des aires endommagées par de mauvais traitements culturaux. Sinon, nous accomplirons notre devoir d’ingérence par des actes éco-citoyens en recourant à tous les procédés qu’une planète en légitime défense nous obligera à utiliser. Leur caractère novateur serait relayé par les médias et les réseaux sociaux jusqu’à ce que nous altérions durablement l’image et les revenus de ceux qui tirent leurs ressources de la sueur et des larmes des autres. 78
Le point de vue d’un journaliste multicartes
Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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Le pigiste affamé Mes revenus dépendent des commandes d’articles qui me sont faites ou de la vente des articles que l’actualité m’inspire. Aussi ai-je toujours une oreille attentive et un œil vigilant pour picorer les thèmes se prêtant à ma plume ou plus prosaïquement à mon clavier d’ordinateur. La montée des controverses autour du palmier à huile a retenu mon attention. J’ai placé un premier article en prenant le sens du vent, dénoncer l’huile de palme sous quatre angles : la déforestation, la santé, l’appropriation abusive des terres appartenant à des populations indigènes, le réchauffement climatique. Cet article a été accueilli dans un mensuel généraliste dont le rédacteur en chef a dégraissé mon texte avant de signer à ma place. Il a fait une large place aux photographies dramatisantes issues d’une banque d’images payante.
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Ayant eu quand même le sentiment d’avoir hurlé avec les loups sans réaliser un vrai travail d’investigation, je suis revenu sur le sujet pour constater que la réalité est beaucoup plus complexe, plus nuancée, sans coupables désignés d’avance, ni solutions simplistes.
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• Le palmier à huile est un sujet en or pour parler de la biodiversité, de l’alimentation industrielle, des biocarburants. • Sans prétendre réaliser un travail digne d’un journaliste d’investigation, j’ai constaté que de nombreux angles d’attaque ont été oubliés et qu’il faudrait aussi parler des initiatives intelligentes apportant effectivement des solutions à des problèmes bien circonscrits.
Le saviez-vous?
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LES OBSERVATEURS Du point de vue de l’environnement Si l’effet négatif des feux de forêts est bien établi au niveau de la pollution atmosphérique, de la réduction de l’ensoleillement et de la réduction de la pluviométrie, il faut préciser que l’implantation du palmier à huile n’est en rapport direct qu’avec la destruction de 15% des forêts primaires en Asie du Sud-Est. En outre, certaines réserves forestières sont financées par des compagnies privées et se trouvent à l’intérieur de leurs concessions. D’autres causes de déforestation sont en jeu comme l’extension des cultures villageoises à cause de l’expansion démographique, du déplacement des populations humaines, de l’implantation de nouvelles cultures comme l’hévéa ou de bois de rapport, de l’ouverture de mines. Comme la pratique des feux de forêts pour libérer de nouvelles terres est maintenant fortement encadrée, sinon interdite, l’extension du palmier à huile va devoir s’effectuer sur des sols déjà exploités ou aux dépens de forêts dégradées. Devant une demande mondiale croissante, l’augmentation de la production oblige à une amélioration de la productivité plutôt qu’à une extension des surfaces plantées. La planification des paysages reste un objectif cadrant à mettre au premier plan des intentions d’aménagement. La libération du méthane provenant des mares de décantation des effluents d’huileries est désormais traitée par un recyclage dans des systèmes permettant de fournir de l’énergie pour des moteurs thermiques ou du réchauffage. On économise en contrepartie des produits fossiles pétroliers non renouvelables. De nos jours, les grandes plantations ajoutent à leur système de production des sous-systèmes devant permettre de recycler le maximum de produits dérivés de l’extraction d’huile au bénéfice de l’enrichissement des sols en produits organiques : compostage, valorisation de la biomasse, ne serait-ce que pour diminuer la quantité des produits fertilisants venant de l’industrie chimique, maintenant reconnus comme onéreux et polluants. Par ailleurs, il faut savoir qu’un hectare de palmeraie adulte permet le stockage d’une trentaine de tonnes de carbone par an, ce qui est beaucoup par rapport à un sol sans forêts, de type savanicole ou embroussaillé ou une prairie supportant l’élevage extensif. Il est vrai qu’une forêt primaire en stocke cinq fois plus, mais elle nourrit beaucoup moins de personnes. Sous cet angle, il est difficile de comprendre les objectifs de certaines organisations non gouvernementales contestataires, à moins que leur positionnement ne puisse se comprendre que par des objectifs non en rapport direct avec l’amélioration de la filière du palmier à huile.
Un angle économique incontournable J’ai donc rédigé un autre article que j’ai publié dans une revue consacrée aux alternatives écologiques. Disposant d’un dossier de mieux en mieux documenté sur le palmier à huile, j’ai exploité le filon pour réaliser un bilan économique qu’une revue de placements financiers a jugé intéressant car, du strict point de vue économique, la filière de l’huile de palme est un incroyable succès de certains pays émergents du Sud pour le Sud.
Une information sélective pour des publics distincts J’en ai profité pour faire un inventaire des usages possibles, apparents ou cachés, de l’huile de palme dans des produits agroalimentaires et agro-industriels courants qu’une association de consommateurs a publié dans sa revue de liaison, un point sur les biocarburants à l’huile de palme dans une revue automobile et un article sur les grands animaux mis en danger comme le tigre de Sumatra, l’orangs outans ou l’éléphant des forêts dans un journal animalier. Mon banquier me salue avec plus de gentillesse.
Liberia © Tristan Durand-Gasselin
Une autre voie ? Évidemment, j’ai changé de nom de plume à chaque contribution pour brouiller les pistes, mais une grande firme internationale a retrouvé ma trace. Elle me propose de réaliser un vrai reportage dans des unités de production d’huile de palme pour aider à construire une plaquette défendant cette filière par rapport aux enjeux planétaires de développement, en me déchargeant de toutes les préoccupations logistiques et financières. Je suis très tenté d’aller découvrir « un pays des deux ors », mais quelque chose me dit que je vais être invité à travailler à façon. Ma déontologie vacillante le supportera-t-elle ? Aurais-je une autre opportunité de me faire une opinion à partir de faits réels, vérifiés sur le terrain ? Le doute m’habite. Mais je crois que je vais dire : pourquoi pas ? 80
La Round Table for Sustainable Palm Oil Source : Michel Launois et Françoise Chirara
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L’objectif affiché Il est de promouvoir le développement et l’utilisation d’une huile de palme produite selon les principes du développement durable répondant à des standards consensuels crédibles et un engagement de toute la chaîne de production et de commercialisation. Forte en 2015 de plus de 2300 membres ordinaires, membres associés et membres affiliés, la RSPO impose des normes de production sur la base de 8 principes fondateurs et de 32 critères pour accorder une qualification CSPO (Certified Sustainable Palm Oil) pour l’huile de palme certifiée durable. Des groupes d’interprétation régionale ou nationale travaillent pour adapter ces critères aux contextes nationaux et régionaux.
? Les liens pédagogiques
Le saviez-vous?
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Une année clé En réponse aux attentes exprimées par des associations de consommateurs et des Organisations non gouvernementales depuis l’an 2000, la RSPO (Round table for Sustainable Palm Oil) a été créée en 2004-2005 en regroupant tous les acteurs de la filière du palmier à huile : planteurs, usiniers, commerçants internationaux, manufacturiers, détaillants, banquiers, investisseurs, ainsi que les Organisations non gouvernementales environnementalistes et sociales impliquées. Les organismes de recherche comme le CIRAD sont présents en qualité de membres affiliés. Le siège de la RSPO est à Zurich en Suisse, son secrétariat à Kuala Lumpur en Malaisie. Pérou © Tristan Durand-Gasselin
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• La démarche fédérative de la RSPO est un exemple rare à l’échelle mondiale d’autorégulation d’un secteur entier, de l’amont vers l’aval, sur des critères de responsabilité sociale et environnementale, même si d’autres initiatives multi-acteurs existent comme FSC (Forest Stewardship Council), PEFC (Programme for the Endorsement of Forest Certification), MSC (Marine Steward Ship Council), BONSUCRO (Better Sugar Cane Initiative Ltd), RTRS (The Round Table on Responsible Soy) par exemple. • Les membres de la RSPO jugent positives les retombées de leur adhésion à la charte : amélioration du fonctionnement des projets, réduction des impacts négatifs, productivité accrue du personnel, réduction des coûts de production, amélioration d’image, espace de dialogue et d’échange d’expériences. • D’autres acteurs non participants à cette structure fédérative jugent que la RSPO a surtout pour objectif d’améliorer l’image de la filière du palmier à huile auprès du grand public consommateur et pour conséquence de privatiser les grandes questions environnementales en mettant les gouvernements à l’écart de la certification des grandes filières.
Liberia © Tristan Durand-Gasselin
UN FEDERATEUR
Les huit fondamentaux Voici les huit principes décrits au temps présent, même s’ils représentent des objectifs à atteindre pour les acteurs fondateurs de la RSPO. 1. Engagement de transparence Les producteurs et usiniers d’huile de palme fournissent aux autres parties prenantes des informations suffisantes sur les questions environnementales, sociales et juridiques se rapportant aux critères RSPO, et ce dans les langues et sous les formes appropriées, pour favoriser une participation efficace à la prise de décision. Les documents de gestion sont accessibles au public, sauf s’ils présentent un caractère de confidentialité commerciale ou si leur divulgation pouvait avoir des conséquences environnementales ou sociales négatives. 2. Respect des lois et règlements en vigueur Toutes les lois et réglementations locales, nationales et internationales ratifiées et en vigueur sont respectées. Le droit d’utilisation des sols doit être prouvé et ne pas faire l’objet d’une contestation légitime par des communautés locales ayant des droits manifestes. L’utilisation des sols pour la culture du palmier à huile ne diminue pas les droits légaux ou coutumiers des autres utilisateurs sans leur consentement libre, préalable et documenté. 3. Engagement du maintien de la viabilité économique et financière à long terme Un plan de gestion est mis en œuvre avec pour objectif la viabilité économique et financière à long terme. Il en découlera un plan de développement durable du palmier à huile. 4. Utilisation des pratiques intégrées par les planteurs et les industriels Les procédures d’exploitation sont documentées de façon suffisante avant et pendant leur mise en œuvre, et surveillées régulièrement. Les pratiques agricoles maintiennent la fertilité du sol, ou si possible l’améliorent, à un niveau assurant un rendement optimal et soutenu. Les pratiques minimisent et contrôlent l’érosion et la dégradation des sols. Elles maintiennent la qualité et la disponibilité de l’eau de surface et des nappes phréatiques. Les ravageurs, les maladies, les mauvaises herbes et les espèces introduites envahissantes sont gérés de façon efficace à l’aide de techniques de protection intégrée des cultures. Les produits agrochimiques sont utilisés de façon à ne pas mettre en danger la santé ou l’environnement. Il n’y a pas d’utilisation prophylactique de produits agrochimiques. Ceux-ci sont classifiés par l’Organisation mondiale de la santé humaine comme appartenant aux Types 1A ou 1B ou sont inscrits sur la liste des Conventions de Stockholm ou de Rotterdam. Les producteurs sont encouragés à rechercher des produits de remplacement. Cette démarche fait l’objet de comptes-rendus. Un plan de sécurité et de protection de la santé au travail est documenté, efficacement communiqué et mis en œuvre. Tous les personnels, travailleurs, petits agriculteurs et entrepreneurs reçoivent une formation appropriée. 5. Responsabilité environnementale et conservation des ressources naturelles et de la biodiversité Les aspects de la plantation et de la gestion des usines d’extraction qui ont un impact sur l’environnement sont identifiés. Des programmes visant à réduire les impacts négatifs et à promouvoir les effets positifs sont élaborés, mis en œuvre et contrôlés afin de démontrer la poursuite d’une amélioration. Le statut des espèces rares, menacées ou en voie d’extinction et des habitats à haute valeur de conservation éventuelle, qui existent autour de la palmeraie ou de l’usine, est identifié. Leur conservation est prise en considération dans les plans de gestion et les activités. Les déchets sont réduits, recyclés, réutilisés et éliminés de manière responsable sur le plan environnemental et social. L’efficacité de l’utilisation énergétique et de l’utilisation d’énergies renouvelables est maximisée. Le recours à des feux pour l’élimination des déchets et pour le défrichage avant de replanter est évité, sauf dans des cas particuliers identifiés dans les directives de l’ASEAN (Association of SouthEast Asian Nations) ou d’autres meilleures pratiques régionales. Des plans de réduction de la pollution et des émissions, y compris les gaz à effet de serre, sont élaborés, mis en œuvre et contrôlés. 82
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La Round Table for Sustainable Palm Oil 6. Prise en compte responsable des besoins des employés, des individus et des communautés affectés par les plantations et les usines Les aspects de la gestion de la plantation et de l’usine qui ont des impacts sociaux sont identifiés selon une démarche participative, et des programmes visant à réduire les impacts négatifs et à promouvoir les effets positifs élaborés, mis en œuvre et contrôlés afin de démontrer la poursuite d’une amélioration. Il existe des méthodes de communication ouvertes et transparentes entre les producteurs et les usiniers, les communautés locales et les autres parties concernées ou intéressées. Un système documenté et convenu mutuellement est mis en place pour traiter des plaintes et revendications, et est accepté par toutes les parties. Toutes les négociations concernant un dédommagement, en cas de déchéance de droits coutumiers ou légaux, sont effectuées au moyen d’un système documenté permettant aux peuples autochtones, aux communautés locales et autres parties prenantes d’exprimer leurs avis par le biais d’institutions représentatives. Le salaire et les conditions de travail des salariés des entrepreneurs respectent toujours au moins des normes juridiques ou industrielles minimales. Ils doivent satisfaire aux besoins de base du personnel et fournir un revenu significatif. L’employeur respecte le droit de tout le personnel à former et à adhérer à un syndicat de son choix et à négocier collectivement. En cas de restrictions légales quant au droit de liberté d’association de conventions collectives, l’employeur facilite des moyens parallèles d’associations indépendantes et libres pour ce personnel. Le travail des enfants est interdit. Les enfants ne sont pas exposés à des conditions de travail dangereuses. Le travail des enfants est acceptable dans les fermes familiales, sous la surveillance des adultes, s’il ne porte pas atteinte aux programmes d’éducation. L’employeur ne pratiquera pas, ni ne tolérera la discrimination fondée sur la race, la caste, l’origine nationale, la religion, le handicap, le genre, l’orientation sexuelle, l’affiliation syndicale ou politique ou l’âge. L’élaboration et l’application d’une politique empêchant le harcèlement sexuel et toutes autres formes de violences contre les femmes, et protégeant leurs droits de procréation, sont encouragées. Les producteurs et les mouliniers doivent traiter avec les petits agriculteurs et autres entreprises locales de façon équitable et transparente. Les producteurs et les mouliniers contribuent au développement durable local s’il y a lieu.
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7. Développement responsable des nouvelles plantations
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Une évaluation indépendante, exhaustive et participative des impacts sociaux et environnementaux est entreprise avant de commencer de nouvelles plantations ou activités, ou d’en développer d’existantes. Les résultats sont incorporés dans la planification, la gestion et l’exploitation. Des études de sol et informations topographiques sont utilisées pour la planification de sites pour l’établissement de nouvelles cultures. Les résultats sont incorporés dans les plans et opérations liées à eux. Les nouveaux palmiers plantés depuis 2005 (date prévue d’adoption de ces critères par les membres de la RSPO) ne remplacent pas des forêts primaires ou n’occupent pas une zone ayant une ou plusieurs hautes valeurs pour la conservation. La plantation extensive sur les terrains escarpés et/ou les sols marginaux doit être évitée. Aucune nouvelle culture ne sera plantée sur le sol des populations locales sans leur consentement libre, préalable et informé, obtenu par le biais d’un système documenté permettant aux peuples autochtones, communautés locales et autres parties prenantes d’exprimer leurs avis par le biais de leurs propres institutions représentatives. Les populations locales sont dédommagées de toutes acquisitions de terres et abandon de droits coutumiers, sous réserve de leur consentement libre, préalable et informé d’accords négociés. L’utilisation de feux dans la préparation des nouvelles cultures est évitée, sauf dans des cas particuliers identifiés dans les directives de l’ASEAN ou d’autres pratiques régionales. 8. Engagement d’amélioration continue dans les champs d’activités clés Les producteurs et les mouliniers surveillent et révisent régulièrement leurs activités. Ils développent et appliquent des plans d’action visant à l’amélioration continue et démontrable de leurs activités-clés. La certification est en pratique délivrée à trois niveaux : • Ségrégation complète de l’huile de palme certifiée RSPO dite CSPO • Mélange contrôlé avec de l’huile CSPO • Promotion de l’huile de palme durable Il est encore mal compris qu’un mélange d’huiles certifiées et non certifiées puisse recevoir une certification CSPO. Quant à la ségrégation complète, elle supposerait des filières de traitement, de conditionnement, de transport et de transformation complètement distinctes, ce qui est encore irréaliste. Cela explique peut-être la raison pour laquelle la moitié des huiles CSPO n’a pas trouvé acheteur en 2010. Toutefois, l’explosion en 2014 des demandes de certifications CSPO et Green Palm démontre que la RSPO, association à but non lucratif, a su devenir en moins de dix ans le forum international privilégié de rencontre pour tous les acteurs de la filière du palmier à huile qui reconnaissent à la fois ses capacités d’écoute et de conseils, le caractère pertinent des orientations qu’elle choisit et les progrès accomplis dans le domaine de la traçabilité des huiles produites et traitées par ses membres. © Palmelit
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UN FEDERATEUR
Au-delà de la certification volontaire : comment aller plus loin ? Même si les principes et critères de la RSPO ont été réactualisés en 2013, certains membres de la Table Ronde ont décidé d’aller plus loin dans la certification de la durabilité de la filière, en particulier sur les questions de la déforestation, de stockage du carbone, de sauvegarde de la biodiversité, ainsi que sur la composante sociale. Ainsi, le Groupe d’Innovation sur l’Huile de palme (POIG pour Palm Oil Innovation Group) s’est créé pour promouvoir les innovations et développer de nouveaux modèles pour la production d'huile de palme durable. Il regroupe des ONG internationales et plusieurs entreprises productrices d'huile de palme reconnues comme innovantes dans les questions socio-environnementales. Lancé en Juillet 2014, le Manifeste pour une huile de palme durable repose sur un engagement commun des principaux acteurs impliqués dans la filière, destiné à assurer la durabilité dans l’ensemble de la chaîne, du producteur au consommateur. Un engagement clé du Manifeste est le financement d'une étude visant à définir les forêts à fort stockage de carbone (HCS pour High Carbone Stock) et à établir des seuils HCS intégrant les facteurs socio-économiques et politiques de l'environnement. La certification crédible de la durabilité exige des recherches sur le long terme, organisés autour grands projets multidisciplinaires à grande échelle regroupant des partenariats public/privé. Destinés à fournir des résultats fiables, robustes et partagés, de tels projets ont besoin d'un partenariat large et diversifié et - surtout – de l'implication sur le (très) long terme de tous les contributeurs. La tâche n’est pas aisée: d’immenses zones d'étude sont nécessaires, les recherches fournissent rarement des résultats immédiats, et il faut du temps avant que ces résultats soient traduits en indicateurs et en seuils fiables et applicables. 84
© Puzzle réalisé par Françoise Chirara, avec le concours photographique de Edmond Colson, Alain Rival et Tristan Durand-Gasselin
Achevé d’imprimer sur les presses de : SOULIÉ Imprimeur Frontignan Dépôt légal : 3 ème trimestre 2015
Découvrir la collection « Les savoirs partagés ® »
LE PALMIER À HUILE dans tous ses états : QUI CROIRE ? QUE CROIRE ?
Beaucoup d’entre nous sont témoins ou acteurs des controverses qui font rage autour du palmier à huile depuis le début du 21ème siècle. Entre les clans qui parlent du palmier à huile comme d’une herbe providentielle et ceux qui en dénoncent les exploitations industrielles, se rencontrent les consommateurs volontaires ou involontaires de l’huile de palme et de l’huile de palmiste. Les polémiques se chevauchent, les arguments joutent, les parties et les partis-pris s’opposent.
L’objectif n’est pas de convaincre tous les lecteurs de partager la même perception mais de faire évoluer la leur par la prise en compte de faits connus par d’autres acteurs mais souvent non partagés. Il est d’éveiller les esprits curieux en les laissant choisir un parcours pédagogique à leur goût en picorant les 160 grains de savoirs et en butinant les 205 illustrations contextuelles. L’enjeu final est de créer des perméabilités intellectuelles et culturelles plus importantes que celles qui existent par la mobilisation d’une grande diversité de savoirs scientifiques et praticiens.
Compte-tenu de sa longue expérience du palmier à huile dans tous ses états, le CIRAD a rencontré, écouté et partagé ses savoirs avec tous les acteurs de la filière en prenant en compte les éléments de confort et d’inconfort pour les hommes, les animaux et les plantes. En considérant le respect nécessaire aux opinions exprimées et l’incontournable nécessité de comprendre les avis des autres, les concepteurs de cet ouvrage proposent la prise en compte des points de vue de 36 témoins et intervenants en utilisant un style narratif empathique, suggèrent des passerelles en cours de lecture des textes, et proposent des liens pédagogiques entre les facettes d’opinions.
Au-delà des circuits propres à la recherche et au développement, les acteurs espèrent que cette contribution au partage des savoirs concernant la seule herbe géante qui sache faire deux huiles en abondance, voyage aussi dans les circuits liés à l’éducation, à la culture et à l’information.
Direction régionale Languedoc-Roussillon Service d’Appui à la Valorisation Opérationnelle de l’Information sur la Recherche Scientifique TA 178/05 - Avenue Agropolis - 34398 Montpellier Cedex 5 - France Tel: 33 0(4) 67 61 57 88 / Fax: 33 0(4) 67 61 59 73 / E-mail: espace.idees@cirad.fr Website: http://savoirspartages.cirad.fr/ © CIRAD, 2015 ISBN: 978-2-87614-697-6 EAN: 9782876146976 ISSN: 1620-0705 Dépôt lègal: 3ème trimestre 2015