CARDO / DÉCUMANUS AUTO-MOBILITÉ / AUTO-URBANITÉ
Un processus de polarisation urbaine à long terme.
Clémentine La Joie - Ensa Nantes 2015. Mémoire de PFE - Utopie métropolitaine. 1
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CARDO / DÉCUMANUS AUTO-MOBILITÉ / AUTO-URBANITÉ
Un processus de polarisation urbaine à long terme.
Clémentine La Joie - Ensa Nantes 2015. Mémoire de PFE - Utopie métropolitaine. 3
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PRÉAMBULE
Le grand territoire Nantais comme objet d’étude. Ensa, Nantes, terminus. Dernier semestre d’une série de 10 qui s’achève comme elle a commencé; dans la métropole Nantaise. Naufragée sur l’île du grand projet urbain, du plan guide de Chemetoff et du renouveau des friches industrielles, du ‘quartier de la création’, nous avons pendant les trois premières années de licence, étudié le territoire Nantais par son centre - croisé les questions de patrimoine et de mémoire collective à celles des outils et des acteurs du développement urbain (du plan guide à la création des organismes mixtes chargé de sa mise en oeuvres) - actant ainsi une première approche de la fabrication de la ville. Cependant, cette dernière année d’étude à l’ENSAN a été pour nous l’occasion de s’intéresser autrement à la ville et à son territoire ; Le semestre dernier d’abord, en tirant des bords entre Nantes et Saint-Nazaire pour découvrir une métropole estuairienne. Et puis finalement, en prenant le bus, et par la même occasion la tangente, celle d’étudier la ville par son pourtour plutôt que par son centre, de contrarier la seule vision radio-concentrée et de s’intéresser au territoire par le prime d’une organisation/ oblique non hiérarchisée.
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SOMMAIRE
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Préambule Sommaire
p.05 p.07
I – Au(dé)tour d’une ligne.
p.09
1 - Un protocole.
p.09
2 - Des questions.
p.21
II – Cardo, décumanus ? Auto-mobilité, auto-urbanité.
p.31
1 - Portrait du Cardo.
p.31
2 - En()jeux en geste.
p.41
III – De la recomposition d’un échangeur métropolitain.
p.53
1 - Enjeux
p.53
2- Programme
p.55
3- Passage
p.57
L’utopie, matrice opératoire. La tangante, prisme d’analyse et de projet. Le récit, producteur de connaissance.
De réseaux De portes. D’interstices.
Immersion Etat des lieux Récit
Quelques idées venues d’ailleur? Cardo/Décumanus Faire Place, faire paysage.
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AU(DÉ) TOUR D’UNE LIGNE. Un protocole L’Utopie, matrice opératoire L’utopie n’est ni à considérer comme un rêve ou un fantasme, mais comme le développement rigoureux d’un imaginaire des possibles. C’est la permission d’un décentrement que l’on s’offre en faisant appel à l’utopie. Le recours à la fiction devient alors un procédé qui permet de prendre ses distances par rapport à l’intant présent pour mieux le relativiser, le critiquer, le confronter ; le projeter. C’est un effort de l’imagination, une posture volontariste, pour explorer et représenter une possible réalité. Dans l’Utopie, Thomas More décrit une société idéale mais qui peut être contruite par l’homme, différente de la vision religieuse du paradis; c’est sur terre que l’utopie peut être envisagée, en prenant les hommes comme ils sont. L’Utopie n’est donc pas un but irréalisable, mais un passage, un imaginaire du réel, c’est en cela qu’elle fait projet.
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LA LIGNE TANGANTE. Cartographie de la ligne 73 (en jaune) et du périphérique (en route).
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La tangente, prisme d’analyse et de projet La ligne de bus 73 est notre prime d’étude, un prime longitudinale qui traverse l‘ouest Nantais depuis la presqu’île d’Indre le long de la Loire, jusqu’à arrivé, 39 arrêts et quelques tours de rond-points plus tard, à l’échangeur du Cardo au nord de la métropole. La ligne passe par le bourg historique de Saint-Herblain, traverse la nouvelle zone commerciale d’Atlantis, la vallée de la Chézine, la route de Vannes et son Sillion de Bretagne, la vallée du Cens et finalement Le Cardo, lisière de Nantes et Orvault. Une ‘presque’ tangente aux courbes du périphérique Nantais dans sa définition mathématique : «En géométrie, une droite est dite tangente à un cercle lorsqu’elle ne le touche qu’en un seul point, où elle a un angle nul avec la courbe et où elle est perpendiculaire au rayon» puiqu’elle le croise deux fois. Mais la notion de tangente porte également l’idée de s’échapper, s’enfuir, se dérober: prendre la tangente de quelquechose, s’esquiver adroitement. A ce titre, la ligne 73 n’est plus seulement la tangente du périphérique, elle est une invitation à la prendre. A regarder un environement métropolitaine, et pas seulement Nantais, territorial plutôt qu’urbain.
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«Parce qu’en empruntant la ligne de bus 73, on s’est découvert un sentiment d’attente, une posture expectative. Alors on s’est interrogé; mais d’où vient donc cette terrible perception? Finalement on a soupçonné tous ces paysages traversés, ou bien plutôt le rythme qu’ils nous avaient imposé. Un rythme qui ne nous est pas commun, pas radialement nôtre. Un rythme qui n’est pas celui d’une traversée d’une périphérie vers son centre, d’un calme vers une intensité, d’un dehors vers un dedans. Au contraire, le cour de la ligne 73 cascade entre ces soit-disant dichotomies. Aux portes de la ville, l’urbain s’intensifie, pour venir se noyer dans la vallée de la Chézine ou du Cens, et fini, ou commence, on ne sait pas trop, sur les bords d’une Loire retrouvée. Stupeur, tremblements, enfin une figure familière. Alors oui, finalement la ligne 73 prend la tangente, mais sans pour autant être la seule, puisqu’elles sont cinq : 73, 25, 70, 30 et 80 concentriquement moqueuses. Parce qu’en les arpentant on admire la proposition d’un regard étranger, narquois même, sur la ville centre. On les entend rire à chaque arrêt de la promesse idiote d’une traversée vers la ville et nous offrir en retour une traversée de la ville, ou plutôt des villes. Ou même des villes, du périph’, des cours d’eau, des champs, des friches, des routes, des urbanités, des ruralités, des ici et surtout d’ailleurs. » Extrait du carnet de terrain, 1 mars.
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Le récit, producteur de connaissances Au cours du semestre, nous avons été amené, par les ateliers d’écriture, à envisager l’analyse des lieux par le biais du récit ; un récit au sens large, narratif ou sous forme d’inventaire, fictif ou issue d’entretiens... A l’ombre des grands noms (Annie Ernaux ; Journal du dehors, François Maspero ; Les passagers du roissy express..), nous avons essayé de nous immerger dans les récits. Autant d’outils qui nourrissent l’analyse et en cela font projet. Qui permettent un autre regard sur le lieu, ou plutôt les lieux, de nos traversées. Plusieurs protocoles ont alors étaient mise en place : _ faire un récit de la ligne en restant dans le bus 73, en faisant un aller-retour entre récit des paysages traversés, narration de la vie à l’intérieur du bus, et impression personnelle. _ faire le récit du ‘kilomètre supportable’, un concept que nous avions entendu lors des conférences duales et qui représente, selon les services municipaux, un rayon à partir duquel les habitants d’un quartier sont à une distance ‘supportable’ et donc potentiellement utilisateurs d’une ligne de transport public (parler de : les conférences duales). Le texte qui suit présente une hybridation de ces deux protocoles, une traversée complète de la ligne, ponctuée par trois arrêts ; à Indre, à Francois Mitterand (Atlantis) et au Cardo. Première immersion dans la ligne.
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DÉBARQUEMENT DES AUTOMOBILISTES Photo de ‘Lola’, le Bac d’Indre
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Bac, Bobby, Bar. - Extrait du carnet de terrain, 14 mars. 13h47 Départ d’Indre. Le bac d’Indre est plus lent et beaucoup moins confortable, probablement à cause des voitures, que le Navibus Nantes-Trentmoult. Il a ce côté fonctionnel et quotidien que son nom représente assez : bac, c’est pas très jolie bac, c’est pas très Nantes métropole. On imagine moins bien la cargaison dominicale de Nantais venir boire son petit kir à Trentmoult en bac. Non, ils ont raison, Navibus c’est mieux, c’est plus vendeur. Enfin bus ça reste quand même un peu limite, tram ça marcherai mieux, Navitram, plus chic, sauf que tout de suite on imagine des rails, et sur l’eau c’est ça ne marche pas. Non, Navibus c’est bien. 14h12 Le Bus arrive, direction Cardo. On sort d’Indre, enfin, on: le chauffeur et moi, de toute façon il n’y a jamais personne avant Saint-Herblain. C’est sûrement pas sur cette portion-là qu’ils rentabilisent la ligne. Saint-Herblain bourg on passe. Sans transition Atlantis. Aller. A exactement 2,013km de l’arrêt François Mitterrand en marchant vers l’est par la rue de la Maison Neuve - coincée entre la N444 mal planquée derrière des haies maigrichonnes et de haut lieu gastronomique type ‘Relais d’Alsace’ et KFC - il est absolument impossible de tourner à gauche sur la rue Olympe de Gouges en cas de motorisation. Pour les autres il suffit d’escalader la rambarde de sécurité, de descendre le talus et l’affaire est faite. Entre la dizaine de hangar sur la gauche, la partie sud de la rue Olympe de Gouges donc, il y a exactement 3 maisons, les trois premières depuis le départ d’Ikéa, la rue de la Maison Neuve n’en comptant aucune. Enfin, à droite, en traversant la D75 nous y voilà ; rue Bobby Sands. Le bus 93 doit passer quelque part ici, il y a un arrêt sur la carte qui porte son nom. Bon, mais c’est un peu décevant tout ça Bobby, on dirait la rue de la Maison Neuve, en pire (avec plus de hangars). Remarque, c’est peut-être pour ça qu’il n’y a pas eu de scandales. Si les anglais sont venus voir, pas étonnant qu’ils aient laissé couler. Enfin quand même, à partir de quelle année c’est devenu envisageable de nommer
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une rue Bobby Sands ici ? Ca doit être relativement récent, je doute que sous Tatcher quiconque ait prit le risque. D’ailleurs à Paris ils sont bien embêtés avec ces deux-là ; article de 2013, le figaro, je cite : «Le Front de gauche avait proposé de donner à une rue de Paris le nom de l’indépendantiste irlandais, mort en prison au terme de 66 jours de grève de la faim, après que le conseiller de Paris UMP Jérôme Dubus, délégué général du Medef Ilede-France, eut proposé de consacrer un lieu ou une voie de Paris à la mémoire de l’ancien Premier ministre britannique Margaret Thatcher, décédée le 8 avril.» Schapira, l’ex-maire adjoint de conclure « Tout les mois j’ai quelque chose. La dernière fois c’était le pape et Chavez (...), là, Dubus annonce qu’il va faire un voeu sur Margaret Thatcher, et hop Bobby Sands. Si c’était pas dramatique ça serait extrêmement drôle ». Bon en tout cas, Saint-Herblain a tranché pour Bobby, et rentre dans le cercle très fermé des villes qui ont osé, la plupart sont françaises, une irlandaise et … Téhéran. Et coup de chapeau, là bas, ils ont même débaptisé la rue Winston Churchill, pour y mettre Bobby Sands, ce qui était osé en soit, d’autant plus qu’il s’agissait de la rue de l’ambassade de Grande-Bretagne. Laquelle a dû changer son entrée principale pour être domiciliée dans la rue d’à côté. Ici ça a l’air plus calme. D’ailleurs c’est tellement calme que je vais repartir prendre la 73. Je laisse Bobby Sands avec ses camarades anarchistes et communistes des rues adjacentes : - Julian Grimaud : dirigeant du parti communiste espagnol exécuté en 1963 par le régime Franquiste. - Sacco et Vanzetti : anarchistes d’origine italienne exécutés aux Etats-Unis dans les années 20. - Jan Palach : étudiant tchécoslovaque socialiste immolé par le feu à Prague en 69. - Julius et Ethel Rosenberg : juifs new-yorkais communistes exécutés aux Etats-Unis en 53. C’est reparti pour la rue de la maison neuve. 18h30 à peu près, arrivée au Cardo. Au Cardo, il y a un bar, un seul. Pas facile à trouver. A environ 400m de la station de
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tramway et de bus, en allant vers le Leclerc, juste un peu avant la grande surface, assez en hauteur, près d’une boutique d’e-cigarette. Sa terrasse surplombe l’immense parking du centre commercial, et à la tombée de la nuit, en ayant bu un verre ou deux et en plissant les yeux, on pourrait se croire devant un port de plaisance. Sauf que les mats des bateaux sont des lampadaires et les embarcations des autos. Malgré tout, le paysage de la terrasse du bar du Cardo est hypnotisant. D’autant plus quand on synchronise astucieusement à la vue de cette océan d’automobiles au mouillage, l’ambiance sonore atypique du comptoir, en s’asseyant près de la porte d’entrée ouverte. «L’Orvaltais», c’est son nom, est un bar d’habitués dont j’ai bien l’intention de gagner le statut. Dans 4 mois peut-être, j’obtiendrai la double dénomination d’Architecte diplômé d’état et d’Habituée de l’Orvaltais. Deux challenges intimement liés semblent-t-il. Mais pour l’instant je n’en suis qu’au titre d’étrangère régulière, promotion majeur depuis la première fois, où j’étais étrangère tout cour. Cette fois là d’ailleurs, tout concordait à signifier l’absurdité de ma présence : _ Dès l’entrée, en me jetant un coup d’oeil, la serveuse (dont j’apprendrais plus tard qu’elle s’appelle Aurélie) se précipite vers le coin tabac, comme s’il était absolument impossible que je vienne ici pour une autre raison. Mais non. Une pinte s’il vous plait ? Vous prenez la carte à partir de combien ? 10 ? Ah … bon ben deux pintes alors. _ Quelques minutes plus tard en lui faisant remarquer l’absence de concurrence dans le quartier et l’éprouvante difficulté qui fut mienne pour trouver une tireuse à bière, Aurélie m’estampille d’un bienveillant « ah, vous sortez du Cardo vous ? ». _ Et finalement enfin installée en terrasse, contemplant le port de mouillage automobiles, j’entends courir le bruit venant de l’intérieur qu’Alain part. Effectivement le dénommé Alain passe la porte et se retrouve devant moi, qui, entraînée par engouement de ses camarades, le gratifie à mon tour d’un chaleureux : « Au revoir Alain ». Sauf que c’était ma première fois à l’Orvaltais et que donc, bien évidement Alain et moi, on ne se connaissait pas. Mais ça n’a pas eu l’air de le choquer, Alain, il a tout de suite enchaîné : - Ah vous, vous aimez bien la bière. - Devant un sens de l’observation aussi affuté (puisque j’avais encore mes deux verres devant moi) je me retrouvais assez prise au dépourvu et ne sû que répondre un hésitant ; « ben oui plutôt ». La conversation partait mal. Heureusement pour la deuxième fois en 2 minutes, Alain allait sauver la situation, avec une question cette fois plus inattendue :
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- Vous êtes Nordique ? Voila, donc. La ligne de bus 73 m’a, non pas seulement, accordé le statut d’étrangère dans ma propre ville mais carrément celui de Scandinave. Qui a dit qu’il fallait partir loin pour voyager quand 30 minutes de bus suffisent.
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DEMI DE BIÈRE ET CARDO. Photo prise à la terrasse du bar ‘l’Orvaltais’.
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VALLÉE DU CENS
ROUTE DE VANNES
VALLÉE DE LA CHÉZINE
ATLANTIS
SAINT HERBLAIN BOURG
INDRE
UNE LIGNE, DES LIEUX. Cartographie de la ligne 73.
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LE CARDO
AU(DÉ) TOUR D’UNE LIGNE. Des questions. Pour resituer les propos qui suivent, il est important d’exprimer la chronologie de notre réflexion sur cette ligne 73, ni tout à fait inductive ou déductive. C’est d’abord par une carte des lieux innomables qu’a débuté notre étude de la ligne. Au cours des premières immertions, nous avons fait l’observation que face à un territoire inconnu, les mots, parfois, nous manquaient pour définir les paysages que nous traversions. Mais une fois notre site de projet choisi (le Cardo), la pertinence de cette carte s’est confrontée aux nouvelles observations et situations rencontrées ; l’innomable était alors cette situation d’interface entre périphérique et réseaux de mobilité. C’est à ce titre que nous avons donc enrichi notre première constatation au regard de ces nouvelles observations.
De mobilité. Choisir d’étudier un territoire en prenant pour prétexte une ligne de bus, toute tangentielle qu’elle puisse être, revient à interroger celui-ci dans son rapport aux transports, ou plutôt à la mobilité. Comment nous déplaçons-nous ? Comment ce mode, ce choix de transport(s) définis(sent)-t-il(s) des rapports différents à la ville ? Comment ceux-ci la façonne-t-elle? Autant de questions qui prennent une importance particulière là où la ville n’est plus ‘centre’, plus si richement déservie par les lignes de transports publics, dites structurantes ‘tramway’ ou ‘chronobus’, ou par les nouveaux outils de la mobilité ; les relais bicloo, pistes cyclables... Mais qu’entend-on de cette mobilité périurbaine : l’exclusive exclusive. Exclusive dans le sens de l’exclusivité : celle de l’automobile, comme moyen de transport unique, devenue structure des urbanités. Exclusive dans le sens d’exclusion : de ce(ux) (‘ce(ux)’ se rapporte alors autant aux hommes qu’aux urbanités) qui n’en a/ont pas les outils d’appropriations. L’exclusivité inclu l’exclusion. Mais ce constat est-il vrai ? Si la question se pose, celle qui l’a suit est d’autant plus importante : est-il immuable ?
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UN ARRET PLUS LOIN. Cartographie des lieux accessibles en un changement de transport.
D’UNE LIGNE À L’AUTRE Cartographie des lignes de bus et de tramways en correspondance avec la ligne 73
BICLOO ES TU ? Cartographie des stations de vélo en libre service dans la métropole Nantaise.
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Le réseaux.
Le réseaux de transport ‘en commun’ d’abord, celui de la mutualisation des déplacements, la ligne 73 bien que périphérique, n’en est pas exclu. Elle croise 9 autres lignes de bus (79, 59, 90, 84, 93, 91, 81, 89, C2), une ligne ferrovière (gare de Basse Indre Saint Herblain où passe le ter Nantes-Saint Nazaire et Nantes Redon) et s’arrête au terminus des trois lignes de tramway ( la ligne 1 à l’arret ‘Francois Mitterand’, la ligne 2 à l’arret ‘Cardo’ et la ligne 3 à l’arret ‘Marcel Paul’), enfin elle donne accès au bac d’Indre sur les quais de Loire permettant la traversée vers la rive Sud du fleuve. Sa situation fait donc lien entre une multitude de lignes de transports publics, et si l’on considère la distance que l’on peut parcourir en effectuant un seul changement; son air d’accessibilité s’étant alors jusqu’à Rezé, Redon, Saint-Nazaire, Nantes «centre». Périphérique disait-on ? Bien que l’on ne puisse pas considérer les services de location de vélos en libre service (Bicloo) comme transport en commun public, les outils sont bien mis en commun mais leur utilisation est individuelle, leur développement relève d’un changement des pratiques de mobilité métropolitaine et offre une nouvelle dimension à celle-ci. 101 stations Nantaises, 2 Rezéennes, aucunes à proximité de la ligne. Leur gestion, relève d’une entreprise privée (et non de la municipalité), qui en assure la rentabilité par la publicité des panneaux attenants aux stations relais. Publicité (dans le sens de l’annonce marchante) nécessitant publicité (accès au public, lisibilité) celles-ci ne sont donc présentent que dans le fragment de ville où se concentre le plus grand nombre d’usagers (ou de consommateurs?). Bicloo es-tu ? La ligne appartient donc à un réseau étendu qui une fois (re)centré l’a fait apparaître comme d’avantage d’une seule périphérique. Mais ce réseau de transport mutualisé est aussi celui d’une temporalité, les itinéraires sont prédéfinis dans l’espace et dans le temps ; diurne et linéaire. Ce réseau est donc celui d’une mobilité contrainte.
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LES PORTES NANTAISES Inventaire des échangeurs du périphériques Nantais.
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Les Portes. Si la notion de périphérique, dans le sens d’éloignement d’un lieu par rapport à un centre, est subjective (on a pu le constater en observant la situation de la ligne 73 au sein du reseau de transport) le périphérique lui, est autrement plus invariable. Figure unanime de «l’autre» réseau : celui de la route auto-mobile, de la voiture et de toute son ossature ; périphérique, bretelles, rond-point, échangeurs. Il incarne à la fois un rapport de l’homme à une mobilité autonome (ne dépendant pas d’horaires de transport en commun ou d’itinéraires pré-établis). Mais aussi un rapport de celui-ci à la ville, incluant par son existance physique, des situations de dedans, de dehors, d’intérieur, d’extérieur, de vitesse ou de ralentissement. Fréquemment imperméable, il établit cependant des espaces de porosité; les portes de la ville. A l’échelle de cette (infra)structure la «porte» est un motif, celui de l’échangeur, variable mathématique d’une doctrine routière, établit à l’échelle automobile. Les prérogatives sont doubles mais uniquement fonctionnelles ; la sérurité et la fluidité : rond-point de luxe pour automobilistes préssés. A l’échelle de la ville, celle-ci prend cependant un motif plus linéaire ; celui du boulevard (route de Rennes, route de Vannes, route de La Baule) qui déborde parfois du cadre institué par le périphérique. La porte urbaine n’est alors plus un point d’entrée mais un passage à géométrie variablement linéaire. Ces portes, ces boulevards d’entrée de ville, sont des espaces privilégiant d’un accès rapide et autonome à l’échelle métropolitaine (puisque périphérique). Ce privilège leur vaut un parasitage systhématique par les grandes centres commerciaux, autourbanité pour auto-mobilité ? On peut considérer ces portes d’entrée de ville comme les stigmates les plus manifestes d’une organisation urbaine automobile. Pour autant, le terme «automobile» ne relèvet-il que d’un ‘amoncellement d’une tonne de métal à quatres roues avec un moteur et un volant’? Où n’est-ce pas plutôt un équipement, un service de mobilité personnel et autonome ? C’est bien la confusion des deux qui créée le motif, de l’entrée de ville autant que celui de l’échangeur. 25
UN POUCE À LA PORTE (ROUTE DE RENNES) «_19h30, ca va être compliqué non ? _ oui, il est un peu tard, je pense qu’ils sont tous déjà partis. _ c’est pas la bonne porte en plus»
UN POUCE AU CENTRE (ARRET DE TRAM DU CARDO) «_j’arrive de Rennes, c’est vraiment pas long _ tu vas vers le centre là ? _ ouais je vais prendre le tram »
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Interstice, interface et internet.
La notion d’exclusivité des transports périphériques naît de la sureprésentation d’un réseau par rapport à l’autre. Pourtant les deux existe bel et bien, et c’est par ailleurs à la croisée de ces deux réseaux (le réseau automobile et celui de la mobilité publique) que se trouve l’auto-mobilité. Elle est aussi nourrie par les pratiques nouvelles qui se développent autour d’espaces aussi virtuels que physiques ; le covoiturage en est un bon exemple, à la fois ancré sur le territoire (les places de covoits sont désormais marqués par les municipalités) mais issus de correspondances internet. Celle-ci n’existe dès lors que quand la notion de complémentarité remplace celle de concurrence (public/privé), quand l’idée de partage n’est plus contradictoire avec celle d’autonomie (commun/autonome). Le passage de l’un à l’autre crée des espaces et des temps de partage, la mobilité dépasse alors la notion de transport. «Le paradigme du transport était hanté par la valeur transit : vite, loin, sans frottement ; la nouvelle mobilité porte la valeur reliance, qui se mesure en création d’opportunités, de liens, de contacts, d’activités, de sérendipité. Il ne s’agit pas d’opposer le rapide au lent, la puissance à l’intelligence ou à la douceur, le collectif à l’individuel, mais de les ajouter, de les croiser. La nouvelle mobilité est convaincue de «diversité modale». Georges Amar (auteur d’Homo Mobilis). Dans ce cadre, l’interstice devient alors une situation de projet, et l’interface un (en)jeux programmatique, desquelles découle l’auto-mobilité à la fois partagée, autonome, individuelle et mutualisée ; plurielle. Pour interroger cette notion et ce qu’elle peut représenter en terme d’urbanité, il faut s’appliquer à la confronter au territoire et aux pratiques. À ce titre le Cardo fait figure de terrain d’étude privilégié, puisqu’il est déjà le support d’expression d’une multitude de pratiques ; covoiturage, autostop, et l’interface des réseaux automobiles (avec l’échangeur autoroutier) et de transport en commun. Un lieu des correspondances. 27
L’HOMME, LE BUS ET LE PÉRIPH’. Photo prise à l’arret de la ligne 73 ‘Jalière’. Sous le périphérique Nord.
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HEURE DE POINTE AU CARDO Photo prise à l’arret de la ligne 73 ‘Le Cardo’.
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LE CARDO, DÉCUMANUS ? Portrait du cardo «Les lieux sont des actions, La limite de quelquechose c’est la limite de son action, et non pas le contour de sa figure.»
Gilles Deleuze.
Immersion Le Cardo n’était pas un choix de site éclairé, dans aucun sens du terme. Pourtant nous y étions toutes les trois déjà allées, ou plutôt passées. Il y a toujours des rendez-vous au Cardo. Des rendez-vous à deux, trois, parfois cinq ; on attend sur l’esplanade, en regardant son téléphone, il ou elle arrive et on s’en va déjà. Ce qu’on voit du Cardo dans ce cas ?Pas grand chose; l’esplananade, la station de tram, le norauto et très souvent les embouteillages. Parce que comme chaque vrendredi, beaucoup partent, comme nous, en week-end ou en vacances. Il est 18h, il fait presque nuit et il y aura des bouchons sur le périph, c’est sur. Quatre ans de pratiques, qui m’aura valu un nombre assez impressionnant de 1/4h passés à attendre les covoitureurs. C’est une mésentente sur l’heure du rendez-vous qui me fera quitter pour la première fois l’esplanade; Arrivée une heure trop tôt. Chercher un café, marcher, se résigner à aller au Leclerc, parce qu’autour on ne voit rien. La première fois, c’était il y a 5ans, j’avais rendez vous aussi, mais pas au Cardo, sur les quais de la Loire, avec deux inconnus. A ce moment la, en passant au Cardo, je n’ai vu ni l’échangeur, ni le Leclerc, ni même l’esplanade, seulement le sentiment anxiogène que le road-trip touchait à sa fin et qu’on arriverait bientôt en ville, et en avance pour ‘l’entretien’. J’ai dessiné le vélo sur le post-it, comme ils me l’ont demandé, les deux types avaient l’air content, c’était partis pour 5ans.
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Plaine de jeux et cimetiaire Parc
Chateau de Plessy Vallée du Gesvres
Vallée du cens
LES VALLÉES COMME CADRE
Hyppodrome
(2)
(4)
(3) Périphérique
(1)
Ligne 73
LES RÉSEAUX DE MOBILITÉ COMME STRUCTURE
Route de Rennes
Tramway 2
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Etat des lieux Le Cardo d’abord le nom d’une esplanade située dans le nord de la métropole, à la lisière de la commune d’Orvault et de la ville de Nantes. Au centre, un arrêt de tram high-tech aux poteaux disproportionnés. C’est ce Cardo là que les inités des voyages vers la Bretagne, à coup de pouce ou de réservation blablacar, connaissent. Partie émergée de l’iceberg seulement. Car derrière la place se cache des univers bien différents.
Paysage / Le cadre et les figures cachés
Le Cardo se situe au coeur d’un bassin versant, matérialisé par deux vallées qui le bordent, à l’Est la vallées du Gesvre et à l’Ouest celle du Cens. Au delà du périphérique, au nord, malgré le mitage des terres agricoles par l’habitat pavillonnaire et les zones franches, se trouve deux parcs importants ; celui du château de Plessy et le parc cimetière (lui même adjacent au golf). Ce cadre continu les limites de notre périmètre d’étude en marquant une frontière nette dans les dynamiques urbaines. Pourtant si on les remarques clairement en plans ou en vues satellites, on ne les perçoit que rarement, les vallées sont décaissées, cachées derrières les jardins des maisons et les immeubles de la Berthelotière ou de la Petite Censive, les parcs dissimulés derrières les remblais du périphérique.
Mobilité / Intersection, interactions ?
Le Cardo se situe à l’intersection de plusieurs axes viaires structurants ; _ la route de Rennes reliant Nantes à la capitale bretonne _ le périphérique pourtour de la ville centre. Il est aussi le support de plusieurs lignes de transport collectif majeur ; _ la ligne de tramway n°2 reliant le Cardo au centre-ville Nantais, se poursuivant jusqu’à Rezé au sud de la Loire _ la ligne de bus 73, reliant par la tangente l’ouest Nantais, d’Indre au Cardo, en passant par Saint-Hebrlain, Atlantis, Le Sillon et les vallées du Cens et de la Chézine. L’échelle de la mobilité douce, piétonne ou cycliste, est elle cependant absente phagocytée par les flux de la grande mobilité (automobiles) et entravée par les infrastructures de celle-ci.
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(1) L’HABITAT PAVILLONAIRE. Photo satellite des maisons de la Berthelotière. Bing.
L’habitat individuel, poussant l’étalement urbain vers la périphérie, jusqu’à passer au-delà même du périphérique. La morphologie de ce bati pavillonnaire est lâche et ne possède pas réellement de point de centralité, dans le sens d’espace mise en commun. Son motif est largement emprunté au réseau viaire qui le structure.
(2) LES GRANDS ENSEMBLES. Photo satellite du quartier du bout de Lande. Bing.
Les grands ensembles, érigés par groupement, ils sont issus des politiques constructives des années 60/70 empreintes d’un modernisme vertical. Les tours et les barres que constituent ces grands ensembles ont un fonctionnement relativement introverti, chacun d’entreelles possédant ses propres programmes ; maison de quartier, jeux pour enfants…
(3) LA ZONE COMMERCIALE. Photo satellite du Leclerc. Bing.
(4) LES REBUTS DU CENTRE VILLE Photo satellite du Centre Pénitentier. Bing.
Les grandes zones commerciales, opportunistes parasites des réseaux de mobilité automobiles d’où ils puisent un accès large dans tout le quartier, jusqu’à l’échelle de la métropole même.
Les rebuts du centre-ville ; grands équipements d’une échelle régionale ; centre de détention pour mineur, centre de pénitencier, cimetière, golf… dont le lien avec l’échelle locale est compromis par la nature même de leur programme ; hétérotopies. Le Cardo un collage ?
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Densité / Des motifs aux motifs.
Le quartier du Cardo est issu de plusieurs dynamiques urbaines qui y ont induit une multiplicité de motif urbain ; entre auto-urbanité et hétérotopies, le quartier fait figure de collage, à l’image de la ligne 73, les paysages, les motifs, les pratiques se suivent et ne se ressemblent pas. Sans transition collage et situations urbaines imprévue.
MAQUETTE D’ANALYSE URBAINE
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PLAINE DE JEUX ET POMPES FUNAIRES
GOLF ET GRANDS ENSEMBLES.
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LA TOUR ET LA TOUR
LES MAISONS DU BORD DE FRICHE
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PORTRAIT DE JACQUES, DE 3/4. ÉXILÉ, IL A TROUVÉ SON CENS. Photo prise dans un des chemins menant à la vallée du Cens, juste en face du Leclerc.
LIEU DE L’ÉVASION . Photo du parking du Leclerc, prise depuis la terrasse de l’Orvaltais.
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Récit d’habitant - passage commenté Le passage commenté (ou l’itinéraire racourci*) se devait (d’)être un récit du lieu, par un habitant, un usager, fragment de vie d’un autochtone. On ne l’a pas trouvé. Alors on l’a imaginé. Le caddy pourtant, était bien là, perdu sur les chemins du Cens, le Leclerc, bien présent, juste de l’autre côté de la route. Entre les deux il ne manque qu’un récit, passage de l’un à l’autre, bien réel donc, imaginaire surtout.
Jacques, Caddy, à dit : mort aux grandes surfaces
Ca y est, je me suis échappé. A toute allure. Du haut de ses quatre roues grinçantes. Ba quoi ? C’était tout vu ; La fuite ou la casse. Quand on grince et qu’on coince c’est bien connu, ils vous emmènent derrière, dans le ‘local technique’ qu’ils disent. Et là, au milieu des squelettes de vos anciens collègues, ou même parfois de vos potes, ils vous dépècent. Décapité, vidé, plumé, terminé, comme les poulets qu’on transportait le matin même. Non ça, pas question. Et puis d’abord, si on grince nous, c’est quand même de leurs fautes à eux. Rouler, rouler toute la journée, chargé comme une mule, forcement un moment on craque. Elles sont bien belles leurs ‘grandes surfaces’ hein, mais pendant qu’ils minaudent au rayon produit de beauté, qu’ils trainent dans le rayon télé ou qu’ils discutent des points et des cadeaux dont ils ont le droit à l’accueil, qui est-ce qui se trimballe les 3 packs de bières et les 4kg de pâtes, en long, en large et en travers de la ‘grande surface’ ? Hé ben c’est Jaco ! Je me tape des kilomètres et des kilomètres tous les jours ; dans les rayons, dans la galerie, sur le parking... sans arrêt ! Et vas-y qu’ils te mettent le gamin par dessus le tout. Eux aussi d’ailleurs, ils couinent, mais on les envoie pas au ‘local technique’ pour autant. T’en as déjà vu un réussir à porté 3 pack de bières jusqu’à la voiture ? Non. Ben voilà. C’est plus possible tout ça. C’est plus tenable. Mort aux grandes surfaces ! Moi je rêvais de belles petites surfaces, avec des virages en courbe où je puisse déraper, des pentes à dévaler avec des gamins morts de rires, des paysages à voir défiler, et pas seulement les produits ménagés... Un peu comme où je me trouve maintenant d’ailleurs. C’est la vallée du Cens. C’est pas si loin du Leclerc mais c’est pourtant radicalement différent, et là au moins, on est bien. Là on est enfin peinard. Peut-être qu’un jour, le Cardo trouvera son Cens aussi. Ceci dit, c’est plus mon problème maintenant. Mais honnêtement, je crois que c’est pas gagné.
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FIN DE PISTE quand la piste cyclable percute le périphérique
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LE CARDO, DÉCUMANUS ? Des enjeux. Des idées venues d’ailleurs.
Enjeux énoncés par les intervenants des conférences duales.
Les conférences duales nous ont permis de rencontrer plusieurs acteurs de la fabrication de la ville, qu’ils soient chargés de projet pour la métropole Nantaise ou architectes et urbanistes travaillant sur les enjeux qui touchent à cette tangente 73 ; la péri-urbanisation, les entrées de villes, les mobilités périphériques... Autant d’intervenants qui nous ont proposés des pistes de réflexions pour notre site et un état des lieux des projets en cours.
Automobile / auto-mobilité
(1) Projet de requalification de la Route de Rennes comme porte métropolitaine. (2) Projet de connexion du quartier à la métropole. Certains projets sont déjà sur la table des négociations ; notamment le prolongement de la ligne 1 jusqu’au Cardo, reliant ainsi le quartier à l’Est Nantais jusqu’au centre ville.
Densité / Dans la cité ?
(1) La requalification des ‘grands ensembles’ déjà à l’oeuvre depuis quelques années; financée notamment par l’ANRU. (2) Densification du front urbain sur les grands boulevards comme outils de qualification des axes d’entrées métropolitains. (3) Eviter le mitage de l’extension urbaine par le développement de quartier pavillonnaire. Encourager le logement intermédiaire et la densification des habitats pavillonnaires.
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PÉRIMETRE D’ETUDE Délimité à l’est et à l’ouest par les vallées du Gesvres et du Cens
REQUALIFIER LES BOULEVARDS URBAINS Densification du front bati
REEQUILIBRER LES ACTIVITÉES Mixer les programmes
RECREER UNE CENTRALITÉ L’esplanade devient place.
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En()jeux et en geste. Si notre périmètre d’étude et d’analyse prenait pour cadre les limites définies par les grands corridors naturels; la vallée du Cens à l’ouest et la vallée du Gesvre à l’est, notre périmètre d’action est lui plus précis. Il s’insère dans la frange interstitielle crée par les différents flux ; le périphérique, la route de rennes et le boulevard René Cassin (ou passe à la fois le tramway et le bus 73). Enjeux Encourager la densification comme élément de qualification des axes pénétrants. Les limites de la route de Rennes sont laches, le bâti qui en crée la limite est hétérocyte, rarement alignée. Encourager une densification progressive de celui-ci permettrait de redéfinir la route de Rennes et le boulevard René Cassin en de véritables axes urbains, dans l’optique d’en changer les pratiques ; diminution de la vitesse, partage des voies, attention portée aux modes de circulations douces. Enjeux Rééquilibrer les activités et permettre leur hybridation. Les activités, de loisir, de commerce, d’habitat, sont au Cardo largement zonées et séparées les unes des autres ; indépendantes. Recréer une mixité d’usages et de pratiques, c’est encourager les rencontres, le partage. Permettre des différences de temporalité. Enjeux Amplifier le capital mobile du quartier. Encourager la multimodalité. Déjà support de nombreuse pratiques de la mobilité, il s’agit de permettre le passage de l’un à l’autre plus librement. Arriver en voiture, se garrer, prendre un vélo, aller jusqu’au tramway. Les interfaces entre ces pratiques doivent s’enrichir et devenir qualitatives. Enjeux Réintégrer une centralité. Faire place. Créer une centralité sur la ligne, à la croisée des lignes plutôt, s’est proposer un arrêt et un espace de partage dont aujourd’hui l’esplanade détient déjà l’embrion. C’est aussi offrir au quartier un échelle de résonance territoriale, une visibilité et une qualité de vie.
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LE FORUM ROMAIN ENTRE CARDO ET DECUMANUS Plan de la ville de Pompei.
Cimetiaire Parc Plaine de jeux
Parc de la Mosquée
Pépiniaire d’entreprises
UN DECUMANUS AU CARDO Création de la nouvelle place.
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Concept La métaphore du decumanus. (des)axer le Cardo
- Dans l’histoire Romaine, le Cardo symbolisait l’axe majeur Nord/Sud qui structurait la ville. Au croisement d’un second axe majeur ; le Decumanus orienté Est/Ouest, se trouvait le forum, place centrale de la cité. A l’échelle du quartier (Nantes nord / Orvault), la route de Rennes symbolise donc ce Cardo Romain ; en étant un axe nord/sud structurant du développement du quartier. Cependant il n’est actuellement pas question de Decumanus ; en cela qu’aucun axe Est/Ouest majeur ne vient croiser la Route de Rennes et bousculer une organisation linéairement établie. Des points structurants à l’établissement de ce nouvel axe existent par ailleurs déjà à l’échelle locale : sur les boulevards René Cassin et Albert Einstein (par lesquels passe la ligne 73) la mosquée Arrhama, la pépinière d’entreprise, la médiathèque doivent donner vie à cette nouvelle dynamique. Alors que se dessine aussi, entre les vallées du Cens (à l’ouest) et du Gesvres (à l’est), les prémisses d’une voie de circulation douce reliant ces deux corridors biologiques en s’appuyant sur le parc de la mosquée et la plaine de jeux adjacente. Et dont la nouvelle place viendra créer le chaînon manquant. La création du Decumanus fait alors projet, en pondérant le monopole Cardésien, il recrée un équilibre, redessine le quartier non plus seulement par son statut d’entredeux (en l’occurrence le centre de Nantes et de Rennes), mais comme celui d’une place effective de la métropole. Le cardo n’est alors plus le point d’une ligne mais l’intersection d’un réseau. La ligne 73 hissée au rang de Decumanus propulse ainsi, par son croisement au Cardo, l’esplanade automobile existante en un projet, une place, un forum.
La symbolique du périphérique.
Cependant, si interroger ce quartier par les axes du cardo (la route de rennes et la ligne de tram 2) et du decumanus (la ligne 73) lui offre une dimension nouvelle, elle n’en reste pas moins réductrice si elle ne permet pas la prise en compte d’une troisième dynamique : celle du périphérique. Figure -à l’instar de la route de Rennes- d’un urbanisme radio-concentrique, hiérarchisant la ville, de son centre vers sa périphérie, il est aussi le vecteur d’une mobilité à grande échelle. Ainsi, il s’agit de s’attaquer à sa symbolique locale ; celle d’une barrière physique, esthétique, sonore, tout en se servant de son utilité globale ; l’accès à une mobilité métropolitaine et territoriale. Les Enjeux révélés précédemment nous ont conduit aux questions suivantes :
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(1) LA PORTE
(2) LA PLACE
(3) LA TOUR
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Comment gérer la lisière, les transitions et les passages entre les échelles du quartier et la métropole, en terme de mobilité et urbanité ? Comment révéler le territoire et exploiter ses atouts ? Comment exploiter les espaces de réserve comme des enjeux actifs de l’économie, des usages et du paysage ? Ainsi, nous avons établi un scénario de développement comprenant des stratégies de re-qualification de la frange entre l’esplanade - devenue place - du Cardo et l’Echangeur autoroutier, à la fois souple et précis, proposant une stratégie de développement de ce nouveau quartier.
Faire Place - La déformation du motif
EDIFICI TORRE ESPIRAL, ZAHA HADID. BARCELONE
A la croisée, au carrefour; un forum. Il faut faire place à ; à autre chose que le simple fait de transiter, dépasser la seul fonction d’espace de correspondance, faire place au lieu, faire place à la place, comme lieu de vie, d’échanges. Le motif de l’échangeur, si étroitement lié à sa fonction, se déforme, prend forme, devient l’élément formateur d’une nouvelle centralité, celle d’une place métropolitaine. Depuis la porte de Rennes, les courbes se déploient, et s’entremellent, pour arriver jusqu’à la tour qui fait face aux arrêts de tramways et de bus. Le motif est motivé, détourné ; la métamorphose de l’échangeur. On ne saura plus si c’est la place qui a envahi l’échangeur ou si c’est le contraire. Le rond-point est destitué par son propre motif. La grande surface commerciale si intimement liée à l’échangeur prend sa forme et perd son exclusivité, elle devient parc, devient passage, fait place.
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(6) LA PLIANE DE JEUX.
(5) LE PARKING RELAIS
(4) LA GARE DANS L’ÉCHANGEUR
(3) LE ROND-POINT DEVENU JARDIN
(2) LA PLACE NORVALTAISE
(1) LA VALLÉE HABITÉ
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Faire paysage - la traversée du Cens à l’échangeur Cimetière parc Golf PLaine de jeux
Route de Notre Dame des Landes
Centre pénitentier pour mineur
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(5) (4)
(3) Parc de la mosquée (2) (1)
Vallée du cens
Route de Rennes
De Cens au Gesvres, au parc, la traversée se crée, le mouvement se déploie. Ils n’ont jamais étaient éloignés, mais désormais ils sont liés. Depuis la vallée du Cens, on peut désormais remonter jusqu’à la place du Cardo, croiser le tramway et le bus au pied de la tour. Monter, tout en haut, admirer le panorama inédit sur la ville. Re-prendre la rampe et traverser les parcs des galeries marchandes. Faire quelques amplettes, dessendre manger un bout dans un des jardins. Repartir, prendre un vélo, dévaller les pentes. Traverser le périphérique, direction la gare, regarder les horaires, c’est large, retraverser, jusqu’à la halle ludique. Un tour de piste. C’est reparti.
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(1) LA PORTE
(2) LA PLACE
(3) LA TOUR
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Trois projets entre auto-mobilité et auto-urbanité : la porte, la place, la tour. (1) La Porte : De la recomposition d’un échangeur métropolitain
L’échangeur du Cardo est naturellement, de par sa localisation, au croisement du périphérique nord de Nantes et de la route de Rennes, un noeud de mobilités. Derrière la sur-représentation de l’automobile, se cache, cependant, une problématique plus large: celle de l’automobilité. Le rapport de l’homme à ses déplacements et aux multiples outils qui le lui permettent, est donc au centre de ce projet. L’échangeur autoroutier cependant, fait figure de l’impossible cohabitation, en terme de besoin et d’intérêt, entre les échelles locales et globales dont ce troisième projet tend à rétablir l’équilibre.
(2) La Place : De la destitution du rond-point dans le monde péri-urbain
Ce second projet se situe dans l’interface entre l’échangeur automobile du périphérique et l’esplanade, future place du cardo. Actuellement, un parking relais, quelques bureaux et un centre Edf y prennent place, fonctionnant chacun indépendamment et interdisant toutes traversées, leurs morphologies, leurs accès différenciés et leurs publicités limitées ne permettent pas d’en faire des acteurs majeurs de la future place. Or, à quelques mètres de là, de l’autre côté de la rue de la Conraie, se trouve le centre commercial Leclerc. Si les 27 000m2 de cette ‘grande’ surface, à la morphologie fonctionnelle et standardisée, semble ne créer qu’une nouvelle enclave urbaine dans un quartier qui s’en fait déjà l’ambassadeur, elle n’en reste pas moins un point d’attraction majeur pour les Orvaltais et les Nord Nantais. Il faut alors s’atteler à déconstruire l’image fataliste et désincarnée que nous évoque la grande surface pour s’approprier son dynamisme, sa publicité et en faire un élément majeur de la place.
(3) La Tour : De la symbolisation d’une nouvelle polarité
Si la première étape de la fabrication de la place s’est incarnée par la dynamique commerciale du premier projet, son établissement en tant que pôle métropolitain passe aussi par l’hybridation de ses fonctions et la variation de ses degrés de publicité de l’échelle locale et à l’échelle territoriale. Or, au coeur des quartiers de Nantes Nord se trouvent une multitude d’initiatives associatives et citoyennes dont on imagine la mutualisation des espaces de rencontre et de débat au coeur de la nouvelle place, ainsi promue au rang de forum citoyen. Mais sa visibilité en tant que place métropolitaine passe aussi par sa caractérisation morphologique. Ainsi, un signal fort doit être donné, et c’est alors l’imaginaire de la tour qui nous parvient.
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L’ÉCHANGEUR HABITÉ Image de référence : dessin de Victor Locuratolo.
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LA PLACE, LA TOUR, LA PORTE L’échangeur habité. Le 20 juillet 1969, l’homme a marché sur la lune. Le 2 juillet 2015, son Apollo git au cardo. Dans les quatre satellites de l’échangeur. Un passage sans gravité pour le cardonaute. Il a changé de voix, rit; exorbité. Extrait du carnet de terrain, 14 mars.
Le projet de l’Echangeur participe à la re-qualification de la frange entre le périphérique et la place du Cardo. C’est le premier projet qui sera mis en oeuvre. Il s’agit d’un relais de mobilité à l’échelle du quartier, de la ligne 73, mais aussi de la métropole Nantaise. Ce projet répond à une attente en terme de d’(auto)mobilité et s’inscrit dans le contexte des villes connectées. Cet équipement public, plateforme multimodale, s’implante dans les 4 boucles de l’échangeur, jonction de la Route de Rennes et du périphérique. Il effectue le relais entre : . La ligne de Tram 2: transport depuis Rezé et le centre ville de Nantes jusqu’au Cardo . La Ligne de bus 73 : qui transporte les voyageurs depuis Indre jusqu’au Cardo . Le périphérique . La route de Rennes A l’échelle de la métropole, cette intervention ménage une connexion supplémentaire entre Nantes et sa région. Le projet de l’échangeur participe donc à la logique de la Porte métropolitaine. A l’échelle de la ligne, l’enjeu est de développer une Porte relais permettant un contre point dans les système de mobilité en place (radioconcentrique votre). A l’échelle du Cardo, cette «gare» est un moteur de développement, contre point de la
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LES PAYSAGES DE L’ÉCHANGEUR Image de référence : Land+Civilization Compositions. Medellin Colombia.
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centralité actuelle et une réponse aux problématiques de mobilités. Mais la reconquête de ce délaissé urbain (ou plutôt de ces quatre délaissés urbain) ne s’arrête pas à la seule restructuration des outils de mobilité, il s’aventure aussi à dé-stigmatiser son emprise, issue de l’aspect purement fonctionnel de celui-ci, en y développant des espaces support d’une pratique ludique des déplacements.
Enjeux Le projet de l’échangeur est un projet d’équipement public, une porte métropolitaine qui répond aux enjeux suivants : Fonctionnel : Relais de Mobilité ; la métaphore de l’échangeur. - connecter les sites entre eux : Le quartier du Cardo et le périphérique, Orvault et Indre (en passant par Saint Herblain, Atlantis, la Chézine, la Route de Vannes et la vallée du Cens) - Interface Multimodale : Bus, voitures, vélos, piétons - Visibilité, clareté de lecture des usages - Mettre à disposition des usagers de nouveaux services (Equipement public) Social : générer de la Publicité et des échanges et des espaces de loisir ; la métamorphose de l’échange. - Espace de Publicité : flux, point de rencontre entre les usagers, espaces d’attente, point de rendez-vous... - Ménager des points de vues diversifiés sur l’espace public - nouvelle centralité pour le Cardo, développer le quartier, générer une vie de quartier, de nouveaux usages et de nouveaux repères (identité) Sensible: Habiter l’échangeur. - Interroger l’esprit du lieu : Intégration au paysage et à l’existant (l’échangeur, la place du cardo, la plaine de jeux) - Poétique du pont habité : comment habiter l’échangeur? comment lier et connecter des espaces entre-eux -Jeux de niveaux : Haut/bas, rythme, lumière, travail sur la ligne et le passage.
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Trois Programmes, trois passages
(1) LA HALLE DES MOBILITÉS LUDIQUES Rouler/tourner . Food truck . Piste de roller derby . Piste de karting . Skatepark . Boutiques . Station de vélos libres
(2) LA BOUCLE À L’ARRET Caché/montré
(2)
. Parking relais . Garage associatif
(3) LA GARE ROUTIÈRE Haut/bas
(3)
(1)
. Guichets . Consignes . Bureaux de renseignement . Magasins . Attente Bus . Quais d’embarquement . Espace de covoiturage
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(1) LA HALLE DES MOBILITÉS LUDIQUES
Le jardin des roulants.
Folkestone Sports Park. Guy Halloway architects. Folkestone.
(2) LA BOUCLE À L’ARRET
Le patio des pressés.
Terminal 1 Roissy Charles de Gaulle. Paul Andreu. Paris.
(3) LA GARE ROUTIERE
Le jardin des voyageur.
Passerelle de la porte d’AUbervilliers. Daniel Vaniche. Paris.
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