Les données pour concevoir l’espace public La collecte, la visualisation et l’exploitation des données pour concevoir l’espace public
Corentin FAVREAU
Professeur référent : Hervé LEQUAY, (MAP-Aria, UMR CNRS-MCC n° 3495) Soutenance : 8 juin 2017 École Nationale Supérieure d’Architecture de Lyon Année universitaire 2016-2017
Les données pour concevoir l’espace public La collecte, la visualisation et l’exploitation des données pour concevoir l’espace public
Corentin FAVREAU Professeur référent : Hervé LEQUAY, (MAP-Aria, UMR CNRS-MCC n° 3495) Soutenance : 8 juin 2017 École Nationale Supérieure d’Architecture de Lyon Année universitaire 2016-2017
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Sommaire
Préambule
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Introduction 5 I. Les données que nous sommes en mesure de collecter 6 1.1. Constat : les données et notre environnement 6 1.2. Les outils de collecte 8 1.3. L’accès aux données 10 1.4. Les limites de l’usage des données 12 II. La visualisation et l’interprétation des données 13 2.1. La visualisation des données : des organismes spécialisés 13 2.2. Fiabilité des données et adaptabilité 19 III. Les potentiels offerts par les données pour la conception 21 3.1. Le concept de Smart City : catalyseur de données 21 3.2. Les potentiels des données au service de la conception 23 3.3. Les projets de visualisation et de conception, encore au stade expérimental 23 Conclusion 29 Ouverture 29 Retour Critique 30 Bibliographie 31 Plateformes WEB 31 Articles 32 Ouvrages et thèses 33 Table des figures 33 Résumé 35
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Préambule
Depuis très jeune, je m’intéresse aux innovations qui bouleversent nos usages et habitudes, et particulièrement dans le domaine des nouvelles technologies. Depuis peu, je prends conscience de l’omniprésence croissante du numérique dans notre environnement urbain notamment. Curieux de comprendre comment fonctionne mon environnement direct, je souhaite comprendre comment le numérique va influencer notre conception de l’espace. L’explosion des données numérique et toutes les problématiques qui en découlent me questionnent. Quelles donnéessommes nous en mesure de collecter aujourd’hui ? Avec quels outils ? Comment les rendre accessible ? Je suis persuadé des potentiels que peuvent offrir les données, mises au service de la conception architecturale. Ce rapport d’étude représente une première exploration de ce domaine du numérique, mis en lien avec la conception architecturale.
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Introduction
En tant qu’apprenti architecte, je suis soucieux de savoir dans quelles conditions nous exercerons notre profession dans les années à venir. Ma génération est presque née en même temps que les premiers téléphones mobiles et grandit au même rythme que les innombrables innovations de « l’Ere Numérique ». Aujourd’hui le numérique occupe une place de plus en plus remarquable dans notre environnement, et particulièrement dans l’espace public urbain. Véritable lieu d’échanges, de flux et d’interactions, l’espace public est un périmètre de l’aire urbaine qui me fascine. Désormais, il se présente aux usagers comme une incroyable interface, un relais d’informations qui ne cesse de s’enrichir, afin de leur offrir une plus grande fluidité dans leurs déplacements et leur pratique de l’espace. Parmi les innovations évoquées précédemment, figurent les technologies qui permettent de collecter des données au sein même de l’espace public. Ces données sont multiples : pollution de l’air, trafic des flux piéton et routier, gestion des déchet, fonctionnement de l’éclairage public, pour n’en citer que quelques-uns. Collectées par des systèmes qui ne cessent d’évoluer, ces données seront de plus en plus en plus précises et fiables. Malgré leurs coûts élevés, ces technologies s’installent progressivement avec l’émergence des Smart Cities, ou Villes Intelligentes. L’idée est de collecter un maximum d’informations liées à l’environnement et aux usages de l’espace public, afin d’en améliorer les qualités de vie. Je m’interroge ainsi sur la nature de ces paramètres, afin de connaître leur utilité pour le concepteur de l’espace public. Cette interrogation gagne en pertinence mise en perspective avec les innovations technologiques qui ne cessent de voir le jour. Ainsi, la problématique que questionne mon travail de recherche est la suivante : comment l’architecte-urbaniste peut s’approprier les données collectées à l’aide des nouvelles technologies afin de concevoir l’espace public urbain ? La collecte de données met en jeu plusieurs grands domaines, que je vais exposer à travers de mon développement. Des processus émergents de l’Ere Numérique, particulièrement complexes, tels que le Big Data et l’Open Data, liés au concept de Smart City, posent des questions de fiabilité, de sécurité, de durabilité ou encore d’éthique. Des thématiques variées, allant de la technique à la sociologie. Mon développement débutera par la définition de l’Espace Public, terrain d’expérimentation privilégié de mon objet d’étude, et exposera les types de données que nous sommes aujourd’hui en mesure de collecter. Dans un second temps, en s’appuyant sur des exemples de travaux, nous verrons comment ces données sont stockées, analysées et interprétées, afin d’être appropriables et exploitables. Enfin, nous explorerons les potentiels de ces données en tant que ressources au service de la conception de l’espace public, illustrés par des propositions de projets réalisées ou pour l’heure fictives. L’Ere Numérique, phénomène puisant sa force dans des innovations technologiques en constante évolution, est un mouvement qui aujourd’hui n’a pas de limites, si ce n’est les ressources matérielles qui ne parviennent pas à suivre cette croissance exponentielle. De ce fait, le matériel rassemblé afin de constituer ce travail est en partie basé sur des hypothèses ou des travaux de recherche. Ainsi, le développement suivant ne se veut en aucun cas être un recueil affirmatif, mais un état d’avancée des recherches en cours, orienté vers un futur proche.
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I. Les données que nous sommes en mesure de collecter I.1 Constat : les données et notre environnement Les données numériques font désormais partie intégrante de notre environnement. Nous produisons des données lors de chaque action mettant en jeu un outil électronique. Nos réfrigérateurs, fours et autres accessoires qui meublent notre quotidien sont aujourd’hui capables de collecter des données. C’est ce que révèle le chercheur néo-zélandais, docteur en design informatique et architecte, Daniel Davis, dans un article rédigé pour la revue ARCHITECT Magazine. How Big Data is Transforming Architecture1, un titre annonciateur d’un phénomène actuel, en pleine évolution. A travers cet article, Daniel Davis évoque l’importance croissante des données numériques au sein de notre environnement, et son lien avec l’architecture. Dans un premier temps, Davis expose le fait que les clients souhaitent aujourd’hui que les architectes, à travers l’usage du BIM notamment, fournissent non seulement des dessins mais également des données concernant les installations qui constitueront le projet, afin d’anticiper leur fonctionnement. Les clients s’intéressent ensuite aux données produites par le bâtiment lui-même. En effet, comme évoqué précédemment, chacun des composants électroniques d’un projet est aujourd’hui susceptible d’être connecté à Internet et donc capable de fournir des données d’utilisation. Ces données permettent d’optimiser les usages d’un projet. Cependant, leur utilité intervient principalement une fois le projet construit, afin d’analyser et d’optimiser les performances de ce dernier. Ainsi, l’architecte ou concepteur doit maintenant s’assurer que l’équipement qu’il projette soit capable de fournir ces données. Seulement, ce qui m’interroge concerne surtout l’utilisation des données en amont du processus de conception, ainsi que toutes les problématiques liées à ce procédé. Mon objectif, à travers ce rapport d’étude, est de traiter des problématiques de la fiabilité, de la sécurité, du stockage et de l’exploitation des données numériques collectées au sein de l’espace public urbain. L’espace public est un terme au sens large, omniprésent dans le vocabulaire quotidien de l’architecte. Il n’existe pas de définition précise de l’espace public. Comme espace matériel, les espaces publics correspondent à des espaces de rencontre et d’interactions sociales, à des espaces géographiques ouverts au public, à une catégorie d’action. Dans le cadre de mes recherches, l’espace public correspond à un lieu accessible à tous, qu’il soit extérieur ou couvert, dans un milieu urbain actif et dynamique. Ces espaces et leur aménagement constituent un enjeu remarquable dans la mesure où ils figurent comme des lieux d’interactions et de flux perpétuels. Ainsi, les bouleversements occasionnés par l’explosion de l’Ere Numérique font de ces espaces des terrains d’expérimentations pour les nouvelles technologies, qui occupent en leur sein des étendues toujours plus considérables. L’Espace Public en lien avec mon étude englobera ainsi parcs, gares, places ou squares, principales zones d’échanges et de fréquentations publics. Dans cette première partie de mon étude, nous allons définir un ensemble de données susceptibles de faire office de ressources projectuelles. Rappelons tout d’abord l’Informatique est primordial dans la collecte de données et leur traitement. Le dictionnaire Larousse définit l’informatique comme la science du traitement automatique et rationnel de l’information considérée comme le support des connaissances et des communications, et l’ensemble des applications de cette science, mettant en œuvre des matériels (ordinateurs) et des logiciels2. 1 2
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How Big Data is Transforming Architecture, Daniel Davis pour ARCHITECT Magazine http://www.architectmagazine.com/technology/how-big-data-is-transforming-architecture_o Informatique, définition Larousse
I.1 Constat : les données et notre environnement
Ces données sont multiples et les outils de collecte évoluent constamment. C’est ce qui rend aujourd’hui leur interprétation compliquée et leur fiabilité discutable. Cette mind-map (Figure 1) retranscrit et catégorise les paramètres potentiellement collectés au sein de l’espace public urbain (données externes, environnementales, usagers, usages). Leur combinaison sous formes de cartes, par exemple, permet de saisir les enjeux de l’espace public étudié. Ainsi, le concepteur, s’il se les approprie, peut utiliser ces outils comme des ressources conceptuelles.
Figure 1 : Mind-map paramètres big data
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I.2. Les outils de collecte Aujourd’hui les villes/métropoles du monde entier prennent conscience de l’émergence du numérique et tendent à devenir ce qu’on qualifie de Smart Cities. Ces villes sont nombreuses, parmi les plus avancées figurent Barcelone, Santander, Songdo, Rio de Janeiro, New York ou encore Lyon3. Ces villes ont pour objectif de tirer parti des avancées numériques afin d’améliorer considérablement leur fonctionnement sur plusieurs aspects : gestion des réseaux, mobilité, environnement, sécurité ou encore économie (cf Infographie Grand Lyon). Ainsi, les nouveaux outils numériques en voie de développement permettent aux autorités locales d’être informées en temps réelle de chacun des dysfonctionnements occasionnés au sein de l’espace public. Parmi ces outils, figurent les capteurs de données. La ville de Santander, en Espagne, appelée par les spécialistes « La ville aux 20 000 capteurs », est dotée d’une multitude de capteurs au sein de ses espaces publics. Ils renseignent sur les différents flux (piétons, routiers, cyclables), les paramètres de luminosité (pour la gestion de l’éclairage public notamment), la qualité de l’air ou encore la pollution sonore. Les données recueillies permettent aux autorités de réagir rapidement à des perturbations occasionnelles. Mis en perspective avec mon sujet de rapport d’étude, ces données pourraient permettre aux concepteurs d’anticiper ces perturbations dès le processus de conception de l’espace public. S’il est vrai qu’aujourd’hui, il existe une quantité incroyable de données générées par des capteurs qui peuvent mesurer et communiquer l’emplacement, les mouvements, les vibrations, la température, l’humidité, le niveau de pollution ou le bruit, nous avons également des antennes wifi, des coordonnées GPS envoyées et reçues, non seulement des véhicules de transport, mais aussi de nos smartphones et de nos caméras photographiques. Selon Robert J Moore, chercheur en données numériques, avec nos smartphones, nous sommes responsables de cette énorme production de données: «Nous l’avons fait en laissant les données s’épuiser derrière nous»4, chaque fois que nous tweetons, publions sur Facebook, utilisons nos cartes de crédit ou passons par une caméra CTV. Nous sommes créateurs de données. Les smartphones se sont aujourd’hui démocratisés si bien qu’ils nous sont désormais « indispensables » au quotidien. Ils nous accompagnent dans chacun de nos déplacements et représentent un relais d’informations incroyable. Ils fournissent de précieuses données, notamment grâce à leur système de géolocalisation (GPS). Ils permettent aux fournisseurs et à tous les services qui y ont accès de connaître en temps réel la position de leurs utilisateurs. L’utilisateur lui-même peut analyser sa position et ses déplacements dans l’espace. La technologie GPS permet également d’anticiper la durée et la nature d’un trajet, données précieuses qui permettraient aux planificateurs de l’espace publics d’analyser les flux. Les réseaux sociaux sont en plein essor. Je citerais Facebook, Twitter, Foursquare ou encore Snapchat, les réseaux les plus pratiqués aujourd’hui. Dans le monde entier, près de 2,3 milliards d’habitants sont actifs sur les réseaux sociaux, pour plus de 3,4 milliards d’internautes. Ils représentent ainsi une banque de données considérable. Parmi ces données, celles qui présentent un intérêt remarquable dans le cas du sujet de mes recherches sont la localisation et depuis peu les humeurs. En effet, les utilisateurs ont la possibilité de renseigner leur localisation ainsi que des items concernant leur humeur du moment. Ces informations pourraient permettent d’établir facilement des statistiques pour un emplacement géographique précis.
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Comprendre la Ville Intelligente, infographie Grand Lyon Métropole, 2016 The Data Explosion, by Robert J Moore https://blog.rjmetrics.com/2010/12/29/the-data-explosion-rjmetrics-ceo-talks-big-data-at-tedxphilly/
I.2. Les outils de collecte
Le Big Data est un concept apparu à la fin des années 1990. Il survient dans la continuité de l’explosion quantitative des données numériques, nécessitant de nouvelles méthodes de stockage, d’analyse et d’exploitation. Aucune définition précise ou universelle ne peut être donnée au Big Data. Etant un objet complexe polymorphe, sa définition varie selon les approches, en tant qu’usager ou fournisseur de services. Une approche transdisciplinaire permet d’appréhender le comportement des différents acteurs : les concepteurs et fournisseurs d’outils (les informaticiens), les catégories d’utilisateurs (gestionnaires, responsables d’entreprises, décideurs politiques, chercheurs et les usagers. Le Big Data se présente comme une solution dessinée pour permettre à tout le monde d’accéder en temps réel à des bases de données géantes. Selon Gartner Inc., une entreprise de conseil et de recherche dans le domaine des techniques avancées, ce concept regroupe une famille d’outils qui répondent à une triple problématique dite règle des 3V. Il s’agit notamment d’un Volume de données considérable à traiter, une grande Variété d’informations (venant de diverses sources, non-structurées, organisées, Open…), et un certain niveau de Vélocité à atteindre, autrement dit de fréquence de création, collecte et partage de ces données5. Dans le cadre de mon rapport d’étude, l’intérêt est de comprendre comment les données sont collectées, stockées et analysées, afin d’être potentiellement exploitables par les concepteurs de l’espace public.
Figure 2 : Les 3 v du Big Data, lebigdata.fr
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Le Big Data http://www.lebigdata.fr/definition-big-data
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I.3. L’accès aux données La collecte des données est une chose. Leur stockage, leur hiérarchisation et leur interprétation en est une autre. En effet, la masse de données collectées est immense et généralement brute. Comment classer ces données et les rendre accessible aux acteurs de la conception urbaine ? Où peut-on trouver ces données, accessibles librement ou sur demande ? Le travail de classification et de traitement des données numériques collectées au sein de l’espace publique urbain est considérable. Il existe à l’heure actuelle quelques bases de données disponibles sur Internet. Souvent complexe et très volumineuses, ces plateformes font face à des difficultés qui les empêchent de diffuser leur contenu. Le professeur Michael Batty (University College London), chercheur sur les modèles informatiques des villes, leur visualisation et les méthodes d’analyse spatiale, dit : « de nouvelles sources de données émergent aujourd’hui, tels que les jeux de simulations ou les GIS ». Les GIS (Geographic Information System) constituent une première base de données conséquente. National Geographic en donne la définition suivante : système informatique capable de capturer, stocker, vérifier et afficher des données relatives aux positions sur la surface de la Terre6. Les SIG peuvent afficher de nombreux types de données sur une seule carte, tels que les rues, les bâtiments et la végétation. Ils permettent de visualiser, interroger, analyser et interpréter les données pour comprendre les relations entre différentes composantes de notre environnement.
Figure 2 : Les 3 v du Big Data, lebigdata.fr 6
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National Geographic, GIS https://www.nationalgeographic.org/encyclopedia/geographic-information-system-gis/
I.3. L’accès aux données
Open Street Map est une plateforme publique, qui propose une cartographie basée sur plusieurs thématiques, à vocation participative. Le projet, international, est fondé en 2004. Il permet d’accéder à des données géographiques sur n’importe quelle zone du monde. Les données sont collectées sur les routes, voies ferrées, les cours d’eau, les espaces verts et les bâtiments. L’intérêt d’un système cartographique comme OpenStreetMap est de pouvoir récolter un maximum de paramètres, notamment grâce au procédé de fabrication collaboratif. L’affichage des données sous formes de calques ou layers, permet de croiser les différents types de données, afin d’en faire des analyses relativement précises. Aujourd’hui, le principal enjeu en matière de données est celui de l’Open Data. D’après la définition présente dans l’article L’Open Data en collectivité à la lumière des données de mobilité, CEREMA, mars 2015, l’Open Data consiste à rendre accessible à tous les données numériques collectées, sur des plateformes publiques. L’ouverture des données est porteuse d’un important potentiel. Au-delà de l’accès à l’information qu’elles offrent, leur usage peut constituer des bases de connaissances et de ressources aux consommateurs, aux collectivités, aux innovateurs, et aux contributeurs citoyens de toutes sortes7. D’après cette même étude menée par le CERTU (Centre d’Etudes sur les Réseaux, les Transports, l’Urbanisme et les constructions publiques), il est aujourd’hui extrêmement compliqué pour les collectivités de se lancer dans l’Open Data, pour de nombreuses raisons. La première est liée à cette notion de Big Data, évoquée précédemment. Le volume d’informations recueillies est si important qu’il est presque impossible de hiérarchiser les données, tant leurs formats, poids et compatibilité varient. En effet, la charge de travail requise afin de classifier et de rendre accessible ces données sur des plateformes publiques est telle que les collectivités sont réticentes à l’entrée dans l’Open Data. Ensuite, les détenteurs des données craignent une perte de l’expertise de la donnée. Ils ne seront en effet plus les uniques détenteurs de ces informations, et encore moins si elles sont rendues publiquement accessibles. Enfin, les agents des collectivités se montrent prudents quant à la qualité et à la fiabilité des données communiquées. Ils redoutent les conséquences de la qualité des informations publiées. En effet, la publication des données expose ces dernières au jugement des utilisateurs. Si une information s’avère être fausse ou non ajourée, les agents en seront responsables, alors que l’erreur sera certainement liée aux difficultés rencontrées lors du traitement du Big Data, ou aux outils de collecte en voie de développement. Qui détient ces données ? De grands groupes tels IBM, EMC Corporation, Sopra, Bouygues, GDFSuez, Vinci Energie, ou Orange pour n’en citer que quelques-uns. Les Télécom et notamment l’ITU (International Telecomunication Union) disposent de données précieuses, collectées dès lors que nous envoyons un message depuis notre smartphone, ou que nous ouvrons un onglet Internet. Ridha Loukil, ingénieur Arts & Métiers, couvre les industries électronique et informatique pour L’Usine Nouvelle depuis avril 2012. Il suit ainsi les secteurs du cloud computing, du Big Data, le logiciel Open Source ou encore la cybersécurité. Dans un article pour le site l’Usine Digitale, il présente le plan « Nouvelle France Industrielle » sur le Big Data, lancé par le Ministère du Numérique en 2014. Cette initiative consiste à organiser 55 challenges visant à mettre en lien ces grands groupes détenteurs de données avec des startup ou organismes susceptibles de les exploiter8. Ce plan va permettre de donner un regard nouveau aux grands groupes sur les potentiels de leurs données, et exposer au public l’importance de la considération du Big Data.
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L’Open Data en collectivité à la lumière des données de mobilité, CEREMA, mars 2015 Challenges big data : grands groupes disposant de données cherchent start-up pour les exploiter, article pour L’Usine Digitale, Ridha Loukil, 3 décembre 2014 http://www.usine-digitale.fr/editorial/challenges-big-datagrands-groupes-disposant-de-donnees-cherchent-start-up-pour-les-exploiter.N301194
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I.3. Les limites de l’usage des données Le processus de la collecte des données numériques pose la question des limites en termes d’atteinte à la vie privée. Les données recueillies via les smartphones ou les réseaux sociaux, par exemple, touchent nécessairement à la vie privée des sujets ciblés. Qui a accès à ces données, quelle utilisation ? Cette question concerne tout d’abord les autorités détentrices des données, mais également, dans la perspective de mon étude, les concepteurs qui mobilisent ces informations. Les données sont protégées par les droits de propriété intellectuelle. Afin de publier les données collectées, leurs détenteurs sont tenus de posséder les droits de chacune d’entre elles. Cette règle figure come une première limite à la collecte des données et à leur publication. Ensuite, certaines données sont classées comme étant à caractère personnel. Ces données sont régies par une loi de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL)9. Se pose alors pour le fournisseur de données la question de la responsabilité et de la charge de l’anonymisation de ces informations. Comme nous l’avons vu dans cette première partie de développement, les données que nous sommes aujourd’hui en mesure de collecter représentent un volume de plus en plus conséquent et mettent en jeu des technologies à usage privé. En effet, les données collectées à l’aide des smartphones, des technologies GPS ou encore des réseaux sociaux relèvent de la vie privée de chacun des utilisateurs, qui contre leur gré deviennent fournisseurs de données. L’utilisation de données par le concepteur de l’espace public pose ainsi des questions éthiques. L’architecte, s’il a accès à ces données, est capable de savoir tout ce qu’il se passe en temps réel au sein de l’espace public. Il se trouverait alors dans une position délicate. La consultation et l’appréhension de ces données doit impérativement s’accompagner d’une prise de conscience de la part du concepteur, pour le respect des valeurs éthiques propres à notre société. William J. Mitchell, professeur au MIT, décédé en 2010, disait : « Qui devrait avoir le droit de nous suivre par voie électronique ? Quand et où ? Dans quelles circonstances, quels contrôles et à quelles fins ? Qui devrait avoir accès aux bases de données résultantes ? Et dans quelles mesures ? En particulier, nous devons nous préoccuper des niveaux d’agrégation des données - un problème technique, mais aussi social et politiquement crucial. »10 Nous avons constaté l’omniprésence des données dans notre environnement proche, et la facilité croissante, liée à l’essor des nouvelles technologies, avec laquelle nous collectons ces données. Ces données posent cependant des questions d’accessibilité, de sécurité, de fiabilité et d’éthique. Mis en perspective avec le Big Data, processus impliquant un volume de données considérable et augmentant de façon exponentielle, je m’interroge sur la visualisation et l’interprétation des données numériques collectées au sein de l’espace public.
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L’Open Data en collectivité à la lumière des données de mobilité, CEREMA, mars 2015 Smart City 2020, William J. Mitchell, 2006
II. La visualisation et l’interprétation des données II.1. La visualisation des données : des organismes spécialisés Les données collectées sont généralement présentées à l’état brut. Autrement dit, elles ne sont pas analysées et ne représentent que des pistes d’informations. L’interprétation des données est certainement l’étape clé de l’exploitation de ces ressources. En effet, le Big Data induisant une masse de données considérable, il est très compliqué de sélectionner et de traduire les informations potentiellement intéressantes pour l’analyse d’un espace. Enrico Bertini, professeur à la NYU Tandon School of Engineering et spécialiste en visualisation de données, dit dans son ouvrage Data Stories : « Je pense que le Big Data est très important(...) d’une certaine façon, la visualisation est très limitée avec de grandes données et personne n’en parle et dans les cercles académiques, c’est un sujet brûlant. Je veux dire que vous pouvez régler la visualisation autant que vous le pouvez, mais à la fin, le mieux que vous pouvez faire, c’est de représenter un point de données avec un pixel, ce qui signifie qu’au maximum, vous pouvez visualiser un million de pixels environ, puis interagir avec lui, donc ça va être vraiment compliqué de toute façon »11.
Certaines agences, laboratoires ou organismes sont spécialisés dans la recherche et dans la retranscription des données collectées au sein de l’espace public. Ils se saisissent des données brutes, les regroupent par thématiques et les traduisent graphiquement, sous formes de cartes ou de diagrammes. Les données ainsi retranscrites se présentent comme de véritables outils pour les concepteurs, qui disposent d’un éventail de paramètres détaillés pour un lieu donné. Cette retranscription de données, généralement graphique, est appelée « visualisation » par les spécialistes. Ces visualisations permettent de mettre en évidence des problématiques spatiales et urbaines, auxquelles les concepteurs peuvent répondre.
Le Senseable City Lab12, laboratoire installé au Massachussetts Institute of Technology, est l’un des principaux centres de recherche mondiaux sur la ville et les nouvelles technologies. Il est dirigé par Carlo Ratti, un architecte-ingénieur italien spécialisé dans la recherche liée aux technologies numériques. Ce laboratoire dispose de moyens techniques colossaux et développe ses recherches avec une équipe pluridisciplinaire constituée d’urbanistes, designers, architectes, physiciens, sociologues, ingénieurs et biologistes. Cette approche pluridisciplinaire permet au laboratoire de traiter des axes de recherches variés, qui se complètent et interdépendent. SENSEable City Lab explore ainsi de multiples problématiques et développe, à l’aide des nouvelles technologies, des outils pour mieux comprendre et analyser la ville. 11 12
Data Stories, Enrico Bertini, 2012 Senseable City Lab, MIT http://senseable.mit.edu/
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II.1. La visualisation des données : des organismes spécialisés
Figure 4 : Senseable City Lab - homepage Par exemple, l’équipe a développé en 2014 l’outil DataCollider13, qui permet à tout utilisateur de visualiser ses données et de les traduire graphiquement afin de pouvoir les exploiter facilement. Cette plateforme permet à l’utilisateur, à l’aide d’une interface intuitive, de manipuler et de représenter sans difficultés un important volume de données. Des plateformes telles que TRADERS, DataEyes, Morphocode ou encore UrbanSensing ont pour vocation de rassembler des projets qui puisent leurs ressources dans la collecte, la visualisation et l’interprétation de données numériques. A travers des exemples choisis, nous allons voir comment ces données peuvent être employées en tant que ressources de projet. Traders (Training Art and Design Researchers for Participation in Public Space) est un projet qui regroupe artistes, architectes, designers et chercheurs autour de la question de l’analyse et de la requalification de l’espace public14. L’idée est de s’appuyer sur la pluridisciplinarité et la participation active des usagers afin de développer des méthodes de conception optimales. Ces méthodes mettent en jeu les données numériques, en voici trois exemples. Le Multiple Performative Mapping » (Design Academy Eindhoven, Pays-Bas), permet de réaliser des cartes regroupant plusieurs calques thématiques, afin de saisir les enjeux de l’espace ciblé. Le Data-mining (The Royal College of Art/School of Architecture, United Kingdom) consiste à étudier les problèmes conceptuels et méthodologiques concernant la collecte et la gestion de grands ensembles de données qui ne peuvent être calculés manuellement. Enfin, le Modelling in dialogue (Chalmers University of Technology/Department of Architecture, Sweden) propose le développement d’un outil systémique de gestion des données et d’un mode d’analyse, dans des contextes de laboratoire exploratoire15. La modélisation permet de visualiser et de communiquer de nouvelles possibilités et utilise à la fois des techniques pratiques et numériques. 13 14 15
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DataCollider homepage project http://datacollider.io/ Traders, research projects http://tr-aders.eu/research-projects/ Multiple Performative Mapping: a Way to Challenge Spatial Configurations http://performativemapping.com/traders-end-conference-mediations-art-design-agency-and-participation-in-public-space/
II.1. La visualisation des données : des organismes spécialisés
DataEyes est un organisme qui se charge de rendre accessible un ensemble de données brutes détenues par un particulier, sous formes d’interfaces et d’applications. Les données sont ainsi traduites afin d’être communiquées et exploitées de manière optimale16.
Figure 5 : Data Eyes - Projects homepage Ben Fry est le directeur de Fathom, une société de conseil en conception et en logiciels située à Boston. Il a reçu son doctorat Aesthetics + Computation au MIT Media Laboratory, où ses recherches ont porté sur la combinaison de domaines tels que l’informatique, les statistiques, le graphisme et la visualisation des données comme moyen de compréhension de l’information. Après avoir terminé sa thèse, il a consacré du temps à développer des outils pour la visualisation des données génétiques en tant que post-doctorant avec Eric Lander au MIT et à Harvard. Avec Casey Reas d’UCLA, il développe actuellement Processing17, un environnement de programmation open source pour l’enseignement du design informatique et de l’esquisse de logiciels de médias interactifs. Cet outil permet, grâce à un tutoriel de codage interactif, de développer ses propres outils de visualisation de données. Un logiciel complexe, qui nécessite une certaine connaissance de l’outil informatique et de son langage. 16 17
Figure 6 : Processing, a programming headbook for Visual Designers and Artists, Ben Fry
DataEyes, homepage http://dataveyes.com/#!/en Processing https://processing.org/
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II.1. La visualisation des données : des organismes spécialisés
Morphocode est une plateforme similaire à celle de DataEyes, à la différence que les analyses de données qu’elle fournit ne sont pas réalisées sur commande. Morphocode a pour vocation de démocratiser l’usage des données, de simplifier leur compréhension et leur exploitation par les acteurs de la conception urbaine18. Morphocode est dirigé par les architectes Greta Dimitrova et Kiril Mandov. Ils décrivent leur pratique comme architecturale, à l’intersection entre le design et la technologie. Morphocode est certainement la plateforme la plus complète en matière de manipulation de données en lien avec le domaine de l’architecture. Les architectes fondateurs présentent des conférences de vulgarisation et interviennent dans le cadre de certains enseignements, à la Staedelschule Architecture Class à Francfort, à l’Université d’Architecture de Sofia ou à l’IUA de Venise. Morphocode milite pour une accessibilité publique des données, afin que n’importe quel intéressé puisse les exploiter. La Morphocode Academy, une plate-forme de formation en ligne dédiée aux architectes et designers, offrira des cours et des tutoriels. Les sujets de conception informatique, d’informatique urbaine, de cartographie web, de codage créatif, d’informations graphiques et de données scientifiques seront abordés. Le projet Urban Layers of Manhattan est un exemple intéressant de collecte et d’interprétation de données au cœur de la ville. L’objectif était de créer une carte interactive retraçant le développement de Manhattan dans le temps, depuis la fin du XVIIIe siècle19. Urban Layers est basé sur deux ensembles de données : PLUTO et les empreintes de construction de NYC. PLUTO contient diverses informations sur chaque bâtiment situé à New York: année de construction, hauteur, arrondissement, etc. Il a été diffusé au public en 2013 et est considéré comme une énorme victoire pour la communauté des données ouvertes.
Figure 7 : Urban Layers of Manhattan - age of buildings 18 19
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Morphocode https://morphocode.com/data-urbanism/ Projet Urban Layers of Manhattan, Morphocode http://io.morphocode.com/urban-layers/
II.1. La visualisation des données : des organismes spécialisés
Le Civic Data Design Lab travaille avec des données pour le comprendre pour le bien public20. Nous cherchons à développer des pratiques alternatives qui peuvent rendre le travail que nous faisons avec des données et des images plus riches, plus intelligentes, plus pertinentes et plus adaptés aux besoins et aux intérêts des citoyens traditionnellement en marge de l’élaboration de politiques. Dans cette pratique, nous expérimentons et développons des outils de visualisation et de collecte de données qui nous permettent de mettre en évidence les phénomènes urbains. Nos méthodes empruntent aux traditions de la science et du design en utilisant des analyses spatiales pour exposer les modèles et communiquer ces résultats, par la conception, à de nouveaux publics.
Figure 8 : Civic Data Design Lab – Projects homepage UrbanSensing est un projet financé par l’Union Européenne, dans le cadre du programme FP7. Organisé en 7 phases, UrbanSensing a pour but de collecter des données numériques à échelle réduite, d’un espace choisi, afin d’en fournir une analyse détaillée et fondée21. Plus précisément, le métabolisme rapide de la métropole contemporaine met en évidence le manque d’analyse à l’échelle du quartier, ou même du citoyen urbain. Partant du postulat que la ville est un système complexe, dont la morphologie urbaine est structurée par les réseaux de flux et d’interactions, UrbanSensing affirme que le travail analytique basé sur les réseaux et les données appropriées au sein de l’espace public peut aider à comprendre la ville. Dans les pays occidentaux, les données qui permettent de mesurer la qualité économique de la ville, des infrastructures, de l’environnement, sont de plus en plus facile d’accès. De plus en plus facile d’accès certes, mais UrbanSensing dénonce le manque d’indicateurs et les imprécisions des analyses. UrbanSensing perçoit les données collectées en temps réel comme de véritables indicateurs des conditions et des tendances urbaines. Ainsi, le projet a plusieurs objectifs. Tout d’abord, analyser ces données, afin de faciliter l’accès et la couverture des services et infrastructures de l’espace public. Ces données permettront d’améliorer le ciblage et la performance de ces services et enfin d’appliquer ces connaissances à la mise en œuvre de politiques et de programmes d’aménagements urbains. 20 21
Civic Data Lab, homepage http://civicdatadesignlab.org/ UrbanSensing http://urban-sensing.eu/?page_id=5
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II.1. La visualisation des données : des organismes spécialisés
Visual Complexity est une plateforme de ressources, qui regroupe de multiples travaux de visualisation de réseaux complexes, réalisés à partir de données numériques22. L’objectif de Visual Complexity est de mettre à disposition un espace de ressources unifiées pour toute personne intéressée par la visualisation de réseaux complexes. L’idée du projet est de tirer parti d’une compréhension critique de différentes méthodes de visualisation, à travers une série de disciplines aussi diverses que la biologie, les mathématiques ou les réseaux sociaux.
Figure 9 : Visual Complexity - homepage
Détails 22
18
Visual Complexity, homepage http://www.visualcomplexity.com/vc/
II.1. La visualisation des données : des organismes spécialisés
Flowing City est égalemnt une plateforme de ressources de visualisation de données. Crée par Margarida Fonseca, chef de projet chez PT Sistemas de Informação, au Portugal, cette plateforme recense un grand nombre de projets qui s’appuient sur l’interprétation de données numériques23. Dans le cadre de sa thèse Flowing city: visualizing the city built of data24, soutenue à l’Université d’Amsterdam, M.Fonseca a décortiqué ces projets, classés par catégories.
Figure 10 : Flowing city - projects homepage
Détails 23 24
Flowing City, homepage http://flowingcity.com/ Flowing city: visualizing the city built of data, Margarida Fonseca
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II.2. Fiabilité des données et adaptabilité Aujourd’hui, la notion de données numériques s’inscrit dans le système du Big Data. Le Big Data englobe une masse de données tellement volumineuse qu’il en devient impossible de les distinguer et de les répertorier. Ainsi, il faut noter le manque de fiabilité des données collectées. Même si les progrès en matière de collecte, d’analyse et d’interprétation tendent à améliorer le degré de fiabilité des données, cette problématique reste aujourd’hui l’un des principaux obstacles à l’utilisation des données pour la conception de l’espace public. Les projets conçus avec l’aide des données numériques questionnent sur la problématique de la durabilité et de l’adaptabilité. En effet, si l’on considère l’évolution exponentielle des technologies de collecte et d’interprétation, on peut s’interroger sur la mutation de ces espaces, susceptibles d’être « rattrapés » par leur outil de conception. Comment faire évoluer un espace public grâce au numérique ? C’est la question que l’organisation University City District (UCD), en partenariat avec l’agence Interface Studio, a tenté de résoudre avec le projet « The Porch outside of Philadelphia’s 30th Street Station ». Il s’agit d’un espace public extérieur situé devant une gare de train, s’apparentant à une bande piétonne de 25 mètres de large par 175 mètres de long. Avec un budget de 250 000$, l’organisation University City District (UCD) a installé des tables, des bacs plantés, des arbres et des parasols le long de cette promenade. L’idée de ce projet est de créer un parc par phases. Ainsi, en partenariat avec l’agence Interface Studio25, l’UCD a analysé et retranscrit graphiquement plusieurs paramètres liés à la pratique de l’espace public créé (bruits ambiants, localisation des flux, utilisation des smartphone). Les résultats vont permettre à l’organisation de proposer de nouveaux aménagements du Porche, offrant à cet espace public une flexibilité et une adaptabilité remarquable.
Figure 11 : The porch outside of Philadelphia’30th Street Station, noises study
Figure 12 : The porch outside of Philadelphia’30th Street Station, uses study 25
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Nombreuses sont les plateformes de collecte et de visualisation de données numériques. La plupart militent pour la démocratisation de l’Open Data et proposent des analyses accessibles au public. En quoi ces données sont intéressantes pour le concepteur de l’espace public ?
Interface Studio – About http://interface-studio.com/about
III. Les potentiels offerts par les datas pour la conception III.1. Le concept de Smart City : catalyseur de données Le Big Data est lié à un autre concept émergent, directement en rapport avec mon objet de recherche. Il s’agit du concept de Smart City. Impulsé par l’explosion du Numérique, ce processus consiste, accompagné par les nouvelles technologies, à repenser entièrement le fonctionnement des villes. D’après l’organisme Smart City Smart Data (SCSD), qui en 2015 a organisé un workshop à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble visant à explorer les possibles applications de l’usage des « mégadonnées » à la conception urbaine, la notion de ville intelligente trouve ses origines dans les années 1980 avec le concept de « ville câblée »26 mais c’est avec le développement et la généralisation de l’informatique que le terme « ville intelligente » s’impose27. « Smart city », un qualificatif qui ne doit pas prévaloir de la qualité a priori de cette ville mais qui renvoie plutôt aux capacités de collecte, de traitement et d’échange d’information. Ainsi la « ville intelligente » se conçoit dans une interaction continue entre des réalités physiques et numériques, construites autour de maillages de capteurs et actionneurs autorisant des pratiques et des usages nouveaux, une supervision urbaine et le développement d’une intelligence collective. Les principes fondateurs de la Smart City ou Ville Intelligente sont les suivants : inventer de nouveaux modes de concertation et de conception de la ville, valoriser les ressources locales, les identités et la mémoire d’un territoire, construire de nouveaux imaginaires urbains et représentations de la ville, mobiliser habitants, acteurs locaux et maîtrise d’ouvrage autour du projet territorial. La Smart City puise sa réussite potentielle dans la mutualisation des systèmes (économie, sécurité, réseaux, mobilité, environnement et action publique), rendue possible grâce aux nouvelles technologies. Même si la France s’investit activement dans le domaine de la Ville Intelligente, avec l’exemple de Lyon notamment ou de Paris, le pays est bien en deçà de ses homologues américains ou asiatiques. En effet, malgré le développement de laboratoires d’excellence, dits « Labex », spécialisés dans la recherche dans le domaine du numérique, la majorité des spécialistes se situent dans les universités américaines de prestige (MIT, Harvard…). Ces laboratoires bénéficient de moyens techniques colossaux, et je me suis référé à leurs travaux, qui présentent un état d’avancement prometteur, avec à leur tête, le laboratoire Senseable city lab, dirigé par Carlo Ratti, architecte-ingénieur italien.
Carlo Ratti, directeur du Senseable city lab, MIT 26 27
« Wired city », Batty, 2012 Smart City Smart Data, La ville intelligente http://scsd.research-unit.net/la-ville-intelligente/
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III.1. Le concept de Smart City : catalyseur de donnĂŠes
Figure 13 : Smart City, La ville intelligente
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III.2. Les potentiels des données au service de la conception L’usage des données, comme nous l’avons vu à travers ce développement, est un processus complexe, lent et précis. En effet, il est impératif de connaître la provenance des données utilisées, de comprendre leur analyse et d’être en mesure d’en faire la synthèse afin de pouvoir saisir les enjeux de l’espace ciblé. Aujourd’hui, il est relativement compliqué de s’appuyer sur des données numériques lorsque l’espace ciblé atteint des échelles importantes. Le système d’Open Data décrit précédemment peine à se démocratiser et le volume de données s’inscrivant dans le Big Data est bien trop conséquent pour que nous soyons en mesure de le contrôler dans sa totalité. La collecte de données soulève à l’heure actuelle des problématiques qui ne sont pas encore résolues. Sécurité et atteinte à la vie privée, fiabilité, durabilité des projets, réglementations et droit d’accès, stockage et interprétation, font partie des questions abordées dans ce rapport d’étude. Cependant, comme nous l’avons vu grâce aux exemples des laboratoires (MIT, Senseable…) et des plateformes (DataEyes, Morphocode…), la maîtrise de l’utilisation des données s’accroit progressivement, grâce à des travaux de recherche et de développement de plus en plus concrets et accessibles. Les potentiels offerts par cette maîtrise de la manipulation de données numériques sont considérables. Les conditions fondamentales étant le ciblage précis et l’interprétation fiable des données, ces dernières s’avèrent bénéfiques sur de multiples aspects. Tout d’abord, l’utilisation de données pour concevoir l’espace public peut permettre d’anticiper l’évolution des usages suivant des paramètres tels que la pollution, les flux de transport, la lumière naturelle et artificielle, la qualité des réseaux de communication. Lorsque ces prévisions sont couplées à une conception modulable de l’espace, comme c’est le cas du Porche de Pennsylvanie, l’espace public est doté d’une flexibilité précieuse, qui lui confère des qualités d’adaptabilité et de durabilité remarquables.
III.3. Les projets de visualisation et de conception, encore au stade expérimental Qu’il se fonde sur des variations paramétriques, sur la mise au point de scripts et d’algorithmes engendrant des familles de formes variables, sur l’intrication de données disparates, sur le morphing ou bien encore sur des objets mathématiques, le projet se définit avant tout comme système actif d’intégration et de tissage des divers aspects du programme architectural, des qualités physiques et du comportement des matériaux ainsi que de l’environnement (social, culturel, physique…) : une architecture hybride et interactive28. Nous allons voir, grâce à deux exemples, comment les données numériques peuvent influencer le processus de conception de l’espace public. Très peu de projets réalisés ou fictifs sont consultables, sur Internet ou dans des références bibliographiques. Les projets que je vais décrire sont des travaux qui appartiennent au domaine de la recherche. Cela révèle la complexité de la maîtrise des données, qui malgré les efforts menés par les laboratoires de recherches cités précédemment, ne parvient pas encore à s’imposer auprès des acteurs de la conception de l’espace public. Ainsi, les projets que je vais 28
Architecture et Numérique, Frac Centre http://www.frac-centre.fr/upload/document/pedagogique/2009/FILE_4cc94c01a37eb_b_archinum.pdf/b_archinum.pdf2
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III.3. Les projets de visualisation et de conception, encore au stade expérimental
présenter, qui relèvent de la visualisation de données, vont permettre d’illustrer les potentiels de l’usage des données, sous la forme d’hypothèses. Le premier travail qui a retenu mon attention est une étude du laboratoire Senseable, dirigé par Carlo Ratti. Il s’agit du projet Wikicity29, mené à Rome, dans la continuité du projet Real Time Rome30. Grâce à l’usage de données collectées en temps réel via les smartphones, systèmes GPS, capteurs et transports en commun, l’équipe de Senseable créé une carte interactive, qui traduit en temps réel les déplacements des usagers de la ville. La mise en œuvre de Notte Bianca permet aux personnes d’accéder aux données en temps réel sur les dynamiques qui se produisent à l’endroit même où elles se trouvent. Comment l’accès aux données en temps réel dans le contexte d’une action possible modifiet-il le processus de prise de décision sur les différentes activités ? Cette étude, présentée à la Biennale d’architecture de Venise en 2006, à un public de concepteurs et de planificateurs urbains, permettraient à ces derniers d’envisager l’aménagement de l’espace public en fonction de la synthèse des dynamiques observées dans un espace ciblé. Le projet de complet WikiCity considère ces questions dans un contexte plus large qui comprend le téléchargement actif d’informations par les citoyens, les autorités locales et les entreprises en ce qui concerne un champ de données toujours croissant. Une approche élaborée des structures de données sémantiques pour permettre de nouvelles façons d’interroger les données et une vaste gamme d’interfaces d’accès multimodal pour que les utilisateurs interagissent avec les données d’une manière significative. Dans les années à venir, le projet Wiki City se développera comme une plate-forme ouverte où n’importe qui pourra télécharger ces données, liées à l’emplacement et à la temporalité.
Figure 14 : Real-Time Rome combines different datasets in a single interface: real-time data, GIS data and raster images, 2006 29 30
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Wikicity, Senseable City Laboratory, MIT http://senseable.mit.edu/wikicity/rome/ Real Time Rome http://senseable.mit.edu/realtimerome/
III.3. Les projets de visualisation et de conception, encore au stade expĂŠrimental
Figure 15 : Wikicity Rome, Senseable City Lab, MIT
Figure 16 : Number of cellular phone users in north-eastern Rome at different hours of a day, 2006
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III.3. Les projets de visualisation et de conception, encore au stade expérimental
Figure 17 : The movement dynamics of cellular phone users at different times of a day in neihborhood scale. 2006 Autre étude similaire menée par le laboratoire, Currentcity, qui permet d’observer en temps réel, toujours grâce à des données agrégées issues de smartphones, l’affluence des bâtiments publics et squares31. Ce projet permet de révéler les interactions et fréquentations d’un espace public, à toute heure de la journée. Ainsi, ces observations permettraient aux concepteurs d’apporter des réponses et des solutions afin de réguler les flux et d’optimiser les usages de l’espace public. Le potentiel des travaux du Senseable Laboratory réside dans ses capacités de reproductibilité dans n’importe quelle ville capable de fournir les données nécessaires. Mis en perspective avec l’émergence des Smart Cities, ces travaux vont certainement se démocratiser et offrir aux concepteurs de ces villes les outils nécessaires pour une nouvelle planification urbaine. Carlo Ratti travaille également sur des micro-architectures capables de capter des données pour s’adapter instantanément aux usages qui s’y développent. Avec le projet Spacebook, présenté à la Triennale de Milan, il propose une maison conceptuelle, entièrement vitrée par un verre breveté par le Senseable Lab, qui s’opacifie selon la présence ou l’absence d’usager à l’intérieur et à l’extérieur32. Imaginons une place publique équipée de salles de lectures vitrées selon ce procédé. Lors des heures d’affluence, les lecteurs pourraient s’y réfugier en toute sérénité. Lorsque que la place est peu fréquentée, ces « boîtes » se fondraient dans l’environnement et permettraient une lecture fluide de l’espace public. Cet exemple montre qu’en plus de permettre au concepteur d’anticiper les réponses à certaines problématiques au cours du processus de conception, il lui sera possible de jouer avec des objets intelligents fonctionnant directement avec les données pour conférer à l’espace public une adaptabilité supplémentaire. 31 32
26
Currentcity project, Senseable City Laboratory, MIT http://senseable.mit.edu/currentcity/ Spacebook project , Senseable City Laboratory, MIT http://senseable.mit.edu/spacebook/
III.3. Les projets de visualisation et de conception, encore au stade expérimental
Dans le cadre d’un workshop organisé par l’organisme Smart City Smart Data avec l’ENSA Grenoble, plusieurs travaux expérimentaux ont permis de développer des cartes interactives particulièrement intéressantes. Le projet Dynamap, mené par Mathieu Cardinal, Colin Miquet et Giuseppina Vespa, propose une cartographie de la ville de Grenoble réalisée à partir de données numériques collectées via le réseau social Twitter33. Inspiré du projet Real Time Rome réalisé par le Senseable City Lab dirigé par Carlo Ratti, Dynamap emploie des données issues de Twitter afin de recenser les activités liées aux entreprises, aux politiques, aux universités, aux sorties ainsi qu’aux actualités de la ville de Grenoble. Les acteurs de ce projet ont rencontrés des difficultés, évoquées dans la seconde partie de ce développement : une géolocalisation des données parfois hasardeuse, pas de décompte des tweets trouvés et pas de données brutes exportables. La finalité du projet est l’obtention d’une carte accessible en ligne, mettant en évidence les différents secteurs d’activités de Grenoble. Un outil utile et accessible, qui permettra d’éclairer les concepteurs de l’espace public grenoblois.
Figure 17 : The movement dynamics of cellular phone users at different times of a day in neihborhood scale. 2006
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Projet Dynamap, Smart City Smart Data, Workshop ENSA Grenoble, 2015 http://scsd.research-unit.net/carte-tweets-mapbox/
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III.3. Les projets de visualisation et de conception, encore au stade expérimental
L’agence NOX, fondée en 1991 à Rotterdam par Lars Spuybroek, architecte diplomé de l’Université Technique de Delft, a une approche pluridisciplinaire de l’architecture et de l’urbanisme34. Spuybroek sort des logiques habituelles de l’architecture par l’usage des technologies numériques, qu’il explore depuis les années 1990. NOX est l’une des premières agences à utiliser le design digital en architecture. Il décrit sa pratique de la manière suivante : « Pour NOX, le désir de technologie semble participer d’une force beaucoup plus importante et déstabilisante, puisque notre besoin de l’accidentel est bien supérieur à notre besoin de confort, que notre besoin de potentialités et d’évènements est bien plus grand que la détermination et la fonction. ». NOX cherche à exacerber la logique et la sensibilité interne du bâtiment. Le projet Pavillon de l’eau douce FreshH2O, totalement interactif, réagit en temps réel aux activités et mouvements du visiteur. Le concept principal de Spuybroek, « l’architecture liquide », consiste à « construire une machine, un dispositif de variabilité, de fluctuations continuelles ». Tout comme le projet Spacebook de Carlo Ratti, l’architecture de Spuyboek consiste à employer les données numériques afin d’offrir à l’espace des qualités de modularité. Les travaux recensés dans cette partie se concentrent généralement sur un paramètre ou une famille de paramètres (flux, interactions sociales, humeurs, ambiances sonores pour n’en citer que quelquesuns). Ainsi, afin de réaliser des propositions optimales pour l’aménagement d’un espace précis, les concepteurs doivent être en mesure d’effectuer la synthèse de plusieurs études, afin de confronter un nombre suffisant de paramètres. Ces exemples, s’ils témoignent de potentiels réels en matière d’adaptabilité et d’anticipation, montrent bien qu’ils représentent aujourd’hui des expérimentations, des pistes à explorer. L’objectif de cette troisième partie de mon développement était de mettre en évidence cet impact des données sur le processus de conception de l’espace public. Cet impact est significatif, car elles dirigent et donnent des pistes au concepteur. Les paramètres qu’il est possible de collecter sont si nombreux que l’architecte ou urbaniste doit impérativement cibler les informations qu’il manipule, et c’est en cela que cet art de l’utilisation des données est complexe.
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28
Architectures expérimentales 1950-2012, Collection du Frac Centre, p 434
Conclusion
Pour conclure, à travers ce rapport d’étude, j’ai cherché à questionner l’influence des nouvelles technologies au service de la conception de l’espace public urbain. Cet espace, qui représente le centre névralgique d’interactions et de flux, est de plus en plus sujet au numérique. Le Big Data, l’Open Data et les innovations technologiques envahissent notre quotidien et tentent de contrôler et de réguler des paramètres divers et variés au sein de l’espace public. Les smartphones, l’électroménager et désormais les infrastructures équipées de capteurs, permettent de collecter un volume phénoménal de données. Ces données, brutes, sont particulièrement complexes à analyser. Des difficultés juridiques et éthiques freinent l’entrée dans l’Open Data des fournisseurs de données. Cependant, depuis quelques années, des plateformes et des laboratoires, conscients du potentiel de ces données, travaillent à la collecte et à l’interprétation de ces dernières, afin d’en faire des outils accessibles pour les concepteurs de l’espace public. En voie de développement, ces outils présentent des faiblesses en matière de fiabilité, tant l’analyse des données est complexe. Les progrès en matière de traitement de données sont significatifs et les travaux menés par les organismes présentés au cours de ce développement sont prometteurs, et présagent une certaine évolution de la conception de l’espace public. En effet, les potentiels qu’offrent les données en tant qu’outil de conception sont multiples. Ils permettent d’anticiper les usages, fréquentations et flux, afin de développer une adaptabilité et une flexibilité de l’espace conçu. Les espaces publics gagneraient ainsi en durabilité. Seulement, il est aujourd’hui compliqué de se baser sur ces données, qui aspirent à gagner en fiabilité. Malgré la complexité de la maîtrise des données, les exemples que j’ai étudié tout au long de mon travail de recherche sont impactés par leur usage. En effet, le nombre de paramètres analysables grâce aux données, qui ne cessent de croître, influencent les décisions du concepteur. Les données offrent des pistes de conception, et si elles sont trop variées ou mal ciblées, elles rendront complexe le travail de synthèse du concepteur de l’espace public. Mon étude révèle un paradoxe. L’utilisation des données s’avère être aujourd’hui une pratique complexe, tant leur volume est conséquent. Cependant, l’évolution et le perfectionnement des technologies de collecte induit une augmentation du volume de données recueillies. Comment parvenir à ne pas se faire dépasser par les données ? Enfin, la thématique de l’usage des données dans le processus de conception induit que le concepteur a accès à des données qui relèvent du domaine privé. Plus simplement, il peut tout voir. Cela pose ainsi une question d’éthique. Le concepteur de l’espace public est-il légitime de manipuler ces données, même s’il agit pour le citoyen ?
Ouverture Si je devais poursuivre ce travail de recherche, en partant du postulat que l’usage de données au cours du processus de conception de l’espace public va se répandre progressivement, je m’interrogerai sur l’évolution de la pratique de l’architecture : quel impact auront véritablement les données sur la pratique de l’architecture ? Dirigeons-nous vers une nouvelle pratique de l’architecture ?
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Retour critique
Le travail mené cette année dans le cadre de ce rapport d’étude a d’abord été pour moi enrichissant méthodologiquement. Je pense avoir acquis une méthode de recherche, d’analyse et de restitution. La définition d’une problématique cadrée a été assez compliquée tant mon objet touche des disciplines variées. Une fois cet étape réalisée, j’ai organisé mon travail de recherche autour de grands axes nourris de plusieurs questions. Il a été relativement complexe de trouver des exemples concrets de travaux pour illustrer mon développement, car la collecte et l’utilisation des données numériques appartiennent aujourd’hui au domaine de la recherche. Mon travail figure ainsi comme un état de l’art de l’avancée de ces recherches, complété d’une interprétation basée sur des hypothèses et des postulats. Je pense être parvenu à répondre à certaines des problématiques que je m’étais posées, mais je n’ai pas réussi à recueillir assez d’exemples de travaux d’architectes ou d’urbanistes. La conclusion de mon travail pose cependant plusieurs questions de recherche, que je souhaiterais approfondir dans le cadre de mon mémoire.
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Bibliographie Plateformes web Senseable City Lab, MIT http://senseable.mit.edu/ DataCollider homepage project http://datacollider.io/ Traders, research projects http://tr-aders.eu/research-projects/ Multiple Performative Mapping: a Way to Challenge Spatial Configurations http://performativemapping.com/traders-end-conference-mediations-art-design-agency-andparticipation-in-public-space/ DataEyes, homepage http://dataveyes.com/#!/en Processing, homepage https://processing.org/ Morphocode, homepage https://morphocode.com/data-urbanism/ Morphocode, Projet Urban Layers of Manhattan http://io.morphocode.com/urban-layers/ Civic Data Lab, homepage http://civicdatadesignlab.org/ UrbanSensing, homepage http://urban-sensing.eu/?page_id=5 Visual Complexity, homepage http://www.visualcomplexity.com/vc/ Flowing City, homepage http://flowingcity.com/ Interface Studio, about http://interface-studio.com/about Wikicity, Senseable City Laboratory, MIT http://senseable.mit.edu/wikicity/rome/ Real Time Rome project, Senseable City Laboratory, MIT http://senseable.mit.edu/realtimerome/
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Bibliographie
Currentcity project, Senseable City Laboratory, MIT http://senseable.mit.edu/currentcity/ Spacebook project , Senseable City Laboratory, MIT http://senseable.mit.edu/spacebook/ Projet Dynamap, Smart City Smart Data, Workshop ENSA Grenoble, 2015 http://scsd.research-unit. net/carte-tweets-mapbox/
Articles Daniel Davis, 23 avril 2015, « How Big Data is Transforming Architecture », pour ARCHITECT Magazine http://www.architectmagazine.com/technology/how-big-data-is-transforming-architecture_o Robert J. Moore, 29 décembre 2010, « The Data Explosion », RJMetrics https://blog.rjmetrics.com/2010/12/29/the-data-explosion-rjmetrics-ceo-talks-big-data-at-tedxphilly/ Le Big Data, « Qu’est-ce que le Big Data ? » http://www.lebigdata.fr/definition-big-data National Geographic, GIS (geographic information system) https://www.nationalgeographic.org/encyclopedia/geographic-information-system-gis/ Ridha Loukil, 3 décembre 2014, « Challenges big data : grands groupes disposant de données cherchent start-up pour les exploiter », article pour L’Usine Digitale http://www.usine-digitale.fr/editorial/challenges-big-data-grands-groupes-disposant-de-donneescherchent-start-up-pour-les-exploiter.N301194 William J. Mitchell, mars 2006, « Smart City 2020 », Emerging technologies are poised to reshape our urban environments http://senseable.mit.edu/news/resources/20060401_Metropolis.pdf Enrico Bertini, 2012, « Data Stories » http://datastori.es/archive/ Smart City Smart Data, « La ville intelligente » http://scsd.research-unit.net/la-ville-intelligente/ Frac Centre, 2009, Architecture et Numérique http://www.frac-centre.fr/upload/document/pedagogique/2009/FILE_4cc94c01a37eb_b_archinum. pdf/b_archinum.pdf
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Bibliographie
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Ouvrages et thèses Architectures expérimentales 1950-2012, Collection du Frac Centre, p 434 Rem Koolhaas, 1978, The Monacelli Press Inc., Delirious New York, 317 pages CEREMA, mars 2015, « L’Open Data en collectivité à la lumière des données de mobilité » Margarida Fonseca, 18 juin 2011, Thèse MA in New Media, Flowing city: visualizing the city built of data, Superviseur : Yuri Engelhardt Ph.D., Universiteit van Amsterdam, 104 pages Grand Lyon Métropole, 2016, « Comprendre la Ville Intelligente », infographie
Table des figures Figure 1 : Mind-map paramètres big data 7 Figure 2 : Les 3 v du Big Data, lebigdata.fr 9 Figure 3 geospatial information system, National Geographic 10 Figure 4 : Senseable City Lab - homepage 14 Figure 5 : Data Eyes - Projects homepage 15 Figure 6 : Processing, a programming headbook for Visual Designers and Artists, Ben Fry 15 Figure 7 : Urban Layers of Manhattan - age of buildings 16 Figure 8 : Civic Data Design Lab – Projects homepage 17 Figure 9 : Visual Complexity - homepage 18 Figure 10 : Flowing city - projects homepage 19 Figure 11 : The porch outside of Philadelphia’30th Street Station, noises study 19 Figure 12 : The porch outside of Philadelphia’30th Street Station, uses study 20 Figure 13 : Smart City, La ville intelligente 22 Figure 14 : Real-Time Rome, in a single interface: real-time data, GIS data and raster images, 2006 24 Figure 15 : Wikicity Rome, Senseable City Lab, MIT 25 Figure 16 : Number of cellular phone users in north-eastern Rome at different hours of a day, 2006 25 Figure 17 : Dynamics of cellular phone users at different times of a day in neihborhood scale, 2006 26 Figure 18 : Dynamap, Workshop ENSA Grenoble 2015, Smart City Smart Data 27
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Résumé A travers ce rapport d’étude, j’ai cherché à comprendre comment s’emparer des données numériques qui nous entourent, en tant que concepteur de l’espace public. Les objets de notre environnement proche produisent tous des données, qui sont significatives de nos mouvements, interactions et même nos humeurs. Persuadé du potentiel de ces données en tant que ressources pour la conception, mes recherches traitent de leur collecte, du stockage, de leur interprétation et enfin de leur exploitation. Mis en perspective avec les processus du Big Data et de l’Open Data, mettant en jeu un volume incontrôlable de données, la question de l’utilisation des données révèlent des problématiques variées, allant de l’accessibilité à la fiabilité, en passant par la durabilité. L’espace public urbain, véritable lieu d’interactions, de flux et d’usages variés, s’avère être le terrain d’expérimentations privilégié pour l’usage de ces données, qui ne cessent de se multiplier, au même rythme que les innovations technologiques qui émergent dans notre Ere Numérique.
Mots clés Espace public, Données, Numérique, Big Data, Open Data, Visualisation, Conception
Summary Through this study report, I sought to understand how to capture the digital data that surrounds us, as a designer of the public space. The objects in our close environment all produce data, which are significant to our movements, interactions and even our moods. Convinced of the potential of these data as resources for design, my research deals with their collection, storage, interpretation and exploitation. Put into perspective with the processes of Big Data and Open Data, involving an uncontrollable volume of data, the question of the use of data reveals various problems, ranging from accessibility to reliability, durability. Urban public space, a veritable place of interactions, flows and diverse uses, proves to be the privileged field of experimentation for the use of these data, which are constantly multiplying, at the same rate as the Technological innovations that emerge in our Digital Age.
Keywords Public Data, Data, Digital, Big Data, Open Data, Visualization, Design
Corentin FAVREAU École Nationale Supérieure d’Architecture de Lyon Année universitaire 2016-2017