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En pleine crise, il apprend à pardonner
VÉCU
Au fond du gouffre, elle trouve la force de se relever
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MARQUÉE PAR LE DÉCÈS DE SON FRÈRE PUIS DE SA FILLE, DES ABUS RÉPÉTÉS, UN DIVORCE ET DES ANNÉES D’INSOMNIE, MIRJAM MARTINEZ A SÉRIEUSEMENT SONGÉ AU SUICIDE. AUJOURD’HUI APAISÉE, ELLE REMERCIE DIEU, QUI L’A TIRÉE DE SON GOUFFRE. TÉMOIGNAGE POIGNANT.
David Métreau
Mirjam Martinez est aujourd’hui une femme rayonnante qui a du succès dans les affaires, à la tête d’une agence immobilière près de Lausanne, en Suisse. Une quadra à qui la vie semble réussir. Pourtant, si rien sur son visage ne trahit son passé trouble, la jeune femme a traversé l’enfer. «J’ai été tellement cassée, qu’il n’y avait plus que de la poudre», témoigne-t-elle. Pendant des années elle a manqué de sommeil au point de vouloir mettre fin à ses jours ou tout simplement se laisser mourir.
Descente en enfer
D’aussi loin qu’elle se souvienne, Mirjam Martinez a toujours eu le sentiment d’avoir été croyante. Son enfance est pourtant difficile avec une mère absorbée par les problèmes de santé de l’une des sœurs et un père trop présent, «d’une manière très malsaine»; elle réalisera cela des années plus tard. L’adolescence est marquée par des douleurs parfois insupportables: parésie du visage et de la main droite, et des troubles alimentaires comme l’anorexie et la boulimie. Elle quitte le foyer familial à l’âge de seize ans, puis commence sa formation d’infirmière en pédiatrie à dix-neuf ans. Elle a vingtquatre ans quand son frère de dix ans son cadet, atteint d’une maladie neuromusculaire, décède. La jeune femme se marie quelques mois plus tard et après cinq ans de mariage naît Melina, une «magnifique petite fille». Mais à ses six mois, un cancer généralisé foudroyant est diagnostiqué. Le bébé meurt trois mois plus tard. Pendant trois ans, la maman a l’impression de mourir à chaque respiration tant la douleur est intense. «Je me suis senti trahie par Dieu», confie-t-elle. La jeune femme hurle dans sa voiture ou avec un coussin devant sa bouche pendant des heures et se tape la tête contre les murs.
Epuisement sévère
Sur le plan médical, les médecins diagnostiquent un épuisement physique extrêmement sévère et une dépression atypique grave. Pendant plusieurs mois, Mirjam Martinez ne Un divorce libérateur parvient quasiment plus à se lever. Plus tard, Mirjam Martinez tombe Couchée sur le sofa, les yeux fermés, enceinte d’une autre petite fille, Noe- elle remercie Dieu que personne lia. Cette naissance est suivie par n’exige ou n’attende quelque chose celle de Kalina. d’elle, tant elle se Cependant, de- sent faible. puis la mort de Elle n’a qu’une envie, En arrêt maladie Melina, la relation entre Mir- celle de dormir, même si et malgré son état critique, la jeune jam et son mari c’est pour toujours femme refuse se détériore. Lui l’assurance invaqui avait déjà lidité à laquelle tendance à être «jaloux» et «dans le elle aurait droit. contrôle» le devient plus encore. La Elle décide de quitter son poste d’injeune femme en vient à avoir peur de firmière pour se lancer dans l’immolui. Des professionnels suggèrent à la bilier en indépendante, secteur où maman de quitter le foyer au plus elle exerçait déjà une activité annexe. vite, mais elle n’en a pas la force. Pourtant, le sommeil ne revient pas. Cette relation la détruit à petit feu, Pendant trois ans, elle ne peut dorjusqu’à en perdre le sommeil ainsi mir que deux ou trois heures par qu’énormément de poids. «Je n’étais nuit, grâce à des médicaments. Pour plus que l’ombre de moi-même.» les thérapeutes, cette hypervigilance Un jour, Mirjam Martinez réalise est le mécanisme de protection d’une que si elle ne part pas, elle va mou- personne abusée: par son père penrir. Elle demande alors le divorce. dant l’enfance, puis par son mari. Une décision qui a été «un soulagement, mais aussi beaucoup de souf- Ses filles la retiennent france». Après trois ans, un médicament fonctionne enfin: l’agente immobilière peut dormir, s’occuper de ses enfants et n’est plus obligée de faire des pauses toutes les deux heures. Mais un an et demi plus tard, le traitement cesse de faire effet. L’absence de sommeil, une fois de plus, la met à terre. Mirjam Martinez pense beaucoup à la mort. Elle n’a qu’une envie, celle de dormir, même si c’est pour toujours. La seule chose qui la retient encore, ce sont ses filles. Donc elle s’accroche. C’est au fond du gouffre que dans son for intérieur, elle reçoit la certitude que Jésus est avec elle, qu’il la porte et qu’il est là, à ses côtés, victorieux face à toutes les adversités qui se dressent sur son chemin. «Dans une vision, je me suis vue assise bien droite sans effort sur un magnifique cheval blanc devant lequel toutes les oppositions s’écartaient. J’ai compris que je ne devais rien faire. Seulement faire confiance à Jésus.»
Vers la guérison
A partir de là, l’entrepreneure, apaisée, assure s’être complètement «abandonnée à Dieu». «Je n’essayais plus de faire quoi que ce soit. Bien sûr je suivais toutes les thérapies, mais quelque chose en moi avait profondément changé!» Le chemin reste cependant long pour réapprendre à dormir, se remettre au sport ou reprendre une vie sociale après des années de désert. «J’ai vécu la présence de Dieu d’une manière incroyable. Rien ne lui est impossible. Il peut vous relever, même si vous êtes complètement brisés. Il peut vous guérir, même si vos blessures sont terriblement profondes. J’ai été tellement cassée qu’il n’y avait même plus de morcaux, mais que de la poudre», assure aujourd’hui Mirjam Martinez. «Mais Dieu me portait pendant toutes ces années.» ▪
En pleine crise du Covid, il apprend l’humilité et le pardon
L’EGLISE LA PORTE OUVERTE CHRÉTIENNE (PO) DE MULHOUSE A ÉTÉ CONSIDÉRÉE COMME UN FACILITATEUR DE LA DIFFUSION DU CORONAVIRUS EN FRANCE ET EN SUISSE. FACE À LA PANDÉMIE, AUX ACCUSATIONS ET AUX MENACES, SAMUEL PETERSCHMITT A APPRIS L’HUMILITÉ ET LE PARDON.
VÉCU
David Métreau
«C ette terrible épreuve nous enseigne l’humilité», affirmait en avril dernier Samuel Peterschmitt, pasteur de l’Eglise la Porte Ouverte Chrétienne (PO) de Mulhouse. Cette épreuve? Le décès d’une trentaine de paroissiens après la contamination par le Covid de centaines de participants à un grand rassemblement de prière qui se tenait dans son Eglise. Puis la déferlante médiatique et la haine. «La foi ne se résume pas à l’obtention des bénédictions de Dieu, mais elle se manifeste aussi dans la faiblesse et la souffrance. Elle ne nous rend pas arrogants, réduisant Dieu à un être exécutant, mais elle nous rend dépen-
dants de lui et elle nous apprend à lui obéir dans l’humilité.» Le pasteur décidé de pardonner à ceux qui lui ont fait du mal - journalistes, politiciens, internautes, voisins- lorsque son Eglise
s’est retrouvée accusée d’avoir propagé le virus. Malgré la haine qu’il a pu ressentir, Samuel Peterschmitt a souhaité répondre avec bienveillance: «Nous n’en voulons à personne.» Cette attitude lui a permis de renouer avec des voisins.
Mauvaises intentions
En mars dernier, alors que le bâtiment de l’Eglise de la PO était fermé au public, seule une équipe de bénévoles assurait la diffusion du culte en ligne. Leurs voitures étaient sur le parking et une voisine a pris une photo et l’a diffusée sur les réseaux sociaux. Ceux-ci se sont enflammés. Samuel Peterschmitt et les membres de son Eglise ont été menacés, insultés, accusés d’être des inconscients et pire, accusés d’être des criminels.
Humilité et pardon
Les jours passent. Alors que le pasteur sort de l’Eglise, il croise le mari de la voisine auteure de la photo. Une discussion amicale s’amorce. Les deux hommes parlent de tout et de rien. Samuel Peterschmitt raconte: «Pardonner ce n’est pas faire comme si de rien n’était. Je lui dis: “Je n’ai pas bien compris pourquoi vous avez posté cette photo.”» Ce à quoi le voisin répond: «C’est gentil de m’en parler. Si vous saviez à quel point cela m’embête que ma femme ait pris cette photo.» Par la suite, son épouse rejoint la conversation et revient sur son geste: «J’ai beaucoup regretté ce que j’ai fait. Je vous demande pardon. Ce qui m’a rassuré, c’est que vous aviez dit que vous pardonniez à ceux qui vous ont offensés.» Et Samuel Peterschmitt de conclure: «J’ai trouvé que cette réaction a été humble, de la part de mes voisins. Ils auraient pu botter en touche.» ▪