Les conférences du CRDP du Centre
académie d’Orléans-Tours
N° 0001 - 5,00 €
Textes de la conférence du 20 septembre 2006
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Le socle commun : pourquoi ?
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20 septembre 2006 Le socle commun : pourquoi ?
I l nous a paru utile de revenir sur la philosophie même de ce que peut être le socle commun qui, enrichi d’éclairages complémentaires, serait plus aisé à mettre en œuvre. Le socle commun, mis en place lors de la rentrée scolaire 2006, est une nouveauté tout à fait singulière dans le système éducatif français. Ce dispositif devenant effectif, nous rentrons peu ou prou dans une période inédite de notre système scolaire et ce pour trois raisons au moins. Tout d’abord, il s’agit d’un contenu qui a trait à l’enseignement et dont les piliers ont été définis par une loi. Pour retrouver un cas équivalent, il faut remonter aux lois de Jules Ferry : il n’est pas si courant que le législateur se préoccupe de contenus d’enseignement ! Or, le socle commun relève de cette procédure. Précisons, dans un second point, que bien que ce dernier n’ait pas vocation à se substituer aux programmes de l’école primaire et du collège, il doit en constituer le fondement. Ainsi, nous sommes face à un contenu d’enseignement qui n’est pas un programme mais qui sert à élaborer les programmes eux-mêmes. L’équation est donc complexe et problématique. Il faut dans un dernier point souligner que pour la première fois en France, le socle commun est rédigé en priorité en terme de compétences, même si celles-ci sont déclinées par la suite. Jusqu’alors, ni les programmes d’enseignement ni les circulaires qui régissent les enseignements n’ont été conçus selon cette organisation. Nous venons de franchir un cap que certains de nos voisins européens ont déjà dépassé, comme la Grande-Bretagne ou la partie francophone de la Belgique. L’avance prise par ces derniers ne doit pas faire oublier qu’en France, il s’agit d’une chose extraordinaire au sens étymologique du terme. Dans ces conditions, la mission d’un CRDP étant d’accompagner une décision de politique éducative, prise au niveau national en l’occurrence, la question du socle commun, eu égard à la quantité de nouveautés que celui-ci impose à notre système et aux établissements, nous a naturellement incités à un travail de réflexion. Depuis une vingtaine d’années, différents pays européens ont aussi travaillé à la définition d’objectifs communs pour la fin de la scolarité obligatoire. Pour mémoire, citons la Grande-Bretagne avec le core curriculum en 1985, plus récemment le Danemark, l’Italie avec le socolo duro qui n’a pas été à son terme bien que le
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dispositif soit prêt à fonctionner, et suite à un certain nombre d’événements, notamment les évaluations internationales comme le PISA, l’Allemagne et la Bulgarie. Il existe bien un mouvement dans l’ensemble des pays européens qui amène à définir des exigences que l’on peut fixer à la fin de la scolarité obligatoire. A ce constat relatif aux pays eux-mêmes, il faut mentionner les résultats d’une enquête menée dans quinze pays par les instances européennes qui ont donné lieu à un rapport intitulé Les compétences clés, un concept en développement dans l’enseignement général obligatoire. Il ne s’agit plus réellement de définir les objectifs de fin de scolarité obligatoire mais de basculer vers les compétences, tendance par ailleurs renforcée par les enquêtes internationales, déjà citées. Les concepteurs de PISA (programme international de suivi des acquis des élèves) ont fait, dès leur premier travail, le choix d’évaluer les compétences car ces dernières pouvaient se retrouver dans tous les pays tandis qu’il apparaissait impossible de fournir un dénominateur commun sur la base des contenus d’enseignement. Les systèmes éducatifs sont donc tournés vers la nécessité de définir des objectifs pour la fin de la scolarité obligatoire alors qu’une tendance très marquée oriente la rédaction de ces contenus en terme de compétences. Dès lors, en 2005, le parlement français a permis que nous rejoignions une évolution internationale largement partagée que d’autres pays ont adoptée depuis vingt ans. Toutes les conditions objectives sont réunies pour que la mise en place du socle soit un succès de notre politique éducative. Néanmoins, les débats qui ont précédé la rédaction puis la publication du décret ont mis en évidence plusieurs types de réactions, à l’exclusion des réactions idéologiques qui ne concernent pas notre propos. Des craintes ont effectivement été exprimées. Nous pouvons évoquer les interrogations sur la place du socle par rapport aux programmes. Doit-on enseigner le socle ou le programme ? Des questions soulèvent le problème des conséquences dans l’organisation de la classe : est-ce qu’il y a des moments où l’on enseigne le socle et d’autres où l’on enseigne le programme ? Il existe, par ailleurs, des doutes sur l’utilité voire l’efficacité du socle pour améliorer les résultats des élèves. Il est intéressant, à cet égard, de lire, sur le site de l’Assemblée nationale, les débats qui ont été menés au sein du parlement pour savoir si le socle
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peut permettre d’améliorer les résultats des élèvesl. Des inquiétudes ont également été formulées sur le risque que le socle, plus que les programmes actuels, stigmatise les échecs de certains élèves. Il est dit et répété que l’une des nouveautés essentielles réside dans l’obligation que toutes les compétences soient acquises, ce qui implique qu’il n’y a plus de compensation possible. Cette exigence forte n’estelle pas excessive pour certains élèves ? Une petite insuffisance dans un domaine qui traditionnellement était compensée par une aisance particulière dans un autre secteur ne sera plus tolérée. Est-ce que ces nouvelles dispositions pourront être gérées par l’ensemble des élèves ? Est-ce un objectif réaliste ? Enfin, des préoccupations apparaissent sur la façon d’enseigner et d’évaluer les acquis et en particulier à propos des deux dernières compétences citées dans le décret, à savoir « les compétences sociales et civiques » et « l’autonomie et l’esprit d’initiative ». Il n’est plus question de s’interroger sur la pertinence de ces choix car les acteurs de l’éducation seront, dans quelques années, dans l’obligation de construire les apprentissages pour les élèves de façon à ce que ceuxci puissent prouver qu’ils ont effectivement acquis les compétences exigées. Néanmoins, la construction de ces protocoles d’apprentissage n’est pas une démarche aisée.
et fortement médiatisé. Alain Bouvier parlera du travail du Haut Conseil de l’Education sur le socle, de ses recommandations et de son avis sur le décret. L’intervention de Jean-Michel Zakhartchouk nous livrera les interrogations concrètes qui se posent, suite à un travail publié dans un numéro récent des Cahiers pédagogiques.
DOMINIQUE RAULIN, directeur du CRDP du Centre
Toutes ces difficultés fragilisent encore la situation. Cependant, il ne faudrait pas que par souci d’idéal, c’est-à-dire sous prétexte que cet objet n’est pas aussi parfait que nous le souhaiterions, nous ne parvenions pas à mettre en place ce socle commun dans notre système éducatif. Il peut permettre aux établissements scolaires de disposer d’une mise en perspective des programmes et de constituer ainsi une sorte de clé de lecture de la scolarité obligatoire. Ce dispositif répond donc à une carence à laquelle professeurs, parents et élèves étaient également confrontés. Conformément aux missions du CRDP, il a donc été décidé d’organiser une table ronde sur le socle commun, construite sur la réflexion concernant l’approche générale de ce dernier. Nous reviendrons sur les aspects de sa construction avec l’intervention de Claude Lelièvre, historien de l’éducation, qui remontera à la notion de culture commune déjà présente dans le plan Langevin-Wallon de 1947 pour reconstruire la genèse d’un socle dont le contenu, élaboré il y a plus de soixante ans, a été repris par la Commission nationale sur l’avenir de l’Ecole
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CLAUDE LELIÈVRE, professeur des universités, membre de la Commission nationale sur l’avenir de l’Ecole (CNAE). L ’historien de l’éducation est convaincu que les phénomènes éducatifs se situent dans un temps relativement long même s’il existe de temps à autre des précipitations aussi bien temporelles que chimiques. La question du socle commun est tout à fait exemplaire à ce sujet pour le passé et pour l’avenir. Elle est présente, sous une forme ou sous une autre, depuis une génération. Plus récemment, ce sujet a généré une précipitation difficilement explicable alors même qu’une vingtaine ou une trentaine d’années seront nécessaires à la mise en œuvre du socle commun. Cette situation n’a rien d’étonnant puisque la question et l’institution de la scolarité obligatoire sous Jules Ferry avaient fait l’objet d’un traitement identique. De longs débats publics et des pétitions se sont succédé tandis que selon les disciplines, vingt ou trente ans ont été nécessaires avant que cette idée pénètre l’école primaire. Il s’agissait pourtant d’une époque où il existait une inspection primaire aux pouvoirs étendus. Il serait donc surprenant, au regard de l’expérience antérieure, que le socle commun soit rapidement opérationnel. Ainsi, il apparaît nécessaire de s’appuyer sur des éléments du passé pour comprendre la situation présente. Les sociologues Baudelot et Establet ont publié, en 1989, un livre, Le niveau monte, reposant sur une étude de l’état séculaire des tests administrés lors de l’incorporation à l’armée. Il en résulte que le niveau à ces tests a effectivement monté pour les 40% qui les réussissaient déjà le mieux. La progression est moindre pour les autres tandis que les résultats des 20% qui les réussissaient habituellement le plus mal se sont tassés. Comme le soulignaient les auteurs eux-mêmes, il reste encore aujourd’hui une quantité substantielle de jeunes qui sortent de l’école sans maîtriser les éléments fondamentaux d’un savoir minimum. L’élévation générale du niveau n’a exercé sur le leur aucun effet d’entraînement. La situation ne semble pas pouvoir s’améliorer tant que nous compterons sur la hausse du plafond pour relever le plancher. Comment a-t-on pu arriver à des résultats aussi contrastés alors même que la mise en système de l’école sous la Ve République prétendait en finir avec l’architecture scolaire ouvertement divisée de l’Ecole de la IIIe République ? Tout recommence avec la Ve République. L’ordonnance du 6 janvier 1959 de Jean Berthoin, ministre d’un gouvernement dirigé par Charles de Gaulle, décide de prolonger la scolarité obligatoire de deux ans et la porte à
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16 ans révolus pour les enfants qui auront six ans à partir du 1er janvier 1959. Cette disposition laissait donc un délai raisonnable de huit ans pour faire accomplir la mesure. Ce laps de temps n’a pas réellement été mis à profit. Apparaissent alors des complications et des confusions car entre le moment de la décision qui aurait dû être accompagnée d’une redéfinition de l’instruction obligatoire approfondie et le moment où la prolongation de la scolarité obligatoire devient effective, la réforme dite Capelle-Fouchet de 1963 institue un collège d’enseignement secondaire, le CES, qui réunit dans le même établissement toutes les formes d’enseignement entre la fin des études élémentaires et la fin de la scolarité obligatoire. Les filières qui étaient dispersées entre différents types d’établissements (les classes de fin d’étude dans les écoles communales, les cours complémentaires baptisés CEG, et le premier cycle des lycées ou collèges) répondent dès lors à une logique de rassemblement. Cette dernière a pour but essentiel de faciliter une bonne orientation des bons élèves en vue d’un recrutement élargi des élites et se substitue à la priorité de définir pour tous une fin satisfaisante de la scolarité obligatoire allongée, une instruction renouvelée et approfondie. Le CES permet, dans les faits, l’instauration de l’élitisme républicain. Le traité de Rome, signé en 1957, institue l’Europe communautaire. La mise en orbite par l’Union soviétique, en 1957 également, du premier satellite terrestre, le Spoutnik, interpelle l’ensemble des pays de l’Ouest. Qu’en est-il de la suprématie scientifique et technologique des uns et des autres ? Qu’en est-il de la bataille des cerveaux et en particulier du nombre et de la qualité des ingénieurs et des techniciens supérieurs ? Ces circonstances incitent Charles de Gaulle à mettre en œuvre sa politique prioritaire en matière d’enseignement, à savoir le développement volontariste des enseignements supérieurs. De la fin des années 50 à celle des années 60, le nombre d’étudiants est multiplié par 2,5 et le budget du supérieur est multiplié par 4. Un tel effort pour l’enseignement supérieur est inédit dans l’histoire de France et aboutira paradoxalement au mouvement étudiant de 1968. Dès lors, il faut alimenter ce recrutement élargi des élites en mettant au point un dispositif d’orientation qui puisse capter les meilleurs éléments. La déperdition d’élèves capables de poursuivre des études longues en classe de fin d’étude dans les écoles communales ou en cours complémentaires, dans les CEG, doit cesser car chaque type d’établissement a tendance à garder ses bons élèves. Le CES est donc créé pour rassembler les diverses formes d’enseignement au sein d’un même établissement. Il regroupe la voie une, la filière longue des lycées avec des professeurs certifiés et agrégés, la voie deux, la filière courte des CEG avec les anciens maîtres de cours complémentaires baptisés PEGC, la voie trois dite transition pratique avec des instituteurs spécialisés. Le collège à filières est né et se veut avant tout une étape de sélection pour capter les élèves capables de
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mener des études longues. De fait, le recrutement socialement élargi des élites pour des raisons nationales voit également le jour. Ce nouvel établissement va être dominé par la question de l’orientation d’une part et réglé idéalement par la culture requise pour l’élite d’autre part. Il est très difficile aujourd’hui de sortir de ce système car à l’évidence, le problème de la redéfinition du sens de la scolarité obligatoire pour tous n’avait pas été résolu. Lorsque Valéry Giscard d’Estaing devient président de la République en 1974, l’une des priorités qu’il s’assigne, dès sa première conférence de presse à l’Elysée le 25 juillet, porte sur cette redéfinition. Il initie ce dossier en affirmant que l’élévation du niveau de connaissance et de culture de chaque Français est un objectif fondamental. Ainsi, nous pouvons nous demander si, à côté de l’obligation de scolarité jusqu’à seize ans, ressemblant davantage à une massification qu’à une démocratisation, il ne faudrait pas imaginer une autre obligation consistant à donner à chaque Français un savoir minimal. Ce dernier forme le sens et le principe essentiel de ce qui sera appelé plus tard le collège unique. Ce n’est pas le moindre des paradoxes du libéralisme avancé giscardien que d’offrir une version française de l’école de base suédoise social- démocrate, de la Comprehensive school travailliste et de celle de la social-démocratie allemande. Il est vrai que le 20 mai 1975, Valéry Giscard d’Estaing n’a pas hésité à déclarer sur RTL que « la gauche, c’est un terme ambigu, je veux dire qu’il y a dans la pensée de gauche des éléments positifs importants, ce qui fait que dans l’action réformatrice libérale avancée, il y a beaucoup d’idées de gauche qui doivent être mises en œuvre ». Il va ainsi devenir le créateur décidé du collège unique dans le cadre du libéralisme avancé, orthodoxe sur le plan socio-économique mais engagé pour les femmes (loi sur l’IVG), pour les jeunes (âge de la majorité abaissé à 18 ans) et pour le collège unique dans le cadre de la redéfinition de la scolarité obligatoire. A droite comme à gauche, le président de la République est accusé de minimiser les savoirs, d’instaurer un nivellement par le bas. Le débat sur la définition d’un savoir commun minimal « exprimant notre civilisation particulière » qu’appelait de ses vœux Valéry Giscard d’Estaing n’a pu avoir lieu. Le collège unique n’a pas pu être fondé à partir de ce qui était son principe, d’où son dérèglement permanent qui a es-
saimé dans l’élémentaire lui-même puisque, peu à peu, la question de la définition de ce qui devait être prioritairement attendu à la fin de la scolarité obligatoire dans son ensemble n’a pas eu de réponse claire. Aux débats culturels nécessaires, à la définition d’une culture minimale ont été substituées des mesures pédagogiques ou organisationnelles sans fondement culturel scolaire véritable. Une contrevérité historique patente a d’ailleurs été en passe de l’emporter récemment. Le collège unique aurait été initialement bien accueilli, en particulier par les enseignants, mais la dure réalité aurait fait disparaître les espoirs et les illusions. Elle serait la cause du désenchantement actuel et de la crise rampante toujours prête à éclater. En réalité, ce système a suscité des oppositions dans l’ensemble de la classe politique et dans toutes les organisations depuis sa création. Par ailleurs, nous pouvons mesurer l’expectative initiale voire le pessimisme affirmé d’un grand nombre d’enseignants d’après leurs réponses à l’enquête de la SOFRES de décembre 1977 alors même que le collège unique venait à peine d’être institué et qu’ils n’avaient eu que l’expérience du collège gaullien. 48% d’entre eux se prononçaient déjà pour la possibilité d’interruption de toute scolarité à quatorze ans. La question de la définition d’un savoir commun minimal ou d’une culture commune exigible à la fin de la scolarité obligatoire est restée durant tout ce dernier quart de siècle un sujet délicat, régulièrement enterré parce que difficile intellectuellement et politiquement. Ainsi, la commande du président de la République François Mitterrand adressée à Pierre Bourdieu et au collège de France en février 1984, à savoir réfléchir à ce que pourraient être les principes fondamentaux de l’avenir pour le système scolaire, aboutit à l’idée « de la définition d’un minimum culturel commun ». Le texte de Bourdieu indique que « des programmes nationaux devraient définir le minimum culturel commun, c’està-dire le noyau de savoirs et de savoir-faire fondamentaux et obligatoires que tous les citoyens devraient posséder ». Dix ans plus tard, en décembre 1994, sous la plume de son président, Luc Ferry, le Conseil national des programmes souligne dans un rapport adressé au ministre de l’Education nationale, François Bayrou, « qu’il est nécessaire de réactiver aujourd’hui l’idéal républicain d’un socle commun de connaissances et de compétences y compris pratiques et réflexives
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devant être transmis au collège. C’est bien au stade du collège que s’impose l’idée d’un socle fondamental dont on devrait s’assurer qu’il est transmis à tous car il peut parfois marquer la fin de la scolarité obligatoire, à tout le moins celle du parcours unique ». Ces propositions remises au ministre de l’Education nationale en 1994 demeureront lettre morte. Ce dernier, bien qu’ayant lancé la formule “collège unique, collège inique”, limite les changements apportés à cette structure pendant ses quatre années de ministère à quelques transformations secondaires. Le problème du collège unique n’a pas changé de nature malgré le nouveau slogan adopté par François Bayrou “passer du collège pour tous au collège pour chacun”. La dernière consultation et le rapport Dubet sur les collèges de mai 1999 réaffirment que « le collège doit mieux définir les savoirs et les compétences qu’il peut attendre de tous afin de mieux identifier et hiérarchiser les priorités, ce qui suppose une réflexion sérieuse sur les compétences et les connaissances qui doivent constituer le socle commun d’une génération. » Mais les objectifs retenus par Mme Ségolène Royal, ministre chargé des enseignements scolaires, laissent dans l’ombre, une fois encore, la question de la culture commune assurée au collège. A l’instar de François Bayrou établissant un catalogue de 158 propositions dans le cadre de son nouveau contrat pour l’école, Ségolène Royal préconise un catalogue de 40 mesures pour le seul collège. Peut-on indéfiniment enterrer une question vive sans qu’il y ait des conséquences, d’autant que cela concerne la colonne vertébrale même de l’Ecole républicaine, le sens et la mise en œuvre de l’école obligatoire. Les dispositions concrètes du collège unique résidaient essentiellement dans le principe de l’hétérogénéité des classes et les actions de soutien ou d’approfondissement prévues. Toutefois, en l’absence de la détermination concrète et précise de la culture commune minimale à atteindre, d’objectifs prioritaires dûment précisés, la seule référence aux programmes ne permettait pas d’identifier le noyau dur à atteindre qui aurait dû être un principe de régulation pour le soutien de l’approfondissement. Ce problème pouvant sembler insoluble avait conduit par le passé à la loi Falloux de 1850 qui écartait la notion même et la possibilité d’obligation scolaire en posant une question qui continue de nous interpeller : « quelle partie de l’enseignement rendra-t-on en effet obligatoire ? Voulez-vous beaucoup, et ce n’est pas possible pour tous ; voulez-vous peu, et vous abaissez le niveau de la culture général ». Entre l’exigence et le minimum exigé, Falloux conclue que la notion d’instruction obligatoire n’a pas de sens. Jules Ferry, pour sa part, a relevé ce défi en précisant l’enjeu que représente l’instauration même de l’école obligatoire. Il s’agit d’une règle de base présente dans les instructions officielles de 1882, à savoir ne pas embrasser tout ce qu’il est possible de savoir mais bien apprendre ce qu’il n’est pas permis d’ignorer. Ce principe régulateur oriente la réflexion sur une autre ques-
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tion qui peut être résolue, non pas celle du niveau présente dans la problématique de Falloux mais ce qu’il est indispensable d’apprendre. Cet historique nous amène à aborder la problématique de la définition d’un socle commun de connaissances et de compétences devant être maîtrisé par chacun. Le problème demeure sans solution si nous entrons dans la problématique déjà posée par Falloux, à savoir celle du niveau qui est en définitive celle du classement. Il s’agit avant tout de définir ce qui peut être considéré comme indispensable et faisable. La commission Thélot s’est engagée pour l’institution d’un socle commun de connaissances et de compétences à assurer à chacun. Elle en a, par ailleurs, fait l’article 1 de son rapport et a défini des principes de base qui lui paraissaient devoir être convoqués pour tenter de résoudre au mieux le problème, très souvent masqué par le texte des propositions concrètes que nous avons faites. Nous n’avions en effet ni les compétences, ni la légitimité ni le temps de définir le socle commun, ce qui nous a conduit à présenter précisément les procédures et les institutions qui pourraient être légitimement capables de la faire. Toutefois, nous avons effectué ce travail afin que la discussion sur ce sujet s’engage sur le plan politique. Paradoxalement, ce texte a si bien fonctionné qu’il a oblitéré les principes que nous pouvions éventuellement invoquer pour être orientés dans la réflexion sur la définition d’un socle. Cette définition est absolument nécessaire afin que l’instruction obligatoire ne devienne pas un vain mot. Cependant, elle est difficile car elle oblige à des choix prioritaires clairs selon des impératifs qui sont en partie de nature différente, pouvant se conjuguer ou se trouver en concurrence voire en contradiction. Il est sans doute préférable d’affronter le plus lucidement possible les difficultés et de ne pas céder à la tentation de les nier rhétoriquement. La Commission s’est donc risquée, pour éclairer les choix à faire, à proposer quelques principes qui, là encore, peuvent être soit combinés soit en tension et que nous pourrions avoir à l’esprit lorsqu’il s’agit de choisir. Le premier d’entre eux est celui de subsidiarité. L’Ecole n’est pas la seule instance éducative et nous ne devrions attribuer à celle-ci, en particulier pour le socle commun, que ce qu’elle peut mieux faire ou, à tout le moins, faire aussi bien que d’autres institutions éducatives, sans préjuger ensuite de ce qu’elle pourrait faire en complémentarité ou en partenariat avec ces dernières. Le second principe est celui de continuité. La formation initiale, étant désormais suivie d’une éducation tout au long de la vie, ne doit pas être conçue comme le tout éducatif d’une vie et ne saurait donc contenir ou aborder cet élément. Mais réciproquement, il ne faut pas perdre de vue, dans la conception même et la mise en œuvre du socle commun, qu’il convient absolument de rendre possible effectivement et de favoriser cette éducation tout au long de la vie. La redéfinition claire de ce
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qu’il n’est plus permis d’ignorer passe par le principe de la mise à jour des fondamentaux au XIXe siècle. Le socle commun de connaissances et de compétences ne saurait être conçu comme un simple réaménagement dans le cadre de l’existant. Il est plus que vraisemblable que des ajouts et des renforcements soient effectués en fonction de cette exigence d’actualisation. Cette dernière ne rend pas la tâche plus facile puisque qu’elle engage à être encore plus drastique en ce qui concerne les choix prioritaires à faire dans ce qui est actuellement, plus ou moins en théorie, au programme. Toutefois, passer à côté de cette opération délicate, suscitant inéluctablement frustrations et amertume, nous priverait de la possibilité d’atteindre nos objectifs et reviendrait à perdre une occasion difficilement rattrapable par la suite. Pour information, dans la colonne de gauche de notre texte dédiée aux indispensables, nous avions ajouté des éléments d’éducation au droit et à l’économie. Passé inaperçu aux yeux de certains, ce supplément moderne existe bien et il est à noter qu’il était déjà présent dans le cours supérieur sous Jules Ferry. Le quatrième principe est fondé sur la notion de priorité des priorités. Lorsque des connaissances apparaissent prioritaires aussi bien pour l’épanouissement personnel que pour la citoyenneté et pour la préparation à la vie professionnelle future et qu’elles sont de nature à rendre possible une éducation tout au long de la vie, elles devraient faire partie des priorités des priorités. Le dernier principe est celui
de faisabilité conjugué avec celui d’évaluation voire de validation. Les priorités dégagées et les choix effectués devraient donc prendre en compte sérieusement la faisabilité de ce qui sera décidé dans le même mouvement où seront précisées les évaluations voire les validations ad hoc s’il s’agit d’être effectivement réaliste et opératoire. Ces dernières considérations sont capitales parce que la notion de socle commun centrée sur la maîtrise effective de certains savoirs et compétences n’a aucun sens si nous sommes incapables de les évaluer concrètement. Se pose alors le problème des évaluations susceptibles de convenir à ces différents types d’objectifs. Il y va du sérieux de l’entreprise et de la lutte effective contre les fuites en avant et les postures avantageuses qui provoquent, en définitive, l’abandon des plus faibles dont nous prétendons nous soucier en premier lieu.
CLAUDE LELIÈVRE, professeur des universités, membre de la Commission nationale sur l’avenir de l’Ecole (CNAE).
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ALAIN BOUVIER, ancien recteur, membre du Haut Conseil de l’Education L e Haut Conseil de l’Education est ce que l’on appelle une autorité administrative indépendante, instance peu courante à l’Education nationale. En trente ans, une quarantaine de ces autorités ont été créées en France, les plus connues du grand public étant le CSA et la CNIL bien que les plus importantes ne bénéficient pas de la même notoriété. La loi du 23 avril 2005 permet au Haut Conseil de l’Education de voir le jour. Il est composé de neuf membres nommés pour six ans, sans possibilité de révocation mais également sans capacité d’être renommer. Trois d’entre eux sont désignés par le président de la République, deux par le président de la chambre des députés, deux par le président du Sénat et deux par le Conseil économique et social. Le président de la République désigne le président du Haut Conseil, qui est actuellement Bruno Racine. Cette instance, installée à Paris, dispose d’une infrastructure qui comprend un secrétaire général, deux attachés d’administration, des secrétaires et des chargés de mission à temps plein et peut également solliciter des expertises ou des études complémentaires. De plus amples informations sont disponibles sur le site hce.éducation.fr. Nos travaux ne sont pas publics mais les résultats de ces derniers le sont. Nous avons trois missions dont la première consiste à effectuer un rapport annuel sur les résultats de l’Education nationale adressé au président de la République, au parlement et rendu public. Le numéro un devrait être disponible début 2007 bien que son contenu n’ait pas encore été fixé. Nous devons par ailleurs rendre des avis sur les expérimentations auxquelles l’Education nationale se livre selon une procédure fixée par la loi et qui aboutit in fine devant le parlement après consultation du Haut Conseil. Le parlement décidera ensuite de l’arrêt ou de la généralisation de ces expérimentations. Nous n’avons jusqu’à aujourd’hui été saisis d’aucune expérimentation mais cette procédure est nouvelle et dans les académies, les recteurs commencent à s’en emparer. Notre troisième mission, à la demande du ministre de l’Education, réside dans la formulation d’avis sur des questions prévues par la loi, comme cela est le cas pour le socle commun et la formation des enseignants où la loi prévoyait que le ministre devait prendre notre avis. Très récemment, le ministre nous a fait savoir qu’il nous solliciterait sur un dossier relatif à l’apprentissage de la grammaire. Ce qui a été fait sur le socle commun concerne cet aspect de notre rôle et le travail entrepris sur la formation des enseignants devrait être achevé courant octobre. Notre méthode de travail repose sur
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des réunions hebdomadaires. Nos séances, préparées par nos équipes, se déroulent sur une demi-journée qui peut être étendue lorsque nous approchons du moment difficile d’écrire collective. Nous procédons à un grand nombre d’auditions que nous sollicitons. Ces dernières ne sont jamais publiées, ce qui nous permet d’avoir avec nos interlocuteurs une grande liberté de parole. Il arrive également que nous opérions des visites et demandions des missions d’expertise. Enfin, concernant le rapport annuel, le président du Haut Conseil est tenu de réunir et de consulter une commission qui vient d’être composée et dans laquelle figure tous les partenaires habituels de l’Education nationale. Il ne s’agit pas d’une commission paritaire et les textes prévoient qu’elle doit être réunie entre une et quatre fois par an. Le problème relatif au socle commun s’est posé de la façon suivante : la loi, à l’article 9, fait référence à ce sujet en terme de connaissances et de compétences dans le cadre de la scolarité obligatoire. Il s’agit, à travers ce socle, d’énoncer ce que l’école doit garantir à tous et peut-être faudrait-il ajouter à chacun. C’est une obligation de résultats dont le ministre devra désormais rendre compte régulièrement et au moins une fois par an devant le parlement. Cela signifie que le ministre aura non seulement à venir devant ces chambres comme il le faisait traditionnellement au moment de la préparation et du vote du budget, mais également à s’expliquer devant des commissions parlementaires puis sans doute devant les députés et les sénateurs sur ce sujet. Au moment où le ministre nous a saisis par un courrier officiel, un document de travail complémentaire, préparé par la Direction de l’enseignement scolaire et les Inspections générales, était censé préfigurer le futur décret. Or, le socle commun est un décret destiné au grand public. Par ailleurs, nous avions, au niveau du Haut Conseil, à notre disposition une abondante documentation nationale et internationale et nous connaissions en particulier les travaux effectués par la commission Thélot et ceux qui avaient été menés par le Haut Conseil de l’évaluation. Nous disposions également, dans le travail préliminaire au vote de la loi d’orientation, de ce qui avait été débattu, discuté et travaillé dans les commissions parlementaires qui, sur ce sujet, ont été très actives. Après quelques semaines, nous nous sommes heurtés à l’impossibilité de formuler un avis sur le document qui nous avait été transmis par le ministère pour diverses raisons. En effet, il s’agissait d’un premier avis d’une institution nouvelle dont la légitimité s’affirmera avec le temps et il était certain que la façon dont nous nous exprimerions allait marquer l’image de cette instance et pouvait la décrédibiliser. Il était de notre responsabilité de faire un travail que nous puissions assumer. Il nous semblait par ailleurs très difficile vis à vis du ministre de dire que le document de travail qui nous avait été remis était
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très éloigné de ce que pouvait être un décret destiné à la nation. Nous avons informé le ministre que nous ne pouvions pas respecter le calendrier initialement prévu et que nous allions procéder en deux temps afin de nous permettre de formuler des recommandations d’une part et, lorsqu’un véritable projet de décret nous serait envoyé, d’exprimer un avis d’autre part. Le ministre a compris et accepté cette logique, ce qui a permis d’aboutir au texte de recommandations qui se trouve sur le site du Haut Conseil et que nous avons pris à l’unanimité des membres le 23 mars 2006. Deux mois après, nous avions le projet de décret rédigé qui reprenait en grande partie ce que nous avions recommandé. Notre avis a été formulé avec une lettre d’accompagnement dans laquelle nous insistions sur ce qui nous semblait être les éléments essentiels. Il fut rendu le 22 mai tandis que le ministre procédait à d’autres consultations et réajustements du texte. Le décret a été publié au Journal Officiel du 12 juillet et au Bulletin Officiel du 20 juillet. Comment au niveau du Haut Conseil en sommes-nous arrivés à cet avis qui marque la fin de notre participation? Dans le rapport annuel que nous ferons sur les résultats de l’Education nationale, à partir de 2008, nous ne manquerons pas d’observer, de regarder, d’évaluer de quelle façon ce ministère met en place tout ce qui relève du socle commun de connaissances. Dans nos considérations initiales, nous nous sommes d’abord demandés pour qui pouvait être défini un socle commun. Nous avons travaillé sur l’école obligatoire sans toutefois nous contenter de la fin de celle-ci mais en considérant toute cette partie de la scolarité. Il a fallu trouver une définition de ce qu’était le socle commun devenu « ce que nul n’est censé ignorer à la fin de la scolarité obligatoire », qu’il y ait ou pas continuité des études, de façon à permettre une insertion dans la vie professionnelle et le système social. Nous sommes initialement partis de l’hypothèse que le socle n’était pas tout l’enseignement. A l’issue des auditions auxquelles nous avons procédé, un deuxième constat s’est imposé. Nous avons été très rapidement interpellés par le fait que notre système éducatif français est globalement en panne depuis douze ans avec des résultats qui sont le signe de beaucoup d’iniquité. L’enquête PISA prise uniquement dans sa partie française et dont l’échantillon a été constitué par l’Education nationale confirme notre constatation. Ainsi, les résultats pour les élèves de 15 ans qui sont en seconde voire en première révèlent un système
éducatif français très performant pour les très bons élèves. Nous faisons, pour cette donnée, mieux que la moyenne des meilleurs pays. Pour l’échantillon le plus volumineux, celui des classes de troisième, les résultats indiquent que nous sommes légèrement en dessous de la moyenne des pays concernés par ce programme. Dans le troisième groupe, nos performances sont celles des pays où il y a cent élèves par classe avec des enseignants formés au niveau du baccalauréat. L’audition, au sein du Haut Conseil, des deux Inspections générales qui venaient de publier, fin 2005, un rapport sur les acquis des élèves a renforcé notre perplexité. Il apparaît qu’en France, nous ne savons presque rien des acquis des élèves et que de surcroît, ce sujet semble ne préoccuper personne. Dans une instance comme celle du Haut Conseil de l’Education, un certain nombre de personnes, qui ne sont pas de l’Education nationale, ont été surprises par ces résultats. Par ailleurs, l’un des principaux problèmes détecté par ce rapport pointe un système fonctionnant sur une base d’attribution systématique de moyennes dont tout le monde ignore la signification. Les travaux du CREDOC et du Haut Conseil de l’évaluation nous ont fourni des éléments de réflexion. En France, une classe d’âge correspond à 750.000 élèves, entrant et sortant chaque année du système éducatif. Les chiffres qui seront cités dans cet exposé ne sont que des approximations mais ceux publiés dans les rapports que nous venons d’évoquer sont exacts. Ceux qui sortent peuvent être répartis schématiquement en cinq groupes de 150.000 jeunes. Sur ces 750.000 élèves, 150.000 sortent sans rien (les décrocheurs, le CAP inachevé et le lycée inachevé), 150.000 nous quittent avec un niveau cinq, celui des qualifications professionnelles, etc. Les chiffres du CREDOC montrent que la population qui sort du système scolaire à bac +2 atteint au bout de trois ans un taux de chômage de 8%, pour le niveau bac, ce taux passe à 11%, pour le niveau cinq, il est de 20%, quant à ceux qui n’ont rien, ils sont confrontés à un taux qui grimpe jusqu’à 40%. La loi évoquait un nombre de cinq compétences avec une culture scientifique rapprochée de la culture générale, exception faite des mathématiques. Lors de nos travaux, nous nous demandions si nous allions nous en tenir à ce dispositif. Nous avons suggéré au ministre de ne pas prendre en compte les 8 compétences clés européennes qui avaient été rendues publiques fin 2005 mais de se limiter aux 7 proposées par le Haut Conseil. Nous avons rapproché les mathématiques et les sciences. Ainsi, il ne s’agit pas d’un socle atrophié
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eu égard aux compétences exigées. Un soin particulier a été apporté à la rédaction du texte qui doit pouvoir être appréhendé par chaque citoyen. Quels ont été les points sensibles ? Ceux qui sont apparus dans nos discussions n’étaient pas ceux imaginés au commencement. En effet, ils nous ont été importés par les personnes que nous auditionnions. Le premier point concernait, dans une large majorité, l’anglais qui apparaissait comme obligatoire dès le cours préparatoire. La possibilité de parler librement a conduit certains interlocuteurs à s’exprimer en totale contradiction avec les discours publics qu’ils avaient été contraints d’adopter. Après en avoir débattu, un élément a emporté notre décision, à savoir que ce sujet avait été l’objet de débats au sein de la commission Thélot mais également au niveau parlementaire. Ainsi, il s’avérait que le législateur renonçait à l’anglais obligatoire dans les écoles élémentaires en connaissance de cause. Il était difficile pour une instance comme la nôtre d’aller délibérément à l’encontre des députés et sénateurs qui venaient de débattre sur le sujet et avaient tranché. Nous nous sommes simplement exprimés sur le fait qu’il devait y avoir un niveau de compétences indispensable sur la maîtrise d’une langue vivante et étrangère et nous nous sommes calés sur le niveau européen. Le deuxième point fut la signification de l’enseignement de l’histoire. De quelle façon peuton évoquer dans notre pays l’histoire de France? Doit-on la transformer en huis clos, avec l’idée que d’autres questions seront abordées ultérieurement, au lycée notamment, ou bien doit-on positionner cet enseignement dans l’histoire européenne ou encore mondiale ? Cette interrogation coïncidait par ailleurs avec le projet de manuel d’histoire contemporaine franco-allemand, publié depuis. Au-delà des questions de contenus disciplinaires, se posaient les questions d’éducation et de citoyenneté. Le Haut Conseil a commencé par se demander ce qui relevait ou non de l’École. La question n’est pas nouvelle et continue de diviser le pays tout entier. Le rapport entre le brevet national des collèges et le socle commun fut également une source d’interrogation car le premier, contrairement au second, est un diplôme. Les parents d’élèves lui accordent une grande importance bien que les professeurs ne lui portent que peu d’intérêt. Il apparaissait que reconsidérer un diplôme national était un acte symbolique majeur et qu’il méritait, par conséquent, un peu de réflexion, le brevet national n’étant pas, de surcroît, le meilleur outil pour procéder
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à l’évaluation du socle commun. Toutefois, la question du rapport entre les deux demeure et la décision du ministre n’est pas encore arrêtée sur ce sujet. Un autre débat important a mobilisé notre attention. Allionsnous travailler sur un socle constituant un bloc unique, en ne parlant que de la fin de la scolarité obligatoire ou fallait-il préconiser des étapes ? Il nous a semblé fondamental de ne pas attendre la fin de la scolarité obligatoire, connaissant le déterminisme des deux premières années de l’école élémentaire, pour savoir si son début avait été satisfaisant. Le système a besoin de mécanismes de régulation globaux mais aussi ponctuels au niveau des établissements, des classes et nous avons préconisé que soient mis en place au moins trois paliers, à la fin de CE1, à la fin du CM2 et à la fin du collège. Après avoir entendu ce qui relevait des mécanismes d’évaluation actuels dans le système éducatif, nous avons compris que rien d’essentiel ne serait changé si ces procédés n’étaient pas modifiés. Cela nous a conduit à proposer que la validation des compétences se fasse compétence par compétence et sans compensation entre elles, avec une multiplicité des outils afin que puissent se faire des évaluations garantissant, à un moment bien précis, une maîtrise des compétences tout en s’assurant de la stabilité de cette dernière. Ce vaste chantier d’une quinzaine d’années vient tout juste de s’ouvrir. Il mérite notre attention puisque l’objectif consiste à rendre l’école non seulement plus efficace mais encore plus équitable.
ALAIN BOUVIER, ancien recteur, membre du Haut Conseil de l’Education
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JEAN-MICHEL ZAKHARTCHOUK, ancien rédacteur en chef des Cahiers
pédagogiques
L a réflexion sur le socle doit se situer dans une mémoire de ce qui a déjà été fait afin que les entreprises du passé ne soient pas sans cesse redécouvertes comme nouvelles. Le socle commun pose de nombreuses questions et éveille des critiques dont nous ne savons pas exactement si elles concernent l’idée de socle ou le contenu de celui-ci. Les recommandations du Haut Conseil et le texte final laissent une impression mitigée. Bien que ce dernier contienne des aspects positifs, il demeure ambigu. À partir du travail que j’ai mené pour coordonner le dossier des Cahiers pédagogiques « quel socle commun ? » (www.cahierspedagogiques.com/numero.php3?id–article=2103), je voudrais mettre en avant sept conditions pour que le socle soit une réalité et aille dans le bon sens. Il nous semble d’abord que le socle ne doit pas en rester à une logique disciplinaire. Le texte actuel a du mal à y échapper. Deuxièmement, avons-nous réellement pris en compte les compétences et pas seulement les connaissances ? Nous donnons-nous les moyens pédagogiques de parvenir au socle au-delà des moyens matériels ? Le socle commun ne sera accepté que si l’ambition culturelle n’est pas laissée de côté. Relions-nous ce dispositif à la formation tout au long de la vie ? Enfin, est-ce qu’il prend en considération tout ce qui existe, notamment les recherches pédagogiques ? Certains points ont fait l’objet d’avancées significatives, en particulier l’ajout des compétences 6 et 7. Le premier élément n’a pas pour but d’opposer le disciplinaire et l’interdisciplinaire. Toutefois, une logique purement disciplinaire est un obstacle au socle car cela entraîne le fait que chacun va considérer son domaine comme essentiel. Ces conflits d’influence peuvent-ils être surmontés ? Le fait d’avoir relié les mathématiques à la culture scientifique paraît une bonne chose. Cependant, il existe une contradiction entre l’affirmation de l’importance du travail de projet avec des dispositifs interdisciplinaires qui, d’après les textes officiels, ont fait leur preuve et la réalité, c’est-à-dire des TPE réduits d’un an et des itinéraires de découvertes moribonds. S’agissant des compétences, Philippe Perrenoud écrit dans un article intitulé Le socle et la statue, publié dans le numéro 439, de janvier 2006 des Cahiers pédagogiques consacré à cette question : « Les élèves qui sortent de l’école à seize ans ont fait des mathématiques de haut niveau mais ne savent pas calculer leurs probabilités infimes de gagner à la loterie ou au tiercé ni estimer le coût du petit crédit. Ils ont fait des heures de biologie mais n’ont pas compris les bases élémentaires de la contraception, de la toxicodépendance ou de la prévention du SIDA. Ils ont fait de la chimie mais ne savent pas décoder les étiquettes des produits alimentaires. Ils ont fait de la physique mais ne savent pas économiser l’énergie ou évaluer les risques technologiques. Ils ont étudié la littérature mais sont incapables d’exprimer leurs propres sentiments. » Le constat est sévère mais nous sommes bien au cœur des compétences, c’est-à-dire le fait de prendre les connaissances au
sérieux. Il faudrait également considérer les capacités d’actions dans la vie sociale ou personnelle. Les compétences doivent être comprises en terme d’usage social afin de donner un sens à l’apprentissage , y compris dans ses aspects “répétitifs”. Pour observer le résultat de ces compétences dans les disciplines, il est nécessaire de mettre l’accent sur la formation. L’accompagnement formatif des professeurs fait partie des moyens indispensables à la mise en œuvre pédagogique du socle commun. Lorsque le rapport Thélot fut publié, nous déplorions déjà qu’il n’y ait pas une évocation plus nette de la nécessité du travail pédagogique, bien que Claude Thélot ait insisté sur l’importance de ce qui se passait dans les classes. Il faut réaffirmer la place importante que doit avoir la pédagogie différenciée. Nous devons, par ailleurs, veiller à ne pas confondre la pédagogie différenciée avec une pédagogie différenciatrice qui renforce les différences. Il s’agit de trouver des chemins différents pour atteindre des buts communs. L’ambition culturelle figure bien dans le socle mais nous devrions travailler sur la notion d’appropriation culturelle car cette dernière ne peut pas être imposée d’en haut et doit avoir pour point de départ l’univers culturel des élèves (cf. Transmettre vraiment une culture à tous les élèves, Jean-Michel Zakhartchouk, CRDP d’amiens et CRAP). Une fois encore, l’enseignant ne pourra être “un passeur culturel” que s’il bénéficie d’un accompagnement et d’une formation. Il n’est pas certain que ce soit une préoccupation prioritaire de l’Education Nationale aujourd’hui. Il y a aussi des approfondissements à effectuer, notamment sur la question de l’évaluation, afin de mieux déterminer ce qu’on veut faire acquérir, très concrètement. Il faut rentrer dans les détails pour que le socle ne soit pas confondu avec le programme et ses exigences strictement scolaires. Enfin, en matière de formation tout au long de la vie, nous revenons toujours aux compétences, c’est-à-dire à la possibilité d’acquérir les «codes d’accès» pour ouvrir d’autres portes. Il ne faudrait pas qu’un élève de troisième sorte du système scolaire sans pouvoir argumenter ou s’exprimer devant un public. Rappelons que ces capacités ne sont pas seulement indispensables pour le parcours professionnel mais concernent également les aspects plus personnels de la vie d’un individu. La question de l’appétit d’apprendre est ici sous-jacente et permet de dépasser l’opposition entre le programme et le socle. Les itinéraires de découvertes grâce auxquels les élèves peuvent approfondir un sujet durant 13 ou 14 semaines, remplissent cette fonction en servant de moteur. Enfin, nous ne pouvons pas agir comme si nous partions de zéro. Il existe déjà des tentatives très intéressantes chez les enseignants qui essaient de constituer entre eux un socle délimitant le fondamental. À cet égard, le rapport d’Antoine Prost sur la recherche en éducation met au jour la coupure entre le savoir existant et ce que nous en faisons. Nous ne pourrons pas faire vivre le socle si ces tentatives ne sont pas valorisées. Depuis la disparition du Conseil national de l’innovation et de la réussite scolaire, aucune instance n’est capable de relier les diverses initiatives et les recherches. Ainsi, il est difficile d’accepter que le texte mentionne en caractère gras la dictée comme étant un outil indispensable d’apprentissage et d’évaluation de l’orthographe alors que le problème numéro un est de permettre aux élèves de donner plus de sens à leurs écrits, de changer leur rapport à la langue, ce qui aura aussi des effets positifs sur l’orthographe. En tout cas, ce passage n’avait guère sa place dans le texte sur le socle.
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Conclusion, Dominique Raulin Le
socle commun de l’Education pourrait être considéré comme un texte de plus mais le travail du Haut Conseil qui sera amené à interpeller le ministre sur l’acquisition concrète des élèves par rapport aux exigences inscrites dans ce dispositif ne permet pas de justifier ce jugement. L’obligation faite à une instance indépendante de s’adresser au ministre ne pourra pas être sans effet. Quel que soit notre avis par rapport à ce socle, il n’est pas légitime de dire qu’il a été conçu sans discernement et que de ce fait, il n’a aucun intérêt. Nous pouvons être en désaccord mais de la commission Thélot au Haut Conseil de l’Education, en passant par le Conseil national des programmes, toutes les interrogations ont été posées. Depuis, le Parlement puis le ministre ont tranché en connaissance de cause et l’heure n’est donc plus aux atermoiements. Il me semble que ce socle peut améliorer considérablement le fonctionnement de la scolarité obligatoire actuelle et particulièrement la situation des 150 000 jeunes qui sortent du système tous les ans sans diplôme en qualification. Nous disposons d’un objet nouveau dont la mise en œuvre est difficile : nous avons besoin de pédagogie, de travailler sur des approches non disciplinaires, de réfléchir au problème de l’acquisition et du développement d’une culture. Ces questions complètement vierges doivent être abordées avec les enseignants. Que devons-nous mettre à leur disposition pour le développement culturel dans le domaine scientifique par exemple ? Quels éléments les CRDP peuvent-ils mettre à la disposition des professeurs ? Nous courons collectivement le risque que ce texte prometteur, ce cadre dont nous manquions soit progressivement défiguré. Il faudra l’accompagner intelligemment si nous voulons éviter cette dérive. Nous possédons actuellement tous les éléments pour que, dans nos missions respectives, nous puissions trouver et construire les composants de ce dispositif. Il ne s’agit pas de s’en remettre aux
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fanatiques de la recherche pédagogique ou aux équipes rodées à ce type d’innovation mais de conforter les enseignants face à la multitude des difficultés que va générer la mise en place du socle afin qu’ils puissent répondre à la demande de la nation. Trois sujets méritent au moins que nous continuions à travailler et à nous éclairer. La comparaison internationale est particulièrement intéressante sur ce sujet car nos voisins ne se posent pas les questions de la même façon que nous. Pour quelles raisons la France en serait-elle incapable ? Par ailleurs, nous sommes en droit de craindre que les compétences 6 et 7, c’està-dire les compétences civiques et l’esprit d’initiative soient trop difficiles à enseigner. Elles étaient déjà apparues dans le domaine professionnel, dans les années 1975-1980 au moment de la mise en place des référentiels dans la voie professionnelle et de la pédagogie par objectifs et avaient été abandonnées. Il faudrait éviter aujourd’hui que nous nous focalisions sur le disciplinaire en sacrifiant les compétences 6 et 7, l’approche culturelle, la culture humaniste, scientifique et technologique..., tout ce qui finalement est transversal Enfin, l’enseignant qui dispense un apprentissage doit, à un moment donné, mesurer la qualité de son travail. L’évaluation des acquis reste complexe pour un certain nombre de compétences. A l’heure actuelle, nous n’avons pas pour travailler sur ces questions assez de relations avec les recherches en didactique et en sciences de l’éducation. Il est donc à craindre que, comme sur les modules il y a quelques années pour les classes de seconde par exemple, les expérimentations hasardeuses se multiplient. Il me semble que cette situation ne doit pas se reproduire avec le socle commun : il est indispensable que les recherches universitaires nous aident à trouver des clés pour que ce dispositif fonctionne.
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Public 1 : La question de savoir ce qu’il fallait mettre au second plan dans le socle a été abordée. À la lecture du texte, rien ne semble pouvoir être retirer. Est-ce que, s’agissant de l’école élémentaire, tout est dans le socle ? Dans le cas contraire, il faudrait travailler à identifier les compétences qui pourraient figurer au second plan. Seront-elles reportées au collège ou devront-elles être acquises dès le primaire ? L’éducation physique, par exemple, a complètement disparu du champ disciplinaire mais apparaît dans les chapitres 6 et 7 à propos de la citoyenneté et de l’autonomie. Le risque réside dans la disparition de certaines compétences, par ailleurs convoquées dans le socle. ALAIN BOUVIER : Rappelons en premier lieu que l’éducation physique n’est pas une compétence mais un champ d’activité proposé aux élèves et qui comme toutes les disciplines est censée apporter sa contribution à toutes les compétences. Le Haut Conseil a invité chaque discipline à se demander quelle pouvait être sa participation aux différentes compétences. Cela suppose de faire un travail peu habituel qui doit également concerner ceux qui conçoivent les programmes. L’élaboration de ces derniers à Paris est assujettie aux lobbies disciplinaires qui ont, par ailleurs, exercé des pressions sur le Haut Conseil. Le ministre a demandé que nous procédions à une relecture des programmes, à partir du socle pour l’école élémentaire puis le second degré. J’ai le sentiment que ceux du primaire sont actuellement considérés comme plutôt satisfaisants tandis que ceux du collège ne semblent pas bénéficier d’un avis aussi positif et devront être retravaillés. Ce remaniement sera, à n’en pas douter, difficile autant que nécessaire.
JEAN-MICHEL ZAKHARTCHOUK : La question du niveau d’exigence sur une même compétence doit être également abordée. Il arrive que les programmes du primaire apparaissent plus exigeants que ceux du secondaire. Toutefois, il faut considérer que le niveau d’exigence n’est pas le même et devrait être mieux défini afin de ne pas générer de paradoxes. De plus, il serait nécessaire d’abandonner la notion de niveau d’excellence qui crée de la confusion et n’est valable que pour les bons élèves. Public 2 : Il est surprenant, dans le texte du socle, de se trouver face à une hiérarchisation des arts du dire, du raisonner et du faire alors que dans son ensemble, ce dispositif sous-estime les arts du faire. L’activité d’écriture des élèves, par exemple, aurait mérité autant que la dictée d’être valorisée. Les enseignants de français savent à quel point il est difficile de mettre les élèves au travail d’écriture. Le socle a tout à fait négligé les activités technologiques pourtant importantes dans notre société. De la même manière, les activités artistiques sont très peu développées tandis que nous traversons une crise culturelle. Le décalage culturel se creuse entre l’enseignement délivré dans les classes et les références des élèves. Cette question ne figure pas dans le socle qui pose le principe d’une culture commune sans en définir réellement le contenu. CLAUDE LELIÈVRE : Nous avons de grandes difficultés à faire certaines conversions. Dans le système éducatif français, le discours est toujours au-dessus du faire. Les mieux placés dans ce domaine sont les philosophes qui sont les spécialistes des discours sur les discours. Ce mécanisme, déjà ancien, place la culture du côté du laïus. Durant le Second Empire, sous Victor Duruy, un secondaire spécial est mis en place sous une forme mi-technologique, mi-professionnelle. Une école normale et une agrégation sont même créées pour cette nouvelle filière qui entre scandaleusement dans un espace culturel reposant, à l’époque, exclusivement sur l’universel. L’enseignement des langues dans le secondaire spécial, par exemple, est destiné à la pratique orale, administrative et épistolaire alors que la culture aurait exigé l’apprentissage de la langue de la philosophie ou de la littérature et de la grammaire. Ainsi, le professionnel ne peut devenir culturel que s’il devienne l’objet de la réflexion. Le modèle culturel demeure celui du discours. Il est vrai que poser la question des compétences ébranle en partie cette structure. Mais il faut déterminer quelles sont ces dernières car, dans le premier rapport venant du ministère, le corps et la main n’existaient pas. Les arts plastiques n’étaient vus qu’à travers la contribution de la consommation de certains musées. La littérature est exposée à la même tentation. De fait, la question des compétences et des types d’évaluation est importante dans la mesure où son traitement peut pondérer l’hégémonie du dire sur le faire. Des discussions âpres sur ce sujet avaient été menées par la commission Thélot au sein de laquelle le mot «travaux manuels», volontairement utilisé, posait la question de l’agir en tant que composant de la culture. Parallèlement, l’importance de certains types de discours était réaffirmée dans l’ajout, par exemple, du droit. Par ailleurs, cette articulation recouvre celle qui existe entre la formation initiale et la formation continue. En effet, il est certain que ceux qui n’ont pas fait de droit dans leur formation initiale n’en feront pas après. Un futur citoyen peut-il être hors de la logique du droit dans la société qui est la nôtre ?
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