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Des idées pour réduire le gaspillage alimentaire

Des solutions pour réduire le gaspillage alimentaire

JULIE CHABOT,

conseillère en transformation alimentaire, Direction régionale du Centre-du-Québec

KIM DESPRÉS,

conseillère en transformation alimentaire et répondante en relève, directions régionales de la Mauricie et du Centre-du-Québec

Saviez-vous que 16 % des aliments produits sont perdus ou gaspillés, selon un rapport de RECYC-QUÉBEC1? C’est 1,2 million de tonnes, ce qui équivaut à 92 300 autobus scolaires. Près de la moitié des aliments sont perdus avant d’arriver en épicerie. Bien que certains facteurs soient difficiles à contrôler, les producteurs et les transformateurs disposent de solutions pour pallier ce problème. En plus de bénéficier à la planète et à sa collectivité, diminuer ces pertes peut avoir un effet positif sur le portefeuille des entreprises.

Réduire son incidence environnementale et ses coûts d’approvisionnement, développer une culture d’équipe et répondre aux attentes sociétales sont quelquesuns des bénéfices résultant des efforts de réduction du gaspillage alimentaire au sein de son entreprise. Par où commencer? Des ressources externes existent et des réflexions sur les pratiques internes s’imposent.

Saisir l’occasion d’améliorer son rendement et de réduire le gaspillage

D’abord, les dirigeants doivent être engagés dans la volonté d’apporter des améliorations à leurs pratiques, car cela requiert du temps précieux. La première étape est d’effectuer une évaluation complète de l’ampleur des pertes et du gaspillage. L’exercice consiste à examiner ses processus, de l’achat jusqu’à la distribution, de façon à cibler les points d’amélioration et à les mesurer.

Parmi les causes les plus fréquentes de pertes et de gaspillage, on dénote l’erreur humaine, la formation insuffisante, les bris d’équipement, les outils de planification déficients, la mauvaise gestion des stocks, les conditions d’entreposage non optimales, etc. Ces éléments ciblés, une fois mesurés, seront des indicateurs à suivre afin de réduire les pertes selon des objectifs établis. En surveillant davantage ses opérations et en mettant en œuvre plus de pratiques d’amélioration continue, une grande partie de l’industrie alimentaire du Québec pourrait saisir des occasions d’améliorer son rendement et, par conséquent, remédier aux inefficacités liées aux résidus alimentaires. Idéalement, cette volonté pourrait s’inscrire dans la culture de l’entreprise.

Les produits de l’économie circulaire : une occasion pour l’industrie alimentaire

La réduction du gaspillage alimentaire est l’une des bases de l’économie circulaire. Par référence au schéma présenté ci-dessus, le concept de l’économie circulaire dans la filière alimentaire est plus large que la réduction du gaspillage alimentaire seulement et propose plusieurs leviers d’action.

Selon un reportage de L’épicerie de Radio-Canada2, l’économie linéaire, celle que l’on connaît bien, consiste en quatre étapes : extraire, fabriquer, consommer et jeter. L’économie circulaire, elle, est une boucle où l’énergie et les matières premières sont réutilisées tout au long du cycle. En d’autres mots, selon la philosophie de l’économie circulaire, les déchets ne sont pas vus comme tels, mais comme des ressources abandonnées qui méritent d’être récupérées et optimisées.

Un sondage effectué auprès de la communauté du Club DUX révèle que 95 % des consommateurs aimeraient voir plus de produits de l’économie circulaire sur le marché3. Cela ouvre des perspectives intéressantes pour les entreprises du secteur bioalimentaire. En effet, le secteur peut optimiser davantage l’utilisation des ressources à toutes les étapes du cycle de vie. Toutefois, le Québec a du chemin à parcourir, car son indice de circularité – c’est-à-dire le pourcentage des ressources utilisées pour satisfaire nos besoins remis en boucle dans notre économie – n’est que de 3,5 %4 .

Le modèle d’affaires de certaines entreprises s’appuie sur un approvisionnement réduisant le gaspillage alimentaire. Une distillerie qui conçoit ses produits à partir de la fermentation d’un coproduit de la transformation en est un exemple. D’autres maillages sont dignes de mention, tels que la transformation de légumes rescapés. Certaines entreprises déploient également des ressources pour rendre disponibles leurs résidus alimentaires pour la valorisation.

Manœuvrer avec le caractère périssable de la matière pour diminuer ses pertes

Malgré plusieurs efforts de la part des commerçants, certains produits ne seront pas vendus dans le délai souhaité. C’est le cas, par exemple, des produits de boulangerie, dont la fraîcheur est non négociable pour le consommateur. Ainsi, certaines boulangeries congèlent les produits restés sur les tablettes afin de les vendre à prix préférentiel, tandis que d’autres les valorisent, notamment par la fabrication de croûtons. Les fruits et légumes sont également une catégorie de produits qui mérite d’être rescapée puisqu’elle constitue une grande part des aliments comestibles gaspillés.

Si l’intégration de la transformation alimentaire de surplus et d’invendus représente une avenue complexe, il est envisageable d’évaluer la sous-traitance. La déshydratation, la mise en conserve et les autres procédés peuvent permettre d’élargir l’offre de produits de l’entreprise, tout en réduisant les pertes. Il existe dans d’autres régions du Québec des initiatives inspirantes telles qu’une conserverie mobile se déplaçant sur les fermes.

Dans certains cas, il est judicieux de se questionner sur l’allongement possible de la durée de conservation des produits. Des améliorations aux procédés et aux méthodes d’entreposage ou d’emballage peuvent augmenter la durée de vie d’un produit.

Le glanage : une pratique en essor au Québec

Pour différentes raisons, dont le manque de main-d’œuvre, plusieurs végétaux restent aux champs. Ces dernières années, les initiatives de glanage se sont multipliées au Québec. Des dizaines de tonnes de fruits et légumes sont rescapées chaque année dans la province5 . Selon Cultive le partage, un regroupement d’initiatives de glanage en Mauricie, la pratique est définie comme étant la récolte de surplus d’une ferme maraîchère, d’un arbre fruitier ou d’un jardin privé par des citoyens et citoyennes bénévoles. Les fruits et légumes sont récoltés, puis distribués en trois parts égales aux donateurs, aux bénévoles et aux organismes communautaires. Cultive le partage a distribué plus de 21 tonnes de denrées en 2021.

Plus près de chez nous, Artha-Récolte offre ses services à des producteurs partenaires par sa formule de glanage. La mission d’Artha-Récolte est de réduire le gaspillage alimentaire en facilitant la cueillette et la transformation des surplus des maraîchers de la MRC d’Arthabaska6 . En 2021, ce sont 24 tonnes de fruits et légumes qui ont été sauvées par l’organisme.

En conclusion, une démarche de réduction du gaspillage alimentaire peut être intimidante. Sachez que des ressources existent pour accompagner les entreprises. • Consultez la section Ressources du site Web de Québec Circulaire : Quebeccirculaire.org, la plateforme qui rassemble les acteurs de l’économie circulaire au Québec. • Consultez une ressource locale de Synergie Québec ou le Centre de transfert technologique en écologie industrielle. • Consultez l’inventaire des mesures d’aide gouvernementales pour le développement durable : MAPAQ – Transformation alimentaire et développement durable (gouv.qc.ca).

Références

1 RECYC-QUÉBEC. Étude de quantification des pertes et gaspillage alimentaires au Québec, juin 2022. [https:// www.recyc-quebec.gouv.qc.ca/sites/ default/files/documents/etude-quantifi cation-pertes-qc-fr-faits-saillants.pdf] 2 MADÉ, Élise. « L’économie circulaire au service de l’alimentation », Radio-

Canada, octobre 2021. [https://ici.radio- canada.ca/nouvelle/1831062/ economie-circulaire-tenebrion- vignoble-pisciculture?fbclid=IwAR0Bc kx9kATck8WrfENqf6P_E9L0QqtbXit

MdqQm8n62GagAy99VR_DpeEY]. 3 FARRELL, Émilie. « Les stats du Club

Dux : qu’en est-il du gaspillage alimentaire chez les consommateurs? »,

L’actualité alimentaire web, juillet 2022, p. 18. [https://fr.calameo.com/read/ 0062309087094764f5478]. 4 CIRCLE ECONOMY et RECYC-QUÉ-

BEC. Rapport sur l’indice de circularité de l’économie, juin 2021. [https://www. recyc-quebec.gouv.qc.ca/sites/default/ files/documents/rapport-indice- circularite-fr.pdf]

Schéma RECYC-QUÉBEC

5 100 DEGRÉS. Le glanage : une pratique en plein essor au Québec, novembre 2021. [https://centdegres.ca/ ressources/le-glanage-une-pratiqueen-plein-essor-au-quebec] 6 ARTHA-RÉCOLTE. À la rescousse des fruits et légumes de nos champs. [https://www.artharecolte.com]

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