Discipline en classe et autorité de l’enseignant

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Discipline en classe et autorité de l’enseignant

Bernard rey

D

iscipline, autorité : ces notions n’ont pas une excellente réputation, car elles sont souvent associées à des images de répression et de tyrannie. L’auteur s’attache à montrer ici que la discipline dans les classes est la condition pour que l’enseignement profite à tous les élèves.

Mais comment faire respecter la discipline nécessaire aux apprentissages ? à partir d’une analyse des causes de l’indsicipline à l’état secondaire, cet ouvrage apporte des causes des indications concrètes et détaillées sur la manière de conduire la classe. Il propose en outre une conception originale de l’autorité du professeur, en expliquant précisément comment tous les enseignants peuvent arriver à construire une relation d’autorité qui soit à la fois efficace et respectueuse de la personne des élèves. Associant réflexions et consignes pour la pratique de la classe, ce livre est un outil à l’usage des enseignants du secondaire en exercice, des enseignants en formation et des formateurs d’enseignants.

Discipline en classe et autorité de l’enseignant

éléments de réflexion et d’action

Discipline en classe et autorité de l’enseignant éléments de réflexion et d’action

ENSEIGNEMENT SECONDAIRE

Pédagogie générale Sciences & mathématiques

ISBN 978-2-8041-0765-9

RELAUT

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Sciences humaines Ouvertures

www.deboeck.com

18/06/09 9:58:19


able des matières Introduction

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Pourquoi la discipline ?

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Quelques représentations courantes du problème

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Discipline et indiscipline : une multiplicité de facteurs

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Présentation de l’ouvrage

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Comment lire cet ouvrage ?

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Qu’est-ce que la situation d’enseignement ?

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École, formes d’apprentissage et relations à autrui 1. La coupure entre apprentissage et pratique 2. Pratiques et savoirs sur les pratiques

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Les conséquences relationnelles de l’apprentissage scolaire Carence de sens et de motivation La dérive relationnelle

21 22 23

Des pédagogies pour corriger les inconvénients de la didactisation La globalisation Apprentissage fonctionnel et pédagogie de projet

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Les limites de ces pédagogies 1. Apprentissage et productivité 2. Apprendre en voyant faire ? 3. École et savoirs

28 29 29 30

Les facteurs psychologiques de la discipline en classe

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Discipline en classe et psychologie des individus Les individus et leur histoire Du bon usage professoral de la psychologie Les adolescents La psychologie des enseignants

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Groupe et phénomènes de groupe Classe et groupe Le phénomène de conformisme

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Chapitre 1

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Changement et résistance au changement Leader et leadership Rôles d’élèves au sein du groupe-classe

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Les pédagogies de groupe Groupe et rapport à la réalité Réhabiliter la parole des élèves

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Les facteurs sociologiques de la discipline en classe

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La découverte progressive des facteurs sociologiques L’unification des réseaux et le principe méritocratique Le poids des inégalités culturelles

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Attitudes et codes de comportement Comprendre les attitudes du professeur Comprendre les attitudes des élèves

62 62 63

Habitudes de pensée et activités scolaires Rapport à l’écriture et rapport au savoir Les réactions des élèves Que peut faire l’enseignant ?

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Réussite scolaire et réussite sociale

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La conduite de la classe

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Regard, gestes et parole : les attitudes de base Regard et gestuelle La parole

80 80 82

Les situations de travail 1. Le travail en situation collective 2. Le travail individuel 3. Le travail en petits groupes

84 84 87 88

Gérer la classe Adapter les situations de travail Être attentif à la « valence » du groupe-classe Organiser le temps et l’espace

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Règles et sanctions Le choix et l’institution des règles À propos des punitions et des sanctions

95 95 100

L’importance des choix didactiques Le savoir Le processus d’apprentissage

105 105 107

Autorité et rapport à la loi

115

Faut-il avoir de l’autorité ?

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Comment avoir de l’autorité ?

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Table des matières


Être à l’aise sous le regard d’autrui Ce qu’en pensent les élèves

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Qu’est-ce que l’autorité ?

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Les débats contemporains sur l’autorité Autorité, tradition et religion Autorité et démocratie

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La forme spécifique de l’autorité de l’enseignant

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Le rapport à la loi Les publics difficiles Loi et règles pour la classe Des exemples de mesures concrètes

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Conclusion

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Bibliographie

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Table des matières

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TableIntroduction des matières

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ntroduction Introduction Ni la notion de discipline, ni celle d’autorité n’ont une excellente réputation. Car elles sont souvent associées aux idées de répression et de tyrannie. Nous voudrions montrer qu’elles en sont pourtant radicalement différentes et qu’elles sont au contraire indispensables pour que l’enseignement secondaire devienne démocratique. Encore faut-il pour cela préciser rigoureusement en quoi elles consistent et indiquer très concrètement comment on peut les exercer dans le cadre de la classe. C’est à cela que le présent ouvrage est consacré, dans une optique de formation pour les futurs enseignants et de réflexion pour les praticiens actuels.

POURQUOI LA DISCIPLINE ? Disons-le sans ambages : non seulement le professeur du secondaire ne doit pas se sentir coupable d’instituer, dans ses cours, une certaine discipline, mais cela fait partie de ses devoirs professionnels. Et cela pour au moins trois raisons : 1) Une collectivité humaine ne peut durablement fonctionner sans règles. Ces règles, loin d’opprimer, protègent de l’oppression. Certes elles contraignent l’individu, mais elle le protège du même coup de la force des autres en les contraignant pareillement. Elles ouvrent ainsi à chacun équitablement un espace de liberté. Dans les classes du secondaire où les enseignants n’ont pas su instituer des règles de coexistence, règne souvent un climat d’intimidation, voire de terreur, de la part de certains élèves à l’égard d’autres. Refuser d’instituer des règles au nom de la liberté individuelle ou de la bienveillance que l’on devrait à de tout jeunes gens constituerait une erreur éthique. 2) Mais la classe n’est pas seulement une collectivité ; c’est une collectivité établie dans le but de faire accéder à des savoirs (au sens très général de connaissances théoriques ou pratiques).

Chapitre 1

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3)

Or un savoir, quel qu’il soit, est un discours qui obéit à des règles. Faire du français, des mathématiques, de la géographie, de la physique, etc., c’est toujours accepter d’obéir à des procédures rigoureuses, d’utiliser des concepts qui ne sont pas ouverts à la fantaisie individuelle. C’est se plier à une discipline. Ce n’est pas un hasard si ce même mot de discipline désigne à la fois un champ du savoir scolaire et un régime d’ordre et de règles. Cela rappelle d’ailleurs que la discipline que le professeur va tenter d’imposer en classe ne se légitime que parce qu’elle est d’abord l’ensemble des prescriptions qu’il faut respecter dans un champ de savoir donné. Si l’on se met à transiger avec le respect des règles dans la classe, on risque de suggérer aux élèves qu’on peut également transiger avec les règles des savoirs qu’on étudie. Le laxisme, le renoncement à des règles précises de fonctionnement de la classe ont ordinairement des conséquences bien connues : il s’établit un climat défavorable au travail et à l’apprentissage. Or ce climat risque toujours d’être plus dommageable aux élèves qui sont déjà en difficulté ou à ceux qui viennent de milieux défavorisés. Car ces derniers, moins susceptibles d’être aidés à l’extérieur de l’école, pâtiront plus directement d’un mauvais fonctionnement du cours ; et ayant moins intériorisé les règles implicites du fonctionnement scolaire, ils seront plus enclins à abandonner tout effort dès lors que la classe est le lieu d’un laisser-faire général.

Pour ces raisons, il est indispensable qu’une discipline soit instituée dans les cours. Mais une telle discipline ne s’établit pas d’elle-même. Elle exige, dans la plupart des cas, que l’enseignant établisse une relation d’autorité. Or beaucoup d’enseignants n’ont pas envie d’être «autoritaires». Pourtant, tous les enseignants souhaitent que les élèves soient calmes, qu’ils écoutent avec attention le cours, qu’ils obéissent aux règles de vie en commun, qu’ils soient dociles aux injonctions du professeur, qu’ils se respectent mutuellement, qu’ils soient polis et déférents, qu’ils soient intellectuellement disponibles, etc., et que tout cela se passe dans le bonheur général. Or il n’en est pas toujours ainsi. Au contraire, les médias relatent régulièrement des faits de violence dans les établissements secondaires et de nombreux ouvrages sont désormais consacrés à ce problème. Certes, la violence au sens ordinaire, la

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Introduction


violence physique, n’est pas le lot quotidien de l’enseignant du secondaire et nous n’en parlerons pas directement. Mais si, sous le terme de violence, on entend aussi l’humiliation, la dépréciation, la mise au pas, les menaces, les peurs, les tensions conflictuelles, l’affrontement des désirs divergents, etc., alors, certainement, les relations dans la classe, au collège et au lycée, sont violentes.

QUELQUES REPRÉSENTATIONS COURANTES DU PROBLÈME Parce que les enseignants sont durement affectés par ce problème dans l’exercice de leur métier et dans leur vie, ils le perçoivent souvent d’une manière très émotionnelle et, donc, à travers des représentations incertaines ou partielles : – Ainsi certains nient tout simplement le problème. Parmi les futurs enseignants certains peuvent croire, avant leur première entrée dans une classe, qu’il leur suffira d’exposer leur matière d’une manière claire et précise pour que les élèves les écoutent. Certains enseignants en exercice peuvent être tentés de le penser aussi, parce qu’ils prennent la passivité ou l’indifférence des élèves pour un signe d’intérêt, d’attention et d’activité intellectuelle, ou bien encore parce qu’ils se sont habitués à faire cours dans le brouhaha et l’agitation, souvent par résignation, parfois avec la conviction que c’est une situation normale. – D’autres ressentent vivement le problème, mais ont tendance à l’attribuer aux élèves et à des causes extérieures à l’école. À leurs yeux, les jeunes seraient incapables d’attention intellectuelle et d’effort, du fait des carences éducatives de leur famille ou de la permissivité générale de notre société. Par suite, les enseignants ne pourraient exercer leur métier, lequel, dans cette optique, est conçu comme la transmission d’un savoir à des élèves dont l’éducation serait préalablement achevée et le comportement spontanément réceptif à tout discours rationnel. Il faudrait résoudre les problèmes de discipline avant de tenter d’inculquer un savoir quelconque. – D’autres, enfin, imputent le problème à eux seuls et estiment manquer d’autorité naturelle. Souvent cette idée est liée à celle selon laquelle cette «autorité» serait un caractère qu’on ne saurait acquérir, mais qu’on posséderait ou non d’une manière innée. Pensée désespérante !

Introduction Introduction

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DISCIPLINE ET INDISCIPLINE : UNE MULTIPLICITÉ DE FACTEURS De telles représentations ne sont pas nécessairement fausses en ellesmêmes ; mais chacune est trop restrictive. Dès qu’on passe d’une saisie immédiate et vécue des problèmes relationnels de la classe à une tentative pour les expliquer, on doit convenir qu’ils sont dus à une multiplicité de facteurs enchevêtrés qu’il est toujours illusoire de réduire ou de simplifier. Sans présumer de la suite, on peut d’emblée évoquer quelques-unes de ces causes : • L’école est une institution où les jeunes sont invités à apprendre, mais selon des modalités d’apprentissage très particulières. Songeons, par exemple, au fait que l’école est probablement un des rares lieux où une personne peut poser une question à une autre alors même qu’elle en possède déjà la réponse. Songeons qu’à l’école, les élèves n’ont souvent pas choisi d’apprendre ce qu’on leur fait apprendre ; d’où une divergence fondamentale avec des professeurs qui, dans le secondaire, sont des spécialistes de leur discipline et ont bâti leur vie sur l’intérêt pour elle. En outre les élèves sont, à l’école, placés dans une situation d’apprentissage. Or le processus d’apprentissage n’est jamais dénué d’effets socio-affectifs. • Inévitablement les relations qui s’établissent dans la classe sont marquées par des données psychologiques propres à l’histoire personnelle de chacun des acteurs. Ces données sont amplifiées et compliquées par le fait que l’enseignement secondaire s’adresse à des adolescents. À cela s’ajoute que la classe est un groupe et, de plus, un groupe confronté à des tâches spécifiques ; comme telle, elle est le lieu de phénomènes relationnels particuliers. • L’école met en présence des individus dont les caractéristiques sociologiques sont différentes et parfois opposées. Du fait des pratiques intellectuelles de leur milieu d’origine, certains élèves peuvent avoir peur de l’école, ne pas comprendre ce qu’on y fait ou avoir le sentiment qu’une adhésion aux activités et aux valeurs de l’école entraînerait une perte de leur identité ou une trahison de leur famille et de leur milieu. Les enseignants de leur côté ne sont pas toujours conscients du caractère socialement spécifique des habitudes de pensée qu’ils mettent en œuvre ou dont ils exigent la mise en œuvre par leurs élèves. Bien entendu, l’enseignant du secondaire n’a pas le pouvoir de modifier toutes ces déterminations. Mais il est utile qu’il les connaisse. Car cette

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Introduction


connaissance lui permet d’échapper au sentiment d’une fatalité indistincte et d’éviter certaines erreurs relationnelles. Mais nous verrons que malgré leur poids, l’enseignant dispose d’une importante marge de manœuvre qui tient à la fois à la manière dont il organise le fonctionnement de la classe (ses choix pédagogiques) et à la manière dont il crée les conditions de l’accès aux savoirs et aux compétences (ses choix didactiques). Mais si le professeur est appelé à prendre sans cesse une multitude de micro-décisions qui conditionnent les relations dans la classe, cette poussière de choix doit être régie par un projet unique qui est de faire apprendre. Nous verrons que ce projet est essentiel dans la construction de l’autorité professorale.

PRÉSENTATION DE L’OUVRAGE Les trois premiers chapitres de ce livre seront consacrés aux trois grands domaines de facteurs qui interviennent sur le climat relationnel d’une classe et que nous avons présentés ci-dessus : Chapitre 1 : les facteurs qui tiennent aux caractéristiques particulières de la situation d’enseignement. Chapitre 2 : les facteurs psychologiques et ceux qui tiennent aux phénomènes de groupe. Nous prolongerons ce chapitre par quelques remarques sur les pédagogies de groupes. Chapitre 3 : les facteurs sociologiques. Les deux derniers chapitres portent sur les possibilités d’intervention de l’enseignant sur le climat relationnel de la classe : Chapitre 4 : la conduite de la classe. C’est dans ce chapitre que seront donnés les conseils les plus pratiques pour instituer un climat de travail et d’apprentissage dans une classe ; nous le prolongerons par quelques pistes concernant les choix didactiques. Chapitre 5 : l’autorité. Il s’agira là à la fois de réfléchir à ce qu’elle est et d’indiquer des voies pour que l’enseignant établisse une relation d’autorité avec ses élèves.

Introduction Introduction

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COMMENT LIRE CET OUVRAGE ? Le présent ouvrage peut se lire selon différents parcours en fonction des préoccupations principales du lecteur. Celui qui souhaite avoir, au plus vite, des conseils pratiques pour exercer le métier d’enseignant pourra commencer par le chapitre 4, puis poursuivre par le chapitre 5, avant de revenir aux trois premiers chapitres. Celui qui désire se faire une idée d’ensemble des processus dont une classe du secondaire est le lieu suivra les chapitres dans leur ordre naturel. Celui enfin qui cherche des éléments pour une réflexion critique sur l’école et l’enseignement peut commencer par le premier chapitre, puis passer directement au cinquième, avant de revenir aux autres.

À retenir pour la pratique Sous ce titre, on trouvera à la fin de chaque chapitre un ou plusieurs encadrés. Nous avons tenté d’y consigner les conseils pratiques qu’on peut tirer du chapitre et qui permettent d’établir, dans la classe, une discipline favorable aux apprentissages. Toutefois ces conseils sont à prendre avec un minimum de prudence, car s’ils sont efficaces dans les situations de classe les plus courantes, ils peuvent l’être moins dans certains contextes particuliers. Ils constituent l’équipement de base de l’enseignant débutant, équipement que celui-ci devra progressivement adapter aux caractéristiques de ses élèves, à la matière qu’il enseigne, aux particularités de l’établissement, à sa propre personnalité, etc.

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Introduction


hapitre 3 Les facteurs sociologiques de la discipline en classe

Chapitre 3

Chapitre 1

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La classe est un lieu où se rencontrent des personnes qui peuvent être d’origine sociale différente. Ce peut être le cas d’élèves à élèves. Ce peut l’être aussi entre élèves et professeur. Cette distance sociale se marque par des différences de manières d’être, de codes de comportement, de systèmes de valeurs. Elle entraîne alors inévitablement des malentendus, des tensions, des conflits. Mais les personnes ne sont pas seules en cause. L’institution scolaire elle-même, par le type d’activités qu’elle impose, prône un système d’attitudes, de manières de penser, d’intérêts et de valeurs qui ne sont pas socialement neutres. De ce fait, les élèves venant de milieux défavorisés peuvent ressentir ces activités comme bizarres ou incongrues, voire comme susceptibles de les mettre systématiquement en difficulté. On comprend alors qu’il puisse y avoir de leur part des attitudes de résistance qui affectent les relations dans la classe. C’est une idée largement partagée par les enseignants qu’il est plus facile d’enseigner dans un établissement de quartier aisé que dans une banlieue déshéritée. Ce n’est évidemment pas faux, pour les raisons que nous venons d’esquisser et que nous allons développer dans ce chapitre. Mais ce fait massif peut donner lieu à des interprétations erronées et tendancieuses et qui, par là, empêchent d’inventer des solutions. Car il tend à accréditer l’idée que les jeunes de milieu défavorisé seraient, en eux-mêmes et dans leur essence, paresseux, indociles, incivils, insolents, voire agressifs. Il y a là une illusion substantialiste. Car il n’y a aucune raison de penser que ces individus seraient par nature plus mauvais que d’autres. Quant à penser que c’est leur milieu d’origine qui les a rendus ainsi, ce serait une idée dont il faudrait se demander si elle ne procède pas du regard d’une classe sociale sur une autre. Si l’on constate que les jeunes d’origine défavorisée sont des élèves plus « difficiles », il y a tout lieu de penser que cette caractéristique ne tient pas à leur être même, mais plutôt à la relation qui s’établit entre eux et les enseignants, entre eux et l’école et peut-être aussi entre eux et les élèves d’autre origine. Dire que c’est la relation qui produit cet effet, c’est dire deux choses. D’abord, les activités proposées par l’école peuvent provoquer, pour des raisons que nous verrons, des réactions de refus ou de résistance de la part d’adolescents d’origine populaire. En outre, c’est dans le regard des enseignants ou dans la logique de l’école que certains comportements peuvent apparaître comme faits d’incivilité ou d’indocilité. Car une

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Chapitre 3


conduite humaine ne peut être jugée bonne ou mauvaise que par référence à une norme, norme qui peut être ici celle de l’institution ou celle du groupe social auquel appartient l’enseignant. Penser l’indiscipline scolaire comme la caractéristique non pas d’individus, mais d’une relation entre individus, c’est éviter le fatalisme, car une relation peut toujours être modifiée. Et tout particulièrement c’est éviter le fatalisme sociologique et pouvoir rendre compte du fait qu’il existe des jeunes d’origine très défavorisée qui sont cependant attentifs, sérieux et scolairement performants.

LA DÉCOUVERTE PROGRESSIVE DES FACTEURS SOCIOLOGIQUES Les facteurs sociaux de l’indiscipline sont encore si peu reconnus et si peu pris en compte dans le traitement du problème qu’il convient de réexaminer les circonstances historiques dans lesquelles ils ont été révélés.

L’unification des réseaux et le principe méritocratique Dans la plupart des pays industrialisés, l’enseignement comporte, au début du XXe siècle, deux réseaux distincts : d’une part un enseignement court qui mène à la vie active dès la fin des études primaires ; d’autre part un cursus long en lequel le primaire conduit sans discontinuité aux humanités secondaires qui, à leur tour, ouvrent la porte aux études supérieures. En France, ces deux réseaux sont, au moins au début, remarquablement étanches : d’un côté, les écoles mènent au certificat d’études primaires par un cursus comprenant cours préparatoire, cours élémentaire, cours moyen, cours supérieur ; de l’autre, il y a les lycées qui comportent des classes élémentaires (de la 11ème à la 7ème) d’où l’on passe sans rupture aux classes secondaires qui conduisent au baccalauréat. Les petites classes des lycées ont bien le même programme que celles des écoles, mais les enseignants y sont différents : ils sont recrutés jusqu’en 1927 par un concours spécifique, tandis que les instituteurs qui enseignent dans le réseau primaire ne sont pas eux-mêmes issus des lycées : après leur école primaire, ils ont rejoint, par le biais de l’école primaire supérieure, l’école normale.

Introduction Les facteurs sociologiques de la discipline en classe

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Chacun des deux réseaux est spécifique d’un groupe social : aux enfants des classes populaires, l’école primaire ; aux enfants de la petite et moyenne bourgeoisie, le réseau des humanités. Aucune des deux institutions n’a une fonction sélective importante. Chaque enfant entre vers 6 ans dans le réseau qui lui est dévolu par son groupe social d’origine ; sa performance scolaire au sein de ce réseau n’a pas d’incidence massive sur son avenir. La répartition entre études courtes et études longues et entre les destinations sociales qu’elles impliquent n’a pas à être opérée au sein de l’école même. Elle se fait en deçà. En Belgique, il existe également à la fin du XIXe siècle un cursus primaire fréquenté par les enfants des milieux populaires et le cursus des humanités fréquenté par les enfants des classes supérieures. La seule différence est que dès 1850, on voit apparaître un troisième cursus constitué d’un enseignement secondaire court, fréquenté par les fils et filles d’employés et de commerçants. Mais cette différence n’empêche pas qu’on trouve le même principe de fonctionnement : il y a une prédestination sociale de la fréquentation des différents cursus. Un enfant, dans le cas le plus général, suit les études qui correspondent à la classe sociale de ses parents et, à sa sortie, rejoint une position sociale du même type, sans que sa réussite ou son échec à l’école ne joue un rôle décisif dans son destin social.

Or, dans ces deux pays que nous prenons comme exemples, mais aussi dans beaucoup d’autres parmi les pays développés, le fonctionnement scolaire va considérablement changer au cours du XXe siècle. En effet de nombreuses mesures, d’abord ponctuelles puis plus systématiques, vont viser à permettre à tous l’accès aux études les plus longues et les plus difficiles, dans le double but de démocratiser l’école et d’élever le niveau d’études de l’ensemble de la population pour répondre aux exigences des transformations socio-économiques. On peut, en France comme en Belgique, regrouper ces mesures en deux catégories : 1) Les premières consistaient à supprimer les obstacles matériels ou financiers à ce que des enfants d’origine populaire suivent des études : c’est dans ce sens qu’allait d’abord l’obtention de la gratuité scolaire ainsi que la scolarité obligatoire, puis l’attribution de dédommagements aux familles pour lesquelles la poursuite des études d’un adolescent pouvait constituer une charge ou un manque à gagner (ainsi, les bourses ou encore, en Belgique à partir de 1921, le « fonds des mieux doués »).

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Chapitre 3


2) Les autres ont consisté à permettre la mobilité au sein du système scolaire. Cela s’est fait dans un premier temps par un décloisonnement des filières, c’est-à-dire la possibilité pour un élève qui a commencé des études dans une filière d’accéder à une filière plus favorable si ses résultats scolaires le justifient. Par exemple dès l’entre-deux guerres en France, des passerelles s’étaient établies entre les deux réseaux. Les très bons élèves de l’école primaire pouvaient rejoindre le lycée en sixième et dans les années cinquante le concours d’entrée en sixième systématisait cette sélection. En Belgique, dès 1924, il y a des tentatives d’harmonisation des programmes du primaire avec les classes préparatoires de l’enseignement moyen. Ensuite, s’est mise en place une continuité sous la forme d’un tronc commun permettant de placer le plus tard possible le moment d’une orientation irréversible. Ainsi, en France, la création des collèges en 1963 rassemble les deux réseaux en un système unique : tous les élèves vont à l’école primaire, puis tous vont au collège. De même en Belgique, dans les années cinquante et soixante, diverses mesures visent à rendre compatibles les différentes filières de l’enseignement secondaire et à permettre le passage de l’une à l’autre. Elles culmineront, en 1971, par le mise en place de « l’enseignement rénové » qui, grâce à un jeu complexe d’options, devait permettre à chaque élève une grande mobilité au sein du système.

L’ensemble de ces mesures est inspiré d’un principe qu’on peut nommer le principe méritocratique, principe qui traverse la pensée progressiste du XIXe et du XXe siècle et qui est largement inspirée par les idées de Condorcet. Ce principe consiste à vouloir établir l’égalité à l’école. Mais cette égalité qu’on veut promouvoir doit s’entendre dans un sens qu’il faut préciser : il ne s’agit pas de faire accéder tout le monde aux études les plus difficiles et au niveau de savoir le plus haut ; il s’agit de faire que les plus doués et les plus courageux puissent accéder au niveau le plus haut indépendamment de leur origine sociale. Il s’agit donc bien de créer une élite, mais l’accès à cette élite ne doit pas reposer sur l’appartenance à une lignée ou à une caste, mais sur le mérite personnel. Alors l’école deviendrait le principal outil pour briser les fatalités sociales.

Introduction Les facteurs sociologiques de la discipline en classe

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Pour le dire autrement, le principe méritocratique consiste à vouloir établir non pas une égalité de réussite ou de résultats, mais une égalité des chances.

Le poids des inégalités culturelles Or précisément, le fonctionnement d’un système unifié, où tous les enfants se retrouvent de 6 à 16 ans, fait apparaître que si tous ont le même cursus et suivent les mêmes enseignements, tous n’en tirent pas également parti. L’inégalité de succès et l’échec scolaire apparaissent au grand jour comme des faits scandaleux qui manifestent que l’unification du système, dont on pensait qu’elle garantirait l’égalité de formation de base, ne produit pas l’effet attendu. Bien entendu, on pouvait être tenté, conformément à la tradition méritocratique, d’expliquer l’inégalité de réussite scolaire par l’inégale répartition des dons et de l’effort. Mais, ce qu’allaient révéler les recherches de sociologie critique des années soixante (par exemple les livres de Bourdieu et Passeron : Les héritiers, 1964 et La reproduction, 1970), c’est que la réussite scolaire est très massivement corrélée à l’origine sociale. Le pourcentage d’enfants d’origine populaire qui accèdent à la fin des humanités classiques ou à l’université est de loin inférieur à la proportion des classes populaires dans l’ensemble de la population. Dès lors, à moins de supposer une infériorité intellectuelle générale et héréditaire des classes populaires (ce qui a été parfois défendu), il fallait faire appel, pour expliquer cette corrélation massive, à des déterminations sociales. Alors même que les obstacles financiers sont aplanis et que les filières de l’enseignement sont relativement décloisonnées, la scolarité paraît reconduire les inégalités sociales. Et précisément, aux yeux de Bourdieu, les idées de don inné ou de mérite personnel ne font que masquer cette reproduction sociale, en faisant croire que ceux qui ne réussissent pas à l’école doivent cet insuccès à leur manque de talents et de persévérance. Bourdieu critique très fortement l’idée de dons innés, en lesquels il ne voit que la dénégation de l’importance du capital culturel acquis. Pour rendre compte plus précisément de ces déterminations sociales et culturelles, Bourdieu et Passeron (1970) proposent le concept d’habitus. Il s’agit d’un « système de schèmes de perception, de pensée, d’appréciation et d’action ». On voit donc qu’il recouvre aussi bien le champ cognitif que celui de l’action : sélection de ce qu’on va percevoir comme

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Chapitre 3


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