huitième numero (Page 07)

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DOSSIER Nul ne doit être privé de sa propriété si ce n’est pour cause d’utilité publique et sous la condition d’une juste et préalable indemnisation ». Selon la Constitution, l’Etat doit garantir le droit de propriété de tout citoyen c’est-à-dire, protéger la propriété de chaque citoyen. Il ne doit pas être privé de sa propriété sans raison. Et s’il devait en être privé seulement pour raison d’intérêt général, il faut qu’il soit au préalable indemnisé. C’est ce principe qui fonde l’expropriation. Alors qu’aucune action publique pour infraction à la loi pénale, n’a encore été engagée contre elles, des personnes se voient empêchées de façon indéterminée d’avoir accès à leur compte. Même la personne poursuivie devant un juge d’instruction ou devant un tribunal correctionnel, bénéficie de la protection de la Constitution à plus forte raison celle qui n’est pas encore poursuivie. En reconnaissant le principe de la présomption d’innocence, la Constitution a voulu que le droit des personnes poursuivies soit respecté, et fasse l’objet d’une justice équitable. L’attitude du procureur de la République fait peser des soupçons de détournement sur les victimes, qui ne font pas encore l’objet de poursuite. C’est une violation de l’article 22 de la Constitution qui dispose que «Nul ne peut être arbitrairement détenu. Tout prévenu est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie à la suite d’une procédure lui offrant les garanties indispensables à sa défense». 2-De la violation du Code de procédure pénale Il ressort de la lecture des deux listes publiées que nombreux sont des magistrats et préfet ou sous-préfet qui y figurent. Notre curiosité nous a amené à interroger certains de nos amis qui exercent dans ces corps pour savoir s’ils avaient bénéficié de la procédure spéciale prévue par le Code de procédure pénale ? Ils étaient autant surpris que nous de voir leur nom sur la liste de personnes qui sont sous le coup d’une enquête de police. Ils n’ont même pas été informés qu’ils faisaient l’objet d’une enquête de police. L’article 648 du Code de procédure pénale impose que «Lorsqu’un membre de

7 la Cour Suprême, un magistrat de l’ordre judiciaire, un préfet est susceptible d’être inculpé d’un crime ou d’un délit commis hors de l’exercice de ses fonctions, le procureur de la République saisi de l’affaire présente requête à la Cour Suprême qui procède et statue comme en matière de règlement de juges et, si elle estime qu’il y a lieu à poursuite ou s’il y a plainte avec constitution de partie civile, désigne la juridiction où l’affaire sera jugée. La Cour Suprême doit se prononcer dans la huitaine qui suit le jour où la requête sera parvenue. L’instruction et le jugement sont communs aux complices de la personne poursuivie, lors même qu’ils n’exerceraient point de fonctions judiciaires ou administratives ». Pour marquer le caractère spécial de la procédure, l’article 649 précise que «le juge d’instruction désigné conformément aux dispositions de l’article 81 doit procéder personnellement à tous actes d’information nécessaires, et a compétence même en dehors des limites prévues par l’article 93». Ces autorités prévues à l’article 648 du CPP bénéficient de cette procédure spéciale, pour les infractions commises hors l’exercice de leur fonction, à plus forte raison dans l’exercice de leur fonction. Ils restent toujours protégés par la loi à son article 650. Tout se passe comme s’il n’existait plus de loi dans le pays, et les magistrats qui sont censés la respecter la foule au pied. Quel est alors le rôle d’un procureur de la République s’il doit se comporter comme le chef du Far West ? Il appartient au citoyen de mettre fin à cela en saisissant les tribunaux pour dire le droit, s’il existe encore des juges indépendants dans le pays. Conclusion Notre réflexion a été longue parce que nous avions le souci que toute personne, qui n’a pas étudié le droit, puisse comprendre notre explication. Et nous avons espoir que l’objectif sera atteint et que les lecteurs auront compris le message. Que retenir ? La réquisition est une mesure que prend l’autorité militaire ou administrative en cas d’urgence ou de crise. Elle est réglementée et obéit à un certain nombre de conditions. Elle est contraignante, limitée dans le temps et donne lieu à réparation. Dans notre droit positif, seul le gouverne-

ment peut prendre une telle mesure par décret. La réquisition que peut prendre le procureur de la République diffère de celle-là. Et il ne la prend que pour obtenir des renseignements et des pièces, de personnes tenues au secret professionnel ou qui rechignent à exécuter ses instructions. La décision du procureur de la République viole à tout point de vue les lois de la République. Il a agi en dehors de tout fondement juridique. Sa décision manque de base légale, et constitue de ce fait une voie de fait. Les personnes victimes peuvent saisir le juge des référés, pour obtenir une main levée de la mesure. Nous les y encourageons afin de redonner à la justice ivoirienne et, surtout, à la Côte d’Ivoire, leurs lettres de noblesse. C’est-à dire une Côte d’Ivoire démocratique, soucieuse du respect de la Constitution et de la loi. Le Président Laurent Gbagbo a mis particulièrement un point d’honneur au respect de la Constitution et de la loi. Tous les actes qu’il posait étaient en conformité avec le droit. Malheureusement, depuis l’arrivée des nouveaux maîtres, le droit est devenu la cinquième roue de la charrette pour faire place à la force des armes. Vivement que le procureur de la République respecte la loi et la fasse respecter par les autres. Car le rôle premier d’un procureur, c’est de veiller au respect de la loi, et non d’agir contre la loi. Que le président de la République fasse attention au tandem Garde des Sceaux, ministre de la Justice –procureur de la République. Car il risque d’accroitre davantage le regard critique des organisations des droits de l’homme sur sa gouvernance. Il faut que le droit, rien que le droit soit dit. C’est pourquoi, il serait intéressant que les personnes figurants sur les listes du procureur puissent saisir le juge civil en référé pour que le droit soit restauré, pour la dignité de la justice ivoirienne. █ Fait à Abidjan, le 22 juin 2011 Serge-Stéphane Silué Juriste-Consultant, Diplômé de l’Université de Poitier (France) Par César Etou cesaretou2002@yahoo.fr

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