les cahiers du patrimoine de
BOLIVIE n°5
pr inte mp s
2014
Apogée et déclin du plus grand centre minier
de Bolivie
Pulacayo
● Fruits oubliés de l'Altiplano ● Choquela : un rituel à la Pachamama ● L'Ulupica, mère piquant ● Le retour de l'Illa Ekeko ● La Bolivie, premier pays au monde de zones humides ● Sur la route des vins
18 dossier : p
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sommaire Gastronomie
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iLLa ekeko
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Le ChoqueLa rituel andin
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brèves
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L’uLupiCa, mère des piments
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danses boLiviennes par la poste
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tarija sur la route des vins
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uLupica
mère de tous les piments
Les cahiers du patrimoine de Bolivie numéro 5 - printemps 2014 Direction : Sergio Caceres G. Coordinatrice de rédaction : Jennifer Sauvage Mise en page : Anne Leïla Ollivier - Atelier ALO Imprimé par : Le Ravin Bleu Ont participé à ce numéro : David Ordoñez Ferrer, Gemma Candela, Elizabeth Salguero,Viviana Ugarte, Ramon Rocha Monroy. Photo de couverture : Jennifer Sauvage Les cahiers du patrimoine de BoLivie sont une publication de la déLégation permanente de L'etat pLurinationaL de BoLivie auprès de L'unesco Ambassadeur Délégué Permanent : Sergio Caceres G. 1 rue Miollis – 75015 • tél : 01 45 68 30 39 courriel : delegation@bolivia-unesco.org web : boliviaenlaunesco.com
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sur la route des vins
: Fundacion Fautapo
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Les fruits oubLiés de L’aLtipLano
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photo : miga g.candeLa/v.gutierrez
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brèves
dossier
fruits oubliés de L’aLTipLano
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photo : JenniFerB sauvage
uLacayo patrimoine industriel et historique
breves Carnaval d'oruro 2014
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photo : camBio
biens patrimoniaux
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Carnaval Camba : la fiesta grande
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e carnaval camba (de Santa Cruz) a été à l'honneur pendant le mois de mars 2014 avec des discussions qui ont eu lieu à Santa Cruz entre historiens, chercheurs, autorités, danseurs et autres personnalités liées à cette fête, appelée également « fiesta grande ». Ces réunions ont été l'occasion de dialoguer et de débattre autour de cette célébration afin de reconnaître et d'évaluer son passé, de réaliser une autocritique constructive et de préparer le futur de cette grande fête. Une future candidature pour le patrimoine mondial ? -
a Bolivie et l'Equateur ont signé un accord pour la restitution des biens patrimoniaux relevant du trafic entre les deux pays — biens qui ont été l’objet de vol, pillage, trafic et commercialisation illicite. Les deux nations se sont engagées à combattre et empêcher l'entrée sur leurs territoires respectifs de ces biens, et à collaborer dans l'adoption de mesures préventives pour améliorer la protection de leur patrimoine culturel, ainsi que la mise en place d’une pénalisation de ces délits, pour ainsi, entre autres, empêcher les fouilles non autorisées. -
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l'identité bolivienne promue par la Culture ablo Groux, ministre des cultures de Bolivie, vient de rendre public le bilan de ses actions pour 2013. Le verdict est sans appel : une forte volonté d'action et l'augmentation du budget ont permis au ministère d'atteindre avec succès quasiment tous ses objectifs : création de la nouvelle chaîne culturelle TV Culturas, loi du livre, publications, promotion touristique (passage du Dakar), prix et festivals, lutte contre le racisme... Pablo Groux a annoncé les principaux buts pour 2014 : une radio culturelle, des actions de décolonisation et une gestion encore plus importante du patrimoine culturel. 3
: carLos Barrios
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: Fundacion Fautapo
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photo : miga g.candeLa/v.gutierrez
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‘edition 2014 du carnaval d'Oruro – chef d'oeuvre du patrimoine immatériel de l'humanité -, s'est encore démarquée par la splendeur de ses danses, masques et costumes. Fabriqués par des générations de familles, ces assortiments viennent chaque année exalter la magnificence des défilés et couronner le savoir-faire des artisans. Les orfèvres se sont également impliqués dans ces créations avec la confection de masques en argent et en or. Tout a été permis pour la somptuosité de la fête ! -
Fruits oubliés
Fruits oubliés
de L’aLTipLano par
gemma candeLa
ces dernières années, de nombreux fruits traditionnels andins ont peu à peu déserté les étalages des marchés du pays. de nouveaux modes de consommation imposés par les industries agroalimentaires, de nouveaux modes de vie qui poussent le monde rural à s'urbaniser et à découvrir ces goûts venus d'ailleurs à moindre coût, sont les raisons avancées pour expliquer ce phénomène. soucieuses de revaloriser leur patrimoine alimentaire et de relancer ces productions locales, plusieurs organisations boliviennes se sont lancées dans la reconquête de ces goûts traditionnels, organisant foires et événements visant particulièrement les jeunes. stefania, dominga et maria Julia, militantes de ces organisations, partagent ici l'amour de leur patrimoine, leurs ressentis et leurs espérances.
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dominga mamani prépare La th'ayacha en congeLant de l'isaño, Friandise gLacée de La campagne, consommé à La paz iL y a encore queLques années.
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«A
photo : miga g.candeLa/v.gutierrez
utrefois, en juin et juillet, il était facile nombreuses vitamines A et C et du phosphore. « C’est de trouver de la th’ayacha (terme géplus sucré que l’oca » précise Dominga. nérique désignant un tubercule Pour préparer cette glace andine, on expose d’abord congelé) dans les rues de La Paz. Mes l’isaño au soleil pendant une semaine. Puis on le fait parents en mangeaient. Moi j’en ai entendu parler cuire, on le laisse refroidir et on le pose sur le toit de mais n’en ai jamais vu » explique Stefania la maison, sur une toile blanche. Le Rada, membre de l’équipe de communica- LES FRUItS tyPIqUES tubercule va geler pendant la nuit et il tion de MIGA (Mouvement d’Intégration ExIStEnt tOUJOURS DAnS faudra le manger le lendemain avant POPU- qu’il ne décongèle. Ce produit, bon Gastronomique bolivien) et de la tAMBO L’IMAGInAIRE (rencontre gastronomique dont la finalité LAIRE... C’ESt POURqUOI pour les problèmes urinaires et les est de revaloriser le patrimoine alimentaire nOUS tEntOnS D’EnCOU- problèmes de prostate, est de moins en régional bolivien). Dominga Mamani, de RAGER LA DEMAnDE POUR moins cultivé. Il l’est seulement pour la Fédération nationale de travailleuses au LE tRADItIOnnEL l’autoconsommation. foyer de Bolivie (Fenatrahob), désigne un petit bout de th’ayacha : « Cela coûte un boliviano Les fruits andins, une culture dans l’assiette... (environ 10 centimes d’euros), dit-elle, mais on n’en Le chilto, le lujmillo, le yacon, le lacayote, l’ajipa trouve quasiment plus en ville ». Une femme originaire font aussi partie des fruits traditionnels de plus en plus d’une communauté de Warisata dans la province Omarares dans le régime diététique bolivien. Il est encore suyos renchérit : « À la campagne, nous n’avons pas possible de les trouver en petite quantité sur certains de glace. Ceci est notre glace ». En l’occurrence ce marchés, assure Maria Julia Jimenez, coordinatrice de Slow Food en Bolivie, mais il faut généralement les demander car ils sont cachés dans une caisse sous l’étal de la vendeuse. Le yacon (poire de terre) est un tubercule dont on mange la racine et qui, à première vue, ressemble au manioc. Doux et juteux, il peut se manger en substitut de la pomme, assure Maria Julia. très riche en fibres et en vitamine A, il est recommandé pour les personnes souffrant du syndrome du côlon irritable. Le yacon pousse dans les vallées andines, où il est traditionnellement utilisé comme élément d’échange. « Mais comme le troc est en train de disparaître, le yacon disparaît aussi » poursuit la coordinatrice de Slow Food. Dans les vallées fertiles de l’Illimani, on trouve également le lujmillo, un fruit qui ressemLe lujmillo, appeLé égaLement lucuma, est un Fruit qui était cuLtivé avant La domination de L'empire inca. ble à la tomate et qui contient beaucoup de vitamine A. Cultivé dans les vallées des bout de th’ayacha est fait avec de l’isaño — tubercule Andes avant l’apparition de l’empire inca, connu au similaire à l’oca. Selon la FAO (Organisation des naPérou sous le nom de lucuma, il est utilisé pour faire tions Unies pour l’alimentation et l’agriculture), des glaces, des tartes et des gâteaux. « On retrouve la l’isaño, originaire de Bolivie et du Pérou, contient de couleur, la saveur et l’arôme dans une même pâtisse6
Fruits oubliés
photo : miga g.candeLa/v.gutierrez
sur
Les marchés on ne trouve pLus que des pommes et des kiwis, Fruits venus d'aiLLeurs... Les pLus traditionneLs se Font rares et sont souvent cachés sous Les étaLs des vendeuses.
plus de vitamines que l’orange... Une autre victime de l’oubli est un fruit appelé chilto en Bolivie. Petit, de couleur rouge ou orangée, il ressemble à une tomate cherry et est enfermé dans des feuilles marron clair sèches au toucher. Au goût, il laisse dans la bouche une sensation aigre douce. Il pousse généralement dans les vallées andines mais aussi dans les jardins de la zone sud où beaucoup de gens ignorent que son fruit se mange tant cru que transformé en jus ou confiture. La représentante de Slow Food explique qu’il apporte des vitamines C (20 fois plus que l’orange) et A ; anti-inflammatoire, antioxydant, il est un remède idéal pour les maux oculaires. Il apporte par ailleurs une touche très particulière aux cocktails. L’ajipa est un tubercule dont la racine farineuse, sucrée et riche en phosphore et en calcium était déjà cultivée et mangée par les Incas. Il y a quelques années,
il était de coutume de manger ce tubercule à la date du Corpus Christi — tout comme l’aricoma. toujours à tarija, dans cette même période, une fois ôtée sa peau marron, on boit du vin dans un verre sculpté dans la chair de ce fruit blanchâtre aux rayures violettes. On essaie également de raviver la coutume de le boire en jus. « Sais-tu ce qu’est l’amañoque ? » demande Maria Julia à Dominga. « Qu’est-ce que ça peut bien être ? » lui répond-t-elle. On le connaît seulement dans les communautés où il est consommé comme espèce sylvestre et parasitaire, poussant sur les hauts plateaux boliviens. Les locaux ramassent les fruits au sol,
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rie », affirme Raiti Espinoza. Mais en Bolivie, sa culture est de plus en plus réduite. Chez les populations des flancs de montagne, comme à Coni ou à tahuapalca, la production de lujmillo est réduite à quelques arbres perdus dans les potagers où poussent laitues, tomates et fleurs. « Quand ils remplissent une caisse de lujmillo, ils l’amènent en ville pour la vendre », raconte Maria Julia. Sur les marchés, ce fruit coûte entre trois et cinq bolivianos pièce (entre 30 et 50 centimes d’euro). Les pépins sont utilisés dans l’artisanat.
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photo : miga g.candeLa/v.gutierrez
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La ajipa, souvent consommée en Jus, L'un des Fruits Les pLus diFFiciLes à trouver. page de droite : Le tamarillo (chilto en BoLivie), consommé surtout en Jus, est un Fruit qui contient 20 Fois pLus de vitamines que L'orange.
Petit lexique des fruits andins et leurs bienfaits : Isaño : Tubercule comestible de la capucine tubéreuse, plante cultivée dans les Andes centrales. Th’ayacha : Glace faite a partir de l’isaño. Chilto : Appelé « Tamarillo » en France, le chilto est un fruit rouge et ovale qui se consomme principalement en jus, avec un peu de sucre. Ce fruit a également des vertus curatives pour les inflammations d’amygdales, les pharyngites et les angines. Yacon/Aricoma : Nommée « poire de terre » en France, cette plante est cultivée pour ses tubercules comestibles croquants, au goût sucré. Le sirop et le thé de yacon sont très populaires chez les diabétiques en raison de leur faible teneur en sucre. Ajipa : plante des régions andines dont le tubercule est consommé frais, à croquer ou en jus. Riche en vitamines K, C et en potassium, l’ajipa est utilisée pour guérir les infections de la gorge.
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lorsqu’ils sont déjà fissurés et porteurs de nouveaux tinés en particulier aux enfants. Dominga et des memgermes. L’amañoque contient du fer, du phosphore, bres de la Fenatrahob ont participé en préparant des des vitamines A et C et a également des propriétés méplats traditionnels tels que le cochon d’Inde ou le frodicinales : c’est un analgésique et un antiallergique. mage humacha. Selon l’analyse de la coordinatrice de Enfin il est utilisé pour la teinture traditionnelle de la Slow Food, la migration des paysans vers la ville et laine. les annonces publicitaires ont favorisé l’implantation Dans la liste des fruits traditionnels en voie d’extincprogressive des grandes entreprises agroalimentaires tion se trouve également le lacayote. Parent de la dans les régions andines, accélérant ainsi la disparition courge, ce fruit à la peau verte et à la pulpe blanche des produits traditionnels. quand ces émigrés reviensert généralement à faire de la confiture (traditionnelle nent sur leurs terres, ils y ramènent des goûts nouà tarija) et des empanadas fourrées. Il se cuisine aussi veaux qui finissent par s’imposer — comme par au four, de la même manière que les pommes. La tuna exemple la pomme supplantant la traditionnelle ari(figue de Barbarie), que l’on trouve dans les lieux coma. « Notre palais est en train de s’uniformiser » arides de l’Altiplano, est encore explique-t-elle. Cependant « les fruits consommée — mais dans une moindre typiques sont toujours dans l’imagiLA MIGRAtIOn DES PAySAnS mesure qu’autrefois. Il en existe de difnaire populaire » affirme Stefania : VERS LA VILLE Et LES Anférentes couleurs: des vertes à la pulpe même si leur consommation a diminOnCES PUBLICItAIRES Ont plus sèche, et des rouges et orangées nué, ils sont toujours présents sur les FAVORISé L’IMPLAntAtIOn généralement plus juteuses dont les apmarchés. Maria Julia intervient : ports majeurs sont le phosphore et la vi- PROGRESSIVE DES GRAnDES « oui, mais de façon marginale. C’est tamine C. La grenade, la gunnère — EntREPRISES AGROALIMEn- pour cela que l’on essaie d’encourautilisée traditionnellement dans la fabri- tAIRES DAnS LES RéGIOnS ger la demande pour le traditioncation d’une liqueur consommée lors AnDInES, ACCéLéRAnt AInSI nel ». Raiti explique que le MIGA du carnaval de Vallegrande — , la mûre, LA DISPARItIOn DES PRO- travaille à la création de liens entre le néflier du Japon, le sureau, la grena- DUItS tRADItIOnnELS. les paysans et les cuisiniers pour delle, la goyave — cultivée tant à Sucre qu’ils contribuent à la revalorisation que dans les vallées de l’Illimani —, ou encore le chédu patrimoine gastronomique, les premiers en reprerimolier — poussant dans les vallées chaudes et les nant la production de fruits artisanaux, les seconds en zones amazoniennes — sont autant de fruits traditionutilisant des produits autochtones dans la confection nels également sur la voie de l’oubli. de leurs plats. tous ces fruits andins oubliés ont fait l’objet d’une L’organisation Slow Food Bolivia — qui existe depromotion par le MIGA lors d’une foire qui eut lieu en puis trois ans dans le pays — cherche à faire croître le nombre d’adeptes à cette lutte contre les fast-food et le automne dernier à La Paz. Lors de cette rencontre vistyle de vie qui les accompagne. Comment faire mieux sant à revaloriser le patrimoine alimentaire régional qu’en revalorisant ce qui nous appartient déjà ? bolivien, ont été dressés des stands de jus de fruits des9
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La chirimoya, ou chérimoLLier.
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rituels
choqueLa
le rituel à la pachamama
rite ancestral des peuples andins, le choquela avait pour but d'invoquer les dieux afin de protéger leur bétail et garantir une bonne chasse. au fil du temps, cette célébration est devenue également un moyen pour encourager la fertilité du terrain et la production d'aliments. mettant en scène une chasse à la vigogne, le choquela réunit, tous le ans, les habitants de l’altiplano qui viennent implorer à la pachamama (la terre nourricière) qu'elle leur apporte de quoi subvenir à leurs besoins. 10
rituels
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: min. cuLturas
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our comprendre le rituel du Choquela, il est nécessaire de s'intéresser à la signification des fêtes dans les cultures andines. Ayant lieu tout au long de l'année, elles sont riches d’une grande variété de rites liés au cycle agricole. Au cours de ces rituels rien n’est laissé au hasard. La danse, la musique, les instruments, les costumes, la chorégraphie, les mouvements des danseurs, le rythme, la mesure et les mélodies, chacun de ces éléments, ont un sens et représentent les tâches collectives de l'habitant des Andes dans sa vie quotidienne; comme le défrichement de la terre, la semence et la récolte. Le rituel du Choquela fait référence au mode de vie des premiers habitants l'Altiplano (les hauts-plateaux PAR Dde AVID ORDOñEz FERRER des Andes), qui vivaient principalement de la chasse et de l'élevage des auquénidés (lamas, vigognes, alpagas, guanacos) pour se procurer les aliments et les vêtements. à l’origine, le rituel était pratiqué pour demander la conservation et l'augmentation du bétail. quand les peuples commencèrent à cultiver la terre, l’invocation s'est étendu à la fertilité de celle-ci et à la production d'aliments, en particulier la pomme de terre. Le Choquela est un rituel qui s'intègre au cycle des rites agricoles. La vigogne était un animal sacré pour les incas qui l'associaient à la fertilité. Lors des sécheresses prolongées, elle était chassée et donnée en offrande pour faire venir la pluie. En période de récolte, la présence de celles-ci dans des lieux inhabituels annonçait une bonne production. La danse du Choquela met en scène des bergers et des chasseurs chassant la vigogne. Cette manifestation culturel a lieu généralement lors des semences (de août à octobre) et des récoltes (de mai à juillet) pour célébrer l'abondance de la production. Les principales dates du
Choquela sont le 3 mai, fête de la Croix, et le 15 août, fête de l'Assomption à Jesus de Machaca, Achica Arriba, Mullojahua, tuli Rosas Pata, Antarani, Laura Lloko Lloko, Puerto Perez, Copancara, toutes des communautés du departement de La Paz. Il existe diverses mises en scène du rituel. Dans la version la plus courante y participent des hommes jouant de la quena-choquela (flûte indienne), des femmes dansant, des khusillos (fous provoquant le rire), des awichos (grand-père), le condor, la vigogne, les autorités et un yatiri (guérisseur). tous les participants au rituel interprètent la vie de la communauté. Dans le lieu où se déroule le rite – généralement une colline ou la place du village – les protagonistes laissent des vigognes s'échapper. Les mu- à L’ORIGInE, LE siciens choquela les poursuivent RItUEL étAIt EFFECtandis que dans l'espace cérémo- tUé POUR InVOqUER niel est dressé un enclos avec une LA COnSERVAtIOn Et porte ouverte vers l'est. Les L'AUGMEntAtIOn DU femmes portent des bâtons appeBétAIL. lés lliip'is, avec lesquels elles traquent un personnage déguisé en vigogne pour le faire rentrer dans l'enclos. Elles l'étendent sur le sol et le couvrent avec une couverture pendant que le yatiri simule l'égorgement de l'animal et répand un liquide rougeâtre représentant le sang. Jouer de la musique et danser lors des rites agricoles n'est pas seulement un moyen de diversion, il s'agit d'un effort commun pour garantir une bonne récolte. Ainsi, le Choquela, en plus de célébrer une année entière de travail, permet également d'anticiper la fête qui aura lieu l'année suivante grâce à l'abondance de la récolte de pomme de terre qu'elle invoque et qui garantira la vie et la survie de la communauté. -
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restitutioN
Volée par un diplomate aventurier
La iLLa ekeko dieu de l'énergie, de l'abondance et de la prospérité, l'ekeko est une des divinités les plus importantes du monde andin. enlevée des mains des natifs de tiwanaku il y a plus de 150 ans, une de ses plus anciennes representations se trouve actuellement au musée d'histoire de Berne en suisse.
L
a Illa Ekeko est une pierre verte de 15,5 centimètres de hauteur et de 9,7 centimètres de largeur. L'Ekeko représente la divinité la plus importante des peuples andins: il est le dieu de l'abondance, de la prospérité et de la fertilité. Des serpents sont enroulés sur ses épaules, des crapauds et des pumas ornent son corps. La fête consacrée à l'Ekeko a lieu le 24 janvier, ou des centaines de milliers de personnes célèbrent la Feria d'Alasitas, principalement à La Paz, mais aussi dans d’autres villes du pays et du monde. Lors de cette grande feria, chacun achète des petites sculptures de l'Ekeko et des illas (miniatures) qui représentent ce qu'ils souhaiteraient recevoir pendant l'année. En 2011, la fête d'Alasitas et son Ekeko miniature ont fait l’objet d’une candidature a la Liste représentative 12
du patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l'UnESCO, actuellement réactualisée sous la coordination du ministère des Cultures et du tourisme de l'Etat Plurinational de Bolivie. des andes aux alpes En 1858, un diplomate suisse s'est fourbement emparé de la Illa Ekeko : l’arrachant des mains des habitants de tiwanaku, il la rapporta en Suisse. Le « voleur », Johann Jakob Von tschudi (1818-1889), scientifique respecté, explorateur et diplomate, fut notamment ambassadeur de son pays au Brésil. Dans son livre Voyages à travers l'Amérique du Sud, il raconte comment, lors d'une rencontre avec les natifs de tiwanaku,
restitutioN
des guides spiritueLs aymaras Font une cérémonie pour Le retour de L'ekeko. au Fond, Le vice-ministre des aFFaires étrangères de BoLivie, Juan carLos aLurraLde, et L'amBassadrice de BoLivie en aLLemagne, eLisaBeth saLguero.
il leur vola la statuette grâce à l'alcool. « J'ai demandé en rigolant aux propriétaires s'ils vendraient cette divinité, mais ils refusèrent, indignés » écrit Von tschudi. « Mais une bouteille de cognac les a rendu plus flexibles ». tschudi raconte également qu'une fois la statuette en main, il fit signe à ses compagnons de préparer les chevaux. Puis lorsque “les indiens” étaient “complètement bourrés”, il effectua la transaction. Il rajoute que lorsque les indiens essayèrent d'annuler l'accord, il était déjà trop tard : tschudi et ses compagnons étaient déjà loin et les indiens trop affaiblis par l'alcool pour les poursuivre. C'est ainsi que la statue est arrivée aux mains de la famille Von tschudi. Un petit-fils du diplomate remit la Illa Ekeko en 1929 au Musée Historique de Berne. Depuis lors, elle appartient à l'exposition permanente Indiens : la diversité des cultures en Amérique.
portant de récupérer cette divinité faisant partie de l'identité de nos peuples indigènes. Nous avons récupéré les ressources naturelles, les entreprises stratégiques, notre dignité et notre souveraineté mais nous voulons aussi récupérer les patrimoines culturels constituant l'identité de nos peuples ». L'ambassadrice, lors de son premier voyage à Berne l'année passée, a trouvé la statuette au musée d'Histoire de Berne, décrite de manière erronée sous le nom d'une divinité de l'eau du Pérou. Yatiris, amautas (médecins et savants du monde andin) et chercheurs boliviens avaient retrouvé la trace de l'Ekeko. Il trouve son origine dans les cultures préhispaniques et selon l'archéologue Carlos Ponce Sanjines dans son livre Tunupa et Ekeko de 1969, serait une pièce tihuanacota (de la culture tiwanaku) . un processus en cours
L'importance du retour en Bolivie
Une délégation bolivienne formée par Juan Carlos Alurralde, vice-ministre des affaire étrangères, Felix Le président Evo Morales a déclaré que le retour de la Cardenas, vice-ministre de la décolonisation, Elizabeth Illa Ekeko au pays était une priorité et a assumé perSalguero, ambassadrice de la Bolivie en Suisse et Alsonnellement la responsabilité de la rapatriation de la lemagne, et les guides sprituels Gladis quenta et statuette. David Choquehuanca, ministre des Relations Wañay Pacha, a visité le 17 janvier dernier le Musée extérieures, s'est exprimé devant le corps diplomatique d'Histoire de Berne où se trouvait la Illa Ekeko. Les reen décembre dernier: « Nous travaillons dur pour rétrouvailles avec la statue furent très émouvante : les cupérer notre identité, nos ressources et nous sommes larmes aux yeux, les guides spirituels firent une céréégalement en train de récupérer nos monie pour invoquer le retour de la lieux sacrés, notre énergie de l'abon- POUR VOUS L'EkEkO ESt Un statue, à laquelle toute la délégation dance, notre Illa Ekeko ». Elizabeth OBJEt DE MUSéE, POUR nOUS participa. « Notre objectif est de rameSalguero Carrillo, ambassadrice de la IL ESt SACRé. IL S'AGIt DE ner l'Ekeko en Bolivie. Il s'agit d'une Bolivie en Suisse et en Allemagne, a nOtRE âME, nOtRE ESPRIt, priorité pour notre président » a déégalement affirmé qu'« il est très im- nOtRE VIE MêME claré Felix Cardenas. Parrallèllement, 13
restitutioN
des centaines de cérémonies eurent lieu dans toute la Bolivie pour accompagner les démarches concernant le retour de la divinité. Felix Cardenas se dit confiant sur le prompt retour de la divinité à sa terre natale : « Nous sommes en train de définir la procédure mais les consultations réalisées par notre ambassadrice ont été bien reçues. Pour l'instant, l'origine de la pièce a été reconnue ainsi que la manière dont elle fut sortie du pays en 1858 ». Le peuple aymara met l'accent sur le sens spirituel et culturel de ce retour pour les Boliviens et Boliviennes. « Pour vous, l'Ekeko est un objet de décoration ou de musée, pour nous il est sacré. Il s'agit de notre âme, notre esprit, notre vie même », a expliqué Wayña Pacha, un des guides spirituels. Elizabeth Salguero a mis en avant le fait que la délégation bolivienne a su montrer la diversité et la force de l'Etat plurinational qui ne se cessera de lutter pour le retour de la Illa Ekeko. « Nous continuerons à travailler avec le musée et le gouvernement suisse dans un cadre amical et de réciprocité. Nous mettrons en place les ponts nécessaires pour ramener la Illa Ekeko — après une absence de plus de 155 ans — et son énergie de l'abondance à tout le peuple bolivien ». -
textiles des femmes indigènes boLiViennes à L'unesco
“A photo
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ujourd'hui est un jour pour réaffirmer l'engagement fort pour l'égalité de genre, parce que parler d'égalité de genre n'est pas uniquement parler des droits humains et de dignité, mais aussi de paix et de développement”, rappelait Irina Bokova en inaugurant l'exposition, le dernier 7 mars 2014. En ce qui concerne les oeuvres presentées par la Bolivie dans cette exposition internationale, la Directrice Générale de l'UnESCO prononça les mots suivants : “Mesdames, Messieurs, nous avons aussi le plaisir d'accueillir une exposition d'art textile des communautés Jalq'a et tarabuco de Bolivie, à
Johann JakoB von tschudi 14
eXPo
dans le cadre de l'exposition organisée par l'unesco en honneur à la Journée internationale de la Femme, la délégation de Bolivie auprès de l'unesco et le ministère des cultures et du tourisme bolivien ont présenté à paris une exposition de textiles andins. cette série a partagé la scène avec des artistes contemporains des cinq continents de la planète. laquelle je suis spécialement attachée, puisque c'est encore un exemple des liens qui existent entre la femme, l'artisanat et l'industrie culturelle. Cet exemple confirme que les femmes sont les premières actrices dans ce type d'activité culturelle et que, quand nous soutenons ce type d'activités culturelles, nous soutenons la création d'emplois et de revenus pour les femmes. Il s'agit d'un autre aspect de notre plaidoyer pour faire valoir et faire reconnaître les liens entre culture et développement”. L'exposition bolivienne est composée de dix textiles provenant des aires culturelles de tarabuco, Jalq'a, et tinquipaya, situées dans le département de Chuqui-
saca. Ils ont été réalisés par les tisseuses Seferina Canaviri et Claudina Mamani de la communauté de Cuiza; Felicia Alata de Surichata; Benita Churqui, Martha Llampa et Leonor Mendoza de Aranjuez; Beninga Flores de Candelaria, Catalina Cayo et Juana quispe de Pampa Lupiara; et Miguelina Llajsa de Pisili. Le vernissage de l'exposition fut accompagné par des spécialités gastronomiques de chaque pays expositeur. à cette occasion, Betty Valda Villavicencio, originaire de La Paz et résidant en France depuis dix ans, concocta une dégustation bolivienne de salteñas, de bouchées de quinoa, et un yungueñito à siroter. -
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brèves les langues originaires romanCées
patrimoine Culturel du peuple bolivien
L
e festival national de la chanson bolivienne Aqui canta Bolivia (« Ici chante la Bolivie »), qui se déroule à Oruro chaque année, vient d'être déclaré par le Sénat patrimoine culturel du peuple bolivien. La promulgation de cette loi nationale reconnaît la promotion et la formation de nouvelles valeurs artistiques depuis 1969, l'accueil de personnalités importantes de la musique nationale et la reconnaissance et la diffusion de nouveaux talents boliviens. Cette initiative prend le pas sur la déclaration départementale et permettra l'augmentation du soutien et du budget destinés à cette fête. -
: camBio
« aqui Canta bolivia » déClaré
a troisième session du Concours du roman de langue vernaculaire « Guaman Poma de Ayala 2014 » reçoit les candidatures jusqu'au 30 juin 2014. Ce prix a pour but de favoriser la lecture et l'écriture en langues originaires pour préserver les connaissances et encourager la production littéraire dans ces langues. Le guarani est mis à l'honneur cette année comme langue de base du concours. Les œuvres écrites devront être d'au moins 50 pages et doivent être des créations littéraires inédites et originales n'ayant jamais été primées dans un autre concours. Le vainqueur recevra 80 mille bolivianos (environ 8000€) et verra son œuvre publiée par Santillana. -
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: camBio
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nettoyage d'été au takesi
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e Takesi, section du sentier préhispanique inca, vient d'être nettoyé par une quinzaine d'étudiants de La Paz qui ont ramassé 50 kg de déchets. Deux jours ont été nécessaires pour nettoyer la trentaine de kilomètres entre le départ dans la cordillère andine et l'arrivée dans les Yungas. Patrimoine historique et touristique, ce chemin est victime de la désinvolture des marcheurs. Belle initiative! -
brèves À l'heure des Carnavals andins...
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ochabamba se bat pour faire valoir l'authenticité et la tradition de son carnaval. Appelé « carnaval aux saveurs de llajta (populations des Andes) et de llajua (sauce piquante), cette fête est un remerciement à la Terre Mère pour les fruits bientôt récoltés. Il s'agit d'un rituel qui s'effectue à l'approche de la saison des pluies et qui n'a rien de comparable aux carnavals européens.
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patates farCies
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: camBio
ingrédients : • 10 pommes de terre cuites • 1 assiette de viande hachée • 2 oignons finement hachés • 1 tomate • 1 cuillère de piment moulu • 1 assiette de pois • 1 œuf dur • 2 œufs • 4 cuillères de farine • ½ tasse de lait • ½ cuillerée de levure • sel et poivre
Carnaval de la paz
L
e carnaval de La Paz, qui a eu lieu du 1er au 9 mars cette année, a ouvert les festivités avec les activités pré-carnavalesques destinées aux victimes des terribles inondations du mois de janvier dans le pays. Le ch'uta, personnage traditionnel du carnaval, est donc arrivé pour la première fois dans une cabine de téléphérique installée face au palais du gouvernement. Plusieurs autres activités telles que le déterrement du Pépino, l'élection de la chola paceña et de la reine du carnaval ont été organisées tout au long du mois de février pour annoncer le début de la grande fête et soutenir les victimes des désastres naturels. 17
préparation : Réduire les pommes de terre en purée, y ajouter un œuf frais. Mettre de côté. Préparer une garniture avec les ingrédients restants assaisonnée à souhait. Former des boules avec la purée et faire un trou en leur centre avec les doigts. Garnir avec la sauce puis ajouter dans chaque boule des raisins secs et ¼ d'oeuf dur. Recouvrir avec de la purée. Battre les œufs, mélanger avec de la farine, lait et levure et tremper les boules de cette mixture. Faire frire dans une huile très chaude. -
Dossier
pulacayo
paTrimoine indusTrieL eT hisTor
P
erchée à 4200 mètres d'altitude au détour d’une colline, à une vingtaine de kilomètres à l'est d'uyuni, pulacayo paraît vivre hors du temps. un climat sec et froid, des rafales de vent glacé, ce lieu vide aux allures de ville hantée semble épuisé par ses siècles d'histoire. dans la seconde moitié du XiXe siècle, la plus grande mine d'argent de Bolivie (et deuxième du monde entier) se trouva dans le site de pulacayo. c'est dans ce lieu que se forgea le mouvement ouvrier Bolivien, animé par la célèbre thèse de pulacayo. avec le temps, l'activité minière et les luttes syndicales se sont éteintes et pu18 lacayo ressemble aujourd'hui à un village nostalgique d'une histoire très agitée.
Dossier
boLiVie JenniFer sauvage
Le FameuX train transportant Le saLaire des mineurs, attaquĂŠ par Butch cassidy et sundance kid en 1908. Les impacts de BaLLe sont encore visiBLes sur Les wagons.
u au19
: JenniFer sauvage
par
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orique de
Dossier pulacayo, principal centre minier du pays au XiXe siècle
La légende de pulacayo
La légende raconte qu'en 1833, une femme indigène Pulacayo, chapitre très important de l'histoire de la aurait dit à Mariano Ramirez, un mineur espagnol à la Bolivie, est resté le principal centre minier du pays penrecherche de filons, qu'elle pouvait le conduire à un dant près de 300 ans. à partir de 1856, il passa aux endroit où se trouvait assez d'argent pour construire mains d'Aniceto Arce — lequel deviendrait président une ville entière. Après avoir traversé monts et vallées, de la Bolivie entre 1888 et 1892. Dans la deuxième parelle s'arrêta au bout de la chaîne de montagnes, sur un tie du xIxe siècle, un tunnel de 3500 mètres fut creusé site communément appelé Mula-Cayo, où souffle le sous la colline entre Pulacayo et Huanchaca, la vent venu du Salar. Jadis exploitée par les colons esdeuxième plus grande mine d'argent du monde. De pepagnols, cette mine fut fermée à la fin du 18ème siècle tites locomotives furent mises en service pour traverser lorsque la rébellion des indiens de tupaj Amaru y batle fameux tunnel « San Leon ». Les ritirent les Espagnols. Le 17 décembre 1833, Mariano Ramirez et deux PULACAyO FUt PEnDAnt tROIS chesses provenant de Huanchaca furent associés acquirent pour 500 pesos SIèCLES LE PRInCIPAL CEntRE à l'origine d'un boom économique en l'hacienda et les engins en ruine de MInIER DE BOLIVIE, En tERMES Bolivie qui vit se développer son secla mine de Huanchaca et signèrent D'InStALLAtIOnS InDUStRIELLES teur bancaire et minier ainsi que ses la constitution d'une société miné- MAIS AUSSI COMME BERCEAU DE transports et lors duquel le PIB augralogique ayant pour but de pour- L'UnE DES PRInCIPALES DOC- menta comme durant aucune autre période de son histoire. En 1890, les suivre le travail d'exploitation. tRInES SynDICALES DU PAyS.
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Dossier "Pulacayo" Le nom viendrait d'un cavalier qui, voyageant sur une mule, aurait fait une chute juste à l'endroit où dépassait de terre un énorme morceau d'argent. Montrant sa découverte en arrivant chez lui, on lui demanda où il l'avait trouvé. Il répondit : « Donde la mula cayó » (là où la mule est tombée). L'étymologie du nom Pulacayo viendrait de cette réponse. - centre de consommation et commercial par excellence - représentaient un marché immense pour le reste du pays. D'un point de vue politique, le boom économique dû aux richesses affluant de Huanchaca ont permis au pays de créer les partis libéraux et conservateurs et surtout de mettre en place une constitution politique qui apporta une grande stabilité au pays entre 1880 et 1938. Pulacayo fu pendant trois siècles le principal centre minier de Bolivie, non seulement en termes d'installations industrielles mais également en tant que berceau d'une des principales doctrines syndicales.
trains à vapeur de la révolution industrielle et les voies ferrées virent le jour pour la première fois dans le pays afin de transporter les minerais en direction du port d'Antofagasta, situé dans l'actuel nord du Chili. Cet essor minier, période charnière de l'histoire de la Bolivie, provoqua de très importants mouvements migratoires jusqu'au début du xxe siècle. En 1925, on recensait autour de Pulacayo 112 compagnies minières, plus de 2 000 employés et 30 000 ouvriers. La production agricole d'autres régions (Cochabamba, La Paz, Potosi, Uyuni, Oruro et tarija) en bénéficia car les mines
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: JenniFer sauvage
vue panoramique du viLLage de puLacayo
photo : dr
Dossier
puLacayo a vu apparaître Les premières Locomotives de BoLivie en 1890 qui transportaient Les minerais Jusqu'au port d'antoFagasta, dans L'actueL nord du chiLi.
Les thèses de pulacayo : à la conquête d'un idéal ouvrier
toire les fondements politiques et idéologiques de ce programme, dont les points essentiels étaient le salaire de base, la semaine de 40 heures, l'échelle mobile des salaires, un contrôle ouvrier des mines, des bourses pour la grève, l'armement des travailleurs, un contrat collectif et une indépendance syndicale. Ce programme, remettant clairement en question la propriété privée capitaliste, ne put aboutir malgré une large diffusion mais est toujours mentionné comme l'une des plus grandes conquêtes des mineurs boliviens.
à partir du xxe siècle, Pulacayo devint en effet le centre de grandes conquêtes syndicales. On dit que c'est depuis l'embouchure du tunnel San Leon, à 4260 mètres d'altitude, que fut lancé l'un des messages les plus révolutionnaires de son histoire : En novembre 1946 s'est tenu le congrès spécial de la fédération syndicale des travailleurs mineurs de Bolivie (FStMB) où fut proposé un programme connu sous le nom de Thèses de Pulacayo, présenté par Guillermo Lora, un jeune universitaire et militant trotskiste, membre de la délégation minière “Siglo xx-Llalagua”. Il expliqua à son audi-
personnalités associées à ce lieu Parmi les personnalités qui ont laissé leur trace dans l'histoire de Pulacayo, Aniceto Arce, président de la Bo22
photo : dr
Dossier livie entre 1888 et 1892, est celui qui aura le plus marqué de son empreinte les événements locaux. Elu député en Bolivie en 1850, persécuté par le gouvernement de Manuel Isidoro Belzu, il s'exile au Chili où il travaille dans le secteur minier. De retour au pays lorsque Linares arrive au pouvoir en 1857, Aniceto Arce acquiert les mines de Huanchaca et, grâce à leur exploitation, devient le premier millionnaire du pays. Cette mine aura été l'une de ses propriétés les plus importantes. Les fameux bandits Butch Cassidy et Sundance kid sont également associés à l'histoire de Pulacayo : on raconte qu'en 1907, un train utilisé pour le transport des salaires des mineurs fut attaqué et pillé par les deux bandits. — Ce train, dont les wagons sont criblés d'impacts de balles, est exposé à Pulacayo.
une entreprise minière canadienne du nom d'Apogee Silver. un petit tour par les rues du village
Descendant du bus au croisement de Pulacayo et de la route désertique qui s'enfonce à perte de vue vers Potosi, le voyageur se demande ce qu'il pourra bien découvrir dans cette petite ville abandonnée. Pulacayo semble être une oasis dans un désert aux collines rosées. Pour découvrir la ville et son histoire, il devra s'enfoncer dans les ruelles, trouver les vestiges de cette montagne éventrée et des luttes syndicales passées, échanger quelques mots avec un mineur en pause ou une « cholita » qui aime à raviver sa mémoire pour se confier. À l'entrée du village, il trouvera des pièces métalliques d'un train, quelques wagons encore liés, pulacayo aujourd'hui vestiges d'un âge d'or passé porteurs d'histoire. S'avançant vers la colline, gardienne de ce village De nos jours, Pulacayo a des airs déserté, il découvrira la fabrique où de ville fantôme... Alors qu'elle re- C'ESt à L'EntRéE DU tUnnEL étaient tissées des étoffes en laine de censait plusieurs milliers d'habiSAn LEOn DE PULACAyO, à lama ainsi que la maestranza, les atetants il y a un siècle, la ville ne 4260 MètRES D'ALtItUDE, liers où furent fabriquées, réparées et compte plus aujourd'hui que stockées machines des pièces de requelques centaines d'âmes ayant qU'AURAIt été LAnCé L'Un change pour le travail minier. Au bout survécu à la fermeture des mines DES MESSAGES LES PLUS RéVOdu chemin de fer, il débouchera enfin en 1959. Mais alors que le centre LUtIOnnAIRES DE L’HIStOIRE sur l'entrée de la mine, ce trou noir minier de Pulacayo semblait sur le DU PAyS. grillagé qui s'ouvre pour aspirer les chemin de l'oubli, son histoire prohommes le temps d'une journée. Levant les yeux, ductive reprend doucement son cours depuis il apercevra l'imposante demeure de l'ancien préquelques années. Le président Evo Morales, ayant sident Aniceto Arce. Il pourra contempler le pretoujours prôné l'entière récupération des resmier chemin de fer de Bolivie qui permettait, via sources minières pour son peuple, a annoncé en le port d'Antofagasta, de faire disparaître l'argent 2011 la réouverture de ce gisement riche en plomb, vers les contrées capitalistes lointaines... Auen argent et en zinc, en gestion coopérative entre jourd'hui Pulacayo reste un mythe, un village la COMIBOL (Corporation Minière de Bolivie) et convulsé par toutes ces luttes et cet argent qui en sont issus. -
Aniceto Arce Avocat issu d'une famille modeste de Tarija, Aniceto Arce fut élu député bolivien en 1850. Persécuté par le gouvernement de Manuel Isidoro Belzu, il s'exilia au Chili et s'intéressa au secteur minier. Lorsque José Maria Linares arriva au pouvoir en 1857, il rentra d’exil et fut nommé recteur du collège Pichincha de Potosi. Il devint le premier millionnaire du pays en acquérant et exploitant la mine de Huanchaca durant son « âge d'argent ». Il fut président de la Bolivie de 1888 à 1892. 23
photos : JenniFer sauvage
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photo : isaBeL coLLazos
• en haut, au centre : chemin de Fer mis en service au XiXème siècLe pour traverser Le tunneL san Leon qui reLie puLacayo à huanchaca. au Fond, L'entrée du tunneL surpLomBé par La maison d'aniceto arce. • en haut, à droite : sur La droite de La photo, La maison d'aniceto arce, propriétaire des mines avant d'être éLu président de La BoLivie en 1888. • au centre : Le viLLage a une grande histoire syndicaLe. c'est ici que Furent présentées Les Fameuses thèses de puLacayo en 1946. • ci-dessus : au croisement de puLacayo, on attend Les Bus venant de potosi pour aLLer à uyuni. • en Bas à gauche : tunneL san Leon reLiant puLacayo à huanchaca, La deuXième pLus grande mine d'argent au monde. • en Bas au centre : registre des mineurs de puLacayo auJourd'hui ci-contre : pour visiter Le viLLage et son « musée de trains » en pLein air, iL Faut passer par Le Bureau touristique. 25
zoNes humiDes
La bolivie, premier pays au monde en
photo : omar rocha
zones humides
L
e 3 février 2014, le Fonds Mondial pour la nature (WWF International) a reconnu la Bolivie comme le pays du globe comprenant le plus grand nombre de zones humides : environ 15 millions d'hectares de zones humides d'importance mondiale. WWF International, la plus grande organisation de conservation indépendante du monde, a pour mission d'endiguer la dégradation de l'environnement pour construire un futur où les hommes puissent vivre en harmonie avec la nature. Christophe Briggs, secrétaire général de la convention Ramsar (Ecosystèmes de zones humides d'importance internationale), affirme que cette reconnaissance est « très importante », le pays contribuant à la préservation de l'environnement par sa diversité biologique. Selon les données offiLA BOLIVIE ESt LE PAyS cielles, les plus grandes extensions de zones humides AyAnt LE PLUS DE SItES du pays sont situées sur les plaines de Moxos (déparRAMSAR AU MOnDE Et tement de Béni): elles couvrent environ 8000 hectares Où SE COnCEntRE LA où sont recensés 131 espèces de mammifères, 568 oiPLUS GRAnDE qUAntIté seaux, 102 reptiles, 62 amphibiens, 625 poissons et plus de 1000 espèces de plantes. DE SyStèMES DE VIE ». « La Bolivie doit travailler sur la conservation de ses zones humides car nous considérons qu'elles apportent le bien-être, la santé et la sécurité de ses populations » a déclaré Briggs. Le ministre de l'environnement, José zamora, a également salué cette nomination, ajoutant que ce n'était qu'une victoire de plus dans sa défense et sa lutte en faveur de la terre Mère. « Le travail ardu effectué depuis la fin de l'année 2012 a conduit à la reconnaissance par la Convention de Ramsar des trois derniers sites Ramsar de Bolivie (Rio Blanco, Matos et Yata du département de Béni). Grâce à cet effort la Bolivie est le pays comprenant le plus de sites Ramsar, et où se concentre le plus grand nombre de systèmes de vie » a-t-il ajouté. Il a également affirmé que cette reconnaissance favorisait l'attention donnée à la terre Mère, et représentait un appui au travail de recherche concernant la sécurité alimentaire du pays. Cta/maABI ABI. Copyright 1998-2013 • paLma reaL (paLmier royaL) dans Le Lac roagaguado dans Le département de Béni. • Loutre et tortues des zones humides de BoLivie • rivière san martin (Béni) 26 photo : dr
photo : omar rocha
photo : omar rocha
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zoNes humiDes
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chroNique De l’héDoNisme
L’uLupiCa mère de tous les piments PAR
R
RAMOn ROCHA MOnROy
Les porteurs de la graine sacrée seraient les oiseaux : immunisés contre le piquant de l'ulupica, ils l'auraient transportée en Asie, au Mexique et en Inde. Là-bas les plantes se seraient adaptées aux rigueurs de leur nouvel environnement jusqu'à former plusieurs variétés de la même espèce. Selon Rita — une bonne connaisseuse du sujet — le quinoa (royal, rouge et blanc) est également une plante originaire de Bolivie. Ajoutons à ce sujet quelques pré-
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ita del Solar et Lupe Andrade préparent un livre de chroniques gastronomiques qui va déclencher une polémique mondiale. En effet, Rita y mentionne l'étude d'un scientifique nord-américain conclant que tous les types de piments descendent de l'ulupica, ce petit fruit rond originaire du sud de la Bolivie. Ce qui signifie que tous les ajis, chiles, rocotos, locotos, aribibis, putitas et piments auraient une lointaine mère commune : l'ulupica.
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chroNique De l’héDoNisme et à l'argent : la feuille de coca et le tabac sont des biens cisions de Lupe Cajias, qui, dans une importante étude ayant eux aussi généré d'immenses fortunes. sur le tabac en Bolivie, cite les recherches de deux Sixto Valdez évoque également le pharmacologue Wilscientifiques nord-américains établissant que cette bur Scoville, concepteur en 1912 d'une échelle mesurant feuille aromatique délicieuse, qui aujourd'hui rend fous le degré de piquant du piment. Le moins piquant est le les fumeurs et les abstinents, vient des vallées tempéCampanaqui qui mesure entre 0 et 600 unités Scoville ; rées de Santa Cruz. le Serrano serait plus fort (entre 10 000 à 25 000) ; le RoMon bon ami Sixto Valdez raconte une conversation coto (notre locoto) mesure lui entre 30 000 et 60 000 unientre Rita del Solar et Jaan van Oordt, chef péruvien tés et le havanais ou le béret écossais entre 80 000 et 150 s'étant fait remarquer à Buenos Aires sur le sujet. Jaan 000. Le poivron rouge, lui, est à zéro degré... donna plusieurs arguments, l'un d'eux étant l'interdicSelon Valdez, les Mexicains appellent le piment « ciel tion du quinoa imposée par les Espagnols aux indiens des sens », « rêve des arômes », « soleil des sauces ». La car il leur apportait une très forte résistance physique, llajua (en aymara jallpawayka et en quechua alors que les conquistadors chert OUS LES AJIS, ChILES, ROuchullajua) est une sauce à l'élaboration chaient à les contrôler. Jaan rappela COTOS, LOCOTOS, ARIBIBIS, complexe et liée au tempérament de celui qui que les enfants buvaient du lait de quinoa, faute de lait de vache, cette PuTITAS Et PIMEntS Ont la fait, qui doit être une femme. Selon son pidernière espèce n'étant arrivée en UnE MèRE COMMUnE: quant, le mangeur sait si celle-ci est triste ou L'uLuPICA. heureuse, furieuse ou paisible, ou encore Amérique qu'avec la colonisation. dans ses jours fertiles ou en pleine menstruation. Les syPourquoi Colon a-t-il rebaptisé les ajis du nom de barites créoles préfèrent la llajua moulue avec le moroqo « piments » ? Ce fut l'une de ses nombreuses erreurs, (pierre ronde) dans un petit mortier ou une tutuma (petit comme celle de nous appeler « indiens », pensant être plat fait à base d'écorce de courge). La llajua en grande arrivé en Inde, ou encore comme celle d’Amerigo Vesquantité est une fête des sens : elle est préparée dans une pucci qui baptisa arbitrairement « Amérique » tout un grande meule à grains, avec ce balancement typique du continen comprenant de nombreuses cultures très difmouvement de la pierre en demi-lune parallèle à celui des férentes les unes des autres. nous ne nous appelions hanches de la cuisinière. La llajua redonne vie aux propas indiens - mais plutôt aztèques, mayas, incas, kolduits les plus insipides tels que la pomme de terre, le riz, las, guaranis -, les ajis ne s'appelaient pas piments et les pâtes ou le maïs, fades au palais créole s'ils ne sont encore moins guindillas (piment rouge), tout comme recouverts d'une généreuse portion de cette sauce. la richesse de ce continent ne pouvait se réduire à l'or
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Fruits et FLeur d’uLupica
timbres
Les danses boliviennes par la
poste
par une troisième série de timbres, la Bolivie célèbre ses danses traditionnelles les plus fameuses. cette nouvelle série met à l’honneur la diablada, le tinku, le pujllay et le waka wakas qui viennent égayer les enveloppes et cartes postales envoyées dans le pays. Le ministère des cultures, en collaboration avec l'entreprise de courrier bolivienne, continue ainsi à promouvoir son patrimoine culturel.
LA DIABLADA La diablada ou "danse des diables" est une danse où se croisent le catholicisme et la cosmovision andine. Originaire de Bolivie, elle doit son nom au masque et au costume de diable qu'utilisent les danseurs. Depuis son origine, elle repose sur une dualité : le « païen » d'un côté (lié à la culture indigène et métisse) et le religieux (catholique espagnol) de l'autre. « Huari », demi-dieu de la mythologie andine, frustré dans son entreprise de séduction d'Aurore — ou Alba, fille de l'astre roi, déchaîne sa furie sur le peuple des Urus en envoyant quatre plaies : au sud un gigantesque serpent, au nord un énorme crapaud, au nord-ouest un immense lézard et à l'est, des milliers de fourmis. Il se lance également dans une violente lutte avec l'angélique « ñusta », beauté qui finira par vaincre le Dieu du mal. En dérou30
tant Huari, la « ñusta » se transforma en une vision divine : la vierge protectrice du peuple des Urus appelée également la Vierge du Socavon. Initialement, les femmes ne participaient pas à cette danse et ce sont les hommes qui interprétaient les rôles féminins. Au xIxème siècle, la Diablada avait pour personnages principaux « l'ange », « Lucifer », « les femmes » et « les diables ». Plus tard, au xxème siècle, se sont ajoutés de nouveaux personnages : « Lucifer », « Satanas », « la femme Supay », « les femmes diables », les « diablesses », « les petits diables » (représentés par des enfants), « le Condor », « les ours » et « la mort ». Au xxIème siècle apparaissent enfin « les ñaupas », « les vertus » et « les tentations ». -
timbres LE TINKU Croix est le moment où se réunissent les communautés autour du « tata Cruz » (une croix couverte d'un poncho et d'un chapeau montera), avec les processions à la « tour Mallku » de l'église, accompagnées de musique de jula jula et de charango. La danse est caractérisée par la vitalité, la force et l'énergie qu'elle transmet. Cette tradition culturelle s'est étendue aux villes où les nouvelles générations s'en mêlent et redynamisent ses costumes, sa musique et ses chorégraphies. -
Le terme tinku vient du quechua tinkuy qui signifie « se rencontrer ». Le tinku est un rituel du nord de Potosi qui a lieu du début du mois de mai jusqu'au mois de juin. Il se situe donc entre deux périodes de l'année : le carnaval de la saison des pluies (novembre-mars) et le début de la saison sèche (juin à octobre). Comme d'autres manifestations, le tinku est lié à l'abondance et à la fertilité de la terre : est le remerciement pour la récolte passée et invoque le beau temps pour les futures semailles. Aujourd'hui, la fête de la
WAKA WAKAS Cette danse s'appelle le Waka Wakas ou, en zone urbaine, le Waka thuqhuris (taureaux dansants). Cette tradition est liée aux danses rurales de taureaux appelées « Waka Inti » ou « Waka tinki ». La danse urbaine est une façon de tourner en dérision les corridas de taureaux en mettant en avant du rôle des laitiers alors que la danse rurale est une mise en scène des semailles de la pomme de terre. Les principales figures féminines de la danse sont la laitière, la mamala et la bergère. La laitière est celle qui a le plus grand nombre de jupes. La mamala repré-
sente l'autorité indigène féminine. Elle est caractérisée par ses vêtements noirs, ses nombreuses jupes, son petit baril d'alcool et tous ses bijoux. La bergère est la représentation plus jeune et joueuse des figures féminines. Le taureau est le principal personnage masculin. Le jilaqata est le mari de la mamala qui est la haute autorité de la communauté. Il est vêtue de vêtements de flanelle et d'un poncho, et tient en main un bâton de commandement, un fouet et un petit baril d'alcool. Il est accompagnée par le torero, les kusillos (bouffons) et le kh'aisalla qui est le matador. -
LE PUJLLAY lay », dansent inlassablement autour de la pukara (tour en bois ornée de produits de la terre) dressée en signe d'abondance. Les vêtements des hommes sont la montera noire (chapeau en forme de casque de conquistador), le poncho, le pantalon, la coiffe, le fichu, la ceinture à clochettes, la chuspa (petit sac) et les ojotas (sandales en cuir). Les tenues des femmes sont constituées du pacha montera (chapeau traditionnel), la llijlla (cape brodée), de fichus, de l'axsu (jupe typique brodée), du chumpi (ceinture), de l'almilla (chemise noire), d'un drapeau et de sandales en cuir. -
Le mot Pujllay signifie « jeu » en quechua et évoque la danse et la joie. Le Pujllay est un rituel qui célèbre la rénovation de la vie et l'abondance amenée par les pluies dans la culture yampara. La danse et les costumes évoquent le « tata Pujllay », une entité démoniaque et féconde qui possède une énergie débordante, représentée parfois comme un cheval ou un cavalier. Le groupe de musiciens du Pujllay joue de différentes flûtes nommées pinkillo. La flûte la plus grande, le toqoro, est accompagnée d'une espèce de clarinette en corne (wajra). Les danseurs, vêtus comme le « tata Pujl-
Projet : Direction générale de la promotion culturelle Textes : Direction du patrimoine culturel. Photos : Min. Culturas 31
la bolivie t’atteND...
La route des vins et singan
photo : Fir0002/FLagstaFFotos
des vaLL
la bolivie t’atteND...
nis d’altitude
Lées de tarija PAR
VIVIAnA UGARtE
D
ans l'extrême sud de la Bolivie, entre 1700 et 2300 mètres d'altitude, se trouve la vallée centrale du département de tarija, région connue pour ses vins et singanis. apportées il y a plus de cinq siècles par les colonisateurs espagnols, les techniques de production de la vigne et du vin ont été adaptées aux hauteurs des ces vallées. aujourd'hui les visiteurs du monde entier peuvent y déguster du vin d'altitude et découvrir de magnifiques paysages.
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la bolivie t’atteND...
L
adite « route du vin et singani d'altitude » est un parcours d'environ 50 kilomètres à travers les communes de San Lorenzo, Cercado et Uriondo qui offre une expérience unique pour découvrir la viticulture d'altitude. On parle de « viticulture d'altitude » car ces vins sont produits avec du raisin cultivé dans les hauteurs de la Cordillère des Andes, à des altitudes peu communes dans le milieu viticole (entre 1700 et 2300 mètres d'altitude). Les caractéristiques des sols et le climat tempéré, voire chaud, donnent aux vins des arômes, des couleurs et des saveurs intenses, propres à ce terroir.
à partir des années 90 sont introduites de nouvelles variétés de raisin et, au début des années 2000, d'importants investissements permettent la modernisation de l'industrie des vins et singanis de la région. C'est ainsi que se sont développées à tarija des caves à vin dotées d'une technologie de pointe. Les vins boliviens sont aujourd'hui primés et médaillés lors de divers concours internationaux du monde viticole, autant de trophées exposés dans les caves à vin le long de la route. Le partage des vins et singanis en Bolivie, toute une histoire...
Les prémices du vin bolivien...
La visite de la route des vins ne se limite pas seulement aux grandes caves, elle comprend également les productions familiales et artisanales n'ayant que de petits volumes de production. Ce sont d'ailleurs ces dernières qui donnent à chaque gorgée de vin une histoire, une légende et une coutume à raconter à la famille ou aux gens de la région. L'authenticité de ces moments et la chaleur des gens du coin rend l'expérience de cette visite unique.
photo : Fundacion Fautapo
à tarija, la culture de la vigne commence au xVIIème siècle et prend un essor important dans la localité de Santa Ana où l'on peut trouver les plantations les plus anciennes de la vallée centrale. C'est autour de 1963 que la viticulture se renforce et devient une industrie, gagnant en technicité et propulsant tarija au rang de premier département producteur de vins et singanis de Bolivie.
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la bolivie t’atteND... Le Singani, emblème de la Bolivie Le Singani est une boisson alcoolisée élaborée à partir de la fermentation et de la distillation de muscat d'Alexandrie. Cette boisson fut d'abord produite durant l'ère coloniale lorsque les espagnols commencèrent à cultiver la vigne dans les vallées au sud de Potosi. Pour des raisons climatiques et géographiques (altitude élevée), la distillation du raisin fermenté fut privilégiée à l'élaboration du vin, ce qui donna naissance à ce spiritueux très fameux en Bolivie: le Singani.
Organisation de Gestion de Destino Tarija-ODG Tarija A Tarija, le secteur touristique public et privé travaille de façon coordonnée sous la tutelle de l'Organisation de gestion de destino Tarija-OGD Tarija, fondation qui depuis plus de trois ans se voue aux activités de promotion du destin et de la formation du talent humain. La OGD Tarija cherche à se consolider et à se positionner au niveau national et international avec des défis importants pour parvenir à cet objectif : améliorer la qualité et la compétitivité des entreprises touristiques, développer un portail web pour les marchés internationaux et définir une marque et un slogan pour chaque entreprise.
turelle de cette vallée et ses diverses expressions telles Concernant les variétés de raisin, la plus diffusée est que la musique, les chants et les danses sont partagées le Muscat d'Alexandrie (utilisé comme raisin de table tout au long de l'année avec le visiteur. et pour l'élaboration de vins et singanis). Dans les vins Une fête particulièrement importante dans le monde rouges on peut s'émerveiller des saveurs que livrent le viticole est la fête des vendanges qui a généralement Syrah, Cabernet Sauvignon, tannat, Merlot, Malbec, lieu en février et mars. Elle vient célébrer le viticulteur tempranillo et Barbera, parmi les principaux. Dans les qui ramasse les fruits après une année entière de dévins blancs les variétés les plus représentatives sont le vouement et d'effort pour la culture de la Sauvignon Blanc, le Riesling, le Chardonnay, le Muscat d'Alexandrie et le L'AUtHEntICIté DE vigne, effort traduit dans les arômes et saveurs livrés par les vins et singanis. torrontés. CES MOMEntS Et LA Parallèlement à cet évènement a lieu la Une des parties les plus importantes CHALEUR DES GEnS rencontre « l'Art et le Vin » qui réunit de la route est la visite des distilleries de DU CRU REnD L'ExPédans la vallée de tarija des artistes du Singani, la boisson emblématique de la RIEnCE DE CEttE VImonde entier —peinture, sculpture, ciBolivie. Cette dernière est le résultat SItE UnIqUE. néma, photographie, arts scéniques— qui d'une distillation jeune, fine et aromapartagent l'élaboration de leurs œuvres avec la populatique obtenue à partir d'un vin clair de la variété Muscat tion locale. d'Alexandrie et dont le degré d'alcool varie entre 35° et En été, au moment où le fruit de la vigne atteint toute 45°. L'origine de cette boisson remonte à l'époque cosa splendeur, on célèbre également les fêtes traditionloniale lorsqu'elle servait à approvisionner les mines de nelles les plus importantes telles que le carnaval ChaPotosi, qui, à cette époque, était la ville la plus grande paco où la musique et la joie des participants est et plus peuplée du monde. particulièrement intense. Et à ces fêtes majestueuses sont loués les arômes et les saveurs des vins et singanis ainsi que la gastronomie locale et traditionnelle. EntreLes expressions culturelles de la vallée de tarija prendre la Route du vin et singani d'altitude représente Visiter la région de la vallée de tarija et déguster ses plus qu'une simple suite de dégustations, mais est aussi vins et singanis s'avère donc être une expérience partil'occasion de découvrir et partager la culture vive de la culière pour les connaisseurs. De plus, la richesse culrégion, son histoire et ses incroyables paysages. • ci-contre : costumes traditionneLs des Festivités de tariJa.
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photo : Fundacion Fautapo
Délégation Permanente De l’état Plurinational De Bolivie auPrès De l’unesCo