Eugène Carrière, l'homme et l'artiste, 1901

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GABRIEL SÉAILLES

Eugène Carrière ^ L'HOMME ET ^ L'ARTISTE

Compositions et croquis de

E. Carrière

GRAVÉS PAR MATHIEU

PARIS EDOUARD PELLETAN, ÉDITEUR 125,

Boulevard Saint-Germain, 125

1901









EUGÈNE CARRIERE l'homme et l'artiste



)

^.

GABRIEL SÉAILLES

Eugène Carrière H^ L'HOMME ET

L'ARTISTE

Compositions et croquis de

E. Carrière

GRAVÉS PAR MATHIEU

PARIS EDOUARD PELLETAN, ÉDITEUR 125, Boulevard Saint-Germain, l'25

1901

-^

——



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i»'i:S;^::g^^g^a

EUGENE CARRIÈRE



^ Nos jeunes gens ont sorte et

ce

de manie

philosophes qu'il

doit

;

goût des manifestes, une

le

législative ils

être,

;

ils

disent ce que

sont esthéticiens l'art n'a

que par eux

ce

écrivent d'abord la préface de leurs plètes.

La méthode ne

reuse.

Il

laisse pas

est à craindre

que

mouvement spontané de voulue ne

la

il

sera

été, ;

ils

œuvres com-

que

d'être dange-

l'analyse vie,

pas

que

soit qu'artifice et contrainte,

n'arrête

le

l'originalité

que

l'ivresse


EUGENE CARRIERE

2

anticipée des cliefs-d'œuvre qu'on n'a point faits

du

n'enlève le courage

lent effort par lequel

s'achemine vers ceux qu'on pourrait

Eugène Carrière

est

un véritable

dépasse sa réflexion.

ne

Il

d'abord dans des formules,

rance de lui-même à se connaître.

Il

:

artiste

s'est il

est entré

sa nature

:

pas emprisonné

a respecté son igno-

en agissant

c'est

on

faire.

dans

qu'il a appris

la vie

avec ce sen-

timent d'horreur sacrée qu'éprouvaient les premiers

hommes

en pénétrant dans

les

inviolées

forêts

qu'habitait la majesté des dieux. C'est dans la vie

même, dans

l'effort

en rien sacrifier,

lui-même,

(c

A

pour

qu'il a

cherché

la révélation

répondais que les montagnes sont »

Nul plus que

lui

faites

tout

à leur aise

complaisance le

;

il

et distraction

;

il

sincérité,

;

ils

l'homme «

Il

avec

dans

l'artiste

la vie

de Carrière

dans ce refus à tout men-

songe, dans cette patiente découverte de cette volonté

été

ont dis-

a poursuivi sans hâte

son œuvre. Le grand intérêt de

dans cette

de grains

les a laissés dire

labeur continu qui peu à peu met

est

leur

je

peut-être n'a

entouré de littérateurs, d'esthéticiens serté

de

camarades ne parlaient

l'école, les

jamais que de soulever des montagnes,

de sable.

sans

la vivre tout entière,

dans

soi,

de ne rien fausser, d'être réellement

qu'il est.

faut

que l'homme consente à

artiste, c'est vivre

avec

le

la vie »

:

être

respect et l'inquiétude


EUGÈNE CARRIÈRE des forces inconnues que

quand

l'heure en

3

seul manifeste,

le travail

est venue. L'art,

pour Carrière, n'est pas un métier qui nourrit ou enrichit son homme, dont on se distrait par le plaisir son art ;

est

mêlé à sa

est le langage

ne s'en pas distinguer;

vie jusqu'à

de ses douleurs

pensée de tous

les

de ses

et

morale

instants, sa

il

joies, sa

sa reli-

et

gion, l'action intime, l'expérience positive qui lui a

révélé tout ce qu'il

divisé qui s'oppose à

un

Carrière n'est pas

sait.

lui-même

acquiescement à sa nature

;

:

être

son travail est un

sa réflexion n'altère pas

ses sentiments, elle en naît, elle les approfondit

;

son vouloir tenace n'est que la claire conscience de sa vraie destinée; son talent ne se distingue pas

de sa vie morale,

œuvre en

il

d'artiste est

même

temps

»,

trompent;

comme

il

pas d'être

«

qu'il

il

n'a

voit et

forme nécessaire; son

point

tant

comme

qu'il est

pas

voit

il

il

«

qu'il

comme

de malice,

pense,

il

se

fait

Ceux qui s'ima-

à les étonner,

ne

« différent »,

ment parce

la

son œuvre d'homme,

qu'elle et par elle.

ginent qu'il cherche

exprès

en est

il

ça il

le »,

fait

se

peint

ne se soucie

est original tout simple-

lui-même.


EUGENE CARRIERE

Il

est des vies

romans amusent

qui ressemblent à des

d'aventures, elles excitent l'attente, elles la curiosité, elles

intéressent par les faits

mêmes

qui en constituent la trame. La vraie vie d'un artiste est sa vie intérieure, elle

nements que dans dont

est

moins dans

pensées,

les

les évé-

sentiments

ont été l'occasion.

ils

La

les

vie d'Eugène

Carrière nous intéresse parce

qu'elle trahit de son esprit et de son caractère, par

ce qui

donner sais pas

nous en

rattache à son art et contribue à

la

Fintelligence.

Regardée du dehors,

je n'en

de plus simple, de plus banale, mais

prend par

même

elle

quelque chose de général

et

nous présente l'exemple d'un

homme

qui, sans à coup, sans rien brusquer, entre

en pos-

d'humain

;

elle

session de lui-même

;

elle

enseigne aux gens pressés

ce que donne de courage dans la lutte, de force

pour

la

soutenir, de

sérénité dans les

épreuves

inévitables, la fidélité inviolable à l'idéal supérieur

qui libère ses serviteurs de toutes les autres servitudes.


EUGÈNE CARRIERE

5

Le sixième enfant crune famille qui en compta sept

(*),

dans

le

j'imagine qu'il fut accueilli à son entrée

monde

avec plus de résignation que d'en-

thousiasme, mais

— ce qu'il

dire

ne

il

sait

infinie. Fille

campagne d'Alsace, sa mère ne

qui

bien sans doute

dresse des mères est

de nous

s'est point lassé

que

la

ten-

d'un médecin de

femme simple

était la

discute ni le devoir, ni la vie, l'être de

dévouement obstiné qui ne songe qu'aux autres ne regarde Il

lui doit

la

et

tâche qu'après qu'elle est accomplie.

son esprit sérieux,

son sens du

réfléchi,

devoir, son acceptation tranquille de la destinée, le

courage des dures besognes qui s'imposent relève la dignité

dont elles sont

rien d'extraordinaire le sort il

ne

lui

n'accompht

il

dans son berceau,

avait réservé

devait tout attendre de

que

sauvegarde.

la

Carrière ne fut pas un enfant prodige,

et

et,

aucune faveur,

comme comme

sa propre volonté, les

diseurs de bonne aventure n'eurent rien à lui prédire.

Durant

enfance,

il

les

longues

fut l'être obscur,

souvent peint, d'abord s'effare, à

l'abrite

;

le

(*)

;

le

garçon grandi, déjà

se sépare, découvre

Carrière a bien

j'utilise

voulu

première si

animal qui sourit ou

tour étonné, inquiet ou ravi.

que

la

silencieux, qu'il a

le petit

peine détaché du sein qui

puis

reconnaît,

années de

le

nourrit et

fort,

qui se

monde, tour à

Le père, souvent

me donner quelques renseignements

nos conversations ont fourni

le reste.


EUGENE GARllIERE

6

absent, en route pour ses affaires, les heures cou-

lentement auprès de

laient

la

mère dans

maison

la

silencieuse.

Appelé à l'existence

au labeur précoce,

active,

Carrière recevait une instruction

pratique

;

périence, il

ignorait ce qu'est

existât;

il

était

condamné

ou

l'art

lui l'ex-

beauté par

n'était point initié à la

il

poésie,

qu'il

modeste, toute

aucun maître ne devançait pour

même

la

qu'il

à savoir seulement ce

apprendrait lui-même, ce qu'il découvrirait

peu à peu du présent

et

du passé

i^ar

une sorte de

croissance spontanée, en amplifiant sa vie, en reliant

son propre

hommes. lui et

effort

dont

il

partageait les vicissitudes était sa pre-

mière éducation tudes, il

à l'effort antérieur des autres

L'existence dure qu'on menait autour de

:

témoin des soucis, des inquié-

du perpétuel recommencement de

faisait

,

sans y

songer

,

la lutte,

l'apprentissage

de

du courage, des solides vertus sur quelles une vie pose sans chanceler.

patience,

Mais dans l'enfant sérieux, dont

la

les-

l'originalité

ne

se trahissait guère que par la lenteur et la timidité,

sommeillaient les germes du talent qui

de sa destinée. Son grand-père grand-oncle paternel lycée de Douai,

il

faisait

habileté scrupuleuse, pastels,

dont

j'ai

était

allait

décider

était peintre

;

son

professeur de dessin au

correctement,

avec une

des portraits, aquarelles et

vu quelques-uns

jadis,

images


EUGENE CARRIERE aujourd'hui pâlies, venir

C'est

(*).

succès

:

7

mon

de

à demi-effacées

une pauvre pliilosophie que

sou-

celle

du

notre effort peut-être se continuera, s'achè-

vera par un effort plus heureux que nous aurons

rendu possible. De braves gens, par un obscur labeur, préparent le

mécanisme que

mysté-

les lois

rieuses de l'hérédité transmettront à celui qui fera

nom

leur

inoubliable.

les images, éprouvait

petit.

descendre de son cerveau

que ses

et s'attardait à ce jeu

faisaient plus passionnant.

cultés

Carrière aimait

un obscur besoin de les repro-

comme

duire, les sentait

dans ses doigts,

Tout

A

diffi-

douze ans,

il

dessinait déjà tout seul, sans y voir de mystère,

sans y mettre obéir

à

de vanité, pour son

l'instinct

sans

qui,

qu'il

marquait l'orientation de sa pect de la nature, de ses

veut que mais,

le

ne précipite

s'il

la

plus constante.

bourg, qu'il

il

le

rien,

Il

lui,

y avait

dès il

pour

soupçonnât,

vie. Carrière

libres

a

le res-

mouvements,

grain lève et mûrisse

cience d'une tendance en

plaisir,

à

il

son heure,

qu'il a pris

y applique

la

cons-

volonté

une académie à Stras-

en suivit les cours, sans but précis, parce naturellement où

était

on

dessinait.

Élève

assidu, bien doué, travaillant l'ornement, la bosse, le

modèle

passion et (*)

0» me

Couture.

où se trahissaient sa son entêtement, chaque année il rem-

vivant, avec

cite

aussi

un

zèle

une bonne copie du Fauconnier de Th.


EUGENE CARRIERE

8

tous

portait

prix.

les

N'attachant

aucune importance, sa famille

Le père

ne

succès

ses

avait le légitime souci de voir les enfants

se suffire à sible

à

les ignorait.

eux-mêmes

promptement pos-

plus

le

les leçons de dessin et les pastels de famille

;

lui

avaient pas laissé de la profession d'artiste

un souvenir qui enfants,

envier pour l'un de ses

la lui fît

même

n'admettait pas

il

fantaisie, et

grand un métier qui d'ores

homme

:

d'une

l'idée

telle

s'occupait de trouver au garçon déjà

il

nourrit son

déjà

et

moi qui

ce n'est ni Carrière ni

l'en blâ-

merons.

A

dix-neuf ans, Carrière quittait Strasbourg pour

Saint-Quentin, ville manufacturière où, sans doute, il

un métier en rapport avec ses

devait trouver

goûts et ses dispositions naturelles. J'ignore

ce

qu'il

en advint. Son séjour à Saint-Quentin toute-

fois

ne

fut

une

par

servi

point perdu

sûrement vers Il

du

y

volonté la

vie

une sorte

tenace,

qui

le

lent

progrès

conscience de ;

par

conduisait

devait être la sienne.

lequel

lui-même.

A

à

s'élevait

il

Strasbourg

la

avait

il

ses albums montrent avec quelle patience,

avec quel scrupule

il

avait,

d'un crayon bien

parfait ses chefs-d'œuvre

d'écolier;

n'avait pas

soupçonné

ignoré

d'instinct,

une découverte qui marque un moment

fit

dessiné

:

l'art,

il

langage de l'émotion par la ligne,

la

mais

il

effilé,

avait

la peinture, ce

forme,

la

cou-


EUGENE CARRIERE leur;

il

n'avait pas

même

9

su voir dans

l'église Saint-

Pierre les chefs-d'œuvre de iMartin Schongauer, le

maître charmant de Golmar.

A

du musée,

les salles solitaires

Saint-Quentin, dans

trouva l'œuvre de

il

Latour, des pastels achevés, des

a

préparations

y>

plus précieuses encore, par ce qu'elles révélaient

de

la vision

vation,

de

quelles

il

une idée

de

l'artiste,

de

certitude, de

la

ramenait claire.

Il

la

l'acuité

de son obser-

décision avec les-

la

nature complexe et fuyante à

y avait là des philosophes et des

financiers, des grands seigneurs et des danseuses, J.-J.

Rousseau, Maurice de Saxe,

la

Favart et la

Camargo, des inconnus qui bientôt n'étaient plus des étrangers pour Latour,

il

Carrière se mit à l'école de

lui.

donna tous ses

pastels, à l'étude

loisirs à la copie

de cet art

fait

d'analyse et de vie;

apprit de ce maître ardent et

il

tête est définie

construire

la

nomie

n'est

manent

A lui

réfléchi

d'abord par son ossature,

de l'animer, que

avant

de ces

la

qu'une

qu'il faut

physio-

que grimace, isolée du caractère per-

qu'elle modifie.

quelque temps de

donna

là,

un court séjour à Paris

l'occasion de visiter le

Jusqu'à cette heure,

il

musée du Louvre.

avait dessiné sans plan arrêté,

par instinct, parce qu'il y avait en

lui

une sorte de

mécanisme préformé qui liait l'image au mouvement et dont le jeu l'amusait. En sortant du Louvre, il avait fait un pas décisif dans la découverte de


EUGENE CARRIÈRE

40

lui-même,

avait

il

compris

qui!

ce

trouvé ce ciue depuis son enfance

il

pressentait,

cherchait obscu-

rément. C'est devant les toiles de Rubens qu'au

choc d'une émotion soudaine avait résolution d'être peintre

en

jailli

lui la

l'admiration est surprise,

:

étonnement autant que sympathie. Cette décision, à dire vrai, n'était que le terme d'un long travail antérieur

selon la

:

ment mûrie, éclose

de sa nature,

loi

l'idée

lente-

à son heure, s'achevait en

une

volonté que rien ne devait plus ébranler.

En

dépit de l'opposition paternelle,

Quentin il

et vint s'installer

dans

entrait

de

la foule

;

il

fait

n'avait à

quitta Saint-

à Paris. Sans trembler,

la ville redoutable,

grande solitude que

il

il

affrontait la

à l'inconnu l'indifférence

compter sur personne,

n'avait ni argent, ni relations, pas

même

la

sympa-

thie lointaine des siens, dont l'hostilité achevait

abandon. il

Il

hommes

d'eux-mêmes,

la

il

d'action, qui

prévu

bohème, de

la vie

Il

de privations, où

Le problème l'effort il

le

prennent

avait le courage des

avait

ments.

son

ne perdit pas son temps à se plaindre;

ne joua ni au héros, ni au génie méconnu;

tous les

il

était

la

la

misère,

il

l'initiative

commence-

avait horreur

sans dignité, volonté

comme

faite

d'excès et

s'affaiblit et

de vivre et de trouver

le

s'énerve.

temps de

désintéressé qu'exige l'apprentissage de

résolut par le travail.

qu'il avait faites à

Il

de

l'art;

mit à profit les études

l'académie de Strasbourg,

il

était


EUGENE CARRIERE

homme

de ressource,

se

il

fit

dessinatem^,

trouva aucune besogne indigne de ses nuits, il vécut. Tout en gagnant jour,

il

ii

le

lui,

ne

prit sur

pain de chaque

temps de suivre

trouvait le

il

il

cours de

les

l'École des Beaux-Arts.

Sur ces entrefaites, premières défaites,

il

guerre éclata. Après les

la

pour Strasbourg,

partait

il

voulait rejoindre ses parents, prendre sa part des

épreuves communes. Strasbourg déjà par les Prussiens guerre et

rallia

il

;

s'engagea pour

était investie

la

durée de

place écrasée d'obus, bientôt

capitulait et

interné en Saxe, dans la ville de Dresde.

frances de la captivité, quille il

d'homme

temps,

la

souf-

blouse bleue, en sabots,

— et

l'été, », et

il

«

Un

soir,

évoquait ces souvenirs

il

soupe au millet

pierre fendre

Aux

fallait subir.

pour toute nourriture dans

teurs ruraux

était

qui n'aime pas les gestes inutiles,

chez Alphonse Daudet, :

il

opposa son courage tran-

il

se ramassa et subit ce qu'il

lointains

La

garnison de Neuf-Brisach.

la

la

les

;

les

camarades

premiers et lui

en

tout semblables aux fac-

cela

pendant

qu'il gelait à

concluait qu'au fond les prison-

niers n'avaient pas eu à se plaindre des Allemands.

— Alors,

on a été très aimable avec vous,

lui dit

ironiquement une dame qui attendait sans doute des plaintes de cet

— Oh!

homme

qui ne se plaint pas.

madame, on n'est pas aimable avec cinq mille hommes. [Journal de Goncourt.J

vingt-


EUGENE CARRIERE

12

Carrière trouvait là-bas, travailler

a

la

le

temps de

dessin, assez banal d'ail-

une composition centrale entre deux épisodes

leurs,

de

pu voir un

j'ai

:

paraît-il,

guerre de Vendée, qui porte cette suscription

:

Frontispice d'un futur ouvrage d'un futur écrivain

qui partage

hasard

ma

qu'une image, celle de

que

le

deux

Un

de tant de chefs-d'œuvre,

:

Rembrandt que

les

^>

permit de visiter l'admirable musée de

lui

Dresde, mais trop vite

dont

décembre 1870 Q.

captivité,

il

n'emportait

madone de

Saint-Sixte,

l'on

la

génie de Raphaël,

par

sait,

le

balancement de

lignes, enlève d'un si noble élan.

La guerre

avait

passé. Les longs

reculé bien des choses dans

mois de

regagnait Strasbourg,

le

captivité écoulés, Carrière

y recevait bon

accueil

et,

après avoir pris quelque repos auprès des siens, revenait à Paris

mener la dure

vie qu'il avait choisie.

Élève de l'École des Beaux-Arts, l'atelier

il

appartenait à

de Cabanel, qui semble avoir eu

le

rare

mérite d'aimer l'originalité chez les autres et de ne

pas porter atteinte à celle de ses élèves. Carrière (*)

Les vieux papiers ont leur destin.

pauvre garçon, mort à sitions faites

dessins, qui

la peine.

Un

On

vendait l'atelier d'un

encadreur, parmi ses acqui-

un peu au hasard, découvrit tout un lot de projets, de portaient le nom d'Eugène Carrière il le donna à ;

M. Pontremoli, pour lequel il avait encadré des toiles signées de ce nom. J'ai trouvé là des documents précieux, non seulement sur les besognes que Carrière accepta pour vivre, mais sur la souplesse de talent, sur remplir.

la

variété d'aptitudes qui le

rendirent propre à les


EUGENE CARRIERE n'était

pas à FÉcole un révolté, un rapin superbe

trouvant dans

de

en transmettre

hommes

des

une

conscience de son génie

la

dont

officiels,

l'habit verdit,

parfaite

dans

tradition. Élevé

la

dédain

bonne

la

lui

le

respect

boutonnière

fleurit,

se pliait à la discipline avec

il

foi,

il

apportait aux exercices de

du

l'École sa forte volonté et son sentiment «

le

technique et des professeurs chargés de

la

dont

43

devoir.

me paraissait une chose sacrée me mener à un but que je n'apercevais pas, qui me semblait fatalement supérieur. Il

Cette éducation

devant

mais

^>

est tenté de croire aujourd'hui

coup de temps dans corrige par l'aveu

« qu'il

maison

»,

a perdu beau-

jugement

qu'il

que, tant que l'homme n'a pas

ce

pris conscience de

cette

lui-même,

ne peut

il

que

faire

». Maintenons pour le principe bon que l'artiste commence par le commencement, qu'ici ou là il apprenne son métier et devienne le bon compagnon qu'avant tout il doit

des choses neutres

qu'il est

être.

En 1879, Carrière montait en classé le premier

pour l'esquisse

s'arrêtait là, et

quittait l'École

il

loge, ;

et

il

était

mais son succès

comme

il

y était

entré.

La

même

année

sa mère, d'une

sécheresses, des rité

,

il

facture

exposait

un

portrait

de

un peu lourde, avec des

ombres dures, mais d'une

touchante qui montre de

sincé-

quel œil attentif

il


14

EUGENE CARRIERE

regardait la nature, avec quel scrupule

guider par

exprimer de

elle,

et

aussi

ce

la vie intérieure.

il

que déjà

se laissait il

savait


EUGÈNE CARRIÈRE

15

II

Six années s'étaient écoulées,

il

avancé qu'au jour déjà lointain où

audacieusement à Paris il

il

;

comme

ne

débarquait

Il

restait debout, portant

poids de ce double labeur

le

pas peur,

lui faisait

il

aussi inconnu,

alors gagner le pain qui per-

mettait à l'artiste de vivre.

allègrement

était

de relations ni de ressources,

n'avait pas plus lui fallait

il

pas plus

n'était

l'une après l'autre,

il

il

en abordait les

la

;

vie

difficultés

triomphait de l'heure présente

sans s'effrayer de l'avenir

:

à chaque jour

suffit

sa peine.

En

1877, avec la vaillance tranquille de f homme

qui a des réserves de courage, et vie

», il

«

qui consent à la

associait à sa rude destinée la

l'image est

si

intimement mêlée à son

femme, dont art, si

insé-

parable de sa pensée, qu'il semble qu'elle en soit

née ou que,

lui

ayant été accordée par je ne sais

quelle harmonie préétablie, naître

pour

il

n'ait

eu qu'à

la

recon-

la choisir.

Après son mariage, une chimérique espérance

le

ne connaissait personne,

il

conduisit à Londres.

Il


EUGÈNE CARRIERE

16

ignorait la langue à se défendre

sort

la

:

misère

vint, et ;

sans limites,

(c

avec l'impuissance

plus seul.

n'était

il

comme

résistance,

la

arrivait là

sourd-muet. C'était tenter

d'un

s'abandonna pas

pour

il

;

toujours

se

il

même, dans

et là

le silence

des foules

Il

le

ne

ramassa

cette ville lui

donnait

un sentiment d'effroi », il fit le miracle de vivre. « Dans sa débine, contait-il à de Goncourt (*), il s'était avisé de faire quelques dessins de femmes et

d'amours

Beaux-Arts

— des réminiscences de l'École des — et les avait portés dans la semaine

qui précédait Noël à un journal illustré. Les dessins avaient plu au directeur qui lui en avait

deux, qu'il

et le

quelques

lendemain, avec les

recevait,

il

de suite à

courait

demandé livres

une taverne

mettre un peu de viande dans son estomac. directeur s'éprenait de

à dîner,

images

et le et

et l'invitait

lui

des bibelots,

Ah

!

des

bien que tout à coup,

si

ses yeux tombant sur la pendule,

quelquefois

à regarder

retenait à causer,

Le

vraiment, je vous

il

s'écriait

ai fait rester

:

trop tard,

vous ne trouverez plus d'omnibus. Et

l'Anglais

Palace, près

demeurait

duquel

imperturbablement

— Oh

!

je

gîtait

prendrai un cab à

Journal, IX, 43.

diable

de

Crystal-

:

voitures qui est à côté. (*)

au

Carrière, qui répondait

la

petite place

de


EUGENE CARRIERE Et

revenait à pied et rentrait chez

il

lui,

tant

quatre heures du matin.

c'était loin, à

17

Ce qui m'a sauvé,

jette-t-il

en manière de

péroraison, c'est qu'il y avait chez moi, dans

ma

jeunesse, beaucoup d'animalité, de force animale. Carrière a raison, mais de cette le tout est

de

faire

la

»

animale,

force

matière d'une énergie vrai-

ment humaine. Voici en quels termes

Londres

résume ses souvenirs de

:

De 1877

(.(

il

Londres

;

à

1878, j'avais passé

sans relations, je m'étais

dépensé une énergie excessive

j'avais

vivant seul, je passais

penser;

il

me

De retour

restait

à Paris,

mon temps

Turner dans à

la vie

et

nions notre cours, l'une dure, Installé

girard,

dans une il

Dans

allusion déjà,

d'affaire

à travailler et à l'esprit. »

moi, nous reprel'autre obstiné

».

jour et bien souvent une

les

j'ai

vieux papiers, auxquels

retrouvé les témoignages

de ce labeur acharné, des vignettes, des tions,

;

toujours

;

maison de banlieue, à Vau-

travaillait tout le

partie de la nuit. j'ai fait

petite

mois à

six

tiré

des réclames pour

le

illustra-

magasin du Printemps,

des menus, des dessins de mobiher ou d'architecture, parfois

une composition ingénieuse

l'enfant apparaît,

A

quelque chose d'original

ceux qui seraient tentés de

répondrait sans doute,

;

dès que

et

d'ému.

le

plaindre. Carrière

comme

Turner, qui avait


EUGÈNE CARRIÈRE

48

connu

les

mêmes

épreuves

:

«

Je ne

un excellent exercice. « dans peintre était son loisir c'était

tableau,

achevé pour

avait

il

:

une Jeune mère

fermé chez

lui,

de de

était

Salon un

le

allaitant son enfant.

sans distraction, sans

Carrière

possible,

travail

n'oubliait pas ce qui d'abord la lui avait

», il

affronter

fait

plains pas,

cette existence

;

forçat

me

Son

y>

amené

En-

modèle

«

»

à voir les choses

passionnantes que tant d'autres ne songent pas à

femme, son enfant, leurs gestes de tendresse, leur émoi charmant, et dans le cercle étroit, où tenait tout ce qu'il aimait, il découvrait un

regarder, sa

mondeque tous croyaient

comme une

tait

connaître et dont

expérience nouvelle. Le

auquel étaient confiées

de

si

Bien des yeux se levèrent vers vit

:

il

était

appor-

tableau,

chères espérances,

dans des hauteurs où

fut relégué

il

il

lui,

était invisible.

personne ne le

placé au-dessus d'un grand portrait qui

d'honneur,

valut à son auteur la médaille partie se perdait dans le

vélum

le vit

enfin en 1883,

il

en diverses

une

et l'autre servait

de tache sobre au coloriste Duran voyagea, on

«

(*). »

villes

Le tableau de France

;

obtenait une médaille de vermeil à

l'Exposition d'Avignon, et

il

était

acheté huit cents

(*) Il semble que quelqu'un ait su voir ce tableau invisible. M. Roger Marx m'écrit « Il y a des œuvres exquises dès le début, et la Jeune mère du Salon de 1879, qui a fait de moi un Carriériste :

impénitent, contient en

admirées.

»

germe

toutes les

«

maternités

»

plus tard


EUGENE CARRIERE

19

musée de cette ville aimable, possède quelques œuvres de premier ordre. francs pour le

Si

était

Carrière ne perdait

soutenu par

c'est qu'il

par l'espèce d'ivresse,

joie,

la

dans

qu'il trouvait

pas courage,

qui

le travail

même,

c'est aussi qu'il

du témoidu progrès

se sentait grandir, que, sans avoir besoin

gnage des autres,

avait conscience

il

continu qui l'approchait lentement lequel, dès l'enfance, avant

compte,

il

Peu à peu

avait tendu.

ce qu'il voulait,

même il

du but vers

de s'en rendre arrivait à savoir

découvrait sa langue dans sa

il

pensée, dans son besoin de l'exprimer sans altération ni surcharge.

En

un chien

d'enfant avec

1884, :

il

exposait un Portrait

son tableau

était

méritait enfin une mention honorable.

vu

et lui

C'était bien

peu, mais son long effort silencieux l'avait préparé

aux œuvres décisives qui et,

résistances,

imposer son

public.

Il

me

allaient forcer l'attention

en dépit des étonnements

des artistes

suffit

nom

désormais

des

et

à l'indifférence d'insister

sur

du

mes

souvenirs, pour évoquer l'image de ces œuvres à la

place

même

quand, dans

je les vis

la foule

pour

la

première

fois,

des choses mortes, elles m'ar-

rêtèrent surpris d'abord,

non sans inquiétude, puis

convaincu, pénétré de l'émotion qui les avait créées.

En

1885,

contesté

VEnfant malade, applaudi par par les autres, remarqué,

tous, obtenait

une médaiUe

et,

les uns,

critiqué

non sans

par

difficulté


EUGENE CARRIERE

20

par l'État pour

d'ailleurs, était acquis

la

somme

de

dix-huit cents francs. Carrière était presque joyeux,

mois sur

avait travaillé de longs

il

toile,

mais

tude,

il

sortait enfin

il

avait

eu du succès,

tâches ingrates qui

lui

cruellement

créancier

du

grande

cette

silence et de la soli-

se voyait libéré des

il

volaient son

me

idiot

temps

prit

;

(c

un

somme

la

presque tout entière en paiement d'une dette que j'avais follement contractée

rechargea

Il

et,

comme

l'ajuste

».

bon ouvrier, qui d'un coup de reins au mieux de l'effort, il se remit en marche. le

L'année suivante, jeune

pour un autre

fardeau sur sa vigoureuse épaule,

le

homme,

surait les

donnait, avec un portrait de

il

Premier

le

voile,

vaste toile qui ras-

amis inconnus qu'avait

VEnfani malade,

au peintre

faits

et qui justifiait le style

de

l'artiste

de manière irrécusable, par un chef-d'œuvre. Mais,

pour mener à bien

cette entreprise,

il

avait fallu

du courage encore, des privations pour

tous,

la

patience héroïque de la mère, dont le visage grave et

charmant dans

toile

tableau

le

longues attentes,

la

même,

lassitude

disait assez les

commencée.

Cette

de grande dimension ne pouvait être achetée

que par

l'État

:

un

tel effort valait

bien un encou-

ragement. Ce chef-d'œuvre, après de longues instances, fut

acquis

douze cents francs,

pour

la touclier,

on

pour et lui

la

quand

modeste l'artiste

somme

de

se présenta

apprit ({u'elle lui étaitallouée


EUGENE CARRIERE sur

des secours

la caisse

21

la recevrait

et qu'il

par

fragments de cent cinquante francs tous les trois mois,

a

toucha ces acomptes avec de pauvres

II

venaient chercher leur

vieilles qui

Carrière d'être

homme,

pas

n'était

confondu avec

connaît,

les

il

aime

de leur être

il

a vécu de

les riches,

il

»

rougir

à

d'ailleurs,

pauvres gens

les

;

pour avoir depuis vu

aumône de l'État. il

les

leur vie,

et,

:

n'est pas tenté

infidèle.

Cependant

les faits, qu'avait

posés son énergique

vouloir, amenaient leurs conséquences. Parce qu'il

ne

les avait

pas subies, les

raient à ses desseins

Roger Marx, qui pour

lui

défendu

il

était

plus avancé qu'il ne le

Des amis venaient à ce

croyait lui-même.

1879, qui le

;

des choses conspi-

lois

premier avait cherché

l'artiste

dire sa sympathie et l'avait ;

Maurice Hamel,

l'appui de

;

pour sentir

le

le

Jean Dolent,

Galimard, l'amateur éclairé

apporte à

:

rapport de

la critique,

;

inconnu

publiquement

lettré délicat,

le

son talent ajoutait

amitié fraternelle

solitaire

avait su voir la Jeune mère de

n.

qui à

reconfort d'une

l'amoureux d'art

»

;

Gustave Geffroy, qui,

l'art

à la vie nationale,

avec sa rhétorique ardente,

une sorte de passion politique

;

le

peintre Benjamin

Constant qui, dès l'apparition de VEnfant malade, sans souci des rivalités servîtes, avait pris en main la

cause du nouveau venu avec un enthousiasme,

qui ne témoignait pas

moins sa générosité que son


EUGENE CARRIERE

22

En

intelligence artistique. le

beau

très

consacrait ses

Devillez,

({ui

succès antérieurs et

lui valait

une

seconde médaille. lui restait

Carrière exposait

1887,

du sculpteur

portrait

avait

Il

convaincu les

artistes,

il

à persuader le public.

Je n'ai pas oublié notre première rencontre. Sur

beaucoup par surprise,

l'instance d'un ami,

accepté de faire un Salon. Cormon,

me

veux des Fils de Caïn, il

a une

très

dit

ce

:

tombait, un de ces jours d'avril,

ressemble

à

tant

qu'il est difficile

une

cour, la

aînée gentiment m'indiqua

fille

l'atelier,

cité touchante,

après

;

Hélène, les enfants jouaient

la

mais sa femme

absent,

conduisant à

printemps

le

la lumière apaisée.

tout petit pavillon qu'habitait était

Le jour déjà

donnée aux hommes,

fête

une sérénité descendait dans

la

^>

de croire à l'indifférence des choses

J'arrivai à l'impasse

dans

peintre ner-

le

Allez chez Carrière,

étude de nu.

belle

j'avais

ine

me montra

le

famille.

reçut,

le

Carrière et

me

avec une simpli-

tableau déjà dans son cadre,

les études, les esquisses

de son mari. Je venais de

parcourir bien des ateliers, ceux de Montparnasse,

ceux de Neuilly, de l'avenue de

coup

j'avais trouvé la

Villiers

comédie de

luxe fripé de bazar oriental

;

;

dans beau-

la richesse,

nulle part je

un

n'avais

éprouvé l'émotion que j'éprouvais dans cet intérieur

où rien ne mentait. Je comprenais mieux Carrière, le rapport

du personnage à son 1

l'art

de

milieu, ce


EUGENE CARRIERE que

ambiantes gardent de l'àme des

choses

les

23

homnnes. Cette belle femme, que sacrait d'une maternité prochaine, disait résignation,

droiture,

la

la

vertus des simples et des forts.

les

Tout en retournant

les toiles,

nous nous étions mis

à causer; à les regarder ensemble,

confiance

s'était établie

son mari

était

un

entre nous

artiste,

que

une sorte de

je lui disais

;

reconnu un

serait

il

que

un grand danger

c'est

pour un peintre, qu'à coup sur jour,

noblesse

la

mais que nul ne pouvait prédire ce jour,

qu'il

faudrait peut-être longtemps l'attendre. Je n'avais

pas vu Carrière,

ma

formulée, était

gagnée

de

bonne nouvelle. En

la

;

A

désormais son ami.

j'étais

prédiction

se réahsait

sans l'espérer j'avais été

peine

la bataille

;

le

messager

1889, Carrière était proposé

pour une médaille d'honneur

et

décoré

;

expo-

les

du Champ-de-Mars, en isolant ses œuvres, faisaient mieux comprendre les artistes, les

sitions les

;

ceux qui

écrivains,

vivent par

comme un le public,

la

pensée

des leurs

sait

toucher par ce

où malgré tout

qui,

il

»

ceux qui

le

saluaient

elle,

;

d'humanité dans cet après

«

me

Je

une vie

en contact avec les

J'étais trop

lui

vision, se lais-

se reconnaissait.

ma toute jeunesse,

de moi.

pas,

amateurs venaient à

lui-même,

et silencieuse,

dans

pour

et

les

qu'il sentait

trouvai alors, dit-il

loin

;

n'arrivent

un peu déconcerté par sa

art

obscure

«

si

hommes

m'avaient paru à jamais

meurtri par

la

vie,

déjà


EUGENE CARRIÈRE

24

trop avancé en âge et trop spécialement façonné

me

par l'isolement, pour pouvoir

nouveau milieu, mais voir exprimer de la

j'eus

la

fondre dans ce

dont je n'aurais pas osé l'espérer.

Il

s'indigne

que

devant son génie

la société

et qui

maladive

sensibilité

épreuve forte-

sans colère, sans haine.

intact,

n'avait jamais été le petit

(jui

démocrate à

prend

les

Werther

exigences de sa

les

pour un droit aux caresses

pas un instant l'idée ne

;

la

ne s'incline pas d'abord

des sensations délicates que donnent richesse

hommes

»

Carrière sortait de cette longue

ment trempé, mais

me

de

satisfaction

sympathie par des

gentilshommes de

la palette

luxe et la

le

de jouer

lui vint il

;

resta ce qu'il

avait été, l'ouvrier robuste dont l'atelier

ne

dit

que

travail, l'homme que nous voudrions appeler l'homme de demain, l'homme de cœur sain et de le

ferme raison, qui

sait

est la vraie noblesse et

qui s'y tient. Les épaules larges. Carrière porte sur

un cou

comme à

demi

lantes,

fort

une

tête

puissante

:

le

front

haut,

martelé, que dominent et parfois recouvrent les le

cheveux rebelles,

les

pommettes

menton ferme modèlent

l'ossature affleure,

comme

le

sail-

visage,

le

roc perce

la

terre

;

enfoncés sous l'arcade sourcillière en rehef, abrités par

la

paupière un peu lourde, les yeux petits,

volontiers baissés, ont,

quand

ils

se

fixent,

un

regard d'une insoutenable ardeur, une flamme qui


EUGENE CARRIERE semble entrer en tournant dans pénétrer

;

impatiences

et les

exprime d'abord

dédains de

machine

a la construc-

pour battre

jours passés, malgré tout, la voile à demi tion la transfigure

dont

;

mais rien ne vaut

l'éclairé le sourire

Quand

de

l'obs-

mélancolie des

la

;

Cette tête

l'artiste.

elle

;

faite

jusqu'à ce qu'il tombe

tacle,

les

et

la lèvre

une moue, où se trahissent

la résolution

tion solide d'une

êtres

les

moustaches courtes,

sous les

inférieure avance en les

25

;

l'atten-

lumière

la

l'amitié.

Carrière parle de sa vie passée, c'est sans

homme qui applique son entendement aux clioses mêmes qui le touchent aussi bien, comme tous ceux qui sentent qu'ils ont une amertume, en

;

œuvre

à faire et qui ne sera jamais achevée,

plus occupé de l'avenir que du passé

un instant sur

la route,

du souvenir des

pour

mèneront plus

loin.

Cédant aux

sollicitations d'un ami,

forces qui le

tourne vers sa vie passée, la

s'arrête

s'il

c'est

d'autrefois,

les

cher ami,

est

ce n'est pas pour se fatiguer

fatigues

reprendre

et se

;

il

route parcourue

;

il

s'il

se recueille

conclut

comme

je

:

a

Voilà,

ne voya-

geais pas seul, elle a été dure, mais elle a été ce qu'elle devait être.

Ayant hbrement

résigné au départ, les accidents

choisi, j'étais

du chemin ne m'ont

pas découragé. Les ennuis matériels ne m'ont guère laissé

de

tristes

social blessé

ne

souvenirs, et

me

mon amour-propre

tourmente pas non plus

;

seules


EUGÈNE CARRIERE

26

douleurs sont restées vives, parce qu'elles

les vraies

sont les seules qui aient pu m'atteindre... Ayant

mis

mon

but très loin, je savais

qu'il

me

faudrait

beaucoup de temps pour y parvenir, je trouve tout cela très logique vie

)).

Comment ne

pas associer à cette

qui en fut vraiment la compagne,

celle

la rendit

par sa patience, par son labeur obscur, possible, y mit la grâce et la dignité ? a.

Ma femme

a été belle

et actif, elle fut

ajoute

Il

dévouement

de

qui,

:

passif

un élément de force naturel qui

soutient sans qu'on le sache, correspondant à notre

équilibre

Ce

)).

qui, plus

et lui

donna de

que tout la force

le reste,

pour

sa passion désintéressée pour

soutint Carrière

aller plus loin, ce fut l'art,

chose de supérieur à lui-même,

la

sa

j'ose dire, qu'il

si

l'œuvre impersonnelle qui

de l'humanité,

et sa

travaillait reliait

pensée à

la

à quelque

conscience

obéissait à sa destinée véritable, le

gieux,

foi

son

sentiment

qu'il reli-

à sa façon

à

effort à l'effort

pensée universelle.

L'égoïste pressé de jouir, l'ambitieux qui ne veut <iue la réputation et les

avantages qu'elle apporte,

songe plus à plaire aux autres qu'à se

se diminue pour se mettre à la

lui-même,

il

de tous,

s'allège

il

satisfaire

Pour Carrière,

les

pour se

faire porter

par

mesure le flot.

événements sont des accidents

extérieurs qui n'ont de sens que par leur rapport

au progrès de son

art et

de sa pensée. Son dernier


EUGÈNE CARRIERE mot, quand

revient sur

de succès

parler

comme

regarde ((.

il

mon

esprit se

fit

au milieu de

qui se complétaient

lois

me

je

refusai à

œuvre une chose dont je

entre

mon

donner dans

je n'étais

pas très sûr, je

répugnai à tromper par l'apparence

que

qu'il

une chose à une autre, amenant

découverte de

Toujours

mais de ce

d'argent,

ni

tout cela, ajoutant

elles.

passé, n'est pas pour

les seules acquisitions véritables.

L'évolution de

la

le

27

d'une

force

ne possédais pas véritablement. Je compris

un moment

même

chose,

lorsque accusé de faire toujours

que changer

que mieux comprendre, ce

la

signifiait grandir, et

serait aussi

comprendre

plus de choses. Je trouvai la correspondance des

formes du paysage avec

la figure,

cipe des formes, j'en eus sentis

ma

conception

du

prin-

un grand bonheur.

s'élargir.

étranger, et en voyant

l'unité

Je

Rien ne m'était plus

une chose, une forme,

je

sentais les autres s'y fondre en la complétant. Cette

idée

me

me fit me

je

me

dirigea et

dirige de plus en plus, elle

voir que tout avait été juste dans sentis plus

ma

vie, et

de forces. Je compris que,

si le

public n'avait pas été prêt, c'est que je ne l'étais

pas non plus, et que les choses fortes et simples veulent être dites fortement, que c'est long, très long, jamais abouti est

une

tard.

;

je sais

maintenant que

la vie

suite d'efforts continués par d'autres plus

Cette

idée

m'encourage, puisqu'elle

laisse 5


EUGENE CARRIERE

28

tout en travail et en action, et que seule la pensée d'arriver à

une

fin est triste. »

homme

arrivé,

dans

bouche des sots

la

ce qu'elle

fut

il

;

ignore

le ;

Carrière n'est pas un

sens que prend ce mot sa vie continuera d'être

son unité intérieure permet d'en

présager l'avenir par

le

passé.


EUGENE CARRIÈRE

29

III

Quand on

parle d'Eugène Carrière,

dis-

faut

il

siper d'abord les malentendus.

De braves gens qu'il fait

les

déclarent d'un ton de supériorité

ne voit point

qu'il

les

comme

choses

formes d'un brouillard qui

les afflige. Je n'ai

dames

sacré de Puvis de Ghavannes

;

pas

qu'égayait le Bois

elles l'accusaient

méchamment

ne pas dessiner, de casser

Il

les peint et

exprès de les contrarier, en enveloppant

oublié les rires des belles

et les

il

de

les bras

jambes des muses.

en est de

la

dessin de Puvis

:

couleur de Carrière l'originahté

comme du

du langage d'un

artiste

se justifie par ce qu'il y sait faire tenir de senti-

ment

et

de pensée.

On

insistera,

on dira que

la

peinture étant un art d'imitation, le peintre est tenu

de rendre l'illusion, et

l'apparence

que

le

des choses, d'en

donner

premier venu est autorisé à se

prononcer au moins sur

le

de savoir

fait

s'il

a

réussi dans cette partie de sa tâche. Il

faut s'entendre. Je reconnais

l'imitation est celle des maîtres

que

de

la

la

théorie de

Renaissance


EUGENE CARIUERE

30

Léonard de Vinci ne se lasse pas d'ad-

italienne.

mirer Fart subtil qui permet à l'homme de rendre le relief

plane

de

la

il

;

dimensions sur une surface

les trois

et

se vante d'avoir trompé le chien et le chat

maison par l'image de leur maître

laient caresser

exalte le peintre

il

;

qu'ils rival

(c

nature, seigneur et maître de l'apparence

de réaliser à son gré tous sa

fantaisie.

même

découvre

le

que

que crée

moment

Vinci écrit

l'art

Si

la

la

la

perspective et du clair-

de procédés nouveaux qui

même

le

peinture

l'exacte reproduction

avec

de

il

perfection.

le

Sans

peinture soit imitation, nous ne pou-

vons plus attacher vaincue.

Traité sur la peinture,

le

un degré inconnu de la

capable

les spectacles

obscur, enrichit

nier

la

Mais n'oublions pas qu'au

les secrets

portent à

»,

voude

à

prix

n'était rien

des choses,

elle

difficulté

la

de plus que disparaîtrait

photographie des couleurs, avec

le

procédé

mécanique qui va permettre de rendre l'image des choses dans sa forme et dans sa coloration. Il y a de

la

beauté dans une gravure, dans un dessin de

maître,

il

a pas dans

n'y en

manœuvre

adroit.

subordonne

l'imitation

Léonard

le

de

trompe-l'œil d'un Vinci lui-même

au sentiment,

il

lui

donne

pour objet dernier l'àme, ce qui peut apparaître de l'esprit

dans un^corps,

— pour nous,

la

la

pittura

e

cosa mentale,

peinture est avant tout un langage.

Certes ce langage reste

lié

aux

lois

générales de

la


EUGÈNE CARRIÈRE vision,

31

aux lignes, au modelé, aux jeux de

la

lumière

de l'ombre, à l'harmonie des couleurs

et

dans ces éléments multiples

l'artiste

mais

;

peut faire un

choix, s'attacher de préférence à ceux qui, accordés

permettent l'expression

à son émotion, lui en

la

plus directe et la plus contagieuse.

Le langage pittoresque de chose d'abstrait, de la

couleur dans

la

à le prendre d'un

partial,

Carrière a quelque

en ce sens

diversité de ses

nuances

essentielles de la vision

par

respect des lois

le

humaine, par

de l'élément primordial que

les

que

lumière

veux dire

l'œil l'objet

la

:

l'intelligence

couleurs ne font et ses

dégra-

gamme

des valeurs qui construit

dans son

relief et qui a elle aussi

dations, toute cette

pour

mais,

;

autre biais, nul n'est plus con-

cret, plus strictement réel

varier, je

qu'il néglige

ses accords délicats et charmants. L'œil de Carrière est

vraiment

ici

d'une subtilité merveilleuse

tous les maîtres,

de ses

lois.

il

domine

la

;

comme

nature par l'intuition

Ceux qui s'imaginent

langage original, qui mêle

de

la

qu'il

a choisi ce

tendresse et

la gravité,

pour ne pas ressembler aux autres,

parti pris,

pour étonner

dérouter les bourgeois, montrent

et

une singulière naïveté jointe à une rare ignorance de ce qu'est

de

le travail

reur du procédé,

comme

songe, pour en savoir n'est pas

l'art

pour

l'artiste. il

le

l'art

Carrière a l'hor-

a l'horreur de tout

néant et

men-

la vanité. «

qui est à craindre,

Ce

me


EUGÈNE CARRIÈRE

32

ud jour,

disait-il

c'est

Détaché du sentiment qui rien

:

métier pour

le

procédé n'est

le crée, le

les plagiaires sont les voleurs volés. L'art est

quelque chose d'intérieur, de personnel vaille

métier.

le

pour donner

dépend de

le

l'œil, l'œil

meilleur de

dépend de

:

on

tra-

La vision

soi.

l'esprit.

Un

pro-

cédé est stérile, une vision est féconde. Sans doute de

la vision

l'artiste

a une unité qui tient à son

même

tempérament, mais par cela de

la

qu'elle

dépend

nature de l'homme, qu'elle en est l'expres-

sion sincère, elle n'est pas arrêtée, figée, elle obéit

aux progrès de

la vie, elle

de chaque œuvre

fait

une occasion d'approfondir sa propre pensée en en découvrant quelque aspect nouveau. » Là est le vrai. Carrière n'a

son inteUigence

qui, liée à

comme

originale

d'abord tudes,

d'inertie,

son

et à

il

a une vision

sa sensibilité, est

nous surprend

esprit. Si elle

exerce quelque violence sur nos habi-

et

au

pas un procédé,

de nous y refuser par une sorte acceptons-la, nous ne tarderons pas à lieu

découvrir ce qu'elle garde d'universel et d'humain

dans ce qu'elle a d'individuel

et

de

différent, et,

mieux en mieux, nous comprendrons ce de

vrai,

de

réel,

de

littéral

même,

de

qu'elle a

tout en nous

sentant de plus en plus pénétrés par sa beauté sensible et par sa puissance expressive. ((

L'œil

dépend de

l'esprit. »

Eugène Carrière

est

avant tout un observateur attentif et réfléchi. Tous


EUGÈNE CARRIERE ceux qui

mules

abordé ont été frappés de ses for-

l'ont

de ses mots hardis, des

vives, originales,

images simples rise

33

et fortes,

par lesquelles

caracté-

il

un homme, résume une théorie, impose ses

jugements au souvenir. Sa conversation d'abord a quelque chose d'hésitant, d'embarrassé, les interrogations, les

pour

mais

réfléchir,

coup

et tout à

«

n'est-ce pas ?

», il

en une formule lumi-

neuse qui sortant du fond obscur tout à

rayonne

et l'éclairé.

suggestifs,

réflexion, son sens tion.

du

réel,

la

profondeur de sa

son esprit d'observa-

la

pensée d'abord

modèle en une forme nette sous une

clarté vive.

n'entre en possession de son idée que la voit,

elle

que quand

prend corps.

la franchise

est

comme

peu à peu se précise, se distingue, se

diffuse qui

Il

en

Le brouillard intelhgent de sa peinture devient

dans sa conversation

il

la fois

abonde en mots imprévus,

Il

marque, avec

se

s'arrête

intérieur se poursuit

le travail

l'idée jaillit

multiplie

il

et la

une pensée

elle est

quand

devenue l'image où

Sa pensée, où

se

retrouvent

spontanéité de l'esprit populaire

artiste

;

elle

ne décompose pas

idées,

elle

ne va pas de l'une à

ment,

elle

est

tique,

une divination,

les

l'autre logique-

l'intuition

synthé-

les observations antérieures et les pres-

sentiments obscurs s'organisent et vivent. Il

est bien

difflcile

de détacher ces mots des

entretiens qui les amènent, de les isoler de l'accent.


EUGÈNE CARRIÈRE

34

du

du geste

sourire,

et

de donner à qui

les

lit

ainsi

épingles l'espèce de secousse intellectuelle qui se

communique

parle de l'art japonais, de son influence

nisme, c'est très intéressant, au Japon

hommes

ce sont des

On

à qui en reçoit le choc soudain.

japo-

« le

:

après tout

;

qui se sont arrêtés, j'aime les

enfants, mais pas les vieux enfants, et puis je m'in-

mon

téresse plus à l'histoire de celle

du grand Turc. Changer

homme

un

nier

il

se

(^c

II

fantassin

fait

que

».

ou tard

tôt

Il

remarque qu'en

toujours à faire ce il

art

pourquoi

il

trahit sa vraie nature

a couru après une loge de concierge

y a des gens

qui

Ueutenant est tué, cantiniers.

gens

le

commandent lendemain

compare

Il

y>

:

les

que

parce

ils

dilettante

»

;

«

:

il

redeviennent

naturahstes

au métier fourneau,

:

ce

dit

a

à des

d'un démocrate sceptique et

dans son journal

parents pauvres

»

c'est

après

;

il

sort

avec ses

d'un peintre qui réduit

un

cuisinier,

tout,

c'est

la figure

l'art

son autel est un aussi

carré

s'égaie « de notre jeunesse littéraire qui porte

vie

;

le

qui jetteraient de l'engrais et se croiraient

jardiniers

la

;

y a plus d'un ministre qui toute sa vie, sans

le savoir, il

n'est pas progresser

ne progresse pas parce que de carabi-

l'homme en vient était fait,

grand-père qu'à

d'un petit débitant dont

le

«.

Il

dans

com-

merce ne va pas », de l'instantanéité du plagiat « qui fait que les découvertes n'ont pas l'air d'être


EUGENE CARRIERE

comme monôme (*) faites

autrefois par un

35

mais par un

seul,

y>.

Carrière n'est pas seulement un observateur, qui excelle à surprendre un ridicule, à saisir le trait

caractéristique d'un être original,

;

un

en qui survit dans

métaphorique de l'homme

esprit singulièrement

la réflexion

que nul n'applique

n'est individuel, en ce sens

lui

Tinvention

Nul plus que

primitif.

plus naïvement, plus directement sa pensée à la vie,

mais nul aussi n'est plus convaincu

qu'il y a dans choses une logique profonde à laquelle on ne

les

impunément.

se soustrait pas

cherche

qu'il

l'inédit,

qu'il

Ceux qui croient

peint autrement qu'il

ne voit, se trompent lourdement. d'être

«.

différent

Son

>>.

n'a pas la

Il

originalité

n'est

manie

que sa

volonté de ne rien exprimer qui n'ait passé par

son esprit et par son cœur. En étant lui-même,

homme

a l'ambition d'être

il

de répéter

mêmes

les

prétend

il

dans I*)

que

les

raisons

commune, en

vérité et

(c

la

la

ne se lasse pas

choses sont toujours belles par Il

^^.

croit

à l'universel, à

langue qui est

la sienne.

Non

qu'il se

pique

Edmond

de Con-

(jLielques-uns de ces mots ont été relevés par ;

c'est à

Concourt

sant les grossièretés du naturalisme

cisme

:

«

é....

au.ic

un jour, oppomièvreries du néo-mysti-

qu'il disait

Est-ce que vous n'avez pas en vous

sespérance dans ce

dans

la

une

laquelle les esprits s'unissent,

découvrir à sa manière, l'exprimer

court dans son journal

un

il

;

le

sentiment de

monde de maintenant dont

main,

et les

autres un cierge

'

»

les

la

dé-

uns portent


36

EUGENE CARRIERE

de philosophie,

qu'il disserte

se flatte

qu'il il

de peindre

Winckelmann

ignore

de regarder,

lieu

monde des

le

ne

et

au

fait

idées

à Platon. Son rationalisme n'a rien d'abstrait,

quelque chose de naïf servation

sous nos yeux

il

a

à l'ob-

lié

l'intelligence et l'interpré-

du monde. Pour com-

spectacle

le

la réalité,

il

ne s'en éloigne pas,

Son

profondément.

plus

intimement

images dont se compose incessamment

tation des

prendre

;

que

n'est

il

;

est

il

;

pas dire de sottises

art

à

l'unit

il

y entre nature

la

;

à force d'épier la vie, ce qu'en révèle un geste, une attitude,

un mouvement,

langage

le

des formes,

jen

il

comme

vient les

à

entendre

vieux saints

légendaires entendaient le langage des bêtes lui,

pour

rien n'est silencieux, tout est signe et symbole,

en peintre,

c'est

c'est

pensée vivante

la

;

avec les yeux

qu'il

voit

qu'à

des

degrés

divers

me

disait

un jour

E. Carrière,

tout

manifeste. (.(

les les

Dans

la

nature,

formes sont sympathiques, d'une expressions d'une

s'affirme et se précise.

même Il

même

famille,

idée qui peu à peu

y a quelque temps, je

revenais de Saint-Maur, je regardais par les vitres courir

le

paysage,

et j'admirais

collines, à laquelle se mariait la

lages

;

je

me

une femme à et

l'ondulation des

courbe des

retourne, et en face de la

bouche d'un dessin

dans cette bouche

comme

feuil-

moi

je vois

fier

et pur,

répété clairement tout


EUGÈNE CARRIÈRE

37

ce que je venais de voir et d'admirer.

y a ainsi

Il

une hiérarchie des formes qui s'expliquent l'autre

;

que tout

dans

la

nature, rien n'est dépaysé, parce

est parent, la colline et la plaine, l'arbre,

l'homme paysage apparaisse une terre

la

l'une

et

que dans un beau

aussi,

;

belle

femme, vous ne voyez

plus qu'elle, mais en elle vous revoyez tout Carrière se plaît à une sorte qu'il illustre

le reste. »

de transformisme,

de dessins étranges, où des formes de

du fruit, par degrés on s'élève à celle de cet la femme. Ici encore sa pensée se fait image retrouve qu'il découvre, homme, qui ne sait que ce à sa façon Darwin qu'il ignore. Mais, par ces symboles, qui ne doivent pas l'égarer, loin de ramener la fleur,

;

la

vie

au mécanisme

sérieuse

exprime

monies cachées qui

et

au hasard, sa fantaisie

sentiment profond des har-

le

lui

révèlent l'universelle pré-

sence d'un esprit également épris de logique et de beauté.

par

la

Spiritualisme de peintre et de poète, qui

perpétuelle attention aux signes expressifs

du sentiment, par aux formes

l'accord de ses propres émotions

par

visibles,

découvre de plus en plus lumière et de l'ombre, à la face de vie, la

la le

et qui

pratique de son art,

sens des lignes, de

de

l'homme, suivant

reconnaît,

la

de

la terre

chaîne d'or de la

sous les mille métamorphoses qui

déguisent aux yeux distraits,

obéissant aux

la face

la

mêmes

lois.

la

même

pensée


EUGENE CARRIÈRE

38

comme

La sensibilité de Carrière, est, si j'ose dire, réaliste

dans ce qui

le

son intelligence,

trouve son aliment

elle

;

touche directement,

elle se

d'abord aux êtres qui l'entourent, à ceux vivre et souffrir duelle,

;

par

enfermée dans

qu'il voit

semble tout

elle

prend indivi-

cercle étroit de la famille

le

;

mais, en s'approfondissant, elle s'étend, s'universalise,

devient

la

sympathie à laquelle toute vie

révèle son mystère. Carrière n'a pas le goût de la

ignore la mythologie

fiction,

il

Faust,

redemander avec violence

la

forme divine d'Hélène

;

besoin du recul du passé, qu'il a

et le elle

sous les yeux, à

témoin

;

(.<.

aux mères

son imagination n'a pas

aux objets

elle s'attache la vie

dont

il

est l'auteur

loin

du

réel, elle est la réflexion

dans laquelle son émotion se continue

et tout

en

d'intellectuel.

Il

ne fausse pas

le

prend quelque chose

répugne au sentimentalisme

;

il

sentiment en exagérant son expression la

poésie par

à son

compte

la

vérité.

la belle

connaît, plus on aime.

soi,

le

»

sang-froid de

et les réfléchit

Volontiers

il

parole du Vinci

pas de lui-même, elles

de

»

sa rêverie a quelque chose de concret,

ne l'emporte pas

s'exaltant

connue

n'ira pas,

il

;

il

;

atteint

reprendrait :

«.

Plus on

Ses émotions ne l'aliènent lui laissent

la

l'homme qui

possession les

domine

sans les amoindrir. Lié à ses senti-

ments,

fait

art est

une sorte de méditation de

d'observation discrète et profonde, son la vie.

Les ana-


EUGENE CARRIERE logies

39

formes ne

croit saisir entre toutes les

({Li'il

sont que les divinations d'une sympathie de plus

en plus clairvoyante qui peu à peu de ceux l'entourent l'unit à

tout

ce

qui

C'est

est.

([ui

pour

avoir observé le langage visible des corps, pour en

avoir pénétré le symbolisme

caché,

qu'il

devine

geste d'un sentiment dans l'ondulation de la col-

le

line,

dans

de

Heur.

la

forme de

la

En quelques

l'arbre,

dans

le

frisson

lignes obscures à force de concision,

mais d'une véritable beauté. Carrière a résumé tout ce que je ne fais que développer et qu'éclaircir ((

de

Dans la

sur

la

le

court espace qui sépare

route à parcourir, et à peine

Dans ce temps

nos douleurs tiennent

;

;

si

est

a-t-il

apparaît.

hmité, nous avons nos joies,

et

elles

nous apparles

ne ressemblent qu'à nous-mêmes...

Je vois les autres

hommes en moi et je me me passionne leur est cher.

L'amour des formes extérieures de le

pris cons-

menace fmale

que du moins

retrouve en eux, ce qui ((

naissance

la

que nos manifestations en soient

témoignages *.c

:

mort, l'homme peut à peine faire son choix

cience de lui-même que la «

ici{*)

moyen de compréhension que

la la

nature

nature

m'impose. «.

(*) ;'t

Je ne sais pas

si la réalité

se soustrait à l'esprit,

Catalogue de l'exposition des œuvres d'Eugène Carrière,

l'Art

nouveau

(avril

1896k

faite


EUGENE CARRIERE

40

un geste étant une volonté

visible

!

Je les ai toujours

sentis unis. (c

L'émouvante surprise de

qui s'ouvrent

la

nature aux yeux

sous l'enapire d'une pensée enfin

voyante, l'instant et

le

passé confondus dans nos

souvenirs et notre présence... tout cela est et

mon «

ma

joie

inquiétude.

mon

Sa mystérieuse logique s'impose à

esprit,

une sensation résume tant de forces concentrées. «

Les formes qui ne sont pas par elles-mêmes

mais par leurs multiples rapports, lointain recul,

tout est et

mon

nous

rejoint par de subtils passages

une confidence qui répond travail est

En ce temps de et surajouté,

dans un

tout,

de

foi et

:

mes aveux,

à

d'admiration.

dispersion, de talent

»

mécanique

où chacun plus ou moins bien joue

plusieurs personnages, cette vie fortement unifiée

a quelque chose de saisissant. Carrière est un bon

ouvrier qui aime son œuvre, qui

avec respect, la

qui

la fait

met en

se

peinture est sa manière d'être

de penser

son métier,

et il

d'agir

;

elle

avec gravité, tout

homme, de

entier

;

sentir,

son art n'est pas seulement

est sa science et sa morale, sa philo-

sophie et sa rehgion

;

il

est

le

principe de son

accord avec lui-même, de sa sympathie avec les autres

hommes, de

sa

communion avec

universel, dont la toute présence le la

valeur de son propre

effort.

A

fesprit

rassure sur

ceux qui seraient


EUGENE CARRIERE

41

tentés de juger ce point de vue bien étroit, bien

naïve cette prétention de trouver dans les

un

art tou>

éléments d'une vie pleinement humaine,

affirmer que cette illusion,

si elle

n'est plus

je puis

de notre

temps, a été celle des Léonard de Vinci, des Michel-

Anse

et

des Albert Durer.


EUGENE CARRIÈRE

42

IV

Le métier de Carrière présent à ce qu'il

de ce

fait,

n'est

même

esprit

est Texpression sensible

il

qu'il a d'original et

que son

de passionné, de logique

et d'universel.

Quelques critiques, pressés de juger

que Carrière ne dessine

leur compétence, affirment

pas

:

il

et d'établir

enfume ses tableaux de

parti pris,

il

noie

ses figures dans un brouillard flottant, où les lignes oscillent,

s'irradient,

les

formes se dissipent

et s'évanouissent. Voilà qui est bientôt dit

il

:

est

plus facile de se débarrasser d'un artiste que de

comprendre.

Il

sur ce qu'est

le dessin.

le

importe avant tout de s'entendre

Le dessin

est chose

moins

simple que beaucoup d'honnêtes gens ne l'imaginent. Volontiers on le définit par qui

contour, par

suggère l'image d'un corps en

sa silhouette.

aux

le

lois

de

Que fait

ligne

reproduisant

ce dessin existe, qu'il réponde

la vision,

du peintre ne

la

il

n'y a pas à le nier

qu'imiter,

:

que suivre le

la main mouve-

ment de l'œil qui, pour s'emparer de la forme, la résume dans les lignes qui la limitent. Mais, en


EUGENE CARRIERE

43

art,

de ce dessin ce qui nous intéresse, ce n'est

pas

la calligraphie déliée,

encore un instrument indifférent

dans l'ondulation de

sement de

c'est

bonnet

frémis-

pemtre qui silhouette un

Tel

l'esprit.

la ligne le

en commençant par

grenadier,

banal.

passif,

et

justesse ce que l'artiste sait mettre d'expres-

la

sion, c'est

le

l'exac-

mathématique que donnerait bien mieux

titude

dans

même

ce n'est pas

ou par

botte

la

à poil,

ne sera jamais qu'un illustrateur

Que ceux

qui parlent de la ligne prennent

la

peine d'observer avec quelle délicatesse Raphaël

la

balance, l'équilibre, la plie aux exigences de son

génie

;

avec quelle violence Michel-Ange l'allonge,

tourmente

la

de l'inquiétude des âmes

et l'agite

héroïques. Le contour n'est pas

une

entité

sacro-sainte

;

est

il

de

lois

la

vision

;

dessin en soi,

un procédé empi-

mesure où

rique, qui se justifie dans la

aux

le

il

répond

sa légitimité, sa valeur artis-

tique reconnue, j'ajoute qu'il a quelque chose d'abstrait

:

il

est

un résumé, un schéma,

à la vision intégrale un de ses la surface, à l'objet Il

donné sa

est des artistes qui,

au

il

substitue

moments, au volume

limite.

lieu

de traduire

la

forme

par une ligne qui n'en est que l'indication

résumé, l'abordent directement qu'elle

leur

apparaît.

et la

rendent

et

le

telle

Leur dessin plus concret,

plus rapproché de la vision réelle, plus complexe, est

une construction de

l'objet,

un

effort

pour

l'éta-


EUGENE CARRIERE

44 blir

d'ensemble, en marquant les

et les reliefs.

Ils

du corps

creux

qui n'est,

trait

y arrivent comme modèlent ils ne défi-

à l'isoler, qu'une abstraction, à la limite

saillies, les

ne partent pas du

qu'ils

ils

;

nissent pas avec plus ou moins de justesse une certaine quantité d'espace pour le remplir de son

vont du centre à

contenu,

ils

dégagent

et précisent la

les lumières,

en

ports. Les élèves

forme par

les

ombres

de David croyaient imiter

tuaire antique par leurs silhouettes linéaires,

cédaient, à dire vrai, à l'inverse voit la

parties

forme toute à

la fois,

par un travail

beauté de

la ligne

Pour comprendre avoir regardé ses

albums

ces feuilles volantes

pectus

tons, ces

«

pensers

loisirs

et

pro-

du sculpteur qui et

ne réalise

à couverture grise,

sur

de

la

la

faire part,

table de

il

faut

manié pros-

l'atelier,

s'accumulent dans les car-

comme

»,

ils

l'équilibre des masses.

lettres

les tiroirs,

pensers du matin

de

qui traînent

encombrent

la sta-

dessin de Carrière,

le

et

en ordonne les diverses

simultané

que par

ils

émerger de leurs rap-

faisant

la

périphérie,

la

du

studieux, où

soir, il

eût dit Watteau, ces

de toutes les heures

prépare les œuvres qui

prolongent sa vie dans les images qu'elle crée. Ces

innombrables croquis au crayon noir, à

la

sanguine

sont les notes rapides où se traduit sa passion

d'observateur infatigable. Carrière sait voir ce que

nous ne voyons plus

à force

de

le voir,

il

garde


EUGENE CARRIERE

45

l'étonnement de l'enfant qui rajeunit

le

du monde

lui

;

n'est jamais

vie

la

chose de banal,

pour

quelque

quelque chose

elle reste

d'effacé,

spectacle

d'inconnu, d'inédit, l'objet d'une perpétuelle surprise

;

en aime tous les gestes,

il

l'épie

il

en ces

instants où, livrée à son propre entraînement, elle

se révèle dans et

de toute

et

conime

saisit il

la

sa vérité, où, libre de tout artifice

contrainte, elle reprend

d'un œil sûr ces aspects

les fixe

fraîcheur

la

nouveauté des choses éternelles. fugitifs

de

Il

l'être,

d'une main prompte et passionnée. Ces

croquis ne sont que des émotions et des mouve-

ments, une suite de visions rapides où brusque-

ment s'évoquent

très

les

images

simples

dont

compose une existence humaine. Vous mouvements qui, d'abord instinctifs, accordent la mère et l'enfant jusqu'à en faire un seul être en deux personnes, puis peu à peu les rapprochent par un amour où déjà entrent la conscience et la volonté la

suite

y trouverez dans leur franchise tous ces

:

une

tête

dans un élan de tendresse,

se penche

deux visages se rencontrent dans un fant s'est

nels

;

endormi dans

autour de

lampe, se presse

la le

de

la

la joie,

de

la

l'en-

berceau des bras matertable,

sous l'orbe de

cercle de famille

quelques accents, tous

ceux de

le

grande

baiser,

les gestes

douleur,

de

;

la

résumés en

la vie

sont

là,

de l'inquiétude,

vague rêverie, ceux des humbles occupations


EUGÈNE CARRIÈRE

46

domestiques,

ceux aussi des objets familiers qui

et

ont leur langage, parce qu'ils ont leur esprit.

Des mains sans nombre couvrent ces vivantes, expressives; et

(c

feuillets,

ces mains, qu'il a délimitées

modelées en quelques coups de crayon, on peut

les placer

auprès des mains les plus célèbres racon-

tées par les croquis les plus impeccables. Carrière les voit

vraiment douées d'une existence spéciale

révélatrices de caractères.

Il

dit

et les mollesses, les énergies

dons hautains des gnés.

Il

et

par elles les volontés

de

aban-

l'action, les

indifférents, les défaites des rési-

en voit de gracieuses, de nobles, d'infiniment

touchantes...

Il

caresse de toute sa délicatesse des

mains potelées d'enfant, des mains fmes et rêveuses de femmes. Il est saisi d'un respect attendri devant des mains de veillesse au repos d'un long Rappelez-vous, dans

émouvant de à la

mère,

la

bouche dont

L'homme

comme

le

d'autres,

compriment

après

seront torturés et brûlés pour (*)

Gustave Gelfroy.

des mains, ah,

la

tant de choses en lui

brassées,

et

La

main !

!

comme

est

et

il

sanglot.

convient,

en son nom,

même

le

morceau de

des mains,

toujours en

mimique. Car Carrière

lui

le

crime

:

sur

Vie Artistique, ire série, p. 33. « Ali

ce

la

))

mains pâles portées

juste a été crucifié,

tant

(*).

Christ en croix, le geste les

elles

travail

il

l'être,

y en a

là,

!

qui dit et raconte

dans

les tiroirs,

des

surprise de toute leur éloquente

un dessinateur passionné de

comme l'ont été Watteau et Gavarni. » de La Vie Artistique, Ire série, p. 12.)

(E. de

la

main,

Goncourt. Préface


EUGENE CARRIERE le

fond,

le

ciel,

dont

ténèbres

les

terre,

la

confondent avec

se

monuments des hommes,

les

corps du crucitié pesant sur

le

47

les

mains que

les

clous déchirent, se construit d'une pâle lumière

s'éclaire,

dit

sottise

la

et

de

sérénité

la

de

la croix

basse qui en

hauteur laisse

celui

juste

le

Auprès

qu'elles.

fort

dressant de toute sa

le

au niveau des hommes,

mère, debout, dans ses vêtements noirs, porte

à son visage ses mains croisées par se

sachant

qui,

méchanceté, a choisi de mourir

la

pour ce qui doit être plus

la

;

visage noyé dans l'ombre, mais dont le front

le

marquent

stupeur et

la

un geste où

désolation de celle

la

qui ne veut rien savoir que l'immense douleur qui l'accable.

Dans

le

tient le meilleur

rapprochement de ces deux êtres

de l'humanité

la

:

nue, s'achève par la pensée, la l'instinctif

dévouement par

le

nature se conti-

mère par

le fils,

sacrifice volontaire.

Là-dessus, n'imaginez pas la calligraphie nette et patiente d'un professeur de pensionnat, un contour sec, sans déviation

;

la

ligne mobile frémit,

se jette dans la direction du sorte d'emportement

leusement observée,

;

la

remue,

mouvement avec une

forme n'est pas scrupu-

elle est pliée à toutes les exi-

gences du sentiment, réduite parfois à n'être que le

thème

expressif, l'arabesque

vérité idéale porte la nature

La forme de

l'arbre

émouvante, dont

la

au delà d'elle-même.

dépend des

souffles

qui

l'agi-


EUGENE GAKRIERE

48

tent

de

selon qu'il ondule sous

elle varie,

;

la brise,

dans

feuillage,

qu'il oscille

du vent qui

sens

le

la

en tous sens aux chocs contrariés d'un

tempête

mente

forme humaine battue de tous

de

l'esprit

(*).

en ces croquis, se tour-

ainsi,

;

Ces notes, prises par

montrent sa curiosité

le jour,

son observation, l'ardeur

forme de

la

comme

regard

son émotion

la vie.

non

et

il

:

ne construit

il

l'embrasse d'un

courbe d'un dessin ornemental

en présence d'une

grappe

raccordés,

traits la

de

sûreté de sa main,

Carrière n'a pas l'œil analytique

pas

au jour

infatigable, l'acuité

et la

nature et devant

la

les vents

l'artiste

ce qu'a de passionné et de réfléchi

devant

et

frappe, ou

le

souffle de la

caresse

courbe tout entier, tronc

se

qu'il

grappe

de

raisins,

les grains, le tout

il

;

voit la

avant les accidents

qui en précisent la vision d'ensemble.

S'il

titude d'un enfant, qui,

endormi sur

la table, la tête

l'image,

une

il

fleur

;

comprend

(*)

«

de

il

s'est

comme un

toute à la fois

découvre d'abord

la

le

reste;

il

va de

la ligne

la

note

il

fruit,

générale qui l'établit et

y main, saisie dans

forme, aux doigts qui l'achèvent;

Insistez sur les traits

dominants du modèle,

lui-même, exprimez-les fortement, ])oussez-les, la caricature, je dis

tance d'un principe

caricature afin de si

juste.

»

l'at-

ne décompose pas

toutes les autres lignes,

subordonne la loi

soir,

dans ses bras,

la voit il

le

mieux

s'il

faire

disait

le faut,

s'il

Ingres jiisqu'à

sentir Tinipor-


EUGENE CARRIERE

49

regarde une mère allaitant son enfant,

ne distin-

il

gue pas deux êtres qu'un hasard rapproche,

aper-

de l'arabesque qui, de ces deux êtres,

çoit l'unité

que traverse un

même

sentiment, pour un instant

compose une forme unique

comme

et

Rien n'est plus propre à montrer ce l'esprit

il

naturelle.

qu'il

y a dans

de Carrière d'original, d'individuel, d'incom-

municable parfois, que ces synthèses hardies où forme, simplifiée par le

signe expressif

vous trouverez l'essentiel, le (jui

domine

Si ces

mêmes, les

;

le

le

mais, jusque dans ces audaces, souci de la

goût de

la vérité

loi, la

recherche de

profonde, l'intelUgence

à force de la comprendre.

la réalité

croquis ont parfois leur intérêt en euxils

ne sont que des notes, des documents,

éléments patiemment amassés de l'œuvre qui

en donnera

le

sens véritable. Carrière n'est ni un

nerveux, ni un agité

ment

rassis, plein

;

il

souveraine que

la

robuste, de tempéra-

est

de sens

est convaincu qu'il y a

;

dans

il

aime l'universel

les

même amour

sa propre

qui

passer dans ses croquis

fait

les palpitations

que

de

loi.

Le

que

le

la vie, l'attache

les accidents dissimulent

est vrai

la

de

il

la vérité

frémissement

aux

et

lois réelles

sans s'y soustraire.

forme, à parler strictement,

n'existe pas, qu'instrument de la vie, toujours difié

;

choses une logique

pensée doit accepter librement

comme

S'il

la

sentiment, n'en est plus que

par les mouvements de

la

mo-

passion et de la


EUGENE CARRIERE

50

volonté, elle se d'aspects,

n'est pas

il

nombre

présente sous un

moins

infini

vrai que, sous tous ces

aspects, elle se retrouve et se reconnaît. Si variées

que soient

les attitudes

que

corps est une machine,

dont

le

nombre,

nissent avec

la

lui

impose

il

le

a ses pièces articulées,

il

structure et les rapports défi-

une inexorable rigueur

entre lesquelles

l'esprit,

les

limites

peut être transformé par l'action.

Carrière est trop

sincère et trop réfléchi pour

s'en tenir à l'apparence,

pour peindre d'un corps

ce qu'en saisit d'abord un œil superficiel et proin|)t; il

est préoccupé avant tout de ce qui explique ce

qu'on

de ce qui détermine

voit,

les plans, les

creux

et les reliefs,

des masses solides, des substructions

osseuses

corps sans poids ni profondeur n'est

;

le

plus qu'un fantôme incapable de vie.

qué chez Vélasquez,

peut-être chez le Vinci, que les traits

yeux,

le nez, la

les entoure, les

« J'ai

me disait-il un jour,

remar-

plus encore

du

visage, les

bouche sont préparés par ce qui

par l'arcade sourcilière, les pommettes,

mâchoires

;

ils

ne seraient pas

mène

sens, n'étant pas attendus

on

comme un sommet,

devinerait. Ces traits sont

y arrive par ce qui y

là,

;

isolés, ils

comme

Les imbéciles qui se jettent sur

les

les

on

perdent leur

dans yeux,

la

nature.

le nez, la

bouche, sont des gens qui veulent ouvrir les fenêtres avant d'avoir élevé le

mur.

de ces architectes chimériques

))

:

Carrière n'est pas il

établit

d'abord


EUGÈNE CARRIERE les

dessous solides,

la

51

charpente osseuse

;

il

dresse

derrière lequel se passent tant de choses,

le front,

sculpte son relief et ses bosses sourcilière, les

mâchoires

pommettes,

;

il

construit l'arcade

l'arête

du nez,

l'os

des

sur ces fortes assises, lentement édifiées

;

par les ancêtres et qui trahissent du caractère ce qui ne change pas, toute émotion les ailes

du

tend les muscles mobiles que

il

met en

jeu, les paupières, les joues,

nez, les lèvres, toutes ces parties fré-

missantes au moindre choc, qui disent tout à fois le

sentiment momentané

la

par leurs contrac-

tions passagères et la destinée parleurs habitudes. C'est surtout dans ces préparations au bran,

dans

modeler de son

libre

les portraits qu'il se plaît à

pinceau avec l'ombre

et la lumière,

que Carrière

masque en

révèle son art de faire sentir, dans le

rehef, les dessous résistants, de relier la construc-

tion savante à l'expression morale. Étudiez encore les lithographies

mes

il

a représenté quelques

célèbres de ce temps. Pâle, émergeant

sans violence,

la tête

doxale, où

sement

;

le

une

sa forme heureuse;

clarté dorée, étale sa face para-

l'homme

et la bête se

crâne chauve,

serré aux tempes et

du fond

d'Alphonse Daudet garde dans

sa mélancolie l'élégance de Verlaine, dans

hom-

mêlent

le front très

comme soudé

si

curieu-

haut mais

trop vide, la fente

des yeux bridés, sans paupières, que l'orbite écrase, le

nez camus,

la

pommette

saillante

que l'ombre


EUGÈNE CARRIERE

52

souligne, la

bouche devinée sous

tache aux poils jaunis l'inachevé de l'enfance,

de symétrie,

la

;

et,

construction forte garde

par son

manque

poète tour à tour ou

et

au repentir.

parallèlement

ce

La lithographie d'Henri Pvochefort aussi simple

mentée,

d'ordre,

trahit l'âme trouble, multiple, qui livra

le

facture

grosse mous-

la

comme

à l'erreur

n'est pas d'une

tour-

inquiète,

l'exécution,

;

))

discordante, se plie au caractère peint

du modèle. Carrière l'homme de combat,

qui,

miheu démocratique,

les

a

le

pamphlétaire,

adapte

d'instinct,

des

traditions

au

grands

seigneurs qui tenaient campagne contre les gens

du

roi et faisaient les routes

Tout autre est la

la belle

peu sûres.

image du sculpteur Rodin;

construction savante distingue et relie les plans du

visage

;

l'arcade sourcilière puissante, d'où se déta-

du nez recourbé, continue les bosses du front, se prolonge par les pommettes un pli dédaigneux avance la lèvre inférieure la barbe descend che

l'arête

;

;

en ondes qui se perdent dans l'ombre. On sculpté par la main la tête

de Michel- Ange, dans

d'un faune sérieux où l'àme de

dirait

le roc,

la

nature

arrive à la conscience d'elle-même, et le souvenir s'éveille

des groupes où

l'artiste

a modelé,

dans

ses marbres frémissants, les ivresses, les angoisses,

du mystérieux amour qui recherche du bonheur.

les terreurs

pour

la

se prend


EUGENE CARRIERE

53

ou un corps

Ainsi Carrière ne voit pas une tète

comme

des surfaces,

scrupuleusement unité,

dans

la loi

:

il

n'en copie pas l'apparence

il

d'ensemble, dans leur

les voit

de leur structure,

et

il

subordonne

tous les détails au plan supérieur qui les domine.

Le

même

esprit de synthèse qui

ne laisse de la

lui

fait

la

forme que ce qu'elle a d'expressif,

rétablir

dans tous ses droits, quand

est

vraiment lui-même,

deux éléments savante

;

qui agite le

:

il

Dans ses tableaux, où

arrive à l'œuvre définitive. il

dans ses croquis

le

dessin est

fait

de ces

justesse expressive, construction

vous y retrouverez ses esquisses,

le

la

fougue intérieure

mouvement passionné,

geste où tout l'être se projette, mais l'action est

contenue dans rêtant, ajoutent

les limites

voudrait franchir. nise ces

ardente

de

la

à l'impression

Le

talent

forme de

la

qui, en l'ar-

force qui les

de Carrière harmo-

dons en apparence contraires et intelligence lucide,

passion

élans soudains et volonté tenace.

:

sensibilité et logique,


EUGENE CARRIERE

54

Sa couleur témoigne

penchant à subordonner le matériel

même le

même

la

vision,

le

même

procédé au sentiment,

le

du langage à ce

esprit de synthèse, la

qu'il

a d'expressif; le

même

originahté dans

respect des lois nécessaires.

D'aucuns trouveront paradoxal de parler de couleur à propos de Carrière

mais

;

bon de s'entendre. Prenez un

ici

encore

il

la

est

coloriste de génie, le

prince des Vénitiens, Paul Véronèse. La diversité

des couleurs, dont chacune a sa qualité propre et ses nuances, la richesse visible qu'il prodigue, la

rencontre de tout ce que

la

de doux, de radieux dans

nature met d'éclatant,

les

pierres précieuses,

les fleurs, les soleils couchants, certes contribuent

à l'enchantement de son œuvre, mais sensible est

moins dans

nombre, dans leur

que dans

combine, dans l'harmonie qui dent, s'accordent, et l'unité

d'une vision

charme

éléments, dans leur

les

intensité,

le

l'art

fait qu'ils

qui les

se répon-

que tous enfin conspirent à

comme

simultanée.

Disposée

par une main maladroite, cette foule d'éléments ne


EUGÈNE CARRIERE serait plus

55

qu'an tumulte douloureux ou

le silence

inattendu de couleurs bruyantes qui s'éteindraient Ainsi ce qui

l'une l'autre.

fait

beauté du coloris, ce n'est ni

des tons isolés,

c'est leur

la variété, ni la

harmonie,

monie dépend elle-même de lumière, de

la

la

la

richesse

et cette har-

distribution de la

justesse avec laquelle ses gradations

sont observées et rendues.

comme

tons seraient

dans un tableau

Un

tableau,

où tous

les

échantillonnés, pourrait don-

ner beaucoup moins l'impression de

la

qu'une gravure où

notées par

les valeurs seraient

couleur

un œil délicat. Vélasquez jamais peut-être ne s'est montré coloriste plus rare, plus raffiné que dans le tableau fameux des Ménines, où n'entrent comme éléments que

le

noir des vêtements opposé à la

clarté des visages et des mains.

contre la

Newton que

combinaison de

vrai,

la

du moins, que

lumière les

sont des accidents de

intimement

liées,

Gœthe prétendait

toutes les couleurs résultent de

la

et

de l'ombre;

est

couleurs et leurs nuances lumière, qu'elles

qu'elles

lui

participent à ses

Supposez que d'un tableau de Vélasquez

Véronèse vous

il

effaciez les tons

sont lois.

ou de

en ne gardant que

leur intensité lumineuse, de ces valeurs accordées

se composera une harmonie dont le

charme sensible

atténuera l'impression première de l'œuvre sans

la

détruire.

De

la

couleur, Carrière ne retient que

la

lumière


EUGÈNE CARRIÈRE

56

et

mais son

l'ombre,

œil

merveilleusement

est

sensible à leurs gradations et à leurs accords.

de regretter ce

est légitime

sage d'apprécier ce

n'observe

cju'il

un

il

sensuel

((

ne

la trahit pas.

de

l'œil,

plus de subtilité que lignes,

un

aux jouissances

homme

vision des choses.

pour

est faite

qui perçoit avec les rapports

qu'il sait

des

goûter dans

disait

délectation. »

la

il

et qui fait participer

La peinture,

«

;

Tout vrai peintre est

des tons ou des valeurs,

les autres

nul

lois essentielles

vulgaire

le

est plus

plus attentif,

œil

n'obéit plus strictement à ses l'interprète,

il

garde et d'en jouir. Nul

d'un

nature

la

qu'il néglige,

S'il

la

Le Poussin,

Les tableaux de

Carrière ne sont pas faits seulement pour plaire à la

ou pour émouvoir

raison

langage caresses,

ils

le

cœur,

mais qui a ses

simplifié,

donnent à

la

ils

parlent

un

douceurs, ses

pensée un accompagne-

ment de sensations qui ont leur prix en elles-mêmes. Harmoniste

délicat,

réalité visible,

il

charme pénétrant.

éléments

des''

garde de

Mais pourquoi

sacrifie-t-il les

couleurs, pourquoi ne peint-il pas les choses

nous

les

comme

voyons? il

les

— Peut-être parce peut-être

voit,

la

composer des œuvres d'un

sait

qu'il

comme

qu'il les peint

aussi parce qu'il a

humbles appartements des Batignolles et palais de Venise à coup sûr, parce que ce

habité les

non

les

;

langage convient à l'expression de ce qu'il veut dire,

parce que d'instinct

il

le

juge approprié à l'intimité


EUGENE CARRIERE

57

de ses émotions, à ce qu'elles ont tout à

la fois

d'ardent, de profond et de réfléchi, parce que sa simplicité

goût de

même lui

l'unité,

plaît,

parce qu'elle répond à son

son esprit de synthèse, à sa

à

concentration volontaire de

Vous de

et

du sentiment.

l'effet et

retrouverez cette pénétration de l'intelUgence

la

ce besoin d'unité, ce sens

sensibilité,

caractéristique et ce souci de l'universel dans

avec lequel

ordonne ses groupes,

l'artiste

l'un à l'autre,

du

l'art

les relie

de leur ensemble construit un tableau.

La composition de Carrière, comme son dessin, est un mélange heureux de puissance expressive et de construction savante- Ses croquis ne révèlent pas

seulement un rare sentiment du mouvement dans ce qu'il a pour ainsi dire de spirituel, le

ils

montrent

peintre attentif à tous ces accidents de la vie qui

rapprochent deux ou plusieurs êtres, enveloppent leurs formes distinctes dans l'unité d'une action qui les

accorde l'une à

la plaine

l'autre.

Un

cavalier galopant par

évoquait dans l'imagination plastique des

vieux Hellènes

la figure

du Centaure

;

à tout instant,

sous nos yeux, de plusieurs corps se crée

un corps plus complexe, dont leur harmonie dans l'acte

existence éphémère

:

les

même

comme

hgnes trouvent

qui lui

les sculpteurs

donne une

ne l'ignorent

pas. Carrière excelle à saisir ces lignes, leur direction et leur convergence

;

il

ne

fait

pas un groupe

de personnages juxtaposés, qui restent séparés

les


EUGÈNE CARRIÈRE

58

uns des autres

comme un mère

les

il

;

ordonne comme un ensemble,

tout qui a sa forme et sa vie propre.

La

de l'enfant qui repose en

n'est pas détachée

ses bras, qui se suspend à son sein ou qui, plus

grand, s'unit à elle par

une

même

la caresse,

La

vie les anime.

par

famille est

baiser

le

;

comme un

aux formes multiples mais orga-

être réel, concret,

nisées, dont l'unité mobile est dans les émotions

communes

spontanément

groupent

en

qui

les

membres. Carrière n'est pas seulement préoccupé de voir le

groupe

comme un

de synthèse

œuvre

;

il

tout,

il

apporte

composition

à la

le

même esprit

générale

de

son

n'y a pas pour lui de lignes ni de contours

masses,

distincts des

morceaux successifs

;

il

il

ignore la mosaïque des

son tableau

voit d'abord

tout à la fois, de loin, dans son effet général. Sur

un croquis, pour donner fortes, puis établit les

de ce

l'idée

délimite par quelques traits

les

qu'il fera,

avec de l'ancre ou du fusain étalés

ombres, çà

et là, les rappels

de

les passages, et c'est cette vision générale

à

peu

un

il

tout

;

il

façon de

il

se crée

l'être

progressif. Aussi

d'accessoires

;

il

comme

vivant, par

n'y a pas

il

clarté,

que peu

le principe, est

d'abord défini dans

est

construction, la

Son tableau, dès

précisera^

il

les plus

clartés

la

loi

de sa

simultanément, à

un enrichissement pour

son œuvre ne se

fait

lui

de

détails,

pas de pièces


EUGENE CARRIÈRE rapportées

;

les

groupes dans leur unité, les masses

dans leur équilibre,

lumières et les ombres

les

dans leurs rapports nécessaires, la

59

vision d'ensemble dont

il

lui

donnent d'abord à s'emparer

lui reste

par un travail successif.

Le Premier

Voile est l'une des

œuvres maîtresses

de Carrière, celle peut-être qui, par l'exécution

comme

par

le

sentiment, provoque

moins de

le

Sa puissance expressive y est tout son art de construire les groupes, de les

résistance.

entière

;

par l'atmosphère,

relier

dans son ensemble par et

de

l'ombre

de composer

le

tableau

rapports de

la

lumière

les

révèle

s'y

sans

parti

pris,

sans

manière. Les personnages ont été surpris dans leur attitude vraie

chacun tère. la

;

sous

le

trahit sa nature,

coup de

la

même

émotion,

son expérience, son carac-

La lumière d'une matinée de mai entre dans

pièce demi-close, la remplit de ses vibrations,

tour à tour elle s'apaise ou s'exalte, reculant les

fonds, mettant les choses à leur plan,

donnanr

d'une pensée vivante, dont les

à la scène l'unité

images précises s'accompagnent

sourdement de

sentiments obscurs, de souvenirs confus. Debout, vêtue de la tête,

la

robe blanche,

cherche

voile, se tient la

mais qui déjà

ciel, affronte

le

plein de certitude

la fillette,

;

derrière

elle,

de

la vie

profil, lève

d'un regard

attachant le premier

mère, jeune, charmante encore,

sait

ce qu'il reste des fleurs d'un


EUGÈNE CARRIÈRE

eo

A

printemps. à

sa robe, le dernier-né, qui se traîne

peine, s'accroche

demi-caché, jette un

et,

grande sœur

effaré sur la

œil

ne reconnaît plus.

qu'il

où se voit le livre de messe, le mouchoir, un bouquet dans un vase, trois enfants Près de

la table,

regardent; fermant

le

tableau, les grands-parents

qui viennent d'entrer et que

aboiement joyeux

:

le

chien salue d'un

le

grand-père un peu embar-

rassé dans sa redingote,

un

libre

penseur qui

sait à

quoi s'en tenir, la main à la barbe, s'étonne de se sentir

ému

tranquille, gardant la

;

lassitude

des

jours vécus, la grand'mère éprouve vaguement la

ressemblance des jours de l'autre côté, assise près

de

fête

aux jours de deuil

de

la fenêtre, caressée

par une clarté douce, une jeune

de coudre

les dernières roses

fille

de

la

;

blonde achève couronne,

et

par l'arabesque des lignes, qui se continue sans se

rompre, par les

les

accords du milieu lumineux qui

baigne, tous ces êtres conspirent dans un être

unanime, dont l'àme

même

est la

communion dans un

sentiment.

Quand on

du métier d'un

il

ne faut

point oublier que ce métier est son esprit

même,

qu'il n'est

parle

artiste,

pas quelque chose de donné,

quelque chose qui se

fait.

qu'il est

Cette évolution a sa logi-

que sans doute, mais une logique vivante, dont travail seul

dégage

peut-être, liée

la loi,

le

une logique contingente

à certaines

décisions, à

certaines


EUGENE CARRIÈRE crises de la volonté.

ne regardent

où son nom ils

les

œuvres d'un peintre qu'au moment

déclarent quil

Carrière a

ne manque pas de gens qui

Il

dans toutes

est

01

les

bouches

toujours la

fait

beaucoup

travaillé.

volontiers

:

même

Ceux qui

chose. s'imagi-

nent qu'on imite les procédés d'un artiste ne savent pas au prix de quel labeur, de quelle discipline se conquièrent les libertés qu'ils se flattent d'obtenir

d'emblée par

le

plagiat.

J'ai

vu chez Carrière un

album rempli de dessins d'architecture, d'ornements divers, de

semblent

Après

fleurs,

qui par leur précision, leur

les cinq

années de

travail

sans trêve dans

maison de Vaugirard, auxquelles

la petite

fini

les préparations d'un graveur.

il

faut

joindre les longues années d'école, dès qu'il entre en

possession de son talent,

avec des défauts, dont

il

il

est

lui-même

;

il

montre

se débarrassera

une

certaine sécheresse, quelque chose de timide et de

contraint et les

— ses qualités

de sincérité, d'expression,

grands partis pris qui caractérisent sa manière

de voir

et

de sentir

diversité des tons

la

nature

(*).

Déjà

néglige la

il

pour s'attacher aux valeurs,

peint avec la lumière et l'ombre, mais heurts, des duretés, délicates qui

(*)

petite

Portrait de sa fille

(1882j.

il

seront

ne réussit pas

a

il

des

harmonies

charme sensible de ses

le

mère (1876)

les

il

;

portrait

de son

père

avec une


EUGÈNE CARRIÈPxE

62

œuvres

délinitives.

Un peu

maître de sa technique, affiné,

plus tard, vraiment

main assouplie,

la

Toeil

peint des œuvres, où se trahit Fintluence

il

sans que

de Vélasquez,

son

Sur un fond neutre, assombri,

atteinte.

en

originalité

soit

détache

il

la

femme, avec une

blancheur nacrée d'un corps de

grâce qui ferait songer à quelque maître du xviiie siècle, si la

mêle

gravité qui se

à

caresse du

la

pinceau n'éloignait cette comparaison avec de

la

Il

peint

lumière toute pure, atténuée, mais sans

une ombre, des s'éclairent

(*).

de

tètes d'enfants,

la

flamme de

dont

la

vie

les

yeux bleus

(**).

touches libres, hardies, qui laissent voir

Il

a des

comme

le

jeu de la main de l'artiste en verve. L'Enfant aux (jéraniums (1886) est un morceau de facture brillante, une des rares œuvres où Carrière semble faire montre de virtuosité. D'un pot de géraniums placé devant lui un enfant a pris des fleurs, que de ses deux petites mains riant de tout cœur.

11

il

porte à ses oreilles en

est à mi-corps, vêtu de noir la

pénombre

comme

les yeux,

avec une large collerette blanche, que apaise, et, sur le

comme

la

fond sombre,

bouche, les tons argentins

mains encore potelées,

(*)

Éludes de nu appartenant

Manzi, (**)

rient

à

du

visage, des

d'un rire auquel se

MM.

Galimard, Pontremoli,

etc.

Tête d'enfant. Portraits d'enfants appartenant à M. Galimard.


EUGENE CARRIERE mêlent

les éclats

63

des deux fleurs aux tous

vils

d'un

rouge orangé. Mais, sans qu'il y

de passage brusque, de

ait ici

date précise à marquer, avec des retours à son pre-

mier procédé. Carrière, en obéissant esprit,

son goût

à

renonce à fond à

pour

la

qui s'en détache.

il

Au les

lieu unit,

d'opposer il

même

participer d'une

sur

Il

le

fond

mêle,

les

il

blancheurs

;

forme

la

et les

person-

les fait

comme

plus ses nus

vie. Il n'enlève

des fonds sombres pour en s'apaise,

faire

le

valoir les

s'enveloppe dans

comme

l'atmosphère qui pénètre ses contours

en reçoit

le

y a sans doute

dans ce dualisme quelque chose encore

d'artificiel.

nages,

de plus en plus

l'unité,

méthode des contrastes qui oppose

la figure

lui

pour

de son

à la loi

elle

rayonnement. Le fond n'est plus quelque

chose de neutre, d'indifférent, d'étranger aux per-

sonnages qui en sortent on ne

un des éléments

sait

rant à son -équilibre,

il

;

conspire à

a son sens,

.sa

valeur morale,

son rapport à

la

scène

il

pourquoi

essentiels de l'œuvre

qu'il

il

il

est

l'expression,

conçu dans

est

enveloppe

;

en concou-

;

ce ne sont

plus seulement les lignes, les formes, les groupes, c'est le tableau tout entier qui est

d'une

vi.sion

dont

conçu dans l'unité

tous les termes

sont insépa-

rables.

Le Théâtre de

montre ce principe poussé à ses conséquences dernières. La tentative a pu Belleville


EUGENE CARRIÈRE

64

être contestée

est curieuse

elle

;

entendre les préoccupations de

et

nous aide à Le tableau

l'artiste.

ne se découpe pas en groupes définis qui se subordonnent,

un

il

est

vu tout à

être collectif,

la

la fois

le

personnage est

même spectacle. Nous

émotion, les yeux remplis du

embrassons du regard deux

galeries superposées

qui dominent la scène invisible

femme, appuyée à

;

foule — palpitant de la même

;

près de nous, une

voûte basse, se penche avec

la

un vieil du travail du jour, s'absorbe dans l'intérêt du drame qui se joue. Là-bas, une femme allaite un nourrisson çà et là, de toutes parts, dans l'élégance d'une cariatide svelte et vivante;

ouvrier, fatigué

;

l'ombre dorée, s'indiquent des gestes qui varient l'expression de la

même

curiosité passionnée.

attention,

de

n'ont de sens

coup

l'une par l'autre, elles sont saisies d'un elles se

mêlent au milieu, à

en sortent

;

fait

la

que

d'œil,

buée qui monte,

théâtre

c'est le

qui pour un instant

même

Les figures ne sont pas étu-

diées chacune pour soi, elles

elles

la

même

corps avec

la

qui

vit,

foule qui

l'anime.

La pensée s'est

l'œil

du

l'unité voulue,

ne

n'a pas paru assez formulée

spectateur, en raison

même

pas senti assez dirigé,

son centre dans cette vaste

de il

;

n'a pas su trouver

toile;

mais cette œuvre,

bon de revoir, n'est pas, comme quelquesl'auteur a uns l'imaginent, une grande esquisse

qu'il sera

;


EUGENE CARRIERE effacé plus d'un

a

employé

65

de ces détails qu'on regrette,

à cette

réflexions et d'efforts.

simplification

et

il

des années de


EUGÈNE CARRIÈRE

66

VI

Pas plus que

métier d'E. Carrière, ses œuvres

le

ne sont détacliées de son tournés vers à la

mode,

ou des

le

ils

un

ce qui l'émeut, sent.

Il

est des artistes

Il

peignent selon les temps, des grecs

des déesses ou des maritornes

rustres,

Carrière est

esprit.

dehors, qui demandent leurs sujets

un

réfléciii,

intérieur,

ne peut exprimer que ce

il

est d'abord

naïvement ce qui

le le

peintre de la famille,

passionne

;

;

ne voit que

il

qu'il

dit

il

ses toiles réflé-

chissent les objets qui occupent sa pensée et son

cœur

:

^ Il

trouve,

imagination et

espace restreint,

monde

dit

Gelfroy, la poésie de

l'aliment il

de son

voyage à

à travers

l'infini

la

un le

qui tient dans la lumière et l'ombre d'une

chambre, sous l'orbe d'or d'une lampe.

que

son

dans

talent

sphère de

sa pensée

«

A mesure

s'agrandit,

({ue

sa

sympathie plus clairvoyante multiplie ses rapports d'intimité

avec

les

êtres

,

de

nouvelles

répondent à ses émotions nouvelles, rare portraitiste que l'on sait,

il

il

visions

devient le

met dans ses nus,

dans ses figures décoratives d'un grand caractère


EUGENE CARRIERE de ce

l'inquiétude

temps,

son Christ il

évoque

il

humbles dans son Théâtre de

paysages

sienne.

par

le

de l'homme juste, synthétiques

qu'il

montre

présence d'une pensée, sœur de

la

la

ne se laisse pas enfermer dans un genre

Il

succès

désintéressé,

;

son droit au progrès.

il

est libre

tendresse

et

la

la

il

;

réserve

phe son langage

Il

resque à des exigences nouvelles,

dans sa simplicité la

dans

dit

il

ose, cette correspondance des formes qui lui

en tout

des

vie

la

Belleville,

le sacrifice volontaire

cherche dans les

67

comme

grâce,

le

il

sait

il

grandeur

pitto-

trouver

y a trouvé

il

par tout

justifie

ce qu'il sait lui faire exprimer de la nature et de l'àme.

Peintre de la famille. Carrière ne tombe ni dans l'anecdote ni dans le

roman

de petites marionnettes n'exagère,

il

fait sortir la

la

ne fausse,

il

;

il

ne

fait

pas jouer à

comédie enfantine ne

))

;

il

la

n'est pas

sionné; il

comme

générahse;

que toute Nul

il

poésie de la vérité, l'éloquence de

justesse expressive. Mais cet observateur, ce

hste

;

souligne rien

il

seulement un lyrique

et

tous les grands artistes, fixe,

il

il

«

réa-

un paschoisit,

arrête les gestes primordiaux

vie rajeunit et renouvelle.

n'a parlé,

nul plus que

lui

comme ne

l'a

lui,

de

l'enfant,

pris au sérieux,

parce que

ne

l'a

res-

pecté. Ses enfants ne se défendent pas de lui,

ils

ne se sentent pas épiés, surveillés par un pédalo


EUGÈNE CARRIERE

68

gogue qui prend des notes; rapides où

résume ces visions passagères. Car-

il

ne veut pas

dans sa

vie

nature

vierge

mouvement

bébé qui

s'éveille

les peindre,

jouent les cheveux bouclés

indique un visage où

le

et fins,

front

le

qui

bombe,

il

les

ce

l'impression Il

y).

aime

les

;

il

ses effrois de blottit

dans

le

évite les con-

blond,

d'un

frottis léger,

sourire des yeux se marie

au sourire des lèvres roses un fond de lumière,

qui trahit

Sur un fond

trastes, les oppositions.

la

à la vie, ses sur-

animal farouche qui soudain se

Pour

veut

de Fêtre qui n'est

maladresse et sa grâce

sein maternel.

il

d'instinct

dans sa vérité profonde,

tout petits, le

il

en attitude,

des choses (Maurice Hamel)

prises, sa petit

la vie tigée

liberté, le geste franc

point observé, le la

ils

devant leur père, sans souci des croquis

vivent

rière

ne posent pas,

ils

;

sans une ombre, sur

modèle en tons argentins joues rondes,

arête au lobe charnu qui retrousse, la

le

nez sans

bouche en-

tr'ouverte, des têtes qu'on sent inachevées, en train

de se construire, mais où déjà se devine la

forme future Il

le

plan de

(*).

suit l'enfant qui grandit,

à l'éveil de sa pensée,

il

il

assiste à ses jeux,

note ses attitudes, celle de

l'étonnement, celle de l'attention et celle de la rêverie

fj

vague qui est sa manière de

Éludes appartenant

à

M. Dolent,

à

réfléchir.

M. Galimard.

Les deux


EUGENE CARRIERE

69

bras recourbés en berceau, les yeux fixés sur sa

poupée,

la

fillette

s'exerce aux gestes maternels

;

auprès d'un bouquet de pâles chrysantiièmes, une petite

fille

un

est assise,

livre

devant

est ouvert

mais ses yeux levés sont à d'autres spectacles

elle,

penchée sur une table que recouvre une le

cette autre écrit avec

une attention qui

corps

ses doigts sur

et crispe

toile cirée

fond son clair et pur

blanche, détachant sur

la

du

plissés, la

plume

couler léger

le

le

le

même

front,

le

rit

les

tille,

à la vie

seul plaisir d'être et de sentir

sang jeune qui met à ses joues

du printemps en sa première

Avec

caressé

;

jeune

la toute

bouche entr'ouverte,

sans savoir, pour

son

visage, s'apaise sur le cou

en une ombre transparente,

yeux

profil,

raidit

par une lumière douce, qui se pose sur s'adoucit sur le bas

art fait

rose

le

fleur.

de sentiment ingénu

et

symbole. Carrière dégage

et

mentaires de

Il

maternité.

toutes ses fonctions

pure, vie

qu

velles

virginale, elle vient

je

;

il

émue

de

du

rétlexion, qui élève l'observation à la généralité

la

;

note les gestes éléa peint

la

mère dans

Ta montrée, au premier né, et

comme

surprise de

la

de donner, dans ces attitudes nou-

ne sais quel embarras se mêle aux

certitudes de l'instinct. Déshabillé, demi-nu, Tenfant est sur ses genoux, la

main son

il

s'est

endormi en caressant de

visage, et elle s'attarde avec

pure à cette caresse lente que

le

une

sommeil

joie

inter-


EUGÈNE CARRIÈRE

70

rompt et prolonge (le Coucher) assise auprès d'une table où brille une assiette d'étain, elle enveloppe ;

de ses deux bras

chambre grise, collé contre fiévreux

;

elle,

(Amour

cette souffrance

L'amour

est l'âme qui

pu

menaces du

(f Allaitement

noté tous

les

dont

vie,

démêlent que

penche sur

des

Mère

invisibles :

nombreuses

toiles et

où s'exprime

berceau,

à l'élan

les

Sous

le

Enfant),

la

de

l'unité

racines

il

ne

a la

se

baiser brusque de la

mère qui

caresse frémissante,

les lèvres s'avancent,

saisit le visage, l'approche,

entier se plie

mère

sentie.

lentement savouré de

le

presque tragique, où

main

de

la

vie,

la

vaguement

lentement

l'enfant, le baiser

se

les

montré

a

porte

Baiser —

gestes

à l'œil attentif.

mêmes

dans

le

mort,

dans ses joies

l'inquiétude d'une absence divers,

Il

fragilité

la

destin, qui

titres

trahit

l'ignorer.

qui sait

douloureuse,

la

des déchirements que

mouvement désormais

double

que

n'est pas toujours plus fort

Carrière n'a pas

souffre

maternel).

les séparations brutales font

des

dort d'un sommeil

immobile, les yeux clos, pressant de ses

lèvres la tête brûlante, elle

tout

dans sa robe de

le tout petit qui,

le

la

corps tout

d'une prise de possession

impérieuse.

De

la

maternité

gestes humains, la fécondité

il

il

n'a

pas fixé seulement les

a évoqué ce qui reste en elle de

des forces élémentaires, de

la loi

mys-


EUGENE CARRIERE

monter le lait dans la poitrine de femme, comme la sève dans le cœur et jusqu'à cime des chênes. Le Sommeil a surpris la mère

térieuse qui la la

71

fait

sombre

tandis qu'elle allaitait l'enfant. Sur le fond

que rompent

du

blancheurs froides des draps, de

que réveillent

l'oreiller,

et

les

dorés de l'épaule

les tons

sein gonflé, le groupe détache fièrement sa

forme sculpturale. Dans un geste de lassitude

et

de

protection, la tête posée sur le bras gauche, abritant

sous son bras droit

de son sang,

la

mère

inachevé qui se

l'être

endormie

s'est

:

fait

modelé

à

grands plans, émargeant de l'ombre transparente

dans laquelle

femme

il

est

a la gravité

conscience n'atteint paisible le

et

rude

comme

visage de la

le

taillé,

des instincts profonds où la pas.

Puissante et

accablée,

douloureuse, cette grande figure, dans

de transmettre

labeur

tragique des

forces

naturelles

la

vie,

mêle

l'héroïsme

à

le

hu-

main.

Le

de

cercle

famille s'étend,

sont devenus les grands, les aînés

de

la

le

chœur

familial

correspondances secrètes qui,

même

commune.

même tude

;

tout

petits

groupés autour

mère, partageant sa tendresse, frères

déroulent

d'un

les

et

sœurs

où se trahissent

comme

les

les

rameaux

tronc, les relient dans l'unité d'une vie

Carrière a multiphé ces

scènes, où

le

sentiment, joie, tendresse {Famille)^ inquié{l'Enfant

malade), attente solennelle en un


CARRIERE

EUGI":NE

72

jour de fête

{le

Premier

varient ses nuances,

voile),

de plusieurs êtres compose

groupe vivant qui a

le

son âme, sa forme individuelle.

Une mère

<.c

bébé qui embrasse

penche, soutient d'un bras

le

sa grande sœur

à genoux, résignée

;

la fillette

du corps, se

souriante, les bras au long

un abandon de tendresse petites mains, à

cette

se

livre

et

avec

à la prise tâtonnante des

douce violence de caresse.

Ainsi rassemblées dans une intime cohésion, les se

figures

composent d'elles-mêmes suivant de

souples inflexions, avec l'harmonieuse beauté des

gestes d'instinct

qui sait voir et choisir

l'artiste

trouve une grâce supérieure aux arabesques préméditées.

Une lumière

descend sur

paisible

de ses effluves

et l'enveloppe

de fines valeurs

le

carnations laiteuses de l'enfant, la fillette et

le

ses cheveux blonds

dégradations, elle glisse sur circule en transparences

groupe

elle difterencie

:

ambré de

teint

le

mère,

les

rose tendre de

par d'insensibles

:

plein

le

la

par

légères

des formes,

dans

l'intérieur

Un charme

où s'indiquent

les

profond

de tendresse confiante enveloppe

et vrai

objets

familiers.

cette toile d'évidente Intimité.

Carrière a

donné comme

^>

la

scènes de famille dans sa belle

Luxembourg, de

la

amour

mère,

qu'il intitule la

inquiet.

:

(Maurice Hamel). synthèse toile

de ces

du Musée du

Maternité. C'est le baiser

caresse où passe l'ardeur de son

Jamais

il

n'a

poussé plus

loin

la


EUGÈNE CARRIERE puissance expressive du geste,

73

de composer

l'art

un tableau dans son ensemble sans affectation de symétrie, de dominer la réalité, en ne paraissant que

reproduire. Les êtres et

la

milieu ne se

le

sent point séparer, participent de la

lumière entre dans

pièce close,

la

vibrations, l'approfondit

;

elle se

même

lais-

vie.

La

l'anime de ses

perd, se retrouve,

mais, dans son apparent caprice, elle obéit aux lois

de

pénétrant l'ombre

meubles, petite

ce qu'elle ne fixe pas

vision qui atténue

la

même,

accrochés au mur, recule

les tableaux

qui s'éloigne

lille

;

;

deviner les

laisse

elle

la

puis, se ramassant sur ce

qui doit être vu, elle enveloppe et détache le groupe

autour duquel tout s'ordonne argentins

la

pour soutenir passionné de

main

le tout petit

la

mère qui

pose ses lèvres sur

les

elle

;

modèle en tons

mobile, qui s'allonge

vivante,

profil

le

;

douloureux,

se penche, avance la tête,

joues du gros garçon aux

boucles blondes qu'elle

attire

d'un

mouvement de

possession jalouse. Cet

art, qui

nature,

semljle à quelques-uns

dit ses joies, ses

amours endormi

femme

cette

:

est l'enfant

au

réveil,

est

né à

l'égaiera

la

la

et

l'intensité

Carrière

ce

bébé

maison qui tout à

de son sourire ou

d'une

la

tendresses, ses

sienne,

troublera de ses cris. La poésie n'est justesse

de

loin

en un sens est un art réahste.

dans ses œuvres

l'heure,

si

ici

observation

que

que

la la

le


EUGÈNE CARRIÈRE

74

concentre

sentiment

sur

La forme

l'expressif.

émouvante que parce

n'est à ce point

qu'elle est

un œil attentif et prompt dans la du mouvement spontané la lumière qui

surprise par sincérité

;

tour à tour la construit,

la recule,

point une lumière inventée certes

de son rêve, nie voilée,

mais

s'affine )\

observée dans les petits intérieurs

parisiens, à l'heure c'est

milieu

« c'est le

ne s'évapore, où tout

rien

l'artiste l'a

où tout s'assoupit

d'éléments vrais

idéale,

;

choix de son esprit, cette harmo-

le

l'enveloppe, n'est

émanée du

a créé cette ambiance

qu'il

<x

réel,

et s'apaise, et

nature se transpose

la

dans tous ses logiques rapports.

»

(Maurice Hamel).

Carrière ne vise ni le symbole, ni l'idéal abstrait il

regarde en

lui et

autour de

se passe sous ses yeux

imagine,

il

;

d'universel

:

et

parce qu'il

de justesse dans

famihères

la

les

la

y a quelque chose est pleinement lui-même, il

Sans

chercher, à

la

notation singulière,

la suite

il

qui

où se

force

généralise,

du

ne ;

laissaient

Carrière,

la

Vinci, volontiers trans-

légende chrétienne dans des

l'amour humain primitifs

qu'il

sous l'accident. Les maîtres de

la loi

Renaissance, à

posèrent

;

ce qui

sait voir

ne s'émeut pas de ce

profonde,

Carrière est humain.

montre

il

imagine ce qui l'émeut. Mais dans toute

émotion sincère

il

il

lui,

que

pour

trahit l'instinct

le

scènes

miracle

de

fixer les gestes

des mères,

scènes famihères jusqu'au symbolisme

élève reli-


EUGENE CARRIERE gieiix.

nous

de divin le

la

fait

sentir ce (\na

transmission de

la

don conscient de soi-même

75

de mystérieux et vie qu'achève le

dans

sacrifice volon-

taire.

11


EUGENE CARRIERE

76

VII

Une

Carrière aux tableaux où la vie familiale.

pures

portraits de

insensible transition relie les

déroule les attitudes de

il

Ses compositions ne sont pas de

nous montrent librement

fictions, elles

prétés les visages qu'il connaît et qu'il aime

coup de ses œuvres, sans

;

inter-

beau-

bien défini, sont

titre

dépures études d'expression. Les cheveux dénoués, de chaque côté du visage, se répandent en noires ondulations,

sombres sous

Un peu et elle

fixé le dernier

l'enfant qui déjà n'est plus

femme

s'est

la

ne

je

regard des

qu'une chose.

accoudée dans un

penche soutenue de

s'abandonne à

ouverts,

lumineux, troublés de

semble

lasse, la

fauteuil, sa tête

lointain

yeux grands

les

le front

sais quel délire,

mères sur

dans

et

la

main gauche,

vague rêverie où dans

passent les images d'autrefois

;

elle

le

est

jeune encore, les douleurs anciennes se sont assoupies

;

les

yeux calmes

et

l'àme vaillante et résignée

profonds s'ouvrent sur ;

la

bouche aux lèvres

pleines est sérieuse mais prête à sourire encore, lui reste

l'amour,

le

dévouement,

la joie

il

des autres.


EUGÈNE CARRIÈRE

77

L'œuvre

est peinte avec la sûreté

tête et la

main sont modelées dans une pâte argentée, harmonie de sensations simples dégage

et

cette

quelque chose de consolant

et

de

des maîtres,

fort

la

Le por-

(*).

pas pour Carrière un genre à part, il est impossible de dire strictement où il commence, où trait n'est

il

finit.

Ceux qui croient que celui qui copie le plus

trompent

plus grand peintre est

le

exactement son modèle se

à la ressemblance machinale

;

mécanique

suffit.

œuvre, ajoute à

Tout grand la

réalité

un procédé

artiste est

dans son

l'interprétation qui en

renouvelle en nous l'intelligence et

le sentiment. scènes d'intimité, auxquelles Carrière se plaît, sont, en un sens, des portraits expressifs quand

Si les

;

est en

il

peindre

le

présence d'un modèle,

même

la vie intérieure.

française

offre

esprit, la

une suite

observés, spirituels tout

l'homme

social,

;

mais

à

de

apporte à

le

préoccupation de

Latour, notre école portraits

finement

nous montrent surl'homme qui, sous les yeux

des autres, se surveille

De

même

De Clouet

il

ils

et tient à faire

bonne

figure.

même

qu'en ses scènes de famille. Carrière, en ses portraits, voudrait surprendre la vie dans ce qu'elle a de

libre,

attend que

modèle s'oubhe, retrouve

(*)

le

de profond, de spontané

Études appartenant à M. Pontremoli, à M. G.

;

il

la franchise

S.


EUGENE CARRIERE

78

de

la solitude. «

Avez-vous remarqué que l'homme

qui se croit seul, qui ne sait pas qu'il est vu, tou-

jours est émouvant, dramatique observé,

redevient

il

Son ambition être

y>

;

qu'il a à

artificiel, social,

temps

ainsi

qu'il peint,

c'est ce

;

il

la )>.

du sculpteur,

à la façon

masque en rehef

un repoussé,

Derrière réel,

la

charpente

anime.

qu'il

est repoussé à

il

reste,

le «.

mon

la

et

L'homme,

fhomme

grands coups

».

sculpteur Devillez a

monies à

et

en établit les

il

supporte

Carrière a quelques portraits célèbres, celui

été le revoir,

le

Pour atteindre

selon ses fortes paroles, n'est pas une fonte, est

pensée

selon son principe,

;

en étudie

et les plans, ce qui

frappés du dedans

».

ne se contente pas de copier

il

la construit,

il

l'ossature

a

il

l'homme

cherche

il

d'une tête un aspect superficiel

dessous

«

qui décide la destinée.

Tinvisible,

d'abord

dissimule

il

rendre des formes habitées

l'homme apparent caractère

qu'il se sent

de fixer un peu du moral d'un

est «

tout le

Dès

?

commencé

sa réputation.

du J'ai

attente a été dépassée. Les har-

fois

délicates

de

et

fortes, l'équilibre

au milieu

savant des masses,

le

qui l'enveloppe,

sous l'insistance du regard, les

et,

lien

détails heureux, les réussites

la

figure

du peintre en verve,

en font une œuvre qui peut affronter toutes les

comparaisons.

On y

sent dans la maîtrise déjà la

générosité de l'artiste jeune encore qui

donne sans


EUGENE CARRIERE compter

et

répand librement sa richesse intérieure.

— La séance s'achève

an centre de

;

sculpteur est debout

le

;

le

le

regard vers

barbe rousse, où

le travail

de

tude,

il

sur

le geste,

vivantes, habituées

encore

une inquié-

visage,

le

glaise

la

un doute qui ne se dissipe pas, évoque

d'un Hamlet qui rêve

pensée se continue,

la

délicats, pétrissent

humide. Dans

monte,

encadrée d'une

fine,

tandis que les mains souples,

aux touchers

vaste toile,

noir, s'allonge,

tête

la

la

corps mince, serré dans

un jersey aux tons de velours porte

79

la

l'artiste

la

l'idée

moment même

beauté au

veut créer. Tout aux images qui l'occupent,

ne sent pas

le

beau

lévrier qui,

ramassé,

prêt à bondir, le pousse de la tête, et sollicite une caresse. rière

A

gauche, sur

un verre de

nymphe dont

cristal,

torse

le

du sculpteur, derun groupe de plâtre, une

la selle

se

renverse, une de ces

natures mortes, dont Carrière a

sens exquis de

la

secret,

le

lumière transfigure

adroite, dans la pénombre,

le

que

le

et spiritualise

;

modèle se prépare à

se rhabiller, le bras tendu, le corps penché en avant,

un corps savamment modelé, dont

les tons

ambrés

se pénètrent de clartés douces, et dont l'œil jouit

sans presque y songer, tant

il

demeure

subordonné dans sa beauté l'œuvre

qu'il

même

à son plan

à l'unité

;

de

achève.

Carrière varie ses procédés selon ses intentions et le caractère

de son modèle

:

il

peint dans

la


EUGÈNE CARRIÈRE

80

lumière les portraits de Roger Marx, de Galimard, d'une tonalité blonde, argentine

une ombre presque tragique élève A. Berton,

où se

sculpte

il

;

dans

masque de son

le

trahit l'attention inquiète

de

dans

de

l'homme condamné

à la solitude

ses semblables

construit la tête solide de son

;

il

ami Geffroy par plans en

relief, les

le

lière,

nets, le front

la société

dur

et puissant

yeux enfoncés dans l'arcade sourci-

regard direct, une tête où se marque

la

tension d'une volonté forte qui contient l'ardeur du

sentiment. Volontiers

il

assied des enfants autour

d'une table, devant un livre d'images, les frères et les soeurs,

du tout

petit

yeux de pervenche, à

au visage de lumière, aux l'aîné

dont

traits déjà

les

s'accentuent et se précisent (portraits des enfants

de Galimard, de Frantz-Jourdain) la

mère ou

Gaplain, de

Madame

fant

avec

fille

;

associe l'en-

il

l'aïeule (portraits

G. S.);

il

de

Madame

groupe un père

et sa

dans une attitude de tendresse, faisant res-

sortir l'expression

par

le

contraste, éclairant d'un

jour inattendu cette vie qui se dédouble, se prolonge et

refleurit

a peint,

en une vie nouvelle. C'est ainsi

qu'il

avec des nuances qui les distinguent, les

beaux portraits de Jean Dolent, d'Alphonse Daudet, de G.

Le

S.

portrait de

Dolent encadre les personnages

dans un milieu vivant où

l'air

circule,

la

lumière

baigne les figures et les objets familiers, les enve-


EUGÈNE CARRIÈRE

81

loppe et les accorde, les noirs saturés de

la

redin-

gote, les blancs et les roses dont est vêtue la

fillette,

ambré des

l'éclat

la faïence

de

visages, l'or

cheminée,

la

de bronze, un

tuette

atténué des cadres,

les fleurs pâles, la sta-

monde de choses visibles,

petit

qui toutes à leur plan se fondent dans l'unité qui les

harmonise. La scène répond à l'intimité du

milieu sier

Dolent assis,

;

de

qui montent

comme une

le

pendant du dos-

a vécu et aux souvenirs

il

près delui,

;

lafillette,

toute lumière,

main gauche sur le genou qui tient une fleur, aguiche

apparition, la

de son père, de le griffon

;

fine

visage se voile d'une mélancolie

le

sans amertume

sur

songe

la chaise,

main

la

la droite,

aux longs poils qui, joueur, se renverse

dos

et la regarde.

Jean Dolent se présente ainsi dans

le

rayonne-

ment apaisé des images qui se mêlent incessamment à sa pensée. Je garde le souvenir du dimanche ensoleillé où, ayant gravi la colline de Belleville,

pour

la

pitalier.

première

j'ai,

pénétré dans l'ermitage hos-

fois,

La maison, une maison de banheue, oubliée

avec quelques autres dans ce coin de Paris, est au

On

fond d'un petit jardin.

entre

;

le

corridor étroit,

sur ses deux faces, est couvert d'études choisies la salle

dont

le

du

portrait

de Verlaine par Carrière,

l'escalier tournant, étroit,

long du

;

rez-de-chaussée est ceinte de tableaux,

mur sombre

;

dans

des dessins grimpent

dans

les

le

chambres, pas de


EUGÈNE CARRIÈRE

82

meubles, mais partout accrochés, retournés, sans

comme

cadre,

en

liberté,

des

toiles, le

Saint Gérome

de Delacroix, un des plus beaux portraits d'homme qu'ait signés

œuvres

des notes

Mirevelt,

rares, et

de prix,

curieuses,

des

tout cela à l'abandon,

dans un désordre à demi-voulu, pour retrouver peut-être la surprise de la découverte dans la possession. Et le

de

c'est,

prodigieux, qui

Paris

avec

couronnement de

la

tantôt

s'étend,

le

l'amoureux d'art

gris bleu,

tantôt

poudroiement d'or des

soleils

s'est

Daudet

vérité est qu'il en existe deux.

eût achevé le la famille

appelé à bon

est

célèbre

Avant que

le

:

la

peintre

premier, sa beauté tragique effrayait

qui ne pouvait consentir à cette effigie

douloureuse. Des deux,

le

premier reste

et le

comment

Carrière

dessine dans ses

n'ont qu'à étudier ce visage émacié,

le

front dans la lumière, l'enchâssement la

le

plus

plus beau. Ceux qui veulent voir

émouvant

de

droit

».

portrait d'Alphonse

saillie

ondule,

s'allonge,

noyé dans une brume d'un

couchants. Jean Dolent

Le

soudaine d'un

respiration sourde d'une bête monstrueuse,

frémissant dans

ce

musée,

cet étrange

la petite terrasse, la vision

pommette,

l'arête

du

nez.

bons jours

modelé du de

l'œil,

la

La justesse

avec laquelle les plans sont établis, donne à cette

masque moulé. Daudet, en veston est à demi étendu sur un sofa, sa

tête le relief d'un

de velours noir,


EUGENE CARRIERE

83

main longue, amaigrie pose sur un coussin, bouche porte

le pli et

comme

la

la

torsion des souf-

frances qui trop souvent l'ont contractée

;

sa tête pâle, et de ses yeux un peu

troubles de

myope regarde dans se détache fillette

brune, dont

Comme

le vide.

du tronc

tige vivace

demi-séché qui penche,

à

tient la

il

une

détourne

il

main dans

la

sienne,

la

debout, monte vers la lumière et la vie. Le visage, modelé avec une sorte d'acuité par la maladie,

deviner

laisse

beauté d'autrefois, les cheveux

la

bouclés, la barbe soyeuse,

cœur sans

ce

;

charmant où passent de destin,

lui est fait,

mais

il

haine, cet esprit

claires images, s'étonne

du

ne se révolte pas contre

le

douleur est une étrangère,

la

Taccepte pas,

nez aux ailes frémis-

grands ouverts aux parfums, au

santes, les sens

son, à la lumière

mal qui

le

subit

la

il

comme

ne

il

quelque chose

d'absurde et d'humiliant.

Dans Carrière

le

second

seul, livré à il

s'observe,

plus

Alphonse Daudet

sapensée, il

comme me

portrait,

lui-même,

il

est

se défend et la douleur ne s'exprime

que par

il

plus

en présence des autres,

l'effort

même

pour

en

l'expression. L'écrivain n'est plus dans

du matin,

disait

le

n'est

se

redresse,

assure son regard, et

il

le

contenir le

monocle à

négligé l'œil,

se tourne vers la petite

il

fille

qui, d'un geste càhn, s'inchne et s'appuie contre sa poitrine. Ces

deux

portraits, si différents et si vrais, 12


EUGENE CARRIERE

84

nous apprennent ce qu'est

un

ne

artiste, qu'il

la

la

ressemblance pour

copie pas, qu'il la discerne et

la choisit, que, selon l'émotion qu'il reçoit

de son

modèle, sa composition tout entière, dans ses lignes, dans son ordonnance, se modifie, se transpose. Les portraits de femmes de Carrière achèvent de

montrer ce

y a de souplesse, de ressources, de variété dans cet art, que son originalité a fait qu'il

accuser d'être uniforme.

du recueillement,

il

Ici

encore

il

garde

se plaît à surprendre l'être

dans sa vie intime, loin des regards curieux sans sortir du langage simplifié qui est

y mettre des accents inattendus,

sait

grâce, la

la

fierté,

goût

le

mille

l'élégance,

le

la

;

mais,

sien,

il

tendresse,

nuances du

charme féminin.

Une jeune femme en robe de

bal est à

demi

étendue sur un divan dans une pose légère, à peine appuyée, où se trahit une vague inquiétude

main sin

;

fuselée,

aux doigts

fins, s'allonge

;

la

sur un cous-

des fleurs aux teintes pâles meurent sur un

guéridon

;

la

bouche mêle à son demi-sourire une

ancienne de

habitude

tristesse.

Un

long boa de

fourrure noire court autour du corps, en accom-

pagne

les

ondulations; les blancs satinés de la robe

lamée d'argent se marient aux roses pâles des rubans qui, çà la jupe,

sur

le

et là, s'égrènent sur le corsage,

coussin, et de

cette

sur

richesse des

choses se compose une harmonie discrète,

comme


EUGENE CARRIERE si elle

d'une

ne nous

àme

arrivait qu'à

85

travers la mélancolie

Sans couleurs

avec

brillantes,

des

atténuées, Carrière sait rendre de

grâce heureuse, involontaire, dont

appeler

M^e

qui en sait le néant (Portrait de

l'éclat

des tons joyeux.

sensations

femme

la

la

G.).

semble

fleur

dans

Peint

la

des

tonalités grises, de parti pris éteintes, le portrait de

madame Arthur Fontaine montre comment

trouver dans son langage les nuances délicates,

sait

les

l'artiste

harmonies caressantes qui

lient

l'œuvre à celui du modèle. Debout,

émerge de

le

la

charme de

jeune

femme

pénombre qui de bas en haut s'allège,

la

se pénètre de clarté, réveille les tons vert pâle de la

robe, baigne dans une lumière

dont

les

yeux

et la

douce

bouche vont sourire

des manches boufTantes,

les

;

visage

le

pris dans

bras nus s'arrondis-

sent pour attacher un bouquet à la ceinture, tête

aux cheveux légers, vers laquelle

monte avec

la

le

et la

regard

lumière, posée sur le col fm, est la

fleur rare qui accomplit la

forme du vase aux lignes

fragiles et pures.

Dans ses

portraits,

comme

dans ses tableaux.

Carrière volontiers rapproche la

donne au groupe une

structure,

femme de

une forme où se

de cette vie qui se multiplie sans

symbolise

l'unité

se perdre.

Dans son admirable Famille,

enfants à la

eux

il

l'enfant,

il

mère une couronne, une parure

la glorifie

;

des

fait ;

en

toutes les lignes dans leur ara-


EUGENE CARRIERE

86

besque savante partent

y ramènent,

d'elle,

celui qu'elle serre encore contre fille

au

son sein à

visage, c'est sa vie qui

fin

c'est l'image

et

la

de

jeune

recommence,

d'elle-même qui se répète, ce sont ses

sentiments qui refleurissent au printemps de ces

âmes allumées à la sienne. Il détache l'enfant de la mère comme le rameau du tronc, et de la grâce fait naître le charme ingénu près de la grand'mère ;

assise, lasse d'avoir vécu,

évoquent fille

dont

les deuils anciens,

au visage

clair,

aux yeux

les

vêtements noirs

met debout

il

la petite

riants, à la curiosité

confiante, qui ne sait pas tout ce qu'elle pourrait

apprendre d'elle-même

et

de son propre destin,

rien qu'à se retourner vers le visage tendre et grave

de

l'aïeule (Portraits

de Mme g.

Ceux qui ont vu Carrière

S.,

de Mme c^y qui de

travailler,

la

conception à l'achèvement ont suivi quelques-uns

de ses tableaux, de ses portraits, assisté à leur lent

douloureux enfantement, savent ce

et

qu'il

faut

penser des critiques naïfs qui regrettent parfois

que ces plus

au

«

esquisses

»

magistrales n'aient pas été

poussées. Carrière ne va

tout,

il

pas de

ne peint pas par morceaux,

la

il

partie

n'avance

pas sagement, prudemment du front aux yeux pour continuer par

le

nez ou les pommettes

du sculpteur,

il

construit son tableau d'ensemble,

il

en équilibre

peu à peu

il

les

masses,

dégage

il

la figure

en

;

à la façon

établit les plans,

des fonds,

il

enlève


EUGENE CARRIERE

comme

les voiles successifs qui

la

87

cachent

et lui

dérobent sa pensée. Dans ce travail simultané n'est jamais sûr

en question elle

il

;

;

de rien,

son œuvre

l'idée

en

lui

et

attente,

jamais ne dit

d'abord l'impression

qu'il

espère

la

pour

la

voir

;

qu'il

en attend, ce qu'elle doit

dire, ce qu'elle doit révéler d'un caractère,

de

vit

il

son travail est un effort, un appel au génie mystérieux qui tout son secret. De son œuvre il sait

se créer son expression

une

remet tout sans cesse

vit

cherche son procédé dans son sentiment,

en insistant sur

c'est

il

il

exprimer

réahté invisible, et c'est ainsi qu'il va vers

ces visages, pénétrés de vie intérieure, que, ses assises fortement établies,

il

peint un regard et ces

bouches étonnantes, ces bouches mobiles, frémissantes,

sourient et qui

qui

d'efforts, qui

Après tant

ne seront pas soupçonnés, quand

est arrivé à

son but,

précisions

superficielles

morale

parlent.

qu'il a tant

il

s'arrête, sans se soucier

qui

cherchée.

limiteraient

la

il

des vie


EUGÈNE CARRIERE

VIII

Carrière ne pouvait rester indifférent à la beauté

de

la

forme humaine. La

cliair,

comme

marbre,

le

se pénètre de lumière, elle se modèle, elle se construit

par les oppositions, par les passages délicats

de l'ombre à

la clarté.

Dans ses études de nu, son

sens subtil des valeurs, ses harmonies discrètes, ses fonds qui

reculent la figure, la détachent et

l'enveloppent,

son émotion

grave devant

mêlent aux caresses de son pinceau aspect de

Même

à peindre «

yeux

il

alors,

il

cruels,

!

il

la

grâce

et autant

qu'aux

ne veut pas

femme avec des yeux

indifférents

de ceux qui se plaisent à

n'est pas

«

Un modèle

un mot qui rend banal,

devrait être

sais quel

Il

souligner ce qui l'humilie.

absurde

y>,

parle à l'esprit et au cœur. la

vie

n'oublie point qu'il a

une forme habitée

qu'on regarde

ou

ne

beauté morale qui spiritualise

la

des corps.

je

la

sacré.

!

Quel mot

vulgaire, ce qui

L'autre jour je disais à

mes

élèves qu'ils devraient dessiner à genoux, religieu-

sement. Quand

le

modèle ouvre

c'est la nature qui entre

:

la

porte de

l'atelier,

en face d'un beau paysage,


EUGENE CARRIERE ils

s'exclameraient, et

femme

ironique cette

sa

de modèle abaisse

les

la

vie

accueillent d'un regard

qui se dévêt devant eux, leur

de

dévoile

ils

beauté.

choses

:

Ce mot imbécile on ne regarde pas

ou on regarde à peine ce modèle,

même

académie, la

89

cette

semaine précédente, au

et l'on fait

semaine que

lieu d'observer

une

de

celle

chaque

la

fois

avec des yeux curieux, avides, cette forme dans

son caractère Carrière,

et

au

dans sa nouveauté. début, a

peint

»

avec

de

pure

la

lumière sur des fonds sombres de petites figures

nues

d'une délicatesse incomparable.

vraiment les maîtres qui ont su

aux yeux

le

relevé ce

charme sensible par

l'intimité,

devant

la vie

le

il

a

recueillement, par

qui est la poésie de son œuvre. Dans

vaporeuse,

un vase de

d'argent,

et,

blancheurs froides

relie

mieux donner

par l'espèce de surprise et d'admiration

objets de toilette,

les

égalé

contact caressant de la chair, mais

une ombre transparente,

un bassin

le

a

Il

au fond, dont

elle

noie

il

les

une psyché,

fleurs,

par ces accents qu'appuient

du

et bleuissantes

émerge radieuse,

que modèlent des clartés argentines

:

linge,

il

la figure

une nuque

que n'eût pas désavouée Watteau, un corps dans l'abandon du sommeil, un dos nacré que caresse,

penchée,

une jeune femme assise sur son la poitrine

nesse, le bras

la

lumière

lit,

la tête

soulevée d'un souffle de jeu-

tout entier perdu dans la longue


EUGENE CARRIERE

90

chevelure noire qu'elle peigne,

cherche

n'exprimant que

le sourire,

dont on

le visage,

mélancolie

la

de sa vaine beauté.

La

belle étude qu'il exposa en 1888 fait sortir

contraste un effet puissant

répandus sur lette

sur

;

:

les épaules, la

de dos,

femme

à

sa toi-

fond, dont les tons chauds rappeUent

le

d'un vieux bronze,

la patine

cheveux

les

est

du

ficence la chair

avec magni-

éclate

où s'indiquent

les

une coulée de lumière qu'agitent

modelés

larges,

les palpitations

de

un corps riche, aux formes pleines, d'une

la vie,

belle matière dont l'argent s'avive et s'échauffe de

tons fauves.

Plus tard,

n'oppose plus avec cette franchise

il

pour

figure au fond

plus

dans

l'effet

le

l'en

détacher,

contraste,

il

belle pâte, à la matière fluide,

regrettent

;

ne cherche

semble moins préoc-

cupé du charme sensible, direct

il

la

renonce à

la

— quelques-uns

le

;

il

son langage, pour répondre à des

pensers nouveaux, se modifie, devient plus spirituel et plus abstrait.

fond

;

au

en naît

;

lieu

et,

figure ne

tranche plus sur

le

y plonge, elle forme vivante où la lumière se

de s'en séparer,

elle est la

concentre, précise

La

comme

elle

cristaUisant ses fluidités,

en une apparition distincte.

se

L'harmonie

n'est plus faite d'éléments contrastés; plus

complexe,

plus vivante, elle repose sur des rapports subtils

moins

intense, plus

variée dans ses nuances,

;

la


EUGENE CARRIERE sensation est toute pénétrée rien souligner,

91

Sans

d'intelligence.

une lumière douce, enveloppante,

poésie du silence et de l'intimité, modèle un dos

de

la

nuque aux

tations

de

caressée

(*).

la

de toutes les palpi-

reins, et agite

vie,

Le changement dans

le

amoureusement

forme

la

procédé ne

fait

que

ému

duire la manière nouvelle dont l'artiste est

devant

la

nature. Carrière obéit loyalement au pro-

grès de sa pensée,

il

ne consent pas à se mécaniser,

à reproduire ce qu'il

ne sent plus. Ses premiers

nus ont un charme de jeunesse, le

ils

disent surtout

de regarder une belle forme

plaisir

rayonnement de sibilité

tra-

lumière

la

;

moins prompte, plus

mêle

l'idée

dans

la

aux images,

Il

exprimer de simple d'une

sent

le

à la

liée

l'artiste

forme humaine

plus haute.

femme

et

trouve

symbolisme d'une l'anime

qui se voile

il

:

le

le

le

geste

tragique

d'une âme. Les figures nues, par lesquelles personnifié les

dans

Sciences,

sa

vie

corps peut

dans

met

le

la sen-

réflexion,

cherche

mieux tout ce que

l'esprit qui

dans

à mesure que

décoration

il

a

de

l'Hôtel de Ville, d'une facture large, simple, forte-

ment de

unifiée, n'ont pas

chitecture

(*)

seulement

le

rare mérite

se situer dans leur milieu, de s'accorder à l'ar;

par

Etude appartenant

leurs

à

gestes graves,

par

leurs

M. G. S. 13


EUGÈNE CARRIERE

92

inquiètes,

attitudes

par leurs courbes sinueuses,

elles disent les angoisses, les

lassitudes «

et les élans

tourments, les grandes

aussi de l'àme moderne,

du

toutes les curiosités et toutes les tristesses

savoir

».

Depuis quelques années, Carrière a été tenté par le

paysage.

même

a cru découvrir que tout parle le

Il

langage, que les transparences

fluidité

des eaux,

la

du

structure de la terre, les ondu-

lations des collines, l'élan des arbres, les formes, par

même

la

et traduire.

La

que toutes

des analogies plus ou moins loin-

taines, se lient à la

sives de

ciel et la

forme humaine, sont expres-

pensée que

terre,

sans

l'artiste doit

entendre

son vêtement colorié

d'herbes ondoyantes, sans sa parure de fleurs, les arbres sans le

ciel

et

le

les

couronnement des verts

feuillages,

eaux sans Fazur qui en

est la joie

visible. Carrière ose cette simplification.

nature avec

la

aux valeurs, à

lumière la

et ses gradations,

Il il

peint la s'attache

forme, à ce qu'elle a de décoratif

et d'expressif, et la

surprise que

ces synthèses hardies souvent

causent d'abord s'achève

en

révélation inattendue de la beauté des choses.

Goyen,

le peintre délicat

Hollande, a laissé

du

ciel et

une

Van

des eaux de

la

quelques études au brun, des

préparations peut-être, qu'il n'a pas cru pouvoir dépasser. Le

la

musée du Louvre

a

un rare tableau

couleur indiquée des eaux se marie très heu-


EUGENE CARRIERE reusement aux bruns de rive

de

du

la

la colline

basse qui suit

large fleuve. Parce qu'il est

lumière,

gravure ou

93

fait

de

poésie

la

paysage de Corot reproduit par

le

la

la

photographie garde une grande partie

la

de son charme pour

l'œil et l'esprit.

Carrière a su évoquer dans la lande bretonne les

arbres tordus par

vent de mer,

le

ses constructions cyclopéennes,

ques aspects de

la

trop hardie répond à

des sentiments trop personnels

ne se reconstitue plus dans concrète.

et

dans

Il

;

l'évocation voulue

l'esprit

en une image

peint des nocturnes

a

brumes parisiennes d'un

les

puscule d'hiver

résumer quel-

nature en images expressives.

Parfois aussi l'interprétation

curieux,

surtout, dans

montagne, avec ses masses solides,

les Pyrénées, la

distincte

cré-

des formes devinées, quelques

:

lumières, une voiture entrevue, l'apparition d'un cheval blanc l'a

il

;

aime

la vision

souvent observé de

ami Dolent à perdu dans

nuées qui

fumées qui montent

et

de pensées soHtaires qui dépassent

la petite

la

tel

quïl

terrasse de son

prolongé jusqu'à l'horizon,

Belleville, les

de Paris,

le

couvrent, dans les

d'où sortent,

comme

et durables, les

foule

grouillante

autant

monuments des maisons

anonymes. de Paris

C'est cette vision

sa

décoration

de

Sorbonne.

la

s'étend, se prolonge

qu'il a choisie

;

La

ville

pour

géante

les toits se suivent, se près-


EUGÈNE CARRIÈRE

94

comme

sent

des vagues sans

fin

çà et

;

là,

rochers

de cet océan, émergent dans l'ombre les dômes, les clochers, quelque masse puissante dont la

forme fait

pas

n'est

de vapeurs, de fumées, de

hommes

traîne

vantes que

la

A

blêmissante.

le ciel

sous

la

:

la

femmes dominent

plus âgée est assise,

grande lassitude d'avoir vécu

elle-même

voit

qu'elle

elle

détourne

des

tempêtes subies

de

grande

la

ses

et

souvenirs

d'elle,

debout, soulevée, grandie par

l'espérance, se dresse la Jeunesse

mains à sa

d'extase, elle porte les

sa

contemplation

l'ivresse

est

tience de savoir et d'agir,

bras levés se

livre

dans

En

à

comme l'élan

la fascination

et le

;

:

dont

l'image s'avivent

mais près le

désir et

dans un geste

tête et regarde

va

de

;

de vivre, l'impacorps tendu, les

l'emporter

et

elle

l'abattre

la fournaise.

étudiant l'œuvre d'Eugène Carrière,

montrer comment

c'est

;

des ailes prêtes à l'essor, qui

la

elle

ville

sa rêverie évoque

la tête,

douleur des blessures reçues

la

mou-

pierres

orageux, colore d'une clarté

gauche, deux

vision redoutable plie

des

la respiration

mer de

sur cette

un nuage

;

lueur pâle d'une aurore, qui s'ouvre

un chemin dans

en

par l'espace

abolie

elle

tient à

son

j'ai

esprit,

voulu à

sa


EUGÈNE CARRIÈRE manière propre d'éprouver

comment aussi elle ment elle respecte resque, J'ai

si elle

conté

95

nature et la vie, et

la

rentre dans la tradition,

logique du

la

langage

compitto-

en trouve des applications nouvelles.

de Carrière,

la vie

elle

de

méritait

de l'homme chez lui ne se l'artiste. En prenant l'initiative de sa destinée, il a été dans la voie où le portait sa nature, mais Têtre

il

sépare

:

pas

a appliqué sa réflexion à son instinct et

rien laissé de

lui-même

volonté.

fait

Il

a

qu'il

sa tâche en

bon ouvrier

indépendance n'est que sa subordination à supérieur auquel

il

s'est

ne

voit, qu'il se plaît à

Ils

voir,

l'art

de

est

l'idéal

étonner par une sin-

pour

être remar-

mensonge

est stérile, qu'il

la vie. Il faut être

ému pour émou-

ignorent que

est la négation

son

:

peint autrement

qu'il

gularité voulue, qu'il se déguise

qué.

la

dévoué.

Quelques-uns s'imaginent qu'il

n'a

il

achevé par

n'ait

le

sincérité.

Fait

d'observation,

de

logique, de sentiment, le métier de Carrière n'est

que son

esprit

dans son langage. Ses procédés ne

s'entendent que par les lois de son imagination et

de sa sensibiUté. Mais le

vain orgueil d'être

«

la vraie originalité n'est

différent », la fantaisie sans

règles qui isole l'individu des autres est le privilège

pas

hommes

:

elle

d'éprouver dans leur fraîcheur, de

renouveler par une sorte d'ingénuité les sentiments éternels.

Quiconque descend assez profondément en


EUGENE CARRIÈRE

96

lui-même y retrouve l'humanité. Le grand

artiste

chose de nous-mêmes,

nous possédions sans dait

cœur de nous apprend quelque

l'intelligence et le

ne nous donne que ce que

il

le savoir,

que ce

des qualités qui sont de tous les temps, sentiment et

le

du

dépen-

qu'il

de nous d'acquérir. L'art de Carrière vaut par vaut par

par l'arabesque émouvante

la raison,

dessin, par le

il

modelé des formes, par

la

cons-

truction des groupes, par le sens délicat des valeurs,

par leur combinaison en harmonies expressives, par l'unité de l'œuvre vivante dont toutes les parties s'appellent et conspirent,

jours belles par les

Les choses sont tou-

a.

mêmes

raisons

».

Quelques-uns, sans doute, refuseront de se laisser convaincre

;

ils

s'obstineront à

leur est pas donné, la variété

ils

demander ce qui ne

regretteront la joie des tons,

des couleurs

;

ils

remarqueront que

le

peintre renonce de plus en plus à la belle matière,

à la pâte lumineuse qu'il aimait à ses débuts

trouveront ce langage ront à

l'artiste

qu'il

triste, abstrait

laisse trop

;

ils

ils

;

objecte-

à interpréter, à

deviner, que ce n'est pas à l'imagination

du spec-

tateur de finir ses tableaux, que, sous prétexte de

mouvement

rendre

le

vie,

n'arrête

il

hmites

assez

pensée quand

et

précises, il

comme

pas toujours qu'il

la

la

fluidité

indique

devrait l'affirmer. Les

cherchent avec bonne

foi

de

la

forme dans des parfois

sa

hommes

qui

sont exposés à se trom-


EUGENE CARRIERE per

;

il

faut

œuvres d'un

97

quelques siècles pour que toutes les artiste

deviennent des chefs-d'œuvre

:

mais à ces critiques générales, toutes négatives, Carrière a répondu,

comme

suré ceux qui pouvaient le justifient.

il

l'être

convient

d'aller

il

a ras-

par des œuvres qui

Son désintéressement, sa

résolution entêtée

;

sans

sincérité, sa

précipitation

jus-

qu'au terme de ce qu'il peut faire rendent les conseils superflus

avec

la

:

laissons-le poursuivre son travail

confiance qu'il a mérité de nous inspirer.

V S?



TABLE DES GRAVURES



Frontispice

Portrait d'Ewjène Carrière.

:

d'après une toile du peintre.

Avant-Propos. Pages

EN-TÈTE

:

Maternité,

GUL-DE-LAMPE

tirage en bistre

Mains

:

Chapitre

Fragment de décoration dissement,

jjour la mairie

Chapitre tirage

3

du

XII<^

arron14

II

en sanguine

Chapitre

...

I

tirage en sanguine

Scène maternelle,

Etude de

1

d'eîî/a/lf, tirage en sanguine

28

III

fillette, tirage en sanguine

14

Chapitre IV Page d'album,

tirage en sanguine

53


TABLE DES GRAVURES

102

Chapitre V

Amour

maternel,

tirage en sanguine

g5

Chapitre VI TĂŞtes d'enfants,

tirage en sanguine

75

Chapitre VII Mains maternelles,

tirage en sanguine

87

Chapitre VIII Gestes et altitudes de

femmes,

tirage en sanguine

....

97


EUGENE CARRIERE, Séailles,

a

été

par Gabriel

d'imprimer

achevé

le

30 Mai 1901, aa nombre de six cent trente exemplaires

chine

par

la Société

de Châteaudun, pour

Edouard

dont trente sur

les

Typographique Editions d'art

Pelletan.

Les compositions

d'Eugène Carrière

ont été gravées par Mathieu.





EDITIONS D'ART

EDOVARD PELLETaN 125

BovIevard

51 Germain

PARIS

Catalogue 1901



D'àRT

éotlfonS

€Dou^iRD

Le

véritable

PeKeT^n

luxe

d'un livre doit

s'entendre de la supériorité de l'œuvre écrite,

de

la

beauté de V illustration,

de l'appropriation de la typographie, de

la perfection

du papier

et

exemplaires.

du

tirage, de la qualité

du nombre

limité des



Paru en 1896

ALFRED DE MUSSET

LES NUITS ET

SOUVExNIR Illustrations de A.

Gérardin

GRAVÉES PAR FLORIAN

Un volume

in-i et in-8 raisin, imprimé par Laliure. tiraoe U presse a bras, limité d 500 exemplaires

la

numérotés.

IN-4,

Un «emplaire

-

TEXTE RÉIMPOSÉ

:

-

sur satin, avec une double suite d épreuves signées, sur japon et sur chine Un exemplaire - X« 2 sur whatman, contenant tous les dessins originaux avec une double suite d'épreuves Preuves a d'ar! artiste signées, sur japon et sur chine. 23 exemplaires de 3 à 25. sur japon ancien à la forme contenant une aquarelle originale et une double u te "«"*-^^^' ^"'- J'-»!'"" '' -^ '^hine.l: 1

-

-

-

t^™:^"""'^

500 fr. IN-8

25

exemplaires

-

RAISIN

:

-

de 20 à 50, sur japon des manufactures impériales, avec un tirage à part de toutes les grav-e sur japon ancien et sur chine, au prix net de Vo^ ù 50 exemplaires, de 51 à 100, sur chine fort, avec un tirage à ch[ne au cnine, lu'nrK "^^r^'"'"'^^' prix ne; de .

.

.

^"'-

^^P^"

ancien et^sur o/,n

*•

100 exemplaires, de 101 à 200, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHIVIA EZ AEI), avec un

tSe

a part sur japon ancien,

au prix de ioq f" 300 exemplaires de 201 à 500, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHIVIA EZ AEI), au^pnx 50

.—

1

fr.


Paru en 1896

HÉGÉSIPPE MOREAU

PETITS CONTES MA SŒUR • 63 illustrations

de

L.

Dunki

GRAVÉES PAR CLÉMENT BELLENGER In-'t et in-S,

imprimé par Laluire, tirage d la presse à bras, limité à 350 exemplaires numérotés. IX-1,

TEXTE RÉIMPOSÉ

Un exemplaire

unique, sur satin, avec six aquarelles peintes sur l'exemplaire, et une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. Un exemplaire N° 1 sur whatman, contenant tous les dessins originaux avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon ancien et sur chine. Un exemplaire N" 2 — sur wliatman, contenant sur chacun des faux-titres un dessin original (soit 6), et une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon ancien et sur chine. 2G exemplaircs.de 3 à 28, sur Japon ancien à la forme, contenant une aquarelle ou un dessin original, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine, au prix nef de 600 fr. 2 exemplaires, de 29 à 30, sur vélin blanc à la forme, des papeteries du Marais, contenant une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon ancien et sur chine.

RAISIN

IN-8

25 exemplaires, in-8 raisin, de 31 à 55, sur

japon des manu-

factures impériales, avecuntirageàpartdetoutes les gravures, sur japon ancien et surchine.auprix/icfde 250 fr. 50 exemplaires, de 56 à 105, sur chine fort, avec un tirage à part de toutes les gravures sur japon ancien et sur chine, au prix net de 225 fr. 100 exemplaires, de 106 à 205, sur vélin à la cuve, des papeteries

du Marais

(filigrane

KTHMA EZ

AEI),

avec un tirage

à part sur japon ancien ou sur chine 150 fr. 145 exemplaires, de 206 à 350. sur vélin à la cuve, des papeteries du Marais (filigrane KTHMA EZ AEI) COfr. .

2

.

.


Paru en 1896

FRANÇOIS VILLON

Ces ï^allabcs 70 illustrations de A.

Gérardin

GRAVÉES PAR JULIEN TINAYRE /n-4

et

1/1-5,

imprimé par Lahure,

tirage d la presse à bras,

limité à 350 exemplaires

IN-4.

Un Un

numérotés

TEXTE RÉIMPOSÉ

exemplaire N° 1 sur whatman, contenant tous les originaux, avec une double suite dépreuves d'artiste signées, sur japon ancien et sur chine. exemplaire X- 2 sur whatman, contenant les maquettes et croquis de l'illustrateur, avec un motif à l'aquarelle sur chacun des faux-titres (soit 33) et une double suite d épreuves d'artiste signées, sur japon ancien et sur

chine. 25 exemplaires, de 3 à 27, sur japon ancien, contenant une aquarelle originale et une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon mince et sur chine, an prix net

de

600

fr.

3 exemplaires, de

2cS à 30, sur vélin du Marais à la forme, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon ancien et sur chine.

IN-8 P..\ISIX

25 exemplaires, de 31 à 55, sur japon des manufactures impériales, avec un tirage à part de toutes les gravures, sur japon mince et sur chine, au prix /lef de 250 fr. 50 exemplaires, de 50 à 105. sur chine fort, avec un tirage à part de toutes les gravures, sur japon mince et sur chine, au prix net de 250 fr. 100 exemplaires, de 106 à 205, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais Hiligrané KTHMA E2 AEI), avec un tirage à part sur japon ancien ou sur chine de toutes les gravures 150 fr. 145 exemplaires, de 106 à 350, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais ( tiligrané KTHMA EZ AEI). 75 fr. .

.

.

.


Paru en 1896

THÉOCRITE

L'OARISTYS Texte grec, et traduction nouvelle de M. A. Bellessort PRECÉUHE

D'UNE LETTRE DE SICILE Par M. Anatole l'Académie

lie

FRANCE

Fraïiçaise

• Illustrations de

Geohges Bellengeu

GRAVÉES PAR In-i

et in-S,

E.

imprimé par Lahure,

FROMENT tirage à

la

presse à bras,

limité d 350 exemplaires numérotés.

IN-4,

Un exemplaire

TEXTE KÉIMPOSÉ

— X" —

sur whatman, contenant tous les dessins originaux, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. Un exemplaire N° 2 contenant une aquarelle originale sur chacun des faux-titres, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. 25 exemplaires, de 3 à 27, sur japon ancien à la forme, contenant une aquarelle originale, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine, au prix net de 300 fr. 3 exemplaires, de 28 a 30, sur vélin du Marais à la forme, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. 1

IX-S RAISIX 50 exemplaires, de 31 à 80, sur japon des manufactures impériales, avec un tirage à part de toutes les gravures, sur japon et sur chine, au prix net de 150 fr. 100 exemplaires, de 81 à 180, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (fdigrané KTHKIA EZ AEI), avec un tirage à part sur chine fort de toutes les gravures 75 fr. 170 exemplaires, de 181 à 350, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHMA El AEI). 30 fr. .

.

.

.


Vient de paraître

:

THÉOCRITE

LES SYRACUSA[NES Texte grec, et traduction nouvelle de M. A. Bellessort Illustrations de

Marcel Pille

GRAVÉES PAR FROMENT FILS

In-i

et iii-S,

imprimé par Laluire, tirage à la presse d bras, limité à 350 exemplaires numérotés.

TEXTE RÉIMPOSÉ

IN-4,

- NM -

Un exemplaire

sur whatnian, contenant tous les dessins originaux, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. Un exemplaire N" 2 contenant une aquarelle originale sur chacun des faux-titres, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. 10 exemplaires, de 3 à 27, sur japon ancien à la forme contenant une aquarelle originale avec une suite d'épreuves d'artiste signées, sur chine, au prix net

-

-

,

U ,o

*^®

,.••,••

300

;

fr.

exemplaires, de 28 a 30, sur grand vélin du Marais à la forme, avec une suite d'épreuves d'artiste signées sur chine, au prix ;i(>^ de 300 fr I.\-8

RAISIN

50 exemplaires, de 31 à 80, sur japon des manufactures impériales, avec un tirage à part de toutes les gravures

sur chine, au prix

100 exemplaires, ries

de

du Marais

Jief

de

81 à 180, (filigrane

160

sur vélin à

KTHMA EX

la

a part sur chine de toutes les gravures

avec un tirage

170 exemplaires, de 181 à 350, sur vélin à la cuve des teries du Marais (tiligrané KTHMA ES AEI)

5

fr'

cuve des papete-

AEI),

80 fr

pape35 fr


Paru en 1897

LES AVENTURES

DERNIER ABENCERAGE CHATEAUBRIAND -*-

44

illustrations

de

Vierge

Daniel

GRAVÉES PAR FLORIAN In-'f et in-S Jésus,

imprimé par Laliure.iiraged

presse d bras,

In

limité à 350 exemplaires numérotés.

IN-4,

Un exemplaire

TEXTE RÉIMPOSÉ

— N° —

sur whatnian, contenant tous les originaux avec une double suite d'épreuves japon et sur chine. exemplaire sur whatnian, avec un dessin N" 2 original sur chacun des faux-titres et une double suite d'épreuves d'artiste signées sur japon et sur 1

dessins

d'artiste signées, sur

Un

,

chine. 15 exemplaires, de 3 à 17.

sur japon ancien à la forme, contenant une aquarelle originale, une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine, au prix net de 600 fr. 13 exemplaires, de 18 à 30, sur vélin du Marais à la forme, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur

japon

et

sur chine. lN-8 JÉSUS

15 exemplaires,

de

31

impériales, avec

a

45,

manufactures

sur japon des

un

tirage à part de toutes les gravures sur japon ou sur chine, au prix ne/ de 300 fr. 55 exemplaires, de 46 à 100, sur chine fort, avec un tirage à part de toutes les gravures, sur chine, au prix nef de. 250 fr. 100 exemplaires, de 101 à 200, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHMA ES AEI)avec un tirage à part sur chine de toutes les gravures, au prix de 150 fr. 150 exemplaires de 201 à 350 sur vélin à la cuve des .

,

papeteries

de

.

.

.

,

du Marais (fdigrané KTHMA E2

AEI) au prix 75 fr.


Paru en 1897

ALFRED DE VIGNY

SERVITUDE ET GRANDEUR MILITAIRES I

SOUVENIRS DE

SERVITUDE MILITAIRE 84

illustrations

de

Dunki

GRAVÉES PAR CLÉMENT BELLENGER

In-i

Un Un

et in-S,

imprimé par Lahiirc, tirage d la presse d bras, limité d 350 exemplaires numérotés.

IN'-4, TEXTE RÉIMPOSÉ exemplaire N° 1 sur whatman, contenant tous les dessins originaux avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. exemplaire N" 2 sur whatman, contenant sur chacun des faux-titres un dessin original, et une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur

chine.

exemplaires, de 3 à 17, sur japon ancien, contenant un dessin original, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine, au prix nef de 600fr. 13 exemplaires, de 18 à 30, sur vélin blanc à la forme des papeteries du Marais, contenant une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. 15

ix-8 JÉSUS

de

sur japon des manufactures impéavec un tirage à part de toutes les gravures, sur japon ou sur chine, au prix /lef de 250 fr. 55 exemplaires, de 4G à 100, sur chine fort, avec un tirage à part de toutes les gravuressurchine,auprixne/de 225 fr. 100 exemplaires, de 101 à 2Ù0, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHMA EZ AEI), avec un tirage à part sur chine fort 150 fr. 150 exemplaires, de 201 à 350, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHMA EZ AEI). GOfr. 15 exemplaires,

31 à 45,

riales,

.

.


Paru en 1898

ALFRED DE VIGNY

SERVITUDE ET GRANDEUR MILITAIRES II

SOUVENIRS DE

GRANDEUR MILITAIRE 51 illustrations

de

Dlnki

GRAVÉES PAR CLÉMENT BELLENCIR

In-i

et

in-S,

imprimé par Lahure,

tirage d la presse d bras,

limité a 350 exemplaii'es numérotés.

IN-4,

Un exemplaire

TEXTE RÉIMPOSÉ

— N" —

sur whatman, contenant tous les dessins originaux, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. Un exemplaire X''2 sur wliatman, contenant sur chacun des faux-titres un dessin original et une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. 15 exemplaires, de 3 à 17, sur japon ancien, contenant un dessin original, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine, au prix net de 600 fr. 13 exemplaires, de 18 à 30, sur vélin blanc à la forme une double des papeteries du Marais, contenant suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. ix-8 JÉSUS 1

15 exemplaires, de 31 à 45, sur japon des manufactures impériales, avec un tirage à part de toutes les gravures, 250 fr. sur japon ou sur chine, au prix net de. 55 exemplaires, de 46 à 105, sur chine fort, avec un tirage à part de toutes les gravures sur chine, auprixnerde 225 fr. 100 exemplaires, de 106 à 205, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHMA EZ AEI), avec un tirage 150 fr. à part sur chine fort 150 exemplaires, de 206 à 350, sur vélin à la cuve des pape60 fr. teries du Marais (filigrane KTHMA EZ AEI) .

.

.

...

8


Paru en 1898

SULLY PRUDHOMME

iLFRED DE VIGNY SONNET

ILLUSTRATIONS Georges Bellenger

DuNKi

,

Bellery-Desfontaines, Florian

et

GRAVÉES PAR FLORIAN

Plaquette in-i et in-S Jésus, imprimée par Lahure, tirage à la presse d bras, limité d 150 exemplaires numérotés en chiffres arabes, plus 50 exemplaires de présent numérotés en chiffres romains, dont iO pour l'Académie française :

Exemplaire unique, sur whatman, contenant le manuscrit du poète avec les dessins originaux et les fumés du graveur. in-4 sur japon d'épreuves d'artiste signées.

12 exemplaires

ancien

une

avec

suite

3 exemplaires in-8 Jésus sur japon des manufactures impériales avec une suite d'épreuves d'artiste signées, au 50 fr. prix de 140 exemplaires in-8 Jésus sur vélin à la cuve des papeteries 25 fr. du Marais (filigrane KTHMA EZ AEI)à. .

Il

Dont

a été

10 sur

tiré

.

.

25 collections d'épreuves d'artistes signées

Japon ancien

20 15

à

Et 15 sur Chine, à

9

fr. fr.


Paru en 1898

ALFRED DE VIGNY

LES DESTINÉES Précédées de

moïse • 46 illustrations de Georges Bellenger

GRAVÉES PAR FROMENT

Un volume

imprimé par Lahure,

in-U et in-S raisin,

tirage à la

presse d bras, limité d 350 exemplaires numérotés.

IN-4

RÉIMPOSÉ

sur whatman, contenant tous les dessins originaux, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur cliine. sur whatman, contenant une N° 2 Un exemplaire aquarelle originale sur chacun des faux-titres, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. de 3 à 17 — sur japon ancien à la forme, 15 exemplaires contenant un dessin original avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine, au prix

Un exemplaire

1

,

600fr. de sur vélin du Marais à la forme, 13 exemplaires de 18 à 30 avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine.

net

IX-8 R.MSIN

sur japon des manufactures de 31 à 45 impériales, avec un tirage à part de toutes les gravures, 250 fr. sur japon ou sur chine, au prix net de. 55 exemplaires — de 46 à 100 — sur chine fort, avec un tirage à part de toutes les gravures sur chine, au prix ne/ de 225 fr. 100 exemplaires — de 101 à 200 — sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHMA El AEI) avec un tirage 150 fr. à part sur chine fort de toutes les gravures. sur vélin à la cuve des pape150 exemplaires de201à350 60 fr. teries du Marais (filigrane KTHMA EJ AEI ) 15

exemplaires

.

.

.

.

.

10

-

.


Paru en 1899

JEAN LORRAIN

la Pantopr^ 33 illustrations de

Marcel Pille

GRAVÉES PAR

DELOCHE,

E.

FLORIAN, LES DEUX FROMENT ET JULIEN TINAYRE

In-i' et in-8,

imprimé en couleurs par Lahure, bras, limité

Deux exemplaires grand

à 150 exemplaires

in-4° sur

tirage d la presse à :

Whatman, contenant: l'un tous les

dessins originaux et aquarelles, l'autre une aquarelle sur chacun des faux-titres, soit trois plus une double suite d'artiste ;

signées sur Chine et sur 15 exemplaires in-4° sur

une double

Japon mince des gravures.

Japon ancien contenant une aquarelle et au prix net de 350 fr.

suite d'épreuves d'artiste,

6 exemplaires in-4° sur vélin

une double

de cuve des Papeteries d'Arches, avec

suite d'épreuves d'artiste.

20 exemplaires in-8° sur Chine fort, avec les

un

tirage à part de toutes

gravures, au prix nef de

175

110 exemplaires sur vélin à la cuve des filigrane

Il

KTH MA EZ

AEI,

a été tiré en outre

Papeteries

au prix de

fr.

du Marais, 100

fr.

:

12 collections sur Chine d'épreuves

monochromes,

d'épreuves d'artiste dont 6 sur Japon ancien

et 16 collections

et 10

sur Chine.


Paru en 1900

ERNEST RENAN

PRIÈRE SUR

L'

AGROPO LE

Illustrations de

Bellery-Desfontaines

GRAVÉES PAR FROMENT

Grand

et petit in-i,

imprimé en couleurs par I.ahure,

tirage d la

presse d bras, limité d iOO exemplaires

GRAND

Un Un

IN-4,

TEXTE RÉIMPOSÉ

— X°l — surwhatman,

contenanltous les dessins originaux, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon ancien et sur chine exemplaire sur whatman, contenant une aquaN° 2 relle sur chacun des faux-titres, avec une double suite sur japon et sur chine. d'épreuves d'artiste signées

exemplaire

,

25 exemplaires, de 3 à 27, sur japon ancien à la forme, contenant une aquarelle originale, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées sur japon mince et sur chine, au prix net de 400 fr. 25 exemplaires, de 28 à 52, sur grand vélin blanc à la forme des papeteries d'Arches, contenant une aquarelle originale avec une double suite d'épreuves d'artiste signées sur Japon mince et sur chine, au prix ne/ de. 400fr. ,

.

PETIT IN-4 45 exemplaires, de 53 à 97, sur chine fort, avec un tirage à part de toutes les gravures sur chine, au prix net de 225 fr. 100 exemplaires, de 98 à 197, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHIVIA El AEI), avec un tirage

à part sur chine de toutes les gravures. 203 exemplaires, de 198 à 400, sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHIVIA EZ AEI).

NOTA

Les quelques exemplaires restant de ces deux dernières catégories sont portés à 150 fr. et à 100 fr. :

12


Vient de paraître

:

CHARLES NODIER

HISTOIRE DU CHIEN OE BRISgUET PRÉCÉDÉE

D'UNE LETTRE A JEANNE Par M. Anatolk I^e

FRANCE

l'Académie Française

25 compositions de Steinlen dont 5 hors texte en couleurs

GRAVÉES PAR DELOCHE, FROMENT, ERNEST & FRÉDÉRIC FLORIAN

Un volume

in-'f,

tirage limité d 127 exemplaires

numérotés

Etabli spécialement pour l'Exposition Universelle de 1900

Un exemplaire

N» l sur whatman, contenant tous les dessins originaux, avec une double suite dépreuves sur japon mince et sur chine.

d'artiste signées,

Un exemplaire

— N° 2 — sur

original sur

chacun des

d épreuves

d'artiste

chine. 25 exemplaires

whatman, contenant un dessin une double suite mince et sur

faux-titres avec

signées, sur japon

X»- 3 à 27 sur grand vélin à la cuve des papeteries du Marais, filigrane KTHMA EZ AEI, contenant un dessin original de Steinlen et une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon ancien et sur chine au prix ne* de 350 fr.'

N" 28 à 127 - sur grand vélin à la cuvé des papeteries du Marais, filigrane KTHIVIA EZ AEI au

100 exemplaires Pri'^ fie

125 Il

15 collections

a été

en outre dépreuves d'artiste tiré,

fr.

:

signées,

vures, dont 5 sur japon ancien, au prix nef 10 sur chine, au prix nef de

de toutes

de

.

.

.

les ° <Jra.

125 fr 100 fr!

Plus 10 collections polycliromes sur chine; Plus 10 collections, sur chine, des gravures non utilisées dans 1

édition.

13


Vient de paraître

ANATOLE FRANCE DE l'académie française

(Butenberg

ZS^an

TRAITTÉ DES PHANTOSMES DE NICOLE LAXGELIER • de G. Bellenger, Bellery-Desfontaines, Steinlen et Frédéric Florian

Illustrations

GRAVÉES PAR DELOCHE, LES DEUX FROMENT, ERNEST & FBÉDÉRIC FLORIAN

Grand

et petit in-'t, tirage

d

la presse

d bras,

limité à 113 exemplaires.

— N" 1 —

sur peau de vélin, contenant tous une double suite d'épreuves ancien et sur chine, plus une collection d'épreuves de toutes les gravures sur par-

Un exemplaire

les dessins originaux, avec d'artiste signées sur japon

chemin.

Un

sur peau de vélin, avec une double exemplaire — N° 2 suite d'épreuves d'artiste signées sur japon ancien et sur chine, plus une collection d'épreuves de toutes les gravures sur parchemin.

6 exemplaires N" 3 à 8 sur Japon ancien, contenant une double suite d'épreuves d'artiste signées sur japon ancien 175 fr. et sur chine, au prix net de 5

sur grand vélin à la cuve des N" 9 à 13 papeteries du Marais, filigrane KTHMA El AEI, contenant une double suite d'épreuves d'artiste signées sur japon 175 fr. ancien et sur chine, au prix net de

exemplaires

100 exemplaires N" 14 à 113 teries du Marais, filigrane Il

— sur vélin à la cuve des papeKTHMA El AEI auprixde.

COfr.

a été tiré, en outre, 17 collections d'épreuves de toutes les gravures, dont 1 sur parchemin, G sur japon ancien et 10 sur chine.

14


ALMANACH OU BIBLIOPHILE Publication annuelle illustrée

SOMMAIRE DE

LA PI\EMIÈRE AXNÉE (1898) 28 illustrations de Bellery-Desfontaines :

GRAVÉES PAR FROMENT

Première partie

:

JANVIER La Vie FEVRIER Du Poème

d Paris, par M. Jules Claretie. dans le drame lyrique, par M. Catulle Mexdks: Xoiweaii théâtre, par M. Emile Bergerat. MARS La Reliure en 1897, par dEylac (M. le baron de Claye). AVRIL L'Impressionnisme, par M. Gabriel Séailles. —MAI Les Snobs, par M. Jules Lemaitre, JUIN Les Sociétés de Bibliophiles, par M. Pierre Dauze. JUILLET Vues générales sur le mouvement poétique en France, par M. Sully-PruDHOM.ME. AOUT L'ancienne Bibliothèque Sainte-Geneviève par M. Georges Lamouroux. SEPTEMBRE Antisémitisme' par M. Anatole France. OCTOBRE Les Editions de bibliophiles en 1S97, par yi. Clément-Jaxix. NOVEMBRE Conte pour les bibliophiles, par M. Octave Mirbeau Les Ventes de livres en 1S97, par M. Georges Vicaire. DECEMBRE Le duc d'Aumale, Henri Meilhac et Alphonse Daudet, par M. Gustave Larroumet. \otules nécrologiques, par M. Fernand Drujox. Le Centenaire de A. de Vigny, par M. Melchior de Vogué. :

:

:

:

— —

:

:

:

:

:

:

:

Deuxième p.^rtie Listes et adresses des et d l'étranger :

France

— — :

:

:

membres des Sociétés de Bibliophiles en La Société des Bibliophiles francois.

— La Société des Amis des Livres. — Les Cent — Les XX. — Les Bibliophiles Bretons. — Les Bibliophiles. Bibliophiles de Guyenne. — Les Bibliophiles Lyonnais. — La Société des Bibliophiles Normands. — La Société Normande du Livre illustré. — La Société Rouennaise de Bibliophiles. — The Bibliographical Societv de Londres. — Grolier club de New-

York.

Troisième partie L'Année théâtrale et bibliographique. Tirage en noir et rouge, à 1.200 exempl. numérotés, dont 100 exemplaires sur chine fort, texte réimposé (50 avec un tirage à partàki pres.se, des 28 gravures, sans la lettre, à 50 fr., et 50 exemplaires sans suite, à 30 fr.). :

:

Pour unifier la justification de cette première année les années suivantes, cinquante exemplaires sur chine ont été détruits. En conséquence la justification définitive est la suivante •25 ex. avec suite, au prix net de 80 fr. et à 25 ex. sans suite, au prix net de 40 fr. 1.100 exemplaires sur beau papier, à 10 fr. avec

:

15

-


ALMANACH DU BIBLIOPHILE POUR LAN NÉE (2'

18 99

année) •*

Trente-huit compositions dessinées et gravées par florian

Première Partie

:

JANVIER. Anatole France Les Bouquinistes et les Quais. — FÉVRIER. J.-K. HuYSMANs .Le quartier Notre-Dame.— MARS. Georges Lamouroux La Bibliothèque Mazarine. — AVRIL. Gustave Larroumet L'ancienne Sorbonne et le vieux quartier Souvenirs d'un Bibliophile Latin. — MAI Jules Claretie :

:

:

:

:

:

la Librairie nouvelle.

JL'IX. Georges Vicaire

:

La Biblio-

— JUILLET. Fernand Drujon La Les Société des Amis des Livres. — AOUT. Ci.ément-Janin Editions de Bibliophiles. — SEPTEMBRE. D'Eylac (Le Baron DE Claye) La Reliure de 1S79 à 1S99. — OCTOBRE. Pierre thèque d'Eugène Paillet.

:

:

:

Dauze Le marché du Livre en iSOS. — NOVEMBRE. Les Disparus.— DÉCEMBRE. Gabriel Séailles Puvis de Chavannes. :

:

Deuxième Partie

:

membres des Sociétés de Bibliophiles en d l'étranger : La Société des Bibliophiles françois. La Société des Amis des Livres. Les Cent Bibliophiles. Les XX. TheBibliographical Society de Londres. Grolier club de Nevi'-York. Liste et adresse des

France

et

Troisième Partie L'Année théâtrale;

— —

:

— L'Année bibliograpliique.

Tirage en noir et rouge, à 1,000 exenipl. numérotés, dont 50 exemplaires sur Chine fort, te.vte réimposé, (25 avec un tirage à part d la presse, des 38 gravures, sans la lettre, à 60 fr. net, et 25 exemplaires sans suite, à 35 fr. net). Les derniers exemplaires sur chine de l'année 1899 sont portés respectivement à 80 fr. net et à 40 fr. net. 950 exemplaires sur beau papier, à 10 fr. :

16


Pour paraître

5 Juin

le

:

ALMANACH DU BIBLIOPHILE POUR L'ANNÉE (3"

1900

ANNÉE)

• 31

compositions de Steinlen

gravées par les deux froment

Première Partie

:

Le Travail, par Sully Prudhomme. JANVIER. Anatole France Le Petit Palais. FÉVRIER. Maurice Hamel Le Grand Palais. MARS. Edouard Pelletan Le Pont Ale.vandre lU. AVRIL. Jules Claretie La rue des Nations et la rue de Paris. MAI. Henri Beraldi La Reliure à l'Exposition de 1900. JUIN. Clément -Janin Les Rétrospectives du Livre à l'Exposition. lUILLET. André Hall.ays: L'Exposition de l'JOO. AOUT. Gustave Laruoumet Anatole France, poète. SEPTEMBRE. Georges Vicaire La Société des Bibliophiles françois. OCTOBRE. d'Eylac (Baron de Claye) La Bibliothèque Guijot de ViHeneuue. NOVEMBRE. Pierre Dauze Le Marché du Livre. DÉCEMBRE. Clément-

;

— — — — —

:

:

:

:

:

:

:

:

:

Janin

:

Les Editions de Bibliophiles.

Deuxième Partie

:

Listes et adresses des membres des Sociétés de Bibliophiles en France et à l'étranger : La Société des Bibliophiles françois. La Société des Ainis des Livres. Les Cent lîibliophiles.

— —

— Les Biijliophiles Bretons. — Les Bibliophiles de — Les Bibliophiles Lyonnais. — La Société des Normands. — La Société Normande du Livre illustré. — La Société Rouennaise de Bibliophiles. — The Bibliophical Society de Londres. — Early English Text Society. — Type Facsimile Society.— Grolier club de New-York. — Les Bibliophiles de l'Empire allemand. Les XX.

Guyenne.

Bibliophiles

Tirage en noir

et rouge, à 1,000 exenipl.

numérotés, dont

:

50 exemplaires sur chine fort, texte réimposé (25 avec tirage à part à la presse des 31 gravures, sans la lettre, à 80 fr. net et 25 exemplaires sans suite, à 40 fr. net).

950 exemplaires sur

beau papier, à 12

fr.


PIERRE LAFFITTE Professeur au Collège de France.

€e ^aii^i be (Bœtî?e ILLUSTRATIONS de

Bellery-Desfontaines

Un volume

in-8 cavalier, sur

H. Vogel

et

GRAVÉES PAR FROMENT

FILS

beau papier, tirage noir

rouge Il

4

30 exemplaires sur chine

a été tiré de toutes les gravures, au prix net de

fort,

fr.

et

50

avec tirage à part 30

fr.

L'INVINCIBLE RACE NOUVELLES Par

Un volume

in-lS, couverture et titres décorés rjravés

Il

TOLA DORIAN

par Froment

...

par Bellery-Desfontaines, 3

fr.

50

a été tiré, en outre, 27 exemplaires — texte réimposé —

dont

7

sur chine fort à 30 fr. net, épuisés, et 20 sur vélin de cuve des Papeteries d'Arches, avec un tirage à part, sur chine, des gravures, au prix net de 25 fr.

18


Pour paraître

le

30 Mai prochain

:

GABRIEL SÉAILLES

EUGENE CARRIERE L'HOMME ET L'ARTISTE Compositions et Croquis d'Eugène Carrière Gravées par Mathieu

Un volume et Il

in-8 cavalier, sur

beau papier,

tiré

en noir, bistre

sanguine

4 fr. 50

a été tiré 30 exemplaires sur chine fort, avec tirage à part

de toutes de

les

gravures, sur Japon ancien, au prix net 35 fr.

En préparation

ANATOLE FRANGE de l'Académie française

POMPEÏ ÉDITION ORIGINALE Compositions

et

décorations en couleurs de

H. Bellery-Desfontaixes.

19


Pour paraître

30 Mai prochain.

le

MAURICE DE GUÉRIN

POÈMES EN PROSE (LE CENTAURE

Compositions

et

-

LA

BACCHANTE)

décorations en couleurs de

H. Bellery-Desfontaines Gravées par

Iii-'t et

in-8,

E.

Florian

imprimé en 6 coiilews pavLaluire,

tirage à lapresse

à bras, limité à 167 exemplaires numérotés.

IN-4,

Exemplaire

N"

1

TEXTE RÉIMPOSÉ sur

dessins originaux, avec

whatman, contenant tous une

les

suite d'épreuves d'artiste

signées, sur chine.

— N"

sur whatman, contenant une aquasur chacun des faux-titres, avec une suite d'épreuves d'artiste signées sur chine.

Exemplaire

2

relle originale

23 exemplaires

— N- 3 à

25

— sur japon ancien ou

sur grand

vélin des papeteries du Marais, contenant une suite d'épreuves d'artiste signées sur chine, plus une collection

monochrome

et

polychrome

sur chine, au prix 325

de

net fr.

IN-8

— sur chine, au prix de 200 fr. — sur vélin à la cuve des pape— à 167 33 N" 135 exemplaires

10 exemplaires

teries

N"

26 à 35

.

du Marais, filigrane KTHMA EZ AEI,au prix de

20

100 fr.


Pour paraître

le

1"

Juillet

ANATOLE FRANCE DE l'académie française

L'AFFAIRE

CRAINQUEBILLE EDITION ORIGINALE 55 compositions de Steinlen Gravées par Deloche, Ernest et Frédéric Florian, les deux Froment, GuzMAN, Mathieu et Perrichon

In-i

Jésus, tirage en rouge et noir sur les presses d bras de Lahure, limité d exemplaires numérotés.

et iti-S

MO

IN-4,

Un exemplaire

— N"

Un exemplaire

TEXTE RÉIMPOSÉ

:

sur whatman, contenant tous les dessins originaux, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées sur japon et sur chine. 1

N° 2 sur whatman, avec un dessin origichacun des faux-titres, soit 10, plus une double suite d'épreuves d'artistes signées sur japon et sur chine.

ginal sur

•25

exemplaires N°' 3 à 32 sur japon ancien ou sur grand vélin, contenant un dessin original de Steinlen, plus une collection d'épreuves d'artiste signées sur chine, au prix net de 600 fr. ix-8,

JÉSUS

:

— N°' 33 à 72 — sur chine, au prix de 300 fr. 28 exemplaires — N" 73 à 100 — sur vélin à la cuve des pape-

40 exemplaires

teries

du Marais

.

KTHMA EZ

(filigrane

AEI),

avec un tirage à

part de toutes les gravures sur chine, au prix de. .300

exemplaires— N" teries

101 à 400

du Marais(liligrané KTH MA EZ AEI) au prix de.

175 fr.

— sur vélin à la cuve des pape-

21

75

fr.


Pour paraître en Décembre prochain

:

BEAUMARCHAIS

LE BARBIER DE SÉVILLE Illustrations de Daniel

Vierge

GRAVÉES PAR FROMENT

In-i

et in-S raisin,

à

la

imprimé par Lahiire,

tirage en noir et rouge

presse à bras, limité à 350 exemplaires numérotés.

IN-4,

Un exemplaire

Un exemplaire

TEXTE RÉIMPOSÉ

N° 1 sur whatinan. contenant tous les dessins originaux, avec une double suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et sur chine. N" 2

un dessin une double

sur whatman, avec

original sur chacun des suite d'épreuves d'artiste chine.

faux-titres et signées, sur

japon

et

sur

25 exemplaires, de 3 à 27, sur japon ancien à la forme et sur grand vélin, contenant une aquarelle originale et nue suite d'épreuves d'artiste signées, sur chine, au prix net de 600 fr. IX-8 RAISIN

55

exemplaires, de 28 à

30

exemplaires, de 83 à 112 sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHIVIA El AEI) avec un tirage à part sur chine de toutes les gravures, au prix

82,

sur chine

fort,

au prix de

250

fr.

.

de 232 exemplaires

175 fr.

de 113 à 350 sur vélin à la cuve des papeteries du Marais (filigrane KTHIVIA El AEI) au prix de 75 fr. .

,

22

-


En préparation

JEAN RICHEPIN

LA

CHANSON DES GUEUX ÉDITION INTÉGRALE

* 240 compositions de Steinlen

EN TROIS PARTIES

:

Première Partie

GUEUX DES CHAMPS 80 illustrations.

Deuxième Partie

GUEUX DES VILLES 87 illustrations.

Troisième Partie

NOUS AUTRES GUEUX 73 illustrations.

23


En préparation

ANATOLE FRANGE de l'Académie française

LA ROTISSERIE

LA

REINE PÉDAUQUE 83 compositions de Daniel Vierge

HENRI HEINE

Illustrations de

Bellery-Desfontaines

24


Pour paraître

le

1" Décembre 1901

:

ANATOLE FRANGE De l'Académie Française

LES NOCES

CORINTHIENNES Compositions de Georges Bellenger Gravées par Ernest Florian

In-i

et in-S,

imprimé par Lahure,

tirage à la presse d bras,

limité à 200 exemplaires numérotés.

IN-4,

Exemplaire

Exemplaire

TEXTE RÉIMPOSÉ

N" 1 sur whatman, contenant tous les dessins originaux, avec une double suite d'épreuves d"artiste signées, sur japon et sur chine.

relle sur

double

X- 2

sur

whatman, contenant une aqua-

chacun des

faux-titres (soit cinq), avec une suite d'épreuves d'artiste signées, sur japon et

sur chine.

X" 3 à 22 sur japon ancien ou sur grand vélin des papeteries du Marais, contenant une aquarelle originale de l'illustrateur, plus une suite d'épreuves d'artiste, signées, sur chine, au prix net de. 500 fr.

23 exemplaires

.

.

IN-8

30 exemplaires

X-

23 à 54

sur chine

de

de Il

au prix net 200

145 exemplaires

papeteries

fort,

du

X"

fr.

55 à 200 sur vélin à la cuve des Marais, filigrane KTHMA EZ AEI au prix

50

fr.

a été tiré 20 collections sur chine de toutes les gravures au prix de 60 fr.


En préparation

:

MAURICE HAMEL

MATKRNITÉ 35 compositions d'Eugène Carrière

Gravées par Mathieu

Tirage en noir, rouge et bistre.

LOUIS BERTRAND

GASPARD DE LA NUIT Edition des 6 peintres et des 6 graveurs.

GŒTHE

5ûU5t TRADUCTION NOUVELLE Compositions de H. Bellery-Desfontaines.

— 26 —










000 599 176

University of California

SOUTHERN REGIONAL LIBRARY

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