THE LIBRARY
T
Ht UNIVERSITY OF
BRITISH
COLUMBIA
GIFT
Roy Daniells
i
LE
GRECO
1»1.
1
PORTRAIT DU GRECO Collection
Aur
de Beruete
?
Madri±
PAUL LAFOND Conservateur du Musée de Pau
LE
GRECO ESSAI
SUR SA VIE ET SUR SON ŒUVRE SUIVI
d'un catalogue ET d'uNE BIBLIOGRAPHIE ILLUSTRÉ DE NOMBREUSES REPRODUCTIONS
PARIS INTERNATIONALE
BIBLIOTHÈQUE E,
SAN SOT 9,
ET O'
RUE DE l'Éperon, 9 Tous droits réserves.
d'ÉDITION
LA FORMATION DU GRECO
ET SA PERSONNALITÉ
Jusqu'à
la
fin
du
xv^
l'Espagne
siècle,
avait vécu pour ainsi dire séparée des autres
nations
monde elle
Dotée
européennes. par
sort à
le
d'un
nouveau
génie de Christophe Colomb,
peine du
moyen
âge.
A
force de
traquer les Maures de tous côtés, sans trêve ni merci, elle
ment de
vient de les refouler définitive-
l'autre côté
expulse et chasse
de
la
Méditerranée. Elle
les Juifs, tandis
que
l'Italie
LE GREGO
6
les
accueille,
les
Osmanlis
et
que Venise et s'allie
même
Compostelle glorifient Martyrs juste au
et des
fait
le
négoce avec
avec eux. Tolède des Saints
les reliques
moment où Rome
et
Florence ne jurent que par les dieux d'Ho-
mère
et
de Virgile. Bref, alors que
du Tibre
tants des rives
et
les
habi-
de l'Arno devien-
nent de jour en jour plus païens, ceux des bords de l'Èbre
et
du Tage s'exaspèrent en
un catholicisme plus sombre C'est
qu'un
alors
jeune
Domenikos Theotokopuli, Crète,
entre
ment en 1547 ou née, traverse s'installe à
et
1540
les
I
et
plus austère.
né
dans
^48, franchit
de
l'île
de
probable-
i^^o, très
plateaux
inconnu,
artiste
la
Méditerra-
la
Castille
et
Tolède.
Certains critiques ont longuement disserté sur
la
ture de
véritable
forme de son nom. La signa-
Domenikos Theotokopuli, en
caractères
LE GRECO
sur les plus importants de ses
grecs, placée
tableaux qu'il Kpv);
Aoiy.Yivixo;
tenait à
il
du mot
faisait d'ordinaire suivre
Cretois
combien
7
Gêotoxotto'Aoç
prOUVC
Kp*/);
sa nationalité.
l'affirme
Il
tant qu'il peut et s'en enorgueillit à l'occasion.
On
en a un témoignage, entre autres, dans
la série
des apôtres de
la
thédrale de Tolède dont
où
l'on
voit
gentils, tenant
dans
loin,
il
sacristie
pliée portant en guise
la
ca-
sera question plus
Saint Paul, la
de
l'apôtre
main gauche une de suscription
des
lettre
:
ripo; TlTOV TY)Ç KpVlTWV E/C)c>.Y)(yta; £7ric)t07rov >cat
Ov'/)(ji|AOv
c'est-à-dire sition des
:
^etpOTOvstaSevTa.
« à Tite, ordonné par
l'impo-
mains, évêque des Cretois et coad-
juteur ».
Le prénom grec de Domenikos Theotokopuli est
K'jptaxoç,
dont
la
traduction
en
italien
LE GRECO
8
est
Domenico
Theotokopulos, qui
l'appellation de
ment
très
ou
piété,
répandue chez ferveur
les
religieuse,
souvent substituée à
littérale-
Dieu
« Petit enfant de
signifie
était
Domingo, en espagnol. Pour
et
elle
»,
Grecs qui par l'avaient
leur véritable
bien
nom. En
Espagne Domenikos Theotokopulos, ou Theodésigné
que sous
l'appellation d'el Greco, portée sans
doute par
tokopuli, n'est
lui,
en
il
car
Italie,
surnom,
d'ordinaire
lui avait
si
été
ce
nom, ou
donné dans
plutôt
ce
les Castilles,
se serait appelé el Griego. Il
n'est
quelle
son
île
ments
pas
possible
de dire au juste à
époque Domenikos Theotokopuli quitta natale et débarqua à Venise. Les
font
cependant
défaut.
avoir
docu-
Jean Bedoulas prétend
retrouvé
dans
le
célèbre
registre des inscriptions de l'émigration hellé-
nique quelques lignes se rapportant à notre
LE GRECO
artiste.
qu'il
Ce
qui
semble hors de doute,
une
appartenait à
reçut une éducation
que est
la
ville
famille
c'est
car
aisée;
il
beaucoup plus soignée
plupart des artistes
même
9
de son époque.
Il
possible qu'il ne soit arrivé dans la
des lagunes qu'après avoir déjà étudié son
art, car sa palette,
dans laquelle
le
blanc et
le
noir dominent, se rapproche singulièrement de celle des peintres byzantins, telle le
manuscrit
Durand
mont
du
et publié
que
Athos, traduit
—
quoi que l'on
—
du
Titien, alors
fut
l'élève
par
On
par Didron en 1845.
maintenante preuve qu'il
décrit
la
a
ait dit,
que
le
maître de Cadore était âgé d'une soixantaine d'années.
Est-ce à Venise ou dans d'Italie
qu'il
Clovio,
le
entra
en
une autre
relations
avec
ville
Giulio
miniaturiste macédonien, son aîné
d'une cinquantaine d'années, dont une
com-
LE GRECO
10
munauté sans qu'il
Ce
égard.
sans doute,
d'origine,
possible
soit
qui est
On
la
adressée,
terbe,
le
16
le
une
pour
lui
lettre
novembre
à cet
fixer
que
le
vieil
rôle important
la
vie
du Greco.
de Giulio Clovio, ^70, à son protec-
Vi-
recommander chaudement son le prier
de vouloir bien donner
une chambre, dans son jeune
i
rapprocha,
Farnèse, alors légat à
cardinal
jeune ami, et
<
un
joué
première partie de
a retrouvé
teur
de rien
certain, c'est
enlumineur grec a dans
le
Candiote,
palais de
élève
du
Rome, Titien,
à ce
bon
peintre, qui, entre autres ouvrages, a fait son
propre portrait, que tous ont admiré
les peintres
de
Rome
».
Qu'est devenu ce portrait du Greco par lui-
même? on
n'en
on peut voir de
sait lui
probablement, de
la
rien; en
deux autres
même
compensation, toiles datant,
époque, au musée
LE GRECO
II
deNaples: un Jeune Garçon qui
morceau de
souffle sur
bois enflammé, avec lequel
il
un
veut
allumer une chandelle, et un portrait de Giulio Clovio sur lequel nous reviendrons.
On
trouve ensuite, au musée de Parme, une
assez grande composition
r Aveugle, qui figurait en Jardins Farnèse de cette
de
Guérison
la
1680 au
ville.
de
palais des
La composition
montre, à gauche, en avant d'un palais renaissance à colonnades, que suivent dans
le
loin-
tain d'autres palais, Jésus, entouré de curieux,
rendant
la
vue à un aveugle agenouillé à ses
pieds, tandis qu'à droite se tient ses disciples.
Il
existe
au moins
trois répétitions
ou variantes de ce tableau, une thèque de Dresde
La
et
un groupe de
à
la
pinaco-
deux en Espagne.
galerie impériale de
Vienne renferme une
Adoration des Mages où, au milieu des ruines d'un riche édifice, l'Enfant Jésus, dans les bras de sa
LE GRECO
12
mère, reçoit
les
Mages dont
adorations des Rois
l'un est prosterné à ses pieds, suivi des autres
qui vont en faire autant, alors que leurs serviteurs déchargent les présents que portent des
chevaux
et des
tour attribuée
dromadaires. Cette à
toile,
Leandro Bassano
Véronèse, semble, en toute
tour à à Paul
et
justice, devoir être
restituée au Greco. Peut-être conviendrait-il
de
lui
jadis
rendre aussi un Martyre de Saint Marc,
dans
la
collection
des rois de
aujourd'hui au musée de Bruxelles. position, cataloguée sous le
montre, sur
la
nom du
France,
La comTintoret,
Piazetta de Venise, Tévangéliste
étendu, que trois de ses bourreaux entourent encore, alors qu'un orage qui vient d'éclater fait fuir les
autres éperdus.
La dernière œuvre connue de sa
période italienne, est
chands chassés du
le
l'artiste,
tableau
Temple^ dont
il
des
de
Mar-
existe de
LE GREGO
nombreuses
variantes, au
sions diverses
:
i3
moins cinq de dimen-
rique, trois en Angleterre, dont
Gallery
nal
Rome,
partie de la collection des
rough en Angleterre.
foule
une à
la
Natio-
de Londres. L'œuvre première,
exécutée sans doute à
péristyle
Amé-
deux en Espagne, une en
aujourd'hui
fait
comtes de Yarbo-
Elle
montre,
sous
temple, Jésus, au milieu d'une
d'un
de disciples et de curieux, fustigeant à
coups de fouet
les trafiquants qui s'enfuient
côtés et d'autres; dans
le
bas de
la
Clovio,
d'un jeune
du
Titien, de
homme qui
de
composition,
à droite, l'artiste a introduit les bustes de lio
le
Michel-Ange
est peut-être
et
Giucelui
son propre
portrait.
Signalons, en passant, une petite toile trois
pouces une ligne de haut,
pouces huit lignes de large
»,
sur quatre
ayant
à Paris, dans la seconde moitié
du
«de
fait partie,
XVIII^ siècle,
LE GRECO
14
du
cabinet
d'un
aucun doute
M.
certain
d'origine
1767, chez un
marchand du nom de Briasson, Saint-Jacques,
l'enseigne
à
« quatre
figurant
lement touchés
et
de
La
Science^ spirituel-
d'un bon coloris, par
minique Greco catalogue
de
du Titien
élève
cette
vente.
rue
établi
d'homme
bustes
en
passée
castillane,
vente publique, en novembre
sans
Davila,
»,
Do-
dit
le
Quels étaient ces
portraits ainsi réunis, s'agirait-t-il d'une répétition
de ceux placés à
du Temple de
chassés
rough
trouver Il
Qu'il
?
est
la
collection
serait
intéressant
difficile
de savoir
de
Yarboles
re-
!
bien
Greco abandonna quitta
base des Marchands
la
Rome où
il
tion déjà brillante
comment
pour quelle raison
l'Italie,
semble avoir
pour un
joui
homme
le il
d'une posi-
de son âge,
apprécié d'une des plus grandes familles ponti-
ficales,
LE GREGO
i5
en
relations suivies
qui Thébergeait,
avec tout ce
que
d'artistes supérieurs, le
Ville Éternelle renfermait
la
avec Michel-Ange,
buste des Marchands chassés du
témoigne.
Le
Greco
TEscurial? la
la
de
lors
fut-il sollicité
décoration de
II,
la
sur
la
pour
recom-
construction de
de venir concourir à
basilique de Tolède par les
hauts dignitaires du chapitre de politaine, alors à
Temple en
s'embarqua-t-il
l'Espagne appelé par Philippe
mandation du Titien
comme
Rome
l'église
avec leur
métro-
archevêque
Corranza ? Ces deux alternatives sont possibles mais pourquoi
l'artiste
Espagne sans y avoir guidé par
le seul
ne
serait-il
été incité
;
pas venu en
par personne,
espoir de trouver à occuper
son talent dans un pays nouveau? Faut-il
des plus
recourir à une dernière hypothèse
problématiques,
Domenikos Theotokopuli,
qui
voudrait
que
arrivé très jeune en
LE GRECO
ï6
Espagne, reçu et
ait
débarqué à Barcelone où
il
aurait
enseignements du peintre
les conseils et
poète catalan, d'origine hellénique, lui aussi,
Pedro Serafin, Toujours
dit
Pedro
est-il
au premier abord paysé dans
la
la ville
dut
grandement dé-
noble et altière Tolède.
Il
nous
de nous l'imaginer, car
la
guère changé depuis que
le
unique
et sans pareille.
plus de quatre siècles
elle est
Grech?
son entrée vers 1^76. Elle est en-
fit
Ferdinand
lo
artiste crétois
se trouver
vieille capitale n'a
core
Griego ou
que notre
est d'ailleurs facile
Greco y
el
la
séparent des jours de
et d'Isabelle, les
bien restée
et religieuse.
la cité
Vue de
Quoique
loin,
Rois Catholiques, guerrière, héroïque
son aspect frappe
comme une apparition. L'antique métropole w^isigothe se développe sur la courbe austère d'un roc. Elle
épouse sa forme, court sur sa crête,
décore ses flancs de murailles
et
de tours; ses
LE GRECO
innombrables couvents, ses pelles,
17
cha-
églises, ses
son alcazar, ses centaines de palacios,
ses milliers de maisons se suivent, pressés les
uns contre sentie,
les autres.
La
vie
l'homme deviné, par
chaque demeure
est
humaine
le
soin avec lequel
mise à Tabri de
la
voisine, associant le présent au passé.
culminant de
la
ville,
est pres-
demeure
Au
point
sa prestigieuse
cathé-
de cœur,
surgir
drale, effort de volonté et
fait
ses hautes murailles dentelées et découpées, se
perdant dans
les
nuages. Elle est
destiné à rester, pendant siècles, l'intact et
des
le
siècles
de
essaie
d'Alcantara, relier
dale à d'autres ses portes Sol,
à
et
des
superbe symbole d'une Es-
pagne bien morte, que rien ne
Le pont
témoignage
la
qui
fera revivre.
enjambe
Tage,
le
vénérable métropole féo-
destinées
plus
actives
;
mais
rébarbatives, sa rousse Puerta del
l'architecture
sarrasine,
aux
petites
LE GRECO
i8
meurtrières grillées, restent des barrières puissantes et infranchissables; ses antiques tours,
sur
le
rocher qui
face au pont, s'écroulent
fait
sans avoir pu servir de chaînon.
Dans une profonde
crevasse, le
Tage
roule
ses eaux, tantôt jaunes, tantôt couleur de sang.
La
ville
précise.
porte en
elle
une
histoire
que rien ne
Quelques fragments de constructions
romaines tentent d'arrêter une date dans prit
;
l'es-
mais, cette sensation disparaît vite devant
cette autre sensation d'une éternité chimérique et
d'une possession éphémère. L'intérieur de Tolède ne change guère la
première impression plutôt.
sombres reculés,
Les rues
;
elle la fortifie et l'explique
étroites
et altières
et
aux
maisons, aux porches bas et
surmontés de lourds
sons, semblent de
tortueuses,
maussades
et fastueux
écus-
forteresses, desti-
nées à subir des assauts, à résister à des guets-
LE GRECO
apens.
gré
La fameuse
les
place du Zocodover, mal-
de l'administration
efforts
et éprise
tracassière
19
de
rectitude,
moderne, est restée
étrange et captivante, dans sa bizarre irrégularité.
Gigantesque épanouie,
la
fleur architecturale,
richement
cathédrale n'est pas moins formi-
dable de près que de loin, avec ses tours, ses tourelles, ses clochers, ses clochetons, ses toits,
ses terrasses, ses balcons, ses aiguilles, ses pi-
nacles,
grimpant
les
uns au-dessus des autres,
A
pour
lutter
duit
une impression de terreur
de hauteur.
l'intérieur elle
pro-
et d'éblouis-
sement, avec ses chapelles sans nombre qu'il-
lumine
le
flamboiement de
ses autels constellés d'or,
précieuses,
où
milliers
de cierges,
d'argent, de pierres
officient des prêtres revêtus
de
lourdes chasubles, de fastueuses dalmatiques.
Mais ce que n'a plus Tolède, ce qui
faisait
LE GRECO
20
sa vie,
lors
de de
dernier tiers c'était,
foule
du Greco, dans
l'arrivée
triomphant XVI^
ce
le
siècle,
dans ses rues et sur ses places, une
bourdonnante, toujours pressée, conti-
nuellement renouvelée, de seigneurs, de prélats,
d'hommes de guerre bardés de
prêtres,
fer,
de
de moines, de bourgeois, d'artisans, de
paysans, de mendiants, tous fiers et hautains.
Dans
aux habitants plus
cette rude capitale,
rudes encore,
vénitienne et à
moment
peintre habitué à la langueur
le
la richesse
romaine, arrive au
psychologique, alors que
les
descen-
Cam-
dants de Bernard del Carpio et du Cid
peador sentent de guerre,
le
besoin de déposer
aspirent
à
des
le
harnois
jouissances
plus
douces, plus voluptueuses que celles dont se sont jusqu'alors contentés.
Espagne, tion, le
il
apporte
charme,
la
le
goût
Dans
ils
cette âpre
raffiné, la
séduc-
courtoisie des terres ita-
.
LE GRECO
liennes.
21
profite de la situation qu'il acquiert
Il
sur ces fiers hidalgos par sa noble prestance,
son
savoir-vivre,
l'intérêt
de
douces manières, dans
ses
l'art qu'il dirige et
conduit dans cette
voie superbe et grandiloquente qu'il ne devait plus quitter et qui a produit l'école de Madrid. Il
ne faut pas oublier que jusqu'alors n'avaient
tilles
guère
produit
Elles s'étaient contentées d'en
autres
nations.
de
les
peintres.
emprunter aux
« L'affranchissement » de
peinture espagnole, a écrit M. Bonnat,
commence sont
qu'avec
le
brillante et
but.
Avec
prend de
indique à l'école
elle
quelle
lui,
les
ne
progrès
la
couleur devient
la
l'éclat, et,
entrera et dont
En
Greco; mais
le
«
la
rapides, et ce maître, d'un bond, atteint
si
presque
il
Cas-
d'un art savant,
.
.
vraie voie dans laquelle elle
ne sortira plus
».
prenant possession d'une race avec lail
n'avait eu jusqu'alors
aucun point de
LE GRECO
22
contact,
Domenikos Theotokopuli
de l'imprévu qui
s'offrait à lui et a
a bénéficié
montré dans
son œuvre, sous un point de vue nouveau, une
Espagne superbe
et ignorée.
Aux temps où
jeune peintre crétois vécut à Venise,
la ville
le
des
lagunes, triomphante de toutes parts, avait atteint le
point culminant de sa grandeur. Épris avant
tout d'harmonie et de couleur, assoiffé de ce qui brille et luit devant les yeux,
l'art
vénitien,
d'origine mélangée et quelque
peu
oriental,
jette
un
éclat sans pareil.
gione, les Lorenzo
Les
Bellini, les
Gior-
Lotto, les Jacobo Palma, Tintoret,
les
Sebastiano Luciani, les Titien,
les
Paul Véronèse y créent chef-d'œuvre sur
les
chef-d'œuvre. Le Greco, élevé au milieu de ces splendeurs, qui apporte à Tolède
le
charme,
la
grâce, l'allégresse de cet art vénitien triomphant,
constatation étrange et imprévue, ne tarde pas à subir à son tour^ sans s'en rendre compte,
LE GRECO
23
sans s'en apercevoir, l'emprise de
sévère capitale castillane. le
soumet^
plus que
le
la
la
rigide
et
Sa nouvelle patrie
conquiert; son œuvre n'est bientôt
conséquence du pays, du climat,
de l'ambiance. Elle n'en acquiert d'ailleurs que plus de force et de saveur.
Peu
à peu, dans ses toiles, les magnificences
vénitiennes, les pourpres et les décors fastueux appris
du Titien
et
du Tintoret,
les éclats
triom-
phants de sa palette que l'on trouve dans Guérison de F Aveugle et
du Temple, s'atténuent, raissent,
pour
faire
les
Marchands chassés
se transforment, dispa-
place
à
des expressions
plus intenses, plus spiritualistes. l'avons dit ailleurs,
le
maître
et
la
Comme la
souffrance,
douleur. Son dessin souple
harmonieux, son coloris chaud
s'exaspèrent en se
nous
ne tarde pas à
s'acheminer vers l'expression de
de l'ascétisme, de
la
spiritualisant.
et
brillant,
La peinture
LE GRECO
24
semble disparaître de son œuvre. Elle exprime l'âme castillane façonnée aux âpres efforts, aux
dures rencontres, demeurée farouche et renfro-
gnée malgré
la victoire définitive.
détachement des
joies
de
la vie, sa tristesse
sondable deviennent l'essence ductions du Greco. Barrés, « c'est
lui,
mieux comprendre
Comme
même
l'a dit
les
M. Maurice fait le
contemporains de CerIl
cependant pas pour cela Castillan. de ses nouveaux compatriotes,
il
ne devient
A
l'inverse
montre toute
une insurmontable aversion pour
ries, les
in-
des pro-
ce Cretois^ qui nous
vantes et de Sainte Thérèse ».
sa vie
Son austère
massacres, les égorgements,
les
tue-
les gesti-
culations violentes, que les peintres espagnols
ont tant aimé à traduire. Les bourreaux qui arrachent et tenaillent
ne sont pas son tés,
il
fait.
les
Aux
oppose toujours
la
chairs
supplices^
pantelantes
aux
triviali-
dignité et la noblesse.
LE GRECO
Si le maître^
en vrai
25
de
fils
Renaissance,
la
après s'être intéressé aux magnifiques draperies,
aux fastueuses architectures, aux beaux corps nus aux gestes rythmés
et
harmoniques, aux
groupes symétriquement balancés, abandonne petit à petit tout cela
pour s'éprendre de
mou-
vements plus dramatiques, de formes violentes
même,
et saccadées
pour
raisons
ment le
l'art n'est ni
ment; que nobles
ses
qu'il
;
lui
l'élever
gion
ainsi.
S'il
hautes
délaisse
l'élé-
pittoresque, c'est qu'il a découvert que
but de
pour
agir
de
a
qu'il
c'est
visées
le plaisir, ni
sont
plus
doit s'adresser à
faciliter
le
délasse-
hautes, plus
l'homme, non
des distractions, mais
pour
au-dessus de lui-même, dans une ré-
éthérée, au delà
dans l'ordinaire de
de
la vie.
celle
où
il
s'agite
Aussi, les différentes
phases de son génie, ses différentes manières,
pour nous
servir
des termes
consacrés,
ne
LE GRECO
26
comme on
furent-elles pas^
plu à
s^'est
trop longtemps
successives, mais ce qui est tout
le dire,
autre chose, simultanées. Tantôt,
donne
à son sujet; tantôt, c'est le
subordonne à
demain
il
sujet qu'il
sa personnalité. Parfois,
de complets abandons; aujourd'hui sera scrupuleux
Ce
restera sincère.
qui
:
fait
subor-
se
il
montre
il
il
est libre,
mais toujours de
lui
un
il
artiste
de notre époque, presque un de nos contemporains, c'est le sens
son œuvre^ de
la vie
de
la
de
la vie
vie
qui se dégage de
en dehors du temps,
de l'humanité tout entière.
un haut degré
le
sens
de l'imagination; mais par imagination
il
faut
Le Greco possède
à
entendre l'exaltation de ce qui
de
la
création
chez un maître est fatalement
du
riche
et puissante, tandis
l'irréel
l'opposé
de l'imaginaire. La transpo-
sition
réel
est,
que l'invention de
demeure toujours pauvre
et parfois
mes-
LE GRECO
quine à
:
nous
le
l'occasion.
penseur drit,
il
:
Il
verrons a
étonne,
il
est pathétique
concentrée
et dilatée.
même
pour
pénétration
la il
27
Greco
du
grand
émeut,
il
atten-
son œuvre est à
la fois
frappe, ;
le
il
Toujours tourmenté
et
inassouvi, c^est une nature orageuse et chimérique, pleine de langueurs
que des mélancolies abattent,
de tourments,
et
intenses
et
imprévues
que des soubresauts non moins inat-
tendus relèvent, sans cesse
obsédée par
le
besoin de produire, d'atteindre plus haut.
Des plus
raffinés,
des plus
sensitifs,
il
regorge
d'idées et de sensations, parfois jusqu'à en de-
venir compliqué^ et presque inexplicable. Son intellect
est
une fournaise pleine de crépite-
ments, de flammes,
d'éclairs fulgurants et inin-
terrompus, accompagnés de flamboiements parfois
cachés par des fumées qui laissent surgir
des lumières inattendues.
Il
est
envahi par une
LE GRECO
28
fougue involontaire qui l'emporte, i
audace qui perdre
le
domine jusqu'à
mesure des
la
il
nalité et
rare
de
la
et la
convention.
Il
supérieur
et
a l'instantanéité
primordiale et rare
Il
il
a la re-
explore des régions
del'art jusqu^alorsinconnues. il
;
du
combinaison des tons poussées jus-
qu'àleurs dernières limites.
pictural
Per-
a le plus souverain mépris de la ba-
geste^ qualité
cherche
un
une
lui faire parfois
êtres et des choses.
sonnel et novateur, à degré,
par
Au delàdu monde
trouve des alliances, des contrastes,
des réussites étranges, des harmonies frisant
presque la
la fausseté,
qui ne sont en réalité que
résultante d'une surexcitation suraiguë.
Hanté
de conceptions démesurées et douloureuses, peint avec
il
un emportement presque maladif.
Son génie prodigieux
n'est pas
surhumain;
mais, au contraire, profondément humain. Aussi
choque-t-il les âmes pusillanimes et ordinaires.
LE GRECO
Ce qu'on
est
29
convenu d'appeler son hallucina-
tion est l'extrême puissance de son cerveau,
créateur d'œuvres qui ont dépassé l'entende-
ment de
la
plupart de ses contemporains.
Aussi ne peut-il être
du Greco^ qu'aurait trariété
ment
ici
entre son
par
le
talent
et
Titien, le rabaissant, par cela
le
génie du
même, au rang
De
changement dans son
style, le coloris
là,
tenir
l'effet,
donner, de façon à se prix.
heurté,
de leurs person-
l'artiste aurait été
compte que de
original à tout
tout à coup, un
de ses tableaux, l'aspect
allongé, maladif et tourmenté
nages, décidé que
con-
rapproche-
d'un simple imitateur.
bizarre de certains
la folie
éclater la vive
fait
suscitée chez lui
établi
question de
de tout
de ne plus lui
subor-
montrer personnel
Nous avons
déjà
dit
et
ce
qui en est, laissons donc de côté ces légendes,
propagées jusqu'à ces derniers temps, par tous
LE GRECO
3o
les
historiens
et
critiques
d'art
qui se
sont
occupĂŠs de Domenikos Theotokopuli, se recopiant
les
unes
les
autres avec une incons-
cience ingĂŠnue, sans plus ample information.
II
LES PEINTURES DU GRECO A TOLÈDE
ET A L'ESCURIAL
Sur une petite place de Tolède, à laquelle
on accède par un enchevêtrement de étroites,
bizarrement contournées, se trouve
vieux couvent de Santo
dont
la
elle
Domingo
el
le
Antiguo
chapelle, précédée d'un auvent qui forme
une sorte de quable.
ruelles
péristyle, n'a rien
de bien remar-
Quoique de proportions
assez vastes,
ne se compose intérieurement que d'une
seule nef. C'est dans ce sanctuaire que se trou-
LE GRECO
32
vent, mais
non plus au complet,
peintures connues,
premier corps,
le
premières
exécutées par Domenikos
Theotokopuli en Espagne. Sur dans
les
il
le
grand retable,
au milieu,
plaça,
VAssomption; dans
les
droite. Saint Jean
FÉvangéliste en pied, sur-
entre-colonnements,
à
monté de Saint Bernard en buste prolongé, selon l'expression espagnole; à gauche. Saint Jean-
Baptiste en pied,
surmonté de Saint Benoît en
buste prolongé; au-dessus de l'entablement, au milieu
du couronnement, un médaillon conte-
nant une Tête de Christ; dans
le
second corps,
il
mit V Adoration des Bergers. Cette décoration se
complète par retable
du
la
Résurrection du
collatéral
Éternel tenant son le
retable
une Sainte
du
Christ sur le
de gauche, par
fils
collatéral
mort sur
les
de droite,
Véronique tenant
le
Père
le
genoux sur et enfin par
voile
où
visage de la divine victime est reproduit.
le
Une
LE GREGO
partie
dans
de ces peintures ne la
chapelle.
33
se
L'Assomption
trouve
plus
figurant
les
douze apôtres, autour du tombeau vide de
mère du Christ qui pieds posés sur
le
s'élève
fait
collection de Tlnfant
bon,
elle est
les airs, les
croissant, soutenue par des
anges, a été remplacée, vers copie. Après avoir
dans
la
une
longtemps partie de
Don
aujourd'hui
1830, par
la
la
Sébastien de Bourgloire de l'Art Insti-
tute de Chicago. Cette page superbe témoigne
d'une énergie singulière où dominent
les
co-
lorations vertes, brunes, dorées et carminées,
avec des rappels d'indigo et de noir. La Vierge, tout en blanc, les yeux profonds et sombres, vision encore
humaine quoique déjà
un mélange d'innocence l'a
si
traits
bien dit
et
céleste, est
de volupté,
le D"" Justi; les
comme
apôtres, des por-
de nobles castillans sans doute, ont
dignité et la rudesse de la race espagnole.
la
'
LE GRECO
34
Le Père Éternel^ une mitre blanche sur tête,
un manteau jaune doublé de bleu recou-
vrant sa tunique blanche, fils
la
accompagné d'anges
sur les genoux,
chérubins sous
les
plis
sous ses pieds, a été, transporté au
cadavre de son
le
il
de
son
et
de
manteau
et
y a un certain temps,
musée du Prado,
à Madrid. Les
personnages des entre-colonnements
:
Saint
Jean rEvangéliste, Saint Jean-Baptiste, sont de nobles figures, imposantes et grandioses; Saint Benoît^ Saint Bernard, de pauvres copies
Tête
du
Christ,
airs,
montre
la
enfermée dans l'écusson du
fronton, est d'un sentiment exquis. rection
;
le
La Résur-
Sauveur s'élevant dans
une sorte d'oriflamme à
la
les
main, tandis
qu'en avant du sarcophage s'effarent ses gardiens
et
qu'au
corps, est placé
premier plan, coupé à
un
prêtre, en
cerdotaux, sans doute
le
mi-
vêtements sa-
donateur du tableau.
LE GRECO
L'Adoration
Bergers
des
est
une
partie supérieure, par
35
illuminée, à sa
gloire surgissant
milieu de nuées fulgurantes. Pour
ronique tenant la face
le voile
où
au
Sainte Vé-
la
se trouve reproduite
auguste du Sauveur, ce n'est plus qu'une
copie dont l'original
fait
partie d'une collec-
tion particulière.
Cette décoration de Santo
guo
est,
ou plutôt
était,
Domingo
une merveille
el
Anti-
d'effet
de
lumière, de science, d'audace, déjà toute dif-
productions italiennes du jeune
férente
des
maître.
Malgré tout, on y trouve
niscences
du
Véronèse, des Venise.
On
du Tintoret,
Titien, trois
voit
des rémi-
de
fameuses Assomptions de
que
fréquenté Giorgione,
le
peintre avait
Palma,
Paris
Leandro Bassano, avec lequel on
connu
la
et
Bordone, l'a
parfois
confondu. Néanmoins, du premier coup, su exprimer
Paul
il
a
pensée de ses nouveaux com-
LE GRECO
36
patriotes dont
s'est
il
fait
juste interprète.
le
Comme on devait s'y attendre, lespeinturesde Santo Domingo
el
Antiguo reçurent un accueil
enthousiaste. Aussi
chapitre
le
de
la
cathé-
drale, à l'affût de tous les talents, demanda-t-il,
sans tarder, à
sentant
le
l'artiste
Partage de
la sacristie
de
toile est des
la
fond
et
et vociférante
du tableau,
larmes et levés vers
la
La
main
de soldats
de hallebardes qui occu-
de fatigue et d'angoisse,
tante, la
métropolitaine.
mieux ordonnancées. Au milieu
armés de piques le
tunique du Christ^ pour
l'illustre église
d'une foule hurlante
pent
une composition repré-
Sauveur,
le
les
épuisé
yeux remplis de la
le ciel,
bouche hale-
droite pressée contre la poitrine,
gauche étendue devant
lui,
s'avance poussé
par ses terribles bourreaux, tandis qu'au premier plan, d'un côté, coupées à mi-corps, les Saintes
Femmes
le
contemplent,
les
yeux mouillés de
LE GRECO
37
larmes, et que, de Tautre, un charpentier travaille à la croix
posée à terre.
Impossible d'aller plus loin dans l'analyse et l'expression des passions. rie,
On
on
crie,
s'inju-
on trépigne, on blasphème. Ce sont des
colères
de sauvages, des haines de bandits,
l'inconscience de
la
de l'holocauste, à
brute opposée à
la
tendresse de
Jésus, dont le rôle est
si
la
sérénité
mère de
la
poignant dans cette
lamentable tragédie.
Quoique ne
soit
pas
brossé par
Partage de
le le
le
il
paraît
Greco en Espagne,
Domingo
el
—
les
pein-
Antiguo en font
foi,
néanmoins de conception antérieure
et dater, tout
au moins dans ses grandes
de l'époque où
l'artiste habitait
ou Rome. Ce qui semble découverte
du Christ
premier tableau, que l'on sache,
tures de Santo
—
la tunique
faite
en 1874,
le
lignes,
encore Venise
prouver, c'est
P'^^
'^
^^
la
Justi, à
LE GRECO
38
Venise, dans toile, ci,
la
galerie Manfredi, d'une petite
attribuée au Barocci, réduction de celle-
dans laquelle,
il
est
vrai,
personnages sont quelque peu qui n'est pas
douteux,
c'est
types
des
différents.
Ce
les
que Domenikos
Theotokopuli a peint sa composition de
la
cathédrale tolédane d'après des études et des esquisses rapportées d'Italie, selon toute probabilité, entre
1578
et 1579.
Il
avait par
con-
séquent une trentaine d'années. C'est
une des plus nobles
et des plus
gran-
dioses conceptions de l'artiste, rappelant, cela
va sans dire, celles des Vénitiens de
époque,
surtout
avec qui
le
Greco
les
ouvrages
du
la
belle
Tintoret,
a de particuliers points
de
Ce
qu'il
convient d'admirer avant tout, dans cette
com-
contact et de nombreuses
affinités.
position, c'est le respect absolu de la nature allié à
une invention chimérique des formes,
LE GRECO
à
39
un individualisme pénétrant, ce qu'un M. Hamel, appelle
tique sagace^
l'héroïsme de
la
interpréter
drame
le
conscience.
très
Le
cri-
justement
peintre a su
religieux, en dégager la
pensée morale, sans que pour cela sa technique
en
ait souffert.
On titions
connaît jusqu'à sept variantes ou répéplus
ou moins dissemblables, plus ou
moins tronquées, du Partage de Christ,
Le tableau
encore à
la
mandé dans
chance de
a la
place pour laquelle la
sacristie
dane qui renferme en
la tunique
de
plus,
la
il
se
du
trouver
a été
com-
métropole tolé-
du maître, un im-
portant Apostolado, c'est-à-dire une suite de treize tableaux représentant
à mi-corps et
chacun des apôtres
un Christ bénissant,
grandeur naturelle, plus ou moins
figures de
fantaisistes,
de personnages de l'entourage du Sauveur, ou plutôt de l'artiste, d'une noblesse d'expression
LE GRECO
40
d'une vigueur de coloration inoubliables
et
enfin,
;
un Saint François cTAssise agenouillé,
priant devant une tête de mort.
Le sombre
Philippe
bâtissant l'Escurial,
II
recherchait de tous côtés les plus habiles ar-
décorer; aussi, en 1^79,
com-
renommée
s'était
bien vite répandue dans les Castilles, un
Mar-
tistes
pour
le
manda-t-il au Greco, dont
de Saint Maurice
tyre
et
la
de ses compagnons^
destiné à itre placé dans l'église
du célèbre
couvent, sur l'autel consacré à ces défenseurs
de
Le
peintre,
faite
pour
la foi.
torture,
au des
lieu
d'une scène de
yeux
espagnols,
a
représenté de nobles officiers en armure, qui
semblent s'entretenir d'un plan de campagne.
Dans
cet ouvrage,
appartient
xvr
siècle
tériorité,
encore italien,
Domenikos Theotokopuli par par
bien le
des
côtés
au
sentiment de l'ex-
du matérialisme du
spectacle,
par
LE GRECO
Tattrait
de
la
41
beauté pour elle-même, par son
intellectualité particulière. Aussi
s'étonner
si,
malgré son incontestable sentiment
artistique, Philippe l'a
écrit
faut-il pas
ne
II
n'y comprit rien.
M. Maurice Barrés, on peut donner
raison au roi. «
Greco ne
vit
pas >
en cela des milliers de
avaient égalés,
—
mais
la
mort,
confesseurs
rêva de
il
mérite
le
des martyrs, « dans l'acceptation de
—
Comme
les
glorifier
que leur chef Maurice eût obtenu par son discours
Philippe
mis à
la
même
nato,
II
il
la
ne voulut pas que
place qui
remplacer, le
de toute
le sacrifice
lui était
légion ». le
tableau fût
destinée.
Pour
commanda une composition
sujet à l'éclectique
venu de Florence,
été élève de Salviati.
l'y
sur
Romulo Cincin-
sa patrie,
où
il
avait
Son ennuyeuse machine,
veule, impersonnelle, sans caractère et pleine
de réminiscences,
est
encore aujourd'hui sur
LE GRECO
42
Tautel
consacré à Saint Maurice, au bas de
l'église
où
Quint
l'avait
placer le
fait
de Charles-
fils
voilà trois siècles et demi.
La
Greco remise au prieur du couvent
toile
fut alors
reléguée sur un humble autel de sacristie
trouve aujourd'hui dans
la salle
du
elle se
;
capitulaire
du
monastère.
Le mécontentement du souverain table désastre le
pour
succès de cette
patrie.
Tout
n'était
composition pour sa
moins de
l'opinion
la
du souverain,
sonnes de
son
A
et
pro-
nouvelle
écrit
qu'une
cour ne partagea pas et
que nombre de per-
entourage reconnurent,
l'œuvre du peintre crétois,
grand savoir
lui
cependant pas irrémédia-
blement perdu. Le Père Siguenza partie au
un véri-
comptait sur
Tartiste, qui
une haute situation dans
curer
fut
les
dans
preuves d'un
d'un art supérieur.
côté du Martyre
de Saint Maurice
et
de
LE GRECO
ses
compagnons,
convient de faire une place
il
au tableau connu sous Philippe
Dom Manuel Cossio,
du Songe de
le titre
également
II,
43
à
l'Escurial.
D'après
qui semble bien avoir rai-
son, cette toile aurait été brossée seulement
après
mort du monarque, vers 1600, un peu
la
plus tard
pour
même, commandée
par
être placée au-dessus de son
le
chapitre
tombeau. Elle
représenterait une sorte de gloire, de triomphe
du
Christ, de
lippe
II
Jugement dernier où
au nombre des
yeux pieusement les
figure Phi-
agenouillé,
élus,
levés vers le ciel, tandis
réprouvés sont engloutis dans
du dragon,
largement ouverte retrouve
même
dans
toutes
que
gueule
la
qu'on
telle
interprétations
la
du
sujet par les peintres primitifs.
Une remarque de Philippe lerie
les
les
II,
à faire, à propos
c'est
du Songe
qu'en Ecosse, dans
du capitaine Archibald
la
Stirling, se
gavoit
LE GRECO
44
une variante du tableau, une simple esquisse, dans laquelle, parmi trouvent
le
pape Jules
toiles
voit
le
II,
encore à l'Escurial
du Greco
:
autres
trois
nombre
d'autres
nobles figures en pied
enveloppé d'un grand les
I^^
d'Assise
que nous rencontrerons,
dans
François
un Saint François
en prières, variante d'un grand
l'Église
roi
ciel, se
de l'époque.
et d'autres princes
On
prédestinés au
les
deux grandes
et
et
Saint Pierre, nu-tête,
:
manteau,
mains
et
les
clefs
de
Saint Eugène, ar-
chevêque de Tolède, en vêtements sacerdotaux, la
la
mitre en tête,
main droite
et
attentivement, dans
la
un la
livre
de
ouvert, qu'il
lit
gauche.
Tout proche du Tage tale impériale
crosse pastorale dans
qui enserre
trois côtés, sur
carpée du roc, se trouve
l'église
la
la
capi-
crête es-
Santo Tome,
surmontée d'une haute tour en briques
roussies,
LE GRECO
à
45
arcatures arabes et à colonnes
domine
qui
les bâtisses
l'entrée de ce sanctuaire, droite, sert
environnantes. C'est à
au fond de
la
travée de
dans une arcature des plus simples qui
de cadre, que se trouve
des œuvres du Greco, celle plus
vernissées,
la
plus célèbre
qui a suscité au
haut point l'enthousiasme de
temporains
ratifié
par
la
lui
ses
con-
VEnterre-
postérité,
ment du comte d'Orgaz. Cette merveilleuse peinture fut à l'artiste
en
1584 ou 1586 par
Gaspar de Guiroga, sur de
l'église.
mage
commandée
les instances
Ne nous arrêtons
avait de tardif;
il
le
cardinal
du curé
pas à ce que l'hom-
nous a valu un chef-
d'œuvre, n'est-ce pas assez
!
Cette
toile, à elle
seule, suffirait à immortaliser à jamais son auteur.
Elle le
dans
montre au point culminant de
le
plein
sa carrière,
épanouissement de son génie.
La composition
est divisée
en deux parties,
LE GRECO
46
l'une supérieure,
ou
ou
céleste; l'autre, inférieure,
terrestre.
Dans
la partie
supérieure,
le
comte d'Orgaz,
nom-
dépouillé de ses vêtements, escorté de
breux
saints, se présente à
genoux devant
le
Christ qui trône, au milieu d'une gloire, en-
touré de
la
Vierge,
milices célestes
gentilshommes,
;
dans
de Saint Pierre la
avant de
le
des
partie inférieure, des
des religieux
accompagnent Saint Augustin en vêtements
et
et
des
clercs,
et Saint Etienne,
sacerdotaux, qui
soutiennent,
déposer dans son sépulcre,
corps
le
du comte d'Orgaz couvert de son armure portant la
le
droite
manteau de
l'ordre de Santiago.
les
en
A
de Saint Augustin, se tiennent un
prêtre en surplis, les bras étendus et
prêtre
et
dalmatique, un
mains, en
avant d'un
livre
un autre dans
ouvert
porte-croix
;
à la
gauche de Saint Etienne, un jeune page à
LE GRECO
47
demi agenouillé portant un gros cierge allumé, et
un
franciscain.
Dans figures allure,
cette vaste composition, les différentes
de
la
scène céleste, d'une très
belle
quoique d'une conception quelque peu
étrange, sont d'un coloris délicat et
personnages de
la partie terrestre,
fin
;
les
au-dessus de
tout éloge.
Chaque savante trait
tête,
et
exécutée d'une touche large,
hardie,
est
un merveilleux
por-
d'une facture superbe. Les noirs des cos-
tumes sont d'une
harmonie sans
égale; les
blancs, d'une fermeté, d'un éclat, d'une trans-
parence inouïs. et
Si
l'âme de
l'artiste est
chaude
ardente, son métier n'en reste pas moins
raisonné et voulu, son exécution d'une sagesse absolue; ses procédés demeurent élémentaires, ses colorations
pliquées.
sommaires
et
nullement
com-
Malgré tout, dans ce chef-d'œuvre,
LE GRECO
48
c'est
dans sa partie inférieure, dans sa partie
purement
humaine, que
plus de sa personnalité. maîtres,
—
ils
entière
comme sa
Comme
a mis
—
il
nom,
ne retrouve sa absolue
puissance
retrempant au contact de
la
le
tous les vrais
tous ceux dignes de ce
sont rares, et
Greco
le
force
qu'en
se
nature, dans cette
intime
communion avec
l'oubli
de ce qu'ont produit ses devanciers et
par lequel
On voit, de
il
la vie,
qui
lui
donne
conquiert sa force créatrice.
au musée du Prado, une répétition
la partie terrestre
de V Enterrement du comte
d'Orgaz, peinte sans doute par
le fils
du maître,
Jorge Manuel Theokopuli.
A un
carrefour où aboutissent d'étroites rues,
peut-être vaudrait-il mieux dire s'élève la petite chapelle de
des ruelles,
San José, où Sainte
Thérèse entendit sa première messe à son vée à Tolède. Le Greco, en
1
arri-
587, y dressa trois
LE GRECO
49
retables qu'il décora de cinq peintures. Sur
grand retable, s'avançant
le
plaça
il
le
d'abord Saint Joseph
long d'un sentier, un bâton à
la
main, l'Enfant Jésus, garçonnet d'une dizaine d'années, câlinement pressé dessus, dans l'attique,
ment de
Vierge,
la
que domine
la
il
contre
a figuré le
Au-
lui.
Couronne-
montrant dans des nuages,
colombe symbolique,
du
Christ, entre son
lui
posent
fils
et le
la
mère
Père Éternel qui
une couronne sur
la
tandis
tête,
que divers personnages, coupés à mi-corps, sont placés un latéral
peu plus bas. Sur
gauche,
de
il
le
retable
mit La Vierge, debout
sur des nuages, l'Enfant Jésus dans les bras,
escortée d'anges et de chérubins et au-dessous. Sainte
vues le
de
Inès et peut-être Sainte Thècle,
profil
retable
et
coupées à mi-corps
de droite,
il
;
sur
peignit Saint Martin,
gentilhomme des plus élégants, couvert d'une
LE GRECO
5o
nue émergeant d'une col-
riche armure, la tête lerette
empesée
;
il
monté
est
un cheval
sur
blanc, richement caparaçonné et tranche son
manteau de son épée, pour en donner tié
à
un jeune mendiant
contre toile
les flancs
brossée par
San José
La ainsi
si
moi-
peu près nu, appuyé
de sa monture. La dernière le
maître pour
la
un Saint François
est
prières, sujet
à
la
fréquemment
chapelle de d'Assise en
traité par lui.
Vierge avec Sainte Inès et Sainte Thècle,
que Saint Martin donnant
la
moitié de
son manteau à un pauvre^ 'ne [figurent plus sur les retables
mandés Sur
et
pour lesquels
ils
avaient été
com-
ont dernièrement quitté l'Espagne.
un promontoire,
en
sorte d'éperon,
avant de Tolède, un peu plus bas que
la
porte
de Visagra, au-dessus du Tage, se dressent
les
importants bâtiments de l'hôpital de San JuanBautista,
d'ordinaire
désignés
sous
le
nom
LE GRECO
de
d'hôpital
afuera,
murs, fondé par
c'est-à-dire
cardinal Tavera,
le
chapelle renferme
5i
non seulement
le
hors
dont
les la
merveil-
leux sarcophage en marbre de son fondateur,
par Berruguete, mais encore cinq peintures du
Greco qui
avait été vers 1608, peut-être
un peu plus
du
chargé très probablement de
de ses retables et de leur décora-
l'édification tion.
tôt,
même
Ces tableaux consistent en un Baptême
Christ,
une Sainte Famille, Les Larmes de
Saint Pierre, un Saint François d'Assise et un portrait
du Cardinal
Christ, divisé
Le Baptême du
en deux parties, montre, dans sa
zone supérieure, et
Tavéra.
le
Père Éternel dans sa gloire,
dans sa zone inférieure, sous un dais sou-
tenu par des anges, Jésus,
les
pieds dans
le
Jourdain, recevant l'eau lustrale de Saint JeanBaptiste
Jésus
;
la
dans
Sainte Famille, les
bras,
la
Vierge, l'Enfant
accompagnée de Saint
LE GRECO
52
Joseph
et
de
Saint Pierre,
Sainte
dont
il
Anne
exemplaires du duit par
Tavera,
le il
dans une grotte som-
reniement
cT Assise en prières,
n'est
même
maître.
diverses répéti-
existe
tions, le chef de l'Église,
bre, pleurant son
Les Larmes de
;
;
si
souvent repro-
le portrait
du Cardinal
en sera plus loin question. les
peintures du
afuera en
1841, voilà
Théophile Gautier, qui a vu
Greco de
Saint François
qu'un des nombreux
sujet
Pour
le
l'hôpital
de
près de trois quarts de siècle, écrit, dans son
« Voyage en Espagne », qu'au premier abord
on prendrait
la
Sainte Famille pour un Titien,
que « l'ardente couleur du
coloris, la vivacité
de ton des draperies, ce beau
reflet
jaune qui réchauffe jusqu'aux nuances fraîches
tromper le
du peintre
vénitien, tout
l'œil le plus
exercé
».
Il
d'ambre les plus
concourt à trouve dans
Baptême du Christ « des abus de blanc
et
LE GRECO
de
53
noir, des oppositions violentes, des teintes
singulières, des attitudes strapassées, des dra-
peries
cassées et chiffonnées à plaisir
tout cela »,
que ce
finit-il
;
n'empêche pas
par dire,
l'œuvre d'un grand peintre.
soit là
Signalons encore à Tolède, dans
San Vicente, une Annonciation
l'église
d'une authenticité absolue? Dans
un
Doncellas se autre, au
Bautista,
le
de
un Saint
et
Dominique de Guzman; mais ce dernier
las
mais
est-il
colegio de
trouve un Christ en croix
musée; dans
l'église
un Saint Jean-Baptiste
;
de San Juanet
un Saint
Jean l'Ëvangéliste, longues figures ascétiques et sauvages, maigres et décharnées.
Non
loin
de Bayona, se
de Tolède, dans le
Greco
rapportant à
leine, auxquels,
Manuel, a
l'église
avait placé cinq tableaux
la vie
de Sainte Marie-Made-
probablement, son
travaillé
du bourg
avec
lui
;
fils,
Jorge
un Ange appa-^
LE GRECO
54
raissant à la Madeleine
Madeleine; leine; le
;
Jésus
enseignant
Christ apparaissant à la
le
Repas chez Simon
par deux anges.
Made-
VAssomption de
et
nue dans
la Sainte s'enlevant
la
soutenue
les airs
La décoration
se complétait
d'une Sainte Face. Tous ces tableaux ont disparu.
Le Repas chez Simon
faisant
collection de sir
partie
à
Edgar Vincent
Londres de
la
où
que préside
le
Christ entouré des
comme
le
sera plus tard celle
la table
invités est vide,
des Pèlerins d'Emmaiis de Rembrandt, tableau de Bayona
impossible de
A
côté
.^
C'est probable, mais
il
est
le certifier.
des épisodes de
Madeleine de
est-il le
l'église
la
vie
de Bayona,
de Mariele
Greco a
peint d'autres Madeleines, mais des Madeleines pénitentes, toutes ayant entre elles de sensibles
rapports, toutes à mi-corps, demi-nues, le vi-
sage extatique et transfiguré par l'amour divin,
LE GRECO
les
cheveux épandus sur
55
les épaules, les
mains
d'ordinaire croisées.
A une le
date
qu'il
est
de préciser,
difficile
marquis de Villena, un des protecteurs
les
même
de
plus fidèles
du Greco,
qu'il
soutint
ses deniers, chargea le maître d'exécuter
verses peintures pour
possédait
à
la
chapelle du palais qu'il
Escalona, non
de Tolède.
loin
Domenikos Theotokopuli décora tels latéraux
de ce sanctuaire
;
il
les
de gauche, Saint Jean-^Baptiste
deux au-
mit sur celui
de droite deux Saints Franciscains
VÉvangéliste.
di-
;
sur celui
et Saint
Jean
SCEAU d'un DOMENIKOS
III
LES COMPOSITIONS
ET LES PAYSAGES DU GRECO
A
mi-chemin entre Tolède
la vieille
route,
ville d'Illescas, la belle
la
et
Madrid, sur
carretera, se trouve la petite
qui montre encore avec orgueil
tour mauresque qui sert de clocher à
sa principale forteresse et le palacio
où
fut
prisonné François P^ après sa captivité à drid.
Une
la
Ma-
des églises d'Illescas renferme cinq
peintures du maître
ment de
em-
Vierge,
:
la
Charité, le
V Annonciation^
Couronnela
Nativité
LE GRECO
58 -
— ^rii^-
1
1
[
.
,fi
,
|-
__
-
..
I
I
II.
m
I
.
,
1
I
.
1
I
et Saint Ildefonse écrivant sous la dictée de la
La Charité
Vierge.
est figurée par
une femme
recouverte d'un long manteau abritant sous
deux malheureux estropiés
ses plis
ronnement de
même
sujet
la Vierge n'est
de
lède, sans les
la
;
qu'une variante du
chapelle de San José de
personnages du bas de
V Annonciation et
Cou-
le
la
To-
la toile
;
iVafmï^ sont de forme cir-
culaire. Saint Ildefonse écrivant sous
la dicte
morceau sans contredit
le
plus
important de cette décoration, montre
le
pré-
de la Vierge,
lat,
le
dans une sorte d'oratoire, en vêtements de
chœur, vrant
le le
camail violet sur les épaules recousurplis,
dossier, devant pis
la
nant une plume,
Le
saint
les inspirations
t
\
sur
un siège à haut
une table recouverte d'un ta-
de velours,
ouvert.
assis
la
main droite levée
et te-
gauche posée sur un
livre
personnage semble écouter
que
lui
suggère une statuette
LE GRECO
de
la
mère de Dieu, recouverte de
lourds atours, côtés.
59
Le
placée
tableau
sur
avait
la
été
riches et
muraille
à
ses
commandé au
Greco en souvenir d'une image miraculeuse de
la
que renfermait un
Vierge
tage voisin, qui passe pour à Saint Ildefonse
;
avoir
petit
ermi-
appartenu
M. Ed. Degas en possède
une réduction.
A
Madrid, au musée du Prado, cette mer-
veilleuse collection de peintures qui renferme
quarante
et
vingt et un
un
Titien, soixante-cinq
Van Dyck,
Rubens,
soixante Bruegel, cin-
quante-cinq Teniers, l'œuvre presque entière de Velazquez,le Greco est représenté par une vingtaine de toiles. Laissant de côté le Christ mort dans les
bras de son père, provenant de l'église
vent de Santo il
convient
Baptême du
de
Domingo
el
du cou-
Antiguo de Tolède,
s'arrêter, d'abord,
Christ, autrefois
dans
devant un l'église
de
LE GRECO
6o
DoHa Maria d'Aragon, de Madrid, celui
variante de
de l'hôpital de afuera, de Tolède, repré-
sentant Jésus agenouillé sur un rocher, entouré
d'anges chantant ses louanges, tandis que
Précurseur
répand l'eau du Jourdain sur
que dans
tête et le
lui
le
haut de
la
Père apparaît entouré de
ensuite, devant
de Atocha Sauveur,
si
comme el
dans
le
Christ, peinte
Notre-Dame
même sujet
du
de
le
l'église
divin ressuscité,
les
chargés de veiller sur son tombeau le sol.
Au
bas de cette
maître avait réservé un espace pour
essayer ses tons; nous y retrouvons quel,
;
Antiguo, tient une banderole,
gisent renversés sur toile le
milice céleste
sanctuaire de
qu'au-dessous
soldats
la
vénéré à Madrid, dans laquelle
Santo Domingo alors
le
la
composition. Dieu
une Résurrection du
sans doute pour
le
un spécimen de
demeuré
tel
sa palette. Enfin, arrêtons-
nous devant une Vierge entourée des Apôtres,
LE GRECO
— longues jour de la
la
6i
figures expressives au possible,
—
le
Pentecôte, jadis aussi, à Madrid, dans
chapelle de las Baronesas.
Ces
trois tableaux,
hauts et étroits, appartien-
nent à ce que l'on est convenu
d'appeler
le
genre exalté du maître, aux colorations aiguës, livides
gés,
et
aux personnages allon-
blafardes,
aux gestes contournés, aux attitudes ma-
niérées et bizarres.
Ils
n'en sont pas moins des
plus passionnants.
Voici une Sainte Famille, où Sainte
Anne soignent
divin
le
la
Vierge et
enfant,
tandis
qu'à leur côté, un petit Saint Jean, nu, porte
une
corbeille de fruits et
se trouve le
même
Saint Joseph.
sujet, traité
par
qu'un peu en
arrière,
Nous avons
déjà vu
le
maître à l'hôpital de
afuera. D'autres Sainte Famille font partie de collection
du
roi
de Roumanie,
ries françaises et américaines.
ainsi
la
que de gale-
Revenons au Prado
LE GRECO
62
et
arrêtons-nous maintenant devant un bijou sans
prix,
une
petite Annonciation
ne mesurant pas
plus de vingt-cinq centimètres de hauteur, sur
tout au plus vingt de largeur, qui figure, sous le
péristyle d'un palais de la renaissance ita-
lienne, la Vierge agenouillée, le visage tourné
vers
le
messager
céleste
glorieuse maternité.
lui
annonçant
Le panneau,
sa
peint à l'aide
des glacis chers aux peintres des lagunes, date sans doute de
la
jeunesse du Greco et a dû
être apporté par lui en Espagne.
brossé sentant
nombre le
Le maître
a
d'autres toiles, toutes repré-
même
sujet,
les
unes appartenant
à des galeries publiques, les autres à des collections privées.
Le musée de Tolède richi
s'est
dernièrement en-
d'une figure en pied, peinte par
nikos Theotokopuli, provenant de
la
Domechapelle
du colegio de San Bernardino de Tolède, un
LE GRECO
63
certain
temps déposée au Prado, probablement
de
même
la
l'hôpital
sous
le
époque que
de afuera. C'est un Saint Bernardin^ froc
de son ordre, debout, en avant
d'un paysage emprunté à
dane
;
aux pieds du
mitres de soie d'or
et
saint,
blanche,
de pierres
plus curieux.
une
décoration de
la
campagne
tolé-
sont posées
trois
la
ornées de broderies
précieuses,
Rarement
le
du
travail
le
maître a montré
figure plus ascétique; rarement sa colo-
ration a été plus chatoyante,
le
charme de
sa
palette, plus absolu.
Au
Prado, nous trouvons un Crucifiement,
douloureux au possible, de grandes proportions, provenant de
où
la
l'église
de l'Inquisition de Tolède
Vierge, Marie-Madeleine et l'apôtre bien-
aimé, sont prostrés au pied du gibet, tandis
que des anges aux
ailes
éployées recueillent
le
sang qui s'échappe des plaies du Rédempteur
;
LE GRECO
64
un
Christ à mi-corps,
couronne
ceint de la
d'épines, tenant dans ses bras l'instrument de
son supplice, noble figure au visage expressif et
douloureux, aux mains fines et aux doigts
un double
fuselés dont
de
la collection
fait
Beruete
;
à Madrid,
partie,
une Tête de
Vierge,
à l'aspect angélique, encapuchonnée jusqu'aux épaules, dont le
musée de Strasbourg possède
une répétition absolument identique François l'église
de
d'Assise las
en
extase,
;
un Saint
provenant
Recogidas, de Madrid
;
de
un Saint
Antoine de Padoue à mi-corps, dans sa robe
de bure,
main
droite
François duites, et
lisant, ;
lys
un Saint Jean-Baptiste
d''Assise
bien
une branche de
et
dans
la
un Saint
en pied, de proportions ré-
proches du Saint Jean- Baptiste
du Saint Jean VËvangéliste de
l'église
de
San Juan-Bautista de Tolède.
Le musée du Louvre possède deux ouvrages
t
\
LE GRECO
importants du Greco figure de saint roi.
du
:
65
un Christ en
Le
croix et
Christ en croix provient
palais de justice de Prades, petite sous-pré-
fecture des Pyrénées-Orientales, auquel été
de
une
donné par M. la ville, lors
religieux en
Péreire.
Déposé
à la mairie
1904,
il
a été acquis depuis par la Il
montre, devant un
fond de nuages déchiquetés et sombres,
Diego
le
et
avait
de l'enlèvement des emblèmes
direction des Beaux-Arts.
veur sur
il
gibet, les
le
Sau-
deux donateurs de l'œuvre
Antonio de Covarrubias,
les fils
du
célèbre architecte de Charles-Quint, à ses pieds, l'un à droite, l'autre à gauche. la la
toile
se trouvait
encore
Au
xviiP siècle,
au couvent de
Visitation à
Tolède où Palomino
La
monarque
virent.
Ferdinand
figure de roi
de
France, montre recouvert
le
Castille,
et
Ponz
la
auréolisé. Saint
ou Saint Louis
roi
de
souverain à mi-corps, de face,
d'une armure
damasquinée qu'un
LE GRECO
66
manteau drapé en forme d'écharpe recouvre en sautoir justice;
;
de de
la
main
il
tient le
bâton de
gauche, appuyée sur son casque
la
que porte un page,
miné par une
La
droite,
fleur
soutient
il
de
un sceptre ter-
lys.
galerie royale de
Roumanie
est particu-
lièrement riche en productions du Greco. Elle
renferme une superbe composition des Fian-cailles
de la Vierge, où
future
la
enveloppée dans un voile qui
qu'aux pieds, Joseph,
la
écoute,
main dans avec
lui,
la
mère du lui
Christ,
tombe
jus-
main de Saint
l'exhortation
du
grand prêtre, debout devant eux, une haute mitre blanche sur de Jésus
et
coupées à
de la
la tête
;
la
Dernière Entrevue
Marie, émotionnantes
figures
hauteur des genoux, dont tout
récemment encore
le
couvent de San Pablo
de Tolède possédait un double tion des Bergers
provenant de
;
la
une Adoravente du
roi
LE GRECO
Louis-Philippe, dont
le
67
haut est occupé par des
anges développant des banderoles; une esquisse
du Martyre de Saint Maurice
et
de
compa-
ses
gnons, sans doute, jadis, au couvent de San Tor-
quato de Tolède
et
enfin
Sainte Véronique tenant
apparaît
la
plusieurs portraits. voile sur lequel
le
Face, ou
Sainte
seule, sont l'un des sujets
la
pour lesquels
eut une affection particulière.
l'église paroissiale
La
Sainte Véronique
parlé
Domingo
de Bayona.
peignit pour les églises de Mostoles et de rubias, mentionnées par
Greco
le
Nous avons
des Sainte Face du couvent de Santo
Antiguo, de
Face
Sainte
Il
el
en
Covar-
Ponz et Cean Bermudez.
de
Mostoles est encore
dans cet humble sanctuaire. Pour
celle
de
Co-
varrubias, est-ce la 5(^mf^ Véronique faisant partie
de
la
collection de
Don Manuel Casado
nos-Ayres, en est-ce une autre, est-ce
Face récemment retrouvée
la
à
Bue-
Sainte
à Séville, qui sait
?
LE GRECO
68
Parmi
étranges productions de
les plus
nikos Theotokopuli, plutôt les
il
Dome-
faut placer le tableau,
ou
deux fragments du tableau connu sous
IttitYtdeV Amour divin et dtV Amour profane, s^ns
doute inspiré par un passage de l'Apocalypse, livre resté
cher à l'Église grecque, à laquelle
appartenait peut-être, très probablement, le peintre.
Cette composition, divisée en deux
montre
parties,
dans
propriété des héritiers
Serna,
des
même
sa
partie
supérieure,
du marquis de Castro-
anges à grandes
ailes
éployées
célébrant, à l'aide d'instruments de musique, la gloire
de Dieu
tenant à
Don
mier plan, à
Ignacio Zuloaga, figure au predroite,
dans une jtunique à levés vers le ciel,
dans loin,
une
appar-
la partie inférieure,
;
la
attitude
au second
et
un plis
tête
personnage
nombreux, à
drapé
les
bras
demi renversée,
d'extase, alors
que plus
au troisième plan, évo-
LE GRECO
dans des
luent,
attitudes
femmes,
jeunes
étranges
aussi
maniérées que rythmiques sveltes
69
modulées,
et
de
longs
et
de
jeunes
hommes nus. Ces êtres, que l'on pourrait presque du
qualifier
titre
d'ombres, s'agitent dans des
limbes étranges et extrahumains. ils
inquiètent, par leur aspect mélancolique et
résigné, voluptueux et ardent à
A
même
la
Laocoon rie
troublent,
Ils
et
inspiration appartient la
de ses
fils
partie de la gale-
Séville.
La composition,
— on
devait s'y attendre avec
n'offre
aucune analogie avec
versés affres
à
Le
vieillard et ses
le
le
Greco,
deux
mordus par
envoyé par Neptune, tandis que élégants éphèbes, nus
comme
—
fameux groupe fils
terre, se tordent pantelants
de l'agonie,
Mort de
fait
qui a
de San Telmo à
antique.
la fois.
les
nus, ren-
dans
les
serpents
trois longs et
eux, et ne s'in-
quiétant en aucune façon des malheureux expi-
LE GRECO
70
rant à leurs pieds, évoluent en de langoureuses
poses plastiques qui font valoir leurs formes.
Au
dernier plan s'étagent les palais et les édi-
fices
de Troie, c'est-à-dire de Tolède.
On sujet le
sait
du
jusqu'à
quatre
au
Christ
du
interprétations
Jardin
des
par
Oliviers
Greco. Deux, peints pour des édifices
reli-
gieux de Madrid. Le premier, pour
l'église
San Sébastian;
monastère
de
las
le
second, pour
Salesas Nuevas;
le
le
troisième, pour la
chapelle du palais ducal de Médina Cœli;
quatrième derniers
est
sont
au musée de dans
Lille.
manière
la
de
le
Les deux heurtée
et
allongée du maître.
Aucun
saint
n'a
plus
captivé
Domenikos
Theotokopuli que Saint François d'Assise. Ses figurations brables. citer
du
disciple angélique sont
Nous avons
quelques-unes.
déjà eu Il
innom-
l'occasion d'en
nous en reste d'autres
LE GRECO
à signaler. D'abord
le
71
Saint François cf Assise,
en compagnie d'un moine de son ordre, pro-
bablement
le
tableau connu sous
Deux Ermites
qu'il
ses historiens,
pour
titre
des
nous apprennent
peignit, le
le
réfectoire
du monastère
de Hiéronymites de Tolède, appartenant aujourd'hui au marquis de Cerralbo, à Madrid
toujours
puis
à
Madrid,
Saint
les
;
François
Mo-
d'Assise des collections Silvela, Pidal, S.
ret,P. de Quinto, R. Garcia, Castro-Serna, Car-
men à
Mendieta,
Barcelone,
lence à
;
Traumann
;
d'autres se trouvent
Tolède, Bilbao, Logrono, Va-
en France, aux musées de Pau, de
Paris,
Lille
chez M. Christian Cherfils, chez
;
le
peintre Ignacio Zuloaga, qui en possède jusqu'à trois,
dont l'un représente
le
fondateur
des
Frères Mineurs dans un paysage des plus accidentés, parsemé d'arbres et de rochers, au ciel
d'orage, à genoux, les bras écartés du corps,
LE GRECO
72
les
mains largement ouvertes marquées des
plaies des
implorant son créateur,
stigmates,
tandis que la foudre terrasse, à ses côtés,
moine de son ordre. Impossible de
un
rien voir
de plus beau, d'une coloration plus riche, d'une plus poignante que
impression neau,
d'ailleurs
lettres, qui
signé
ce petit pan-
du maître^ en
toutes
mesure tout au plus trente centi-
mètres de
hauteur
sur
vingt-cinq
de
lar-
geur. Il
est
une face du
Theotokopuli c'est
de
Domenikos
garder de négliger,
qu'il faut se
son merveilleux sentiment du paysage.
son époque, où considérée que
scène
situer,
pour
la
nature
comme un
et n'avait d'autre
à la
talent
extérieure
A
n'était
motif de décoration,
but que de servir de cadre
qu'elle
accompagnait, que de
ainsi dire,
il
en
fit
tante de ses compositions.
une
partie
la
impor-
Dans bon nombre
LE GRECO
de ses tableaux
fonds
les
apothéoses de
et farouches
73
sont
la terre
des monts tolédans, bossues et
pés
'de
de sublimes castillane,
stériles,
cou-
torrents grondeurs, plantés de loin en vent, dressant leurs
loin d'arbres tordus par le
cimes abruptes sur des prés, traversés
ciels
jaunes et
empour-
de lourds nuages, qui courent
éperdus, prêts à crever en cataractes.
Quoi de Tolède
la
de ses arides environs, que
et
trent les
plus dramatique que les vues de
lointains
mon-
du Saint Martin donnant
moitié de son manteau à un pauvre et du
Saint Joseph cheminant avec l'Enfant Jésus de la
les la
chapelle de San José; de plus épique que
fonds du petit Saint François d'Assise de collection
Laocoon tableaux ler
?
Ignacio Zuloaga, de
de
ses fils,
qu'il
serait
et
et
la
Mort de
de nombre d'autres
fastidieux
de
rappe-
LE GRECO
74
Mais
Greco ne
le
ces fonds,
peint plusieurs
a
il
nature extérieure
De
motif.
pour
mais,
principal,
D'abord,
valeur.
la
ainsi
deux
celles-ci,
^ue
de
dont
la
seulement
le
toiles
non
été
a
contenté
pas
s'est
Tunique
dire.
sont
de première
Tolède, aujour-
de
d'hui au
musée de
l'escalier
monumental de son Ayuntamiento,
dont, au
XVIII^ siècle,
Madrid,
vait à
l'antique cité, jadis
dans
une répétition l'église
costume élégant,
se trou-
Recoletos
des
montre, à droite, un jeune
elle
dans
;
homme, en
tuyautée au cou, des
la fraise
manchettes de guipure aux poignets, présentant
un plan de
la ville;
un person-
à gauche,
nage mythologique, à peu près nu, à demi
couché
un
filet
dans
le
et
appuyé sur une urne d'où s'échappe
d'eau, sans doute ciel,
la
le
Tage
;
au-dessus,
Vierge s'élève au milieu d'un
groupe d'anges musiciens; au-dessous,
et c'est
LE GRECO
là
tout
tableau,
le
développe
avec sa
75
castillane
capitale
la
se
ses couvents,
cathédrale,
ses églises, ses chapelles, son alcazar, ses palais
innombrables maisons.
et ses
Une
autre toile du Greco est encore plus
exclusivement un paysage, rien qu'un paysage. C'est
une seconde vue de
jadis
à
Madrid,
soit,
le
cité
impériale,
des
palais
comtes
aujourd'hui à Paris, à moins qu'elle
d'Onate,
ne
dans
la
elle
l'Amérique,
aussi,
comme
récemment
pour
partie
d'autres productions
tant
du maître.
Au tes, le
premier plan, entre deux berges abrup-
parsemées d'arbres agrippés à leurs
Tage tumultueux
grondant; plus
jambe
ses
se
loin, le
fraie
le
un passage en
pont d'Alcantara en-
eaux bouillonnantes,
éminence, à gauche,
flancs,
laissant sur
une
château de San Ser-
vando, tandis qu'à droite,
la ville
grimpe
le
roc.
LE GRECO
76
rampe
sur ses pentes, prend possession de son
sommet couronné
par son alcazar et sa ca-
thédrale^ dont les tours déchirent d'épais
nuages
chargés d'électricité qui s'entre-choquent furibonds.
/
IV
LES PORTRAITS DU GRECO
Le Greco
est
un des plus grands
portraitistes
qui aient jamais existé. Ses portraits ont une qualité primordiale qui les la
met au-dessus de
plupart de ceux de ses contemporains
ont
le
sens de
extérieure,
ce côté,
ils
la vie,
non seulement de
mais surtout de
la vie
;
ils
la vie
intime. Par
s'imposent à nous d'une façon toute
particulière, et
peuvent être mis en parallèle
avec
les
meilleurs du Titien et du Tintoret,
dont
ils
ont
le
genre,
l'allure
et
l'ampleur.
LE GRECO
78
s'en
Ils
néanmoins, par un dé-
distinguent
veloppement plus grand de
On
plus de nervosité.
Tâme d'un
par
spiritualité,
sent chez leur
auteur
rendue experte au métier
primitif
d'un Vénitien de la belle époque. Les portraits du
Greco, une
fois vus,
ne s'oublient plus. les
personnes
ne fût-ce qu'une seule
Ils
qu'ils
fois,
font véritablement revivre
représentent
;
nous ren-
seignent admirablement sur leur milieu, leur
genre d'existence, leur caractère, leur tempéra-
ment, à ce point
qu'il
semble qu'on
les a
ren-
contrés, que ce sont d'anciennes connaissances
retrouvées.
Quoique nous n'ayons pas la prétention de passer
chronologiquement en revue
peints par
les portraits
Domenikos Theotokopuli,ilnous
de toute nécessité dire deux mots de ceux brossa en
Italie
faut qu'il
avant de se rendre en Espagne.
Le premier que
l'on rencontre
est
celui
de
LE GRECO
macédonien
est représenté
dans l'angle
assis,
fenêtre donnant
extrémité, une
de
;
dénudé, et
L'artiste
d'une chambre, qu'éclaire, à
gauche
pagne
musée de Naples.
Clovio, au
Giulio
79
les
busqué,
cam-
sur la
trois quarts, le front haut, le
yeux légèrement la
bouche cachée sous d'épaisses dans une barbe
peu fournie, un
blanche, assez
dans
ouvert
les
livre
mains,
de mi-
semble
il
âgé d'une soixantaine d'années. Cette d'une
crâne
bridés, le nez fort
moustaches qui se perdent
niatures
l'autre
facture
un peu
toutes lettres du
nom
précieuse,
toile,
signée
en
de Domenikos Theoto-
kopulos en caractères grecs, rappelle, par certains côtés, le Tintoret.
assez
étrange
L'œuvre a
Rome l'hôte
très
d'un
Elle affecte la
rectangle
très
forme
allongé.
probablement été exécutée à
à l'époque
où
le
jeune
du cardinal Farnèse ou
peintre
allait le
était
devenir.
LE GRECO
8o
Le
Don Salvador Sanpere
critique catalan,
y Miquel, veut que pendant son séjour en le
Greco
ait
peint en pied
Italie
Anastagi,
Vicente
un des plus héroïques défenseurs de Malte. Ne serait-ce pas le
de
Hazanas,
représenté
agenouillé,
recouvert d'un
semé de
homme
fleur
de
lys,
Greco après son
las
mains
ample manteau bleu
en armure placé derrière
des premiers
les
accompagné d'un
paraît presque dans la
Un
nom
le
du capitaine Julian Romero de
celui
jointes,
connu sous
portrait
pénombre
gentil-
qui dis-
lui, ?
portraits, brossés
par
le
installation à Tolède, est, sans
doute, celui du conseiller d'État Yguera de
la
maison de Leyva, vu de
la
barbe
et
les
cheveux
face,
noirs,
en
qui après avoir
longtemps été accroché dans une la
buste,
sacristie
de
cathédrale de Valladolid, est aujourd'hui au
Canada.
LE GRECO
Dans
cet
8i
incomparable musée du
Prado,
réunion unique de chefs-d'œuvre, malgré merveilleux portraits
qu'il
Titien, Tintoret, Antonio
Van Dyck ces
et
renferme de Raphaël,
Moro, Sanchez Coello,
surtout de Velazquez, malgré
redoutables
écrasants
et
voisinages,
du Greco forcent l'admiration
effigies
à craindre
ils
se détachent
intensité de vie à peine croyable.
observation
si
et n'ont
aucune comparaison. Ce sont huit
fond sombre, dont
si
si
imprévue,
avec une
Tous d'une
prompte, d'une
si
exacte, d'une profondeur intellectuelle
subtile.
C'est
d'abord,
—
une pure merveille,
un gentilhomme d'une trentaine d'années, présentant
complètement de
haut, les sourcils arqués, la
les
d'hommes, en buste, émergeant d'un
portraits
vision
les
main
droite ouverte
le
face,
le
— se
front
nez un peu court,
appuyée sur
la
poitrine.
LE GRECO
82
le
pommeau damasquiné
sant à droite, à
la
base de
de Tépée apparaisla toile
;
puis Rodrigo
VazqueZy président de Castille, âgé d'une soixantaine d'années, tourné à droite, de trois quarts, le
visage maigre d'une distinction suprême et
barbe blanche en
du
Comte
pointe, indubitable
ancêtre
même
musée,
riorées,
!
montre un visage maigre, des yeux profondément enchâssés sous
fouilleurs
cade sourcilière, en pointe, grises; et droit,
teint
les le
la
la
hâlé
barbe et et
et
la
l'ar-
barbe
quatrième, au front haut et sec
mine hautaine les
bronzé;
soixantaine d'années, le
moustaches
encore plus maigre
cèdent, a
quième,
Le troisième personnage
une variante, hélas des plus dété-
existe
il
du
de Benavente
peint par Velazquez.
dont
la
a,
le
que
le
pré-
et sévère; le cin-
cheveux châtains, sixième, âgé
comme tous
le
d'une
les autres,
front haut et droit; le septième, très maigre,
LE GRECO
—
la
plupart
comme
ses
huitième
et
le
— semble un
sont,
compagnons dernier,
sans que rien ne l'aspect plutôt
83
hidalgo,
fier
d'ailleurs
enfin,
;
le
un médecin, croit-on,
prouve, à barbe blanche, à
le
doux
et réfléchi,
tandis que les autres, à part
le
vu à mi-corps
premier,
le
sont
seulement en buste, avance une main vers l'autre sur
spectateur, et tient
un
livre
le
posé
sur une table à ses côtés.
Les notes dominantes de ces œuvres hors de pair sont le noir, le gris, le blanc, l'ocre et le car-
min. Le use
le
noir,
chaud les
gris,
si
peintre,
pour
les
et
très
particulier et
pour
trois
les
collerettes et
carmin, pour raviver
ou quatre tons
lui
amplement, pour donner
l'illusion
pour arriver aux
de couleur
effets
le
et les fonds; le blanc,
monté, pour le
personnel, dont
visage et les mains;
vêtements
manchettes;
ombres. Ces
le
si
de
les
suffisent la
vie,
les
plus
LE GRECO
84
surprenants, les plus fins et les
plus délicats.
Cette technique du Greco est des plus instructives.
Prenons pour type
VHomme
portraits, celui
de
sous foncés de
la toile
carmins purs; tournant à
la
les
premier de ces
à Fépée, Les des-
sont rehaussés par des
colorations au brun
rouge
laque, produisent une magnifique
harmonie de roux violacés brillants
le
;
Tépée, avec les
de son damasquinage jaune ambré, est précieux au possible et non moins ha-
d'un
travail
bile,
sous une apparence volontairement négli-
gée.
La dominante de l'œuvre
jaune, en passant par tière
le violet,
qui va
du noir au
produit une
ma-
d'ensemble d'une profonde résistance, so-
lidement établie sur des surfaces transparentes.
Les
inoubliables
portraits
du
Prado proviennent sans doute du
Buen
Retiro,
ou de
la
Ponz raconte que dans
la
musée palais
du du
Quinta du Pardo. grande galerie qui
LE GRECO
entourait en
85
partie la première
de
ces rési-
dences royales, figuraient de son temps plusieurs portraits peints par
Quinta du Pardo,
la
il
Greco, et qu'à
le
en avait encore noté
cinq ou six autres. D'autres portraits du Greco sollicitent notre attention,
non moins vivement. D'abord,
du protecteur de
l'artiste, le
roga ou de Guiroga, qui
le
celui
Cardinal de Qui-
montre en vêtements
de chœur, un camail rouge violacé à capuchon rabattu sur les épaules, les deux mains longues et fines
appuyées sur un
table devant
lui.
La
tête,
yeux enfoncés sous cheveux blancs blanche
et
et longue,
superbe d'énergie de
ou
si
grande
six
et
si
livre
ouvert posé sur une
maigre
l'arcade
drus, la
aux
sourcilière,
les
barbe également
tombant sur et
et étroite,
la
poitrine, est
de volonté. Ce portrait,
noble allure, existe en cinq
exemplaires, dont l'un se trouve à
la
LE GRECO
86
National Gallery de Londres. Plusieurs critiques, parmi lesquels
l'écrivain
Manuel Cossio, étonnés
Don
espagnol
ses
nombreuses
répétitions, ont voulu voir en lui
un Saint Jé-
rôme. Mais ce Père de TÉglise,
le
interprété à maintes reprises, dans
un tout autre
de
Greco Ta
sentiment, décharné, hirsute, à peu près nu, dans
une
toile qui se
Maria Montejo
;
trouve à Madrid, chez
dans une seconde, jadis dans
Téglise de Burguillos, dont
à
Dona
New-York, dans
il
existe
un double,
collection R. Ehrich.
la
Mais revenons au cardinal Quiroga, dont
un dernier la
portrait
Beruete
collection
portraits
dont
ce prince
partie
de
Madrid. Après
les
profil
de
de cet archevêque,
dire quelques rera,
de
il
mots de
celui
fait
il
convient
de
du Cardinal Ta-
a déjà été question, qui représente
de l'Église en buste,
les
cheveux
courts, le visage rasé, portant sur les épaules
LE GRECO
un camail violacé
comme
le
87
cardinal Quiroga,
main gauche appuyée sur une
la
est
posée
barrette.
sa
toutes les effigies peintes par tokopuli,
—
nature, trois
la
où
doute
de
Domenikos Theo-
seule qu'il n'ait pas exécutée d'après
mort deux ou
car ce prélat était
ans avant
— mais
sans
C'est
table
la
naissance
même du
peintre,
seulement d'après des documents de
seconde main, probablement d'après
la
statue
de son tombeau par Berruguete. Berruguete, ce maître tier,
quelque étonnante que
puisse
paraître, semblerait
Greco. Dans
la
Don
J.
drilène^
une
si
suite
puissant et la
si
al-
constatation en
avoir
collection d'un
influencé
le
amateur ma-
Lazaro y Galdeano, se trouve
de bas-reliefs en bois de chêne peint
représentant
les
quatre Évangélistes, provenant
de Salamanque, attribués à ce maître, d'un
mouvement
et
d'une fougue qui font involon-
LE GRECO
88
tairement songer à Domenikos Theotokopuli. S'ils
sont bien de Berruguete,
donne
à penser,
prise de son
lède
il
faut bien
œuvre sur
le
comme
tout
le
admettre l'em-
Greco, arrivé à To-
une quinzaine d'années après
mort du
la
sculpteur castillan survenue en i^6i.
Un
dernier portrait de cardinal ne
en rien aux précédents; périeur
s'il
il
celui
Don Fernando Niho
inquisiteur
archevêque
de
York, dans
la
Séville,
même
leur est
est possible. C'est
su-
du grand
de Guevara,
aujourd'hui
collection H.
cède
le
à
New-
O. Havemayer.
C'est une des productions les plus puissantes et
les
plus
impressionnantes du
incontestable chef-d'œuvre. teur, qui
a
dépassé
la
Le grand
inquisi-
soixantaine, est figuré
en pied, de grandeur naturelle,
assis
siège de bois
à fond
des
un
maître,
plus simples,
sur
un
et à
dossier de cuir, les mains posées sur les ac-
/
LE GRECO
en avant d'une tenture.
coudoirs,
vêtement de chœur, haut
la barrette,
doux
et
sicles,
89
et
il
a le front,
bombé,
les
en
que couronne
yeux volontaires
barbe courte et presque complète-
la
l'avons
déjà,
dit
nous ne nous lasserons jamais de
une œuvre superbe de
un miracle de science
De
est
à la fois, brillants sous de larges be-
ment blanche. Nous
c'est
Il
cette
le
mais
répéter,
vie et d'énergie,
et d'habileté technique.
extraordinaire effigie,
existe
il
une
répétition en buste, peut-être l'étude première prise sur nature.
Poursuivons le
la
revue des portraits peints par
maître. Voici celui
du célèbre
Père Hortensio Félix Paravicino, siège haut,
comme
portrait
du
la
même
la
chevelure
assis sur
un
sur les genoux,
in-folio
noble et digne,
l'aspect
brune
un gros
Trinitaire le
barbe ;
religieux,
puis
soyeuse et
un second
mais seulement
LE GRECO
90
en buste tête
sans
une
ensuite, celui d'un Dominicain,
;
au visage carré, aux lèvres
plus,
minces, à l'aspect énergique et volontaire, dans
on
lequel
voulu
a
reconnaître
peintre
le
Bautista Mayno, ce qui est inadmissible, car
ce dernier n'avait pas vingt ans quand mourut le
Grecoet
il
n'entra que plus tard en religion.
Au musée de Tolède traits
peints
d'abord
les
par
le
se trouvent quatre
Greco, tous en buste
frères Covarrubias
été question à propos
musée du Louvre;
por-
du
l'aîné,
dont
il
Christ en
Don
;
a déjà
croix
du
Diego, successi-
vement évêque de Ciudad Real, de Ségovie président du Conseil de Castille
;
le
Don Antonio, chanoine de la cathédrale
et
second.
tolédane.
Diego de Covarrubias est représenté une calotte sur la tête, la
et courts, vêtu
barbe et
les
cheveux blancs
d'une soutane que couvre un
rochet sur lequel pend une croix; Antonio de
LE GRECO
Covarrubias,
la
barbe et
91
cheveux également
les
blancs et courts, porte un vêtement noir. Ces effigies,
aux harmonies
obtenues par
délicates,
les
valeurs des vêtements, les gris des visages,
les
blancs des cheveux et de
pellent les
la
barbe, rap-
beaux bustes du musée du Prado.
Laissant de côté une répétition du portrait de
Diego de Covarrubias, passons au quatrième portrait
brossé
par
galerie provinciale
cette
que renferme
maître
le
;
celui d'un religieux
au visage commun, aux cheveux drus broussailles,
aux yeux
main appuyée sur voir
vifs
la poitrine.
lousie
mourut en
1
le
fouilleurs,
On
a voulu, à tort,
le
bienheureux
célèbre apôtre de l'Anda-
569
et
Domenikos Theoto-
kopuli n'étant arrivé à Tolède que vers plus tôt, n'a pu par conséquent
Ne
s'agirait-il
pas
une
et
dans ce moine hirsute,
Juan de Avila, mais
et em-^
plutôt
le
1
576 au
rencontrer.
du Père Julian de
LE GRECO
92
une
Avila, qui en 1604, écrivit vie de Sainte Thérèse, lains attitrés
?
nous
tons en passant, au le portrait
le
dont
il
relation de la
un des chape-
fut
croirions volontiers.
musée Bonnat,
à
No-
Bayonne,
présumé du Duc de Benavente, à mi-
corps, la collerette et les manchettes blanches
tuyautées,
Le
vêtement
le
noir, l'épée
capitaine Archibald Stirling^ à Keir, en
Ecosse, possède, provenant de Louis-Philippe,
noux,
—
le
portrait^
— du sculpteur
apprécié de Philippe
11^
sellette.
Dans la
vente du roi
vu jusqu'aux ge-
italien
Pompeo
collection Stirling Maxw^ell,
Domenikos Theotokopuli, de Jeune
mantille,
une
Fille,
fleur
Leoni,
à ses côtés^ sur
à Londres, particulièrement riche en
trait
Greco, à
le
occupé à un buste en
marbre de ce souverain^ posé
une
la
sans doute peint par
TEscurial, si
au côté.
la
dans
se voient
tête les
œuvres de :
un por-
couverte
d'une
cheveux; ensuite
LE GRECO
un
portrait de Jeune
portrait de
Pompeo
cession du roi
longtemps sous Mais très
le
Greco
Femme,
Leoni,
93
ayant,
comme
fait partie
de
Louis-Philippe, connu le titre
eut-il
de La
une
fille,
Fille c'est
comme une des perles de
jeune
femme aux
tout
le
douteux,
nous conquiert par
la
surgissent
de le
de surhumain
la terre
dans tout
jeunesse. Ses grands yeux veloutés
douloureusement
ovale de son pur visage.
joues
La
sa beauté maladive et presque fa-
des êtres condamnés à quitter
de
con-
enveloppée
Elle a ce je ne sais quoi
l'éclat
le
larges yeux, qui envahissent
voiles et de fourrures,
tale.
depuis
sa collection.
visage, frileusement
charme de
suc-
la
du Greco.
douteux. Son heureux propriétaire
sidère
le
la terrible
Il
de
l'implacable
semble que sur ses
tache pourpre, et sur son front,
les irrémissibles veines
bleues des prédestinés
vont bientôt apparaître. Tout, jusqu'à sa main
LE GRECO
94
aux longs doigts
femme
Cette jeune
trouble
fuselés,
rappelle les douloureuses
évocations d'Edgar Poe. Elle a et les
obsède.
et
les doigts pâles
yeux mélancoliques de Morella;
beauté
la
de Ligeia, « vision aérienne et ravissante, plus
que
étrangement céleste «
On
teint et
—
rêveries ».
les
connaît les beaux yeux, l'ovale pur,
mat de
la fille
du Greco, mais de de
des sentiments
cette
sa voix
émouvante
vreuse, rien ne nous est parvenu », dit M. rice Barrés,
auquel
et qui écrit
encore
recueillait
les
:
le
fié-
Mau-
il
faut sans cesse recourir^
«
Quel
noms de
livre
si
l'on
tous ceux qui l'ont
aimée » Pas un portrait dans !
d'amour
les
anciennes écoles
n'a la spiritualité intensive de cette figure.
Par certains
Greco rappelle est bien puli.
fille
du
de SanchezCoello;
elle
côtés, la le faire
soi-disant
cependant de Domenikos Theotoko-
Est-ce
elle,
est-ce,
comme
le
voudrait
LE GRECO
M. E. Bertaux, pour
le
du
fils
95
peintre,
posa
qui
cierge dans VEnterre-
l'enfant tenant le
ment du comte d'Orgaz, qui
sait
?
C'est elle
incontestablement que l'on retrouve dans une étrange
composition du maître^ l'Homme
de feu,
la
femme
souffle,
où
cette
une torche à qu'un
tandis
d'étoupe,
même
l'aide
le
jeune
diable passe
et
femme allume
d'une étoupe enflammée,
singe
au-dessus
apparaît
de
épaule à droite et souffle pour attiser
son
est
la
flamme, alors qu'à gauche un jeune homme, le
chapeau sur Divers
dents.
tête,
critiques,
rit
en montrant
au
qui,
de
lieu
problématique du Greco, voudraient
fille
dans
le
modèle qui
circonstances, sa
aux
la
a
servi
voir,
au maître en ces
Dona Geronima de
Cuevas, penseraient encore
la
—
été
n'aurait
la
femme, seulement son amie,
dires de certains,
elle
les
donc pas
retrouver
las
vieillie,
enlevée par
la
LE GRECO
gô
maladie
?
—
mais encore
belle,
de femme d'un certain âge aux réguliers,
aux grands yeux
fixes,
dans traits
aux
buste
le
nobles et
lèvres plu-
tôt minces, à l'aspect rigide, la tête envelop-
pée dans une double
en
1
de
la
90
1 ,
Princesse d'Eboli.
s'agisse
un
rôle
Est-ce encore
du Greco, qui
du
à
et astucieuse si
ce
nous qu'il
personne tragique
II.
la fille,
la
femme, ou l'amie
au milieu d'autres per-
figure,
sonnages, dans
portrait
part,
mystérieux et
si
à la cour de Philippe
une composition de
l'artiste,
en Andalousie, aujourd'hui, croyons-nous,
Allemagne?
large
du
Pour notre
inconvénient
de cette étrange
qui remplit
en
exposé à Londres,
à l'Art Gallery sous le titre
ne voyons aucun
jadis
coiffe,
Cette
toile,
que haute, représenterait
peintre.
— toujours
Au le
centre,
beaucoup alors
La Famille
une jeune femme
modèle du
plus
assise,
portrait de la collée-
LE GRECO
tion Stirling
Maxwell
de
et
97
scène au singe,
la
— une ample guipure blanche tuyautée veloppant
le
visage,
brode,
lui
en-
yeux baissés
les
sur son ouvrage; à sa droite, une autre jeune
femme, un foulard sur elle,
tout en filant sa quenouille
une
vieille,
une guimpe
;
;
à sa gauche,
claire lui
moitié du front, tricote en
dessus ses lunettes
tourne vers
la tête^ se
la
cachant
la
regardant par-
en arrière, à droite, une
servante soutient dans ses bras un enfant de dix-huit mois à deux ans, qui veut essayer ses
pas encore incertains; à gauche, un chat est
grimpé sur un meuble. Faut-il voir dans cette scène d'intérieur
la
famille
du Greco, qui
Continuons cette rapide revue des
sait
?
portraits
dus à Domenikos Theotokopuli,par ceux que
Ton pense encore des
membres de
mand
le
sa
représenter, ou représenter famille.
Le
critique alle-
Justi et d'autres après lui, croient
recon-
LE GRECO
gS
— nous en avons
naître le Greco,
mot,
— dans
jeune
le
homme
déjà dit
un
placé à Tangle
inférieur des
Marchands chassés du Temple, de
la collection
Yarborough, aux côtés de Michel-
Ange^ du Titien
et
de Giulio Clovio; ce
n'esta
malgré tout^ qu'une hypothèse. D'autres veulent le
retrouver dans
le
centurion du Partage de la
Tunique du Christ de drale de Tolède;
Sainte Famille
la sacristie
dans
le
du Prado;
de
cathé-
la
Saint Joseph
de
la
c'est possible, rien
de plus.
Pour ayant
le
merveilleux portrait de Jeune Peintre
fait partie
de
la
collection réunie par le
duc de Montpensier dans son
Telmo tiers
et
généreusement
palais
de San
offert par ses héri-
au musée provincial de
Séville,
représente indubitablement pas.
Ne
il
ne
le
faudrait-il
pas plutôt voir dans ce personnage, à l'aspect élégant,
aux
traits
fins,
aux
mains aristo-
LE GRECO
cratiques^
le
Theotokopuli
de
fils ?
Mais
99
comme
ce dernier a fort
peint, s'est surtout fait connaître par des
peu
au
travaux d'architecture^
plutôt mis dans les mains
d'une palette
lieu
de pinceaux^ son père ne
et
Manuel
Jorge
l'artiste,
lui
aurait-il pas
un dessin de monu-
ment, un modèle de volute ou de équerre ou
un compas
Ne
?
frise,
une
vaudrait-il pas
mieux reconnaître Jorge Manuel Theotokopuli dans
le
jeune garçon de
nous avons
déjà
premier plan de
Le
portrait
la
droite,
au
Mais qu'importe
s'ouvrir
une œuvre
est vivant,
pour
!
il
parler,
semble
que
les
s'agiter.
Faut-il voir
buste
?
Séville est
personnage
bouche va
mains vont
la cité
du musée de le
à
composition, tenant dans
la
mains un plan de
hors de pair,
Vue de Tolède, dont placé
parlé,
ses
que
la
le
portrait
d'homme au
front
du Greco dans un haut quelque
peu
LE GRECO
100
dénudé, à
la
barbe grise en pointe, aux yeux
mélancoliques enfoncés sous l'arcade sourcilière,
nez long et droite
le
la collerette
tuyautée au
cou, rappelant singulièrement les personnages
de ses tableaux, qui passent pour ter
Ce
?
environs de Teruel.
les
autre portrait, que Ton pense avec assez de
vraisemblance être celui
même, le
représen-
portrait à noble allure a été derniè-
rement retrouvé dans
Un
le
faisant partie
montre, de face,
haut
et
dénudé,
la
collerette tuyautée
de la
de la
l'artiste
par
lui-
collection Beruete,
tête allongée, le front
barbe grise en pointe, une
au cou,
les
épaules cachées
sous un manteau garni de fourrures.
Peut-être conviendrait-il de les portraits
les
figurations de
Apostolados
saints, qui,
en
mettre parmi et
nombre de
réalité,
ne sont
pas autre chose.
Nous avons
déjà parlé de VApostolado de la
LE GRECO
delà cathédrale de Tolède. Le musée
sacristie
de
ICI
la vieille cité
provenant de
impériale en possède un second,
l'église
Saint-Pierre martyr
en rencontre d'autres à ailleurs; c'est
tolado que
Séville, à
lerie
superbe Buste d'homme de
ce
;
W.
les figures
Bourbon
chez
en est de
que
un Saint Bernard qui
se
Don Sébas-
peut-être
le
même
que
vu figurer dernièrement à
l'on a
Cheramy la
ga-
la
qui a renfermé tant de toiles
premier ordre,
vente
la
de saints, également des
trouvait dans la galerie de l'Infant tien de
et
van Horne à Montréal, Canada.
portraits, signalons
celui
il
de l'énergique Tête d'Apôtre, de
Parmi
de
Oviedo,
certainement une figure d'Apos-
collection Henri Rouart, à Paris
même
on
;
à Paris;
un Ëvangéliste,
la
jadis
comtesse de Anover, sans doute au-
jourd'hui en
Amérique
de Saint Pierre
et
;
à Madrid, le
tableau
— dans
l'apôtre
Saint Paul,
LE GRECO
102
des gentils,
le
Greco
senté lui-même,
un Santiago del
et
s'est
— chez
probablement repré-
la
marquise de Perinat;
un Saint Roch, chez Dona Maria
Carmen Mendieta
;
un Saint Ignace
Loyola, que l'on a pu voir chez
Bosch
;
de
Don Pablo
mais à quoi bon allonger indéfiniment
cette liste
?
Ajoutons-y, cependant, une œuvre
unique, croyons-nous, dans l'œuvre du maître,
une
sorte de miniature, le portrait
du
D""
Pisa,
l'auteur de l'histoire de Tolède, représenté de face, les
cheveux
pointe, sur
la
barbe blanche
en
un panneau d'une douzaine de centi-
mètres au plus.
V
rares,
LE GRECO ARCHITECTE
ET SCULPTEUR
Les
écrivains
critiques
et
monuments
célébré à l'envi les
espagnols
ont
élevés sur les
plans du Greco, vantant les nobles proportions, la
sobriété et la pureté de style
miento de Tolède cas, ses
et
de TAyunta-
des deux églises d'Illes-
principaux ouvrages selon eux.
aujourd'hui prouvé que
mientodeTolède
et des
sont pas son œuvre.
le
deux
Il
est
plan de l'Ayuntaéglises d'Illescasne
A part le palacio du
Cigarral
LE GRECO
104
de Buena Vista, le
cardinal
sur
la rive
édifié peut-être
par
Don Bernardo de Sandoval
y Rojas,
du Tage, aux abords du che-
droite
min de Tolède
pour
lui
à Avila, défiguré depuis long-
temps, nous ne voyons à mettre à son
actif
que
des retables.
Les
et xvii^
XVI^ sait,
retables
des
siècles
espagnoles
des
comme
l'on
consistent,
en fastueux autels à plusieurs corps, or-
dinairement en bois, tables
peints
monuments, montant
voûtes. lités
églises
de
Il
dorés,
et
parfois jusqu'aux
ne faudrait pas s'exagérer
ceux du Greco
;
véri-
les
n'a point,
il
quapour
eux, découvert un type architectonique nou-
veau, à
physionomie distincte
Sa formule est plutôt mixte
ceux de tous épris, à
les
la suite
truve, ne sont
;
et particulière.
ses plans,
architectes
de Palladio, du
de
comme
son temps,
style
de Vi-
que des adaptations des monu-
LE GRECO
ments gréco-romains, Texagération, à
une tendance
avec
boursouflure.
la
serait, paraît-il, l'auteur
io5
\
non
Le
à
Greco
seulement
des
peintures, mais aussi des retables de la cha-
Santo Domingo
pelle de
de
fini,
de Afuera,
—
pour il
Antiguo. Pour ceux
chapelle de San José, de l'église de l'hô-
la
pital
el
étant mort avant leur achèvement;
les retables
brossa
semble
les
la
Caridad
d'Illescas,
picturales,
il
—
dont
nous
malgré des opinions récem-
difficile,
partielle.
de
décorations
ment émises, de moins
cependant pas
n'aurait
qu'il
lui
Là ne
en dénier
la paternité,
au
se borneraient pas, selon
certains historiens, les ouvrages d'architecture
dus au maître;
il
passe pour avoir été chargé
en 1590, par Dona Maria ser
les
plans
d'une église
d'Aragon, de dresd'un
et
destinés à servir de maison d'études
gieuses Augustines de Madrid.
Il
couvent
aux
est fort
reli-
dou-
LE GRECO
io6
Domenikos Theotokopuli
teux que
quelque chose dans ces blement, tenait
le
l'église,
pour
proba-
édifices, seul,
grand retable de
une de
soit
qui con-
ses peintures, est de lui.
Mentionnons encore, au nombre des œuvres architectoniques attribuées au Greco, falque qu'il aurait
chapitre
rendre
1611.
de Tolède, dans
A
la
les
d'Autriche,
femme de
cette époque,
cata-
ordres
du
cathédrale, pour
honneurs funèbres à
les
guerite
dressé, sur
le
la
reine
Philippe
MarIII,
en
ces édicules, quoique
éphémères, étaient d'un luxe et d'une richesse
dont on ne peut que difficilement se idée.
ces
Aucune dépense
n'était
mausolées d'un jour,
desquels, à
la suite
à
faire
une
épargnée pour l'ornementation
des architectes, des sculp-
teurs, des peintres, tous les corps
de métiers
collaboraient.
Le Greco
est
beaucoup moins connu
comme
LE GRECO
sculpteur,
même
architecte.
Il
le
Don Fran-
de San Roman, d'après laquelle
cisco Borja il
comme
que
trop à l'opinion de
encore
serait
107
n'aurait été ni l'un ni l'autre. C'est peut-être
aller
un peu
loin.
ainsi
en bloc
les dires
de
porains
Pacheco,
le
paraît difficile de rejeter
Il
explicites des
contem-
N'oublions pas
surtout
si
l'artiste.
maître de Velazquez, racontant que
lors d'une visite qu'il
en 161
fit,
1,
à
Domenikos
Theotokopuli, à Tolède, celui-ci, en train de lui
montrer ses travaux,
dans une
pièce
de
sa
l'introduisit
d'abord
maison remplie des
maquettes en terre cuite de
ses ouvrages
de
sculpture.
Ce
qui est
sculptures
difficile,
que
Tolède mer,
et
de rencontrer des
puisse donner
l'on
certitude au Greco.
c'est
Les
édifices
en toute
religieux
de
de ses environs doivent en renfer-
mais lesquelles
?
Parmi
celles
que
l'on
LE GRECO
io8
soit
en droit, croyons-nous, de
Don
malgré que
man
les
statues,
veuille
en
Francisco Borja de San
de Monegro, se trouvent constituant
bois,
du grand retable de Santo Domingo
temps que qui
théologales,
el
Antiguo exécutée en
deux
les
décoration
la
entre
même
1^77 et 1^79,
en figurations des de
Ro-
du couvent de
l'église
les peintures,
consiste
lui attribuer,
trois
Vertus
et
en un
Prophètes,
groupe de deux Anges soutenant un grand médaillon. L'élégance des les
Vertus théologales,
proportions sveltes des Prophètes, l'attitude
des Anges,
la petitesse
des têtes de ces diffé-
rents ouvrages, d'un caractère italien indiscutable,
rappellent,
au dire
du
D""
Justi,
les
œuvres de Sansovino.
En même temps
qu'il
commandait, aux en-
virons de 1^79, à l'artiste
la
composition du
Partage de la tunique du Christ,
le
chapitre de
LE GRECO
la
cathédrale
sculpter
—
vail,
un
lui
109
demandait de construire
Ce
retable pour l'encadrer.
—
chose étrange,
et
tra-
payé à
avait été
son auteur un prix beaucoup plus élevé que sa toile.
La
relation d'une visite
que
cardi-
le
nal de Sandoval, archevêque de Tolède, la
cathédrale en 1601, rapporte que ce retable,
—
disparu au
de
pilastres,
xviil^ siècle,
personnages
Dame donnant Un
de
de bases,
frontons complètement
de
à
fit
la
[
dorés,
—
«
était
orné
chapiteaux et de
dorés et sur
côté,
le
représentant
Notre
chasuble à Saint Ildefonse
».
fragment de cet encadrement vient d'être
fortuitement retrouvé au séminaire de Tolède, c'est le
groupe de La Vierge remettant
suble à Saint Ildefonse^
montrant
la
la
cha-
Mère de
Dieu posée sur des nuages d'où émergent des têtes
de chérubins, accompagnée
anges à demi nus, aux
de
ailes éployées,
quatre
— beaux
LE GRECO
no
jeunes la
la
sveltes et élégants,
— donnant
chasuble au saint évêque agenouillé à ses
pieds.
un
hommes La
figure de la Vierge rappelle jusqu'à
certain point celle de Marie figurant dans partie
céleste
de V Enterrement du comte
d'Orgaz.
Un
autre ouvrage, sans doute, de
nikos Theotokopuli, est
en bois,
la
malheureusement
ment découverte par
le
Dôme-
statuette de Vierge
mutilée,
marquis de
récemla
Vega
Inclan.
Le grand
retable
de
l'hôpital
de
afuera,
peint par le Greco, a probablement été dressé et
également sculpté par
consiste en
dix
statues,
penser à celles de Santo
lui.
Sa décoration
dont neuf qui font
Domingo
Antiguo,
el
ont de grandes chances d'être du maître. Plus
grandes que nature, marbre,
comme on
elles
ne
pourrait
pas
en
croire
de
sont le
LE GRECO
III
prime abord, mais en bois peint à l'imitation
du marbre. Les deux qui figurent dans mier corps représentent Saint Pierre
Paul;
celles
nombre
le
pre-
et Saint
du second corps, également au deux^
de
Mathieu
Saint
et
Saint
Jacques; sur l'entablement au milieu, se trouve
un
Christ
l'épaule
en
croix,
la
tête
retombant
jambes légèrement
droite, les
chies et arquées, avec
La
Vierge tt Saint
sur
inflé-
André
à sa droite. Saint Jean, l'apôtre bien-aimé, et
Saint
Thomas
du grand
à sa gauche. Cette
retable de l'église de afuera est in-
contestablement inférieure à
de Santo
décoration
Domingo
el
celle
de
la
chapelle
Antiguo, de plus de trente
ans plus ancienne, puisque Domenikos tokopuli ne fut occupé à dinal
la
Theo-
fondation du car-
Tavera que vers 1608.
C'est pour les églises des Franciscains et de l'hôpital
de
Illescas,
dont nous avons déjà parlé,
LE GRECO
lia
que
Greco exécuta
le
ses principales
œuvres
sculpturales.
Dans
des Franciscains on
l'église
voir encore, à la fin
du
xviii^
pouvait
siècle, les
mo-
numents funéraires de Gedeon de Hinojosa, ministre du Conseil et de tille
sa
du
et
la
Chambre de Cas-
des Indes, mort en 1595, et celui de
femme, Doha Catalina sanctuaire.
S'il
faut s'en rapporter à
qui les ont admirés, ces sistaient
VelascOy fondateurs
ceux
deux tombeaux con-
en deux édicules en marbre blanc,
ornés de pilastres et de frontispices, dont partie
centrale
était
la
occupée par une table
sur laquelle les défunts étaient agenouillés sur
un coussin dans coins
l'attitude
de
la
prière.
Aux
du sarcophage de Gedeon de Hinojosa
se trouvaient
deux pleureurs.
Hélas! ces tombeaux ont complètement disparu, on n'en connaît pas un seul fragment.
LE GRECO
Dans
l'église
ii3
de l'hôpital de
reste dans le
chœur quatre
deux peintes
et
la
Caridad,
il
en bois,
statues
deux dorées. Les deux
sta-
tues peintes sont celles du vieillard Siméon et
du prophète Foi
Isaïe;
les
deux dorées,
de VEspérance
celles
de
agenouillées,
très
proches parentes des anges soutenant un
mé-
la
daillon
Ces
et
du
retable de Santo
Domingo
el
statues, taillées dans les toutes premières
années du
siècle,
xvii^
mouvementées que Antiguo
quelque peu
même
celles
et n'ont plus rien
un certain point
sont
de Santo Domingo
peintures
époque. Le
le tie
les èr^^^
prophète
vieillard
aujourd'hui au
Isàie^
de TEscurial.
el
de leur allure, jusqu'à
classique.
les
beaucoup plus
Elles
rappellent
du maître de Siméon
fait
néanmoins au Père Éternel tenant son dans
Antiguo.
la
songer
fils
mort
musée du Prado;
au Saint Pierre de
la
sacris-
Malheureusement peintes
et
LE GRECO
114
empoissées de
repeintes,
couleurs,
perdu leur délicatesse primitive
elles
ont
n'offrent
et
plus que des arêtes des plus émoussées.
Les statues du Greco que nous venons de passer en revue, seuls vestiges à peu près au-
thentiques de son
œuvre
sculpturale, témoi-
gnent d'une indéniable noblesse de proportions,
d'un sens affiné des formes élégantes et
goût délicat
sveltes, d'un
et averti
pendant reconnaître que
au
même
Pour
n'y trouve pas,
concentrée qui
fait le
ca-
monuments de Don Gedeon de
les
Hinojosa et de sa
Il
faut ce-
du maître.
ractère
est
il
degré que dans sa peinture, l'émotion
intense^ la passion
il
l'on
;
bien
femme Doha
difficile
de
s'en
semble, cependant, que,
tombeaux de être, jusqu'à
la
même
un certain
Catalina Velasco^ faire
comme
époque,
une
idée.
tant d'autres
ils
ne devaient
point, qu'une glorifi-
LE GRECO
cation à la
mode
ceux dont
ils
Quoique Castilles, ait
le
lui
des
même
classique et assez vague de
renfermaient
Greco, une renié
nous l'avons vu, maîtres
ii5
dépouille.
la
fois
établi
jusqu'à un certain
les
italiens,
indépendance,
si
les
il
côté, plus circonspect, faut en convenir,
ressant.
point,
ne montre pas
la
ouvrages que nous
que sculpteur qu'en tant que
il
les
enseignements reçus par
venons d'énumérer sont bien de
est,
dans
lui,
en tant
peintre.
De
moins primesautier,
ce il
beaucoup moins inté-
SCEAU d'un DOMENIKOS
VI
CONCLUSION.
—
L'INFLUENCE
ET LES ÉLÈVES DU GRECO
Pour nous résumer, disons que
le
Greco
fut
avant tout peintre, que c'est en cette qualité qu'il
mérite une place privilégiée dans
théon des
Comme gloire
et
le
pan-
arts.
peintre,
lui
il
une dernière
reste
non une des moindres,
fluence que son
quez. C'est à
œuvre
lui, ainsi
de Beruete, que
le
c'est
l'in-
a exercée sur Velaz-
que
l'a
écrit
portraitiste
Don
Aur.
ordinaire de
LE GRECO
ii8
IV doit ses
Philippe
dans
la
«
teintes
gris
argenté
coloration des chairs, Temploi de cer-
tains carmins,
une plus grande
liberté d'exé-
cution dans les draperies, étoffes et autres accessoires... coloris,
doit
certaines
une harmonie de tons
guée... » qu'il
lui
il
finesses
de
gris très distin-
que son œuvre ne montra qu'après
eut vu et étudié à Madrid, l'Escurial et
Tolède, des
toiles
de Domenikos Theotoko-
puli.
Au nombre
des productions de Velazquez,
dans lesquelles l'influence du
Greco
plus sensibles et des plus évidentes,
de placer au premier rang
le
il
est des
convient
superbe portrait
d'un Comte de Benavente, au musée du Prado, à l'allure
si
hautaine et
le
Couronnement de
si
proche du
même
si
dédaigneuse
la Vierge^
;
puis
encore au Prado,
sujet par le
Greco de
la
chapelle de San José de Tolède, et de l'exquise
LE GRECO
119
petite toile de la collection de
Don Pablo Bosch.
Jusqu'à ses derniers jours,
le
peintre des
ninas se souvint
du vieux maître
admiration pour
lui
crétois,
fut sans bornes;
Meson
nous en
trouvons un dernier témoignage dans l'inventaire
de son
atelier, dressé
après sa mort, dans
lequel figurent trois portraits
du Greco, deux
d'hommes, un de femme.
Le Greco Il
vieillit
à
Tolède respecté de tous.
profite de la haute situation qu'il a acquise,
non
dans son intérêt personnel,
celui
de
mais dans
conduit dans cette
l'art qu'il dirige et
voie superbe qu'il ne devait plus quitter et qui a
produit
le
plus « peintre
Velazquez. Les intérêts et profession,
Dans
il
les
la
» des
dignité de sa noble
défend en tout
ses désaccords avec
peintres,
le
et
fisc,
pour tout.
n'admettant
pas que les artistes soient soumis à un impôt et
obtenant gain de cause devant
le
Conseil de
LE GRECO
120
Castille
;
dans ses procès
communautés
les chapitres et le
discussions avec
et
paiement de ses ouvrages
moines du couvent lui
pour
ceux de ses
et
rappeler ses démêlés avec les
élèves. Faut-il
Ceux-ci
religieuses
de
la
Sisla
à
Tolède
demandé de peindre une
avaient
Cène pour leur monastère. N'eut-il pas alors loisir
d'exécuter
une autre qu'il la
la
raison,
commande, ou
le
fut-ce pour
peu importe, toujours
est-il
passa à un de ses élèves. Luis Tristan,
tout jeune
encore.
Ce
cette tâche à son grand
dernier s'acquitta
honneur
moment de
réclamait
payer
l'artiste, les
les
de
et à la
com-
quand
arriva
plète satisfaction des religieux. Mais le
?
deux cents ducats que
Pères trouvèrent ses pré-
tentions exagérées, vu son extrême jeunesse, et
demandèrent au Greco
ci
accepta
il
jeté
le rôle d'arbitre;
un coup d'œil sur
d'intervenir. Celui-
mais à peine eutla
composition de
LE GRECO
son élève,
121
bâton levé sur
qu'il se précipita le
Tristan, l'appelant « drôle, vaurien, déshonneur
de
la
peinture ». Les assistants voulurent arrê-
Greco, essayèrent de
ter le
faisant observer
pour
le
que son élève
calmer en
était trop
rendu compte de ce
s'être
mait. « C'est bien ce
que
lui
je
qu'il
jeune récla-
reproche
répliqua-t-il, « son tableau vaut cinq cents
cats et
vous ne
si
qu'il le
reprenne
donnez tout de
les lui
et l'apporte
lui
»,
du-
suite
chez moi. » Là-
dessus, les moines, tout penauds, se hâtèrent de
payer à Luis Tristan stipulés, prix.
ses
deux cents ducats
heureux encore d'en
Reste à savoir
L'activité les
les
si
du Greco ne
l'anecdote est vraie. se ralentit pas avec
années. Toujours occupé, derniers
sculptant,
moments,
écrivant,
car
être quittes à ce
il
travaille jusqu'à
dessinant, modelant, cet
esprit
universel,
qui a plus d'un point de contact avec
Léo-
LE GRECO
122
nard de Vinci, a
manuscrits mal-
laissé divers
heureusement perdus. Malgré
la
haute estime dont
sa nouvelle patrie, le
Greco
il
jouissait
dans
resta toujours
une
sorte d'énigme. Ses élèves qui l'approchèrent
cependant de avait
si
près, ses confrères auxquels
rendu tant de
services,
dont
ils lui
il
étaient
reconnaissants, ne purent jamais s'habituer à sa liberté d'allure et
que
lui
de pensée. Pacheco raconte
demandant un jour ce qui
préférable de
la
lui
semblait
couleur ou du dessin,
— ques-
tion éternellement ressassée et oiseuse
—
le
maître
lui
répondit: «
s'il
en fut,
La couleur natu-
rellement ». Notre pédagogue en fut tout scandalisé
;
mais ce
fut bien
l'ayant questionné sur
osa dire que
si
bon professeur,
Michel-Ange,
l'auteur c'était
n'eût pas su peindre.
autre chose, quand
Ce
du Moïse bien fut le
le
Greco
avait été
dommage
un
qu'il
coup de grâce
LE GRECO
pour Pacheco
;
123
une
aussi celui-ci écrit-il qu' «
opinion aussi monstrueuse ne semblera pourtant point extraordinaire à ceux qui ont
Greco. Là,
le
sans doute
sonne
».
comme
dans sa peinture,
à
leur, à
son
Ses compatriotes castillans ne purent
son goût pour
vie,
les étoffes
amour du chatoiement
ment des broderies
et
si
différent
ondoyantes,
du
d'or et d'argent,
scintille-
—
souvenir atavique de l'ancienne Byzance, la
pompe
vénitienne, dont
jamais complètement. fiter
aura
il
cherché à ne ressembler à per-
non plus s'habituer à son genre de
du
connu
de toutes
les
s'il
à
blâmaient, pour pro-
— bien
la fois,
d'avoir
petite et bien exiguë
faut s'en rapporter à
cisco de Borja de
—
ne se déshabitua
jouissances à
tenu dans sa maison, cependant,
Ils le
il
res-
San Roman,
Don Fran-
— jusqu'à
des
musiciens qui jouaient pendant ses repas. Mais il
ne faut pas oublier que notre
artiste avait
LE GRECO
124
passé les brillantes années de jeunesse, celles qui ne nous échappent jamais de à
Rome,
une époque où
à
étaient poussés à
une
se faire
un
mémoire,
le faste et la
un point dont
idée. Alors
la
il
pompe
est difficile
de
cardinal de San Sisto
dépensait en un jour vingt mille ducats pour une
en l'honneur de
fête
celle-ci faisait
Éternelle,
femmes à
de
n'a
duchesse de Ferrare
son entrée solennelle dans
;
la Ville
accompagnée de deux cents jeunes
et d'autant
cheval
Qui
la
et
de jeunes seigneurs, tous
des plus
lu la
luxueusement
description
de
la
vêtus.
procession
compagnie du Broncone dont Laurent
la
de Médicis
était le capitaine, célébrée à l'occa-
sion de l'élévation de
Léon
X
au pontificat,
avec ses chars sculptés par Bandinelli et peints par
le
nirs cela,
Pontormo ? Encore une
demeurent
à
fois ces
souve-
jamais inoubliables.
Après
comment reprocher au Greco
d'avoir
LE GRECO
dépensé tout ce à sa et
125
qu'il gagnait,
de n'avoir
mort que deux cents tableaux ébauchés
d'innombrables maquettes de sculpture
Domenikos Theotokopuli mourut le
laissé
7
avril
1614,
à
à Tolède,
d'environ
l'âge
?
67 ans.
Quoiqu'il passe pour avoir été inhumé dans
de
l'église
découverts
il
la
irréfutable
chapelle [de Santo
tiguo qui
lui
des
documents,
y a quelques années, prouvent
manière
d'une
dans
San [Bartolomé,
qu'il
fut
Domingo
enterré el
An-
doit sa [décoration.
Finissons par quelques lignes sur les élèves
du Greco formant avec lède, qui eut
une
si
lui
l'école
de
grande influence sur
Tol'art
espagnol en général et sur l'école madrilène
en particulier, par son chef Velazquez. Cette école
se
compose cependant
bien restreint
d'adhérents
:
d'un
nombre
de son fondateur
d'abord, puis de ses disciples directs. Arrêtons-
LE GRECO
126
nous un
peu
longuement,
au
sinon
plus
remarquable d'entre eux, au moins au plus intéressant pour nous, au
Manuel Theotokopuli,
fils
né,
du Grèce, Jorge selon
récents
les
documents découverts par Don Francisco de Borjade San Roman, en 1^78, l'installation à ci
lui
Tolède de
enseigna
la
trois
l'artiste crétois.
comme architecte
que Jorge Manuel Theotokopuli 10 mars
1625,
il
fut
cathédrale.
En
cette qualité,
dresser les plans de
terne de
la
la
se distingua.
nommé
pitre métropolitain sculpteur et la
Celui-
peinture, la sculpture et l'ar-
chitecture; mais c'est surtout
Le
ans après
il
coupole
par
le
cha-
architecte de fut et
chargé de
de
la
lan-
chapelle mozarabe érigée par le
cardinal Cisneros. Quoiqu'ils aient été trouvés
trop
audacieux par
pour des
les
la
commission désignée
examiner, particulièrement par un
membres de
cette sorte de
jury, le
fray
LE GRECO
Alberto de
la
Madré de
127
carme déchaussé
Dios,
fort expert
en
cutables,
chapitre passa outre et Jorge
le
la
matière qui
les jugeait
inexé-
Ma-
nuel Theotokopuli en entreprit l'exécution qu'il
mena
à
bonne
elle consiste
L'œuvre
fin.
fut
achevée en 163
1
;
en une voûte surbaissée sur laquelle,
en qualité de sculpteur, sons de l'Infant
plaça les bla-
l'artiste
Don Fernando, du
tonio Zapata et du chanoine
cardinal
An-
Don Horacio Doria.
Plus tard, Jorge Manuel Theotokopuli donna
de nouveaux projets pour l'achèvement de
la
chapelle de l'Ochava, qu'on ne l'autorisa pas,
après débats, à mettre à exécution.
Comme
peintre,
on ne peut
lui
donner en
toute certitude que deux reproductions vres de son père la
:
la
d'œu-
réduction du Partage de
tunique du Christ et
la
partie
terrestre de
V Enterrement du comte d'Orgaz, toutes deux au
musée du Prado. Sans aucun doute, nombre
LE GRECO
128
du père
de variantes ou de copies de
toiles
sont sorties des mains du
Jorge Manuel
fils.
Theotokopuli mourut à Tolède vers avait alors
5
3
16.31,
il
ans.
Les autres élèves du Greco qui
travaillèrent
plus ou moins dans son atelier, sous ses yeux,
sont
:
Bautista
Mayno, tout jeune encore quand
sont maître disparut, qui se fait
une sorte de
petite dimension;
nitien
fit
spécialité
moine
des
disciples
de
de
portraits
Pedro Orrente, sorte de Vé-
espagnol; Luis Tristan dont
été quelque
et s'était
peu question,
le
il
a
déjà
plus célèbre des
Domenikos Theotokopuli, dont
l'œuvre néanmoins est fort peu définie et encore moins connue, car rien ne prouve que belle Tête
d'homme qui avoisine
les portraits
de son maître au musée du Prado Saint Jérôme pénitent de
la
et le petit
l'Académie de San
Fernando soient non seulement de
lui,
mais
LE GREGO
même
du
129
Au nombre
peintre.
des productions
absolument authentiques de Luis Tristan, convient de
grand retable de il
plaça
des Mages,
ment de
décoration du
la
de Yepes, sur lequel
l'église
Naissance du Christ, V Adoration
la
:
d'abord,
citer,
il
Christ à la colonne,
le
croix,
la
Porte-
le
Résurrection, VAscension, et
plusieurs figures de Saints
;
puis, diverses
com-
positions pour les chapelles des couvents de la
Sisla et des religieuses
lède,
de
la
pour
de
la sacristie
à
la reine,
de Uclés, enfin,
l'église
Trinité,
de
To-
tableau
le
des calices de
la
cathédrale de Séville, imitation servile du Père Eternel tenant son
par
le
fils
mort dans
Greco pour Santo Domingo
Signalons encore, parmi
nikos Theotokopuli fidèle des élèves
s'adonna à
la
:
bras, peint
les
el
les disciples
Antiguo.
de
Antonio Pizarro,
Dome-
le
moins
du maître; Diego de Astor, qui
gravure
si
peu pratiquée dans
les
i3o
LE GRECO
.
Castilles.
Le Greco, auquel aucune branche de
l'art n'était
indifférente et inconnue, enseigna
dernière à celui-ci, qui reproduisit sur
cette
cuivre^ d'après
une composition de son maître
sous ses yeux^ un Saint François d'Assise à
et
genoux, une tête de mort dans
les
mains. Cette
estampe^ des plus rares, signée et datée suit
est
:
«
D. D. Astor. sculp. Toleti.
comme 1606
>,
d'une vérité surprenante, d'une puissance
faite
pour étonner. Nous en avons
d'ailleurs
pour garant Cean Bermudez qui a pu comparer la gravure
appartenant à la
au tableau,
Don
—
de son temps
Nicolas de Vargas,
—
et qui
loue grandement de son exactitude et
de
sa correction.
Après
les élèves directs
du Greco, viennent
ceux de Luis Tristan, au nombre desquels
il
convient de compter Juan de Toledo et Diego
de Rodriguez.
LE GRECO
L'école l'école
tolédane
madrilène
qu'une avec Velazquez, espagnoles,
se et
elle.
comme,
confond
ensuite avec
ne
bientôt
fait
L'école
tolédane,
plus
jusqu'à
d'ailleurs, toutes les écoles
ont
qui
i3i
fleuri,
pour
ainsi
dire
exclusivement, à l'ombre des autels, est essentiellement la
Elle
religieuse.
délicatesse
et
la
se
finesse
distingue
de
par
son coloris
qui rappellent souvent ceux du Titien et du
Tintoret;par son dessin toujours correct, souvent sévère et sa
même
composition expressive, pondérée
de charme. Elle se son
noble et grandiose; par
attrait
prisée,
de
comme
la
fait
et pleine
encore remarquer par
nature
extérieure,
l'on sait, à ces
si
époques.
peu
AOMNiicp 0CO£fcon/Cû '
K(/
èïïOlH
AOh^NiKO en
SIGNATURES DU GRECO
n.
II
Phot. Durand,
L'ASSOMPTION Ar
IntilitHte,
Chicago.
Uiu'l.
;z:
-s
PI.
IV
Pliot.
Driiet, Paris
LE PARTAGE DE LA TUNIQUE DU CHRIST Cathédrale de Tolède.
P^-
^
Pbot. Aiidoisoii
MARTYRE DE SAINT MAURICE ET DE Salle capitulaire
SES COxAIPAGNONS
du monastère de l'EscuriaL
L'ENTERIÎEMENT DU COMTE D'ORGAZ Eglise Suiih Tome, Tolède.
"""' ^"""'""'
PI.
VII
LA VIERGE AVEC SAINTE INÈS ET SAINTE THÈCLE Anciennement, chapelle San José, Tolède.
?
SAINT MARTIN PARTAGEANT SON MANTEAU AXEC TX P^C^^E Anaennemenl,
chapelle
San
José,
Tolède.
1 ^4..
%
PI.
IX
LE CHRIST EN CROIX Musée du Prado, Madrid.
PI.
\
LA SAINTE FAMILLE Anciennement,
collection R. de
Madrazo, Paris.
t^-
PI.
M SAINT LOUIS ROI DE F HANCE Musée du Louvre, Paris.
?
\
PI.
XIJ.
Phot. Braun.
LES FIANÃ&#x2021;AILLES DE LA VIERGE Galerie Roi/nle de
Roumanie.
1>1.
Xlll
SAINT FRANÇOIS D'ASSISE EX PRIERES Musée de Pau,
I.
PI.
XIV
SAINT FRANÃ&#x2021;OIS D'ASSISE CoUeclion hjn. Zuloaga, Paris
l'iiot.
Dru.t,
PI.
x\
Pliot.
Brauu.
L'ADOKxVnON DES BERGER8 Galerie Royale de
Roumanie
PI.
XVI
SAINT FRANÇOIS D'ASSISE EN PRIÈRES Collection Ch. Cherfils, Paris,
PI.
XVII
Piiot.
VUE de;^tolède Anciennement
collection Onale,
Madrid.
Duiaïul, Ruel.
^'•...vj<j. liage
iledCaaipo el laifamo^o (ÎI05
PI.
XVIII
'"" LE CAPITAINE .ULIAN «OMERO DE LAS HAzIxlsT"^'""' Collection
Luis de Errazu, Pans.
PI.
XIX
l'iiol
L'HOMiME A L'ÉPÉE Abusée du Paido,
Madrid.
AiulfiSon
PI.
XX LE CARDINAL TAVERA Hôpital de Afiieni,
Tolède.
"LLl. ('Otlccliiin
II
'tliNANnoMNoDEOUEVARA f)
yy '"•'""•.'/'T.
.V,-u-- >o,/v.
LE GRAND INQUlSlTEUii FEI^Vvvnn v.v'"'
'""'"'
^•"'•
PI.
XXII
LE FIIAY IIORTENSIO FÉLIX l'ARA\ ICLM) Musée
des Beaux-Arts,
Bosloa.
<*
\
PI.
XXIII
PETIT PORTRAIT Collection
DU FRAY Casa
Tarres,
H. F. Madrid.
PARAVIGIXO
PI.
XXIV
Plid!
UN DOMINICAIN Colleclion
Pablo Bosch,
Madrid.
.
-Morono.
PI.
XXV
DIEGO DE COVARRUBIAS Musée du
Greco,
Tolède.
Pliot. .Moreuu.
i
PI.
XXVI
Pllot.
ANTONIO DE COVARRUBIAS iMusée du Greco,
Tolède.
Moi CHU.
X
PI.
XXYIII
LA PRINCESSE D'EBOLI Anciennement coUeclion
L.,
?
Madrid.
PL XXIX
PORTRAIT D'HOMME Collection
P.
La fond,
Pau.
PI
XXX
UN APOTRE Collection H. Rouart, Paris.
^
PL
XXXI
UN APOTRE Collection
\V.
Van Home, MontrĂŠal -Canada.
PI.
XXXII
UN ÉVANGÉUSTE An ciennement
collection AT^over.
'^''''' ''"''"'''
Madrid.
''''"-'
i
PI.
XXXIII
SAINT PIERRE ET SAINT
PWL
PI.
XXXIV
LA VIERGE Statue bois. Tolède.
CATALOGUE ABRÉGÉ DES ŒUVRES PRINCIPALES DU GRECO
Compositions, tableaux religieux. Jeune Garçon allumant une chandelle (Musée de Naples)
La Guérison de l'Aveugle (Musée de Parme) Variantes: Pinacothèque de Dresde; X, Burgos
coll.
;
;
J.-E.
Madrid;
Valle,
;
L'Adoration des Mages (Galerie Impériale, Vienne)
;
Le Martyre de Saint Marc à Venise (Musée de Bruxelles); Les Marchands chassés du Temple (Coll. Yarborough, Londres)
;
Variantes ou réductions : National Gallery, Londres; coll. F. Cook, Richmond, Angleterre; R. Diaz, Jerez; Alonzo, San Sébastian; coll. X, États-Unis (anciennement coll. Beruete, Madrid).
L'Assomption (Art
Institute, Chicago);
Le Père Éternel tenant son Sto
Domingo
el
fils
mort sur
Antiguo, Tolède)
L'Adoration des Bergers (Église Sto Tolède)
;
les
genoux
(Église
;
Domingo
el
Antiguo,
C
CATALOGUE ABRÉGÉ
II
La Résurrection du Christ (Église Sto Domingo elAntiguo, Tolède);
Domingo el Antiguo, Tolède) Jean TÉvangéliste (Église Sto Domingo el Antiguo,
Saint Jean-Baptiste (Église Sto
Saint
Tolède)
;
;
Tête de Christ (Église Sto Domingo
Le Partage de
la
el
Antiguo, Tolède);
tunique du Christ (Sacristie de
drale de Tolède)
la cathé-
;
Variantes ou réductions : Musée du Prado (signée Jorge Manuel Theotokopuli); coll. J.-B. Buck, Jerez Villatoya, Madrid; del Drago, ;
Rome; Musée
de Lyon
;
coll. Detti,
Duret, D. Cochin, Paris
;
Saint Sébastien (Sacristie de
la
cathédrale de Palencia);
Le Martyre de Saint Maurice
et
de ses compagnons (Salles
capitulaires, couvent de l'Escurial); Variantes
et
réductions
Madrid
Salvatierra,
Roumanie
;
anc. coll.
II
(Salles capitulaires,
couvent de
;
Variante-réduction
Saint
Galerie royale de
;
Le Songe de Philippe l'Escurial)
:
Eugène
:
coll.
(Sacristie
de
Archibald Stirling, Keir, Ecosse l'église
de l'Escurial)
;
;
Saint Pierre (Sacristie de l'église de l'Escurial);
L'Enterrement du comte d'Orgaz (Église Sto Tome, Tolède) Musée du Prado, Madrid Jorge Manuel Theotokopuli);
Variante-réduction attribuée à
Saint Joseph
:
et l'enfant
Le Couronnement de Variante-réduction
la :
;
(la partie inférieure,
Jésus (Chapelle San José, Tolède);
Vierge (Chapelle San José, Tolède)
coll. P.
Bosch, Madrid;
;
m
DES ŒUVRES PRINCIPALES DU GRECO
Martin donnant
Saint
la
moitié de son manteau à un
pauvre (Ane. chapelle San José, Tolède); Variantes
Manzi, Paris
La
réductions
et
:
de
Galerie royale
Roumanie
;
coll.
;
Vierge, Sainte Inès et Sainte Thècle (Ane. ehapelle San
José, Tolède)
;
Saint Ildefonse écrivant sous
de
la
Caridad, Illescas)
Variante-réduction
:
La Charité (Église de Le Couronnement de
la dietée
de
la
Vierge (Église
;
coll.
E. Degas, Paris;
la
Caridad, Illescas)
la
Vierge (Église de
;
la
Caridad,
Illes-
cas);
L'Annonciation (Église de
la
Caridad, Illescas)
La
Nativité (Église de la Caridad, Illescas)
Un
ange apparaissant à
la
;
;
Madeleine (Église de Bayona);
Jésus enseignant la Madeleine (Église de Bayona)
;
Le Christ apparaissant à la Madeleine (Église de Bayona); L'Assomption de la Madeleine (Église de Bayona); La Sainte Face (Église de Bayona); Le Repas chez Simon (Coll. Edgar Vincent, Londres); Variante
:
coll.
du prince de Wagram, Paris
;
Le Baptême du Christ (Musée du Prado, Madrid) La Résurrection du Christ (Musée du Prado, Madrid); ;
Variante
:
coll.
San Luis, Madrid
^ ;
La Pentecôte (Musée du Prado, Madrid); La Sainte Famille (Musée du Prado, Madrid) La Sainte Famille (Coll. O'Rosen, Paris) ;
;
CATALOGUE ABRÉGÉ
IV
La Sainte Famille (Galerie royale de Roumanie); La Sainte Famille (Ane. coll. R. de Madrazo, Paris) La Sainte Famille (Petit hôpital de Sta Ana, Tolède); Le Christ en croix (Musée du Louvre, Paris) Le Christ en croix (Musée du Prado, Madrid); Le Christ en croix (Musée du Greco, Tolède) ;
;
;
Variantes et réductions
:
Église San Nicolas, coll. P. Caballero,
Tolède; Suarez, Madrid; R. Diaz, Jerez; Zuloaga, Paris;
Le Christ portant sa croix (Ane. Variantes: Musée du Prado, L. Quer, Barcelone
manie
coll.
église d'Olot,
;
coll. J.
A. de Beruete, Madrid) Mengs, Madrid; anc.
Caialogne
;
Galerie royale de
;
coll.
Rou-
;
L'Adoration des Bergers (Musée Métropolitain, New- York) L'Adoration des Bergers (Galerie royale de Roumanie)
Les Fiançailles de
L'Assomption
la
L'Assomption (Anc.
;
Vierge (Galerie royale de Roumanie)
(Église
;
;
San Vicente, Tolède);
coll.
Navas, Madrid)
;
Le Baptême du Christ (Hôpital de afuera, Tolède); La Sainte Famille (Hôpital de afuera, Tolède); Les Larmes de Saint Pierre (Hôpital de afuera, Tolède) Variantes:
coll.
Casa-Torres,
Inclan, cathédrale, Tolède; coll.
Ferrat; D. Cabot,
F. Sanghen, Madrid; La Vega Alamada, Vitoria; Rusifiol, Cau-
Musée des Beaux-Arts, Barcelone;
Dernière entrevue de Jésus
Roumanie)
;
et
de Marie (Galerie royale de
;
Variante: anc. couvent San Pablo, Tolède;
L'Annonciation (Musée du Prado, Madrid)
;
L'Annonciation (Musée Balaguer, Barcelone)
;
DES ŒUVRES PRINCIPALES DU GRECO
v
L'Annonciation (Église San Nicolas, Tolède); Variantes:
coll.
Baron, Zuloaga, Durand-Ruel, Paris;
Saint Jean l'Évangéliste et Saint François d'Assise (Musée
du Prado, Madrid); Variante
coll.
:
du duc d'Alcudia, Boadilla
Monte
del
;
Saint Jean-Baptiste et Saint Jean l'Évangéliste (Église San Juan-Bautista, Tolède)
;
Le Christ au jardin des Oliviers (Église de las Salesas Nuevas, Madrid); Variantes
Chapelle du palais ducal de Medinaceli
:
Le Christ mort dans ramy, Paris
les
;
musée de
Lille
;
bras de sa mère (Ane. coll. Che-
;
Variante
:
coll. Trotti,
Paris;
Saint Be/rnardin (Musée du Greco, Tolède)
;
L'Amour divin (Coll. Roda, Madrid); L'Amour profane (Coll. Zuloaga, Paris)
;
La Mort de Laocoon
coll.
et
de ses
fils
(Ane.
Montpensier,
Séville);
Le Martyre de Saint Sébastien (Galerie royale de manie)
;
Variante
:
antérieurement dans une
coll.
La Vierge (Musée du Prado, Madrid) Variante: Musée de Strasbourg
La Sainte-Face Variantes
Ayres
;
Rou-
:
;
;
;
(Église de Mostoles) coll.
madrilène
;
Durand-Ruel, Paris
;
Manuel Casado, Buenos-
CATALOGUE ABRÉGÉ
VI
Saint Benoît (Musée du Prado, Madrid)
;
Saint Antoine de Padoue (Musée du Prado, Madrid); Saint Paul (Musée du Prado, Madrid);
La Madeleine pénitente (Collège Variantes
Torre Arias, C. Ferrer, Madrid
coll.
:
anglais, Valladolid) ;
;
Rusinol, Cau-
Ferrat; E. Fischoff, Paris;
Saint Pierre Variante:
et
Saint Paul (Coll. Perinat, Madrid);
coll. J.
Saint Jérôme dans
Antiga, Barcelone; le
désert (Coll. Montejo, Madrid)
Saint Jérôme pénitent (Coll. Silvela) Variante
R. Ehrich,
coll. L.
:
;
;
New-York
;
Saint Louis roi de France? (Musée du Louvre, Paris)
;
Apostolado, suite de treize tableaux représentant à mi-corps Christ bénissant et les douze apôtres (Sacristie de la
le
cathédrale de Tolède)
;
Musée du Greco, Tolède; coll. A. Hencke, Séville Sarri-Valdés Oviedo; nombre de figurations d'apôtres faisant ou ayant fait partie des collections; C. Cabanas, Castro-Serna, Ibarra, Carmen Variantes
:
;
Mendieta, R. Garcia, Madrid
;
R. Puget, Junyent, Barcelone
;
Aguirre,
Jado, Bilbao; F. Vano, Valence; Durand-Ruel, H. Rouart, Paris;
W.
van Horne, Montréal,
etc.,
Saint François d'Assise avec
sont des fragments d'Apostolados.
un
legio de las Doncellas, Tolède)
Variantes: Musée du Prado, drid
;
;
;
Castro-Serna, Alej. Pidal,
Logrono cathédrale de Tolède coll. Scouloudy, Athènes, etc.
Instituto tecnico,
patriarca, Valence
coll.
religieux de son ordre (Co-
;
;
Ma-
colegio del
;
Saint François d'Assise en prières (Salles capitulaires, cou-
vent de TEscurial)
—
douteux.
DES ŒUVRES PRINCIPALES DU GRECO
vu
Variantes soit en pied, soit à mi-corps : coll. S. Moret, E. Ordoflez, marquis de Pidal, Carmen Mendieta, Castro-Serna, A. Rosillo, chapelle San José, Silvela, P. de Quinto, Traumann, Madrid église des religieuses capucines, hôpital de afuera, Tolède; coll. Jado, Bilbao musées de Pau, de Lille coll. Cherfils, Raoul, Zuloaga, ;
;
;
Durand-Ruel, Paris,
etc.
Saint François d'Assise recevant les stigmates (Coll. Cerralbo, Madrid); Variantes: Église de l'hôpital des femmes, Cadiz;
Saint François d'Assise surpris par
un orage
(Coll.
Zuloaga,
Paris);
Saint François d'Assise les mains croisées sur la poitrine (Coll.
Saint
Lazaro, Madrid);
Dominique de Guzman
Tolède)
(Sacristie
de
la
cathédrale de
;
Variantes
et
Sanz Bremon, Valence; Pedro R. Ehrich, New- York;
réductions
E.Degas, Paris; L.
:
coll.
Gil,
Dominique de Guzman (Église San Nicolas, Tolède); Saint Bernard (Ane. coll. Cheramy, Paris); Saint
Saint Ignace de Loyola (Ane. coll. P. Bosch, Madrid);
Groupe d'anges
(Coll.
La Vega Inclan, Tolède);
Paysages. Vue de Tolède (Ane. coll. Onate, Madrid) Vue de Tolède (Musée du Greco, Tolède);
;
Portraits. Portrait de Giulio Clovio (Musée de Naples) /
Portrait de Julian
Romero
;
(Coll. Errazu, Paris);
CATALOGUE ABREGE
VIII
du conseiller d'État Yguera
Portrait
Montréal)
W.
(Coll.
van Horne,
;
Vazquez (Musée du Prado, Madrid); Portrait d'un médecin (Musée du Prado, Madrid) Portrait de Rodrigo
;
Thomme
Portrait de
à Tépée
(Musée du Prado, Madrid);
Le musée du Prado renferme cinq autres portraits d'homme; de le n» 238, existe une variante dans la collection P. La-
celui portant
fond, à Pau
;
Portrait de Fray Juan de Avila (Musée
du Greco, Tolède) Portrait de Diego de Covarrubias (Musée du Greco, Tolède); Variante
:
même musée
;
;
Portrait de Diego de Covarrubias? (Galerie royale de
manie)
;
Portrait d'Antonio de Covarrubias (Musée lède)
Rou-
du Greco, To-
;
Variante
Portrait
:
Variantes:
coll.
Castro-Serna, del Arco, Madrid
Phitsbourg, États-Unis
du cardinal Quiroga,
ruete, Madrid)
Ecosse)
musée de Bayonne
;
;
profil (Ane. coll. A.
de Be-
femme
(Coll.
Archibald Stirling, Keir,
(Coll.
Archibald Stirling, Keir,
;
Portrait de
Ecosse)
;
;
;
Portrait de jeune
Portrait
;
du cardinal Quiroga (National Gallery, Londres)
coll. Frick,
Portrait
même musée
Pompeo Leoni
;
du cardinal Fernando
vemeyer, New- York)
Nifio de
Guevara
(Coll.
;
Variante: seulement en buste; anc.
coll.
R. Kahn, Paris
;
Ha-
DES ŒUVRES PRINCIPALES DU GRECO
Portrait
ix
du Fray Hortensio Félix Paravicino (Musée de
Boston)
;
Variante
:
seulement en buste; anc.
coll.
Casa Torres, Madrid;
Portrait d'un religieux trinitaire (Coll. Torrecilla, Madrid); Portrait d'un religieux dominicain (Coll. P. Bosch,
Ma-
drid);
Portrait de Garcia Ibanez de
Mugica Bracamante (Cathé-
drale d'Avila); Portrait d'un duc de Benavente (Musée de Bayonne); Portrait
d'homme
Portrait
du cardinal Tavera (Hôpital de afuera^ Tolède) de jeune fîUe. La fille du Greco (Coll. Stirling
Portrait
(Coll. Stirling
Maxwell, Londres); ;
Maxwell, Londres)
;
Portrait de la princesse d'Eboli ? exposé à PArt Gallery à
Londres, en 1901. Portrait de jeune peintre (Musée de Séville) Portrait
du Greco
? (Coll.
du Greco? (Coll. La famille du Greco ?
Portrait
L'homme fils,
est
de feu,
A. de Beruete, Madrid) P. Lafond, Pau)
femme
la
;
;
;
d'étoupe, etc. (Coll. Cher-
Paris);
Variantes:
Portrait
du
coll.
D*"
Navas, Madrid
Pisa,
Pour
le
S. L.
Bensusan, Londres
proportions très
Vega ïnclan, Tolède) Vienne
;
réduites (Coll.
Pétersbourg,
la
;
d'homme inconnu de la galerie impériale de du poète couronné du musée de l'Ermitage de Saint-
portrait
et celui
;
ils
semblent, à
tort, être attribués
au Greco.
CATALOGUE ABRÉGÉ
Architecture. Retables des églises du couvent de Sto tiguo, de l'hôpital de afuera^ Tolède
;
Domingo
el
An-
de l'hôpital de
la
du couvent des Augustins, Madrid. Palacio du Cigarral de Buena Vista, Tolède ? Caridad, Illescas
;
Sculpture. Statues
du grand
retable
de
l'église
Domingo el Antiguo, Tolède ? La Vierge remettant la chasuble relief,
du couvent de Sto
à Saint Ildefonse, bas-
— fragment du cadre du Partage de la tunique du
Christ de
la
cathédrale de Tolède. Séminaire de Tolède
Statuette de la Vierge, Tolède
;
;
Statues du grand retable de l'église de l'hôpital de afuera,
Tolède. Statues de l'ancien grand retable
chœur
— de
l'église
—
de l'hôpital de
aujourd'hui dans
la Caridad, Illescas.
le
.
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BIBLIOGRAPHIE
xiii
ViARDOT (Louis), Les MusĂŠes d'Espagne Paris, Hachette. ViLLAAMiL (D. G. Cruzada), Ca/a/og^o/?ro2//5/ona/ del Museo NaciO" nal de Pinturas {ministerio de Fomenfo). Madrid, M. Galiano, i865. ViNiEGRA (Salvador), Catalogo ilustrado de la exposicion de las obras de Domenico Theotocopuli, llamado El Greco. Madrid, Lacoste, 1902. .
TABLE DES PLANCHES
I.
II.
(Frontispice). Portrait
du Greco.
L'Assomption.
III.
Les Marchands ciiassés du Temple.
IV.
Le Partage de
la
Tunique du
Christ.
V. Martyre de saint Maurice et de ses compagnons. VI. L'Enterrement VII.
La Vierge avec
du Comte d'Orgaz. sainte Inès et sainte Thècle.
VIII. Saint Martin partageant
son manteau avec un pauvre.
IX. Le Christ en Croix.
X. La Sainte Famille. XI. Saint Louis, roi de France. XII. Les Fiançailles de la Vierge. XIII. Saint François d'Assise en prières.
XIV. Saint François d'Assise.
XV. L'Adoration des
bergers.
XVI. Saint François d'Assise en
prières.
XVII. Vue de Tolède. XVIII. Le Capitaine Julian
XIX. L'Homme
à l'Epée.
Romero de
las
Hazanas.
TABLE DES PLANCHES
XVI
XX. Le
Cardinal Tavera.
XXI. Le Grand Inquisiteur Fernando Nifio de Guevara. XXII. Le Fray Hortensio Félix Paravicino. XXIII. Petit Portrait du Fray H. F. Paravicino.
XXIV. Un Dominicain.
XXV. Diego de Covarrubias. XXVI. Antonio de Covarrubias. XXVII. L'Homme
est
de Feu,
la
Femme
d'Etoupe.
XXVIII. La Princesse d'Eboli.
XXIX.
Portrait
XXX. Un XXXI. Un XXXII. Un
d'Homme.
Apôtre. Apôtre. Évangéliste.
XXXIII. Saint Pierre
XXXIV. La
et saint
Paul.
Vierge.
Sceau d'un Domenikos
56
Autre sceau d'un Domenikos
ii6
Signatures du Greco
3214.
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