Richard Wagner sa vie et ses oeuvres, 1886

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i,^^'-

RICHARD WAGNER SA VIE ET SES OEUVRES


IL

A

ETE TIRE

3o EXEMPLAIRES

DE

CET OUVRAGE

NUMEROTES

A

LA

SUR PAPIER JAPON IMPERIAL

PRESSE



'KTlrtV-ï


S

ADOLPHE JULLIEN

RICHARD WAGNER SA VIE ET SES OEUVRES OUVRAGE ORXÉ 1)K

(H AT OR/ K I.Il'HOC.R \PH

PAR

M.

I

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H

I

(1

1

NA

I,

KS

FANTIN-IjATOUR DE

Quinze

Portraits de Richard DE

ET DE

Q UA

Wagner

TRE EA UX -FORTE

GRAVURES, SCÈNES D O P É R A S CARICATURES 12 VUES DE THÉÂTRES, AUTOGRAPHES, ETC. '

,

LIBRAIRIE DE L'ART PARIS

LONDRES

I

JULES RoiAM, Knnj-:ini

(;n.Bi:Ri'

29,CITEDANTIN,20

j

1886 Droits de traduction

et

de reproduction réservés

175,

woon STRAND,

I

75

>!i

c:


tM


A

MON AMI

FANTIN-LATOUR



AVANT-PROPOS ûiLA tantôt quatre ans que Richard

Wagner tomba.

coniDie foudroyé.

Sa mort remonte-t-el/e

pour qu'on puisse

se mettre

de juger a-t-elle

l'homme en

impartialité?

toute

d'écrivains

de

s'occuper

la

acharnés détracteurs lui

ne devoir venir qu'après la leur? Apparemment, plus

L'heure

sonné d'accorder a ce grand génie

enfin

avaient promise pour après sa nu)rt

sans

loin

au point convenable afin

pleine justice que ses plus

auditeurs français,

asse^i

qui semble

car la

masse des

mesquines

ces

embourbés dans leur prose ou de

et

ces

petits

rancunes

intérêts

de

commerce, a fait franchement réparation à Richard Wagner des injures qu'on avait déversées sur lui de son vivant,

dans son

entier, s'est

et le

public français, pris

montré beaucoup plus généreux, plus

juste à son

égard que certains individus jaloux, fanatiques ou rancuniers. On peut dire aujourd'hui que soleil

il

:

n'y

Wagner, même en France, a conquis

compte presque plus que des admirateurs.

c'était se singulariser

que de

sur soi l'attention que de Cette

réhabilitation

qu'après que

mais,

la

sa place au

le

ne

le

défendre

;

à présent,

signes certains, que

le

vouloir attirer

décrier. s'est

produite

indiscutable

mort du maître eut calmé

déjà depuis un

c'est

Autrefois,

certain

temps,

il

toutes

était

les

aisé de

vent de la fortune allait tourner,

et

frappante

susceptibilités

prévoir, et les

;

à des

nombreux

écrivains qui s'ingénient à se mettre toujours d'accord avec les préfé-

rences

momentanées du public avaient pu

conversion afin

d'arriver à

louer le plus

ménager savamment leur superbement du monde un


AVANT-PROPOS

vm un

hoinaïc,

auquel

artiste,

Le

souffrances les plus cruelles. calculs;

yeux,

alors,

Il les nie,

même

peu qu'on

s'inquiète

et

avec

et

affaire, à leui'S

injligé les

jugements d'hier à

ses

lui jette

tombaient des

lui

face.

la

de la meilleure foi du monde. Il n'en va pas de

yeux du moins, que de

d'essayer de donner

sur

écailles

si les

gens qui tiennent une plume,

les

années,

public, en niasse, n'a pas de ces petits

change en un jour, comme

il

depuis des

avaient,

ils

le

ce n'est pas une

et

mince

avec eux-mêmes

s'accorder

change à leurs lecteurs ébahis sur

et

la fermeté,

bien fondé de leurs jugements.

le

Cet clan du public vers un génie trop longtemps méconnu a néces-

provoqué une

sairement articles

sur

et

brochures, toutes plus

louangeuses

A

compte de Richard Wagner.

le

l'exagération de l'éloge,

instants,

place, en plus d'un

de publications

abondante éclosion

d'articles ou d'études critiques,

unes que

livres,

les autres,

du blâme a succédé, par

l'aveuglement de la haine a fait

du

l'aveuglement

à

cas,

et

l'excès

les

:

fétichisme.

historiques, anecdotiques,

Quel déluge apologétiques,

ditliyrambiques sur Richard Wagner, depuis l'époque de la représentation

de Tannhœuser à Paris! Et cependant,

ments circonstanciés

homme

de génie,

et

qu'on

l'on

si

se

restreint

chronique courante?

la

au.x

sur un

de demander à tout ouvrage

qu'on serait en droit

un peu sérieux, en dehors de part,

désireux de posséder

toujours

est

trouver les renseigne-

oit

écrits publiés

A

peu près nulle

en langue française, car

l'étude si intéressante de Gasperini, outre qu'elle s'arrête après Tristan et Iseult,

est très

sobre

Et depuis

toriques.

entretenir

de

lors,

et

Richard

!

.se

nous

Aujourd'hui, si l'on

Que non pas

inintelligibles et l'on

fait

de renseignements

ont

resseri'i

tient

!

pour

on

la

croit les

mode

homme

plume à

file

les

est

à la philosophie

commente

faits

afin de les rendre

satisfait.

expéditif de laisser

l'aventure et d'enfiler des mots à perte de vue sur

un

ou sur une œuvre sans avoir entendu f œuvre ni étudié l'homme,

que de rechercher

pagné

à la

que ses ouvrages sont

C'est qu'il est singulièrement plus facile et plus

courir sa

his-

rhétorique, assaisonnés d'un grain de poésie,

n'entend rien à ^]\^gner

être exécutés.

qui

^]'agner,

d'un soupçon d'esthétique

pour

peu sûre en

combien d'écrivains français ont prétendu nous

mêmes développements de et l'on

très

la

les

circonstances de la vie d'un artiste qui ont accom-

production de ses ouvrages, que de contrôler en quelque sorte


par sa

SCS œiirrcs et

d'éloge, eu

et

ix

tendre

au juste point de critique

vie et de toujours

fuyant également l'hyperbole louangeuse, dittyrambique, amer,

blànie

le

AVANT-l'ROPOS

injurieux.

Des analyses de pièces sur

mon

lyrique, on en rencontre autant et plus qu'on n'en désire, à 7uais et

il

serait injininwnt nu)ins aisé de trouver

l'on

en

le

put suivre à

la fois la

pi-enant à sa naissance

Non

seulement

langue, mais,

aux

satisfit

même

pour

n'existe

il

J'ie

de l'homme

En

fiance.

un ouvrage où l'existence

et la

les

et

mis

en

et

y

puisse être utilisé de con-

et

rédigés dans un style

devine à chaque page

quelque et

sorte

à

la

devait juger

qu'il

de

dévotion

aussi;

appréciations perdent toute portée, mais

simples sont présentés de qu'on

ne

les

telle

façon qu'on

accepte qu'après vérification

de parti,

se méfie,

au contraire,

lui nuisent

par l'exagération de

Le mieux, avec un de juger ses actes

et

dithyrambe,

tel

ses

et le

et

ouvrages, à ce qu'il

tels :

ils

ne

le

font pas

rendent quelque peu déplai-

uniment sa

le

était

s'il

vie,

mort

de ne pas l'écraser sous des éloges

rendre

livre de

plus

chaque page,

œui'res aussi simplement que

hyperboliques qui risquent de c'est

de

A

génie, est de raconter tout

et

;

non seulement

l'éloge et l'abus des coups d'encensoir.

depuis cinquante ou soixante ans,

sensés

et

et

allait

instinctivement,

minutieuse.

sont sans utilité pour la gloire du maitre

le

il

les faits matériel.^ les

semble,

ils

Tel auteur,

dont

dès lors,

le livre

sant

l'influence directe

et

l'artiste

on sent

connaître,

notre

en prenant la plume, a dépouillé sa personnalité propre

raconter la vie ses

en

d'impartialité nécessaires pour

contrôle permanent du maître ou de ses représentants.

s'est

l'artiste,

ouvrages allemands conformes à ce plan général

à ce point laudatif qu'on

tel autre,

;

à l'étranger, on n'en saurait découvrir un seul qui

sont conçus dans un esprit tellement admiratif

ou

carrière de

ouvrage de ce genre

aucun

conditions d'indépendance

effet,

;

conduire jusqu'à sa mort.

le

qu'un pareil travail offre quelque intérêt

le

sens

(vuvres du hardi novateur fussent racontées, étudiées avec suite

les

oit

et

nu)de

le

ridicule

au.x

yeux

des gens

en un mot d'écrire à son sujet un livre d'histoire, non un

combat ou de

parti.

Wagner, au degré de gloire

monté, n'a plus besoin qu'on rompe des lances pour lui ;

achever sa victoire par

Donc, point de

lii're

la toute-puissance

de son génie

et

il

oit

il

est

saura bien

de ses œuvres.

de combat. Point de livre de parti,

non plus

;

car ce serait montrer un esprit singulièrement étroit que de rallumer


AVANT-PROPOS

s

de vieilles querelles éteintes, en rééditant, pour

le

plaisir de taquiner

gens, toutes les pauvres raisons imaginées naguère

les

par des opposants

de parti pris. Et puis à quoi cela conclurait-il? serait plus facile, assurément, que d'être désagréable à

Rien ne nie

tant d'écrivains qui et

menèrent l'attaque autre/ois contre Richard Wagner,

muni pour

je serais amplement

cette petite guerre.

à présent de voir des personnes recueillir dévotement

récente

ne

et

développé que

s'est

depuis

la

de dix, quinze ou vingt ans singulière bien,

et

Wagner chaque

ce qui

tout

l'on recule

si

sommes

ne

et l'un

je crois

pis,

aidant l'autre,

s'imprimait sur Richard

qu'une œuvre de lui passionnait l'opinion ou qu'il

fois

surgissait dans le

Nous

!

ne trouvera

l'on

en ce temps, aurait paru

de longue date,

imaginé de réunir à peu près

numdc musical une

querelle à son sujet.

agissions en simples collectionneurs

besogne fastidieuse,

cette

l'idée,

recherche sans intérêt

la

et

plus forte raison

combien

:

plus de deux qui ayons,

Nous

A

de mode

est

mort de Wagner. Qu'on

remonte seulement de quelques années en arrière,

pas trace de collection de ce genre.

qui

articles

les

admirent; mais ce goût

se publient sur le maître qu'elles

pas rare

Il n'est

et

quand nous entreprenions

nous ne soupçonnions pas quelle

utilité,

quel prix, une telle réunion d'articles acquerrait par la suite. Aujourd'hui,

qu'il s'agisse

rition

des

sement

de la représentation de Rienzi à Paris, de l'appa-

Nibelungcn à Bayreuth, sur lesquels nous avons précieu-

colligé

moindres bribes des journaux français

les

d'articles importants de tous les qu'il soit question

M.

Pasdeloup

y fit

tout

Lohengrin à

sous la

main,

l'

dernièrement par l'annonce de

Opéra-Comique

non seulement tous

de profession,

saillies

du Nouveau- Monde ;

exécuter la marche funèbre de Siegfried, ou bien

tation de

minces

et

du tumulte soulevé aux Concerts populaires lorsque

du confit provoqué

critiques

pays d'Europe

et quantité

les

mais encore

échappées à

la

— on trouve,

,

les

la

représen-

immédiatement

articles -petits

et

grands

moindres facéties,

les

là,

des

plus

plume de chroniqueurs en gaieté qui ne

s'en souviennent déjà plus et qui ne riraient guère, aujourd'hui, si l'on

s'amusait à

les leur

rappeler.

Quel riche arsenal avec

leurs

propres

contre Richard

oii

puiser

s'il

eût été dans

mon

pi'ojet

de blesser

armes ceux-là mêmes qui s'acharnèrent

Wagner! Mais

le

je répugnais absolument à donner à

plus

mon


AVANT-PROPOS livre lin caractère de représailles.

Richard

tialité stricte entre

anciens détracteurs,

ses

et

mains pour divertir

les

c'eut été leur

dépens de ceux-ci ;

faire injinimcnt

trop

Donc, silence à peu près complet sur et

aux

trêve

un admirateur de

pendant

un livre

tout,

oii

un

louange

la lii're

et

la

enfin tel que

mais un admirateur indé-

veille,

la

Wagner.

de

volontairement dépourvu de

où l'anecdote vérifiée aurait sa place,

l'écrire

aux

d'honiwur que

Avant

personnalités.

critique parleraient un langage accessible à tous,

devait

sans

gens qui prirent part aux

les

d'histoire exact, complet si faire se peut,

solennité,

la galerie

nom

de leur prêter une nouvelle vie à l'abri du i^rand

polémiques d'antan,

une impar-

Il vie plaisait d'observer

Waffncr

user des textes que J'ai'ais entre

xi

qui n'a jamais voulu frayer avec personne ayant tenu de

et

près à Richard ^^^agner.

Je tiens à

quand on

le

déclarer. C'est, selon moi, une condition indispensable

essaie d'apprécier

indépendance absolue

et

serait en droit de vous

vécu,

pour

l'œuvre le

est

un

taille,

que de

la

faire payer,

immortelle

:

il

y

a

peu que

si

ce fût.

de surcroit,

peut,

me

suis

pas fait faute. Mais

il

y

pu demander que

je

soumisse

le livre

//

y

a près de vingt

qui,

ans

et

je

défendre avec énergie, au risque de m' attirer

gens qui

me

reprocheraient volontiers,

renseigner

se

et c'est

de quoi

à solliciter

le

par échange, auraient

entier à leur approbation.

rateur de Wagner, certes, je crois l'être; d'écrire

de

a loin

moindre renseignement auprès de persoimcs

L'homme a

éléments nécessaires

tous les

auprès de gens ayant pénétré dans l'intimité du maître, je ne

j(niir d'une

de n'avoir pas la plus petite obligation à qui

sans compter qu'on

jnger,

de cette

artiste

Admi-

depuis que j'ai coinniencé

jamais cessé de

n'ai les

le

attaques railleuses de

maintenant,

circonspect ; mais autre chose est d'improviser un

d'avoir été tiède

et

article

de critique

militante presque aussitôt oublié, autre chose de composer

un volume

d'histoire

auquel l'auteur prétend qu'on

se

puisse

reporter

en

toute

sécurité.

Je

me

suis

donc efforcé de faire un ouvrage entièrement impartial

non seulement envers Richard Wagner, mais aussi

pour une raison ou pour une autre, ont prétendu version publique le

mal fondé de

;

il

appartenait à l'historien

eni'crs

le l'ouer

de disceriwr

ccu.x qui,

à ianitnadle

bien ou

ces attaques, leur origine i)itércsséc ou leur but caché.


AVANT-PROPOS

XII

et

de prononcer ensuite, en connaissance de cause,

ennemis. C'était

croire, et d'autant plus

pareil dans

tous

homme tel comme on peut

un travail indispensable à faire avec un

Wagner, mais un

que Richard

entre l'artiite et ses

très délicat,

malaisé qu'il ne se trouve absolument rien de

écrits

les

travail

biographiques consacrés au maître

France ou d'Allemagne

tous les écrivains de

même

et

avec AI.

avec

:

Dann-

reuther, dont la notice anglaise est un des meilleurs travaux qui soient

sur Richard Wagner,

n'y a jamais d'e.xamen calme ni de jugement

il

modéré. Pas de moyen ternie ou

}]^agner

l'absolu

ce qui

un

est

misérable

pas de ce monde,

n'est

concerne Richard

ou

c'est tout l'un

ou

c'est

:

il

Wagner

faut examiner de près

en

lumière

ainsi

sition le

ne

il

Eh mon Dieu! relative en

il

a subi

attaques

les

pas de lancer de grands

suffit

la question

c'est tout l'autre;

la vérité

sous toutes ses faces, sans

sans aveuglement.

et

entendu sur Richard

Wagner

mit bien

génie auquel on tentait de rendre un juste hommage,

le

marquer mieux que par

fallait

ceux dont

et

idée préconçue, autant que possible,

Pour qu'un ouvrage

martyr.

pour arriver à

et

sans demeurer en reste avec eux,

mots;

un

ou

le

il

par des dessins, quelle oppo-

récit,

maitre avait rencontrée en tout pays

et

quelle énergie

il

avait

dû dépenser pour venir à bout des nombreux obstacles qui se dressaient devant

lui,

par sa faute asse^ souvent, par

Rien non plus ne montre mieux que quel revirement

Wagner. La et

comme

s'est

fait

caricature,

suite

de son caractère absolu.

dessin, qui

le

dans l'opinion publique au sujet de Richard ici,

devait donc venir en aide au texte écrit,

nul compositeur, pas

même

Rossini ni Berlio^,

inspiré la verve railleuse de ses contemporains,

parmi

toutes

Angleterre, trop

caricatures

les

etc.,

grossières

aux yeux,

saute

écloses

en

il

n'a

plus

n'y avait qu'à choisir

Allemagne,

en

France,

en

mais en évitant toujours d'en reproduire qui fussent ou

le

moins du monde blessantes pour des personnes

encore vivantes. C'est

dire

asse:[

que

la caricature

document historique, abstraction faite de

avant

tout à

l'attaque plus ou

mes yeux un moins

plus ou moins envenimé qu'elle dirige contre l'homme

trait

Au

est

surplus, la caricature est devenue, en ce siècle, une des

la célébrité,

bien,

im gage éclatant de renommée,

ne devait pas voir d'un

ccil

et

et

vive,

du

l'artiste.

formes de

Wagner, qui

le

savait

indifférent ce déluge de croquis face-


AVANT- PROPOS tieux sur liii-miniic

cl

sur ses (vuvrcs

xui

en

:

innombrables gens qui n'auraient jamais eu

un

article,

aidaient plus

ils

d'écrits n'auraient

pu

faire.

parodie écrite ou dessinée, dei'oir lui

à

En et si

comme

notre

le loisir

regards des

les

ou

goût de

le

lire

répandre son nom que des centaines

aucun cas

il

n'a été réclamé contre la

jamais crayonneur satirique arait cru

demander permission de

doute pas répondu

frappant

le

tourner en charge,

il

n'aurait sans

grand Lamartine, qu'on ne

doit auto-

RICHARD WAGNER VERS 184O. Son premier

riser

personne à faire grimacer

faite à l'image

A

portrait, dessiiii^ par Ernest Kietz, à Paris.

astreint à

et

de caricatures devaient répondre une série de scènes

une autre de portraits.

Pour

les

premières,

je

me

suis

donner toujours au moins une gravure contemporaine des

représentations originales, afin de

mieux conserver à chaque pièce

cachet du temps; pour les seconds, les

visage de l'homme, seule créature

de Dieu.

cette série

de pièces

le

plus rares

et

ceux auxquels

le

j'ai

nom de

cherché à réunir l'artiste

ture donnaient une importance particulière

de Renoir. Il ne m'a pas été facile

le

:

tels

le

les portraits

ou la date de la pein-

ceux d'Herkomer

croirait-on ?

et

d'ordonner


AVANT-PROPOS

XIV

exactement uns

date précise;

la

par exemple pour

nmison Brcitkopf et Hartel

ans. que la et

longue série de portraits. J'avais bien pour quelques-

cette

pour ceux qui ont

sonnes

par

qui,

Wagner

leur

pour

pour intercaler

de la physionomie

et

me guider

sur

Kiet^,

le

la

que

artiste

je

texte ? Je

l'espère

demandais vainement à tous

voilà

:

Quant au portrait que premier

et

donné à

j'ai

les

échos,

et

je m'estime

,

Ce

par Ernest Kiet^, un et

page 45, en supposant que

la

peut-être celui de Kiet{,

comme on

il

est

postérieur tout au

en peut juger par la physiono-

nous donne bien Richard ^]\^gner aux environs de la date indiquée est

donc

la bonne. Il

natale. C'est son frère ,

Bayreuth même, en

les

i<S-;3,

le

la trentième

parait que Kiet^, l'auteur

après avoir p>assé la plus belle partie

,

de sa vie à Paris, de iS'So à

l'S'yo,

est

Gustave Kiet^, qui a fait à

sculpteur

deux

aujourd'hui retiré dans sa

bustes en

marbre blanc qui ornent

rei-de-chaussée de Wahnfried.

Pour préparer un il

Wagner, par

faire figurer dans cet Avant-Propos.

le

du premier portrait de WagJier

le

un peu, mais ne

donc Wagner à vingt-sept ou vingt-huit ans.

plus de deu.x ou trois ans,

ville

vête-

bonne fortune de trouver à Paris lors de son premier

la

séjour che{ nous

année;

les

de Dresde qui étudiait la peinture à l'atelier de Delaroche

que Wagner eut

et

mode dans

un ordre relativement exact pour

portrait fut dessiné à Paris, en US40 ou 1841

mie,

De

modif cations

surtout sur les

reçu au dernier monient le premier portrait de

c'était le

Richard

garantir.

encore heureux de pouvoir

jeune

de

douteux entre ceux dont

changements de

les

insérés dans

les portraits

J'ai

auprès des per-

savoir

tout

ces portraits

ments. Aurai- je établi, de la sorte,

le

même

les autres,

devraient

situation,

je savais pertinemment la date,

saurais

convuuuiquait aimablement,

leurs réponses étaient vagues ou manifestement erronées.

:

sorte que j'ai dû,

tous

me

à quarante

Paris ou à Londres ; mais impossible

été faits à

d'obtenir un renseignement sur

Wagner

celui de

m'a fallu,

tant

nombre de gens, un renseignement

pour

écrire utile,

partout qu'obligeance avait

une

si

pareil ouvrage, absolument neuf de toutes pièces^'

et

l'illustration

que pour

le

texte,

recourir

à

à bien des personnes en vue d'obtenir d'elles et

je

me

félicite

de n'ai'oir rencontré presque

bon vouloir. Pour

grande importance

à

la

partie caricaturale, qui

mes yeux, je

dois

beaucoup

à


AVANT-PROPOS M. John

Gyand-Carlcrct, auteur de l'excellente Histoire de Autriche, en Suisse;

ture en Allemagne, en le

xv

M.

et

grand collectionneur )vagnérien de Vienne, m'a

En

précieux secours.

ou

caricatures

de

général,

tous

satiriques

publications

aimables, aussi bien ceux de France

que

allemands,

éditeurs

les

:

Eiuerich Kastner,

été pareillement d'un

de journaux

directeurs

les

se

Carica-

la

montrés

sont

des plus

du Charivari, du Triboulct,

comme ceux du

Kikeriki

de

etc.,

du Floh, à

et

comme AIM. Braun et Schneider, des Fliegende Bketter, à Munich; comme M. Heck, de Vienne, pour les portraits-charges de GusVienne;

M.

tave Gaul, etc., etc.

A. Hofmann, propriétaire du Kladderadatsch,

de Berlin, à défaut de caricatures dans mettait à

ma

disposition

toute

le

même

corps

de ce journal,

une brochure humoristique

Schulze

:

et

Millier à l'Anneau du Nibelung, dont les plaisants croquis sont dus au

de

dessinateur

principal

Punsch, de Munich, m'a été aussi

du séjour de Wagner dans

cette

W.

M.

célèbre,

cette feuille

pour

très utile à consulter

ville;

mais j'adresse

Le

Schol^.

temps

le

mes remer-

ici

ciements à un journal disparu, à un auteur mort, car l'année iNjS a

vu s'éteindre à teur,

la fois

cette feuille satirique et

son rédacteur-dessina-

Martin Schleich.

Si je

Nuitter pour

France,

en

rentre

obligeance

son

m'est dou.x

portrait de Renoir; portrait essentiel,

Charles

Archives de

les

Charpentier, qui possédait

communiqué un

frères, qui m'ont

M,

de remercier

accoutumée à m'ouvrir

mon ami Georges dessins^ comme le

l'Opéra, puis

de certains

il

les

MM.

originaux Charai'ay

surtout tel autre

et

de mes amis, dont la bibliothèque jvagnérienne, plus fournie encore que la

mienne en

ma

disposition.

Du

exactement

très

gravures ou documents originaux,

articles,

quand je

portraits et caricatures

même,

par scrupule d'historien,

reste,

qu'il

j'ai successipement

qui m'avaient été

le

me

un et

troui'er

m'a plu de

moins du monde

les

nommer

j'ai toujours indiqué

utiles

dans

de reproduire

mon

aux yeux.

et

de

ouvrages

livres français

plutôt que d'en négliger

tous sans faire ici métier de critujue

sans discerner entre leur plus ou moins de valeur

saute

les

;

travail. J'aurais

silence les différents et,

des pièces,

l'origine

courant du récit tous

avait été déjà parlé de ce rare génie,

seul, il

paraissait bon

noté au

eu mauvaise grâce à passer sous oit il

pu

l'ai

toute à

était

:

cela,

d'ailleurs,


-

AVANT-PROPOS

XVI

Tel

qu'il

est,

avec

des

imperfections

inéi'itables,

je soumets

ouvrage aux admirateurs éclaires de Richard Wagner, eu d'excuser qu'on

l'a

les

fait

qui

fautes ;

mais

il

ont

ne

me

pu ni'échapper.

de jouer auprès d'eux

voudra

déplairait pas non plus d'intéresser

beauté

demi-voilée

l'original.

;

que

nous vantent

qui :

ils

font

naître

encore

lettre close,

ou immodeste, :

«

Ce

sont,

désir

comme on dit-il,

des

charmes d'une

irrésistibles

les

un

est

les

brûlant

de

connaître

»

Et nmintenant que rcuth

modeste

le rôle

que Gœthe assigne aux traducteurs

entremetteurs {élés

priant

eux surtout

C'est p>oiir

gens de bonne foi pour qui l'œuvre ivagnérienne et

les

cet

le

une courte fanfare

j'ai tout dit,

rideau s'entr'ouvre

représentation de sa propre vie

et

que

le

comme

à Bay-

maitre lui-même, avant la

la vie agitée d'un

héros de

l'art,

vienne intercéder auprès du public en faveur de son nouvel historien

WAGNER SALUANT. {Puck, Je Lcipzii;, 3 septembre

i<S7'3.J

!




RICHARD WAGNER SA VIE ET SES

OEUVRES

CHAPITRE PREMIER MOZART ET RICHARD WAGN'ER EN FACE DES FRANÇAIS

kvSÉPV^I

''


RICHARD WAGNER

1

Ne

moment dexaminer

serait-ce pas le

pris d'indulgence

de sévérité, les griefs

ni

en toute justice, sans parti

si

souvent formulés contre ce

compositeur par ceux qui transportent cette question purement musicale

que d'autres ont écrit et fait pis encore contre nous qui n'en sont pas moins admirés et loués par toute la France? La question de génie ou de talent n'est sur

le

terrain brûlant de la politique, sans vouloir se rappeler

pas à discuter

ici

et toute dissertation serait oiseuse à la veille

théories et les créations du novateur allemand,

examen

En

nous

réfléchi put effet,

nature

la

complexe, son génie telle

si

grand

faits

môme

Aussi nous abstiendrons-nous de juger, d'examiner

décisifs.

de

attrait

les

que cet

offrir.

artistique

musical

de Richard "Wagner est

révèle

une

telle

tellement

vigueur et exerce

une

attraction, qu'à défaut d'une connaissance approfondie de ses œuvres,

on a recours aux comparaisons les plus étranges pour le juger en bien ou en mal. Cette année môme, presque le même jour, un compositeur

allemand

l'assimilait à

comparait à M. l'Allemand et

Richard

Napoléon

III,

tandis qu'un journaliste français le

de Bismarck. Et tous deux,

le

Wagner

Français,

musicien et

le

croyaient avoir tout dit

sur

Hiller, directeur

intime de Mendelssohn,

contre "Wagner,

Wagner

celui-ci,

compte de

l'un

au

l'autre,

il

— cette

écrivait à la

du Conservatoire de Cologne

vieille

eut toujours

ses aspirations,

il

;

foi

ami

Deutsche Rundschau

:

III.

Comme

en son étoile, malgré les circonstances les

moyens qui pouvaient

le

employés avec une constance

et

tous les

les a

et

amitié explique sa haine vivace

ressemble en beaucoup de points à Napoléon

plus contradictoires

en dehors qu'aucun musicien n'a possédées avant

Un

le

à titre de curiosité.

M. Ferdinand

«

littérateur,

par ce seul rapprochement.

Conservons ces deux portraits qui se contredisent

moins

le

autre point de contact entre Napoléon et

lui

mener au but de une énergie tout au

même

lui, c'est qu'il

degré.

a su enchaî-

ner indissolublement ses partisans au succès de sa cause, et qu'à l'égard

de ceux dont cation à

son

la

personnalité

profit.

couronnement de

Il

est

lui

portait

arrivé

ainsi

ombrage, au

il

a

fait

de

la confis-

Comme

suprême pouvoir.

sa brillante carrière, à l'Exposition universelle de 1867,

succédera, en 1876, l'Exposition de Bayreuth.

Wagner

aura-t-il aussi

un

d'abord, jusqu'ici, rien ne nous annonce

Sedan? venue sur le terrain musical d'un Bismarck ou d'un Moltke ensuite, dans les arts, les victoires ne sont généralement pas aussi rapides que dans l'ordre militaire. Mais sa cause finira pourtant par être vaincue, car elle ne repose que sur des principes faux, comme la puissance jadis incontestée de Napoléon III. » C'est difficile à croire

la

:

;


RICHARD WAGNER Que

disait, trautre i^art, le

comme fixe,

Wagner

Richard

«

XIX'

3

Siùclc?

est la volonté, l'énergie, l'opiniâtreté incarnées;

tous ceux qui s'attachent obstinément à la poursuite d'une idée

on

l'a

ces deux

longtemps de maniaque. Aujourd'hui, Bismarck

traité

hommes

dont

et lui,

sinon les génies, ont tant de traits

les caractères,

de ressemblance, sont les dieux de l'Allemagne. L'élite des Germains gallophobes et mélomanes est prosternée à leurs pieds.

Wagner du de

ont

Bismarck

et

preuve, dans deux sphères d'action bien différentes,

fait

même esprit absolu la même fougue de

systématique, de

et

tempérament, de

sur le choix des moyens. Uiiiu'tc que

ou de vive force dans

le

même ténacité passionnée, même absence de scrupules

la

la

diplomate a conquise par adresse

la politique, l'artiste a

essayé de

la réaliser

dans

»

l'art.

De

moins forcé que

ces deux parallèles, le second est peut-être

premier, mais

le

ne prouve pas davantage pour ou contre l'auteur de

il

Tristan et Iseult.

Wagner

L'animosité a surtout redoublé contre Richard apprit, par simple hasard,

depuis qu'on

avait écrit contre la France, au prin-

qu'il

temps de 187 1, certaine comédie-charge politique intitulée: Une Capitulation. Sur ce sujet, il conviendrait de ne pas crier si fort, pour ne pas mettre en évidence notre ignorance prolongée. Quelques gens s'occupant de critique ou d'histoire musicale connaissaient depuis longtemps cette grossière plaisanterie

pour

la

milliards

»

qu'un

révéler

lui

et

y

que

le

public l'ignorait encore

informés dès alors

et cette

il

a fallu

pays des

«

façon d'apprendre les choses

Ou

ne sont guère à notre honneur.

cette

publi-

une importance capitale, et nous en devions être premier jour ou elle ne signifiait pas grand'chose, et

avait le

;

eût été sage de ne pas faire tant de bruit autour

il

et

cette découverte inattendue.

fit

au bout de cinq ans hostile

voyageât au

touriste-écrivain

Cette lenteur dans l'information

cation

;

d'elle.

Attacher

'importance à une parodie bien inoffensive en sa grossièreté, faire ressortir d'autant plus notre manque de prévoyance et d'in-

pareille c'était

formations.

On

fait

encore un crime à Richard

Wagner

d'avoir

composé en 1871

une marche triomphale pour le couronnement de l'Empereur d'Allemagne. Il aurait mieux fait de s'abstenir, assurément, lui qui a vécu plusieurs années en France ciens

de

célébrer

les

célébré

le

mais n'est-ce pas

succès

n'attendent-ils pas toujours çais seraient-ils

;

militaires

le lot

de leur

de tous

pays

des succès très avérés.

Et puis,

les

et les

musiencore

Fran-

bien venus à blâmer un compositeur allemand d'avoir

triomphe

de

l'Allemagne,

eux

qui

ont

si

bien

applaudi


.

RICHARD WAGNER

4

MM.

Félicien David

Gounod chantant

et

France, eux qui n'ont jamais reproché à

les

victoires

futures

de

la

Spontini de célébrer

l'Italien

dans des cantates officielles l'oppresseur de sa patrie et de lui consacrer mcnie, sur son ordre, un grand opéra comme Feniaiid Cortei?

Weber

mieux que Spontini, lui qui se lit le Tyrtée des armées allemandes pendant la campagne de i8i3, lui qui mit en musique les chants de guerre les plus haineux contre le drapeau envahisseur, le nôtre, et contre un conquérant justement abhorré. Mais

Weber

autrement

agit

et

dans ce sens plus

alla

loin

seulement sa cantate de victoire

— comme Wagner

de Waterloo,

il

que Wagner

Combat

:

fit

pour

le

et

il

;

ne composa pas

triomphe, après

la bataille

couronnement de l'Empereur;

avait déjà, au plus fort de la guerre, lancé contre nous ces chants

patriotiques qui enflammaient l'ardeur des combattants.

Et pourtant, qui songerait aujourd'hui à proscrire à nier son génie, parce qu'il

Personne

même

haine,

il

passa par

Toute

la

flatteur,

le

:

Londres son Oberou. reçut alors avec un empressement bien

pour

Paris

française le

génie,

diriger à

aller

il

:

c'est

qu'elle devait

qu'il allât, d'où qu'il vînt.

oi!i

Wagner

Weber. Mais, triomphe

notre ennemi acharné et victorieux?

ne voulut se rappeler qu'une chose

Richard

de France,

n'y songea lorsque, douze ans après cette explosion de

société et

honorer

fut

Weber

donc beaucoup moins

a

dit-on,

n'a

il

la

France que

pas seulement composé une

marche de

a aussi déversé l'injure sur

fait

contre

un peuple abattu, pour venger

son amour-propre offensé de l'échec que ce peuple avait autrefois infligé à son Tannhœiiser

Mais un autre compositeur allemand nous a pour le moins aussi maltraités, aussi injuriés pour nous remercier de notre bon accueil, de nos bravos pure,

;

et

ce compositeur jouit

comme homme

monde ignore

et

comme

aujourd'hui de la gloire la plus

musicien,

ce qu'il pensait de nous.

faire déflorera peut-être l'idéale

même

La

en France, où tout

le

révélation que nous allons

image du tendre Mozart, mais,

si

grande

surprise qu'elle cause à ses dévots admirateurs, elle n'atteindra en rien

son génie

ni

et injurier la l'esprit

son œuvre. Elle prouvera cependant qu'on peut détester

France avec

la

nature aimante d'un Mozart,

comme

avec

rancunier d'un Wagner.

Et d'abord, en quoi Mozart, dont on a voulu faire le modèle de différait-il du commun des hommes? Avait-il vrai-

toutes les vertus,

ment

cette droiture inflexible, cette honnêteté qu'effaroucherait la seule

pensée d'un biais ou d'un faux-fuyant, celui qui, après avoir vendu sa

Symphonie concertante

et

cert spirituel, écrivait tout

deux ouvertures à Legros, directeur du Con-

naïvement

:

«

Il

croit

en être

le

seul

pos-


RICHARD WAGNER sesscur, mais ce

n'est

dans

je

la

maison.

tête,

et

Le

«

pas vrai,

trait

car

les

je

encore

ai

de souvenir

écrirai

les

5

retour à

mémoire qu'à

plus d'honneur à sa

fait

toutes fraîches

mon

aussitijt

la

sa déli-

catesse.

nature

d'une

Était-il

aimante,

si

gardait-il

et

homme

invariable des services rendus, ce jeune

calomnie sur Grimm, qui

l'injure et la

une reconnaissance

qui osait bien déverser

été son plus

avait

dévoué pro-

tecteur lors de son premier voyage à Paris avec ses parents? L'enthou-

Grimm

singulièrement refroidi, il est vrai, quand il présomptueux garçon de vingt-deux ans, doué d'une vanité prodigieuse, et auquel manquaient, d'ailleurs, toutes les qualités de souplesse et d'amabilité nécessaires pour réussir à Paris mais il

siasme de

s'était

avait vu revenir ce

;

accordé une constante

encore

lui avait

une protection

sinon

amitié,

bien efficace.

Et ne

pas

l'eùt-il

dénonciation

que rien n'autorisait Mozart à écrire cette

fait

pleine de colère et d'aigreur, que

si

services passés devait l'empêcher

grossiers

:

...Le plus

«

quinze louis d'or

de

ma

grand bienfait

mettre en rage) et

mette

lui

le

pied...

mon honnêteté de mon talent. »

Avait-il enfin ce profond

:

«

ma

respect

de

mon

cousine. Je suis de tout

offense qui

famille, était-d

pût

me

même doué

on

a raillé,

raille

et 1,000 coniyli-

mon cœur,

Àlonsieur, votre ini'ariable cochon, ic

«

la

seule

cher oncle, une bonne santé

«

On

(la

car ce serait montrer de la

délicat, celui qui terminait ainsi certaine lettre à un parent

Je vous souhaite,

inents à

m'ait accordé consiste en

qu'il

méfiance à l'endroit de

si

en ces termes

m'a prêtés, par petites sommes, durant la maladie peur de les perdre? S'il a un doute à ce sujet, il

mérite vraiment qu'on

respectable

seul souvenir des

qu'il

mère. A-t-il

d'un esprit

de

de parler

le

Grimm

'W. A.

Mozartin'.

»

encore 'Wagner de son esprit tudesque et de

ses plaisanteries d'éléphant

Elles sont le plus souvent assez lourdes,

».

d'accord, mais elles sont moins crues que celle-ci et ne s'adressent pas à un

homme

d'âge.

Cette courte

nous vise pas,

plement

l'idéal

il

digression est vrai,

qu'on

sur

le

caractère

et

nous autres Français,

s'est plu

l'esprit et elle

de Mozart ne atténuera sim-

à se former de lui, de ce jeune

sont en français dans I. Les mots ici soulignes langue pour faire de jolies plaisanteries de ce genre.

l'original,

homme

Mo,^arl recourant volontiers à notre


RICHARD WAGNER

r.

timide

chaste,

Mais

qui

et

Mozart

soigneu-

l'ont

jour.

Plusieurs de ses lettres, écrites de Paris, renferment quelque

de mépris, quelque

dans sa

du 9

lettre

cela.

bien surprendre nos

va

qui

car les biographes et traducteurs de

sement caché jusqu'à ce

moins que tout

rien

n'était

nous touche davantage

voici qui

lecteurs,

respectueux,

et

injure

notre

à

1778

juillet

adresse, lui

il

:

et voici les

marque

premières

de quelques lignes pour

suffit

Après avoir parlé de son ballet des Petits Riens, dont il a seulement, dit-il, composé six morceaux sur douze, le reste n'étant, d'après lui, qu'un arrangement de « misérables airs français », il arrive à dire « I>e maître de chapelle Bach sera bientôt ici, et je crois qu'il vient en vue d'écrire un opéra. Ces Français sont nous décocher

trois lardons.

:

seront toujours des ânes;

et

sont incapables de produire et force leur

ils

de recourir aux étrangers.

est

venant d'un jeune scènes françaises

homme lui faire

»

Le compliment vaut son

dont l'orgueil la

juillet

:

«

...Il

n'y

a

pas

opéra ou n'en écrire aucun. Si fice si

de

prix, surtout

ne

pas

voir les

place assez large.

Près d'un mois plus tard, Mozart 3i

souffrait

de milieu je

à

écrivait :

me

il

père, en date du

son faut

compose qu'un

n'en

sera insignifiant, car en ce pays tout est

taxé,

écrire petit,

sans

un grand

mon

béné-

compter que

l'opéra n'a pas la fortune de plaire à ces nigauds de Français, c'est

une

affaire finie

ma

réputation

je

;

en

commandes, j'en retirerais peu je compose un grand opéra,

n'aurais plus de

souffrirait.

gagnerai plus d'argent,

Que

si

dans

je serai

mon genre

et je

spécial et j'aurai plus

de chances de succès, parce qu'un grand ouvrage offre plus d'occasions d'enlever

pas un

les

applaudissements.

moment

si

j'obtiens la

Je

vous garantis que

commande

d'un

ouvrage.

je

n'hésiterai

Le diable

a

comprends trop bien les difficultés qu'elle a présentées à tous les compositeurs; mais, malgré tout, je me sens en état de les vaincre aussi bien qu'eux. Au contraire, quand je me figure et cela arrive souvent que mon opéra ira bien, alors je me sens tout feu, tout mon être frémit et je brûle d'apprendre aux forgé cette langue, c'est vrai, et

Français à

je

connaître

Allemands, à

les

les

estimer

et

à les craindre.

D'où vient donc que jamais Français n'est chargé de faire un opéra? Pourquoi faut-il toujours recourir à des étrangers? Le plus grand obstacle pour moi proviendrait des chanteurs. Mais ma résolution est prise je :

ne chercherai aucune querelle, seulement saurai

bien

me

duel, car je n'ai

si

l'on

me

pousse à bout,

d'ailleurs, de m'en aucun goût à ferrailler avec des nains. »

défendre. Je souhaite,

tirer

je

sans

Mozart, qui avait très à cœur cette question pécuniaire, y revient encore dans sa lettre du septembre, celle-là même où il arrange si 1

1


RiciiAki) vva(;ni:i<

Grimm

bien son protecteur

Je n'ai pas voulu repousser tout net la

«

:

7

proposition de Noverre, parce qu'on aurait pu penser que

A

de confiance en moi-même. tables,

mais

comment

le

je

savais d'avance,

terminé, on

le

répète

on ne

le

donne pas,

çais,

n'est ])as

s'il

:

et

en raison du succès

Anes,

!

Vous

le le

encore y

Et

a-t-il

:

:

et

on ne peut compter sur

nous

n'avons

que

nous gratifie;

s"il

rien.

»

l'embarras du ne nous traite

il

Lo/icngrin.

entre eux cette différence que Richard

Wagner

retourné dans son pays,

sera

lorsqu'il

;

gain

réussit, le

s'il

fera par la suite l'auteur de

nous maltraitera de l'étranger,

Voici

ici.

savez sans doute déjà. L'opéra

met en scène,

choix entre les épithètes dont Mozart

vraiment guère mieux que ne

étaient inaccep-

l'usafrc

du goût de ces patauds de Fran-

voyez

nigauds, patauds

niais,

pas

n'est

tel

le

manquais

compositeur en est pour sa peine

le

est jugé bon, au contraire, on est

car

choses se passent, vous

les

mes conditions

la vérité,

je

après qu'un de ses principaux ouvrages, bon ou mauvais, aura été

sifflé

chez nous sans qu'on en perçut une note, tandis que Mozart nous déco-

même,

chait toutes ces aménités dans des lettres écrites de Paris

que

la

obtenait du

nom

son

une bienveillance marquée, malgré son

société l'accueillait avec

humeur revêchc

et

alors

son orgueil,

succès à l'Opéra, et

alors que son ballet des Petits Riens que deux symphonies faisaient applaudir

au Concert spirituel. Différence essentielle,

qui n'est pas,

et

ce nous semble, à l'avantage de Mozart.

Mais ce n'est rien encore, et, dans la haine qu'il a vouée- à Paris, Mozart va jusqu'à traiter la société française, ses mœurs et sa santé d'une façon qui défie toute excuse ou toute atténuation. Ces passages, il

faut le répéter, ont été patriotiquement

écartés par les critiques ou

historiens français de Mozart, qui n'ont pas voulu réveiller sa béate confiance au chantre de idéal qu'il s'était

formé du cœur

donna Anna, et

de

l'esprit

ni

deuxième

commence

tres.

:

«

le

délicieux

d'une

légèreté

i8 juillet, la

mort de sa mère, arrivée quinze jours J'espère que vous avez reçu mes deux précédentes let-

Nous ne parlerons

Paris

:

«

la

plus de ce qui en faisait

nous n'y changerions rien. en parlant d'une visite par était alors à

était

de cette façon allègre sa lettre du après

qu'il écrive

auparavant

défigurer

public de

du doux Wolfgang.

Mozart, qui pouvait avoir bon cœur, mais qui incroyable,

le

«

le

Et, après cette parole

sujet

;

c'est passé,

stoïque,

il

ajoute

rendue au célèbre chanteur Raaf, qui

lui

Lorsque

j'eus

achevé de jouer

et

Raaf, pen-

temps, n'avait cessé de m'applaudir très vivement et très j'échangeai quelques mots avec Ritter. Je lui marquai, sincèrement, entre autres choses, comble'n le séjour de Paris était peu plaisant pour

dant tout

moi,

le

même

sans parler de

la

musique, car,

lui

dls-je, je

ne trouve

ici


RICHARD WA(;NER

8

aucun soiilcigement (dédommagement?), aucun entretien, aucune relation agréable et honnête avec le monde, particulièrement avec les femmes pour

qui,

plupart, sont des

la

p

rares qui font exception

les

et

',

me don-

n'ont aucun savoir-vivre. Ritter n'a pu faire autrement que de

ner raison...

»

Des femmes, passons aux jeunes gens. Deux jours après, Mozart, apprenant qu'un capitaine du nom de Hopfgarten a été tué dans une escarmouche entre les troupes du roi de Prusse et celles de l'archiduc Maximiîien, écrit à son père

par hasard

encore son

Ce

?

de ce genre. Dès

berceau,

le

nouveau,

de

rien

la

plupart des jeunes gens de

homme

avec un

ici

quatre fois ou qui ne se trouve

apprends

douloureux, mais mieux vaudrait

comme

d'une maladie honteuse,

Impossible de causer

Paris.

bien

serait

rencontré un trépas glorieux au lieu de mourir dans

qu"il eût

lit,

qui

n'ait

contagion n'a

enfants naissent infectés;

les

d'ailleurs,

Bien

qu'il ait été

accusations aussi française.

et

les

qui

On

chez

sifflé

Wagner ne

applaudi,

coup

que croître

fait

vous saviez

et

et embellir.

nous

odieuses

contre

fort

Mozart

que

infamie de la

accueilli

par des huées,

dans son âme Richard

Compositeur,

France que ne fit

Mozart

dont on

fut

y

société

pu lui reprocher, non sans raison, d'avoir décrié après amateurs parisiens auxquels il était venu demander la gloire

Mozart lui-même,

mais

pur Mozart, que venait-il faire au milieu d'un peuple

le

de

que

j'ajoute

a

l'avaient

corrompu

si

cela

en somme, de porter des

soi-disant

la

ne vous

je

tout

«

aussi

jamais permis,

s'est

été trois ou

encore gratifié de quelque galanterie

longue date aussi bien que moi. Croyez-moi cependant, la

Serait-ce

«

brave baron Hopfgarten, que nous avons connu à Paris

le

M. de Bosé

avec

:

fait

:

le

fut

et

et

dans sa chair

Wagner

s'est

Weber; homme,

il

qu'il

jugeait

le si

?

montré moins hostile à

la

nous a moins injuriés que ne

cependant on accumule sur

lui

toutes les rigueurs

grâce à ses deux compatriotes. Outre que ces excommuni-

cations vengeresses n'ont aucune valeur

quand

elles

ne

frappent pas

tous les coupables, elles sont absolument temporaires, et s'effacent

au

bout de quelques années ou de quelques mois. Si ce n'était que l'amour-

propre français, froissé de voir notre jugement ne pas

faire

loi

dans

autres pays, s'obstine à opposer l'insuccès de Tauiihœiiser à Paris

les

aux triomphes éclatants de Tannhœuser et de Lohengrin sur tant d'autres scènes du monde, il y a longtemps que Wagner serait rentré en grâce auprès de nous,

ments à I.

la

quitte à nous

remercier

façon de Mozart.

Mo/îart, eu ilclicat,

ijcrit

le

mol

allciiiaïui

en toutes

lettres.

ensuite par

des compli-


RICHARD

wa(;ni<:r

9

Mais qu'importe, après tout? La postérité n'a cure des pensées de l'homme, voire de l'homme lui-mc'me, quand juger l'œuvre, et elle

fait

le

génie

lui

aussi vite

l'auteur de

si

musical

partout ailleurs qu'en France

envers nous ne

Wagner

de

de ses prédécesseurs. Et,

possède vraiment

— on

de

— ce peut

qui

Lnhengrin plus

n'est

le tenir

a

qu'elle

oublié

et

de Tristan

à

démontrer

pour assuré

:

ses torts

nuiront pas plus, en définitive, que des torts sensi-

blement plus graves n'ont nui à

Weber

et à

Mozart.

-^•^ P

saisit

il

en cela preuve de sagesse et d'impartialité.

Elle oubliera donc les injures celles

écrits ni des

ORTKA T-C H AK I

(J

K

[Eclipse, 5

DE WAGNER, PAR G novembre

187Ô.)

1

(.

L


CHAPITRE

II

WAGNER

LA JEUNESSE KT LES PREMIERS ESSAIS DE RICHARD LES FÉES ET LA NOVICE DE PALERME

SÉJOURS A MAGDEBOURG, A KŒNIGSBERG, A RIGA

Wagner

iCHARD

dans une et

vieille

blanc

au

)i,

neuvième

maison,

la

en particulier

le

il

prenait

même

senta

certain

salon

particulier

19 octobre

avait

iSi3,

avec des

se

vif

de

et

son père occupait

Après

choisir par le

pendant l'occu-

poésie et ainsi

c'est

bien

entendait

il

;

le

ce dernier

:

théâtre,

le

repré-

qu'il

Complices, de Gœthe, dans un

les

batailles

les

sous

livrèrent

et

le

de toute

simple com-

était

de police

la

était

Il

'.

famille

la ville

pour

comédie,

amis

de Leipzig. qui

greffier

la police

un goût très

plaisir à jouer la

jour

d'une

français, ce qui l'avait fait

maréchal Davoust pour organiser il

Briihl

Son grand -père

douane de Leipzig

22 mai i8i3,

le

Maison du Lion rouge

reçu une bonne éducation

avait

pation française;

«

dernier enfant

et

modeste emploi de les langues,

la

88 de Hause

n"

petite bourgeoisie.

mis à

né à Leipzig

est

acharnées des 18 et

murs de

les

la

qui

et

ville

rAllcmagne du joug odieux de Napoléon, il se déclara à Leipzig une fièvre pernicieuse provoquée par l'énorme quantité de morts, de blessés et de malades accumulés dans la ville ou alen.our, et cette épidémie emporta le greffier Frédéric "Wagner le 22 novembre, alTranchirent

six

mois jour pour jour après

donc de qui tenir pour à hériter des goûts

réelle

comme

le

théâtre

;

et

il

ne fut pas

le

Celui-ci

avait

seul de la famille

du père, car sa sœur Rosalie acquit une notoriété

tragédienne, et son frère Albert, l'aîné, acteur et chan-

teur à Wiirzbourg, à Dresde,

qui

naissance de Richard.

la

puis régisseur à Berlin, eut deux

devinrent cantatrices et dont

Johanna Wagner en méritant

d'être

La mère de Richard Wagner deux ans dans un

état voisin

l'une

se

a

même

comparée

illustré

le

filles

nom

de

à la Schrœder-Dcvrient.

retira à Eisleben,

elle

vécut

de l'indigence, en s'aidant d'une modique

I. C'est la grande rue coiiimerçame de Leipzig, au centre Je la ville. Le 22 mai 187?, à l'uccasion du soixantième anniversaire de la naissance du maître, on plaça une plaque conimeinorative sur cette vieille masure qui menace ruine aujourd'hui et qu'il va falloir démolir, malgré le projet pieux l'orme par quelques admirateurs de la racheter et de la remellrc à neuf: les architectes de la ville uni

jugé celte restauration inutile et impraticable.


1

RICIIARO \va(;ner que

pension

TKtat; au bout de ce temps,

faisait

lui

1

avec un ami de son mari,

comédien

le

Louis Geycr,

remaria

elle se

avec

et s'en vint

toute sa famille habiter Dresde où celui-ci tenait un bon rang dans la

troupe royale. Apres avoir eu des succès proloni^és à Leipzig, ce Geyer, qui n'était pas seulement un comédien estimable, mais qui avait aussi tàté

du métier d'auteur dramatique

marqua

talent relatif,

Malheureusement, de

à côté de celui de sa

mère

tation d'une des petites

de

on organisa en famille

de Geyer

Massacre des enfants à

le

:

représen-

la

de sa mort, Geyer avait

au petit Richard

dit

jouer deux ariettes, dont la Couronne l'irginale, du Freischi'it^,

lui

qu'on mal,

parlait

il

;

touché lorsqu'à Bayrcuth, pour

et fut très

pièces

même

veille

père

gardait précieusement son portrait

il

fêter son soixantième anniversaire,

Bethléem. La

un

que sept ans.

n'avait encore

se souvint toujours de son second

avec un respect affectueux,

lui

peinture avec

la

tout de suite une affection particulière au bambin.

mourut que Richard

il

Wagner cependant

cultivait

et

lui

avait apprises sur

murmura d'une

il

le

piano

comme

;

l'eniant ne s'en tirait pas

femme

voix faible à l'oreille de sa

Aurait-il

«

:

comme

il

était

mort, sa femme, en rappelant aux enfants combien de preuves

il

leur

avait

des dispositions pour la musique?

données

d'une

Et

»

vraiment

affection

voulu faire quelque chose de

lendemain matin,

le

«

:

aurait

Il

Richard. L'enfant se sou-

dit-elle à

toi »,

vint toujours de cette parole et eut à

paternelle

cœur de

réaliser.

la

Personne, alors, n'aurait songé à faire un musicien de Richard gner,

son second père en aurait voulu

été tout à fait rebelle au

dessin, —

et

quand

aidée par un frère de son second mari, afin qu'il

de sérieuses études

fît

faire

le

il

un peintre,

n'avait

s'il

eut neuf ans, sa mère,

plaça à l'école

classiques.

Wa-

de

un enfant

alors

C'était

la Croix,

volontaire et fantasque, à la fois impétueux et tenace et qui s'enflam-

mait ou se dépitait pour un rien.

«

J'ai

grandi,

disait-il

en dehors de toute autorité, sans autres guides que

même. à

fait

favori

»

Et

il

était

nécessaire.

de ceux auxquels une

ancienne

Sillig.

mais

;

enseignait par-dessus

de l'instrument

lui

aimait aussi beaucoup

marché son professeur de il

suite,

moi-

est

tout

et devint l'élève

mythologie

la le

latin

piano, ;

s'amusait à jouer de

la

que

et lui

technique

mémoire au

bien qu'un jour son professeur lâcha prise en décla-

si

rant qu'on ne

ferait

put jamais apprendre il

11

avait peu de goût pour

répugnait et

lieu d'étudier,

parti,

le

il

la

indépendance

s'adonna surtout à l'étude du grec

Il

du professeur

l'histoire

telle

par

la vie, l'art et

jamais rien de à

jo-uer

lui.

Et, par

proprement

le

fait,

du piano.

Wagner ne

Son professeur

n'en continua pas moins à répéter de souvenir, avec des doigtés

extravagants, deux ouvertures qui constituaient alors tout

son

bagage


RICHARD WAGNER

12

musical qu'il

:

celle

de

Flûte

la

euchaiitée

venait d'entendre au théâtre

surtout celle du

et

qui

et

lui

Freischitt\,

première

avait cause sa

grande impression musicale. 11 ne jouait d'ailleurs ces deux morceaux que pour lui-même, et, comme il était incapable d'exécuter régulièrement une gamme,

il

conçut dès lors une aversion

qui n'était que virtuosité

"Weber

était

grande

si

;

pour tout ce

instinctive

mais l'enfantine admiration

qu'il courait à

portait à

qu'il

qu'approchait

la fenêtre aussitôt

l'heure où celui-ci passait devant la maison pour se rendre au théâtre il

le

avec une

contemplait avidement,

sorte de

terreur

:

religieuse, et

conservait précieusement son image au fond du cœur.

"Weber, qui exerçait de prime abord une

il

sur un en-

chef d'orchestre à l'Opéra de Dresde, où,

fant de neuf ans, était alors

depuis 1817,

telle influence

combattait pou-r

allemand contre

l'art

musique

la

ita-

lienne, ayant toute la cour contre lui et ne parvenant à faire exécuter le

dans

Freischiit^

le

tant succès à Berlin.

avec

la

charmante

et le caractère il

Weber,

à ce qu'il paraît, entrait volontiers causer

Geyer, dont

et intelligente M"""

douces manières

les

enjoué avaient un charme spécial pour les artistes, mais

ne fut jamais et d'aucune façon

mourut

dirigeait, qu'un an après son écla-

théâtre qu'il

le

Wagner

de

maître

:

en

effet,

il

Londres alors que Richard n'avait pas plus de treize ans et ne s'occupait nullement de musique; mais il avait éveillé son instinct musical, ainsi que Wagner se plaisait à le reconnaître. « Malgré une éducation scientifique sérieuse, écrit-il dans sa Lettre sur la musique à

en 1860, j'avais dès

ma

première

années de

personne

dans

que

me

mon cœur

de nouveau trouvée dans

la

theater de Leipzig. aller vivre

auprès

entrer au

collège

qu'il avait déjà

En

comme

1827, M"'"

d'elle

commencé

pour un bon élève de

«

l'exécution

mais on sa

lettres,

dehors des heures de classe,

de ses

fille,

iii

absorbé

trois

et sa

veuve

de ses enfants

Rosalie, en particulier avait

première amoureuse jeunes

enfants, et

»

au Stadt-

se décida à

Richard dut

ne l'admit qu'en troisième tandis

seconde à Dresde,

les

))

vite

Alors,

;

caractère et sa na-

Wagner, veuve Geyer,

avec ses plus

Nicolaî;

en

mort dans un pays

sa

d'enfant.

gène.

s'étaient tournés vers le théâtre, et sa

conclu un bel engagement

les

alors

mes premières impressions musicales

amassé par Geyer avait été

petit pécule

étroites,

tombe dans

dirigeait

Dresde,

une vraie fascination;

éloigné remplit de désolation

s'était

à

vie il

remplissaient d'enthousiasme, son

ture exerçaient sur moi

Le

de

;

j'habitais,

opéras. Je reçus de ce maître ses mélodies

de

Charles-Marie

ville

la

ma Weber

Cette partie

continuelles avec le théâtre.

dernières

jeunesse vécu en relations

litteris,

il

passait,

ayant traduit par

douze premiers chants

dit-il,

goût, en

de VOdyssée,


RICHARD \VA(iNKR et

ayant eu

1

honneur

ouvert pour déploier

même

,3

icm|)(>t ter le prix tlans un concoui^s poétique moit cfun de ses camarades: sa pièce avait

ilc

la

imprimée après qu'on en eut retiré beaucoup de pathos. -11 avait alors décidé dans sa petite tète qu'il serait poète et s'était mis à l'étude de Shakespeare afin d'arriver à le lire dans le texte orii^inal été

;

une facilité exceptionnelle pour les vers allemands, il comme avait entrepris une traduction métiique du monologue de Roméo, puis il

il

avait

avait fabriqué des tragédies

imitées

de l'antique dans

MAISON NATALE DE RICHARD WAGNEK,

celles d'Apel, puis

une autre

LEIPZIG.

A

inspirée par Hainlct et

plus de quarante individus mouraient coup

genre de

le

sur coup,

le si

Roi Lear, où bien qu il en

du ressusciter quelques-uns pour fournir au dénouement. L'humiliation qu'il éprouva à se voir classé en troisième à Leipzig dégoûta des études classiques et le rejeta du côté de la musique.

avait

le

Justement, cette année-là, Beethoven mourut phonies Matthaji,

aux concerts lui

causa

de sa nouvelle

:

la

Une

du Gcwandhaus, sous

et

nie de Beethoven, j'eus

un accès de

direction

la

plus , profonde impression. Visite à Beethoven,

l'audition de ses

«

Un

sym-

du célèbre

soir, dit le

héios

ayant entendu une symj)ho-

fièvre,

je

tombai malade,

et, aj^rès


RICHARD WAGNER

14

mon

rétablissement,

je

devins musicien.

a quelque analogie avec ce récit

près

celle

que

alors

par

Weber,

de

musique; ce je

que j'entendis parler de

fois

connaissance avec sa musique, attiré,

fis

de

suivit

Lettre sur la

sérieusement dans sa

plus

dit-il

première

fut la

C'est là du roman, mais l'histoire

La mort de Beetlioven

«

:

«

si je

c'est

lui,

et

puis

le dire,

nouvelle de sa mort. Ces impressions sérieuses développaient en

la

moi une inclination de plus en plus vive pour la musique. Ce ne fut que plus tard, cependant, lorsque déjà mes études m'avaient fait comprendre l'antiquité classique et inspiré quelques essais poétiques, que j'en vins à étudier la musique plus à fond. » Son projet, en cultivant la musique, était d'adjoindre à sa fameuse tragédie aux quarante-deux

une partition semblable à

victimes

diEgniont, qu'il venait d'entendre;

se figura qu'il lui suffirait d'étudier

il

l'harmonie huit jours pour composer une œuvre analogue et

dans la lecture du

Traité

d'iiarmouie de

un libraire ambulant; mais

avait

il

Logier,

beau

à se graver tout cela dans la tète. Alors,

faire,

un

résolution

sa

même un

comme un

air,

caprice

bon

Gottlieb

maître,

eut

cervelle

était

fort

à

faire

Mûller, avec

ne parvenait pas

d'avouer sa nou-

combattit d'abord

un sujet qui n'avait

passager chez

tard

bout de compo-

à

On

donna cependant

lui

organiste

Altenburg.

à

un élève épris d'Holfmann

point

troublée à ce

acheté à

venu

un quatuor.

plus

s'absorba

il

pas pu apprendre à jouer du piano, mais on

Celui-ci

il

qu'il avait

résolut

il

velle vocation à sa famille, aussit('it qu'il serait

ser quelque chose, une sonate,

celle

par tant d'inventions

dont

et

la

bizarres, qu'il

rêvait en plein jour et voyait apparaître la note fondamentale, la tierce et la

quinte avec lesquelles

il

avait des entretiens mystérieux'.

le

maître d'harmonie, ne voulant pas perdre

son élève en déclarant,

«

comme

avait

fait le

qu'on ne tirerait jamais rien de ce garçon-là Cette

écrivit

le

malgré

maintint

de

piano

royal,

avec lequel sa sœur Rosalie avait

sur

les rires

le

de l'orchestre

programme,

Le public

et la

tout surpris n y

fit

et

de Matthœi

et la ;

mit en répé-

bien plus,

bien qu'elle

il

la

exécuter entre deux actes d'une

distingua qu'un

roulement de tim-

bales qui revenait toutes les quatre mesures, obstinément, jusqu'à la si

:

».

mettre en rapport. Celui-ci accepta l'ouverture

titions,

pièce.

professeur

deux fuis répétée ne troubla nullement le visionbravement une ouverture et l'alla porter à Dorn,

chef d'orchestre du théâtre

pu

la fin,

prédiction

qui

naire,

A

son tour, planta

la tête à

demeura célèbre, après une seule

audition, sous

le

fin,

nom

I. Ces lectures, toutefois, ne furent pas perdues, car les Frères de Sérapioii contiennent un récit du tournoi poétique de la Wartbourg et quelques germes des Maîtres chanle::rs se trouvent dans un autre conte d'Hoffmann Maître Martin, le tonnelier de Xurembenr. :


KICIIAKI) \va(;n'i;r

aux

d'Oiii'ciitirc

timbales.

ma

point culminant de

le

,5

Cette ouverture, écrit Wagner, était bien

«

Pour en

lolic.

eu ridée d'écrire avec trois encres différentes les cuivres en vert et les bois en noir.

que

sonate de Pleyel.

X

se

la

me

coup,

TEurope

cordes en était

rouL'^e,

compliqué

si

semble, à côté, une

eût

homme

le

trône de

et particulièrement

en Saxe,

une constitution à ses

Wagner,

voici révolutionnaire, écrit

que tout

en

révolution qui renversait en France

sentir dans toute

roi se vit contraint d'octroyer

le

sion

fit

les

:

tissu

»

Le contre-coup de Charles

Le

Neupième Symphonie de Beethoven

la

lintelligence, j'avais

faciliter

sujets. «

parvenu à

et

Du

conclu-

la

tant soit peu ambitieux ne devait s'occuper exclu-

me

compagnie d'écrivains politiques; j'entrepris aussi une ouverture sur un thème politique. C'est dans ces circonstances que je quittai le collège pour entrer à l'Université, non plus pour me vouer à une étude de faculté (car on me destinait encore à la musique), mais pour suivre les cours d'esthétique et de philosophie. Je profitai aussi peu que possible de cette occasion de m'instruire; en revanche, je m'abandonnai à tous les écarts

sivement que de politique. Je ne

de

\\c d'étudiant, et je le

la

peu de retenue que

fis,

plaisais plus qu'en

à vrai dire, avec tant d'étourdcrie et

bientôt dégoûté

j'en fus

la

'.

»

Ce révolutionnaire

si

et ce

viveur n'avait pas plus de dix-sept ans.

Lorsque Wagner eut assez goûté des

plaisirs,

temps pour lui de se livrer à l'étude régulière et Il avait précédemment quitté l'école Xicolaï pour

il

comprit

qu'il était

suivie de la musique. l'école

Thomas où

ses

études philologiques n'avaient pas marché beaucoup plus vite; en i83o

Leipzig

entra à l'Université de

la

étudiant en philosophie

et en

bonheur de rencontrer un excellent professeur personne de Théodore Weinlig, cantor à l'église Saint-Thomas.

esthétique

en

comme

il

il

;

eut alors

le

Cet admirable musicien sut tout de suite gagner

garçon

et

le

mit dans

le

reconnaissant, car tout à

droit chemin, ce dont la

fin

de sa vie

il

la

confiance du jeune

Wagner

disait

lui fut

toujours

encore à ses amis

:

méthode spéciale, mais c'était un esprit clair et pratique. On ne peut pas, à proprement parler, enseigner la composion peut montrer comment la musique est graduellement arrivée tion à être ce qu'elle est et guider ainsi le jugement d'un jeune homme, a

Weinlig

n'avait pas de

;

mais

c'est là

de

la critique

historique qui ne peut pas avoir de résultats

Tout ce qu'on peut faire est d'indiquer un modèle à suivre travail, c|uelqucs morceaux particuliers, donner un devoir dans ce

pratiques.

dans

le

sens et corrioer ensuite I.

.\utohiogrj\.^]iic, irailuiLc

Charpciilicr,

i{)!S4.

la

besogne de

par M.

«-^aiuillo

l'élève

Bcnoii dans

les

:

ainsi

fit

^^'einIioavec moi...

Souvenirs Je R. W'agi.cr.

Un

vol. in-iS,


RICHARD WAGNER

,6

examen

véritable leçon consistait dans son

La que

j'avais

écrit

avec une bonté

:

infinie,

passages défectueux et m'expliquait paraissaient désirables

pas à trouver

le

doigt

le

sur les

pourquoi des changements qui

satisfaire.

le

mettait

il

rapidement où

vis

je

;

moyen de

le

patient et attentif de ce

tendait et

il

me renvoya

Il

ne tardai

je

me

en

lui

disant

:

Vous avez appris à vous tenir sur vos propres jambes, allez'. » C'est Weinlig et non pas Weber, comme on Ta trop souvent répété,

«

qui

Wagner

un jour à

dit

jamais de fugue à écrire

«

:

diait au bout de

le

vous n'aurez

à ce prix-là vous

:

reste vous sera facile.

»

Il

direction de Weinlig, que celui-ci le

la

mois

six

que

probable

est

mais sachez en écrire une

;

acquerrez l'indépendance et tout avec tant d'ardeur sous

Il

avait appris, grâce à

il

:

lui,

travailla

congé-

à connaître

admirer profondément Mozart; mais Beethoven avec ses symphonies,

et à

surtout

la

d'études,

il

neuvième

composa

,

était

toujours

maison Breitkopf

même

:

Après

dieu.

cette

période

d'abord une polonaise et une

l'honneur d'être

éditées par

la

célèbre

Ha;rtel, puis une ouverture de concert avec fugue,

et

une autre encore,

morceaux

différents

sonate pour piano qui eurent

son

et surtout

une symphonie en

cjuatre parties

lui-

avouait s'être beaucoup inspiré de Beethoven, et de certains mor-

ceaux de Mozart. Dorn, écrivant plus tard à

la

Nouvelle Ga{ette de

amusant cet enthousiasme de Wagner pour Beethoven « Je doute, dit-il, que jamais jeune musicien ait vécu dans une intimité plus étroite avec Beethoven que Wagner à dix-sept ans. Il avait copié de sa main les ouvertures et les grandes il dormait avec les quatuors compositions instrumentales du maître musique de Schumann, a noté d'un

trait

:

;

sous son oreiller,

chantait les lieder et

il

sifflait

talent de pianiste ne fut jamais bien brillant «

fureur teutonique

«

qui, jointe

activité d'esprit, promettait de

Pendant tique: et

il

l'été

de

alla visiter

i8'32,

donner de riches

la ville

Beethoven avaient vécu, mais

dant à Vienne que refrains de s'enfuit au j^lus vite et repassa et succès.

En

allant à Vienne,

place et s'était 1.

muni des

il

bref,

il

possédé d'une

était

une bonne éducation,

à

Wagner

d'abord

;

concertos, car son

les

fruits-.

une

à

rare

»

accomplit un double pèlerinage artismusicale par excellence, celle où Mozart il

fut

Zampa

terriblement dé^u et pots-pourris

sur

en

n'enten-

Zampa

par Prague, où Mozart avait trouvé

;

il

joie

espérait sans doute y découvrir une petite

partitions de sa

symphonie

et

Entretien particulier avec M. Dannrcutlier, rapporte par celui-ci dans art. ^^'a^nel.

le

de son ouverture; Dictionnaire de musique

de Grovc,

2. Dans le courant de l'année i83o, il fit une transcription pour piano de la Neuvième Symphonie de Beethoven, qu'il olVrit à la maison Schott, par lettre du G octobre, et en i83i, se sentant sur de lui pour pareille besopne, il écrivit une lettre très inodcste au bureau de musique (maison Petcrs), où il faisait des offres de service en qualitJ de correcteur d'épreuves et d'arranpcur c'est le métier qu'il :

fera plus tard k l'aris.


RICHARD \VA(;NKR fut plus hcLircLix

il

l^ragiic,

à

Dionys Weber, qui dirigeait

connaissance avec

lia

il

Conservatoire et qui

le

d'entendre enfin sa symphonie à Torchestre.

plaisir

Wagner

succès avait engagé

même

à tàter de la

et, sitôt

de retour à Leipzig,

un septuor, que son maître Weinlig approuvait ayant trouvé

détestable,

le livret

déchira

il

occasion d'aborder l'opéra. Cependant

il

;

le

:

à

petit

Prague intitulé

premier morceau,

tout et attendit une autre

le

donné son ouverture

avait

le

mais sa sœur Rosalie

symphonie aux directeurs des concerts du Gewandhaus, du comité,

savant

procura

lui

tli^amatique,

en avait écrit

il

le

Ce premier

musique théâtrale

composé un poème effroyablement

avait

il

Noce ;

la

oîi

,7

et sa

et le président

conseiller aulique Frédéric Rochlitz, lui avait écrit de

le

le

Mais vous êtes un tout jeune homme, s'écria-t-il en le voyant entrer, je m'attendais à voir un homme âgé, à en juger par » 11 lui proposa alors de faire essayer sa l'expérience du compositeur symphonie par une société nouvelle Eiiîerpc, le jour de Noël i832, venir voir

«

:

!

:

ne

et cet essai

dans

Journal du

le

Henri Laube, avait

satisfit

et

Thonncur

3o

Monde

quinze

mais

;

eut la chance d'être loué,

il

élégant, par un littérateur assez bien posé,

jours après, le 8 janvier

d'être exécutée au

guste Pohlentz

i833, sa symphonie

Gewandhaus sous

la direction

d'Au-

son ouverture y fut également jouée au concert du Ces deux productions reçurent un assez bon accueil et posèrent

avril.

Wagner

guère l'auteur

:

à Leipzig, surtout

grâce

garçon mais cerveau brûlé, qui de

sur ce musicien

première ceuvre

et

vingt ans. l'article

à

l'appui

n'était

Laube, excellent

d'Henri

pas sans exercer grande influence

symphonie

Cette

de Laube était

le

réellement

était

premier

qu'on

sa

sur

fit

lui'.

Wagner

a raconté

gaiement ces souvenirs lorsque, cinquante ans plus

tard, étant à Venise avec sa famille,

tenaire de ses

femme

et à

ajoute-t-il

débuts

comme

son beau-père

en

«

eut l'idée de célébrer le cinquan-

il

compositeur, en

entendre à

faisant

cette production de jeunesse

aux professeurs

riant. L'exécution, confiée

lycée San Marcello, eut lieu à la

Noël

l'anniversaire de naissance de

Wagner,

M""-'

un intéressant retour sur lui-même.

Il

de

1882, et

reconnaît

surannée et

sa »,

aux élèves du

pour célébrer aussi

provoqua chez l'auteur

que cette

symphonie

découlait tout droit de Beethoven, que l'andante, en particulier, n'aurait

jamais vu l'allégretto

le

jour sans l'andante de la

de

la

symphonie en

la,

symphonie en

puis

il

ut

majeur

continue ainsi

:

«

et

sans

Si l'œuvre

les Souvenirs de R. Wagner. En iS34-J'5, dans nnc visite à Lcipzii; Mcndeissohn, alors chef d'orcliestre des concerts du Gewandhaus, sinon de lire, au moins de garder cette symphonie et jamais Mendelssohn ne lui en reparla. Cet ouvrage aurait été de la sorte entièrement perdu si l'on n'avait un beau jour retrouvé les parties séparées dans une vieille valise oubliée à Dresde par Richard Wagner au moment de sa fuite en 1840. I

il

.

Histoire d'une syinplionie, Jans

avait prié


RICHARD WAGNER

i8

marque de Richard Wagner,

portait la

dans cette confiance illimitée douter de rien...

ma me

seulement de dans de

suite,

la

deuxième

sa

(qualité

qui,

un musicien que

complètement

alors

j'étais

avec

familiarisé

œuvres

toutes

maître n'avait nulle idée ou tout au moins n'avait qu'une idée

le

vague

fort

pas

tirais

tout en m'arrêtant au point de vue de

effet,

symphonie,

contrapuntiste

avec celles en ut mineur et en la majeur,

l'Héroïque,

dont

En

la

mais aussi d'un grand avantage

Strauss),

Beethoven.

l'empêchait de

ne

je

que toute autre par

fut contestée plus

Munich,

cour à

la

j'avais sur

comme

de main

sûreté

trouverait-on

la

cette époque,

moi-même,

en

Cette confiance

au plus

tout

dès

qui,

deuxième symphonie.

sa

écrivit

lorsqu'il

Ainsi s'explique

»

à ses yeux, et sans vanité, la flatteuse exclamation de Rochlitz.

Cependant, de

polonaise, que

révolution

la

qui

Albert,

frère

en refusait

il

:

une

avait

lui

jolie

et

à

même

un sur Kosciuszko,

offrait

son ami Henri Laube. Son

de ténor,

voix

chanteur et régisseur au théâtre de Wi^irzbourg toute une année auprès de lui

poème

théâtre et cherchait un

toujours au

visait

il

mettre en musique

Richard

;

héros

alors acteur,

était

accepta volontiers

le

alla

passer

place de chef

la

des chœurs, moyennant dix florins par mois. L'expérience de son frère

en matière théâtrale

fut

lui

d'une réelle

exécuta plusieurs de ses morceaux

et,

utilité

la

;

comme

Société de musique

son poste était fort peu

temps de composer là son premier grand opéra. Cet opéra des Fées était tiré dune fable de Gozzi, intitulée absorbant,

Femme

la

serpent

veut, pour

succombe statue

et

dans

il

:

le

s'agit

d'une fée qui s'est éprise d'un mortel

Ainsi

il

lui

mais

renoncer à l'immortalité;

en

elle,

cruelle

si

bonheur, l'amant devra, dans la pièce,

rend

la

Wagner, dès

la

qu'elle

époque, avait

cette

;

baiser l'immonde animal; dans

fable,

par l'ardeur

vie

se

et

la

des

les

deux drames, en

faits,

condition

mais sur

la

la

Marschner on en Wûrzbourg, en 1834, :

triple

I.

RicluirJ

Wagner

avait et

il

la

musique,

Un

deLohengrin;

vol. in-i.S,

elle

de Beethoven, de

essayé plusieurs

comme une reflétait,

Wcbcr

le

finale

du second acte

chez l'isclibachcr, iSS5.

et

fragments en famille,

semblait à l'auteur qu'il y avait

d'après lui-mcmc\ par M. G. Noulflai'il, d'aprù-s

de M. Glasenapp.

sujet

confiance absolue reposant non sur

influence

de parties satisfaisantes et que

U'irlicn,

le

ses chants.

hanté par ce mythe

persuasion intérieure, est présentée

de l'amour'. Pour

nécessaire

son propre aveu,

effet, la

beauté de

l'esprit

éternel de Psyché qui devait plus tard lui fournir

dans

et

il faut que son amant montre à son égard il la fée est changée en crapaud dans le conte de Gozzi, en l'opéra de Wagner. Pour la reconquérir et retrouver le

lui,

confiance

ait

eut tout

il

de

de à

beaucoup

était spéciale-

Richard W'agiicr's Icbcn

iind


,

RICHARD WAGNER ment destiné à produire répreuve. Dès son retour

un

grand

à Dresde,

il

elFet

,g

mais

;

ne put

il

avait bien proposé cet

en

faire

ouvrage au

directeur Ringelhardt, qui l'avait accepté;

le journal de son ami Laube annoncé qu'aussitôt après le Bal masque, d'Auber, on jouerait le premier opéra d'un jeune compositeur appelé Richard Wagner mais quand le Bal masqué fut à bout de succès, le directeur, sans plus songer aux Fées, monta / Capuletti e Montecchi, de Bellini.

avait bien

;

Wagner

Si

ailleurs,

ne

put jamais faire

qu'on

c'est

n'avait

exécuter cet opéra à Leipzig,

d'oreilles,

que

alors,

pour

ni

musique

la

étrangère, pour les opéras français et italiens, au grand détriment des

productions alleniandcs

Muette de Portici moins à cause de

la

Wagner

:

tout le premier

musique,

il

que pour

est vrai,

par

était captivé

pour / Capuletti

passionnait

se

et

la

Montecchi

e

pathétique et

le jeu

Schrœder-Devrient, qui vint chanter à Dresde au printemps de 1S34. Il vit alors pour la première fois cette artiste incompasuperbe de

M""-'

rable qui devait exercer sur

une

lui

de cette intime union de

l'idée

la

tendit bientôt de tous ses efforts.

l'exemple de

produisit sur la

on représenta que

l'avait

constant

devant

la

extrêmement profonde

Rellini, fut

Muette

la

Wagner

à Leipzig,

suggérer

lui

à laquelle

de sa vie

fin

chaque

idéal, et,

il

fois

mais quand ensuite

;

fut

pauvreté de

la

tout

surpris de voir

scènes saisissantes et l'action rapide de cet opéra produisaient

les

grand

effet et tenaient le public haletant

ligne,

comme

Schrœder-Devrient.

la

sans l'aide d'une artiste hors

Cela

le

fit

réfléchir

:

certes, la

musique héroïque de Beethoven demeurait toujours l'idéal à ses yeux mais avait-il chance de produire quelque chose de pareil sur le théâtre

Au

ainsi

au succès immédiat

?

palpable

et

donc pour réussir

pas plus vite

n'arriverait-il

et

après

lequel

il

courait

?

Que

Imaginer d'abord un scénario d'action vive animée, écrire ensuite une musique facile à chanter et qui fût de

fallait-il

nature à saisir Il

et

se

femme

il

était

sentait le

mysticisme abstrait de la

?

du public. Vite,

l'oreille

avait vingt ans,

du monde et

;

contraire, ne pouvait-il pas s'inspirer à la fois d'Auber et de Bellini,

pour combiner leurs différents mérites,

et

:

yeux. L'impression qu'elle

les

jeune admirateur de Beethoven, malgré

le

musique de

il

encore à

disait

le

Il

Dcvrient avait été son

la

concevait un rôle,

qu'il

très grande influence et musique avec le drame

qu'il

la

dans

se mit au travail.

il

les dispositions

première jeunesse,

entreprit

de chanter

c'est la

lorsqu'il

plus

les

au corps. Aussi,

diable

joyeuses

rompant avec

le

beauté matérielle

conçut

son

second

opéra, Défense d'aimer, pendant un séjour de vacances à Tœplitz, en

Bohême.

emprunté le sujet de Shakespeare, Mesure pour mesure mais Il

avait

;

cet il

ouvrage

à

la

pièce

de

en avait totalement changé


RICHARD WAGNER

20 le

caractère, en ne songeant

l'amour sensuel.

à glorifier

bafouer

qu'à

le

puritanisme hypocrite et

Cette pièce, d'une intrigue

assez

vive et

hardie, où se donnent librement cours toutes les passions juvéniles qui

fermentaient dans ce corps et ce cœur de vingt ans, a cela de parti-

forme une antithèse absolue avec

culier qu'elle

Wagner

par

d'aimer, évoluer.

fixent

ses

deux premiers opéras,

déjà

les

deux

Comme

il

les

son

tendances

si

ces deux drames arriveront à se fondre dans

par

Fées

les

lesquels

entre

lui-même,

noté

l'a

pôles

précédent sujet traité

le

c][ue

et

Défense

et

génie

contraires de

Tannhœuser

entend

il

:

de sacrifice et de renoncement qui triomphe dans

là l'idée

allait

le

Vais-

seau faiilânie, dans Lohengriti, dans Parsifal, et l'indomptable appétit

Walk) vie et dans Tristan. Wagner, pour subvenir aux Richard

de jouissance physique qui prévaut dans

Pendant l'automne de 1834, besoins de l'existence, accepta

la

la

place de directeur de la

musique au

Magdebourg. Il commençait donc à vivre de son art, et son nouveau métier lui plut beaucoup dans les premiers temps le monde des théâtre de

;

coulisses, les rapports fréquents avec les

chanteurs

et surtout avec les

chanteuses n'étaient pas pour déplaire à quelqu'un de son âge et de

tempérament.

son

s'acquittait

Il

pendant plus d'un an chef

d'orchestre

et

de sa tâche à souhait, et

d'ailleurs

Magdebourg, de son mieux pour que

qu'il resta à fit

il

devint un e.xcellent théâtre

le

prospérât.

Le directeur, par exemple, ayant décidé de monter Lestocq, d'Auber, il ne changea pas d'avis que Wagner trouvait du reste charmant, celui-ci se donna beaucoup de mal pour faire réussir jusqu'à la fin,

cet

ouvrage

bataillon

:

il

renforça, par plusieurs choristes

qui

russe

soutenir

vient

inusité de chanteurs,

la

révolte,

grâce à ce nombre

et,

quelc^ues soirées au moins, attira la foule au théâtre tout.

Wagner

de

continuait

composer

charge et de distractions de toutes direction son ouverture

sortes.

un morceau pour célébrer le

milieu Il

et puis ce fut

;

devoirs de sa

des

faisait

exécuter sous sa

des Fées et une autre qu'il venait d'écrire

i835 sur un drame d'Apel, Christophe

ment

au

le

jour

Colomb;

il

composait à

la

en

volée

de l'An i835, en reprenant simple-

thème de l'andante de son unique symphonie, puis

chansons pour une farce fantastique intitulée l'Esprit de et la faveur qu'il obtenait

le

de sonorité qui, pendant

obtint un grand effet

il

dans l'armée,

pris

avec de telles productions

le

la

bâclait des

montagne,

confirmait dans

l'idée qu'il n'était

nullement besoin de se montrer bien scrupuleux pour

forcer le succès

combien

:

encore aujourd'hui de Il

achevait

aussi

se proposant toujours

de compositeurs, des mieux

même de

et

ne changeront jamais de visée

mettre en

musique

la

pensent

assis,

Défense

I

d'aimer,

Auber comme modèle, en rêvant toujours de

en la


RICHARD Schrœdcr-Dcvricnt

\VA(;N1:R

vù\c pi-incipal

limir le

de faire accepter cet opéra par

:

21

avait eu d'abord l"cspoii-

il

dédomma-

directeur de Leipzig-, en

le

gement des J'\'cs, mais la démarche avait été inutile et il s"était rabattu sur Magdebourg. Le théâtre de cette ville était alors dirigé par un nommé Bethmann, toujours à deux doigts de la faillite, malgré une par

petite subvention fournie

de disparaître la

cour de Saxe, et qui avait l'habitude

la

de paiement. La troupe était dans

les jours

situation

la

plus précaire au printemps de i836 et déjà les acteurs lâchaient pied

pour

chercher fortune ailleurs;

aller

pour devancer pour

bénéfice

Wagner

pour

à rester par égard

cependant, consentaient

certains,

une représentation à son

avait bien droit à

la

faillite.

le

dédommager des

Il

surhumains

et celui-ci faisait des efforts

frais

d'une tournée

qu'il avait

faite.

Tannée précédente, de recruter de nouveaux chanteurs; mais le directeur ayant déboursé quelque argent pour la mise en scène, il fut convenu que ce dernier aurait pour lui toute la recette de la première afin

représentation et

Wagner

que douze jours avant

toute

la clôture.

celle

Ce

de

la

n'étaient

seconde.

que

n'y avait plus

Il

répétitions au théâtre,

répétitions chez les artistes; toute la ville était en émoi,

nul ne savait son rôle et les ensembles allaient répétition générale, cela sait,

et

pour tout

criait

Wagner monde

à le

A

de travers.

tout

marcha presque, grâce

chantait

gesticulait,

cependant

et

la

qui condui-

mais à

;

la

représentation (29 mars i836) qui avait attiré grande aftluence, et qui

rapporta gros au directeur, ce fut une confusion épouvantable

absolument,

sonne,

musicien

dont

poète

pièce

la

put

n'y

croyait

qui

avoir

libre

si

distinguer

rien fait

aurait

très

tant

et

bien pu être

en avait pu percevoir tous

pour

le

mieux pour

le

par

le

Rien que

le

tant

c'était

:

un bel ouvrage

et per-

pis

arrêtée

commissaire,

s'il

premier

Défense d'aimer, avait déjà paru trop libre à ce fonction-

titre.

naire pour que la pièce pût être jouée pendant n'avait

autorisé la

détails.

les

Semaine

la

sainte et

représentation qu'en exigeant un autre intitulé

:

il

la

Novice de Païenne, et sur l'assurance réitérée de "Wagner que le sujet en était emprunté à un « drame très sérieux » de Shakespeare.

O

roueries des auteurs

!

ô naïveté des censeurs

La seconde représentation de la la

théâtrale et "Wagner,

saison recette,

surprise

en

avait

fait

hausser

constatant,

qu'il

n'y

avait

dans

mari

et

femme,

et

croît

de malheur, dans

la

un

la

juif là

allait

clore

encaisser

toute

prix des places. Quelle ne tut pas sa

c^uelques salle

Novice de Palernie devait à son tour

qui

le

!

que

minutes avant trois

polonais coulisse,

personnes

en costume

au

môme

lever

le :

ses

de

instant,

du

rideau,

propriétaires,

gala! le

première chanteuse tombait à bras raccourcis d'abord sur

Par

sur-

mari de le

la

second


RICHARD WAGNER

22

mieux apparier,

Le rideau

que,

ne

qu'il a

et

cb coups, pour

bien

si

d'empêchements imprévus,

suite

les

en public.

paraître

annonça solennellement aux

régisseur

le

par

pouvait

trois

représen-

la

Wagner, par le récit plein dhumour représentation manquée et de l'odyssée antérieure

avoir

de cette

fait

rouait

les

et

eussent été incapables de

qu'ils

leva

se

spectateurs tation

femme,

sur sa

puis

ténor,

lieu.

de la Novice de Païenne,

montre que ces contre-temps n'avaient pas

moins du monde ébranlé sa confiance de débutant. Il n'avait pas été, d'ailleurs, trop mal jugé. Le journal de Magdebourg, tout en le

apportée aux

déplorant

la

exécution

brusquée où

que

estimait ville

hàtc

importante

plus

chance de réussir ce

l'écrivain

;

musique

et

plus

:

de

plaît,

souvent chez

que cela

c'est

comme

vraie mélodie,

la

final

nos compositeurs.

»

:

une

pas leurs rôles,

son opéra dans une

faire jouer

y a beaucoup de qualités

11

me

qui

résultat

le

même

dans des conditions plus favorables,

et «

et

ne savaient

compositeur arrivait à

le

si

répétitions

les acteurs

vibre

;

avait

il

dedans, disait

c'est

de

la vraie

on en désirerait trouver plus

En

d'autres termes,

Wagner

avait tellement subi l'influence des musiciens français et italiens, sur-

tout d'Auber et de Bellini, qu'il n'avait presque plus rien d'allemand

doute ce qui

c'est là sans

Sur

le

faisait accueillir

moment, Richard Wagner,

le

à son opéra, revint à l'assaut 11

cette

ville,

de débuter

c'était

et qu'afin

pour

toujours

de

le

avec faveur dans son pays.

donnée Novice de Païenne

tout fier de l'approbation

jouer la

faire

avec agrément que

raconte

à Leipzig.

:

Ringelhardt,

mieux séduire

,

directeur du théâtre de

le

— il

avait

lui

fit

une

en âge

fille

valoir quel avan-

y aurait pour sa fille à faire son apparition dans un joli rôle de jeune personne et dans un opéra nouveau. Le directeur, par mal-

tage

il

duper que le commissaire de Magdeeut parcouru la pièce, il répondit sévèrement à

heur, n'était pas aussi

bourg,

dès

et,

l'auteur

:

son autorité

comme ma

;

si

le

à

magistrat de Leipzig autoriserait

semblable ouvrage

d'un

sentation

qu'il

Je ne sais

«

facile

et

j'en

la

repré-

doute fort par respect pour

mais, en tout cas, apprenez, monsieur, qu'une personne

fille

ne saurait y figurer.

»

Wagner

battit

en retraite devant

ce père chatouilleux et s'en fut présenter son ouvrage à Berlin, non pas à l'Opéra fut très

à Berlin

royal,

mais au théâtre plus modeste de

Feniand Corte^.

Il

fut très

maître obtenait en accusant très fort

pondre

Résidence, où

il

aimablement reçu, sans rien obtenir. C'est dans ce court voyage qu'il vit pour la première fois Spontini dirigeant une repré-

sentation de

mais

la

les

évolutions

surtout

la

sur

partition

la

le

frappé de

rythme

et

reff"et

que

le

vieux

en y faisant corres-

scène avec une précision mathématique

de Fer)iand CortCy

produisit

sur

lui

;

une


.

Kl

c; Il

WAONKK

A Kl)

imiiression profonde et nui se retrouva

quand

il

23

vivace deux ans

très

]")lus

et

Donc la Novice de Paleiine était repoussée à droite et à Wayncr, qui n'avait que des dettes en ijuittant Magdcbourg

le

de toute sa

refrain

vie,

une place

sollicitait

ancien ami Dorn, devenu cantor et directeur de la

Mais Wagner

petite ville russe de Riga.

demandait aussi un emploi pour sa fiancée, Planer, dont

il

épris à

s'était

longue échéance.

En

attendant et

première amoureuse

de devenir chef d'orchestre,

l'intention

théâtre.

11

obtint enfin

Minna Planer dans une

le

24 novembre i836

amis;

lettre à ses

et

domestit]uc pour laquelle

tombai dans

je

d'individus.

la

je

je

et

pas voulu

n'avait

qu'il

engagée en qualité de dans cette ville avec

et

il

y organisa des concerts au sitôt

et,

nommé,

amoureux,

ne possédais pas

misère dont

les

dit-il

plus tard je

ennuis de

rendis la

vie

nécessaire. C'est ainsi

le

effets

les

épousait

il

mariai par obstination et

tourmenté par

autrui,

il

la suivit

J'étais

«

:

me

fut

auprès de son

comédienne Wilhelmine

elle était il

'

avait conclu des fiançailles à

il

poste qu'il désirait

le

malheureux moi-même que

comme

Kœnigsberg,

à

»

— ce

pas seul à caser;

n'était

Magdebourg,

gauciie

musique religieuse dans

la

la jolie

épouser faute d'argent, mais avec laquelle

f(

lard

entreprit la composition de Rien^i

tuent tant

de

milliers

»

année à Kœnisberg, en proie à mille soucis, malheureux, tourmenté, tourmentant les autres, n'écrivant que deux ouvertures une sur Rule Britannia, une autre intitulée Polonia, ne resta pas

11

plus d'une

:

puis

femme au lui la

Riga, où Dorn avait pu obtenir un emploi pour sa

alla s'établir à

il

théâtre, un autre pour sa belle-sœur Thérèse Planer, et pour

place de premier directeur de

la

musique.

11

fut

d'abord ravi d'un

poste beaucoup plus avantageux que ceu.x qu'il avait occupés jusque-là;

donna dix concerts dans lesquels ouverture de. Christophe Colomb

il

fit

et celle sur

Rule Britannia;

aussi plusieurs airs avec vocalises et choisissait la

sentée à son bénéfice

le 11

fonctions en grippe, en

le dit

lui-même,

il

ne

Norma

il

écrivait

pour être repré-

décembre iSSy', puis, tout à coup, il prit ses temps qu'il sentait s'éveiller les premiers

même

scrupules de sa conscience d'artiste. il

il

exécuter, non sans succès, son

s'était

En

écrivant ses précédents ouvrages,

pas montré très scrupuleux sur

le

choix des

une mclodic religieuse de Li Sovicc de J'jlcnnc pour exprimer, dans recueillement des pèlerins admis auprès du Saint-Père; c'est la mélodie que répètent alternativement les instruments à vent et à cordes dans l'introduction du 3° acte. 2. Son admiration pour Bcllini, arrivée au plus haut point, s'épanchait dans un article qu'il publiait dans le Spectateur de Riya, du 7/10 décembre 1837. « Le chant, le chant et encore le chant, ô Allemands! Le chant est le langage par lequel l'homme doit se communiquer musicalement, et on ne vous comprendra pas si ce larTgagc n'est pas formé et conservé aussi indépendant que toute autre langue cultivée doit l'être, l.e reste, ce qui est mauvais en liellini, chacun de vos maîtres d'école de village peut le faire mieux; cela est connu, il est donc tout à fait hors de propos de se moquer de ces défauts. Si Uellini avait fait son apprentissage chez un maitre d'école de village allemand, il I.

11

utilisci'ci

pkis

tard

Tjniihii'iiscr, le respect et le


RICHARD WAGNER

24

employer pour emporter le succès; mais voilà-t-il pas qu'un beau jour, en voulant composer la partition d'un opéra-comique en deux actes, r Heureuse Famille d'ours, arrangé d'après un conte des Mille et une

moyens

Nuits,

à

morceaux

s'arrête avec dégoût, relit ses

il

tout simplement de la musique à la

en horreur

Adam. A

et s'aperçoit qu'il

dater de ce jour,

il

prend

position de chef d'orchestre dans une ville de province, en

la

d'un public impropre à juger toute œuvre nouvelle parce

face

fait

qu'il

a

perdu sa clairvoyance en n'entendant jouer que des ouvrages à réputation déjà faite et, dès lors, pour se mettre en garde contre une défaillance qui

main,

il

puisse monter sur un petit théâtre. Et

le

Paris que viennent alors

tourne

tous

yeux vers Paris

les

Du temps

de gagner avec

venait

d'aller tenter fortune

les

les

il

que, besogneux et misérable,

et

Huguenots,

Paris.

à

de

c'est

brCde d'y venir débuter.

et

Kœnisberg

était à

qu'il

puisque

opéras applaudis en Allemagne,

voyait danser devant ses yeux les 3oo,ooo

il

a sous la

qu'il

décide d'entreprendre un ouvrage de proportions trop vastes

qu'on

]30ur

moyens d'exécution

pousserait à user des

le

11

il

avait

que Meyerbeer, disait-on, avait été pris du désir fou

fr.

justement cru trouver un bon

Grande Fiancée, en avait aussitôt tracé le plan et l'avait envoyé à Scribe, espérant que il celui-ci n'aurait rien de plus pressé que d'écrire le poème et de le faire dans une nouvelle de Henri Kcenig

sujet d'opéra

accepter à l'Opéra; naturellement, Scribe; aussi, quand en lisant

le

la

:

ne reçut jamais de

il

Rien{i, de Buhver,

y crut découvrir se garda bien de renouveil

un sujet d'opéra préférable au précédent, il ler pareille tentative. Il entreprit de faire tout lui-même, partition

C'est pendant l'été

et

la

le

poème de Rien{i

par

en

'.

coup

un

rentrant

et

d'éclat

à

Riga,

il

nouvelles de

de

i838

et le

commença

qu'il

y mit. d'autant plus de feu qu'il voulait sortir

ennuis

d'une

vacances

finies,

des les

existence alla

il

se

précaire;

assez

loger à

hors des remparts, pour mieux rompre avec les mesquineries de théâtrale

et

se

poème

à écrire

mieux consacrer à

une heureuse coïncidence,

eut

il

la

composition de

alors à faire

étudier

l'écart, la

vie

son opéra; par le

Joseph,

de

aurait sans domc appris à faire mieux; mais il est bien à craindre, en même temps, qu'il n'eut désappris son chant. » Lire l'article entier traduit dans la Revue wagnérieiiite, de Paris (fe'vricr nSSG). On peut rappeler à ce propos la fine boutade de Rossini, qui disait à Bellini lui-même « 11 est bien heureux, Vincenzo caro, que tu ne saches pas la musique; car, si tu la savais, tu en ferais de bien :

mauvaise. » I. Plus tard, quand

il

fut

maître de chapelle à Dresde avec Reissiger,

comme

celui-ci

attribuait

musique à la pauvreté des livrets qu'ij avait eus, Wagner s'offrit à lui rimer son ancien scénario de la Grande Fiancée; mais Reissiger ayant trouvé scabreux démettre en musique un poème auquel Richard Wagner avait renoncé, ce fut Kiltl, directeur du Conservatoire de Prague, l'insuccès

de sa

qui en hérita par

la suite, et

son opéra fut représenté à Prague,

liianca e Giuseppe ou les Français à Nice le

joua à Francfort en 1S73.

:

il

le

eut du succès, car on

19 février le

1848, sous

le titre

de

reprit en 1868 et 1870, et on


RICHARD WACiNRR Méhul, qui éleva

pensées,

ses

et

dit-il,

25

l'aida à se corriger

des erre-

ments passés. Ce n'est pas qu'en entreprenant Rien{i il songeât le moins du monde à s'écarter des formes usuelles de l'opéra, mais en écrivant le poème il s'était efforcé de ne pas le faire aussi banal que

les livrets habituels,

une œuvre grande,

avait fait jusqu'à ce jour.

singulier

il

voyait

il

bien son sujet qui

tout

l'hiver,

yeux

:

d'ardeur au

Plein si

il

le

liait

il

le

seule forme qui tlottàt

composa d'arrache-pied pendant

printemps de

1S39

avait

il

au théâtre de Riga,

comme

et

tout

terminé

les

expirait

l'engage-

moment même

premiers actes de Rien^i. Mais à ce

ment qui

la

son opéra,

mais ce sujet,

du grand opéra.

celle

travail,

qu'au

bien

de

parties

les

déterminait lui-même inconsciemment, d'après alors devant ses

comme une

était alors

guidait de préférence,

le

état

ne voyait exactement que

et

dans toutes

qu'il

lui-même en quel

grand opéra

le

composer

voulait

il

en un mot, de ce

a très bien expliqué

11

pouvait embrasser;

ce qu'elle

musique,

la

contraire,

le

comment

se trouvait,

lunette à travers laquelle

c'était

quant à

et,

forte, élevée,

il

deux

tout à fait

était

dégoûté de courir ainsi de ville en ville en qualité de chef d'orchestre,

comme du

d'autre part

théâtre

à

un

le

simple

d'argent, retourna à

ténor,

il

Kœnigsberg,

oîi

dettes, puis décida sa naissait

ce

absolument

pouvait

être

Karl de

poète

femme

allait

n'hésita

pas.

il

fit

le

à partir avec lui

personne.

avant peu

Holtei

la

Mais

la

11

grand

de Sc/iull^e

et Millier

à l'Anneau Ju Nibelun^,

iStii.

un

peu

de payer ses

effort

LE SOMMEIL DE BRUNEHILD Tiiii

réunit

l'inconnu,

gl(.>ire

direction

la

pour Paris où

c'était

fortune et

céder

et

avec

il

ne con-

l'inconnu, Jxieiiii.


CHAPITRE

III

TROIS ANNEES A

u lieu de prendre

|,

la

I

S

route de terre, et probablement

Wagner s'embarqua

par économie, Richard

femme

AR

I'

avec sa

son chien, un magnifique chien de Terre-

et

Neuve, car il avait déjà la passion de ces animaux, sur un vaisseau voilier en partance de Pillau pour Londres. Cette traversée, qui dura plus de quatre semaines

de

jamais

Norwège,

par trois

et

fois,

forcèrent

tempêtes qui

et

mémoire

à la

;

vaisseau fut assailli par d'épouvantables

les brisants

dans

légende du Hollandais volant, qui

Wagner

l'esprit.

de courir

le

port

le

plus

norwégiennes pro-

des côtes

milieu des éléments déchaînés qu'il entendit effroi cette

hauteur des côtes de

capitaine à se réfugier dans

le

sortit

lui

imagination une impression merveilleuse, et ce fut au

son

sur

la

le

voisin. Ce passage à travers

duisit

qui fut féconde en accidents, ne

la ville

matelots chanter avec entra

lui

si

profondément

passa huit jours à Londres, ne s'occupant que

vivement intéressé par sa

et

les

visite

au Parlement, mais

Manche. Une fois débarqué à Boulogne, il apprit que Meyerbeer y faisait une maison de bains de mer, et il demeura tout un mois dans les environs, pour lier connaissance avec le célèbre compositeur et s'en faire un appui. Meyerbeer, d'ailleurs, accueillit son compatriote avec une grande s'en examina les deux actes terminés de Rienii il bienveillance s'il de quoi jeune voyageur avait vivre demanda au déclara satisfait et ne mettant pas

le

pied

dans

les théâtres

;

puis

il

traversa la

,

;

à l'aise

Sur sa

un bon bout de temps, pour aller ainsi tenter la fortune à Paris. réponse négative, il hocha fortement la tète il n'en promit ;

pas moins à

mais

il

Wagner

l'avertit

de

le

soutenir autant qu'U serait en son pouvoir,

charitablement que des démarches par lettres ne pour-

un cas pareil où une insistance personnelle cela dit, il lui et de tous les jours devrait seule avoir quelque effet remit des lettres de recommandation pour Anténor Jolly, directeur de raient guère aboutir dans

:

la

Renaissance, où Ton jouait à

comiques, pour Léon

la

Pillel, directeur

fois

des

drames

le

dut à ces gens-là, et par ricochet à Meyerbeer.

tout ce

opéras-

que Wagner put obtenir à Paris,

Habeneck. Par

fait,

des

de l'Opéra, l'éditeur Schlesinger

et

le

et

«

il

Savez-vous ce qui


RICHARD WACiNKR me

rend déliant à l'égard de ce jeune

recommande.

que Meyerbeer protégé que pour

le

le

homme,

Va

»

ce

27

disait

trait,

Henri Heine,

c"cst

pour

aussi piquant

le

protecteur, est tout ce qu'il a jamais laissé percer

de son sentiment sur Richard Wagner.

Wagner

mois de septembre

au

arriva à Paris

1S39

s'en

et

alla

prendre un appartement garni dans la rue de la Tonnellerie, auprès des Halles, dans un quartier peu hanté des artistes, mais où il devait pouvoir vivre à très bon marché. visites à travers Paris lui,

;

il

commence

11

tournée de

aussitôt sa

voit d'abord toutes les portes s'ouvrir

grâce au patronage de Meyerbeer,

et

chaque

logis ravi de l'accueil qu'on lui fait de droite et

soir

rentre

il

devant en son

gauche, déjà

de

sûr

d'un succès immédiat. Alors tout l'enchante, l'admirable mise en scène

de l'Opéra accroît son désir d'y voir bientôt représenter Rieu^i ;

d'ail-

pas que

cela

leurs,

ne doute pas un instant de réussir

il

puisse tarder

:

Renaissance, où

la

avait accepté de représenter

ne croit

de terminer entièrement cet ouvrage,

aussi se hàte-t-il

au prix de privations quotidiennes.

du côté de

et

voyait

11

tout en

également

rose

directeur, par égard pour Meyerbeer,

le

malheureuse Novice de Païenne,

sa

si

Magdebourg. Dumersan le vaudevilliste acquitté de sa tâche il s'était avait été chargé d'en traduire le poème avec tant de bonheur que ces nouveaux vers paraissaient à Wagner enfin s'adapter mieux à sa musique que ceux qu'il avait faits lui-même le jeune musicien se croyait tellement sur du succès avec un opéra expédiée en un

vite

soir

à

;

;

bien conçu dans

pas à

n'hésita

le

goût français sur un sujet tant

quitter

le

soit

peu léger,

vieux quartier des Halles, pour

rue du Helder, au n° 25, dans

le

cœur du

qu'il

s'installer

Paris élégant et artiste.

son côté, l'éditeur Schlesinger n'avait pas moins bien travaillé pour

De le

d'Habeneck que la Société des Concerts du Conservatoire essaierait une ouverture que son jeune ami, désirant mettre tout le drame en musique, avait entrepris de composer

protégé de Meyerbeer

pour

obtenait

Wagner,

en travaillait avec plus de

Wagner sait

il

Faust, de Goethe, et

le

velle,

:

dans

tout heureux de la

bonne nou-

joie et d'ardeur.

n'habitait pas depuis six mois Paris, car tout cela

les

premiers mois de 1840,

qu'il

se

pas-

d'avoir un

était assuré déjà

une ouverture exécutée au Conservatoire, en attendant Rien{i. Tout à coup, changement de décor. 11 opéra

joué

à la

Renaissance

et

avait terminé son ouverture dès le fin

mois de

février,

on

l'essayait

de mars, et l'éditeur Schlesinger se hâtait d'insérer dans

musicale siteur

la petite

note suivante

allemand d'un talent très

la

à

la

Gaiette

Une ouverture d'un jeune comporemarquable, M. Wagner, vient d'être :

«

répétée par l'orchestre du Conservatoire et a obtenu

des

applaudisse-


RICHARD WAGNER

28

ments unanimes. Nous espérons entendre incessamment cet ouvrage et nous en rendrons compte. » La vérité était que les sociétaires exécutants

une longue énigme « et qu'ils avaient Restait la Novice de Païenne, dont la repré-

avaient déclaré cette ouverture

décidé de ne pas

jouer.

la

sentation était attendue d'un

«

jour à

milieu d'avril, Anténor Jolly réunissait

tous ses

pour leur annoncer qu'à bout de ressources

de

Chaste Suzanne,

la

théâtre

;

et

il

On

de deux.

dans

se trouvait

inférieure

fût

à celles

contemporaines,

et

même époque une

artistes

et

malgré

la

nécessité

:

exécuter

telle

celui-ci,

Rhin; mais

il

l'a

employés,

et

fermer

de

le

quand

on

ouverture

complètement remaniée après de croire qu'elle

est bien difficile

du

de Rienii ou voit

Vaisseau fantôme, qui sont

que

de Jeanne

tout déconfit, mit

quelle à Dresde en

pléter son Faust musical.

le

succès récent

le

la

Société

d'Arc ,

Il

est

de

côté

exécutait

son

à

Moschelès

par

semble qu'elle aurait pu se montrer plus accueillante

Wagner

matin, vers

ne peut dire exactement ce que valait alors

l'ouverture de Faust, puisque "Wagner

avoir terminé l'Or du

Un beau

l'autre.

envers

ouverture

la ,

il

Richard qu'il

fit

1844, et ne pensa plus jamais à com-

donc

strictement

vrai

que

si

nous

n'avons qu'une ouverture au lieu de toute une partition de Faust, nous

sommes redevables de vatoire en

Une de

aux musiciens chevronnés du Conser-

autre tentative avait encore échoué.

Pologne

la

vail

1840

cette perte

'.

et

On

une grande représentation pour

s'occupait fort à Paris les

Polonais sans tra-

avait été organisée au théâtre de la Renaissance par

les soins

de

la

princesse Czartoryska, qui avait recruté chanteurs et choristes dans

le

grand monde,

et

chez laquelle on avait répété tout

l'hiver.

La

fête

mars et l'on y devait représenter un Duc de Guise qui n'était autre que le Henri III et sa cour, de Dumas, arrangé en opéra par un noble amateur et mis en musique par le jeune de FIola principale interprète était une toute jeune fille, appelée Anna tow fixée

était

au vendredi

3

:

de Lagrange, et qui devait rendre pelant qu'il avait

ce

nom

célèbre.

Wagner,

composé une ouverture de Polonia, qui pouvait

se rap-

être de

circonstance et qu'il avait vainement proposée aux concerts Valcntino,

la

I. Wagner remania cette ouverture à Zurich en iS55, puis il eu dirigea la première exe'cution à Munich en 18G5. Il y a mis comme épigraphe les vers suivants du drame de Gœthe « Le Dieu qui habite mon àme peut la bouleverser jusque dans ses profondeurs; mais celui qui trône hors de moi ne peut rien faire jaillir de mon sein. Aussi l'existence m'est-elle un fardeau, la mort me fait envie et la vie m'est odieuse, u Sous sa forme détiniiive, cette ouverture, tout empreinte de douleur et de passion, est une création du premier ordre, une œuvre à part dans l'œuvre entier de Wagner. Elle n'est pas traitée, en cfTet, en long crescendo, comme les magnifiques ouvertures du Vaisseau fantôme, de Tannhaniser et :

des Maîtres CJianteiirs ; elle est d'une conception non pas plus admirable, mais plus libre, qui lui permet de suivre de près toutes les phases du drame et de les traduire avec une vérité saisissante. Un chef-d'œuvre, en un mot, seulement comparable à l'ouverlure île Faust que Schumann écri\it

en i853.


RICHARD

\VA(]N1-:R

porta bravement au chef crorchcstrc du tliéàtrc,

promit de s'en occuper; mais on n'avait que au milieu de tout ce beau monde, et

mise en question'. chances de succès. dant

Wagner De plus,

qu'il travaillait

2g

nommé Duvinagc

il

avait épuisé toutes

pour devenir célèbre

femme il n'y avait plus à s'occuper du leur emménagement rue du Heldcr. L'éditeur Schlesinger fut

et avait

puis,

comme

représentée

il

Revue

au mois de décembre de cette

auprès

du

Dumersan

,

à

allait lui

toutes

directeur le

quoi

et

les

des

:

même

Wagner

Variétés

après

mettre en musique un vaudeville que ce :

la

Descente de

des

répétitions, les acteurs déclaraient

sa

ne contenait

même

populaire et que tout

pas

la

besogne ingrate,

à la

heureux de

reste,

avec il

était

réitérées

l'appui

de

chargé de

venait d'écrire

musique inexécutable

file,

s'en

il

mais, dès les premières

chanson: Allons à

monde,

le

chargea

il

démarches

devait renoncer. Cette folie de carnaval fut jouée le et

1840;

la Favorite,

année,

même Dumersan

la Courtille;

juillet

était trop

peut-être

et

commanda

lui

il

donner de quoi manger. Du portes

avec sa

vivre

Galette musicale, dont

traducteur de la Novice de Palerme,

avec Dupeuty

mais avant de

logis;

d'en faire la réduction pour piano,

trouver puisqu'elle

frapper

acheter à crédit

musique allemande, parut au mois de s'était rendu acquéreur de la partition de

coup sûr, sinon compliquée, mais que

allait

ressources pen-

la

Richard Wagner à

ses

encore sa providence;

plusieurs articles pour son journal, la

Sur

pas

chien, qui avait été volé avant

:

:

même

voyait donc s'évanouir à la fois ses diverses

meubles nécessaires pour remplir son nouveau payer ses meubles il lui fallait d'abord gagner de

premier

celui-ci

:

pauvre diable

son ouverture ne fut

les

le

d'un

l'aire

20

la Courtille,

attribue à

et

janvier

l'on

y

1841,

un instant

Wagner

:

double

erreur, à ce qu'il parait.

I. Wagner quitta Paris sans réclamer cette ouverture quelle fut sa surprise en apprenant, quarante ans plus tard, qu'elle e'tait entre les niains de M. Pasdcloup! Un de ses amis de Paris entreprit de rétablir la suite des faits, et il y parvint après ujic minutieuse enquête menée avec la prudence et la sagacité d'un juge d'instruction. Voici par quelle série d'aventures a dû passer Polonia. Duvinage avait gardé près de vingt ans cette ouverture non réclamée, lorsqu'un beau jour M. Henri LitolfF, qui donnait des leçons de piano à sa fille (aujourd'hui M™" Théodore Dubois), le pria de la lui confier Duvinage y consentit. Litolft, sans doute à bonne intention, la remit, par la suite, àM.Arban, qui désirait la jouer à ses concerts du Casino, et celui-ci, pour l'essayer, avait chargé le copiste du Théâtre Italien d'en détacher les parties. Puis Arban l'avait complètement oubliée, le copiste aussi, si bien qu'elle traînait dans les amas de vieux papiers de Ventadour et que l'éditeur Choudens, ayant acheté toute cette musique en bloc après la déconfiture de la direction Escudier (avril 1870), fut tout étonné de découvrir un manuscrit de Wagner dans ce fouillis de musique non classée. Il parla de cette ouverture à M. Pasdcloup qui se la fit prêter, ne la joua jamais et l'avait à son tour mise au rebut, quand elle lui fut réclamée au nom de Wagner, d'abord par la personne qui avait fait toutes ces recherches, puis par M. Nuitter. C'est ainsi qu'en 1881 Wagner rentra en possession d'une œuvre de jeunesse, égarée depuis 1840, et qu'il la fit exécuter cette année à Palerme pour célébrer l'anniversaire de sa fciinuc il remercia ses amis de Paris de la peine prise avec une véritable effusion. ;

:

:


RICHARD WAGNER

3o

Wagner

essayait aussi de

des paroles françaises la

pour

tion faite exprès

position un écrite

mettait d'abord en

et

Deux

des

lui

Grenadiers, de Henri Heine, com-

peu pénible, très inférieure à

un an plus

même

tôt sur la

lurent pas. Ensuite,

dans leur petit cadre

enfant,

de Victor Hugo, Mignonne, œuvres simples et charmantes

toutes

pas produire alors, faute de chanteurs

marché.

11

étaient, à la

elle

:

mais

qu'on goûte aujourd'hui,

et

teurs pour les publier

que Schumann avait

celle

poésie, et dont les artistes ne vou-

l'Attente,

écrivit

il

mon

de Ronsard, Dors,

môme

vogue de M'"" Loïsa Puget, à musique une traduc-

aspirait à la

il

;

réputation de Schubert,

composant des romances sur

percer en

pour

chanter, d'édi-

les

bonnes pour

trop

lettre,

toucha bien quelques francs pour Mignonne, quand

imprimée dans

Galette musicale,

la

mélodie,

et cette

put

ne

qu'il

le

elle fut

reparut

ensuite,

il Lewald faut voir à ce propos en quels termes pressants Wagner, dans une lettre d'avril 1841, soumet ces trois romances à l'éditeur du journal et

avec les deux autres dans

le

supplément de

payer

le

plus vite et

le

les

(12

supplie de les prix fr.

lui

variaient

5o et 22

Un farceur me traite ici.

fr.

qui se

«

Ici,

»

une

dénotaient

pour de

c'est-à-dire

personnalité

à

succès dans un cercle restreint, et

Beethoven, publiée à

la

fin

un mélange de poésie

et

qu'il

ses

de 1840, avait assez frappé de

raillerie,

d'enthousiasme

articles,

avaient un

nouvelle intitulée

la

florins

g

comme on

voilà

énergique,

et

et

5

pour l'apitoyer:

bien

n'est!

Cependant

Paris.

originale

entre

prend

s'y

il

donne pour meilleur

;

plus cher possible, puisque

le

productions,

telles

comme

Et

5o).

VEuropa, de

Une

:

qui réel

Visite à

les

lecteurs par

et

d'amertume,

pour que Berlioz, bon juge à cet égard, ne crût pas trop faire en la signalant dans le Journal des Débats. Il rendait compte, en bon collaborateur, journal

d'un

infatigable, qui donnait

concerts,

etc.,

Wagner

et

il

ajoutait de

intitulée

sûrement pas dire aussi

Une

la

jolis

portraits

lui-même

Galette musicale, ce

:

«

On

d'artistes, lira «

:

beaux

nouvelles

longtemps

celle

Berlioz ne croyait

vrai'. il

poursuivait sans désemparer

non plus en vue de l'Opéra

se défend après coup d'y avoir jamais pensé

Dresde,

et

Visite à Beethoven.

l'out en travaillant pour Schlesinger,

l'achèvement de Rienii,

Revue

tant de choses à ses abonnés

bons articles de critique,

charmantes, de M.

organisé par

concert

de

Paris

il

mais pour l'Opéra de

où chantaient des artistes de premier ordre, Devrient, Tichatschek, etc., et il arrivait au bout de

la

sa

Schrœdertâche

en

I. Les articles de Wagner pour la Ga:;ette musicale étaient traduits par Duesherg, chargé de rédiger toutes les nouvelles d'Allemagne pour ce journal. Quant à savoir ce que ses articles ou ses arrangements lui furent payés, ce serait bien impossible, car Wagner, toujours à court d'argent, a peut-être reçu quatre ou cinq fois le prix stipulé pour ses travaux.


Kl

novembre

en A Kl)

\va(;ni:u

3,

encouragé par ses succès d'écrivain et surtout misère qui atteignait au degré le plus aigu, il écrivit tant

1840. Alors,

presse par

la

pour vivic,

et plus d'articles

ment de 1841,

publiait cette nouvelle

qu'il

Un Musicien

moment-là, au commence-

et c'est juste à ce

étranger à Paris,

où,

amère

si

et si

douloureuse

mettant lui-même

se

avec son bien-aimc chien de Terre-Neuve,

plume

décrit d'une

il

:

en scène, viru-

lente tous les espoirs qu'il avait follement caressés, toutes les douleurs

éprouvées, y compris la perte de son chien, avant d'arriver au découragement final, en attendant la mort libératrice de son héros. qu'il avait

«

C'était

un

homme

excellent, dit-il en parlant de

autre que lui-même, un digne musicien né dans

lemagne, mort à Paris, dresse de cœur, fois qu'il

Paris.

tale.

maltraiter

voyait

a bien souflfert.

il

Malheureusement,

il

Beethoven,

et cet

joignait à tout cela

»

que par

le lieu

de

la

scène,

le

antichambres

d'artiste

de

la tète

telle

dans son assiette pendant son tellement

est

Neveu de Rameau

calqué sur

tant par la forme

café de la Rotonde, on retrouve exactement

tout ce qu'il vient de faire à Paris en pure perte les

capi-

bêtes, que, dans le dialogue qui va

les

suivre et qu'on dirait inspiré du

la

donné de voir une

tourné

lui avait

Ce personnage imaginaire

lui-même, avec son amour pour

trouver

de

une conscience

avait été

lui

il

retrouver

se

de

se

étroits

si

les

ambitieux sans aucun talent pour

était

il

excès de bonheur

sorte qu'il ne put jamais

séjour à Paris.

ten-

rues

les

de

colère

sa part des trottoirs

dans sa jeunesse,

l'intrigue; de plus,

sans

supportait

il

d'une scrupuleuse délicatesse;

fois

d'Al-

ville

Doué d'une grande

malheureux chevaux dans

les

doux,

gamins de

les

héros, qui n'est

ne manquait pas de se prendre à pleurer toutes

il

Naturellement

dépossédé par

oij

ce

une petite

mélodies

des directeurs,

Schubert sans que personne en voulût

longues attentes dans

:

dans

écrites

essayer,

refus

le

de

style

d'une ouverture

composée par un disciple de Beethoven par ceux-là mêmes qui semblaient le mieux goûter ce grand maître, etc. A quoi, l'ami sceptique et désillusionné, dans la bouche duquel il a dû mettre quelques-uns des conseils que Meyerbeer

avait donnés,

lui

Beethoven

répond vivement

mets que

je

mais

bien attention que sa réputation et son

fais

t'arrête

ici.

choses reçues et consacrées. Mis

grand maître, ce

nom

sera

bien

révéler les beautés à l'instant

est déifié, tu as

en

tête

d'un

:

x

Per-

parfaitement raison;

nom

sont maintenant

morceau digne de ce

un talisman assez puissant pour en

comme

et

par

magie,

mais à ce

nom

substitues-en un autre, et tu ne parviendras jamais à rendre les directeurs de concerts attentils aux passages les plus brillants

morceau.

»

Wagner, comme on

le

voit,

Cependant Maurice Schlesinger,

qui

de ce

même

mordait à belles dents. ne pensait

(}u'à

consoler

le


RICHARD WAGNER

32

pauvre musicien de sa déconvenue au Conservatoire, eut

de faire

l'idée

exécuter une composition de lui dans un de ces concerts que la Gaicttc musicale olTrait à ses abonnés, et ce beau projet fut mis à exécution le

jeudi 4 février 1841

sou choix

:

(Christophe ColombJ, qu'on avait modestement mise

gramme.

en fut naturellement rendu compte dans

Il

de Schlesinger.

Ce morceau,

«

d'une introduction, disait la

qui a plutôt

critique

le

désignation d'ouverture que

dans ses articles de de

la pleine

la

a

forme

la

mérite-t-il bien

bien définie dernièrement

si

voulu

peindre

des violons

aigu

l'infini

Les entrées

?

uniformément

reviennent trop

de cuivre ;

trémolo

le

avec

et

choquaient

d'ailleurs, leurs discordances qui

exercées et délicates n'ont pas permis d'apprécier à sa

d'un

et

mer, de l'horizon qui semblait sans but aux compagnons

d'instruments

travail

même

journal

caractère

le

Gaiette musicale ? A-t-il

du célèbre navigateur, par d'obstination

en tète du prole

Henri Blanchard,

l'auteur

Columbus

sur FouverLure de

s'était fixé

trop

les oreilles

juste valeur le

de M. 'W^agner, qui, malgré ce contre-temps, nous a paru l'œuvre ayant des idées

artiste

larges,

moderne.

ressources de l'instrumentation

prendre ainsi que dans cette œuvre, usait déjà des trémolos de violons à

de cuivres dont

s'est si

il

assises,

souvent

»

connaissant bien les

et

Il

est

curieux d'ap-

Wagner

écrite à vingt-deux ans,

fulgurantes attaques

l'aigu et des

et

assez

si

merveilleusement

servi.

Cette

exécution bien modeste eut quelque écho en Allemagne, grâce à Schu-

mann

qui mentionna

concert

le

dans son

point que, parmi les numéros du

de Richard Wagner,

«

journal, en insistant

programme,

un jeune Saxon,

il

écrit-il,

y avait une ouverture qui

restait

depuis longtemps et qui, par bonheur, se remet à composer

ragé par ce petit succès,

Wagner

Londres, espérant que Jullien

la

hâta

se

sur ce

d'envoyer son

silencieux ».

Encou-

ouverture à

pourrait exécuter dans ses

concerts-

promenades; mais l'excentrique chef d'orchestre n'en voulut pas, et quand le facteur des messageries Lafitte et Caillard rapporta le rouleau au compositeur,

pas

payer

le

|iûrt

celui-ci

dans une

de Londres à Paris,

tranquillement son paquet

Wagner, dans

était

:

telle

que

et

misère le

facteur

l'ouverture était perdue à jamais

sa détresse, allait jusiiu'à se présenter

dans un petit théàtic du

qu'il

boulevard

:

«

m'en

Je

remporta '.

comme

tirai,

ne put

dit-il,

choriste

encore

plus mal que Berlioz lorsqu'il se trouva dans une situation semblable

:

I. Ce Jiiiail miscjiablu a utij racunle par Wagner liii-inciuc, vers irSSo, à un lIc mus amis, qui voulut alors s'informer de ce que ce rouleau mis au débarras avait bien pu devenir depuis quarante ans. I-es messageries n'existaient plus; après avoir cherché dans tout Paris, il découvrit que le vieux M. Caillard, très âge, mais ayant toute sa tète, logeait à sa porte il se promit de l'aller voir, attendit quelques jours par négligence et comme il descendait un matin, il vit qu'on tendait de noir la maison :

voisine.

11

s'inlurmc... le vieillard était mort.


RICHARD \VA(iNER devait m'cxamincr découvrit tout

le

chef d'orchestre qui

je

ne savais pas chanter

moins du monde

le

« Heureusement pour nombreuse colonie d'Allemands,

rien à tirer de moi.

une assez pour

33

y avait alors à Paris

cœur

et

d'élan,

contribuèrent sûrement à soutenir, à faire vivre à peu près sa

femme pendant

moins d'amis,

le

chacun

propre compte et n'ayant pas D'ailleurs,

parmi

Wagner

les

et

se

il

musiciens

qu'il

démenant pour son commerce avec autrui.

s'agitant,

temps de

le

n'était porté vers

il

qui

et

ce terrible hiver. Mais, en dehors de ce cercle,

sentait tout isole dans Paris et c'était encore

comptait

artistes, savants, lettrés,

plupart assez pauvres, mais pleins de

la

déclara qu'il n'y avait

et

lui qu'il

de suite que

se

lier

aucun d'entre eux. De Meyerbeer, alors le Diable et les Huguenots, il

souverain maître à l'Opéra avec Robert eut tout d'abord, sans

la

manifester, l'opinion qu'il exprima plus tard

quand il crut que les sentiments de reconnaissance ne devaient pas rempêcher de distinguer entre l'homme et l'artiste. Pour Halévy, il jugea que son bel enthousiasme avait duré juste le temps d'obtenir un grand succès qui le tirât de pair; après quoi il n'avait plus pensé qu'à opéras pour faire fortune, en

écrire des

d'Auber, sans avoir conscience, hélas

laisser-aller

comme

l'eut

plus lâchées.

les

jugea pas plus

le

!

la

négligence et

qu'il

En

ce

lui

regardait

qui

favorablement, quoiqu'au

défendu par opposition à Rossini

aucun rapport avec

n'avait pas su,

;

cependant

il

et

Auber lui-même,

il

Muette

il

temps de

à -l'école

essaya de

le

la

italienne.

Edouard Monnais refusa son

parler de patriotisme

frani^-ais

plutôt commerciale, car

laume Tell trois

article

et la Favorite, entendait

ses

compose pas l'art

pur,

le

confrères sa

de Paris,

musique pour de du beau

sens

dans sa tendance

:

il

n'a

le direc-

dans une question purement musicale, ou

lui

la fois la

Muette, Guil-

que son journal vantât également

Wagner éprouva quelque

en dépit de son naturel hérissé, ce fut et

n'eut

ne voulut pas entendre

et

Schlesinger, éditant à

compositeurs. Le seui pour lequel

dit-il,

11

louer un jour dans la

Galette musicale au détriment de Donizetti, Rossini, etc., mais teur

le

son modèle, acquérir un semblant de style, appréciable dans ses

productions

ne

imitant

cette

Berlioz.

différence

l'argent.

manque.

Mais Il

il

reste

«

11

attrait,

y a entre

essentielle

les

lui,

qu'il

ne

ne peut écrire pour

complètement

isolé

personne à ses côtés qu'une troupe d'adora-

moindre jugement, saluent en lui le créateur d'un nouveau système de musique, et lui ont complètement tourné la tète eux exceptés, tout le monde l'évite comme un fou. » C'était le seul qu'il appréciât.: peut-être est-il opportun de le répéter. C est à Paris qu il rencontra pour la première fois Franz Liszt, et les premiers rapports entre ces deux artistes, qui devinrent si grands teurs

qui, platement et

sans

le

:

5


RICHARD WAGNER

34

amis

par

de

fait

des

furent

suite,

la

Wagner marquait un

liant.

du grand pianiste

bruyante

plus

manquèrent tout à

et

dédain

franc

détestait

il

;

réservés

pour

réputation

la

virtuosité pure et jugeait

la

que Liszt se laissait entraîner par le public jusqu'à donner des preuves du plus mauvais goût, jusqu'à exécuter, par exemple, une fantaisie sur Robert le Diable, dans un concert organisé pour élever un monument à Beethoven

;

il

déplorait

différence

la

y a entre

qu'il

la situation

du

compositeur dramatique, qui ne peut se révéler qu'à un auditoire en

composé d'amateurs,

partie

et celle

devant n'importe quelle assistance;

il

propre isolement en face du public,

et en arrivait à considérer son

non plus contre

comme un

dangereuse

la

tout seul, les jetait sur

Du

métier de virtuose

musical de Paris, qui

et

Gaiette musicale

à la

il

sa

tète,

il

comme une

il

parut

Et

intitulait cet article

il

hardiment

en

1840.

Dégoûté par

farouche

:

comme

dans un douloureux abattement,

monde

le

conquérir Paris, et tombait

excédé par

exercices de

les

de Duprez et de M'"" Dorus-Gras,

Liszt et de Chopin, les chants

:

le portait

dans ces moments de désespoir, à ce

renonçait, désir

garantie

quand il avait remontait dans sa chambre et profanes.

ces

papier;

le

bien,

de l'iiidépeudauce du compositeur, et

son

était autrefois

de

amitié

bien ruminé ces idées dans là,

comme un

mais

mal,

du virtuose qui triomphe aisément se comparait alors au célèbre pianiste

les

sempiternels de Rubini. Duprez et Rubini l'avaient entièrement

trilles

dégoûté de auditoire

la

dit

mauvaise musique recruté

d'élite,

dissait de confiance.

Il

qu'ils

dans

chantaient d'ordinaire et qu'un

l'aristocratie

ne trouvait aucun

intérêt

sentations de l'Opéra qu'il fréquenta peu,

ne voyait

qu'un prétexte à mise en

applau-

aux luxueuses repré-

d'ailleurs, faute d'argent, et

scène

Juive d'Halévy que dans

n'a vu, disait-il, la

et la finance^

et à décorations telle

ou

Qui

«

:

telle ville d'Alle-

magne, ne parviendra jamais à se figurer comment et pourquoi cet ouvrage a pu charmer les Parisiens, w L'Opéra-Comique, à tout prendre, aurait pu le contenter mieux que l'Académie de musique et les Italiens, au moins par le talent des chanteurs mais ce qu'on ;

écrivait alors s'est

et

enfuie,

]wur ce théâtre hélas

la

!

?

ou

:

«

Méhul, de Nicolo, de Boïeldieu rythmes de quadrille qui font

les ignobles

»

Malgré quelques article

parut absolument détestable

grâce de

du jeune Auber, devant

rage aujourd'hui

lui

satisfactions

l'exécution

passagères,

comme

le

succès

d'un

d'une

ouverture, qui n'apportaient pas grand soulagement à sa pauvreté, "Wagner, trompé dans ses espérances, souffrait

cruellement à tous égards, par matérielle et par les

cruelles

les

soucis

déceptions

et

d'un

les privations

légitime

de

la vie

amour-propre.


RICHARD WAGN

Un

rayon de

soleil

bon accueil au

vouée au

culte

Conservatoire,

Beethoven

de

33

triompher du sort

recommandation de Meyerbecr

de

trouver

R

suliitemcnt son existence et l'artiste

éclaira

se reprit à vivre, à vouloir la lettre

F.

coûte que

un doux

procuraient

lui

pouvait au moins assister aux répétitions et chaque

fois

d'une symphonie de Beethoven rendue en perfection là,

aux

pareille

en écoutant

l'œuvre

prendre enfin pour infinies

sent

il

;

de

première

la

alors

pour

lueur du

ne

et

s'était

musiciens

:

roche

il

et

il

beautés^

rejette au

il

de Ricu^i,

com-

la

se réjouit

il

se serait à jamais

entrevoit l'idéal de

il

'.

«

Ce

fut,

dit-il,

comme

des yeux,

si

un

Habeneck

qui, après avoir fait tra-

un hiver cette symphonie sans que son orchestre y vît plus acharné à la remettre à l'étude pendant deux ou trois hivers D'ailleurs,

«

il

;

senté pour la

récitatifs

son esprit,

Beethoven

me tomba

qui

croit

et

pénètre les

musique où

était

en avoir

vraiment

le

première

est

vrai,

à

fois

pénétrer

fait

Habeneck

ajoute-t-il,

maître

surcroît de bonheur, le Freischùti dans

subissant,

ravi,

,

»

et n'avait lâché prise qu'après

vieille

soupçonné

Kmu

quoi célébrer davantage, de l'admirable application des exé-

sait

vailler tout

en

conventionnel,

cutants ou de l'énergie déployée par

clair,

il

les sentiers battus

écaille

rideau venait de se lever. Il

tant

chef-d'œuvre de

comme une

finir,

seulement

jamais

Leipzig.

à

lumière se faire en

la

perdu dans un genre inférieur la

avait

son adolescence,

fois,

d'avoir été repoussé de l'Académie de

sa vie à

se délectait

sent transporté de dix ans en arrière,

préférée

de se traîner dans

loin ridée

Gewandhaus,

se

il

n'en

qu'il

telle

du

concerts

d'enthousiasme,

haletant

Il

!

une exécution

chœurs,

ai'ec

de

entend, ô merveille

il

réconfort. il

c'est

:

Société

la

une satisfaction sans mélano-e. Et voilà qu'un une incomparable exécution de la .Sy??;^?/?o;?/e

ressentit

qu'il

dit-il,

jour

il

de

concerts

les

et

Avec avait dû

coûte.

Habeneck,

à

abattu

Paris,

et

était

sens à tous ses

un

chef de

tout lui obéissait.

sa forme le

le

7 juin

originale

1841,

>>

la

Par

fut repré-

un Freischuti

lois du Grand-Opéra français, augmenté de mais sans qu'on en eût retranché une seule

les

de ballets,

note, et mis en scène avec un respect religieux par Berlioz, le Frcischiiti enfin auquel

pour

le

coup,

il

avait il

les

n'hésite

premiers ravissements de sa jeunesse.

plus, et cette

double apparition de

allemande incarnée en Beethoven, en Weber, rend à l'exilé toute son énergie

:

«

O ma

comme

la

Ah

!

patrie

par miracle

splendide patrie, combien

je dois

I. Les concerts du Conservatoire entraient dans leur treizième année en 1840. Il y avait alors huit concerts par saison, de quinzaine en quinziiine, à partir de janvier. C'est au concert du 8 mars 1840 que Wagner dut entendre la 5_)-m^/ioHie avec chœurs et il put la re'entendre encore le 2 mars 1841 et le

9 janvier 1842, car on l'exécuta ne la joua plus qu'en 1849.

une

t'ois

par an durant

les trois

hivers qu'il passa à Paris

:

ensuite, on


.

RICHARD WAGNER

36

combien

t'aimer,

Freischïtty

mand

né sur ton

est

aime

qui

rêver de

dois

je

sol

d'homme,

à l'âge

cœur dans

O

1

prendre

couvre-feu

le

Et tout aussitôt

imaginaire à Beethoven.

visite

sans qu'il

possible

soit

dans

préexistaient

même

créée, et

humaine

voix

:

»

tête

jaillir les

idées

et qu'il avait déjà

...Les

«

sons des instruments,

comme organes de la nature hommes sur terre pour recueillir

primitif

y eût des

qu'il

Mais

ces vagues harmonies.

!

pourtant de préciser leur vraie signification,

monde

le

avant

'

audacieusement à l'auteur de Fidelio,

jetées sur le papier en les prêtant

dans sa

du clocher du village

voulut faire

il

confusément bouillonner dans sa

sentait

qu'il

se mit à l'œuvre,

il

la lune,

rêveries

!

heureux qui peut vous com-

est

rêver, divaguer avec vous

et croire, sentir,

aux

croit

aimable rêverie allemande

toi,

Combien

!

aujourd'hui,

mystérieuses et douces qui agitèrent son

des bois, rêveries du soir, des étoiles, de qui sonne

le

dois aimer le peuple alle-

je

encore

qui

que

parce

des légendes, qui sent encore aujourd'hui,

les terreurs

jeunesse

sa

Combien

!

Freischiïti,

le

merveilles de la plus naïve

ne fût-ce que

toi,

en est tout

il

autrement du génie de

la

du cœur humain, et traduit Son domaine est donc essen-

celle-ci est l'interprète direct

nos sensations abstraites et individuelles.

tiellement limité, mais ses manifestations sont toujours claires et précises.

Eh et

bien

réunissez ces deux éléments

!

abrupts de

la

nature sauvage par

le

langage des instruments, en

avec les idées positives de l'âme

opposition

humaine;

représentées

exercera une influence lumineuse sur

et celle-ci

premiers, en réglant

leur

cœur humain s'ouvrant pressentiments

par ces

traduisez les sentiments vagues

;

à

émotions

infinis

accueillera

avec conviction, cette espèce de révélation intime d'un turel...

L'opéra n'est point

mon

je

je

ivresse,

monde surna-

je

ne connais pas de théâtre au monde

voudrais m'engager à composer un

ne voudrait l'entendre, car

dilaté

et

avec

le

(n'oublions pas que c'est Beethoven

une partition conformément à mes propres

j'écrivais

Alors

fait

qui est censé parler); du moins

pour lequel

des

le conflit

complexes, agrandi

délicieux,

et

voix

la

en modérant leur violence.

élan,

ces

par

nouvel ouvrage. Si instincts,

personne

n'y mettrais ni ariettes, ni duos, ni rien

de tout ce bagage convenu qui sert aujourd'hui à fabric^uer un opéra, et ce

que

que le

musical

je

mettrais à

public.

Ils

déguisés

Celui qui ferait un

pour un

fou, et le

la

place ne révolterait pas moins les chanteurs

ne connaissent tous que sous de

brillants

dehors,

liiclidrd

le

mensonge

et

le

vide

néant paré d'oripeaux.

drame lyrique vraiment digne de ce nom passerait serait en eftet, s'il exposait son œuvre à la critique

du public, au lieu de la garder pour lui seul. I.

le

Wai^ner d'après lui-même,

p.

i

i

»


WAGNER

1<K;HAR1)

37

Et ce que Beethoven, censément, n'aurait pas osé

Un

l'entreprit.

écrivain

fait

l'avait

peu s'en

;

mais

écrite,

satire

sentiment de révolte contre

Wai^ncr

destinée qui Faccablait

la

ne se donnât tout à

qu'il

de sa conscience d'artiste et

réveil

le

fallut alors

tenter,

la

sentiment

le

de sa propre valeur le firent rentrer dans sa voie naturelle et se vouer

Neuf mois durant,

à la musique.

gements d'opéras dans

vuli^aires arran-

des articles de journaux qui paraissaient, à Paris

et

Galette musicale, à Dresde dans

la

que de

n'avait fait

il

Courrier du soir ou dans

le

Lewald, à laquelle il envoya, sous le pseudonyme de Freudenfeuer [Feu de joie), une série de lettres intitulées tantôt Amusements parisiens et tantcjt Mésaventures d'un Allemand d'Auguste

VEuropa,

à

Un

ParisK

Mcyerbeer.

avec

Celui-ci

recommanda avec

et le

Cette

l'Opéra.

tout

lui

moins

le

Paris

Léon

et telle

possibilité

ne se

il

une

pas de

tint

qu'il

que ce dernier pour

partition joie

;

rentra

il

n'eût terminé au

entrevoyait déjà une mise

qu'on n'en pouvait réaliser qu'à Paris.

permission de

la

Pillet

d'écrire

scénario de l'ouvrage pour lequel

Après avoir obtenu

revenir

lui

comme Wagner

juste

en fièvre et ne prit pas de repos

en scène merveilleuse

allait

eut pitié du pauvre Allemand

il

tant d'insistance à

Wagner

chance

la

à

misère;

la

Richard

fois

rentré

était

entrevoir à 'Wagner la

laissa

que

cru

avait

il

au dernier degré de

arrivait

chez

instant

Henri Heine

afin

d'utiliser

une pièce anglaise du même titre, il écrivit avec bonheur l'ébauche du Hollandais volant, dont il avait fait, dit-il, la connaissance intime en pleine mer, au plus fort de la tempête, et il la fit tenir bien vite à Léon Pillet. Mais Meyerbeer

l'emprunt

était

parti

poétique le

lui

c'était

avait

qu'il

et

dans

lui-même

fait

l'intervalle,

et

à

frappé

directeur,

le

de

la

couleur

de l'originalité du sujet, proposa simplement à l'auteur de

acheter

pour

faire

le

musique par un autre. Et bon aptkre un tel opéra ne

mettre en

tout à son avantage, ajoutait

le

:

pourrait pas arriver à la scène avant quatre ou cinq ans, par suite d'ar-

rangements antérieurs

or,

;

Wagner

tous côtés, tandis que, ayant devant

composerait un Anéanti,

avait

tenta

Pendant

déjà parlé

lui

tout le

temps nécessaire,

il

en

autre et se consolerait aisément de ce léger sacrifice.

Wagner

réfléchirait.

se lasserait de le colporter ainsi de

de

vainement de se débattre

qu'il

cette

réfléchissait,

il

ébauche comme

apprit lui

et

que

répondit

Léon

appartenant

et

qu'il

Pillet

que,

raille agréablement Scribe, qu'il représente à son lever, prenant I. Dans un de ces articles, il son chocolat en donnant audience à nombre de visiteurs et menant de front la confection de vingt pièces avec autant de collaborateurs, dilférents. Dans un autre, il parle longuement de Berlioz qu'il qualifie de musicien génial. « Celui qui veut entendre de sa musique, dit-il assez plaisamment, est oblige de se déranger tout exprès et d'aller à lui, car il n'en trouverait nulle part, pas même aux endroits où l'on rencontre cote à cote Mozart et Miisard. »


RICHARD WAGNER

38

ne cédait pas son scénario de bonne grâce,

s'il

par

Après tout,

adresse.

en serait dépouillé

donnerait

lui

échange

en

moins pendant quelque temps

son existence au

assurerait

qu'on

l'argent

il

et

per-

lui

mettrait de composer en toute liberté d'esprit, puisqu'il voulait revenir à la musique

magne,

accepta donc, tout en gardant

il

;

de

critique

la

de 1841 était proche de

ville,

la

sur

la

révolution de

cassette

royale

mais cela

suffisait

la

Meudon, près des grands

loger à

alla

il

de

faisait

il

:

rassurer 'Wagner,

à

cave un biuit épouvantable

sons de

les

harpe avec

la

ceu.x

neur-inventeur d'instruments le

se

la

peinture

!

donner en

campagne,

«

ballade dramatique

en trois actes pour versifié,

il

du piano

Wagner

ce »

;

sujet il

il

:

pour

le

une

et,

avait

le

passés

à

produit d'un seul joie,

il

il

dune

seule

à

haleine,

découpa tant bien que mal tout

fois

le

poème

d'une inquiétude mortelle

fut pris

à

écrire,

critiquer ou

à déranger

composer lui-même?

chanson des

jet la

se

toujours musicien il

monde

finit

il

concert

de l'instrument avec une véritable angoisse;

quand

savamment combiné

peintre était un collection-

écrit

et

entreprit la musique. Alors, en face du piano qu'il avait fait

autres, était-il encore capable de

Fou de

comme

entend dans

eut toutes les peines du

reprit, le

le

théâtre,

le

venir pour son travail,

de mois

il

pas

n'étant jour,

par y réussir et put composition du Hollandais volant. Sa première

à la

pai.x

beau

est

il

se précipite et trouve le vieillard en

dissuader de cet abominable accouplement;

idée avait été de traiter

en

il

;

une machine où

de confectionner

train

propriétaire,

exécrable

peinture,

la

goûtait délicieusement la tranquillité de la

la

le

bois qui

une pension de mille francs

Juillet,

d'habitude un métier bruyant. Voilà-t-il pas qu'un il

du

loin des soucis et

ardent qui aimait fort à parler de l'ancienne cour et qui

perdu, à

vrai,

autant pour fuir ses créanciers, qui devenaient

:

de quatre-vingts ans, n'en paraissant pas plus de quarante,

vieillard

avait

composition. Le printemps

la

dans une maisonnette habitée en partie par

l'attiraient,

légitimiste

tout à

et

que pour composer plus librement,

intraitables,

un

propriété pour l'Alle-

céda son ébauche à L.éon Pillet pour cinq cents francs'.

et

Alors, foin

bruit

la

!

lève

En

en fut arrivé

et

sept là,

lance

la

un

œuvres des

tournait autour

cri

-chœur des matelots. de triomphe

semaines, tout l'opéra fut composé

de nouveau

et quoiqu'il portât l'ouverture à

attendre, avant de

ciel

Il

après tant

l'ouvre enfin, l'essaie et

il

fileuses et le

au

les

:

les soucis

le

mais

;

matériels l'accablèrent,

peu près achevée dans sa

pouvoir fixer sur

est

il

:

tête,

il

dut

papier, deux grands mois.

I. Le Hollandais volant, arrangé en opéra français en deux actes par Paul Fouchcr et devenu le Vaisseau fantôme avec musique de Diestch, fut représenté à l'Opéra le 9 novembre 1S42. Wagner avait

déjà quitté Paris et n'apprit que de loin l'insuccès de cet opéra qui dut lui faire un certain plaisir le put jouer que onze fois.

on ne

:


I r-..'\'

n

.'

'i

RICHARD WACN ER



WAGNKR

Kl cil A kl)

complctcmcut

S'ctaicnt-ils assez

an plus «

tôt

tu

concurrence

des

talents

facilité

mon pauvre

lourdement, contre

laquelle

bien celle des réputations établies

et

mais, sans cela, et surtout

tu

si

Il

l'épreuve ton talent et tes travaux.

sans

On comme

pareille

portes, et,

plus

nom

ce

rentiers,

lui

la

mais Ls-tu

alors tente la lutte tiens-toi

sans

;

soioneu-

même

avoir

ne sera pas question de mettre à Oh non, ce serait là une faveur !

est

du nom que tu dénué de toute réputation, comme de sur aucune liste de propriétaires ou de

vous faudra végéter inaperçus,

il

pas

n'est

seulement à s'enquérir

pensera

!

ne se trouve inscrit

il

!

c'est

jusqu'à

auras à combattre,

tu

manques d'argent,

attiré sur toi l'attention publique.

Ce

mais

;

des intérêts particuliers.

car tu ne pourras que succomber,

l'écart,

seul

d'arriver

ami.

bien assuré d'une protection ouverte et influente,

sement à

qu'un

donneur de conseils

qu'au public

affaire

ou moins de

plus

le

trompes

te

n'avais

tu

si

dans

précisément

le

tu as raison. Je suis d'avis qu'avec ton talent tu pourrais

1

espérer de réussir,

que

réalises les fâcheux; pronostics

mettait dans la bouche de son ami

il

Le public

3^

et

toi

ton talent

Bref,

morfondre à attendre en vain l'exécution de ta tes compositions sont conçues dans cet esprit audacieux et original que tu admires tant dans Beethoven, on ne manquera pas de les trouver boursouflées, incompréhensibles, et l'on ou

l'on te laissera

te

musique, ou bien,

si

beau jugement.

se débarrassera de toi par ce

»

Aussitôt qu'il avait eu terminé son Rieii^i, en novembre 1840, l'avait

adressé à l'Opéra de Dresde.

Une

lettre

Wagner

de Meyerbeer à

l'inten-

dant royal, baron de Liittichau, en date du 18 mars, avait été décisive, et

le

18 juillet

l'ouvrage

1841,

représenté avant la direction

la

Ga:{ettc

la

en ajoutant

musicale annonçait

qu'il entrait sur l'heure

de l'année.

fin

va faire des

frais

On

cet

opéra

les

personnes qui ont examiné

»,

beaucoup de bien

qui

de

le

journal, que

considérables pour monter avec un luxe

beauté

«

réception

en répétitions pour être

assure, ajoutait

extraordinaire car

la

contient des effets scéniques de toute la

en disent

partition

comptent sur un grand succès. Ces personnes-là, ne serait-ce pas Wagner tout seul? Dès qu'il eut rtni le Hollandais

volant,

il

et

essaya de

le faire

accepter à Leipzig et à Munich

;

mais de

deux villes on lui répondit par un refus, en ajoutant même, de Munich, que pareil ouvrage ne pouvait pas convenir à la scène allemande, et Wagner, en transcrivant cet arrêt du directeur, M. de Kiistner, ajoute ironiquement « J'aurais cru cependant qu'il convenait seulement à l'Allemagne, car il s'attaquait à des cordes qui ne vibrent que ces

:

dans un cœur allemand. qui occupait à Berlin

le

»

Il

adressait alors son manuscrit à Meyerbeer,

poste de maître de chapelle, et celui-ci, toujours


WAGNER

RICHARIJ

40

empressé pour son jeune ami, manœuvrait si bien qu'il pouvait bientôt envoyer une réponse favorable à Wagner. Le 3 avril 1842, la Galette musicale annonçait cette nouvelle en profitant de Toccasion pour explisi la représentation de Bien^i à Dresde avait subi des retards, il uniquement à cause de l'importance de la mise en scène très important aux yeux de Wagner de ne laisser naître aucun

quer que, c'était

était

:

doute à cet égard.

Dès

qu'il avait

appris que Rien{i serait représenté à Dresde,

il

aurait

voulu partir et regagner sa chère Allemagne, où tout semblait devoir lui

sourire

;

mais ses dernières ressources avaient été absorbées pen-

campagne il n'avait plus un sou vaillant. Il rentra misérable à Paris, s'alla modestement loger rue Jacob, 14, dans une maison précédemment habitée par Proudhon; puis il revint demander

dant sa retraite à

de le

la

;

besogne à Schlesinger, et quelle besogne! Giiittarero, la Reine de Chypre, en tira

la

drilles qui s'y

dur pour amasser l'argent

qu'il l'eut

gagné,

sentit son

cœur déborder de

:

il

les

réduisit

pour

fantaisies,

le

piano

les

qua-

trouvaient en puissance, et passa tout un dernier hiver à

travailler

mande

Il

le 7

avril

1842,

voyage.

partit allègrement

en

touchant du pied les

trois

la vie à ses

yeux

:

la

HERR t'

musique de

RICHARD WAGNER

l'avenir

[Eiili\ictc.

n

alle-

il

avait

failli

force créatrice et le ressort moral.

^'r^TTf

essaie sa

terre

la

et

longues années

de misère qu'il venait de traîner à Paris

perdre plus que

Aussitôt

pour Dresde

doux transport et dans lesquelles

dans ce

oubliait

joie

il

nécessaire au

sur les oreilles sensibles de Jolin

de Londres,

H)

mai

1S77.)

lUiIl


CHAPlIRi; RIKNZl

le hollandais

I:T

lENzi

senti

s'était

d'amis et contre

volant,

les

DRESDE.

a

représenté à Dresde

fut

Dès que Wagner il

IV

20 octobre

le

avait mis les pieds dans cette ville,

dans un

milieu

favorable,

de gens prompts à défendre hésitations qui

entravent

assez

erand g»...»^

pour

contenir

par l'architecte seize

opéra

une

un des

était

théâtre, nouvellement

le

Gottfried Semper,

personnes

cents

entouré

son

toujours

œuvre de débutant. L'Opéra de Dresde meilleurs de l'Allemagne, et reconstruit

1S42.

:

on

n'avait

était

rien

négligé pour qu'il se rapprochât le plus possible de l'Opéra de Paris, et

même

on avait

fait

et brosser les décors.

homme

venir des artistes français pour décorer la salle

A

la

tête se trouvait l'intendant royal,

baron de

mais médiocrement doué pour les beauxarts, et la troupe alors comptait au moins trois artistes hors ligne le baryton Wœchter, le célèbre ténor Tichatschek, enfin l'illustre SchrœLùttichau,

aimable,

:

der-Devrient, cette artiste de génie et cette rêvait depuis

si

longtemps d'avoir pour interprète.

reusement déjà avancée dans à force

femme de cœur que Wagner

la carrière,

et,

malheutout en courant le monde, Elle était

de chanter indistinctement chefs-d'œuvre et platitudes depuis

Wagner

vingt années, elle avait contracté certains plis défectueux que et

Berlioz

sont d'accord

pour signaler,

comme

l'habitude d'intro-

duire des interjections parlées dans le chant, d'exagérer son importance

en scène, afin de tout écraser de sa personnalité, etc.

;

mais

elle

n'en restait pas moins, malgré ces défauts qui allaient grossissant avec l'âge,

une

tragique

:

artiste d'une inspiration supérieure et tout elle allait

Mais comment

animée du démon

précisément chanter dans Rien{i.

cet opéra, signé d'un compositeur allemand,

pu trouver grâce auprès de ses juges, dans une

que ce qui provenait de France ou de l'étranger de Rien{i était arrivé à Dresde,

ville ?

«

l'on

Lorsque

le

avait-il

n'aimait

manus-

de peu qu'il ne examen. Le -timbre de Paris intrigua l'intendant royal, qui se décida à en prendre connaissance en présence du maître de chapelle Reissiger, du chef des chœurs Fischer et du ténor Tichatschek.

crit

il

s'en était fallu

fut rejeté sans

6


RICHARD WAGNER

42

Le nom Mais

inconnu,

était

directeur

le

et

d'une

partition

la

de

maître

le

chapelle

énorme

épaisseur

opinaient-

séduit par l'accent héro'ique de la composition.

refus.

Duprez,

ténor, que les journaux de Dresde comparaient à

le

aussi

:

un

pour

ils

fut

entrevit pour lui une

Il

création dans le oenre des grands rôles de la Muette et de Guillaume Tell,

de concert avec Fischer,

et,

par faire accepter l'ouvrage

finit

il

»

'.

Et 'Wagner, à son arrivée à Dresde, y avait été reçu par ces deux partisans avec une sympathie, une cordialité qui lui parurent d'autant plus douces après tant de déboires

jamais, a-t-il dit,

me

bien que

le

et

d'humiliations.

cet accueil

fit

encouragements qu'eût jamais rencontrés secoué par

le destin.

c'étaient

;

les

jeune artiste

le

rudement

si

bien

si

réussi à tailler

patron de notre Opéra, avec beaux décors, grands ballets,

hymnes de guerre

cortèges,

même

dans

plupart

la

tiches

de

invocations religieuses,

et

goût du jour à Dresde, où

le

grandes

des

l'opéra

villes

de sonorité puissante

et

de l'Halévy. Dès que

éprouva une satisfaction et les

compliments

qu'ils lui

en jour. Enfin arriva

un

fut

prètes

:

pour

pour M"'"

le

pas-

banale,

mais

eût fallu partout

il

commencèrent, Wagner pour à voir l'intérêt que lui

le zèle

dont

faisaient

ils

preuve

décernaient plus chaleureusement de jour

jour de la représentation (20 octobre 1842); ce

le

triomphe

réel

des

les répétitions

toute nouvelle

chanteurs prenaient à leurs rôles,

les

assez :

par cela

comme dans

temps, que

musique

d'une

sur

pompeux

était

ne désirait,

l'on

d'Europe en ce

ornés

français

longuement développée et toujours

premiers

»

Cet opéra, que Richard 'Wagner avait le

Je n'oublierai

«

et

pour

Wagner

et

pour

admirable dans

ténor Tichatschek,

principaux inter-

les

le

rôle

Schrœder-Devrient, un Adriano très pathétique

du tribun ,

et

;

pour

Wûst, une touchante et séduisante Irène. Les rôles de Stefano Colonna et de Paolo Orsini étaient tenus par Dettmer et Waechter ceux de Raimondo, Baroncelli et Cecco del Vecchio par Reinhold, Joachim Vestri et Cari Risse. Dès le lendemain matin, Wagner, M"''

;

effrayé

de

la

longueur

du

spectacle,

qui

avait duré de six heures à

minuit, arrivait au théâtre pour indiquer des coupures; mais cjuand revint dans l'après-midi vérifier

il

elles étaient bien portées sur toutes

si

parties, le copiste s'excusa de n'avoir rien fait par suite des récla-

les

mations indignées des chanteurs mon rôle, s'écriait Tichatschek; saient

chorus avec

tations furent I

.

18S2).

Durant

«

Je ne

laisserai

rien arracher de

c'est trop ravissant.

les dix jours suivants,

données devant des

Richard Wagner, par

(Leipzit;,

lui.

:

L. Bernardini, d'après

salles

»

Et tous

fai-

deux représen-

regorgeant de monde, avec

Richard M'agncr's Icbcn

titid

n'irkcn, du

le

M. Glasenapp


RICHARD WAGNER

43

prix des places augmenté, et, lorsqu'à la troisième, Reissiger remit un

bâton d honneur au jeune musicien, ce fut un enthousiasme fou dans

En un mot, Wagner

la salle.

héros du jour,

était le

à

Dresde, au

moins.

A

Leipzig, où dominait l'influence toute classique de Mendelssohn,

succès

son

Le 26 novembre 1842,

moindre.

était

donnée au Gewandhaus par Sophie Schrœder, Tichatschek

Tout

;

bravement que d'idées

publia

Wagner

ce fut

dans

:

demanda au jeune auteur quelques notes l'embryon de son autobiographie,

admiré, contemplé succès,

même

trouvais une

je

ni lieu,

Saxe.

me

je

avec étonnement base

nomination, aussi inattendue royale de

mis à sa célébrité.

sceau

le

N'était-il

avec un

et

de

portrait

Eh

«

il

quoi

!

Communication à mes amis, moi, naguère

la

abandonné, sans feu

isolé,

pauvres

et

il

c'était

tard dans

secs

Journal du monde élégant,

le

par Kietz plus

dira-t-il

morceaux étaient bien

trois

En revanche,

».

sur lui-même les

ces

a

prière de Rienzi,

confondit ensemble et déclara

les

il

la

fragments étaient précédés d'un

ces

Templier, de Marschner,

duo du

soirée

Henri Laube entreprit de vanter

aussitôt,

comme

malheur,

par

une

nièce de M""" Devrient,

Devrient vinrent chanter, l'un

et M'"'

l'autre l'air d'Adriano.

son ami

la

dans

solide

et

trouvais !

De

tout à coup

par

plus,

durable de

naturel

que

l'effet

de ce

ma

bien-être dans

que surprenante, de maître de

pas

aimé,

chapelle

la

m'abandonnasse à de

je

douces illusions, destinées pourtant à être dissipées par un douloureux réveil

?

»

Dès

3o

le

octobre,

la

Ga:{ette

musicale de

l'opéra de son ancien collaborateur avait

Paris

annonçait

que

remporté un succès d'éclat à

que jamais l'enthousiasme du public ne s'était manifesté par des bravos aussi bruyants, Tauteur ayant dû reparaître en scène trois et quatre fois;, puis, dans un numéro suivant, le même journal insérait une longue lettre à laquelle on peut supposer sans trop d'invraisemDresde

et

blance que fait

voir

Wagner

n'était pas étranger.

L'enthousiasme du public ne

qu'augmenter, y disait-on en substance, et Ton ne revient pas de un jeune homme, inconnu jusqu'ici, s'élancer si haut d'un seul

bond

et se placer

d'emblée à côté des illustrations musicales

qui étonne au plus haut point, artiste

cien.

de trouver réunies dans

c'est

deux qualités aussi diverses que

Il

y aurait

un long

récit à faire

par l'auteur avant d'arriver à

la

de sa musique.

de poète et

Pareille

le

même

de musi-

des ennuis et contrariétés subis

représentation de sa pièce,

premières répétitions au piano, ce difficulté

celles

mais ce

;

ne fut qu'un

chose

s'était

cri

déjà

et,

dès les

contre l'excessive vue,

et

l'on

se

souvient des interminables discussions soulevées par Fidelio, dont plu-


RICHARD WAGNER

44

sieurs

morceaux avaient

alors

dans

de sa gloire

plein

le

été déclarés inexécutables

volonté tout ce qui s'opposait à

œuvre

naient contre une

pas malgré tout

en enthousiasme

était

de sa

et

tandis qu'un compositeur jeune et d'artistes qui se déchaî-

et refusaient de l'exécuter.

Il

ne se découragea

parvint à transformer ce mauvais vouloir en zèle,

il

;

lui,

désarmé en face

sans réputation se trouvait

nom

de son

écrasait

il

;

mais Beethoven

;

extraordinaire,

et

succès

le

de

colossal

l'ouvrage

récompense enfin tant d'eiïorts, car, malgré l'augmentation du prix des places, maintenue jusqu'au delà de la septième soirée, on ne voit pas l'afilucnce diminuer. Chanteurs excellents, mise en scène admirable, recettes superbes, tout est à souhait, au dire du correspondant. Et la

musique

n'en dit pas long, c'est vrai, mais c'est soigné

11

?

signaler

les

nombreuses beautés,

approfondie

de

la

en

mieux que moi. Je connaisseurs dont

tâche

partition,

me

que

difficile

bornerai à dire

qu'on n'y trouve point de réminiscences et surtout

cependant

couvrir

les

d'un

maître

mais

voix.

Enfin,

accompli.

modeste en commençant, avec finir,

celle

de Richard Wagner'.

Rien{i

ne

marqué

dont

reproduit

générale,

et

cependant

certaines

grands

exactement

faut

la

reconnaître

parties

d'un

,

commence

l'auteur

souvent

recours par

à l'aigu,

comme

I.

de Fidelio et de Beethoven

l'article

ouvrages

coupe

et ce

serait

français

alors

en

duos,

airs,

que ce pastiche

aussi

cachet

à poindre

particulier

la

y

essaie suite,

formes

diverses

comme

et

par endroits.

ensemble, est calquée sur toutes celles de

son

l'emploi

la

même

auxquelles

fréquent

est

que

le

L'œuvre, époque, il

aura

des violons

ces progressions mélodiques retombant sur un pianis-

Le portrait ci-contre

Kietz, en

il

compositeur

en

réserve

sa

comme une imitation, une exagération des opéras de Wagner s'inspire évidemment pour les récitatifs et la

dans

,

du

il

débu-

d'un

Ce jugement, avec

«

des

rien

non

sans

c'est

si

déclamation

en

diffère

dont

applaudis, trios, etc.;

style

luxe de l'orchestre,

l'œuvre,

c'est

rappel

le

le

équivaut à une signature au bas de

pour

Spontini,

de ces lieux

point

qui se rencontrent dans une foule de compositions modernes.

L'instrumentation, très riche, déploie tout

tant,

unanime des

que cette musique porte partout le abonde en motifs aussi neufs qu'inspirés,

suis l'organe)

je

cachet de l'originalité, qu'elle

communs

rempliront

d'autres

l'opinion

c'est

(et

Pour

donner une analyse

faudrait

il

«

:

premier de Richard Wagner, gravé sur bois par lors de son séjour en Suisse. C'est maître aurait ajouté dessous une pensée manuscrite dont on peut rendre ainsi l'esprit, est

vraisemblablement

le

1843, et reproduit plus tard en lithographie à Zurich,

alors

que

sinon

le

le

texte exact

qui pressent

scii-méme

le

la vie

Le créateur de l'œuvre

:

d'art de l'avenir n'est autre que l'artiste du présent qui désire y participer. Celui-là qui, concevant ce désir, trouve en réaliser, vit déjà d'une vie nouvelle seul, l'artiste a ce pouvoir. »

de l'avenir

moyen

de

le

et

:


'"^^

^.-^^«'. RICHARD WAGNER EN 1^43.


RICHARD WAGNER

46

maximum

après avoir atteint leur

délicieux,

siiuo

on y à en

de sonorité;

surprend déjà cette habileté merveilleuse à manier Torchestre, de plus, certains morceaux, comme la belle tirer des effets inconnus ;

comme

prière de Rienzi, différents épisodes,

point magnifique

tout

et

par

la

musique

scène de l'interdit, de

la

et par la situation, révèlent

un futur maître en ce débutant. C'est ce que les auditeurs parisiens auraient pu reconnaître en 18G9, au lieu de plaisanter; c'est ce que sentirent, à ce qu'il paraît, quelques amateurs de Dresde en 1842, un mouvement d'entraînement causé par l'étrangeté des déterminations de la pensée, qui leur avait paru annoncer un génie créateur destiné à diriger l'art dans des voies noupuisqu'ils avouèrent

avoir

«

subi

Et Fétis, dans sa haine contre l'auteur, rapporte cette appréciation pour montrer combien Wagner, par la suite, avait trompé le ceux-ci n'ont cependant pas si mal pronostic de ces connaisseurs

velles ».

:

jugé. «

écrit

Cet ouvrage où l'on trouve

le feu,

Wagner

la

dans sa Lettre sur

l'éclat

que cherche

la jeunesse,

musique, est celui qui m'a valu en

Allemagne mon premier succès, non seulement au théâtre de Dresde, où je l'ai fait représenter d'abord, mais sur une grande partie des théâtres où

il

donné depuis

est

avec mes autres opéras.

lors

conçu et exécuté sous l'empire de l'émulation dont

impressions

jeunes

Spontini

et le

Aussi

suis-je

l'art

héroïques

de

d'attribuer

elle

à

ni'arri-

et d'Halévy.

composition

cette

une

ne marque encore d'une façon bien

de faire parade à vos yeux de mes triomphes de compositeur,

ment

ici

mais

d'éclaircir

Rienii

fut

des

une direction

pendant

achevé

splendeurs

pour concevoir

le

encore

de mes facultés.

incertaine

mon premier

du Grand-Opéra, et pour me flatter de

désir,

Paris

Ce en

séjour

à

j'étais

assez présomptueux

;

j'étais

l'espoir d'y voir représenter

ouvrage. Si jamais ce désir devait être accompli, vous ne pour-

riez à

coup sûr vous empêcher de trouver,

jeux du sort qui, entre si

opéras

aucune phase essentielle dans le développement des vues sur qui me dominèrent par la suite. Il ne s'agit, d'ailleurs, nulle-

claire

mon

les

l'ai

les

noms d'Auber, de Meyerbeer

les

aujourd'hui

loin

importance particulière; car

face

rempli

Je

moi par

en

genre brillant du grand opéra de Paris, d'où

œuvres portant

vaient des

m'avaient

excitée

long intervalle

ce désir de

et

le

comme

moi, singuliers

les

désir et sa réalisation, a laissé s'écouler

un

accumulé des expériences qui ont

mon cœur.

si

fort éloigné

»

Aussitôt après le succès de Rieii{i, le théâtre de Dresde avait mis

en

répétitions

fût

insuffisant

le

Vaisseau fantôme,

et

quoique

le

au gré de Wagner, en particulier

personnel chantant le

ténor chargé du


lUCHARb WAGNKR première représentation en

rôle d'Erik, la

Le baryton Wa;chtcr représentait Schrœder-Devrient tenait

M"""

créations les plus puissantes'

le

raison que le public ne retrouvait

A

précédent ouvrage.

enleva

le

succès qui parut d'abord

pas à un degré

suffisant

Paris,

Ga:{ette

la

la fin

question

n'était

il

de février,

bonne

la

pompe

la

charmé dans le musicale, toujours prompte à

réloge en ce qui regardait Wagner, proclamait d'abord

une note où

artiste, et

une de ses

fut

musical qui l'avaient tellement

fracas

le

Senta qui

de

rùlc

2 janvier 1843.

le

en grand

mais qui s'éteignit bientôt par

devoir égaler celui de Ricnii,

théâtrale et

donnée

Hollandais

le

elle

:

fut

4-,

que

alors

la

le

de rien moins que de

chute était définitive,

«

elle

succès dans

génie

»

publiait

à

;

un

que le second opéra de Wagner avait remporté un succès au moins égal au premier, plus grand peut-être eu bout d'article expliquant bien

égard aux moyens d'exécution dont l'auteur avait pu disposer Rieii{i,

la

pompe du

«

:

morceaux d'ensemble

spectacle, les grands

Dans et les

dramatiques d'une action plus compliquée pouvaient éblouir

effets

public et militer en

faveur de

Hollandais, où, sauf tout

est

scène finale et

la

Rien de tout

l'auteur.

l'effet

simple et dépourvu de ce que

le

contrer dans les opéras de nos jours. C'est

On

mise en action.

peu goûtée

mais

;

il

en

a

été

tout

est

habitué à ren-

uniment une ballade de ce genre fût

pièce

autrement.

tout

le

du vaisseau fantastique,

public

pouvait craindre qu'une

le

dans

cela

Elle a fait

une vive

impression sur l'assemblée nombreuse qui y assistait, et, dès le deuxième acte, qui fut un véritable triomphe pour M™" Schrœder-Devrient, l'en-

thousiasme

éclata

demandés à grands du

délire.

»

A

dans cris

toute

et accueillis

beau broder qui

Pour consoler un reprendre Rieit{i; mais

la

peu la

salle

;

auteur

acteurs

et

furent

par des acclamations qui tenaient

écrit de loin.

Wagner

de

cette

on

chute,

se

hâta

de

déception n'en était pas moins cruelle pour

un auteur qui voyait tomber le premier, le seul opéra où il eût vraiment mis quelque chose de lui-même, et réussir celui qu'il tenait à bon droit pour un pastiche. Cependant, cinq mois ne s'étaient pas écoulés que le Hollandais volant était joué à Riga avec succès, en mai 1843, et

qu'il

paraissait dans le

de musique,

un

article

journal de l'on

Schumann,

saluait

le

JS^oiirclle

la

nouvel opéra

«

Galette

comme un

signal d'espoir que le génie allemand cesserait bientôt d'être éternelle-

ment

ballotté

définitivement

poème I.

sur les flots de la musique étrangère et qu'il trouverait

en terre allemande un port hospitalier

avait été

soumis à Spohr, qui

l'avait

Daland, Erik et la nuunicc Mary, c'étaient Deitnicr, et M"" Wieehter.

RwHyi,

jugé un Reinhold,

«

c]ui

».

De

plus,

maître-ouvrage

le »

avaient joué déjà dans


RICHARD WAGNER

48

musique

et qui avait désiré connaître la

opéra sur

cuter cet aussitôt

succès

le

bonne voie

On

)k

Wagner

à

en

reconnaît

après Tavoir lue,

de Cassel,

théâtre

le

;

5

l'engageant à le

le

a

exé-

fit

annonça tout

et

juin,

il

persévérer dans

vieux champion de

l'art

la

allemand

d'outre-Rhin. Toujours

est-il musique d'outre-monts et que Spohr fut le seul musicien marquant de la génération antérieure qui ait reconnu et salué dès l'aurore un musicien de génie en Wagner.

pur contre

«

la

Le Hollandais

volant m'intéresse au plus haut point, écrivait-il à son

ami Luder au courant des répétitions. Cet ouvrage est plein d'imagination, de noble invention, bien écrit pour les voix, extrêmement difficile chargé d'instrumentation, mais rempli

trop

et

scène,

sûrement

paraîtra

il

penser que, de tous

ment décida

les

enfin

les

directeurs

qu'ils paraissaient avoir reçu

et

pour lequel

Wagner

et

Wagner

Ce double succès

)i

du théâtre

nouveaux

J'en

clair...

compositeurs de théâtre,

richement doué.

plus

le

intelligible

d'effets

à

suis

à la

;

venu à

est actuelle-

Riga

et à Cassel

de Berlin à jouer un

opéra

seulement par politesse envers Meyerbeer

s'était

dérangé, allant de sa personne à Berlin,

Vaisseau fantôme y fut représenté au commencement de 1844; mais dès le second soir la salle était vide, et l'on ne poussa pas plus loin'.

Finalement,

sans rien obtenir.

le

Dans le Vaisseau fantôme, Richard Wagner a véritablement fait œuvre de poète-créateur, puisqu'il n'avait d'autres matériaux à utiliser que les cinq ou six pages où Henri Heine résume le mélodrame de Fitzball,

que

qu'il

vu

avait

les miitelots lui

jouer

à

Londres,

plus

la

même

légende

avaient racontée au milieu des tempêtes qui retar-

dèrent sa traversée de PlUau à Londres. Dans sa pensée première, on le là^

sait,

cet

dit-il,

opéra ne

que

devait

de

l'éclat

avoir qu'un acte; or, l'on peut voir par

l'idéal

parisien avait déjà singulièrement pâli

à ses yeux et que, pour déterminer

la

forme de ses pensées,

mençait à puiser ailleurs que dans cette mer de publicité s'étendait devant

poème, je

je

«

comqui

Quelle valeur poétique peut être attribuée à ce

l'ignore, ajoute-t-il;

ce que

je

sais bien, c'est que, dès lors,

composant, une toute autre liberté qu'en traçant le de Rien^i; car, dans celui-ci, je ne songeais encore qu'à un

sentis, en

libretto

lui.

il

officielle

le

Ga^eltc musicale de Paris dans son nume'ro du 4 février i''^44: « On a nouveau de Wagner le Hollandais volant. Cet ouvrage a obtenu du succès la première représentation a été dirigée par Meyerbeer; les deuxième et troisième par l'auteur. » Remarquez ceci, d'après cette note émanant de qui l'on sait bien, la troisième représentation a déjà eu lieu; mais dès le numéro suivant (11 février), le journal, s'apcrccvant qu'il a trop vite accueilli » La fortune de cette nouvelle, la rectifie incidemment dans un entrefilet extrêmement louangeur notre ancien collaborateur Richard Wagner grandit tous les jours en Allemagne. On monte à Hambourg son opéra de Rioi^i, pour une représentation que donnera pendant son congé le célèbre chanteur de Dresde, Tichatschek. La troisicinc représentation du Hollandais errant est attendue à Berlin, et le jeune compositeur vient de terminer un nouvel ouvrage intitulé le Tannhœiiser. « I.

Voici ce que disait

la

représente' à Berlin l'opéra

:

;

:

:


•^

CO

O

2

Ji

•-

o

a

z

o

::


RICHARD WAGNER

5o

d'opcra

texte

même

qui

me

duos,

airs,

Dans

sible

principalement

le

trios, etc.,

proposée

ce

coloris

intimes de l'action

même.

introductions, hnales,

chose

je

me

fusse

traits

les

plus

c][ue

des

sortir

richesse pos-

la

superflu

et

toute

et,

intrigue

davantage

le coloris caractéristic^ue

me semblant

tout à fait approprié aux

par conséquent, s'identifier avec l'action

»

C'est

partir

à

et

il

plut à dire, il

de cet o|)éra que 'Wagner, d'instinct, changea

non

qu'abandonnant,

l'histoire,

après

oubliait

tations jusqu'à

sans

de retour,

esprit

une première excursion sur

fit

coup,

fin

ainsi,

le

terrain

celui de la légende.

que cette résolution

lui-même, en parlant la

était

qu'il

11

de de se

dès lors définitive;

eut de grandes hési-

entre un sujet d'ordre légendaire ou un autre de

caractère

historique,

ouvrage.

En adoptant

chaque la

qu'il

fois

légende,

il

nécessaire pour décrire et représenter il

seule

pas

de bannir tout détail

légendaire,

sujet

motifs

la

ne

propres à mettre dans son vrai jour

les traits

:

formes admises et

d"y déployer toute

et

de

était

les

à la vie vulgaire, et, en revanche, de développer

empruntée

mais

réunir toutes

Vaisseau fantôme,

simples de l'action,

sujets

de

obligées de grand opéra proprement dit

chœurs,

du

permit

dut

entreprendre

un

nouvel

se débarrassait de tout le détail le fait

historique et ses accidents;

se trouvait dès lors affranchi de l'obligation de traiter

la poésie, la

musique surtout, d'une façon qu'il jugeait incompatible avec les moyens d'expression de ces deux arts. La légende, à quelque époque ou nation qu'elle appartienne, avait de plus, à ses yeux, la propriété de comprendre

époque et cette nation ont de purement de le présenter sous une forme très saillante et dès lors au premier coup tl'œil. C'est ainsi qu'une ballade, un

exclusivement

humain

et

intelligible

refrain

ce

populaire

que

cette

suffisent, dit-il,

pour vous représenter en un instant

ce caractère sous ses traits les plus arrêtés et les plus frappants.

résumé,

le

«

Au

caractère légendaire assurait donc dans l'exécution un double

avantage du plus haut prix; car, d'un côté, la simplicité de l'action, sa marche dont l'œil embrasse aisément toute la suite, permettent de ne pas s'arrêter à l'explication des incidents extérieurs, et, de l'autre, la plus grande partie du poème peut être ainsi consacrée au dévelop-

du drame, parce que ces motifs éveillent des échos sympathiques au fond de notre cœur. » Voilà bien pour la légende en général remplaçant l'histoire, dans la mais quel motif pensée de Wagner, comme cadre du drame musical

pement des motifs

intérieurs

;

particulier,

quelle

affinité

secrète

avaient

pu

le

pousser à choisir

la

légende du Vaisseau fantôme? 11 y découvre une déformation du mythe d'Ulysse dans l'antiquité, de la légende du Juif errant dans le monde




WACiNKK

Kl cil A Kl)

chrcticn,

nature

mythe et légende qui reposent sur un trait essentiel de la humaine, à savoir lardent désir du repos éternel parmi

tourmentes

les

5,

de

répétées

fantôme, nous retrouvons,

Ainsi,

tlit-il, dans prodigieusement développé, le

vie.

la

«

Vaisseau

le

fonda-

trait

mental du vieux mythe grec. Ce conte de matelots date de l'époque des grands voyages de découverte. Le peuple y a (jpéré une fusion remarquable des deux types précédents. Le navigateur hollandais est

condamné par

de toute éternité, sur

sans repos,

Le terme de

témérité.

comme

tout

errant,

donc à

la

par

l'obtenir

femme en

général,

l'instinct

du cœur

l'était

il

et

patrie idéale.

ne

je

sauver qu'en mourant avec

le

même,

avait-il

comment

et

ouvrage de

lui

mis à

disposé

qui méritât alors

longue série qui s'étend du efi'royable tempête,

hospitalière.

:

«

de

même

la

soif

de

Un

«

le lui.

tel

que

Nouveau-Monde,

Ln

pour

sa

Du

reste,

femme ne

route donc, et en avant! se retrouvait

il

théâtre ce sujet,

le

de poème,

Vaisseau

Wagner,

milieu, dit

le désirer...

et

fantôme à

vaisseaux cherchent abri

le

'

»

lui-

seul

premier de

le

ParsifaI? Par

dans

une

baie

Le premier qui aborde a pour patron un Inup de mer

norwégien que entrer

deux

dévoré

faisais

nom

le

lui

lui-même en ce malheureux

scène ce mythe où

la

avait-il

l'avenir. »

auprès d'une femme, symbole du

final

connaissais pas encore,

Comment

vents ont rejeté à sept milles du port où

les

L'orage touche à sa

partirons demain

!

y

fin, dit-il

au sommeil, en pensant à

la

il

voulait

à ses matelots, reposez-vous, nous

Et tout l'équipage s'endort bercé par

quart du pilote qui rêve au pays, à tôt

était

il

Hollandais n'avait pas découvert

pouvait

une

se reconnaissait

la

femme de

la

dans Paris qui grondait autour de

alors

que son héros, du repos

foyer domestique et de

en un mot,

l'infini,

par l'orage,

le

pousse

le

n'est pas Pénélope,

navigateur battu

ne

mort

désir de la

et

c'est la

"Wagner

cette

Le

lui.

.luif

femme aimante

d'une

sacrifice

le

femme

comme

repos

aspire

il

gardienne du foyer domestique;

pareil à l'Océan,

mon

mort à laquelle

recherche d'une femme. Mais cette la

féminin se trouve développé à

Perdu

châtiment de sa

le

encore inconnu, mais désiré, pressenti, en qui

l'être

je

c'est là

:

ses souffrances est la

courageuse qui se dévouerait pour réponse,

mer

la

du vent) à errer

flots et

Ahasvérus. Mais cette délivrance, encore refusée au peut

il

(symbole visible des

diable

le

la

joie

du retour

chanson de

la

et qui

bien-aimée absente. Alors,

la

cède bien-

tourmente

reprend avec une violence épouvantable, un autre vaisseau, secoué par la

mer en

à son tour

fuiic, et

jette

fantômes exécute 1.

un vaisseau noir aux voiles

la

l'ancre

avec

un

fiacas

couleur de sang, terrible.

manteuvrc sans nul bruit

liiclmrd Vi'aL;nrr d\iprcs

liii-iitciiu\ p.

1

J.S.

;

un

aborde

Un équipage de hcmmc descend à


RICHARD WAGNER

5,

terre et s'écrie avec douleur

écoulé sept années

Le

«

:

La mer me

!

terme

passé

est

dégoût

avec

terre

jette à

encore

s'est

il

;

Ah

...

!

me porter encore !... nulle part la mort telle est ma terrible sentence Nulle part une tombe jour suprême quand luiras-tu dans ma jugement, Jour de damnation. de orgueilleux Océan! dans peu de jours,

te

il

!

faudra

1

!

nuit

?

))

C'est

Hollandais

le

volant,

condamné

l'antique blasphémateur,

de

Juif errant

le

mer

la

c'est

;

à errer sur les eaux tant qu'il n'aura

mort tous les sept ans, la mer le rejette à terre un court moment. Les deux patrons s'accostent, et le Hollandais demande asile au Norwégien Daland pour quelques jours, en

femme

pas trouvé une

brusquement

ma

n'atteindrai toi

«

:

:

yeux l'appât de trésors sans nombre; enfin,

faisant briller à ses dit

fidèle jusqu'à la

As-tu une

patrie.

A

quoi

fille

me

!

sert d'amasser des richesses

consens à cette alliance

convaincre,

et

lui

il

ma femme Jamais

Qu'elle soit

?

?

je

Laisse-

prends tous mes trésors.

»

Le vieux marin accepte au moins de le mettre en face de sa fille, et, mer une fois apaisée, ils prennent tous deux le chemin du port ou

la

les

attend

Dans

la

fille

maison

la

Senta, avec sa

hommes

de Daland.

Norwégien,

du

nourrice

nent gaiement

le

amies,

ses

et

mer; mais,

de

que

troidis

du

soupire

après

jeunes

les

foyer,

clair

rêveuse

la

retour

le

des

chantent et tour-

filles

rouet, Senta seule, absorbée par de tristes pensées, ne

quitte pas des yeux certain portrait

l'interroge; alors,

près

comme

sombre accroché

On

à la muraille.

en extase, avec une passion qui l'enfièvre etia

compagnes l'horrible destinée du marin courir la mer en tous sens sans jamais dispa-

transfigure, elle retrace à ses

condamné par

Eh

bien

!

l'éternité!

Ni

je »

L'infortuné,

repoussé

doubler un cap dangereux,

qu'il voulait «

sort à

mourir.

et

raître

le

par

s'était

tempête chaque

la

un jour écrié avec rage

:

franchirai cette infranchissable barrière, dussé-je lutter toute

Rt l'éternité avait accepté

les railleries

de ses compagnes,

ni

le

défi

fille,

inquiètes du chasseur

les prières

fidèlement jusqu'à

la

mort

«

:

!

«

sacrifice qui saisit

damné, et, dans un qu'il paraisse! c'est moi qui l'aimerai (Jh La porte s'ouvre Daland paraît condui-

qui la pousse irrésistiblem.nt vers

élan suprême, elle s'écrie

marin

de l'audacieux

Erik, son fiancé, ne peuvent calmer l'ardent désir de cette jeune

fois

le

!

:

sant son hôte par la main, et Senta, reconnaissant son mystérieux bien-

aimé au regard sombre, vole allègrement au-devant de père

la

laisse avec

fidélité jusqu'à

reprenne

la

la

mer,

l'étranger, elle se

m.jrt.

— Le

dévoue à son

délai fatal expire.

et déjà la silencieuse

a

;

dès que son

salut et

faut

Il

manœuvre

lui

que

lui

le

jure

maudit

commencé pour

le

départ. Alors Senta se sent faiblir en écoutant les doux reproches d'Erik qu'elle aimait avant d'avoir appris quelle

fatalité

pèse

sur

le

marin


WACNRK

RlCllAin)

damné;

elle

cède au doux réveil d"un juvénile amour,

tombe entre

landais vient pour la prendre, elle est

donc

fait

:

crient les matelots, et l'impitoyable

ses

amies

retiennent

la

dans

SCÈNE FINALE

les flots.

Ii

U

«

;

suivre

le

HOLLANDAIS

coup

à

VO

[.

A N

le

T »,

son

vaisseau maudit

A

C'en

avec fureur.

vainement

:

Hol-

le

d"I-]rik.

échappe, escalade un

elle leur

Tout

quand

marin désespéré. 11 « En mer, en mer! »

tempête reprend

vaisseau s'éloigne. Alors Senta veut

et se précipite

le

reprend son éternel voyage.

et

et

bras

les

pas de rédemption possible pour

remonte à son bord

Erik,

53

Le

père,

rocher s'abime

DRESDE (1843)

d aprLs une cr.iviirc du temps.

dans

les

nues

le

Hollandais

Dans encore

profondeurs de

;

et

la partition

la

mer,

et l'on

voit

apparaître au milieu

Senta transfigurés par l'amour

du Vaisseau fantôme,

mais, aussi bien dans l'ensemble

la

et le

des

dévouement.

mélodie d'opéra domine

de l'œuvre que dans chaque

page en particulier, se révèle une tendance à fondre les divers éléments du drame et les différentes parties de l'ouvrage en un tout poétique et musical entièrement homogène. avec

la

11

s'en faut bien

que l'auteur

coupe des morceau.x déteiminés, quoique

avec les récitatifs tende à disparaître;

il

le

ait

lonipu

point de soudure

s'en faut bien qu'il

renonce à


RICHARD WAGNER

54

chanter les personnages ensemble, qu'il répudie cavatines ou points

faire

d'orgue et qu'il ne subordonne pas tout par vocal

nombreux

mais, malgré ces

;

moments

purement

à l'efiet

vestiges de l'opéra conventionnel, on

ressent à l'audition de cet ouvrage une impression toute particulière, et

amateurs de Dresde en 1843. moins autant du poème que de la musique et sur-

c'est ce qu'avaient très bien discerné certains

Cela découle pour de

tout

fusion

la

le

tentée entre ces deux éléments

Wagner,

l'opéra, car

de l'opéra, oui, de

faut bien appuyer là-dessus, n"a jamais employé

il

d'autre intitulé, jusques et y compris Lohengriii.

n'y a plus là simple-

Il

ment juxtaposition, "comme cela se produit par exemple avec Berlioz, qui compose également lui-même et ses vers et sa musique, mais à la il semble y avoir chez Wagner enfantement simultané, et l'on sent suite très bien, dès le Hollandais volant, que le poète et le musicien, éclos ;

successivement dans

individu et développés isolément, se joignent

pour ne plus jamais se quitter,

ici

grande

originalité de

marcheront dès

qu'ils

même

indissolublement dans un

et s'uniront la

même

le

lors de front

Telle est, telle sera

idéal.

Richard Wagner, chez qui

poète

le

et le

musi-

cien rêvent, conçoivent, travaillent et créent ensemble et d'un seul

jet.

ne se dégage pas encore de Gluck, puisqu'il ne se

fait

Assurément,

il

pas faute de répéter les paroles pour produire un effet purement musi-

déclamation procède évidemment de ce modèle.

et sa

cal,

non plus affranchi

de

lintlucnce de

Weber, qui

n'est pas

11

se fait sentir surtout

dans son admirable maniement de l'orchestre, dans

couleur terrifiante

la

des épisodes surnaturels et dans la fraîche simplicité de certaines mélodies

;

sante

mais ces ressouvenirs se fondent déjà dans une personnalité puisne reproduit pas seulement,

qui

supériorité

mais

crée.

c|ui

Au

fond,

la

du Vaisseau fantôme sur Rien^i consiste en ce que

vraie

l'auteur en a rejeté tout ce qui, dans l'opéra, se rattache indirectement

au drame ICI

les

ne vient

et

qu'il

est

devait venir

il

emploie encore

subordonne au drame adoptant

le

irrévocalile-

mythe au

si

bien en aide à Richard

appelé

conçues, d'un hasard.

fanto?ne,

première apparition de

il

«

il

son

na «

écrivit

a

«

la

le

la

de

Wagner pour

répéter

était

si

que,

par

peu

lorsqu'il

ballade de

le

Vaisseau

mélodie caractéristique qui

le

que cette innovation

raconté

d'abord

pivot musical de tout

de

cessé

système

parti pris n,

Lui-même

lieu

arrivera.

(pi'il

la

Comme

Ht

toujours

du

;

autre clément nouveau qu'il convient de noter dans

fantôme idéal.

les

il

tendait d'ailleurs en

histoire, et c'est là

Un

que pour éblouir ou étourdir

formes de l'opéra, mais

ment. C'est 1

la

atteindre à son

suite, ce qu'on a

résultat d'idées préfut a l'origine

composa

le

Senta, qui devint

un

effet

Vaisseau

comme

le

l'ouvrage, et qu'ensuite, à mesure qu'il abordait



RICHARD WAGNER

5b

du drame,

les différentes situations

mélodies qu'elles

évoquaient chez

elles

les

lui

avaient tout d'abord suggérées et qui tendaient à

lui

se modifier, à se développer parallèlement aux sentiments en jeu,

pu dès

qu'il aurait

tielles

c'est à quoi

:

développement de deux ou

le

bien

mélodies essen-

trois

devait arriver par la suite, mais

il

si

en suivant cette impulsion naturelle, bâtir son

lors,

ouvrage entier sur

mêmes

était

il

encore

trop imbu des habitudes de l'opéra courant pour ne pas suivre la voie

autant de motifs

ordinaire et ne pas se contraindre à trouver presque

de morceaux à composer. Cependant,

différents qu'il avait

apparue

dégage de l'ensemble du Vaisseau fantôme un charme nou-

se

S'il

qu'à germer.

elle n'avait plus

:

l'idée était

veau, une impression de force et d'individualité saisissante, aussi que certains fragments, tels que l'ouverture, lots,

ballade de Senta,

la

chanson du

la

absolument propres à Richard Wagner. repose

véritable

de

celui

soit

traires,

damnation

la

lutte

de

celui

et

damné

sont des créations

notamment, un

L'ouverture,

sur la

déjà

faut dire

pilote et, par-dessus tout, les

élans de désespoir ou d'amour du malheureux

chef-d'ceuvrc,

il

chœur des mate-

le

de deux motifs condélivrance, de la

la

perdition ou du salut, du plaisir sensuel ou de l'amour rédempteur, de

pédante

science

la

sur

finalement

par bien

la

suite

le

cju'un

en

pris

gens bizarres, nouvelles.

tives

avec

ainsi

qu'il

et

dont

le

bon prévaut

devait souvent le

une incomparable grandeur.

ouvrage

masse,

c'est

génie,

libre

mauvais,

toujours

et

singulier

auditeurs

du

ou

aussi

en

personnel, tout

pratiquer 11

eût été

rebutant

les

ne trouvât pas quelques zélés admirateurs,

possible,

mais dont

Cela se produisit, en

l'esprit fût

et

effet,

ouvert aux tenta-

cette

adhésion d'amis

douce à ce point, après ce douloureux échec, qu'il prit alors une résolution nouvelle. .« De Berlin où j'étais complètement inconnu, dit-il dans sa Communication à mes amis, je reçus de deux inconnus

fut

lui

que l'impression produite par amenées vers moi la première satisfaction

personnes qui m'étaient étrangères le

Hollandais volant avait

complète

dans

qu'il

et

,

m'eût été donné de goûter, avec l'invitation de continuer particulière

la direction

que

m'étais tracée. Dès ce

je

moment,

je

perdis de plus en plus de vue le véritable public. L'opinion de quelques

hommes

intelligents prit chez

peut jamais bien tions dans

saisir,

mes premiers

la

place de l'opinion de

encore qu'elle eût été l'objet essais, alors

la

lumière. L'intelligence de

et

pour m'assurer d'être

n'avait

moi

m3n

suivi, je

la

masse qu'on ne

de mes préoccupa-

que mes yeux n'étaient pas ouverts à

but

me

devint de plus en plus lucide,

ne m'adressai plus à cette masse qui

aucun rapport avec moi, mais bien aux individualités dont

dispositions

et

les

les

sentiments étaient analogues aux miens. Cette posi-


RICHARD WAGNliR

5?

tion plus sùrc, relativement à ceux qui devaient recevoir

cations, exerça désormais d'artiste.

»

une influence

Et Fétis a beau

rire,

il

n'empêchera pas que

blement supérieur ne doive toujours ayir ment.

11

d'emblée,

faut et,

forcément

dans

les

mes communi-

très importante sur

ainsi, plus

quand

transiger,

on

ou moins radicale-

veut

en peu de temps.

RICHARD WAGNER DANS LE CItL. geiuilvotre accueil duirez jamais

;

d'eflct.

aiif^cs

mais sans timbales

ni

:

i'

Mes

ciiers îin^e>, 1res

tiompeltes, vous ne pro-

»

[Kikcrilii

de \'ieunc. iS février iSS3.)

caractère

l'artiste vérita-

questions d'art, qui transige est sûr

Richard Wûg;ner, s'tidrcssaiU aux

mon

plaire tic

à

tous

tlisparaitre


CHAPITRE

V

RICHARD WAGNKR MAITRE DE CHAPELLE A DRESDE

RETOUR DES CENDRES DE WEBER

LA VESTALE ET SPONTINf.

LA SYMPHONIE AVEC CHŒURS.

in

après

jours

roUiut,

soit

comme

porté,

1843,

jour,

Morlacchi trelli

meuré pelle

;

fait

Depuis que Rien^i avait

avait

diriger en chef la

agréer Morgenroth

fait

comme

Reissiger, de-

chapelle et le théâtre

sous-directeur de la cha-

lui

Dès

preuve en dirigeant Rienii

tant le rude et ingrat

présenter,

métier

représentèrent

qu'il

n'était

les

succès

le

;

;

sa

dont

même

de

mais

il

hésitait à se

fait

à

Kœnigsberg

qu'il avait

Cependant

avait inspiré de dégoût.

qualités

lors, et

pour cet emploi

l'emportèrent sur ces souvenirs

la nécessité

le

besoin de vivre et

femme

et ses

amis

lui

dans une situation à laisser échapper

pas

un emploi permanent, avec appointements la

musique Ras-

la

produit deux vacances.

cet opéra semblaient le désigner

Riga

du directeur de

exclusivement de l'orchestre.

s'occuperait

et à

en amélio-

nouveau maître de chapelle qu'on nommerait de ce côté

le

Wagner

succès

on avait décidé que, vu Tlmportance du travail au

en outre,

théâtre,

grand

un

rem-

mort du maître de chapelle adjoint

et celle

avaient

moment pour

seul un

ensemble, avait

la

avait

devait le fixer à Dresde,

rant beaucoup sa situation. le

Hollandais

Wagner

chef d'orchestre,

personnel qui

vu

du

représentation

la

lo janvier

le

EN AULIDE

IPIIir,i:NIE

fixes, et

il

se décida à disputer

place à Louis Schindelmeisser, beau-frère de Dorn, qu'il avait connu

autrefois à Leipzig

et

qui

se croyait sûr

représentation de concours, avait choisi la

du succès. Celui-ci, pour Vestale ;

sa

Wagner, peut-être

en souvenir de son adoration d'enfant pour Weber, choisit Euryanthe, et

Wcber

paraît,

par

la

que

porta

lui le

bonheur

il

:

poste de directeur

protection

de

M. de

chapelle, à 5,625 francs, et

le

de

n'ambitionnait la

Lûttichau,

brevet

d'abord, à

ce qu'il

musique, à 4,5oo francs, mais, il

lui

obtint

en

était

celui

de maître de

délivré à la fin

de

janvier 1843.

La cérémonie de de serment eut

lieu

sa présentation le

2

février,

à la chapelle et de sa prestation le

lendemain du jour

oii

Berlioz,


RICHARD alors

ciTectuant

Dresde Ft

première tournée

sa

Wagner

pour Berlioz que

c'est

en

5(,

Allem'done,

d\mc

trouva dans tout Tenivrement

le

il

;

\VA(JNF, R

Le maître

suspecte.

soirées à cause de

seulement

marche ôiOlympie mais

;

somme, mômes. était,

M"'^

Devrient,

M"^"'

Wiest ;

assez

yeux

ses

(Wi^ist)

enfin

plus vive

le

par son

belles, avait

grande

à

passionné,

dit-il,

d'Irène

paraissent

interprètes

les

dans

«

baryton talent

appropriée

Wœchter

avait

pur et bien

si

jeune

et

pour

l'auteur.

œuvres

garçon dans

i?/e;/{/,

exercé

peu

que

en

possède à un

Dresde un souvenir

tel

l'action

lui

même

qu'une

de

mît

cœur

Berlioz,

dit

mais

partit,

temps de

la

des plus

temps

Berlioz

qu'à quelque

insignifiant

voix,

sa

l'artiste

degré très élevé.

Rienii, ou

rôle

sur :

Tichatschek

dans

au

complet

vibrant

En

les

Vaisseau fantôme ;

le

bien

fort

puissance expressive,

à

laissait

et

Vaisseau

le

que

frappé

héroïque, entraînant

brillant,

était

plus

en

ridicule

dans

chez

d'invention

l'avoir

un timbre onctueux

les

magni-

la

sombre

coloris

le

'c

le sujet

de sensibilité dans son chant, et ces deux qualités-là,

Waschter

bien

y avait remarqué une tendance à abuser du trémolo, ce

il

relevée

s'était

apprécié

signe de paresse et défaut

qu'il jugeait

d'opinion

sujet

mais non servilement, sur

avait

Il

son

à

avoir prêté grande

pas

d'une belle prière au dernier acte

«

taillée,

».

parait

pas

orageux bien motivés par

efi^ets

fantôme

ne

11

n'avait

et

se souvenait

il

;

certains

et

longueur.

sa

dune marche triomphale

fique

pas

n'est

français entendit le J'aisseaii faiitàine et seulement

à cet ouvrage

attention

et

avec zèle et

fit

et sa parole

derniers actes de Rieiiii, qu'on s'était décidé à jouer en deux

les trois

arrêtée

lui-même en témoigne

Berlioz

:

à

naturelle.

eut à exercer pour la première fois

son autorité en l'assistant dans ses répétitions, ce qu'il

de grand cœur

arrivé

était

joie bien

là,

il

comme

Wagner

faisait exécuter son ouverture de Faust, on la prit pour un fragment de la Damnation de Faust, et on l'applaudit en conséquence auquel des deux la méprise a-t-elle dû causer le plus de déplaisir'? :

La place attribuée à Wagner était loin de constituer une sinécure. Des représentations à conduire tous les soirs de l'année au moins trois ;

pièces, et

généralement

sans parler de

la

cour: telle était et

les

trois

et quatre

musique ordinaire et des concerts exceptionnels à la la besogne à répartir entre le directeur de la musique

deux maîtres de chapelle,

et surveillant

conduisant exécution

à

de

ia

opéras difiérents par semaine,

musique

l'église

certains

le

le

premier dirigeant

d'église les jours de

dimanche

opéras.

F'n

et

les

semaine;

représentations les

deux autres

répondant chacun de

acceptant

ces

lourdes

la

bonne

fonctions,

I. Dans ce cnnccrt iloiinc le 2-i juillet \>>^^ au bénclîce des pauvres, il avait fait exécuter, outre sou ouverture pour Faust, \a Symplnmic pastorale et la Suit de Walpurgis, Je Mcndeissohn.


RICHARD WAfïNER

tjo

Wagner

;

général. Mais tous

cédé au désir de s'assurer

aussi

s'était

il

Dresde

ne mit pas plutôt

il

côtés

même

la

parvenu à vaincre

inertie

main

la

heu-

ricochet, sur l'art en

à l'ouvrage qu'il rencontra

mêmes

les

et

par

et,

une exis-

d'exercer une

de l'espoir

flatté

de

l'Opéra

influence sur

reuse

de

pas seulement

n'avait

tence honorable

préjugés

qu'il

n'était

trois mois à peine qu'il y en fonctions lorsqu'il subit un premier assaut à propos d'une repré-

pas était

ailleurs.

Don Juan

sentation de

qu'il

avait

II

26 avril 1843, avec une

avait dirigée, le

profonde admiration pour Mozart, mais en e.xécutant l'œuvre ainsi

qu'il la

que son exécution s'écartait sensiblement de la tradition ayant cours à Dresde, tradition bonne ou mauvaise, venant de Mozart lui-même ou introduite par les maîtres de chapelle Morlacchi et Reissiger, peu importe^ mais tradition toute-puissante et qu'il fallait sentait.

Or,

se trouva

il

être fou pour vouloir modifier.

au

crièrent

teurs

On

le

lui

scandale, et certain

bien voir; les vieux

fit

affirma que l'auteur de Rien:;i et du Vaisseau

incapable de comprendre

comme

vous voyez,

et

Wagner, un sauvage et

enchérissant

critique,

fantôme

était

ama-

sur eux,

un barbare

remonte assez

Mozart. Cette chanson

loin,

ce n'est pas d'hier qu'on a cherché à assommer

de vacarme, en

aflolé

opposant

lui

le

séraphique

mélodieux maître de Salzbouro-.

Wagner, par un rôle dans

les fêtes officielles

hymne composé par

d'un

statue

du

feu

présence du

royaume.

roi,

et

souverain,

Un

an

cantate intitulée

:

dence d été de

Pillnitz.

:

ainsi

c'est

en dirigea

qu'il

des corps tard,

de

lorsque

composa

il

les

la

qu'il

écrivit

la

l'exécution, le 7 juin

des

et

l'filtat

avait

il

musique

la

le

la

1843, en

du

députations

Frédéric-Auguste paroles et

Salut au Roi, qui fut chantée,

Entre temps,

cour et tenu de jouer

pour l'inauguration de

l'avocat Hohlfeldt,

plus

voyage en Angleterre,

de

était à la solde

sa place,

revint

musique

d'un

d'une

12 août, à la rési-

écrit

une œuvre plus

importante,

dédiée par reconnaissance à M""-' Charlotte Weinlig, la veuve de son premier maître qui venait de mourir, et voici dans quelles circonstances

il

des Apôtres.

En

la

Liedertafel,

avait

il

composé ce grand

sa qualité

avait

diriger une réunion

tableau

de chef d'une

été

choisi

oénérale de

avec

toutes

Société

Heissiger les

de la Cène

biblique

chorale

pour

Sociétés

d'hommes,

organiser et

chantantes de

la

La fête commença, le 6 juillet 18^3, par un concert monstre, en église Notre-Dame, la plus vaste de Dresde les chanteurs, au nombre de douze cents, étaient groupés sur une estrade élevée dans le chœur et, derrière eux, encore plus haut, se trouvait l'orchestre composé de Saxe.

1

cmq

:

cents artistes et amateurs. Les souverains arrivèrent à midi précis

et tout aussitôt

commença

le

festival

:

le

morceau de Wagner venait


iviciiAKi) wa(;ni:i{

en dernier. Voici

pour célébrer

blés

nouvelle qu'il

nom

le

d'en

que leur

vœu

détendu,

par

divin,

l'esprit

convertir

le

le

d'en haut annonçant

Saint-Esprit les secourir.

le

et

Un chœur

quarante disciples assemblés,

Alors,

elles

;

disciples

les

de quarante

et,

partent

hommes

pour

aller

représentait

pour mieux rendre

l'effet

Wagner

descente du Saint-Esprit,

la

la

annoncent aux siuppliants vent mugit, le sol tremble et, enivrés

apôtres

les

monde.

apportant

dans cette détresse,

faiblir et,

ctjeur

haut se font entendre :

arrivent,

sous peine de mort, d'enseigner au

Seigneur d'envoyer

va être exaucé

Les disciples sV'tant rassem-

:

les apôtres

saint repas,

le

leur a été

voi.x

conçu

l'avait

il

de Jésus. Tous sentent leur

supplient

ils

des

comme

c,

des

les

voix

avait imaginé

de faire chanter ce petit chœur mélodique et d'une grande douceur

du haut de

la

Cette disposition purement

coupole.

l'auteur a tiré plus tard

distingua

la

un beau

parti

matérielle, et dont

dans Parsifal,

critique dans l'œuvre nouvelle

:

elle

ce que

fut tout

divertit agréable-

s'y

ment et resta sourde à l'admirable crescendo qui annonce la descente du Saint-Esprit et que l'orchestre, jusqu'alors muet, traduit avec une force extraordinaire. A quoi sert-il d'avoir du génie avant le temps'? La direction du théâtre avait décidé de faire une reprise solennelle de la Vestale pendant l'automne de 1844 réussir avec une Julia telle

et,

comme

devoir

elle paraissait

que M""' Schrœder-Devrient, Wagner,

par un sentiment d'admiration envers Spontini, qui venait de quitter

la

direction de l'Opéra de Berlin dans des circonstances très pénibles pour

son amour-propre, vieux maître il

avait

persuadé au baron de Lùttichau d'inviter

diriger son

à venir

La chose une

opéra.

fois

n'avait laissé à personne autre le soin d'engager Spontini,

écrit

lui-même une

lettre

Spontini répondit qu

il

pas de l'excellence de

naïvement de

telles

en français qui produisit

accei^tait

musiciens de l'orchestre que

dant et chez M""^ Devrient

Wagner, leur

et qu'il

Par malheur,

exigences quant au nombre

lui

il

avait

ne doutait

marquait très

il

exécutants

des

tout désolé, courut

conter son

convenue,

meilleur effet, car

le

avec reconnaissance

l'interprétation.

le

embarras.

chez

Otte

et

des

l'inten-

dernière,

de bon cœur de l'imprudence commise, mais elle s'offrit en même temps pour la réparer et, comme le vieux maître marquait assez de hâte de regagner Paris, il tut convenu qu'on l'avertirait d'un retard interminable occasionné par une indisposition de M™ Schrœder, qui servait ainsi de bouc émissaire. Ainsi fut fait et l'on qui connaissait bien Spontini,

répéta

rit

tout tranquillement sans plus

s'inquiéter de

Spontini,

— e'crivait

lorsque,

" le correspondant Ce derniei- ouvrage, dont la conception est des plus hardies, habituel de la Gai^cttc musicale, a produit un effet grandiose et qu'il est impossible de décrire; aussi, le roi, après la riu du concert, a-t-il fait appeler, dans sa tribune, le jeune auteur et lui en a-t-il 1

.

témoigné sa satisfaction dans

les ternies les

plus affectueux.

»

à Paris


RICHARD WAGNER

62 la

de

veille

et lui

répétition générale,

la

démontre,

il

formait strictement aux nouvelles

de ce jour

était

et qu'il

tombe

tout

à

indications ses

Wagner,

à limproviste chez

en main, qu'en arrivant à cette date,

lettre

cju'on

lui

amis de Dresde

:

se con-

il

avait envoyées il

ne s'en

irait

qu'après l'opéra joué.

Malgré ce coup inattendu, Wagner ne pensa d'abord qu'au plaisir de voir de près ce grand compositeur et d'entendre une de ses œuvres sous sa direction; il l'assura que tout marcherait à merveille et, pour ne laisser dans son esprit aucune arrière-pensée, il lui proposa de diriger lui-même la répétition générale, fixée au lendemain. Le visage de Spontini se rembrunit, puis, après un grand moment d'hésitation, il

demanda lement

;

à

Wagner de

quel bâton

demanda

pour conduire habituel-

d'ici

si

bâton d'ébène, d'une longueur

se servait

mesure d'un bâton ordinaire; alors, le au lendemain on pourrait lui faire un

celui-ci lui indiqua la

maître soupira et

il

d'une grosseur extraordinairement appa-

et

deux bouts par de fortes pommes

rentes, et terminé aux

Wagner

d'ivoire.

répondit sans hésiter par l'affirmative, et Spontini se retira pleinement satisfait. le

Aussitôt libre,

Wagner court répandre

menuisier, qui promet de fabriquer un bâton jouant fort bien Tébène

dans

et

tini

conditions requises. I,e lendemain, au

les

bâton; alors, au lieu de

avait son

un chef d'orchestre ordinaire, et le il

l'alarme et s'entendre avec

comme un

brandit

fut évident

les

le

voulu, Spon-

bâton de maréchal. Dès

recommencer toutes

les

comme

prendre par un bout

l'empoigne à pleine main par

que rien ne marchait au

entendait faire s'efforçait,

il

moment

gré

du

milieu

le

premières scènes,

les

compositeur

études sur nouveaux

et

qu'il

frais.

11

en baragouinant un allemand des plus bizarres, à redresser

fautes de l'orchestre,

nœuvres des comparses

même, avec une

les défaillances

qu'il

faisait

des chœurs et jusqu'aux ma-

recommencer en

obstination infatigable.

Alors

les

Wagner

dirigeant luise rappela les

évolutions analogues exécutées à Berlin, qui l'avaient tellement frappé

dans Fernaud Corte:{ drait

précision

cette

effrayants.

Bref, à

seur, tous prirent

de

déférence en

pour

mieux

Devrient,

qui

la

;

il

comprit aussi que jamais à Dresde on n'attein-

mécanique fin

qui

produisait

des effets

avait

presque

du premier acte, chanteurs, musiciens,

Wagner emmena Spontini avec des l'assurant que ses vœux seraient accomplis la

tuite.

répondre,

y

et

on

allait

présentes à

mander

l'esprit

les

au

plus

vite

régis-

paroles et

que,

Edouard

moindres traditions de

la

Vestale à Berlin.

Tout

était à

il

recommencer. Le personnel, surtout

le

chef des chœurs,

seul, Wagner ne faisait pas grise mine à Spontini, tant admirait l'ardeur extraordinaire que celui-ci mettait « à pnunsnivre

était turieux;


R

un but de

et à maintcnii'

époque

».

Cil AU'

WAGNER

1)

chanteurs

les

fier

en mieux

la

de

certains

03

peu

ilranuitiquc à

ait

près

oublié

de son de son habitude de traiter sans ménagements plus réputés, il profitait de ses exigences pour modi1

de l'orchestre,

disposition habituelle

doutes et

de

profitait

ses

judicieux

enhn l'énergie avec laquelle

remarquait

accents rythmiques, bief,

les

'

était frappé

Il

les

sortir

I

de son zèle en

lui

donnant un

musique tlramatique

à la

le

avis charitable;

Quand

«

:

en affection

prit-il

entendu votre

j'ai

jour qu'ils dînaient chez la Schrœder-Devrient, «

homme

de génie, mais déjà

expliquer ce paradoxe, qui

ai

fait

grande révolution avec

la

longation de

la sixte

avec Corte^,

remonta en arrière

il

dans l'harmonie,

fait

j'ai

un

en

pas

la

«

:

avant,

me

surpasser. Or,

puis

j

en

ai

comment voulez-vous

du nouveau lorsque

sible à n'importe qui d'inventer

«

Et, pour

moi

c'est

introduit la

j'ai

un

(,lit-il

pro-

grosse caisse dans l'orchestre; trois

fait

Olympie et cent avec Agnès de Hohenstaiifeu. Après cela, composer les Athéniennes, un poème excellent, mais j'y désespérant de

payer

C'est un

«

:

Après Gluck,

Vestale,

et la

der-

le

Riciiyi. lui

pensé

j'ai

a plus fait qu'il ne peut faire.

il

res-

conseilla de renoncer

lui

il

vnulut-il

et

il

dévouement

nier représentant de la tragédie Ivrique et lui montrait un

respectueux. Aussi Spcmtini

lui

lit

par ce

intéressé

tort

était

il

s'ouvrait à

pour (pidn

insista

il

il

éclaircissements;

avec

j'aurais

pu

ai

renoncé,

qu'il

soit pos-

moi,

Spontini,

je

reconnais ne pouvoir surpasser mes œuvres antérieures, et que,' d'autre part,

il

que depuis

est bien évident

la Vestale

de musique qui ne m'ait été volée?

on n'a pas écrit une note

Et Spontini

»

appuyait cette der-

Tout étourdi

nière affirmation de faits scientifiquement constatés.

Wagner

risqua une objection timide et

qu'il

demanda

fût

de ce discours,

s'il

ne se sentirait pas de force à créer des formes nouvelles en abor-

dant un sujet entièrement nouveau. Spontini «

Dans

Corte-^,

la

Vestale, dit-il,

un

sujet hispano-mexicain;

j'ai

eut

un

lui

sourire de pitié.

un sujet romain; dans Fernaud

traité

dans Olympie, un sujet gréco-macé-

donien; enfin, dans Agnès de Ho/ienstaiifèn, un sujet allemand reste ne vaut rien.

:

tout le

»

Malgré ce phénoménal amour-propre, exaspéré par

l'irritation

de se

voir supplanté par des musiciens qui ne le valaient pas, Spontini, tout ridicule et vieux qu'il fût, avait artistes à force d'énergie,

qu'on rétablit primait

la

après leur délivrance),

de

pas, surtout par

|5ar

la

travail.

les

ne se

et chcjeur

sympathies des

et lorsqu'il

exigea

joyeux (qu'on sup-

duo de Licinius et de Julia trouva personne pour réclamer contre

terminant sur il

regagner

de confiance en lui-même,

scène finale, avec ballet

d'habitude en

ce supplément

fini

le

Peine perdue,

la

représentation

ne

réussit

faute de la Schrœder-Devrient, qui, se sentant elle-


RICHARD WAGNliR

(3_^

même

marquée pour le rôle, à côté d'une y^randc-prètresse aussi charmante que Johanna Wagner, prétendit réparer ce désa-

trop

jeune et

vanta'^e à force de patliétique et dépassa le but en redoublant d'efforts.

La

soirée fut donc n'étaient

nèrent

froide

assez

qu'un

et

applaudissements qui

les

hommage rendu

à

la

gloire

la

termi-

universellement

consacrée du maître. Aussi "Wagner éprouva-t-il un sentiment pénible en le voyant s'avancer sur la scène, chamarré de décorations, et se confondre en saints pour un

maigre rappel. Afin d'éviter une déconvenue plus criante, M"" Schrœder-Devrient imagina de prétexter encore une indisposition, pour reculer la deuxième représentation de la Vestale, que Spontini

alors

si

laissait

percer

déjà

secret désir

le

d'être

invité à

prolonger son séjour à Dresde et d'y monter la série complète de ses il venait opéras. Mais il eut tout à coup hâte de quitter Dresde d'apprendre que le roi de Danemark lui conférait des lettres de noblesse :

pape l'honorait du titre de comte de San Andréa. Il oublia du coup la Vestale, au grand contentement de ses hôtes, et partit laissait de sa personne un il presque immédiatement pour Paris souvenir à la fois comique et enthousiaste au jeune musicien qui lui

et

que

le

:

promit, au

moment

carrière dramatique

des adieux, de

méditer à

le

ses

avis

sur la

mal ses conseils.

et qui suivit si

Peu de temps après, eut lieu

loisir

retour des cendres de "Weber à Dresde,

décembre 1844, et cet événement, dit Wagner lui-même, influa beaucoup sur les dispositions où il se trouva au moment d'achever Tannhœuser. Un comité s'était formé depuis longtemps pour ramener à Dresde la dépouille de Weber qui s'était éteint à Londres, où il était allé diriger Oberon ; mais la propagande était insuffisante et, de plus, on se heurtait aux scrupules religieux du roi, qui répugnait à troubler le dernier sommeil d'un mort. Wagner, une fois en fonctions, reprit les

14 et i5

cette idée avec

un suprême lui

hommage

avait procuré

comme

saluer lui

une énergie inimaginable

avait

plus,

il

11

fallait

première jouissance musicale,

c][u'il

se plaisait à

comme un

souffle

de

la

patrie

allemande avec

le

que de l'initiative privée, et, de mauvais vouloir de l'intendant royal

n'y avait rien à attendre

vaincre avant tout

qui, ne voyant en

à l'étranger. Alors

le

"Weber qu'un maître de chapelle ordinaire, craignait et

qu'on ne

en Saxe avec grands honneurs tous

fût,

les

par

la suite,

obligé de ramener

maîtres de chapelle qui mourraient

Wagner, ayant accepté

de tous côtés

des concerts,

de rendre

au musicien allemand par excellence, à celui qui

de créer un précédent

lança

c'est qu'il s'agissait

son maître et qui, durant son temps d'épreuves en France,

apporté

Freiscliùl^.

sa

:

le titre

de président du comité,

des appels, recueillit des souscriptions, organisa

décida certains théâtres d'ordre inférieur à donner des




uu; reprciscntalidiis

A Kl) \va(;ni:k

de

hcnclicc

ati

Il

05

en

une l'C^iKTa de Meyerbcer, qui rapporta 2,000 thalers bref, bien (pie la ilirection du théâtre de Dresde ne rtjcuvi'c,

obliiit

it

Berlin, par l'eiUrcmisc de il

manieuvra

tanl et

si

;

put pas rester en arrière et qu'on eut bient(U réuni

somme

la

nécessaire

monument

à la translation des cendres d'abord, ensuite à l'érection d'un

funèbre. L'aîné des deux

mortelle de son père

bateau, éclairé

le

déposa

formé par

le

transporta sur

chanteurs

et

Wagner. Après, lique,

le

passer

au

le

matin du

heures, un

de l'Elbe. Alors

centre

dun

cercle

puis quatre cent cinquante instru-

;

exécutèrent

hymne

un

funèbre

cortège se mit en route pour

illuminées

étaient

huit

dépouille

de draperies noires,

rive droite

la

catafalque,

au son des cloches de toutes

devait

à

soir,

la

cents artistes et amateurs tenant tous un

ou quatre

cierge et une couronne de laurier

mentistes

le

tout orné

et

magnifique

un

sur

trois

puis,

le

de trophées lyriques,

Magdeboury

cercueil arriva de

le

:

chercher à Londres

alla

chemin de fer; de nombreux falots

14 décembre par

on

Wcber

de

tîls

églises

les

moyen

au

;

cimetière catho-

le

les

Richard

de

rues par où l'on

d'innombrables

bougies

placées aux fenêtres, et tous les artistes, amis et admirateurs qui suivaient le cercueil, plus cinq cents fantassins de

des torches à

la

main.

Wagner

avait encore

la

garde royale, portaient

composé pour

une marche funèbre avec deux motifs iXEitvyaiithe dans l'ouverture, caractérise l'apparition du fantôme se tine

d'Euryanthe transposée en

morceau

si

le

cérémonie

thème

reliait à la

qui,

cava-

bémol majeur, puis revenait pour

transfiguré

ainsi

qu'il

reparaît

symphonique,

écrit

pour

quatre-vingts

conclusion,

:

la

à

la

fin

de

instruments à

la

Ce

l'opéra.

vent

tambours voilés pour vendre pianissimo le trémolo des altos dans l'ouverture, était d'une grandeur superbe et produisit un ert'et indescriptible. A la chapelle du cimetière. M'"" Schrœder-

auxquels

Devrient

il

avait adjoint vingt

attendait

couronne de

fieurs.

le

pour

la

lequel

L'inhumation n'eut

elle

lieu

que

déposa le

lendemain; lorsque

leurs couronnes de laurier, puis Richard

première

fois

une magnifique la

assistants formèrent au-dessus une pyramide

fosse fut comblée, tous les

énorme avec

sur

corps,

Wagner, parlant

en public, prononça un discours dans lequel

il

Weber

et

rappela très heureusement

la

mort récente du

fils

cadet de

transforma, par une gradation toute naturelle, en une invocation à l'art national allemand « 11 ne fut jamais au monde un musicien plus allemand que toil... L'Angleterre te rend justice, la Erance

qu'il

:

t'admire,

mais l'Allemagne

S£ule peut

t

aimer;

tu

es sa chose,

tu es

un beau jour de son existence, une chaude goutte de son sang, une parcelle de son cteur... Qui tlnnc nous blâmerait d'avoir voulu que ta


RICHARD WAGNER

06

cendre devînt aussi une parcelle de son

allemande

'

du

sol,

de

sol

la

chère patrie

»

?

Tous les ans, à Dresde, on avait l'habitude de donner, le dimanche des Rameaux, un grand concert au profit de la caisse des musiciens on y exécutait une symphonie et un oratorio, que conduisaient alter:

nativement

les

deux chefs

de

maîtres absolus de

chapelle,

la

choisir

l'œuvre qu'ils voulaient diriger. Reissiger ayant à diriger l'oratorio pour

Wagner, qui, l'année précédente, avait choisi la Création, décida de jouer la Symphonie avec chœurs il avait gardé une profonde admiration pour cette œuvre et ne voulait rien moins que retrouver 1846, Richard

:

l'impression qu'il avait ressentie à Paris, aux concerts du Conservatoire,

en l'entendant diriger par Habeneck. Mais les musiciens de l'orchestre, outre

répugnaient

qu'ils

ce

à

l'annonce de cette symphonie, jusqu'alors mal jouée et

Dresde,

un fâcheux

n'eût

M. de Lùttichau pour Par

bonheur,

inébranlable.

11

répéter. Alors

qu'il

était

études

fit

il

;

il

emportements,

jusqu'à douze adjoignit

ils

jusqu'à

allèrent

Wagner demeura

et

voulait et se mettre à

il

rare e.xemple de cette ténacité, de ces

qui

craindre et admirer de ses interprètes.

l'orchestre,

absolu,

donc en passer par où

fallut

Wagner donna un

exigences et de ces

recette, et

la

s'opposât au projet du maître de chapelle.

de celui-ci

droit

le

sur

effet

que mal comprise à

craignaient

considérable,

travail

firent

le

Il

consacra tout

pour

tellement

toujours

chacune

l'hiver

ces

à

parties

de

aux choristes diverses sociétés chantantes,

les

répétitions

des

chœurs du séminaire et de l'école de la Croix, arrivant ainsi au chiffre énorme de trois cents voix il fit modifier la disposition de l'estrade, musiciens qui se seraient bien au grand mécontentement des passés de ces frais de menuiserie il rédigea et fit imprimer un programme explicatif de la symphonie mais surtout il entreprit d'agir sur ;

;

;

l'esprit

de ses exécutants à

la

façon d'Habeneck, de leur faire vivement

comme

sentir ce qu'ils allaient exécuter, et

d'œ-uvre,

comme

dernière,

il

sien

et

par cœur

savait

le

il

possédait à fond ce chefla

première

note

à

la

parvint à enflammer ces artistes d'un enthousiasme égal au

l'exécution qu'il

obtint

l'effet

fit

monde musical de Dresde, même au faire le

il

de

voyage,

des contrebasses.

disait Niels »

Gade,

Or, parmi

phonie avec chœurs,

le

5

avril

les

delà

rien

d'un coup de foudre sur :

«

Cela vaut

la

que pour entendre

le

auditeurs enthousiasmés de

1846,

il

se trouvait

un jeune

le

peine de récitatif la

Sym-

homme

et

un enfant qui devaient compter plus tard parmi les plus chauds partisans de Richard Wagner le jeune homme était Hans de Bùlow, alors :

Ces détails sur le passage de Spontini à Dresde et sur la translation des restes de principalement des Souvenirs de R. Wagner (trad. C. Benoit, chez Charpentier).

I.

tire's

Weber

sont


RICHARD VVAGNF.R

67

âgé de seize ans, et l'enfant, qui n'en n'avait pas dix, était le futur ténor Louis Schnorr de Karolsfcld, le créateur inspire de Tristan et Iscult.

Tout en préparant soins

ses il

la

assidus à une

même

y donna

Symphonie arec reprise

renforça, discrètement,

il

du poème, en

conclusion

de

trop de soins au

i^ré

est vrai,

Wagner

cluvuvs,

donnait aussi

Vlplii^énie en Aitlide, de

de certaines

l'orchestration

s'éloignant

(jluck

;

gens, puisqu'il en et

modifia

qu'il

la

de Racine pour se rapprocher

d'Euripide et de Gœthe. Alors que Spontini faisait répéter la Vestale à Dresde,

il

un jour à "W^agner

avait dit

entendu dans votre

J'ai

«

:

un instrument que vous appelez basse-tuba faites-m'en une partie pour bannir de l'orchestre

Rie)i{i

;

s'était-il

le

faire

pas imaginé qu'il convenait de mettre l'orchestration cVIphigénie

en état de produire aujourd'hui l'on

ne veux pas

la Vestale. » Et moins pour Gluck que pour Spontini, ne

:

Wagner, ne voulant pas

je

l'effet

qu'elle produisit à l'époque

ne connaissait d'autres instruments que ceux employés par Gluck?

de cette tache délicate avec une conscience

11

s'acquitta

fit

venir une copie exacte de Paris, de peur que

la

à Berlin n'eût déjà reçu des retouches de Spontini

à une révision minutieuse du texte allemand, ceaux,

quelques

ajouta

changea

le

et,

il

de plus,

se livra

il

resserra certains

comme

nous

bref,

mor-

l'avons il

il

usage

partition en

pendant assez longtemps, personnel pour se consacrer à Gluck et pour

dénouement;

tout travail

d'union

traits

;

extrême,

dit,

abandonna

le

glorifier

:

retouchée, eut un

y réussit d'ailleurs, car VIphigénie en Aitlide, ainsi très grand succès. Certes ce zèle et ce désintéressement sont à l'honil

neur de Richard 'Wagner; mais

partait

il

d'une idée fausse en entre-

prenant un travail qui ne pouvait pas avoir de résultats durables, (jluck n'est pas tellement archaïque ni son orchestre à ce point rudimentaire

que ses chefs-d'œuvre ne fassent encore assez bonne figure à il

la

scène

n'est pas permis, en outre, de toucher à des créations de cette

teur, qui sont des

sommets dans

l'histoire

de

l'art

:

hau-

musical, et de semblables

corrections ne sont admissibles que pour les œuvres d'ordre secondaire, éphémères, bonnes tout au plus pour distraire un moment la foule, et qu'on ne songera jamais à oflfrir comme des modèles à l'étude et à la vénération de la postérité. D'ailleurs, un seul mot résout la question Richard 'Wagner aurait-il jamais admis l'idée que dans un temps donné :

on pût' faire par admiration

pour

pour

de

Gluck,

qu'on

imaginât

marier Lohengrin avec Eisa

?

lui

ce

modifier

Dès

lors, le

qu'il

faisait

orchestre ou

son

moyen

le

meilleur de glorifier Gluck était d'exécuter son opéra c'était

presque

le

desservir

que

l'honorer

de

par admiration

la

plus

bien

simple et

tel qu'il l'a

de le

conçu

:

sorte, et Berlioz, en


RICHARD WAGNER

ÔS

montré pour l'auteur d'Orphée et d'Aruiidc une admiration plu? intelligente, un zèle autrement respectueux'. Wagner n'avait pas beaucoup à s'occuper de la musique de la pareille occurrence, a

chapelle royale, mais, de ce côté encore, déplorait

le

des catholiques dans

jeunes

hommes

quatorze

dont

chœur

le

de

par

tenues

étaient

La

travail qu'on y faisait. et

il

se heurtait à la

routine et

cour, catholique, ne voulait que

les

de sopranos

parties

garçons

:

d'altos

et

en tout, vingt-six choristes,

douze enfants, plus un orchestre complet

et

qui s'élevait à cinquante exécutants dans les grandes occasions.

échos de

l'édifice étaient assourdissants, dit

soulager les

femmes dont

membres surmenés de

et introduire

donnai

je

le

la

vraie

Mater de mais tous mes

Stabat

que d'autres pièces;

Richard Wagner. Je voulus ajouter

l'orchestre,

musique

Les

«

Palestrina

des

voix

catholique a

d'église

comme

efforts furent en

de

capella,

spécimen, ainsi

pure perte

-...

11

un viusico, un y avait là un singulier survivant des jours d'autrefois soprano, prétention, grand et gros dont la la sottise extrême me diver:

tissaient fort.

Les jours de

fête,

il

moins que des

refusait de chanter à

airs particuliers ne lui fussent réservés, et c'était tout à fait réjouissant

d'entendre ce vieux colosse se g-aroariser avec les fioritures de Hasse

on aurait

dit

haleine,

il

pouding énorme avec une voix de crécelle fêlée. il avait une qualité incomparable d'une seule

d'un

Mais avec tout

cela,

»

Wagner, durant fois

lors

:

autant et plus que n'importe quel autre artiste en

chantait

deux respirations.

:

ce long séjour à Dresde, avait eu pour la première

occasion de dévoiler son caractère, en appliquant ses idées, et dès il

s'était

mécontent de

montré

ménagement pour orgueilleux à

dominateur,

tel

tout, — ce

qu'il

malgré

;

toute sa vie

ardent à l'innovation,

:

ou

les

préjugés

d'autrui, violent,

mais aussi, doué d'une rare énergie ses

défauts,

qu'il

faisait

— sans

haute faculté,

qu'il disait être sa plus

les idées

l'e.xcès

fut

violence

difficile,

et tellement

à

tous

et

se

chauds partisans parmi ceux-là qui l'avaient d'abord le violemment attaqué. C2eux de ses confrères qui avaient l'esprit

recrutait de

plus

ouvert l'appréciaient et

l'aimaient;

mais

il

déplaisait

à

presque tous

par son humeur irritable, par son activité infatigable et envahissante. 1.

Berlioz, au

nidins,

quand

il

accepta d'ajouter des

re'cits et

un

ballet

au

Freiscliiit:^,

respecta

Wcber et ne modifia pas la pièce; au contraire, il défendit tant qu'il put le dénouement, qu'il soit. En fait de rcnrcbestratinns, on cite toujours celles du Messie, par Mozart; des Dapar Spontini du Déserteur et de Richard Cœnr-de-Lioii, par Adolphe Adam, etc., etc. mais

l'orchestre de si

long

uaides,

;

;

aucun de ces cas n'est comparable à celui de Wagner, d'abord parce qu'il a modifié la pièce et surtout parce que l'instruinentation de Gluck n'est, encore aujourd'hui, ni insuffisante ni vieillote. Cette reprise A'Iphigénie en Anlide avec dénouement de Wagner eut lieu sous sa direction le 22 février i''Î47. M™ Schrœder-Devrient jouait Clytemnestre; M"" .îohanna Wagner, Iphigénie; M"« Marpurg, Anhémise; Mittcrwurzer, .\gamemnon; Tichatschek, Achille, et Dettn\er, Calchas. 2. Entretien avec M. nannreuther, rapporté par celui-ci dans le Dictionnaire de Grove.


RICHARD WACJNER

rompait ouvertement en visière; mais on dessous les clFets de la jalousie et du mauvais

Personne, assurément, ne sentir en

faisait

lui

ment

lui

Ses façons d'aqir

vouloir.

son caractère hautain

et

Dresde

aliéné à

partout

il

en

même

de

sera

monde des journaux,

le

<^o

qui

avaient rapide-

lui

Paris,

à

à

Munich

de

poursuivait

le

et

brocards

compte les anecdotes les plus sottes. Le critique accrédité de Dresde, ami particulier de Reissigcr, se posait justement alors en champion des usages établis, qu'ii décorait du titre ronflant traditions classiques. Ce Schladebach, qui n'était ni sans éducation, de son

et publiait sur

:

ni

sans

mérite,

commencé par protéger Wagner,

avait

tourné contre en insistant sur tout des

villes

un

battus

sentiers

Dresde des

comme

:

avait

opéras, sécartait

principal

correspondant à

'le

littéraires

de Leipzig, Berlin

et autres

importantes, son jugement rayonnait par toute rAllcmagne et sensible

tort

prenant

Wagner.

à

et difficile

comme

celui-ci

l'était

en

réalité.

fois

et ces

lui

même

on

les lui

renvoya sans

leur .violence

et

une disposition naturelle à se poser en pays,

son

tel

méconnu

WO :i

paiitoulle

que

les

1'

AN

ET SES

C O R U EA UX

corbeaux tiennenl dans leur bec

M

;(..'.-()

1.1

/-.viloKjlc. signiliant

S S

époux ^^'otan;la loculion que la femme, dans le ménage,

ialouse Frick exerce sur son i7,M

E

exprime

Tiré de Sc/iiill:r cl Miillcr

.i

IWnnc.'u Au

A ici

(i

E

1<

le

S

faiiiilië're

est plus

.

pouvoir

talillon

allemande

que

:

maîtresse que

Xih'lii:)^, iSSi.

qu'il

Berlioz dans

sien.

I

les

déboires ne purent jamais rien sur un

Wagner dans

Tel

non

présentait étaient à

entouré d'ennemis et beaucoup plus

incompris,

artiste

en

musiciens

bientik classé,

fut

de sa trempe, aussi confiant en son génie,

accroissait seulement

et

fit

un personnage excentrique, insupportable

d'une

Mais ces attaques

homme

directeurs

à manier; les pièces ou partitions qu'il

peine feuilletées et plus ouvrir.

La plupart des

mot d'ordre des journaux,

le

sans vraisemblance,

ne

il

ce qui, dans ses était

il

ou

feuilles politiques

puis

le

mai

i.

la

le


CHAPITRE

VI

TANNU^USER

OUT à

de son séjour ù Paris et bien

la, fin

préoccupé

surtout

DRESDE

qu'il

fût

d'amasser un peu d'argent pour

regagner son pays, Richard Wagner, dans ses moments de loisir, lisait l'histoire d'Allemagne avec l'espoir d'y trouver un sujet d'opéra. Ses recherches furent long-

temps vaines; mais ce qui que

c'est lui

d'accord pour repousser

rique

lui

paraissait

poète

le

ou

tel

impropre à

le

frappa de prime abord,

musicien étaient toujours en

et le

dès qu'un épisode histo-

tel sujet, et

mise en œuvre dramatique,

la

il

échap-

pait également à son sens musical. Cette observation le confirmait dans

déjà venue que

l'idée qui lui était

beaucoup mieux que ceux de cherchait toujours de ce coté.

des derniers temps de

la

l'histoire à la

avait

11

convenaient

légendaires

sujets

les

musique,

cependant

et

par se fixer sur un épisode

fini

puissance des Hohenstaufen et avait choisi

pour personnages principaux Manfred,

de Frédéric

fils

et

II,

supposée de ce dernier, une jeune Sarrasine, qui relevait abattu de Manfred, tuer

faisait

pour son frère

et

poème de Tieck, c'était

Wagner

avait

qui ne l'avait

principale

captiva

pouvait

la

au

plus

se

même

lui

courage

aucunement

satisfait,

le

conte popu-

ayant dit-il

jadis le

lu ;

il

savait

de traiter ce sujet en musique,

l'idée

lui.

la

assez développé

prêta

n'était pas sans le connaître,

encore un grand attrait pour

la figure le

Il

que Weber avait eu

aussi

fille

seulement en mourant

dévoilait

lui

son scénario, lorsqu'un philologue de ses amis

de Tannhaeuser.

le

une

menait de victoire en victoire jusqu'au trône, se

le

parente qui s'opposait à leur union.

laire

il

et

Bref, cette vieille légende où

détache d'une façon très claire et très simple,

haut

point.

11

était

surtout

frappé de ce qu'on

rattacher sans peine au tournoi poétique de la Wartbourg,

un épisode on ne peut plus propre à échauffer son inspiration, parce qu'il répondait à merveille à son culte pour la vieille Allemagne. Aussi, pour dédaigneux qu'il se fût montré du poème de Tieck, dont il blâmait «

la

d'en

coquetterie mystique et faire

usage. 1 ieck, en

le

catholicisme frivole

effet,

avait

il

ne laissa pas

imaginé que Tannhœuser se

Wartbourg lorsqu'il Wagner, en adoptant cette idée.

rendait au concours des Alintiesinger ouvert à la

rencontra Vénus et se laissa séduire, et

»,


WAGNKR

RICliARD

71

Tamour entre Tannhicuser et la nièce du comte, oublié pour Vénus et qui sauve à la iin le chevalier

a simplement ajouté

amour un

instant

en farrachant à sa perdition par

Dans

hâte

sa

et

bâtit

commencer montagnes de Bohême.

les

huit années auparavant, tracé

de tout cœur

bientôt

après

le

besoin, toujours et projeta

si

II

retourna à Tœplitz

même

impérieux chez

d'abandonner

avait,

il

s'y

11

mit

quelques jours de défaillance

pourtant

à la Cène des Apôtres;

fait

à

pour se distraire,

plan de la Défense d'aimer.

le

eut

il

:

fâcheux accueil

était arrivé

il

et,

Tannlicviiser dans l'endroit

de

scénario

le

Riciiii,

prêt à les

fût

un voyage dans

fit

il

aux répétitions de

d'assister

Dresde avant qu'on

repentir'.

le

l'artiste,

Taniiluvuser pour

faillit

il

céder au

d'être applaudi sur l'heure

revenir à Manfred, qui

lui

paraissait plus propre à être traité dans le goût

du public, d'écrire en

quelque sorte un second Rienii.

la

dans

ferait

merveille

projet

de drame

poursuivre.

;

mais

sentiment au goût de

ment survenu dans ma en

était le résultat

;

mon

et

lutte

la

soumit son

le

détourna de

sacrifier

extérieure et

la

liberté

me

d'esprit

qui

trouver en contact

sympathique, déterminèrent en

et

propre

son

lui-même avec énergie à « L'heureux change-

par-dessus tout, l'ivresse de

moi un

-

immédiates qui détournait de sa propre direction

être intérieur, tel

du passé

lui

il

alors en proie.

situation

avec une société nouvelle désir de jouissances

moment de

et a dépeint

était

il

Schrœder-Devrient

et

pas satisfaite et

fut

au

masse

la

quels combats intérieurs

Sarrasine,

la

n'en

elle

d'ailleurs

hésitait

11

de

rôle

le

comptait que

11

que

l'avaient

formé

dans laquelle

elles

les

impressions douloureuses

m'avaient

jeté.

L'inclination

qui entraîne l'homme à la poursuite du bonheur tendait à m'engager dans une voie artistique qui devait bien vite me dégoûter

naturelle

profondément. Je ne pouvais, en acquérant de

qu'en

vie

la

effet,

trouver de satisfactions dans

renommée comme

possible qu'à la condition de subordonner public.

Il

que

je

et

aurait fallu

me

au point où

que

je

me

était

dont

la

j'étais arrivé,

je le

seule forme que notre

pour je

Kn

et

cela

n'était

véritable nature au goût les

caprices de la

mode

prêtasse à toutes les bassesses de la spéculation, ce qui, sentais clairement,

dégoût. Ainsi, les jouissances positives de sous

ma

misse à suivre

artiste,

la

les

la vie

monde moderne

obtenir de plier

ne connaissais que trop

mes la

facultés

m'eût

fait

périr de

se présentaient à

moi

leur a donnée; et force d'artiste à des

misérable nature-

exigences

».

remonter à la source de l'histoire du tournoi des chanteurs, Wajjner toucha Lohengrin et à ParsiJ'al. En effet, une des copies du « Combat des Chanteurs » amène là le poème de Lohengrin et Wagner, ainsi entraine à lire le Parsifal et le Rituel de Wolfram d'Eschenbach, vit « s'ouvrir subitement devant lui tout un monde entièrement nouveau de poésie ». 2. Richard Wagner d'après lui-même, p. lyt). 1.

s'efForvant de

du premier coup

à


KICllAKL)

-^,

par sortir vainqueur de cette

finit

11

WAGNER

Manfrcd

définitivement

intérieure

lutte

à Tannhœitser, l'œuvre

sacrifia

et

qu'il aurait

faite

selon

le goût convenu du public à celle qu'il voulait composer conformément à ses vues sur fart; mais il nourrissait, à vrai dire, le secret espoir de concilier les deux et d'obtenir l'assentiment de la foule sans rien aban-

donner de ses trop

bien

avril

1844, et

le

lùi quoi

idées.

prouver. le

il

soumit à une première révision

mois de décembre.

allait

Tann/uvitser en eut achevée au

qu'il

y avait travaillé de verve et

Il

l'événement

complètement terminé

avait

11

comme

se trompait,

l'avait finie

il

avec

un tel feu d'inspiration qu'il s'était risqué à faire lithographier la partition

complète d'après

copie

à

lettre

:

que, libre,

l'intention

,1'ai

temps

vie et la culture de

mois.

en envoyait une

il

longue

intéressante

et

pour piano a déjà été préparé de sorte tout à fait

serai

je

paresseu.x un an ou deux, de passer

d'être

à lire et de ne rien produire...

les six

une

première représentation,

la

soit significatif et original, la

1845,

juillet

avec

Berlin,

...L'arrangement

lendemain de

le

manuscrit; en

de

Gaillard,

Cari «

le

Pour qu un ouvrage dramatique d'un

faut qu'il résulte

il

l'artiste

mais on ne peut

;

mon

en avant dans

i)as

faire

un

tel

pas tous

"

Malgré l'insuccès du J^ûisseaii fantoinc, la direction de l'Opéra de Dresde avait accueilli avec empressement Tannluviiser et faisait de les décors avaient été notables dépenses pour le représenter dignement :

commandés

à Paris par Dieterle, et les meilleurs chanteurs étaient mis

à la disposition de tout

premier

le

modifier

les

Wagner. Mais

était

la

musique

Tichatschek

les déroutait.

chargé du rôle de Tannhceuser, dont

passages

élevés

baryton, Mitterwiirzcr, tenait

c][ui

le

le

trop

fatiguaient

un

;

personnage de Wolfram

;

il

fallut

excellent

la

nièce

de

Johanna Wagner, encore novice à la scène, faisait une gracieuse Elisabeth, et M""' Schrœder-Devrient figurait une \'énus un elle avait accepté ce rôle uniquement par complaisance peu miire « Vous êtes un et tout en déclarant qu'elle n'en pourrait rien tirer l'auteur,

;

:

homme

de génie,

disait-elle à

Wagner, mais vous

écrivez des choses

Dettmer et Schloss Walther Waechter, avaient en partage les rôles du Landgrave et de ("urti et Riss représentaient Biterolf, Heinrich et Rcimar, et M""' Anna Thiele était le petit berger. La première représentation fut donnée le 19 octobre 1845, devant une salle comble et plus curieuse que sympasi

excentriques qu'il est impossible de

les

chanter.

»

;

thique; on désirait surtout savoir voie où l'avait

valu

le

il

était entré

par

le

décidé à revenir au

grand succès de

si

l'auteur

Hollandais

l'ulaiit,

genre de l'opéra

là'cii^i.

Richard

avait

persévéré dans

ou bien

si

consacré qui

Wagner

avait

cet

la

échec

lui

avait

persisté

dans


Klt;ilAkD

WAGNER

^j

ses idées novatrices et le public en eut un i^rand désappointement

ce

;

fut un franc insuccès, contrairement à ce que rapportent les narrateurs

français, y compris

Gasperini,

cpii

parlent

d'ovations, dj

couronnes, de triomphe. Et savez-vous quelle

La scène du

de ce i4rave échec?

cause déterminante

fut la

Rome

de

retour

raconte son douloureux voyage et son entrevue avec

une des créations

dit

lannhieuser

pape, autrement admirables qui soient au théâtre et dans

les plus

le

musical.

l'art

Jusque-là,

représentation s'était traînée assez languissante et les

la

du drame étaient plus ou moins bien

différentes scènes le

de

rappels,

plus ou moins de

mélodie

et

La scène du Venusberg en quelle ne

déclat qu'y trouvaient

défendue par

auditeurs.

les

beaucoup moins

particulier,

devint par la suite et mal

le

accueillies selon

importante

Schrœder-

M""-'

Devrient, qui n'avait que trop prévu qu'elle y serait inférieure à elle-

même,

avait

médiocrement disposé

l'auditoire

grand'chose, en dépit des éclaircissements sur

que l'auteur avait rédigés lui-même vendait dans

salle.

la

Après,

beaucoup plu

acte avait

avait

et l'on

la

et placés

cependant,

on n'y comprenait pas légende de Tannhieuser

:

en tète du

septuor

le

rappelé

1

livret qui

du

linal

auteur avec

se

premier

les

chan-

marche et quelques mélodies très claires du deuxième acte avaient été mieux reçues et avaient permis de rappeler Wagner encore une fois, cérémonie assez banale en Allemagne où l'auteur Puis

teurs.

la

revient généralement à la hn de la pièce. le

moment de en

entracte,

ayant duré

effet,

humeur,

par là-dessus et durant

qu'un

dait

On

un

l'on

moment

décisif

pour

en conclut aussitôt que

le

le

récit

plus

une

inspirées,

une franche mélodie,

Haro sur

détracteurs de

depuis quarante ans

Le abattu

lendemain

que

la

le

la

n'enten-

fut

un

main un ténor

toile

que

tel

chanter au troisième

faire

lui

l'on

succès, qu'un récitatif interminable, et

musicien capable d'une pareille faute

des

Wagner

et

baudet! Ce

le

conceptions

les

éclater ce sot reproche d'impuissance et de les

Le dernier

de l'annliLeuser, arrivant

complètement à court d'invention mélodique. Ainsi, les

fait.

un quart d'heure, acheva d'indisposer

air,

récitatif!

long

Tichatschek, ne trouvait rien de mieux à

au

simplement avancé

demi-heure, avait mis

près d'une le

encore

attendait

fastidieux

et

général contre ce musicien qui, ayant sous

acte,

avait

cette politesse obligée, et l'on avait bien

public de mauvaise

l'auditoire.

On

plus

c'est

était

une des pages

grandioses qui

lit

manque de mélodie auquel

en tout pays ont eu régulièrement

recours

!

de

douce

la

représentation,

illusion

par

lui

Wagner

caressée

était

d autant

d'arriver au

plus

cœur du

public sans rien sacrifier de ses idées réformatrices venait de subir ime


RICHARD WAGNER

74

plus rude atteinte.

Je fus,

«

accablé de ce revers et ne pus

dit-il,

me

me

nombre Je d'amis qui sympathisaient de cœur avec moi se sentaient eux-mêmes découragés par un vit sentiment de ma pénible situation. Une semaine que

avant

s'écoula

dans lequel

risolcment

dissimuler

deuxième

la

Le

trouvais.

représentation

pût

petit

donnée,

être

parce que des changements et coupures avaient paru nécessaires pour d'une

poids

de l'ouvrage.

Tintelligence

faciliter

vie

tout

propre que j'éprouvai

mes

toutes

je

intimes,

et

la

Il

m'étais

devint

évident

révélé

qu'au

non au public

à qui

représentation de l'ouvrage. contradiction.

cette

raccroché

s'était

à

Il

Malgré

»

une

pas

n'est

le

d'amour-

blessure

conscience de l'anéantissement absolu de

j'eus

;

illusions.

ne

/uviiser

Ce

entière.

semaine eut pour moi

Cette

je

ne

le

nombre

mes

petit

m adressais me

cette

ce dernier

pour moi qu'avec

espoir

de

Taiiii-

amis

involontairement

par

parut pas possible d'accorder

résignation

que

la

Wagner

apparente,

seconde

représentation

mieux comprise; enfin, après huit jours de mortelle attente, les changements étant sus et l'enrouement dont souffrait Tichatschek ayant pris fin, on put rejouer Tauiihœiiser le 27 octobre; cette soirée impatiemment attendue eut un résultat tout pareil. La un

serait

salle là

peu

à

était

moitié

et

les

qui s'étaient égarés

rares spectateurs

ne se montrèrent pas plus clairvoyants que ceux

cependant, grâce à au

vide

talent des

jusqu'à

la

sentations

fin

persévérance de

la

acteurs, on

la direction

prêta un semblant de

de l'année, en neuf semaines,

put

il

du premier soir; et

vie

surtout au zèle, à

l'ouvrage,

fournir

et,

sept repré-

'.

Les journaux, tout dun

cri,

avaient déclaré

Tannhœuscr insuppor-

ennuyeux cela n'avait ni mélodie ni forme. Et puis cette de musique agissait sur les nerfs, sans parler d'un sujet par trop

table et fort sorte

:

fatigant et douloureux.

consolant

:

L'art,

disaient les critiques, devait être gai et

pourquoi Tannhœuser n'épousait-il pas Elisabeth

dant royal, alors, expliquait à

Wagner que

son

?

prédécesseur

L'inten-

Weber

arrangeait mieux les choses, puisqu'il savait terminer ses opéras d'une

façon heureuse. Enfin, c'était un mécontentement général.

du

soir, lie

Hiller, le

La

Galette

Dresde, exaltait par comparaison certain opéra de Ferdinand

Rêve d'une

nuit de Nocl, représenté à

Dresde en

avril 1845,

œuvre a excité le plus vit" enthousiasme, écrit-on à la Galette musicale de Paris; l'auteur chaque acte et, après la représentation, les musiciens de l'orchestre et plus de deux cents jeunes gens se sont rendus processionncllcnient à sa demeure, chacun muni d'un flambeau, pour exécuter sous ses fenêtres une sérénade composée de morceaux choisis dans ses ouvrages et dans ceux de Meyerbcer. u (2 novembre.) Mais, un mois après, force est bien de reconnaître que le succès est illusoire « Cette partition remarquable a soulevé de vifs et sérieux débats dans le public aussi bien que parmi les hommes ce l'art; mais tout le monde s'accorde à reconnaître que c'est une œuvre capitale et qui fait le plus t;rand honneur au compositeur, u (7 décembre liiJfb.) I.

«

Cette

a été rappelé après

:


RICHARD WAGNER qui,

et

La

mot.

que Wagner ronne

hauteurs qu'elles sont

ces

durer.

Enfin

»

abandonné

direction,

nant par deux

lui

contre

fois

fit

le

Un

!

inaccessibles

Schumann

bien connaître que

ennui

si

qu'on

et

et la

pesant coun"y pourrait

n'était

plus

musique, dont :

Wagner,

elle

à ce

faisait

coup, dut

là.

Les musiciens de profession n'étaient pas plus presse à Tannhœuser. Mendelssohn, après audition, à l'auteur

vrai

est

S'il

payer ses éloges antérieurs en s'achar-

poème

invraisemblances

l'obscurité et les

ressortir

«

:

Nouvelle Gaiette de musique, dont Schumann avait

la

la

badinait

à des hauteurs inconnues, disait-elle en substance,

vise

nous préserve de Ty voir atteindre

ciel

le

Nord

de l'Allemagne du

G^iyC'tte

de musique, au sens vrai du

plus

bien

renfermait

disait-elle,

75

favorables que disait

la

simplement

qu'une entrée canonique dans l'adagio du deuxième finale

«

lui avait fait plaisir »

Maurice Hauptmann, qui

;

avait

remplacé Weinlig

Spohr que « l'ouverture était tout à fait atroce, incroyablement longue, gauche et fastidieuse ». Et Spohr, quand il l'eut fait jouer à Cassel en i853, écrivit à Hauptmann « que cet opéra contenait beaucoup d'idées neuves et belles, mais aussi quantité de passages fâcheux pour l'oreille « puis dans une lettre à l'école Saint-Thomas, mandait à

;

suivante

il

des choses

avouait qui

s'être

l'avaient

habitué,

d'abord

par

des auditions répétées, à bien

blessé et

il

ajoutait

à

le

qu'il

manque fréquent de troubler ». Schumann, car

plus que l'absence de rythmes définis et le

arrondies qui continuassent

«

n'y avait

périodes était

il

venu habiter Dresde à l'automne de 1844, écrivait à Dorn le 7 janvier « Je voudrais que vous puissiez entendre Tauuhœuser ; il contient 1846 :

des parties plus profondes,

plus originales,

cent fois meilleures

bref,

même temps

beaucoup de phrases musicalement triviales. En somme, Wagner peut prendre une grande importance au théâtre et je suis certain qu'il possède le courage néces-

que

les

saire.

à

fait

déjà

précédents

opéras,

et

en

Les moyens techniques, par exemple l'instrumentation, sont tout remarquables, incomparablement plus sûrs qu'auparavant. II a un nouveau

fait

Schumann, dès rédiger

des

livret,

cette

études

Lohengrin.

»

époque, avait presque entièrement renoncé

critiques

à

mais qu'une œuvre

de longue haleine,

le frappât en bien ou en mal et, sitôt rentré chez lui, il ces rapidement son impression sur des tablettes journalières brèves mentions, éparses de 1847 i85o, forment comme un Carnet

musicale notait

:

^'

théâtral.

Or,

on y

Richard Wagner.

à

lit

11

la

est

date du 7 août 1847

impossible

peu de mots. Ce qui est hors de doute,

œuvre de

génie. Si

Wagner

de

parler

c'est

«

:

qu'il

Tannhœuser, de

de cet ouvrage en a la couleur d'une

avait autant de mélodie

que d'ingéniosité,


RICHARD WAGNFR

yC,

il

l'homme

serait

Cet opéra fournirait matière

privilégié de son temps.

à quantité crobservations

pour plus tard'.

»

;

il

n'y

Il

mérite bien que

modifier au sujet de Richard

dans une

de i853

:

Wagner

«

forme

la

car

il

écrivait

je dois dire la chose

si

lui

il

:

musique est pauvre c'est de la musique d'amateur, vide et » Spohr et Schumann changeaient d'avis en même temps,

sa

tation,

de

et

Wagner,

n'est pas,

opinion ne

manque le sentiment nécesbeauté du son... En dehors de la représen-

en peu de mots, un bon musicien saire de la

réserve cette tâche

jamais. Et d'ailleurs son

revint

tarda pas à se lettre

me

je

;

déplaisante.

mais à rebours'.

Wagner, recherchant dans son en

arriva

esprit

les

de

causes

penser que l'éducation artistique du public, gâté par des

à

productions sans conscience, était entièrement à refaire et qu'un

y réussirait mal,

ordinaire

chance de succès, avoir

ou d'un

prince

la

qu'il

protection d'un

Justement,

roi.

aux

nouvelles

idées

et

la

de

puissant

y avait alors sur

il

maîtres de

ses

trône de Prusse

le

respectueux des chefs-d'œuvre

très

lui

pensa que

:

le

lorsqu'il

c'était

demandait

Frédéric-Guillaume

roi

le

leur

souverain qui mettait

la

tragédie

à

ce

apporterait

curiosité à l'examen

peut-être

du

à

J^ûisscdii

1.

fantôme

Cet

(.'loge

quelque

Donc, sans à

Berlin,

s'adressant d'abord

cfiorts,

est d'autant plus

à

c'est

au

la

Wagner

arrêté

par

de ce côté

le

la

moins quelque récent insuccès

tourna tous ses

qu'il

royal, puis

plume de Schumann que, Richard Wagner sur

de restaurer

et qu'il les aiderait

l'intendant du théâtre

frappant sous

Richard

afin

sympathie,

être

avait juge' très sevèreinent les retouches ope'recs par

entendu

l'improviste

à

honneur dans ses Mendelssohn, qui avait

de nouvelles idées musicales,

prévaloir.

embarras-

tel

Meyerbeer et chœurs cVAiitigone,

dernier les

antique,

IV.

musique en

Etats, qui avait appelé à Berlin

commandé

et qui

vieux maîtres oubliés de tous, mais

fragments de

d'exécuter certains

non de

chapelle

d'un

terre,

la

musique en particulier, très

du passé, doué de plus d'une mémoire extraordinaire sait

homme

pour tenter l'entreprise avec

fallait,

un souverain épris des beaux-arts, de accessible

échec,

cet

trois

Ipliif;cnie

mon-

mois plus

en Aulide.

Il

tut,

il

avait

le i5 mai, et voici ce qu'il écrivait sur scn Canict Richard Wagner qui a mis l'œuvre en scène les costumes et les décors sont dignes des interprètes. 11 a même ajouté k la musique, à ce que j'ai cru remarquer çà cl là. .le dirai plus tout le tinale Nach Troja (Vers Troie) est de son invention. Cela passe vraiment la permission. Glucii aurait pcut-Otrc lo droit d'en user de même avec l'opéra de Richard Wagner et d v pratiquer force retranchements et coupures. Que pourrais-je dire de l'œuvre en elle-même.- Aussi longtemps que durera le monde, une pareille musique brillera toujours et ne Aieillira jamais... » Ce sont là critiques fort sensées et que Richard Vi'agncr ne pardonna j;.mais à

la tragédie lyrique

de Gluck ainsi arrangée,

ihéatral au sortir de la représentation

:

Schumann. 2. En février delssohn,

qui

:

«

...C'est

:

:

1^46, l'ouverture de Taiiiiluvuxer fut exécutée à Leipzig sous la conduite de

Men-

M. Glasenapp dans son ouvrage écrit sous l'inspiration de \\'agner, avec la médiocre sympathie qu'il a toujours ressentie pour les efforts de Wagner. S'il est vrai qu'il ait eu l'intention de montrer là cette ouverture comme un modèle à fuir, on peut assurer qu'il v a réussi le compliment vaut son prix. «

la dirigea, dit

1..


Kl cil A RI)

tant

jtisqirà

IMntcndant

de

raconter quelles réponses

des

dc'marches pour

il

WAGXRR

musique de

la

mon opéra

lici-ement les regards vers le théâtre de Rerlin

REP KESENTATION DE (Acte III, scène dernière.)

(l

TANNH.EUSER

»,

Mise en scène conforme

à

mais

;

A l;i

faut le laisser

11

reçut de ces deux seigneurs

propagation de

la

cour,

la

«

:

et

Je

jetai

fis, dit-il,

particu-

reçus un refus

je

HRESnE. reprise de

1S17.

formel de l'intendant des théâtres royaux de Prusse. L'intendant général

de

la

musique de

médiaire, l'exécution la

je

de

fis

la

cour paraissait mieux disposé

solliciter

roi

le

mon ouvrage

partition de Tanuhœiiscy.

et 11

pour

qu'il

:

par son inter-

voulut bien s'intéresser à

demandai la permission de lui dédier me fut répondu officiellement que le roi


RICHARD WAGNER

78

n'acceptait jamais

qu'attendu sur

qui

obstacles

les

ouvrage sans

dédicace d'un

la

s'opposaient

théâtre de Berlin, on pourrait

le

faire

le

connaître

le

à l'exécution

de

entendre au

mais

;

mon opéra roi

j'ar-

si

rangeais quelques morceaux pour musique militaire, lesquels seraient joués

à

pouvais être plus profondément humilié

Je ne

parade.

la

reconnaître avec

de certitude quelle était

plus

ma

Désormais, toute publicité d'art avait cessé pour moi. Cela

bon à dire après coup

est

convaincu

de

mérite

son

jamais désarmé devant

de

et

public

le

force

la

Une

?

un

mais

;

véritablement

artiste

nouvelle

a-t-il

quà

faiblesse ne convient

compositeurs sans conviction, sans conscience,

des

»

d'une idée

telle

ni

véritable position.

Dieu

et

sait

s'ils

nombreux dans le monde! Au lieu de se lamenter sur son échec, Wagner, tout en projetant une nouvelle œuvre où il pût développer sont

ses facultés créatrices et innovatrices,

Tanuhœusev

pait aussi de retoucher

ce sera Lohengrin,

de l'améliorer

et

s'occu-

y tâchait du

il

:

moins. Tannhœiiser, dans sa forme première, différait par deux points capitaux de l'ouvrage qu on entendit à Paris en 1861. D'abord,

était loin d'avoir les

pour nous; de plus, on ne voyait

ni

la

scène

médiocrement rendue par M™" Schrœder, développements que Wagner lui donna tout exprès

du Venusberg,

initiale

si

la

Vénus,

de l'ouvrage

conclusion ni

écourtée

:

convoi funèbre d'Elisabeth. Tannlieeuser

le

Wolfram,

restait seul en scène avec

fort

était

et la lutte entre la volupté

païenne

cœur n'était indiquée que par le flamboiement lointain de la grotte de Vénus et par le glas Wagner modifia des morts que sonnent les cloches de la Wartbourg

et

vertu

la

chrétienne

qui

se

disputent

son

:

et développa cette scène finale dès la seconde révision de son opéra,

terminée en septembre 1846, mais, avant il

avait

avait

éprouvé un double

rencontré

confirmé dans

Wagner reprise

après

vieux

le la

effectuée à

en lumière

les

que

la

lecture

de

allé à Cassel,

il

y Tannha'user avait

du talent de Richard représentation du Vaisseau Jajitôine ; ensuite, une

haute

la

D'abord, étant

plaisir.

Spohr,

achevé cette refonte,

qu'il eût

idée

Dresde

beautés de

qu'il

même

avait conçue

en

partition

la

commencé à mettre de Tannhœuscr Aussi, lorsque

1846 avait

.

l'opéra reparut en 1847 avec la conclusion développée à loisir, trouva-t-il

un accueil de plus en plus favorable auprès des amateurs. La presse, elle, ne désarma pas et soutint que l'ouvrage était toujours aussi mauvais mais le véritable public se montra, par instants, si chaleu;

reux,

que Wagner eut alors

arriverait aisément

à

faire

la

persuasion

adopter son

que,

sans

la

critique,

nouveau point de vue

il

et ses

créations les plus personnelles par tous les gens sincères et non pré-

venus.


RICHARD WAGNER que Wao^ncr eût ctc de

Si humilié

la

^^

proposition qu'on

faisait à

lui

Tannhœuser sous forme de musique de parade,

Berlin de juger son

il

n'en avait pas moins, par besoin d'argent, renouvelé ses sollicitations en

appuyer par Meyerbeer,

faisant

les

désigner Rieiiii pour

et

de Prusse avait

roi

le

par

fini

représentation de gala qu'on devait donner

la

jour anniversaire de sa naissance,

octobre 1847.

i5

à Berlin dès septembre afin de diriger les études

le

L'auteur se rendit reçut un accueil

il

:

assez tiède, et des attaques personnelles, des insinuations malveillantes

parurent aussitôt dans

Au

final.

théâtre,

des chanteurs

et

journaux, qui faisaient mal augurer du résultat

les

était

content du zèle de l'orchestre et du talent

dans Rienzi, M"' Tuszek (Irène) et M'"^ Schlegelmais il ne réussissait toujours pas à se concilier la

Pfister

:

Kœster (Adriano) direction

il

;

presse.

la

En

outre,

commençait

il

être

à

piqué de

et

allocutions

ses

chestre, il

remercier

voulant

générale,

pas

n'étaient

toujours

personnel,

le

qu'on

un péché de jeunesse

particulièrement

et

que Wagner la

La

représentation,

que

lieu

était

comble,

malgré

mais

le

compositeur,

second acte et surtout à

le

retardée

par une

26'. Me.yerbcer,

le

pourtant désigné l'opéra, n'avait pas daigné venir.

salle

froidement,

rappelé après

avouait lui-même

qu'il

les

doutes et

préconçues du monde des journalistes; l'ouverture, assez

l'or-

assure, était parti en hâte quelques jours auparavant,

et le roi, qui avait

Cependant,

».

manquée,

M"' Tuszek, ne put avoir

indisposition de à ce

répétition

la

ne devrait pas juger de son idéal

actuel par cette production totalement «

A

s'échappa à dire que Rienzi était une œuvre de débutant, dont

il

répudiait la tendance, et

être

heureuses.

la

Weber,

tarentule des discours, depuis qu'il avait parlé sur le cercueil de

qui

il

opinions

est vrai, fut reçue

dirigeait

la fin

les

l'exécution,

du spectacle.

11

fut

y avait

probablement dans ces rappels plus de civilité que d'enthousiasme réel, et dès le lendemain les journaux traitèrent fort mal l'ouvrage en s'appuyant sur

le

propre aveu de l'auteur, en

lui

reprochant de manquer

de mélodie, de forme arrêtée, d'avoir une orchestration bruyante,

Et c'en

Une

taire. fois, le

fut fait à Berlin

par

de Rieii^i, parce que l'auteur n'avait pas su se

allocution maladroite avait causé tout le mal, et plus d'une

la suite,

on verra l'orateur, en 'Wagner, compromettre

ainsi

musicien.

Du

Vaisseau fantôme à Tannhœuser,

notable en

ce

sens

que 'Wagner se

formes de l'opéra conventionnel, I.

la

etc.

Est-ce bien

là la

tel

y avait un progrès très dégageait de plus en plus des

que

il

les plus

grands maîtres à son

raison véritable, et n'y avait-il pas de politique sous roche:

direction avait trouvé dans Rie)i:(i certaines expressions politiques dangereuses

On :

dit aussi

liberté,

que

frater-

qu'on aurait pu souligner à la représentation, et qu'elle avait préféré donner un autre opéra pour l'anniversaire du souverain, en repoussant Rie>i:;i à la fin du mois.

nité, etc.,


lUCHARU WAGNER

8y

Weber, Favaient

sens, Gluck et

grandement aidé au développement du génie

bien que Beethoven, ont

Wagner

de

premier,

le

mais

;

proposition

ne faut rien exagérer, surtout en ce qui concerne

il

Wagner

ne pas aller jusqu'à dire que Richard

et

Gluck

que

imaginé

Certes, Gluck et VVeber, aussi

traité.

n'eût

pareille,

Wagner en regard entre elles comme

navoir

faudrait

il

indiqué

ou

fait

avant

n'a rien

Pour soutenir

lui.

mis une partition

jamais

de

d'une de son illustre devancier, car elles diffèrent jour et

le

Gluck

nuit.

la

modifié en

n"a

rien

la

forme générale de l'opéra; lair en demeure l'élément essentiel

et les

chœurs et divertissements s'y succèdent plement du monde; en outre, il avait souvent en vue

vocal

airs,

pur

;

duos, trios,

l'effet

répétait alors les paroles sans contrainte et se souciait

il

de conception entre

l'unité

plus sim-

le

la

poésie

et

musique

la

si

peu de

réappliquait

qu'il

de vieux airs italiens sur des paroles françaises sans aucun scrupule,

que cela devenait possible

aussitôt

puissance et

En

en

:

seulement par

c'est

fait,

nerf de sa déclamation que Gluck a agi sur

le

Weber, Wagner

ce qui concerne

a expliqué

de

dilférer

caractère

lui.

«

On

ne peut

propre au vrai

ce caractère

finit

public d'opéra est

d'un poids capital, et

ici

On me

que Weber lui-même, ce pur,

disait

ce noble, ce profond esprit, reculait de temps en les

conséquences de sa méthode

femme il

i5e

le

droit de « la galerie

faisait faire

par

il

conférait à sa

selon l'expression dont

sens de

le

idées,

temps eftVayé devant

de style;

pleine

si )',

dans

elle,

objections possibles à ses

elles

et

«

le

se servait;

il

cette galerie «,

toutes les

déterminaient parfois,

dépit des exigences du style, à de prudentes sions

encore obligé de

faire

plus, je crois pouvoir

au public

m'en

d'opéra,

dans

flatter,

vous

mon

forme de cet ouvrage a de particulier, ce qui

le

plus de ceux de le

se croyait

rencontrerez

les

Taiinhaniser, et ce que

la

puisant

ne

en

Ces conces-

concessions.

que mon premier modèle, mon vénéré maître Weber,

f*^n

croyait

toujours par devenir, chez l'artiste d'une nature faible,

considération décisive.

la

il

le

sentiment décourageant du

nier, le

le

Wagner.

lui-même, avec

respect qu'il avait pour son maître d'élection, par quels points

la

le

distingue peut-être

mes devanciers, consiste précisément en cela. « sujet de son drame dans une légende allemande

qui

se rattachait à l'institution

nationale des chevaliers chanteurs d'amour,

des Minnesinger,

Wagner

rences

légende et

pour

le

exprime

Richard

mythe, la

lutte

puisque

de

était bien resté fidèle le

fond

de

cette

à

naïve

l'amour charnel personnifié

de l'amour idéal représenté par

la

chaste Elisabeth.

ses

préfé-

et

pieuse

par Vénus

Un

chevalier

de 'l'huringe, Tannhœuser, s'est laissé entraîner dans l'empire souterrain

lie

la

divinité

pa'ienne,

le

\'cnusberg.

La déesse

l'enivre

de


^ ^ ''--*»»ô?lgî3^



RICIIAKI) \VA<;NKR plaisirs et déploie

a

saisi.

que

en

s'éveiller

senti

ou tard

t(k

lui

reviendra vers

il

chant des pèlerins

pardon de leurs

qui

Tannhxuser; ce sont

On

ses frères

d'où

aime.

vient

il

faute

ami Wolfram, Elisabeth,

Rome

on entend

:

au

loin

le

implorer du Saint-Père

le

:

et

lui

doit

qu'il

donc

il

murmure

lui

du landgrave,

a

son

à l'oreille

qui, depuis ton départ,

l'enjouement de

tout

(|u"il

en fuyant tous ceux

l'expier

Elisabeth,

a quitté

jeunesse?

la

A

«

ce

chéri qui lui rappelle un passé bien heureux, Tannha;user cède et

retourne avec ses amis à de

Tannli^cuser se trouve

et s'enfuit.

vallée

prédit

lui

demande pourquoi Tannhœuser répond vaguement

la nièce

a perdu toutes les grâces,

nom

remords Ta

le

;

ses amis, les chevaliers-poètes, c'est le landgrave

Oublies-tu

«

jeunesse

sa

Surviennent des chasseurs qui reconnaissent

questionne, on

le

commis une grande qu'il

elle,

riante

vont à

s'en

fautes.

de Thuringe. et

une

terre dans

transporté sur

souvenir de

le

retenir; mais Tannhaîuscr

le

aux dernières supplications de Vénus, qui

résiste

11

séductions pour

mille

8i

la

Wartbourg.

Elisabeth,

qui,

Tannhieuser,

souvenir les tournois

queur

la

:

présence

des hauts

ouvre

landgrave

récompensera

le

fête

la

».

y

en

son

se font vite entre les

seigneurs et grandes

dames de

concours

qu'Elisabeth,

et

déclare

mieux

W'olfram d'Eschenbach entre

En

des chantears.

solennelle

celui des poètes qui aura le

du pur amour

salle

rencontre

évoquait

nouvelle,

fête

raccommodement

le

commence

Alors

la

grande

la

Wolfram,

par

dont TannhcUuser sortait toujours vain-

passés,

reconnaissance et

deux amants.

conduit

de

l'approche

à

— Voici

cour du landgrave.

la

l'huringe,

la

de

pénétré

«

sa

main,

mystère

le

premier en

le

le

lice

et

Mais Tannhteuser, qui subit encore la domination de Vénus relève le défi et célèbre une passion moins nuageuse. Walther se lève et riposte à Tannha^user; alors celui-ci, enflammé

chante l'amour idéal. ,

par

le

souvenir du Venusberg,

siasme croissant.

L'assemblée se lève indignée,

les chevaliers tirent l'épée

Elisabeth, laisse la

n'est et

seule,

vie

l'engage

derniers

le

sauve,

à

se

accents

et

Elle

joindre

dans

la

le

repousse.

aux

pèlerins

vallée.

«

s'enfuient,

l'audacieux

chanteur.

obtient

mais elle-même renonce à

enthou-

avec un

femmes

les

sur

se précipitent

défend contre tous.

digne d'elle et

plus

hymne

reprend son

enfin

l'amour

qu'on

de celui qui

Le landgrave chasse on

dont

A Rome

»

!

entend s'écrie

lui

l'impie

retentir

les

Tannhieuser,

mesurant d'un regard l'abîme de maux où l'a jeté le pouvoir de Vénus. — Au commencement du elle troisième acte, Elisabeth est agenouillée aux pieds de la Vierge secouant

soudain

son

hallucination

et

-

:

implore avec ferveur

de

Rome

et

le

salut de

Tanubceuscr ne

se

Tannhauser. Les pèlerins reviennent trouve pas avec

eux

:

la

jeune

iillc.


RICHARD WAGNER

82

alors, se retire à pas lents. TannhaîLiser arrive le dernier, pâle, épuisé

de

fatigue

Wolfram

et

prière.

et

montre

lui

du

poids

le

«

vas-tu

?

;

de se donner

vient

le

la

:

Sainte Elisabeth, priez

«

sa simplicité grandiose, offrait une variété de tableaux

du

Finspiration

à

musicien; de

élevé, surhumain, presque mystique,

il

au

lieu

autant

de rabaisser sujet

dû captiver

avait

il

dans

tard

plus

écrira-t-il

caractère

autant un pareil

:

le

poèmes légen-

toutes les préférences pour les

justifiait

La légende,

d'un

étant

exaltait l'âme

il

devait dérouter le public pris en masse,

novateur, dont

plus,

accidents purement terrestres

l'esprit sur des

«

Alors

»

mais Wolfram

»

!

Ce drame, dans

daires.

pape

le

:

volupté païenne, et Tannhtuuser

la

expire auprès de la pure victime en s'écriant

favorable

rencontre

11

Au Venusberg.

pécheur

le

corps d'Elisabeth qui

le

mort. Le christianisme l'emporte sur

pour mol

remords.

voyage en termes désespérés

Vénus, qui veut reconquérir

apparaît letient

sous

son

retrace

lui

exaucé sa

pas

n"a

succombant

et

Lettre

sa

sur

la

musique, à quelque époque et à quelque nation qu'elle appartienne, a l'avantage de comprendre exclusivement ce que cette époque et cette nation ont de purement

humain,

et

de

présenter sous une forme

le

originale très saillante et dès lors intelligible au premier coup d'œil

Le caractère

et

de

Icsprit dans cet

état

clairvoyance,

l'esprit

et

de

ton

le

la

rêve qui

l'état de veille ordinaire. la

musique,

les

yeux

tableau

le

du Venusberg,

ce qui vient après

:

la jolie

compléter

conscience, est

à

le

souhait

tel

jusquà la pleine enchaînement des

le

lutte

qu'il

fut

que cette ouverture

avec tant de violence, refait

pour Paris? Et

chanson du pâtre avec

le

chœur du

grand septuor des chevaliers, n'est-il pas cet acte admirable: Le second acte, en

inférieur aux

deux autres.

L'entrée d'Elisabeth et

début de son duo avec Tannliieuser sont encore remarquables l'allégro qui suit est

dans

le

moment où

les

sages

vraiment par trop banal.

tournoi

des

))oètcs,

pages font asseoir

les

comme

11

le

ensemble

est

condition

y a de superbes pas-

chant

d'orchestre

au

la

conclusion avec

le

pèlerins dans le lointain; mais la scène du concours en son

monotone,

cette fusion de la la

;

le

mais

seigneurs, ou l'imploration d'Eli-

sabeth se jetant au devant des épées, ou encore

chœur des

jeter

pouvaient apercevoir dans poème. En ce qui concerne

ne

pour

chose de plus beau

quelque

départ des pèlerins, puis

pour

ses 'Voilà

»

bientôt

un nouvel

deux éléments du drame entrent en

ou que tout

est-il

porte

le

découvre alors

phénomènes du monde que

contribuent ensemble à

légende

et

il

ne

paraît

pas que

l'auteur y ait réalisé

musique et de la parole, qui devait être à ses yeux du beau musical le souille en est puissant.

essentielle

:


KIClIAUn WAGNi: mais uniforme, devrait

et

caractère y

le

provenir du

contraste

d'amour improvisés par est d'un

fait

et

qu'il

Taiinhœuser déjà

en

le

est,

le

et

malgré

défaut,

que tout

alors

Topposition

des

Le troisième

l'intérêt

divers

chants

acte, en revanche

moule de

l'opéra.

endroits,

|)u

l'égaler,

mais non

la

surj^asser.

du deuxième acte, nettement où tend l'auteur et fait éclater

laisse entrevoir

plusieurs

dans

s:i

bout à l'autre une conception de génie, une création tellement

supérieure, que l'auteur, depuis, a ^l'el

de

les trouvères.

R

imperfections

les

Quoique dans

surtout

duo entre Elisabeth

et

droit se flatter d'avoir produit

les le

formes du genre y persistent finale du premier acte et

Tannhituser,

une œuvre aux

Wagner

pouvait à bon

trois quarts personnelle

non du public, un grand pas en avant de son maitre "Weber, de ce 'Weber qui, lui aussi, avait aspiré au drame, au moins par Euryanthe, et qui, dans sa prédilection pour les vieilles et d'avoir fait,

victorieux ou

légendes populaires, avait pressenti

qu'il

deviendrait possible un jour

de créer de toutes pièces un opéra allemand.

"Wagner, dans ce dernier opéra, commençait

On

l'a

là juste

fini.

^'4 MAISON

liK

KICHAUI)

WAGNER,

A

BAYKEUTH.

dit

avec raison

Weber

:

avait


CHAPITRE VU LOHENGRIN

durant

'kst

WEIMAR

A

un

séjour

Marienbad en

trété

1845

qu'il

avant l'apparition

de

Tannhœiiser

Wagner

le

plan

esquissa

il

première

riantes

Justement, ses amis

idées.

moins

triste,

la tête

encore pleine

Tannliœuser, en

coniique

contre-partie

Chanteurs

de

Nuremberg

de

l'idée

transportant sur

la

se

il

pour

laissait

cours

le

un

comme

et,

il

de

sujet

avait

d'en faire une

vint

lui

corporation

des

iMaitres

opposant

aux

tournois

en

scène,

la

et,

conseillaient de traiter

lui

facilement plaire au public,

pût

qui

avec Taniihcvuser ;

fini

sa gaieté naturelle en suivant

à

aller

longtemps,

depuis

fois

mois

trois

un prochain succès réparateur

attendait

la

ou

que Richard Lohengrin. Il était

de

alors fort heureux d'en avoir

aux eaux de

fit

deux

soit

poétiques des nobles Minnesiuger les concours pédantesques des bour-

s'identifier

avec

Hans Sachs, le

De

plus,

héros,

il

Nuremberg.

de

geois

ses

comme aurait

dernier représentant

le

chevalier Walter,

eu

de

la

plaisir

à

poésie

populaire,

à

dans

s'incarner

poète à l'inspiration de flamme,

le

disposé

toujours

était

il

et

dans

tandis que ces

l^édants bornés auraient figuré les musiciens dont les plates productions lui

barraient la route et les sots critiques

leur

ignorance.

Il

ébaucha donc

le

qui

canevas des Maîtres Chanteurs,

mais y renonça presque aussitôt, soit que trop gai pour l'état actuel de son esprit, soit il

assez d'ironie à déverser sur

détracteurs;

ses

du haut de

traitaient

le

sujet

le

n'eût pas

qu'il

et

-

réellement

fiit

il

encore

revint à Lohen-

grin. Il il

connaissait depuis longtemps la légende du Chevalier au

l'avait lue à

Paris en

même temps

pas goûtée davantage

l'avait

:

il

la

que

celle

de Tannhœuser

rangeait dans un

celui des

poèmes romantico-chrétiens, mais, quand

près, au

moment d'abandonner

départ la

vant.

était,

femme;

Comme

non il

il

pas dans

s'en éprit dès le

dit

surnaturel, mais

le

lors

lui-même,

il

il

autant puisa

le

qu'il

et

et

il

ne

artificiel,

l'examina de plus

Maîtres Chanteurs,

mythe antérieur au christianisme

Lohengrin un de

les

genre

Cygne;

reconnut dans

il

dont

dans

le

l'aimait

le

point

de

cœur même peu aupara-

courage d'entreprendre un


RICHARD WAGNER

encore en avant et se détacherait de plus des opéras courants, précisément dans le sentiment qu'il

nouvel ouvrage où

en

plus

isolement en

Cela marquait chez

échapper.

Vaisseau fantôme,

le

femme idéale, après les maux soufferts,

que

ainsi

immense, soupire après éternelle;

mêmes

qui doit

Tauuhaniser,

en écrivant

cœur

il

conscience

radieuses, le

dans

haut

plus

s'élever

allait

de

et

comme

toujours

son

héros,

la

à leur niveau,

ment

En

nouvelle;

celui-ci,

ne

seulement

et

pouvait avoir de

ma

vérité,

elle

pouvait

des

un

la vie

dit-il,

surgir

dispositions

;

du mien, quand s'imposait à

moi'.

sujet

alors,

mystérieuse,

parce

en

qu'il

dépit

ne pouvait pas

qu'il

En

»

d'autres termes,

Wagner

disposa

faire

et

autre

de

situations

et

cimes

monde,

et

redescendre

temps que

l'intuition

il

Lohengrin

composa

caressa l'hiver

que

j'en étais

nécessaire

tâche

la

absolu, absolu selon

musicaux de son drame pendant tout

il

trouvé précisément dans

autrement que d'obéir

les

le

les

développement où

y était invinciblement de toutes les attaques

faire

le

en aucun

comme

m'apparut

comme

est une apparition entière-

artiste qui, s'étant

du coup au chef-d'œuvre

s'éleva

avait

ce

vers

que tout

d'esprit

position, en fût arrivé au point de son

qui

lutte

Lohengrin ,

dans

éthérées,

Lohengrin

mer

la

douce jouissance de

la

public, et la presse, et ses amis s'efforçaient de a

de tous

vainqueur,

était sorti

alors

la

damnation

symbolisé

régions

les

il

après

sur la

entrevu

l'idéal

Quand

réparatrice

ballotté

son héros, en sacrifiant les plaisirs charnels à satisfaite

lui-même

racheter de

avait

il

dont

et

le

particulière à

de son cœur.

soupirait

il

Hollandais,

le

femme

la

venait de s'élever dans son

la

puisque

rebelle,

tournure d'esprit bien

absente, souveraine

patrie

la

une

lui

refléter dans ses héros les impressions

composé

public

rare et une disposition

étrange, mais aussi une ténacité

avait

d'un

face

pensé trouver auprès d'un souverain intelligent venait

l'aide qu'il avait lui

pousserait

il

complet

avait de son

de

83

les

qui et

idées qu'il

poussé par une force

ou à ce les

remontrances,

démon

et

intérieur.

principaux

motifs

de 1845, immédiatement

Tannhœuser, si bien qu'il put en commencer la musique au mois de septembre 1846, tandis qu'il était en villégiature à Grosgraufen, près de la résidence royale de Pilnitz. De même que après

pour

l'échec

le

de

Vaisseau fantôme,

de Senta, qui devint

le

il

avait, d'instinct,

pivot

musical

de

la

commencé par partition

;

la

ballade

de même,

et

entama Lohengrin par le troisième composa d'abord le récit du Saint-Graal, sur lequel il voulait bâtir tout son ouvrage. Entre temps survint la première reprise de Tannhœuser, et, comme elle réussit un peu mieux, il n'en eut que cette

fois

de propos délibéré,

il

acte et

I.

Riiliard

Wagner

d'après lui-mcmf, par M. Georges NourtlarJ,

p.

21?.


RICHARD WAGNER

Sr,

cœur au

plus de

Lohengrin ,

travail.

de

qu'il rêvait

ment nécessaire

de

l'été

dans

fort

si

du monde

s'isoler

pendant

aussi

:

s'absorbait

Il

composition de

la

afin d'obtenir le recueille-

1S47

une

ménagea-t-il

se

solitude absolue au vieux palais Marcolini, de façon qu'il put terminer

dès

l'introduction

à

suivirent

28 août;

le

instrumenter.

tout

achevé sa partition

d'avoir

faire représenter.

Or,

l'éditeur

ni

il

restait

à

royal, qui

ne paraissaient disposés à se mettre encore en

amis

bons

de l'auteur

logeait au premier avant Rieii^i, et

Lohcngri)i

;

les

au grenier

l'on assurait aussi, qu'à l'approche

Dresde

non

Wagner

auquel

l'éditeur,

sommes pour

leurs

Breitkopf et

Hasrtel

voulait publier

s'il

du chef-d'œuvre,

jusque

et se colportaient

était

marchés antérieurs,

et

finit

redevable c'est

dans

par céder,

d'assez

grosses

puissante maison

la

moyennant quelques centaines de

qui,

prix

le

toutes plaisan-

:

L'intendant royal, cependant,

journaux de Vienne.

mais

les

que l'infortuné Meser, qui qui avait dû monter d'un étage à

s'installer

charitables qui couraient

bien que

Si

des cordes d'instruments subissait une hausse sensible teries

profit

montés,

avait

les

frais.

à la

répétant

allaient

chaque opéra, n'avait plus qu'à

paraître,

faire

la

Meser, qui avait public sans

l'intendant

ni

printemps qui

l'hiver et le

quelque chose assurément que

C'était

mais

;

premiers opéras,

ses trois

employa

il

thalers,

acquit la propriété de Lohengrin.

un 'Wagner avai: dès lors d'autres projets en tête il hésitait entre Siegfried, sujet purement mythique, et un Frédéric Barberousse\ sujet absolument historique autrement dit, il s'élevait dans son esprit un :

;

suprême entre

conflit •

l'histoire et la légende.

Barberousse avec l'intention d'en mais

il

il

fallait

plus de place pour

resterait

mythe,

il

détruisait

propre

à

son

compromis et

et

la

Il

devait

en

façon

être

le

musical,

de

plus

drame il

tandis

dit,

les

l'histoire et enlevait

conclut la

saillants

faits

en employant

donc

pour

que,

parfaite,

prendre un mythe véritable.

double pensée que

qu'il

librement,

fallait

il

Une

fois

idéal ne dei'ûit

rejeta

musique;

grande figure de Barberousse

réunir tant

complètement

héros.

forme mythique de

la

récité, sans

drame proprement

le

essayait de traiter son sujet

penchait d'abord pour

Il

un drame

connut bientôt que pour placer

sous son jour véritable

cette

faire

pas

complètement

qu'il

ne

que

s'il

procédés du

tout caractère

employer répudier

la

tout

bien pénétré de être historique

Frédéric Barbe-

dans l'automne de 1848, il écrivit le poème de la Mort de Siegfried. Il l'écrivit en vers allitérés, car il avait des idées à lui sur rousse,

et,

Des études histcniques

Die en vue de Barberousse, il ne résulta qu'un curieux essai la tradition, originairement destiné à un drame en prose, et traitant des points de contact de l'histoire avec le mythe; il fut écrit en iS4Sct publié à Leipzig T.

Vi'ibeUiiigen, histoire

en

iSSi).

faites

du monde d'après

:


R

langue et

la

la

rien

n'est

Fallitcration

que

bâti

s'était

I

( :

1

1

AUD

WAG N

i:

K

y_

un système de versification, tenant que moins que la force e;cnératrice du lano-ao-e et tout

musique, avec son aide, atteindiait à une richesse, à une variété il prétendait aussi qu'il aurait dû renoncer à son Siegfried s'il

infinies;

n'avait

pu mettre en

usage.

U

dans

trouvait

bouche d'autres vers que ceux d'un commun

sa

accentuant fort

l'allitération,

véritable mélodie de langage d'où découlait tout droit

équivalente,

cale

etc.,

et

Mort de Siegfried, mais ration comme de la rime sont

mis en musique,

Nibelitngen

les

En

ce

c'est

sans résultat décisif, :

s'atténue

elle

ainsi

qu'on

car

mélodie musi-

la

dans

réaliser

en va de

il

e.xtrcmement quand

peut s'en

convaincre

l'allité-

vers

les

en

la

écoutant

'.

Richard "Wagner

1848,

essaya de

qu'il

rythme, une

le

capital de Lohengriu, tout le

fit

entendre

premier

à

Dresde

un

fraoment

dans un concert donné le 22 septembre, à l'occasion du troisième centenaire de la fondation de la chapelle royale. A la fin de la fête, il y eut naturellement un himquct

"Wagner y

et

pensée,

de

tant

fit

un

encourager exclusivement

la

discours

petit

depuis, que

répétée

fois

finale,

il

exprimait

théâtre

le

production artistique

déjà

cette

avait un devoir

nationale

:

un but

;

:

aider à féducation, au relèvement du peuple pour et par la patrie alle-

mande. Ainsi tout marchait régulièrement, et, après l'audition de cette page importante en public, Lohengrin aurait été tranquillement joué à Dresde, ainsi que l'avaient été Rien{i, luviiscr,

s'il

ne

s'était

Vaisseau

le

fautonie et

un grand bouleversement

produit

Tauii-

politique.

11

que Richard "Wagner, peut-être sous l'influence des théories subversives qu'il avait puisées dans les Universités, mais aussi parce faut dire

qu'en sa qualité de

réformateur

existait, était très porté vers

des

eût

convictions

misérable,

criblé

il

de dettes, traqué

content de

révolutionnaires.

arrêtées;

réfléchies,

jamais

n'était

les idées

par

mais parce ses

Non

qu'il

créanciers

pas qu'il très

était

il

;

ce qui

attendait

donc d'un changement politique une amélioration subite pour lui-même ou la réalisation immédiate de ses projets plus ou moins chimériques. 11

sur

la

Leipzig, I.

lie

beaucoup de papier; il avait mis au jour un essai réorganisation du théâtre de Dresde et du Conservatoire de

noircissait déjà

qu'il

RiLli.uJ

voulait transporter

Wagner

a voulu rcpioduiie

sans

plus

de façon

à

Dresde

les vci's allilcrcs Icis qu'il les lroii\ait

ici

l'ancienne Kdda. l'ius tarJ, dans Tristan, dans Parsifal,

il

dans

cniploieia un int'Iange

:

on

les (xicnics

d'allite'ratioiis,

d'assonances et de rimes. L'allitération n'est autre chose que la répélilion d'une nicnic lettre ou de plusieurs dans un seul vers. Le ce'lèbrc'vcrs de Racine Sa croupe se recourbe en replis tortueux, est un exemple d'allitération par l'j-. Cela s'étend à des syllabes similaires, ce qui est plutôt le cas de \\'agner, comme dans ce jeu grammatical Le rl^ tenta le rat, le rat tenté tdta le rij. L'assonance est une consonnancc imparfaite, par exemple j'aime et pleine, Iterbc et conserve, ou bien encore iMuu ami l'icrrvt, prétc-moi ta plume pour écrire un nuit. :

:

:


WAGNER

KICIIAIU)

88

de

peut juger

chez

produits en Allemagne

du

avait

plus tard, lorsque, à

par

le

contre-coup de

soulever

la suite

Kœnneritz en Saxe,

il

minis-

le

nouveau ministre de Tinté-

avait adressé au

il sympathisait, un long projet demandait qu'on séparât le budget de et qu'on remplaçât par une dotation

Martin Oberlasnder, avec lequel

rieur,

de réorganisation du théâtre

de

l'Opéra de celui annuelle

sur

prise

:

cour,

la

le

il

trésor public

jusque-là sur sa bourse privée.

Il

subvention que

la

mettre

suivre,

le

rêvait de centraliser toutes les insti-

théâtre en état de guider

pour

et,

enfin

;

de l'Éolise et

De

même

de

le

il

le

intellectuelle,

il

comme une annexe

de ce théâtre idéal

faisait

rattachait au ministère des cultes.

le

toutes ces belles propositions

avait pas

tout

vou-

il

;

lieu

une sorte de république artistique, soumise au régime

transformait en représentatif

goût public au

le

donner une direction

lui

donnait

roi

le

tutions d'art existant en Saxe, avec quartier général à Dresde lait

des

révolution

la

en France, un ministère d'opposition avait remplacé

18.18

tère

proposition

telle

Un peu

habitants de Leipzig.

les

troubles

de

qu'une

lirritatioa

examinées,

il

Wagner,

et

rien

n'était

froissé

on ne

résulté,

les

du peu d'attention qu'on

prêtait à ce long travail, se tournait de plus en plus vers le parti révo-

lutionnaire;

avec

frayait

il

de

plusieurs

directeur de l'école d'architecture, son ami de longue date le

philologue, avec Rœckel^

tique

il

;

se

laissait

à

affilier

d'imprimer à politique

;

la

des

sociétés

le

Dresdener

secrètes

s'en

et

allait

Vateylandsverein, afin

révolution projetée un caractère plus artistique et moins

à quoi les chefs de parti

visionnaire et d'esprit creux.

De

coup plus favorablement

le

et

répondirent en

son côté, leur

moins reçu une réprimande

pas

avec Kichly

;

nouveau journal démocra-

directeur d'un

prononcer un grand discours dans

Semper,

avec

chefs,

ses

des

il

laissait

ne

jugeait

les

voir

autorités,

le traitant d'artiste

;

mais

il

pas beaun'en

jugeaient

qui

avait

qu'un

maitre de chapelle royale avait autre chose à faire que d'aller pérorer

dans qui

même,

A

clubs.

les

ne pouvait

le

cet

instant

comprendre

et

de

sa

vie,

isolé

dans

n'ayant plus qu'à se

une

retirer

société

en

lui-

eut un instant l'idée de dépeindre son propre anéantissement

il

dans un drame de Jésus de Naiareth où Jésus n'aurait pas un Dieu descendu sur terre pour mourir, mais un homme heureux,

volontaire été

désireux de vivre, et que les bassesses de, ce monde dégoûtent à ce point qu'il marche à la mort comme à une délivrance. Il ne poursuivit

pas cette idée de poème, d'abord, dit-il, parce qu'un tel Jésus aurait été bien difficile à faire admettre, et puis parce qu'un tel diame aurait été défendu par la censure aussi longtemps que la société n'aurait pas subi un

changement

radical

:

dès lors, à quoi bon l'ébaucher?


a: o ~ z

I

a

—

X o

= 'c

a

-J

i

"


RICHARD WAGNER

90

Malgré

la

gêne où

débattait,

se

il

qui bouillonnaient confusément

but,

idées de rénovation

les

pour base

sociale et musicale, avec le théâtre

pour

malgré

et

bonheur universel

le

dans sa

tête,

ne serait

il

probablement pas allé plus loin, si le révolutionnaire russe Bakounine n'était arrivé dans ce pays en fermentation. Celui-ci prit tout de suite sur Wagner une grande influence et Tamcna à un tel degré d'exaltaque Tambitieux musicien,

tion,

même

une

jour

certain

République

la

au

lettre et

pour

roi

de devenir ainsi

EnHn, le i"' mai 1849, lorsque le diète saxonne et que les chefs du

Wagner

peuple aux armes,

prononça

roi

parti

toujours

dessus quitta

arrivaient,

qui

prenait

fuite,

la

le

et à courir

le fusil

les

gens qui savaient

Sophie,

Les insurgés

sœur du

roi

d'abord

eurent

larmée régulière

incendié,

de

appelèrent

:

le

défaite et le roi

prussiennes

trente-six heures après, les troupes

mais,

ville;

la

princesse

la

Bakounine.

de

l'influence

rar>enal fut pris,

;

de

avait eu à se louer

il

la dissolution

socialiste

aux barricades, ce qui étonna au plus haut point

combien

lui-

premier citoyen de cet Etat

le

pas à prendre

n'hésita

de proclamer

conseiller

lui

libre. la

de bonne source, adressa

je tiens le fait

promptemcnt l'ordre, et Richard Wagner Semper Bakounine que et beaucoup d'autres

rétablissaient ainsi

:

était arrêté.

Une

demander Paris,

des

asile à Liszt, s'était

il

lié

tempérament

Wagner

(12

novembre

fête

de

succès

rapprochés

en

une

lettre

la

exécutant

toujours

avait

décisif,

été

la

Weimar,

dès

répétition

Dresde «

si,

le

de

pour arrêter,

individu

Paris,

hospitalière cet et

au

aux

Wagner,

16

184g, pour

il

le fugitif aurait

la

vante à bon

s'en

Journal des Débats, cette belles

dans à

de

ayant pris sa

février

comme

ouvrage

et

marqué son dévouement à Tannhœuser l'ouverture de le

et,

Liszt,

et

toute

Dresde,

grandes

choses,

l'Allemagne.

en

avait

forme classique d'une tabatière en

par Liszt à bras ouverts, d'une

d'abord

adressée à

renommée de

confirmation sous

à

pour jamais.

1848), puis l'opéra entier,

petite capitale, fait

une grande conformité de tendances

grande-duchesse régnante,

la

droit dans

avait

:

cour de Saxe-Weimar, avait

retraite à la

Weimar

de solide amitié, quand celui-ci était venu donner

avait

les

s'en alla tranquillement à

avec lequel, oubliant sa première impression de

concerts à Dresde

Richard

Wagner

hors de Saxe,

fois

or.

reçu

Le la

Accueilli

volontiers prolongé son séjour

19 mai, il n'avait appris subitement, au cours Tannhœuser, que des ordres étaient partis de

dans

politiquement

toute

dangereux

Germanique, un du nom de Richard Wagner.

Confédération

la »,

En même temps, le Wochenblatt, de Francfort, publiait son signalement « Wagner, trente-sept à trente-huit ans, taille moyenne. :


wac.ner

RrriHAru)

cheveux

bruns,

bouche

^,

dégagé, sourcils bruns, yeux gris-bleu, nez et

front

menton rond, porte des lunettes. Paroles et Vêtements redingote de bouckskin vert foncé,

proportionnés, rapides.

gestes

:

pantalon noir,

ordinaires.

bottes

parvint

à

de

gilet »

velours, cravate de soie, chapeau de feutre et n'y

Il

pas

avait

procurer un passeport

lui

temps

de

perdre

à

Liszt

:

conduisit jusqu'à Eisenach,

et le

sur la route de Paris.

En

Wagner

s'éloignant,

œuvre

sur son

propager.

la

et

savait qu'il laissait un

Un

«

jour,

ami sûr pour

veiller

que

j'étais

raconté,

a-t-il

malade, misérable et découragé, mes yeux tombèrent sur

que

de Lohengriu,

presque

j'avais

loureux en songeant que ces notes ne

comme

raient

en

mortes, et

m'assurant

parole.

grands

guration

de

et aussi

pour

célébré

le

de Herder,

statue

la

28 août, jour de

le

centenaire

par quelque grande

fallait fêter

décidé

qu'on exécuterait,

dont Liszt écrirait

première

fois,

le

Et Liszt

»

il

tint

grandes fêtes pour l'inauaoût,

jour de

sa

naissance,

un respect religieux.

avec

manifestation

25,

le

musique,

la

répondit

Weimar,

de

jouer.

programme de

le

demeure-

me

Il

dou-

naissance de Goethe, dont on avait

la

précédente

l'année

Lorsqu'on en vint à discuter

25

le

Liszt.

restreintes

faire

préparait alors à "Weimar de

se

Il

me

pour

coup

résonneraient jamais,

ressources

les

eiïorts

partition

la

un

reçus

deux mots à

j'écrivis

malgré

que,

plus

les

ferait

Je

oubliée.

ces deux journées, qu'il

de

scénique,

l'art

fut

il

Prométhée enchaîné, de Herder,

le

et que, le 28,

dernier opéra de Richard

on représenterait, pour

la

Wagner.

du chef d'orchestre Genast, s'occupa aussitôt de préparer l'exécution de Lohengrin conformément aux indications minutieuses Liszt, aidé

que

envoyait son ami

lui

représentation,

Wagner

c'était à ce point

:

que son

ouvrage

combien

sa

joie

de

arrivèrent

où,

dévouée,

il

malgré

le

guise,

gros public

en

;

Dès

de

Genast

joie

les

demandes

Wagner

coupures. la

lendemain de

le

que

insistant

;

par

une

:

«

Comme

pressantes

une

lettre

collaboration

à

aussi

demeure persuadé

et

du tout, par ces mutilations, à intéresser davand'ailleurs, il laissait ses amis libres d'agir à leur pour qu'en

Maîtres Chanteurs à

termes

plus

les

cas

pareil

on ne

le

jamais à l'avenir. Et, vingt ans plus tard, à propos de des

première soirée,

la

répondit

cause

lui

marque une résignation douloureuse

qu'on n'arrivera pas tage

un grand bonheur pour lui d'apprendre mais exécuté sans aucune suppression

peu!

et

quelques

d'autoriser

Genast,

Liszt

les

fut

être

allait

dura

encore des éclaircissements sur

adressait

moindres jeux de scène. Ce

jours avant la

que, trois

ici,

de

Berlin,

même

il

que

formulera la

le

la

consultât

plus

représentation

même vœu

plupart du temps,

je

en

ces

suis tout


RICHARD WAGNER

92

à

impuissant,

fait

rien

dise

mais

IJszt

»

!

familiers du maître

et la

;

de

suppressions

des

permission,

la

mal que déplorent

les

ces coupures s'est conservée,

et,

provient

tradition de

au cœur de T Allemagne, avec

grin

Genast usèrent modérément de

et

en usèrent,

ils

même

ce mal devait se produire, au moins qu'on ne m"cn

si

tout

le

on exécute encore aujourd'hui Lohensinon

tolérées,

Richard

par

consenties

Wagner. musicale, à laquelle Liszt présidait, avait attiré un

Cette solennité

nombreux concours à Wcimar; la presse étrangère avait répondu avec empressement à l'invitation du célèbre artiste, et l'on marquait le de juger l'ouvrage

plus vif désir

La première représentation si

ne fut pas un

ce

rendue

MM. se

trouvait

Faiztlinger

et

avait

Ortrude),

et

par

et

une invitation, sans doute en raison de qui!

(Eisa

Hœfer (Lohengrin, Frédéric et le roi), reçut-elle favorable. Au nombre des journalistes présents à Weimar, un écrivain français de marque auquel on avait adressé

Beck, Milde

un accueil

chaleureusement.

si

triomphe, au

Agthe

M'""

par

patronnait

qu'il

donnée au jour fixé, le 28 août i85o; moins Toeuvre, remarquablement

fut

du Faust, de Gœthe

faite

première traduction française

la :

Gérard de Nerval. En

c'était

décrivant ces fêtes dans la Presse, Gérard dut dire au moins quelques

mots de Lo/ieiign'u, qu'il soit, a

la

première

de Wagner.

La musique de

de

plus

en

talent

original

appréciée hardi

et

cet

aux

qui

trop

Grétry,

mis

d'importance piédestal

le

aux

fois,

premier écho qui a

...On a donné

Lohengrin, opéra en

représentations

On

à

trois actes,

scène et

suivantes.

l'Allemagne

a reproché

instruments

sur la

peu autorisé

si

opéra est très remarquable et sera révèle

se

encore que ses premiers mots.

donné

le

France des succès de Richard Wagner,

aussi ce jour-là, pour

plus

réservé,

si

son importance, car c'est probablement

retenti en

ait

court jugement,

et ce

et

à

qui

M. Wagner

d'avoir,

statue

la

et

C'est n'a

un dit

d'avoir

comme

disait

dans l'orchestre

;

mais cela a tenu sans doute au caractère de son poème, qui imprime à l'ouvrage

Les en

artistes

la

forme d'un drame lyrique plutôt que

ont

vaillamment exécuté cette partition

celle d'un opéra. difficile

donner une idée sommaire, semble se rapprocher de

musicale

Wagner

de Gluck et de Spontini.

Après Rien{i

et

qui,

pour

la tradition

avant Lohengrin,

Tannhœuscr, qui obtint un grand succès à Dresde et ensuite à Weimar. Le dernier opéra a paru un essai moins heureux de l'idée qu'il poursuit, de l'alliance intime de la poésie avait déjà

donné

le

<

et

de

la

musique.

»

Et pendant ce temps-là, Wagner, retenu à Zurich, attendait avec anxiété des nouvelles de Lohengrin. Un de ses élèves, Cari Ritter


«.-^

^-

^

RICHARD WAGNER EN l85 3. D'après un portrait de ClùmeiUine Strocker-Escher, lithograpliié par Fr. Hanfstœngl.

(Communication de

MM.

Breilkopf

et

Hœrtel.)


RICHARD WAGNER

04

car

Weimar pour cher

à

;

Wagner ne

et

rendre compte

se

prenant corps sur petite ville de

la

renseignements

rapporter les

lui

produit

l'effet

la

à

la

que son

œuvre

devenue

ce

tout cas, ce seul Lohengrin, joué dans

en son absence, avait

était

grande

la

mêmes

pour

plus

fait

:

par

on discutait beaucoup à ce précédents

ses

ouvrages,

Mais

sujet.

et

avait

qu'il

lui-même

mêlasse de poésie,

polémique suscitée

la

talent de musicien

quant à

j'ai

;

«

Vous verrez,

qui n'ait

pouvoir d'enflammer

que l'auteur

disait-il à ses

exilé pût avoir le

amis, que

:

Par tout

»

lui', tandis

je

serai bientôt le seul

:

Allemand

«

et

complète que

la

même

souche que Tannhœuser

précédente-. C'est l'expression

la

Wagner. Tandis que Tannhœuser français imité

par

même

Wagner dans temps

pensée qui aboutira à

qu'il

de

la tradition

deuxième

la

plus

style de

au Vaisseau fanl'école, à

l'opéra

Rienii, Lohengrin s'en sépare ouver-

fait

Tristan

le

se rattache encore

par de rares morceaux, à

tement, en

public

bonheur de l'entendre

plus riche de ce qu'on pourrait appeler

et,

le

me mon

seulement de deux années, Lohengrin est une œuvre autre-

et postérieur

tôme,

je

tour de l'Allemagne et que dix grandes années

Bien que manifestement issu de

haute, la

le

on ne connaissait absolument rien de

pas entendu Lohengrin.

ment miire

que

ne répugnaient pas à confesser

poètes

eu fréquemment

faisait le

se passaient sans

Les musi-

«

ce

enseignante, elle m'a toujours maltraité.

la critique

le reste de l'Europe,

que Lohengrin

les

à

pour

opéra

d'un

suffi

alors, n'avaient pas d'objection

et

il

;

sans inquié-

raviver, ne s'étendait pas encore hors des pays allemands. ciens, dit-il

que

lui

compris

pas

n'avaient

qui

en

de Dresde

ville

grand'chose à Lohengrin n'en parlaient pas sans passion, tude

sur

précis

En

Ceux-là

célébrité.

plus

à

allé

de

scène.

Weimar

les

était

se lassait pas de l'interroger, pour cher-

tous ses opéras précédents donnés dans touchait

mis à donner des leçons de composition

s'était

il

et

prévoir

la

puissante

évolution

Le poème de Lohengrin

Iseult.

meut en pleine légende, sans nulle attache avec ments mystiques qui guident les personnages,

de se

l'histoire, et les sentiles

mobiles auxquels

obéissent, seraient tout à fait insuffisants pour bâtir un livret d'opéra

ils

à la 1.

de la Muette ou de Robert ; mais

façon

ils

amènent cependant

Le 24 novembre i85o, peut-être par contre-coup dos fêtes de Weimar, Seghers inaugurait fameux concerts de Sainte-Ce'cile en donnant Touverture de Tannhœuser qui passait tout

Paris ses

à à

inaperçue, tant l'auteur était ignore chez nous.

fait

Wagner

Lohengrin il avait fait un grand pas en avant de Tannhœuser et de plus en plus du goiît contemporain, car c'était surtout Donizetti qui régnait à Dresde au temps de la composition de Lohengrin ; mais il ne s'exagérait p;is son mérite et disait modestement dans une lettre écrite en 1847 n .Te suis plutôt disposé à douter de mes talents qu'à les surfaire, et je dois considérer mes entreprises présentes (Lohengrin) comme des expériences pour répondre à cette question opéra est -il possible? » Et le plus curieux est qu'il disait vrai, puisque peu après il caressa l'idée d'écrire un Barbcrnusse sans musique étrange illusion d'un esprit universel. 2.

qu'il

sentait bien qu'avec

s'éloignait

:

:

V

:




lUCllARD VVA(;NER

g5

des épisodes tendres ou dramatiques tels qu'un compositeur n"en saurait désirer de plus beaux. On a remarqué qu'il existait, et Wagner lui-même

deux poèmes tXEiiryanlhe de Luhengrin, qui empruntent à des légendes dilïérentes des carac-

en convient, des analogies frappantes entre et

les

Le comte de Telramund

tères et des situations à peu près semblables. et

Ortrude ne sont-ils pas agités par Eglantine

et

Euryanthe et

Eisa

;

Lohengrin

et

et Adolar, placés

chevaleresques; enfin

médiateur? C'est à

la

fin

du

siècle,

XII*

l'un

mêmes

pas

et

ici

fameuse épopée de Parsifal

Wolfram d'Eschenbach,

l'un

comme

pas,

situations poétiques

de

rôle

le

et Titurcl,

et le roi

juge

et

dont l'auteur

des plus célèbres Miiincsitiger de

empruntée

qu'est

la

légende de Lohengrin

de chanteurs donnés à

des tournois

passions que Lysiart

trouvent-ils

se

d'Allemagne, Henri l'Oiseleur,

jouent-ils

est

dans

ne

au milieu des

roi

le

innommé ne

de France

mêmes

les

la

la

et c'est

;

Wartbourg, comme

Tannhœuser , que Wolfram chanta pour la première fois le poème de Lohengrin, à la prière du landgrave de Thuringe, des dames présentes et de son ennemi même, le magicien Klingsor, « lequel cherchait à le tenter à mal et à le g-agner au diable en excitant son

celui de

envie et son orgueil par une

Wolfram, soutenu par queur de cette Lohengrin,

Vierge, qu'il servait

la

lutte avec le le

«.

Mais

fidèlement, sortit

vain-

supérieure à

science

malin esprit.

Chevalier au Cygne, est

de Parsifal, auquel a été

fils

mont

confiée la garde du Saint-Graal, ou Gréai, sur le

pieux chevaliers

chargés de ce saint

office

événement quelconque ne

de dévoiler leur mission

divine

ainsi

que

défendre en

Lohengrin descend

champ

clos

de

l'origine

et

des

Salvat

;

or, les

ne peuvent rester et agir

sur terre qu'autant qu'un

C'est

sienne

la

les

a pas

leur force

régions

forcés

invincible.

inaccessibles

pour

accusée d'avoir noyé son jeune frère,

Eisa,

du Brabant, par l'ambitieux Frédéric de Telramund et la celui-ci, la haineuse Ortrude Ratbod mais, avant de tirer répée pour Eisa, Lohengrin lui fait jurer qu'elle ne cherchera jamais à le connaître. Eisa souscrivant à cette condition, Lohengrin croise le fer avec Frédéric et le terrasse, mais il lui fait grâce de la vie. Tous l'héritier

femme de

les

que

;

seigneurs brabançons

l'empereur

le

saluent alors pour leur chef dans l'expédition

d'Allemagne

prépare

contre

les

Hongrois

révoltés.

Frédéric, déshonoré et dépossédé de ses biens, juge la partie perdue,

mais Ortrude s'introduit en suppliante elle

s'insinue

dans sa

confiance

premiers germes du doute et de époux. elle

Eisa

résiste

à

ses

la

et

auprès de

jette

dans

ce

la

généreuse Eisa;

cœur candide

les

curiosité au sujet de son mystérieux

suggestions, mais,

va entrer triomphalement dans

l'église,

au moment

Frédéric

somme

même

son vain-


RICHARD WAGNER

de

queur

une

avec

déjà

A

défenseur.

connaître devant toute la cour,

faire

se

impatience

croissante

dédaigneux

silence

le

peine sont-ils réunis tous deux dans

Lohengrin de questions pour

qu'elle presse

brûle de savoir; vainement celui-ci

lui

Eisa supporte

et

lui rappelle-t-il

son serment solennel;

va

lui

Au moment

aimé.

cygne blanc revient pour

le

où ce

de

trouble

l'esprit

son

arracher ce secret qu'elle

Eisa, dont l'esprit s'exalte à chaque nouveau refus, croit

échapper, que

de

chambre nuptiale

la

des

et

que son mari

ravir

lui

sens

son bienson

atteint

paroxysme, Frédéric, caché par Eisa dans une chambre voisine, s'élance

pour frapper Lohengrin, mais celui-ci se retourne et tue son adversaire; puis, voyant son bonheur à jamais évanoui, il ordonne qu'on revête El:a de blancs habits et qu'on

devant toute il

explique

la

cour assemblée,

l'ordre

souverain

retourner au mont Salvat, car

la

conduise au tribunal du

Là,

roi.

dévoile et son origine et sa mission

il

qui

l'oblige

à

mais

partir,

;

de

avant

rend le jeune Godefroid à sa sœur Eisa, cygne blanc, qui avait amené Lohengrin, n'était autre que le

le

il

jeune prince transformé en cygne par les maléfices d'Ortrude. Lohengrin

jamais

à

disparait

Rien qu'à voir dans

le

monde

et

Eisa tombe sur

rivage frappée de mort.

le

les principales lignes

de ce poème, aujourd'hui connu

du grand nombre de situations

entier, n'est-on pas frappé

d'une rare puissance dramatique qu'il renferme et ne reconnaît-on pas

que

en

c'est,

Moyen-Age

et

somme,

fondue avec

ferveur et de foi?

Ce

antique

fable

la

frappe déjà à

qui

Psyché,

de

la

lecture de la partition de

Lohengrin, mais ce qui est bien autrement saisissant à

forme absolument nouvelle dans laquelle

c'est la

est

de tout point conforme à

forme dans son entier

au

transportée

légendes religieuses d'une époque de

les

vérité

la

comme un

vaste

elle-,

la

représentation,

est

plus absolue.

la

conçue

et qui

Chaque

acte

morceau symphonique, dont

les

selon l'expression des scènes ou le

dessins d'orchestre varient à

l'infini

sentiment des personnages,

mais sans se rompre en aucun endroit.

Au-dessus de cette trame orchestrale, dans cette atmosphère sonore qui double

la

puissance de

la

voix et l'expression mélodique

des phrases

chaque personnage déclame juste ce qu'il doit dire, jamais moins ni plus, en un récit toujours très mélodieux et très élevé, mais sans se répéter, sans presque jamais chanter avec un autre personnage,

chantées,

car

il

est

ensemble,

également contraire à

comme Grimm

et

la vérité

Rousseau

que deux personnes parlent l'ont

longtemps, ou qu'une seule redise plusieurs qu'un exercice vocal. D'ailleurs, à ces répétitions ristiques

qui

Wagner

fait

fois le

remarquer depuis

môme

refrain

ainsi

supplée d'une façon admirable

inexplicables et inexpressives par des phrases caracté-

déterminent

non

seulement un

personnage,

mais une


o 00

5

o J

l

.;;

r

u

=

z

— ~

o —

4>


RICHARD WAGNER

(^8

situation,

une scène tout entière,

même

l'état

de l'àme à

tel

moment

une donné, et qu'il fait reparaître, qu'il combine toutes ensemble avec nouvelle, et dont aisance incroyable. Cette forme musicale entièrement surprise à l'auditeur rien ne peut donner une idée, doit causer une vive mieux préparé et Ton ne saurait exprimer l'effet produit en prenant le

mais cependant il pour point de comparaison nos opéras ordinaires semble impossible que tout esprit non prévenu ne soit pas frappé d'admiration devant une œuvre où des éléments si divers sont maniés d'inspiration. avec une telle force de volonté et une telle puissance ;

Chez nombre de gens, plus

lents à

comprendre ou

à s'émouvoir, l'admi-

et n'en sera ration sera plus longue à venir, mais elle viendra sûrement

que plus «

11

après

réfléchie, plus inébranlable.

dans une brochure écrite peu de temps représentation de Lohengrin, d'apprécier cet ouvrage avec

est impossible, dit Liszt la

veut y chercher l'ancienne facture d'opéra, les divisions accoutumées des morceaux de chant, la distribution reçue des airs, romances, soli et tutti, en un mot toute l'économie adoptée pour

justice

si

l'on

faire valoir les

chanteurs

et les

mélodies, dans une proportion souvent

'Wagner abjure solennellement toute donna assoluta prise en considération des exigences habituelles de prima

arbitraire en faveur des premiers.

ou de basso can tante.

A

ses

yeux,

il

de chanteurs,

n'y a pas

il

n'y a

que des rôles; si bien qu'il trouve parfaitement simple de faire garder cantatrice durant tout un acte, le plus complet silence à une première scène, où sa présence, eflfectivement nécessaire à la vraisemblance de la ne doit être marquée que par un jeu muet, certainement aussi dédaigné qu'inexécutable par toute diva italienne'.

pendant

tout

dans

que

le

le

premier

finale,

et

acte

«

Ortrude, en

de Lohengrin;

cependant,

elle

l'actrice

si

possède un véritable sens dramatique, effets de ces jeux de scène muets.

elle

ne

effet,

ne

dit rien

chante un peu

chargée

de

ce

rôle

saura tirer les plus beaux

forme technique, le mérite l'a intrinsèque et la puissance rayonnante de cette musique à qui ne jamais entendue, autant il est malaisé d'en citer un morceau plutôt qu'un autre, car il n'y a pas, à proprement parler, de morceaux, et Autant

est

il

difficile

d'expliquer

la

Ton ne saurait détacher une partie quelconque de l'unité si complète et aussi distant du récitatif si serrée que forment ces opéras, par leur style banal que des périodes cadencées de nos grands airs. L'auteur a voulu que l'effet fût produit sur l'auditeur, non par telle phrase ou telle y a complètement réussi. De vient l'impossibilité d'en extraire une mélodie, un fragment complet

page, mais par l'ouvrage entier, là

I.

Lohengrin

et

et

il

Tanniuvuser. (Leipzig, chez Brockhaus, iS5r.)


RI

CHAUD WAGNER

par lui-mcme, à moins de chanter troisième

duo; de

d'un

dépasse

qui

acte,

de

toute

scène,

comme

du

celle

proportions ordinaires

les

morceaux qu'on exécute isolément la marche nuptiale,

prélude, la marche religieuse,

le

:

une

beaucoup

vient aussi que les

dans des concerts

en

rayonnement que lorsqu'ils sont à leur place naturelle au milieu du drame, entre les fragments qui les ont annoncés et ceux n'ont leur plein

qui les rappelleront.

Chaque ensemble, la

acte

poétique et

:

la

du premier, avec ces magnifiques chaste prière d'Eisa,

du duel

la

;

d'Ortrude,

du deuxième, avec

— ou du troisième,

avec

duo

l'incomparable

enfin

de mai,

à

la

et

Weimar

grand retentissement

très

magne

victorieusement

seulement

et se

les

par

la

et le

de tous

réunion récits

chœur des

Italie,

se jouait

une

à

lieu

les

tour à tour

seigneurs

résignés et

Liszt eut donc un

tentative de

et à

que des plumes fran-

chaque hiver,

Berlin, mais

l'Alle-

un chef-d'œuvre,

monde

il

entier'.

s'est

Non

plus grand

nombre

est considéré

comme

le

en Russie, où toute une école, qui a produit des ouvrages

Espagne, en qu'il

fiançailles,

propagea rapidement par toute

c'est l'opéra qui obtient,

remarquables, traite déjà

très

réveille

veiller sur le Saint-Graal.

sur les scènes lyriques du

de représentations à Vienne classique

l'entrée

foudroyante de Frédéric;

çaises, hier encore hostiles, déclarent aujourd'hui établi

roi,

trompette au lever du jour,

depuis trente ans et plus, cet ouvrage

;

du

où Ortrude

scène

et l'intervention

triomphants du chevalier qui retourne

Le succès obtenu

récits

d'Eisa et les supplications hypo-

marche nuptiale

la

d'amour,

Champ

au

la

appels de

brillants

les

magnifique marche religieuse

feudataires

son

descente de Lohengrin aux cris

la

l'orgueil de Frédéric, avec la rêverie crites

dans

adieux du chevalier à son cygne et ce grandiose

la foule affolée, les

finale

considérer

le

bien avisé serait celui qui dirait auquel des trois donner

et

préférence

de

également admirable, à

est

rétrograde

applaudi au Nouveau-Monde.

Il

;

il

est accepté

il

courtoise reparaît

de langue française,

entre

la

Nilsson

régulièrement sur

et ce

et

en

n'y a pas longtemps

concurremment à Londres sur deux théâtres

lutte

d'Eisa; enfin,

Wagner de

l'Albani

et

dans

donnait le

l'affiche à Bruxelles,

rôle

pays

retour constant d'un ouvrage très goûté et

I. Lohengrin était représenté à Wiesbaden, en i853 ; à Leipzig, Schwerin, Francfort, Darinstadt, Brcsiau et Stettin, en 1854; à Cologne, Hambourg, Riga et Prague, en iS55 à Munich et à \ienne, en i85S à Berlin et à Dresde, en i85q, etc., etc. Lohengrin en français, traduit par .M. Ch. Nuitter. fut joué pour la première fois au théâtre de la Monnaie, à Bruxelles, le 22 mars 1870. Distribution M"" Sternherg (Eisa) et Derasse (Ortrude) MM. Blum (Lohengrin), Troy (Frédéric) et Pons (le roii. Une première reprise eut lieu le 14 avril 1871, avec les mêmes chanteuses, plus MM. Warot, Monnicr et Jamet une deuxième s'elîectua le 2g octobre de la même année avec M"" Sternbcrg, Von Edels;

;

:

;

;

berg

;

MM. Warot,

et

Lassallc et \'idal. Entîn cet opéra prenait sa place au répertoire après la brillante il était chanté par M'"" Kursch-Madicr et Bcrnardi, MM. Tournic, Devovod

du 25 mars 1S7S, où Dauphin.

reprise


RICHARD WAGNER

joo

assuré du succès semble en Belgique

Guillaume Tell

Paris celui de D'ailleurs,

prévenus

et

où qu'on joue à présent Lohengriu, plus

les

frappés,

toujours

novices,

ravis,

ceux

Eh

et ils

sont, là, pris et captivés par l'idée

le

retour, le contact et la

reparaissant

mariant

former

sous

les

ainsi

un

tout

déprécier

Wagner,

qu'imiter

Weber

le

bien

les

Mais

il

ramène une ou deux vert

wagnérienne pure,

contrariant

se

ou

se

du

connaissant mal, assurent

fois certaines

à savoir par

drame, et arrivant à incomparable. Ceux qui veulent mais

symphonique

y a tout un

non

cœur de Wagner, sont symphonie accompagnant

plus divers,

qu'il

n'a

fait

en

cela

compositeurs qui ont, eux aussi, mis

quelques mélodies en évidence pour situations.

auditeurs

sans qu'ils s'en rendent compte,

!

musicien,

et tant d'autres

les

de diverses phrases caractéristiques

fusion

aspects

non du

au gré,

le

par cette

maîtrisés

drame.

selon

commentant

le

que peut Têtre à

naturel

aussi

Huguenots.

et des

faire

les

monde

reparaître en différentes

entre la manière

dont

Weber

phrases principales, toujours à décou-

avec leur entier développement, et

la

façon

dont Wagner, une

fois ces motifs-types posés, les reprend, les accouple et les combine en

un

tissu

symphonique d'une seule pièce

dont nul compositeur théâtral

et

n'avait eu l'idée avant lui.

Or, tel

il

est à l'honneur des

coup de génie, ainsi que

premiers partisans de n'avoir pas l'a

fait

ri

d'un

Berlioz, et d'avoir compris quels

horizons nouveaux pareille initiative ouvrait à

RICHARD WAGNER CHEF

\>

l'art

ORCHESTRE.

Caricature allemande de Gust. Paul,

iS6.".

musical.


CHAPITRE

Vlll

RICHARD WAGNKR KN EXIL

K C R ir

T H KO RI QUE S

S

COMPOSITION DES NIBHI.LNGEN

iCHARD Wagn'i:k, proscrit d'Allemagne, arrivait à Paris au milieu du mois de mai France.

d'aller en

ment

gagner à

pas à Paris,

l'Art

et

la

séries

Révolution;

bien plus disposé à

d'articles

à

Wagner

résolut

Zurich où s'étaient

ses

français

vues

sur

des

sans façon que Paris était

discuter sérieusement les théories

de partir,

sur

scène

la

dès

et

la

politique.

musique en France

la

un

amis

ses

et l'éloi-

grand

mois de juin

le

de

plusieurs

réfugiés

voulait se

et le directeur

rapports de son art avec

les

Une fois bien constaté le triste état de gnement de tout directeur à risquer tragique,

exposerait

il

dit

lui

plaisanter qu'à

musicien allemand sur

11

aisés'était

premiers

ses

prit.

le

mais cela ne put aboutir,

Débats, auquel Liszt l'avait adressé,

d'un

dès

publiant dans un journal

connaître en

faire

des

lui-même

et

Mais,

cet espoir.

découragement

le

conseillant

lui

Liszt .espérait qu"il pourrait

une position solide

s'y faire

laissé

En

184g.

il

opéra arrivait

politiques

de

Dresde. 11

s'y

de cette lui

fixait ville,,

à

demeure

où sa femme

furent douces, en

de décrire

ma

joie,

au mois

et,

de tortures et de désirs, libre en

moi ces

désirs.

capitale chez Richard

»

11

Wagner.

j'eus je

me

il

devenait

citoyen

retrouver. Ces années d'exil

le

à ce qu'il dit

que que

après

impressions douloureuses et

naître

venue

était

somme,

d'octobre,

:

«

me

Il

serait impossible

passé par-dessus

les

premières

sentis libre, enfin, de ce

monde

de l'entourage ennuyeux qui avait s'accom[)lit 11

prit

la

alors

plume

une

fait

transformation

afin d'expliquer et

de

défendre ses idées, et ces premières années d'exil sont marquées par une longue série d'écrits théoriques et critiques. « Mon état mental,

en revenant sur ces livres et ces essais, ressemblait à une lutte; j'essayai d'exprimer théoriquement ce que je ne pouvais exprimer par disait-il

une création directe, en raison du désaccord complet de mes aspirations d'artiste avec les tendances du public, particulièrement au sujet de l'opéra.

«


RICHARD WAGNER

102

Le premier de ces

où dominent

l'Art et la Révolution,

est

écrits

les préoccupations politiques et

aboutissant à cette conclusion

sociales,

qu'un bouleversement complet peut seul remettre l'homme en état de

goûter lart pur

de Sophocle dans lequel d'une

race

oij

ne

instincts,

les

du luxe

et

que

les

forces

n'adorant

par

son

de

orgueil

domination,

du gain, qui gagne jusqu'aux l'esprit

de ces forces de

la

l'échafaudage

tout

pourra comprendre

aimer

et

en

le

balaie

social, et

le

tous

ramène

les

préjugés

qui

l'art'!

Wagner

plusieurs mois et qu'il

pour bien marquer que

l'avenir,

il

bien que Par malheur, Wagner

phraséologie de

la

théories, de

sorte

que

Feuerbach

dune

la

poésie, la

le

musique

drame des Grecs; mais

unis, dit-il, dans le

avaient

lui

fait

ses

aller

laissé

s'est

que ce

valeur réelle, est pénible à

y reprend les idées esquissées dans développe à sa façon. :

dédiait à Feuer-

à

en l'appliquant à ses propres

11

trois arts frères

le

résultat déroute le lecteur et

le

d'un style chaleureux et

Les

de

et

à l'état de nature, où

remerciant par épître du

ouvrages de philosophie.

et les

également

nature. "Vienne donc une révolution

plaisamment (Euvre d'art de

adopter

christianisme

contemplation

la

son idéal ne se réaliserait pas de sitôt; de plus,

égards.

ses qu'il

brochure, qui ne donnait qu'une indication, fut bientôt suivie

(>ette

intitula

le

artistes, ont

humain de

d'un travail de longue haleine qui occupa

bach,

nature

la

mépris du monde, enfin l'industrie moderne par cette

aveuglent et dégradent l'homme, il

de

superbe

selon

liberté,

?

en détournant

l'art

renverse

qui

en

toute

dieux.

ses

d'abord,

jouissance

la

parfait, la manifestation

l'art

développait

:

antique

étouflFé

se

au théâtre d'Eschyle et

Pour quelles causes cet art a-t-il décliné mêmes raisons que l'état social lui-même parce que la Rome

ensuite par son soif

trouve

il

l'homme

connaissant,

personnifiait en

Par

Wagner remonte

et véritable.

lire

travail,

à tous

précédent opuscule

et la

mimique, étaient

drame disparut avec

le

la

chute de l'Etat athénien, l'union des arts fut dissoute et chacun d'eux

une existence à

eut

passe-temps.

A

tombant par instants au niveau d'un simple l'époque de la Renaissance, et depuis, on essaya de les lui,

rassembler encore, mais ce de chaque

art, pris

plus

loin

sans

la

abandonner 1.

demande

il

mimique ses

plein

développement

devenir incompréhensible,

degré de perfection, musique,

en vain, quoique

la

en particulier, aient augmenté.

séparé a acquis son

art

fut

à tous les

prétentions

Richard Wagner, pur

!..

deux;

Bcinardini

un

portée

jours,

chaque poussé

absurde.

A

ce

art voisin, la poésie à la

chacun de ces arts devra

alors,

pour

De nos

la

ne peut être

fantastique,

à s'associer à

égoïstes

et

technique et

concourir à

un

ensemble


RICHARD WACÎNi; R artistique idéal et le

rations futures ce

En

,o3

drame musical « pourra devenir pour les génédrame de la Grèce était pour les Grecs'.

«

le

c-jue

Nouvelle Ga^clte musicale de Leipzig publiait, sans Du Juduisme dans la musique^ signé crier gare, un article intitulé du pseudonyme de K. Freigedank (libre pensée)'. Comme ce journal, i85o,

la

:

par Brendel, avait à peine quelques centaines de lecteurs,

alors

édité

cette

attaque

siteurs juifs, ne flatté

:

contre la

violente

si

on ne reproduisit pas contre

bien

surtout

et

mais

,

factum

le

l'éditeur, à

seurs, ses

alternative

il

:

Cependant

nom

le

et

de

vrai

Brendel

caché.

enseignant

garda

l'auteur

le secret.

sur

était

toutes

hostiles.

qu'ils

:

Mendels-

part de cette opinion que les Juifs, en quelque

11

s'expriment,

ont

toujours

de

l'air

une langue apprise, non leur langue naturelle, encore bien

lui

C'est qu'il attaquait là sans merci les

plus puissants et les plus applaudis des musiciens allemands

sohn et Meyerbeer.

lèvres,

les

reconnaissable, et déjà bien des journalistes

devenaient ouvertement

le

moment

mais Brendel refusa de se soumettre à cette

;

conserva sa place

tant sa manière était

sont

le

la

de démasquer l'écrivain

langue

s'en était

défaut du véritable auteur qu'on

demeurait

qui

Wagner

borna pour

et tout se

compo-

les

musique au Conservatoire de Leipzig, onze des profescollègues, le sommèrent par lettre d'abandonner sa chaire ou

de

l'histoire

juive

pas tout d'abord autant de bruit que

fit

à des représailles

soupçonnait

race

parler

et

il

en étrangers

en conclut qu'ils

impropres à traduire idées ou sentiments par

plus

chant, qu'ils deviennent alors insupportables et répugnants. Le Juif

civilisé,

prétend se manifester dans

lorsqu'il

que par des choses ordinaires, tique l'art

n'est

pur à

que son telle

ou

quent, lucrative l'attention

;

il

«

:

n'a

et

forme actuellement à

la

Peu qu'un

lui

naturel

importe ce

souci

celui

:

qu'il

de

ne peut être inspiré

son prétendu instinct artis-

du gain

instinct

telle

triviales, car

l'art,

porte à sacrifier

mode

et,

crée, pourvu

forme.

la

sortes d'aménités de ce genre à l'adresse de

le

la

»

par conséforce

qu'il

Après toutes

race juive en général,

Dictionnaire de musique, de Grove; article Wagner, par M. Daniireuther. Lorsqu'il parut une reédition augmentée en brochure (Leipzig, iS6o), Wagner la signa lie smi véritable; alors, une foule d'articles et de pamphlets plurent de tous côtés, et s'il désirait du

1.

:

2.

nom

brochure et d'autres ouvrages de lui, demeurés inconnus amis cherchent à disculper Wagner de la sorte Meyerbeer, disent-ils, quand il patronnait Wagner à ses débuts, le faisait dans son propre intérêt et pour s'assurer l'allié qui lui manquait parmi les vrais musiciens, des maîtres comme Spohr et Marschncr, Mendelssohn et Schumann, n'appréciant que les talents commerciaux de Meyerbeer et regardant sa musique comme une farce ingénieusement combinée, etc. Il est possible que Meyerbeer ait eu cette arriére-pensée d'enrôler Wagner dans son parti, qui comptait surtout des adhérents littéraires et des

tapage,

il

fut servi à souhait, car,

du coup,

cette

jusque-là, trouvèrent quantité d'acheteurs. Ses

:

n'en est pas moins vrai qu'il a protégé Wagner d'une façon très cllicace et décidé de l'acceptation de Rien^i à Dresde; il n'en est pas moins vrai que Wagner, non seulement s'était laissé faire une douce violence, mais qu'à diverses reprises il avait sollicité lui-niOme et provoqué l'intervention de Meyerbeer c'est là ce qui aurait dû l'arrêter.

soutiens dans la presse;

qu'une

lettre

de

il

lui avait

:


RICHARD WAGNER

,04 il

attaque en

face

nommcmcnt

et

deux ennemis

ses

:

ce

voilà

que

n'aurait pas fait quelqu'un de plus avisé.

Pour Mendelssohn encore,

déclare qu'aucun autre compositeur juif

il

n'excite également sa sympathie

que de

condamné par l'examen des qu'il

en

a

y

lutter contre

voir

le

sa naissance

que

et

c'est

un spectacle douloureux

l'impuissance originelle à laquelle

Le

«

:

que nous a donné

résultat entier

de notre antipathie contre l'élément

raisons

lui-même

nous

chez

et

de

est

il

contradictoii'e,

juif,

tout ce

son

toute

impuissance à se mettre en rapport avec nous; son infructueuse tenta-

pour développer des

tive

cela

tout

exclu,

vraiment

sur

un

sol

d'où

est

il

montre au plus haut degré et comme un conflit la nature, dans la vie, dans la production

se

dans

tragique

artistique de

ayant germé

fruits

Mendelssohn, mort

jeune.

si

En

cet

homme, nous

recon-

naissons qu'un Juif peut être doué du plus beau, du plus grand talent; qu'il

peut avoir reçu l'éducation

peut

avoir

la

grande,

plus

plus soignée, la plus étendue; qu'il

la

plus

la

noble ambition,

sans arriver

une

malgré tous ces avantages, à produire sur notre esprit et notre cœur cette profonde impression que nous attendons de la musique, dont nous la savons capable, l'ayant éprouvée tant de fois, dès qu'un seule

fois,

héros de notre art nous

faisait

entendre un seul de ses accents.

»

« La faculté Pour Mcyerbeer, il y a moins de circonlocutions de tromper est si grande chez cet artiste qu'il se trompe lui-même, et peut-être le veut-il aussi bien par rapport à lui-même que par rapport au public. Nous croyons, en effet, qu'il voudrait bien créer des œuvres pour sortir de d'art et qu'il sait qu'il n'est pas en état de le faire ce conflit pénible entre sa volonté et sa faculté, il compose des opéras :

:

pour Paris

et

les fait

exécuter dans les autres pays,

ce qui est, de

le moyen le plus sur d'acquérir la gloire d'artiste sans être Quand nous le voyons ainsi accablé par la peine qu'il se donne pour se tromper lui-même, il nous apparaît presque comme un person-

nos jours, artiste.

nage tragique, mais pour

ne s'y

qu'il

règne

qui

y a chez lui trop d'intérêt personnel en jeu mêle pas beaucoup de comique d'ailleurs, le Judaïsme

dans

il

:

les

arts,

et

que

le

compositeur représente dans sa

musique, se distingue surtout par son impuissance à nous émouvoir par

le

ridicule qui lui est inhérent.

Entre

les

tenants

second,

compositeur sérieux

acquise

tiers

et

parti

:

celui

des Juifs

jaloux

provoquer l'attaque

et

surtout

une de

protonde

horreur

du

belle

position

de

la

Mendelssohn, Wagner dénonce un qui continuent à composer, et qui cherpar

chent à empêcher tout scandale ])as

»

du premier qui ont

ceux du

second,

et

entre

les

deux groupes,

a lin

de ne

de pouvoir poursuivre en paix leur travail


RICHARD WAGNER de fabrication

Ceux-là,

"

:

dit-il,

ont de

fructueux des opéras de Meyerbeer Tafïaire rapporte,

il

;

la

ils

considération pour

pensent que, du

:

«

Nous devons encore

produisit parmi nous

pour s'unir à nous,

le

succès

moment que

y doit y avoir là quelque mérite, sans qu'on puisse

tout approuver et tout donner pour résistant.

Conclusion

io3

comme

afin

auteur.

Il

de se délivrer

conscience qu'il ne réussira

«

parler

dun

est sorti :

il

autre Juif qui se

de sa position de Juif

n"a pas réussi et a

qu'en cherchant

du avoir

avec nous la délivrance

RICHARD WAGNER VERS l855. D'après une gravure sur bois.

commune

— La

signature, rapportée, est de iSoiS.

qui doit faire de nous tous de véritables hommes. Mais devenir

homme

avec nous, c'est, pour les Juifs, avant tout, cesser d'être Juifs.

Bœrne

avait cessé de l'être, et c'est

précisément

lui

qui apprend que

une douce quiétude et dans indifférente, mais qu elle est, pour les Juifs,

cette délivrance ne peut être obtenue dans

une nonchalance froide

comme pour

et

nous, le prix d'une lutte remplie de peines, de souffrances

Que

prennent franchement part à cette lutte qui doit détruire notre nature actuelle, et nous serons unis et inséparables Qu'ils se souviennent en même temps que la délivrance de la

et

de douleurs.

les

Juifs

!

14


RICHARD WAGNER

,o6

malédiction

l'Anéantissement.

Wagner tissants,

Gloire à Schopenhauer

y>

même temps

publiait vers le

travers

à

!

de

envoyait

qu'il

deux premières années

les

nombreux travaux de

ses

:

d'autres articles moins reten-

gauche en Allemagne. Durant

passa à Zurich,

d'Ahasvérus

celle

ou souvenirs personnels

écrits théoriques

droite et de qu'il

peut être que

eux ne

pèse sur

qui

critique,

il

conduisait des concerts à grand orchestre ou surveillait des exécutions

de ses œuvres au Stadttheater, aidé déjà par ses jeunes disciples Cari Ritter

Hans de Bûlow

et

musical,

Paris,

à

décisif

manière d'exemple

en

Siefr/ried

;

d'un

lui

en rapport avec un

entré

était

il

drame

le

de ses amis qui rêvaient toujours pour

enfin, sur le conseil

succès

Mort de

la

lisait

il

conférences sur

des

faisait

il

;

librettiste

drame sur la légende Scandinave mettait lui-même en scène et racon-

français, et terminait le projet d'un

de Wieland

forgeron, où

le

se

il

tait ses propres souffrances.

espérait

II

que ce poème, une

achevé et traduit en vers fran-

trouverait un accueil favorable, et, pour hâter l'affaire,

çais,

lui-même à Paris en

môme qu'il

fois

à

février i85o; les

lecteurs

leurs

employait

ses

Paris, d'Eugène Suc.

quelque démarche,

à

ne

11

partie

vivait

qu'il

loisirs

faisait rien

et,

au Prophète,

et

Mystères de

les

de tout cela,

racontaient

Bruxelles,

à

partie

ici,

allemand

en

traduire

se serait heurté

il

journaux allemands

arriva

il

avait tenté

s"il

qui

de se

venait

Meyerbeer aidant, occupait alors Le désespoir qui le prit, joint à

jouer durant l'année précédente, et qui, toute l'attention du

monde

musical.

son mauvais état de santé,

lui

causa une maladie

rendre à Bordeaux, puis à Villeneuve, se guérir, et, dès

mois de

le

juillet,

sur il

le

nerveuse;

il

de Genève,

lac

dut se

de

afin

de retour à Zurich.

était

Il

abandonnait complètement ce Wieland pour penser à mettre en musique la

Mort de Siegfried ; mais

surtout

tique et, dans le courant de i85i, la

il

il

fameuse Communication à mes amis,

souvent citée,

si

considérable

:

réunis en

Opéra

Cet ouvrage,

et

qui

un volume,

musique;

ne

contient

Théâtre

le

Poésie

trois

tendent à démontrer ceci

sion, à savoir la le

vrai but,

:

le

le

sous forme

de Tannhœuser et théorique

écrit

l'essence

de

plus

parties

de

drame de

:

la

comme

politique

l'Opéra

le

plus

ni

de

et l'essence

poésie dramatique

l'avenir

que, dans l'opéra,

le

;

et

moyen

toutes

;

les

d'expres-

que drame, a été subordonné aux formes musi-

musique, a été pris

à savoir

presque

trois et

Musique dans

3° la

et la

son

cri-

Drame.

pseudo-philosophie, est divisé en

de la

et

l'olant,

de

même temps

presque en

publiait

de préface aux trois poèmes du Hollandais de Lohengrin,

à ses travaux

revenait

seul objet et but, tandis


RICHARD WAGNER La

,07

respective des deux arts a donc été complètement renversée et l'effort de l'auteur tend à la rétablir. cales.

D'où

situation

mal

le

embryon de prétexte

l'opéra,

à

jeux

les

chanter des

faire

De

venu?

est-il

pour

surtout

tel

ou

tel

dramatique

de scène et l'action

airs,

bornait à écrire des morceaux selon et

cantate

la

tâche

la

n'étaient

du

Lorsque

chanteur.

tel

ou

ballet

le

qu'un

compositeur

type adopté pour

le

italienne,

se

tel sujet

greffa

se

musicien dut tendre à reproduire des formes de danse populaires comme il reproduisait pour la voix des chansons populaires là-dessus, le

industrieusement défigurées

;

les airs

chantés se relièrent entre eux au

moyen de récitatifs conventionnels quant aux tout bonnement à la queue leu leu.

airs

;

Gluck,

Survint

premier réformateur, qui

le

pour mieux approprier sa musique à mélodie en suivant

un terme à

de

la

devenir les interprètes de ses intentions

forme

même

L'ouvrage

l'avait

trouvé.

d'airs,

de chœurs

travaillaient

dramatiques

et c'est là le point capital

et

demeura

de ballets tout

pour Gluck

l'action, sans être

entier

lui

fournissaient

Les grands successeurs

et

mais

;

il

mit

chanteurs à

pour

assemblage de

avant,

pour

les

;

la

récits,

et les auteurs

qui

des paroles où

les airs

reléguée au second plan.

était

Méhul, Cherubini, Spontini, dramatique et s'affranchirent ainsi

de Gluck

développèrent l'ensemble musical

modifia la

laissa l'opéra tel qu'il

il

un

comme

absolument négligée,

Il

du langage parlé

pure et força

virtuosité

allaient

ils

de grands efforts

fit

l'action dramatique.

les inflexions, les accents

l'étalage

de danse,

:

monologue ininterrompu formé par les airs de l'ancien opéra. un pas considérable en avant, et l'opéra acquérait alors son plein développement, au moins par ses côtés essentiels car, quoique Mozart ait produit de la musique pure, plus riche et plus belle que celle de Gluck, il n'est pas douteux que les éléments de l'opéra ne soient exactement les mêmes chez l'un et chez l'autre maître. Par la du

C'était là

;

suite également, Bellini,

dans

ouvrages de

Auber, Meyerbeer,

chose que l'histoire de

Dans

les

la

«

Weber

l'histoire

etc.,

et

de Spohr, de Rossini,

de l'opéra n'est pas autre

mélodie d'opéra

».

deuxième partie de son travail, "Wagner s'occupe du sujet et de la forme dans le drame parlé. En ce qui concerne le sujet, il indique deux facteurs distincts d'abord, les récits romanesques du Moyen-Age et son rejeton, le roman moderne; puis, le drame grec, ou plutôt la forme essentielle de ce drame, telle qu'elle est donnée dans la Poétique d'Aristote. La plupart des pièces de Shakespeare la

:

sont pour

lui

des histoires dramatisées, tandis que

sont construites selon les théories d'Aristote.

celles

de Racine


RICHARD WAGNER

loS

En continuant

étude,

cette

de Schiller

Goethe et

arrive à examiner

il

aboutit

et

cette conclusion

à

ouvrages de

les

que

:

historiques offrent de grandes difficultés pour être traités en

moderne

que le théâtre de

tion

au

masse des

historiques

faits

comme

de la guerre de Trente ans tout entière, dans

eût donné la vision

lui le

temps occupé par

la

du poète allemand.

trilogie

Ensuite,

Racine

résultent

établit

il

Racine,

Gœthe

dramatique avec

se

il

déterminent

la

quand

ils

que

la

aux

musique

l'action

effets qui

difficultés le

fond

à conclure,

drame

favorables au

les plus

en

la tirade

ont voulu combiner

examen l'amène

et cet

d'une part, que les sujets mythiques sont

de l'autre,

et

tragédie de

la

moins à

préoccupe de savoir à quelles

et Schiller

forme poétique,

la

s'attache

dit-il,

de Gluck l'amenèrent à traduire

instincts

de Racine en air. Enfin se sont heurtés

:

qu'aux motifs qui

dite

or, les

;

un rapprochement ingénieux entre

de Gluck

l'opéra

et

proprement

;

accablé sous

de son Wallensteiu, tandis que Shakes-

peare, en excitant l'imagination du spectateur,

idéal

et

de provoquer Tessor de nos

lieu

facultés Imaginatives. Schiller, par exemple, reste la

drame

fausse route en poursuivant la représenta-

fait

contingente,

réalité

la

sujets

les

langage par excellence pour

est le

mettre ces sujets en leur plus beau jour.

De

nécessaire

fusion

là,

réclame en terminant

drame

le

troisième partie de

la

que l'accroissement

aussi

entre

riche de

si

la

et

sa

musique.

brochure

musique

un drame

la

à notre

;

il

Il

la

explique

époque peut

en vue et qu'on ne

idéal tel que celui pu réaliser avant ce merveilleux développement de la technique musicale. Alors, il expose à loisir toute sa théorie de l'art

seul produire

qu'il a

jamais

l'aurait

nouveau

:

de

relations

et cette dernière

l'orchestre,

etc.

tante,

justement

fut

poésie

la

;

la

et

partie,

par des

illustrer

la

à

moins comprise à

raison qu'il ne pouvait donner là que les

de

exemples

:

il

musique

ses

yeux

l'origine,

,

la

plus impor-

par l'excellente sans

des indications abstraites,

s'exposait

de

de

fonction

la sorte à être

assez

mal entendu. D'autre part,

dramaturge et

Schiller,

la

et ses

deuxième

partie, avec ses observations sur l'art

nombreux renvois

excita quelque

à Shakespeare et Racine, à

du

Gœthe

peu l'attention des littérateurs purs, mais

demeura non avenue auprès des musiciens. La première partie, au contraire, émut dès l'abord le monde musical et souleva des discussions passionnées, moins à cause des propositions mêmes que par les attaques qu'on crut encore y découvrir contre des compositeurs en vue, contre Meyerbeer en particulier, et dont on se montra fort scandalisé.

Ce

fut

seulement par

la

suite

et

lorsque les propres

créations

du


RICHARD WAGNER VERS 1857. D'après une lithographie.


RICHARD WAGNER

no

novateur purent servir d'exemples précis et de preuves concluantes à son écrit qu'on s'avisa de voir dans ce travail littéraire et musical de

premier ordre autre chose qu'une fantaisie satirique on reconnut alors tout ce que Wagner avait mis là de savoir historique et d'esprit cri;

hommage

tique, et l'on rendit

décrit la genèse dans

à l'idéal élevé dont

son esprit,

avait

il

si

clairement

marche progressive à travers

la

le

temps'.

Après avoir tant écrit, Wagner fut repris d'une terrible envie d'entendre de sa musique, et, ne pouvant aller en Allemagne, il voulut que l'Allemagne vînt à

lui.

prétendit organiser à Zurich une semaine

11

comme on

exclusivement consacrée à l'exécution de ses œuvres, déjà

Weimar,

à

fait

et

avait

adressa un pressant appel aux sociétés musi-

il

cales de l'Allemagne et de la Suisse, qui toutes se mirent à ses ordres,

de Munich.

toutes, sauf celle

Il

réunit ainsi

un orchestre de soixante-

douze musiciens, des chœurs nombreux en proportion le

que

afin

salle de concert conforme à ses vues

en

théâtre de Zurich

public entrât plus facilement dans sa pensée,

le

programmes

arranger

fit

il

;

puis,

écrivit des

il

pour l'ouverture du Hollandais volant

explicatifs

;

et

le

prélude de Lohengrin. Le premier concert, qui comprenait des fragments

de ses quatre opéras publiés, eut lieu parut au pupitre,

acclamé

fut

il

Au

salua d'une fanfare trois fois répétée. le

mai, jour de sa

22

bornes

on

:

le couvrit

vers, dont l'un

chœurs

sortit

de couronnes

de

et

lui

oflVit

:

salle,

ne

l'enthousiasme

naissance,

des rangs et

la

quand et

le

maître

l'orchestre le

troisième concert, qui tombait

fleurs,

débité séance tenante

lui fut

mai i853

le i8

par toute

;

connut

plus

de

avec compliments en

après quoi, une

dame

des

un magnifique vase d'or au nom

de ses camarades.

Pendant l'Engadine,

En

l'été et,

de i853,

de

là,

il

traversant Turin,

complète

et correcte

il

il

se rendit auprès de Saint-Maurice, dans

un voyage dans le nord de l'Italie. entendit une exécution du Barbier, de Rossini, entreprit

comparable en Allemagne; ensuite nuit

d'insomnie, à

idée de la

n'en avait jamais ouï,

à ce point qu'il

la

Spezzia,

il

que

alla à

Gênes,

et ce fut

passa par l'esprit

lui

musique du Rheingold. Vite,

il

la

dit-il,

de

dans une première

interrompit son voyage et

regagna sa tranquille demeure de Zurich, pour ne pas commencer un Il y travailla de tout cœur, puis, à la tel ouvrage sur le sol italien. fin

le

de l'automne,

poème

il

alla

trouver Liszt,

entier des Nibeliingen, tandis

tesse en exécutant pour lui seul, rain, 1.

Bâle,

à

que Liszt

comme

il

il

lui

lui

:

aurait fait pour

Wagnci-, par M. Dannreutlicr.

connaître

rendait sa poli-

quelques-unes des dernières sonates de Beethoven. Dictionnaire de Grove, article

fit

un souve-


WAGNER

RICFiARD

Une

,,,

vinrent ensemble à Paris, où leur présence est signalée au milieu du mois d'octobre, mais n'y restèrent que fort peu fois réunis,

ils

de temps. Les journaux allemands attribuaient ouvertement ce voyao-c si rapproché du précédent, au désir toujours croissant chez Wagner de nous

faire

même

entendre un de ses opéras, et déjà

théâtre et l'ouvrage

le

:

Théâtre-Lyrique

ils

désignaient

Tannhœuser ; mais

et

il

le

est

bien invraisemblable que Jules Séveste, alors directeur du Lyrique, où l'on

donnait

songé

le

le

Bijou perdu, où l'on

représenter la Promise,

allait

moins du monde à Tannhœuser. Toujours

novembre

rentrait à Zurich dès le mois de

est-il

replongeait dans

et se

ait

que Wagner les

Nibelungen.

Ce opéra,

son grand travail durant

fut là

comme

la

Mort de

Siegfried,

l'exil.

Mais comment d'un simple

était-il

arrivé à en faire quatre

?

Lorsque j'essayai, dit-il, de dramatiser le moment capital du mythe des Nibelungen dans la Mort de Siegfried, je trouvai nécessaire «

d'indiquer un grand

nombre de

que

ces faits préparatoires, tandis

entrer

dans

écrire Siegfried.

pas

moyen

je

Mais

ici,

nouvel embarras

d'incorporer tout ce qui

il

arriva à écrire la

Rheingold.

Valkyrie

Le poème, on

seulement pour

les

et le

»

Et

façon :

c'est

ainsi

vins

j'en

amis de l'auteur. Une

fois

à

pour que

l'action

qu'en remontant,

prologue général de sa tétralogie,

vu plus haut, avait

l'a

que

ne trouvais toujours

je

nécessaire

était

dramatique s'expliquât d'elle-même.

nécessité de les faire

la

de

:

ne pouvais que raconter

je

sentais

même du drame

l'action

de façon à mettre ces

faits antérieurs,

épisodes essentiels dans leur vrai jour. Mais

été publié en

qu'il eut

le

i853,

commencé

d'en

composer la musique, après son retour précipité d'Italie, les choses marchèrent rapidement. En mai 1854, la partition du Rheingold était achevée;

en

juin,

suivante,

et

quant à Siegfried, dont

de 1854,

il

en

il

avait

abordait la Valkyrie,

fini

les

qu'il

terminait dès l'année

premières ébauches dataient

avec les deux premiers actes au printemps

de 1857.

Ce tantôt

travail

de longue haleine

fut

interrompu de

par les répétitions et représentations de

en février i855, tantôt par un violent érysipèle

de i836, plus tard par une

Wagner

visite

:

Orphée

totalement son travail quand'

Préludes ; mais

à Zurich

au printemps

il

et Liszt, ses

dut abandonner

accepta d'aller diriger, à Londres,

Au mois

huit concerts de la Société Philharmonique.

un des directeurs, M. Anderson,

était

venu

exposé l'embarras de

qui,

depuis

la Société,

qu'il eut

Symphonie héroïque,

et les

il

Tannhœuser

instants,

prolongée de Liszt, pendant laquelle

conduisit, à Saint-Gall, la

Poèmes symphoniqucs

courts

le

de janvier i855,

voir à Zurich et la

les

lui

avait

mort de Mendelssohn,


RICHARD WAGNER

112

ne trouvait pas facilement de chef d'orchestre en renom chaque année

on

était

de Lindpaintner

las

pour

avait été engagé, la

New

qui allait s'ouvrir, par la société rivale,

la saison

partit en emportant la promesse de Wagner. annoncé à grand renfort de réclames, arrivait à Londres

M. Anderson

Celui-ci, la

venir, et Berlioz

Philharmonie. Après avoir entendu par occasion Tannhœuscr

à Zurich,

sur

Spohr ne pouvait pas

;

:

de février;

fin

même

avant

mais,

en particulier

voyait les journalistes,

eût

qu'il

MM.

conduit,

rien

Dawison, du Times

il

du campagne, et

et Chorley, de VAthenœum, qui menaient la violemment contre lui. Ce fut bien pis lorsqu'on apprit que l'indigne successeur du célèbre Michel Costa réagissait contre les prétendues traditions de Mendelssohn, qu'il exigeait de l'orchestre énergie et vigueur, qu'il ne voulait pas qu'on jouât tout en demi-

Musical World, se déchaîner

mouvements d'une façon désordonnée,

teinte, ni qu'on précipitât les

toutes

Alors,

général s'ils

ces

qu'il

(c

Mozart,

traiter

allait

se résumèrent dans ce cri

Cherubini,

Beethoven,

comme

La

plaisan-

avaient, eux aussi, écrit de la musique de l'avenir

lancée

terie était

:

25 juin

;

».

un beau chemin.

elle a fait

Les huit concerts de le

inhospitalières

diatribes

etc.

la saison

commencèrent

en dehors du répertoire classique,

le

12

Wagner

mars

et hnirent

n'y dirigea guère

Tannhœuser et la sélection marche et chœur des fiançailles). L'ouverture de Tannhœuser eut un tel succès que le prince Albert en demanda la répétition pour le septième concert, auquel la famille royale entière devait assister ce fut un nouveau triomphe et la

que deux morceaux de

lui

:

l'ouverture de

de Lohengrin (prélude, marche nuptiale,

;

reine, au milieu de la séance,

fit

appeler l'auteur dans sa loge afin de

le féliciter.

Entre autres griefs contre Wagner, on le raillait fort de son habitude de diriger les symphonies de Beethoven par cœur c'était là, :

disait-on,

simple aflFectation de mépris et on

perdue

peine

,

à

dernière

la

répétition

,

lui

en

fit

la

remarque;

pour l'Héroïque,

n'avait

il

toujours pas de partition. Cette fois, la mesure était comble et

Wagner

dut promettre de diriger au concert avec la symphonie sous les yeux. 11

parole et l'exécution

tint

s'empresse autour de

C

est tout autre

lui

chose qu'hier

vement du scherzo! A complimenteurs saisit c'était le

marcha d'une façon magistrale;

pour

lui faire fête. !

Comme

la

bonne heure!

la

partition

Barbier de Séville, et

le

«

alors,

vous avez mieux pris »

on

N'avions-nous pas raison

Et, tout en

ouverte sur

le

le

?

mou-

un des Horreur!

parlant,

pupitre...

Barbier de Séville en réduction de

La farce est jolie et bien de Wagner. Rossini, plus tard, à ce qu'on assure, essaiera de déchiff'rer Tannhœuser à l'envers « Cela

piano

!

:


J^ir}L\Ill)

\\"AGNER



RICHARD WAfîNF.R ne va pas dans Tautre sens découler de l'autre

:

disait-il.

»,

fini

huitième tourna

il

dernier concert

et le

dos

péremptoirement d'y revenir; pour essayer de réparer écrit-il

n'en

Le

les

est c]ue les

— son

refusa

il

esprit de

plus

la

Société

de musique

une heure de musique

:

Comment

peu de temps dont

superbe;

solide

gens de

consomment

et auditeurs,

prend plusieurs heures de répétitions. le

il

principaux artistes,

incomparables; fait

peuvent digérer. Règle générale

chef d'orchestre, avec

le

des Nibelungeii.

chefs d'attaque pourvus d'instruments

le

après,

en résumant cette campagne de trois mois,

Philharmonique, orchestre

et

que beaucoup plus tard,

n'y retourna

il

corps, mais pas de style propre.

qu'ils

orchestre,

années

quelques

Magnifique orchestre en ce qui concerne

«

et,

déficit

le

son

à

valut une ovation réparatrice. Aussitôt,

lui

Londres,

à

bien

prince consort, avait

jxir le

comme

anglais

pourrait

prête-.

Cependant Wagner, ouvertement soutenu public

histoire-là

(_]ettc

un rendu pour un

par s'imposer au

1,3

peut-on se figurer que

dispose

le

matin, pourra

énormes programmes que les directeurs mettent devant lui? Deu.x; symphonies, deux ouvertures, un concerto et deux ou trois morceaux de chant à chaque concert! Les directeurs me

convenablement préparer

les

rappelaient continuellement à ce qu'il leur plaisait

d'appeler les tradi-

Mendelssohn mais je soupçonne que Mendelssohn. s'était tout simplement soumis aux traditions de la Société. Un matin que nous commencions à répéter l'ouverture de Léonore, Je demeurai surpris. Tout semblait éteint, mou, inexact, comme si les musiciens étaient fatigués et n'avaient pas dormi de la semaine. Pareille chose était-elle tolérable de la part du fameux orchestre philharmonique? Je m'arrêtai tions de

parlant en français

et, «

;

capables de faire et

me

comprirent

que

taient

Je sais fort bien, leur dis-je, ce que vous êtes

«

:

je

n'attends pas moins de vous.

et traduisirent;

j'avais raison et

l'ouverture et la répétition

que

la

furent tous stupéfaits,

prirent bien

ils

marcha

à souhait;

Et cependant, quand

voyait juste.

M. Richard Wagner

nier

mais

ils

sen-

On recommença

chose.

toute raison de croire

j'ai

concert

l'avenir.

la

a cjuitté

Londres

partit,

il

fit

le

la

le

Musical World,

conduite en ces termes

même

lendemain

:

du der-

enchanté sans doute de enfoncée dans les impéné-

Société Philharmonique,

précipitamment

s'éloigner

trables

de

je

»

entêté dans son hostilité de parti pris, lui «

la

Quelques-uns

majorité des artistes en était arrivée à m'apprécier avant que

ne dusse les quitter. Il

ils

»

d'une

ténèbres du présent et

ville si

si

sourde à

la

voix

jjrophétique

de

»

Wagner

avait

rencontré,

à

Londres,

Berlioz

venu

pour

diriger


RICHARD WAGNER

,,4

rival;

l'orchestre

malgré

mais,

concurrence

cette

inattendue

en

et

dépit de leurs idées contraires sur l'art, ils avaient renoué de bons rapports. Une fois de retour à Zurich, Wagner engagea Berlioz à le

mais celui-ci ne put accepter cette

venir voir; été

pour

diale;

il

une

lui

fête véritable «,

demande

Lohengriu

Wagner

à

de

possède déjà;

qu'il

autres honnêtetés

Vous

«

qui

aurait

envoyer Tannhœuser pour joindre à lui promet, en retour, son Te Deum,

lui il

l'Enfance du Christ et Lclio, qui vont paraître, et :

réunion

«

dans sa réponse très cor-

assure-t-il

donc en train de

êtes

lui

encore, entre

dit

faire fondre les glaciers

en composant vos Nibelungen... Cela doit être superbe d'écrire ainsi en présence de la grande nature!... Voilà encore une jouissance qui m'est

aspects de

chez moi

beaux

Les

refusée! la

de

manifestation

la

exprimer. Je

paysages,

je

la

cimes,

grands

les

de

provoquer

Je sens alors et

ne saurais

lieu

lune qu'en regardant son image au

nous vivions encore une centaine d'an-

si

crois que nous aurions raison de bien des choses et de bien des

hommes. Le vieux Demiourgos barbe, du succès constant de ne dirai pas de mal de protégez.

lui,

doit

bien

farce

la vieille

nous

qu'il

un de vos amis,

c'est

dans sa

là-haut,

rire

et je sais

calembour avec lequel

Wagner, en

en iSSg;

un théâtre provisoire où mais, à bien réfléchir,

une

ville

il

je

que vous

le

Pardon de main '. »

aux Nibelungen, espérait avoir

donnerait

régal de la voir exécuter;

le

découvrit qu'une pareille entreprise était impra-

peu de ressources musicales,

d'aussi

qu'il faudrait

déranger des artistes des quatre coins de l'Allemagne, réaliser cette éclosion

la

projetait alors de faire ériger à Zurich

il

se

il

en vous serrant

finis

travaillant sans relâche

la tétralogie

ticable dans

je

vieille

Mais

fait...

Je suis un impie plein de respect pour les Pies.

cet afl'reux

terminé

pensée.

la

ne puis dessiner

fond d'un puits... C'est égal, nées,

hautes

les

mer m'absorbent complètement au

d'une pièce en quatre journées,

il

que pour

et

aurait besoin

de sommes énormes sans trop savoir où

les

trouver. Bref, toutes ces

raisons et la crainte aussi de n'en avoir pas

fini

de

désir qu'il avait d'entendre ses

idées

opéra

de

suffit

d'un

définitives

une œuvre de

léger

incident

et

pour

de l'y

disant envoyé par l'empereur du Brésil, vint

composer un ouvrage pour

la

Janeiro, dans quelles conditions

troupe il

Certain lui

italienne

pourrait

le

un

poussaient à écrire

le

mise en scène assez décider.

à l'ardent

absolument conforme à

lui,

drame musical,

sur le

longueur ordinaire

sitôt, jointes

personnage,

demander qui

faire,

facile

s'il

jouait à

et

s'il

:

il

se

voudrait

Rio-de-

s'engagerait

à venir en personne diriger l'exécution-. 1.

2.

Lettre de Berlioz à Wagner, du lo septembre i855. Cette offre venue de Rin-de-J;ineiro paraît avoir eu un fondementsérieux

:

car Tcmpercur du Brésil


RICHARD WAGNER Le compositeur,

,,5

étonne trune proposition semblable,

fort

à donner une réponse formelle

;

hésitait

mais, pour être prêt à tout événement,

un poème plus court. On était à Tété de iSSy, et ce poème était celui de Tristan et Iseiilt, qui s'était présenté naguère à son esprit, en même temps que Parsifal^\ il en avait tracé la première esquisse en 1854 ou i855, aussitôt après avoir publié le premier canevas de l'Anneau du Nibelung et lorsqu'il venait il

de côté

laissa

la tétralogie et se

rejeta sur

s'initier à la philosophie de Schopenhauer. C'est en effet en i85i que l'apparition des Parerga und Paralipouicna avait si fort surpris

de

l'Allemagne intellectuelle contre les représentants qui avaient auteur.

La

fait

le

soulevé

et

officiels

silence

de

comme une la

réprobation générale

philosophie dans les universités,

pour saluer en Schopenhauer un moraliste hors ligne particulier, acceptant les rait à

même

autour des ouvrages précédents du

petite colonie de réfugiés à Zurich ne se laissa pas devancer

Wagner, en

et

yeux fermés sa doctrine métaphysique, adhé-

son enseignement dont

il

prétendit, plus tard, développer certains

Dès 1854, il lui envoyait à Francfort un exemplaire de l'Anneau du Nibelung en témoignage « de remerciements des

points

plus

discutables.

comme

et

de vénération

le

grand Frédéric, n'en attendait sûrement pas tant d'un simple musicien.

».

Schopenhauer, bien

Wagner, une fois qu'il au commencement de i85j

qu'il jouât

se fut remis à et,

de

la

tlùte,

Tristan, le termina très vite

dès l'hiver de cette année,

il

faisait tenir

tout le premier acte aux éditeurs Breitkopf et Hœrtel. Vers le mois de

janvier i858, sa présence

toujours dans

l'intention

est

signalée à Paris, où

il

venait,

paraît-il,

de faire entendre quelqu'un de ses opéras,

et

Arban marquait l'intention d'exécuter l'ouverture de Tannhœuser pour faire honneur au musicien étranger. Mais Wagner ne dut alors que toucher barre à Paris

de Tristan les autorités

et

;

Iseult,

il

repartit bien vite et poursuivit la composition

dont

autrichiennes

le lui

deuxième acte

était

écrit à

Venise, où

avaient permis de résider, et daté

fina-

lement de cette

ville, le 2 mars 1859; enfin le troisième était a'chevc Lucerne au mois d'août de la même année. Aussitôt, comme il ne voyait rien venir du côté du Brésil, il s'occupa de faire exécuter un

à

ouvrage en Allemagne

fut plus tard

et conclut affaire

un des patrons du thcàirc de Bayreutli

avec

théâtre de Carlsruhc.

le

cl \ini assister à la

première exteution des Nibc-

lungen. I.

Il

avait encore écrit, vers iS5ô, l'esquisse d'un dr;;nie

mieux que

bouddhique, to

\'ainqHeitrs,

<\\\\

se prillait

de Tristan et Iseult à l'expansion des the'ories de Schopenhauer et dont on a retrouvé le canevas, date de Zurich, 16 mai i836, dans ses papiers posthumes : c'est tout ce qu'il lit jamais de ce drame qu'on disait commencé, mais inachevé. Enlin, l'esquisse de Parsi/al fut ébauchée par lui au printemps de 1837. On voit que tous ces sujets s;ermércnt presque simultanément dans son esprit et qu'il n'y aurait nulle impertinence à signaler des traces de l'inMuence de Schopenhauer jusque dans Parsi/al quelle singulière salade ce devait cire en son cerveau la le'gende Celte

:

1


.

RICHARD WAGNER

ii6

espérait, par

11

surcroît,

autorisé à venir monter tale, consentirait définitif,

et,

à transformer

dès Tété de iSSg,

Tristan était déclarée

Paris,

en il

demande. 11 fut repoussé; apprenait que la représentation de

faisait la

De même

le jouer.

espérances se tournèrent de nouveau

ses

TAUemagne

défaut de

à

séjour temporaire en établissement

ce il

grand-duc de Bade, après l'avoir Tristan et Iseiilt dans sa capi-

impossible et qu'on renonçait à

Alors, toutes

à Strasbourg.

forma

le

diriger

quelque temps après,

bien plus,

vers

que

et

qui

se

fermait devant

et

lui,

il

projet fou d'engager des chanteurs allemands hors ligne afin

le

d'organiser lui-même a Paris, aux Italiens, durant l'hiver suivant, une

représentation modèle de Tristan

et Iseult, à

chefs d'orchestre et régisseurs allemands

d'obtenir

le résultat

à Paris,

qu'il

pour goûter

qu'il aurait

projetait depuis le

Conservatoire,

une bien

en quittant le

public

la

Suisse

français

à

:

I.A

d'abord

quand

il

11

qu'il

musique,

sa

lors, ce

voyage

ses

à

yeux

et

devint

amenât par des concerts

et

puis

IL PLAIT A

Vienne, 12 mai 1872.)

du

avait deux choses en vue

qu'il

RI L H A K

paye un fauteuil vingt-cinq Horins.

{Kikcrtlii, de

celui

réalisât

et Iseult.

MUSIQUE, COMME

C'est seulement

se flattait

il

un orchestre incomparable,

ardent désir de monter enfin Trista}i

LE JUDAÏSME liANS

par ce moyen,

autre importance

fallait

goûter

convierait tous les

obtenu à Carlsruhc. Dès

partie essentielle dans ses projets d'avenir. il

il

quelque temps en guise de distraction,

plaisir d'entendre prit

:

laquelle

LJ

\V

A

(_.

N K

R

son


CHAPITRE DEUX ANNÉES

PARIS

A

IX

CONCERTS AUX ITALIENS

TANNH.EUSER

l'opÉRA

A

au mois de septembre

'est

s'installer à Paris.

lorsqu'il

i85g que

Wagner

n'y était guère plus

11

vint

connu que

dix-sept ans plus tôt, et les

en était parti,

discussions soulevées par ses ouvrages dramatiques,

comme faible

par ses écrits, n'avaient eu qu'un écho très

On

en France.

jamais occupé de

ne car

lui,

à vraiment parler,

s'était, le

peu de lignes de Gérard

de Nerval sur Lohengrin ne pouvait pas compter, et quand Théophile Gautier, ayant entendu Tannhœuser au théâtre grandducal de Wiesbaden, en septembre iSSy, avait communiqué ses impressions aux abonnés du Aloniteur universel, ceux-ci avaient dû être fort surpris qu'on les entretînt de ce compositeur étranger. D'autant

plus que Gautier, grand clerc en musique,

troublé "

un

le

comme

moins du monde à cette audition.

Wagner dénué

Il

on

sait, n'avait

s'était figuré

par avance

volontairement de mélodie, de rythme et de car-

rure, hardi nuvateur, secouant les vieilles règles, inventant des

naisons bizarres, essayant des tout

outrant

l'extrême,

à

la

rant,

mêlé de

d'une

sources de

beer «

;

».

lors,

l'orchestre

musicale sur

sauvage,

etc.,

et

est

le

etc. «

de lueurs, cédant aux caprices »;

et

en place de tout cela,

remontant dans

le

il

passé vers les

musique, au lieu de renchérir sur W'cbcr et sur

la

Dès

propos de rien,

à

comme une trombe

de ténèbres

découvert qu'un musicien

n'avait

déchaînant,

violence,

un génie compliqué et furieux, cahotique et fulgu-

souffles,

inspiration

combi-

inattendus; un pavoxyste, poussant

efl^ets

l'ouragan de l'orchestre et passant parterre abasourdi

pas été

Meycr-

longuement d'un ouvrage oîi plein de fugues, de contre-points fleuris, de canons à

quoi

bon parler

si

exécutés avec beaucoup de science, où rien n'est échevelé, ce désordre

apparent venant de l'absence du rythme carré, que parti

pris,

de

même

qu'il

s'-abstient

de moduler

montagne qui accouche d'une souris. Le nom de Wagner, malgré tout, commençait

:

le «

maître évite de

C'est toujours

la

à se répandre, et la

Galette musicale, aussi, avait cru devoir se faire adresser

un compte


RICHARD WAGNER

n8 rendu de ce pondant,

festival.

Tout ce que

«

puis dire, écrivait son corres-

je

que M. Richard Wagner me

c'est

mélodiste abondant et

cantilènes sont rares dans sa parti-

les

facile;

parait très loin d'être un

romance de TEtoile, accompagnée à l'italienne avec des hardiesses d'harmonie absolument allemandes; il loue encore le duo de Tannhasuser avec Elisabeth, si »

tion.

Il

pourtant du charme

reconnaît

fort inférieur qu'il le juge à celui à

accorde quelque estime à l'ouverture, à «

la

de Valcntine et de Raoul;

marche bâtie sur un motif élégant

la

à

plein de franchise; enfin,

et

il

y aurait danger à comparer il conclut en ces termes

qu'il

puis

du Freischiit{ et d'Oberoii, On ne peut nier que M. Richard Wagner celles

applaudit

il

:

se rapproche

Weber

de

manie l'orchestre avec une grande habileté. Son instrumentation est claire, variée, par

certains

modulation.

la

accords

un

lui

talent

lourd,

est

WAO-.UR OUVRANT SON

ŒUF UK PAQUES.

S'il

Mozart Cependant, '.

fut

homme,

un si

un

eut

douanes,

affaire lorsqu'il se

formalités de la douane

nomme,

et

au.v

peut-être

seul

particuliers

employé des

dispute

incontestable,

empesé, raide.

mais

il

Isocrate

Grâces.

Je ne serais

justement ce qui doit distinguer

et

l'on

:

Edmond Roche

le

fort

salue

heureux d'avoir obligé un grand

le

Paris,

connaissait

profondément,

un

par un

hasard

premier Français

auquel

;

et,

débattait à grand'peine au

un employé

baragouinait

l'employé

à

admirait

les

providentiel, cet admirateur fut justement

Wagner

d'heureuses

fait

»

opéras

ces

modeste

de

la musique de l'avenir de celle du en est ainsi, puissé-je être condamné à perpétuité à Weber

et à

bien

après

Mais

pas étonné que l'absence de grâce

(Cliam, Chdn'Viiri, 3i mars iS6i.)

passé.

les

aurait certainement conseillé de

sacrifier M.

il

abuse

M. Richard Wagner

rencontres a

court

Il

harmoniques.

temps en temps

Il

recherche

Il

inattendus.

effets

les

Il

richement colorée.

brillante,

de

côtés.

milieu des

intervient, attiré par le bruit d'une

mal

aussitôt, artiste.

le

en

français

;

le

voyageur se

assurant qu'il était trop

Cette rencontre, qui tenait du

I. A cette rcprcôciuation du festival de Wicsbaden, le nMe d'ICIsa était cliaiitc par M"° Franziska Stofck, ceux de Tannlia;uscr cl de Wolfram par Tichalschck et Simon; l'orchestre était dirige par .M. Hagcn, niailre de chapelle du duc de Nassau.


RICHARD

\va(;ni-:r

119

roman, ne devait-elle pas sembler d heureux augure au nouvel arrivant?

Wagner, pas vu

qui,

durant son premier séjour à Paris,

de musiciens et

s'était

lié

avec

des

n'avait

presque

peintres et des

renoua ses anciennes relations, en forma de nouvelles,

littérateurs,

M. prenant

surtout

le

parti de faire exécuter sa

si

WAGNER

musique de

l'avenir par des musiciens

également de

l'avenir.

(Cliam, ClhUiViiri, 27 février 1860.)

bien

qu'il

put bientôt ouvrir chez

lui

des

réceptions intimes

rencontraient beaucoup de gens qui devaient marquer dans

où se

les lettres

et dans les arts. 11 avait d'abord habité un pied-à-terre, au n° 4 de la rue de Matignon, puis avait loué, rue Newton, près de l'Arc de Triomphe, un joli petit hôtel, démoli depuis, où il vivait seul avec sa

femme,

à l'abri des voisins et des pianos.


RICHARD WAGNER

120

C'est là, dans ce quartier alors presque suburbain, qu"il recevait ses amis tous les mercredis: on y voyait Emile Ollivier, qui venait d'épouser,

en

Florence,

à

iSSy,

la

femme charmante

jeune

aînée de Liszt et de

fille

profondément

et

mort conservateur des musées impé-

à trois années de là'; Frédéric Villot,

Wagner

riaux, auquel

par

artiste, ravie

la

poèmes d'opéras traduits en Edmond Roche, en reconnaissance de sa

a dédié ses quatre

naturellement,

français;

d'Agoult, une

M'"*^

réception à la douane; Hector Berlioz, en souvenir de leurs relations en Allemagne et à Londres; Emile Perrin, alors directeur inoccupé,

n'ayant plus TOpéra-Comique et n'ayant pas encore l'Opéra; Carvalho, directeur du Théâtre-Lyrique et très

porté vers les œuvres nouvelles

;

un

dessinateur et un avocat, de vingt-

ans

sept

tous

Doré, dans

les

et Jules

Ferry,

Ollivier;

puis

deux

Gustave

:

de sa vogue,

plein

le

amené

par Emile

des écrivains

Ch.

:

Baudelaire, Champtleury, Charles de

Lorbac

,

qui firent

Léon Leroy, Gasperini, énormément pour la répu-

tation de leur hôte, en forçant l'at-

tention du public par leurs cris de

guerre UNK RÉPÉTITION DE

A

— fait

^'a,

magne

TANNH.EUSER

».

monsieur Wagner, votre musique

Sapristi,

trop de tapage

«

être

entendu

d'ici

plus

transporté la

!

moi fouloir

et leurs

Un peu

en Alle-

demeure au

sa

rue d'Aumale, on y

iSôi.)

tenir

plus

dans

la

tard

vie

la

vit

avait fait le

trouver en lui,

la

voyage exprès pour

"Wagner

amusante

était

de

plein

M. Carvalho

pianiste

plus

le

l'aider

confiance.

l'appel

qui

et

mit

le

du maître,

dans ses préparatifs de concerts.

En même temps

directeur de ses rêves,

que

sa F.lle

faveur.

et

mourut

en

déroute,

des

difficultés

à Saint-Tropez en 18G2. Elle a transmis son

aîncc de M""

croyait

qu'il

soumet-

qu'il le

médiocre et doué d'une voix archi-fausse,

patient

En présence

place

le

il

la

façon

Wagner, aujourd'hui comtesse Gravina.

'

qui

la

plus

s'occupait activement

d'organiser les concerts qui devaient tout d'abord bien disposer

I.

de

cœur de M"^ Cosima Liszt,

au supplice d'une lecture que Gasperini a racontée de

la lilk

3

peut-être

meilleure

dans

et

sœur cadette de M™^ Ollivier, depuis deux ans mariée à Hans de Biilow, qui, sur Richard 'Wagner,

en

eut

lorsqu'il

quelquefois une personne qui devait

!

(Cham, Clinihwî, mars

tait,

enflammés.

articles

tard, et

surgissaient

doux prénom

tic

Blandine

la

foule

de

tous

à sa nièce,


'M

.^s

S


RICHARD WAGNER

12-2

côtés,

avait renoncé à son projet

il

de représenter

Tristan et voulait

simplement donner quelques auditions des principaux fragments de ses œuvres, comme il avait déjà fait à Zurich. avait

11

demandé, par l'intermédiaire de Mocquart,

particulier de la

Tempereur, qu'on

de TOpéra

salle

accordât

lui

la disposition

mais, ne recevant pas de réponse,

;

marché avec Calzado pour

le

louer^ et fort cher,

il

secrétaire

gratuite de avait conclu

théâtre Ventadour

le

:

à peine avait-il signé l'engagement, qu'il recevait avis que la salle de

l'Opéra

lui

était

accordée;

Pendant

nèrent aux Italiens.

Herz, Bûlow

salle

frais,

trop tard,

était

concerts se don-

les

et

que Wagner exerçait l'orchestre à

la

chœurs à la salle Beethoven avec peine, que, pour avoir beaucoup de choristes à peu

d'autant plus de

de

il

on avait

faisait répéter les

appel aux amateurs de

fait

colonie allemande, à

la

Paris.

Les trois concerts eurent lieu les 25 janvier, i" et 8 février i86o. Pour les trois soirées, le programme était identiquement le même i" Ouverture du Vaisseau fantôme ; 2° Marche avec chœur, introduction du troisième acte, chœur des pèlerins et ouverture de Tannhœuser ; 3° Prélude de Tristan et Iseiilt ; 4" Prélude, marche des fiançailles avec chœur (du deuxième acte), fête nuptiale (introduction du troisième acte) et épithalame de Lohengrin L'exécution, malgré tant d'efforts réunis, fut très défectueuse, et Wagner, fébrile et nerveux, n'était pas pour remettre les choses d'aplomb dès le début du concert, il avait donné une marque de son caractère irascible et violent, qui avait :

'.

;

frappé toute l'assemblée,

un

mouvement de

vif

leurs

si la

En clairs,

curiosité était grande,

il

mais non au delà;

musical,

d'ail-

faut dire aussi qu'il n'y avait nulle

préconçue.

résumé

l'artiste,

monde

le

de ces séances avait produit

L'annonce

dépit.

beaucoup d'émotion dans hostilité

en jetant ses gants gris perle à terre avec

le

,

des concerts

résultat

qui avait rassemblé là

les

plus

accessibles

les

fut

morceaux de

au public,

tout

et

honorable

très

œuvres

ses

à

fait

l'entrepreneur,

pour

les plus

dérisoire

pour

qui demeurait en déficit d'environ six mille francs heureusement qu'il put couvrir cette somme en prenant sur les droits que la maison Schott lui payait pour la propriété de l'Anneau du Nibelung. Aussi ne profita-t-il pas de l'offre du maréchal Magnan, qui

lui

proposait

:

la

salle

s'en fut-il à Bruxelles,

de l'Opéra pour un quatrième concert, et

où on

l'invitait

concerts, en mars, au Grand-Théâtre, I.

Lcfort.

.\u licuxicinc concert,

on ajouta

la

romance de

à et

se le

y donna deux résultat pécuniaire ne fut

rendre

:

il

l'Etoile,, de Tannliœiiscr,

chantée par M. Jules


RICHARD WAGNER pas

plus

satisfaisant

qu'à

l'aris.

C'est

123

en vue

de

ces

concerts

de

Bruxelles qu'il adressait à quelque ami une lettre où il faisait force recommandations pour l'exécution du chœur des matelots, coupé ou raccourci aux concerts des Italiens, et qu'il terminait par ce post-

LE

«

TANNH.EUSER

l)

DEMANDANT

A

VOIR SON PETIT KRERE.

(Cham, Charivari, 25 novembre

scriptiim

:

«

Royer

était

iS63.)

encore hier bien stupide.

»

Preuve irrécusable

qu'on s'occupait déjà de Tannhœuser à l'Opéra.

De

Bruxelles,

il

revint -tout droit à Paris.

La presse

français étaient surtout étonnés, surpris, désorientés

;

et le public

ce qu'ils avaient

entendu ne leur paraissait ni aussi transcendant que l'avaient crié les admirateurs du maître, ni aussi barbare et cruel que l'avaient hurlé


RICHARD WAGNER

124

ennemis,

ses

comme

en

sans

avant

quant aux journaux, de

;

musicien,

force paraître informés sur ce

en plein Paris, en voulant la

«

ils

campagne. En

dès avant

qui,

un homme

Voici venir

dont

il

la

faut

après toute

fimproviste

surgissait à

môme,

de

;

battaient tous

ils

branle avait été donné par un feuilletoniste

le

fait,

de ses attaques et

homme

qui

n'avaient guère rapporté que des fables

juger sur l'heure et de façon définitive,

le

en renom,

On demeurait indécis même qu'en voulant à

connaître.

rien

de "Wagner, avait

l'arrivée

au

crié

renommé pour

depuis longtemps

feu.

hardiesse

la

verve éblouissante de sa critique; voici venir un se

défier

Berlioz est le Robespierre

Son

1

est

Il

!

Marat de la musique, dont une chose qu'on ne définit sa phrase un macaroni, une

le

style est

pas,

gluante

mélopée.

opéras que

dont le

nom

même

écrire

mais, malgré tout,

;

:

des

fait

ne connais pas et

ne sais pas

je

répète

je

a

11

défiez-vous

!

je

Et cependant, malgré ces d'alarme, on

se

réservait.

l'embarras général de

du

public,

tous

les

le

»

cris

Dans

presse et

la

regards

se

tournaient vers Berlioz, considéré

comme

le

chef de l'école musicale

avancée en France; du jugement qu'il allait

— — —

C'est faux, ce

que

tu joues là, uicm enfant.

collaborateur à

Maman, c'est le TannJia'uxer. Ah c'est ilitlei-cnt (Cliam,

(:ii,iih:iri, 3i

mars

ration

11

de guerre qu'on a

souvent reproduite,

si

puient encore aujourd'hui les derniers

reux,

qu'il

que Paris

cédait,

se perdait

avec

rival,

lui

;

il

il

la

à

l'ac-

ferait à

franche déclalaquelle

et sur

ennemis de "Wagner. En

sans doute,

pour perdre son

jalousie, et,

définitif

parut enfin, cet article, et c'était

ce feuilleton, Berlioz

Galette musi-

dépendait en grande partie

iS6i.)

cueil

Richard Wagner.

la

cale et son ancien aide à Dresde,

!

!

porter sur son ancien

un sentiment

ne s'apercevait pas,

ne se doutait pas que

s'ap-

écrivant

instinctif le le

de

malheu-

public ne

faisait aucune difterence entre eux, et que la ruine de l'un entraînerait

forcément

la

Troyens, que

ruine de l'autre le

:

plus tard,

il

dut comprendre, après les

public les mettait bien, "Wagner et

lui,

dans

le

même

quand parut une caricature de Cham qui représentait Taimhœuser demandant à voir son petit frère les Troyens. Mais jusque-là, Berlioz sac,

avait

poussé

si

loin

la

haine

et

l'aveuglement à l'égard

ilc

Wagner,



RICHARD WAGNER

126

place nette à son

qu'il se flattait d'avoir fait

sa

main Richard Wagner

au désastre de Tannhœiiser.

calculé, sans rien écrire,

Le

pis est

moins dans la forme amicale

que Wagner répondit et première partie de sa «

:

en renversant de

profit

après ses concerts, en aidant, par un dédain

Mon

cher Berlioz,

qu'il

répondit avec

lettre,

en affectant

au

esprit,

même une du Journal des Débats

l'article

que vous avez bien voulu consacrer à mes concerts ne contient pas seulement pour moi des choses bien flatteuses, et dont je vous remercie; il me fournit encore l'occasion, que je saisis avec empressement, de

donner quelques

vous

sommaires

explications

sur

que vous

ce

appelez Musique de l'avenir, et dont vous avez cru devoir entretenir

sérieusement vos lecteurs. Vous aussi, vous croyez donc que ce

une école dont

abrite en réalité

beau jour avisé d'établir certains

deux catégories

divisez en

:

la

que

le chef,

je serais

principes,

je

me

titre

un

suis

certaines thèses que vous

première, pleinement adoptée par vous

et

ne renfermant que des vérités depuis longtemps reconnues de tous

la

seconde, qui excite votre réprobation, et ne se composant que d'un

tissu d'absurdités? M'attribuer

principes incontestables serait à la fois

telligence

que

qu'en

ce

le ciel

votre bienveillance

toute

a

le dire,

vouloir faire

prétention d'imposer

nomme

langue on

mon caractère et pu me départir. Vos

faire

stupidités,

explications à ce sujet,

m'est parfaitement connue,

de votre

tire

passer

comme

injure au peu d'in-

m'ont paru un peu indécises ;

mieux assurément que je vous

et,

comme

vous ne demande^ pas sinon

doute,

de

votre

»

Cette lettre, très développée, tout

terrain

vanité de

folle

la

méconnaître

permettez-moi de vous

erreur...

sotte

la

pour neufs de vieux axiomes ou

;

philosophique

oh.

portait

personne,

alors ni

la

discussion

Berlioz

ni

les

sur un autres

Wagner; mais il avait suffi de ce début si mordant le monde contre un musicien qui n'acceptait pas les

lecteurs, ne suivit

pour liguer tout

leçons bouche close et qui prétendait en remontrer à ses juges. Alors, ce fut un déchaînement l'infatuation

l'avenir

;

des

général, on ne tarit pas de plaisanteries sur

du nouveau venu

sa

et

folle

conception

de musique

de

caricatures parurent qui soulevaient une gaieté générale

en répondant au sentiment public

:

de ce jour,

la partie était

irrévoca-

blement perdue à Paris pour Richard Wagner. Il

n'espérait pas beaucoup, d'ailleurs, faire représenter

à l'Opéra. C'était du côté du Théâtre-Lyrique et de croyait avoir quelque chance,

de l'empereur ordonnant

la

Tannhœuser

M. Carvalho

qu'il

quand M""" de Metternich obtint un mot mise à l'étude immédiate de l'ouvrage à

l'Académie de musique. Elle voulait, par

là,

relever aux yeux du

monde


un compositeur allemand cruellement

musical

inespérée

nouvelle

cette

arriva

obstacles samoncelant autour

vers r Allemagne.

combien de

tant

11

de

à

Wagner

lui,

il

au moment

juste

tournait de

il

en fut absolument ravi,

difficultés

tourne en ridicule

sans

nouveau

se

oij,

que

changer

et

dissimuler pour-

aurait à vaincre avant d'arriver, sur cette

en

mais,

renoncer

fallu

à

intéressé

celui-ci

les hostilités

commandait, pour maison de l'empereur 11

la

n'échoua que sur un point alors nouveau venu, pour créer le rôle Il

:

exigeant 8,ooo francs par mois,

concours

son

n'est

il

Wagner, en

Richard

:

mode.

la

le satisfaire.

désirait le baryton Faure, ;

pour calmer

dépendait alors de

pour

l'on faisait tout

de Wolfram

zèle

homme

devenu l'homme à

était

dire, à l'Opéra, qui

ainsi

il

faveur avérée d'un

findifférence

quelques jours,

et

la

yeux

les

grande scène, à une réalisation coînplcte de son idéal. Tout le monde, en commençant, Taccueillit avec sympathie; rien de tel

et

les

contenter

se

et

de

avait

il

Morelli

qu'on

engagea tout exprès à 3,ooo francs. Il y eut aussi quelques difficultés pour se mettre d'accord sur le nombre des instruments supplémentaires, mais on s'entendit

avec

artiste était capable,

un ténor

très

des

Un

de part et d'autre.

concessions

seul

aux yeux de Wagner, de personnifier Tannhîeuser,

jeune et très content de

maître en Allemagne et

qui chantait les opéras du

lui,

contribuait fort à

M. Niemann, de Hambourg,

leur succès;

à 6,ooo francs par

expresse que sous aucun prétexte

il

on

venir

fit

mois, avec condition

ne chanterait

d'autre

opéra que

Taiinhœuser.

On donna

à ce ténor des maîtres de toutes sortes pour l'accommoder

à la scène française, et, de son côté, l'auteur s'efforçait à transformer, à styler les interprètes qu'il avait choisis laquelle

il

s'était

bientôt l'impropriété, et qu'il malmenait

beau

jour,

visage

;

le

:

Tédesco (Vénus), pour

M""^

enthousiasmé à cause de sa belle voix dont

dans un accès de colère italienne, baryton Morelli, dont

il

elle

lui

sauta presque au

obtint des sacrifices tout à

prenants chez un chanteur d'outre-monts; n'avait alors qu'une voix

aux répétitions qu'un

fort

si

reconnut

il

incomparable

M"'"

Marie Sax,

et qui apprit

fait

enfin,

la

une il

mise en scène

satisfaction sans

et

des décors, auxquels

mélange

et

Et sa confiance

tenait tant,

ne pouvait dissimuler sa

n'aurait osé espérer tant de merveilles,

les détails-.

il

une

renaissait, son

qui

presque à jouer avec

chaleur et conviction sous la rude férule de Richard Wagner'.

de

sur-

il

côté

éprouvait

joie

telle perfection

Du :

jamais

dans tous

enthousiasme débordait à

Les autres rôles étaient chante's par Cazaux (le landgrave], Coulon (Biterolf), Aimés, Kœnig, et M"° Reboux (le petit pâtre). Enfin, M""" Rousseau, Troisvallets et Stoïkoff représentaient les trois Grâces dans le tableau du Venusberg. 2. Parmi tous les bruits plus ou moins saugrenus qu'on répandait dans la presse et qui ne rcpo1.

Frérct


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I.A

DEUXIEME REPRÉSENTATION DE

«

TAN N H

.K

U

S

E K

«.

(Arcliivcs Je rOpOra.)

17


1

RICHARD WAGNER

JO

voir les progrès des chœurs, de l'orchestre, des solistes, et ces préparatifs

gigantesques pour un de ses opéras,

plus était sevré d'une pareille joie.

Gasperini,

devant

cette

«

La

depuis dix ans

qui

lui

voilà donc, s'écriait-il

après

idéale

représentation

et

un jour

laquelle

j'ai

si

longtemps soupiré. Royer est converti, il m'a compris, je le tiens On Tannhœusev tant attaqué, et c'est à la pourra enfin juger de ce !

France que

je

devrai cette gloire

Pour traduire

son

ouvrage,

»

!

adressé

s'était

il

poète à ses heures et poète de talent;

il

à

Edmond Roche,

surmenait, l'exténuait,

le

le

par un travail de forçat, l'attelant à la besogne dès sept heures du matin, ne le lâchant qu'après la

brisait

nuit

tombée,

même

et

lorsque Roche,

près de s'évanouir. le

morceau que

affaissé,

plume

sa

permettant

lui

un

d'avaler

tomber

ne

laissait

paraissait

et

entre

C'était

musicien-poète et son traduc-

teur une chasse éperdue après la syllabe indispensable, unique, in-

trouvable, qui devait frapper sur telle

ou

la fois le

voudrais apprendre la musique. enfant, on ne sait pas comment cela pourrait tourner; tu n'aurais qu'à devenir un Wagner Merci Papa,

Du

je

mon

tout,

!

!

(Cham, Charivari,

'i\

mars

iSôi.)

note pour rendre à

musique

l'accent de la

et

sens du poème. Roche, qui ne

pas l'allemand, s'était

savait

— —

telle

fait

aider, au vu et au su de 'Wagner,

par un de ses amis d'origine alle-

mande, nommé Richard Lindau, qui

se

vantait

d'être

à

la

fois

poète et musicien, et qui donnait à

Roche

le

sens

non sans peine dans

vers

et

du poème. La traduction

le

avait

à fin

courant de juin; mais celui-ci avait aussitôt déclaré que

non rimes des fait.

menée

remise au directeur de

été

récitatifs

allemands devaient être traduits en

vers rimes français et non pas en vers blancs,

avaient

ainsi

par l'acharnement de Wagner, qui mettait l'épée

reins à ses collaborateurs,

les

l'Opéra, dans les

littéral

Pour revoir leur traduction,

comme Roche

très

et

Lindau

défectueuse à bien des

convient de rappeler la fameuse « grotte rose » que Wagner, disait-on, de Vénus. Et tel était l'i^charnement des partis en présence, qu'il cette seule idée de grotte rose, on en venait aux cris, aux injures, presque au.x mains, l'our les uns, c'était la fin du monde, et, pour les autres, la rénovation de l'art musical au demeurant, il n'y eut pas de grotte rose, et cela suffit à expliquer l'échec de Tamiliœuser aux yeux de ses plus ardents défenseurs. saient souvent

sur rien,

exigeait pour

l'apparition

il

:


RICHARD égards,

il

rhabitiidc

Romeo

indique

avait

des

Wagner

à

i3i

Charles

i\l.

Nuitter,

qui

avait

travaux de ce genre,

et Juliette,

Celui-ci reprit

et,

pour

le travail

le

avec

ayant déjà traduit pour TOpéra Théâtre-Lyrique, Oberon.

Edmond Roche

Craignant toujours pour ses provinces du

iCham,

Charivari,

la 2.ï

très vexé d'être éconduit,

et

Richard

l'AlIenicgnc envoie

i^liin

pour endormir

M. Lindau,

\VA(iNI':R

le

Wagner mais ;

2"annhœuscr

France. mars

fit

iSôi.)

un procès au musicien pour

déterminer ses droits de collaborateur et demander que son inscrit sur ralliche et sur le livret. L'affaire fut appelée, le 6

sept jours avant la première représentation

première chambre du tribunal

civil,

nom

de Tannhaniser, devant

présidée par NL

fût

mars 1861, la

Benoist-Champy.


RICHARD WAGNER

,32

M" Marie

pour

plaidait

le

demandeur

qui s'était fait délivrer des brevets

de traducteur par Berlioz, de chanteur

Gounod

par M.

Wagner, de

deux

et les

Wagner

tandis que

;

avocats

M''

Ollivier

citèrent

qu'ils croyaient les plus

juges. Ceux-ci déboutèrent

de compositeur de romances

et

se

pour Richard

présentait

Tenvi les passages des

à

propres à éclairer

M. Lindau de

sa

la

écrits

religion des

demande en réservant

ses

une indemnité pécuniaire, et le résultat direct de ce procès tut que le nom de Richard Wagner figura seul, à bon droit, sur l'affiche et sur le livret. Roche, qui travaillait par pur dévouement, s'en était droits à

remis à son ami pour

donc pas voulu

n'avait

dernier

venu dans

avec

pour s'effacer

lui

du poème

de

et

de

s'agit là

11

la la

la

rémunération à recevoir en cas de succès;

la

s'associer

à

collaboration,

la

M.

réclamation de

Lindau, et

il

le

tombé d'accord

Nuitter, était

devant Richard W'agner, seul véritable auteur

partition'.

traduction en vers,

de

qui

celle

chantée

fut

et

gravée; mais Wagner, dans son désir d'être bien compris des Parisiens, avait fait plus encore.

Il

avait fait faire

une traduction de ses

grands poèmes, en prose, à cause du temps qui pressait

et

de

quatre la diffi-

y aurait eu à rendre en vers le sens littéral; puis il les avait réunis en volume, avec une lettre-préface où il avait prétendu culté

qu'il

résumer sa vie

et

expliquer clairement ses théories artistiques à des

gens qui s'en souciaient

fort peu.

Cette Lettre sur la musique, publiée

Wagner, qui recommença deux ou

à la fin de l'année 1860, fut une erreur de Richard

rage de l'autobiographie et qui

d'ailleurs la fois

la

sienne,

auditeurs

toujours

français,

américains

musique. En principe, utilité, 11

ciens,

afin

avait trois

de se bien faire connaître des nouveaux

ou

l'intention

autres, était

auxquels

bonne; en

il

fait,

soumettait elle

sa

était sans

mais non sans danger.

fallait

bien peu connaître les Français, amateurs, critiques ou musi-

pour s'imaginer

Taunlicvuser, et

qu'ils allaient lire cette préface,

posé Tristan tivement

même ils l'auraient Comme Wagner, en

quand bien

plus étourdis qu'éclairés. et Iseult et

que ce poème

figurait

lue,

avant d'aller voir

ils

en eussent été

1860, avait

dans son

déjà

com-

livre, instinc-

du développement de ses idées jusqu'après Tristan, sans faire réflexion que cela dépassait terriblement le but, puisqu'il s'agissait simplement de préparer les gens à l'audition de il

poussa l'histoire de sa vie

et

I. Edmond Roche mourut à trente-quatre ans, le iG décembre i8ôi, par contre-coup du désastre de Tannhœiiser, tant il avait mis sur cet opéra son dernier espoir de renommée et de prospérité. Ses poésies furent réunies en un volume précédé d'une préface, où M. V. Sardou raconte avec sa verve habituelle les séances extraordinaires de travail entre Roche et Wagner et déplore, attendri, la mort d'un ami de talent. Quant au recueil des poésies de Roche, il en fut comme du poète en personne on :

l'ignora totalement.


<

—

o =


RICHARD WAGNER

,34

Tannhœiiser. le

En

rédigeant sa Lettre sur la musique,

but immédiat de cette préface

que pour lui-même, entre

on

une méprise, toute naturelle,

et par là se produisit

foi trompa tout le monde Tanuhœuser et Ton en fut

public et l'écrivain. Sa profession de

le

voir

y crut

effarouché

qu'en

tandis

;

du

définition

la

écrivant,

:

de

style

perdit de vue

moins pour des ignorants

l'écrivit

il

;

il

l'auteur

en vue

toujours eu

avait

non pas Tannhœuser, ni même Lohengrin, mais Tristan l'Anneau du Nibelung. « Considérer les 11 le dit formellement quelque part

et Iseult et

:

éclaircisse-

ments que je vous adresse comme une préparation à la représentation de Tannhœuser, serait donc concevoir une attente très erronée à certains égards. » Mais alors pourquoi les donner? Des éclaircissements qui n'éclairent rien ne peuvent que brouiller les idées des gens et c'est ce qui arriva, d'autant plus que tout cela fut parcouru d'une façon fort superficielle.

On

ne

du tout cet

pas

lut

dans

écrit

le public,

et les

une ou deux mélodie infinie, musique

journalistes qui le feuilletèrent furent frappés seulement par

appellations

nouvelles pour eux

bizarres ou

de table, en parlant de l'opéra cation dans le contexte

comme trois

ils

;

dont

en inventèrent

ils

:

ne cherchèrent pas

ils

môme

une

:

l'expli-

mélodie de la foret,

avaient déjà imaginé celle de musique de l'avenir, et sur ces

ou quatre expressions

déversèrent des

flots

ils

bâtirent les théories les plus saugrenues,

de fantaisie intarissable,

Voilà pourtant tout

la\ii.

italien,

le

mal que peut

avec force quolibets et

faire

un

livre inutile et

mal

compris.

A

avec attention, ce résumé de sa vie et de ses idées beaucoup de soin par un auteur qui, naturellement, ne se donne jamais tort; mais il est confus, comme tous les écrits de le

suivre

est fait avec

Richard Wagner, où

loppements parasites, l'objet il

qu'elles

l'idée essentielle est

avec

toujours surchargée de déve-

comparaisons plus

des

prétendent expliquer.

Assez peu

embrouillées

clair

que

par lui-même,

parut fort obscur à des gens qui ne soupçonnaient rien de ces choses,

qui considéraient

comme un

musicien sans valeur

l'artiste

assez pré-

somptueux pour s'attaquer aux réputations les mieux assises et pour vouloir renouveler la musique dramatique. Et ee pauvre Wagner qui « L'ouvrage dont écrivait naïvement dans sa Lettre sur la musique je vous parle, et dont la composition musicale est déjà depuis longtemps achevée en grande partie, a pour titre l'Anneau du Nibelung. Si la tentative que je fais aujourd'hui de vous présenter mes autres poèmes :

d'opéra dans une traduction en prose serais-je disposé à renouveler cet essai I.

Dans

sa Lettre sur la

nnisiijiic,

Wagner

a

ne vous déplaît pas,

pour

ma

tétralogie'!

peut-être »

proteste par tleux fois contre la sotte invention qu'on


lUCIIAlin

WACJNEK

,35

Les

dillicultcs surgirent à propos du ballet. L'administrateur Alphonse Royer, dès ses premiers entretiens avec Richard Waoncr, ne lui avait pas caché que c'était là un élément de succès considérable, et que le ballet, indispensable à ses yeux, devait arriver au milieu du deuxième acte, afin de couper la soirée au gré des habitués qui aiment à voir ce

divertissement vers dix heures.

Wagner

un

il

deuxième

ballet au

acte,

refusait

obstinément d'intercaler

était inadmissible

contraire, d'introduire des danses dans le

;

il

caressait l'idée, au

Venusberg

cette scène en appliquant ses nouvelles idées sur le

et de développer drame. Cela ne devait

servir à rien qu'à dérouter les chanteurs qui

savaient déjà

acte, et ce n'était

concernait les

d'aucune

utilité

en ce

puisque ce divertissement arrivait dès

le

qui

le

premier abonnés,

lever du rideau du premier acte.

Mais 'Wagner n'en fit qu'à sa tête, avec raison. Il donna au tableau du Venusberg des développements maonifiques dont

les

interprètes se

plaignirent

en particulier M'"^ Tedesco, réduite à rapprendre un nouveau rôle de Vénus, et dont les auditeurs rirent infiniment, parce que ce morceau, en dehors du caractère fort,

général de l'ouvrage, était écrit dans un style trop étranger au public pour être accepté, quand bien même on aurait applaudi tout le reste de l'opéra mais il est à l'honneur de Wagner d'avoir agi selon sa conscience ;

et

de n'avoir pas écouté

les amis qui le dissuadaient de ce changement, de peur de compromettre le succès. A tous ces points de vue, il eut absolument raison toutefois ce refus de mettre un grand ballet à la

place

;

accoutumée

fut la

raison

déterminante de l'orage

de racharnement des beaux messieurs des clubs à venir siffler Tannhœuser : ils avaient trop de points de contact avec le corps de ballet pour ne pas épouser sa rancune et soutenir son dépit.

A mesure

que

et

les répétitions

geuses'. Pendant ces

avançaient, elles devenaient plus oralongues études, Wagner avait trouvé chez les

chefs du chant Vauthrot et Croharé le concours le plus intellieent et le plus dévoue; mais il n'en allait pas de même avec le chef d'orchestre qui n'était autre que Dietsch, celui-là même qui avait mis en musique lui prctait ac

musique de iavenir. Après avoir explique que chaque art, selon lui, arrivé auK limites de sa puissance, demande à s'allier à un art voisin et que rœuvre d'art parfaite résulterait de la fusion de tous les arts particuliers poésie, musique, mimique, etc., il reconnaissait qu'en l'état actuel des choses, cet idéal ne pouvait pas arriver à une réalisation complète, et il le désignait sous le nom d'œuvre dart de l'avenu: « C'est le titre aussi que je donnai à un écrit développé dans lequel j'exposais avec plus de détails les idées que je ^iens d'indiquer; c'est à ce titre (soit dit en passant) que nous sommes redevables de ce spectre si bien inventé d'une « musique de l'avenir », ce spectre, devenu si populaire qu'on l'a vu courir comme un revenant jusque dans des écrits français. Vous pouvez à cette heure comprendre clairement sur quel malentendu cette invention a été imaginée, et dans quel dessein. » [Lettre sur la musique, à M. F. ViUot, traduite par M. Challemel-Lacour, en tète des Quatre poèmes doperas traduits en prose française. Un vol. in-i8. Librairie nouvelle, 1860.) I- Il n'y en eut pas moins de 164; les frais généraux de mise en scène s'élevèrent à 100,000 fr.. plus 800 tr. de dépenses extraordinaires pour chaque représentation. Ces chiffres sont extraits de :


RICHARD WAGNER

i36

avec

peu de succès

si

Léon

à

Pillet,

des

fin

devenues des plus

les

Royer, à ce que soit

abandonné

mon

concerne

Wagner,

générale et

l'effet

du

à la merci

personnelle

valeur

entre

l'auteur

à la

:

Dietsch

et

étaient

demanda

tout à fait mécontent,

premières représentations

les trois

décidément consentir,

Je ne puis

sans

était

relations

difficiles.

dirig-er la répétition

de «

de plus

qui

et

répétitions,

Wagner

Vaisseau fantôme cédé par Richard

le

:

au directeur Alphonse

écrivait-il

zèle inouï de tant d'artistes et chefs d'études

d'un chef d'orchestre incapable, en ce qui

ouvrage, de diriger l'exécution définitive.

pas de

»

ne dépendait

Il

l'administrateur de

une décision à cet égard, dut

adresser

demande

sa

mi-

au

par un refus

qui y répondit

nistre,

prendre

Wagner

et

formel, justifié par les usages d'alors et

approuvé,

il

de

musiciens

les

chœurs,

faut le dire, par tous l'orchestre

se vengeaient

qui

Wagner en

des exi-

compliments

gences et des mauvais de

des

et

portant aux nues un

chef qu'ils décriaient dans leur particulier.

Quoi UNE REPETITION GENERALE DE « TANNHyEUSER ».

A

pas permis de s'ennuyer à mourir à votre opéra ? Non, monsieur, mourir, c'est claquer, et je ne veux pas de claqueurs à mes repréTiens,

il

n'est

(Cham, Charii\iri.

10

mars

iSôi.)

soit,

ministre

y a dans

il

d'Etat,

la

comte

Walewski, une phrase solennelle à conserver comme modèle de style administratif « Jamais en France, :

soit

sentations.

en

qu'il

du

réponse

qu'il

des œuvres de nos

s'agît

compositeurs, soit qu'il s'agit de celles des maîtres étrangers tels que Ros-

sini

ou

Meyerbeer,

le

directeur

droit de rester à la tète de sa

nos idées son

siège

comme

et

nos habitudes françaises,

dans ces journées solennelles

pis,

Tanicle

le

»

Et

les

n'a

été

et

décisives

avec

:

pour

pupitre

serait

considéré

l'avenir tout le prestige

répétitions continuèrent

chef d'orchestre à son

y

du

déshérité

a plus

chef d'orchestre qui céderait

le

désertant ses dei'oirs et perdrait

de son autorité. en

de l'orchestre

phalange d'exécutants. Il

battant

,

tout allant de

une mesure,

mal

et

le

M. Cli. Nuitter dans les Ba\-rciitlicr i-'cstblœiter (1SS4) et sur lequel 011 peut pour ce qui regarde Tannhcrusey. I! faut se délier au contraire d'un article amusant, mais très habile, où M. Paul Lindau, sous couleur d'être favorable à Wagner, tend à démontrer que tout, absolument, est de sa faute et qu'il n'y avait pas l'ombre de cabale. M. Paul Lindau était le frère de Richard Lindau qui venait de perdre un procès contre Richard Wagner, et quand même on ne le saurait pas, la façon dont il raille les vers de ^L Nuitter suftirait à montrer qu'il tenait de si

précis publié par

se guider en toute confiance

près au traducteur éconduit.


RICllARl) \va(;nkr

compositeur assis sur pied,

de

main,

la

la

>37

scène à deux pas, battant sa mesure à lui, du furieusement, au milieu d"un nua^-e de

et frapprfnt

poussière, le plancher du théâtre. C'est dans ces conditions défavorables fut

donnée,

le

mercredi i3 mars 1861.

monde

aliéné tout le

à l'Opéra

:

que

la

j^remièrc représentation

En quelques mois Wagner

s'était

directeur, chef d'orchestre, orchestre

RICHARD WAGNER EN 1861. D'après

et

une

litlio^raphic

de

Dcsmaîsons.

corps de ballet, jusqu'aux claqueurs salariés dont

passer, par honnêteté artistique, et qu'on lui avait

il

quand

aurait voulu se

même

imposés,

sans parler des quolibets et caricatures que cette folle prétention pleuvoir sur tion

lui.

Cependant, malgré tout ce quintranspirait de l'opposi-

systématique d'une partie des spectateurs, écrit

nous a laissé

le

meilleur

exactement de ce qui fût

écrit

tout

à

fit

fait

récit

allait

dans

la

M.

Nuitter, qui

de cette soirée, on ne se doutait pas

Le premier tableau, bien qu'il dernière manière de Wagner, passa

arriver.

18


RICHARD WAGNER

i38

sans opposition, mais quand, après la

changement de décor, on entendit

le

premier murmure

phrase du petit pâtre jouant du chalumeau, un

Wagner,

s'éleva.

qui était dans la loge du directeur sur le théâtre, ne la

manifestation du public, se pencha

salle et dit à

son collaborateur qui se trouvait à

comprenant pas encore pour regarder dans côté de

lui

:

la

l'empereur qui

C'est

«

sens de

le

arrive.

Hélas non

»

c'était le

!

ricanement d'une partie des spectateurs qui commençait.

Dans l'entr'acte, une idée lumineuse traversa l'esprit de ces gens en humeur de s'amuser la plupart des abonnés, membres du Jockey-Club :

ou du Cercle Impérial, allèrent acheter dans

du passage de l'Opéra tous

deuxième acte pour

et le

vacarme

de

la

représentation, sauf pendant la

il

fallut

que

reprit au

les

aller croissant jusqu'à la fin

marche avec chœurs, pour laquelle

trêve.

fissent

siftleurs

boutique d'un armurier

la

de chasse qu'ils purent y trouver,

les sifflets

faut

11

que, dans cette

dire

bagarre, les chevaliers du corps de ballet avaient été soutenus par les

ennemis personnels du maître,

il

excella toujours

tandis que les spectateurs impartiaux, indignés d'un

à

s'en créer,

parti pris et d'un

tel

outrage aussi scandaleux, avaient joint leurs bravos, souvent très chaleureux, à ceux des amis de

Un mais

instant, on put

dours, acheva la

nage à Rome, dans

de trouba-

et

au troisième, on n'entendit plus rien du

:

tout l'ouvrage, en particulier, le récit du pèleri-

d'un

couvert

fut

la salle

bravement l'auteur

bout à l'autre de

forcenés. Les

cris

deux personnages de marque au moins défendirent

reprises

semblait vouloir prendre

M""" de Metternich, qui

:

sa revanche de Solférino,

plusieurs

aux défenseurs;

victoire resterait

la

cependant, ne plièrent pas devant ces démonstrations hos-

interprètes, tiles, et

déroute

sommet de

tout, et le

que

du deuxième acte, encombré de harpes

finale

le

Wagner.

croire

Mérimée,

dit

et

l'empereur,

signal des applaudissements

le

;

qui

donna

à

cela valait toujours

mieux que d'applaudir Roland à EoucevavxK

Wagner, affaire, et

à

des

d'ailleurs,

dans

amis

le

compte rendu qu'il il marque

d'Allemagne

public pris en masse. cet

accueil,

vu assez

avoir

paraît

,

« Il

qu'on vous

me a,

fait

jusqu'à

présent,

vous vous tromperiez grandement informations, flatteuse

sujet

peut-être pour

très injuste. Je persiste,

\'oir

public le

si

26 mars,

la

au

nature de

entretenus dans l'erreur;

vous

tiriez

français

en

de vos précégénéral,

une

public allemand, mais en vérité

au contraire, à reconnaître au public parisien

des qualités fort appréciables, I.

du

le

reconnaissance

semble, en ce qui concerne

dentes

conclusion

dès

la bataille^,

une grande

certes,

au

de

dans toute cette

clair

notamment une compréhension

Paris dilettante au commencement du siècle (chez riimJn-Didol),

p.

307.

très vive et


RICHARD WACNKR

i3<

vraiment (généreux. Voici un public (je parle de ce public pris dans son ensemble), auquel je suis personnellement

un sentiment de

tout

à

la justice

inconnu,

fait

rappoitcnt

oisifs

journaux, les bavards et les

les

mon compte

journellement sur

choses les

les

plus

moi avec une rage presque sans public, pendant des quarts d'heure entiers,

qu'on travaille contre

absurdes,

et

exemple

eh bien

:

un public auquel

qu'un

!

pour moi contre

tel

me prodigue

témoignages

les

plus opiniâtres de son approbation, c'est là un spectacle qui devait

me

lutte

mettre

monde

la

claque et

la

au cœur, eussé-je été l'homme

joie

I,

CLEF DE LA MUSIQUE DU

A

B

(Cliani, Cluirii'.u-i, 7 avril

plus indifférent du

profita

l'auteur

:

il

de

ce

déjà

avait

Vénus dans

le

obtenu de

lui

mars,

fut reculée

».

M. Niemann, de

qu'on

premier tableau,

i3

1861.)

pour demander

retard

le

TANNH.EUSER

au lundi iS par suite d'une indisposition de

rôle de

le

»

'.

La deuxième représentation, annoncée pour

teur

les

les

nouveaux

et

le

direc-

sacrifices

à

supprimât une partie du

trompes de chasse

et les

du premier acte^, la ritournelle du petit le deuxième acte, et le retour de Vénus au troisième toutes coupures heureuses, mais insuflfisantes au gré du directeur. « Je vous ferai observer, écrit-il au ministre le 17 mars, chiens dans le tableau pâtre,

le

trait

final

de violon qui termine :

Riclurd Wagner, p. '171. Ces malheureux chiens qui avaient soulevé l'indignation des spectateurs délicats et servi de prétexte aux quolibets les plus spirituels, à quelque temps de là contribuèrent singulièrement au succès d'un grand drame la Jeunesse du roi Henri, de Lambert Thiboust et Ponson du Terrail, représenté en 18Ô4 au théâtre du Chàtelet les auteurs avaient tout simplement repris l'idée de Wagner 1.

Souveitirs de

2.

:

;

et

n'eurent qu'à s'en féliciter.


RICHARD WAGNER

,40

ouvrao-e à

un homme

Ceux qui

le

cela,

récitée,

pas

soit

suffisant.

telle partie

déjà obtenu, quoique

j"ai

d'une

s'agissait

S'il

d'autorité, malgré les réclamations de

couperais

de son

que Test M. Wai^ner.

aussi convaincu de son mérite

ne

répète,

je

retrancher telle ou

faire

connaissent s'étonnent de ce que

le

je

de

diflîcilc

très

est

qu'il

pièce

l'auteur;

mais, dans une partition, tout retranchement nécessite un raccord de tonalités que je ne puis pas me permettre de faire. » On n'est pas plus modeste, en vérité.

En

confirma

C'était

«

:

si

A

bjs les Jockeys!

passèrent

sans

premier

En

que

d'ordre,

encoi'e

donnée

un

présence des abonnés de l'orchestre, et

elle

Mais de cette

salle

comble, ainsi que

oreille, et, plutôt

il

chevaux,

Autant

«

messieurs,

Wagner,

dit

héro'iques déployés par

douter,

si

mon égard

peu que ce

un terrain neutre, de

de

fut

que

le

monstre.

qui tenait

convenu que

la

d'éviter

la

afin

les chiffres

des recettes'.

le

Tanuhœuser

risque de laisser

se

d

Et

le ;

autant

cela,

mauvais

masse, eux pour qui

montrer un dimanche à l'Opéra.

même

à ruser

j'ai

ému

été

et

avec une cabale

touché des efforts

public proprement dit pour

jamais

soit,

et

été stupéfait de l'attitude effVénée de ces

ai

j

ne

il

m'est

ne l'oublions pas,

troisième représentation.

11

avait été sous-entendu,

sans qu'on

réparer ce déni

moins venu à

du public parisien dès

la

l'eût

qu'il se

fut écrit le

l'esprit

de

trouve sur

surlendemain

officiellement

annoncé,

Recettes des trois représentations de Tannhœuser : première 7,491 fr. (dont 2,770 d'abonnement), le service lait à la presse et aux artistes; deuxième 8,-4i5 fr. fcirnt -j,;?!^ fr. d'r.l-onnement'; troisième 10,7134 fr. (abonnement, 23o fr.) (Arlicle cite de M. Cli. Nuitler.) I.

:

maigre

le

partie

eut lieu effectivement le 24,

venus en

étaient

ils

n'y avait plus à lutter ni

aussi acharnée.

de justice à

il

la

violentes

mal tué

dimanche

prouvent

que de courir

presque déroger que fois,

mirent de

plus

moins du monde devant un public impartial

connaisseur en c'était

le

chaleureux à

abonnés, dont on voulait se passer, n'avaient pas entendu

les

se relever le

Cette

serait

du second

moitié

tout-puissant,

ministre en personne,

le

sur un signal, qu'à

bravos

et mirlitons se

sifflets

siftleurs.

du tournoi des chanteurs,

de cet acharnement d'un club

troisième représentation

devant une

la

de

celle

puis, à partir de la scène

tremblement

le

et

tant les siffleurs craignaient d'avoir

soir,

présence

dans

mot

sur un

manœuvrant

et

manifestations hostiles devinrent

les

et

:

public, sur ce public qui cria

le

premier acte

le

interruption

autre

plusieurs endroits

comme

tout

et

aux bravos des partisans,

fois

pour imposer silence aux

»

une cabale montée

bien

représentation,

cette

d'une

plus

s'associèrent

jugement de Wagner sur

le

lui-même

deuxième représentation, pendant laquelle l'empereur

la

fait,

l'impératrice

:

:


RICHARD WAGNER

,4,

que cette représentation du dimanche serait la dernière il lut bien un instant question d'en donner une quatrième afin que les abonnés du vendredi qui, seuls, n'avaient pas entendu Tannhœitser, pussent s'en amuser à leur tour mais Richard Wagner s'opposa si vivement ;

;

1^,

C^i^li"

tU^iT

C^^-^C-ft^i^t

^

f-r «./•

,

''^'^^.J^c. LETTRE AUTOGRAPHE DE WAGNER AU DIRECTEUR DE l'opÉRA En

à ce projet

que

le

date du

ministre

i" mars

1861.

ne

crut

(Archives de l'Opéra.)

pas devoir passer outre et

consentit au retrait de l'ouvrage,

demandé par Fauteur.

membres du Jockey-Club,

Wagner dans

directeur,

entendre

ne veulent

mon

pas

disait

permettre que

opéra exécuté sur

la

le

«

qu'il

Puisque

les

une note adressée au

public

de

scène de l'Académie

Paris

puisse

impériale de


RICHARD WAGNER

,43

musique, faute de voir danser un ballet à l'heure ordinaire de leur entrée au théâtre, je retire ma partition et je vous prie de vouloir bien

communiquer C'était

une note privée

Monsieur

directeur,

le

;

me prouve combien affaire, vous me faisiez

cette

ballet

conventions

d'autres

et

lettre

la

résolution, par laquelle

»

officielle

qui

l'opposition

TannJuvnscr de

ma

d'Etat

embarras important.

tirer d'un

je crois le

«

à S. Exe. le ministre

s'est

est

conçue

ainsi

manifestée

contre

:

le

vous aviez raison quand, au début l'absence

du

auxquelles les abonnés

de

observations

des

scéniques

l'Opéra sont habitués. Je regrette que la nature de

sur

mon ouvrage

m'ait

conformer à ces exigences. Maintenant que la vivacité de l'opposition qui lui est faite ne permet même pas à ceux des spectateurs qui voudraient l'entendre d'y donner l'attention nécessaire

empêché de

le

pour l'apprécier,

je

n'ai

d'autre ressource

honorable que de

Je vous prie de faire connaître cette décision à S. Exe. d'État.

y>

Toute

C'était

tomber fièrement

cette affaire de

M.

retirer.

le

ministre

le

presque en vainqueur'.

Tannhcvuser, à quelque point de vue qu'on

l'examine, est peu honorable pour nous.

encore que ce tapage infernal

Mais ce qui

est

plus

triste

organisé par de joyeux viveurs après

boire et avant souper, c'est l'attitude de la presse qui, elle, n'était pas

dans

la

dépendance du corps de

ballet et crut na'ivement se trouver en

présence d'une oeuvre exécrable et d'un compositeur de rencontre. fut entre tous les

journaux une course à

l'injure,

Ce

un tournoi d'ignorance,

pendant des semaines, longtemps encore après que le compositeur avait fui Paris, ils écrasaient l'œuvre et bafouaient l'homme avec un et

acharnement sans

pareil.

Jamais peut-être l'aveuglement de

la critique prise

en masse et sa

faiblesse envers le public, sur lequel elle se guide au lieu de le guider,

ne se montrèrent d'une façon plus éclatante. d'articles c'était

l'on injuriait l'artiste et

de mode, et

le

pis est

l'auteur

était

y a eu des centaines

son œuvre, uniquement parce que

que tous ces juges, qui ne soupçonnaient

absolument sûrs de leur un polisson, l'œuvre une ordure et

rien de la chose à juger, étaient

yeux,

Il

fait

:

l'arrêt

à leurs qu'ils

rendaient devait être sans appel.

Beaucoup sont morts avant d'avoir vu leurs jugements cassés en si peu de temps; mais, parmi ceux qui survivent et qui furent des plus Ce

Tannhœuser

une véritable déception pour les amateurs et les curieux dans Tannhœuser, et la location encaissée à l'avance était énorme. Une fois la pièce retirée, on se rendit en foule partout où l'on jouait quelque fragment de Wagner, par exemple au Casino, où Arban faisait exécuter la marche de Tannhœuser et la marche des fiançailles de Lohengrin ; à l'Opéra-Comique, où Roger chantait dans un concert spirituel le récit du pèleiinage à I.

retrait de

Paris, tout le

Rome,

inonde avait

etc., etc.

la

fut

:

rage de

Et partout adversaires

et

partisans sifflaient et applaudissaient avec rage, aveuglément.


WAGNER

RICIIAI^I) violents

rurii^inc,

à

manœuvrent pour

amusant

est

il

tourner

oublier leurs élucubrations

comment môme temps que la mode

en

passées,

sentent le terrain fuir sous eux.

d'observer

crient

et

plusieurs et

faire

que d'autres, plus crânes

tandis

désespérément, avec rage,

luttent

143

d'autant

plus

fort

qu'ils

serait fastidieux de rccheicher tous

Il

ces articles, dont Gasperini a, d'ailleurs, détaché des passades caractéristiques

des

doux

plus

maîtres de

un

suffira d'en citer

il

;

signé

et

d'un

seul, oublié

dans sa nomenclature, un

qu'on classait alors parmi les

écrivain

critique.

la

Pas de périphrase à notre opinion sur l'opéra de AI. ^^'a"ner

«

marche du second acte exceptées, qu'un chaos musical. Les sons se heurtent, l'ouverture et la

s'agglomèrent,

s'entassent,

confondent,

se

comme d'immenses nuages dans un fard.

Tantôt

pesante,

mélodie

et

ce

que M. Wagner appelle

la

obscurité

sans doute,

iujînic,

x

partition

n'est

i?

ciel bla-

opaque

une

c'est

sa

:

qui écrase la

plus robuste attention; tantôt c'est un

vacarme

discordant qui ne parvient qu'à simuler les plus grossiers fracas des tempêtes physiques.

Les voix luttent, «

l'orchestre,

et

comme

le plus fou ».

perce

Si parfois

ténèbres,

ces

les

vents et

Shakespeare,

dit

si

le

«

la

mer

à qui sera

un coin de lumière spectre

d'une idée

mélodique se dessine vaguement sur ce fond grisâtre, le

à la façon d'Eole excitant les vents, et

de cesse que

comblé

la

— — — —

déchaîne son orchestre

musicien

masse nuageuse

et tout efïacé.

n'ait

M. Wagner

il

n'a

tout

J'ai

ma

vendu

partition.

Au marchand

de musique? Non, au pliarmacien. Comme somnifère, c'est juste. (Cham,

Chjrii\-iyi. 7 avril 1861.)

s'interdit

à dessein ce que les musiciens de tous les temps ont recherché l'essence

musique,

le rythme, môme de leur art comme celle des Corybantes, qui :

la

mélodie,

comme

clarté.

la

Sa

entouraient les antres des

Mystères orgiaques, semble n'avoir pour but que d'effrayer et d écarter » criaient les profanes. « Il a mangé du tambour et bu de la cymbale !

Hiérophantes de ces bacchanales pour désigner

les

traversé la terrible épreuve.

«

Si je

l'Initié

comprends ce que

te

chasse

cuisinier.

voilà la

gible est son idéal.

Paul

de

je

mange,

En deux

«, disait un gourmet à son musique de M. Wagner. Elle impose, pour révéler des tortures d'esprit que l'algèbre seule a droit d'infliger «

qui avait je

mots,

ses secrets, :

l'InintcUi-

«

Saint-Victor,

l'auteur

de

ce

galimatias

double,

osant


RICHARD WAGNER

144

reprocher à quelqu'un d'être «

écrit

Moins on en

inintelligible

'

?

mieux cela vaudra,

dira sur les causes de cet échec,

Wagner; mais

bouffon

assez

est-ce

:

ce fut un désastre pour moi. Toutes les personnes

intéressées avaient été payées par moi

;

ma

consister dans

part devait

honoraires habituels après chaque représentation, et cette ressource

les

était

brusquement supprimée. Aussi

me

de dettes, ne sachant de quel coté de ces désagréments,

nullement désagréable.

»

perdait

11

année désolante ne m'est

cette

d'autant

abandonné

la

moitié

deux traducteurs,

les

de ses droits sur

les

représentations et que c'était seulement à partir de qu'il

alors

devait toucher pour

seul la

lui

somme

donc seulement ySo francs

la

vingt

et

premières

fixée

trois représentations

à chacun

francs

37 5

il

vingt-et-unième

totale de 5oo francs,

pour tous droits d'auteur à l'Opéra. Ces

rapportèrent

brusque inter-

plus à la

ruption de Taniihcviiser que, pour rémunérer leur avait

cependant, en dehors

tourner;

souvenir de

le

une masse

Paris avec

quittai

je

lui

des

deux traducteurs-. Quelle explosion de le

silence aux

quel

comme

Débats; mais

chez Berlioz

fut alors

ce

joie

se rattrapait

il

déchaînement de colère dans toutes

craindre un succès

gnements dès & représentation

!

son ennemi par terre

Quels éclats de

sous un jour tout nouveau; polissonneries d'une

hautbois; enfin,

il

dans

monde! Et

le

tant

lettres

qu'il

put

Mais aussi quels cris de triomphe et quels trépi-

qu'il vit !

ses

avait gardé

11

1

a

il

ri

orchestration

comprend donc

rire

«

!

Ah Dieu du

Le Parisien

!

du mauvais bouffonne,

ciel,

!

a

montré hier

musical,

style il

s'est

ri

il

a

ri

des

des naïvetés d'un

y a un style en musique.

qu'il

quelle

Quant

Et sept jours après, dans « La deuxième représentation de Tannune lettre adressée à son fils hœitser a été pire que la première. On ne riait plus autant, on était furieux, on siftlait à tout rompre, malgré la présence de l'empereur et aux horreurs,

il

splendidement.

les a sifflées

»

:

de l'impératrice sortant, sur

qui

dans leur loge. L'empereur s'amuse.

étaient

l'escalier,

on

traitait tout

haut ce malheureux

En

Wagner de

Infiniment peu de critiques défendirent Richard Wagner ou se contentèrent de le discuter se-riculieu de l'accabler de quolibets il faut nommer cependant Baudelaire à la Revue européenne, Franck-Marie à la Patrie, Weber au Temps, d'Ortigue aux Débats, remplaçant Berlioz pour un jour, 1.

sement au

:

tout en repoussant les idées émises dans la Lettre sur la musique, reconnut en Wagner un convaincu et le combattit sans aigreur. 2. Ces chiffres sont exacts, mais les renseignements qui suivent, rapportés par M. Dannreuther, qui les devait tenir de Wagner, paraissent sujets à caution. Si Wagner avait demandé une cession de droits à ses collaborateurs, il est bien probable que ceux-ci y aurarent consenti; mais il n'avait pas à il ne dépendait pas disposer dune part de droits qui était la pleine propriété de ses collaborateurs de lui, mais d'eux-mêmes, qu'ils touchassent leur part, équivalente à la moitié. Dans le lait, il y eut, en ce qui concernait Tannhœuser, tant de conventions particulières, de traités fictifs, pour soustraire les droits de Wagner à ses nombreux créanciers, à MM. Erlanger, Beckmann, Lindau, etc., qu'on ne et qui,

artiste

:

raurait y reconnaître grand'chose aujourd'hui, de peine qu'on se donnerait ?

l'aveu

de

M..

Nuitter.

Ht puis, cela vaudrait-il la


lUCIIAin)

WAGNER

.45

grcdin, d'insolent, d'idiot. Si l'on continue, un de ces jours la repré-

pas et

sentation ne s'achèvera

pour Tcxterminer. Pour moi,

La presse cruellement venge

tout sera dit. suis

je

est 1

I

!

unanime » Pauvre

Berlioz!

Au mois

Wagner

de juin 1861,

encore à Paris.

était

Il

abandon-

d'Aumale pour aller loger chez le ministre de Prusse, économie et honneur pour lui comte de Pourtalès, mais il quittait presque aussitôt la France et, cette fois, il pouvait regagner nait alors la rue

tranquillement sa patrie au lieu d'errer en

déjà

vers le milieu

;

de l'année

1860

Depuis quelque temps

exil.

du grand-duc

l'intercession

de Bade avait obtenu du gouvernement saxon que, tout en continuant

Wagner

à interdire à Richard

de

le territoire

la

Saxe,

ne s'opposât

il

plus à son séjour dans les autres Etats de la Confédération

au moins autant que de son

parlant «

Paris

lui

eût

fait

jouer

Tristan

second séjour, car

et Iseiilt.

l'exactitude

les

sitîleurs

est

nous,

acharnés du Paris firent plus pour sa

nom que

remportés en Allemagne.

fois, I.

qu'il avait déjà

l'avaient

porté au pinacle

:

n'aurait

ainsi

va

pu le

faire

un succès

En

croyant

monde quelque-

et tout est bien.

mois d'octobre iS3i, le roi de Saxe avait coinnuié en bannissement liors Je l'Allemas^ne emprisonnement auquel Wagner, condamne par défaut, n'avait échappé que par la En 18Ô0, le proscrit n'était plus écarté que du royaume saxon; enfin, en mars 1862, il obtiendra

entière l'uitc.

Wagner, en

frappante encore après un

plus

semblable à ceux ils

cela valait

a

gloire et le retentissement de son

l'enterrer,

;

remarqué que du plus grand secours pour l'Allemagne ». Obser-

premier séjour au milieu de

avait été

vraie et dont

vation

s'il

'

Des le

le

loni;

de pouvoir rentrer

même

en Saxe,

après treize ans d'exil.

TANNH.EUSER TRODUISANT SON EFFET, MEME SUR LES ARTISTES QUI iCliam, Clu^rivari.

10

mars

1,E

REPETENT.

i.Sôi.)

Kl


CHAPITRE X TRISTAN ET ISEULT A MUNICH

iCHARD Wagner, en rentrant en Allemagne, jours possédé

de

même

la

Tristan et Iseult.

avait

Il

au théâtre cet ouvrage

même,

le

-

poète et

réformateur,

le

idée fixe

une

ou.

musicien,

qu'il avait fallu

exécuter

hâte d'entendre

telle

mis tout de

avait

il

était tou-

faire

:

lui-

philosophe et

le

le

une impossibilité radi-

cale pour le faire renoncer à sa folle idée de louer le

monter son œuvre à ses un bien autre hourvari que pour Tannpensa que cela devait marcher tout seul en Allemagne; théâtre Ventadour et

d"y

risques et périls. C'aurait été

hœuser. Mais

comme retour

faisait

il

sance.

et

la

n'avait

furent peut-être

qu'une

étaient

pensée,

comme

et

les

plus

tous

les

frappés d'impuis-

échoua d'abord auprès du grand-duc de Bade, qui ne refusa Tristan

mais qui n'en reparla

jamais.

monter

après

le

Il

réaliser

pas tout net de laisser Jouer

de

années comprises entre son

appel à Munich

son

pour

tentait

les trois

fait,

de sa vie entière.

qu'il 11

En

erreur!

France

de

déplorables efforts

il

mais,

;

flagrante du ténor

Ander

à 'Weiniar,

fallait

il

s'en

A

Vienne, on avait en principe accepté

cinquante-sept

répétitions,

força d'y renoncer.

qu'on

pour son anniversaire,

et Iseult

allât

jusqu'à

A

l'insufîisance

Carlsruhe, à Prague,

répéter

:

on refusait de

prime abord.

A

Wagner

ce moment-là,

tenir sa précaire existence,

il

était à

bout de ressources,

et,

pour sou-

dut organiser une série de concerts où

il

conduisait principalement les symphonies de Beethoven et des fragments

des

Alaitres

Chanteurs

des

et

Nibelungen^.

De décembre

1862

à

I. Quelques renseignements pécuniaires ne seront pas de trop ici. En Allemagne, les honoraires habituels pour la première représentation d'un ouvrage variaient de lo à 5o ou 60 louis d'or (soit de

200 à

selon

rang

grandeur du théâtre. Pour

les représentations suivantes, la part de d'avance et dans un petit tant pour cent sur la recette, le plus souvent cinq, parfois sept, jamais plus de dix. La plupart des villes allemandes ayant un théiitrc, un opéra heureux dans sa première tournée pouvait produire une somme considérable mais après, le rendement baissait vite on ne pouvait pas jouer longtemps la même pièce dans un théâtre de cour ou de ville, où les prix sont toujours très bas et où le système des abonnements tend à réduire le nombre des représentations d'un ouvrage, n Mes opéras pouvaient être joués de diftercnts Cotés, dit Richard Wagner, mais je ne pouvais pas vivre avec leur produit. A Dresde, où le Hollandais volant et Tannluvuscr avaient eu du succès, on me dit que je n'avais aucun droit parce qu'ils avaient 1,-ioo fr.),

le

l'auteur consistait dans

une

et la

petite

somme convenue

:


RICHARD WAGNER

,47

monde, dirigeant des festivals de ce Prague, à Saint-Pétersbourg, à Moscou, genre à Leipzig, à Vienne, à à Pesth, à Breslau et de nouveau à Vienne, où il redonna plusieurs décembre

i863,

courut

il

concerts au théâtre

An

exécution, tout à

dans

fait

le

Wicn,

der

émerveilla

il

la vraie tradition,

public par une

le

de l'ouverture du Frcischi'tti.

Et lui-même a résumé d'un mot cette vie de Juif errant de la « Ce curieux concert, dit-il en parlant de celui de Leipzig, musique :

entreprises

pareilles

Dans

réduisirent. je

Russie que

d'autres villes au moins,

accourait

parvenu à

fait

pour

partout

Tristan

faire jouer

vint en masse et

public

le

mais

;

le

seulement en

c'est

en parlât.

pécuniaires valurent qu'on

résultats

les

en somme, avaient

concerts,

le

fut

un véritable succès artistique

remportai

monde

premier d'une longue série de absurdes auxquelles la gêne et la misère me

vide à moitié,

était

salle

la

»

beaucoup pour sa réputation mais

voir,

et

toujours

n'était

il

Ces le

pas

et Iseult.

Après cet heureux voyage en Russie, où la grande-duchesse Hélène, amateur passionné de musique, avait témoigné son admiration à ce « Messie du laid », comme dit Fétis, avec une magnificence toute

Wagner

royale,

dépenses tous

imaginé

s'était

donné

de sa tournée dans

les bénéfices

il

gaspilla

ne verrait jamais

qu'il

libre cours à ses goûts fastueux

A

la

la fin :

de cette fortune et avait

on parlait d'un canapé tendu

Wagner

de magnifiques tapisseries que villa

de Suisse

roubles

furent

mangés.

plus

sou,

grande-duchesse

rien

s'introduisirent

et sur laquelle fit

plaisamment

avait fait tisser

de temps,

Vers cette époque,

une riche tabatière

quelque temps. Cela ajoutèrent

en un

:

des voleurs

butin, emportèrent la

il

qu'il

a

La légende de

Tristan

comme lui

avait

et,

première

fois

il

n'avait déjà

trouvant maigre

journaux, en relatant ce vol,

Iseult,

si

Tristan et des

»

fameuse au Moyen-Age,

d'origine celtique et par conséquent d'essence française. la

exprès

reçue des mains de

Quant aux manuscrits de et

tout

les trente-cinq mille

comptait probablement pour durer

rire, et plusieurs :

et

chez

Nibeliingen, les voleurs n'y ont pas touché.

pour

six mille

devanture d'un grand marchand de Vienne, on se montrait

pour sa le

folles

Nord, environ trente-

le

de soie richement brodée et payé trois mille florins, plus de francs.

en

qui représentaient alors plus de cent mille francs.

cinq mille roubles, Il

quartiers à Vienne,

ses

prit

On

la

est

rencontre

sous une forme littéraire, dans un roman écrit au

pendant que j'étais maître de chapelle, et qu'un maître de chapelle de la cour de Saxe un opéra par an. Quand ensuite, à Dresde, on désira avoir Tristan, je ne voulus le donner que si l'on consentait à me payer Tanniuvuser, et l'on me refusa; mais lorsque le public insista pour avoir les Maîtres Chanteurs j'obtins ce que j'avais demandé. » [Dictionnaire de Grove, article Ricliard Wagner, par M. Dannreuther.) été représentés

doit produire

:

,


RICHARD WAGNER

,48

x\f siècle, en prose

normande, par Luc de Gast. De France,

rapidement en Allemagne

elle

en 1210, Gottfried de Strasbourg en

et,

passa

fît

une

épopée chevaleresque, à laquelle Richard Wagner emprunta la donnée première de son drame, en la modifiant beaucoup pour Tapproprier à la

scène

avait

y introduire les théories philosophiques dont il cerveau plein. Dans Tétat d'isolement douloureux et

surtout

et

alors

le

d'absolu

découragement

vers

spéculations

les

il

se

trouvait en exil,

philosophiques

son

porté

imbu surtout des

jusqu'alors

et

esprit,

doctrines panthéistiques de Hegel et de Schelling, s'était laissé gagner

par

les

théories

des

religieuses

de Schopenhauer qui ne sont autres que

Hindous, du Nirvana

:

déooùt de

le

du jour aveuglant, l'aspiration à

l'horreur

la

vie

la

idées

inutile et

calme, à

nuit

les

la

mort

bienfaisante, à l'anéantissement. «

Comme

Schopenhauer,

écrit

Gasperini dans

chaleureux,

Wagner

élément,

pouvait se sentir vivre dans cette

son plaidoyer très

un refuse contre les agitations d'un monde mobile et tumultueux, dans ce grand détachement que l'Inde préconise. C'est de ce côté qu'il se tourna, c'est au bouddhisme qu'il demanda l'apaisement de son âme, c'est en renonçant au combat, en se donnant tout entier à la foi nouvelle, qu'il espéra se préserver à jamais des désenchantements terrestres, des surprises violentes qui l'avaient jeté à bas. Par une contradiction étrange et dont il serait trop long de rechercher les causes, le bouddhisme, qui prêche l'extinction, l'anéantissement, proclame la puissance de la volonté, et glorifie la volonté sans limites. Par là, du moins, "Wagner se retrouvait dans son il

torpeur morne où

il

crut trouver

venait de s'abîmer'.

Que Richard Wagner

eût

décourageante entre toutes,

le

relever des abattements

de

se

comparable à

rien là de

prêchant l'extinction de

mais

lui-même, cations

lumière

dans cette

volonté nécessaires pour

de mieux;

rien

il

n'y avait

de Schopenhauer lui-même,

nombreux enfants;

comme

de ses héros, de deux amants

Iseult

de l'école philosophique alors agissant sur

les interprètes

et

et la

race et procréant de

qu'il allât jusqu'à faire

et Tristan,

courage l'exil,

épaisse,

dans une théorie philosophique,

contradiction

la

la

puisé

nuit

»

qu'en guise de chant d'amour

il

leur

fît

au jour pervers, au jour menteur, à toutes

lancer des impré-

les faussetés

de

la

honneur, beauté; qu'il les fit aspirer aux ténèbres, au repos éternel de la mort, au néant; que le suprême élan d'amour de Tristan fût celui-ci a C'est moi-même qui suis le monde », ainsi :

gloire,

:

que Schopenhauer avait

ma

représentation 1.

»,

en termes plus abstraits

dit

voilà

La Nuiwelle Allemaf^nc musicale

:

qui

montre

:

«

un esprit

Richard Wagner, par A. de Gasperini,

Le monde

est

singulièrement p.

145.


WAONKK

KICIIAKI) par

trouble

dramatique

Tristan

comme un

ne

Iscii/l

et

voyait toujours

épouvantai! pour tout

pas

la

lumière et

la

lin

de Tannée

monde. A

le

i863, l'intendance du théâtre de la cour, à Dresde,

par toutes ses conditions,

passait

équipage de

au théâtre,

loge

chef d'orchestre.

exorbitantes qu'elles fussent

:

de pension viagère, appartement au château grand-ducal,

six mille livres

conclure,

allait

si

entame des

avait

comme

engager Richard Wagner

néçociations pour

On

concept

sain

et musical.

Cependant c'était

philosophiques et détourné du

rêveries

les

'49

cour à sa disposition,

la

toutes ces clauses

lorsqu'à

dans un très bref délai de Tristan

ajouta

il

et Iscitlt

:

alors,

la

etc.,

on

etc.;

représentation

craqua,

tout

et,

devant cette nouvelle exigence, on rompit les

Las, découragé de tant

pourparlers.

Wagner

d'efforts superflus,

prendre

allait

une retraite définive en Suisse, lorsque la

mort

amena

Maximilien

de

sur

le

Bavière

de

II

mars

trône, en

un

1864,

jeune prince âgé de dix-neuf ans, vision-

ardemment

naire et mystique,

épris des

théories d'art dramatique et national tant

de

exposées

fois

passionné

Richard Wagner,

par

pour

Loliengriii ,

entendu dès sa seizième année,

un an

avant

avait

qu'il

de monter sur

UNK

qui,

et

trône,

le

vous portez

avait

dans

cru voir un avertissement du ciel les

dernières

appel de Richard

Cet

écrit, est

définitif

lignes

Wagner

SCENE DE

Kind, de Munich. tion,

la tùlc si

I'

AT N ]

{Punscli, de

GE

.

haute, faites atten-

vous allez tomber dans

d'un suprême

.\

\'ous,''|là-bas, si

Munich,

ic)

le

trou.

février 186.'.)

à ses amis.

daté de Vienne, avril iS()3, et sert de préface au texte

de l'Anneau du Nibelung.

Wagner

y reprend en termes plus

précis, avec des détails très étudiés, le plan déjà esquissé dans la

Com-

munication à mes amis

réali-

sation de son

œuvre

orchestre invisible,

et leur

d'art,

adresse un dernier appel pour

pour

l'édification

représentations

la

d'un théâtre spécial avec

solennelles

à des intervalles régu-

événement considérable et fertile en conséquences que je prépare, quand je cherche à me procurer les moyens nécessaires pour une première représentation du grand drame liers,

etc.

«

C'est, dit-il,

un

solennel fBûhrienfestspielJ.

Comme

je

nécessaires pour assurer

-succès

de

plus qu'à pourvoir au\

moyens

la

matériels.

partie

Deux

et la capacité

artistique,

voies

se

il

ne reste

présentent à

Une association d'amateurs riches, des deux sexes, pour fournir sommes nécessaires à la production de mon œuvre; mais quand je

moi. les

le

possède l'expérience


RICHARD WAGNER

i5o

combien

rctlexion

fais

Allemands ont peu d'entrain pour de pareils

les

mode de procéder ne

appels de fonds, ce premier

Par contre, il augmenter son budget

serait

espoir.

entreprise

fonds

les

très

facile

un prince

à

pas grand

m'offre

allemand, sans

par un simple virement, d'appliquer à

et

destinés

à

l'entretien

détestables, telles que les théâtres d'opéra, qui pervertissent

dément

Oue

musical allemand.

groùt

le

à

charge

leur

compte, ce n'est ni la musique ni le

drame

allemand.

musical

et le sens

sommes

conviction de ce prince, les

Si

les

sources.

Par

pour

développement

esprit

purement

et

se rencontra,

de riches amateurs

vivre

assez

souhaite seulement

musicale

acte du

d'envoyer à Vienne ce simple billet

bout

national

le

:

Ce prince

et plus tard se

il

est

suivant

et

la

formation d'un

prince assurerait ainsi à son »

formera aussi cette association

force

:

en

quel

;

achever

d'en

Je

mon œuvre,

pour assister à l'exécution de la

«

:

composition

la

a

Louis

jeune roi

II,

,

venait

passant

le

en montant sur

trône, fut

le

un secrétaire particulier pour remettre à Wagner Venez ici et terminez votre travail. » Mais Wagner,

d'expédients

L'envoyé

retraite

res-

les

à remarquer que 'Wagner, alors telle-

justement

pour Munich,

élevés

par

le

de

ciel

ce

fut

avait

Eckert,

poursuivit d'étape en étape

coup du

Vienne

quitter

poursuivre

puis

Stuttgart où son ami, le chef d'orchestre sur.

année à l'Opéra

se rencontrera-t-il?

d'avoir

des créanciers assez mal sur Zurich

la

eut la bonne fortune de voir son double souhait se réaliser.

»,

Le premier

à

parvenais à former

désespéré et qui ajoutait avec une douloureuse résignation

n'espère plus et

car

;

plus grave

la

représentations auraient

les

Allemagne

en

l'art

gloire impérissable.

Ce prince ment

de

mais bien

fondée une institution d'infinie portée

trouverait

se

là,

vraiment

nom une

je

façon

ans ou à des intervalles plus éloignés,

lieu tous

prenant à son

les

destinées chaque

profiteraient au grand drame solennel, dont

le

la

mes

prince de

le

qu'il protégerait,

une machine outrageant de

l'opéra, c'est-à-dire et le

car en

;

drame

profon-

si

amateurs forcenés de

quotidiennes,

théâtre exigeaient des représentations

rêves en laisserait les frais

les

si

mon

musicales

d'institutions

et

;

il

et

fuyait

s'était

dirigé

tourné du- côté lui

un

offrait

de

asile

parvint à découvrir sa

pour Wagner, quand

reçut ce

il

messager de la fortune Après l'entrevue, il se jeta au cou du fidèle Eckert en s'écriant « Je croyais tout perdu, voici que tout est sauvé. Toutes mes espérances sont dépassées. Le roi met à ma. disposition !

:

tous les

moyens dont

Peu de dans

dispose

jours après, Richard

les bras

royale de

il

I

»

Wagner

de son protecteur qui

Starnberg

et

lui

assurait

arrivait à

l'installait

non

Munich loin

de

et la

tombait

résidence

une pension de 2,5oo francs sur


RICHARD \VA(JNER sa boLirsc privée

:

ce n'était

travail, J'ai

et

Wagner

sa grâce.

A

»

homme me

au

Propylées,

de son

ni

de

la

créanciers

mon

rendit heureux. fait ni

du mien,

encore, et par

quand

Munich,

le

roi revint à

son favori une petite maison

bout

Mes

suis libre aujourd'hui

je

l'entrée de l'hiver,

disposition de

la

ennuis,

«

pus continuer

je

1877,

eu beaucoup d'ennuis depuis, qui ne sont

mais, en dépit de ces

à

en

ce noble jeune

confiance de

la

qu'un iM-cmicr secours.

furent tranquillisés, écrivait

,3i

ville,

augnîenta

et

en

située

sa

pension

il

mit des

face

dans

de

fortes proportions.

Alors Wagner,

lui-même,

écrivit,

souverain maître en

pour rendre

Marscli avant de se remettre à

f[iinf['s

depuis longtemps

interrompue;

sur l'Etat et la Reliision

essai

Bavière et plus

hommage à ;

il

la

que

le

roi

composition des Nibcluugcii,

demande du

la

roi

à son protecteur, son Hiddi-

roi,

rédigeait un

il

élaborait les statuts d'une école de

chant, semblable à celle qu'il rêvait autrefois d'établir à Dresde, et roi

fermait

le

vieux Conservatoire en

commission pour examiner

le

juillet

nommait une

i865, puis

projet d'une école établie sur un nouveau

plan; mais ces propositions n'eurent pas de résultats appréciables, suite

du mauvais vouloir de Franz Lachner

Munich

et autres

par

musiciens de Munich,

de ressources pécuniaires'. De plus,

et aussi faute

le

Wagner mandait

à

Semper, que le roi voulait consulter pour édifier, selon les indications du maître, un théâtre propre aux représentations des Nibelungeii; enfin, il faisait engager exprès pour Tristan et pour Gottfried

M.

Iseult

Schnorr de Carolsfeld, en indemnisant leur directeur faisait venir de Berlin son bien-aimé disciple Hans de

et M""-'

de Dresde;

il

Biilow, auquel était conféré le titre de pianiste du roi

dans ces conditions,

il

de Bavière, et

consentait à laisser mettre en répétitions Tristan

et Iseult.

Entre temps, pour montait

Tannha'iise)% n'avait

sans

faire patienter son royal maître, le

Hollandais volant

pas encore entendu

malice,

le

jugement

à

de

Munich, xM.

de

il

faisait rejouer

décembre

(4

et rappelait, à ce

1864)

qu'on

propos, non

Kùstner qui, vingt-quatre

plus tôt, avait refusé cet ouvrage envoyé de Paris,

comme

étant

«

ans

peu

dirigeait des concerts exclusivement

conforme au

p-oût allemand ». Enfin il composés de ses œuvres; dès le 11 décembre, il en combinait un pour donner à son protecteur quelque avant-goùt de ses créations nouvelles, I. Le 8 octobre i863, la Ga-^ctte musicale de Paris recevait et publiait l'avis suivant lie .Vlunicli de considérablement modifié La difection de notre Conservatoire, réorganise d'après le plan M. Richard Wagner, a été contiéc à M. de Perfall; les classes rouvriront au mois de novembre. C'est le 3 du même mois que doit être inauguré le nouveau Théâtre du peuple, fondé par actions. » A propos de ces remaniements, un journal satirique de Munich écrivait n Le bruit s'est répandu que, dans la nouvelle écule de chant, on se servirait de la vapeur pour l'émission du son; la nouvelle ne parait :

»

:

pas se confirmer.

»


RICHARD WAGNER

,52

que

telles

Tristan

et Iseiilt et

dans

laissèrent jouir de son plaisir vide,

préparé

que

répétant

allaient

hostilité,

pour provoquer un

Cependant

première

la

M.

depuis

tous,

mécontentement qui

et

de Tristan

représentation

et

mieux

le

Schnorr

M"'''

MM.

Gottmayer, Mitterwurzer

Marke, Kurwenal et Melot). L'annonce de à Munich une affluence énorme de tous

attiré

l'Allemagne de

l'insuccès

à

l'entrée

homme

de l'Europe; mais l'auteur, en

et

Tannhcviiser,

tous

avait

pris

gens suspects

les

d'opposition.

rendue publique à ces

lui-même,

qualifiait s'il

et

aux seuls

réservées

y avait lieu d'admettre

la

et

points

les

de

interdire

monde

entier par

comme

il

les

on verrait plus

adeptes;

du public à jouir

niasse

Hein-

solennité

cette

pour

modèles,

représentations

jusqu'à

ne s'en était pas

11

caché, bien au contraire, en convoquant ses amis du lettre

chaque

ayant profité de

précautions

ses

était

avant dans

Iseult)',

et

rich

avait

Iseiilt

l'accent juste à

(Tristan

(Brangœne), jusqu'à

roi

assez

pas encore

n'était

M""" Deinet (le

le

conflit décisif.

pensée du maître, à qui donnerait

mot,

pas encore

n'était

et tous les artistes luttaient à qui pénétrerait le plus

proche

roi,

du théâtre presque

salle

terrain

le

<(

C'était bien plutôt le

».

assez fort

grande

la

de Richard Wagner, pour se consoler de cette

partisans

les

et

tard

Muni-

les

par un commencement de mauvaise humeur contre leur

chois,

la

Maîtres Chanteurs ; mais

les

«

de ce

y a de plus élevé et de plus profond dans l'art d. Cette Invitation à mes amis pour assister à la première représenta-

qu'il

de Tristan, publiée en

tion

extrêmement singulière

lettre

débutait

par ce

et

dans

comme

pouvait seul en écrire une,

il

un noble cœur n'en

:

était toute-puissante, car c'était la

c'est

de

quantité de choses le

son

mot

séjour

En

chez :

nous

et

roi. »

se

félicitait

«

Alors que

fort et plus

cria

à

Ensuite trois

revenait sur

chaudement de

langage bien différent de celui

ce qui c<jiKerin: ces

qui

propos de cette action en

:

l'artiste

et cette fois la volonté

»

volonté d'un

substitue à celui à'opéra,

qu'il

de Tannhœiiser

à

lui !

11

que plus

battit

chaudement pour l'idéal de mon art. Ce fut aventuré « Ce que toi tu crées, moi je le veux d une

Messager de Vienne,

le

de reconnaissance envers Louis

cri

m'abandonnait,

tout

i865

avril

qu'il

il

parlait

actes, le

-

temps

l'insuccès

tiendra par

la

deux artistes hors ligne, On ne vit jamais, pai-ait-il, une leile idcnlilicapersonnages c'était à craindre, en certains endroits, de les voir succomber a leurs émotions presque surhumaines. Un tel degré d'oulMi du monde réel, un sicomplet abandon en scène paraissent tout au plus acceptables en AUeniagnc, et seulement entre époux. Richard Wagner a paye un juste tribut d'hommages et de regrets à Schnorr, qu'une fièvre maligne enleva aussitôt après les représentations de Tristan et Iseult, le 21 juillet iS65. C'est ainsiqu'à peine entrevu, Tristan rentra dans l'ombre pendant quatre années, jusqu'au jour où M. et M'"" VogI le chantèrent avec grand succès, toujours à Munich, en juin 1HG9. Voir le chapitre intitulé': Mes som'cnirs siw Louis Schnorr de Carolsfeld, dans les Souvenirs de Wagner, p. 187. I.

iion des acteurs avec leurs

:


KEPUESENTATION Scène

II

linalc

E

Cl

TRISTAN ET ISEUI.T

du promicr

acte.

»

A

MUNICH, EN lS03.

D'aprcs une sravuie du temps.


RICHARD WAGNER

i54

suite dans

à

ses

Gautier et

M""^ Judith

causeries

avec

i865,

première

dans sa

lettre

M. Monod'.

Du

mai

i5

la

représentation,

déjà

reportée au lo juin par suite d'un fort enrouement de

commençait

rhostilité le

si

bien à gronder contre Richard

rendait responsable de cet

accroc

fait

supprimer tout un rang de

dès

le

on

;

lui

affichée,

M"''^

fut

Schnorr,

et

Wagner, qu'on

reprochait aussi

d'avoir

pour augmenter l'orchestre,

stalles

et,

29 mai, un petit théâtre populaire, qui avait préparé une parodie

de Tristan,

ne voulait pas attendre davantage et

avant

la lançait

la

représentation de l'opéra parodié. C'est sous ces fâcheux auspices que

Tristan vit

le

jour

:

il

y eut en tout quatre représentations,

admirablement dirigées par Hans de Bùlow aux deux premières, c'était applaudies avec frénésie quatre

:

toutes

toutes quatre

et

lui-même

le roi

qui donnait, après chaque acte, le signal des acclamations".

L'écho de ces bravos retentit jusqu'en France, coup. La palme, en qui

fit

fait

grande dépense

de

raillerie,

oîi

appartient à

l'on

en

rit

beau-

M. Blaze de Bury,

d'esprit et contre l'ouvrage et contre Vlni'ilatioii

à mes amis, sorte d'encyclique adressée au

monde wagnérisant^

qui avait

Munich. Heureuse Bavière Bavaria felix ! Elle avait la peinture et la statuaire, elle avait Cornélius, Kaulbach et Schwanthaler mais Gluck manquait encore à son bonheur on le lui donne. Respectons les illusions généreuses et ne

servi de préface aux représentations de

«

1

;

:

reprochons jamais à un souverain ses excès de zèle en pareille cause; mieux vaut encore prendre M. Richard Wagner pour un Gluck et pour un Eschyle que de ne connaître ni Eschyle ni Gluck, ce qui parfois s'est vu,

même

ce rabâchage d'une

crement,

n'était

chez de puissants monarques

Au

fond, tout

personnalité ivre d'elle-même nous touche médio-

pourtant une phrase trop bouffonne

relevée. Parlant de sa

campagne de France

et

pour ne pas être

de toute une longue

année de son existence sottement gaspillée à cette occasion, M. Wagner entame la question de Tannhœuser à l'Opéra,, et, loin de se plaindre de sa mésaventure, de déplorer la catastrophe, se demande, l'ironie et l'amertume aux lèvres, s'il ne vaut pas mieux, après tout, que les choses se soient ainsi passées, 1.

«

car, dit-il, d'un

grand succès,

s'il

eût

les jnuniaux d'Allemagne évaluèrent à So.ooo florins la somme dépensée pour monMunich, et a. une somme encore plus élevée les frais de Tristan et Iseidt, sans parler cadeaux en argent et en nature s'élevant au total de 25o,ooo florins. La Galette de

IMus lard,

ter Lolicngrin à

de dilTércnts Cologne, en particulier, annonçait un jour que le roi venait d'offrir à son musicien favori une canne dont la pomme était un cygne en or ciselé et enrichi de brillants valant plusieurs milliers de ducats. 2. La salle du théâtre de Munich, rappelant en beaucoup plus grand le Vaudeville de Paris, était niédiocremcnl éclairée et d'aspect assez triste. Au premier étage, en face de la scène et flanquée de

deux cariatides, la loge royale, éclairée d'un petit lustre; au-dessus du rideau de la scène, à la place des armes ou emblèmes usités chez nous, une horloge indiquant' parfaitement l'heure; enlîn le chef d'orchestre était placé au centre de son orchestre, au lieu d'être auprès de la rampe, et dirigeait debout.


RICHARD WAGNKR «

,55

ctc possible, en vérité je n'aurais su qu'eu faire

joueur qui,

cette capitale de l'empire des Iroquois, voyez un Si par

du moins comment on Ta K

complètement assurées,

«

ordinaires

et

fait,

se

peuvent pour

groupés

que,

modèles.

On ignore grand homme deux cents

sont

demeuce que

trop

amis dûment

de huit ou dix

l'infatigable direction

du tambour.

11

de

fameuses représentations,

trois

journalistes jouant du fifre et

usages

les

Impossible

»

en famille

manœuvrent sous

et qui

dehors de tous

en

dans ces

gloire d'un seul

la

ami savent

public auquel on s'adresse.

le

amis,

entre

passerait

ne savait que

représentations, dont trois sont

lieu

représentations

des

seront

donc bien convenu

tout

à Paris, dans embarras!

tpiel

ont lu sa Lettre à uu I.es

k

auront

s'expliquer plus clairement sur rait

peu

hasard M. Richard Wagner, ce grand dégoûté,

de ce succès, tous ceux qui

faire

(Test Thistoire de ce

».

nj gagnant pas, aime mieux perdre. Réussir

ne sont que deux cents

Ils

Voyez au théâtre du

à peine,

et

vous

Châtelet

les

magnifiques défilés qu'on obtient avec quelques comparses

passant et Tristan

croiriez

toujours

repassant,

La

et Iseult.

qu'ils

Wagner

fusée d'artifice après

a dit

qu'on

il

de

puis

Tannhœuser,

à

de

qu'il

un

rien!

Paris,

deux

Tristan soirées

Ce

qui

ne pense lui-même

des représentations

n'y en aura plus,

plus

Mais

M. Richard

Hélas!

tirée.

comme

il

:

n'y

art sans veille et sans lende-

main. De l'agitation, des discours qu'entre compères on

brouhaha,

succès

ce

après trois jours?

l'a

une chose plus mélancolique

comme

Ainsi

Quels rappels surtout!

reste-t-il

ce sont des représentations modèles,

en a pas,

!

salle ne désemplissait pas, et quels bravos, quels

de toute cette fantasmagorie, que reste d'une

mille.

mêmes

les

quels trépignements!

enthousiasmes,

dix

et

qui,

Iseult,

à

échange, du

Munich,

chacune dans

son

ou

le

genre,

» compter pour des représentations modèles Ce n'était pas une petite affaire, il faut l'avouer, même pour un auditoire préparé et trié sur le volet, comme celui de Munich,

peuvent, en

elïet,

!

d'entendre ainsi trois actes pendant lesquels intervalle

il

n'y a pas

le

'

plus petit

ou repos pour applaudir ou respirer, où tout s'enchaîne

et

si bien que l'oreille ne perçoit aucun point de soudure en symphonie ininterrompue, au-dessus de laquelle les personnages déclament et chantent leur partie avec une intensité d'expression superbe et sans jamais se plus répéter qu'on ne ferait dans un drame

se tient

cette

que cette nonrépétition des paroles nuit au développement symphonique de la pensée sans

musique.

Il

ne

faudrait

pas

croire,

cependant,

y aide au contraire et en accentue la portée. L'auteur, reste, en donnant comme pivot à son œuvre entière une phrase

musicale;

du I.

elle

Revue des Deux- Mondes, i"

juillet i8(J5.


RICHARD WAGNER

,5(-,

exquise et passionnée, sur laquelle est bâti

prélude, établit d'avance

le

an courant secret qui échauffe ses auditeurs et les associe à la pensée oénératrice du drame. Aussi faut-il voir de quels bravos enthousiastes

on salue, entre autres points lumineux, le magnifique couronnement du premier acte, cette conclusion rayonnante à laquelle on tend, vers

amassée

laquelle on se sent entraîné par la force supérieure du génie, et

d'un

au courant

décuplée

acte

entier

d'accumulation d'électricité musicale et

tel

il

:

y a

un

pour se

qu'il faut,

inouï

effet

repré-

le

senter, en avoir subi le choc.

Cette fusion intime entre

créatrice

de

simultanéité

cette

dire,

et

poème

le

musicale

Wagner

un des points auxquels

est

raison.

L'exécution musicale de Tristan,

la

mots,

de

répétition

tissu des

le

mélodie; en un mot,

La forme musicale donnant

lui

poétique,

il

une

la

une seule

l'étendue

destinée à »

poème

et

si

cette

sitôt

certitude absolue

plus, avec

le

se trouvant ainsi figurée d'avance dans le

reste à savoir

Au

«

:

même

n'offre plus

paroles a toute

répond

qui

valeur particulière

Wagner,

un

dans

s'attache

dit-il,

pensée

seule

mélodie est déjà construite poétiquement.

l'invention

liberté d'allures nécessaire à son

Et

une

poétique

et

cerveau, «

musique, ou pour mieux

la

impliquant

conception

double faculté

la

et

exactement

au

but

mélodique n'y perd rien de

la

développement.

question

y répond

soulevée,

une

avec

contraire, la mélodie et sa forme comportent,

grâce à ce procédé, une richesse de développement inépuisable et dont

on

ne

l'affirmait,

une

puissance et de

œuvre

«

fier à

ainsi

qu'il

admirer

faut c'est

:

se

lui

;

faire

une

idée.

»

Il

mais l'audition de son

seulement du génie du compositeur, mais de

»,

qu'il

MU de l'exécution

recours,

lucidité d'esprit de

la

d'art

de Tristan, ce

avoir

preuve à l'appui de son affirmation qu'on

telle

confondu, non

reste

d'y

pouvait déjà s'en

l'on

et

œuvre apporte

velle

avant

pouvait,

le

l'homme qui a conçu

On

l'appelle.

génie,

en

ne

sait,

en Wagner, de

le plus

tout

cas,

la

cette nou-

après audition la

dans ce

conception qu'il

peut

avoir de plus audacieux et de plus puissant.

De

l'aveu

même

sion

la

leui-

haute valeur,

sont

que

plus

les

de Richard

fidèle

et le

Wagner, Tristan

et Jsciilt est l'expres-

Malgré Lohengrin ne

plus vivante de ses idées théoriques.

la

Vaisseau fantôme, Tannhœuser et

créations admirables d'un génie ignorant encore à

quel

il lui sera donné d'atteindre. « On m'accorun plus grand pas de Tannhœuser à Tristan mon premier point de vue, celui de l'opéra

point de prodigieuse audace dera, dit-il, que

que

pour

j'ai

passer

de

fait

ordinaire, à Tannliantser.

dégagé,

et

l'art

nouveau

»

Dans Tristan, dont

il

enfin, son idéal s'est clairement

s'est fait

le

fondateur et l'apôtre,

en


.

RICHARD WACNF.R gnands maîtres,

s'inspirant, dit-il, des plus

15:

s'y

impose avec une autorité

qui ne souffre pas de compromis.

Wagner

les lois les plus

tant

il

*

quelque part qu'on pouvait juger Tristan d'après

écrit

a

rigoureuses qui découlent de ses affirmations théoriques,

est sûr de les avoir suivies d'instinct,

W

w. ,_^ ^.

'^

mais

il

avoue

qu'il

A-

H.

RICHARD W A G N Dessin de

M.

F.

R

VERS

1

ô

3

Renuir, d'aprcs une photographie.

et qu'il senen composant, affranchi de toute idée spéculative son essor même, à mesure qu'il avançait dans son œuvre, combien

s'était,

tait

formules de son système quelque nuance de regret, de

faisait éclater les t-il

avec

parfaite spontanéité

composant mon

de

Tristciii.

l'artiste »

Il

dans

la

en fut de

écrit.

«

félicité

création,

même,

11

n'y a pas, ajoute-

supérieure et je l'ai

à ce qu'on

à

cette

connue en

peut croire.


RICHARD WAGNER

i58

quand quand

il

termina l'Anneau du Nibelung, interrompu pour Tristan,

il

écrivit les

Maîtres Chanteurs

Tristan, Tcnfant de

Marke,

roi

le

son

la

a

il

reçu

Tristan

a

même,

cjui

trier

de

une blessure à

reconnaît en

son

belle

la

lui

Morold

fiancé

tête;

la

est

il

yeux rencontrent ceux du jeune héros désarmée. Elle le laisse, une fois guéri, Cornouailles.

Tristan

bientôt

est

:

de Tantris,

à ce regard,

retourner

renvoyé

princesse Iseult. Celle-ci est accordée par son

le

pure au

Marke;

roi

mais

terrible,

il

il

résiste

sent

vieux

main

la

de

cour

la le

roi

de

la

père au souverain vic-

drame commence, on

sur

est

Cornouailles.

vaisseau qui conduit Iseult en Tristan, fidèle à sa

meur-

elle se

à

par

Marke, son oncle, en ambassadeur pour demander torieux en gage d'alliance, et lorsque le

le

tuer à son tour, lorsque

le

ses

Mais

soigné par Iseult elle-

nom

faux

le

va pour

elle

;

adoptive du tribut

patrie

combat singulier Morold, neveu du Iseult. Mais, dans ce combat terrible,

malgré

,

sa

délivré

qu'elle payait à l'Irlande et tué en

de

et Parsifal.

Bretagne, est passé en Cornouaillcs, où règne

oncle;

roi d'Irlande et fiancé

et

mission,

veille

sur la jeune

et la

fille

remettra

entend bien gronder en sa poitrine une passion avec héroïsme et se tient résolument à l'écart

d'Iseult. De son côté, celle-ci se sent fiévreusement poussée vers Tris-

tan;

son

mais, se révoltant à l'idée qu'elle

puisse aimer le

vainqueur de

premier fiancé, ce vainqueur orgueilleux qui n'a pour

l'indifférence,

elle

ouvre son cœur à son amie

elle

et suivante

que de

Brangœne.

une ardeur concentrée, tout ce drame antérieur; elle lui commande alors d'aller quérir Tristan, immobile à l'arrière du navire. Celui-ci, mis en garde par le prudent Kurwenal, son fidèle Elle lui raconte, avec

écuyer,

et

de

d'abord

refuse

princesse,

et

de quitter son poste

lorsque celle-ci

pardon,

pressent

il

;

il

finit

par obéir à

la

propose de boire en signe d'alliance

lui

qu'elle

veut

l'empoisonner

pour

venger

Mais Brangœne, éperdue, a remis à sa maîtresse un philtre amoureux au lieu du breuvage de mort Iseult et Tristan vident la coupe et tombent dans une extase indicible. A ce moment, le navire aborde, et de toutes parts éclatent les cris, les vivats saluant le roi Marke, qu'on aperçoit sur le rivage,

Morold

;

cependant

il

accepte

boit.

et

;

attendant sa fiancée. s'éveillent-ils la

couronne

A

peine, à ces clameurs de joie, Iseult et Tristan

de leur délire enivrant, qu'on ofTre à et le

manteau

Une

royal.

fin

la

souveraine Iseult

d'acte admirable et d'un effet

dramatique entraînant.

Ceux qui n'osent plus

nier

en

Wagner

poète, et trouvent le premier acte de

sur un vaisseau, vide et pauvre.

le

musicien s'attaquent au

Tristan, qui se passe tout entier

Moins pauvre

et

moins

vide,

à

coup




RICHARD WA(}NER que

sûr, et

et la la

troisième acte de l'Africaine. Et puis,

le

ne contient- il pas tous pas

suit-on

Ne

intéressant?

clairement les progrès d'une passion, d'abord contenue

jurée,

envers

l'outrage

à

les

deux héros jusqu'à

Marke,

vieux roi

le

de

l'oubli

jusqu'à

enfin

mort?

Au deuxième s'éloigne,

acte,

bruit

a

malgré

l'éteint,

On

nuit.

fait

il

quand tout

et

torche qui brûle et

A

tellement vide

est-il

éléments d'un drame

les

débordante ensuite, qui va entraîner foi

iStj

entend

conseils de la sage

les

Brangœne ;

plus

n'a

mais

qu'à

faire

le

saisit

la

Brangœnc.

au-devant de

lui

pendant cette longue scène

guet

mal, car

elle le fait assez

qui

roi

impatiente,

ce signal, Tristan accourt; Iseult se précipite

d'amour

chasse du

la

Iseult,

cessé,

le

prévenu par

roi,

le traître

Melot, revient à l'improviste et surprend Tristan et Iseult perdus dans

une ineifable étreinte

il

;

reproche douloureusement cette trahison à son

neveu. Tristan demeure d'abord interdit, puis se jette sur Melot, dont l'épée le blesse grièvement;

tombe,

il

et le

vieux

Kurwcnal l'emporte

en Bretagne, au manoir de ses ancêtres.

Là, blessé, sur de bientôt mourir, Tristan attend avec fièvre

que

rivée d'Iseult,

affectueusement

bon Kurwenal

le

son

maître

Tristan ne désire pas vivre revoir

sa

rendre

lui

Tout

bien-aimée avant d'expirer.

à

mais

l'espoir;

demande qu'à

à la mort et ne

aspire

il

;

dû prévenir. Celui-ci console

a

cherche à

et

l'ar-

coup éclate une joyeuse

un pâtre, placé en guetteur sur le rempart, qui signale au loin le navire attendu. Déjà Iseult aborde et s'élance; Tristan, réunissant toutes ses forces, se soulève et va pour se jeter dans ses mélodie

bras

;

:

c'est

mais ce suprême effort

Le vieux

Marke,

roi

le

brise

:

il

rend l'àme en revoyant

par Brangœne

instruit

que

cette

Iseult.

passion

folle

magique, arrive à son tour pour pardonner et deux amants mais il ne trouve devant lui qu'un cadavre

était l'effet d'un philtre

pour unir

les

et Iseult,

évanouie auprès.

en extase

et

;

A

la

voix de

Brangœne,

semble déjà prête à quitter

la terre.

elle se relève

qui l'entoure, elle n'entend, elle ne voit que Tristan par delà elle aspire à lui à travers les

inanimée,

Que

sur

le

comme

Étrangère à tout ce l'infini

;

sphères lumineuses, et lentement retombe,

corps du bien-aimé.

dire de la partition

?

Chaque

forme une scène

acte, pris en soi,

gigantesque, d'une intensité d'expression merveilleuse,

l'œuvre entière

et

puissamment dans ce prélude incomparable, incompris de dans ce prélude admirablement bâti sur cette phrase ascen-

se condense

Berlioz,

dante I.

en

demi-tons,

Pourquoi no pus rappeler

d'une ici

tendresse infinie',

«i

certaine annotation de Voltaire;

tique procède pur plusieurs scnii-tuns consécutifs, ce qui produit

11

11

est

écrivait

une musique

singulier,

un jour

:

n I.c

etltiniiatc,

dit

chroma-

très

conve-


RICHARD WAGNER

,,,o

Berlioz après l'avoir entendu aux Italiens, que l'auteur ait

même

ce prélude au suivi

même

le

plan dans l'un

commencé

d'un morceau lent, fortissimo,

retombant à

et

exécuter

fait

concert que l'introduction de Lohengriu, car

dans

et

1

autre.

nouveau

de

s'agit

Il

a

il

pianissimo, s'élevant peu à peu jusqu'au

nuance de son point de

la

départ,

sans

autre thème qu'une sorte de gémissement chromatique, mais rempli d'accords dissonants, dont de longues appogiatures, remplaçant la note

riiarmonie, augmentent

de

réelle

page étrange

cette

n'ai

écoutée

l'ai

le

la

cruauté.

avec l'attention

eh

sens;

bien

relu

l'avouer,

je

il

la

Le moyen d'accorder

ces contrariétés

?

L'héro'fque loyauté de Tristan, chargé d'amener

au vieux

faut

et

profonde

plus

la

il

I

lu

J'ai

moindre idée de ce que l'auteur a voulu faire. « Au trouvait admirable en tout point le prélude de Loheugrin.

pas encore

contraire,

je

;

d'en découvrir

et un vif désir

encore

roi

Marke,

cœur une ardente

sentant gronder en son

et qui,

princesse Iseult

la

passion, se tient loin d'elle, à l'arrière du navire, et se refuse à l'aborder

quand

amour

l'invincible

Morold

fiancé,

cet

;

Morold;

par l'écuyer

colère et le dépit d'Iseult, confuse de

de ne rencontrer que muette indifférence en

irritée

côté

à

la

qui la pousse vers le chevalier qui a tué son premier

vainqueur

orgueilleux

quérir;

elle l'envoie

d'eux,

Kurwenal

et

résolue

et

l'empoisonner

à

Tristan

,

la

passion

croissante d'Iseult

l'irrésistible élan qui les jette

ont bu le philtre

amoureux,

dans

leur douloureux réveil lorsque

le

sa

réserve obstinée

la

soif

Brangœne, au

de

vengeance

;

lieu

du breuvage

leur enivrante extase et

aborde

navire

Marke attendant

le roi

et

— —

bras l'un de l'autre après qu'ils

les

servi par

de mort qu'lseult croyait verser à Tristan; matelots saluent

venger

dévouement complet, absolu, représenté Brangœne; les sages conseils

le

l'aimable

de ceux-ci, tantôt ironiques, tantôt affectueux; de

pour

que

et

cris

les

sa fiancée au rivage

:

des voilà

pour les épisodes du premier acte, que l'auteur a traduits avec une vérité et une variété dont on ne peut civoir aucune idée, à moins de l'entendre. A la deuxième représentation, à Munich, ce finale, d'une joie débordante, souleva de tels transports que l'auditoire, en masse, acclamant l'auteur sans se

était debout, applaudissant,

La le

les

suite

de l'œuvre est pour

troisième acte, en élans

puissante,

nablc à

Tristan

si

riche en

qui

raiiiinir. u Voltaire, aussi

avait-il ilouc

aucuns.

de

particulier,

le

moins égale à ce qui précède,

et

rempli tout entier par les plaintes et

va mourir,

traits

lasser.

est

d'une conception tellement

de génie, en combinaisons merveilleuses,

peu musicien que possible et souverainement rebelle à la musiciue, et Iseult? Ce serait comique et mfime humiliant pour

prévu, deviné, pressenti Tristan


RICHARD WAGNKR qu'il

perd toute

en

primable.

monotonie

et

i6i

vous ctrcint d'une angoisse

Les appels douloureux de Tristan, son

inex-

retour attendri sur

chant plaintif

chalumeau du pâtre fait entendre le même qu'au jour oi!i mourut son père; et les rudes consolations

de Kurwenal,

et l'affolement

sa jeunesse,

alors

que

le

d'amour,

qui secouent le malheureux dès

-'

M.

ramène

ET M™"^ VOGL DANS

«

les sursauts terribles

qu'on signale en mer

le

de passion

vaisseau qui

-->iii&^-'

TRISTAN ET ISEULT

»,

A

MUNICH, EN

iStJO.

d'amour en la voyant, et la transfiguration d'Iseult, « se fondant dans les grandes ondes de l'océan de délices, dans la sonore harmonie des vagues de parfums, dans l'haleine Iseult

;

et

son dernier

cri

de l'âme universelle «; de ces divers éléments réunis, Wagner a su former un tout poétique et musical d'une profondeur d'accent et infinie

d'une force d'étreinte incomparables.

Quant au deuxième

acte, qui s'ouvre \y.w

une scène charmante entre


RICHARD WAGNER

iCz

douce Brangœne, où

Iseult et la

fanfares de la chasse et les

nuit;

deuxième acte, qui

ce

reproches du

|)aternels

bruissements de d'une

finit

Marke

façon

bien sur les

si

la foret

pendant

la

grandiose sur les

si

à Tristan, renferme aussi ce long

duo

drame — qui

mieux qu'un duo, tout un poème et tout un certainement la conception musicale et dramatique la plus extraor-

d'amour est

roi

détachent

les voix se

infinis

dinaire. Cet élan des

deux amants

hymne

leurs ressouvenirs, leur

amour

l'un vers l'autre, leur

effréné,

à la nuit qui les rassemble, les lointains

de Brangœne, enfin leur suprême abandon d'où nulle humaine ne les peut tirer autant d'épisodes du drame, autant prudence de secrets mouvements de l'àme et du cœur que le musicien-poète a su avertissements

:

traduire et condenser en une page où les

chaînent et se superposent de

la

renaissantes viennent

mélodies sans cesse

Un

océan symphonique. a-t-il

façon

la

motifs caractéristiques s'enplus merveilleuse,

où des

surface

de cet

fleurir à la

chef-d'œuvre, à n'en pas douter. Mais l'auteur ses théories et de

créé ce chef-d'œuvre en déduction directe de

ses vues sur l'art

?

C'est ce qu'il convient d'examiner.

morceau

C'est là, c'est dans ce

développé

qu'il a surtout

de Schopenhauer, et l'on avouera que

le

moment du drame

est

les idées

au moins

singulièrement choisi. Vit-on jamais amants passionnés s'étreindre en un transport purement cérébral et s'enlacer fiévreusement pour mieux philo-

de

so|)hcr touchant la supériorité

sur

la

vie?

nuit

la

Ces prétendus amants,

k

sur

la

lumière

et

de

la

mort

Gasperini, sont deux élèves de

dit

Kant, de Schopenhauer, de l'école indienne, ce ne sont pas des créatures

humaines et

jamais, grâce au ciel, l'amour n'a parlé cette langue ampoulée

;

barbare

jamais

;

cette rage de cri

d'amour

celte haine

heureuse

;

!

il

ne

dans

s'est précipité

délabrement

le deuil,

de submersion.

et

Cet élan de reconnaissance envers pour

mais

le

le

développement qui

plus délicieux de leur étreinte

suit n'est plus

amoureuse

de l'amour, donne-moi l'oubli de de

la nuit

la

mort avec

leur premier

qui les rapproche,

jour qui les sépare, formaient une antithèse poétique

philosophique, et voici ce c]ue 'Wagner leur

affranchis-moi

dans

Va pour

»

l'univers.

la vie,

:

fait «

qu'une dissertation

chanter au

le

Descends sur nous, nuit

recueille-moi

Déjà s'éloignent

moment

les

dans ton sein,

dernières

lumières;

ce que nous avons pensé, ce que nous avons cru voir, les souvenirs et les

images des choses,

les restes

de

l'illusion,

l'auguste pressentiment

des saintes ténèbres éteint tout cela en nous affranchissant du monde.

Dès que

le

soleil s'est retiré

dans notre sein,

les

étoiles

de

la

félicité

épandent leur riante lumière... Le monde et la fascination pâlissent, le monde que la lune éclaire de sa lueur trompeuse, le monde, spectre décevant que le joui' i)lacc devant moi et c'est moi-même qui suis le ;


RICHARD WAGNER monde.

,,-,3

d'amour, auguste création de volupté, désir délicieux » de l'éternel sommeil sans apparence et sans réveil \ ic sainte

!

Tout ce morceau, je le répète, est un chef-d'œuvre. Mais précisément parce que Wagner, en mettant dans la bouche des deux amants des idées inexprimables par

le

langage musical,

involontairement réduit à ne

s'est

plus traduire par sa musique que l'idée générale d'amour et d'enlace-

ment voluptueux.

me

Je

«

plongeai,

dit-il

bonne

de

foi,

avec une

intime confiance dans les profondeurs de Tàme, dans ses mystères, et

de ce centre intérieur du monde,

Se peut-il une

grande

illusion plus

s'épanouir sa forme extérieure.

je vis

Au

?

lieu

«

de peindre avec une pré-

cision impossible à obtenir des sons, les motifs intérieurs qu'il supposait

agir dans l'âme de ses amants,

ments extérieurs

et

il

a tout simplement rendu leurs

l'amoureux transport qui

musicale aurait-elle dilïéré

s'il

les

Sa création

saisit.

avait prêté à ses héros

mouve-

les

idées philo-

sophiques de Pascal ou de Spinosa, de Kant ou de Hegel au celles

de Schopenhauer

lieu

de

Assurément non.

?

uniquement traduit avec une idée générale l'amour; une situation un génie incomparable assez commune un rendez-vous nocturne entre amants. Par quelle déviation d'esprit a-t-il pu croire qu'il arriverait à rendre autre chose

Dès

de

plus

lors,

philosophie.

a

Il

:

:

en musique, ici

la

par quelle aberration

et

philosophie à l'amour

réussi, et qu'à

force

heurté à l'impossible.

Heureusement

Mystère.

?

pu imaginer de substituer

a-t-il

qu'il

n'y a pas

de vouloir pousser son idée à l'extrême, Il

n'a

donc pas

s'est

page véritablement

cette

écrit

il

unique en application directe de son système, mais à côté, presque à rebours,

puisque

les

guider échappaient à

mobiles

intérieurs

musical et

l'art

sur lesquels

qu'il

prétendait se

il

en arrivait, sans s'en aper-

cevoir, à ne plus exprimer qu'un sentiment très banal, qu'une situation très ordinaire.

oublié

Il

ne croyait pas dire aussi vrai quand

toute théorie

en composant

Tristan

que ce jour-là combien son essor créateur système écrit Il

:

lubrique

)>

convient de

fait

des généralités. la

entre

s'en

avoir

n'avoir senti

de son

sinon que,

tenir

aux

«

purement musicale

pour

lieux

et

rendre l'amour en

communs de morale

La musique, le plus vague des arts, de mouvements de l'àme ou du cœur, exprimer que

11

en serait autrement dans une composition

pensée acquiert une Hélo'ise

traversée

«

dont parle Boileau.

ne peut, en où

et

brisait les barrières

cette discussion est

ne tend à prouver autre chose, il

Iseult

avouait

y>.

faut le bien préciser

musique,

et

il

de

et

Abélard,

querelles

précision

d'école

et

une scène d amour pourrait être heureusement

sans rivale

par exemple,

littéraire,

;

d'argumentations

philosophiques.


WAGNER

RICHAr<n

,64

Chaque époque,

en

manière

sa

à

redit

effet,

thème

le

de

éternel

l'amour, et les lettres d'Héloïse et d'Abélard prouvent que ce docteur

en robe

flamme en s"argu-

ce docteur en jupons entretenaient leur

et

mentant sur

réel

le

et

nominal,

le

etc.;

excellemment

qu'a

ce

c'est

rendu M. de Rémusat dans son beau drame cVAbélard, où revit l'âme entière du xii'' siècle. Mais encore une fois, une composition littéraire est

une chose, une œuvre musicale en

Roméo

d'Héloïse et d'Abélard, de

musique

la

d'une chimère en croyant

sphère d'action

de

la

musique

ni

et

Ce

et Iseult,

;

Wagner

de Richard

le

personne.

indéfiniment

personne n'y saurait

ni

de longues méditations

n'est pas sans

instinctif

s'agisse

qu'il

étendrait

qu'il lui

réussir. «

et

ou de Tristan

d'amour, sans acception d'époque ou de

»

lieu

la

une autre,

foncièrement impropre à traduire autre chose que

est

commun Wagner a rêvé «

est

et Juliette

un admirateur

a dit

sans des études approfondies et une

que Wagner est arrivé agents divers du drame lyrique. Pour domi-

infatigable estimation des éléments qu'il emploie,

à

dompter radicalement

les

ner ainsi les exigences harmoniques, associer ces rythmes brisés, fondre ces modulations féroces,

fer,

fusionner enfin en un cristal unique tous ces

non seulement une volonté de mais aussi une pénétration inouïe des ressources inhérentes à chaque

cristaux partiels

élément de faire obéir

dissemblables,

si

l'action.

ne

suffit

pas d'être

rompu

à la science et de se

dispersion de la vie centrale,

faut être artiste, et cette

il

:

11

faut

il

de l'expression générale dans toutes les parties de

l'édifice

commun, ne

un sentiment profond de la vérité et de la passion, où l'àme éclate et rayonne. » En un mot, c'est le génie, et le génie dans ce qu'il a de plus spontané et de plus humain. Gasperini continue en disant que Wagner, dans Tristan et Iseult, se fait pas sans

a réagi contre cette tendance funeste des écoles italienne et française,

absorbent volontiers

lesquelles constitutifs

d'animer

et

les

bré et inculte avant l'art

Comme lui

Ce

des divers

il

;

il

libre et

enrichi dans une proportion

penseur,

aura

il

aura déblayé

facilité à

ceux qui

l'arsenal

dront puiser leurs inspirations et leurs armes.

où »

les

a vigoureuse-

montré la terrain encomet

suivront les voies

Comme

un tout ensemble.

énorme

le

le

éléments

œuvre que

de faire vivre une

faisant, ajoute-t-il,

du côté d'une réforme urgente

esprits

vraie route à suivre.

pour

tout au profit

préoccupent moins

se

les parties accessoires. «

ment tourné

à suivre

le

artiste,

il

aura

compositeurs vien-

La prédiction

s'est déjà

prier ses

combien de musiciens dans le monde ont tâché de s'approformules, son style, en un mot le côté matériel de l'œuvre

d'art de

Richard Wagner, qui n'avaient malheureusement pas son génie

vérifiée, et


RICHARD WAfiNF.R et qui,

i65

n'ayant rien pu produire avec cet appareil

retournés contre

novateur dès

le

emprunté, se sont

Tont vu ga£i-ner tant soit peu de

qu'ils

terrain en France et devenir, sinon une menace immédiate, à tout

moins un n'y

Il

lointain

a

deux

que

même

l'aveu

danger

repousser entièrement. ;

le

Qu'elle

l'audition

plus

le

par

la

les

Tout avec

sulnr

ou

la

suivra

la

«

Il

serait

représentations sont

exécutants en une

les

A

si

peu de gens ;

A

?

cela on peut répondre

Ces critiques-là ne sont plus nombreux aujourd'hui

AU COMBLE DU

mot

B O N H K U R.

harili se réalise; l'impossible s'accomplit Isetilt

va être exécuté. Toutes

les

.avril

!

douleurs

Moyen-Age

souverains absolus ont donc encore du bon iPimsch. de Miinicli. ïo

;

mais

comme

cruel de Berjioz

si

sont oubliées. Les temps sont venus. Le el les

:

ou mieux encore, pour parler

«

font tout ce qu'il faut pour justifier le

Le rcvc

d'elforts et qui,

vraiment déplorable que certaines œuvres

fussent admirées par certaines gens.

Tristan et

seule

quoi bon, objectent

œuvres qui réclament tant

comprises par

:

la

de

oeuvres de génie qui les provoquent. Elles

ce qui est grand est difficile et rare

Berlioz

telles

puissance de l'enthousiasme.

alors certains critiques, des d'ailleurs, sont

faut

œuvre,

close.

lettre

ne sont possibles que par l'union de tous et

cette

vous saisisse au début, on

restera

premier à confesser que de

presque aussi rares que

pensée

il

:

de

Et M. Schuré, se rapimpression ressentie aux mémorables soirées de Munich,

sinon elle

pelant l'ineflFable

en i865, est

alternatives à

de ceux qui l'admirent

jusqu'au bout

le

!

iSfi?.)

?

!

ils


CHAPITRE DÉPART DE BAVIÈRE.

SEJOUR A TRIEBSCHEN

CHANTEURS

LES MAÎTRES

E

XI

MUNICH

A

monarque de vingt ans une

idole

admiration

telle

s'entourer,

tableaux et d'estampes

œuvres

de

la

de sa

vie,

il

Starnberg, se figurant

il

qu'il

le voit,

plus

un objet

de scandale

jeune roi n'ignoraient

opéras —

livres et

politique

pas que s'était

sur

le

et qu'il

et

à

le

lac

cos-

de

arrive

comme on

Cette admiration poussée,

surprises par ses ministres,

fois

portant

équipage

cet

à un degré voisin de l'égarement et dont les

d'une

plaisir

une nacelle

construire

descend des pures régions

au secours d'une nouvelle Eisa.

des

poèmes. Plus tard, sur

fera

se

dans

naviguera

de

prenait

il

traînée par deux cygnes très habilement machinés et,

tume de Lohengrin,

Starnberg,

représentant des scènes

des héroïnes, de ses

fin

de

costumes des différents héros,

revêtir tour à tour les

voire

à

soit

Wagner,

Richard

son

non

que,

Munich,

à

soit

pour content

conçu

avait

marques furent

devint bientôt en Bavière

religieux,

Wagner, dans

car

conseillers

les

du

ouvrages,

ses diff'érents

montré tour à tour athée avec Feuerbach,

panthéiste avec Hegel, bouddhiste avec Schopenhauer.

Au

fond,

il

n'était rien

de plus qu'un

artiste,

en politique, et ceux qui s'indignent de ce qu'un

en philosophie «

ancien révolution-

naire ait consenti à vivre ainsi des bienfaits d'un souverain

une candeur singulière. 11 dans son adolescence, par universités

ait

fait

est possible

que

il

déçue

soin

s'était

laissé

guider par

le

cal

;

mais

la

marquent

exercée sur

en faveur dans

lui,

les

avait surtout cédé à l'ambition

de sa fortune.

trouver de ce coté la réalisation à bref délai de ses d'art, partant la

»

pencher de ce côté ses sympathies; mais, en pre-

nant part à l'insurrection de Dresde, et

l'influence

les idées révolutionnaires

comme

suprématie

mobilité

même

qu'il

Il

idées

rêvait d'exercer dans le

de ses opinions politiques,

avait

cru

en matière

monde musireligieuses et

philosophiques, tournant toujours au gré de sa fantaisie d'artiste ou de

son ambition, montre assez clairement qu'en politique aussi bien qu'en philosophie il était fort loin d'un enthousiasme sincère et désintéressé.


RICHARD WAGNER

m,-

ennemis trouvaient prétexte à l'attaquer dans ses palinodies antérieures, et ses ennemis étaient nombreux, car son arrivée en Bavière avait tout mis sens dessus dessous, tant il avait

Quoi

en

qu'il

soit,

ses

montre dès l'abord ses goûts dispendieux

Peu importait

comme athée et les autres comme révolutionnaire

les

son caractère envahissant.

autonomistes les

;

comme

étranger;

les

gens sans opinion arrêtée

extravagances

de ses luxueuses

s'indignaient

Les catholiques

qu'il se fût fait naturaliser sujet bavarois.

l'attaquaient

uns et

et

qui

mettaient à

sec

le

employés du gouvernement étaient outrés de lui voir attribuer tout l'excédent des recettes, dont ils bénéficiaient auparavant bref, toutes les opinions et tous les intérêts se trouvèrent un public, et les

trésor

;

beau jour ligués contre

lui.

Alors les feuilles satiriques s'en mêlèrent et divertirent

en l'excitant contre

le

«

grand compositeur Tintamarre

bouleversements

tous les

causés

avait

qu'il

:

».

On

le

peuple

rappelait

Hans de Biilow appelé

de Berlin, Peter Cornélius de Vienne et Frédéric Schmidt de Leipzig; tant de professeurs déplacés au Conservatoire et le directeur brusque-

ment mis

à la retraite afin de caser tous

on exagérait,

si

amis du nouveau favori

les

changeait son ameublement tous les six mois, on décrivait par

qu'il

menu

le

on signalait son fameux béret de vieil-allemand,

sa garde-robe,

bœuf;

azur, tantôt sang de

tant(')t

;

son faste et sa dépense; on répétait

faire se pouvait,

il

était partout et toujours la

cause

un concert militaire, le jour de la naissance du roi, au milieu duquel un vieux musicien tombait frappé d'apoplexie, aussitôt on le rendait responsable de de tous

les

maux, de tous

les accidents; se donnait-il

cette mort.

Lorsqu'on

janvier

i865,

bataille à Dresde, fut

l'entretenir

rait

l'architecte

mandé par Wagner grand

nouveau

d'un

la liste civile,

les

fausse

journaux avec joie

parce

que

en

fallut

bientôt

le

plus de bornes

la

une ardeur unanime. la

par

roi

;

de

qui désil'agitation

les

gens qui

menacés par ces projets ruineux, méfiance du peuple et y furent aidés

loge royale

certaines représentations du Vaisseau il

et reçu

jours

se sentant

cherchèrent à exciter encore par

des

l'ami

théâtre à construire,

contre ce bourreau d'argent ne connut

émargeaient à

Semper,

rabattre

et

les

était

Ils

eurent un

moment de

sombre à de Tannhœuser, mais

restée

vide

fantôme

et

attaques

reprirent

et

de plus belle

après cet espoir déçu.

On jusqu'à

répandit alors sur l'intrus les propos les plus outrageants, on alla lui

reprocher de laisser mourir de faim sa femme,

menait une vie fastueuse à Munich. Il fallut que disculpât publiquement d'une aussi grave accusation en

Dresde, tandis celle-ci

le

retirée à

qu'il


RICHARD \VA(;NER

itiS

En propres

adressant une lettre aux journaux calomniateurs.

imprimé

avait

qu'elle en était

laveuse de vaisselle

alors,

;

réduite à exercer

Wagner,

M'"''

si

termes, on

misérable état de

le

qu'elle

faible

quinze

fût

jours avant de mourir, écrivit la protestation suivante^ datée de Dresde, le

1866

9 janvier

«

:

Les bruits

quelque temps certaines

mon

que

malveillants

de Vienne

feuilles

et

m'obligent à déclarer que jai reçu de

mari,

depuis

publient

de Munich, touchant jusqu'à ce jour,

lui,

une

pension

amplement

à

qui

suffit

mon

exis-

tence. Je saisis cette oc-

casion avec d'autant plus

me

de plaisir, qu'elle

per-

met de détruire au moins une des nombreuses calomnies que l'on se plaît à

mon

lancer contre

mari.

»

Cette dénégation d'une

moribonde pas

à

ne

suffisant

calmer

l'opinion

ne voulait

publique,

qui

entendre

aucune

Hans

Wagner

raison,

Bulow,

de

puis

en personne eu-

rent la simplicité d'inter-

venir

répondre

de

et

leur tour,

a J'ai

à

vu, disait

Wagner dans une

protes-

fô._taâic:-r

l'oitiail

du

rui

de

!ia\ iCrc

{Dcr

sous

Flolt,

le

coslnmc

et

dans

la

magne,

nacelle de Lolienj^rin.

en

Angleterre

de Vienne, 3o aont i8S5.)

en

publiée

tation LE ROI LOHENGKIN.

France,

en

vu

les

j'ai

,

Alle-

journaux se moquer sans pitié

boue

et

sifflée

caractère, le

naissait

Le

pays à

mes

roi,

au théâtre

;

mais

il

me

restait

ma vie privée diffamés de même où mes œuvres étaient

mon dans

la

efforts

une énergie

fidèle à l'amitié, résista

sur le rôle politique de

Wagner

en Saxe

et

voir

pesèrent

personne,

et

l'on

recon-

une haute signification. » Mais on insista tellement sur son exil

si

publique en voulant défendre à tout prix un

ma

façon la plus outrageante

admirées

virile et

d'abord.

à

traînée dans la

instamment sur l'esprit du roi; reprochèrent avec tant d'amertume de compromettre

et le clergé lui

mon œuvre

de mes travaux et de mes tendances,

homme

;

la

noblesse

ses conseillers la tranquillité

antipathique à tous.


WAGNK

KlCIIAkl)

que

céda

jeune prince

le

pour prouver,

«

Fun de ses ministres, que

à

adressée

itjg

dans

disail-il

confiance et

la

une

lettre

amour de son

1

peuple bien-aimé primaient tout à ses yeux.

»

Wagner

pria donc

Il

de quit-

ter Munich pour quelques

tout

les

aussit(')t

i^ens,

mois,

ravis,

et

firent

bruit d'un éloiynement défi-

courir

le

nitif;

Wagner,

sachant bien que

lui,

cette disgrâce était plus apparente que

chemin du

de ne

roi

tranquillement

repris

avait

réelle,

l'exil.

lui

fit

En

laveur

la

tait,

le

mais

jamais défaut,

jamais non plus l'hostilité du pays ne

désarma à son égard Bavarois,

les

UN NOUVEL O R H E E I'

.

sien Le

nouveau vine «

Orphée animait

vieil fait

danser

mclodie (/'hh.vc7i,

les

infinie

écus

les

rochers

— et encore

il

«

Prus-

le

plus tard pour

le fut

le

;

Français.

les

sur

Le

v.

de Muiiicli, lo diîccmbrc

déjà

était

il

comme

»,

d'un mot, pour

;

roi

revint à

pénible

décision

cette

prit

au mois de décembre

i8ii.i.)

i8()5,

lorsqu'il

Munich, après un séJDur pro-

longé à son château de Hohenschwangau, et

trouva

qu'il

tellement

esprits

les

montés qu'une émeute était à craindre contre lui-même et contre son favori. cependant

Celui-ci

ne

partit

sans

pas

que ses amis ne protestassent à leur tour, et,

tout de

Munchener. TagebUvtter pièce suivante

mation

du

en

roi

En

Roi

d'ordonner

vient

proclaqu'il

l'amour

et la

peuple

de son

la

la

déclarant

mettait au-dessus de tout

confiance

les

publièrent

réponse à «

:

départ,

son

après

suite

bien-aimé,

l'éloionement

le

du

un

Wagner

que

Roi

au

accroire

avait

la

l'on a fait

présence

de

contribué à l'émotion du

avait

sa confiance

diminué son amour

dans

le

et

souverain. Par ces

o

v

ag eu r

».

Wagner, en faux mendiant de grand chemin, quitte

la

route de Cîenéve. billet

indiquant

par an à Munich

peuple et

v

oh! que non pas!

compositeur Richard Wagner. Ces mots

nous prouvent clairement que

pau v k e

(i

Bavière 11

le :

et

tient à la

prend

la

main un

chiftre qu'il touchait cS,ooo

llorins (environ

iSjOoo francs). {l'iiiisfli,

de Mmiicli, 17 dtvcmbrc iSôi.)

Roi a été grossièrement

allégations,

le

trompé sur

les véritables

sentiments du j^euple. La présence de

Wagner


?

RICHARD WAGNER

,-0

diminué en rien la confiance et Tamour du pays pour son Roi, et réloio-nemcnt de Wagner n"a pas plus amené la pacification des esprits qu'elle n'a satisfait les mécontents. La personne de Wagner n'a aucun n'a

rapport avec les affaires du pays et siste

'.

les

tendances du parti progres-

»

Dans son

désir

de

lui-même

oublié

d'être

s'isoler,

de

et

tout

oublier, dans la crainte aussi des créanciers qu'il avait un

Wao-ner chercha

la

solitude

peu partout, Munich, il De se

calme en Suisse.

et le

rendit d'abord à Vevey, puis à Genève où il pensait s'établir; mais il n'y était pas depuis un mois que le feu prenait dans une chambre de sa villa le

les

:

dommages ne

furent pas grands

travaux nécessaires,

tracas des

se

il

médecin qui l'engageait à faire un voyage dans 11

Avignon, Toulon, Marseille,

visita

apprit

ville qu'il

la

Une

;

c'est

de son

l'avis

midi de

le

France.

la

dans cette dernière

mort de sa femme, décédée subitement à Dresde,

d'un accident au cœur, vaillante

etc.

pour éviter

cependant,

;

décida à suivre

25 janvier i866.

le

créature,

l'un

dit

;

une brave femme,

dit l'autre

;

à

coup sûr une femme excellente et très dévouée à son mari, mais n'ayant pas su se mettre en communion spirituelle avec lui et qui cherchait surtout

ne

ni

voulait

à

obtenir des concessions au public qu'il ne pouvait

Mariés depuis près de trente ans,

faire.

séparés que depuis cinq

hœuser, alla

et c'est

vivre à

seulement dans

Dresde

quittés très

s'étaient

car elle

;

:

alors vite

le

était à Paris

au

ils

n'étaient

moment de Tann-

courant de cette année i86i quelle

comment

lit-on

dans certains livres

après leur mariage et que

qu'ils

Wagner, dès

la

composition de Tannhœuser. c'est-à-dire en 1843, était brouillé avec sa

femme

et

voulait symboliser l'extinction

de

cet

amour profane dans

était

de retour en Suisse.

l'abandon de Vénus par Tannha^user-

Au mois de 11

février

1866,

le

voyageur

y établissait ses quartiers définitifs à Triebschen, près de Lucerne, et

D'après des !. Guide musical, 17 juin iSS'i. Article de M. Maurice Kufferath sur le roi Louis H. renseignements du temps, ne'gligés dans cet article, l'origine ou plutôt le prétexte arrange' de ce renvoi fut le refus de Richard Wagner d'accepter l'ordre de Maximilien, que le roi lui avait gracieusement confère. 11 en serait re'sultc un conflit entre le ministre et Wagner, à la suite duquel le roi aurait exprime au compositeur son de'sir de le voir sortir de Bavière. Et celui-ci aurait quitte Munich dès le lendemain, dans l'après-midi, pour se rendre à Genève. A la première apparition qu'il fit en public après sa déclaration, le roi fut l'objet d'une ovation enthousiaste, et plusieurs cercles de la capitale lui hrcni parvenir des adresses de remerciement. 2. La vérité est qu'il n'v eut jamais de mésintelligence entre les deux époux. Lorsque Wagner, rêvant monts et merveilles, la fortune et la gloire, une série de triomphes sans fin sur la seule acceptation de Tannhœuser à l'Opéra de Paris, avait fait venir sa femme auprès de lui, elle était déjà très atteinte de la maladie de cœur qui devait l'emporter. Leurs rapports réciproques étaient presque touchants elle le traitait comme un grand enfant qu'il fut toute sa vie, et il marquait à la malade une tendresse à la fois filiale et paternelle. Après, quand ils retournèrent en Allemagne, elle se fixa à Dresde parce qu'elle était trop faible pour suivre un homme dont la destinée était de courir le monde; mais elle entretint toujours de loin les meilleurs rapports avec lui. :


r<ICHARI) WA(iNi; R voyait bientck arriver

ennemi qui

parti

le

le

,-,

Hans de Bulow, chassé de Munich par

fidèle

se débarrassait de tous les partisans de Wai^mer.

Hans de Biilow dut aller Mais cette heureuse réunion dura peu gagner sa vie à Bàle en y donnant des leçons de piano toutefois, :

;

avant de s'éloigner,

nom

un jeune musicien du

taire,

auprès de Wagner, en qualité de secré-

installa

il

de Hans Richter, qui

devenir

allait

un des plus chauds partisans du maître.

A Munich

une satisfaction ijénérale

réijnait

tentement d'avoir éconduit

on

était

tout au con-

mais quelle

;

fut

la

quand au printemps de 1866 on apprit que le menaces d'une guerre imminente, avait quitté subite-

générale

stupéfaction

malgré

roi,

:

encombrant

hôte

cet

les

ment

sa capitale et ses Etats pour aller souhaiter un glorieux anniver-

saire

à son

musicien favori

réconfortait

qu'elle

wagnérienne

raffermit

l'exilé,

en éloignant

:

de renoncer à sa musique,

Cette visite inattendue, en

!

le

et

appui, se remit tout joyeux à

musicien,

Wagner, la

dans

souverain

le

à

et,

plus sur que jamais de ce royal

composition des Maîtres C/miiteiirs qui

dès l'année suivante,

fut

il

esprits vers

et

de Loheiigrin.

croyant pas encore pouvoir faire un long séjour à Munich,

avait

le

maître

pour diriger les études, Hans de Biilow qu'un décret du 3o décembre 1866 nommait maître de la chapelle royale en

désigné,

royal service

tâche.

personne

la

convenu qu'on donnerait

Munich des représentations modèles de Tatuihœuser

Ne

passion

sa

demandèrent encore une grande année de travail assidu. La guerre et les événements de 1866, en tournant les la politique, avaient contribué à faire le calme autour de de Wagner;

temps

nullement promis

n'avait

il

même

extraordinaire, et celui-ci Il

nombreuses répétitions

exigeait de

familles d'instruments;

peut-être

même

donnait tout entier à sa nouvelle

se

il

partielles

pour toutes

les

passait bien dix heures par jour au théâtre

y couchait-il, disait-on, car

il

toujours

était

le

:

premier

à son poste, et le dernier.

A

la

de

fin

mars

1867, la

Munich

et Ion remarquait main de son arrivée il y

qu'il

pour

l'intendant

la

de huit jours,

plus

modèles, non seulement on avait le

matériel de

la

scène et brossé

Frédéric, on avait appelé de

quelque temps, l'école

de

un jeune Schnoir; l]lsa,

En vue de

renforcé

on avait recruté par toute l'Allemagne jouer

artiste,

ce

signalée à

était

passait

qu'il

à

mise en scène de ses deux anciens

opéras et des futurs Maîtres Chanteurs. renouvelé

Wagner

avait été reçu par le roi dès le lende-

restait

;

conférer avec

présence de

les

Berlin,

Franz

devait

être

ces représentations

l'orchestre

et

les

chœurs,

de nouveaux décors, mais meilleurs

où Betz,

M"^

il

chanteurs.

brillait

qui

s'était

Mathiide

Pour

déjà depuis

formé à

Mallinger;


RICHARD WAGNER pour Ortrude

enfin, M'"''

Lohengrin,

et

maître avait spécialement désigné

le

Bcrtram-Mayer, de Nuremberg,

Wagner,

tout

son

et

ami Tichatschek.

vieil

Bûlow,

en ayant pleine confiance en

bien de revenir surveiller les dernières répétitions

roucher personne,

il

;

se promettait

mais, afin de

n'eflfa-

descendit cette tois à l'hôtel et marqua l'intention

de passer seulement quelque temps aux environs de Munich. Le 22 mai 1867, à l'occasion de son anniversaire, une première manifestation eut

œuvres

honneur

son

en

lieu

réussit

un

et

composé exclusivement de ses partisans. Tout semblait donc aller à

concert

au gré de ses

souhait, lorsqu'il se produisit un incident qui prouvait que le parti hostile

aux aguets

était

La

et

Wagner

qui décida

teur

à repartir aussitôt. juin

devant

de nombreux

invités

répétition générale avait eu lieu et

le

1

bien marché,

1

aucune

sans

Wagner, émerveillé de

la

elle

;

l'au-

roi,

le

avait

coupure, voix

et

toujours

éclatante et jeune de Tichatschek, n'avait

pu se tenir de sauter au cou de cet ami des premiers jours, lorsque roi

le

qui

sujets

fidèles

le

lendemain,

cédant, disait-il, aux instances de

«

voyaient

avec

chagrin

des artistes étrangers supplanter ainsi les

du

aimés

chanteurs

public

Bertram-Mayer

M'"'

et

»,

congédia

Tichatschek

et

décida leur remplacement par deux jeunes UNE SIMPLE VISITE EN PASSANT. Allusion

mu-

qui plaisaient déjà au public

artistes

aux nombreux emprunts

\Punsch,

d(.'

MuiiiL-li.

17

mars

devaient

nichois et qui

de Richard \N'agncr au trésor royal.

dans

iS'(l7.i

les

rôles

de

briller

Tristan

et

plus tard d'Iseult

:

Heinrich Vogl et sa future femme, Thérèse

Thoma. Wagner,

irritation

recrues,

alors, entra

en défiance,

de voir sa partition confiée quitta

brusquement

la

ville

pour tous

Peut-être aussi ce départ précipité fut-il le

compositeur

et le roi

pour mettre l'autre à qu'il

en

soit,

représentation,

le le

le

pour procurer à

l'abri

maître

reprit

et

et,

simulant une vive

les

rôles à de jeunes

la

route

de Lucerne.

résultat d'une entente entre

l'un

une

sortie

honorable

et

de violentes réclamations populaires. Quoi

était

dimanche 16

déjà juin,

quand eut lieu la première avec un éclatant succès'.

loin

1. A qiiclijuc temps de là, au mois d'oclubrc liSf^y, une union projetée entre le roi Louis II et sa cousine Sophie e'choua par suite d'incompatibilité d'humeur de plus en plus marquée entre les jeunes fiancés; le père de la princesse dut retirer sa promesse, et l'engouement du roi pour la musique dite alors de l'avenir ne fut pas pour peu de chose, à ce qu'on dit, dans cette rupture itt extremis, après parole échangée et cadeaux envoyés. Telles sont les raisons qu'on donna officiellement mais on parla sous le manteau ifune aventure extrêmement scandaleuse et qui justifiait anipleiucnt le recul ;

du

rni.


o

D

::

<

^

"

cl.


RICHARD WAGNER

,y4

Le

Louis avait décidé que rannée 1868 ne se passerait pas sans

roi

entendit

qu'il

Maîtres Chanteurs à

les

un revirement

dans ce sens. D'ailleurs,

scène,

la

se faisait

en faveur de Wagner, de sorte que, tout en en

Suisse,

il

longtemps

pour qu'on pût

bien

assez

Comme

avec un dévouement

fêter le 22 de ce mois,

de

qui était

le

Munich

et

marchèrent

et les répétitions

au mois de

représentation la

fin

de mai,

cinquante-cinquième

voulut

roi

le

juin.

anniversaire

naissance de Richard Wagner, en passant toute une journée railleries, comme les maître au château de Berg. Et le

la

avec

par cette marque de

ravivées

avait, disait-on, le

faisant

lui

la

conservant son domicile

:

filial,

Munich avant

arrivé à

était

il

fixer

dirigé

fut

y séjourner aussi Hans de études de son œuvre

à

voulut pour diriger les

qu'il

Biilow l'aidait

venir fréquemment

put

tout

et

dans l'opinion publique

mauvais œil;

avait

il

Tannhœuser,

traduire

chanter Tristan; qui donc

plurent sur le compositeur.

faveur,

allait-il

Edmond Roche,

tué

déjà

Louis

en

Schnorr,

11

en

faisant

lui

expédier avec les Maîtres Chanteurs?

Après bien des hésitations, Wagner, à la place du regretté Schnorr, avait désigné pour Walther le ténor Nachbaur, de l'Opéra de Darmchanteur à

stadt,

la

voix délicieuse,

On

à la tournure élégante.

avait

réuni d'ailleurs les artistes les plus estimés des différentes villes d'Alle-

magne,

et,

cette fois,

le

roi

n'imagina pas de

congédier

les

représentation pour complaire encore à ses

de

la

M.

Betz, qui s'était fort

Beckmesser,

dans

excellent

poétique Éva, était de

M.

enfin

Schlosser,

de

Berlin

un Hans

fit

M. Hœlzel,

;

M'" Mallinger, une que M""" Dietz, Madeleine

de Vienne;

arrivait

Munich môme,

ainsi

ténor léger chargé du

le

fidèles

«

Frédéric et qui

appartenait à l'Opéra

incomparable,

Sachs

distingué dans

la veille

sujets ».

;

rôle

de David,

venait

d'Augsbourg, mais d'une boulangerie, non du théâtre. Il chantait dans cette ville avec succès, lorsqu'il s'éprit de la fille d'un boulanger qui, pour consentir au mariage, exigea que son futur gendre abandonnât le mais lorsque théâtre et prît la pelle à four. L'amoureux ténor accepta ;

Wagner réclama

son aide,

il

accourut à Munich,

quitte à regagner

après son fournil. Enfin, les moindres rôles étaient tenus par des chan-

de mérite

teurs

Hans de Biilow chestre

dont

il

;

il

avait

:

MM.

Bausewein, Heinrich,

n'aurait

bien

quelques

186S,

juin

des partisans Iseiilt.

droits

à cet

avait déjà dirigé les représentations de

21

gagnés,

Wagner

avait

Fischer,

cédé à nul autre sa place à

La première représentation, lieu le

Sigl,

la

tête de

honneur pour Tristan

etc.

la

;

et

l'or-

façon

et Iseiilt.

suivie de cinq autres consécutives, eut

et l'aftluence,

en raison de

la

force

acquise

et

était encore plus grande que pour Tristati et convoqué à Munich le ban et l'arricre-ban de


RICHARD WACiNER

,y5

ses admirateurs; critiques, ocns de lettres, artistes et musiciens conquis

wagnérienne avaient reçu une

à la cause nité,

à laquelle assistaient seulement trois Français

Joncières

Victorin six

Léon Leroy. Le spectacle heures moins un quart la salle

et

heures; dès six

ques minutes avant Theure

Richard

Wagner

semblait ainsi le

le

succès

fixée,

le

franc

très

dès

acclamations, couronnes,

bravos,

d'ailleurs ce

était

remplie; quel-

Peu après

n'était

que

dans

l'ouverture,

du jeune :

début,

et

roi,

qui

inutile précaution, et,

après chaque

loge royale.

la

Wagner

ce fut une ovation sans pareille et pour :

le

Pasdeloup,

annoncé pour

protéger contre un orage possible

se dessinait

MM.

était

venait à son tour s'asseoir auprès

acte, l'auteur devait venir saluer le public

teur

:

place dans sa loge,

prenait

roi

en simple bourgeois.

apprêt, sans pose,

sans

car

pour cette solen-

invitation

A

la fin,

pour son protec-

discours, rien n'y

manqua,

et

en présence de l'œuvre qui venait de

justice,

se révéler au public enthousiasmé'.

comme

Les Maîtres Chanteurs, Richard

Wagner

et Isciilt,

ont été écrits par

en manière de délassement, au travers de

mise au jour de

tion et de la

Tristan

la

tétralogie

la

concep-

Nibehmgen. Wagner,

des

temps à Paris dans l'hiver de 1861-1862, après son long séjour à propos de Tannhœuser, y termina le poème des Maîtres Chanteurs, qu'il avait esquissé dès 1845, puis abandonné pour la maison Schott s'assura aussitôt la propriété du nouvel Lohengrin étant revenu passer quelque

:

ouvrage

et

fit

poème au courant de Pour commencer la musique, il

imprimer

encore en vente.

le

1862, sans le mettre alla s'installer sur les

mois de

bords du Rhin, en face de Mayence, à Biebrich,

et,

novembre de

Maîtres Chanteurs

cette année,

il

dirigeait l'ouverture des

dès

le

dans un concert donné par Wendelin Weisshemer, au Gewandhaus de

La

Leipzig.

eu

n'avait

foudroyant

salle la

était vide

curiosité

que

le

par acclamation-.

de

public

Au

à

moitié,

venir, et

et

pas un

musicien de profession

cependant

l'orchestre

réunis

milieu de l'année i863,

l'effet

fut

bissèrent le il

tellement

morceau

se rendit à Penzing,

près Vienne, espérant y trouver le calme et le loisir nécessaires bref, après de nombreuses reprises de travail, toujours traversées par des ;

accidents inattendus, les Maîtres Chanteurs furent complètement ache-

I. .\près Munich, les Maîtres Clianteiirs furent représentés à Carlsruhe le 5 février 1869 (Hans Sachs, M. Hauscr; Walther, M. Nachbuur; Éva, M"" Ehrhardt; chef d'orchestre, M. Le'vy); puis à Dresde et à Dessau, H Mannheim et à Wçimar; en 1870, ils se jouèrent à Berlin, Kœnigsberg, Stettin, Vienne, etc., etc. C'est un des ouvrages de Richard Wagner qui obtinrent le succès le plus rapide, en dépit d'exécutions défectueuses que le maître était loin d'approuver. « Si j'avais la chance de monter

Chanteurs avec une troupe intelligente de jeunes gens, disait-il à M. Dannreuther demanderais d'abord de lire et de jouer la pièce; après, je leur ferais étudier la musique, et je suis assuré que, de la sorte, on obtiendrait très vite une excellente exécution. » 2. Souvenirs personnels de M. Dannreuther dans son article sur Wagner. Dictionnaire de Grove.)

les

Maîtres

en 1877,

i'^

l'^U'"

I


RICHARD WAGNER

176

Triebschen,

à

vés,

première ébauche,

octobre

20

le

manuscrit en

et le

vingt-deux

1867,

ans après

leur

fut aussitôt dirigé sur le théâtre

de Munich.

Une

Wagner

de ce long travail, Richard

fois quitte

quelques jours à Paris, peut-être

par les derniers

attiré

Et dès que sa présence

position universelle.

santeries reprirent de plus

s'en vint passer

feux de l'Ex-

signalée,

fut

ici

plai-

les

en souvenir des joyeuses soirées de

belle

Tannhœuser. Pour donner une idée des sornettes avec lesquelles on pensait alors

le

battre en brèche et

le

tour de

la

fait-divers facétieux qui

que Richard Wagner, musique,

il

y

démolir,

avait

tirant de son propre cerveau

de

lieu

M. Otto Kamp son comble, n'a

« ((

est

il

laissa dire et

inséra un

pas compris

Wagner

«

On

de réclamations, d'injures.

lettres,

le

fit

nouvel

le

supérieur à Schiller

musiciens

lorsque

et les poètes

sous

m'explique

en tant que musicien.

soleil,

ni

en

écrivait

mon

sous

me

je

«

:

;

»

On

oui,

il

Procédés au temps

qui remontaient

ans,

d'objection à ce que

le

de

Oui, Richard

:

en tant que poète

ne répugnaient pas à confesser

Rien de nouveau

et

accablé de

fut

terminait ainsi

se

je

Wagner lui-même

pas

n'avaient

qui

pensée;

d'attaque et quolibets vieux de douze

de Lohengriii,

sa

mort. Puis, quand l'irritation fut à

Beethoven

est supérieur à

Schiller

journaliste

le

et

publia brochures sur brochures,

article

ma

fond de

critique

poèmes

ses

de

au-dessus

placer

le

Un

«

:

prétendu dans un article

avait

Beethoven. Grand émoi, grand scandale;

de citer ce

suffira

il

presse parisienne

M. Otto Kamp,

de Dresde,

distingué

le

lit

riant

Les

«

:

mêlasse de poésie

talent de musicien

plume

la

»

M. Albéric

de

Second.

On

se

souvient

que Wagner

avait

d'abord

voulu

Maîtres Chanteurs, une contre-partie comique de il

avait modifié ce projet primitif et s'y

symbolisant dans

le

Stolzing

prises avec les pédants de l'école routinière,

tique incarnée en

Beckmesser, par

avec

Tannhœuser

les

mais

;

représenté lui-même, en

était

chevalier Walther de

faire,

et

le

libre génie

triomphant de

la

aux cri-

de l'inspiration. Voilà

la seule force

qui va de soi; pourtant, des glossateurs plus raffinés ont voulu découvrir

en outre dans l'ingénue

Hans Sachs,

Éva

la

Poésie immaculée, et dans

qui protège Walther, le roi Louis

quitter le terrain musical, ont reconnu dans

que Wagner a salué souvent messer, le

le

comme

plus pédant des greffiers

et

d'autres encore, sans

;

Hans Sachs Franz bon génie,

son le

II

le savetier

et

Liszt,

dans Beck-

moins inspiré des hommes,

savant Ferdinand Hiller, compositeur sans génie et qui fut toujours

des

plus

qui

amusent

acharnés contre la

galerie

Richard Wagner.

à l'origine

et

De

aiguisent

ces commentaires-là, la

curiosité

publique,


iiiiiîiiïi^^^^^^^^^^^^^^^^^^^

UICIIAUD WAGNliR VEUS

iSÔS.

D'après uno photographie.

23


RICHARD WAGNER

178

autant en emporte

de

critique épuisée

la

Mais Tœuvre entière

le vent.

et c'est là le principal'.

Les Maîtres Chanteurs

Tristan se font pendants, en ce sens que ce

et

sont les deux ouvrages de courte durée l'autre légendaire et

ment de et

conforme à son

musicale en tout point soumise

de

ans.

un

l'œuvre

toujours

c'est

:

d'art,

Drame

formes précédemment adoptées, cohésion

:

intime

reusement adéquat à

musique

sur

Lettre savoir

de

et

:

la

la

la

poésie.

musique

la

suprême

la

note,

égale

Et ce que

félicité

musical

s'était

de

tiré

commune,

c'est

peu à peu

dégageant de toutes

se

parole et

et

chant,

le

les

le

mot rigou-

réciproque pénétration de

l'auteur

dit

de

la

dans sa

Tristan

également vrai des Maîtres Chanteurs, à

qu'en composant cet ouvrage

éprouvait

théâtrale

pour arriver à ces conditions essen-

entre

est

la fois

la vie

qu'elle

telle

développée dans cet esprit supérieur, en

tielles

comique,

plus rigoureuses qui

les

lois

légende ou comédie en musique empruntée à

tout

et

idéal sans attendre l'achève-

théoriques.

affirmations

ses

l'un historique

une œuvre à

la tétralogie, est arrivé à réaliser

découlaient la

d'art

— dans lesquels Richard Wagner, impatient

héroïque

de produire une œuvre

debout en face

reste

il

avait oublié toute théorie et qu'il

réservée à

l'artiste,

celle qui résulte de la

spontanéité complète dans la création. Faut-il «

système

répéter

d'ailleurs

encore une

idéal,

son esprit,

Lohengrin essaya,

la

dont

et qu'il

que

la

conception se

c'est

à

la

progressivement dans en

sa

puisqu'il

seulement après avoir écrit main, tète

d'expliquer et

qui

le

peu à peu plus nette dans

faisait

voulut se rendre compte de

plume

mot de

le

Wagner,

premiers ouvrages, en tendant vers

produisit d'instinct ses quatre

drame

que jamais

fois

ne fut plus mal appliqué qu'à Richard

»

le

l'avait

Tannhœuser

route parcourue,

la

travail

qui

conduit

au

et

qu'il fait

s'était

point où

il

arrive, c'est-à-dire aux Nibelungen? Contrairement à ce qu enseignent tant de gens, ses drames n'ont pas été écrits en vue de confirmer des théories préétablies, comme il est arrivé par exemple à Lessing ce sont ces théories, au contraire, qui ont découlé des œuvres, après que le maître eut affranchi son génie de toute influence étrangère pour l'amener à son complet épanouissement. Il conçut et écrivit Tristan était

:

lorsqu'il

avait

déjà

compose une bonne

partie

de

la

tétralogie

;

et,

I. Cet. O'cirA An Maîtres CliMiteufs osl le qualriciiie, et jusqu'à présent le lieniier ouvi'ai;c de RicharJ Wagner qui ait été représenté intégralement en langue française. Très habilement traduits par M. Victor Wilder, qui a entrepris le même travail pour Tristan, pour la tétralogie et pour ParsifaI, les Maîtres Chanteurs furent représentés le 7 mars i885, à Bruxelles, au théâtre de la Monnaie, avec

un succès

très réel. Les rôles étaient ainsi distribués Éva et Madeleine, M™" Rose Caron et Blanche beschainps; Walthcr de Stoizing, M. Jourdain; Hans Sachs, M. Séguin; Bcckmesser, M. Soulacroix; Pogner, M. Durât; David, M. Dclaquerrièrc Kothner, M. Renaud; Vogelsang, M. \'oulct Nachtigal, M. \'anderlinJeii Zorn, M. Desy un veilleur de nuit, M. Frankin. :

;

;

;

;




lUCIIARI) \VA(iNF. R

quant

aux

Chanteurs,

J\Jiiitix's

après l'aventure de

en

s'il

Taiiiiluviiscr,

il

17g

avait achevé le

poème

n'en termina la musique et ne mit

l'œuvre entièrement sur pied qu'après que Tristan eut vu

Ces deux créations dans sa tète;

si

elles sont

dissemblables ont donc

comme

à Paris

le jour.

mûri simultanément

jumelles et tout porte à penser qu'en

choisissant un sujet aussi dilïérent de ceux qu'il traitait d habitude, en faisant chanter de braves bourgeois, de simples artisans, après l'héroïque

chevalier breton et

la

fière

princesse d'Irlande,

voulait d'instinct se

il

bien prouver que les doctrines formulées en déduction de ses précédents

ouvrages s'appliquaient à l'opéra-comique

aussi bien qu'à

l'opéra,

et

qu'elles étaient, par conséquent, capables de résister à toutes les atta-

ques de

la

routine et du parti pris.

Les Maîtres Chanteurs échappées sur

burlesque et d'assez fréquents retours vers

le

poésie.

Ce poème,

l'esprit

de Richard

de Hans Sachs, le

assurément,

Wagner que

n'a

définitivement

pris

la

grande dans

corps

lorsqu'il eut trouvé la magistrale figure

poète familier, aux libres aspirations, pour en faire

le

personnage; Hans

principal

une comédie musicale avec quelques

sont

Sachs,

cordonnier-poète, incarnant

le

le

chant populaire en face du chevalier Walther de Stolzing figurant

la

poésie supérieure;

Gœthc

en qui

et

célébrité littéraire

En

Hans Sachs,

l'ami

Luther

de

et

d'Albert Durer,

Wieland avaient déjà salué un ancêtre, et dont la a pour consécration suprême l'œuvre de Wagner.

se transportant en plein

xvi'=

siècle,

au sein de

la

corporation des

maîtres chanteurs, en vouant au ridicule et leurs sottes prétentions et leur asservissement aux règles étroites et surannées d'un code barbare,

appelé

tabiilature,

il

a

certainement

voulu

joindre

la

satire

à

la

quand on sait quelles comédie, et il n'y a pas là luttes il avait à subir dans son propre pays, quand on remarque que les Maîtres Chanteurs furent écrits peu de temps après le lamentable échec de Tannhœuser à Paris. de quoi surprendre

En dont

face de ces gens routiniers, attachés au rituel le plus baroque et

les

l'école

séances solennelles devaient

stationnaire,

personnifie

en

exclusive,

Walther

le

un tableau

off'rir

ennemie de

poète de race,

fond

même du

comique de

toute

inspiration

plein

de

flamme, qui ne connaît d'autre règle que son génie. et cette lutte sont le

fort

drame, où

jeunesse

et

il

de

Cette antithèse

noble,

le

libre,

le

beau,

le

faux, par leur

du mise en action puissance d'expansion. Cette belle avec une \ariété de caractères, une abondance d'épisodes, une fécondité d'invention poétique, une richesse mélodique et instrumentale qui

vrai, finissent

par triompher du

font

petit,

du ridicule idée

seule

de ce drame

a

et

été

une œuvre prodigieuse en son genre. Ainsi

parlait


RICHARD WAGNER

,So

y a déjà dix-huit ans, après l'apparition des Maîtres Chanteurs à Munich, en 1868; ainsi pensent aujourd'hui tous ceux qui

M. Schurc

il

en ont suivi

représentation en quelque

la

que ce

ville

'.

soit

Les séances des maîtres chanteurs de Nuremberg se tenaient dans c'est dans ce beau décor que réglise même, à Tissue du service divin Wagner nous les présente, et son premier acte débute par une réunion :

préparatoire au grand concours qui doit avoir lieu

de

la

le

lendemain, jour

Le chevalier Walther de Stolzing

Saint-Jean.

est épris de la

du riche orfèvre Pogner, chez lequel il ilcmcurc, et comme ce dernier, zélé maitre chanteur, a promis la main de sa fille à qui triompherait au concours de la Saint-Jean, Walther sollicite d'abord le titre de maître. Mais il ignore absolument la tabulaturc,

charmante Éva,

et

lllie

quelques conseils que

de Hans Sachs,

devant

le

rival,

qui lorgne

fut,

bruyamment

à plaisir et note le

en

s'il

sur

le

le grellier

aussi

tableau

le

valeur d'un

tel

déroute complète Sixtus Beckmesser,

Éva,

la belle

le

charge

indigne et

déclarent

pressent

et

le

moindres fautes

noir ses

code poétique; alors tous les maîtres

repoussent, tandis que Sachs seul devine

la

force et la

poète.

Lorsque commence avec son

jeune et turbulent apprenti

d'essuyer une

jias

maîtres assemblés. Son

les

cuistre et pédant

contre

donne David,

lui

ne l'empêchent

le

deuxième

acte, la

père au logis, ne se tient pas

tombe. Kva, rentrant

nuit

Hans Sachs

consulter

d'aller

sur l'issue de l'épreuve, sous prétexte de chaussures à corriger.

Ici

se

place une charmante scène de coquetterie naïve de la part de la jeune

qui veut tirer les vers du nez

lille

qui n'est pas

cependant par la

de

sottise

à

l'astucieux

d'aimer Eva, voit

loin

ce

annoncer l'échec du chevalier

lui

tous

ces

vieux

son refrain, que

Eva; aux pour

l'un

pour qui

allreuscment.

peine

Celui-ci,

prête;

le veilleur

fait

de nuit

finit

il

Éva s'emporte contre aucun

plus

veille

entrer Walther chez

lui.

psalmodiant

est-il passé,

Beckmesser arrive pour donner une sérénade à pousse afin de dominer le bruit que le savetier fait

le sot

cris qu'il

tout exprès

A

s'y

et

Eva; mais Hans Sachs, qui

sur les deux enfants, arrête leur fuite et nuit est venue.

et

cordonnier.

Walther, n'ayant

pédants.

espoir de vaincre, va pour enlever

La

manège

gêner,

le

pour

les voisins

l'autre,

La trompe du

en

se

réveillent,

viennent

veilleur de

aux

prennent parti qui

mains

nuit retentit

au

se

battent

loin,

tous se

et

sauvent et quand celui-ci reparaît, tranquille et répétant son somnolent appel, la ville entière a repris son calme habituel

La

nuit

ramène

le

:

tout dort.

calme en ces esprits troublés. Au troisième acte,

I. l.:i (incti:|UC élude de M. Edouard Schuré, d'abord publiée à la Rcviic des Deux Mondes, reparu depuis dans son bel ouvrage en deux volumes le Drame musical (iH-l'i el iSS5). :

.1


RICHARD WACNKR

iSi

Hans Sachs, poursuivant son rôle de protecteur envers les deux amoureux, et sacrifiant son amour iriiommc un peu trop mùr au bonheur des deux jeunes gens, initie Walther aux principaux secrets du bel art des maîtres chanteurs. Le jour du concours solennel devant tout le peuple assemblé dans une prairie, aux bords de

EVA DANS Acle

des M.ùtivs

III

L

ATELIER

Cli.mti'iirs.

Le fâcheux Beckmesser, qui

I)

I)\lplc^

K

I.

les

rameur de Munich el c'est

M. Joseph Flûggen

,

représentations de Tristan

HANS

le l:ilileau

avait cru taire

texte tout sec de la poésie esquissée par

décorative à l'Opéra de

la

et Iseiilt, à

Bayrcuth.

est enfin venu.

SAC.US. de M.

.1.

Flûs^en

1.

merveille en s'cmparant du

Walther

et corrioée par

Hans

la haute main sur toute la partie année, a été chargé de dessiner les costumes pour

cette jolie composition, a lui qui, cette

Pcgnitz,


RICHARD WAGNER

i82

Sachs, ne peut pas en sortir quand

huer par

fait

gagne

foule.

la

ainsi la

Walther

veut chanter à son tour, et se

la

il

proclamé vainqueur

facilement

est

main d'Eva, tout en reportant l'honneur de sa

et

victoire

à l'excellent Sachs.

A

propos de cet ouvrage, essentiellement historique,

question. Cette exclusion de l'histoire, prononcée par Richard

au profit de

la

légende,

une

se pose

il

Wagner

pas singulière et n"a-t-elle pas un

n'est-elle

même à ne considérer que ses propres opéras? Sur ce point, deux écrivains français qui ont su composer sur Richard caractère trop absolu,

Wagner un

livre

réflexions.

leur paraît d'abord

Il

ingénieux et

chose rare, émettent de justes

clair,

que

poème dramatique

mérite d'un

le

provient moins du choix du milieu où se meut l'action que de

dont

meut dans ce

elle se

milieu, quel qu'il soit

comme

historiques excellents,

livrets

daires.

non contrôlée,

une

variante avec broderies?

finit

l'autre?

Wagner

prononce hardiment; toujours. Or, son

Lohengrin

et

est,

il

monnaie de

Qui décidera où commence

il

rejette l'histoire;

entier

il

lui faut la

dément en

les

il

l'une et où

légende,

la

il

se

légende

partie cette prétention

Tristan sont des chevaliers vivant à une époque et dans

entoure sont fournis par l'histoire,

Tannha;user, frère cadet de Robert

jMoyen-Age où

les

et

les

non par

accessoires la

légende.

Diable, nous dévoile un coin du

le

chevaliers-chanteurs accomplissaient des exploits qui

n'ont rien de fabuleux

prologue.

le

l'histoire,

paraît se faire fort d'établir la distinction;

œuvre

des

effet,

légende? N'est-ce pas

la

la fausse

un pays que l'auteur lui-même a soin de préciser, dont

en

manière

aussi de pitoyables livrets légen-

Et puis, disent-ils, qu'est-ce que

«

plus souvent de l'histoire

:

la

:

le

Venusberg

n'est

Quant aux maîtres chanteurs,

qu'un tableau servant de

fut-il

jamais reconstitution du

passé plus précise, plus curieuse, plus conforme aux procédés de

l'his-

Assurément non. Donc, ce poème, qui renferme des scènes charmantes, des situations

toire?

'

))

vraiment comiques, est tout à

la

fois,

pittoresque en tant qu'évocation

d'une ville allemande au xvi' siècle, avec ses et ses fctes populaires, et curieux

mœurs,

par ses données d'une rare précision

sur les épreuves à subir pour passer maitre chanteur. détails sembleraient

ses corporations

Ceux auxquels

ces

un peu longs pourraient se délasser en écoutant

une orchestration qui n'a pas sa pareille et dans laquelle on découvre à chaque audition de nouveaux trésors. Ce merveilleux travail d'orchestre est

tel,

qu'il

frappe

Richard Wagner; I.

iii-i8,

d'admiration

mais

ils

ajoutent

jusqu'aux

derniers

malicieusement

détracteurs de

qu'ils

aimeraient

L'CEuvi-e dramatique de Ricliard V,'ai;ner. par iMM. Albert Soubics et Charles Malherbe (un vol. chez I''i.schbachcr, iS86).

.


RICHARD WAGNER mieux

symphonie sans

la

chantée,

partie

la

avec une grande sécheresse

traite

,83

Wagner,

ijuc

comme un

et

disent-ils,

récit sans accent.

11

pour n'observer aucune coupe déterminée à l'avance, pour n'être coulée dans aucun moule et pour suivre exacten'est

rien

ment

la

de plus

faux

:

chaque phrase confiée aux

parole,

tendre ou grandiose,

gées entre Walther

Pogner annonçant

Éva,

et

donnera

qu'il

sa

premier chant de Walther, que

et

d'Eva à

tombée de

la

Mais ce

la

possible.

Tout

douces paroles échan-

les

messe, que

la

l'allocution

de

au vainqueur du concours, que

fille

dialogue à mots couverts de Sachs

le

nuit, etc.?

le

hommage,

une

est

convient de l'expliquer aussi claire-

qu'il

symphonique, ininterrompu tant

discours

en majeure partie sur certaines phrases typiques,

l'acte, est bâti

Au

conducteurs [Leitmotire).

motifs

longue,

polyphonie orchestrale.

la

travail d'orchestre, auquel tous rendent

conception tellement nouvelle

que dure

de

à l'issue

le

ou

de

et distincte

de plus délicieux, par exemple, que

Est-il rien

ou

courte

toutes les fois qu'il le faut, une forme mélo-

a,

dique parfaitement appréciable,

ment que

voix,

de conserver

lieu

l'ancienne

chaque ensemble ou chaque morceau se bornait à traduire à peu près les sentiments exprimés à tel moment par tel personnage en scène, en négligeant totalement son caractère forme de l'opéra, où chaque

air,

général, "Wagner prétend dépeindre

personnages

par des

motifs

qui

nature

la

s'attachent

et

le

eux,

à

de ces

caractère

enserrent

les

et

finissent par les personnifier.

Ces ils

ou

eux

diffèrent entre

caractéristiques,

exposés

d'abord

superposant,

auquel

ils

entraîné

"Walther

amour

première

la

:

d'une

fois

leur

tel celui

:

façon

par

et d'Éva,

d'abord

à

la

rendent à

qui

vont

mesure

se

les

façon dont

développant,

que

le

un peu plus son caractère

événements extérieurs.

les

la

les

des maîtres chanteurs. D'autres,

fragmentaire,

se rapportent dévoile

voudra

on

développement dès qu'on

plein

combinant entre eux

se

comme

et par leur essence et par

sont traités. Certains ont

entend pour

la

typiques

motifs

appeler,

et se

trouve

Tels, les motifs typiques

merveille

la

se

personnage

progression

de

de leur

tendresse naissante, puis l'ardeur impatiente, enfin

passion déclarée, et qui montent, croissent, s'enchevêtrent jusqu'à ce

qu'ils éclatent 11

dans toute leur plénitude par une superbe explosion. il s'agit là d'un art entièrement nouveau, créé

n'y a pas à dire

:

de toutes pièces par Richard avec

l'opéra

Comme

on

proprement l'a

déjà

Wagner

dit,

remarqué

tel

à

qu'il

et

qui

a été

propos de

n'a

aucun rapport

plus

conçu jusqu'à nos jours. Tristan,

il

faut

subir ce

y goûter un plaisir extrême ou bien le repousser entièrement. Point de tergiversation possible. Je reconnais volontiers

nouveau genre

et


.

RICHARD WAGNER

i84

complètement originale et londéc sur un exige une initiation, comme toute travail musical aussi complexe mais cette initiation deviendra graduellement moins création de génie à mesure que l'esprit s'habituera à cette nouvelle forme

quune œuvre

d'art

aussi

;

laborieuse

comme

d'art,

tous ceux

il

epii,

habitué à l'ancien opéra. Dès à présent, d'ailleurs, selon le désir de Wagner, écoutent son œuvre en dehors s'est

charmer, de toute idée préconçue et se laissent simplement dominer, captivante entraîner par le génie, en ressentent la même impression et

souveraine à l'exclusion de toute autre.

Et comment en

autrement avec une création qui, renferme des épisodes aussi gais que la

puurrait-il

outre les passages déjà cités,

ronde des apprentis, ou

la

être

sérénade burlesque

de Beckmesser cou-

en surronnée par ce prodigieux charivari de toute une ville éveillée du premier acte, saut; des pages aussi grandioses que l'ensemble final l'ensemble à cinq voix du la rêverie et le monologue de Hans Sachs, parler de dernier acte' et tout le tableau final du concours, sans cette admirable ouverture

même ,

Il

qu'on applaudit à tout rompre actuellement,

à Paris, et qu'on y sifllait avec rage en parait dillkilc à qui rJllJchit

que Wa.^ncr

ait

pu c.n.poscr

1869? ce m,.,ccau des Alailrcs Chanteurs,

conca-lantc, diraient les Italiens, après un vci-ilablc quinlc.tc ayant une fo.-me aétern.ince, un pe^^o développe dans Opéra et Drame On suppose avoir formulé un systùu.e aussi absolu que celui qu'il on dit même qu'il voulut la déchirer après antérieure, très composition était de alors que cette paye parvint a l'en empechci femme avoir terminé les huîtres Chanteurs, mais que sa future

RICHARD WAUNKR, PAR KLIC. {llumorislisclic Uhrttcr, de Vienne, iS mai 187;'.)


CHAPITRE DU

SUITE

XII

SÉJOUR A TRIEBSCHEN.

RIENZI A

PARIS

LE RHEINGOLD ET LA VALKYRIE A MUNICH

INSTALLATION A BAYREUTH ET CONSTRUCTION DU THEATRE

usTE au moment de Chanteurs, toujours

dans

des

Maîtres

en juin 1868, Richard Wagner,

habitant

Lucerne, avait pubHé, d'abord

en

articles

Presse de l'Allemagne du Sud, de Munich,

la

brochure, à Leipzig, un important

puis en

Art allemand titre,

le

représentation

la

travail

:

allemande, dont on connaît

et politique

mais que personne, ou peu s'en faut, n'a

jamais lu en dehors des pays allemands'. Cet écrit de

longue haleine est surtout dirigé contre l'influence

prépondérante que notre pays

Allemagne,

et,

de penser que

beaucoup

dans

Allemagne

lui

cette

croisade

par

agit-il

personnification ;

l'auteur,

anti-française.

il

est bien

à

Obéissait-il

permis

calcul

en

du

génie

autant vaut ne pas

allemand

épousant

profond de son esprit vert quelque chose;

il

et

œuvre

et

son

encore

Il

antipathie,

en

devinssent

la

civilisation

que personne,

aurait fallu pour cela

n'est-il

en

nom

contre

révolté

couvait

à

une guerre désas-

cette

soulever cette question,

aujourd'hui, ne saurait résoudre.

d'instinct

haine sourde qui

la

alors contre nous et qui allait aboutir à

ou bien

française

paraissait exercer jusqu'en

souvenir de l'échec de Tannhœuser à Paris entrait pour

l'incarnant en quelque sorte afin que son la

France, ou du moins contre

malgré l'indifférence affectée de le

quelque aversion de race, cédait-il treuse,

la

lire

au plus

pas bien sûr qu'on y eût décou-

est très possible, en effet, qu'il ne se rendît pas

compte lui-même des secrets mobiles auxquels

il

obéissait ou semblait

obéir en mainte occasion.

Tout ce

sur l'équilibre I.

Dès

développement d'un passage des Recherches européen, oia l'économiste Constantin Franz expose l'in-

travail est le

mois de septembre 1S67, on avait annonce lie Munich que Wagner renonçait à son une feuille spéciale fondée et dirigée par lui et qu'il rédigerait simfeuilleton musical du nouveau journal Die Sitddcutsche Zeitung, qui allait paraître au

le

idée d'exposer ses théories dans

plement

le

I" octobre. Un des principaux propriétaires de ce journal était son ancien collègue à Dresde, le directeur de musique Auguste Rœckel, ce qui explique son concours mais, dans le fait, la collaboration annoncée se réduisit aux articles ci-dessus indiqués sur la politique et l'art allemands. ;

24


RICHARD WAGNER

,86

sur

exercée

llucnce

quelle se manifeste dans

telle

propagande,

dit-il,

impuissante. Aussi

fait

politique

la

précisément

sans laquelle

lui

pays du continent, l'Allemagne seule possède

les

vigueur d'esprit et

puissance

la

Or,

matérialiste.

dispositions,

les

d'âme requises pour

force

la

Cette

de l'Allemagne, parce que, parmi tous

mission

la

à

«

:

elle-même tout à opposer consiste-

serait

elle

efficace

de cette civilisation

l'empire

française,

propagande napoléonienne

la

seule digue

la

t-elle à se soustraire à

c'est là

par

ne repose sur rien autre chose que sur

la civilisation française,

de

européen

système

le

la

une

prévaloir

faire

culture plus élevée, contre laquelle la civilisation française n'aura plus

Ce

aucun pouvoir.

serait

propagande

véritable

la

allemande qui

contribuerait très essentiellement au rétablissement de l'équilibre euro-

péen.

Rien qu'à

))

maxime en

cette

lire

veut étudier les rapports entre

culièrement entre

d'un

tête

en général,

l'art et la politique

de

les tentatives

l'art

allemand

et parti-

les prétentions

et

importance politique,

l'Allemagne à une plus haute

où l'auteur

écrit

on pressent

de les

développements qui vont venir. Les armées

de Napoléon

odieu.x

ment vaincue

ont

alliées

si

l'Allemagne et l'Europe

délivré

mais qu'importe que

;

elle a

France

la

ait été

elle-même vaincu ses vainqueurs par

du

joug

matériellel'influence

souveraine des lettres et des arts? Pour repousser cette invasion morale, il

ne

suffit

plus de baïonnettes

de canons,

et

il

faut

créer de toutes

moyens l'art national allemand en face Mais pourquoi cet art national est-il encore à créer? français. C'est parce que la scène allemande est sous la domination de la scène française et qu'elle a vainement essayé de secouer ce joug par le triple effort de Lessinof, de Goethe et de Schiller. Le mal remonte en France à Louis XIV, « qui avait érigé les règles de ce qui passerait pour beau, règles dont les Français ne sont pas encore débarrassés sous Napopièces et soutenir par tous les

de

l'art

léon

III

«,

glément

et

en Allemagne à Frédéric française

l'influence

culture germanique,

donné à

avoir

l'esprit

regarde avec mépris siennes; mais les

de

réveil

sous

le

régénéré la

ne montrait que du dédain pour la à

la

suffisance

Schiller,

britannique et les

au fond,

ils

séductions

pari-

compte de ce

n'ont jamais compris autre chose,

de culture des arts, que l'introduction d'un ballet français italien, et, à le

d'hui

une véritable trahison envers

pour

en substance, pour

forme de Vadolescent allemand qui

ou d'un opéra ;

dit-il

allemands ne tinrent aucun

princes

l'esprit national;

nom

et

Honneur

a

Grand, qui subissait aveu-

le

c'a été

l'expier,

il

bien prendre,

ils

en sont encore

faudra plus d'un acte de bonté,

dévouement de leur

part.

y>

C'est,

là aujour-

l'esprit de leur peuple,

ajoutc-t-il,

parce

de

noblesse

qu'il

et

et,

de

compte sur


RICHARD WAGNER ces actes,

moyen de la réparer. Le théâtre est à parce que c'est

de

plus

la

belle

Schiller:

l'opéra, là

ici

mélodie résonna,

et

fois;

si

la

plus

la lutte

cou-

dépayser

Gœthe

de

et

le

poésie était muette,

de Y adolescent allemand passa dans

souffle

le

le

Par bonheur,

Rossini, Spontini.

ballet;

le

la

l'avait

pour

scène aux héritiers de

la

génie allemand se réveilla encore une la

commencé

Napoléon,

mais

victoire;

allemand, avait repris

l'esprit

et

grand agent d'éducation du peuple,

le

génie allemand trouve son expansion

le

domination française; au théâtre, que Schiller

la

ronnée

yeux

ses

que

commise

faute

la

C'est par le théâtre que Lessing avait

irrésistible.

contre

,87

signale aussi clairement

leur

qu'il

magnifiques chants de Weber.

donc se détourner à jamais des Français, chez lesquels on ne trouve que pure virtuosité théâtrale, les

Il

faut

avec un don particulier d'imitation, d'art mimique, et qui ne cherchent

qu'une distraction toute frivole dans à l'abaissement du théâtre

degré

le

scène;

remédier

faut

il

par deux

Faust parodié de Gœthe par Gounod

le

retremper entièrement dans intelligent et

çaises,

la

qui descendit

fois

au

plus bas, en adoptant le Guillaume Tell parodié de Schiller

par Rossini, puis

si

de

les jeux

allemand,

si

l'esprit

;

il

faut se

du peuple allemand, de ce peuple

moral, et qui n'a nullement besoin des règles fran-

tant la bienséance est inhérente à la pureté et à l'intimité de

son être. «

Demandons-nous,

dit-il,

quelle richesse inou'ie, vraiment

surable, d'organisation vivifiante

en

rait

elle-même

par

si^

la

politique

analogie

avec

de

l'organisation

prussienne, dont nous avons cité l'exemple,

incommen-

de l'Allemagne posséde-

les

l'armée

éléments propres à

la

culture et à la vraie civilisation étaient attirés dans l'orbite du pouvoir

gouvernements se tiennent aujourd'hui bureaucratiquement renfermés. En résumé, les dispositions de l'esprit allemand pour l'art sont les

universelles,

dans

comme

l'histoire.

C'est

la

mission du peuple allemand depuis son entrée qui ont dans

à ceux

leurs

mains

les

destinées

politiques de la nation à donner l'exemple de l'appropriation de

renaissance la

fondation

jusqu'au delà

s'adresse

à

entre

des

frontières

dans

l'histoire,'

En un mot comme en la

intellectuelle

de

l'Allemagne.

vainqueur de Kœnigsgr^tz- (Sadowa),

une

française pâlira pour toujours.

A

vie

du

peuple, à

»

Cet

appel

tous les princes allemands; mais celui-ci est plus spécial

Un mot du

force

la

d'une nouvelle civilisation germanique, qui étendra ses

bienfaits

«

de

l'ennoblissement

à

cette

force

devant

et

laquelle

:

une nouvelle la

civilisation

»

cent, faites représenter les Xit>eluugen.

première représentation des Maîtres Chanteurs à Munich,

il


niCHARn WAGNER

i88

n'y

avait

que

l'un

des

trois.

d'une belle

trois

Français,

avons-nous

M. Pasdeloup

et

dit,

était

Le courageux fondateur des Concerts populaires, passion pour la musique de Richard Wagner, avait

pris fait

tout ce qui dépendait de lui pour la faire apprécier du public français;

mais sa propagande

était

forcément restreinte aux fragments sympho-

niques. Lorsqu'il prit la direction du Théâtre-Lyrique, en octobre 1868,

voulut aussitôt nous faire entendre un ou deux opéras complets du

il

maître, afin de réparer, dans

la

mesure du possible, l'échec de Tannhœiiser, et il choisit, pour commencer, Rienii qui, ne sortant pas du

moule ordinaire,

paraissait assez propre à accli-

mater tout doucement "Wagner chez nous. Celui-ci refusant de

déranger pour

se

chose,

voyage de Paris

le

afin

peu de

si

M. Pasdeloup

fit

même

à Zurich

de s'entendre avec

lui

sur

ses intentions, de prendre ses

mouvements, etc. Mais il avait compté sans l'ignorance et l'entêtement

journalistes

amateurs français, qui,

et des

sans

des

même

examiner

de l'œuvre ou

le

style

s'informer

de

sa date, attaquèrent ou défen-

dirent

même

18 avril 1S69.)

[Éclipse,

sait

et

sur

6

avril

envers n'eut les

le

seul

1869,

Richard

nom de Wagner. ne

modifia donc

Wagner

et

la

en

œuvres

rien

tentative

:

l'état

signées

du

de confiance

sifflait ,

donnée

le

de l'opinion publique

honorable de M. la

qu'ils

défendu

on applaudis-

représentation

comme

prière de Rienzi et, par-dessus tout, le

auteur

ou Ton

en mal, malgré

aucun résultat en bien purement mélodiques,

parties

ni

Cette

ou

attaqué

d'autres

RICH.\RD WAGNER, PAR GILL.

selon

Rienii,

avaient

le

Pasdeloup

succès qui accueillit

cavatine

d'Adriano,

chœur des messagers de

la

paix'.

I. La traduction française était de MM. Nuitter et Guilliaume. Monjauze chantait avec éclat le rulc de Rienzi; M"°' Borghèse et Sternberg représentaient Adriano et Irène d'une façon très satisfaisante, enfin une jeune élève du Conservatoire, M"° Polliart (depuis Priola), ravissait tout le monde en chantant le petit solo dans le chœur des messagers de paix. MM. Lutz (Orsino), Giraudet (Colonna), Massy (Baroncelli), Bacquié (Cecco), et Labat (Raimondo) complétaient un ensemble assez bon.


3

C

œ H <

j.-.

-,

— I

=

i

^


RICHARD WAGNER

,go

Par aflfectation crimpartialité, c'étaient surtout les ennemis de Richard Wagner qui provoquaient le directeur à représenter un opéra Lohengrin par exemple afin de faire une plus décisif que Riei!{i bonne fois justice des prétentions du prétendu réformateur. « Quand

personnes auront été scalpées par ce sono-

trente ou quarante mille

risme de Peau-Rouge, écrivait un

furieux,

libre

la

splendeur du véritable art est le seul mobile,

du trop célèbre mélodiste de

parti pris à l'égard

critique,

dont

wagné-

la forêt, et le

risme sera tenu, par l'immense majorité des dilettantes, pour ce est en réalité, c'est-à-dire

Celui-là

mort

est

pour

qu'il

plus retentissante des mystifications.

la

»

grande masse du public, indifférente

Bref, la

fou.

la

ne sera plus accusée de

entre les défenseurs et les détracteurs de parti pris, s'ennuyant surtout et

ne voyant

plus

que d'autres, ne marqua pas d'empressement à

original

entendre

et,

qu'un opéra aussi brillant, aussi bruyant, mais non

malgré

bruit qui se faisait autour,

le

Rieii^i

l'aller

ne put durer

au delà de vingt-six représentations.

Wagner,

D'ailleurs,

par lettre rendue publique,

présence

ma

et

participation

le

l'air

de

me

la

pour

soi,

le

succès de l'entreprise,

de s'en désintéresser.

afl:ecté

représentation qui

— pourraient

Mendès,

écrivait-il à M"'" Judith

tendu. J'aurais

à

par ses amis de Paris et

conseillé

vœux, cela va de

tout en faisant des avait,

dans

bien

très

mettre à

la

donner

se

« ...

Ma

prépare,

lieu à

un malen-

tête d'une entreprise théâtrale

but de regagner par Rieii{i ce que

j'ai

perdu par Tannhœuser ;

du moins, sans nul doute, ainsi que la presse interpréterait ma venue. Or, la mise en scène de RieiT{i au Théâtre-Lyrique n'a été qu'une question toute personnelle entre M. Pasdeloup et moi. A la c'est

suite

de

la

l'attention faites.

On

représentation

dont

elle

a d'abord

a

des

été

Maîtres Chanteurs

italien;

n'était

puis

;

encore Lohengrin en

pas question, cet été,

représentation

de

propositions

et

de

m'ont été

parlé d'une troupe allemande devant donner l'un

après l'autre mes six opéras à Paris

en

plusieurs

l'objet,

Munich

à

puis on a voulu tenter Lohengrin

que

Bref,

il

de moins de cinq projets concernant

la

français,

mes œuvres à Paris Quand M. Pasdeloup

;

cependant

sais-je?

je

n'en

ai

point

venu me dire qu'il prenait encouragé un seul. la direction du Théâtre-Lyrique dans l'intention de donner plusieurs de mes ouvrages, je ne crus pas pouvoir refuser à cet ami zélé et capable l'autorisation par Rien^i,

je lui

de

les

dis qu'en

représenter eff'et

est

et,

c'était celui

comme

il

désirait débuter

de mes opéras qui m'avait

toujours paru devoir s'adapter le plus aisément à une scène française.

y a de cela trente ans, en vue du Grand-Opéra, Rien{i ne présente aux chanteurs aucune des difficultés et n'offre au public pariÉcrit,

il


RICHARD WAGNER

uji

aucune des ctrangetés des œuvres qui l'ont suivi tant par son il musicale, se rattache sa forme aux que par sujet opéras depuis Ou Rien{i fera son chemin sans moi, longtemps populaires à Paris

sien

:

ou, l'y

aider

concerne

qu'ils sont

la

mon

ainsi,

ma

assistance ne saurait

façon de voir et

décidé ou, pour mieux dire,

suis

je

faire

le

en peu de mots,

telle est,

;

conduite que ce qui

capable de

n'est pas

s'il

mes ouvrages

représentation de

ligne de

la

appelé à suivre en à Paris, tous tant

»

'

Grâce à cette habile politique,

ne

il

fut

nullement atteint par ce

succès médiocre et put facilement s'en consoler. D'ailleurs, des ques-

Allemagne enfin

autrement

bien

tions

!

les

Nibelungen. Le

la

25 août i86g, jour de sa fête-, et dès

fermé ses portes,

pour y installer qui

oflFrait

la

la

fin

machinerie nécessaire à

Wagner,

la

de juin

le

lieu

le

Grand-Théâtre

mise sens dessus dessous représentation d'une œuvre

Pendant ces des chœurs travail-

des difficultés inouïes, presque insurmontables.

préparatifs matériels,

activement

laient

scène

par fragments aurait

scène avait été

la

en

alors

la

nouvelle création de Richard

première exécution

décidé qu'une

avait

débattaient

se

de Bavière, dans l'impatience de con-

roi

deux de

naître une partie ou avait

lui

ne s'agissait de rien moins que de mettre à

il

:

pour

palpitantes

les artistes

sous

la

de l'orchestre

direction

et

Hans Richter, musicien hors Wagner.

de

ligne et dévoué du fond de l'âme aux intérêts de Richard

Les choses marchaient cependant, en dépit de tous

donc

musique et de retard en retard, on avait dû

régulièrement

les efforts,

reculer la représentation du Rheingold jusqu'au

pour

la

septembre.

i*^''

A

l'ap-

proche de cette date, des inquiétudes très vives commencèrent à se produire parmi

les

des effets décoratifs

comme

les

amis de l'auteur au sujet de :

tout allait de travers et les profondeurs du

et

Rhin

splendeurs du Walhalla étaient d'un ridicule achevé. Quel-

ques zélateurs pressés télégraphièrent à afin d'en juger

tion

mise en scène

la

par lui-même.

Il

arriva aussitôt et

admit

à laquelle on

générale,

Wagner

les

nombreux

de venir à Munich faire

fit

fidèles,

une répétidont

une

ou c'crits eu frauyais de Richard Wagner destines à être rendus mais, avec le temps, il était arrivé à parler notre langue sans de trop grosses incorrections. Il a passé, cette année, en vente publique à Berlin une pièce in-folio de 32 lignes, signée seulement de l'initiale R. ce brouillon d'une lettre écrite en français (vers 1839) à propos de la traduction du livret de Rieii^^i, montrera quel singulier français il parlait alors. 1.

11

va sans dire que

les lettres

publics étaient revus et corrigés

;

;

« Monsieur, j'espère bien que vous aurier-la bonté de tînir votre travail pris pour moi et pour mon avantage de corriger ma mauvaise traduction de mon sujet d'un grand opéra Rieii^i. En c'espérant, je vous prie, Monsieur, bien fort de m'envoyer cette ouvrage à Mitau sur mon adresse si bientôt que possible. » Ce curieux spécimen du premier français de Wagner s'est vendu 40 marks. :

2.

Au commencement Wagner le

disposition de l'on avait

beaucoup

ri

de l'année précédente, on avait déjà répandu le bruit que le roi mettait à Palais de Cristal de Munich, transformé en théâtre à sa convenance, par avance de l'aquarium où devaient barboter les filles du Rhin.

la et


RICHARD WAGNER

192

vingtaine de Parisiens, accourus pour cette représentation solennelle et qui

languissaient à

Munich

ce fut une véritable

:

voulut exiger une mise en scène un peu moins protestations

l'intendant

aHn de donner

royal

répondit par Tordre

satisfaction à son

COSTUME DE

de Farrivce de Richard

débâcle, et

grotesque.

jeune

BRUNEHILD DANS

Wagner

politiques et Ton ne parlait de rien

avait

«

de passer

De

maître.

plus, la

LA VAI.KYRIE

réveillé

)l

lui

ses

outre,

nouvelle

,

d'anciennes

moins que de

Wagner

Mais à

inimitiés

donner un chari-

vari pour le punir de sa brochure dirigée contre les Juifs.

Ainsi, Richard

catholiques, qui qui avaient sa

Wagner

ne

lui

se trouvait pris,

comme

protestant, entre les

pardonnaient pas raftection du

brochure sur

le

roi, et les Juifs,

cœur; comme auteur, entre un intenCe qu"il avait de mieux à

dant aveugle et des décorateurs maladroits.


RICHARD WAGNER dans cette situation tendue,

faire

de retourner à Lucerne et c'est

était

Hans

à quoi ses amis le décidèrent sans peine.

malgré sa position précaire,

n'hésitait pas,

,^3

Hichtcr,

de son côté,

sacrifier le poste inespéré

h.

de maître de chapelle à Munich, et refusait de conduire une représentation aussi mal préparée; quant au chanteur Betz, pour se soustraire à de vaines sollicitations,

pour

repartit

Malgré

ces graves

dant royal désir

Berlin

du

défections, l'inten-

s'efforçait

qui

roi

de répondre au connaître à

voulait

tout prix le Rheingold et

et

chestre à tous les échos

:

M. Camille

de-

allait

il

mandant basse chantante d'abord

même.

jour

le

il

chef d'oril

suppliait

Saint-Saëns, ensuite

SI

un chef de Weimar, de remplacer Hans Richter à des

de

tète

la

l'orchestre,

éprouvait un

il

frciie,

sur lequel

ils

ont gravé leurs initiales dans deux cœurs enflammes.

et

(Tire de

deux côtés

EG LIN DE

aide Sicginiind à arracher l'cpée Ju

refus

Sc/iiill:;c et

Miillcr

à l'Aimcau Ju Nibcluii''. 1881.)

péremptoire. Hans de Bûlow, de plus, se disait malade.

d'arrangement

En

les

de compte, après avoir épuisé

fin

plus

baroques,

avouer au

dut

il

radicale où l'on se trouvait de représenter

septembre, au plus

les

l'impossibilité

roi

Rheingold avant

le

tentatives

la fin

de

tôt.

Cette série de contre-temps ne fut qu'un stimulant à l'affection du

pour

souverain

malgré cet

incident,

que

lorsqu'il

tendre

le

ne pas

fut

sur

le

le

point

d'en-

des études faites

fruit

de l'argent dépensé, on s'adressa

bien vite au machiniste LOGE, LE DIEU DU FEU,

repos

Pour ne pas

Rheingold.

perdre tout

exploiter

de

n'eut

roi

le

et,

de ses conseillers,

habiles pour

trop

et

compositeur,

le

les efforts

Brandt, de

Darmstadt, qui vint corriger l'œuvre maladroite des machinistes de Mu-

emporté par son énorme manteau rouge (Tiré de Schicll\c et Midlcr

à i'Aniicju du Xihclinig, 1881.)

nich

;

le

baryton Kindermann

prit la

de Betz, et le répétiteur études à la place de Hans Richter,

succession

Éberle fut chargé de poursuivre sur

destitué

l'heure.

Avant

les

la

fin

du mois,

la

volonté 22

royale

était

septembre,

remplie la première représentation put avoir lieu grâce au travail ardu que s'étaient imposé quinze jours durant Wûllner, le

:

le

nouveau

chef d'orchestre,

les

chanteurs Vogl

et

Kindermann

et


,

RICHARD WAGNER

194

l'habile

machiniste

atteint,

mais

Le but

Brandt.

moral

l'effet

de

matériel

douteux;

était

tant

d'efforts

de

public

le

était

première

la

représentation demeura indécis, presque hostile, et la patience allemande, si

justement reconnue pourtant, ne supporta pas sans broncher quatre

interminables tableaux,

entractes

mois avait bien changé

d'un

retard

sans

beaucoup des plus

fidèles

de grue au mois d'août,

pied

septembre, de façon que

après avoir

dire

faut

Il

composition de

la

partisans,

repos.

ni

fait

si

que ce

salle

la

que

;

longtemps

le

pu ou voulu revenir en

n'avaient pas

joué devant un public moins

le R/ieiiigold fut

moins acquis au compositeur et même en partie défavorable innovations. Quoi qu'il en fût, l'œuvre avait toujours été repré-

entraîné, à ses

sentée, et c'était un grand point

Un

romancier-poète,

un

s'attribue

en

:

un

manquement de mémoire

tel

montre assez combien

il

revanche,

Wagner

vivant il

faut

à cette

piano ou

à

Allant,

table.

changeant

les

venant par

le

point capital

de poète.

En fait

ces

récits

Non,

jamais!

lui,

souvient pas de l'avoir vu assis une seule

chaises,

il

époque un portrait tout à

de

défier

se

sur

lesquels

retardé d'une

fut

Quelquefois nous étions assis, mais

a

:

me

ne

a tracé de

il

dans

incidents

ces

que l'Or du Rhin

rcMe décisif, avance

année entière

l'honneur était sauf.

:

narrant

fois,

ce n'est au

si

grande pièce, remuant

la

les

de place, cherchant dans toutes ses

fauteuils

poches sa tabatière toujours perdue ou ses lunettes, qui étaient quelquefois accrochées aux pendeloques des candélabres, mais qui n'étaient

jamais sur son nez, empoignant

gauche avec

l'œil

crispés, le

fourrant dans

cheveux,

parlait, parlait, parlait

ments

:

il

béret de velours qui

le

d'une crête noire,

l'air

son

retirant,

le

gilet,

pendait sur

le

replaçant sur ses

s'envolait dans des emporte-

11

!

lui

triturant entre ses poings

le

sublimes images, calembours, barbarismes,

un

flot

incessant,

toujours heurté, toujours renouvelé, de paroles superbes, tendres, violentes

ou bouffonnes.

tantôt

s'attend rissant

Et,

tantôt

jusqu'aux

à

riant

pleurs,

se

décrocher

tantôt

se

la

mâchoire,

haussant

jusqu'à

l'extase prophétique,

il mêlait tout dans son extraordinaire improvisadrames rêvés, le roi de Bavière qui n'était pas un incchaiit garçon, les tours que lui jouaient les maîtres de chapelle juifs, les abonnés qui avaient sifflé Tannhœiiser, M"" de Metternich, ces gueux

tion

:

les

d'éditeurs, la réponse qu'il voulait faire

théâtre

qu'il

viendraient

M. Auber,

ferait

de

bâtir

tous

etc., etc.

les '

sur

une

pays

à la

colline,

tous

les

près

peuples

d'Augsboiirg,

d'une ,

ville,

Sébastien

et

le oij

Bach

»

L'année suivante, après l'Or du Rhin, 1.

Gaiettc

Richard Wagner, par M. CaUillc .Vlcndès

(i

vol. in-iS,

c'était

naturellement

Charpentier, 1886).

le

tour


r^r.'-'^iit.iWWft.vj.M»..

li^V-

.

'%^. r,

;^-^



RICHARD WACNKR de

,o5

Val kyrie, dont quelques fragments importants, mais seulement comme la scène finale du premier acte et la chevauchée

la

des fragments,

des Valkyries, 1864. Cette

avaient été exécutés à Munich, à A'icnne, en

fois,

les

mesures furent

bien prises que

si

tion eut lieu juste au jour promis, le 26 juin

contraint de renvoyer

l'Europe

Aussi

on avait trop perdu à

:

résultat

le

fut-il

voir

les

1870, et qu'on ne fut pas coins de

les

partir avant le Rheingold.

meilleur

infiniment

et

représenta-

la

venus de tous

d'ardents auditeurs,

\8G3

que

ajouter

faut

il

:

la

pièce rentrait mieux dans le cadre habituel, que la Valkyric présentait

humaines autrement vivante et intéressante que les solennelles évolutions du Rheingold, et que Wagner, poète, avait remarquablement servi Wagner, musicien, en lui oftVant de véritables « situations » dramatiques à mettre en musique. Le musicien, à son une

lutte de passions

tour, avait secondé le poète

de

reconnaissance de

la

dans

les

dans

la

admirablement dans cet épisode

Sieglinde

premier acte,

scènes de Brunehild au deuxième, surtout celle avec Siegmund

chevauchée des Valkyries,

audacieux embrasement

et cet

de Siegmund au

et

passionné

si

les

à Brunehild

qu'on réprouvait aux répétitions

final,

pour toutes sortes de bonnes raisons

Wotan

adieux de

;

et qui

gagna

sa cause, en dernier

ressort, devant le public.

Ce

malgré de fâcheux pronostics, un grand succès, auquel de timides coups de sifflet, lancés surtout pendant les fut

donc un succès,

longues scènes du deuxième acte, ajoutèrent quelque agrément. Lexécution

était

de tout

point

parfaite

:

M"""

Stehle

(Brunehild),

M.

et

M'"" Vogl (Siegmund et Sieglinde), MM. Kindermann (Wotan), Bausewein (Hunding) et M"" Kaufmann (Fricka) avaient tous, mais surtout

montré une rare intelligence dramatique quablement rendu le caractère de leurs personnages;

les huit Valkyries,

soeurs de Brunehild, étaient représentées par M""^ Possard, noff,

MûUer, Hornauer, Eichheim,

comme pour

L'orchestre aussi, dirigé par F'ranz Wiillner, se

montra

parfait d'entrain et d'ensemble

120 exécutants au moins

hors de

la

:

Seehofer

E.

Ritter,

il

et était placé

était

remar-

et avaient

M"*^ Stelhe,

M"" Leo-

et

le

Tyroler.

Rheingold,

augmenté d'un

tiers

en contre-bas du parterre,

vue du spectateur, conformément aux indications de Wagner,

qui avait pu enfin réaliser une réforme à laquelle

il

tenait essentielle-

ment. La mise en scène, très luxueuse et fort ingénieusement conçue, était

due au machiniste Brandt

pour

la

au peintre-décorateur Jank

:

le

tout

bagatelle de cinquante mille florins.

C'était le roi qui payait telle

et

e.xécution

des

n'assistait pas à cette

;

c'était le roi qui rendait seul possible

ouvrages

de

Richard

Wagner,

première représentation.

Il

et

une

cependant

il

se réservait de venir


RICHARD WAGNER

,f)5

troisième,

et,

pour en mieux

auparavant, on

lui

jouât

à la

jamais trouvé qu'on

Rhciiigold

le

donnait

en

lui

Wagner,

n'en avait jamais assez.

jouir,

il

ce

:

trop

alors,

que,

exigeait

pas

n'est

trois

qui

lui

jours

aurait

entendre; au contraire,

à

il

pour exprimer ses sentiments

de profonde reconnaissance à son royal ami, composait une pièce de vers vraiment émue et la faisait imprimer en tète de la première partition

de la Valkyrie ;

la

il

supprima par

par une dédicace générale de

O O

Roi toi

pour

suite

remplacer

la

tétralogie à son bienfaiteur

la

noble protecteur de

!

la

ma

vie

:

!

suprême refuge d'une bonté inépuisable,

!

Arrivé maintenant au but de ma vie, je lutte Pour trouver le mot digne de tes bienfaits.

Ce que

tu fus

En voyant

pour moi, moi

seul, je puis le

mesurer

ce que j'étais sans toi.

Pas une étoile ne m'apparaissait qu'elle ne pâlit aussitôt. Les espérances suprêmes, je les ai perdues une à une... El maintenant,

Dans

Deux

le

mois

je vais, fier et

royaume

après

heureux, par de nouveaux sentiers Grâce

ensoleillé de ta

'

de

l'apparition

!

la

Valkyrie

Munich,

à

le

Wagner, veuf depuis quatre ans et demi, épousait à Lucerne M"^'-' Hans de Biilow, qui venait de divorcer avec son mari pour s'unir à l'homme qu'elle aimait et qu'elle admirait pardessus tout; ce mariage eut lieu le plus simplement du monde, en. présence du fidèle Hans Richter et de deux ou trois amis. M"'" Hans de Biilow, née Cosima Liszt, était la tille du grand pianiste et de 25 août 1870, Richard

d'Agoult.

M'"''

Elle

avait

vingt-neuf ans

alors

;

apportait

elle

son

à

nouveau mari une âme aimante, un esprit viril et très cultivé, un dévouement inépuisable, dont elle lui avait déjà donné maintes preuves depuis si longtemps qu'elle le soutenait dans la vie. En se remariant, M""-" de Biilow gardait auprès d'elle quatre jeunes filles charmantes nées 'de son premier mariage et dont l'aînée, M'''^ Blandine de Biilow, a épousé depuis le comte italien Gravina, tandis que sa sœur Daniela année même, à

s'unissait,

cette

versité de

Bonn.

M. de Thode,

privat-docent à l'uni-

Richard Wagner, en appelant Hans de Biilow partout où à Zurich, à Munich, à Lucerne, avait fait en quelque artistique des truit,

deux époux.

musique sur

l'arrêt

prodigieux qui I

Hans de

qu'on destinait d'abord à

Guide musical

la

très

et

s'était

très

ins-

voué à

la

par Richard Wagner, musicien

une admiration religieuse

'17 juin iSM\i. Arlicle

allait,

sorte la fortune

distingué,

diplomatie et qui

rendu par Liszt

portait

Biilow,

il

à

son

idole

ntcrologique de M. Maurice KulVcralh sur

le roi

et

qui

Louis

II.


RICHARD WAGNER VERS 1S74. Dessin Je M. H. de Liphart.


RICHARD WAGNER

igS

tout à

cœur

par

retenait

son esclave et sa chose.

fait

par Wagner,

moindres essais ébauchés

les

n'est pas

11

au contact de cette adoration brûlante,

croître

en

Tristan,

en

senti

ait

passion qui se trahit lors des représentations de

merveilleusement dirigées par Hans de Bûlow avec

encore

s'accrut

qui

moment

au

porta enfin à abandonner son mari pour aller à précipité fut un coup

passèrent

sanglantes

l'homme.

«

Si

quelqu'un

c'était

yeux,

ses

qu'il

mais fût

une

elle

i865,

si

d'apôtre,

zèle

qui

et

la

Lucerne.

Ce départ

l'artiste

des lueurs

de foudre pour l'homme et

devant

un

Maîtres Chanteurs,

des

était

étonnant que sa femme,

;

eut

l'artiste

de

raison

permis de tuer,

dit-il

avec

» Il ne revit jamais une résignation héroïque, je l'aurais déjà frappé le maître auquel il avait tant donné de sa vie et de son cœur, mais il ne garda pas rancune au génie, et plus tard, quand sa douleur fut apaisée, il se remaria lui-même et se dépensa plus activement que

jamais

pour

lorsqu'il

triomphe

le

s'agit

de

de souscrire

tétralogie à Bayreuth

la

wagnérienne

cause

on

;

le

vit

bien

de pousser aux représentations de

et

la

'.

Dès 1S69, une Française, éprise avec passion de la musique de Richard Wagner, allait lui rendre visite à Lucerne et décrivait ainsi « Au coucher du soleil, sa retraite et son calme intérieur de famille :

j'abordai à Triebschen, à ce coin de terre béni, où si

charmantes heures.

j'ai

passé depuis de

une sorte de promontoire, très

C'était

resque, qui s'avançait dans le lac;

n'y avait

Il

ni

grille,

ni

pitto-

porte;

le

marquées et se prolongeait, à l'infini, sur les montagnes voisines. La maison était très simple extérieurement, grise avec un toit de tuiles sombres; mais, dans l'intérieur, d'un arrangement plein de goût et d'élégance, on sentait la main d'une femme.

jardin n'avait pas de limites

jyjme

Wagner m'apparut au

un beau sourire

gracieuse avec

Cette soirée fut délicieuse

:

de ses

milieu

le

et

les

enfants,

blonde,

yeux bleus, doux

maître montra

et

grande, rêveurs.

un entrain, une gaieté,

une verve incomparables. Je ne m'attendais pas à cette vivacité prit,

avait

à ces saillies, à ces finesses de langage.

beaucoup

amertume de

la

souffert,

grande

mais

bataille

qu'il

aimait

Il"

parla de

encore,

de Tannhœuser'-.

et

Paris

sans

d'es-

il

aucune

»

Deux ans après, a la tin de l'annce 1872, la consécration religieuse fut donnée en présence de de Vabbé Liszt, à Punion de Richard Wagner avec M'"" de Bulow, celle-ci, née catholique, ayant adopté la religion luthérienne, qui était celle de son nouveau mari. Wagner n'avait pas divorcé, mais il avait profité du divorce, et cela lui valut un honneur dont il se serait bien passe. Pour ses étrenncs de l'année 1881, le commandeur Épailly, président de la Société des Amis du divorce, ayant son siège à Paris, 71, rue Saint-Sauveur, lui donnait avis que la Société l'avait nommé « membre honoraire à titre d'hommage ». Et force fut à Wagner de remercier ledit commandeur et la Société « de l'attention dont il était l'objet u par une lettre assez sèche et dont le commandeur s'est volontiers dessaisi d'ailleurs, car elle a passé dernièrement en vente publique, à Paris. 2. Richard Wagner et son œuvre poétique, par M'"" Judith Gaiiticr (in-12, chez Charavay, 1882). 1.

Liszt,


RICHARD WAGNER Après

à Triebschcn,

quinze jours de quasi-résidence avec ses hôtes d'une

était liée

199

amitié qu'elle partait

telle

la

visiteuse

cœur

le

gros,

en leur promettant bien de revenir l'année suivante.

en

etïet

de plus,

;

elle acceptait

Elle y retourna avec bonheur d'être marraine du fils

Wagner

qui naissait alors à Richard

Au

Wagner

de

recevait

avant

du

loin,

et la

de Paris,

5

:

des éclairs et des coups de tonnerre bruyants.

de foudre joueront leur rôle dans

du

j'aime ces augures

silence

nous

qui

terrestres

convenu de

même

sépare,

région,

de

vie

de votre

privés

bon

la

ce terrible

dans nos Jugements sur

les

contribuer qu'à nous

guerre qui commençait

«

s'agit,

Il

les

chers amis tarderaient un silence absolu.

même

nom

signé cette fois en toutes critiques

les

d'abord

sa

l'orchestre)

directement

plus

Wagner

maîtres

plusieurs

même

ses meilleures

expose ses vues sur

la

région

ce qui nous

rapprocher davantage

il

convenu que

profiter

du bruit que

forme assez

une

das

Dirigireii

la

musique,

deux de ses

publiait

sous

et

lignes,

été

avait

du Judaïsme dans

de

brève.

fSur la

écrits

C'était

de

direction

renom, enflamma bien plus violentes contre ou pour

chapelle en

des colères et raviva les discussions les l'une de

Tout

notre

pas d'écho hors d'Allemagne, mais qui, visant

n'eut

Richard Wagner;

garde

y a une

il

unis.

comme pour

et

lettres,

Ueber

:

laquelle

la réédition

intéressants

brochure qui

et sur

année 1870,

autour de son

Mais

dans ces dernières

la

cette

coups

choses qui appartiennent à

de

En

les

garçon.

Je

assistance.

et restons toujours

plus intimement avec le temps.

faisait

que

parait

sens. Oui, heureusement,

sommes

ne peut

Il

tandis que je prends en aversion ces coups

ciel,

ont

si

d'existence où nous

cette

Siegfried

:

siège

le

la

septembre 1870, parlait justement de la cérémonie moment de la bénédiction, disait Wagner, un orage nous envoya

lettre datée «

de son héros

marraine du bambin que de

ne put être

elle

dernière lettre qu'elle

occupé de

celui-ci, fort

nom

composition de Siegfried, baptisait du

Wagner. Mais

que

et

:

en dehors de ces attaques, cette étude est c'est

un

tout

petit traité

sur le

style,

il

meilleure manière de rendre la musique classique,

avec de nombreux exemples tirés de Beethoven,

Mozart, Weber,

etc.

décembre à Leipzig, est un de musique; il résume, en quelque sorte, tous les écrits sur la métaphysique de la musique et découle des idées de Schopenhauer sur l'art musical, idées que ce phiL'autre travail

singulier

:

Beethoven,

losophe avouait ne pouvoir fissent.

citations

paru

le

amalgame de métaphysique

nullement

Wagner, non content de empruntées à

l'essai

les

2

et

prouver, quoiqu'elles

admettre,

le

satis-

y ajoute encore des

de Schopenhauer sur

matières qui s'y rapportent, et ces citations sont au

les

visions

moins

et

sujettes

les

à


RICHARD WAGNER

2O0

caution

mais, abstraction faite de ce gribouillis

;

philosophique,

y a sens de il

dans cette brochure un exposé des pensées de "Wagner sur le qui vaut d'être attentivement lu par les la musique de Beethoven, oens sérieux c'est l'écrit d'un musicien judicieux encore et clairvoyant, :

malgré Schopenhauer. En 1871, Richard Wagner, voulant pour de

jour de sa naissance et célébrer aussi le premier anniversaire

le

son

une surprise à sa femme

faire

fils

et familial

;

âgé d'un an, il

l'intitula

:

écrivit

en cachette un morceau tout intime

Siegfried-Idyll, et prit soin d'expliquer, dans

une préface

versifiée, qu'il s'était

proposé de rendre l'impression des sentiments purs et sereins

qu'on éprouve auprès du ber-

ceau

d'un

tout

Cette idylle

jeune

enfant.

pour

écrite

,

petit

orchestre, est bâtie sur deux ou

thèmes

trois

le

motif d'amour en

de se

saillants de la par-

de Siegfried (notamment

tition

la

/;//

mineur

dernière scène) auxquels

mêle une berceuse populaire

allemande

:

reste

le

tout

ce

morceau,

qui

temps dans une

demi-teinte rêveuse et tendre, est réellement exceptionnel sous la

plume du maître

et

déroute

aussi bien ses admirateurs LE MESSIE DES JUIFS, DERNIERE MANIERE. Entrée de Liszt à Jérusalem entre les deux maris de sa fille Hans de Bûlow et Richard Wagner.

par

que

ses

détracteurs

pris

de rêverie et de douceur.

ce

parti

:

[Dcr

Floli,

de Vienne, 1S81.)

Wagner, pour que fût

biné secrètement avec

Hans

la

surprise

complète, avait tout com-

Richter, qui séjournait alors en Suisse et

qui prépara l'exécution en recrutant à Zurich un petit orchestre et en le faisant

Au

répéter.

marqué, Hans Richter amena ses musiciens à Triebgroupa tant bien que mal sur le perron, se chargea de jouer lui-même les quelques mesures de trompette et Wagner prit la direction de la petite bande à la première attaque, M'""^ Wagner sortait de sa chambre et jouissait avec ravissement de la touchante attenschen,

jour les

:

tion de son mari. Cette composition, naturellement dédiée à M"'" et qu'on appelle assez

souvent

:

Morceau de

l'escalier,

Wagner

en souvenir de


lUCHAKI) première éxecution,

sa

à Meinini;en,

à

\VA(iNi:i<.

rejouée en

fut

cour du grand-duc,

la

à Mannlieim, et en

1871

toujours

sous

Fauteur; mais c'est seulement en 1S78 qui! se décida à

publier,

la

deux ans après on en avait connaissance à Paris. En réalité, M'""" Wagner ne dut éprouver cpfune

et

1877

direction de

la

surprise

très

de concerts, ces célébrations d'anniversaires en fréquent usage en Allemagne, et Richard Wagner

relative, car ces sortes

musique sont n'y manquait jamais pour sa part, exhumant quelque œuvre de jeunesse oubliée, offrant quelque composition nouvelle en primeur c'est ainsi qu'en 1878, toujours pour l'and'un

:

niversaire

de sa femme,

entendre, avant tout

faisait

monde, à Bayreuth, ensuite

plaisir

en

///

qu'il se

à

symphonie mineur. Et quand il préde diriger

la

musicales,

devait se rappeler

le

roi

prélude

le

parait ces surprises il

le

donlui-même le

de Parsifal, puis nait

lui

il

Louis

II

lui

gée,

une

fêter

son propre

C'était le 22

ména-

avait

certaine

que

celle

pour

fois,

anniversaire.

A

cette

chez

Wa-

mai i86g.

date étaient arrivés

gner, à Triebschen, quatre instrumentistes saient

à

meilleurs niers

MM.

français

juste

qui

pas-

pour

titre

des

interprètes

les

der-

quatuors de Beethoven

Maurin,

et Jacquart,

Colblain,

MODERNES CHEVALIERS DU Richard Wagner.

Liszt.

Mas

(Dit

h'ioli,

de

Viciiiii;,

Ho

iiiiu

qui

Ces messieurs du

roi

n'avait

étaient

de

pu

joindre

se

reçus en

Bavière

n'attendirent que le signal.

;

secret

à

ses

par

préparèrent

ils

Quelle

un

partners tiers

leurs

fut la surprise

nos quatre artistes au port d'armes! puis, reconnaissant xMaurin,

bras ouverts et leur

fit

se

fête à tous,

passa ainsi

le

Il

habituels.

informé des

instruments

et

du maître, lorsque, il

aperçut

demeura d'abord bouche bée,

avait entrevu à Paris,

cju'il

il

l'accueillit à

avec une joie sincère. .\Iors ceu.\-ci

notamment

8% le 14' et le 15". plus cordialement du monde, avec des

jouèrent plusieurs quatuors,

La journée

.

1SS2.)

entrant dans son salon en robe de chambre assez négligée,

lui

(3KAAI.

Bulow.

ce dernier rempla-

çant Chevillard

intentions

LtS

:

le

iO


RICHARD WAGNER

202

pour se rafraîchir

cntr'actes

Wagner

d'arrêt, «

et

Dans un de

bavarder.

porta deux toasts, Tun à son royal protecteur, Tautre

au plus grand musicien français, à Camille Saint-Saëns

Saint-Saëns qui souvenir

mais

depuis...

plus vivace de cette

le

avant sa mort,

Wagner

passons.

inattendue,

fête

»,

les

derniers

même

le

conservé

avait

le

quelques années

et,

encore à Tun de ses amis de Paris

disait

il

entendu mieux jouer

jamais

moments

ces

qu'il n'avait

quatuors de Beethoven que

par ces quatre artistes français.

Cependant, ces exécutions espacées d'année en année des différentes

mal au désir de

parties de la tétralogie répondaient assez

en

comme des opéras distincts, on rentrait dans l'ordre Wagner avait voulu, tout au contraire, en composant ce

jouant ainsi

les

habituel

et

;

grand ensemble, et

des

«

exprimer l'antagonisme de ses tendances artistiques théâtrales

institutions

presque un

moment

défi

contre

la

existantes

»

condition actuelle des théâtres d'opéra

hanté d'une

idée

fixe

:

œuvre pût

absolu, où son

avoir un

caressait cette idée,

dessiné

alors

et

sur les

du

ordres

tesque, qui ne tenait compte

effraya

:

lors,

régnât en maître

roi

pour

ainsi

;

plan

gigan-

de terrain ou autre,

dépenses tellement ruineuses que

sa cassette aurait été vidée à peine

un plan

Louis

mais ce

Zurich

d'aucune

du

son ami, l'architecte Gottfried

difficulté

entraîner à des

or,

conception.

qu'on avait pu voir à l'Exposition de

devait

il

être exécutée dans des conditions la

:

comme un ouvrage Wagner, dès

théâtre où

dire adéquates et identiques à celles de

Dès 1867, il Semper, avait

tout

protestation, ni défi.

n'y avait plus ni

il

une protestation,

lancer

;

qu'on traitait chaque fragment de ce

ordinaire, fut

l'auteur, car,

le

roi

s'en

au quart des travaux,

et

Chambres n'eussent sûrement pas voté le moindre crédit pour tout bouleverser à l'intention de Richard Wagner. L'hostilité de son peuple

les

et

de ses ministres avait déjà contraint Louis

deux mois

d'essai,

Wagner pour

lui

l'école

II

de chant établie selon

à laisser fermer, après les idées

former des chanteurs. Qu'aurait-ce été

de dépenser des sommes énormes en vue d'édifier

Wagner reconnut que

Alors,

pour

lui

procurer

le

cette

théâtre

la tétralogie telle qu'il

spécial

l'avait

s'il

conçue,

et

il

s'était agi

théâtre-modèle?

le

protection royale était nécessaire à la

de Richard

insuffisante

représentation de

résolut

de recourir au

peuple en exaltant son patriotisme artistique et son orgueil national.

Le

terrain était merveilleusement préparé, à ce point de vue, après la

guerre de 1870, et l'orgueil surexcité du peuple allemand devait accueillir avec plus de chaleur les prédications de Wagner contre l'art welche et

pour

l'art

germanique.

Un

instant,

il

s'était

bercé de l'espoir de trou-

ver dans le nouvel empereur une aide autrement effective que celle du




RICHARD WAGNER roi

de Bavière; mais Guillaume

avait

simplement envoyé

2o3

assez peu porté vers

I",

trois cents thalers, peut-être

la

musique,

marche fKaisermarschJ, que Wagner avait composée pour brer le couronnement du nouvel empereur d'Allemagne et qu'on

de

la

exécutée pour

la

première

fois à

Berlin

une composition magnillque, tout à

le

fait

1S71

14 avril

inspirée de

lui

en remerciement célé-

avait

c'est d'ailleurs

;

Bach

et

de Beetho-

douteux que l'empereur s'en inquiétât beaucoup. Trois cents thalers, c'était peu auprès de ce que l'auteur espérait, et il ne cache pas son mécontentement dans ces lignes qu'il fait bon méditer. ven, mais

c(

et,

est

il

Rien de

en dernier

pareil, écrit-il avec lieu,

commencé avec

amertume,

à ce

l'appui

de

projeté,

j'avais

confiance, grâce au concours

enthousiastes, n'avait jamais encore été entrepris

ment digne de

que

:

d'amis

c'eût été essentielle-

notre jeune gouvernement impérial,

qui

ne

pouvait inaugurer son brillant règne plus glorieusement qu'en donnant l'aide la plus

franche à un objet désintéressé et pour un motif pure-

ment idéal. On pouvait avoir d'autant plus volontiers confiance en lui que le peuple allemand même est pauvre et n'a pas de vastes ressources à sa disposition pour satisfaire ses besoins intellectuels, taudis que le gouvernement était, à cette époque, riche jusqu'au superflu par les termes du traité avec son voisin vaincu. Mais les pouvoirs qui régnaient en Allemagne, négligents table, ne virent alors

comme

à l'ordinaire

dans mes

efforts,

des

comme

intérêts ils

de

l'art

véri-

n'y avaient toujours

vu auparavant, que l'expression de la plus extrême ambition personnelle, et, dans l'institution que je projetais, rien que la demande extravagante d'une représentation extraordinaire ouvrages, pour

ma

et inusitée

de mes propres

seule satisfaction d'amour-propre personnel. L'achè-

vement de mon entreprise fut dès lors laissé entièrement à moi et à » mes amis Pendant les derniers temps de son séjour en Suisse, en décembre '.

1870,

il

avait

publié sa belle étude sur Beethoven, dans laquelle

rattachait habilement l'œuvre

du maitre des maîtres

à la

sienne,

expliquant que Beethoven avait été irrésistiblement amené, par

la

il

en

pro-

gression continue de son génie, à joindre la parole à l'orchestre dans sa dernière symphonie, et

du maître en fondant la

toute-puissance de

la la

que

lui,

Wagner,

avait repris l'idée

suprême

toute-puissance symphonique de l'orchestre et parole dans sa nouvelle œuvre d'art.

Il

avait

I. Richard Wagner, lŒuvre et la mission de m.i vie, autobiographie traduite par M. Edmond Hippcau {1884). Wagner s'était donc inge'nunicnt Hatté qu'une partie des milliards payés parles Français seraient affectés à la fondation de son Théâtre idéal. Certains biographes allemands assurent même qu'en 1870 il aurait, par ressentiment de l'échec di^Tannbceiiser à Paris, vivement poussé le roi Louis H à s'allier à la Prusse. Mais le moyen de croire qu'il ait dépendu du rui et de son musicien que la Bavière prît ou non parti contre nous, quand la Prusse ordonnait, et ne peut-on relever assez de griefs dans les écrits authentiques de Wagner, sans recourir à de pareilles imaginations ?


RICHARD WAGNER

204

également

fait

paraître

vers

brochure sur Texccution du il

toutes

expliquait

atteindre

au

but

entièrement

monde Il

le

les

la

époque,

festival théâtral

conditions

suprême de

spectateur

imaginaire, en

même

à

qu'il

l'art,

qui

réalité

la

et

en

avril

une

1870,

l'Anneau du Nibching, où selon

était,

de

pour

indispensables

croyait

d'arracher

lui,

transporter dans un

le

vivre de la vie des héros en scène.

le faisant

ne se contentait plus, pour cela, des ressources ordinaires de Tart

musical

;

il

avait recours à des

moyens purement matériels

et modifiait

même

du théâtre. En faisant l'obscurité presque complète dans la salle, il isolait chaque spectateur du reste de l'assistance et le forçait à concentrer toute son attention sur la scène où les perla disposition

sonnages, éclairés suivant l'usage, de face et par en

des

bas,

coulisses

et

de se

cintre, auraient l'air

mouvoir

du

monde surnaturel. De un

dans

inconnu,

plus, afin de

supprimer tout

ce qui pouvait rappeler la

ordinaire ou

vie

du théâtre, chestre

en avant de

M. IIANS

RICHTHR DIRIGEANT

l.

imn

nom

OUCHKSTKE A

I.

plaçant

scène, dans

llAVREU'Ill.

singulier d'abîme

mystique^ et d'où les ondes

la salle,

devaient

se

ré-

envelopper chaque auditeur

d'ef-

que Gottfried Sempcr papier ce théâtre incomparable en vue des Nibelungen '. Et

Cet orchestre invisible,

honneur à

le

les

sonores, adoucies et mieux

pandre insensiblement par toute

fait

pour

i

fondues,

avait édifié sur le

en la

l'or-

une excavation décorée du n

D'après un croquis original.

fluves mystérieux.

rendait

invisible

spectateurs,

,.,^^^;-^IlMLMOM'

il

l'artifice

c'est d'après ces indications

dcjiit

i'ide'e

première, à

la

ce qui

comme

d'ordi-

rigueur, peut découler de Grctry,

sa perspicacité sans dépre'cier l'innovation de

Wagner

— est

bien placé,

naire, en avant de la scène; mais il s'étend beaucoup en dessous, les instruments les plus bruyants s'enfonçant de plus en plus sous le plancher. Une sorte de demi-voûte légère, en bois, semblable aux boites de nos souffleurs, s'étend tout le long de la scène et cache entièrement au public l'orchestre et

son chef; celui-ci, au contraire, est très bien vu de tous résumé, fut entièrement favorable, n On avait craint, n'étouffât les effets délicats d'orchestre;

percevaient à merveille et que

il

les

dit

musiciens et chanteurs. L'expérience, au M. Dannreuther, que cette disposition

se trouva, tout à rebours,

que

les détails les

plus subtils se

instruments de bois s'entendaient plus distinctement que jamais; de plus, ]cs furte, qui semblent toujours, en l'état habituel, provenir d'une explosion subite de trompettes et de trombones, étaient d'un éclat moins brutal et répondaient de la sorte au désir de Wagner. » Parfois même, cela semblait un peu trop terne et doux à certains auditeurs. les



RICHARD WAGNER

2o6

Tout en désirant avantages que lui Munich, dont avant

chait

théâtre-modèle,

Mais ce

la

rester

sur

offrait

royale,

pour garder

ne

il

hésitait. les

pas de

voulait

toujours hostile; car ce qu'il cher-

lui était

de

assurer l'exécution

à

c'était

Wagner

Ici,

bavarois,

territoire

protection

la

population

tout,

le

construire?

le

sa

en

tétralogie,

dehors de toutes compétitions politiques, religieuses ou autres. C'est ce qui le décida à se fixer dans une petite ville de 20,000 âmes, soit

au milieu d'une population insuffisante pour former un public, loin de toute inimitié, à l'abri de tous les préjugés, de toutes les traditions, de toutes

habitudes.

les

de Bayreuth, dans

ville

Au mois la

d'avril

1871,

s'en

il

même

la

MM.

Gross,

etc.,

il

décidait

convient

d'ajouter

ville

aux

point essentiel

de s'intéresser

réveiller en elle la vie artistique, faisait

son

gracieusement don à

théâtre

et

trois quarts protestante et

pouvait manquer

ne

libéral,

novembre

que son théâtre-modèle

érigé dans cette ville écartée et tranquille.

Bayreuth,

et, le 9

année, après avoir pris conseil d'amis éprouvés, tels que

Feustel,

11

la

Haute-Franconie, à laquelle on n'arrivait

que par un détour, de Nuremberg ou de Bamberg, de

vint visiter

pour

la

éteinte

Wagner

maison

que

la

serait

municipalité de

dévouée au parti national à

ce

projet,

depuis longtemps,

qui devait qu'elle

et

des deux terrains nécessaires pour

qu'il

devait

se

faire

dans

bâtir

les

abandonné pour Bayreuth, environs. C'est en « Un et M""^ Wagner écrivait le 22 avril à M™" Mendès-Gautier dernier mot de Triebschen, ma chère amie, que nous quittons le cœur 1872 que Lucerne

fut

:

Demain Wagner se rend à Bayreuth; je Rus dans huit jours. Nous ne voulons pas

gros, et avec l'esprit inquiet. le

suis avec

les enfants et

sans vous envoyer notre souvenir et nos tendresses...

partir

Pour

réaliser

(1,125,000 francs), partisans,

le

somme nécessaire, évaluée Wagner adopta le plan d'un

la

pianiste

Cari

à

de

'

3oo,ooo ses

»

thalers

plus

zélés

Tausig, qui mettait en souscription mille

actions de 3oo thalers (1,1 25 francs), donnant le droit d'assister aux trois séries de représentations

d'action

tiers

certain

I.

de

de

donneraient

nombre de

la tétralogie, le

droit

à douze soirées en tout; des

d'assister

à

une

seule

série.

Un

ces parts de fondateurs étaient déjà souscrites lorsque

Richard Wagner, par M"" Judith Gautier. Le membre de la famille qui re'pondait au nom était un magnifique terre-neuve noir, auquel Wagner portait une affection toute pater-

Rus

avait d'ailleurs la passion des bêtes, des chiens en particulier, et l'on a souvent raconte composition des Maîtres Chanteurs fut arrûte'e assez longtemps par suite d'une morsure que lui avait faite à la main droite un misérable chien errant recueilli et soigné par 'Wagner à Zurich. La plaie était devenue assez douloureuse pour l'empêcher d'écrire, et comme il ne pouvait dicter sa musique, il fut réduit à une inaction qui dut terriblement l'impatienter, mais le malheureux chien malade n'en fut pas moins bien soigné. « Quand un chien a reçu une bonne éducation, dit le Wagner de Faust, il intéresse même un sage, u

nelle.

que

la

Il


RICHARD WAGNKR Tausig mourut, emporte par 10 juin de cette

plus, le le

la

même

typhoïde,

fièvre

année,

une

Mannheim; Texpérience,

à

dans toute l'Allemagne,

même

et

les

et

De

1871.

juillet

avait imafrinc

en avait fondé

il

prouva

aussitôt,

qu'il

lui-

y avait

au delà, quantité de gens prêts à

fournir leur part de travail et d'argent

pu verser

en

M. Emile Heckcl

système des associations wagnériennes,

même

207

qui n'auraient cependant pas

,

3oo thalers.

Alors un comité de

M.

patronage, présidé par

riche banquier de l'Allemagne du Sud,

Frédéric Feustel,

composé de

MM.

Adolphe Gross, Théodore Muncker, Emile Heckcl et Frédéric Schœn, donna l'impulsion la plus vive aux sociétés qui se formaient dans toute TAlleet

New- York,

niagne et ses colonies, puis à Saint-Pétersbourg, Varsovie,

Amsterdam, Bruxelles,

monde

enfin dans le les

Paris,

entier,

Stockholm,

pour provoquer des adhésions

moindres souscriptions en vue de

la

Les membres de ces associations, réunies sous son

à

tour,

le

Berlin,

nom

de Wagnerve-

au profit de l'œuvre, et

concerts composés de fragments de la tétralogie, à

Hambourg, Schwerin,

et recueillir

Cologne,

le

donnant des

à parcourir l'Allemagne,

se mettait

Londres,

représentation des Nibelungen.

rein, organisaient aussi des représentations

maître,

Milan,

(>aire,

le

Mannheim, Vienne,

etc.; assistant à

des banquets

et

prononçant des discours pour enflammer

11

ne s'agissait toujours, c'est important à noter, que de construire un

le zèle

des souscripteurs.

théâtre exprès pour y représenter trois fois la tétralogie. Alors est à son

apogée, et tout l'univers,

spectacle

merveilleux,

Wagner

s'agite

afin

de réaliser ses gigantesques projets.

La première pierre du Théâtre des Festivals fut posée en grande pompe par Richard Wagner, au haut de la colline de Bayrcuth, le 22 mai 1872, de façon que la naissance de ce monument concordât avec celle de son fondateur, le jour

même,

profond de

il

recevait un

mon cœur

je

à soixante-neuf ans de distance,

télégramme du

roi

Louis

plus

les

sincères.

:

«

Du

Salut

et

bénédiction à

la

les plus

et,

plus

vous exprime, cher ami, en ce jour d'une

haute portée pour toute l'Allemagne, mes félicitations et

II

si

chaudes

grande entreprise de

l'année prochaine. Je suis aujourd'hui, plus que jamais, en esprit avec vous. à

»

Près de deux mille musiciens

cette

cérémonie

compositeur,

qui

et

se

et

chanteurs étaient venus assister

avaient, de la sorte, encouragé flattait

de

les

illusions

du

pouvoir représenter sa tétralogie au

printemps de 1874.

Pour célébrer dignement ce grand l'ancien théâtre,

Richard

Wagner

si

coquet

et

si

joli,

dirigea l'exécution

jour,

on donna un concert dans

Margraves de Bayrcuth, où de sa marche impériale (Kaiserdes


RICHARD WAGNKR

2oS

de

marscli) et

Neuvième

arranq^éc

Syniplioiiic

de cors et trompettes à pistons dans

addition

la

à

passage du Scherzo,

le

trouvait que les instruments de bois ne suffisaient

il

supérieure de

à l'octave

sition

symphonie

le

etc.

ilùte,

«

Cette allait

premier exemple d'une grande

représentation dramatique

d'une

pas; transpo-

de lart national, qui

était, dit-il, la pierre d'assise idéale

donner au peuple allemand victorieux solennité scénique,

de

plusieurs traits

avec

guise,

sa

et

musicale

qui

Quelques jours après. M"'"' Wagner écrivait, « Notre fête est passée, et, en dépit d'un fort toujours à M™"^ Gautier mauvais temps, elle a été magnifique. Ce que Beethoven nous chantait fût la perfection

môme.

»

:

:

Tous

hommes deviennent

les

quelques

jours

Bayreuth,

à

frères

s'était

où de tous

coins

les

même

foi...

entière;

musiciens

il

n'en

même

«

demandait que trois cents I']t quand la fête

m'a

Il

pensée,

chanteurs de bonne volonté de l'Allemagne

et

plus

:

fut

de

finie,

quatre il

été

impossible de serrer

la

cents

rédigea une

sorte de proclamation à son peuple, en véritable souverain de ce :

sont

lustre à cette cérémonie, avait fait

s'étaient mis à ses ordres.

musical

ces

«

Wagner, pour donner un grand appel aux

monde

du

accourus nos amis, connus ou inconnus, ayant tous une

une

durant

réalisé

royaume

main, en leur disant

adieu, à chacun des membres de cette superbe réunion d'artistes qui,

dans ces heureux jours de mai, venant de maintes contrées lointaines, se sont et

il

écrit,

qui,

groupés autour âc moi

m'est également

difficile

])our

maintenant de leur adresser,

ce salut d'adieu. Je remercie

du nord

et

du sud, de

de Pesth jusqu'à Mannheim, noble solennité artistique.

célébrer notre grand Beethoven,

l'est et

ont

mes amis, chanteurs

même

par

et musiciens,

de l'ouest, de Berlin jusqu'à Vienne,

répondu à

mon

invitation

»

Fait, écrit et publié à Bayreuth, le 24

SIEGFRIED ET LE DRAGON ATTENUANT (Tiré de ScInilyC cl Millier à l'Anneau

I,

mai 1S72.

HEURE DU COMBAT.

du Nibelunf;,

iSS3.)

pour cette


CHAPl'l'RE XIU

ANNEAU DU NIBKl.UNG

L

moi

"losr

idùirrc

mes amis,

et

écrit fièrement

ma

mission de

la

et

BAYKEUTH

A

avons pu mener à bien

Wagner dans

en

rie,

iHyc),

qui

une aussi colossale entre-

Puis il insiste en développant sa pensée Jamais ime pareille œuvre ne s'était accomplie au milieu de plus grandes diflicultés et d'anxiétés plus

prise.

:

«

vives, en dépit de la plus

enfin

s'éleva

mesquine opposition, quand

Théâtre

le

idéal

à

On

Bayreuth.

y

voulut réunir tout ce qui pouvait être minutieusement ajouté parmi les plus

ressources de

précieuses

d'un grand

dramatique

festival

malgré toutes

pour

scène,

la

allemand,

représentation

de

parties de

mon Anneau du Nibelung dans

l'art

tôt,

la

:

par son triomphe,

que ma

une

il

oubliait

dans sa

lettre à

trois

fois

l'été

me

Orgueil

apparemment

qui,

renouvelée des quatre

qu

ce

propos de Rien{i

«

:

il

avait

Ma la

Enivré

»

écrit

dix

nature autant

du tra-

solitude

sens absolument impropre à toute entreprise extérieure.

légitime

bien

à

semblait annoncer retour

le

après

n'avaient pas désarmé

contre ils

:

et

Ses

lui.

de

difificultés

Wagner, provoqua un

ennemis,

surtout

les

Juifs,

furent exaspérés par la perspective de son

des

portèrent

lui

tant

»

Cette cérémonie du 22 mai 1S72, qui

succès définitif de Richard

oflFensif

triomphe

prendre,

tout

vaincues, d'obstacles surmontés.

prochain

solennité

de l'année 1S76.

destinée m'ont voué à la concentration et à

vail, et je

violent

pour

entraves, fut essentiellement conforme aux véritables

les

principes

ans plus

première célébration

la

de l'année, un médecin dont

le

nom

coups

indicjue

furieux.

assez la race,

Dès le

la

fin

ducteur

Puschmann, rendait publique une consultation que personne ne lui avait demandée et qui concluait à la folie, ni plus ni moins, de Richard Wagner. 11 proclamait qu'il avait fort admiré le Wagner de TannIiœuser et de Loliengrin,

comme

épuisée

depuis son

premiers symptômes de l'artiste avait

les

eu

eflbrts qu'il

mais que

le

la

la

force

créatrice du maître était

séjour à Munich, où s'étaient déclarés les folie.

A

dater de cette époque, assurait-il,

douloureux sentiment de son impuissance,

avait tentés pour réveiller

son

et tous

génie n'avaient abouti 27


RICHARD WAGNER

210

Ce docteur sans

qu'à des résultats désordonnés et incohérents.

pareil

assurait aussi qu'il avait reconnu deux signes diagnostiques de la folie en

Wagner

Richard

:

d'abord l'orgueil excessif et

qui avait éteint chez

malade

le

sentiment

le

de tout ce qu'il y avait délire de la persécution

d'élevé en dehors de lui, ensuite et surtout le

qui lui faisait découvrir

un Juif embusqué partout où ses productions

«

n'obtenaient pas le grand succès dont

nous sur ce propos révélateur

même

attaques, publiées

il

:

il

même

le

se croyait sûr...

Arrêtons-

»

remettre au jour d'aussi odieuses

fallait

par des journaux sérieux d'Allemagne, pour

montrer à quel degré de haine on en

Dans

manie des grandeurs

la

temps,

comme on

venu contre

était

annonçait que

rendre à Cologne et s'aventurer ainsi dans

le

camp de

le

lui.

maître ses

allait se

ennemis

les

plus acharnés, Ferdinand Hiller, qu'une vieille inimitié de race et d'école

aucun courage de

éloignait de lui, écrivit aigrement quil n'y avait

Wagner

part de

hœuser et qu'il

Lohengriu

et

y serait

comme

parti

le

une

à venir dans

fait

l'honneur de

me

de ce

partie

compose

qu'écrit,

et

Mais,

non plus que fait

j'ai

ajoutait-il,

me

majeure

la

M. Wagner, m'agace

entreprend

infiniment. Je dois cependant rappeler que

«

succès,

en adversaire et

traiter

proscrit en cette qualité, je n'ai garde de nier

la

Cologne, où Tann-

sûrement en triomphateur.

accueilli

me

comme

couramment avec un grand

jouaient

se

ville

connaître au public,

par d'excellentes exécutions, ses principales compositions de concert.

Wagner diriger une comme ses partisans,

Voir M. saires

d'un bâton à

paraît, n'était

de ce

chef

trait

de ses œuvres doit intéresser ses adverd'autant

d'orchestre

que

final,

et

plus

non de

Ferdinand

pas d'humeur à passer à Richard

se sert, à cet effet,

qu'il

prose allemande.

la

d'origine

Hiller,

Wagner

»

11

Israélite,

ses violentes attaques

contre les Juifs.

Cette levée de boucliers n"empêchait pas bâtir.

Mais

ne

il

suffisait

le

théâtre de Bayreuth de se

pas d'une première pierre

et,

malgré tout

le zèle

des disciples et des adhérents, les souscriptions n'arrivaient pas suffisantes et les ressources fournies

terminer

le

par

les

concerts avaient seulement permis de

gros oeuvre, en laissant tout à faire à l'intérieur. Sur les

3oo,ooo thalers que devaient fournir les mille

on avait assez promptemcnt réuni avaient aussitôt tarit

génie

commencé

tout à coup

de Wagner,

les

:

la le

;

le tiers

de

«

la

actions de patronage

somme,

et

mais, une fois ce chiffre atteint, la source

confiance semblait s'être perdue. Alors roi

»,

travaux

les

Louis

IJ,

vint encore à

son aide

:

il

le

bon

avança

200,000 thalers qui manquaient, sous condition de se récupérer sur vente future des actions. Le succès final de l'entreprise était donc assuré les traités pour les décors, la machinerie et les aménagements

la

:


RICHARD WAG NKR purent

intérieurs

exécutés;

être

21,

travaux

les

reçurent une

impulsion

nouvelle et les représentations furent définitivement fixées au printemps

de 1876.

Wagner, cependant, même après

cette détermination

du roi, pourune propagande active en faveur de Bayreuth. Au commencement de mars iSyS, il allait à Pesth et donnait en commun avec Liszt

suivait

profit de son théâtre il paraît même que le gendre traînaient après eux chacun sa cohorte d'admirateurs prompts à lutter de flatteries, d'hommages enthousiastes, et que celle de Liszt l'emporta haut la main, si bien que Wagner en

un grand concert au beau-père

:

et le

conçut quelque dépit et quitta brusquement

mander

jours après,

l'œuvre

Vienne,

était à

il

Bayreuth

de

journaux

la

non sans contreQuelques plusieurs concerts pour ville,

banquet qu'on devait donner en son honneur.

le

croc-en-jambe

le

dirigeait

il

voyait vivement

se

et

qu'il

reprocher par certains

lui-même à

donnait

ses

théories

en

dépeçant ses ouvrages, afin d'en produire des morceaux détachés dans les concerts.

«

La pénurie

couleur de l'excuser,

neur

d'argent,

disait-on

méchamment, sous

prêt pour l'échéance d'hon-

la nécessité d'être

à lui-même, pouvaient seules un démenti aussi formel. »

qu'il s'était fixée

s'infliger

A

de cette

la fin

même

année

iSyS,

Wagner

contraindre à

revenait à Vienne,

de surveiller une reprise de son opéra de Tannhœiiser, avec des

afin

modifications nouvelles pour l'Allemagne. D'une part, la

le

grande bacchanale

écrite à Paris

se comprenait fort bien, puisque ce

à sa

pour

morceau

avait introduit

était tout à fait

récente manière; mais, en outre,

plus

il

premier tableau, ce qui

le

il

conforme

avait réduit l'ouverture

aux proportions d'une simple introduction faisant corps avec la première scène de l'ouvrage, à laquelle elle se reliait par le développement

Venusberg la reprise du chant des pèlerins était donc supprimée, ainsi que le fameux trait des violons, répété plus de cent fois, qui avait provoqué de si violentes discussions.

symphonique

A

de

la fin

des

la

motifs

du

représentation,

:

Wagner,

qui

se trouvait dans

une loge

d'avant-scène, crut devoir répondre aux applaudissements par un petit discours zèle,

;

et

il

remercia

le

public

de son attitude,

termina par ces mots inattendus

:

«

Que

les le

artistes

de leur

succès continue,

mesure des talents qu'on a mis à ma disposition » Là-dessus, grand émoi dans le monde musical de Vienne, auquel

au moins dans

la

!

ces façons par trop superbes et dédaigneuses n'allaient guère, et refroi-

dissement sensible du public, déjà tout désorienté par cette mutilation d'une ouverture consacrée. On ne put jouer Taunhœiiser, ainsi remanié,

que deux

fois,

et,

quelques jours après, on se rejetait sur Loheugnn

:


RICHARD WAGNER

2,2

avait bien encore présidé à la mise en scène

Wagner

Vienne dès

le

sans

lendemain de la représentation,

la

première

jyjme

dans cette

Voggenhuber

^}g

Marke

fois

et

Kurwenal).

et

Le

de

Tristan

et

Brandt,

fois,

surveiller

exécutait pour

chanté par Niemann, par

ville et qui était

M""

qu'on

Iseiilt,

cette

allait

il

quittait

il

avoir,

adressé de speech à personne. Enfin, en mars 1S76, à Berlin la représentation

mais

;

par Betz

maître assistait

soirée

cette

à

Schmidt

et

roi

(le

solennelle,

dirigée

par

après

premier acte une chaleu-

reuse le

le

Eckert,

ovation

toucher

et

mais

;

plus

ce

recevait

qui

dut

encore que

les

bravos, c'est que l'empereur, pré-

avec

sent

toute

permis d'affecter à

l'entreprise

reuth

avait

la recette entière

de

colossale

mois encore,

cinq

:

cour,

la

Bayet

rêve allait devenir une réalité

Entre

temps,

Wagner

le '

!

avait

reçu d'au-delà de l'Atlantique une

proposition point

flatteuse,

en ce

combien

d'adhérents

rateurs

Monde

il '.

prètaiejit

avaient eu l'idée de

leur

montrait

qu'elle

d'admi-

et

à

États-Unis

célébrer,

de

la

en

s'ap-

1876,

proclamation

indépendance,

et,

pour

dignement ce centenaire, des partisans fanatiques de Richard demander de composer une Grande fcter

D'aprcs un croquis original.

Wagner Marche

de

au

comptait au Nouveau-

Les

l'anniversaire

UN COIN DU THEATRE DE BAYREUTH.

avantageuse

fort

de vue pécuniaire et bien

lui

de Fête qu'on pût jouer à l'ouverture de l'Exposition internatio-

Sur

le dessin ci-contre, il faut observer que la façade arrondie a été modifiée par la suite, ainsi expliqué plus loin. La partie haute du théâtre, correspondante à la scène, est ici trop élevée proportionnellement au reste de l'édifice; quant à la décoration du terre-plein en avant du théâtre avec balustrades de marbre, statues et jets d'eau, elle existait peut-être dans les projets sur le papier, mais 1.

qu'il est

on accède au théâtre par de simples rampes contournant un talus pjazonné comme on peut le voir sur le dessin de la page 2o5. Le petit croquis ajouté en haut représente le s^raffito qui se trouve au-dessus de la porte principale de la maison de Vk^agner, a Bayreuth il en est donné une reproduction plus grande k la page -i^-j. 2. Antérieurement, dès 1872, la ville de Chicago, le considérant un peu comme une bête curieuse, lui avait offert cinq cent mille francs pour venir diriger plusieurs de ses ouvrages; mais il avait décliné cette offre, en alléguant que la fondation du théâtre de Bayreuth absorbait t"us ses instants et

elle n'a et

pas été réalisée

:

planté de petits arbres,

:

lui interdisait

un

aussi long voyage.


D

mM ,

pliiil!!ï"Él!illillillll|l!Él


RICHARD WAGNER

214

nale de Philadelphie

:

ils

somme énorme de inespéré Wagner

offraient de la lui payer la

5,000 dollars, soit 25,ooo francs. Quel coup de fortune

!

accepta sans marchander et en donna aux Américains pour leur argent.

mai 1876, est une compobruyante, destinée à être entendue en plein

Cette marche, exécutée à Philadelphie sition très brillante et très

et

air

qui

éclater

fait

un

sion atteint à

effet

salles

les

thème yankee, présente un

le 10

de concert

début,

le

;

travail d'orchestration

sur un

bâti

superbe

et la conclu-

grandiose, par l'accouplement de ce motif popu-

avec

laire

chant de fête

le

imaginé par Wagner.

galamment

dé-

Il

au comité de fête

marche des dames

de Philadelphie,

avec une

dia

cette

épigraphe empruntée à Gœthe « Celui-là seul mé:

rite la liberté

qui tous

les

conquérir.

»

comme jours

Pour

la vie,

doit

5, 000

la

dol-

lars, elles auraient peut-être

aimé mieux danser,

les belles

dames américaines, avec ou sans citation de Gœthe'.

Wagner une il

belle

somme,

tout

E.

Entrées.

0.

Orchestre.

mieux. Mais

L.

Loges.

V.

Vestibules.

G.

Amphithéâtre.

S.

Scène.

e'té

intéressantes

:

«

le

pour

était il

le

sentait bien

bât le blessait, et plus

quand cette marche fut exécutée à Londres en 1877, il jugea bon de s'en expli-

exécutes.)

quer avec ses amis dans une causerie où

comme

tard,

(Les deux vomitoires indiqués en haut des gradins de l'iimpliithéàtre n'ont pas

et

était toujours pressé d'ar-

gent,

PLAN DU THEATRE DE BAVREUTH.

encaissé

avait

il

leur dit, entre autres choses

Je ne suis pas un musicien savant

;

je

n'ai

jamais eu

occasion de faire des recherches d'antiquaire et les périodes de transition I.

La vue ci-contre du théâtre de Bayreuth est très exacte pour Tarchitecture, et donne la plus juste ide'e de l'ensemble; mais que d'inexactitudes dans les

celle qui

c'est,

en

somme,

détails! D'abord,

l'auditoire est tout de fantaisie. Outre que les spectateurs n'étaient pas en tenue de soirée et qu'ils ne circulaient pas dans les rangs pendant le spectacle, il faisait presque nuit, pour obéir aux prescriptions de Wagner, et il aurait été bien impossible de distinguer tant de belles robes et de beaux uniformes.

De

plus, le vomitoire indiqué au milieu des gradins n'existe pas.

Sur la scène il faudrait, pour que vélum, d'un ton gris mat avec bandes verticales rouge et or, fût entièrement ouvert dans sa partie supérieure, afin de disparaître aux yeux du public, et qu'on ne vit pas d'instruments de cuivre dans l'excavation de l'orchestre, ceux-ci étant relégués sous la scène; ù leur place, il aurait

tout fût vrai, que

fallu dessiner le

le

chef d'orchestre, visible seulement pour

les

chanteurs.


Kmm^^wm-

^-

î^-'^îa^,.-


RICHARD WAGNER

2iG

m'intéressent médiocrement.

été

J"ai

tout droit de

Palestrina à Bach,

de Bach à Gkick et à Mozart, ou, si mieux vous aimez, les mêmes étapes, en remontant de Mozart à Palestrina.

me

personnellement de

nait

contenter de

maîtres,

tème

eu ses inconvénients,

ait

des héros,

la

cela

conve-

connaissance des principaux

peut

se

me

11

Que

de leurs créations capitales.

et

parcouru

j'ai

dans tous

;

ce sys-

mon

les cas,

musique en général... » Tout ce développement n'était que pour amener la conclusion suivante, essentielle à « N'étant point un musicien savant, je n'ai jamais pu écrire SCS yeux sur commande. Si un sujet ne m'intéresse pas et ne m'absorbe pas complètement, je suis incapable de noter vingt mesures qui vaillent la esprit n'a jamais été bourré de

:

peine d'être entendues.

»

de

devait

se

11

dire

le

:

on en croira ce

qu'on voudra.

Après une longue période d'incubation pendant laquelle

maître

le

avait choisi par toute l'Allemagne les artistes les plus propres à personnifier ses

dieux et ses héros', après deux mois de répétitions prépara-

toires,

devint

il

séries de i3

que

évident

la

première

représentation

rAinieau du Nibelung pourrait avoir

au 16 août

lieu

deux autres exécutions de

1876;

la

des quatre

définitivement du tétralogie

entière

du 27 au 3o. Dès le 6 du mois, le roi de Bavière arrivait à Bayreuth pour suivre les répétitions générales. seraient données du 20 au

11

si

mauvaise

Alors,

il

et

d'abord être seul

entendait

entrer tmit

2j'

qu'on le

supplia

le

monde

et

se produisit une

;

mais l'acoustique, dans de

s'attendrir

25

soit

il

comme

cohue énorme

dut requérir

et l'on

francs,

l'idée

vide,

répondit de

de faire absolument

de rétablir un peu d'ordre; puis on eut 20 marks,

:

le

s'il

était

laisser

n'était pas là. la police afin

lumineuse de

faire

payer

pour assister aux répétitions suivantes, ce

qui produisit une recette supplémentaire de 20,000 marks.

Les répétitions avaient ravi

que

la petite ville

de tous

les

autres

Louis

11.

Le

12 août au soir, alors

franconienne regorgeait de partisans fanatiques venus

pays, ou de simples curieux attirés par ce que l'entreprise

offrait d'inusité,

d'orchestre,

le roi

était

personnes

le

contingent principal, outre soixante-treize chefs

fourni

du

par des

monde

intendants,

théâtral,

un

directeurs, train

acteurs

ou

amenait

spécial

Les journaux colportaient mcnic à ce propos toutes sortes de mauvais bruits. On assurait que qu'il honorait de son choix, de faire pendant deux ans toutes les répétitions nécessaires, et de concourir enfin aux représentations solennelles sans rien toucher, par dévouement pour sa personne et pour ses œuvres. On ajoutait que certains artistes, grassement rentes d'ailleurs. M"° Oppenheimer, MM. Niemann, Betz et Scaria, avaient consenti, mais que d'autres, n'ayant pas, comme ceux-ci, de gros appointements a Vienne ou à Berlin, s'étaient vus contraints de refuser, et que M"'" Wagner, à ce propos, écrivait des lettres indignées où elle fulminait contre Ici race égoïste des comédiens, manquant de tout essor idéal. Tous ces méchants bruits tendaient à rendre la tache encore plus difficile au maitre, en soulevant des conflits d'amour-propre ou d'intérêts, en excitant la susceptibilité des artistes, etc. Et pourtant rien de tout cela ne devait aboutir 1.

Wagner demandait aux chanteurs

!


RE ! KÊ SENTA T ION Alberich

et

les

Filles

DE

«

l'aNNEAU DU NIBELUNG

du Rhin, scène première de l'Or du Rhin.

»

A

UAYREUTH, EN 1876.

D'après un dessin de M. Knul Ekwall.

28


.

RICHARD WAGNER

3l8

rempercur d'Allemagne, que le comte de Holnstein alla recevoir et complimenter au nom du roi l'empereur serra la main au comte, au bouromestre de Bayreuth, aux autres personnages ofliciels et même à Richard Wagner qui se trouvait là comme par hasard. Et tout aussitôt Bavière quitta Bayreuth, offensé, dit-on, que l'empereur le roi de ;

neùt pas accepté son invitation pour les répétitions générales ou tout simplement parce qu'il préférait ne pas se rencontrer avec le vieux souverain,

par orgueil

privait ainsi d'assister

se

il

:

première série des représentations et se réservait de revenir plus

à la

tard

ou

par rancune

'

D'ailleurs

Richard

il

manquait pas de

ne

Wagner

ayant

sollicité

couronnées à ce

tètes

festival,

des adhésions auprès de tous les prin-

d'Allemagne

cipicules

auprès des

et

souverains étrangers, sans oublier vice-roi

Aziz.

d'Egypte

Dans

et le sultan

Abd-ul-

érigée par

salle

la

le

les

architectes de Bayreuth sur les plans

de l'architecte de Leipzig, Bruckwald, et qui se rapprochait autant

sible

de

l'amphithéâtre

aux

répondre

que pos-

grec

pour

néo-helléniques

idées

de Wagner, une grande loge d'hon-

neur [Fursten-Gallerie) était réservée

aux souverains APPAREIL NATATOIRE DES FILLES

L>U

et princes

Le théâtre comprend

RHIS.

quarante-cinq (chaque fauteuil

en

est

amphithéâtre jusqu'à de

la salle,

princes

la

canne tressée) dont loge des princes,

se

subdivise

neuf loges

en

Au-dessus de

places.

Ni

loges

colonnes dans et

la

et

au public

salle entière

latérales,

le style

nu des murs,

mettent

;

de

la

ni

se

la la

largeur loge des

trouve une galerie destinée aux petites

et

comprend donc environ quinze cents

gradins sur

les

côtés,

rien

que des

Renaissance pour rompre l'aspect monotone

de larges baies et

cent

parquet

rangées s'élèvent en

les

poavant contenir environ deux cents personnes entrées de faveur

treize

de

occupant toute

à l'extrémité opposée à la scène.

qui

places

convoqués.

aux musiciens

(seize

entrées

en tout) qui per-

de

de l'orchestre

s'écouler

en

I. Au moment de la tétralogie, ensuite pour Parsifal, à chaque reprise enfin des représentations de Bayreuth, il s'est publie', ainsi qu'on le fait dans les villes d'eaux, une liste quotidienne des étrangers, avec l'indication de leur domicile ordinaire et leur adresse à Bayreuth cela se criait en ville et se trouvait chez tous les libraires. Ces listes d'étrangers, malgré bien des omissions et des fautes dans l'orthographe des noms, sont curieuses à feuilleter et fournissent des données intéressantes sur le mouvement toujours croissant d»s voyageurs wagnérisants à Bayreuth. :


RICHARD WACJNER moins dans

de

219

deux minutes. Peu ou point de dorures, pas une draperie pas de lustre ni de candélabres en haut, quelques globes

la salle,

;

dépolis qui donnent juste la clarté nécessaire pour que les

spectateurs

puissent gagner leurs places et qu'on baisse absolument quand tacle

par

commence. Pas de rideau rouge milieu

le

;

pas de trou du

;

un

salle; enfin suppression radicale de

tout

l'eliim grisâtre

pas de rampe

souffleur,

qui

le

spec-

souvrc

visible

de

!a

ce qui rappelle la convention

du théâtre, afin de plonger le spectateur dans l'illusion la plus complète. Après l'empereur d'Allemagne, occupant la place d'honneur dans la loge réservée aux spectateurs princiers,

LA

MANŒUVRE

DES VILLES DU

on pouvait voir l'empereur

et

RHIN, VUE DU FOND DE LA SCENh'.

l'impératrice du Brésil, le grand-duc et la grande-duchesse de Rade, le

duc

de

Mecklembourg-Schwerin,

le

duc

d'Anhalt-Dessau,

le

prince

I. Ce petit dessin technique fait bien saisir par quel ingénieux mécanisme on obtenait ce merveilleux tableau des Filles du Rhin chantant en nageant, qu'on avait déclaré d'avance irréalisable. Deux hommes faisaient rouler en tous sens l'appareil dans lequel les chanteuses étaient maintenues par les jambes, tandis qu'au moyen d'un contrepoids, un troisième mécanicien faisait monter ou descendre, s'incliner ou se relever l'appareil lui-même, et donnait aux ondines l'air de (lotter. Toute cette manœuvre s'exécutait en contre-bas de la scène, de façon que l'appareil était caché aux spectateurs par les amas de rochers figurant le fond du fleuve; Albcrich, se présentant de dos aux spectateurs, n'était aussi vu qu'à mi-corps et paraissait sortir de ces rochers; de plus, toute l'ouverture de la scène

remplie par une gaze verdàtre, derrière laquelle se mouvaient tous les personnages, comme dans même, et qui atténuait sensiblement ce que leurs exercices auraient pu avoir d'un peu raide. Le souffleur, comme on peut voir, s'asseyait tout près des chanteuses pour mieux être à leur portée, et un jet de lumière, parti d'en bas, allait frapper l'anneau placé au haut du rocher central; mais, à force d'habileté et d'adresse à suivre les mouvements des objets éclairés, ces objets paraissaient produire eux-mêmes la lumière, au lieu de la recevoir. était

l'eau


RICHARD WAGNER Georo-es de Prusse,

grand-duc

le

de Wagner,

décidé

partisan

Liszt,

enfin

de

qui

se

Saxe-Weimar, ami de faisait donner deux ans

auparavant des représentations modèles de Tristan et Tseult, dirigées compositeur en renom lui-même, Edouard capclliueister, \rdr son Lasscn'. Par malheur, l'empereur d'Allemagne, assez peu sensible à la musique et qui s'était laissé persuader qu'il fallait assister à cette

(randc manifestation de l'art national allemand, n'y put durer et quitta ce que Richard 'Wagner n'était pas la partie après le second jour, homme à jamais pardonner. Le vice-roi d'Egypte et le sultan n'étaient

bon d'ajouter qu'entre temps ce dernier avait subitement perdu son trône et passé, non sans mystère, de vie à trépas .

pas venus

:

est

il

La première pensée de l'Annean du Nibcliing, dont le sujet

li.Il^,^kM

emprunté

est

aux

anciennes

légendes Scandinaves

germaniques des Eddas, des Nibeluugen

et

de Giidrun, remonte

et

à l'année 184S. C'est alors

Wagner,

pendant

d'été à la

campagne,

le

poème de

séjour

avait écrit

Mort de

la

plus

qui devint

fricd,

un

que

Sici^-

tard

le

Crépuscule des Dieux; mais à

époque,

cette

nullement à en \V A

GN fR

T IM

A N

(1 IJ

Duprcs un

T AY

cioqilis

IC

C

gie.

SES AMIS.

Loliengriii et la

inij;ili;il.

de courage,

il

poser un Wieland

aux Nibcluugeu a

tidii

A

1.

14 juin

un

caressa

:

le le

moment, nous

furgeruu plan

;

mais

ces

ruprcscnlalioiis 1l-s

rôles

ainsi

vu,

le

abandonna

succès

le

de

chaude amitié rendu

eurent

lui

trilo-

le

de com-

projet

cette idée et revint

général en est indiqué dans sa Cuininujiica-

de Tristan

étaient

l'avons

il

mes amis, parue en novembre

iS;4,

Liszt

songeait

une

faire

que

Après

ne

il

et

Iseiill

distfihués

:

à

iiS5i,

Weimar, dont

Ti'istan

et

Iseult,

retraçait

il

la

M.

premièi-c et

les

avait

M"" NO^l

;

princi-

eu

lieu

le

Brangœne,

MM. Milde el BraiidstctUner. dut niettfc un jiiur d'intervalle entre la Wilkyric et Siegfried par suite mais, aux deux autres séries, les quatre d'une iiulisposiiiim de M. Betz, chargé du rnlc de W'otan parties se jouèrent de suite en quatre jours. Les représentations cuninienv-aient d'habitude à quatre heures, saut pour le Rheingold, qui, durant deux heures un quart, sans arrêt, commençait seulement à sept heures un q'iari. Dans la Valkvrie, il y avait un entr'acte d'une heure entre le premier acte et le deuxième acte. Pour tontes les pièces, à tous les commencenieiils d'acte, au lieu de frapper les M"" Diitter; Kurweiial 2.

A

la

et

MarUe,

prcniièie série,

<in

;

trois

de

coups traditionnels, on lançait une courte sonnerie de tronipeltes d'une des galeries extérieures

la

même

sonnerie de l'intérieur. salle,

reproduisant certains

motifs

caractéristiques de

ri.eu\re

et

qui

s'entendait


RICHARD WAGNF.R

22

1

paux cvcncmcnts de sa vie et les motifs (]ui l'avaient conduit à cotte conception du drame musical. 11 comptait, disait-il, exécuter la donnée du mythe en trois drames complets, précédés d'un grand prolooue ;

chacun de ces

drames, bien que formant un

tout

ne devait

distinct,

rzL.

pas devenir un "

morceau de au

pertoire,

sens

absolu du mot contraire,

il

ré-

;

au des

exigeait

conditions toutes différentes Al.l'.lCRICH

F,T

I.RS

FU. LES DU

Dessin original Je M. K. de

pour

d'exécution

cycle et entendait

RHIN.

trois

I.iplKirt.

logue

ouvrages fussent

et

but de cette tentative atteint

s'il

arrivait,

en

muniquer sinon l'intelligence critique, au moins œuvre, aux gens qui se seraient réunis pour exécution supplémentaire

lui

paraîtrait

que le

les

pro-

représentés

dans des fêtes solennelles durant quatre jours consécutifs. De plus, et cette affirmation n'est pas sans importance, le

son

il

jugerait

quatie jours, à comle

sentiment de son et

l'entendre,

radicalement

inutile.

«

toute

Tel est


RICHARD WAGNER

222

mon

mes amis doivent

plan, concluait-il, et

peut pas se

dans

réaliser

mettent bien cette idée dans

tête et qu'ils

la

dont ce projet devrait être exécuté, leur

donne donc

qu'une

plus

parlerai

temps

le

et

;

se

s'ils

réfléchissent à la façon

pourront beaucoup m'y aider. Je

ils

loisir

le

l'ouvrage

fois

voir dès à présent qu'il ne

du théâtre actuel

conditions

les

penser, car

d'y

achevé'.

»

En

ne leur en

je

i853,

il

avait

fait

imprimer pour son particulier son poème entièrement fini et l'avait donné seulement à quelques amis; il en envoyait, par exemple, un exemplaire à Schopenhauer, qui le couvrait aussitôt de notes littéraires, philologiques et philosophiques; enfin, en i863,

l'Anneau du Nibelung propos ce

était

d'appel désespéré

cri

comme une voix d'en haut à Wagner, par sur

la

mis en vente :

Wagner

et

Ce prince

l'oreille

poème jetait

de

définitif

dans l'avant-

se trouvera-t-il? qui retentit

d'un prince de dix-huit ans.

poème des Nibelungen,

ce

le

achevait de

faire

revivre

scène les traditions historiques, poétiques, légendaires et

môme

tenu au Moyen-

mythiques du peuple allemand. Jusque-là, il s'en était Age, représentant dans Tannhœuser, dans Lohengrin, dans Tristan Iseult la vie chevaleresque et féodale, dans les Maîtres Chanteurs vie municipale et bourgeoise pour écrire l'Anneau du Nibelung^ il ;

et

la

a

remonté jusqu'aux plus anciennes traditions germaniques, jusqu'à l'époque héroïque

et

même

mythologique.

légende des Nibelungen,

du x\f

où déjà

siècle,

christianisme,

adouci les

les

plus

primitives, la

composition

dans

s'est

pas, en effet, arrêté à la

trouve dans

le

poème allemand

anciens dieux ont disparu pour faire place au

idées

les

ne

telle qu'elle se

monde chevaleresque et chrétien ont mœurs il l'a cherchée dans ses formes Eddas et les Sagas islandaises, où l'on

du

rudesse des vieilles

la

retrouve

Il

les

;

création spontanée de l'imagination populaire, sans aucune littéraire,

et

les

mœurs Wagner

barbares se

donnent

cours

donc placé en pleine mythologie, en plein surnaturel, tout en donnant à ses personnages un développement moral supérieur à celui des héros des temps barbares, en en faisant dès lors des personnages plus complets, plus humains,

dans leur

et

grandiose sauvagerie.

s'est

en ajoutant aux péripéties du drame un sens philosophique que

légende ne renfermait

événements

qu'en

puissance.

comme aux personnages

Pour donner, en

cette

effet,

aux

haute portée symbolique,

tout en leur conservant leur couleur locale et leur caractère héroïque, fallait

absolument

c'est ce

les

placer

la

dans un cadre à demi fantastique

il

et

que l'auteur a très justement compris'.

1. Les plus dévoues et les plus actifs nmis de l'auteur, à cette époc(iie, étaient Th. Uhlig, Franz Brendcl, Peter Cornélius, Schnorr de Carolsfcld, Cari Tausig, M"" de MuchanolT, etc., etc. 2. G. Monod, l'Anneau du Nibelun^;, étude dans le Courrier Uttcraire (lo octobre 187G).




RICHARD WAGNKR

223

Aux temps Icgcndaires où Taction se passe, trois races peuplaient le monde les Nains [Nibeliingen) dans les profondeurs de la terre, les :

Géants (Riesen) sur

Tous

ciel.

vivent

les entrailles

emblème de de

et

précisément

c'est

lutte

est

prochaine, et

de

l'or

jusque-là enfoui

et

les

Nains

se le dispute-

Wagner

de ces trois races que

lutte

voulu dramatiser dans sa tétralogie. possession des Dieux, et leur maître

la

des fleuves, sera cause de

le lit

Géants

les

la

la

puissance,

la

ou dans

la terre

tous les malheurs. Les Dieux, ront,

mais

encore en paix,

possession de Tor,

dans

surface du globe, et les Dieux (Gœtter) dans le

la

Au début du drame, Tor à tous, Wotan (Odin), a

est

en

a la

confié à

du Rhin ce trésor d'autant plus précieux que la la toute-puissance appartiendra à qui saura forger un anneau avec cet or et maudira l'amour en renonçant pour toujours aux séductions de la volupté. garde de

trois filles

Le chef des Nains, Alberich, conditions

requises,

des trois sœurs. Cependant

magnifique palais pour

d'accomplir leur œuvre et qui déesse de

Freia, celle

cjui

par sa

les

fait

parole,

la

le

a

disparaît aux

et

l'or

Wotan

Dieux,

les

commandé

la

cris

désespérés d'un

construction

Walhalla, aux Géants qui viennent

réclament pour salaire qu'on leur

jeunesse. Les Dieux ne

éternellement

va pour livrer

lorsque ceux-ci, enflammés

remplit les

qui a surpris ce secret,

s'empare de

jeunes

et

forts,

mais Wotan, engagé

déesse aux géants

la

Fasolt et Fafner,

par les récits de Loge, dieu de

du feu, consentent à abandonner Freia des Nibelungen; par prudence

si

on leur

emmènent

ils

livre

veulent pas se séparer de

la

la

ruse et

tout le trésor

livre

déesse en otage, et tout

aussitôt les dieux se sentent affaiblir et vieillir. Alors

Wotan,

suivi

Loge, descend au Nibelheim pour s'emparer du trésor qu'Alberich nain vient de ravir aux

du Rhin

filles

donné

et qui lui a

le

de le

souverain

pouvoir sur tous ceux de sa race.

Ce

dernier, confiant en sa force, montre orgueilleusement ses talents

et ses trésors

rend invisible

aux deux visiteurs, entre autres un casque magique qui le

guerrier qui

porte, et, pour prouver

le

son

dire,

il

métamorphose en serpent; l'astucieux Loge lui tend un piège en lui demandant s'il pourrait se changer en crapaud; Alberich se transforme; aussitôt Wotan le maintient avec son pied. Loge s'empare disparait puis se

du casque magique, au

et tous

deux, ayant garrotté Alberich, l'emmènent

royaume des Dieux. Une

obéir;

il

fait

fois

apporter tous les

Alberich

prisonnier,

trésors

du

Nibelheim

n'a

arrache jusqu'à l'anneau

magique

et Alberich,

que

les

Wotan

lui

pour

Dieux puissent retrouver leur jeunesse en rachetant Freia;

qu'à

plus

furieux, lance cet ana-

thème « En maudissant, j'ai forgé cet anneau qu il soit à jamais maudit dans le monde et donne désormais la mort à son maître » :

;

!


RICHARD WAGNER

224

Wocan, que mais si

les

scrupules n'embarrassent guère,

les

Géants, malgré tout

l'anneau ne

leur

est

remis

avoir consulté la prophétesse

Dieux.

A

et

amoncelé, refusent de rendre Freia

Wotan

s'accomplit

:

de

terre

la

touché l'anneau que

Fasolt et

non sans

forcé de céder,

est

Erda, déesse

peine les Géants ont-ils

d'Alberich

diction

l'or

donc l'anneau;

a

Fafner,

battent

tue Fasolt.

dans

le

la

terrible pré-

deux

les

pour

mère des

et

frères,

l'avoir,

monde

et

Fafner

et

Le meurtre

est entré

ce crime re-

douloureusement

tentit

se

dans

la

conscience de Wotan. Mais P'reia

avec

reste !|

reconquis

la

Dieux

les

jeunesse,

ont

ils

;

ont vu

ils

sur un coup de Donner, dieu du tonnerre, un

leur palais bâti

arc-en-ciel

:

à travers

brille

les

cieux purifiés et sert de chemin

triomphal aux Dieux pour entrer

dans

tandis que du

le 'Walhalla,

fond du fleuve s'élève désolé

des

le

chant

nymphes du

Rhin

dépossédées de leur trésor. Tel prologue de

est le

intitulé

la tétralogie,

POr du

Rhcingvld ou

Rhin.

D'importants sont

accomplis

logue lorsque

depuis

commence

première

hyrie,

événements

partie

se

le

pro-

la

Val-

de

la

La prophétesse Erda, consultée de nouveau par Wotan, tétralogie.

WAGN f.iibaiu

rcpcior à lîctz

i; 1<

lu

lole de Wotiin.

mortelle

il

naîtrait

lui

a prédit la fin prochaine des

elle Dieux que de ses

lui

un héros destiné à régénérer

le

D'jprls un Liuquib original.

;

a aussi

amours

dévoilé

avec

monde

une

par ses

des Nibelungen, devenu la proie du géant Fafner. Des amours de Wotan avec une femme de la terre sont nés deux jumeaux la mère a été tuée; la fille, Sieglinde, prisonnière, est devenue par force l'épouse et l'esclave du chasseur Hunding; le fils, Siegmund, court les aventures; les deux jeunes gens ne se sont

exploits, à reconquérir le trésor

:

jamais revus depuis lenfance et ne se connaissent pas. Mais, au

moment


29

2 o

-u

I

O

3

.£

"5


RICHARD WAGNER

226

même

du mariaoe de Sieglinde, Wotan

une lourde épée au

tant

arme

assurerait

la

apparu à sa

est

flanc d'un frêne,

victoire

lui

il

riiommc assez

à

Tarbre et que celui-là délivrerait

Sieglinde.

et,

plan-

annonce que cette

a

fort

Elle

fille

pour Tarracher de

attend

toujours

son

libérateur.

Au

début de

lambeaux accueille

homme

la plus vive.

les lois

pendant

la

A

malheurs, sentent poindre en leur cœur ce

moment

Hunding

arrive

qui, trouvant

provoque au combat pour le lende Thospitalité voulant qu'il lui donne asile au moins

l'ennemi de sa race

demain,

ignorant que c'est son frère, et tous

soigne,

le

racontant leurs

se

sympathie

accourt, blessé, les vêtements en

Siegmund qui fuit les coups de ses ennemis et que course amènent dans la demeure de sa sœur. Sieglinde

fugitif et

le

deux,

les la

c'est

:

hasards de sa

les

un

la pièce,

nuit.

II

à

son foyer,

sort,

le

emmenant

Sieglinde; mais celle-ci quitte la

couche de l'époux endormi, vient retrouver Siegmund

et se laisse aller

Siegmund, brûlant d'une égale ardeur, bondit vers le frêne et d'un suprême effort en arrache l'épée qu'il baptise aussitôt du triste nom de Nothiing (détresse), en souvenir de « Je te reconnais, s'écrie Sieglinde, sa vie passée. A ce coup d'éclat tu es Siegmund, le frère bien-aimé que mes rêves appelaient, je » Et Siegmund, fou d'amour « Tu l'as dit, la sœur et t'appartiens » Les deux amants s'enfuient et l'amante, je les retrouve à la fois Hunding se lance à leur poursuite en mari trompé, mais furieux. Au deuxième acte, grand conseil des Dieux assemblés dans leur palais Wotan, bien disposé pour son fils Siegmund, veut le défendre dans sa lutte contre Hunding. Et parmi les neuf filles qu'il a eues de à tous les élans de sa passion;

:

:

!

!

:

la

déesse

Erda,

les

Valkyries,

les

neuf vierges guerrières qui sou-

tiennent les héros dans les combats et les

au 'Walhalla, et lui

lui la

commande de descendre

dans son d'avis

appelle à

il

emportent après leur mort

plus vaillante et la plus belle, Brunehild, sur la terre afin de protéger

combat sinoulier contre Hunding-.

sur les

remontrances

Mais

il

Siegmund

change

de son épouse légitime Fricka

bientôt (Junon),

indignée du sacrilège commis par Siegmund et de sa lâche fuite devant

Hunding. C'est décidé, Siegmund périra qui veillera à l'exécution de cet arrêt.

par

la

noblesse de

combat, coups

soudain dans

de Wotan,

par Hunding la

Elle se laisse

à

elle

Siegmund.

pourtant toucher fort

du

pare avec son bouclier

les

l'amour du jeune héros

infidèle à l'ordre

portés

et c'est Brunehild, la Valkyrie,

et,

Mais

dans

le

plus

Wotan, apparaissant

nuée, brise de sa lance toute-puissante l'épée de Sieg-

mund, qui tombe mortellement frappé par Hunding. Brunehild, de plus en plus rebelle aux ordres paternels, s'empare


RICHARD WAGNER

227

des tronçons de l'épée et s'enfuit en entraînant Sieçlinde évanouie, elle

du Brunhildcnstein. Là, Sie-

s'en va retrouver ses soeurs sur les rochers

mais

glinde veut mourir,

héros qui naîtra

d'elle.

Brunehild

Sieglinde, alors, s'enl'uit sur

emportant l'épée brisée,

nehild,

commande de

lui

pour

vivre

le

cheval de Bru-

le

Valkyric reste exposée au cour-

et la

roux de son père. Celui-ci résiste aux supplications des sœurs de

coupable il

la

pour

et,

punir d'avoir enfreint ses ordres, tout

la

la

ému lui-même,

déclare déchue de sa qualité de Valkyrie et destinée à subir l'amour

comme une

simple mortelle

conquise que par un

:

homme

père l'endort d'un baiser et

seulement de ne pouvoir être

elle obtient

n'ayant jamais connu la

peur; alors son

la

condamne à demeurer

ainsi sur la

mon-

tagne, endormie, entourée de flammes inextinguibles, jusqu'au jour où le

héros annoncé par Erda, surgissant enfin, viendra

Ce

héros, ce sera Siegfried ou Sigurd,

glinde

et

Après

les

dont

de Wotan,

petit-fils

amours de

Mime

l'astucieux

capable

de

par

Fafner;

après

quoi,

Siegfried,

Siegfried,

Wotan

Mime, aura

lui.

était seul fait

bient(')t

de l'égorger pour

et

lui

ravir

aura conquis. Mais, pour occire

qu'il

le

il faut une épée redoutable entre toutes Mime en forge pluque Siegfried brise comme des fétus; mais celui-ci parvient à

dragon, sieurs

:

forger une

avec les tronçons de l'épée de Siegmund,

invincible

Mime

que Sieglinde expirante avait confiée à part

Siegfried

à

la

s'assied rêveur à l'ombre lui font

;

même temps

moment

au

mais,

d'un

en

que

l'enfant.

du souverain trésor, à la recherche

conquête

de son redoutable ennemi

tilleul,

écoute

(i'attaquer

les bruits

de

Fafner,

il

la forêt qui

oublier Fafner et s'essaie à imiter le chant des oiseaux; puis

s'éveille enfin

A

neveu.

a vite compris que ce descendant de

tuer

Brunehild.

se développer la force et le courage de

casque magique et l'anneau

s'en

à

de

géant Fafner, transformé en

le

de l'endormir d'un sommeil léthargique le

neveu

vie à sa mère, est élevé par le nain songe uniquement à reconquérir le trésor

toujours gardé

En voyant

dragon.

par conséquent

la

frère d'Alberich, qui

des Nibelungen,

l'éveiller.

de Siegmund et de Sie-

frère à sœur, ceux de tante

naissance a coûté

la

Mime,

tîls

il

de ce doux rêve et sonne une fanfare sur son cor d'argent.

dragon apparaît; Siegfried le provoque et le transperce de son épée. Quelques gouttes de sang du monstre ont ce bruyant appel,

jailli

sur

lèvres,

oiseaux.

main du vainqueur.

la

et

le

aussitôt,

L'un d'eux

o

merveille révèle

lui

présence du trésor envie dans trésor.

Mais,

l'amour de

la

aussitôt,

le

plus belle

les

même

porte involontairement à

ses

comprend le clair langage des méchants projets de Mime et la

il

!

la

la

Il

caverne

:

il

tue

oiseau jaseur

Mime éveille

des femmes et s'ollVe à

le

et conquiert le

en

son

cœur

guider vers l'en-


RICHARD WAGNER droit où Brunehild est retenue prisonnière; Siegfried vole à ce nouvel exploit.

A

ce coup

court

pour

monde en voyageur inconnu,

le

de sa divinité

las

craint

que

héros

le

qui par-

et

qu'il a suscité

Dieux ne cause leur perte définitive; il évoque encore forcer à lui révéler l'avenir; mais Erda ne peut plus

salut des

le

Erda

Wotan, déjà

inattendu,

et

veut

rien dire, et

la

Wotan,

irrité,

s'opposer en personne à

la

replonge en un sommeil éternel.

la

marche triomphale de Siegfried de

bois

de

répée

quelle

même

entre les

mund,

et

le

mais sa lance

;

sous les

brise

se

a

coups

brisée

elle-

mains de Sieg-

Siegfried,

franchissant

brasier, arrive auprès de

nehild,

la

réveille

comme Wotan Aussit(')t

la

veut

Il

Bru-

avec un baiser,

endormie.

l'avait

du

vierge

Walhalla

et son libérateur se sentent saisis

au cœur d'un délicieux amour Tun

pour l'autre passion nehild

;

:

et

l'expriment

avec

Siegfried a délivré Bru-

de par

les lois

de

des-

la

tinée, elle doit être à lui.

La dernière catastrophe

la

mythologique des UN KEVK

IiE

RICHARD

\V

.\

G NER

Freia (\'cnus) recueillera la pluie d'or. (Giiulz. l)cr Floli. de

Vienne, 20 août

il

trouve attablés et

buvant

le

II

monde

vieux fin

d'oi!i

le

des dieux titre

:

le

nous

ramène d'abord sur terre. Siegfried abandonne Brunehild pour accomplir de nouveaux exploits à

monde, et comme gage de sa travers le

1^7(3.)

magique conquis sur Fafner.

du et la

Crépuscule des Dieux,

.

rcmel son tjiincrrc et fait soumission, au nom de l'ancien Olympe, à Wotan, sous les traits de Richard Wagner, qui va pouvoir e'tourdir le monde à son tour," tandis que .lupitcr, cscoriJ Ae. X'c'nus,

dame

Eddas

partie, qui retrace

il

foi,

laisse,

lui

l'anneau

arrive au palais des Gibichungen, iirince

Gunther,

sa

sœur Gutrune

où et

mais demi-frère Hauen, tous trois fils de la reine Criemhild Gunther et Gutrune sont les enfants légitimes du roi Gibich, tandis que Hagen, fds adultérin de la reine et du nain Miijrich, a hérité de son

ce

;

dernier toutes les

haines,

toutes

les

perfidies,

tous

les

instincts

Hagen, sachant par son père que Siegfried possède actuelimagine de le perdre en le rendant amoureux de (jutrune et en inspirant à Gunther de l'amour pour Brunehild. Dans criminels.

lement

l'anneau,


)

RICHARD WAGNER cette vue,

Gutrune,

imagine de

il

229

un breuvage d'oubli par

lairc servir à Siegfried

aussitôt pris de pas-

et Siegfried,

sœur de Gunther, jure à celui-ci amener Brunchild, afin de conquérir

sion pour la

de

lui

sa sœur.

Que Elle

Brunehild pendant ce temps-là?

fait

une de ses sœurs envoyée par

reçoit

Wotan pour filles

rendre

de

conseiller

lui

du Rhin Tanneau magique auquel

attaché

des Dieu.x

le salut

en dépositaire fidèle

Tout à coup, ayant pris tarnhelm, se servait

:

si

anneau

méconnaissable,

ther.

Far

grâce

au RICHARD WAGNER, PAR MARS.

casque enchanté dont Alberich

maladroitement naguère

1

refuse,

elle

de Gunther,

lui

11-

,

et

est

elle attend Siegfried.

celui-ci parait,

l'aspect le

mais

;

pare violemment de Brunehild, 1

au.\

;

s'em-

il

/'

'

l'effet

du

philtre,

Gun-

reconnaît vrai

l'anneau

Siegfried,

la

Brunehild,

devine

ainsi

il

assourdit les uns,

raccorde;

il

assomme

mon

'

du

doigt

art, vous aurez encombrant, je

l'admets;

':—'

s-->-'^-

forme de Siegfried, "

magique au

art est

je

tout simpie-

est

.

unie à Gunther sous

Mon

""'"'

'

oubliée, à ce point que, lorsque

vous voulez un

art!

'" '"'^"' i'*^" conviens; ii d'un emploi coûteux, je le veux bien encore; mais il émane de mon

Ta totalement

il

Public idolâtre,

Si

un

arrache

entraîne pour la livrer a

art

un cour,

prene....

!

,.,„„,„.,/ .„„„,„„,,

^cnembre

,,

1S76.)

trahison

la

dont

s'est

il

des

cable glants,

et

absolument rien du

Brunchild, fureur

et l'ac-

plus

les

insensible

reste

il

rappelle

rendu coupable

reproches

alors,

san-

ne

se

passé.

dans un accès de

jalouse et plutôt

que -de voir

Gutrune unie à Siegfried, se joint à Gunther et à Hagen pour comploter la mort de son infidèle amant.

On à

le

pendant

tuera

laquelle

ses

ennemis

une chasse convient

le

par honneur. Le rendez-vous est aux

bords du Rhin LISZT ET RICHARD

WAGNER AU BANQUET.

apparaissent

d'argent

et

en avoir sa part. (Cham, Clurifayi,

3

septembre 1876.

le

raillent

le

neau

du puis les chasseurs, viennent

Siegfried

premier, sonnant du cor;

Un malin, l'abbc Liszt. N'embrasse Richard Wagner que pour se faufiler sous sa couronne et

:

;

à

la

en

surface lui

arrive

les

le

ondines

des

eau.x

réclamant l'an-

Siegfried les repousse au fond

fleuve à coups de pierres.

Hagen,

rejoindre, et le traître, attaché à sa proie,


RICHARD WAGNER

23o lui

un nouveau

verse

breuvage,

raconter ses aventures passées.

mémoire dragon,

Siegfried boit et

chante son enfance dans

il

:

conquête de Brunehild

la

du souvenir,

celui

A

la

forêt,

ce

nom,

en

tout

à

l'invitant

en

revient

lui

son combat avec

le

déchire et

le voile se

remords étreint son cœur. « Brunehild, ô bien-aimée » s'écrie-t-il, et Hagen, qui n'attendait que ce cri d'amour, le perce de sa lance. On emporte son cadavre chez Gunther aux sons d'une marche funèbre

le

qui

!

redit toute l'existence

Brunehild accourt, tou-

héros expiré.

aimante et blessée au cœur du coup qui a tué Siegfried

jours fait

du

élever un

bûcher pour

bien-aimé

le

et s'y précipite,

;

elle

montée sur

son cheval de combat Grane, en jetant l'anathème au Walhalla et aux

Dieux désormais impuissants. Le règne des Dieux est fini, le règne de l'homme commence Les flammes s'étendent partout au fond du fleuve :

!

on voit rejeté.

ondincs jouer souriantes avec l'anneau que Brunehild leur a

les

Gunther voudrait tour en

se noie à son

mais

s'en emparer,

essayant d'arracher

est tué

il

par Hagen, qui

trésor maudit aux

le

filles

du Rhin. Le fleuve déborde et submerge la demeure des hommes; le feu gagne le Walhalla et détruit le palais des Dieux. Tout est consumé. Que s'il fallait prouver combien Wagner s'est rapproché de l'antique

Edda

Scandinave bien plus que du poème germanique des Nibelungen, on

ferait

observer que dans ce poème, qui date du

centre non pas sur Brunehild,

comme

l'opéra, mais sur Criemhild qui

prend

dans la

la

légende primitive

place de

dans ce poème intermédiaire entre

Siegfried,

se con-

xii^ siècle, l'intérêt

la

la

et

dans

Gudrune de VEdda. légende

et

l'opéra,

connu Brunehild avant de la conquérir pour Gunther; n'aime que Criemhild, et Brunehild non plus n'aime pas Siegfried jamais

n'a

par un simple sentiment de vengeance

c'est

a mis

qu'elle le fait tuer.

en œuvre avec une grande habileté ces

Sagas;

a

il

un tout simple, compliqués qui d'une

pour «

se

suivi

livrer et

Quant

à

une besogne

intéressant, avec

et

dans

pour former

confus et très

il

honneur. la

de

la tétralogie,

est

écrit

forme

même du poème,

il

est

bien

difficile

continue en

termes précis

sur les origines et la langue

pour un étranger de

la juger.

11

dans une langue remplie d'archaïsmes, pleine d'allusions sou-

vent obscures à l'ancienne mythologie. vers

très difficile

les récits très

M. G. Monod dans son étude approfondie

étrange;

Eddas

y a ajouté souvent des détails Tout ce travail littéraire, en un mot, est

servaient de base, et

lui

heureuse invention. lui faire

à

:

Wagner

vieilles traditions islan-

daises qui se répètent ou se contredisent dans les deux les

il

La

versification est

non moins

des séries de vers de deux pieds sont suivies d'un ou deux

de trois pieds,

sans

qu'aucune règle bien

stricte préside

à leur


RICHARD WAGNER ne

Ces vers

alternance.

sont

23t

pas rimes deux par deux, mais

ferment des syllabes qui riment entre elles par allitération.

dans chaque vers, commencent par

l'effet

et

Ces

la

même

consonne

et

allitérations

sur les

l'attention

attirent

i^cnéral,

quelque analogie de son. C'est ce qu'on appelle Slabreim, assez en est

présentent

aofréable.

ren-

consistent en ce que les syllabes accentuées des mots

ces allitérations

importants,

En

ils

mots essentiels de la phrase et les accentuent pour ainsi dire avec plus de puissance.

Malgré

nombreuses

les

difficultés et les obscurités

du poème de Wagner, la langue m'en a paru très expressive

couleur

passages dra-

les

;

matiques

de

pleine

et

atteignent

sou-

vent à une véritable grandeur'.

»

Tout

long

le

de

la

tétralogie, excepté dans de

comme

très courts passages la

scène du réveil de Bru-

nehild et celle de

où Hagen

Wagner

tue

la

chasse

Siegfried,

a répudié complè-

tement l'emploi simultané de deux ou plusieurs voix il

a

eu

recours

:

uniqueytL^J^ -^

ment à une

déclamation

à une sorte de COSTUME DE WOTAN EN VOYAGEUR, mesurée sur une dans Sici^fricd. trame symphonique tissée avec un art infini de tous les motifs musicaux caractéristiques qui s'attachent à chaque personnage, à chaque idée, à chaque sentiment.

continue,

récitation

Jamais

la

science,

génie de l'orchestre et

le

instrumentale n'ont été

midable orchestre, I.

Le

Dmme

à la page S7, ce

si

poussés aussi loin

coloré,

si

varié,

si

;

l'art

de

polyphonie

mais au-dessus de ce for-

riche,

si

puissant,

musical: l'Anneau du Sibelung, Jans le Courrier idtéraire{\o j'ai dL-jii Jit de l'assonance et de l'allitération.

que

la

oc\i-A'>rc

il

y a

187G).

la

— \'oir,


RICHARD WAGNER

232

Tauditeur ne doit pas perdre une syllabe et qui

parole déclamée dont

exige un effort tout spécial de

la

part des chanteurs

il

ne leur faut

mais dire, en quelque sorte, une déclamation notée

plus chanter,

qui exige autant de voix, que de précision dans

dans

:

mesure

la

et

de netteté

et

l'articulation.

Rheingold débute par un enchantement, par la scène des nymphes du Rhin nageant autour du trésor confié à leur garde. Ici Wagner, qui ne recule devant aucune hardiesse, a osé

La

du

partition

mi bémol

placer une pédale de

mesures, soutenant

aux

grâce

délicieux,

huit

règne pendant près de deux cents

qui

symphonie

la

des ondines

et la voix

employés pour

cors

Telfet en est

:

peindre

l'ondulation

monotone de l'eau; par-dessus cette pédale, la variété des timbres arrive à donner l'illusion de la transparence liquide et les renflements de sonorité sont

comme

autant de

qui s'écoulent les uns sur les

flots

un charme exquis chaque fois que reparaissent les sirènes, et dans la quatrième partie, quand elles se raillent de Siegfried, elles donnent lieu encore à une page charmante, qui tranche à merveille sur les scènes dramatiques qui vont suivre. En général, D'ailleurs c'est

autres.

Wagner

heureusement inspiré par

a été très

de son vaste poème

Wotan dans

célébrant

on sent

de et

vivacité

y a de grandeur dans les récits de du Walhalla, de rudesse et de lourdeur

moqueuse dans

tour

fond

tour

à

épisodes pittoresques

il

apostrophes menaçantes des géants

les

ramène

autant

:

l'édification

les

les

Fafner

et

Fasolt, autant

de Loge, où l'auteur

récits

dans l'accompagnement

principaux

les

motifs des situations précédentes.

le

Le tableau de la forge d'Alberich, où Ton fait connaissance avec thème retentissant de la forge qui reparaîtra si souvent par la

suite, est

scènes.

habilement conçu pour former contraste avec

La malédiction d'Alberich, quand Wotan

véritablement superbe.

est joie,

exprimant

sombre

féUcité

la

mélopée

de

la

Donner,

Une

jolie

causée

le

retour

Erda

et

de

une

premières

les

arrache l'anneau,

mélodie de P'roh,

par

prophétesse

lui

dieu

le

Freia,

phrase

de

puis

la

une

ample

et

du tonnerre, aboutissent au finale où résonne dans son plein développement la marche des Dieux vers le

magnifique

de

dieu

Walhalla, qu'on avait déjà entendue entre et celui des Dieux.

gold fut

si

le

tableau des

filles

du Rhin

Bref, la première impression produite par le Rhein-

favorable qu'on n'était pas sans crainte pour la Valkyrie

:

après avoir eu plus qu'on n'espérait du prologue, on redoutait une déception de la partie sur laquelle

on fondait d'abord

Lt cependant, l'impression produite encore plus profonde, en

dépit

par la

le

plus d'espoir.

Valkyrie

fut peut-être

de longueurs dans les deux premiers


REPRÉSENTATION DE

«

l'aNNEAU DU

Mort de Siegmiind, deuxitrme

Nir.EL'UNG

acte de la l'alkyrie.

— D'après

»

A

BAYREUTH, EN 187G.

un dessin de M. Knut Ekwall.


RICHARD WAGNER

234

où se trouve un interminable

actes, surtout dans le deuxième,

Cette partie est celle qui s'éloigne

Wotan.

le

moins

récit

de

de' nos habitudes

dramatiques et qui, par conséquent, peut le plus rapidement trouver faveur auprès d'un public encore assez peu pénétré des idées du réfor-

mateur,

et le succès qu'elle

en est

villes,

retrace

qui

la

la

et

remporté par

la suite,

en différentes

preuve irrécusable. Après un court prélude impétueux

commence un

course haletante de Siegmund,

dure une heure entière

accumulées

a

et qui paraît court,

grandissantes

toujours

superbe scène entre

tant

renferme de beautés

il

jusqu'au

point

sœur, Siegmund

le frère et la

amour s'épanche en un chant d'un contour

acte qui

et

suprême,

Sieglinde

:

la

leur

net, d'une expression brû-

l'hymne au printemps, que chante Siegmund lorsque les rayons de la lune pénètrent dans la salle, est d'un charme exquis. Le deuxième acte, moins bien rempli au point de vue dramatique, lante,

et

que Wotan converse avec sa fille Brunehild ou avec Fricka, sa femme, s'anime seulement à l'entrée de Siegmund, lorsqu'en refusant la gloire et les honneurs du Walhalla, s'il y doit et

languissant

tant

un premier sentiment d'amour au cœur de Brunehild. L'épisode du combat entre Hunding et Siegmund est aussi traité de main de maître et termine l'acte infiniment mieux

arriver mort, sans Sieglinde,

qu'il

n'a

Le

et

acte

un chef-d'œuvre en entier. Après

est

sublime de

la

au rendez-vous, déchirant la

éveille

commencé.

troisième

violente

il

tempête

elle-même,

chevauchée l'air

on

des Valkyries

arrivant

avec

anxiété

scène toutes

et

dominant

l'émouvant

dialogue

de leurs cris de guerre

suit

la

entre Brunehild implorant grâce et son père implacable; on est frappé

d'admiration par les sublimes adieux du père à sa fantastique de la

mer de

feu qui

monte

et crépite

fille,

dans cette scène

autour de

la

déesse

endormie. L'opéra tout entier se distingue du Rheiugold par une allure plus hardie, par une inspiration plus hautaine et plus franche, traversée d'éclairs

de tendresse

d'œuvre, en vérité,

et

de sensibilité d'un éclat surprenant.

que ce troisième

acte,

et

deux

fois

Chef-

chef-d'œuvre,

aussi bien par l'éblouissement et la fureur de l'orchestre dans la course

effrénée la

que par

des Valkyries,

l'intensité

de l'expression vocale et

puissance d'émotion dans l'admirable scène entre Brunehild et Wotan.

Le premier logie

:

acte de Siegfried fut un des grands succès de la tétra-

tout y est vie et

la

joyeuse

le

jeune

entrée

Siegfried,

héros forge

tandis que grondent

desseins

de

mouvement. Le sombre monologue de Mime, son

la

scène,

d'une énergie singulière,

épée avec tant d'ardeur

à côté de lui

les

et

de gaieté,

espérances jalouses et

de Mime, avaient entraîné dans un

succès général

les

noirs

certains


WAGNER

RICHAl^D

235

dialogues languissants, malgré de beaux passages symphoniques, entre

Wotan sous les habits d'un voyageur. De même, au second acte, après chaque épisode un peu

Mime

et

il en arrive un délicieux, d'une poésie adorable et qui au public les longueurs précédentes. Par exemple, après

d'Alberich avec son

écoute

fried

les

de

bruits

oiseaux avec un

ennemi Wotan,

vieil

roseau;

foret

la

après

et

imiter

à

oublier

fait

rencontre

la

passage où Sieg-

c'est le joli

s'essaie

traînant

chant des

le

combat effroyablement bruyant de

le

Siegfried contre le monstre, viennent ce dialogue exquis entre Siegfried

rieur

Ràumen

extérieures sans carte d'entré.

des Theatere Zutritt.

Das Raurhf n

2)

Personne n'est admis dans l'inté-

1)

zu den âusseren und iimeren

D

2)

seren fiàumen des Theaters auf

est s«TrreiDent drfendo de

dans

TrompeteD-Sigial bekumt

extérieures

l'intèrieui

du théâtre.

Smoking

3)

strictly prohibitwl in

Tbe beginmiig anioimced

comnieiciinieDt de chaque acte

Le

g^ est aimoDce par des fanfares

Dacb welcheiD

of eacb act vill be

b;

a

tnn-

of

call

einzinelmeD

pets, spog wbicli tbe

On

'

seats sboild

be taJien at once

die Pliitze

est sofort

2)

Actes wirddiirch 3)

eii

No admission exœpt by ticket

ter

galeries

les

comme a

gebei.

1)

du théâtre ni aux galeries

das Strengste untersagt 3) DerBegiiiiijedes

puis

the corridors.

auch in den âus-

ist

Mime,

projets de

des astucieux

l'avertit

hat Niemand

flhno Ein(ri((st5ilc

1)

qui

jaseur,

l'oiseau

et

repreidre sa

de

prie

place

siid

4)

l.adirs

are rpsprriroll)

rrqorsird

immédiatement après. 4) Die horlivrrehrtrn

Domrn

\ind aof

4)

das Frrandliclisfr irehctdi. naih Rin-

lijTsI

der Plalze

b)

wird

Inpst

AFFICHE

18711

scène

dé"yoiler à

si

ioQl

performances.

\nn

plarrs.

5|

AU

seats

are

te be

raised

on

gettiig np BAÏREUla

ij»

,

L"

im

o(

Iuctsi ICT

,

,

•dalalstr«tt«a.

L« comité l'sdnUtstiatloa.

ses

les

reprcscnlalions de

la tétralogie,

Wagner, par une

mauvais desseins de

en 1876.

d'une invention curieuse et

de génie,

trouvaille

l'air le

insinuant; cette façon d'exprimer la fausseté de est

Ihf ir bunarts dirinir Ibr

SOUS LE PROMENOIR EXTERIEUR DU THE.\TRE DE BAYREUTH

nouvelle,

Mime

orrape

BAÏREUTH,

Pour

la

rnprrlnrosrniriil

lit'

Iran chaprant après

Oi est pries derrlever les sirges

Tenfnltiiiigsrath.

cor, LEE

soul

eo les quittait

gebetei. die Sitze aofziiklappei BAÏREUTH

danrs

avoir

ahznnrhmrn.

BeiiD Verlassen

5|

l.i's

prirr.v d'ôlrr

nahmrdrrSifzpIcilzrdlcOjllrffofâl-

Iakr

fait

plus aimable et le plus

Mime

remarquablement

envers Siegfried

rendue au

double

point de vue poétique et musical.

Au la

,

l'évocation d'Erda

par

Wotan

est

scène analogue du Rheingold et du plus grand effet

Wotan l'on

est

troisième acte

veut arrêter

;

supérieure à l'épisode

l'élan de Siegfried n'offre pas grand intérêt;» puis

arrive au réveil de Brunehild, dont le salut à la nature retrouvée

de tout point magnifique,

fried,

un

duo véritable,

et aboutit à la

passion

un duo entre elle et Siegéclate avec une force, une


RICHARD WAGNER

236

surhumaine.

intensité vraiment

poussées

Siegfried,

toutes

et

l'ardeur

rapides

causa

passionnée

plus

la

scènes

les

au dernier;

moins

au

l'auditoire,

tissant

et la

Brunehild

le

de

fil

dernier

jusqu'au

qui

ce

et

scène où

avec

boit le

il

sœur

sa

Siegfried,

refroidi

lugubre chant des par se briser,

finit

de

l'arrivée

celui-ci

chez

breuvage d'oubli, puis l'entrevue de

Waltraute,

toutes ces scènes qui, ramassées en

Wotan, suivie de compte de Gunther,

envoyée par

un

le

acte, durent bien près de

deux

surtout par des rappels ingénieux et des combinaisons

heures, valent

de

saisissantes

Le

acte.

de Brunehild par Siegfried pour

l'enlèvement

complètement

avait

destinée des Dieux qui

la

de Brunehild et de

séparation

Gunther

précédemment exposés. Au Gunther avec Brunehild,

motifs

l'entrée brillante et fière de et

deuxième

rendit plus

légèrement fastidieuses,

intermédiaires,

Le Crépuscule des Dieux, en revanche,

la

c'est là ce qui

gaieté

la

:

fantaisie aérienne au

la

succès imprévu de Siegfried.

le

Nornes

suprême

degré

au

trois

les

premier acte,

juvénile, éclatante au

maîtresses dans

qualités

y a trois

Il

deuxième

déjà,

celle de Siegfried

de (jutrune, tendre et caressante, suivies de l'unique chceur

et

de

l'unique trio qui se trouvent dans la tétralogie, avaient déjà réchaulle les

auditeurs;

son et

transforma D'abord,

les

mais

c'est

surtout

le

entier, qui éleva l'enthousiasme la

fin

la jolie

ondines

le

»,

1

thème

sa

et la

la

tétralogie en

ressouvenirs de sa vie entière qui

puis les

raillent,

mort et mort de

la la

la

scène

lyrique,

création de génie

:

lui

k d'amour Brunehild, ô biensuperbe marche funèbre qui suit enfin l'ana-

cri

:

;

Valkyrie, avec l'anéantissement

dans leur ensemble, une des plus belles choses qu'on

pour

merveille en

au niveau des soirées précédentes

un triomphe incontesté. scène de Siegfried sur les bords du Rhin, lorsque de

reviennent en mémoire, jusqu'au

aimée

troisième acte, une

de quelque

nom

final,

ait

forment,

jamais écrites

qu'on veuille qualifier cette

drame, mythe, poème ou simplement opéra. L'im-

portant est que le tableau tout entier présente une élévation de pensée, une richesse d'inspiration mélodique, une puissance de combinaisons symphoniques véritablement géniales, et qu'après un tel acte, il n'y a qu'à s'incliner devant créer

l'artiste

assez

merveilleusement

doué

pour

le

'.

Somme

toute

et

malgré de durs moments,

c'était

une victoire

I. Les décorations de la tétralogie avaient été brossées par les frères Brùckner, de Cobourg, d'après les maquettes du peintre Hoffmann, de Vienne; le professeur Dœppler, de Berlin, avait dessiné

costumes; les armures sortaient des fabriques de Meiningen, et les machines avaient été combinées par M. Brandt, de Darmstadt, qui avait surveillé avec un soin particulier tout ce qui concernait l'éclairage de la scène, afin d'obtenir des résultats saisissants, des cflets de lumière et de nuit correspondant aux jeux du théâtre avec une merveilleuse exactitude. les



RICHARD WAGNER

238

éclatante pour

ce créateur à

depuis vingt-cinq ans,

monde

entier

qui

avait réalisé l'irréalisable et qui donnait au

spectacle

le

volonté de fer qui suivait son projet

la

de sa propre

stupéfiant

apothéose.

Aussi

comprend-on presque, à tout bien peser, la prodigieuse infatuation de riiomme et son terrible orgueil aux cris d'un auditoire enthousiasmé :

veut saluer

qui

en

seul

redingote,

fêter ses interprètes dévoués,

et

en pantalon de

dans un speech

artistes

et

ce

un

môme

un

art. »

reparaît

il

remercie spectateurs et

termine par ces paroles qui manquaient

qu'il

but

si

;

:

de votre côté vous nous soutenez, alors nous aurons

Quelle déplorable manie de parler, quand on a

commandement

et qu'elle trahit

dans

d'Haydn

Weber

interloqué

grands

de Mozart, de

et

mais

;

et

parole

A

ces

mots,

!

de Beethoven,

et

Schumann

de

la

l'auditoire reste

,

Richter,

le

chef d'orchestre,

et

M"""

Materna.

que

reparaît, toujours seul, et semble ainsi vouloir affirmer

autour de

s'efface

d'enthousiasme,

exclamation

pays de Bach

le

peu

veut payer sa dette aux artistes et les réclame à

surtout

cris,

Wagner

il

si

toujours votre pensée

qui sonnaient étrangement

tout

et

toile,

« Nous vous avons montré ce que nous voulons que nous pouvons, quand toutes les volontés sont tendues vers

au moins de clarté

à

maître

le

:

une Viva

a

lui

dans

ce

de triomphe

Jour

M"" Lucca, le salue de maestro, le plus grand de tous

Italienne, il

je suis très contente; nous vous remercions tous!

referme sans qu'aucun artiste

ait

»

alors,

:

folle

bizarre

cette les

maestros,

le

rideau se

Puis

pu répondre à l'appel du public.

Et

n'eùt-il pas été convenable que Wagner associât dès le premier Jour à son succès ceux qui y avaient travaillé avec tant d'ardeur

cependant et

de passion, des artistes

comme

Betz, superbe en tout point dans

le

de Wotan, écrit malheureusement trop bas pour lui; comme M"" Materna, incomparable en Brunehild; comme M. Vogl, étourdissant de vie et d'entrain dans Loge, le dieu du feu; comme M. Niemann rôle

qui n'avait plus que les restes d'une belle voix, mais qui Jouait

Sieg-

mund d'une façon très dramatique; ou comme M. Unger, chanteur peu expérimenté, mais énergique et vigoureux dans Siegfried. Et M""= Jaïde M. Niering (Hunding), et M""= Scheffzki (Sieglinde), et Schlosser, Gura, Kœgel et Hill (Mime, Gunther, Hagen, Albeet M'"" Grun et Haupt (Fricka et Freia), et M"" Lilli et Marie

(Erda),

MM. rich),

et

Lehmann Le

— 1

à

et M'"'^

i8 août,

Richard

œuvre

et

en arrivant

Lammert,

les trois délicieuses filles

un banquet d'honneur

Wagner

et

aux artistes par

soi-disant

les

par ceux des spectateurs qui avaient voulu la

veille

dans

la salle

du Rhin!

— formule consacrée,

était offert,

patrons

de

s'y associer, car,

de spectacle, chacun avait pu trouver

a sa place uns invitation à souscrire

à ce

repas

,

moyennant

5

marks


REPRÉSENTATION DE Le

réveil

«

l'aNNEAU DU NIBELUNG

de Brunehild, troisième acte de Siegfried.

»

A

BAYREUTH, EN 1S76.

D'aprls un dessin de M.

Knm

Ekwall.


RICHARD WAGNER

240

par tête'. Le héros de

25)

fr.

(6

de parler

dès

et,

en trouva roccasion,

qu'il

les assistants

de leurs sympathies,

désintéressée

et

n'avaient

pas

presse et

le

surtout

on

lui avait

la

veille,

rapporté s'en

il

avec une bonhomie charmante

il

de

patrons

combattre

le

le

mauvais

pour remercier

l'entreprise

:

il

effet

,

qui

époque où

la

et l'écraser.

produit par sa brève

le

plus simplement du monde,

n'avait

nullement voulu dire, ainsi

expliqua

qu'on l'avait compris, qu'avant sa venue

Allemagne;

se leva

de Tavenir de son œuvre, à une

douté

de

il

exécutants de leur collaboration

les

premiers

les

public se liguaient pour

comme

Et

allocution

ne se tenait pas d'impatience

la fête

avait seulement répété ce

l'art

qu

musical n'existait pas en

avait dit cent fois

il

:

à savoir

que l'opéra allemand n'avait pas jusqu'alors une physionomie propre, un caractère individuel comparable à

Le monde

l'opéra

italien.

italien,

l'opéra français;

l'opéra allemand. térise est

la

La

entier,

dit-il

en

substance,

création de l'opéra allemand, du théâtre qui carac-

race germanique dans sa plus haute manifestation d'art, telle

pour cela

Wagner

leur dit

qu'il

:

«

convie tous ses compatriotes,

Voulez-vous un art? cela dépend

de vous. Ayez une volonté, vous aurez un théâtre national'-.

Après ce le

A

)>

la

bonne heure,

petit discours,

Wagner

fit

le

en sa faveur dans

les

ayant posé sur

tête

la

hautes

classes de

fait

parlant

au

éloquent et

puis,

;

il

M"'*'

Lucca

lui

acheva sa tournée

lui-même, otant sa couronne pour saluer

dit

alors

de cette œuvre d'art, puis

national

soutenir.

une propagande acharnée

Berlin

couronnant derechef, heureux, radieux

membre du Parlement,

peut se

qui

tour de la table, en donnant

une couronne d'argent,

avec cet ornement, en riant

un art nouveau, un

art,

et voilà

bras à la comtesse de Schleinitz qui avait

et se

connaît l'opéra

connaît aussi des opéras allemands, mais non

il

l'œuvre à laquelle Richard

et c'est

de l'opéra français ou de

celui

et

quelques

bon enfant. M. Duncker, paroles

sur

le

caractère

comte Apponyi, de Buda-Pesth, des étrangers, prononça ce petit discours, d'un jet « Pareil à Siegfried, Wagner marche sans crainte poétique le

nom

:

à la conquête d'une

femme

céleste, la tragédie.

Comme

le

héros alle-

1. Le texte de cette circulaire, e'manant de Wagner lui-même, ou du restaurateur et qu'aucun patron n'avait signée, est au moins curieux à conserver n M. Richard Wagner désire se trouver réuni, dans an souper, a ses patrons, protecteurs et amis, en compagnie des artistes et toutes autres personnes ayant concouru aux représentations actuelles. Pour répondre à ce désir, nous avons l'honneur de vous in\-iter cordialement à prendre part au souper qui aura lieu le 17 août, à sept heures et demie, dans la grande salle du restaurant du théâtre. Le prix de la souscription est fixé à 5 marks par :

bien entendu). On est prié d'envoyer son adhésion le 17, à neuf heures du matin au Voilà comment s'organise une manifestation n spontanée » en l'honneur d'un grand homme. Si l'appel n'avait pas été entendu, on désavouait le restaurateur qui avait battu la caisse pour soB propre compte, et tout était dit. Du 17, le banquet dut être reporté au 18 août, par suite de rindisposition de Betz qui avait fait reculer les deux dernières parties de la tétralogie au i5 et au 17. 2. Lettres de Bayreuth l'Anneau du Nihelung, par M. Ch. Tardieu (Bruxelles, chez. Schott, i883). tûie (sans le vin,

plus tard.

»

:


RICHARD WAGNER EN 1877. D'après

le

portrait de

M. Herkomer, grave par lui-même

à l'eau-forte.


RICHARD WAGNER

242

mand,

sans

passa,

il

Tenvie et de

au travers des flammes ardentes de

trembler,

la haine.

Comme

lui,

a réveillé la belle endormie qui,

il

but inaccessible des

de tant de génies.

depuis des siècles, fut

le

Wagner

un glaive, a brandi une épée. Nothung,

aussi a forgé

divine musique

oii

nous pouvons

et ses amis,

Bruneliild disait à celui qui la réveilla pliante

d'un spectateur

personne,

'Wagner

reprit

son

patrons à coup

ses

Gloire à

lui

répéter ce que

toi,

lumière triom-

M. Ludwig Nohl, après une

allocution

s'exprima dans sa langue et ne fut entendu

russe qui

orateurs, et surtout

de

«

:

!

»

!

Enfin, après peu de mots de

de

c'est sa

a fondu les tronçons des arts de tous les peuples

il

Et nous, ses admirateurs «

eff'orts

la

parole

plus

fidèle

sûr,

celui

afin

de

remercier

ami, son protecteur, qui

relevé

avait

tous

le

les

premier

courage à

son

du plus profond abattement, qui avait lutté et vaincu pour lui Franz Liszt. Et le beau-père et le gendre, dans le temps de l'exil émus et joyeux, tombèrent dans les bras l'un de l'autre, aux acclamal'heure

:

tions de cinq cents convives attendris.

Liszt y eut grande soirée chez Richard Wagner en faisaient les honneurs avec lui. Cette réception priée

Le lendemain et

sa

fille

il

:

réunit autour du maître, de neuf heures à minuit,

vingts invités, heureux de fêter teurs, chefs d'orchestre, 11

dans

y avait

avec

humeur, causait

comme un

diable

:

il

le

afin

M.

plus gaiement du

entonnait

une chaise

le

Judith

M""^

brillait

on l'entendit

sincèrement à certains

son

M. Saint-Saëns,

et

monde

démenait

et se

chant du Walhalla à tue-tête,

atténuer

le

ces

un

il

toast des plus

Français

fâcheux :

«

s'associer

produit

effet

dans un accès de franchise

prié de

Gautier,

Wagner,

Allemands, nous sommes lourds!

oui! nous autres

etc.

d'atteindre à l'oreille de cet admirateur

même, en voyant

triomphe,

écrits et dire

chan-

Saint-Saëns.

russe, haut de six pieds, qui lui avait porté la veille

chaleureux;

artistes,

:

amis d'ancienne date, patrons de l'œuvre,

d'excellente

sur

sa victoire

nombre une Française,

le

quatre ou cinq Français, entre lesquels

grimpait

lui

soixante à quatre-

par

Eh! mon Dieu

»

se faire entendre, répondit à cette politesse

en improvisant pendant un quart d'heure à peu près, sur des fragments

de

commencer par la Gœtterdivmmerimg, pour finir par le il joua sa Danse macabre, et de la belle manière. On

la tétralogie, à

Rheingold ; puis

de droite et de gauche; on causait avec les gens qu'on connaissait dans cette soirée sans programme arrêté mais quel circulait, jusque-là,

;

silence et quelle attention

Pendant une grande heure,

lorsque Liszt se mit à son tour au piano il

tint toute

l'assemblée sous

le

!

charme en

exécutant plusieurs de ses oeuvres inédites, tant valses qu'impromptus

:




RICHARD WAGNER plus de musique possible après qu'il eut soirée,

et le pianiste français, visiblement

se mettre en ligne, alors qu'on l'avait

hommage

au vieux maître.

sous une forme

disait-il

présents à la fête,

et,

ces déshérités de

de

La demeure

fini.

243

Ce

fut lui le lion

sollicité, fut le

premier à rendre

C'est à décourager tous les pianistes »,

«

ultra- pittoresque à l'un de ses compatriotes

sans fausse modestie,

il

se rangeait

au

nombre

l'art.

princière que

Wagner

D'après un

située

la

ennuyé d'avoir paru vouloir

s'était fait construire à sa

UN DES RESTAURANTS DU THEATRE, A BAYREUTH, EN

était

de

à l'extrémité de

la

guise

1876.

croquis original.

ville

opposée au théâtre, au bout du

(Chemin du renne), qui porte aujourd'hui le nom de Richard Wagner'. Après avoir franchi la grille, une petite avenue aboutit à un rond-point fleuri où trône un énorme buste en bronze du

Rennweg

maison, construite en pierres d'un gris roux, presque carrée, sans autre ornement extérieur qu'un sgraffito, sorte de roi; face à l'avenue est la

Munich et tandis qu'on bâtissait sa demeure délînitivc, boulevard Dammaltee. C'est là qu'en 1873, un jeune compositeur français, muni d'une lettre d'introduction de Liszt, fut très aimablement reçu par M'"» Wagner, mais ne put apercevoir Wagner que de dos, à travers deux portes ouvertes, tant le maître était alors absorbe par la Composition des dernières scènes de la Goettcrdixmmcrunj;. I.

Dans

Wagner

les

premiers temps de son

habitait

une

petite

se'jour à

maison sur

le


;

RICHARD WAGNER

244

fresque en noir et blanc, mélange de grisaille ornait autrefois les façades des maisons

dans beaucoup de

encore

de

villes

en

Italie,

Cette composition

péninsule.

la

que Ton trouve

et

due au peintre d'histoire Robert Krausse, représente

allégorique,

Wotan, dans son costume de voyageur, de

dieu

de camaïeu, dont on

et

Siegfried,

et

le

sous les

du regretté ténor Louis Schnorr. D'un côté se tient M'"'^ SchrœderDevrient, costumée en Tragédie; de l'autre, M'"'^ Cosima Wagner,

traits

incarnant

Musique, conduit vers

la

de

l'autel

enfant, qui n'est autre que son propre

Tragédie Siegfried

la

Siegfried

fils,

Wagner

:

le

tout

musique et de la tragédie sous l'influence et pour la glorification du mythe germanique. Le maître a dénommé cette habitation Waliufried (Apaisement de mes illusions), et sur la façade on lit symbolise l'union de

la

en

l'inscription suivante,

HIEU

WO

lettres d'or, sur trois

WAHNEN

MEIN

U

rUISQU ICI MES ILLUSIONS ONT TROUVÉ LEUR APAISEMENT

entre

Wagner

de

par

UMtJT? TUTi

lvlJ_-/i7

""""^^

'^^"'"

GENANNT ^^ "^^^

'~^^^

DONNE A CETTE MAISON

jjr

vestibule,

petit

puis

dans une grande

haut, ornée des bustes du roi de Bavière,

le

des premières œuvres du

héros

court une frise en grisaille, où

haut,

j,,^

de sa femme, et de statuettes en marbre, présents du

et

qui représentent les

roi,

A

VVillliM

dans un

d'abord

dallée, éclairée

salle

W/'

:

DIESES HAUS VON

^^'

\1 "CT* T 17 f^ \\ T A VVil.lliM iVlLdJ

FRIEDEN FAND

On

plaques de marbre rosé

En

maître.

se détachent de petits tableaux

du poème original des Nibclungeu de plus, un orgue américain à tuyaux apparents, sans valeur. A moitié de la hauteur, règne une galerie circulaire sur laquelle donnent les chambres à coucher, et ornée elle-même de paysages d'Asie, à l'aquaretraçant les principaux

par Hillebrand.

relle, la

salle à

nom

manger;

A

épisodes

à gauche, le petit salon de M"""

sur tous

les

meubles.

Au

fond,

le

hall,

Wagner, décoré du

de Liszt, très coquet, plein d'objets d'art, .avec un

jetées

ou de

droite de cette sorte de galerie

fouillis d'étoffes

grand salon carré terminé

par une vérandah ronde et totalement garni de corps de bibliothèque emplis de beaux livres, car «

Tout ce qui

mérite

Wagner

d'être

lu,

fut,

toute sa vie, un grand liseur

disait-il,

mérite

d'être

relu

»;

et

:

il

excellait à lire à

haute voix des scènes de Shakespeare ou des pièces

comiques dont

se divertissait

il

comme un

enfant.

Ce salon, qui forme encore la grande pièce de réception, renfermait de nombreux portraits. Au-dessus de la porte d'entrée, celui de Beethoven M""=

;

à

sa

droite,

Wagner,

celui

Gœthe; de son

à sa

gauche, Schiller;

père et celui

ici,

le

portrait

de

de son mari, par Lenbach;


I<

LI'R t SE N

i

A

1

lO.N

UE

«

l'anneau DU

N

I

Bt

I.

UNG

Cortège funèbre de Siegliied, troisième acte du Crefuscule Jes Dieux.

«

A

l.AVKEUTll,

tN

1^7^.

D'après uu dessin de M. Knul lîkwall.


RICHARD WAGNER

246

bustes de

les

là,

Schrœder-Devrient

la

enfin les portraits du roi de Bavière

Wagner. Plus décoré

a

du

;

second père de

le

wagnériennes, on

Sociétés

dans cette pièce d'honneur, avec

plafond,

écussons des principales

les

de Geyer,

et

après l'extension des

tard,

voussure

la

de Schnorr de Carolsfeld

et

adhérentes à l'Association. Derrière

villes

maison, s'étend un jardin modeste,

dont

les

arbres se confondent

avec ceux du parc royal; des fleurs à profusion,

une serre pleine de

la

plantes recherchées, une grande volière peuplée de paons, de faisans, de

pigeons d'espèce rare; un petit bouquet d'arbres, et dans ce massif un

tombeau que Wagner

s'était

préparer d'avance, avec une énorme

fait

de très beau marbre gris veiné de blanc,

pierre tumulaire

d'une seule moulure très simple sur les bords. Pas

aucune inscription;

La deuxième

monde

le

confirma l'impression de

gold

moindre emblème,

le

l'Anneau du Nibelung

première, en accentuant

la

furent également

et Siegfried

ornée

entier saura toujours qui repose là'.

des représentations de

série

lisse,

appréciés,

et

le

la

Le Rhein-

succès.

mieux

Valkyrie,

interprétée et mieux mise en scène, fut encore plus admirée

à la fin

:

de cette seconde soirée on rappela à grands

cris l'auteur, qui refusa

se montrer;

public qu'après la dernière

de

scène

On

il

ne consentit à venir saluer

Gœtterdœmmening

la

et

mais

lui,

et se retira

de nouveau,

saluant

comme

pour une

doutait-il

fois

Son

venu.

était

il

que n'eût été son discours;

fort

la

môme

à il

fut

pas de

Reviendront-ils

divine.

dans

le

»

Ensuite,

Je

la

célébra en

le

II,

des termes exaltés le

«

La

vie

du maître

instant, toujours en

devant de

théâtrale)

se

la

scène et

sont à leur

dépend

de

la

:

terme,

puissance

la

esquissé cette œuvre, avec

achevée pour

gloire

foi

de son

présent à cette scène émouvante. part que

le

roi

à l'issue

de

la

avait

prise à la et faveurs

;

première exécution,

des plus régulières, dit M"" Gautier, surtout lorsqu'il poursuivait un il se levait, mais après son bain se recouchait et lisait jusqu'à se mettait au travail jusqu'à deux heures; après le diner, il se reposait

six heures, il

compagnie d'un

livre;

de quatre à

six,

il

faisait

une proinenade en voiture,

remettait à l'ouvrage jusqu'au moment du souper, à huit heures; amillc très gaieinent, et avant onze heures tout le monde était couché. «

puis

mal

était

A

dix heures; à onze heures,

un

le

remercia de toutes ses grâces

puis, revenant sur le trouble qui,

I.

la

si

troisième série. Aussitôt

la

cela

et

l'avait

Louis

il

de

fin

qu'il avait

qu'il

roi

réalisation de l'entreprise,

travail pressé et fatigant.

applaudi plus

fut

?

fête

l'ignore

rappela

il

génie allemand,

auguste bienfaiteur, 11

?

alors,

vraiment rien à dire, ou bien

s'avança sur

Les Biihncnfestspicle (pièces de

dit-il.

rien à dire

n'avait

de ses moyens oratoires après avoir été

fermeture du rideau,

n'en

Il

prier.

prononcer une allocu-

qu'il

silence

n'avait-il

compris lors de sa première allocution après

signe

fit

longtemps

fit-il

s'attendait, connaissant son faible, à lui voir

tion,

«

le

encore se

de

la

soirée

se

passait en


RICHARD WAGNER avait dénaturé Texpression

plus

accusé

être

de sa pensée,

d'orgueil,

s'il

disait

il

247

espérait,

qu'avec

l'œuvre qu'on venait

d'achever un pas était accompli pour l'indépendance de

Ce pas

avait-il

été heureux?

même

quand bien

ne seraient probablement pas sans profit pour

moment,

saient groupés sur la scène autour

Puis une dernière

allemand.

qu'une tentative,

l'art

national.

11

parole

lui

et

tous les

artistes

elles

adressait

A

compliments à ses dévoués collaborateurs

rideau s'ouvrait derrière

le

l'art

L'avenir seul en devait décider; mais,

ces exécutions n'auraient été

enfin de chaleureux

ne devoir

dit-il,

ce

apparais-

du chef d'orchestre, Hans Richter.

d'adieu de

Wagner

au public, et

rideau

le

COMPOSITION DU PEINTRE KRAUSSE Pour

se referma

:

les

la

de

façade

la

maison de Wagner, à Hayronlh

représentations de la tétralogie avaient pris

en conserver à jamais

le

glorieux

souvenir,

Wagner

fit

médailles commémoratives en argent, en bronze et en cuivre.

Louis

fin.

Pour

frapper des

Une

H

seule,

unique

en or et de plus grand module, était destinée au roi exemple assurément, dans l'histoire, d'un sujet décorant son souverain. :

en somme, un très beau triomphe, eu égard surtout à la grandeur de l'entreprise, et cependant Wagner ne se tint pas pour satisfait. Lui qui avait si bien dit, dès i85i, quuiie seule exécution de C'était,

qu'une seconde exécution lui semblait tout à fait superflue, il n'avait pas encore assez de cette seconde venus il garda rancune aux princes qui étaient et même d'une troisième son mythe en quatre parties

;

lui suffirait et


RICHARD WAGNER

248

à Bayreuth, de leur indilFcrcnce apparente et de leur parcimonie à l'égard

de

la tétralogie

aurait voulu qu'ils la lissent jouer un peu partout.

il

:

N'est-ce pas là ce que signifiait un passage de l'Œuvre

de

ma

compris

vie?

«

de toute évidence qu'on n'avait

devint

11

mes

but où tendaient

le

non plus personnel.

Môme

efforts,

en présence

dans un de

cet

la mission

et

intérêt

même

pas

général et

heureux résultat, nul

représentant de l'autorité gouver-

nementale n'eut

l'idée

de provo-

quer une action déterminante, afin de

réaliser

qui

ce

venait

d'être

WANH!R

I

ED

Hahitation de Rieliard

,

Wagner

,à Bayreulh.

démontré l'amélioration

jugeais

de

l'art

national

en

possible

Aussi, dans

le

tout

temps

opportun de pousser vigoureusement vers

point

même

l'institution

pour où

je

que

je

rêvais d'établir, par des représentations

tout

le

poids de cette

modèles régulièrement répétées, entreprise retomba sur moi on me laissa seul

la

poursuivre et l'achever,

et

sans intérêt. Et, pour

redoutait

;

comme une

fantaisie individuelle, sans portée

»

comble

d'ironie,

par-dessus tout

:

la

il

se produisait justement ce

tétralogie, en dehors de

que Wagner

Bayreuth,

était


^ ~


RICHARD WAGNER

25o

comme

exécutée assez rarement dans son entier, et

même

Hambourg,

zio-,

naire.

au

la sorte

;

que

une autre,

partie, tantôt

musical

ordi-

différentes

villes

train

le

souvent

assez

contraire

représentaient tantôt une

de

en rien

ne modifiaient

etc.,

arrivait

Il

Taurait souhaité

il

représentations intégrales données à Munich, Vienne, Leip-

les

l'auteur assistait

et

à ce spectacle écœurant, disait-il, de voir son

œuvre

ainsi

morcelée en quatre pièces distinctes, qu'on jouait exactement comme un opéra quelconque, comme un « morceau de répertoire », pour employer sa propre expression de mépris.

Lui,

si

rebelle naguère à cette idée,

à cet émiettement de son satisfaction,

même quand

:

divers

ces

moindre

se produisait

que

la

fragments étaient joués sans

la

coupures qui

les

le

générale, et que l'ouvrage sou-

applaudissements, malgré

et

public marquait

de

c'est

intelligence de la conception

levait partout les il

œuvre

trouvait cependant un bon côté

il

milieux défavorables où

les

défiguraient.

le

11

espérait

qu'en

présence de ce succès par fragments, un temps viendrait où l'on exécu-

dans toute l'Allemagne à certains jours de

terait l'ouvrage entier

l'espérait il

le

eût

quoiqu'il

prétendait

autrefois le

écrit

que son ouvrage

enfin

fût

officiellement

il

tations

à la lettre

;

il

imposé comme

anti-français absolu du nouvel art allemand, de mourut avant d'avoir vu cet espoir rempli; car les représende la tétralogie données à Berlin, de son vivant, par une troupe

type

Mais

contraire,

fête;

recrutée

l'art

pour

furent un cas

la

circonstance

et

sans influence

isolé,

chano-ement au cours habituel de

Cet espoir

était d'autant plus

dans un théâtre d'ordre secondaire,

même la vie

locale, et n'apportèrent

aucun

musicale à Berlin.

ambitieux que,

même

au delà du Rhin,

plusieurs écrivains, tout en admirant l'œuvre en elle-même et l'extraordinaire force de conception du maître, combattaient très vivement sa pré-

tention de déterminer par la tétralogie la forme idéale et définitive de l'art national allemand.

A

leurs yeux,

Wagner, avec

ses restitutions savantes

et ses imitations peu dissimulées du théâtre grec, était moins franchement national, moins issu naturellement du sol allemand que 'Weber qui a si fidèlement rendu le milieu où il a vécu, le sentiment, la rêverie, les harmonies de la forêt, le fantastique na'if dont il avait l'esprit imbu. Comment donc, disaient ces critiques, attribuer aux œuvres de Wagner, presque exclusivement et par excellence, ce caractère national, alors qu'elles procèdent si visiblement du théâtre grec

et

que cette origine,

quées,

comme

titres

cette

ressemblance ont été

de gloire,

par ceux qui ont

transmis aux adeptes la pensée du maître civilisations,

deux

sols,

deux

climats

plus

?

le

Or, se

d'ailleurs

revendi-

mieux expliqué et peut-il voir deux

différents

que ceux de

la


Mjiliil.le

Georg Unger. -SwXTiif.EiigcnGiaj. -Hagen: Guslw Sifhr.Karl Hill. Briinnliilde Amalie Maierua. Gutrune Wcclicriin. Waltiaute Louise JaiJe. Eic flrci Noinen

.hili.ttni.i

W'jgncr. Joséphine ScUvf-^ky. FrieJerikc

SiegfrieS:

Alberich

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— —

:

:

:

;

— Tie Lammcrl. — FÛlher Gri'tu.

drfii

EheintSciter I.illi iind Marie LeUmaun. Minna derMaanen Herrlich. Uiirger, Wciss. Koch, Eilcrs, Rcicheiiherg, Xiering. :

:

Orcliesterleitung

Decorationen Eiiiil

''y; ?-

:

— ScenischE-Leitaug

Hai:$ Richicr.

Joseph Ho/maim.

— Ohoreographis

:

CchriiJer

:

Karl

Briickncr.

llran.li.

Oostûms

:

Richard Friche.

^VHo'

m II'.',

DôfUr.

:

Cari Wnlfel. Conrad Weiss. Chr.

w

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V

Vogel

ii.

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i;iV

Gewidniet von dcn Bnumeistern

'^^

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:

P. Schâferleiii.

/i'^^-

rnir

r^^

!;!i/^-.. -

PIERRE COMMÉMORATI VE DES REPRÉSENTATIONS DE LA

T

IC

TRA

LOG

I

E

,

EN

1876.


2

RICHARD WAGNER

52

Grèce

s'attribuer

Germanie? Kt

une

aussi

à ceux

armes que

la

de

et

iiliation

qui, tout

la tétralogie

comment Wagner, en cherchant

voilà

glorieuse,

prodigieux génie,

confessant son

en

lui-même

tourni

avait

à

des

niaient

incarnât Tart national et que TAllemagne eût trouvé

un drame lyrique ayant que possédaient l'Italie et la France entrailles de sa race et de son sol. issus des organisme des traits et un là

ce

:

Ces

écloses

critiques,

pays

en

d'outre-Rhin

très

et

impoitant de M. Gustave Frédérix,

résumées dans un

article littéraire

témoignent de

culture d'esprit de leurs auteurs; mais

et

la

ne frappent pas

juste.

En

clairement

elles

effet,

portent

elles dévient

moins sur l'œuvre

MEDAILLE COMMEMORATIVE DES KETES DE BAYREUTH, Gravée par M.

Cli.

Wiener, de Bruxelles,

el

communiquée par M. C. G. Tliieme.

de Richard Wagner. Revers (d'après Tesquisse originale du prof. Adolphe Schniilz, de Dusscldorf) Rcpresentalion des principaux personnages de Richard Wagner. A droite, le Hollandais, Lohengrin, Tannhituser, Hans Sachs et Tristan; à gauche, Brunchild,- Wotan, Siegfried et les Filles du Rhin.

Face

:

l'ortrait

:

clle-mcmc,

que sur la

création

de

les conditions

génie à

produire en public, pensant

authentiquemcnt national. Or, le

purement

côté

sitions

et

de toute contestation sérieuse,

lui

imprimer de

en

il

était

l'auteur avait tenu à

la

sorte

advenu tout

le

un caractère contraire.

Par

décoratif, par l'ensemble de ce théâtre et ses dispo-

architecturales,

Wagner

l'abri

matérielles dans lesquelles

par

le

retour

régulier de ces

jeux solennels,

se rattache, ainsi qu'il prétendait le faire, aux fêtes religieuses

théâtrales

emprunté,

de

la

Grèce antique; mais ce

et le sujet sur lequel

ment germanique, comme sources allemandes les

il

n'est

qu'un

appareil

a fixé son choix est d'essence absolu-

musique dont il l'a enrichi découle des plus pures. Qu'on s'occupe du poème ou qu'on la


KICHAKI) \VA(iNi;U étudie

parution,

la

tétralogie une

œuvre

serait

celui

méconnaîtrait

(|ui

d'art toute nourrie des sucs de la terre

pour juger Fœuvre en

l'en dépouiller

comme

ose

après coup de cette parure néo-hellénique

et revêtue

de

bien

233

soi,

la

aussi convient-il

:

pour clairement tliscerner

plonge ses racines au plus profond du

elle

dans

allemande

germain.

sol

Pour conserver et transmettre aux âges futurs le souvenir d'un événement extraordinaire, qui demeurera probablement sans second dans de

riiistoire

pas d'une

l'art

médaille;

:

pouvait

se

perpétuer

il

ne

mémoire

sullisait pai-

un

galerie du rez-de-chaussée, qui contournait

la

en façon de promenoir couvert

libre,

en cas de pluie durant

tenir

la

fait.

était à air

cette façade,

l'air frais

et

d'en

sans précédent,

de pierre, capable de résister aux attaques du Le théâtre de Bayreuth, à l'origine, avait

et

c'est ce qui fut

une façade arrondie

était

il

convenait

il

monument de marbre temps

comme

musical,

du dehors. Entre

les

les

entr'actes,

représentations de

la

oii

l'on

pour aspirer

tétralogie et celles

de Parsifal, tout en laissant cette galerie ouverte à ses deux extrémités, on appliqua contre le milieu de la façade un avant-corps rectangulaire, et, sous

la

partie

du promenoir garantie des vents par

cette construction nouvelle, on érigea, dans un encadrement de pierre,

une dalle de marbre noir relatant Nibeliiug en artistes

l'année

1876,

avec

qui avaient pris part à

représentation

la

de

noms, gravés en

les

cette

solennité.

Ce

l'

Anneau du

or, cîe tous les

fut

un hommage les noms monument.

rendu au maître et à ses interprètes par les architectes, dont sont plus modestement inscrits en lettres noires, au bas du

commémorative, au-dessous de ce titre, point de nom d'auteur, non plus que d'inscription sur la pierre tumulaire de Wahnfried. Comme il reste entendu que la postérité la plus lointaine, en déchiffrant sur la pierre effritée un titre presque effacé par le temps et des noms de chanteurs tombés dans l'oubli, se rappellera toujours Sur cette

quel

homme

dalle

de génie a créé ce chef-d'œuvre impérissable, quel géant

dort dans ce tombeau son dernier sommeil

LE MOTIF Tire de Schull^c

et

DE

l.

Militer â

\

t

O

!(.

OE

l'AiiiiCiiii

du

!

ANIME. Xibcluiig, iSS3.


CHAPITRE XIV CONCERTS

A LONDRKS.

LA TETRALOGIE A BERLIN

PARSIFAL A BAYREUTH

A représentation de la tétralogie à Bayreuth eut un

contre-coup presque immédiat à venu,

M. Pasdeloup, à

intéressantes

Paris.

L'automne

TafFùt de toutes les nouveautés

pour ses Concerts populaires, crut de

son devoir d'exécuter un des plus beaux fragments de l'ouvrage qui venait d'avoir un

par toute l'Europe, et

il

de Siegfried, tirée de la

tel

inscrivit la

retentissement

marche funèbre

Gœtterdœmmerung

{le

Cré-

des Dieux], sur son programme du 2g octobre 1876; ce morceau précédait immédiatement l'ouverture du Freischiïti, qui terminait le concert. Mais une cabale avait été organisée en se couvrant du grand mot de patriotisme, et, dès avant que le morceau commençât, une portion du public, assez faible il est vrai, mais décidée à user de tous les moyens et munie dans ce dessein de sifflets à roulette, se mettait à faire un tapage indescriptible. Cependant, l'assistance presque

puscule

tout entière, ayant protesté contre

cette

violence

faite à sa

liberté

et

manifesté énergiquement la volonté d'entendre le morceau annoncé,

la

marche

funèbre

complet

que

;

les

dèrent

à la

de

fin

sifflets,

Siegfried

même, lorsque

les

exécutée

fut

au

milieu

d'un

silence

bravos étaient de beaucoup plus nombreux

quelques

enthousiastes

maladroits

deman-

bis.

Mais M. Pasdeloup, homme prudent, était si bien décidé à ne pas recommencer, qu'il fit aussitôt attaquer l'ouverture du FreischiU{. A ce

moment, mencer pas

le

elle,

peine

la

fureur des opposants ne connut plus de bornes et

de toutes leurs forces. Quatre

flèrent

le Freischiiti,

début

siffla

si

fois la foule

M. Pasdeloup

;

ils

sif-

voulut recom-

ahurie et qui ne reconnaissait

caractéristique d'un chef-d'œuvre souvent applaudi par

Weber pour Wagner. M. Pasdeloup

perdue

Freischûty

quatre

fois

il

tout

se

décide enfin

à

essaie alors de parler

reprendre une cinquième

fois

:

le

l'andante est couvert par des vociférations, et c'est seulement lorsque éclate Vallegro que les cabaleurs, surpris et confus en percevant ce motif bien connu, se hâtent d'applaudir à tout rompre ;


RICHARD WAGNER pour colorer leur méprise l'applaudissaient.

les

:

Jamais,

uns

enfin,

sifflaient

255

encore

Webcr que

d'autres

depuis les glorieuses représentations

de Tannhcvuser, foule rassemblée dans un théâtre ou dans un cirque n'avait prouvé avec plus d'éclat son ignorance et sa versatilité.

Ce

fut bien

inattendu

fit

pis

quand

les

journaux se mirent de

la partie

;

ce conflit

tant noircir de papier et débiter de sottises qu'on a peine

à s'y retrouver. D'abord, la plupart des écrivains qui se jetèrent dans la

mêlée étaient aussi ignorants de

LE

la

question posée par l'œuvre que

THÉÂTRE DE lîAYREUTH DANS SON ETAT ACTUEL Avec

l'avant-corps rectangulaire ajoinO au printemps de 1SS2.

de l'œuvre elle-même,

pour mieux charger

et,

le

pauvre M. Pasdeloup,

pour incriminer avec plus de vraisemblance son manque de patriotisme, ils crièrent bien haut qu'on n'avait pas entendu une seule note de Wagner aux Concerts populaires depuis 1870 c'était là une erreur :

manifeste,

car,

depuis

deux ans

revenaient régulièrement soulever

aucun tumulte

sur les :

déjà,

ses

principales

compositions

programmes de M. Pasdeloup sans

tout au plus les

sifflets

de rigueur lancés

par des opposants désespérés ou par de mauvais plaisants en humeur de rire; il était dans la tradition, pour s'amuser, de siffler quoi que ce fût de Richard Wag^ner.


RICHARD WAGNER

256 Il

tains

que

savoir aussi

faut

écrivains engagés

jadis à propos de

les plus

forcenés clans l'affaire étaient cer-

par des articles,

méprisants ou joyeux, écrits

Tannhœiiscr, et qui, ne pouvant pardonner au com-

du verdict rendu par eux à la venvole, séchaient monde musical ne tenir aucun compte de leur arrêt et déses-

positeur de s'être relevé

de voir

le

même

péraient d'imposer leur opinion, habile que de

l'homme au

proscrire

en F'rance. Alors quoi de plus

lieu

de

du musicien, en raison non ses œuvres, mais de sa

nationalité

?

tapage

le

patent

fait est

organisé ce

pas

n'était

pour

faite

Le

:

jour-là

une manifestation empêcher Wagner

de reparaître sur

le

programme

des Concerts populaires, puis-

y avait repris une large c'était place depuis deux ans

qu'il

;

le

musicien seul qu'on voulait

écraser, sans l'entendre,

comme

cela s'était passé aux représentations de Tannhœitser, et parce

que

anciens

ses

enrageaient de si

malgré leurs de train 11

cette fit

dit le Miisicion

de

[Le Sifjla.

l'.tvcnir, -i-j

.noût

par H. Mcyer.

regagnait

fond

reculer

par

si

bien que

bagarre ne

le

d'une

et

ligne

fait,

le

nier épisode violent de

la

pagne

1S76.)

perdu,

attaques à

bruyante

pas

regagner

terrain

'.

le

que ce

WAGNER,

le voir

tout le

vite

détracteurs

fut,

le

poursuivie

en

der-

camFrance

depuis vingt ans et plus contre l'auteur de

Tannhœuser.

11

y avait

même un

attaque haineuse que tous les auditeurs de ils

eurent bien quelque mérite,

cette

marche

entendu

la

si

difficile

tétralogie.

il

tel

parti pris

dans cette

sens rassis protestèrent; et

faut le dire, à écouter religieusement

comprendre pour ceux qui n'avaient pas Elle est généralement admirée, aujourd'hui, à

o Merci 1. (Ju'il nie soit permis de citer ici la lettre que M. P;isdeloup m'adressait à cette occasiun de m'aider dans mon œuvre. Votre article si vigoureux du Français (fi novembre) me donne l'espoir que nous pourrons surmonter l'obstacle. Si nous devions rester étrangers au mouvement imprimé à la musique par Wagner, dans une trentaine d'années, no:; jeunes compositeurs pourraient bien être de :

petits vieillards.

Kncore une

fuis merci.

»


D ta a:

-

"i

<

~

H

-S


RICHARD WAGNER

258

parce qu'on sait tence du

ment

héros

qu'elle

qui

vient

ensemble,

reliés

comme un

offre

tableau raccourci de

de mourir, et que ces motifs, à

faciles

si

reconnaître

l'exis-

admirable-

si

au passage, sont de

courts rappels de mélodies déjà entendues dans les situations principales

où Siegfried a paru. Mais, en 1876, c'était pour les auditeurs français toute une éducation à faire, et, quand on y réfléchit, de

la tétralogie

demeure étonné qu'un public aussi enclin à railler ce qu'il ne comprend pas tout de suite ait voulu, dans cette circonstance, écouter sérieusement une œuvre sérieuse en faisant taire à la fois les rires et les sifflets. C'était là un très beau succès pour Richard Wagner'. Pendant qu'on bataillait en France autour de son œuvre et de son nom, Wagner, pour se remettre des fatigues de Bayreuth, voyageait en Italie et y recevait un accueil dont il était vivement ému, car il on

un jour rencontrer

n'aurait jamais cru, au début de sa carrière, devoir

de

telles

sympathies sous

séjour de quelques

le

Après un

de Donizetti et de Verdi.

ciel

semaines à Sorrente,

Rome, où

par

repassait

il

le

baron de Keudell, ambassadeur d'Allemagne, donnait une grande soirée en son honneur, où l'Académie de Sainte-Cécile honorifique il

assistait

à

une

le

à

plus élevé, celui de Sociiis

Bologne

représentation

avait

il

Ricn{i

de

illiistris;

qui

et,

le

grade

cette

ville

magnifique

une

valait

lui

le

décembre,

5

de

de citoyen

titre

le

décernait

lui

ovation.

Mais une

fois

de retour à Bayreuth, une

quand

dissipées et les lampions éteints,

exact de

la

il

fois les

voulut se rendre un compte

situation matérielle de son théâtre et de son

se trouva en face de chiffres décourageants.

de

la tétralogie à

n'en

avaient

pas

moins le

dans

laissé i'"'

pressant appel aux Sociétés

sa

janvier

Wagner

caisse

un

le

il

maître, elles

de

déficit

lançait-il

1877, :

entreprise,

Certes, les représentations

Bayreuth avaient été glorieuses pour

i5o,ooo francs. Aussi,

le

fumées du triomphe

de

I25

à

Bayreuth un

mille cartes patronales, donnant

droit d'assister à l'une des trois séries de représentations annuelles,

marks (i25 francs); de plus, il conseillait à ses adhérents de demander au Parlement un subside de 100,000 marks pour aider au progrès du nouvel art national allemand étaient offertes au prix réduit de

100

;

mais

il

dut presque aussitôt renoncer à cette idée

devant

la

certitude

I. Quelques-uns, dans les journaux, rirent beaucoup de ce titre le Crépuscule des Dieux; d'autres s'amusèrent fort du sujet général des Nibelungen. Ces beaux esprits retardaient de quelque cinquante an?, car cette légende avait e'té connue et étudiée en France même, dans des travaux littéraires très importants, bien avant que Wagner ne se l'appropriât. Et puis n'était-il pas imprudent de demander, même en riant, ce que cela pouvait Être? On donnait à penser par là qu'on n'avait jamais lu Henri Heine ni les pages admirables où il a résumé tout le poème des Nibelungen. Quand on veut faire rire, il faut tâcher au moins que ce ne soit pas à ses dépens un bon plaisant est décidément une :

:

pièce rare,

comme La

Bruyère

l'a

remarqué

il

y a longtemps.


RICHARD WAGNICR échec

d'un

Après mon expérience antérieure, toute attente d'une de la part du gouvernement fut abandonnée. »

«

:

aide effective

Le passage pour éviter

259

le

plus curieux de cette circulaire est celui où

hasardées

appréciations

les

et

critiques

les

Wagner, qui

hostiles

Nibelungen, pour ne plus entendre aucune au milieu d'un si beau concert de louanges, recom-

s'étaient produites après les

voix discordante

mandait aux Sociétés Wagner de ne gens

suffisamment

initiés

tout

et

laisser

à

venir à Bayrcuth que des

bien

Fait

disposés.

regrettait de n'avoir pas exigé pour la tétralogie, et cela

même, ah

grand Dieu non

!

REPRÉSENTATION DE Guruemanz conduit

les

auditeurs

dans le

il

;

œuvre.

y>

Et

«

PARSIFAL

PavsifaI au château

ne voulait pas,

la situation fausse

seul but

mais par égard pour

I

de

était c'est

ce

ils

troubler qui fut

»

A

les artistes et

lui-

pour

BAYREUTH, EN l882.

du Giaal.

disait-il,

C'est ce qu"il

non pour

Acte

«

l^"'',

dctixiènic tableau.)

replacer ses vrais partisans

aux côtés de gens dont représentation et de combattre son

s'étaient trouvés, la

pratiqué,

au moins pour

les

deux pre-

mières représentations de Parsifal. Afin de combler ce gros déficit de i5o,ooo francs qui pesait uniquement sur lui, Wagner laissa d'abord un imprésario prendre possession

des décors désormais inutiles à Bayreuth et colporter la tétralogie de ville en ville ce qui était la négation complète de son idée mai-

tresse

;

— puis

il

entreprit

lui-même une excursion qui pensa

1

entraîner

dans d'inextricables embarras.

Sur

le

conseil du

grand violoniste Wilhelmy, un de ses tenants

les


RICHARD WAGNER plus

dévoués

accepta

et

qui

partie

sa

faisait

donner à Londres

d'aller

alternativement

Hans

avec

à

des

concerts, qu'il

La

Richter.

Bayreuth,

Torchestre de

bonne

devait

nouvelle

annoncée au peuple anglais par une lettre insérée dans maître faisait une propagande active en faveur du

«

diriger

bientôt

fut

Times, qui

le

:

il

Souvent

j'ai

reçu d'Angleterre dans ces dernières années des invitations à de semblables

écrivait

entreprises,

Vous savez

Wagner

à

Wilhelmy,

i5

le

mars 1877.

pas dans mes idées de donner des concerts

qu'il n'entrait

proprement dits; je voulais toujours inviter à Bayreuth ceux qui avaient le désir de

me

connaître.

nière, et je

me

Il

paraît que, de cette

notamment

vous

bons amis. Vous, cher

m'avez

d'une

invité

façon

m'y décide,..

je

»

que Wagner ne pouvait pas

est

si

personne persuader

pressante à venir en ces derniers que

en Angleterre,

aussi

suis acquis de

ami,

ma-

Le

fait

se mettre

en contradiction avec lui-même d'une façon formelle

plus

pas

diriger,

non

non pas une ou deux parties entières, mais

l'ensemble de

même

venant

qu'en

tétralogie,

la

des sélections, selon

la

mode

anglaise, des

morceaux ou fragments découpés dans divers ouvrages,

depuis

Rieii:^i

ses

jusques et

y compris les Nibeliingen.

même

L'organisation fut

assez

difficile;

il

de

fallut

ces

concerts

toute

l'énergie

du conductor Edouard Dannreuther et l'influence personnelle de Wilhelmy, qui avait RICHARD WAGNER. {The Hornct, de Londres,

<i

pris le poste de

mai 1877

)

monter tant d'obstacles accumulés. D'abord, à ce

ture de la

par

MM.

«

saison

»

Mapleson

premier violon, pour sur-

moment

qui concordait

avec l'ouver-

à Londres, tous les bons artistes étaient accaparés

Gye, à Drury-Lane

Covent-Garden, sans parler des orchestres permanents du Cristal Palace et de la Philharmonie ; il fallut donc faire venir des instrumentistes d'Allemagne, de Hollande, de Belgique, etc., et ce ne fut pas une petite aflfaire que de dresser cet orchestre cosmopolite de cent soixante-huit musiciens et

et à

;

peu à peu cependant, après qu'on eut péniblement pataugé, la lumière se ht et tout était à peu près d'aplomb lorsque Richard Wagner et

Hans Richter

arrivèrent

le

3o avril pour les dernières répétitions.


RICHARD Six concerts, les uns

donnés

et le furent

le

en cfFet

soir,

\va(;ni;r

les autres

les 7,

rimmense enceinte d'Albert-Hall

10,

261

raprcs-midi, i;-!,

i5,

devaient être

— dans

mai

17 et iq

qui peut contenii- de 10 à

i2,<)0()

audi-

en général, ces séances attirèrent beaucoup de monde mais il en aurait fallu bien davantage, tant on avait dépensé d'argent pour teurs

:

;

RICHARD WAGNER EN 1S77.

D'aprcs une photographie

les

annonces

neurs

Hodge

et les

en

réunissant

séduisants pour

le

Londres.

les

en diminuant

les

dépenses

le

plus possible

ces

deux programmes

les

morceaux

public.

Cette idée eut un

bon

résultat

sur

entrepre-

imaginèrent de donner deux concerts supplé-

mentaires à prix réduits, et

à

appointements des chanteurs. Alors

Esse.v

et

faite

;

les

plus

mais cela


RICHARD WAGNER

262

ne

pas encore à combler

suffit

le déficit.

Wagner

furent pas couverts et

Les

frais

mêmes

des concerts ne

dut abandonner une partie de

somme

la

arrangements conclus à l'avance avec les qui entrepreneurs, pour que tous les artistes ayant concouru au festival pourtant, il put encore envoyer à Bayreuth plus fussent désintéressés revenait d'après

lui

les

;

de 700

Un à

st.

1.

(17,500

fr.)

peu de chose après un

c'était

:

si

grand

de Londres avaient eu l'idée d'ouvrir

instant, ses admirateurs

son insu une souscription pour liquider complètement

Bayreuth,

réuni une somme considérable lorsqu'on un autre moyen de se tirer d'affaire et que avait trouvé

apprit qu'il

employés à éteindre cette des

déjà versé

douce surprise,

Munich

seraient

souscripteurs anglais, qui

les

remboursés

furent

fonds,

de leurs

maître une chaude

reçurent du

et

Alors,

dette.

ciements à ses amis d'Angleterre. Bref, à Londres

avances,

remer-

de

lettre

comme

à Bayreuth,

opération financière et grand succès musical'.

triste

Ce

y a de particulier,

qu'il

Albert-Hall pour voir

tout à

que

c'est

Anglais, qui venaient sur-

les

personne de Richard Wagner, mar-

la

quèrent une grande préférence à Hans Richter

passif de

le

et ils avaient déjà

tous les bénéfices des représentations de la tétralogie à

avaient

effort.

dès

cela

et

On

premier concert.

le

comme

chef d'orchestre,

y jouait d'abord

le

Kaiser-

marsch, puis des fragments de Rien{i, de Tannhœitser et du Rheingold.

Après des répétitions aussi précipitées, produisit quelque

accroc

comme

à son

ordre

aussi lorsque

;

en survint en

il

;

était à craindre

il

effet

était ;

et qui alla

pourtant,

pour

ou plutôt avait été, un chef d'orchestre

le vrai

avait le

tants; mais force,

ce

Londres

à

qui

Ces concerts

et

de Beethoven surtout

il

style

;

outre un sentiment parfait de

la

mouvement et de la précision du don de communiquer son enthousiasme aux exécu-

beauté du son, des nuances il

remporta personnelle-

tant sa profonde admiration pour ces maîtres lui

trouver d'instinct

rythme,

il

grandissant de concert en concert.

œuvres de Weber

les

n'avait pas de rival, faisait

Wagner, nerveux

manqua de sang-froid pour tout remettre en après lui Hans Richter vint diriger le Rheingold

ment un succès énorme exceptionnel

ne se

naturel,

avec une puissance, une sûreté merveilleuses,

Wagner

et

qu'il

n'était

il

fut

du

au-dessous de lui-même.

pas étonnant à cet âge,

et,

les

II

manquait de répétitions le

coûter au bas mot 60,000 I. st. et les entrepreneurs perdirent au moins 5, 000 1. y en avait quarante-huit, reçut 10 guinées pour les six concerts (une guindé, 2Û fr. 25, pour un concert et une répétition, plus une demi-guinée par répétition supplémentaire); les deux concerts de supplément leur furent payés 2 guinées, répétitions comprises. Tout l'orchestre à proportion et les instiuments à vent plus cher il y avait six flûtes, sept hautbois, huit clarinettes, huit cors, sept bassons, cinq trompettes, cinq trombones, cinq tubas, deux paires de timbales, une grosse caisse et des cymbales, un tambour basque et des castagnettes, un tambour, sept harpes, quinze altos, vingt violoncelles et vingt-deux contrebasses quel orchestre monstre! I

st.

.

Chaque

(.lurent

violon, et

il

:

:




RICHARD WAGNr:R fatiguant,

avait

il

bras faible,

le

irregulier,

quelques défaillances de mémoire

mière répétition, le

en conduisant

"Wagner des anciens jours

non pour

soir;

le

ce

bref,

;

suffisait

montra aussi

il

guère qu'à

n'est

Kaisennarsch, que

le

cela

:

2Ô3

pour

la

pre-

retrouvé

s'était

musiciens, mais

les

le public. le maître avait amenés avec lui étaient en partie Nibelungen à Bayreuth M'"" Materna, SadlcrExter, MM. Unger, Hill, Chandon, Schlosser, etc.,

Les chanteurs que interprètes des

des

Griin, et

M""

:

"Waibel et

A

tous obtinrent un succès considérable.

on rappela

"Wagner,

trois fois

la

du premier concert,

fin

et les princes et princesses

de

la famille

Tannhœuser pour le troisième Mais cela ne marchait pas tou-

royale redemandèrent les fragments de concert, auquel

voulurent revenir.

ils

encombre à la quatrième séance, il se produisit un tel désarroi dans le duo de Lohengrin, par la faute du ténor Unger, indisposé, qu'il fallut s'arrêter au milieu et complètement supprimer les morceaux du programme où ce chanteur devait reparaître. Aux jours sans

:

concerts suivants, de grands

applaudissements accueillaient encore

la

la marche funèbre de Siegfried, les fragments des Maîtres Chanteurs et surtout ceux de Tannlianiser, après lesquels l'auteur et ses deux lieutenants, Richter et "VN'^ilhelmy, étaient appelés dans la loge royale et fort complimentés. Les deux séances supplémentaires permirent de faire entendre les morceaux de Siegfried que l'indisposition du ténor Unger avait fait rayer des précédents programmes; enfin, après le dernier concert, Richard Wagner, rappelé sur l'estrade à grands cris, remercia vivement l'orchestre en ajoutant

chevauchée des Valkyries,

qu'il

bien

espérait

«

de Londres

artistes

Le vœu

était

être

et,

de parler vie,

de raison, Je

«

:

dit-il,

le

la

part

il

n'avait pas laissé

mais parmi

Peu de

oeuvres,

jours

M"""

paraître en

je

auparavant,

le

mon

que

celles

j'ai

souvenir entre

tous, qui avez

mai,

17

de Parsifal, qu'il

volume

ma

donné votre coopévous remercie du plus profond de mon cœur. »

Vous

Edouard Dannreuther,

entier

à cette

:

belle occasion

si

m'ont été données,

les rares qui

il

réuni

avait

dans sa demeure d'Orme-Square, 12 (Bayswater),

M. et poème

dont on

un grand banquet

offert

échapper une

passées à Londres au milieu de vous resteront dans

mes

homme

d'un

pas eu beaucoup d'heures heureuses dans

n'ai

les plus belles et les meilleures.

ration à

encore avec les

fois

soixante-cinquième anniversaire

cercle choral allemand lui avait

le

comme

rapport plus d'une

un peu téméraire de

venait précisément de fêter occasion,

en

«.

à la fin de la

et leur avait

avait

même

donné

apporté avec année. Fnfin

lui il

quelques amis logeait

il

la

et

chez

primeur du qui

quitta

devait

Londres


RICHARD WAGNER

264 11-

non sans avoir marqué de nouveau

juin,

4

garderait

qu'il

plus

le

doux souvenir de ses amis anglais.

Une

de retour à Bayreuth, Wagner, sans se désintéresser de

fois

Parsifal, s'occupa avant tout de fonder en cette ville un Conservatoire

où seraient admis

dans

une

des

musiciens ayant déjà reçu une éducation complète

les

existantes

musicales

écoles

auraient passé là six

ils

;

que chanteurs, à

instrumentistes

tant

années

et

Tesprit

des œuvres du maftre, afin de participer ensuite à l'exécution

se

seraient

initiés,

de

que possible des créations national allemand personnifié par

parfaite

aussi

l'art

Richard Wagner. Dans sa pensée, suffire

de 10,000 marks pour organiser

les

première année, après quoi

les

cours de

la

fournies

recettes

par

concerts permet-

les

traient d'établir les cours

années.

aux

Ce

des

des

des

Conservatoire

priétaires,

les

les

frais

char-

de ce

Conservatoires,

en seraient, par

qu'elles

Wagner

Sociétés

subvenir à tous

de

cinq autres

projet fut exposé par le maître

déléo^ués

gées

devait

il

fait,

le

élèves, à leur

puis-

pro-

les

étant

sortie,

de droit membres du comité de patronage.

Mais Wagner

toujours de recettes

parlait

magnifiques sans qu'on en

vît

poindre au-

cune, et les délégués, déjà fort inquiets du

gros déficit des représentations de Bayreuth, de l'échec financier des concerts de Londres,

sourde

firent la

idéal eut l<

.('//if

I

C HA RD

\V A

GN

K

K

encore moins de succès à Bayreuth

.

qu'il n'en avait

obtenu à Dresde

Mu-

et à

nich.

if^yy.)

Cependant,

Wagner

à l'automne de

1877 ^"^

'^^^

représentations futures de Parsifal se

fondirent

Bayreuth i5

Conservatoire

MiisiCiiliWorlJ. de Londres,

id mai

mées

oreille, et le

et

marks;

Wagner,

dont

en les

les différentes

Association

le

s'ils

encourager

générale

annonce eut un

on

plus

recruta

sociétés

déjà

fit

les

for-

ayant son centre à

contribution

annuelle de

Enfin

de Parsifal l'objet précis,

perspective immédiate de l'entreprise à laquelle cette simple

des comités

voulaient, de donner davantage.

public,

le

réunion

moins pour résultat d'assurer

membres payèrent une

libre à eux, ]-i(nir

une

:

cette

cifet si favorable

de deux cents membres

on

allait souscrire,

que, dans l'année

en Allemagne

et

la

et

même,

ailleurs.


=0

^

J4

-3


RICHARD WAGNER

266

Cependant

comme par

École de style

«

annonça

à

la

de

Parsifal (après

les

deux

3o marks par place

patrons) au prix de

et

décidait

quatorze

premières réservées aux par représentation.

idée, entièrement contraire à son précédent projet de rendre

Bayreuth de plus en plus fermées,

sentations de

Wagner

de Parsifal,

En même temps, il monde et de donner

première.

d'ouvrir le théâtre de Bayreuth à tout le

représentations

et

suffire à la fois à l'établissement

et à la représentation

«

renonçait

qu'il

dix-sept cents,

180,000 marks, réunie tant par les cotisations que

dons volontaires, ne pouvait

les

d"une

nombre des patrons ne dépassa pas

le

somme de

la

était

Cette

les repré-

excellente

et

devait donner des résultats fructueux.

En mai

1881, la tétralogie, qu'on avait déjà exécutée en entier dans

différentes

sentée

Berlin

à

notamment

villes,

mais ce ne

;

dente, on avait bien

dit

Hambourg

à

et

Leipzig,

à

repré-

fut

pas au théâtre royal. L'année précé-

fut

que l'Anneau du Nibelung

joué

allait être

à

l'Opéra de Berlin; mais cette nouvelle avait laissé incrédules ceux qui connaissaient et les sentiments de Richard

intendant

général

des

Hiilsen

pour Richard

pouvait

lui

offrir

de Hùlsen,

M. de

royaux, et les sentiments de

théâtres

Wagner.

insuffisantes,

Wagner pour M.

L'un

et

ressources

qu'on

l'autre estimait les difficultés

d'exé-

trouvait

les

cution insurmontables; l'intendant, surtout, ne voulait pas s'astreindre à

donner

les

ouvrage,

quatre parties

ni à les

de

la

tétralogie

comme formant un

présenter dans leur ordre naturel.

du théâtre de Leipzig, Neumann, voulant

Cependant,

le

directeur

faire

entendre

la

tétralogie à Berlin, s'aboucha avec l'intendant

dont

la

tâche

seul

aurait

singulièrement simplifiée en

été

cas

ce

royal

qui

et

consulta là-dessus l'empereur, qui se

paraissait devoir

accepter,

souvint assez de

Bayreuth pour se désintéresser complètement de

question

les

;

— mais

d'orchestre.

senter

la

loua donc

artistes

pourparlers se rompirent sur

M. Neumann sur

tétralogie

apprécié de il

Alors,

Richard le

il

reprit

un théâtre

Wagner

la

question du chef

son idée première

libre,

avec un

la

de repré-

chef d'orchestre

et bien pénétré de ses idées,

M.

Seidl

;

théâtre Victoria, forma une troupe avec les meilleurs

de Leipzig, renforça l'orchestre symphonique de Berlin avec

les

membres de

l'orchestre de Leipzig et put donner enfin l'Anneau du Nibelung dans des conditions favorables, sans imiter néanmoins toutes les innovations de Bayreuth. Le rideau s'ouvrait bien verticalement et le commencement du spectacle était annoncé par une sonnerie de

trompettes,

mais

il

ne

faisait

pas nuit complète dans

la

salle

et l'or-

chestre demeurait visible, quoique placé en contre-bas.

Le Rheingold dépassa tout ce qu'on pouvait attendre

et la

Val-


RICHARD WAGNER kyrie, en dépit des longueurs,

267

eut aussi un succès considérable; mais

Siepfried réussit beaucoup moins qu'à Bayrcuth, peut-être par Finsuffisance du ténor chargé du rôle principal enfin, le Crépuscule des ;

Dieux répara ce mauvais effet et

Wagner, rappelé

toire. Alors,

naissance

pour

le

dernier acte enthousiasma l'audi-

le

sur

chef d'orchestre

exprima toute sa recon-

scène,

la

et

pour

le

directeur,

7/7îrt^,//t'

enfin

pour

f^/-'

m;aterna dans kundrv,

M""'

au deuxième acte de Parsifal.

M™' Materna,

la

digne représentante des

surpassée elle-même dans

le rôle

de Brunehild, mais à côté

moins trois artistes incomparables dans Loge, Lieban dans Mime; et, parmi avait au

même tions

préférables à à

Berlin,

d'excellents

Wagner

résultats,

:

parfaites

durent

de

tout

être d'autant

qu'elles avaient lieu devant

d'elle

il

y Scaria dans Wotan, ^'ogl

les autres,

leurs prédécesseurs de

presque

Elle s'était en effet

artistes.

beaucoup étaient

Bayreuth. Ces représentapoint plus

et

qui

donnèrent

agréables à Richard

un auditoire ordinaire, qui

n'était


RICHARD WAGNER

268

prévenu ni pour ni contre l'œuvre succès de Bayreuth.

Cepenchmt Wagner

poème de

ce

confirma sans restriction

qui

et

délibérément à Parsifal.

travaillait

le

avait tiré

Il

légende du Graal,

la

chantée par les trouvères allemands

notamment par Chrétien de Troyes et par Wolfram d'Eschenet français,

bach, qui ont célébré cette réunion

de

chevaliers

voués

au

les

joies

fuyant

Christ,

du

culte

profanes

pour se consacrer à la garde du Graal c'est-à-dire de la coupe

dans laquelle Jésus a bu à

Cène

qui

et

a

reçu

sang du Crucifié dont

Longinus,

le

la sainte

plus et

tard

de

la

le

M

lance

soldat romain, a

le

HC DES

P^f

M^ \TUi tHHTcm

DU VAiSStAU FAKTofviC-

rAAp.fHC

du Sauveur. Wagner, depuis longtemps déjà, marquait un percé

A

ilanc

M.

l'ASDEI. OUI>

ne se méfiant pas assez des marclies de M. Wagner.

certain penchant au mysticisme, vers

novembre

(Chani, Charivari, 12

1S76.)

un christianisme riche en miracles, et

il

cédait à cette grande et religieuse inspiration lorsqu'il écrivit son

Parsifal, qui n'est plus

lyrique

à

yeux,

ses

même

mais

un drame

œuvre

une

solennelle destinée à consacrer la scène (ein

BiihnenweihJéstspielJ

n'est pas sans raison

mand i<

a

pu

en

Parsifal est

de

l'amour

des

porter

le

dès lors ce

jugement

ce

:

Cantique des cantiques

divin,

cantiques

;

qu'un critique alle-

comme

Cantique

le

de l'amour terrestre

est

Tristan. »

Le maître

avait

écrit

poème

le

à

Bayreuth de 1876 à 1877, en reprenant son ancienne ébauche de Zurich quant ;

à

la

[L'Éclipsé, 3 septembre 187Ô.)

plet acte, déjà fort

après

Noël,

d'avril

187g; mais avant

il

avancé à

abordait

le

la

il

la

commença

précisé-

ment dans sa soixante-cinquième année. Le scénario du premier acte était com-

LE TETRALOGUE WAGNER, PAR GILL.

deuxième

musique,

fin

au

printemps

la mi-juin, était

troisième

qui

de

terminé

l'occupait

1878, le

1

1

et

le

octobre;

jusqu'au

mois

de cette année, une assez forte attaque


RICHARD WAGNER de son

vieil

ennemi

sud de ritalie. (on

se

Il

269

l'érysipèle le força à chercher un refuge

n'en

clans

le

continua pas moins son travail d'orchestration de Meiningen avait déjà exécuté le

rappelle que Torchestrc

prélude à Bayreuth ce long travail dans

des Palmes,

le

pour le

Noël de 1878) et mettait le point milieu de Ihiver suivant, à Palerme, à la

i3 janvier

final à

riiotcl

1882.

TT-i

^^^^^f/'^^^

PARSIFAL

(m.

JŒGER) ET LES

F

1

LL

t.

S- t

LEUR

S

,

au deuxième acte de Parstjal.

Le

dénouement de Lohengriu pourrait servir d'avant-propos à Parsifal, puisque Lohengrin est le fils de Parsifal, roi du Graal, et qu'une fois sa mystérieuse origine dévoilée pour satisfaire la curiosité d'Eisa, il doit retourner à Monsalvat parmi les récit

qui forme

le

chevaliers gardiens du Graal. Ces chevaliers,

lui-même en

faisant

apparaître

leurs

le

Saint-Graal les choisit

noms au bord d'une coupe,

et


RICHARD WAGNER

270

qui

lui

c'est

descendant du de

chevaliers

Graal

le

vase sacré,

déposant une

et

vue

suffit

Parsifal

est-il

la

à préserver

devenu

ces

du

roi

?

Au moment où

drame commence,

le

Amfortas

mais

;

celui-ci

à des séductions impures.

dresse

la citadelle

son indignité a

filets

de

cieuse,

face de la citadelle chrétienne se

en

désert

le

un

de

séjour

peuplé

délices

fleurs,

qui ont déjà su prendre en

plus d'un chevalier. Amfortas,

s'armant d'une relique pré-

d'enchanteresses à leurs

En

suc-

a

il

fils

du paganisme, élevée par le magicien Klingsor, que fait chasser de l'ordre du Graal et qui veut venger cette

transformé

a

il

:

trône à son

le

plus digne de gouverner, car

n'est

combé

injure

Titurel, fondateur et chef de

du Graal, se sentant mourir, a déjà cédé

l'ordre

s'est

dont

Mais comment

mort.

la

année,

vendredi saint, chac^ue

le

ciel

blanche hostie dans

miraculeuse, une colombe

d'une nourriture

soutient

les

la

la sainte

fois

filles

et

lance avec laquelle on perça

le flanc

du Sauveur,

mis en campagne pour vaincre Klingsor, mais lui-même a cédé

au charme fatal

Klingsor, saisissant l'arme sacrée, en a frappé

:

le roi

qui, depuis, souff"re d'une blessure toujours saignante...

Un

libérateur doit venir, un jeune garçon, pur de corps et d'âme,

mais ce libérateur se

toujours

fait

guérir la cruelle blessure d'Amfortas, pas

fond de l'Arabie par une

nul onguent ne peut

attendre, et

femme étrange

même

baume apporté du

le

et mystérieuse, à l'air sauvage,

aux vêtements misérables, toute dévouée aux gardiens du Graal, mais soumise par instants au pouvoir du magicien Klingsor, qui la trans-

forme alors en une femme divinement pour

jamais

belle, la plus redoutable qui fut

du Graal. Telle

chevaliers

les

est la

double destinée de

Kundry, qui ne sera délivrée qu'après qu'une àme pure aura

résisté à

ses séductions. Alors seulement, elle trouvera le repos, le repos qu'elle

cherche en vain depuis des siècles

dans

croix, la sistible

Jérusalem

rues de

les

le

malheureuse femme a à

travers

le

monde,

;

car depuis

le

ri,

elle

riant

est

voyant

jour où,

Sauveur accablé sous

le

poids de sa

poussée par une force d'un

toujours

rire

irré-

déchirant,

ne

pouvant pleurer, ne pouvant mourir.

Ce sauveur, ce sera chevalier Gurnemanz a indispensables.

Parsifal

Gurnemanz reproche

Parsifal, qui entre en scène après

tué

d'une

flèche

;

en

Graal

:

il

lui

l'être

vieux

un des cygnes sacrés

ce sacrilège à l'impétueux

chasseur égaré sur

domaine du Graal le jeune homme, touché de repentir, carquois, et le bon chevalier, frappé d'une telle candeur, naître

le

de raconter à des pages ces préliminaires

fini

a

que

naïf et

brise

le

château de

le

arc et

croit recon-

pur (reinige ThorJ qui pourra sauver

l'emmène alors vers

et

le

Monsalvat, où Parsifal,



RICHARD WAGNER

272

cérémonie de

attentif et muet, va assister à la

de

et

la

communion des

Des chants

chevaliers.

religieux se

Des enfants apportent

consécration du Graal

la

font entendre sous les arceaux du temple.

Graal, enfermé dans un riche écrin

le

leur

à

;

on amène Amfortas, couché sur son lit de douleur mais le malheureux roi se regarde comme indigne d'élever de ses mains vers le suite,

ciel

;

coupe sacrée

la

plusieurs reprises son

qu'à

faut

il

:

père Titurel

ordonne de remplir cet office pour qu'il s'y décide; alors, du haut de la coupole, un chœur invisible chante les paroles du Christ à la sainte Cène, le temple s'assombrit, un rayon lumineux descend sur la coupe, le sang y bouillonne puis la

lui

;

lumière

divine

pâlit

et

s'éteint,

jour

le

reparaît, les chevaliers vident leurs calices

mangent

et

pain

le

qu'une main

sacré

Tandis

mystérieuse a placé devant eux.

que

chants reprennent, tous les assis-

les

reforment

tants

leur

cortège

dispa-

et

raissent dans les profondeurs du temple...

Etonné,

et celui-ci le

de

irrité

,

trouver

le

que

Klingsor

côté,

veille.

Kundry

alors

et

iWinilr

F.lir,

a

de Londre'!. lo

m;ii

déjà

jamais

1877.)

fuser,

mais

doit

elle

au

mal, a passé,

du

maître

elle

:

sans

même

soupçonner

douce tendresse

se laisse aller à cette elle

le

voile

se

qu'Amfortas, cruelle,

il

lui

elle

offre

lui

dans

le

danger, au milieu

affectueusement de sa

parle :

à la place de l'amour

un autre amour plus voluptueux,

appuie sur ses lèvres un

déchire, et,

des

apparaît à Parsifal

mère,

maternel,

à

re-

Kundry

dans ses bras,

ruiner

gardiens

espérances

des filles-fleurs; mais lorsque il

elle

merveilleuse beauté. Celui-ci, protégé par son igno-

tout l'éclat d'une

rance du

obéir

il

La malheureuse Kundry veut

les

Graal.

comme

Amfortas, pour

séduit

;

commande

lui

de séduire ce jeune innocent AVKNIR.

sait

Il

prédiction s'applique à Parsifal

la

évoque

I,

niais,

si

pousse hors du temple avec mépris.

De son

LA MUSIQUE DE

Gurnemanz

à

compris de cette cérémonie,

n'a rien

qu'il

marque

Parsifal

Parsifal

pénétré

de

se

sent

long baiser.

blessé

compassion

pour

de

la

et,

l'attirant

Tout

même

à

coup

blessure

une souffrance aussi

veut l'en guérir. Kundry, saisie d'une admiration passionnée

pour ce jeune héros, elle le supplie à

s'efforce

genoux de

lui

de l'entraîner plus avant dans l'ivresse; faire

un instant l'aumône de son amour.


35


RICHARD WAGNER

274

Parsifal résiste; elle appelle

sacrée

alors Klingsor qui

veut en frapper son

et

accourt avec

ennemi; mais Tarmc

la

lance

s'arrête au-dessus

du jeune homme. Celui-ci la saisit et trace en l'air avec la aussitôt tous les enchantements de pointe le signe de la croix les jardins merveilleux font place à un désert Klingsor s'évanouissent de

la tète

:

;

aride et brûlé.

deuxième acte et le fait un vieillard. Il devenu tout s'est établi à dernier, dans un ermitage, au pied de la montagne du Graal un certain jour, le vendredi saint, il y recueille et rappelle à la vie la malheureuse Durant

long temps qui se passe entre

le

Gurnemanz

le

est

;

Kundry, qui

se fait

humblement

Un

sa servante.

chevalier arrive couvert

main Gurnemanz lui remontre qu'il n'est pas permis de pénétrer armé dans le domaine du Graal, surtout le jour de la mort du Sauveur. Le chevalier se découvre et Gurnemanz reconnaît Parsifal muni de la sainte lance il le conduit à la fontaine où, pieusement, Kundry lave les pieds du

dune armure

visière

noire,

baissée et lance à la

:

;

voyageur qui a tant erré, tant souffert tète

pécheresse repentante, sur

sur la il

rouvre enfin

d'Amfortas

yeux

les

tout

et

la

la

lui

oint la

malheureuse Kundry, pour laquelle

larmes

source des

prend possession de

la

ensuite,

;

guérit

il

désigné par

le

hommage

la

blessure

royauté du Graal. Kundry meurt,

fixés sur la sainte relique, et les chevaliers

premier, rendent

le

Gurnemanz

puis

sacre roi du Graal. Et celui-ci verse aussitôt l'eau du baptême

le

e-t

;

à

sauveur,

leur

Amfortas

réunis,

au nouveau chef

Graal, à Parsifal.

Wagner, dans

Parsifal,

poursuivi

a

bout ce qu'on est

jusqu'au

il n"a pas écrit un seul air propreun duo, un trio, un ensemble quelconque. Rien que des jamais il n'a plus récits et des chœurs, et la symphonie orchestrale complètement subordonne la musique au drame et les chanteurs à leurs personnages, puisque le ténor ne fait pas entendre une note pendant tout le tableau final du premier acte et qu'au troisième, après deux ou trois mots, la chanteuse n'a plus qu'à jouer et mimer son rôle

convenu d'appeler son système

ment

;

dit,

;

avec toute

Mais

la force

pathétique dont elle est capable

aussi, jamais

il

— sans proférer un son.

n'a poussé plus loin l'emploi des Leitmotive, l'art

de tisser ces motifs qui soulignent et caractérisent toutes les évolutions

du drame, de intérieure

double but

qu'il

expansion

à part

Kundry

l'âme

yeux

comme

des personnages;

de l'action

car tel est

le

proposait à son génie, aussi attentif aux mobiles qu'aux

aux causes qu'aux

actes,

leur

l'action extérieure qu'on suit des

qui se déroule dans

effets.

A

part

les

chœurs qui donnent toute

musicale à quelques-uns des motifs qui raconte la mort d'Herzeleide,

la

les

plus

mère de

saillants,

Parsifal,


RICHARD WAGNER

275

dans une phrase d'un dessin mélodique large et soutenu, i! n'y a pour les voix que bribes de chant, qu'exclamations, que fragments cpars de motifs primordiaux, tandis que ces thèmes caractéristiques s'étalent ou s'enchevêtrent dans l'orchestre qui les colore et en varie les aspects à

REPRÉSENTATION DE KunJry

se trainc

«

PARSIFAL

aux pieds de

«

A

BAYREUTH, EN 1882.

Parsifal. (Acte UI,

premier tableau.)

un art admirable et nouveau, nouveau même sous la plume de Richard Wagner qui n'avait fait que l'essayer dans l'Anneau du Xibelung. 1

infini;

c'est

D'ailleurs

Wagner

innove

ici

dès

le

prélude.

On

s'attendait à quelque


RICHARD WAGNER morceau trunc cohésion parfaite où rautcur aurait résumé, condensé tout le drame avec cette puissance extraordinaire qui n'a pas d'égale entre tous les musiciens. Mais le compositeur doué d'un véritable génie a des ressources inépuisables et trouve de nouvelles formes au lieu de

un temps

toujours se répéter; c'est bien là ce qui déroute

Dans

prélude de Parsifal,

le

l'auditeur et lui

la

a simplement

voulu présenter à

mémoire les trois ou quatre motifs Pàque et de la Foi, sur lesquels il doit échafauder son poème lyrique et religieux. Dans ce dessein, il

graver dans

du Graal, de

essentiels

Wagner

public.

le

la

expose successivement à dé-

les

couvert, en les coupant par de

longs

pour

silences

déterminer;

reprend

les

il

de l'auditeur,

croit bien saisis les

mieux

les

quand

puis,

il

fond dans un

et les

ensemble méditatif

religieux

et

d'une simplicité lumineuse, malgré

la superposition

Mais

ce

diose

développement

reste

dans

pris

des thèmes.

amener

si

gran-

toujours et de parti la

demi-teinte,

aucune

sonorité, sans

sans

de

explosion

que

le

motif prin-

cipal soit poussé à sa plus haute

puissance, ainsi que teur et

tard

composi-

dans Loheugrin

avait fait

plus

le

dans

Tristan

et

IsciiltK

lOKTEUR DU SAINT-GRAAL.

Lli

Le

dans Parsifal.

prélude,

naturellement,

ne conclut pas et se

lie

scène du bois sacré où valier

Gurnemanz

épisodes

et

écuyers font

ses

intermédiaires

l'entrée

:

la

le

à

la

che-

du matin. Tous les de Kundry, le triste

prière

impétueuse

I. Dès le mois d'dctohrc 1882, qui suivit la représentation de Parsifal à Bayrcuth, on entendit ce prélude à Paris et l'on put lire à ce sujet d'étranges appréciations dans les gazettes. Celui-ci, qui tranche du savant, estime que c'est « une excellente page d'harmonie »; celui-là, qui doit être aveugle et sourd, enseigne que le morceau « commence par un ce solo de violon » cet autre enfin déclare que ^

;

qu'ilyade mieux,

une imitation de l'unisson de « l'Africaine ». Où découvre-t-il cette étrange analogie.'' Probablement dans les cijiq premières mesures, jouées en elfet it l'unisson par les cordes et les nistrumcnts de bois; mais cela n'a aucun rapport avec l'elfet de sonorité trouvé par Meyerbecr.

Sans prêter l'autre,

est

d'.\mfortas

c'est

plus d'attention à

en et

excellente page d'harmonie, coinme dit pages notamment, qui peignent la douleur son repentir, égalent ce que V/agner a jamais écrit de plus beau. soi

un

ces doctes

clieF-d'ceuvre,

et

les

critiques,

dernières

cette



RICHARD WAGNER

278

d'Amfortas

cortège

qu'on

étendu

apporte

une

sur

l'arrivée

civière,

joyeuse de Parsifal, etc., sont traités de main de maître avant d'aboutir

au tableau de

la

grandeur sans seconde, avec gens

jeunes

les voix

qu'on ne parvient jamais à bien n'avait pas

superposées des chevaliers, des

des enfants, avec cette

et

pu

page d'une sérénité, d'une

Consécration du Graal,

sonnerie de cloches

solennelle

rendre,

même

car,

Bayreuth, on

à

se procurer des cloches assez graves, et force

avait été

les remplacer par une sorte de piano à cordes énormes et par des tam-tam dont le son brutal et médiocrement juste avait déconcerté les auditeurs. Par une de ces oppositions auxquelles "Wagner excelle, cette

de

cérémonie religieuse violent où le fices

de

célébrer

malheureux Amtortas, qui

l'enter, le

passage dramatique

s'est laissé

divin sacrifice et ne cède enfin qu'en

par

faite

et

prendre aux malé-

se rappelant la pro-

Sauveur. Et cette scène pathétique

le

superbe d'angoisse religieuse est précisément ce qui donne

complète

tout le tableau, ce qui si

le

arrache ses bandages, exhale sa douleur, se refuse à

messe de rédemption et

coupée en deux par

est

grandioses des chevaliers,

et

des jeunes garçons et

le

de Kundry par Klingsor, où

le

invocations

les

la vie à

calmes

valoir les prières

et fait

si

chant séraphique des enfants.

Au second musicien

a

après l'évocation

acte,

rendu

à miracle

sauvagerie

la

infernale de l'esclave et la

haine féroce du maître par un dialogue tout composé de lements,

d'imprécations

charmé

véritablement

par l'adorable épisode où les

autour de Parsifal; un tableau souriant, poé-

Filles-fleurs s'empressent

tique,

d'une orchestration

soutenu

et

diabolique, on est délicieusement

de hur-

cris^

inondé de lumière

de

et

reflets

colorés,

une pure merveille à

tous les points de vue. Et la scène entre Parsifal et Kundry, où celle-ci

de

essaie

séduire

l'enlace en lui

tueux

et

le

jeune

homme

en

parlant

lui

de

sa

mère

et

donnant un long baiser, se peut-il rien de plus volup-

de plus troublant

Le

?

cri

de douleur qu'arrache à Parsifal

la

révélation

des souffrances d'Amfortas

marque

point culminant de l'action dramatique, est-il assez strident,

le

assez sauvage, et

Mais

cet acte,

comme si

beau

sième, où se succèdent la

pécheresse

il

Kundry.

le «

par sa

retentit au plus

qu'il

récit

soit, est

propre blessure

profond de

l'être

au moins égalé par

et

qui

humain le

!

troi-

baptême de

du bon Gurnemanz et le la prairie me semble belle aujour-

Comme

d'hui!... s'écrie Parsifal. C'est l'enchantement du vendredi saint », répond Gurnemanz. Mais Parsifal s'étonne; il lui semble qu'en ce jour de la mort du Sauveur la nature devrait être en deuil. « Non, reprend Gurnemanz, les larmes des pécheurs sont la rosée divine qui fait res-

plendir la prairie... Regarde

:

toutes les créatures rachetées et purifiées


RICHARD WACNER chantent

la

27')

gloire et la miséricorde de Dieu.

» Cette pa^c entière est de fraîcheur printanièrc et d'onction reconnaissante il n'y a rien de plus simplement beau que le moment où Parsifal verse

merveilleuse

;

X

j?ROb-7m-V€a€CN,D^S xaevsi

V A, .

<!,

s

'>i\$S

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l^

i

MENUS SOUVENIRS DE BAYREUTH, Sous

rubrique sont reunies quatre pièces distinctes du restaurant du théâtre, à Bayreuth elle forme le grand carre encadrant tous les dessins. Les deux gravures qui se présentent de biais une vue du théâtre de Bayreuth et une annonce de librairie, illustrent la serviette même, tandis que les deux autres sujets ont été rapportés pour remplir les parties blanches de la feuille. 2" et 3° (à droite, en bas). Deux cartes postales représentant, l'une la brasserie Angcrmann, lieu de réunion favori des artistes, l'autre une vue générale de Bayreuth, avec une rangée interminable de chopes; lors des exécutions de Parsifal, il parut toute une série de cartes postales de ce genre, avec la formule traditionnelle Gniss ans Bayreuth (Salut de Bayreuth). 4° (à gauche, en haut). Une carte de membre de l'Association wagnéricnne universelle, tigurani la colombe qui plane sur le Saint-Graal et portant la légende suivante, empruntée au chant du second groupe des chevaliers, dans le finale du premier acte de Parsifal: o Joyeusement réunis, frères fidèles, pour combattre avec un courage heureux. » 1°

cette

Une

:

serviette en papier

:

:

:


RICHARD WAGNER

2So

l'eau sur la tète

de

la

motif de

la

Foi; rien

ceur

le

ncmanz

pécheresse tandis que Forchestre expose en dou-

de plus délicieux que

chant de Gur-

le

une mélodie exquise à laquelle s'adjoignent les thèmes de la Cène et de la Rédemption, dont une phrase incidente a déjà figuré dans Tannhœiiser. Le finale, qui s'ouvre par la marche viose développant sur

lemment grandiose des

funérailles de Titurel, reproduit à

peu de chose

près celui du premier acte, et, lorsque Parsifal a guéri Amfortas en tou-

chant sa blessure avec

Kundry

même

lance

la

qui l'avait faite, lorsque l'âme de

est délivrée, tous les chevaliers réunis

pieusement leur libérateur

dans

le

temple célèbrent

par un chant, où

et leur roi

motif de

le

la

Foi du premier acte, accompagné par la harpe en triolets, atteint au plus haut degré de grandeur sereine et de céleste béatitude. eut complètement renoncé

Soit qu'il

à

son

drame bouddhique en

écrivant Parsifal, soit qu'il pressentît simplement qu'il n'aurait

temps

de composer un nouvel ouvrage, à diverses reprises

avait affirmé

musical

que Parsifal serait son œuvre dernière

des Nibelungen.

mais,

les

dès

fut-il s'il

avait désigné à l'avance, et

Il

premières

artistes ne pourraient pas suite,

et

kelmann

(de

même

études,

;

Marianne

il

reconnaître

dut

que

les

;

mêmes

avec des intervalles de deux et trois jours.

MM. Siehr (de deux basses pour Gurnemanz Scaria (de Vienne) trois ténors pour Parsifal MM. WinVienne), Gudehus (de Dresde) et Jœger (de Bayreuth); :

:

;

trois

cantatrices

Brandt

alternèrent

possible, à celle

chanter cette partition considérable pendant

deux basses pour Klingsor

Munich)

difficile

non sans y avoir bien

Alors on engagea

Munich),

Wagner

son testament

et

encore plus

était

le

meilleurs chanteurs des principaux théâtres d'Allemagne les

un mois de

monter,

le

une exécution supérieure,

et voulut-il obtenir

réfléchi,

de

aussi, lorsqu'il s'agit

:

pas

(de

:

MM.

Hill

pour Kundry

Berlin)

et

(de Schvverin) :

Maltcn

et

Fuchs (de

M'"" Materna (de Vienne), (de

Dresde).

Ces

artistes

entre eux pendant les seize représentations de Parsifal et

que l'exécution régulière du drame put être assurée pour Il n'y eut cependant, malgré l'importance du personnage, qu'un seul Amfortas, M. Reichmann, et qu'un seul Titurel, M. Kindcrmann; mais la partie de ce dernier est insignifiante, car il ne ainsi

c'est

toute la série.

chante qu'une seule rôles des pages, des

fois et

hors de

la

vue du public. Quant aux

chevaliers, des filles-fleurs,

ils

petits

étaient remplis en

perfection par des artistes d'élite, qui

tenaient ordinairement les premiers emplois dans leurs théâtres respectifs. Certains de ces artistes, Marianne Brandt par exemple, avaient refusé toute et,

rétribution, se Jugeant suffisamment payés

quant aux autres,

ils

par l'honneur,

ne touchaient que des appointements

très


RICHARD WAGNKR modestes au prix du dévouement, du culte

281

et

de Tamour

qu'ils

mon-

trèrent pour l'œuvre. Enfin, la direction générale était confiée au chef

d'orchestre du théâtre de Munich, plus ardents du maître

et

Hermann

Lévi, un des disciples les

qui conduisit ces représentations avec une

conviction toute religieuse. Entre tant de chanteurs

des degrés, mais

la

homie touchante faisaient

palme appartint sans conteste

et noble,

diction

la

Gurnemanz

merveille dans

;

parfaite

à

,.î)/ii

il

y eut forcement

à Scaria, dont la bon-

et

la

M™" Materna

magnifique voix, et

Brandt, deux

Nuk^B. non. biîltitjhctcp^^at

CARTE POSTALE IMAGINÉE ET PUBLIEE A BAYREUTH à l'occasion des représentations de l'arsifal.

Sur

les

expliquent

wagons, on le

sens

même

lit

:

Traiyx spécial

du dessin

pour Bayreiith,

et les

quatre vers d'en haut

:

Dans le miroir magique du Graal Klingsor voyait s'approcher Parsifal; Mais à pre'sent il voit avec plaisir Les trains-extra vers Bayreuth accourir.

Kundry admirables sous matique; enfin à

M"'-"

le

rapport de

Malten,

la

la

Kundry

voix et de l'expression drala

plus enchanteresse et

la

plus jolie qui se pût voir'.

Par une coïnciI. De Strasbourg à Bayreuth, par M. Gustave Fischbach (chez Fischbachcr). dence frappante, Scaria, depuis quelque temps impropre à tout exercice de son art, est mort cette gui année, à Basewitz, près Dresde, au moment même oii se rejouait à Bayreuth ce Farsifal, ayant réputé, médecin d'un fils artiste, grand Ce carrière. sa succès de lui avait valu le plus e'clatant scènes d'abord étudié le droit, puis débuté sans succès à Pesth, en 1860, et végété sur quelques héroïque et sa voix de secondaires, était incomparable dans les héros des Nibehmgen, où sa stature aux leçons tonnerre le servaient à merveille. 11 paraît avoir dû le plein développement de son talent 36


RICHARD WAGNER

282

Malgré tous les efforts de Richard Wagner, malgré ses appels réitérés aux patrons de Tentreprisc et le concours infatigable de ceux-ci, le théâtre de Bayreuth n'avait pas rouvert ses portes depuis 1876, lorsqu'on annonça les représentations solennelles de Parsi/al pour

juillet

honorée

de

La première

et

août

la

présence du grand-duc

1882.

eut

lieu

de

et

le

28

juillet et

fut

grande-duchesse de

la

Mecklembourg, du prince-héritier de Saxe-Weimar, de la princesse sa femme, de la princesse d'Edimbourg, etc. Ce fut encore une glorieuse soirée

pour Richard

Wagner,

ne put se tenir de parler; mais,

qui

remarque agréablement M. Paul Lindau, il ne parla que trois fois et pas si mal qu'on pouvait le craindre. La première fois, il dit » la seconde fois « Mais applaudissez a Mais n'applaudissez donc pas

comme

le

:

:

!

donc

!

la

))

troisième et dernière

«

:

Vous avez applaudi trop

tard

'

!

»

Les seize représentations promises de Parsi/al marchèrent régulièrement jusqu'au bout, malgré les prophètes de malheur annonçant que cela nirait pas au delà de

deux ou

trois exécutions, et, fait significatif, le

succès en fut toujours aussi franc,

vées aux patrons le

28 août,

le

troisième

et

Wagner

celle qui

l'Anneau du Nibelung

rideau

tant

:

se

donna

;

elles se

:

le

terminèrent

plaisir

le

A

sans être aperçu des spectateurs.

une cérémonie semblable à

sur

après les deux séances réser-

du véritable public

l'arrivée

par une soirée où acte,

môme

la

de diriger fin

il

y eut

clos les représentations de

avait

s'ouvrit,

personnel

tout le

exécu-

chanteurs, choristes, musiciens de l'orchestre, etc., parut groupé

la

scène

et

partant invisible

Wagner, demeuré au

public,

à

sa

place de

chef d'orchestre,

leur adressa des remerciements auxquels

toute la salle répondit par de chaleureux bravos.

Mais ce

qu'il

y eut de

mieux qu'aux représentations des Nibehingen, c'est qu'il resta, tous frais déduits, un bénéfice de 75,000 marks (cent mille francs) qui furent versés au fonds de réserve du comité central. Ce « fonds des pièces de fête »,

nouvellement institué, avait pour double but d'assurer

la conti-

de Bayreuth et de fournir les moyens, aux artistes ou amateurs pauvres, de venir assister à ces représentations. A partir de ce jour, l'avenir du théâtre paraissait garanti, et l'on ne doutait plus d'y pouvoir redonner Parsi/al, qui demeurait exclusivement réservé pour Bayreuth-. nuation des fêtes

de Garcia, à Londres, pendant toute une année à son retour, il conclut un engagement au théâtre de Dessau, puis chanta à Leipzig et à Vienne. Après la mort de Wagner, il était devenu le metteur en scène habituel des représentations de Bayreuth. Il avait, dit-on, la rage de spéculer sur les grains, et ses .soucis financiers ne durent pas être étrangers à sa folie il est mort avant d'avoir qu'il prit

:

:

atteint quarante-six ans. 1.

Richard Wcigiwr, par M. Paul Lindau (chez Hinrichsen,

2.

On

1S84,

on

à Paris). a eircciivemcnt reloué tous les ans Parsi/al à Bayreuth, sauf en i885. Pour le remonter en s'est servi de notes prises yav Wagner aux répétitions de 1882 et i883 et recueillies

M™


RICHARD WAGNER La

représentation du 25 août fut honorée de

Comme

héritier d'Allemagne, bien par hasard.

du côté de Bamberg,

militaires

dont on parlait tant,

sijal

piquait sur Bayrcuth

de

centrale

Wagner,

qui

:

s'était

appréciations

ses

et

dispensé d'aller saluer loin,

du théâtre où

pendant

frétillant,

— «

vu

il

siégeait

dirigeait des

visite

fit

les

entractes

;

il

vous voilà

!

teint

le !

dit-il

le

Le

len-

vaste salon

trouva très gai,

quelques

oh!

animé,

pantalon

gris clair

émerillonné sous ses lunettes.

l'œil

tout jovial, en apercevant le visiteur. Avez-vous'

Prince de Prusse?

très content;

tent,

le

loge

la

rapidement à

futur empereur.

au maître dans

il

toujours irréprochable dans sa tenue de petit bourgeois soigné

rasé de frais,

le «

d'entendre ce Par-

parvinrent

le

redingote de drap noir, gilet de piqué blanc et

Ah

manœuvres

en bourgeois, de

suivit le spectacle,

il

galerie,

la

présence du prince-

mouvements de troupes,

entre deux

et,

il

la

la fantaisie lui vint

demain, un ami, venu de

283

»

Vous savez?

était là hier...

11

un fameux musicien...

c'est

longueurs, relevé plusieurs fautes de

enchanté. Le défilé des chevaliers

goût;

Il

il

était con-

a bien constaté

n'importe,

il

est

surtout ravi. Leurs pas cadencés beaucoup frappé. Jamais il n'avait vu ça et il utilisera sûrement ses observations pour les manœuvres de l'infanterie prussienne. Oh l'a

l'ont

le Kronprini a bien du goût! » Et, tout en parlant, mimait Wagner son discours, marquait le pas des chevaliers, faisait de

cher ami,

oui!

grandes enjambées, soufflant, reprenant déployée il

Une

Wagner

fois lancé,

et

ne cessant de

ne connaissait

rire à

plus

gorge

personne

:

ne s'arrêtait qu'à bout de verve et de quolibets.

pour se dépiquer, sous sa

cœur

avait décidément sur le

Il

il

daubait sur

le

trois

les

cents thalers du père

Ces notes minutieuses, scène par scène, forment un véritable mc'moire, qu'on pour en remettre un cvcmplaire au metteur en scène, à chaque exécutant, etc.

dictcic.

grapliicr

fit

PAUOLE HISTORIQUE DU MAITRE, RECUEILLIE LE 25 JUILLET 18S2. Richard Wagner à

Mme Materna

:

«

Il

et,

fils.

fait

aujourtlMuii une chaleur insupportable!

(Dcr juiige Kikcriki, 3o

juillet

iî)S2.)

»

auto-


CHAPITRE XV MORT ET FUNÉRAILLES DE RICHARD WAGNER CONTINUATION DE SON ŒUVRE.

SES REVIREMENTS INTÉRESSES

SON ATTITUDE ENVERS AUBER, ROSSINI, MEYERBEER, SCHUMANN, ETC.

l'homme DANS l'intimité, l'aRTISTE EN PUBLIC

OINS de deux mois après les représentations de

pour

sifal,

lesquelles

d'énergie

extraordinaire

Wagner, sur

fatigué,

pour

avec

l'Italie

avait

il

qui

et

faire

l'avaient

conseil des médecins,

le

sa

toute

famille

et

Par-

un effort beaucoup partit

s'établit

à

Grand Canal, au palais Vendramini, propriété du comte de Chambord. Il n'y avait pas Venise,

sur le

d'illusion à se

sur l'affaiblissement très réel de

faire

sa santé, et la réaction qui s'était manifestée en lui après les représen-

Bayreuth

tations de

dans

de

teu

le

maine pour un

Un

la

tombé à

bleue;

se

il

passa très «

bataille

la

une vivacité surhu-

milieu des répétitions de Parsifal, a raconté le

Wagner

avait

été

d'un accès d'asthme

pris

tel

qu'il

renverse sur une chaise longue, sa figure était devenue

tordait dans

vite,

avait déployé

qu'il

et

dépensé

de soixante-neuf ans.

vieillard

môme, au

jour

chanteur Scaria, était

fut d'autant plus violente qu'il s'était plus

et

Cette fois encore

seur

Standhartner,

dans

le

sur

fut

il

terrassé la

j'ai

convulsions;

d'aftVeuses

quand

médecin

très

pied,

la

Wagner dit Un de ses amis,

cependant

simplement

mort » en vogue à Vienne, !

crise

le

l'avait

:

profes-

exploré

courant de

l'été et avait constaté les rapides progrès de la maladie de cœur dont il souffrait depuis longtemps. Wagner, sans être informé du résultat de l'exploration, devait sentir lui-même à quel point

ses forces et

combien

diminuaient,

prenaient

d'intensité

les

crises

devenaient plus fréquentes

lui, si gai, si pétulant d'ordinaire, était depuis son arrivée à Venise en proie à des accès de profonde mélan-

colie.

Un

jour

même,

:

il

disait

décidément son dernier ouvrage, exprimait à diverses

reprises

assuré l'avenir de son cette inquiétude, ou

fils

bien

la

unique. il

à «

quelque

ami

parce qu'il

que Parsifal serait

allait

mourir

»,

et

il

de disparaître avant d'avoir Et cependant, il se raidissait contre

crainte

n'avait pas l'e.xact pressentiment d'une fin


RICHARD WAGNER très prochaine, puisque,

s'employait activement à préparer

le printemps de i883 et en correspondance à ce sujet avec ceux de ses interprètes portait dans son cœur Scaria et M""" Materna'.

était

qu'il qu'il

:

la

qu'il avait déjà ressenti dilTérentcs attaques, dont Saint-Marc, une autre au lycée BcnedeLto Marcello expressément recommandé d'éviter toute émotion violente.

place

était

lui

il

avéré

paraît

Il

une sur

Le mardi i3 février faire sa promenade

i883,

comme

habituelle,

discussion assez vive il

il

de Parsifal à Bayreuth pour

les représentations

et

de Venise,

285

:

il

monter en gondole pour eut un subit accès de colère, une il

allait

tout à coup

se lève en sursau! de sa chaise,

étouffant, et s'écrie

mal

très

»

!

«

:

me

Je

sens

tombe évanoui. On lit et quand son

Il

porta sur son

le

médecin,

courut en hâte,

dans

trouva mort

le

il

femme qui le En rendant le avait murmuré

bras de sa

les

croyait

Keppler, ac-

docteur

le

endormi.

dernier soupir,

il

quelques mots assez peu distincts

uns

les

ont cru

y

:

un

découvrir

dernier appel à sa servante, Betty Biirckel

;

les

mandation «

recom-

suprême à son

fils

Siegfried

Siegfried soi!

vra

une

autres,

:

de-

»

Quand l'évidence.

elle

dut

se

M™" Wagner

rendre

à

fut prise

d'un épouvantable accès de désesElle

poir.

voulut

demeurer seule

FROU (Grxtz,

- F

ROU

Floli, de

WAGNER.

Vienne, 24 juin 1S77.)

coucher au-

avec

le

cadavre

près,

si

bien qu'il fallut presque employer

et se

Der

au bout de vingt-deux heures;

elle

la

violence pour l'en séparer

resta près de

quatre jours sans

coupa les cheveux pour les mettre dans le cercueil de son mari. Non seulement elle ne voulait voir absolument personne et se cloîtrait dans une solitude absolue qui dure prendre aucune nourriture

et se

cftectivcment, avait tout rcgio lui-mcmc en vue des représentations de Parsifal pour du nombre des exécutants M"" Brandt, avec laquelle il s'était brouille, vers la lin des fOtes de 1882. Bien que franchement laide, c'était une artiste consommée, avec une voix manquant un peu de jeunesse, et elle était la plus émouvante, à coup sûr, des trois Kundry. Mais Wagner n'aimait pas les artistes qui composaient leurs rôles sans avoir recours à lui, et sa favorite a I.

Wagner,

i883. C'est donc lui qui avait raye'

toujours été M"" Materna, très remarquable d'ailleurs, mais aussi très empressée à lui conseils.

demander des


RICHARD WAGNER

286

encore aujourcrhui, du moins pour le public; mais elle s'opposait, et toute la famille avec elle, à ce qu'on moulât le visante du mort. C'est seulement par ruse que le docteur Keppler parvint, en se cachant de sculpteur Benvenuti une empreinte immédiatement mise sous scellés pour du masque, empreinte qui fut être offerte à la famille, après la grande douleur apaisée et le calme à

amis,

ses

faire

prendre par

le

d'esprit revenu'.

La

de Venise

ville

d'abord

voulait

faire

à

Richard

Wagner

des

obsèques solennelles, mais ce projet dut être abandonné, sur le désir formel de sa veuve. Le corps, embaumé par le professeur Hofmann, de Berlin, quittait Venise

énorme

;

là,

c'est

il

le

vendredi suivant, au milieu d'une atlluence

accompagné par

était

durant un arrêt

demi-heure,

d'une

Baligand, put se joindre à

M. de

docteur Keppler jusqu'à Vérone et

le

qu'un ami de Wagner,

funèbre escorte composée, outre

la

la

du peintre Joukowsky, de Hans Richter et de délégués des associations wagnéricnnes de Berlin, Vienne et autres villes, accourus à Venise au premier signal; enfin, partout où s'arrêtait à Vérone, à Botzen, à Inspruck, à Munich, des le train funèbre, famille, de

M.

et M""-" Gross,

députations venaient saluer des

fleurs

sur

de

la

sociétés

la

dépouille

Le samedi

son cercueil.

corps arrivait à

par les

la

du grand soir,

artiste

et

déposer

un peu avant minuit,

le

gare de Bayreuth, où une garde d'honneur, fournie

de gymnastique de

cérémonie funèbre

fixée

ville,

la

le veilla

jusqu'à l'heure

au lendemain dimanche, quatre heures

de l'après-midi.

La voilés

place de la station avait été décorée de mâts avec des drapeaux

de crêpe et

ouvrages de

portant

Wagner

:

des

où se

cartels

on avait placé sur

lisaient

trois chars plus

les

titres

des

de deux cents

couronnes expédiées de toutes parts et parmi lesquelles il y en avait une grande en laurier envoyée par Johannes Brahms-; dans le lointain 1. Le docteur Keppler, consulté sur gnements suivants à M. H. Perl, qui les n Richard Wagner (Augsbourg, i883)

la

maladie

et les

derniers jours de Wagner, adressa les rensei-

l'ivre Richard Wagner à Venise d'une hypertrophie du cœur déjà fort avancée, affectant spécialement le ventricule droit, avec dégénérescence graisseuse; il souffrait en outre d'une dilatation de l'estomac et d'une hernie inguinale à droite que l'application prolongée d'un bandage mal fait avait singulièrement aggravée. » Il explique ensuite que les douleurs ressenties par le malade dans les derniers temps de sa vie provenaient de l'estomac et des intestins et qu'elles influençaient les mouvements du cœur, en sorte que la mort se produisit par la rupture du ventricule droit. Si l'on :

a reproduits en tête de son

était

:

atteint

si agitée de Wagner, son ardeur à discuter sur l'art, la science ou la polique le maître était journellement à la merci d'un accident; quant à préciser l'occasion même qui détermina cette mort si rapide, il ne peut se permettre aucune conjecture à cet égard. Il termine en disant qu'il avait surtout ordonné, outre l'application d'un bandage mieux ajusté, des massages sur l'abdomen, et restreint dans la mesure du possible le traitement médicamenteux, Wagner ayant la mauvaise habitude de mélanger tous les remèdes que différents médecins lui avaient succes-

ajoute à cela, dit-il, la vie tique,

on

voit

sivement ordonnés. 2. La couronne offerte par Brahms a été cataloguée sous le n° 4G dans la liste dressée par le Bayrcuther Tagblatt. 11 n'y avait que deux couronnes provenant de France, l'une envoyée par M. A. L.;



mi


RICHARD WAGNER se

distinguait

grand drapeau

Papenheim de Bavière

intendants

Wagner

Tliéàtrc

allemandes,

voilé

Buerkel

privé

conseiller

le

les

;

couleurs

aux;

et

du

rotonde

la

287

A

un

lequel flottait

d'un

Le comte

crêpe.

représentaient

des théâtres de

ducs de Saxe-Weimar et de Meiningen.

sur

la cour,

les

le roi Louis deux grands-

quatre heures,

le cercueil

placé sur un char traîné par quatre chevaux fut conduit, au son de la

marche funèbre de Siegfried, devant une tribune élevée où le bourgmestre Muncker, au nom de la ville, et le banquier Feustcl, au nom du conseil d'administration du théâtre, adressèrent un adieu suprême au grand maître et rappelèrent ses titres immortels à l'admiration de tous; puis le Liederkrani de Bayreuth chanta le morceau composé par Wagner pour les funérailles de Weber. Aussitôt après, le cortège se mit en marche à la lueur de torches portées par les pompiers et bourgeois et,

par toutes

les

rues où passait

A

fleurs et drapeaux.

par

famille, à

la

Quant à Franz ment frappé de grand âge

son

de

du jardin de

Wahnfried,

la villa

dehors,

tandis

Texception

de M™°

Wagner

et

au son des cloches,

la ville,

convoi funèbre, on ne voyait que

resta

silencieuse

s'arrêta

l'entrée

le

que

corps

le

brisée

Liszt, qui se trouvait alors à Pesth,

cette

mort subite qu'on

l'avait retenu,

émotions poignantes dune

les

il

par

la foule

reçu

était

douleur.

la

avait

été telle-

pour épargner à

Les

cérémonie'.

telle

du maître, alors, portèrent le cercueil à bras jusqu'à l'entrée du caveau que Wagner s'était fait construire et devant lequel il avait enterré son chien fidèle, empoisonné par un misérable, avec cette insdisciples

cription touchante

:

«

Russ repose

Ici

famille et les personnages

bout

;

fut

monde

le

comme

gardé par

la vie,

était

Le lendemain, un ami seul à

fois

la

invités

tombe

par Wagner, on

Bayreuth

et

qui

se retira le

n'avait

:

de

la

cercueil jusqu'au

dit

pour

et,

seulement

bénédictions en usage dans l'Eglise protestante.

de cette cérémonie, tout

dans

Les

».

prononcé devant

répondre au désir exprimé maintes les prières et

attend

suivirent seuls le

officiels

mais aucun discours ne

et

l'homme, après

A

l'issue

la

mort

chien.

pu

déposa des fleurs sur

se la

joindre au

tombe

cortège

à peine

alla

fermée de

liste, par un jeune Autrichien, .M. Emmanuel de GratTenricd. Après, toutes les couronnes turent artistement rangées dans deux salles basses du thciUre, dont l'une était le cabinet de repos du maître, et dans chacune on a place un petit buste de Wagner, soit sur une console, soit sur une sorte de petit autel. I. Aussitôt qu'il le put, Liszt se rendit auprès de sa tille, et ce lui fut un coup sensible, ,à ce qu'il

Tautrc, qui n'est pas portée sur cette

froidement reçu par M'"» Wagner, exagérée en tout comme il l'était lui-même, et qui s'absorbait dans sa douleur sans vouloir en être aucunement distraite. Une fois cette exaltation Liszt calmée, il va sans dire que les rapports les plus affectueux reprirent entre le père et la fille venait régulièrement à Bayreuth et c'est là que la mort l'a frappé, cette année, au seuil du « temple u où l'art wagnérien, dont il avait été le premier apôtre, avait trouvé sa consécration définitive. Et son dernier acte de volonté avait été de se faire porter au théâtre, en dépit des médecins, pour assister à paraît, d'être assez

:


RICHARD WAGNER

288

celui à qui

il

de Tesprit.

C'était le roi

que

avait

Louis

qui, depuis près

roi,

II,

le

de ce et

son génie,

reporter sa sollicitude

Rien

chefs-d'œuvre.

de plus

dérobant à l'étiquette de sa cour pour vivre en poète

comme

;

eût

il

homme

de génie qu'il traitait sur le pied d'égaun souverain ami Louis II et Wagner, dans

fait

:

si

cette

compagnie

eût trop pesé à

lui

sur ses

allait

se

roi,

comme

vie

mort,

inaltérable

grand

l'intimité, se tutoyaient, si bien

Et

marqué un

avait

le fait,

en artiste, avec un

lité,

lui

douces jouissances

philosophe encore plus

et

que cette affection inspirée au prince adolescent compositeur spectacle assurément unique que celui

touchant, dans

par

de

enfants

les

et les plus

artiste

de vingt ans,

attachement au maître, et qui, sur

lame

repos de

le

la

mort

!...

eût été

lui

père et

d'adoption.

fils

comme

indispensable,

homme

jeune

le

dit

seul, trois ans à peine

traîner

perdu cet appui providentiel, lard dans la

qu'on aurait

allait

si

la

après avoir

retrouver

vieil-

le

'

Wagner, en mourant, ne laissait aucune fortune et les inquiétudes qu'il avait marquées pour l'avenir de son fils Siegfried n'étaient que trop justifiées il dut sentir, en ces derniers moments, combien il ;

montré père imprévoyant en n'enrayant pas,

s'était

un

fils,

après avoir eu

ses habitudes dépensières, ses goûts de luxe et de prodigalité

qui avaient absorbé des

sommes

sa vie, à la misère dorée, avec

considérables et l'avaient réduit, toute

un somptueux

en proportion. Certain jour, à iMunich, auquel

même

il

le

train de vie et des dettes

premier tapissier de

la ville,

devait près de cent mille francs, lui chanta pouilles en plein

théâtre, s'accrochant aux pans de son habit, jurant qu'il ne le lâcherait

qu'après dette payée, et criant rasser, lui signa

un bon sur

le

si

fort

que Wagner, pour

trésor royal

:

le

s'en

tapissier criait,

débarle roi

payait.

A

calculer

en gros

ce

devenir et rester plusieurs

qu'il

fois

a

dû gagner

millionnaire

;

d'argent,

il

aurait

pu

tous les théâtres d'Allemagne

première représentation de Tristan et Iseult'. C'était le 25 juill'et; le samedi suivant 3i, il rendait le dernier soupir. Triste année 1886, qui a vu disparaître ainsi coup sur coup trois des plus solides soutiens de l'œuvre d'art de Wagner enfin Liszt, le roi Louis II, Scaria, le chanteur par excellence la

:

de race, confident des premiers jours et précurseur du maitre. Munich, de par le roi de Bavière, ayant été jusqu'en ces derniers temps

;

l'artiste I.

le

centre du

monde

wagnérisant Bayreuth, qui n'est pas une ville ordinaire, une fois mise à part il est intéressant de connaître l'échelle exacte des différents opéras de Richard V/agner dans la capitale de la Bavière. En moyenne, on y jouait chaque année Rien-^i une fois; le Hollandais volant, cinq ou six fois; Tannhœuser et Lohengrin, quatre à cinq fois; Tristan et Iseult, deux {ois; les Maîtres Chanteurs, trois fois; l'Anneau du Sibelung dans son entier, deux ou trois fois; la Valkyrie et Siegfried, deux fois, et le Crépuscule des Dieux une fois quand on le jouait. De plus, les prix variaient selon le degré de faveur de telle ou telle pièce, et ces prix étaient fixés d'avance, sans aucune hésitation, par l'intendant de la cour, baron de Perfall, compositeur lui-mame et médiocrement disposé pour Richard Wagner, bien qu'il eût été, dans le temps, choisi pour diriger le Conservatoire organisé selon les vues du réformateur. Lohengrin, Tannlnvuser, la Valkyrie et Siegfried atteignaient le taux le plus élevé, les autres ouvrages restaient dans les prix moyens, tandis que Tristan et Iseult descendait au plus bas.


n a j <

1 -

°

a;


RICHARD WAGNER

290

ont

de ses œuvres

fait

éditeurs dit

que

fond

le

payaient ses

lui

le

dans

a toujours vécu

d'avance en

gaspillé

demeure, pour son égard, il

y a quelques années

Wagner

dont

et

Et cependant

l'argent qui lui revenait était

pour

pour

maison,

de

de lettres de

la série

et tout

dépenses irréfléchies, train

le

et les

n'a-t-on pas

;

trois cent mille francs?

gène,

la

'

de Mayence, avait acheté Parsifal

célèbre maison Schott,

la

taux fabuleux

partitions à des

deux cent quarante mille marks, il

plus solide de leur répertoire

ses

la

décoration

habits

même.

de sa

A

cet

qu'on a vendue

à sa couturière,

public s'est tant diverti, met bien en

lumière ses excentricités enfantines pour sa toilette et ses prodigalités

pour tout ce qui

folles

était luxe et confort.

Car Richard Wagner avait une couturière, une des plus renommées de Vienne, M"^ Bertha, et c'est elle qui lui confectionnait ses robes de chambre et ses Justaucorps de satin rose tendre, bleu clair ou rouge feu avec rubans orange ou

sans oublier les chemises de dentelle

lilas,

de satin, qui composaient sa tenue ordinaire d'intérieur.

et les bottines

Les fournitures ne montèrent pas, pour une seule année, à moins de

Wagner était plus prompt à commander même à ses commandes des croquis de sa main comment la ruche de sa robe de chambre devait

8,000 francs. Mais Richard qu'à payer.

joignait

Il

pour mieux expliquer devenir, vers

de largeur,

le

etc.

une riche et belle garniture ayant une demi-aune Mais quand son habilleuse, qui pourtant le ménageait

bas,

qu'aucune

plus

récriait,

payait

de Vienne,

élégante

grand'peine,

à

exigeait

quelque

envoyant des acomptes

argent, et

il

se

demandant

des délais'. Qu'il fût

ments,

très

de toutes

friand

qu'il ait été

un des hommes

son temps, rien de mieux

s'il

avec l'âge,

la

les

élégances, de

le

plus étonnant

C'était

soie et le satin.

bitude d'emporter, quand

il

voyageait, tout

;

mais, parmi

fut sans contredit

devenu une véritable manie

sans parler de sa garde-robe orientale,

et,

tous les raffine-

plus délicatement sensuels de

payé ses fournisseurs

avait

tous les goûts luxueux qu'il a eus,

son amour pour

les

le satin

il

avait pris l'ha-

nécessaire à la déco-

ration des pièces qu'il habiterait en route; à Venise, au palais Vendramini, la

chambre où

il

rendit le dernier soupir était

satin rose, bleu pâle 1.

Dans presque toutes Durant

vert

et

les villes

du

Nil.

d'Allemagne,

il

a

De

telles

entièrement tendue en folies

montrent assez

un avantage marqué sur tous

les autres

compo-

saison 1876-1877, je cite au hasard, il obtenait, à Vienne, 3/ représentations contre iMeycrbeer 34, \'erdi 29, Rossini i5, etc.; à Berlin, il comptait aussi 37 représentations contre Mozart 17, Meyerbeer i5, Weber 14, etc. Pendant la sai.son 1884-1885, à Berlin, il atteignait 40 représentations siteurs.

contre 2.

Weber Ces

la

20, Lortzing 20,

lettres

si

Meyerbeer

16, etc.

i8l")7, passèrent en vente publiijue à \'iennc en 1877 de cent Horins à M. Spitzer, q^.i en régala aussitôt les lecteurs de

édifiantes, qui vont de 1864 à

et

furent adjugées pour

la

Aouvelle Presse

libre.

la

somme


RICHAKl)

WA(;N1-:1<

quel bourreau crarq-ent c'était que Richard

par

le

Un

Wagner,

et c'est à rarf>-ent

rapportait tout dans la vie.

qu'il

fait,

2'ji

jour qu'on

transmettait

lui

des

propositions

représenter Lohengrin à l'Opéra de Paris

:

«

assez

vaf>-ues

de

Je ne puis, répondait-il.

juger du plus ou moins grand désir qu'on a de représenter mes œuvres que d'après le taux de la prime » et, ce disant, il ne faisait qu'user de ses droits d'artiste en proclamant ce que pensent la plupart des ;

ceux qui affectent un grand détachement des Pour ce qui regarde son fils, c'était s'inquiéter un peu tard d'assurer son avenir que d'y songer à près de soixantedix ans. Il n'importe, un tel vœu devait être entendu des admirateurs du maître, et la direction du Théâtre Wagner décida d'appliquer tout le produit d'une représentation donnée à Ai.x-la-Chapelle à la constitucompositeurs,

surtout

biens de ce monde.

premier capital en faveur de Siegfried Wagner. Cet exemple fut suivi par beaucoup de théâtres allemands, et ce ne fut pas le moins bel hommage rendu à l'homme et à l'artiste que cet empressement tion d'un

public à protéger, à adopter en quelque sorte, son jeune

M. Adolphe

Gross, banquier à Bayreuth et

promoteurs de l'œuvre,

veiller ses intérêts

c'est

;

Parsifal au lendemain de

la

lui

fils.

des

plus

qui

assura les

mort de Wagner

représentations qui

et

scellée

fut

répandues sur verselle,

sorte

la

de

continue à sur-

direction

la

du comte

de Spork, provoquèrent une assemblée générale à Nuremberg

que

le

en tous pays avec un zèle infatigable. De plus, au

printemps de i883, quelques wagnéristes, sous

ardents

testamentaire du maître et

était l'exécuteur

tuteur du jeune Siegfried

l'un

la

fusion

de

toutes

Sociétés

les

et c'est

wagnériennes

surface du globe, en une Association wagnérienne uni-

de nouveau

patronat

accessible

annuelle, en dehors des dons volontaires,

n'étant

tous

à

cotisation

(la

que de cinq

francs),

pour but principal de pourvoir au maintien perpétuel des

et qui avait

représentations-modèles à Bayreuth. Chaque association de

ville

ou de

pays, gardant son individualité propre avec un représentant spécial, se rattache

au

Munich,

et

ciation

comité

dont

le

composé de neuf membres, siégeant à président honoraire était Franz Liszt. Cette Assocentral,

wagnérienne universelle a obtenu un succès tout à

fait

surpre-

nant, car, depuis trois ans qu'elle existe, elle est déjà représentée dans

240

villes et

dans

le

compte environ cinq mille cinq cents membres disséminés

monde

entier.

Richard

Wagner

concernait,

l'homme

a toujours prétendu que, était

inséparable

de

du moins en ce qui

l'artiste,

et

c'est

le

par cette

audacieuse afîirmation qu'il ouvrait, dès i85i, sa Communication à mes amis. « J'adresse, disait-il, ces communications à mes amis; car


RICHARD WAGNER

202 Je

ne puis être compris que par ceux qui éprouvent

me comprendre,

désir de

Mais

et

comme

ne puis considérer

je

y artiste, en

Miomme.

même temps

Si la séparation

de bon sens que

tels

d'avec

l'artiste

le

êti-e

sympathie à

qu'ils croient devoir refuser leur

de

séparation de

la

besoin et

le

que mes amis. ceux qui prétendent aimer en moi

ne peuvent

ceux-là

Tâme

Thomme

dépourvue

est aussi

d'avec le corps,

que

est certain

il

jamais artiste n'a pu être aimé, jamais

son

compris,

sans

qu'il

comme homme façon

(au

fût

de sa

incons-

et

sans qu'on eût à la

et

fois l'intelligence

et

être

aimé

moins d'une

involontaire

ciente)

pu

n"a

art

de ses œuvres

»

vie.

Tout "Wagner

dans ce

tient

paradoxe, qu'il a imaginé pour

usage

son

personnel

montre à quel point n'être

dait

façon

il

affirma-

telle

hardiment

si

enten-

d'aucune

discuté

mais une

;

tion,

qui

et

qu'on

la

lance, est inutile et n'empêche

pas

suivre

humaines

choses

les

pouvait être un LE VIEUX MAITRE RICHARD arrive sjiis être annonce dans la salle de ce

désir

Bi'avo, enfants!

me

C'est déjà

une

WAGNER

musique du

de grâce

eîel.

joie d'être ici;

reprend de composer encore du nouveau.

à s'insinuer

quand

masse du public,

il

est

homme

d'entrain,

dans

plein

prompt

cœur de

le

»

ceux qui l'approchaient, car s'était fait ainsi

d'amis surtout

particulier,

le

[Ncbelspaltcr, de Zurich, 17 février i8S3.)

créateur,

et

normal.

cours

leur

Wagner, dans son

de

;

un

mais

doué d'un pareil génie,

il

beaucoup artiste,

s'adresse à

un la

n'empêchera que chacun éprouve, sans 'l'approcher, plus ou moins d'admiration pour ses œuvres, plus ou moins de sympathie instinctive pour son caractère. Que ce jugement sur un

homme

et rien

avec lequel on n'a jamais eu aucun rapport découle plus d'une

impression que de

la réflexion,

pouvoir d'aucun artiste de

s'y

je

n'y

mais

contredis pas;

soustraire,

et,

il

n'est

au

Wagner, en nombre de ses

d'ailleurs,

particulier, aurait trop à perdre à restreindre ainsi

le

vrais admirateurs.

Quand on prend l'homme

et

l'artiste

en

bloc,

comme

on a

fait


RICHARD WAGNER jusqu'ici,

ses

quand on embrasse d\in on

seul

2gj

coup d'œil sa

ses

vie,

œuvres

frappé

de tant de grandeur dans la conception, de tant de solidité contre l'attaque, de tant de fermeté dans les convictions. Quand on regarde d'un peu plus près, sans se laisser éblouir par les emportements fulgurants du dieu ou par les grands mots des et

écrits,

fanatiques, créateur,

est

on s'aperçoit que

Wagner

l'idole

des pieds d'argile.

a

Artiste et

va l'égal des plus grands, et son génie

LE PALAIS VENDRA M INI, A VENISE, OU

comme

ses

EST MORT RICHARD WAGNER.

(Appartenait au comte de Charabord.)

œuvres commandent une admiration sans bornes

;

homme,

il

est

dénué

de noblesse et n'échappe à aucune des faiblesses de l'humaine nature au contraire,

et

comme

en

lui

tout est démesuré,

il

les

exagère

:

et les

pousse à un degré surprenant. Qu'il ait été d'un profond

égoïsme

là rien à dire, et cette disposition

naturelle, j'allais dire nécessaire,

de leur œuvre

comme

Berlioz,

et

de

fort

leur

et

d'un orgueil excessif,

il

n'y a

à tout rapporter à soi est tellement aux artistes, uniquement préoccupés

gloire,

qu'on

enclin à exagérer les

n'en

parle

inimitiés

plus; qu'il

qu'il

fût,

renccMitrait,


RICHARD WAGNER

204 qu'il

et

par

aimât,

instinct

théâtral,

poser en

à se

martyr,

sachant fort bien profiter des circonstances et jouer des

tout

en

protections,

passe encore; mais ce qu'il y a de désobligeant chez lui, c'est l'ingratitude, une ingratitude naturelle et candide envers ceux qui lui avaient

bon secours, dès

été de

ne pouvaient ou ne voulaient plus servir

qu'ils

musiciens. Lorsqu'au lieu de

confrères

les

Juger au seul point de vue théorique, on les

il

précédés ou

ont

les

ceux

s'entend à flatter

peuples ou

suivis,

l'homme de bronze

quelle aisance

dont

rois,

mêmes ne changent

plus

n'a

il

pas

très

rattache aux

frappé

est

en

voir et

Les théories en

soubresauts très expliquer,

à

faciles

événeavec

comme

maltraitant les gens,

mais leur développement

;

de

aux conjonctures,

séduire,

rien à tirer.

à des inflexions sensibles, à des

malheureusement

se plie

veut

qu'il

lire

on

à

ses écrits à part et de

ses

ments qui

comme

Et cela s'applique aux peuples, aux souverains,

ses intérêts.

elles-

littéraire est sujet

curieux à suivre et

puisque

en est

l'intérêt

la

cause, invariablement.

Dès le

le

quand on

début, par exemple, et

de Prusse ne peut pas accepter

roi

en avoir entendu quelque

la

répond de Berlin que

lui

dédicace de Tannhœiiser sans

fragment, fût-ce à

parade,

la

s'indigne,

il

tonne, fulmine avec fracas pour la galerie et n'en continue pas moins à négocier sous main, tant et Ricii{i

que

bien

si

le

roi

décide qu'on Jouera

A qui est-il redevable en partie Quel homme avait soutenu ses pre-

pour son propre anniversaire.

de cette décision miers pas à

A

?

Paris,

Meyerbeer. l'avait

quelque sorte empêché de

en

mourir de

recommandant à Schlesinger et l'avait mis en rapport avec Opéra, au point qu'à ce moment 'Wagner considéra le départ de Paris de ce bienfaiteur comme un véritable désastre pour lui ? Meyerbeer, toufaim en

le

1

jours Meyerbeer. suite. et je

vais plus

loin, je

Judaïsme dans sans conteste

sohn avec qui il

Or, on

comment 'Wagner

sait

l'en

a remercié par la

Antipathie de race ou animadversion de musicien, c'est possible,

;

la

musique

pouvait

il

il

consens que Richard 'Wagner, en lançant son (i85o),

écrire

ait

tout

n'avait Jamais eu

ce

eu

raison

sur tous les points

qu'il voulait contre

Mendels-

que des rapports insignifiants; mais

aurait dû observer plus de réserve à l'endroit de Meyerbeer.

Wagner, dans

le

privé,

racontait

que Meyerbeer avait commis à

son endroit une véritable trahison, justement à propos de Schlesinger.

Longtemps après son premier

séjour à Paris,

il

aurait appris que son

compatriote,

en lui donnant une lettre de recommandation officielle pour Schlesinger, en avait écrit une autre, arrivée plus vite à Paris par la poste, et où Meyerbeer disait à peu près ceci « Un jeune :

musicien, très ambitieux et très remuant, m'importune de ses

sollicita-


RICHARD WACNF.R tions.

Pour m'en débarrasser,

remettra

et

donne une

ai

vous

le

lettres,

ce

Schlesinger

se soit

puisqu'il le

fit

qui

bien

est

improbable,

conformé seulement à

moyen

vivre au

ments pour sa maison

que

celle

Quoi

disculpé

en

trahison dont

il

soit,

la

produisit celle de

il

Galette musicale et que,

du jeune étran-

Wagner,

moins aidé, par

a-t-il

il

imputait à

misères

tristesses et des

Paris et ce ressentiment ne désarma jamais.

succès d'argent de Meyerbeer avaient dès le

suite,

cœur

fourberie du

la

qu'il avait

ait

à

?

paraît-il, eut toujours sur le ;

qu'il

la

de l'auteur

les instances

demeurait persuadé

une grande partie des

Wagner,

quant à Meyerbeer, supposé

;

Rien^i à Berlin, sur

qu'il

semble que

remit

lui

fut tout à la disposition

véritablement joué ce jeu double, en faire accepter

de

concerts

les

pendant des années, ce journal l'éditeur

il

d'édition, puisque, après avoir essayé de faire

Colomb dans

ger. Voilà

vous

qu'il

pour son journal, d'arrange-

d'articles

exécuter son ouverture de Faust au Conservatoire,

Christophe

lettre

recommande chaudement; mais vous n'en Je que bon vous semblera. » En admettant qu'il y ait eu

que ce réellement deux

ferez

lui

je

agS

«

cette

Juif »

éprouvées à

Le que les gros commencement hanté ses vrai est

rêves et travaillé son esprit. Voilà donc sa brochure sur le Judaïsme, à

ou à raison, lancée de par

tort

discutée en AUemag-ne, mais

avant i86g. ser à

que

Il

elle

monde. Ellle avait été vivement absolument ig^norée en France

n'importe, aussitôt qu'il est question de jouer Tannhcvu-

dès 1860,

Paris, c'est-à-dire

le

prudent écrivain atténue autant

peut ses attaques contre Meyerbeer par sa Lettre sur la

se

faire

le

était

musique, afin de ne pas indisposer

les Parisiens

opéras d'un compositeur dont

ont toujours

parle alors de

son

beautés entraînantes

«

grande renommée,

moins imputables à

peu

de l'empereur qui

musique,

la

l'artiste

Taunhœuser

Continuons. expresse

»

et se

fait

défend,

de

beaux

c'est

la

Lyre

et

qui

pour

qu'au genre

même

représenté

est

n'y comprenait

possible,

tenir

avaient

aux si

cas

le

la

Il

moindre

de l'opéra.

à

Paris

pas

par

la

grand'chose,

volonté

aimant

mais qui vint pourtant applaudir aux et

Politique (186S),

de charger seulement les Taunhœuser, Wagner éprouva le

généralités

bien

état.

sifflé

et

l'empereur en personne. 11 libre adolescent allemand qui gagna des batailles au son de

de

exalte le

s'en

qui

fils

besoin

grand

les

en critiquant quelques points faibles,

deux premières représentations; eh bien, dans Art au., lieu

si

eu de l'écho chez nous, d'avoir voulu donner

libelle aurait

atteinte à cette

ils

en rabaissant trop

et

diriger

un

trait

blessant

sur

de l'Épée [Leier iind Schipert, allusion à

refoula

l'invasion

française

monarques n'avaient pu vaincre;

il

que

les

Kœrner

troupes

et à

Wcbcr)

mercenaires

représente alors Napoiccm

b'''

des

comme


RICHARD WAGNER

296

étonné de sa défaite, en cherchant «

Peut-être n'y

a-t-il

raison

la

et

ne

craint l'adolescent allemand.

brochure

X

:

//

connaît

et

» :

Art allemand

où "Wagner montre à tous égards

celle

:

sur les trônes d'Europe que son neveu qui puisse

répondre à cette question avec une véritable sagesse D'ailleurs, cette

trouvant pas

la

le

et

Politique allemande, est

plus d'indépendance de cœur.

/

\x

f^;

X

ol^'

LES FUNERAILLES DE RICHARD Départ du corbillard de

la

WAGNER

place de

Elle parut en 1868, deux ans à peine après

mands du Sud, Bavarois, 'Wurtembergeois

la

A

BAVREUTH.

stalioii.

Sadowa, et

alors

que

les

Alle-

autres, la veille alliés à

l'Autriche, étaient loin d'être assimilés à la Prusse, et

Wagner, tournant

déjà du côté du vainqueur, célébrait hautement les victoires des Hohenzollern sur la Bavière, cette Bavière dont le roi avait tant fait pour lui

et

dont

il

voulait encore obtenir la création à

allemand selon son rêve

:

«

La Prusse

Munich d'un

seule, dit-il, conserva

théâtre

une orga-


RICHARD WAGNf^R nisation

ce le

dernier

de

issue

militaire,

de

reste

297

période d'essor

la

Tesprit

allemand,

royaume de Prusse, un demi-siècle

extirpé

plus

tard,

Kœnigsgrastz à Tétonnement du monde entier, Cette étude

éminemment personnelle

etc.

la

ailleurs,

bataille

de

»

dirigée

la

France;

TOMBEAU DE RICHARD WAGNER

partout

gagna

est

d'une façon manifeste contre l'influence de

LE

de TAlIemaq-ne; avec

BAYREUTH

A

encore ouvert, au lendemain des funérailles. |Ka pierre Inmulaire, presque entièrement recouverte de lierre auiourd"luii, mesure i"',7o de large

sur

il

semble, en

français

effet,

après

suivante,

s'amadoue

il

la

est

et

à

M""' Judith

a

d'excellents

3'". 21)

de Ions

que Wagner défaite

question

de

et o"',3o

n'ait

d'épaisseur!

plus rien à attendre des amateurs

Tannhœuscr

de' jouer

Ricii^i

à

Paris.

atténue un peu ses récriminations dans

Mendès, exprès pour et nombreux amis à

être

publiée

Paris;

il

:

il

Alors,

l'écrivain

lettre

la

sait,

apprécie

l'année

dès

cependant,

et

dit-il,

écrite qu'il

infiniment 3S

la


RICHARD WAGNER

298

portée

et

France

et,

Paris, au

de

la

contraire,

etc.,

qu'on fasse

qu'il

L'année suivante,

etc.

Wagner

et

sympathie

de

n'est pas

ce

n'y vient pas,

s'il

France,

la

des marques

valeur

lance

Une

d'un succès à

fi

guerre,

la

Capitulation

donne en

lui

la défaite

!

Quelques années s'écoulent, et par un revirement plus prompt qu'on ne pouvait l'espérer, ses œuvres paraissent devoir triompher en France; alors il écrit la lettre à M. G. Monod, rendue publique après sa mort et

il

cherchait à expliquer qu'il raillait l'Allemagne et non la France

dans ce pamphlet de

Remarquez que

«

:

l'esprit français, je l'ai

écrit

en

tout ce

allemand,

que

au sujet

écrit

j"ai

exclusivement pour

les

il est donc clair que je n'ai pas eu l'intention d'offenser Allemands provoquer les Français, mais simplement de détourner mes :

ou de

compatriotes de limitation de à leur propre génie, qui

plus,

moment de

reproché, composé au pire

amèrement théâtre

ironique,

allemand

intendants

aura

presse actuelle,

la

pour reconnaître que dans

de pénétration

?

de bon...

assez

Rappelez-vous

m'a été

et

plus

le

guerre, dans une disposition

la

de

conclusion

la

Bien

d'intelligence

qui

l'écrit

eu surtout pour but de ridiculiser

j'ai

cette

du

l'état

Les

farce.

de théâtres allemands se précipitent dans

les directeurs

et

les inviter à rester fidèles

veulent faire quelque chose

s'ils

dans

donc,

France, de

la

Paris assiégé, afin d'emporter pour leurs théâtres toutes les nouveautés

en

fait

de pièces et de ballets.

»

Mais à quoi bon se disculper? Est-ce qu'un artiste voit dans le autre chose que son art? Wagner, pour ne parler que d^ lui,

monde n'était

pas

acharné de personne

l'ennemi

même

de

France

la

pas sa musique. Et dès

n'était l'ennemi

il

;

d'aucun peuple en général,

ni

lors n'avait-il

pas

que des gens qui n'aimaient

le droit

même,

France, alors que, dans les pays allemands

de s'en prendre à il

la

tournait son encen-

Munich, tantôt vers Berlin? Dès Sadowa, dès qu'il avait trouver dans le futur empereur d'Allemagne un prince apte à

soir tantôt vers

cru

seconder ses vues, l'indifférence il

du

brûla la

lui

il

avait exalté le vainqueur de la Bavière; aussitôt

empereur bien constatée à l'égard de la musique, politesse, et, dans l'Œuvre et la mission de ma vie, vieil

écrite après les représentations des

de

lancer

tétralogie,

par

la

des traits contre ni

Nibelimgen,

souverain

voulu rien distraire pour

France.

On

est soldat

conclusion va de soi

et la

le

:

en Prusse

vive Louis

qui

il

ne se

;

II

on est artiste en Bavière,

il

comme

il

aurait

mieux

fait

la

!

il

et

pas faute

durer à

Bayreuth des milliards payés

Comme avait raison de lancer ce cri de gratitude homme auquel devait la tranquillité de l'existence et génie,

fait

pu

n'avait

de ne jamais

envers le

le

jeune

repos de son

solliciter ailleurs


RICHARD WAGNER



WAGNER

RK:HAR1)

299

une aide, un encouragement qu'il ne pouvait trouver qu'auprès de Sans ce prince enthousiaste, illuminé, sans la compai^ne Louis II exceptionnelle qu'il eut le bonheur de rencontrer à la fin de sa vie, !

Wagner Parsifal.

n'aurait

Ce

c'était là le salut

Que vous

première

qui

reine a mis au

de

mon

avec

le

pût

me

il

semble

Comment

qu'il

se fait-il

ma

premier moment, que

ami peu de temps après sa plus inimaginable et la

la

complètement réalisée! Une

s'est

m'apporter

détresse,

m'ait été envoyé du

que

ceux qui devraient être

le

gens

les

ciel...

plus

les

salut et la con-

le ».

amers,

les plus acerbes,

plus cuirassés contre les faux compliments,

aient toujours un point sensible et soient, sous leurs dehors les

tout

monde, dans l'année même de la première représentaTannhœuser, le bon génie de ma vie, celui qui devait

plus tard, au plus fort de solation;

sauver

oia

assurée à son œuvre d'art.

vie

et la

La chose

roi.

composé

ni

l'archange sauveur à l'heure

avait bien senti, dès le

pour lui-même

entrevue

Nibelungen,

les

dirai-je? écrivait-il à quelque

seule pourtant

tion

comme

roi vint à lui

l'abandonnait, et "Wagner

«

pas terminé

peut-être

bourrus,

plus faciles à embobeliner dès qu'on chatouille agréablement leur

amour-propre? entente,

pavés

et,

sans

compliment qui ne

ne font pas un

Ils

dès qu'on les

on peut

flatte,

Tel

bronchent.

qu'ils

les

était

assommer des

Berlioz,

tel

à double

soit

plus lourds

Wagner.

était

C'est pitié, quand on admire ces deux grands compositeurs, de voir avec quelle bonne foi ingénue ils rapportent et consignent pour la postérité les éloges les plus écrasants.

dans

deux

grands

rapports

ses

articles

Wagner, en

Auber

avec

Rossini

et

;

ne durent pas avoir

narquois

vraiment le rusé Italien et le Parisien

particulier, a raconté

beaucoup de peine à se moquer du pesant Allemand. Avec Rossini encore il se défie un peu, celui-ci ayant la raillerie avec Auber, au contraire, il plus mordante et la main moins légère ;

est

si

complètement dupe

grammes par un

qu'il

paye ses

lui

fines

et

pénétrantes épi-

éloge étourdissant de la Muette de Portici. C'est au

perron de Tortoni, durant

études de

les

musiciens se rencontraient presque tous

Tannhœuser, que

les soirs,

et

Auber

deux

les

s'informait

aimablement du progrès des répétitions; il voulait savoir avant tout s il y aurait de luxueux décors, une riche mise en scène, et, quand il le sut, « Ah ! il y aura du il se frotta joyeusement les mains en s'écriant :

spectacle! ça aura du succès^

soye:^ tranquille!

par échange de politesse, essayait de jouait alors à

l'Opéra-Comique

sons les farces en paix Lestocq, qu'il

avait

!

eu

»

:

«

Wagner

lui

Ah

!

»

Et

comme Wagner,

parler de la Circassienne, qu on disait

modestement Auber,

alors changeait

occasion de monter à

lais-

de pièce et vantait

Magdebourg

et

qui

y


|

lUCHARD WAGNER

3oo

avait eu

yrand succès;

gardé

faveur en Allemagne au lieu du

la

Auber, pour toute réponse,

boles, et

disant

lui

propre

ne s'expliquait pas

il

Que

«

:

de

et

voulez-vous, c'est

naïveté,

symphonie de comprendre t),

Beethoven et

n'était

!

le

genre

le

autres fari-

regardait d'un œil mi-clos en

rapporte

Par surcroit d'amourqu'Auber, entendant une

dilBculté

»

!

au Conservatoire,

admet sans

il

plus à TcinnliiVuser Rossini

Wagner

ouvrage n'eût pas

cjue cet

Pré aux Clercs ou

n'y rien

«

rien compris

n'a

qu'il

«

avoué

aurait

de

»

pas ce c]u'on

appelle un

aimait à

rire

au

;

même

au

pincc-sans-rire

degré qu'Auber

contraire,

bruyamment.

et

il

Ses

bons mots se colportaient de droite et

de gauche,

égayait,

cela

Wagner,

qui

premier

comme on

et

un

troublait

peu

jugeait au fond

le

homme

« le

vraiment grand

digne de vénération

monde

le

du peu,

Excusez

et

eût ren-

qu'il

contré jusque-là dans tistique ».

s'en

ar-

dirait

Rossini lui-même. Et tout cela, parce jour le maestro

qu'un

dans L

EMPEREUR

mine

ALLEMAGNE ET RICHARD WAGNER.

L' l'.inycrcuv plus beau de

Oui, cher

«

:

mes

l>

iiiaitrc,

tuyau de

contrite,

voici

ordres. Je n'ai i]u'un

li;

rei^ret,

que vous u'ayci pas fait avec moi la campagne de France la guerre m'aurait coûté moins de sani;, car vous auriez mis les Français :

conclut-il,

quelque

avec une

en

dû,

lui

Allemagne,

et

aurait

aurait

J'avais de

«

:

l'oreille,

destinée

qu'alors sa

complie

avait dit

qu'il

naître

Rossini,

c'cbl

eu déroute

le

lui

et

j'aurais

chose.

»

Et

été ac-

la facilité,

pu

arriver à

Rossini,

((irai/, Ik-r Floh, Je Vienne.

voyant accepter cette bourde énorme argent comptant, développait,

pliliait

teur

cette

am-

idée avec une verve intarissable, sans ciue son interlocu-

soupçonnât

ni plus

le

»

1

la

farce un

seul instant.

On

n'est

pas plus cruel

naît.

Cependant,

Wagner

ne se sentait pas à« l'aise en face de Rossini;

il

le tenait pour saint Jean Bouche d'or, mais il ne pas avec lui comme avec Auber. Son article, en somme, est

buvait ses paroles et se livrait

favorable et

tend à prouver que c'était

un musicien bien doué, de

mérite et de valeur, que le public de son époque et le milieu où il vécut empêchèrent de s'élever au-dessus de son temps et, par là, de participer à la grandeur des véritables héros de l'art. Ce petit article, écrit immédiatement après la mort de l'auteur de Guillaume Tell et pour


RICHARD

VVA(;NI£R

rectifier certaines plaisanteries ou anecdotes qui couraient alors les journaux sur son attitude envers Wai^rner, est donc postérieur à Art et politique, où Richard Wagner avait exprimé à peu près la même

idée en s'attaquant violemment au

poème de Guillaume

Tell,

parodié

d'après Schiller, mais en ajoutant qu'il y avait des morceaux ravissants

dans sa musique et Rossini,

bons, parmi

les

encore moins génies de était

voyait

il

en ligne avec à

confesser

un phénomène

cile à s'expliquer

et

qu'il avait

hxume pour ainsi

Tell

le

quelle catégorie

les il

son

même à

écrit,

Schiller,

musique,

il

ne

compte il lui avait suffi d'une fois pour juger moins la production que les ten:

dans

voudrait arriver au succès et, sa

détresse,

les

moyens Quels

'

LE ROI DE BAVIERE

ET

talent subalterne qui

«

se

raccroche

tous

à

RICHARD WAGNER.

Louis : « Maitre, changeons, je suis Laisse-moi faire de la musique à Bayrcuth, et loi, va régner à Munich, a

Le mieux

roi

ici.

(Grxtz,

».

étaient

non pas

diffi-

et à

revint jamais sur son

dances d'un

le classer,

la lin.

ne l'expliquait

Gœthe en

parodiés

préoccupa beaucoup jusqu'à

rapproché de Guil-

dans

accoupler

plus volup-

qu'il

très

Quant à M. Gounod

pas.

Faust

le

ne pou-

musique allemande,

la

réduit

sujet.

le

compositeur

médiocres

les

comme

et

;

vait pas le mettre

en

voir, le

gênait de ne savoir dans

le

parmi

oublier

d'ailleurs, qu'il déclarait être le

tueusement doué qui se pût Cela

faisaient

tels qu'ils

ses

Der Floh, de

Vicniii;.)

compositeurs

préférés ou ses œuvres de prédilection?

Beethoven, avec ses quatuors

ou ses sonates pour l'étude intime, et ses symphonies pour l'exécution publique; Bach, avec son Clavecin bien tempéré ; Mozart, avec la Flûte enchantée, l'Enlèvement au sérail, les Noces de Figaro et

Weber,

avec Euryanthe

symphonies en mi

le

Freischut{

;

Mozart encore, avec

ses

mineur et ut majeur. Voilà pour les amis de chaque jour, ses épées de chevet. Ce

bétnul,

ouvrages qui étaient ses 1.

et

Don Juan ;

sol

Tauteur Celte courte appréciation suffit à çxpliquer les attaques aussi vaines qu'acharnées dont

de Je Fii»s< poursuit Richard Wagner. L'opinion courante est que Wa£;ner a qualilié la musique Faust de « musique de lorettc ». 11 y a là erreur; cette triple appréciati<m « un salmigondis nauséafabriqué bond, une platitude douceâtre, dans un jargon atlccté de lorettc », vise principalement le livret que par M. Jules Barbier avec le chef-d'œuvre de Gœthe, cl approuvé par M. Gounod. On comprend pourfendre en prose le parolier français lui ait gardé une dent et ne manque pas une occasion de le :

et

en vers.


RICHARD WAGNER

3o2

avant tout dans une composition,

qu'il cherchait, disait-il,

du

généité

style,

entre

le

moyens

l'équilibre entre les

cette concordance absolue entre

chœur de

Palestrina

la

et le but,

musique de Mozart son contrepoint,

et

l'homo-

c'était

et

et

trouvait

il

son orchestre,

entre

piano de

le

Chopin et plusieurs de ses préludes ou études, sans estimer aucunement qui sent trop les salons parisiens heureusement, le « Chopin des dames j)

;

beaucoup d'oeuvres supérieures au niveau

a produit

qu'il

ajoutait-il,

des salons. 11

regardait les mélodies de Schubert

mais ce

pas une raison, selon

n'était

comme lui,

de véritables modèles

;

pour accepter sa musique

pour piano, non plus que les merveilleux opéras de Weber ne devaient faire admirer ses mélodies, son trio avec flûte et son quatuor avec piano. L'enthousiasme de Schumann pour les d'ensemble

trios

et ses

sonates

de Schubert et autres œuvres semblables

:

mystère aux

un

était

yeux de Wagner, aussi bien que pour Mendelssohn

a

me

Je

rappelle

que Mendelssohn retrouvait partout dans Schubert l'image du bourgeois de Vienne et de sa vie facile fBchaglichkeitJ. Chose curieuse, ajoutait-il, Liszt aime encore à jouer

divertissement

entaché de

à

trivialité.

que de naturel,

du Schubert. Je n'y comprends

car ce est

Cette préférence de Liszt n'avait pourtant rien

»

et ce qui le séduisait

dance des notes

rien,

hongroise, de quelque façon qu'on l'exécute,

la

et la virtuosité

:

dans ces morceaux,

c'était l'abon-

ses propres compositions, à cet égard,

ne sont pas tellement différentes de certaines pièces de Schubert.

Aux yeux de Richard Wagner, Mendelssohn giste de premier ordre

et l'ouverture

»

de la Grotte de /"//^^a/

un

«

lui

semblait

paysa-

y trouvait une imagination merveilleuse, un sentiment délicat, soutenus par un art consommé; il insistait surtout être

un chef-d'œuvre

était surtout

il

:

sur la beauté du passage où les hautbois montent par-dessus les autres

instruments avec un gémissement plaintif,

courant sur

les flots.

Il

retour, puis le premier

saise

:

«

On

morceau

andantes,

»

et le

les vents

Mer

scherzo de

la

calme

et

de

mer

la

l'heureux

Symphonie

écos-

ne pouvait, pensait-il, blâmer un compositeur d'employer

des motifs du terroir quand veilleuse.

comme

admirait également la

En

revanche,

il

il

les

développait

trouvait

que

les

d'une façon aussi mer-

seconds thèmes et

les

humain, étaient sensiblement plus faibles chez Mendelssohn. Quant à l'ouverture du Sauge d'ime nuit d'été, il ne fallait jamais oublier, disait-il, que l'auteur l'avait écrite à dix-sept ans combien la touche en était déjà sûre et la forme achevée C'est dans le particulier que Wagner jugeait ainsi les différents reparait

l'élément

:

!

compositeurs dont on venait à parler, transmises soit par

M. Dannreuther,

et ces soit

conversations nous ont été

par M. de Wolzogen dans


RICHARD WAGNER SCS intéressants souvenirs.

à son sujet,

fit

instrumentale,

Un

jour qu'on discutait sur Berlioz, Wao-ner,

une profession de suis

dit-il, je

3o3

bien

foi

inattendue.

En musique

«

un rcacticunaire, un conservateur. Je déteste

tout ce qui exige une explication verbale en surplus des sons eux-mêmes.

Par exemple,

le

milieu de la touchante

scène d'amour dans

le

Roméo

de Berlioz, prétend reproduire en phrases musicales les vers de Shakespeare relatifs à l'alouette et au rossignol dans la scène du

et Juliette,

balcon. Mais elle ne

rien de pareil et n'est pas intelligible, en tant

fait

que musique. Berlioz augmenta, modifia disant

Symphonie dramatique, dans

ni poisson

ment

Ni unité de

choraux,

sujet,

cette soi-

;

sa forme définitive, n'est ni chair

ce n'est pas le moins du

:

parler.

ouvrage

et gâta son

monde une symphonie,

à stricte-

de style;

récitatifs

ni

unité

les

et

mélodies et autres parties vocales ont vraiment trop peu

les

morceaux symphoniques. Le finale d'opéra, la partie du père Laurence en particulier, est tout à fait manqué. Cependant, il y a de belles choses çà et là. Le convoi funèbre est très touchant c'est un morceau de maître, aussi bien que l'Oftertoire dans la scène le Requiem. Le premier thème de la scène d'amour est divin du jardin avec la fête chez Capulet est d'une habileté extraordinaire, car, pour dire le vrai, Berlioz était diaboliquement habile. J'ai fait une

de rapports avec

les

:

;

étude approfondie de son instrumentation dès 1840, à Paris, je

me

souvent remis à ses partitions

suis

pour apprendre d'éviter.

»

ce

et

C'est là de

se diminuait

qu'il la

:

j'en

convenait de faire

franchise, à la

En

ce

beaucoup profité

en rien pour proclamer quel profit le

convenait

ce qu'il

et

bonne heure,

créations de Berlioz. C'est sottise de dire qu'il l'aveu formel

ai

et depuis,

il

et

avait

Wagner

ne

su tirer des

méconnut

:

en voilà

'.

qui

concerne

Schumann,

il

convient

d'insister.

Wagner

un compositeur délicat de petits chants inspirés, de jolies pièces de piano, un « peintre de genre » comme Mendelssohn était un « paysagiste », et il développait ainsi son jugement

reconnaissait en

lui

:

La façon propre à Schumann de traiter le piano est insupportable à mon oreille; tout y est mêlé, confus, et l'on ne peut rendre ses mor«

Quel soulagement d'entendre Dans les commencements, j'attendais ensuite une sonate de Beethoven plus de Schumann ses écrits sur la musique étaient brillants et ses compositions de piano montraient une grande originalité. 11 y avait ceaux sans abuser de

la

pédale obligée. !

;

I.

par

le

Wagner

représente

mot presque

ici le

classicisme

le

plus pur

et,

sans qu'il s'en doute,

il

termine son discours

textuel de Cherubini, lorsqu'on lui proposait d'aller entendre la .'iymphonie fanias-

rapprochenien : « Zc n'ai pas besoin d'aller savoir comment il né faut pas faire. » Ce qui rend le plus piquant encore, c'est que c'est Berlioz lui-même qui nous a transmis, par ses Mémoires, bourrade de Cherubini. tique


RICHARD WAGNER

3o4

dans

des

et

réelle,

beaucoup

cela

tout

très

tous ses soins à la déclamation, et

son temps.

ce

à

avait,

qu'il

débuts,

ses

pas un

n'était

parfaits.

;

quoi-

donnait

il

mérite en

petit

Wagner

forme, et

la

trouvé

ses admirateurs fanatiques, ses dévots,

franc-maçonnique

esprits

les

laquelle les moindres paroles

il

dans

Schumann en

ne s'en

pas

tint

air d'oracle. Alors,

il

forma

la

accès terrible et

d'entrer,

était

tous

lui

société

et

pour

bouche du maître prenaient

par l'adoration de cette petite chapelle,

Wagner

fut saisi d'un

reprit à démolir avec fureur les musiciens

se

la

Après

là.

comme une

refusèrent

libres

tombant de

exalté

se

pas

n'avait

un appui constant

grisé par l'encens qu'on lui brûlait sous le nez,

mêmes

aurait dû défendre et respecter.

Tant et

et

représentations des Nibelungen eurent réuni autour de

les

qu'il

chaleur

de Schubert

celles

malheureusement

resté le directeur; mais

un

une

mélodies,

ses

au moins tant que

Nouvelle Galette de musique,

que

aussi

»

Voilà qui est assez modéré dans oublié

nombre de

un grand

haut

ne soient pas aussi belles que

qu'elles

mais

fermentation,

passages nombreux sont vraiment uniques

aussi

J'estime

de

battu en brèche les compositeurs

qu'il avait

tant

autres,

qu'il

avait

quelque nation

pacotille^ à

fustigé de qu'ils

ne pouvait que faire chorus avec

la belle

façon

surfaits, français les

musiciens de

appartinssent, rien de mieux, et l'on lui

mais

;

voilà-t-il

pas qu'un beau

Schumann qu'il s'attaque, à Schumann, qui ne devait pas lui porter grand ombrage avec un seul opéra à Schumann enfin, que tout le monde musical reconnaît actuellement comme le plus grand musicien symphoniste après Beethoven. Ce qu'il lui reprochait, à

jour c'est

;

c'était

d'avoir

osé, lui, compositeur bien cloué

pour de petites pièces

de chant ou de piano, osé écrire des symphonies,

poèmes, un opéra de

ma

vie

l'aller

il

le

dit

formellement dans l'Œuvre

et la

des

mission

chercher exclusivement,

comme

trop de deux ou trois articles, et, en

l'un

ballades,

ainsi

il

convient, dans les créations

de Richard Wagner. Mais, pour terrasser un décisif,

des

trompé l'Allemand qui voulut voir dans au lieu dernier mot de l'art national contemporain

et d'avoir

ces ouvrages le

de

Wagner

d'entre ses

en

faisait

écrire

tel

homme,

même temps

qu'il

il

n'était

pas

en rédigeait un

un autre, non moins écrasant, par

commensaux.

Celui-là était le pianiste Joseph Rubinstein, un familier de la maison

de Wagner, qui n'avait que le nom de commun avec les deux frères célèbres, Antoine et Nicolas Rubinstein, et qui a fini par se tuer, après avoir dû quitter Bayreuth où l'on rendait la vie trop dure au serviteur

le

plus

aveuglément dévoué.

Ce Joseph Rubinstein donna


RICHARD WAGNER donc aux Feuilles de Bayveuth

Schumami, où

il

'

un

Ions;

3o5

article

Sur

:

la

musique de

comme

attaquait Tautcur de MauJ'red, non pas

poète

RICHARD WAGNER EN 1882. Dessin

et

ù

1.1

mine de plomb de M. Renoir, d'après son esquisse

musicien dramatique,

comme compositeur

Wagner

i\

s'était

riiuile faite

;i

Venise

le

i5 janvier 1S82.

— mais

réserve cette tâche,

au point de vue absolu.

Il

lui

reprochait

de ne

qui de ce journal mensuel, moniteur oaiciel du wagncrismc, Otait redire par la propagation de la foi wagneriennc. 11 d'articles et ne M. de Wolzoj;en sous la direction cl rinspiration de Wajjner, qui y donna beaucoup Brahms. Il lohanncs surtout. mais Joachim, cessa d'y attaquer les disciples ou servants de Schumann celles de lîeethovcn et déclare rci^ardc les .symphonies de ce dernier comme de pitoyables imitations de I.

Bayrcuthcr BLvttcr

commença

:

tel

est le titre

à paraître en janvier 1878,

pour

:

39


RICHARD WAGNER

3o6

morceau, de procéder toujours par

pas savoir bâtir un

membres de phrases montant par

répétant certains il

morceau sition.

symphonie en

alors la

prenait

en disséquait

bémol,

démontrait sans réplique possible

et

ne

Il

si

le

du métier,

vérité, et lui

:

«

Même

...

Schumann manque absolument de que

faut souhaiter

il

les

nombreux auteurs qui

ce serait la ruine totale du goût et du sentiment.

article général

en particulier,

sur

poème

le

qu'il l'exécuta

musiciens, de Mozart, de

singulier aveu

«

:

sur

d'opéra,

en passant.

s'inspirent de

On

et c'est

parlait

beaucoup

(en

dans un

de quantité de

Weber, de Winter, de Spohr,

criait

autrement,

;

composition dramatique

la

Il

de

»

front,

sans réserve et sur lequel

qu'il louait

sini enfin,

Schumann de

pas

n'attaqua

lui,

au point

sincérité,

se dégagent au plus tôt de cette pernicieuse influence

Wagner,

;

premier

le

de piano, au

pièces

contraire, et concluait à peu près en ces termes

de vue

en

néant de cette compo-

pas mieux ses délicieuses

traitait

rosalies,

ou demi-ton

ton

échapper ce

laissait

il

de Ros-

etc.,

Allemagne) contre Rossini

;

mais, au fond, ce qui nous blessait réellement, c'était moins sa poétique

que son génie.

Schumann

Heureusement que

aussi,

n'en

déplaise

à

les

Rossini

Wagner.

l'auteur de Tristan jugeait l'artiste auquel on «

...

attirer

mann

;

Mes

sont

rares.

Et

»

Voici

pourtant

ào\t le

Paradis

les

comment

et la

Péri

:

succès sur le théâtre royal de Dresde ne tardèrent pas à

auprès de moi d'abord Ferdinand Hiller, ensuite Robert Schuvenaient pour voir de près comment,

ils

lyriques les plus

importantes d'Allemagne, un

sur une des

scènes

compositeur allemand,

inconnu jusque-là, pouvait jouir d'une vogue durable auprès du public.

Les

deux amis crurent d'abord reconnaître que

particulier

comme

musicien

unique raison dans aussi et je

qu'il

était

de

et

que, dès lors, seul

le

texte

la

première

mon

de mes opéras.

je

n'offrais

rien

de

succès trouvait son

En

importance d'avoir

vérité, j'estime

un

bon poème,

m'en ouvris à eux-mêmes, qui étaient en quête de sujets d'opéra.

Ils

me demandaient mon

le

suivre

avis et, quand je le donnais, se refusaient à soupçonne que c'était par défiance des mauvais tours qu'ils redoutaient de moi. A propos de mon poème de Lohengrin, Schumann déclara qu'il ne voyait pas là un sujet d'opéra en quoi il ;

je

;

différait d'opinion

avec

le

maître de chapelle Taubert,

plus tard, bien après l'achèvement et l'exécution de avoir envie de prendre

mon

texte

pour

le

mon

de Berlin, qui, ouvrage, disait

mettre en musique à son

que les musiciens simplement ferrés sur leur métier qui croient s'élever par leurs symphonies jusqu'à Beethoven ne fabriquent que du Brahms; ailleurs, dans un morceau sur la vivisection des chiens, qui l'intéressait vivement, il insinue qu'il n'aurait que faire, à ses obsèques, du Requiem allemand, de Brahms. Il ne l'eut pas, en effet, mais il eut une magnifique couronne que l'auteur, oublieux de ses attaques, eut le bon goût d'envoyer pour les funérailles à Bayreuth.


RICHARD WAGNER Lorsque Scluimann composa

tour.

ma

peine à vouloir

poème de

le

sa Geneviève, je perdis

faire modifier son troisième

lui

malheureuse;

sottise

307

mais

s'emporta,

il

acte, qui est d'une

estimant

conseils n'allaient à rien moins qu'à ruiner

ses

au fond

que

meilleurs effets.

que tout dans son ouvrage fût allemand, pur, relevé cependant par quelques pointes de légèreté; et qu'un but

visait

finale.

assisté,

J'ai

ne

Il

chaste et

:

qu'il est arrivé à écrire les vulgarités et les grossièretés

mes

c'est ainsi

de son second

y a peu d'années, à Leipzig, à une représentation

il

très soignée de cette Geneviève, et je dois

confesser

que

le

troisième

Bal masqué d'Auber, oeuvre répugnante au premier chef et bâtie avec des motifs de même acabit, m'a paru un chef-d'œuvre d'esprit auprès de la brutalité vraiment écœurante de ce poète et compositeur allemand, chaste et pur. Chose étrange, je n'ai jamais entendu en Allemagne une seule plainte à ce sujet, tant est grande l'énergie avec laquelle l'Allemand impose silence à son vrai sentiment, quand il s'agit d'élever un homme au-dessus d'un autre, par exemple Schumann acte du

au-dessus de moi.

Tout

»

cela était-il bien sérieux? J'en doute, en vérité, tant ce serait

Et certain paragraphe arrivait où Wagner montrait un bout de l'oreille et semblait donner à entendre qu'il écrivait

triste à croire.

peu

le

.

pour

cela

tout

galerie.

la

«

...

Il

se

peut,

que

dit-il,

les

idées

ici

développées soient plus ou moins justes, mais cet article n'est pas destiné à la Galette de

supposé

que,

Accordé

;

Cologne

que cela

ni à

soit

aucune

mauvais,

la

chose

entre

reste

nous.

»

mais, encore que les Feuilles de Bayreuth n'aient pas en effet

l'importance de la Galette de Cologne, était-il

d'importance, en sorte

feuille

bien

d'imprimer de

nécessaire

comme Wagner choses,

telles

le dit

en riant,

ne pouvait-il

et

contenter ces haines de coterie plus discrètement et à meilleur marché?

Ce

Wagner,

qui frappait à première vue en Richard

extraordinaire forte, avec

animait ce corps chétif,

qui

un énorme développement du

c'était

surmonté d'une

la vie

tête

Les caricaturistes,

front.

très sur-

tout ceux d'Angleterre, ont bien saisi cette disproportion qui le faisait paraître, plus

petit

qu'il

en

n'était

réalité.

La

clarté

du

regard,

la

transparence des yeux adoucissaient ce visage aux lignes très accusées,

bouche, malgré

et la

la

forte

du nez

saillie

et

du menton,

avait un

caractère inoubliable de douceur et d'affabilité. Bien pris dans sa courte

extrêmement preste de mouvements, d'allure et de gestes, il donde prime abord l'impression d'une originalité vive et puissante il

taille,

nait

fascinait

;

par sa conversation, tant

tenaient au

cœur

et

mimait ce

il

s'animait sur les sujets qui

qu'il voulait

de tempérament extraordinaires

:

chez

lui,

dire.

Il

lui

avait des violences

la gaieté,

comme

la colère,


tempétueuse

était

alors

raillerie,

parlait ni

il

WAGNER

RICHAF'ÎD

3oS

inhabile

:

il

qu'il

le

trouvât,

ni

de qui

diplomatie était

la

ou réparer ses boutades,

écarts

retenir ou à le rattraper

il

allaient

sur cette pente

son

discours

voi.\

bref,

;

de s'imposer, son don de pro-

Et M. Dannreuther, qui

extrême.

vu de près, ajoute non sans une nuance

l'a

de regret

:

L'homme

«

amis appréciaient,

mateur

deux

A

bien

au

avait habituellement une

il

était

sur

le

nerveux,

choses.

et

Hélas

en

attitude de défi

;

point de s'emporter

;

irritable,

semblait

il

prendre plaisir à mettre en pièces «

public,

distincts

acteurs et musiciens,

il

impatient,

réfor-

le

l'égard du public et du

des chanteurs,

toujours

ou

s'adressait

individus

Richard Wagner.

monde

noble et bon, que ses

et le critique

qui

agressif

faisaient

WAGNER

sa

et

lui,

de pair avec une bonté simple, avec une

sensibilité

v

de

musical

son énergie native, irrésistible, sa façon incessante

autour de

tout

éclipsait

encore à FefFet

mélodieuse ajoutait duction

ou de

proprement incoercible.

était

se

à

joie

ne savait plus

il

;

femme, dont

et sa

pour prévenir ses

éveil

souvent

glissante

ménagement

perdait tout

il

devant quelles gens,

toujours en était

débordante. Était-il pris d'un accès de

et

oui,

!

hommes

c'était

le

côté

fâcheux de sa nature.

Lisant aux Champs Elysccs les journaux de Munich, qui lui apprennent la mort du roi Louis II. B Le vrai meurtrier de ce pauvre prince, ne serait-ce pas moi «

Et cependant quel ascendant prestigieux il

exerçait

sur tant d'artistes dévoués

comme

cause,

il

comme

les subjuguait,

à

sa

il

les

.'

fanatisait par

{Le Trihiiulct, 27 juin 1S86.)

par jamais des compétitions

eux

!

suivit,

Après ne

prodiguer

le

les

de

représentations

louanges

violence

d'amour-propre

même

qu'il

Parsifal ,

sans

et

s'inquiéter

pouvait provoquer entre

dans

la

réception

au milieu d'un cercle d'admirateurs

vit-on pas,

les

sa

un charme supérieur, peut-être

et les conseils les plus flatteurs

qui

attentifs,

à sa chanteuse

Materna Par un contraste humiliant, M"'' Brandt, qui vouée corps et âme à son triomphe et qui avait fait une Kundry incomparable, était dédaigneusement laissée à l'écart, seule avec

préférée.

M"'''

?

s'était

M"" Wagner, le

triomphe

artiste aurait,

qui s'efforçait, par ses prévenances,

de

lui

faire oublier

écrasant de

sa rivale auprès du maître. Et l'héroïque par fanatisme, recommencé l'année d'après, si Wagner,

avant de mourir,

ne l'avait rayée du de participer aux fêtes de i883 !

nombre des

interprètes

dignes


RICHARD WACNER un

3of)

de deux cents des meilleurs artistes de rAllemagne et de l'étranger accouraient pour les répétitions et repréQu'il

fit

et près

sip^nc,

de

deux étés tout fiers de s'associer à son œuvre, ils signaient gaiement l'engagement de passer, ces deux années-là, trois mois drstinkk de iucuard wagner icr-RAs. pleins à Bayreuth, sans gagner

sentations

tétralogie, réparties

la

sur

:

plus que leurs frais de voyage et

de logement. Enfin, n'impochanteurs

aux

pas

sait-il

plus réputés

stricte

la

les

obliga-

ne pas revenir en scène,

tion de

qu'on

pour

les applaudît,

si

fort

«

mieux rester dans

cadre

le

de l'œuvre qu'ils devaient présenter au public

»

?

Et tous se

courbaient sous cette règle de attendant

fer,

plût

qu'il

La Critique

Wagner

à

"j-?^»

broncher

sans

de

les

comme une

poui-suivait

le

Furie tant

qu'il vécut.

démasquer, revenant tous alors se

grouper en costumes autour

du maître, non pour eux-mêmes ni pour le public, mais afin de donner a

l'auteur

à

une

dernière

de

œuvre

son

c'est

vue >>.

de

et

donner peut-être à

lui

seul,

lui

d'ensemble

Notez

lui-même qui parle

que ainsi

dans de brèves notes de service adressées aux chanteurs

cela

:

n'est-il

pas merveilleux et vit-on

jamais

homme

pire aussi

les

^^

suit son cercueil"et joue drapé de deuil.

présent,!; elle

lu cheval

'1-

le

rolc

{Kikeriki, de Vienne, 22 février itS3.)

sujets

plus difficiles à gouverner

Tous

A

em-

exercer un

grand sur des

i.:

?

gens qui ont approché Richard

Wagner

ont été captivés,

dominés par sa personne, aussi bien ceux qui sont entrés dans son intimité que ceux qui n'ont fait que passer mais tous aussi témoignent des brusques soubresauts de son humeur et de la nécessité qu'il y avait de plier devant lui. Que dit, par exemple, iM"'" Judith Gauséduits,

;

tier,

caractère de Richard et

y a dans le reconnaître, des violences

qui lui portait une sorte d'admiration religieuse?

Wagner,

il

faut bien le

des rudesses qui sont cause qu'il est

si

«

11

souvent méconnu, mais seulc-


RICHARD WAGNER

3,0

ment de ceux qui ne jugent que par impressionnable à Texcès,

et

poussés à leur paroxysme

moindre

désespoir, la

terribles

d'une

de chagrin

vieillit

le

jeune que jamais

exquise

de dix ans, mais,

jour d'après.

le

Il

sincère,

chez

lui

presque du

la fureur.

Cette mer-

est

de

il

la

des

a

sensibilité,

même comment

Toujours

extraordinaire.

si

éprouve sont toujours

qu'il

une peine légère

;

on se demande

;

sentiments

irritation a l'apparence

organisation,

veilleuse

les

vibrations

peut y résister joie revenue, il

un jour

:

plus

est

une prodigalité

se dépense avec

donnant tout

se

Nerveux

des choses.

rextériorité

entier

choses, d'un esprit très mobile pourtant; ses opinions,

ses

toutes

à

idées, très

absolues au premier moment, n'ont rien d'irrévocable; personne mieux

que

ne

lui

premier

reconnaître une erreur; mais

sait

Par

feu.

la franchise,

assez souvent de toujours,

dépasse

il

Beaucoup, amitié

le

chez

que,

tandis le

maître des regrets

si

vraie

s'en serait accru.

»

Que «

vu

dit à

son tour

C'est là qu'il

sa

nature

nombreux

arrive

excessif

;

emportent sans rien dire

de

si

sincères,

consoler,

les

perdent ainsi une

ils

avaient crié qu'on

s'ils

avec une effusion

eussent

lui

il

le

but et n'a pas conscience du chagrin qu'il cause.

qui s'envenime dans la rancune, et

précieuse;

sa parole,

vouloir ses meilleurs amis

le

dans leur amour-propre,

froissés

la blessure,

sans

blesser

véhémence de

la

passer

faut laisser

il

il

les

blessait,

ils

se serait efforcé

que leur amour pour

M. Monod, beaucoup moins

lui

intime à Bayreuth?

faut voir et connaître 'Wagner, lorsqu'il met un frein à

indomptable pour recevoir avec une courtoisie parfaite visiteurs qu'ont attirés les fêtes

de Bayreuth.

Il

les

exerce sur

ceux qui l'approchent un irrésistible ascendant, non seulement par son génie musical,

par l'originalité de son esprit,

connaissances, mais surtout par une

volonté qui éclate

par

puissance de

dans toute sa personne.

On

variété

la

tempérament

de ses de

et

sent qu'on est en pré-

sence d'une sorte de force de la nature qui s'agite et se déchaîne avec

une violence presque irresponsable. Quand on l'a vu de près, tantôt d'une gaieté sans frein, livrant passage à un torrent de plaisanteries et de

rires,

ne respectant dans ses attaques

tantôt furieux,

ni

puissances, ni amitiés, toujours obéissant à l'élan irrésistible

mouvement, on finit par manques de goût, de tact

et

on

Juif,

est

tenté,

Judaïsme dans

si

l'on

la

musique

capitulation de Paris;

accablé l'Allemagne; taines

lettres

ne plus

est

si

;

si

à Frédéric

II,

reprocher

de délicatesse dont de

lui

l'on est

l'on est

comme

lui

il

trop s'est

durement

les

rendu coupable

pardonner sa brochure sur Français, sa pantalonnade sur

Allemand, toutes

les injures

on pardonne à Voltaire à

ni

titres,

du premier

la

dont

il

;

le

la

a

Pucelle et cer-

Shakespeare certaines plaisanteries

et


RICHARD WAGNKR sonnets,

certains

On

certains discours.

parce

certaines

prend

de

tel

produits'.

ait

»

Il

pièces

qu'il

à Victor

ridicules,

Hugo

plein de défauts, peut-être

est,

mais

génie,

un des plus grands

supérieur, siècle

le

plein

est

qu'il

Goethe

à

3,,

incontestablement

homme

un

des plus extraordinaires que notre impossible de mieux dire en moins

et

serait

de mots.

Tous

les

afïable

très

témoignages en font et

foi

Wagner, comme homme,

:

même

de relations charmantes,

Le peintre Renoir, voyageant un

était

à l'égard des Français.

certain hiver en Italie et sachant la

répugnance que marquait Wagner à poser devant aucun peintre, espérait fort peu faire le portrait du grand compositeur. 11 s'était pourtant muni à tout hasard d'une lettre d'introduction perdue en route, et la première personne qui

ment

quand

le reçut,

se présenta chez

il

Wagner,

fut précisé-

peintre russe Paul Joukowski, qui s'était attaché à la fortune du

le

maître et qui s'occupait alors à faire les maquettes des décors de Parsifal

Comme

•.

côté

Renoir

lui

marquait

depuis deux ans

qu'il suivait

but de sa

le

Wagner

visite,

de faire

afin

avoua de son son portrait

il

:

Mais restez, dit-il; ce qu'il me refuse à moi, il peut vous l'accorder; quand même, vous ne pouvez partir sans le voir. « Renoir resta et fit bien Mais écoutez-le parler; c'est un vrai tableau que ce récit familier, fait par lettre à un ami, de Sa visite à Wagner « ... J'entends un bruit de pas assourdi par les épais tapis. C'est le maître avec son vêtement de velours à grandes manches «

et

:

doublées de satin noir.

main, m'invite à

me

11

est très

beau

et très aimable.

me

Il

serre la

commence une conversation

réasseoir et alors

des

plus insensées, parsemée de ah! de oh! moitié français, moitié allemand,

avec des terminaisons gutturales.

un son et

raconte

tout.

Quand

je

Alors,

il

me

dis

prenait les mains,

Addente^ encore un peu; Bref,

Wagner,

entraîné

:

nous,

me

russe et

viens de Naples

je

pour

le

je n'ai

beaucoup

Et

tait

me

je

»,

rire.

que répéter

levais

refourrait dans

:

pour m'en

mon

fauteuil

:

fenir... d

gaieté

la

l'amuse, offre de poser une demi-heure, à la fois pour le peintre

»

ma îemmQ fa par

Non,

lettre, ce qui le fait

Cher maître, certainement, cher maître.

aller. «

ma

perte de

la

Nous parlons de «

Je suis bien goûtent (ah! oh! et

Vous venez de Paris?

guttural).

lui

je

«

du

peintre

parisien

qui

lendemain avant son déjeuner,

le

français

:

«

Vous me

ferez.

la tétralogie à Bayreuth en 1S76. rencontrant Richard Wagner à Naples, brigua et obtint l'honneur d'être choisi pour faire les décors de Parsifal et quitta tout pour suivre le inaitre, est le tils d'un des plus illustres poètes de la Russie, qui fut le précepteur d'Alexandre II. L'artiste s'est installé dans une maison toute voisine de Wahnfried et vit là en ermite, travaillant de 1.

Articles de M. G.

2.

«

Monod

Ce ieune peintre

tout son cceur.

»

publiés dans

écrit M""" Judith

le

Moniteur universel sur

Gautier

— qui,


RICHARD WAGNER

3,2

au premier, tournant le dos à la France, et M. Renoir me fera de l'autre côte. » [Ah! oh!) « .... Le lendemain, poursuit Renoir, j'étais là à midi; vous savez le reste. Il a été très gai, moi très nerdit-il

employé mon temps, trente-cinq minutes ce n'est pas beaucoup. Mais si je car mon modèle finissait par m'étais arrêté avant, c'était très beau

veux

de n'être pas Ingres. Bref,

et regrettant

crois, bien

j'ai, je

:

;

perdre un peu de sa gaieté et devenir raidc.

A

gements; enfin vous verrez. a dit

«

:

Ah! ah!

Enfin

vrai.

j'étais

comment

Voilà

demi-heure par

le

reprises

que

un gros

rire),

c(

«

le

ce

prêtre protestant.

«

admirable.

portrait

ait

à l'huile,

avait terminé

bien voulu poser.

Français lisaient trop

les Juifs

allemands

(et

il

fait

Ce

11

qui est

four;

il

y a

brossé

à

Palerme en une 1882,

surlen-

Parsifal, est un des rares «

....

a répété à plusieurs

Il

ah! et Mais, monsieur

les critiques d'art [ali !

en

nomme

un).

«

Renoir, je sais qu'il y a en France de pons garçons que je ne confonds pas avec les Juifs allemands. » Je ne puis malheureusement pas rendre franche

la

Le

comme

gaieté de toute cette conversation de la part du maître.

singulier il

Wagner que nous

difî"érait

de

avait

fait

pris sur le vif!

celui-ci,

Les vrais génies sont aussi simples dans le

»

à voir.

»

peintre français Renoir, le i5 janvier

maître

les

demandé

a

très heureux de n'avoir pas trop

demain du jour où Wagner pour lesquels

Wagner

fin,

ressemble à un

je

petit souvenir de cette tète

un

la

trop suivi ces chan-

J'ai

»

une légende hostile et Quoi d'étonnant à cela?

l'intimité

que

les

faux génies

sont peu. Ceux-ci n'oublient jamais leur personnage et ne se lassent

pas

de poser, qui pour

exalté.

penseur

le

absorbé,

qui

pour

le

mystique

Ce sont de grands comédiens, sinon de grands musiciens.

A

Wagner

LA PORTE DU CIEL.

dcmaiidaiit [Ucr

il

sainl Pierre de lui ouvrir le Paradis.

jiiii^c Kilicrild,

iS fOvricr iStiJ.)


CHAPITRE XVl LE GENIE EN FACE DE SES PARTISANS ET DE SES

devait-il

LIE

Wagner

advenir de Richard

I

mort, le

et quelle

simplement

dun

Eh

?

réformateur inspiré.

aura

11

on

de

incarnait

:

c'était

un jour sur terre, éclairant le

ouvertement

s'est

personnalité

sa

plume engagés autour du maître, on

et

grands

des

lors

si

presque,

le déifiait

tout l'art musical en sa personne et l'on n'admettait rien

auparavant, rien après

lui

dégager

de

Dieu, tout

sort de tous les

le il

Aux temps héroïques,

puissante.

combats

que

avant

mon

!

du premier ordre

celle d'un musicien

génies qui l'ont précédé et dont inspiré

après sa

sera vraisemblablement sa place dans

d'or de la postérité

livre

UETRACTELUS

le

comme

le

monde

et

dieu de

ne devant plus laisser après

que ténèbres. Mais ces excès de pensée feu de la lutte et provoqués par les

sont calmés à mesure que

le

détracteurs et s'imposait

à

musique descendant

la

de style, éclatant dans

et

négations du parti ennemi,

se

génie ainsi défendu rencontrait moins de durable

l'admiration

de

tous

esprits

les

réfléchis.

Ce

fut alors

Wagner

fut

une autre antienne. Dès que

reconnu

wagnéristes de

la

peu

à

dernière

pour se distinguer d'avec imaginèrent de rejeter

Wagner

le

le

philosophe

près par

heure, les

génie musical de Richard

le

maladifs et contournés

esprits

premiers

prosélytes,

musicien en seconde et

le

poète,

monde, apparurent

tout le

en

par l'âge,

assagis et

d'exalter chez

faire

une sorte de de la poudre

ligne

pour

les

qui,

mystagogue universel. Jeux littéraires destinés à jeter aux yeux des lecteurs naïfs, gageures de jeunes gens en humeur de rire,' simple cliquetis de mots qui ne veulent rien dire et dont les premiers

à

s'amuser

sont,

il

me

plait

de

le

ceux

croire,

dans Wagner

qui

s

y

Wagner est dans tout, tout est formule néo-panthéistique à laquelle on pourrait ramener ces merveilleux

exercent.

discours, un peu confus sans doute au premier abord

épigones l'ayant ainsi voulu pour exaspérer

on discerne aisément broussailles

le

fond, peu

les

profond,

si

:

ces

bourgeois — touffues

telle est la

facétieux

mais dont

que soient

entassées pour masquer ce piège à nigauds. 40

les


RICHARD WAGNER

3,4

Du et

penseur qu'on s'ingénie à découvrir en Wagner, du philosophe

du

vent

poHticien

du poète,

;

en

il

être lui-même,

croyait

qu'il

tout

restera

juste

emportera

autant en est

inséparable du

n'ayant

pu être menée

qui

ce

musicien, la réforme qu'il a conçue et réalisée

le

à bien que par un grand compositeur doublé d'un littérateur instruit et

Quant au musicien, sur

perspicace.

lequel

des détracteurs arriérés et

des partisans trop avancés se dépensent en de puérils écrits, c'est une et l'on peut affirmer, sans se targuer du don de proque son œuvre entier traversera les siècles, dans la mesure permise à une œuvre musicale, et rendra le nom de Richard "Wagner immortel. C'est une destinée commune, en France, aux compositeurs

autre affaire, phétie,

qui innovent ou réforment que d'être, à leur apparition, combattus par leurs pairs et défendus par des

Wagner que pour

pour

hommes

de lettres

que pour Gluck,

Lulli,

médiocrement musiciens, mais

littérateurs purs,

:

en

et

fut-il

autrement

ne sont-ce pas des ouverts aux idées

très

de progrès, qui furent frappés tout d'abord de l'excellence des réformes proposées, qui embouchèrent

novateur contre

Les femmes, et

de

même

Provence on

vit

musiciens

les

et

soutenir

le

?

aussi, prirent part à la lutte avec leur fièvre habituelle,

qu'au siècle dernier on voyait

faire cabale, ainsi

également

impériale

trompette pour défendre

la

telle

la reine et la

comtesse de

qu'on disait alors, pour Iphtgénie en Aiilide,

princesse étrangère, telle belle

dame de

la

cour

éperdument des mains à Tannhœuser et briser son en faisant tête à toute une salle déchaînée. « ...Un

battre

éventail de dépit,

dernier ennui, mais colossal, écrivait alors cet éternel railleur de Méri-

mée, a été Tannhœuser. Les uns disent que la représentation à Paris d'autres a été une des conventions secrètes du traité de Villafranca ;

qu'on nous a envoyé est

fait

que

c'est

Wagner pour nous Il me semble que

forcer à admirer Berlioz.

prodigieux.

je

pourrais

Le

écrire

demain quelque chose de semblable en m'inspirant de mon chat marchant sur

La

le clavier

d'un piano.

La

représentation était très curieuse.

mouvement terrible pour faire semblant de comprendre et pour faire commencer les applaudissements qui n'arrivaient pas. Tout le monde bâillait; mais, d'abord, tout le monde princesse de Metternich se donnait un

voulait avoir le fiasco

Au

est

l'air de comprendre cette énigme sans nom... » Conclusion énorme; Auber dit que c'est « du Berlioz sans mélodie ».

moins,

:

la

bataille

des deux côtés avec une furie inimaginable avait-elle

deur

;

on s'abordait de front

faux-fuyants,

héroïque pour

en

criant

Wagner

et

menée

quelque

gran-

poussée à ce degré d'acharnement

et l'on se portait

de terribles coups, sans

au génie ou au monstre. et

ses

tenants,

tandis

que

C'était les

la

période

attaques insi-


RICHARD WAGNER des

dieuses

ennemis

derniers

et

3i3

façonnccs de ses

glorifications

les

modernes zélateurs sont empreintes d'une mesquinerie singulière des ou s'affiche la décadence. Heureusement que le génie du maître est assez grand pour résister aux uns comme aux :

deux côtés s'accuse

autres et qu'il ne saurait être jugé à

ou de

compositeur de génie,

salué

désespérément contre

lui

et

ne se

les

donc close

peuvent tenir de

dans

;

l'histoire et

dans l'immortalité.

Ce malheureux échec de Tannhœuser revenir, était resté si

comme un

musiciens étrangers. Tantôt,

ne

tenait

indépendance

il

affectait

a

;

faut toujours

Wagner,

exercé

toujours

public

français

qui

tantôt,

;

les

amis de France,

il

il

s'en

sauvegardé son

avait

mais, dès qu'il ne parlait plus pour

et qu'il n'avait plus affaire à des

sur

de s'en désintéresser, assurant

d'un bienfait des dieux

d'artiste

il

point noir dans l'existence de

nullement rigueur au

comme

réjouissait

à Paris, auquel

que notre capitale

puissant est l'attrait

qu'il

l'occasion

l'imiter,

maître est entré désormais

le

;

est

qui s'acharnent

héroïque et légendaire

L'ère

commence

l'âge classique

mêmes

vieillis

Wagner

Aujourd'hui,

musiciens

venue, et de se traîner à sa remorque. est

de ses adversaires

la taille

ses dévots de la nouvelle observance.

laissait

la galerie

percer dans

un regret amer, une rancune insurmontable. Et c'était tout naturel. Dans les derniers temps de sa vie, il écrivait encore à l'un de

ses écrits

ses partisans qu'il ne voulait pas

pour

lui

montrer l'endroit où Tannhœuser avait été

avaient

tant,

mourir sans avoir mené son

fait

premier moment,

l'impossible

afin

à Paris

fils

Ses amis, pour-

sifflé.

de panser sa blessure,

dès

et,

le

des esprits droits, des écrivains d'élite avaient protesté

contre ce jugement sommaire avec une généreuse indignation. «

...

Le succès ou

l'insuccès

de

Tannhœuser ne peut absolument

même

déterminer une quantité quelconque de chances favorables ou défavorables dans l'avenir. Tannhœuser, en supposant rien prouver ni

qu'il

fût

supposant parfait, question

de

continuera;

que

si

En

le

le

fait,

la

la

bataille

un ouvrage détestable, aurait pu monter aux nues. la

il

La

question,

dans

réformation de l'opéra n'est pas vidée, et

apaisée,

Wagner

pouvait révolter.

elle

recommencera.

obtenait par son

J'entendais

drame un

éclatant

dire

récemment

succès,

ce

serait

que sa méthode n'aurait aucune influence ultérieure sur les destinées et les transformations du drame lyrique. Je me crois autorisé, par l'étude du passé, c'est-à-dire de

un accident purement individuel,

l'éternel, à

préjuger l'absolu

ne détruit en aucune façon

même

la

et

contraire, possibilité

à

savoir

de

qu'un

échec complet

tentatives nouvelles

dans

que dans un avenir très rapproché on pourrait bien voir non pas seulement des auteurs nouveaux, mais même des hommes le

sens, et


RICHARD WAGNER

3i6

anciennement accrédités, idées émises par

ouverte par

lui.

dans une mesure quelconque, des

profiter,

Wagner, et passer heureusement Dans quelle histoire a-t-on jamais

causes se perdaient en une seule partie

à travers

que

lu

brèche

la

les

grandes

»

?

Qui parle ce beau langage et qui donc a lu si clairement dans l'avenir au lendemain de la déroute ? Un homme assurément peu versé dans

les

choses de

musique, mais auquel sa haute intelligence avait

la

œuvre

plume acérée jetées sur le papier avec une chaleur éloquente. Et nul non mieux dépeint que Baudelaire l'enfièvrement qui s'empare des

révélé les lois éternelles de toute les avait

plus n"a

esprits à la

sorte

première audition d'œuvres de Richard Wagner, et cette

moral

d'envahissement pénétré un

qu'ils ont

«

Aucun musicien

profondeur,

qui

et

comme Wagner,

n'excelle,

matériels

tout

ce

possède

Il

qu'il

fois

reviennent toujours.

lui

spirituels.

et

sieurs esprits, et des meilleurs, n'ont

occasions.

une

que tant d'amateurs,

fait

peu avant dans sa musique, n'en veulent plus

entendre aucune autre

la

d'art et dont la

pu s'empêcher de

de traduire,

l'art

à peindre l'espace et

une remarque que plu-

C'est

par des

en plusieurs

faire

gradations

subtiles,

y a d'excessif, d'immense, d'ambitieux, dans l'homme Il semble parfois, en écoutant cette musique ardente

spirituel et naturel. et despotique,

par

la rêverie,

moment,

qu'on retrouve peintes sur les

fond des ténèbres, déchiré

le

vertigineuses conceptions de l'opium.

c'est-à-dire

du premier concert',

je

fus

A

partir de ce

du

possédé

désir

d'entrer plus avant dans l'intelligence de ces œuvres singulières. J'avais subi (du moins cela m'apparaissait ainsi) une révélation.

Ma

volupté avait été

m'empêcher

si

forte

et

opération spirituelle, une si

terrible

que

je

ne pou-

Dans ce que j'avais éprouvé, il entrait sans doute beaucoup de ce que Weber et Beethoven m'avaient déjà fait connaître, mais aussi quelque chose de nouveau que j'étais impuissant à définir, et cette impuissance me causait une colère et une curiosité mêlées d'un bizarre délice. Pendant plusieurs jours,

vais

d'y vouloir retourner sans cesse.

pendant longtemps, « de la musique de

me dis Wagner?

je

piano furent plus d'une

fois

:

»

«

pourrais-je bien entendre ce soir

Ceux de mes amis qui possédaient un

mes martyrs.

casinos

les

triviales.

ouverts tous

il

une foule amoureuse de voluptés

La majesté fulgurante de cette musique tombait mauvais lieu. Le bruit s'en répandit

tonnerre dans un

1.

les soirs à

comme en est de Wagner retentirent dans

Bientôt,

toute nouveauté, des morceaux symphoniques de

comme

vite, et

le

nous

Le premier concert donné par Richard Wagner au Théâtre-Italien de Paris est du 25 jandans la Revue eiiropéeiine du i"'' avril i8Ci, soit iininédiatement après la

vier i8ôo. Cet article parut

débâcle de Tannhcvuscr.


RICHARD WACiNF. R eûmes souvent

d'hommes

spectacle comique

le

sant le contact des cohues malsaines,

de

noces de Lohengrin.

«

en attendant mieux,

Wagner?

pourrais-je entendre de la musique de

combien

et

l'ont poussé,

dans

Mais quelle

!

premiers temps de

les

donc

fut

Quel

»

cri

du

révélation

la

l'origine et

quelle est

pouvoir souve-

raison de ce

rain,

o-raves et délicats suliis-

jouir,

»

wagnérienne en France la

pour

marche solennelle des Invités au Wartburg ou des majestueuses

\a

cœur

3-7

de cette attraction fasci-

que

natrice

Waoner

musique

la

exerce

de

invinciblement

sur tous les gens qui n'y opposent pas une résistance achar-

née

de parti pris

et

?

Elle pro-

vient sûrement de la façon dont le

maître a conçu

d'art

entière, car

œuvre

son

ce n'est pas

seulement un charme

musical

qui s'en dégage, et du bonheur

avec lequel

il

a fondu tous les

éléments émotionnels dans une

œuvre

homogène,

d'art

en

attribuant à tous un rôle égal,

sans en laisser dominer un seul

au détriment des autres. doit tenir aussi à ce

Cela

que Richard

Wagner, préoccupé

surtout de

A

traduire et d'exprimer des sen-

timents,

des

mouvements

de

moins

les

Richard Wagner à Kikeriki. ami,

il

y a

ici

A'iVv-eriA-i.

l'âme,

de

peindre

événements extérieurs, que

BAYREUTH.

font

—Vous

le

voyez, clier

des gens qui applaudissent. X'ous faites erreur, grand maître;

que joindre leurs mains .lU-dessus de leur

ils

ne

tète.

^vAm/,/, de vienne. 3 août iss-.i

les

passions qui les ont provoqués

ou

les.

conflits

qui

en

résultent

dans l'àme de ses héros, du

même

coup, pénètre au plus profond du cœur de ses auditeurs.

au profit du mythe équivalait à dire que dans toute action scénique, dans tout drame, au sens originel du mot, il ne cherchait qu'un sujet très simple et simplement traité, dépourvu surtout des combinaisons et péripéties dramatiques en

En

faveur

fait,

dans

l'histoire

sa proscription de

l'opéra

ordinaire.

l'histoire

Or

il

trouvait

héroïque des siècles passés que dans

ment que beaucoup de

ses

poèmes

se

bien

dans

légende pure,

telle-

cela la

meuvent dans

aussi

l'histoire,

dans


RICHARD WAGNER

3,8

rudimentaire

l'histoire

il

est

mais non plus seulement dans

vrai,

la

formulé ses préférences d'une façon trop exclusive et trop absolue, cela ne paraît pas douteux; mais il n'est pas douteux, non plus, que les raisons de son choix étaient judicieusement déduites Qu'il

légende.

ait

:

seulement à

étendez

comme

et

dans

le

œuvre, était

l'a

il

légende

qu'il

dit

du mythe,

passant de la théorie à la mise en

d'instinct en

fait

vous devrez reconnaître qu'il avait pleinement raison. Il vrai, dans le vrai pour sa nature artistique et son tem-

pérament musical, la

embryonnaire ce

l'histoire

lorsqu'il

résolut d'adopter des sujets appartenant à

à l'histoire en formation, aurait-il dû ajouter), parce que,

(et

éléments émotionnels d'une donnée mythique sont toujours peu complexes et se peuvent aisément dégager de tout détail accessoire, parce que c'est seulement dans le cœur d'une histoire et dans son pathédisait-il, les

tique essentiel que le musicien puisera ses meilleures inspirations.

Cette observation témoignait à

lui-même

d'un retour clairvoyant sur

fois

la

d'une connaissance exacte du public,

et

plus accessible aux

émotions, aux sentiments simples, qu'aux raffinements et complications de passion. Mais ce n'était pas tout que de l'avoir faite, il fallait en tirer

parti,

conception

et

à quoi tendaient les procédés de

c'est

première

et

dans

l'exécution

Wagner dans

la

de ses ouvrages,

définitive

musique, poétique ou quand il accouplait divers arts ensemble égale. « Je reconnus, la balance mimique, en tenant toujours entre eux répète-t-il avec insistance, que précisément là où l'un de ces arts atteignait à des limites infranchissables, commençait aussitôt, avec la plus rigoureuse exactitude, la sphère d'action de l'autre; que, conséquem:

ment, par l'union clarté la

on exprimerait avec

intime de ces deux arts,

plus satisfaisante ce que

la

ne pouvait exprimer chacun d'eux

isolément; que, par contraire, toute tentative de rendre avec les moyens

de l'un d'eux ce qui ne saurait être rendu que par les deux ensemble, devait fatalement conduire à l'obscurité, à la confusion d'abord, et ensuite à la dégénérescence, à la corruption de chaque art en particu-

Voilà qui est fort bien dit en théorie

lier.

»

dans

la pratique,

nisé

qui puisse enfanter d'emblée une

car

il

n'est

cerveau

donc obligé de suivre un ordre moins,

il

lui

fallait diviser ce

et,

si

;

mais comment procédait-il

vaste

œuvre

dans

la

qui, plus tard,

et

si

aussi

richement orga-

complexe

?

Il

était

besogne préparatoire au devait

paraître issu d'un

seul effort de volonté.

Lorsque Wagner avait fixé son choix sur tel ou tel sujet, le premier travail, et non le plus facile à ses yeux, était de condenser en un canevas très serré les fils épars du mythe auquel il s'était arrêté et de les tresser, pour ainsi dire, à nouveau. Tâche préliminaire formidable


RICHARD WAGNKR dont on

319

une idée en pensant à combien de sources diverses il devait aller puiser ses matériaux avant de les fondre et de les souder pour obtenir un tout hom.ogène. Une fois qu'il en avait fini

et

peut se

avec ces recherches

faire

ou

pittoresques

littéraires

nages se détachaient clairement à ses yeux,

et

lorsque les person-

entamait son ébauche

il

;

commençait le travail proprement dit de Fauteur dramatique. En donnant corps aux actes et aux scènes, il ne perdait pas un instant de vue le théâtre, et la représentation avait lieu, pour ainsi parler, dans ici

son esprit.

Avant

tout,

il

voulait que le dialogue, dans chaque scène, mît à nu

personnages

les motifs intérieurs qui guidaient les

et que, d'une scène

marche du drame apparût comme étant le résultat direct de ces sentiments pour s'arrêter, à la fin de chaque acte, sur quelque événement décisif, sur un point culminant de l'histoire. La pièce une fois esquissée et les principaux passages du dialogue fixés, Wagner à l'autre,

la

s'occupait de mettre son

rythmique

tion

adéquate à

concevoir à

la fois le

fait,

le

musique, ou plutôt

la

poète et

conception musicale

allait

vers et

il

de pair avec

la

pris

ainsi

commençait à

l'écrire,

musicien ne faisaient qu'un chez

le

son

le

devait être adhérente,

Et quand son poème avait

chantée.

la syllabe

entreprenait

il

en

car,

s'efforçant de

et

vers, recherchant surtout l'accentua-

tant la syllabe prononcée, à ses yeux,

musical,

corps,

poème en

conception poétique,

en certains cas. première période d'incubation de son œuvre, alors

lui

la

;

la

devan-

çait peut-être

Dès

la

faisait qu'entrevoir

certaines

esprit

comme tions

il

les

caractères

et

et

situations,

il

se

phrases musicales, certains motifs,

désigna plus tard

dominantes ou

motifs, et d'autres de

même

ne

présentait à son

les

qui déterminaient pour

les traits caractéristiques

qu'il

Leitmotn>e

émo-

lui les

de ses personnages. Ces

deviennent les sujets, à propre-

origine,

symphoniste dramatique manie en se servant de toutes les ressources orchestrales de Beethoven, mais en y ajoutant tout ce que peut lui suggérer le cours de l'action dramatique.

ment parler

les

Les tableaux

événements qui se déroulent sur la scène deviennent ordes visions expliquées par la musique symphonique

ainsi

comme

thèmes, que

et les

;

chestre prépare et met à les

le

événements passés

flot

et

l'action,

devient,

appuie sur

en

quelque

les

détails,

façon,

la

1

rappelle

conscience

artistique de toute l'œuvre'. travail de I. Ces considérations sur l'cntantement des opcras de \^"agner, rcsumccs ici d'aprcs le M. Dannreuther dans le Dictionnaire de musique de Grove, sont d'autant plus curieuses à connaiire qu'elles doivent venir de Wagner lui-même. M. Dannreuther paraît aller un peu loin quand il affirme que Wagner ne veut pas de narrations dans ses opéras et qu'il prétend que tous les faits importants les récits ne se déroulent sur la scène, il n'est presque aucun de ses ouvrages, au contraire, uix


RICHARD WAGNER

3zo

Assurément,

écrivent pour le théâtre un tel

de

connaissances

pour

concevoir, à

de

réprouver de Tristan a

demander

serait intempestif de

il

exécuter, telles

perdu

travail

en un

diverses,

exigences.

tous

une somme égale méthode identique pour

préparatoire,

mot, une

Richard

et

C'est

Wagner

aurait été

premier

le

de répéter que Tauteur

sottise

compositeurs

les

à tous les musiciens qui

de

son temps

qui

n'ont

pas réagi contre son influence, et ceux qui s'en vont prêchant la croi-

sade contre cet ni

dans

voies

les

hérésiarque musical

de personne,

ni d'eux,

charlatans

«

d'arrêter

ouvertes

de village,

à

ils

la

suite

ne

font

»

le

savent fort bien qu'il ne dépend

mouvement

d'un

du

qui

pousse

oénie novateur

bruit

:

un art

comme

les

que pour retenir un peu

\t^

EXCLAMATION « Il

y

il

D UN

Bienheureux

KA N

AT QUt 1

luaitrc, les

DE

RICHARD WAGNER.

bassons sont avec

dans cette légende un ii-peu-près assez fade en allemand 'KiUcriliî,

de Vienne. 6

aoiit

toi

!

»

en tianv'ais.y

et intraduisible

iSS^.)

plus longtemps les badauds autour de leur estrade.

11

est

dans

générales de l'univers qu'un génie hors ligne attire à

lui,

rayonnement, tous les pouvoir de diriger en

n'est

artistes tel

ou

contemporains

tel

;

mais

il

par son seul

sens l'influence géniale que

a départie, ni de faire qu'elle soit bienfaisante

les lois

pas en son le

Ciel lui

ou maligne sur ceux qui

tiennent une place considérable; mais il est plus dans le vrai quand il résume en peu de mots les diUérentcs façons dont Wagner, successivement, a compris la mélodie chantée et traité les voix. Il ne cherchait d'abord, dans Rieri^i, que de simples mélodies, dans lesquelles le chanteur produisit facilement de l'effet; puis, dans le Vaisseau fantôme et plus consciemment dans 7"ii)i«/uri(ïer, le flux et reflux mélodique est réglé par l'action dramatique; dans Lohengrin, les sentiments en jeu tout autant que les particularités de la mélodie attirent l'attention, tandis qu'une harmonie et une instrumentation caractéristique accentuent l'esquisse mélodique; enfin, dans ses derniers ouvrages, la mélodie vocale jaillit directement des paroles; elle est souvent indépendante de l'orchestre et dans le

certains cas, à vrai dire, elle n'esi qu'une version intensifiée des sons parlés de la langue allemande.


RlCHAkl) subissent

la

:

c'est

ceux-ci

à

WAGNER

d'en

savoir

tirer

s'abandonner au courant sans Dans l'ordre de la musique dramatique,

forces, et de

à

fin

la

du

avec Rossini, au

xviu'' siècle,

Richard

exercée par

l'influence

quelle embrasse un

champ

"V\''agner

plus vaste,

321

s'y

leurs

noyer.

en

il

suivant

profit,

fut ainsi

avec Gluck,

commencement du paraît

xi\% et

plus frappante,

comprenant

à la

fois

la

si

c'est

con-

drame, l'élaboration de la parole, la manipulation de que l'influence de Gluck ne se fit sentir que sur la déclamation proprement dite, et celle de Rossini sur la production mélodique pure. 11 faut ajouter, pour compléter ce rapprochement, que ception

du

rorchestre, alors

Gluck

et Rossini

ne visaient aucunement à exercer un ascendant quel-

conque sur les musiciens qui vivaient de leur temps ou qui viendraient

DIFFERENCE ENTRE DEUX COMPOSITEURS CELEBRES. Mozart jouait seul raircs

:

il

était

Richard

et sans accepter d'honoapplaudi par des centaines de per-

chanteurs,

sonnes.

Wagner emploie de

musiciens;

louent des places

et

il

des

des centaines

de

milliers de gens

est seul à applaudir.

yKikcriki, de Vienne, 6 août 1SS2.)

après eux; Tinfluence de leur génie fut toute spontanée et inconsciente, même en tenant compte de TÉpître dédicatoire à^Alcestc. Wagner, au contraire, ambitionnant

le

rôle de chef d'école et de novateur, ratiocinait

sur lui-même et réunissait toutes ses idées en corps de doctrine, afin d'assurer à son œuvre un empire et plus durable et plus étendu.

Doutez-vous

qu'il

y

ait

réussi

?

La musique ou

les

que certains

musique de l'avenir », bien déjà celle du présent, car de nombreux faits démontrent que destinées de l'opéra moderne y sont étroitement liées. Il n'est plus,

balourds s'amusent à appeler encore est

l'école,

«

école ou

à cette heure, un seul compositeur vraiment digne de ce

à se servir des créations de Richard

Wagner, comme

nom

qui ne tende

tous les succes-

seurs de Gluck, Salicri en première ligne, se sont approprié les innovations de ce génie supérieur. 4>


RICHARD WAGNER

322

Mais c'est affaire à eux de profiter des conquêtes du génie dans la mesure de leurs moyens, et de dégager, s'il se peut, leur individualité propre en puisant dans la musique ou les procédés du maître seulement ce qui doit convenir à leur nature particulière. C'est là un travail encore assez difficile et qui demande, outre l'inspiration personnelle, beaucoup de judiciaire et de sens artistique à défaut de l'un et de :

on verse, ou dans l'imitation servile, inintelligente, ou dans

l'autre,

Et

négation obstinée, inintelligible.

d'ailleurs,

compositeurs contre une propension

Richard Wagner,

afin

d'arriver

similaires, nul plus

que

lui

Toutes

ft

les

abandonne

la

pensée,

prenait

il

à

vite

ses

car

il

les

d'oeuvres

réalisation

la

les

dangers

ne se connaissait mieux,

nul

son art.

et sur

compositeur

tonalité, disait-il,

dans

prémunir

fâcheuse à pasticher servilement

plus

lui-même qu'un

fois

fallait

ne serait habile à leur signaler

d'une telle entreprise et son inanité, n'avait plus réfléchi sur

s'il

la

de

est perdu.

»

musique instrumentale Et, pour compléter sa

œuvres, dans Lohengrin, dans Tristan,

certains exemples de modulations éloignées, tourmentées, qui passaient,

emportées par

l'élan

profondément

choqué dans une composition purement instrumentale

«

Que

de

dramatique, alors qu'elles auraient

la situation

me

l'occasion se présente, ajoutait-il, et je puis

:

risquer à peindre

des chos&s violentes, terribles, parce que l'action les rend compréhensibles

mais que

;

la

musique, séparée du drame, affecte de

et tout aussitôt elle paraîtra

grotesque

que mes partitions ne soient guère elles

;

menacent d'égarer,

et,

la

En

vérité,

audaces, j'ai

peur

aux compositeurs de musique

utiles

instrumentale; elles n'admettent pas

encore

barbare..

et

telles

condensation,

dès lors,

la dilution

moins

plus sage est de les

le

de côté. Je dirais volontiers aux jeunes gens qui veulent écrire

laisser

pour

le théâtre « Tant que vous serez jeunes, abstenez-vous du drame, écrivez des opérettes [Singspielé). » Voilà pour les compositeurs en goût d'imiter Richard Wagner des conseils autrement judicieux :

«

et

profitables

contre

le

devant

le

que

maintes

déclamations

mystiques

démon de Bayreuth, accompagnées de compositeurs du monde entier,

les

cés dans leur carrière et les plus glorieux, la

supériorité

soient de battre

ou

bonne

d'un

foi.

définitif

l'instinct

du génie,

tions frelatées

tel

le

et

la

sens artistique

commercial afin

génie

et

même

les plus

avan-

ont conscience aujourd'hui

proclament,

ne reste plus pour

11

que ceux dont

par

béates génuflexions

dieu Mozart.

D ailleurs, de

anathèmes

avec

le

est

le

qu'ils

com-

primé par l'amour-propre

qui cherchent

de prolonger d'autant

pour peu

méconnaître et

le

à reculer

le

triomphe

débit de leurs produc-

que ces créations supérieures feraient justement rentrer


RICHARD WAGNFR dans

néant.

le

l-",t

même que

de

France, ont tous

ailleurs qu'en

positeur trop longtemps

323

musiciens,

les

amende honorable au

fait

méconnu.

Wagner

Richard

de

considérable

plus

le

hommage

rendre

lui

par tout

que,

le

monde

est

il

en

mort

confessant son génie,

juste à

encore oppo-

fît

M. Edouard

vrai,

com-

i^n-and

est

l'heure où le seul écrivain musical d'Allemagne qui lui sition,

partout

critiques,

les

Hanslick, venait

en

reconnaissant

musical, en Italie, en France, en Allemagne,

ne restait debout que Richard Wagner.

il

C'était

avait

propos du

à

exemplaire

été

demandait

A

«

:

car

l'écrivain,

Zamora,

Tribut de

l'échec

s'adresser désormais

qui n'y

il

dont

même

a

pour l'opéra, se France de quoi

en

plus

alimenter un répertoire. Avec Bizet a disparu prématurément

nouveau qui donnait

manque de

de promesses

plus

le

jeunesse,

et

les

Ambroise Thomas et une triste chose que la vieillesse, lorsque feu

le «

faut

«

ne

le talent

musique de Massenet deux pontifes bien connus de l'art Gounod, ont beaucoup vieilli. Ah! c'est

parisien,

la fièvre

Vienne

à

;

la

l'orgueil continue à entretenir

de production, sans parvenir à rendre à

qui réchauffait autrefois et

fantaisie

la

qui est désormais éteint

créatrice «

!

me

fera plus danser.

paresseuse

l'on

si

veut

lui

s'était

une

fait

vieillesse

on

;

facile,

combien il devait lui être agréable « Quel dommage qu'il ne veuille plus

mais

;

autour de

d'entendre dire

Rossini

»

ne

11

pas s'exposer à devenir une vieille danseuse, disait Rossini

:

Tandis que ses deux confrères parisiens sont exposés aujour« Quel dommage qu'ils d'hui à entendre la foule murmurer tout bas « Quelqu'un avait déjà dit ne veuillent pas cesser d'écrire! » «écrire!

»

:

tout

que

même

cela,

celui-ci

en

France,

pour

n'est jamais tfop tard

Richard désarmé.

Wagner

On

son

à

l'écrivit

est

tour la

:

vérité

la

mais

Hanslick, n'est

forte dose de naïveté

fait

depuis

bon

était

il

pays

d'aucun

et

il

proclamer.

mort,

et

détracteurs

ses

Il

pour croire que des gens dont

représentation de

Tannhœuser à

durant plus de vingt ans, enferrés

comme

n'ont

français

aurait eu grand tort d'espérer le contraire.

une

la

avant M.

fallait le

pas avoir

siège est

Paris, et qui se sont,

à plaisir

dans

la

négation

complète des chefs-d'œuvre de Richard Wagner, n'attendaient que sa mort pour faire volte-face et s'incliner devant son génie en confessant leur erreur aux yeux du monde entier. Il faut un certain courage,

ou tout au moins une certaine bonne qui a paru tout simple à

foi,

M. Hanslick, '

le

pour agir de critique

la sorte,

éclairé

et ce

de Vienne,

aux journalistes français, qui ne se rétractent jamais, dussent-ils aller à l'absurde. Et ils y vont.

aurait

semblé

faiblesse

Tant que Wagner

insigne

était

vivant,

ils

pouvaient couvrir leur entête-


RICHARD WAGNER

324

ment d'un semblant de patriotisme ils allaient prenant des airs de justiciers, affirmant qu'ils condamnaient seulement l'homme et réser;

Jugement sur

vaient leur

compositeur

le

disaient,

le

Ils

gens

certaines

et

scrupules leur étaient venus un peu tard.

porter

à

l'origine,

jugement

le

plus

le

l'oreille à sa

croyaient;

les

irréfléchi

mais ces

pas hésité, dès

n'avaient

Ils

où sa mort,

jour

de prêter

les laisserait libres

calmant leurs susceptibilités, musique.

jusqu'au

non seulement sur

Tannhœuser, mais sur l'œuvre entier d'un compositeur qu'ils couvraient, sans le connaître, de huées et de risées. C'est après bien des années, virent

lorsqu'ils

l'homme

entre

subtile

et

sentirent de plus en

se

qu'ils

et

dans leur opposition obstinée,

plus isolés tinction

applaudir

public

le

qu'ils

imaginèrent cette

compositeur,

le

qu'ils

dis-

voulurent

arrêter ce mouvement irrésistible en appelant

la police à leur aide,

nom du patriotisme outragé. Wagner avait prêté le flanc,

et

exagérés, n'auraient rien eu que

vrai,

c'est

de respectable

même

scrupules,

ces s'ils

au

eussent été

sin-

cères; mais quelle apparence qu'ils le fussent? Par ce grand étalage de

beaux sentiments, ces Aristarques fourbus cherchaient uniquement à masquer un temps, à retarder leur irrémédiable défaite eux-mêmes ;

prouvé en injuriant, en outrageant de plus belle, après sa mort, l'homme et l'artiste à qui ils avaient promis justice et répit dès qu'il

l'ont

aurait eu le

bon goût de mourir. Ce

qu'un faux semblant,

n'était

et sa

mort leur importait peu. La seule chose qui les préoccupât et qui les préoccupe encore était leur propre influence, qu'ils croyaient grande, trouve être nulle et sans portée.

et qui se

Est-ce à dire que le temps soit déjà venu de jouer à Paris quelque

de Wagner, fût-ce Lohcugrin? Certes,

opéra complet

amateurs qui admirent

croissant des

sont seulement disposés

que

outre nature,

il

l'attention

les

gens

suffit

d'un

de

qu'on joue ou qu'on

les

opéras

dans

le

sens

œuvres de

écouter d'une oreille

pour gâter

entêté

le

sont admirés,

ennemi

monde musical

?

applaudis d'hier,

L'aveu

le

est

mais, leur

ou troubler

plaisir

?

En

quoi

cette

renom d'un compositeur dont

partout ailleurs qu'en est

qui

Et qu'importe, après tout,

ne joue pas Lohengrin à Paris

augmenter

attentive;

peu manifestants de

sont

rassis

trois mille auditeurs.

peut- elle

qui, de l'aveu d'un

les

siffleur

de deux ou

représentation

à

les

nombre va

le

Wagner ou

le

seul

précieux

maître à

France

et

encore debout

noter

venant

M. Hanslick l'était naguère, moment où l'on cherchait à galvaniser

d'un

adversaire aussi convaincu que

et

conversion éclatante, au

certains

opéras écrivain

mort-nés

un

tant

de soit

musiciens

français,

peu prudent. Mais

devrait à

quoi

cette

faire

réfléchir

tout

bon

réfléchir?

Les


RICIIAllD

WA(JNER

325

temps la science infuse contempteurs de Gluck jusqu'à ceux de "Wagner, sans oublier ceux de Mozart et de Beethoven, de Wcbcr et journalistes

et

le

français

verbe haut,

pas eu de

n'ont-ils

depuis

tout

les

de Berlioz?

REPRÉSENTATION d'uN OPÉRA EN PRÉSENCE DU

«

MAITRE

».

(OberlaMidcr, Flicgendc Blœtler, de MunL'li, 1880.)

Le

fait

qu'on continuerait à ne pas jouer d'opéra de

ne nuirait qu'aux amateurs

quant à Wagner,

il

français

très

ne souffrira pas plus,

Wagner

à Paris

désireux de les entendre

et,

en définitive, de cet ostra-

cisme prolongé ou de ces critiques injurieuses que n'en ont souflert ses


RICHARD WAGNER

326

me

devanciers. Si Ton pouvait

dire en quoi la

Weber

de

gloire

et

de

Beethoven a été moins grande alors qu'on les ignorait ou qu'on les critiquait violemment en France, j'admettrais volontiers que le jugement de notre pays a une importance quelconque, opposé à celui de l'Europe

toute

dans si

mais

;

l'histoire musicale, et

poétique et

si

régulièrement

c'est

il

n'est pas jusqu'à ce

En

avec une froideur polie.

magne, en Angleterre? En sa mort

accueilli

d'abord

de son vivant, moins fêté en Alle-

fut-il,

même

moins goûté,

fut-il

pauvre Mendelssohn,

que nous n'ayons

délicat pourtant,

observe

qu'on

contraire

le

en France, après

?

Quand

bien

même

on jouerait avec succès Lohengrin à Paris, pourraient

clabaudeurs

derniers

toujours

Tristan

ouvrage où l'auteur ou de

des Maîtres

Iseult ,

et

l'opéra,

se

Wagner,

objection que ce n'est pas là le vrai

dans

retrancher qu'il

faudrait essayer de

de Parsifal,

Chanteurs,

les

cette

d'un

enfin

pleinement réalisé ses réformes du drame lyrique

ait

comme on voudra

dire,

et

que jamais ces œuvres ne

Pour Parsifal, il se peut faire, moins à cause musique que du poème, absolument contraire aux idées qu'un

s'acclimateraient à Paris.

de

la

public français se forme d'une action théâtrale. Autre chose est de Tristan et

des

surtout

même

Maîtres

Chanteurs,

pourront forcer

qui

l'admiration

des auditeurs français, mais seulement lorsque ceux-ci se seront

peu à peu préparés, habitués aux théories essentiellement louables de Richard Wagner.

Son oeuvre

ductions musicales qui règlent

est à ce point diflFérente des pro-

d'art la

mode

à

Paris qu'il s'écoulera

long-

temps avant que ces théories y aient acquis force de loi mais cette lenteur même à s'imposer au goût d'une nation est un gage de durée, et les œuvres qui pèsent le moins dans la balance de l'histoire sont presque toujours celles dont le monde, aveuglément, s'est le plus ;

engoué à

l'origine

et

que

les

esprits indépendants ont eu le plus de

peine à déraciner.

De

du drame, rêvée et réalisée par Wagner, de cette fusion complète entre l'orchestre de Beethoven et la parole déclamée de Gluck de cette symphonie en un acte, établie sur des motifs-types qui reviennent travaillés, accouplés à l'infini pour cette union absolue de la poésie et

;

expliquer et commenter

au-dessus duquel court

le

la

drame, de ce magnifique mélodie vocale, de

tissu

orchestral

déclamation

la

la

plus

aucune répétition de parole, sans nul ensemble conventiontous ces éléments associés et fondus dans un cerveau de

juste, sans

nel

;

génie

de il

contraire

est

résulté

une œuvre

d'art

aux productions courantes

donner une

idée

à

ceux

qui

ne

la

tout qu'il

à

fait

est

nouvelle et tellement

presque impossible d'en

connaissent

pas.

Certains

ont


RICHARD WAGNER essayé de

faire en

le

ayant recours à l'amplification poétique et n'ont résultat négatif. J'ai sur ce point l'aveu de nombreux

obtenu qu'un

convertis qui, d'abord ignorant tout à

reproché de

tiers

le

musique que

maintenant, sienne

la

l'admirent sans jamais

ils

:

ne veulent presque

ne savoir comment faire partager leur jouis-

s'en lasser et confessent

commun

Wagner, m'auraient volon-

fait

défendre et qui,

plus entendre d'autre

sance au

3^7

des amateurs.

Qu'est-ce que Berlioz aurait dit des Nibeliingen et de Parsifal, qui dénigra

Tannhœiiscr

fort

si

et qui déclarait le

lui

prélude de Tristan

une énigme indéchiffrable ? Ah pauvre Berlioz ce fut son tort le plus grand comme homme et sa faute la plus grave comme artiste que d'avoir méconnu Wagner, que de l'avoir desservi avec une animosité haineuse. Aveuglé par le dépit qu'il éprouvait à voir son rival, son !

un étranger,

cadet,

semblait prendre la foule

barrer

lui

la

le

même

Tannhœuser, un acte

et

il

sort

deux

les

n'y

il

malhonnête

et

avait

musiciens,

la défaite

dans ses

aigreur

nulle

que

et

l'un

que Wagner,

lui,

W^agner,

lui,

n'a

c'est

jamais

vrai,

lui

technique orchestrale;

mettre à profit rival, qui,

mais

aurait beaucoup

nuire,

s'il

les

part

ennemis jugé

de

Berlioz

Berlioz

plus

dans

son droit, et Berlioz, au lieu de

c'était

mieux

sa

de dix ans

jeune, a beaucoup profité des innovations introduites par la

ruine de

sur ses méchants

derniers

les

entre l'autre

et

Kn poussant à la Ce fut de

maladroit. C'est sur

écrits.

différence

des Troyens.

que s'appuient encore aujourd'hui tandis

Tannhœiiscr

ne comprit pas que, pour

il

à peu d'intervalle.

préparait

Richard Wagner, avec

chemin de l'Opéra, où

ignorante et moutonnière,

auraient

articles

le

Troyens,

place des

deux opéras, entre

les

!

d'étudier,

fait

d'approfondir et

de

admirables réformes tentées dans l'opéra par un

s'était fait

son disciple dans

l'art

de l'instrumentation,

s'est

montré son maître au théâtre. Les plus chauds partisans de Berlioz sont bien forcés de reconnaître aujourd'hui que ce déni de justice fut une maladresse insigne, et

de nos compositeurs qui a

celui

l'a

plus hérité de

lui,

qui

mémoire un culte même, au maître qu'il aimait

jusqu'à la mort et qui garde à sa

le soutint

ne

le

pas caché, de son vivant

fâché de vous

le

dire,

mon

:

cher Berlioz,

le veilla,

attendri, «

Je suis

mais sachez bien que

la

chute du Tannhœuser, à laquelle vous avez tant soit peu contribué, a

préparé

la

chute des Troyens, chute moins éclatante, moins brusque,

mais non moins réelle que

l'autre.

Mieux

valait

pour vous que

Troyens entrassent à l'Opéra à la suite du Tannhœuser, Lohengrin, que de ne pas y entrer du tout. » C'est

le

même

écrivain

et

même

les

de

qui formulait ensuite en termes passionnés


RICHARD WAGNER

328

une

qui

idée

chère,

m'est

qu'à

ainsi

sur

et

lui,

laquelle

je

s'agit

qu'il

«

:

Poser

ainsi

veux

Wagner

terminer ce long travail; aussi bien est-ce toujours de Richard

devant une génération d'artistes qui

vit,

qui pense et qui travaille, ces colonnes d'Hercule faites avec les osse-

ments de ceux qui sont morts, c'est nier le progrès, c'est vouloir rompre violemment une chaîne dont les anneaux doivent arriver, en se multipliant,

époques

jusqu'aux

plus

les

Ces morts

éloignées.

illustres

que vous acclamez aujourd'hui n'ont-ils pas vécu, pour la plupart, ou méconnus comme ceux qui vivent et que vous repoussez

critiqués

aujourd'hui?...

O

vous donc toujours que deviennent

de

Weber

N'avez-vous

lesquels raine

?

du lendemain

classiques

à

marche

vite

Wagner

pensé

jamais

que,

Wagner

,

que

les novateurs,

à

et

Du

comme vous Beethoven et Weber Mozart,

?

avenir peu

Berlioz

la veille

de Beethoven et

vivant et

Berlioz

un

dans et

?

romantiques de

les

Haydn

ne leur opposait-on pas

aujourd'hui

opposez

temps

les

du passé, oublierez-

pieux thuriféraires des gloires

seraient

éloigné, béliers

les

car

le

avec

on battrait en brèche quelque vivante renommée contempoLes classiques

!

les

classiques

!

dites-vous

;

tenons-nous-en aux

Mais Wagner et Berlioz, dans quelques années d'ici, seront des classiques!... Depuis combien de temps Mendelssohn est-il un classique? Depuis qu'il est mort. » C'est là la vérité vraie, celle qu'il n'est pas toujours bon de dire, mais qui finit tôt ou tard par triompher, si violemment qu'on lui résiste, si puissants que soient les intérêts ligués contre elle. Et la preuve en est que la prédiction de M. Reyer s'est déjà réalisée aujourd'hui Berlioz est un classique, presque un ancien, et c'est Wagner classiques

!

:

qui rayonne, éblouissant, sur tout le

RICHARD WAGNER DANS

o

Le inonde entier

se

monde

musical.

LANNEAU DU NIBELUNG prosterne à ses pieds.

{Caricalurc alU'tnanJc. 1S76.)

«.


fej^^^!^^-v:T:.^'4>4\te,

V...--.

v-.;



APPENDICE

LES

ŒUVRES DE RICHARD WAGNER DANS

LES CONCERTS DE PARIS

E petit travail qui va suivre n'est rien de plus est et

titres,

de dates

de

et

qu'un mcmentu musical.

noms propres

mais, par cela

;

parce qu'il est d'une précision historique indiscutable,

11

même

offrira sûre-

il

ment quelque intérêt aux gens qui n'écoutent pas seulement de la musique au jour le jour et qui aiment, de temps à autre, à regarder atin de mieux juger du chemin parcouru. Tel est l'esprit qui m"a guidé en

en arrière, l'écrivant;

bourré de

me

je

flatte d'ailleurs

y trouveront matière

que

Wagner

anciens détracteurs de Richard

les plus

à réflexion.

Les théâtres n"ont rien

fait

pour Richard Wagner en France,

au succès incontesté,

qu'il est arrivé à la gloire,

même

et c'est

par

les

concerts

à Paris, lui, compositeur essen-

la représentation théâtrale comme absolument compréhension de ses œuvres. D'où vient donc que pareil renversement se soit produit en France? Uniquement en raison de l'insuccès bruyant de Tannhœuser à l'Opéra. Depuis lors, en effet. Jamais directeur de théâtre n'aurait eu

tiellement dramatique

nécessaire pour

l'idée

et

qui regardait

parfaite

la

de jouer une grosse partie sur une œuvre capitale de Wagner,

inutile faite en 1869

P'^'"

^- Pasdeloup avec

et

la tentative

Rien\i, sinon contre le gré, au moins sans

l'approbation de l'auteur, ne pouvait que justifier cette prudente abstention,

qu'un entrepreneur de concerts, ne courant pas grand risque autre la

un morceau,

s'il

— tandis

essaver de temps à

déplait au public, pouvait faire efficacement de

propagande en faveur du grand musicien.

Voyons donc à réparer sa

quitte à le retirer

à

longueur

et

qu'ont dû faire

le

fait les

concerts

son aridité témoignent des et chefs

maître allemand

dans tout

ce qu'ont

et

par quelles lentes étapes

honteux échec de Tannhœuser. La nomenclature

le

la

monde

efforts

ils

est aride et

sont parvenus

longue, mais

souvent infructueux, toujours répétés,

d'orchestre et partisans de la première heure, afin de restituer au

place d'honneur à laquelle

musical. Richard

il

Wagner ne

avait droit en France, aussi bien fut

un peu connu

que

à Paris qu'après les

donnés par lui-même aux Italiens en janvier 1860; il ne fut généralement bafoué chez nous qu'après le désastre de Tannhœuser en mars 1861. C'est à dater de ce jour qu'il est intéressant d'observer les progrès de ses œuvres en France, à dater du jour où tout le monde à peu près demeura persuadé qu'on n'entendrait plus jamais parler de lui ni de sa musique à Paris. Je prends donc à cette époque, après avoir raptrois concerts

pelé toutefois que, bien auparavant, Seghers avait exécuté pour Paris,

inaugurait

au Casino

Paganini,

rue

de

Chaussée-d'Antin

la

24 novembre i85o. Donc, honneur à Seghers I.

la

première

fois, à

l'ouverture de Tannhœuser, dans les concerts de la Société Sainte-Cécile, qu'il

'

:

c'était

le

dimanche

!

Elle reparut ensuite aux Concerts de Paris, dirigés par Arban, à la tin de janvier i858. «

42

Le


APPEN b CK I

J 3^j

Mais honneur surloiu à M. Pasdcloup. Car le premier défenseur acharne de Richard Wa£;ner en France, celui qui s'obstina à jouer de sa musique en dépit des cris du public et qui résista aux plus terribles orages avec un entêtement rageur, c'a été

M. Pasdcloup. Il en avait d'abord essayé aux concerts de la Société des jeunes artistes du Cunservatuire et, l'année même où allait se jouer cette grosse partie de Tannhœuser, exécutait la marche et le chœur des fiançailles de Lohengrin (3 février i8(3i^, puis il il faisait chanter par M. Gourdin une mélodie de Wagner, le 17 février; et, comme pour protester, aussitôt après au concert du 14 avril. Les Concerts populaires, 2" octobre 10

mai

Wagner

1861,

l'année

le désastre,

rechanter

le

chœur

dés l'origine au Cirque

installés

même

faisait

il

de

des fiançailles

d'Hiver,

catastrophe de Tannha'user,

la

datent

du

et c'est le

1862 que M. Pasdeloup inscrivit pour la première fois le nom de Richard jouait la marche de Tannhœiiser Ensuite un silence de il sur son afhche .

;

mars i865, première audition de l'ouverture de Tannhœuser 'grande cependant deux fois avant de risquer le prélude de Lohengrin répète Il la .tempête. (il février 1866). Cette fois les partisans l'emportent et le prélude est bissé. Le 7 mars trois

ans.

Le

:

5

1866, la marche et le chœur des fiançailles de Lohengrin passent presque sans encombre. Ajoutez l'ouverture du Vaisseau fantôme (i3 janvier 1867!, un air de Lohengrin murmuré par M. Capoul ^24 mars 1867), l'ouverture de Rien^i (3 novembre 1867), la marche religieuse de Lohengrin (9 février 1868), des fragments du troisième

Tannhœuscr, chantés par M. Faure et Mi><= Nilsson le vendredi saint 10 avril 1868, de courts morceaux pour orchestre tirés des Maîtres Chanteurs (t 8 octobre 1868), l'ouverture des Maîtres Chanteurs, huée d'un bout à l'autre au point qu'on n'entendit rien (12 et 19 décembre 1869), l'ouverture de Faust (6 mars 1870) et vous aurez toutes acte de

;

les pages de Richard Wagner que M. Pasdeloup, à force de les répéter, imposa presque à son public jusqu'en 1870, au milieu de cris, clameurs et sifflets que rien ne pouvait

Tout

arrêter. i3

mars 186

1

cela

parce qu'on avait joyeusement

sifHé

Tannhœuser

à l'Opéra, le

1

M. Pasdeloup recommence à j(juer plusieurs de ces morceaux dans la saison 1873-1874. Le i5 novembre 1874, il s'attaque au prélude de Tristan et Iseult ; puis, après une nouvelle année de silence, il exécutait, le 29 octobre 1876, la marche funèbre du Crépuscule des Dieux, qui soulevait dès la veille un terrible émoi. Devant le déchaînement presque général de

la

presse,

de Richard Wagner; puis, après avoir

fantôme

et le

prélude de Tristan (3o mars

ces trois auditions intégrales

succès (20 avril, 8

Seguin, Piccaluga,

De

et i5

M""

ce jour date le

vers Richard Wagner

morceaux ne

du premier

mai 1879I;

il

tàté le

dut rester trois ans sans rien risquer

du Vaisseau immédiatement donna 1879), de Lohengrin qui eurent un si grand terrain avec

et 6 avril

acte

les rôles étaient

l'ouverture

il

tenus par

MM.

Rey et Caroline Brun. grand mouvement, qui entraîne les amateurs et

Prunet, Bacquié,

Juliette

va bientôt gagner

suffirent plus et

il

la

français impartiaux

foule; mais, de ce jour aussi, de

court;-,

fallut offrir au public de longs fragments chantés, de

œuvres de Wagner. M. Pasdeloup donna d'abord divers morceaux du Vaisseau fantôme chantés par M. Lauwers, M'"" Brunet-Lafleur et Rose (>aron [6 février 188I;. Le lo avril 1881, il fait entendre des fragments du troisième

véritables sélections des

loul se unninc, disuil alors la Galette musicale, par une espèce de tumulte harmonique, tenant lieu de péroraison, et en cet endroit l'auteur a cru pouvoir mettre \emoi_fin. Pourquoi là plutôt qu'ailleurs.' Rien ne l'indique. Le public a écouté dans un silence religieux cette œuvre étrange; il a même applaudi, ce qui est très poli de sa part. »


APPENDICK acte

des Maîtres Chanteurs,

Lauwers

Lecor, puis

et

le

chantes

33,

par M"'=^ Panchioni

28 mai, les adieux de

Wotan

Caron,

et

Brunehild

à

MM.

Holly,

et l'incantation

du feu, de la Valkyric, dits par M. Faure. Le décembre 188 reviennent des frai,'ments du troisième acte de Tannliceuser, par M. Faure et M""; Rose Caron. Le i

i5 janvier

1882,

mélodie

la

1

i

Raves, transcrite par

:

Wagner lui-même,

morceau

et le

de concours des Maîtres Chanteurs, transcrit par M. Wilhelmy, sont exécutés sur le violon par M. Waldemar Meyer. Le 5 février, M"i= Panchioni chante la scène finale

de Tristan,

vendredi saint 7

et, le

on entend pour

avril,

la

première

fois le

chœur

final

de l'Agape des Apôtres.

Le 22 octobre le

jouaient M.M.

Lamoureux;

et

auditions du premier acte de Lohengrin,

du Vendredi

les

28 janvier

et les 11 et 18 février,

Saint, de Parsifal,

;

exécution de l'épisode répertoire des ceuvrcs

le

et lassé

rence, abandonnait alors, après vingt-trois années, ces excellents

goût musical en France

et

dont

la

même

popularité

Concerts

finissent les

ici

populaires eux-mêmes, puisque M. Pasdeloup, atteint par l'âge

le

temps que

février i883, nouvelles

4

et

pour orchestre seul. Ici finit wagnériennes essayées au Cirque d'hiver par M. Pasdeloup

renouvelé

même

1882, première audition du prélude de Parsifal, en

Colonne

par

la

concurqui ont

concerts

assure un

renom

durable à leur fondateur.

Tandis que

Concerts populaires étaient tellement agités par

les

qui se livraient autour des œuvres de Richard Wagner,

Chàtelet, fondés en mars 1873

FOdéon

à

et

les

les

Concerts

furieux combats

dits aujourd'iiui

transportés seulement pour

la

du

saison

suivante au Chàtelet, restaient jusqu'au i" février 1880 sany donner une seule note de

Wagner. M. Colonne exécuta

ce

jour-là

l'ouverture

Tannhœuser.

de

Durant

la

saison suivante, au premier concert, ouverture du Vaisseau fantôme [\j octobre 1881

Siegfried's Idyll, qui allait

devenir un des plus grands succès de

i3 février

1881

puis

;

le

prélude

vendredi saint i5 avril. Les 23

hœuser;

les

20

et

27 novembre

de Tannhœuser, avec

Wolfram; Mlles

les 5 et

;

14 novembre; la Chevauchée des Valkyries pour orchestre seul,

le

MM. et

et

ces concerts, les 23 janvier, 6 et

de Tristan, toujours pour orchestre seul,

3o octobre 1881,

la

le

scène du Venusberg, de Tann-

4 décembre, longs fragments pour orchestre et chant Bosquin et du Wast dans Tannhœuser et Auguez dans et

1882, sélection de Rien^i, chantée par

12 février

Marie Battu, C. Brun

et le finale

Dihau;

M. Stéphanne,

26 mars enfin, fragments de Tannhœuser, avec

le

M. Faure pour Wolfram. Le 22 octobre 1882, le prélude de Parsifal se joue au Chàtelet en même temps que chez MM. Pasdeloup et Lamoureux; le 5 novembre, Huldigung's-Mar'sch ,-les 25 février et 4 mars i883, sorte de Festival-Wagner, composé presque entièrement de ses œuvres, mars, ouverture des avec M. Lauwers et M'"» Rose Caron comme solistes; puis, le Maîtres Chanteurs. Durant la saison de 1883-1884, réapparition des précédents morceaux le 20 janvier, fragment de Lohengrin, chante par M"'= Schrœder lElsa) puis le grand finale du premier acte de Parsifal exécuté le 10 février et le 2 mars 1884, suivi la seconde fois de V Enchantement du vendredi saint, avec M. Faure (Gurnei

i

;

;

rechante ses fragments préférés de et M. Mazalbert [Parsifal). M. Faure Tannhœuser le 9 mars, et M. Colonne termine la saison (6 avril; avec la Chevauchée des Valkyries, qu'il a bien dû jouer quinze ou vingt fois et qui demeurera le grand succès wagnérien des Concerts du Chàtelet. A la réouverture d'automne, en 1884, M. Colonne s'appropriait Touveriure de

manz)

Faust de

la

(2

novembre)

Valkyrie

:

;

les

puis, les 25 janvier,

adieux de

Wotan

à

i"et8

février (885,

il

donnait divers fragments

Brunehild. chantés par M. Soum,

le sr-lut

de


APPENDICE

332

Siegmund

printemps soupiré par M. Bosquin,

;iu

parties vocales. (6 et i3

Au

début de

la

saison suivante,

décembre!; puis M. Maurcl

et

redit les adieux de

Tanesi chantent

M"'-'

Chevauchée, avec

l'inévitable

et

M. Lauwers

le

Wotan

duo du deuxième

acte

du Vaisseau fantôme aux concerts des 7 et 14 février 1886. Les Concerts du Chàteau-d'Eau, fondJs il y a seulement cinq ans, le 2'} octobre 1881, se sont, dès le début, consacrés au triomphe de Richard Wagner sous l'énergique impulsion de M. Lamoureux. Pendant

la

première année, ouvertures de Rien\i

(6 et

du Vaisseau fantôme (20 et 27 novembre) cavatine du Vaisseau par M. Guiot (11 décembre); ouverture et tragments des Maîtres chantée fantôme Chanteurs pour orchestre (18 et 25 décembre); ouverture de Tannhœuser 8 et i5 janvier 1882); chœur des tileuses du Vaisseau fantôme, etmarcheet chœur des fiançailles i3

novembre)

et

;

de Lohengrin, exécutés trois fois de suite (22, 29 janvier et triomphales du premier acte de Lohengrin chanté par

enfin le

Franck-Duvernoy

Lhcrie, Plançon, Heus-

Gayet

et

[12, 19 et

26 février,

une première année.

assez bien travailler pour

en

MM.

5 mars 1882]; M. Bosquin grand duo de Lohengrin, par M'"= Franck-Duvernoy et (19 mars et et sélection de Tannhœuser avec M. Heuschling dans Wolfram (26 marsV C'était

chling, Auguez, M"""

7 avril),

;puis quatre auditions

5 février)

Au début de la deuxième, les 22 et 29 octobre 1882, exécution du prélude de Pars/y^/, même temps que chez MM. Colonne et Pasdeloup; les 5 et 2 novembre, audition i

du prélude de Tristan;\c 14 janvier i883, introduction instrumentale

M. Bosquin; pour

chantée par

finir

saison,

la

Festival-Wagner

réentendait tous les morceaux déjà classés, en parti 'ulicr

chanté

par

M"»-'

Brunet-Lafleur,

MM.

le

prière de

et

(4 et

1

7?!C'h^/,

mars) où l'on

1

premier acte de Lohengrin

Bosquin, Couturier,

Dans

etc.

le

troisième

hiver, d'abord la marche funèbre du Crépuscule des Dieux (janvier 1884), admirablement rendue et que M. Lamoureux dut rejouer quatre dimanches de suite enfin les quatre auditions foudroyantes du premier acte de Tristan et Iseult, chanté par M'"«s Montalba MM. Van Dyck, Blauwaert et Mauguière (2-, 9, 16 et 23 mars). et Boidin-Puisais, Cette exécution, qui retentit comme un coup de tonnerre, acheva la reconnaissance et la consécration du génie de Richard Wagner par le public français enthousiasmé. M. Lamoureux ne devait pas s'en tenir là. Dès la réouverture, il exécutait la Grande ;

Marche de

fête,

composée pour

(26 octobre 1884), et la répétait

centenaire

le

joignant les deux fois l'ouverture de Faust. Lafleur

et

M. Van Dyck

le

après avoir répété une fois le

deuxième

l'indépendance des Etats-Unis

de

aux deux concerts suivants Il

faisait

grand duo de Lohengrin le

(7,

premier acte de Tristan

acte ^jusqu'à l'arrivée

du

roi

I9

et

16 novembre), en

y

chanter trois fois par M"'^ Brunet14

et

et Iseult,

décembrel

21 il

exécutait

Marke) avec M. Van Dyck,

M'''^'^

;

puis,

deux fois Montalba

comme

solistes (l'-'f et 8 mars i885). Enfin, le vendredi saint 3 avril, donnant un grand concert exclusivement composé d'œuvres orchestrales de Richard Wagner, précédemment entendues dix numéros au programme,

et

Boidin-Puisais

il

attirait

la

foule en

:

autant d'éclatants succès.

Au commencement 29 novembre

et 6

de

la

décembre,

saison suivante, l'orchestre exécutait Siegfried's Idyll les et

M. Van Dyck chantait

29 novembre) qu'il répétait encore deux fois

duo de

Z.o/!e«^r/« avec

Brunet-Lafleur. Le

premier acte presque entier de

chantaient

le

Hunding,

et celte

21 février, 14 et 21 était

M™

remplacée par

exécution avait un

tel

la

les et

adieux de Lohengrin (22 7 février 1886) après le

14 février, ces deux

Valkyrie, moins

succès que

la

mêmes

et

grand

artistes

scène deuxième avec

M. Lamoureux

la

devait répéter les

quatrième audition. M™" Brunet-Lafleur, indisposée, Boidin-Puisais. Dans le même concert, M. Lamoureux exécu-

mars; M'"'=

janvier

(3i

à cette


APPENDICE tait

les

pour

la

prcmicrc

deux dimanches suivants

dente,

pour

]'ii!kj-rics

vendredi saint

le

premier acte de

le

entendre, en première audition,

faisait

Iseiilt,

cnlin

;

333

2'}

l'Enchantement du vendredi

comme

marche

et

la forêt,

de

!

pèlerins,

et, le

Société des concerts

la

7 annhœuser

de

vier 1884, elle rejouait la

marche religieuse de

vendredi saint

elle

avril,

11

exécutait,

après l'apparition de ce chet-d'ceuvre à Dresde

suprême audace,

3i janvier 1886,

la

première

la

première

la

O

!

Le 20

jan-

au concert spirituel du

et,

/.o/!é'/z^/-//z,

pour

Tannhœuser pour

le

;

24 janvier 1869, elle allait jusqu'à

religieuse de Lohengrin. Puis, silence absolu pendant quinze ans.

liœuser. L'ouverture de

fois,

Murmures de

Et pendant ces vingt-cinq années, de 1861 à 1886, que faisait du Conservatoire? Le 8 avril 1866, elle risquait la marche la

cinquième

Tristan

saint, de Parsifal, et les

chœur des

la

prélude du troisième acte de

Siegfried. Quelle afHuence et quelles ovations

16 février 1868, elle jouait le

l'année précé-

Wagner. Outre quantité de

Valkyrie, exécuté pour

la

le

orciicstre, qu'il redonnait

avril,

consacrait tout son concert aux œuvres de Richard

il

morceaux connus, outre il

Chevauchce des

fois la

fois, l'ouverture de

Taiiii-

1884! Trente-neut ans

fois en

sacro-saint Conservatoire! Enfin, le

Société faisait chanter

Vaisseau fantôme, après avoir essayé, toutes portes closes,

la

le

ch(eur des fileuses du

scène des Filles-fleurs de

M. Garcin n'aurait pas mieux demandé que d'aller un peu de l'avant pour marquer son avènement au poste de premier chef d'orchestre mais rentêtcment routi-

Parsifal.

;

nier a prévalu contre ses timides efforts.

Et quel

aujourd'hui,

est,

le

inespéré après

résultat manifeste,

hœuser, de tant d'elïorts patiemment répétés? C'est que

chute de Tann-

la

les théâtres parisiens, présente-

ment, ne rêvent plus que de jouer des ouvrages de Richard Wagner. L'Opéra-Comique est et

aux regrets de n'avoir pu représenter ce Lohengrin connu, admiré du mande

s'il le

regrette à ce point, croyez-le bien, c'est qu'il était assuré, la

trouver grosses recettes d'autre objectif.

A

italien de la place

la fin

grands profits; avec

les

de sa précaire existence,

et

et

directeurs de théâtre,

comme

il

était

entier,

vogue aidant, d'y il

pas

n'est

au plus bas, l'Opéra

du Châtelet voulait tenter un dernier coup de fortune en montant le Fi3metn/yrt/z?o;nf; heureusement que les gens ayant

tant bien que mal, en huit jou.'s,

pleins pouvoirs pour autoriser cette folle entreprise ont répondu sans hésiter

:

non.

L'échec du Vaisseau fantôme, tombant sous une mise en scène ridicule et une exécution à la diable, aurait fait perdre en un soir tous les résultats gagnés par vingt ans de

combats.

luttes patientes et de lents

Ce

gens trop pressés, qu'un acte de Tristan

n'est rien, diront les

Valkyrie, entendu dans

plus grand silence

le

et

pendant quatre auditions consécutives. C'est un la

France

et la

date en restera, car elle

Richard Wagner par tous

les

marque

et Iseult

couvert d'applaudissements

fait

dans

capital

l'histoire

ou de

la

à la fin,

musicale de

reconnaissance absolue du génie de

la

amateurs français, exception

faite

des critiques qui s'étaient

trop engagés naguère en sens inverse et qui en sont réduits à s'entêter tout seuls dans leur négation

:

c'est

comique

et triste à la fois

pérément, en poussant de grands Aujourd'hui,

la

cris,

contre

de voir

le

les

malheureux

courantqui

les

lutter aussi déses-

entraîne

et les

submerge.

représentation de Lohengrin à Paris n'est plus qu'une affaire de jours

peu importe que ce

soit dès l'hiver

ce chef-d'œuvre obtiendra

le

prochain ou plus tard.

plus grand succès,

et

On

peut

le

:

prédire à coup sûr:

ce succès est précisément ce que redou-

tent et veulent retarder les compositeurs installés en maîtres dans nos théâtres lyriques.

Quoi

qu'ils disent, fassent

face d'un génie hors ligne,

apprête à rire

il

à la postérité.

ou écrivent,

ils

sont dès à présent sûrs de leur

n'v a qu'à s'incliner

et,

plus on

tarde à le taire,

fait.

En

plus on


II

CATALOGUE COMPLET DES ŒUVRES MUSICALES DE RICHARD WAGNER'

I.

Œuvres dramatiques.

Les Noces, fragment d'un opéra

:

chœur

introduction,

et

septuor.

Inc'dit;

copie

i'"' mars i833. Fut présenté par Wagner musique de Wiirzbourg. Les Fées, opéra romantique en 3 actes; i833. Ne fut jamais représenté; l'ouverture

autographe de

36 pages, datée du

la partition,

à la Société de

seulement

fut exécutée à

Magdebourg en

1834. Inédit; la partition originale appartient

au roi de BaTière.

La Défense

d'aimer, musique composée en i835

Magdebourg,

et

i836. Représentée une seule

29 mars i836. Partition originale en

la possession du roi de imprimé dans YEiiro a, de Lewald (année 1837, p. 240), et publié par contrefaçon à Brunswick et à Hanovre. Rien\i, le dernier des tribuns, grand opéra tragique en 5 actes. Musique commencée à Riga en i838. Actes I et II terminés en 1839 à Riga et à Mitau; actes III et IV terminés à Paris en 1840. Première représentation à Dresde, le 20 octobre 1842. Traduction française de MM. Gh. Nuitter et J. Guilliaume. Le Hollandais volant, opéra romantique en 3 actes. Musique écrite à Meudon, près

fois, à

Bavière.

Un

le

de cet opéra

air

Chant de carnaval,

:

Première représentation à Dresde,

Paris, en 1841.

a été

le 2

janvier 1843. Traduction fran-

M. Ch. Nuitter. Tannhœuser ou le Tournoi des chanteurs à Wartbourg, opéra romantique en

çaise de

Poème

écrit à

tion à Dresde,

Dresde en 1843

;

19 octobre 1845. Traduction française de

le

Lohengrin, opéra romantique en

commencée

3 actes.

partition terminée en 1844-184^. Première représenta-

3 actes.

Poème

écrit à

M. Ch. Nuitter. Dresde en 1845

;

musique

9 septembre 1846. Introduction écrite le 28 août 1847; instrumentation de tout l'ouvrage terminée pendant l'hiver et le printemps suivants. Première représenle

Weimar, L'Or du Rhin,

tation à

le

28 août i85o. Traduction française de M. Ch. Nuitter.

partie de l'Anneau du Nibelung. Poème de l'Anneau commencé à Dresde en 1848, exécute dans l'ordre inverse [la Mort de Siegfried, Siegfried, la Valkyrie et l'Or du Rhin] terminé à Zurich en i85 i-i852. Musique de l'Or du Rhin commencée dans l'automne de i853, à la Spezzia partition terminée en mai 1854. 1^=

;

;

Première représentati(Mi

à

Munich,

le

22 septembre 1869.

La Valkj'rie, 2'= partie de l'Anneau du Nibelung, en 3 actes. Partition terminée Zurich en i856. Première représentation à Munich, le 26 juin 1870. Traduction française de M. Victor Wilder. i\

Tristan et Iseult, en 3 actes. Poème écrit à Zurich en 1857; musique commencée en 1857. Partition du i" acte terminée à Zurich pendant l'automne de 1857; du 2= acte, à Venise, en mars 1859 du 3= acte, à Lucerne, en août 1859. Première repré;

sentation à

Munich,

le

10 juin i865.

Traduction française de M. Victor Wilder.

Siegfried, 3° partie de l'Anneau du Nibelung, en I.

Cette

3 actes.

été'

à

qui permet de suivre distinctement la série d'ceuvres empiétant souvent dressée avec beaucoup de soin par M. Dannreuthcr, auquel il con\ ient d'en

liste très claire et

l'une sur l'autre a

Musique commencée

laisser tout le mérite, en

y ajoutant quelques renseignements nouveaux.


Al'I'KNDICE Zurich, uvain

Tristan. Acte

Murmures de

la

acte III 1)

1

\^'

335

icrmiiié en avril 1857; partie de l'acte

II, jusqu'aux' 1857; acte II termine à Munich le 21 juin i865; terminé au commencement de iSôg. Première représentation à Bayreuth, le

forêt, écrite en

août 1876.

Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg, en 3 actes. Ébauche en 1845 poème commencé à Paris durant l'hiver 1861-1862, publié en manuscrit en i8()2 musique commencée en i8(i2; partition terminée le 21 octobre i8()7. Première représentation a Munich, le 21 juin 1868. Traduction française de M. Victor Wiidcr. Le Crépuscule des Dieux, 4'' partie de l'Anneau du Nibelung (le preinier projet pour la Mort de Siegfried date de juin 1848). Musique commencée à Lucerne en 1870. Ébauche de l'introduction et acte !'=' terminés le 20 janvier 1871. Ébauche de la partition ;

;

complète terminée

Bayreuth

à

Première représentation

à

le

22 juin 1872. Orchestration terminée en

Bayreuth,

novembre

1874.

août [876.

le 17

Parsifal, pièce de festival solennel en 3 actes

vendredi saint datent de l'année 1857, à Zurich^.

(les

premières esquisses du Charme du

Poème

écrit à

Bayreuth en 1S76-1S77.

musique commencée à Bayreuth en 1877, terminée le 25 avril 1879. Orchestration terminée à Palerme le i3 janvier 1882. Première représentation à Esquisse de

la

Bayreuth,

26 juillet 1882.

le

2.

Ouverture en

si

Compositions pour okchkstre, bémol

(6/8). Inédite.

Exécutée

irr

chœurs.

Leipzig en i83o. Partition vraisem-

à

blablement perdue.

Ouverture en ré mineur

Exécutée

Inédite.

(4/4).

à

Leipzig

le

25

décembre i83i.

Partition à Bayreuth.

Ouverture en i83i

;

exécutée

Ouverture tition à

:

ut.

Bayreuth

de i832,

le

3o avril i833,

Polonia, en ut majeur

^4/4). Inédite.

ut. Inédite.

Composée

puis à Leipzig, d'abord à

et

à

le

10 janvier i833

Cantate pour

le

nouvel an. (Introduction

Magdebourg

la veille

debourg en i835

du jour de

;

enfin à Venise

l'an

;

la partition et les

plus entendu parler

-.

1.

Il

a été

à

Leipzig en i832. Par-

^p. 2<))

Prague pcntlant

le

24 décembre 1882.

deux pièces chorales.) Inédite. Exécutée i834-i835, et à Bayreuth le 22 mai 1873. et

i838

morceaux de chant pour une

raconté

à

et

exécutée deux

fois, à

Mag-

4 février 1841. Après cette parties détachées disparurent, et depuis on n'en a

rejouée à Riga en

dernière exécution,

et

22 mai 1873.

Société iTM/er^c en décembre i832, ensuite

Ouverture de'Christophe Colomb. Inédite. Composée,

Musique

le

Composée

Leipzig en i832, exécutée

la

au Gewandhaus,

à

Bayreuth

et à

'.

Symphonie en l'été

(Ouverture de concert en forme de fugue.) Inédite. Composée en

Leipzig

à

comment, après avoir

et

à

Paris

le

farce féerique de Gleich été

1

:

l'Esprit de la

perdue, après avoir passé de main en main

pendant quarante années successives, cette partiiion fut enfin rc.due à Ricliard Wagner grâce aux patientes recherches de ses amis de Paris. 2. On faillit la retrouver un jour (voy. p. '.^2); mais tout indice est aujourd'hui perdu. Ce récit piourRulc Britannia. que Wagner envoya de Paris, en 1S40, à la rait s'appliquer aussi à l'ouverture Société Philharmonique de Londres, et qui est pareillement égarée. Cependant Jullien ne dirigea jamais les concerts de la Société Philharmonique. En rapportant tout à la tin de sa vie, ce pitoyable épisode de sa jeunesse, peut-être Wagner a-t-il fait confusion sur le titre de l'ouverture expédiée ou sur le nom du destinataire. Peut-être aussi avait-il envoyé une ouverture à la Société Philharmonique, une autre à Jullien. Quoi qu'il en soit, ces deux ouvertures de Cliristoplie Colomb et de Rule Britannia :

paraissent être détinitivcment perdues.


-

.

APPENDICE

336

ou

nviiitat^nc

souhaits. Mcigdcbourg,

les trois

iS'-iiJ.

InJdits

;

manuscrit probablcmcnl

perdu. (JuvLMture fut

envoyée

Rule Britannia. Incditc. Ecrite

:

à la

Kœnigsbcrg en i836. La

à

partition

Société Piiilharmonique de Londres en 1840. Probablement perdue.

Ouverture pour Faust. Ecrite

Paris en 1839-1840. Première exécution à Dresde,

à

le

Recomposée en i855. Marche d'hommage [Huldigungs marsch.'] Composée en 1864. Publiée en 1869. La partition originale, pour musique militaire, demeura manuscrite. La version, publiée pour grand orchestre ordinaire, fut commencée par Wagner et terminée par Raff. Idj'lle de Siegfried (Siegfricd's Idjrll). Composée en 1870, publiée en 1877. Marche impériale (Kaisermarsch), 87 Grande Marche de fête, pour l'Exposition du Centenaire, à Philadelphie, 1870. La Cène des Apôtres (Das Liebesmahl der Apostel), scène biblique pour chœur d'hommes et grand orchestre, 1841. 22 juillet 1844.

1

1

Cantate de circonstance, pour l'inauguration de Auguste,

à

Dresde,

la statue

Salut au roi (Gruss

seiner Treuen an

Friedrich Angust).

et publié la même année dans cette ville i" comme mélodie avec accompagnement de piano. Au Tmubeau de W'eber 1° Marche funèbre pour instruments

9 août 1844, 2"

en bronze du roi Frédéric

7 juin 184?. Inédite.

le

:

:

S Furj-aiithe

:

2"

double quatuor pour voix, 1844. Partition du n"

3.

Sonate en

si

à

Pièces

Composée en

bémol.

Polonaise en re,

i'Ol;r

Exécuté

à

pour quatre voix

le

sur des motifs

à vent, 2

Dresde

d'hommes

publiée en 1872.

piano.

i83i, publiée en i832.

quatre mains. Coinposée en i83i, publiée en i832.

Fantaisie en fa dic:^e mineur. Inédite. Ecrite en i83i.

Sonate d'album, en

la

bémol, pour

M""-'

Mathilde Wcsendonck. Composéeen i853,

publiée en 1877. Feuillet d'album, en ut, pour la princesse de Mettcrnich.

Composé en

1861, publie

en 1871. Feuillet d'album, en

mi bémol, pour

M'"- Betty Schott.

Composé

le

i'-''

janvier 1875,

publié en 1876.

4.

Chant de carnaval,

tiré

de

la

M liLODl KS.

Défense d'aimer, i835-i836. Reimprimé

à

Brunswick

en i835.

Dors, Publiées

mon

enfant; Mignonne, Attente, mélodies composées à Paris en 1839-1840.

comme

primes musicales dans ÏFuropa, de Lewald, en 1841

allemande en 1871. Les Deux Grenadiers, de Henri Heine,

et

1842. Repu-

bliées avec traduction

sur

la

à lui

dédiés, Paris, iSSg.

Musique composée

traduction française.

Le Sapin (Der Tannenbaimi), Petite

1840. Publié en 1871.

Chanson de Kraft (Hôtel de Prusse, 22

avril

1871).

Petit

remerciement

humoristique à son hôte, M. Louis Kraft, de Leipzig. Imprimé dans le Jmirnal illustré de Vienne [i\ octobre 1877], puis dans le Recueil général de chansons d'étudiants, de Millier von der Verra.


Al'I'ENDICE Cinq Pdcijics Tristan lioii

:

L'Aiige.

2.

Douleurs.

5.

i.

et Iseult. 4.

Demeure

337

tranquille.

3.

Dans

Rêves, ciuJe pour Tristan

et

la serre,

Iseult

ciudc pour

(1862). Tradui.-

anglaise de Francis Huerter.

5

.

AU

1!

AN G

li

M 1: N T s

E

,

V

C

.

Gluck. Ipliigenie en Aulide, d'après rarrani^ement de

pour piano réduite par Hans de Bûlow, publiée en

Rii.Iiai-d

iS5'). Paililion

Wagner: paiiiiiim la CnJa de l'ou-

de

verlure publiée en iSSg.

Dan Juan,

Mozart.

avec dialogue

et l'écitatifs

remaniés, exécuté

à

Zurich en i85o.

Inédit.

Palestrina.

avec indications pour Texécution.

Stabat mater,

Partition

publiée

en 1877.

Allegro pour lion de 142

ginal

l'air

Vampire, de Marschner, en fa mineur. Partide musique ajoutées, au lieu des 38 mesures de l'ori-

d'Aubrey, dans

mesures de texte

et

le

datée de Wiirzbourg, 23 septembre iS33, en

;

la

possession de M. \V. Tappert,

à

Berlin.

Beethoven. Neuvième Symphonie, réduction pour piano, iS3i. Inédite. Donizctti.

La

pour piano, Paris.

Favorite., réduction

HElisir d'amore, réduction pour piano.

Halévy. La Reine de Chypre, réduction pour piano, Paris, 1841.

Le Guittarero, réduction pour piano, Paris, 1841. Arrangement à quatre mains d'une grande fantaisie de Henri Herz^ pour piano deux mains, sur la Romanesca.

>,

BAYREUTHIANA. Comment

celui qui n'csi pas initie se représente la

Devise

:

Que

sert-il

{l'iuli.

de

Je

Chevauchée

re.yarcicr, si l'on n'y

I.cip.cif;, 3

Valkyrics.

îles

peut loucher

:

septembre 1S76.)

4J

a


ADDITIONS ET CORRECTIONS

Page

^3, ligne 21, et

Page

23, ligne 3i.

page 24, ligne

Pour

de

attirer plus

son bénéfice au théâtre de Riga,

Noriuj.

— Lire

i5.

Le soussigné

Wagner

passion intime. Tous

monde

imprimer sur

de Kœnisberg.

Norma, donnée déclaration

l'affiche cette

mieux prouver son estime pour

La Nonna, parmi

à :

public de

le

toutes les créations de Bellini,

abondante veine mélodique, unit avec la plus profonde réalité la les adversaires de la musique italienne rendent justice à cette

grande partition, disant qu'elle parle au cœur, que pourquoi

lieu

représentation de

à la

avait fait

croit ne pouvoir

cette cité qu'en choisissant cet opéra. est celle qui, à la plus

Kœnigsberg au

une œuvre de génie. C'est

c'est

nombreux.

j'invite le public à accourir

Richard Wagner. Jusqu'à

la fin

de sa

dernier voyage en

vie,

Italie,

il

conserva

comme

venaient souvent

lui faire visite,

On me

un ogre pour

«

croit

il

la

même

mes

que

et

mais non, non, mille

;

musique

intimement, strictement aux paroles. La musique que

et liée

D'ailleurs,

rit

du

durant son

:

fait-elle

fois

est

non

:

me pose

Bellini,

au

tout cœur, sentie

je déteste, c'est la

sujet et des situations...

admiration persistante ne se

cette

et

musiciens de Naples

leur dit à peu près en termes précis

il

prédilections, parce que sa

vague, sans conclusion, qui se

les

tout ce qui se rapporte à l'école italienne et l'on

en antithèse particulièrement avec Bellini contraire, est une de

admiration pour Bellini,

Sorrente

était à

musique

»

pas sentir dans l'œuvre du

maître et ne retrouverait-on pas l'infîuence manifeste de l'école it.alienn«, au moins pour dessin général, dans certains

le

morceaux

de ses premiers ouvrages? Le

très applaudis

septuor de Tannhœitser, par exemple, n'a-t-il pas un air de famille avec

le

sextuor de

Wagner, par endroits, ne semble-t-il pas procéder de Donizetti que de Weber, dont il se réclamait volontiers à ses débuts ?

et

de Bellini,

Lucie, et plutôt

Le i"'' août 18S6, l'Opéra de Prague a justement fait sa réouverture en Page 24, note. reprenant encore une fois les Français à Nice, poème de Wagner, musique de Kittl. Page

17,

Hagen, «

ligne 21.

D'après M. Dannreuther, qui s'appuie sur l'autorité de Théodore

flenri Heine,

en voyant arriver

Ce qui me rend ce jeune II

est

homme

Wagner

inexact de dire que jamais plus

prononça-t-il son avaient échoué sur

nom

il

aurait dit ces simples

mots

recommandé par Meyerbeer.

ne reparla de son compatriote

plus tard en parlant des

le sol

Paris,

à

suspect, c'est qu'il est

;

:

»

au moins

nombreux compositeurs allemands qui

parisien et seulement réussi à se faire mystifier par les roués

du monde des planches.

Quelles tristes expériences n'eut pas à faire M. Richard Wagner, qui, à la fin, écoutant la voix de la raison et de l'estomac, abandonna prudemment le dangereux projet de prendre pied sur la scène française, et s'en retourna dans raffinés

le

Page

pays des

pommes

de terre d'Outre-Rhin

!

»

C'est peu, mais favorable au demeurant.

— Lire Dietsch au lieu de Dicslch. note. — Le portrait donné à page 45 n'est

38, note.

Page 44,

la

puisque celui de Kietz, qui est indiscutablement

pas

îe

le

premier de Richard Wagner,

premier, est parvenu à

ma

con-

naissance assez tôt pour trouver sa place dans VAvant-propos. Mais ce portrait représente bien

Wagner

âgé de trente ans, ou peu s'en faut, car

il

est très

peu postérieur, de


ADDITIONS ET CORRECTIONS toute (ividence, à celui de Kietz, qui fut

en 1840 ou

Quant

1841.

réédition à Zurich, c'est

fait

à l'autographe

pendant

de

avec

mot

Page 07, ligne

le

final

— Lire

2.

Wagner

à Paris, soit

placé sous ce portrait lors de sa

d'Opém

conclusion presque textuelle

la

— dans

attachait une importance telle qu'il l'imprima culiers,

séjour de

le

Wagner

33<(

son

Drame,

et

livre

à laquelle

il

en caractères parti-

Kiinstler ^^Artiste|, bien détaché.

:

Schnorr de Carolsfeld au

de Karolsfeld.

lieu

— Lire Fricka au lieu de Frick. gravure. — Lire Gust. Gaul au lieu de Paul.

Page

69, légende de la gravure.

Page

100, légende de la

Page

106, ligne 14.

^ Le librettiste

Wagner

français avec lequel

espérait pouvoir achever

pour Paris son opéra de U'/t'/.iiuY /e/orgeroJ! était Gustave Vaez, belge d'origine, de son vrai nom Gustave Van Nieuwenhuyzen, inféodé à l'école italienne, auteur, avec Alphonse Roycr, du

livret

Rossini, de

de

lettre

de

et

donne

je

spécial dans tout opéra.

mon

de

l'intelligence

le vrai

poète,

l'assaut à la règle d'après Si

j'attaque la

laquelle

u

chercherai aussi longtemps

je

Avec de

il

telles idées

en

tête,

le

divers opéras de

Wagner dans une

écrivait

forme de l'opéra en

doit y avoir

enflammer Gustave Vaez,

réussis à

je

même, de

le

dessein, h lui inspirer la volonté de

sinon

ce sera parfait

traducteur, avec

Pour commencer,

«

M. Camille Benoît,

traduite par

1S49,

cinq actes, puis

trouvé

Favorite,

la

Donizetti, de Verdi.

à

un

ballet

communiquer

lui

mettre avec moi à exécution, jusqu'à ce que j'aie

qu'il faudra,

autant valait chercher tout de suite.

Page 144, ligne i. Si réservé que je prétende être en fait de citations d'anciens articles hostiles à Richard Wagner, il me semble impossible de laisser perdre des perles telles que celles-ci, tombées de la plume d'un écrivain qui faisait la pluie et le beau temps en 1S61. Celui-là, sûr de son

parlait

fait,

ex cathedra

et

ne prenait pas de gants pour

donner son sentiment sur Tannliwuser. définitive, — aura coûté le

Cette mystification,

«

Tannhxuser,

dans laquelle

les

Parisiens ont joué

beau rôle en

le

à l'Opéra près de cent mille écus. Grâce au succès qui attend

c'est cent mille francs

Ne

par soirée.

regrettons pas

les

Ils

1

nous pré-

servent d'un véritable déluge germanique; car nous étions menacés d'une pluie de

Vaisseaux fantômes, de Lohengrin, de couler dans faire

la

taire les

Seine. Mais

il

aura

suffi,

apothéoses, crouler

les

Tristan de Léonais, et le Rhin allemand allait pour remettre toutes choses en leur place, pour

hauts patronages et crever des ballons pleins de

vent, DE l'attitude pleine de t.\ct et de mesure

excellencç,

le

Puis, le trait final obligé

de

:

Celte

«

Pénélope, une tapisserie qui

recommencer ouvriers

du public

p.\risien, le critique

juge en dernier ressort des productions de l'imagination et de

le

On

lendemain.

se

malencontreuse partition,

défaisait

y travaillait

c'était la

toute seule chaque soir et

mécaniquement, comme

par

l'esprit.... »

tapisserie

qu'il

fallait

travaillent

les

des Gobelins, à l'envers, sans avoir conscience de l'œuvre, sans se rendre

compte de l'effet que le musicien voulait produire, en aveugles, ou, pour mieux dire, en sourds. Heureux ceux qui ont pu le devenir! » Avouez qu'il eût été dommage de ne pas tirer de l'oubli cet arrêt sans pareil, qui résume tout ce qu'on a pu dire à propos de l'échec de Tannhœuser à Paris. M. Jouvin, s'il

se

relit

jamais, doit-il être assez fier de

réussi de faire le prophète, et,

comme

entendu parler de Richard Wagner,

il

cet article!

l'annonçait en

si

En

beau

vérité, style,

on

cela lui a

bien

n'a plus jamais

à Paris ni ailleurs.

Page 283, premier paragraphe. Le prince-héritier d'Allemagne avait certainement vu et goûté dans Parsifal autre chose que le pas martelé des chevaliers, car, durant les fêtes de iSSi"), il est revenu à Bayreuth tout exprès pour P.iri-i/j/ qu'il n'avait pas réentendu depuis l'origine. Bien plus, depuis la mort du roi de Bavière, on semble prendre à Berlin un intérêt particulier aux manifestations de à ce qu'il paraît, la question

l'art

national allemand, et l'on y agite,

de donner une aide décisive à l'œuvre de Bayreuth.


ADDITIONS ET CORRECTIONS

J40

Page 2S6, note

2.

principale des deux salles du théâtre où sont conservées les cou-

La

ronnes funéraires, celle qui fut le cabinet de repos du maître, est visitée par de nombreux fidèles, en temps de représentations à Bayreuth on l'appelle A'rjnï^ioniier (Chambre des couronnes). Dès le seuil, on est pris d'une émotion sincère et profonde en entrant dans :

commémorative. La demi-obscurité qui y règne et cette décoration saisissante, avec le buste de Wagner au milieu, donnent à cette pièce un aspect quasi sépulcral. Les murs disparaissent complètement sous l'amas des couronnes qui y sont cette sorte de chapelle

accrochées;

le

sol

en

jonché;

est

feuilles desséchées. Parmi

l'air

tout imprégné de l'odeur des fleurs et des

est

reliques qui s'y trouvent, on

les

noir enfermé sous verre et sur lequel sont inscrits ces mots à

Wagner (Demain,

probe,

qui aient été écrits par

reconnaissant,

le

Emile Scaria,

— impressionne

artiste,

M'""

Wagner,

Wagner). Ce sont

répétition générale,

maître dans son théâtre.

ruban porte cette inscription

:

Au

— et

également

meilleur

qu'on

a

remarque un petit tableau Morgen General-

la craie

et

:

les derniers, paraît-il,

Une immense couronne, dont

le

au plus noble des maîtres, son élève

dû mettre en évidence depuis du Kran^pmnier.

la

mort de cet

les pèlerins

à ce qu'on dit, cédant aux instances de son entourage, s'est abstenue

jusqu'à présent de pénétrer dans ce lugubre sanctuaire.

Page 3i2.

Wagner

Le peintre Joukowski ne

d'exécuter son portrait en

toile très curieuse

C'est

pas avoir profité de

paraît

même temps que Renoir

qu'on peut voir actuellement dans

une Sainte Famille où toutes

les tètes

le

l'offre

que

lui faisait

composé, en i8Si,une salon-bibliothèque de Wahnfried. ;

mais

il

sont des portraits. Ni

a

le

maître, ni sa

femme

ne figurent dans cette assemblée; mais on y voit tous leurs enfants. Saint Joseph, c'est le peintre en personne le

petit

Siegfried

musique sont toile,

avec

colonne

les

celles

la

Vierge Marie,

se trouve

c'est M""^

les

trois

de M''" Claudine, Isolde

accessoires obligés

ami de Wagner), la

;

Wagner. Enfin,

une

:

un

établi,

tête qui pourrait bien

est très saisissant;

la

Daniela de Bulow; l'Enfant Jésus, c'est

ligures d'anges jouant et

Éva de Blilow.

une colonne, être

celle

des instruments de

L'effet

etc. (sur le

de cette grande

chapiteau de cette

de feu M. de Gobineau, grand

teinte générale en est bleuâtre et

donne

composition l'apparence d'un rêve peint, d'une hallucination.

RlCU.^RD WAG.NEti, l'AR GUST. GAUL. l'ortrait-cliarge fait à la rùpétition de la SocictcS do

musique, à Vienne,

le

27 février 1875.

à toute


.

TABLE DES GRAVURES

I

ILLUSTRATIONS HORS TEXTE LITHOGRAPHIES

ORIGINALES

DE

Tirées par Lemercifr

M

.

FA N

T N - L A T O II R I

et C'".

Pages 1.

Titre.

2.

La Muse

3.

RiENzi (acte V). Prière de Rienxi

4.

Le Vaisseau fantôme

xvi

5.

Tannhjeuser

6.

LoHENGRiN

(acte

(acte

III).

(acte III).

lll).

L'Etoile

5o

Ravissement de Senta

du

80

Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg (acte

9.

L'Or du Rhin (scène La Valkyrie

(acte

I").

II).

Signal dans

i58

nuit 1°').

Rencontre de Walther

et

d'Eva

178

194

Siegmund

-

Évocation d'Erda

12.

Le Crépuscule des Dieux

l'i.

Parsifal (acte

14.

Réveil

II).

la

Les Filles du Rhin

(acte I"). Sieglinde et III).

64

g4

Tristan et Iseult

Siegfried (acte

du Hollandais

soir

7.

I.

et

Scène d'amour

8.

10. I

Immortalité

(acte

III).

202 222

Siegfried et les Filles du

Rhin

242

Evocation de Kundry

28O

SaS

EAUX- FORTE S Richard Wagner, eau-forte de Unger, d'après

ET le

H F: Ll O GR A VU RE

portrait de

38

Lcnbach

Richard Wagner, eau-forte de M. Abot

Devant la demkure des Giuichungen,

'

eau-forte de H. L. Fischer, d'après

le

-

tableau de Joseph

HotTmann

2''2

Richard Wagner, héliot^ravure

-9-

II

ILLUSTRATIONS DANS LE TEXTE Richard

Wagner

Wagner

saluant, caricature allemande-.

vers 1840, par E. Kiet/

Portrait-charge de Wagner, par Gill

Maison natale de Richard Wagner,

^"' ''\''

9 à Leipzig

'^

Le Sommeil de Brunehild, caricature allemande

-^

Herr Richard Wagner

4"

et

John

Bull, caricature anglaise


TABLE DES GRAVURES

342

Pages.

Richard Wagner vers 1843

45

Représentation de Rioip à Dresde, en 1842

Scène

finale

du Hollandais

49

volant, k Dresde, en 1843

53

Scène finale du Vaisseau fantôme, à Londres, en 1S7G

55

Richard Wagner dans le ciel, caricature allemande Wotan et ses corbeaux messagers, caricature allemande

69

5y

Représentation de Tannhœuser à Dresde (Reprise de 1847)

77

Maison de Richard Wagner à Bayreuth Représentation de Lohengrin à Weimar, en i85o

83

Richard Wagner en i853, par Clémentine Strocker-Escher

93

89

Représentation de Lohengrin à Munich, en 1867

97

Richard Wagner chef d'orchestre, portrait-charge par Gust. Gaul

100

Richard Wagner vers i855

io5

Richard Wagner vers 1857

Le Judaïsme dans

M Wagner

la

109

comme

musique,

il

plait à

Richard Wagner; caricature allemande

iiG

ouvrant son œuf de Pâques, caricature française

M. Wagner prenant

118

de faire exécuter sa musique de l'avenir par des musiciens également

le parti

de l'avenir, caricature française

A une

répétition de

119

Tannhœuser, caricature française

120

Autographe musical de Richard Wagner

121

Le Tannhœuser demandant à

123

que

C'est faux, ce

voir son petit frère, caricature française

tu joues là,

mon

enfant...

124

caricature française

»

Représentation de Tannhœuser (i" acte) à Paris, en 1861

Minute d'une Papa,

lettre

autographe de Richard Wagner

voudrais apprendre

je

I25

musique!...

la

128-129 i3o

caricature française

»

Craignant pour ses provinces du Rhin, l'Allemagne envoie

Tannhœuser pour endormir

le

la

France, caricature française

Représentation de Tannhœuser

A une

La Clef de

la

J'ai

vendu

'.

i

musique de Tannhœuser, caricature française

ma

partition...

»

Tannhœuser produisant son

Une Scène de

Wagner au

i39

directeur de l'Opéra

141

caricature française

effet,

même

143

sur les artistes qui

le

répètent, caricature française.

patinage, caricature allemande

Représentation de Tristan

et Iseult à

et M'""

Vogl dans Tristan

Au comble du bonheur,

pauvre voyageur?

Munich, en iSôg

iG3

caricature allemande

Une Simple

»

i65

1G8 iGg

Oh! que non pas!

Visite en passant, caricature

Représentation des Maîtres chanteurs de

caricature allemande

allemande

Nuremberg

l'atelier

Munich, en 18G8

III

des Maîtres Chanteurs)

Richard Wagner, par Klic, caricature allemande

Représentation de Rien^i au Théâtre-Lyrique,

Sieglinde aide

Siegmund

la

188 ;i

Paris, en 18G9

189

Valkyrie

à arracher l'épée

iSi

184

Gill, caricature française

Costume de Brunehild dans

173

177

de Hans Sachs (acte

Richard Wagner, par

169 172

(2" acte) à

Richard Wagner vers 1868

Eva dans

143

157 et Iseult, à

Nouvel Orphée, caricature allemande B

.

i33

Le Roi Lohengrin, caricature allemande

Un Un

.

149

Munich, en i865

Richard Wagner vers i865 M.

36

i37

1

Lettre autographe de Richard (1

i33

Tannhœuser, caricature française

répétition générale de

Richard Wagner en 186

i3i

à Paris, en 1861

[2" acte)

192

du

frêne, caricature

allemande

193


1

TABLE DES GRAVURES

343 Pag*».

Loge,

le

dieu du feu, emporté par son dnormc manteau rouge, caricature allemande

ifj3

Richard Wagner vers 1874, par E. de Liphart Le Messie des

ir,^

manière; caricature allemande sur

Juifs, dernière

Richard Wagner

Liszt,

de Bùlow

M. ILins Richter dirigeant l'orchestre

La Colline de Bayrcuth

et le

il

la

les trois

mêmes

Bayrcuth

Théâtre des

L'Orchestre en contre-bas de le

Un Coin du

théâtre de Bayrcuth

festivals

3o5

scène avec sa demi-voûte en bois

2o5 208 212

extérieure du théâtre de Bayrcuth, en i.Sjô

2i3

Plan du théâtre de Bayrcuth intérieure

Alberich

214

du théâtre de Bayrcuth

2i5

du Rhin, scène première de l'Or du Rhin

et les Filles

'

Appareil natatoire des Filles du Rhin

La Manœuvre des Wagner trinquant Alberich

la

scène

2i<j

avec ses amis

210

du Rhin, par E. de Liphart

et les Filles

217 2icS

du Rhin, vue du fond de

Filles

201

204

dragon attendant l'heure du combat, caricature allemande

Siegfried et

Vue

Hans 200

Les Modernes Chevaliers du Oraal, caricature allcniaiide sur

Vue

et

221

Wagner faisant répéter à Betz le rôle de Wolan La Demeure de Hunding i" acte de ta \\-ilkyi-ie)

224

Un Rêve

228

223

f

de Richard Wagner, caricature allemande

Richard Wagner, par Mars, caricature française

Wagner au banquet, par Cham, Costume de Wotan en voyageur, dans Siegfried Mort de Siegmund (2° acte de la Valkyrie) Liszt et Richard

Affiche collée sous

le

229 caricature française

23i

233

promenoir extérieur du théâtre de Bayrcuth, en iSjô

Le Rocher des Valkyries Le Réveil de Brunehild

(3" acte (3° acte

de

la

229

Valkyrie)

235

237

de Siegfried)

239

Richard Wagner en 1877, par Herkomer

241

Un

243

des restaurants du théâtre, à Bayreuth

Cortège funèbre de Siegfried

(3°

acte

Composition du peintre Krausse pour

la

façade de

Wahnfricd, habitation de Richard ^^'agner

Une

24D

du Crépuscule des Dieux)

à

la

maison de

^\'agncr, à Bayreuth

248

Bayreuth

Soirée chez Richard ^^'agner, par L. Bechstein

Pierre

commémorative des représentations de

249

la tétralogie à

Bayreuth, en 1876

la

Wagner,

dit le

253

forge animé, caricature allemande

Le Théâtre de Bayreuth dans son

255

état actuel

Musicien de l'avenir, caricature française

Arrivée de Parsifal sur

Gurnemanz conduit

le

domaine du Oraal (i" tableau de Parsifal)

Parsifal au château

du Graal

25

252

Médaille commémorative des fêtes de Bayrcuth

Le Motif de

247

(2°

tableau de Parsifal)

236

257 259

Richard Wagner, caricature anglaise

260

Richard Wagner en 1877

261

264

Richard Wagner, caricature anglaise Évocation de Kundry par Klingsor M"'°

(2*

acte de Parsifal)

Materna dans Kundry, au deuxième acte de Parsifal

M. Pasdeloup ne

se inétiant pas assez d^s

Le Tétralogue Wagner, caricature

marches de M. Wagner, caricature française

Parsifal baptise

Kundry

La Musique de

l'avenir, caricature anglaise

[3'

2*^7

268 268

fran

Parsifal (M. Jœger) et les Filles-Fleurs, au

^55

deuxième

acte de Parsifal)

acte de Parsifal

269 271

272


11

TABLE DES GRAVURES

344

Richard Wagner à liayreuth, par G. Papperitz

Kundry

se traîne

aux pieds de ParsifaI

(3"

273

acte de Parsifal)

273

27b

Le Porteur du Saint-Graal, dans ParsifaI ParsifaI découvre le Graai (scène dernière de ParsifaI]

Menus souvenirs de Bayreuth carte de

membre

277

du restaurant du

serviette

:

deux carte; postales, une

théâtre,

de l'Association wagnérienne universelle

279

Carte postale publiée à Bayreuth lors des représentations de ParsifaI. Parole historique du maître, recueillie

le

28

.

'-'

25 juillet 1882; caricature allemande

2S5

Frou-frou Wagner, caricature allemande

Le Grand Canal, à Venise, Le vieux maître Richard

et le

Palais Vendramim-Galcrgi, par Robert Mois

Wagner

arrive sans être

annoncé dans

la

salle

289

de musique du

ciel,

292

caricature suisse

Le Palais Vendraminî, à Venise,

oij est

rnort

Richard Wagner

293

Les Funérailles de Richard Wagner, à Bayreuth

Le Tombeau de Richard Wagner, à Bayreuth.

L'Empereur d'Alleinagne Le Roi de Bavière

et

et

296

297

.

Richard Wagner, caricature allemande

3oo

Richard W'agner, caricature allemande

3oi

Richard Wagner en 1882, par Renoir

3o5

Wagner apprenant aux Champs Élysées la mort du roi Louis Destinée de Richard Wagner ici-bas, caricature allemande

A A

la

II,

3o8

caricature française

309 3i2

porte du ciel, caricature allemande

Bayreuth

:

283

Richard Wagner

et

Kikeriki

;

caricature allemande

Exclamation d'un fanatique de Richard Wagner

;

317

32o

caricature allemande

Différence entre deux compositeurs célèbres, caricature allemande

32

Représentation d'un opéra en préseiice du maître, caricature allemande

325

Richard Wagner dans Bayreuthiana

:

l'Aitiicau

Comment

celui

328

du yibelung, caricature allemande qui n'est pas initié se représente

la

Chevauchée des

caricature allemande

337

Richard Wagner pendant une répétition à Vienne, portrait-charge par Gust. Gaul W'agner dans

le

feu de la composition, caricature allemande

Wagner composant,

\'all<yries;

344 34G

caricature anglaise

WAGNER DANS

340

LE

l-'

EU

DE LA COMPOSITION.

[Kikeriki, de Vieiuic, i3

novembre

1876.)


TABLE DES MATIÈRES

Avant-Propos

vu

CHAPITRE PREMIER Mozart

et

Richard Wagner en face des Français

,

CHAPITRE La jeunesse

et les

premiers essais de Richard Wagner.

i

II

Les Fées

et la

Novice de Palerme.

Séjours k Magdehourg, à Kœnigsberg, à Riga

'.

CHAPITRE

lo

III

Trois années à Paris

2(i

CHAPITRE Ricii^i et le Hollandais volant à

I\'

Dresde

41

CHAPITRE V Richard Wagner de Weber.

niaitre de chapelle à Dresde.

— La

Symphonie avec chœurs.

La

Vestale et Spontini.

Retour des cendres

Iphigénie en Aulide

CHAPITRE

38

VI

TannluTiiser à Dresde

70

CHAPITRE Lohengrin

à

Weimar

84

CHAPITRE Richard Wagner en

e.\il.

— Écrits

théoriques.

à Paris.

Concerts aux

Italiens.

\II1

Composition des Sibelungcn

CHAPITRE Deux années

VII

101

IX

Tanniuvuser à l'Opéra

117

CHAPITRE X Tristan et Iseult à Munich

i4<>

^.

CHAPITRE Départ de Bavière.

Séjour à Tricbschen.

— Les

XI

Maîtres Chanteurs de Nuremberir à Munich.

44

.

166


TABLE DES MATIERES

34(",

CHAPITRE

XII Pages,

Rien^i à Paris. Le Rhciiipold du séjour à Triebschen. Installation à Bayreuth et construction du théâtre

Suite

CHAPITRE L'Aivicaii

du

Nibeliiiig à

et

la

Valkyrie à Munich.

— i85

XIII

Bayreuth

20'j

CHAPITRE XIV Concerts à Londres.

La

tétralogie à Berlin.

Parsifal à Bayreuth

264

CHAPITRE XV Mort

et

dans

de Richard

funérailles

intéressés.

Son

Wagner.

attitude envers .\uber,

l'intimité, l'artiste

Continuation de son œuvre. Rossini, Meyerheer,

Schumann,

Ses revirements etc.

L'homme

en public

284

CHAPITRE XVI Le génie en face de ses partisans

et

3i3

de ses détracteurs

APPENDICE Les œuvres de Richard

musicales de Richard

Wagner dans Wagner

les

concerts de Paris.

Catalogue complet des œuvres 329

Additions et Corrections

338

Table des

341

Gr.avl'res

h'f Ci' t/i•y/^|

/ le-

.yJm0"

H'AGNER COMPOS.\NT. (ï/ii-'

illuslraicd iporting

and

dr.ini.iîic ncivs,

de Londres, y juin 1877.)


AUTRES OUVRAGES DE L'AUTEUR

La Comédie a la (2our; les Théâtres de Société royale pendant le siècle dernier. La Duchesse du Maine et les Grandes Nuits de Sceaux, M"" de Pompadour et le Théâtre des Petitsle Théâtre de Marie-Antoinette à Trianon. Ouvrage orné d'un frontispice en chromolithographie, de 8 gravures en taille-douce ou eaux-fortes, de i8 gravures sur bois

Cabinets,

d'après des portraits et tableaux originaux de l'époque, et de 20 cartouches, en-tètes et

culs-de-lampe expressément composés pour l'ouvrage sur des motifs du

xviii" siècle, (ln-4"

carré, Firmin-Didot, éditeur.).

Paris Dilettante au commencement du siècle. Ouvrage orné de 36 gravures sur bois fac-similé de dessins originaux conservés

aux Archives de l'Opéra.

(In-S" écu,

et

Firmin-Didot,

éditeur.)

Histoire DU Costume au Théâtre, depuis

Ouvrage orné de 27 gravures reproduits en fac-similé. (Grand

XVI II"

I^'Opéra secret au

Archives de l'Opéra

et

in-S", Charpentier, éditeur.)

1770- 1790), Aventures et Intrigues secrètes, racontées d'après

cul-de-lampe à l'eau-forte, par de Malval. (In-S" écu, Rouveyre, éditeur.)

La Comédie sur et

(

origines du Théâtre en France jusqu'à nos jours.

papiers inédits conservés aux Archives de l'État et de l'Opéra, avec frontispice, en-tête

les

et

siècle

les

et dessins originaux, extraits des

et la Galanterie au XVIIIe siècle

le théâtre, le

cul-de-lampe

:

l'Église et l'Opéra en iy.3S, les Spectateurs

Théâtre des Demoiselles Verrières,

à l'eau-forte,

A

la Bastille;

avec frontispice, en-tète

par de Malval. (In-8" écu, Rouveyre, éditeur.)

La Ville et la Cour au XVII I° siècle Mo:;art à Paris, Marie-Antoinette musicienne, la Musique et les Philosophes avec frontispice, en-tète et cul-de-lampe à l'eau-forte, par de :

;

Malval. (In-8" écu, Rouveyre, éditeur.)

La Cour et l'Opéra sous Louis XVI

:

Marie -Antoinette

et Sacchini, Salieri,

Favart

et

Gluck

:

d'après des documents inédits conservés aux Archives de l'État et de l'Opéra. (In- 18, Didier, éditeur.)

Airs variés

:

Critique, Histoire, Biographies musicales et dramatiques.

(In- 18,

Charpentier,

éditeur.)

Gœthe

et la Musique

Ses Jugements, son Influence,

;

les

Œuvres

qu'il a inspirées. (In- 18,

Fischbacher, éditeur.)

Hector Berlioz autographe

et

:

la

Vie et

le

Combat,

les

un portrait de Berlioz.

Paris.

Imprimerie E.

Œuvres

:

(In- 18 carré,

Mlnard

et

J.

avec un portrait de miss Smithson, un

Charavay

Aucitv, 41, rue de

frères, éditeurs.)

la

Victoire.







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Jiillien, Adolphe

4.10

Richard Wagner, sa vie et ses oeuvres

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