Maqam numéro 04 fr juillet 2015

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Numéro 04 - juillet 2015

Constantine Capitale de la Culture Arabe 2015

Onei TWOi THREEi

lemqam

VIVA L ALGeRIE I

I

DE AMAR EZZAHI À AMAZIGH KATEB

Une alchimie sonore pour des miracles plein les oreilles MIRIAM MAKEBA,

Ana hourra fi El Djazaïr www.qasantina2015.org


OFFICE NATIONAL DES DROITS D’AUTEUR ET DROITS VOISINS

Vibrant hommage au musicien Cheikh Namous

L’

Office national des droits d’auteur et droits voisins (ONDA) a rendu début juillet à Alger un vibrant hommage à Cheikh Namous, de son vrai nom Rechedi Mohamed, en signe de reconnaissance à son long et riche parcours de musicien talentueux. À cette occasion, marquée par la présence du ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, un Trophée hommage lui été remis par le directeur

général de l’ONDA, Sami Bencheikh El Hocine. Outre la projection d’un film documentaire retraçant le parcours du musicien, la soirée hommage a été animée par quatre artistes de la chanson châabi que sont Cheikh Abdelkader Chercham, Kamel Aziz, Nardjess et Tarek Difli. Né le 14 mai en 1920 à Alger, Cheikh Namous débuta très jeune sa carrière de musicien (banjo) avec

l’orchestre de Cheikh Abderahmane Sridek. En 1951, Rechedi Mohamed intègre l’orchestre de musique «Elak» dirigé par cheikh Noreddine comme musicien professionnel. L’artiste qui boucle ses 95 ans cette année, a côtoyé de grands artistes de l’époque, notamment cheikh El Hadj M’hamed El Anka, Mrizek, Ménouer, Taleb Rabah, Slimane Azem et d’autres encore.

Promouvoir notre patrimoine culturel L’ONDA procédera à la sortie de deux coffrets de musique du patrimoine culturel traditionnel du genre Chaâbi, interprétée par Nacer Mokdad et Sid Ahmed Lahbib. Deux disques du mérite ’’ONDA’’ seront décernés par monsieur le Premier Ministre à ces deux artistes, pour leur contribution à l’enregistrement des œuvres du patrimoine culturel traditionnel. Photo Une : Walid Hamida


Maqam numéro 04 - juillet 2015

ÉDITORIAL lemqam

Les yeux baissés » face à « La soudure fraternelle » «

Revue publiée par le Commissariat de la manifestation Constantine capitale de la culture arabe 2015

DIRECTEUR DE PUBLICATION Sami Bencheikh El Hocine RÉDACTEUR EN CHEF Mohamed Mebarki RÉDACTION Hamid Ali-Bouacida Djamel Belkadi Ikram Ghioua Ranida-Yasmine Meraz Farah Feriel Mohamed Bouhabila

DIRECTION ARTISTIQUE Walid Hamida DESSIN / CARICATURE Ferhat Ilies PHOTOGRAPHIE Mohamed Lamine Hamida

Contact : Revue Maqam Siège : Centre International de Presse (CIP), Boulevard Zighoud Youcef Constantine maqam@qasantina2015.org www.qasantina2015.org Impression ENAG

ADVERCORP 119 A lot Eriad Ain Smara Constantine - Algérie. T. 031.97.26.54 E. hello@advercorp.dz

www.advercorp.dz La reproduction intégrale ou partielle des articles est soumise à l’accord de la rédaction

Par Mohamed Mebarki

De nombreux écrivains algériens ont séjourné au Maroc et ont aimé ce pays sans le moindre complexe. Mouloud Mammeri y a vécu une partie de son enfance, entre 1928 et 1932. Il y est retourné, 30 ans plus tard, en ne quittant le Royaume qu’après l’indépendance de l’Algérie. Rachid Boudjedra a enseigné à Rabat durant les années 70. Rachid Mimouni s’y est établi en famille; à Tanger plus précisément ; et Mohamed Arkoun, le rénovateur de la pensée islamique y est enterré. Tous ces intellectuels qui ont suffisamment connu le Maroc, ses devantures et ses arrière-cours, n’ont jamais osé dépasser les limites de la correction, en évoquant occasionnellement ce pays à travers leurs sorties médiatiques. Mieux, ils ont tous exprimé le sentiment de bien-être chez soi, jouant parfaitement leur rôle d’une élite éclairée et visionnaire dont le regard dépasse la conjoncture politique. Ils ont été tout simplement lucides, académiciens et pédagogues. Ainsi, ni La colline oubliée, ni L’escargot entêté, ni La pensée arabe, ni encore L’honneur de la tribu n’ont été « bêtement » souillés par l’infamie. Ces œuvres et leurs auteurs sont donc demeurés loin, très loin du démarchage politicien cyclique, préférant concentrer toute leur énergie à comprendre le fait social dans sa dimension maghrébine la plus nuancée. Mammeri, Boudjedra, Mimouni et Arkoun ont continué à cultiver dans leurs écrits, l’Eloge de l’amitié, à l’opposé de l’auteur de ce roman qui vient d’exécuter un sale « contrat » commandité par des enjeux électoralistes venus d’ailleurs qu’aucun écrivain digne de ce nom n’aurait accepté. Moha le fou, Moha le sage, l’auguste membre de l’Académie Goncourt, s’en est pris violemment à l’Algérie, en utilisant un procédé et un lexique indignes de son statut littéraire. Son « coup de gueule », qui ressemble curieusement à une récente déblatération anti-algérienne perpétré par une personnalité politique française, véhicule une haine monstre contre un pays où il n’y a jamais mis les pieds. Une attitude qui pue l’intolérance. A l’inverse de Mammeri, Boudjedra, Mimouni et Arkoun qui ont fait preuve d’une remarquable clairvoyance et d’une hauteur d’esprit propre aux gens de Lettres, l’auteur de La nuit de l’erreur est tombé dans les travers de la manipulation gratuite, Les yeux baissés. M. M.


Le Fond et la forme 6

En lettres capitales

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Hommage Ana hourra fi El Djazaïr

One TWO THREE

Hommage

VIVA

fondouk

I

L’ALGeRIE I

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UN ÉTÉ 62

Ahl El Djazaïr

p.26 p.17-25

p.16

SOUAD ASLA

Invitation

Memoire

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L’oasis rouge telle que Boudjedra ne l’a pas racontée

L’artisan émérite du premier projet culturel national

Gracieuse et enchanteresse

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p.

p.24

Une vie dans le théâtre


Istikhbar

Par Dj. Belkadi

Soleils sonores

M

aqam offre à ses lecteurs un numéro tout en musique pour célébrer toutes ces voix qui ont jailli, à force chants et à force gorges, pour fêter la patrie, glorifier l’Indépendance et perpétuer l’esprit patriotique chez une jeunesse qui, aujourd’hui, dans une poussée flamboyante, n’a de cesse de nous prouver et prouver au monde entier son attachement à son algérianité. D’illustres artistes, chanteurs et musiciens, femmes et hommes de ce cher pays, ont consacré leurs vies à la réappropriation, la préservation puis la transmission d’un riche patrimoine culturel identitaire que le colonialisme préméditait de gommer dans une tentative monstrueuse de dépersonnalisation de tout un peuple. Aujourd’hui, ce socle identitaire, cet immense patrimoine culturel matériel et immatériel hérité, de part sa diversité, ses ramifications, ses mutations et ses territoires, fait l’objet d’un intéressement scientifique, institutionnel et social jamais égalé auparavant. Moment décisif, historique même, car nous considérons qu’il constitue le prélude, ou encore, cet Istikhbar intelligent à une modulation savamment orchestrée, une jonction de tous les efforts, tant pour sa sauvegarde, sa réhabilitation, son enrichissement que pour sa promotion et sa revalorisation. En déclarant récemment que : « La culture se construit par la société et non par l’administration. », l’homme de culture et ministre de la Culture, M. Azzeddine Mihoubi, à bien précisé cette conscience et cette volonté institutionnelle d’aller vers une politique de rationalisation globale. Une politique qui, forcément, induit, outre

une crispation financière sur laquelle se sont étroitement et indûment focalisés les médias, une volonté de « défolklorisation » de ce patrimoine culturel. Une vision qui implique, surtout, la prééminence d’une approche prospective porteuse d’une signifiance empirique, symbolique, syncrétique et consciente des risques et des enjeux de la globalisation et ceux inéluctables de la modernité. À l’image de ces initiatives de patrimonialisation des savoirs traditionnels, des process scientifiques de leur réhabilitation et des politiques de leur mise en branle, nous compterons avec satisfaction et une grosse attente quant à leur aboutissement salutaire, ces démarches perspicaces portées par des actants de la société civile et tendant à inscrire et à verser au patrimoine mondial la musique classique algérienne. Une musique qui, aujourd’hui, avec la formation d’un ensemble national de musique andalouse (ENAMA) qui rassemble sur une même partition les écoles musicales ; le Gharnati de Tlemcen, la Sanaâ d’Alger et le Malouf de Constantine, revendique avec mérite d’être légitimement reconnue comme étant une musique universelle. Et ce statut, n’est-il pas déjà là quand l’Algérie est célébrée en ce début du mois d’août, à l’occasion de l’Exposition universelle de Milan 2015, avec un récital absolument inouï, exécuté avec grâce et distinction par cet Ensemble national de musique andalouse. C’est là, croyons-nous, l’apport inestimable de la culture algérienne et du peuple algérien à toute l’humanité. Dj. B.


En lettres capitales FÊTE DE L’INDÉPENDANCE ET DE LA JEUNESSE

One TWO THREE i

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VIVA L’ALGeRIE I

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Illustration Walid Hamida


One, two, three, viva l’Algérie Lorsque cet air fut inventé au début des années 80, par les vétérans du Hittisme, ces jeunes collés aux murs fissurés des centres historiques des grandes villes, personne ne se doutait qu’il allait traverser la terre entière au rythme d’un hymne céleste pour devenir le « cri » de ralliement de tous les Algériens à travers la planète. Par Mohamed Mebarki

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ne, two, three viva l’Algérie grandit et gronda pour la première fois au stade du 5 juillet à Alger, lors d’un match amical disputé par l’équipe nationale algérienne qui se préparait à son baptême mondial prévu en terre ibérique. Ce fut une symphonie frappée du sceau de la jeunesse, célébrée, dans un stade plein à craquer, par une rue qui savait dessiner le triomphe. Le « coup de foudre » a tonné dans un ciel printanier de l’année 1982, et l’Algérie entière fut submergée par un amour juvénile éclatant dans un énorme brouhaha. C’était l’époque des voitures italiennes et japonaises destinées aux classes moyennes, et les confortables allocations touristiques en devises fortes qui offraient l’Europe à une jeunesse certes impatiente, mais qui s’est vite ressaisie au moment de faire le choix entre la tentation occidentale et l’appel de la terre mère, en s’enracinant davantage dans la société. A cette époque, l’activité culturelle arrivait à imposer son mode de vie. Slimane Benaïssa et Abdelkader Alloula plantaient des milliards de graines dans des esprits asséchés et assiégés. Le Théâtre régional de Constantine inondait de son humour hallucinant une Algérie conquise par le style loufoque

d’une troupe façonnée dans le fou rire. A cette époque, Hasna de Béchar, le groupe Kahina de Batna, Khaled, Idir et Nouredine Staïfi charmaient les foules, et Amar Zahi entrainait ses admirateurs vers les rivages calmes d’un Chaâbi « habité » par les esprits. En ce qui concerne le grand écran, Les cinéphiles algériens avaient l’embarras du choix entre des superproductions affichées en avant-première mondiale, comme ce fut le cas pour Apocalypse Now de Francis Ford Coppola, des projections rares du patrimoine cinématographique abritées par des cinémathèques de longue tradition, et un programme de haute facture présenté par la télévision nationale.

Les chiffres de la liesse Cette période fut celle de la culture sous toutes ses formes, en Algérie et dans le monde. Même le foot était imprégné culturellement et certains chants des gradins, portés par une intense ferveur, ont traversé, des villes et des peuples, avant de s’élever vers un ciel constellé. Repris 30 ans plus tard par de jeunes chanteurs, 1, 2,3, viva l’Algérie, que les radios brésiliennes enregistraient à plein tube sur la

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Dessin Abderrahmane Chaouane

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main courante du stade du 5 juillet, par une soirée printanière de l’année 1982, fait toujours vibrer les cœurs. Habitués à l’exubérance populaire, les Brésiliens n’avaient pas tardé à détecter toute l’énergie cumulée dans 1, 2, 3, viva l’Algérie. Et ils ont vu juste. Chez nous, les trois chiffres se multipliaient déjà à une très grande vitesse, et réinvestissaient, ruelle par ruelle, les lieux populaires où ils ont vu le jour, la première fois, en arborant un bel emblème, verdure et blancheur unies par les liens du sang de l’étoile et du croissant. Le chant est désormais partagé par des millions de jeunes. Il est présent à chaque performance algérienne. Il est à présent un titre fédérateur à la gloire de l’Algérie. Le 5 septembre 1993. Tout le monde se souvient de la situation qui prévalait, en ce moment, en Algérie. Ce jour là, et malgré la tragédie, 1, 2, 3, viva l’Algérie raisonna dans tout le pays, dans la foulée du record mondial décroché par Nordine Morsli à Rieti en Italie. Ce fut un sursaut d’orgueil de la part d’une jeunesse qui luttait âprement contre la déprime, et un cri dégagé par des millions de poitrines pour dire non à la mort, non au désastre. Oui, 1, 2, 3, viva l’Algérie a toujours constitué un acte de résistance. Un acte populaire dont la filiation ne s’arrête pas aux performances sportives, mais re-

monte à loin quant à ses motivations psycho-sociales, si on revient à cette époque inoubliable que l’Algérie a connue après le Cinq juillet 1962, et à cette liesse incommensurable qui s’est emparée des Algériens.

Al Hamdou lillah ma bqach istimar fi bladna!

La joie de tout un peuple épris de liberté fut célébrée par de nombreux artistes dont l’inimitable El Hadj M’hamed El Anka et son Al hamdou lillah ma bqach istimar fi bladna. Fraichement sortie d’une nuit coloniale dure et obscure, la foule n’était pas encore habituée à chanter à l’unisson. Ce sont donc les artistes qui canalisèrent le bonheur d’une liberté arraché de haute lutte, exprimé par tout un peuple. Dieu soit loué avait jubilé l’indétrônable patriarche au rythme d’une harmonie musicale magistrale, mariant subtilement le traditionalisme chaâbi aux nouveautés patriotiques. El Anka a interprété majestueusement une liesse populaire, en la faisant planer sur des airs qui sentaient le jasmin et la menthe au beau milieu d’un « Ouast Ed-


dar », patio au style mauresque baigné par une nuit d’été. Dans la chorale qui l’accompagnait, une jeune silhouette portée par un sourire flamboyant se distinguait déjà. C’était celle de Hachemi Guerouabi qui allait s’imposer lui aussi comme un Cheikh incontestable de la « sanaâ ». Les couches populaires étaient encore sous le coup de l’émotion, et ce sont les artistes qui avaient su traduire l’exceptionnel sentiment d’apaisement des Algériens toujours sous l’emprise d’une allégresse enivrante. La radio a fait pénétrer la voix du maitre El Anka dans les demeures et dans le cœur d’une population passionnée par l’indépendance, avant que la télévision n’élargisse l’audience d’un maitre qui venait de signer un « single » époustouflant à travers lequel le mandole a dansé sur le fil. Il a salué l’Algérie en y mettant tout son talent, et il a réussi ; à sa manière, à la manière des maestros. Dans un autre registre artistique, légèrement influencé par les tendances musicales modernes de l’époque, Abderrahmane Aziz composa et interpréta Ya Mohamed mabrouk alik Al Djazaïr rajaât lik. Une chanson qui inscrira son nom en haut du répertoire musical algérien pendant des années, et un texte reflétant toute la dimension d’un bien sacré que les Algériens se sont réappropriés en offrant tout ce qu’ils avaient de meilleur.

Lillah ya Djazaïr ! D’autres chanteurs et d’autres artistes dans le cinéma et le théâtre ont emprunté cette voie. Saliha, Nora, Ahmed Wahbi, Hacène El Annabi, Khélifi Ahmed, Hacène El Hassani, Mahiedine Bachtarzi et Boualem Titiche, pour ne citer que quelques uns, ont glorifié l’indépendance, chacun selon ses propres fibres, dans des contextes plus ou moins différents, mais toujours avec le même enthousiasme vivifiant. Plus tard, Khaled est arrivé à se frayer un chemin

vers la lumière du jour, en faisant briller les plus beaux bijoux du Raï. La complainte bédouine et la mélodie oranaise ont scintillé de mille feux au beau milieu des années 80, illuminées par la voix ensoleillée de l’enfant d’Eckmühl. Loin d’être considéré comme un chanteur engagé, Khaled a toujours fait acte de présence lors des célébrations nationales. En dix ans, durant lesquels il avait augmenté de volume, artistiquement parlant, en côtoyant Safy Boutella et Jean-Jacques Goldman, le roi du Raï a réussi à atteindre le niveau d’une vedette internationale confirmée. Sa notoriété est désormais établie à Beyrouth, au Caire, à Marseille et à Marrakech, et son amour pour Bakhta et Aïcha dessiné par une florale d’accents, du Liban au Maroc. Ensuite, son attachement à son pays a fini par faire tomber tous les préjugés cultivés au sujet d’un genre musical « dévergondé », aux yeux de beaucoup, en donnant naissance à une des plus belles chansons dédiées à l’Algérie. « Lillah ya Djazaïr », un texte dense et limpide, composé par Lotfi Bouchenak, le plus algérien des Tunisiens, et chanté par le King lui-même, mit du baume à des millions de cœurs meurtris, et propulsa Khaled au sommet des hit-parades pour une très longue durée. De l’avis de nombreux mélomanes, le clip « Lillah ya Djazaïr » constitue un concentré d’amour pour l’Algérie qui ne sera jamais démodé. A vrai dire, ce n’est pas la première fois qu’un troubadour du Raï convertisse son art en une profession de foi patriotique. Un enregistrement partagé sur les réseaux sociaux nous rappelle que l’énigmatique Cheikha Djenia avait eu, elle aussi, l’insigne courage de s’opposer frontalement au terrorisme, dans une de ses chansons. Toujours au registre du Raï, Nasro avait essayé, à sa manière, d’exorciser les vieux démons, en implorant le ciel de protéger l’Algérie.

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Ya Er rayeh !

En un mot comme en mille, la beauté de l’Algérie a été exaltée par un nombre incalculable d’artistes dans tous les domaines, même si la chanson s’est accaparée de la part du lion, grâce à son ancrage populaire prononcé. De Blaoui Houari à Beggar Hadda, et d’Akli Yiahiaten à Souad Massi, en passant par Hocine Lasnami, Amazigh Kateb et Cheb Akil, chacun de ces chanteurs a essayé d’exprimer ses attaches à ce pays comme il les ressentait, et suivant sa vocation artistique et culturelle. En 53 ans, l’Algérie a été fêtée en paroles et en musique par des générations de compositeurs et d’interprètes dont certains ont pu accéder au statut d’immortels à l’image de Dahmane El Harrachi et Ouarda El Djazaïria. Même les chanteurs qui ont opté pour le « coup de gueule » et la contestation, à l’instar de Matoub Lounes, la troupe Debza ou Nezzar Nouari, lui ont rendu hommage.

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En dépit des vexations ressenties par les uns et les trajectoires contrariés des autres, l’amour, l’espoir et la vie dans un pays réconforté sont demeurés des valeurs sûres partagées par la majorité des chanteurs algériens.

En vérité, rares sont ceux ou celles qui ont été touchés par le déracinement l’aliénation culturels. Rachid Ksentini, El Bar Amar, Idir, Horria Aïchi, Rachid Taha et tant d’autres ont été suffisamment nourris aux sources de l’algérianité pour ne pas succomber à l’appel des sirènes d’une intégration hexagonale réfléchie et mise en œuvre par les tenants du jacobinisme. L’Algérie est demeurée profondément enracinée dans le cœur et l’esprit de ces artistes au talent reconnu. Ce sentiment d’appartenance à la patrie n’est certainement pas unique au monde. Il est partagé par d’autres peuples et d’autres artistes qui ont chanté et aimé des terres considérées par eux comme des parcelles de paradis. Il est toutefois singulier dans sa dimension émotionnelle. Car, aimer l’Algérie est aujourd’hui une griffe et un label revendiqués par une jeunesse qui ne reprend pas seulement à son compte une vieille ovation qui provoque toujours la même émotion, mais qui innove. Si 1,2,3, viva l’Algérie inspire encore les artistes et le show-biz, c’est grâce à l’engouement porté par cette jeunesse. Le « tube » est vécu avec une intensité pareille à celle qu’il avait, il y’ a 33 ans. Les temps changent, mais le ton demeure dans le plus pur style d’une société aux traditions orales bien ancrées. En interprétant magistralement Ya Er rayeh, Dahmane El Harrachi a résumé parfaitement l’irrésistible appel de la patrie qui transcende toutes les structurations sociales, culturelles et politiques. Au lendemain de I’Indépendance, des icônes de la chanson algérienne s’étaient attelés et ont réussi à traduire les sentiments partagés par l’ensemble des Algériens. Vingt ans plus tard, la génération des vingt ans, plus ou moins marquée par l’esprit conquérant des ainés, mais mieux adaptée aux effets de l’indépendance et de la liberté, renverse la vapeur. Désormais, c’est beaucoup plus la foule qui inspire les chanteurs. Depuis, l’influence entre les chanteurs et la société navigue dans les deux sens M. M.


Nostalgie UN ÉTÉ 62

Ahl El Djazaïr Cela remonte à très loin et à réécouter ces chansons patriotiques qui passaient en boucle à la radio, une vague infinie de nostalgie m’envahit. Comment oublier ces journées brûlantes de juillet 62 où l’oreille collée au «TSF» familial ou à ce qu’on appelait « transistor », radio portative que le grand frère baladait à la place de «la Brèche», vécues dans l’ambiance des chants patriotiques ?

Par Alioua Bouchoua

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l y en avait de tous les genres, du chaâbi pur avec El Hadj El Anka qui délaissa le temps du devoir sa grande satire sociale pour consacrer à l’Algérie une superbe production «El Hamdoulillah, mabkache istîmar fi bledna», à la variété qui s’y mit avec Abderrahmane Aziz avec « Ya Mohamed mabrouk alik» (celle-là qui repassera trente ans plus tard quand Mohamed Boudiaf reviendra de son exil), en passant par d’autres chansons qui résonnent encore dans la tête comme les cloches d’un passé à la fois lointain et intact…Je me souviens de ce foisonnement de chansons interprétées par d’illustres inconnus qui luiront le temps d’un succès repris par toutes les générations, avant de disparaitre définitivement. Les sexagénaires se rappellent

de « Ahl el djazaïr», « nar ya istîmar» à la célèbre « Watan el akbar» interprétée par une pléiade d’artistes égyptiens dont Abdelhalim Hafez, Chadia, Nadjat Essaghira. Un chef-d’œuvre composé par Mohamed Abdelwahab que la télévision a la bonne idée de transmettre à chaque fois qu’il y a massacre à Ghaza, c’est-à-dire plusieurs fois…Pour dire que cet été est resté gravé dans la mémoire. Pour sa luminosité, pour sa solidarité, pour tout l’espoir qu’il charria auprès de la population. Du haut de mes dix ans, je m’accrochais aux bennes des camions Berliet pour crier l’indépendance retrouvée et du côté de l’ordinaire, il n’y avait aucun souci à se faire : les trottoirs et les seuils des maisons regorgeaient de plats de couscous posés à même le sol et en libre service! A la tombée de la nuit

et sur injonction de mon père, je rentrais la mort dans l’âme laissant la place de la Brèche s’illuminer de mille feux et ça dansait jusqu’à l’aube. Aujourd’hui avec le recul et l’âge qui a fait son œuvre, je crois bien qu’en ces journées lumineuses de ce juillet 62, nous avions entrevu l’Algérie telle qu’elle était rêvée, avec sa paix et sa quiétude revenues, le gigantesque élan de solidarité qui s’instaura au sein de la population, la joie de vivre retrouvée et surtout le goût de l’effort parce qu’il faut rappeler que l’année 1963 sera marquée par une récolte record de céréales. Du jamais vu. Ahl El Djazaïr avaient au prix du sang, récupéré leur pays. A. B. 11


Hommage MIRIAM MAKEBA, LA VOIX DE LA RÉVOLUTION

Ana hourra fi El Djazaïr Par Ikram Ghioua

Sa vie a été une lutte continue contre l’injustice et le despotisme. Son combat ne plaisait pas beaucoup aux producteurs, mais son talent les a forcés à l’accepter. Anticonformiste jusqu’aux bouts des ongles, elle se marie en 1969 avec Stokely Carmichael, le chef des Black panthers. Cette liaison lui coûte son séjour aux EtatsUnis. Durant la même période, elle accède au statut de citoyenne d’honneur dans dix pays africains dont l’Algérie. Elle a été proclamée algérienne par Houari Boumediene. 12


naire des Pays-Bas et de Grande Bretagne exerçait une domination sauvage sur des millions d’êtres humains parqués comme des animaux dans des bantoustans sans droit, elle a retrouvé en Algérie la terre d’asile « promise » à tous les opprimés de la terre.

L’exil en trois décennies

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lle a chanté la douleur et l’insoumission. Elle a jubilé l’amour et la gloire. Elle n’a pas seulement transcendé les siens, mais elle a réussi à emporter par sa puissance vocale et la force de son art, des milliers de fans vers le sens de la liberté. Elle est forcement et sans aucun doute la beauté du rythme Africain. Elle, c’est la voix de la révolution, de la vérité et une expression artistique du démantèlement de l’apartheid. Elle c’est Miriam Makeba, l’ambassadrice du rêve Africain, de la justice et de la bonne volonté. La voix de la chanteuse sud-africaine disparue le 9 novembre 2008 à l’âge de 76 ans n’arrive peut-être plus à se faire entendre au beau milieu de cette formidable fusion de rythmes et de sonorités, mais elle continue de réveiller la nostalgie de toute une génération d’Algériens qui ont écouté ses chansons ou assisté à ses galas organisés à Alger depuis le festival panafricain de 1969.

Un amour africain

En se produisant à Alger, elle n’a fait que suivre à la trace son héro, Nelson Mandela, le leader et le symbole, qui avait effectué un « pèlerinage » en terre algérienne dès 1963. Son passage en Algérie dans une conjoncture marquée par la lutte anti-impérialiste est resté gravé dans les mémoires. Elle l’a signé d’une fort belle manière, en laissant son âme crier : « ana hourra fi El Djazaïr » alors qu’elle exécutait son légendaire tube Ifriqiya, Afrique, Africa, intitulé en trois langues. Une déclaration d’amour dédiée à l’Afrique que Miriam Makeba avait partagée avec la mythique chorale de l’ex-RTA, Radio télévision algériennes, lors d’un magnifique tour de chant en Anglais, en Arabe et en Français. Privée de ses droits les plus fondamentaux dans un pays où une oligarchie financière origi-

Zenzi, comme on aime l’appeler, est née le 4 mars 1932 à Johannesburg. A 20 ans, elle commence à user de sa voix. De condition sociale assez modeste, elle est obligée d’élever seule sa fille tout en prenant soin de sa mère. Les affres de la vie, l’injustice et la ségrégation raciale ont fini par éveiller sa conscience politique. Après Cuban Brothers, elle devient choriste du groupe Manhattan Brothers, avec un nouveau nom de scène, Miriam. Son métier lui permet de dénoncer le régime de l’apartheid. En 1956, avec son tube « Pata, Pata », qui signera son plus grand succès, elle fera le tour du monde entier. Son engagement contre ce régime impérialiste et de son apparition dans le film anti-apartheid Come Back, Africa du cinéaste américain Lionel Rogosin, lui sera fatale, puisqu’elle est forcée à un exil de longue durée. Elle est même empêchée d’assister, en 1960, aux obsèques de sa propre mère. Son retour dans son pays natal n’interviendra qu’après la libération de Nelson Mandela, dont elle avait épousé la cause pour militer à sa façon en chantant en zoulou, en xhosa, en tswana, en swahili et en arabe, Ana hourra fi El Djazaïr à l’occasion des Jeux africains de 1978. Depuis ce pays qui avait connu les affres de l’occupation et qu’elle considérait comme le sien, ses mélodies qui expriment la tolérance et la paix ont été diffusées sans la moindre contrainte, comme elle ce fut le cas aux États-Unis, en Guinée ou même en Europe. Ses chansons traduisaient la dignité d’un peuple par lesquelles elle devient le symbole de la lutte anti-apartheid. Avant de mettre fin a sa carrière en 2005, elle publie son autobiographie Makeba « My Story ». La diva rêvait d’une grande Afrique unie, en faisant appel au pardon. Elle est à l’origine de l’expression, « Il faut nous laisser grandir. Les Noirs et les Blancs doivent apprendre à se connaître, à vivre ensemble ». C’est en Italie, et à l’âge de 76 ans ; un certain 9 novembre 2008, que la voix de la révolution s’est éteinte, laissant derrière elle un combat légendaire I. G.

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Légende DE AMAR EZZAHI À AMAZIGH KATEB

Une alchimie sonore pour des miracles plein les oreilles Loin de proscrire la pensée, le silence en est l’acte de naissance, sa germination profonde. Il en est son recueillement, son fiat (le Soit). Verbe antérieur à la parole et creuset du chant, la matrice de toute création artistique et la condition de son apparaître au monde.

Par Dj. Belkadi

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Le retrait du grand maître du chaâbi, Amar Ezzahi, de la scène médiatique artistique et culturelle nationale à, incontestablement, fait de lui cet homme sage et humble à la générosité légendaire et grandement respecté, non seulement dans le microcosme du chaâbi mais également dans l’imaginaire de toute la société algérienne. Icône incontournable de ce patrimoine ancestral que constitue le chaâbi, en tant que chanson, musique, mais surtout, en tant que mode et art de vivre, avec ses codes, sa ritualité, ses modes, son parler, ses ambiances et sa convivialité, Amar Ezzahi a su préserver l’âme de cet art et son authenticité, ceci tout en prolongeant la noblesse de cet héritage en lui assurant un renouveau esthétique certain chez la jeunesse d’aujourd’hui. Refusant la gloire et le faisceau des projecteurs, il reste pour ses fans et tous les algériens, un virtuose de la race des géants qui, avec son apport multidimensionnel, constitue un pilier monumental de l’identité nationale. Que n’a-t-il pas déterré et sorti de l’oubli ces

Photos Lamine Hamida

pièces rares du répertoire inépuisable du Melhoun, du Medh, des joyaux inédits, et ces textes poétiques fabuleux, des perles menacées d’ensevelissement ? Que n’a-t-il pas, aussi, avec les prouesses de sa voix mélodieuse, cristalline et envoutante par ses inflexions déroutantes, revisité le terroir pour en extraire cette alchimie saisissante et toute cette mystique riche d’allégories et de métaphores puisées dans les grands diwans d’anciens cheikhs, de bardes et de conteurs de tout le Maghreb, et même bien au-delà ? Que n’a-t-il pas, encore, avec une aisance et une maitrise magistrales dans son jeu de mandole, fait plier la fermeté des cordes par des improvisations audacieuses, des transpositions et des interversions sur des métriques musicales aussi inouïes et surprenantes qu’inattendues. Possédant le répertoire le plus étoffé de cet art populaire, Amar Ezzahi a savamment capitalisé


l’essentiel des savoirs de ses prédécesseurs. Plus que ses contemporains, il a su en tirer les meilleures séquences pour les réhabiliter sous un habillage esthétique, pédagogique et technique novateurs. Ce travail laborieux, à institué un courant et a fait école, réussissant malgré tous les clivages à restaurer cette filiation intergénérationnelle avec ses référents à une tradité trop souvent ébranlée par les soubresauts de l’histoire. Musique de la magie de l’instant, musique des humbles, le chaâbi est cet univers ou se traduit l’âme du peuple et ou se perpétue la tradition poétique orale du Grand Maghreb. Avec l’apport de Amar Ezzahi, cette musique, tout en préservant ses spécificités et son socle profond, s’est encore ouverte sur d’autres géographies et d’autres champs musicaux et esthétiques. Dans une étude pertinente consacrée au grand maître et chef de file du chaâbi, El Hadj M’hamed El Anka, le Cardinal comme le nommera le grand reporter Halim Mokdad, l’intellectuel et musicologue Bachir Hadj Ali expliquait que : « La musique chaâbi aide, a sa manière, à sauvegarder une dimension essentielle de la personnalité de notre peuple. Elle stimule des attitudes dynamiques. Elle est partie prenante de l’engagement culturel. Elle fertilise le sentiment patriotique ».

Un florilège Khaloui pour chatouiller les sens Et nous retrouvons intacte toute la magie de cet art, restituée avec sa beauté envoûtante et son raffinement esthétique par une nouvelle génération qui, dans sa ferveur d’ouverture au monde, reprend avec une extraordinaire fierté d’appartenance et beaucoup de dignité le répertoire chaâbi. Amazigh Kateb, fils d’un autre pilier de l’identité culturelle algérienne, Kateb Yacine, est de ces jeunes qui ont su puiser avec tact et mesure dans ce patrimoine incommensurable. Son père, l’auteur de Nedjma, l’avait déjà précédé en réalisant une incursion lumineuse dans l’univers artistique du chaâbi. Grâce à

l’entremise de Mohamed Zinet, l’auteur du célèbre long métrage Tahya Ya Didou, Kateb Yacine, au début des années 1970, obtient un entretien exceptionnel avec Le Phoenix, El Hadj M’hamed El Anka. Un enregistrement vidéo de cet entretien d’une durée de 49 minutes circule sur les réseaux sociaux, ainsi qu’une photo sur laquelle figure ces trois monuments de la culture algérienne. En revisitant les trésors du terroir, Amazigh Kateb réussira à déterré et à remettre au goût du jour le patrimoine musical Gnaoui, d’où d’ailleurs le nom de son premier groupe Gnawa Diffusion. Pour le bonheur d’une jeunesse qui l’a tout de suite adopté, il le chantera sur toutes les scènes aussi bien en Algérie qu’à travers le monde. Pour investir l’univers chaâbi, tout autant que le maître Amar Ezzahi, Amazigh, n’a trouvé mieux que de s’appuyer sur le même Bras (Joueur de banjo) de ce dernier. Effectivement, le grand P’tit Moh, de son vrai nom Mohamed Abdennour, a révolutionné la technique de jeu sur le Banjo et la Mandole algérienne, sans pour autant verser dans ce « chaâbi-twist » que fustigeait de son vivant l’illustre Mohamed El Badji. Par leur ouverture sobre et intelligente sur d’autres horizons musicaux, ces deux fieffés artistes, adulés et portés aux cimes par les jeunes d’aujourd’hui, démultiplient les expériences et tentent des fusions inspirées, explorant des pistes musicales tout à fait audacieuses, en préservant ce lien direct avec les coutumes et les valeurs sociales transmises à travers cet art qu’est le chaâbi. C’est dire enfin, qu’une tradition musicale ne peut se maintenir et survivre que par l’ouverture aux autres et par l’innovation constante. Pour conclure, nous reviendrons sur cette réponse du Cardinal à une question de Kateb Yacine : « tu n’es pas sans ignorer, cher ami, que chaque génération a son peuple et chaque peuple a son élément préféré. Les jeunes qui sont à pied d’œuvre aujourd’hui ont acquis la célébrité. Je remercie Dieu de m’avoir prêté vie afin que je constate de visu que l’art pour lequel j’ai tant donné a profité à ces jeunes » Dj. B.

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Valeurs Mémoire EL BOUDALI SAFIR

L’artisan émérite du premier projet culturel national « Dans un carrousel presque sans fin, se succèdent Touchia et Incirafate, H’waza et Aâroubiate, Q’çaïd et Khlassate. Cette véritable Halqa (séance) musicale, née de l’esprit d’El Anka, sera appelée Chaâbi, en 1946, par El Boudali Safir ».

Nour Eddine Saoudi Musicologue et interprète

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l Boudali Safir est né le 13 janvier 1908 à Saïda au sein d’une grande famille conservatrice, pieuse et lettrée. Il effectue une scolarité studieuse qui le mène jusqu’à l’école normale de Bouzaréah à Alger. II est ensuite admis au cycle supérieur à Saint Cloud en France où il décroche trois certificats de licence en lettres et un titre de professeur des écoles normales. Pour avoir été empêché de concourir pour l’agrégation des lettres et ce, pour des raisons purement discriminatoires, El Boudali décide en 1929 de s’installer à Mascara où il exerce en qualité de professeur de lettres à l’École primaire supérieure. II exercera les mêmes fonctions à Mostaganem et Tiaret avant d’être affecté d’office à Chlef en 1942 au sein d’un collège en tant que professeur de lettres arabes sous le gou-

vernement de Vichy. Ce sont tous ces espaces culturels et artistiques qui s’offrent à lui à travers tout le pays où il anime des conférences sur le patrimoine lyrique national d’une manière générale, se spécialisant dans ce domaine en aiguisant sa plume lors des tournées qu’effectuait Mahieddine Bachtarzi à travers l’Ouest algérien en collaboration avec le journaliste Mahmoud Benkritly au sein de l’Echo d’Oran, d’Oran Républicain et de la Voix des humbles. El Boudali est recruté au sein de Radio-Algérie à l’ORTF dès sa réorganisation en 1943 en qualité de directeur artistique des émissions en langues arabe et kabyle qu’il occupera d’une façon exemplaire jusqu’en 1957. Durant l’exercice de ses fonctions, il mettra sur pied cinq ensembles musicaux permanents.

On trouve également trace de sa participation dans de nombreux colloques; séminaires musicaux, notamment en Tunisie, au Maroc, en France ainsi que dans l’Organisation africaine de la radio et de la télévision. El Boudali se retire de la scène artistique en 1985 et quitte le pays en 1987 pour s’installer à Paris. II meurt le 4 juin 1999 à l’âge de 91 ans. Grâce à son immense travail les Algériens découvrent les genres musicaux du terroir dans toute leur diversité. Pour cela, il s’entourera des maîtres de chaque genre auxquels il insufflera une dynamique intellectuelle qui leur ouvrira de nouvelles perspectives artistiques. Aux dons de chercheur, il aura su allier celui de rassembleur, galvanisant toutes les énergies autour d’un véritable projet culturel national.


fondouk GROUPE IMZAD

Le culte

libéré Le passage du groupe Imzad à Constantine, un ensemble targui alliant les chants traditionnels aux instruments contemporains laissera sûrement une empreinte indélébile dans le cœur des Constantinois.

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a grande salle de spectacles Ahmed Bey se souviendra longtemps de leur belle prestation. Une fusion sonore impeccable accompagnée d’une noble poésie interprétée avec une prestance artistique inouïe. Des doigts qui filent des cordes qui mènent jusqu’au Hoggar ancestral. Et une tenue qui met en valeur l’allure et le jeu limpides du groupe. Nous avons été gâtés, ma parole. Imetawan, Ténéré et azamen ont transporté le public dans les airs de l’Ahaggar. C’était sublime et très professionnel. En fin de compte, même si ça va choquer quelques puristes, n’est-il pas temps de reconnaitre que l’introduction de la guitare électrique a

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libéré les sons de l’Imzad ? « L’Imzad est au Touareg ce que l’âme est au corps. La guitare est notre moyen d’expression » tels sont, d’ailleurs, le fondement culturel et l’image de marque d’un groupe de jeunes qui puise sa matière d’un territoire regroupant le Hoggar, le Tassili, Kidal et l’Adrar des Ifoghas en plus du Ténéré. Le groupe s’est chargé, en peu de temps, de démontrer musicalement que l’Imzad, l’instrument culte et sa tonalité d’origine n’ont pas été altérés par la modernité. Bien au contraire, cette sophistication des sons de l’Imzad, qui est loin de constituer une menace, a amplifié le métissage réussi entre le Tindi et le beat emprunté au reggae. Connu en Algérie

où il est apprécié pour la qualité de sa création musicale et la portée humaine de ses textes, Imzad est en train d’opérer aujourd’hui une percée fulgurante en Occident. S’inspirant intelligemment des sonorités produites par Tinariwen, le célèbre groupe touareg malien, crée en Algérie par des jeunes réfugiés, l’ensemble de Tamanrasset a su tirer profit du succès international enregistré par le groupe touareg malien, crée en 1982 en Algérie, en préservant l’instrument initial et en multipliant ses capacités sonores à travers une expression musicale moderne, considérée par les connaisseurs comme une copie conforme à l’original. I. G.


Rythmes HOMMAGE ÉMOUVANT À DRIASSA

« Ana Djazaïri »,

la voix de l’Algérie plurielle

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orsque le souffle de Ghardaïa caresse la sensibilité constantinoise ; quand la mélodie oranaise enlace la poésie de Bejaïa ; alors que le métissage musical de Béchar séduit le lyrisme algérois, et lorsque les Aurès sont fascinés par le tempo targui, c’est l’Algérie entière qui fredonne à l’unisson. Nacereddine Hora, Souad Asla, Dounia, Tin Hinane, Mouati El Hadj, Azzou, Rym Hakiki, le groupe Imzad, la troupe Jaouhara et la troupe Ithren sont tous venus à Constantine pour offrir un plateau de rêve aux amoureux de la belle musique et des beaux rythme. Ils sont venus « casser » la douleur et « briser » la monotonie d’un été constantinois étouffé par la canicule. Artistes talentueux et très inspirés, ils ont réussi à créer une ambiance du tonnerre, en chantant l’Algérie et l’amour de la patrie. Porteurs d’un message de paix et de tolérance, ces artistes se sont distingués par leur spontanéité, et les paroles de leurs chansons ont vite trouvé le chemin des cœurs et des esprits. Ils n’ont pas fait de discours. Ils ont déclaré et clamé leur amour en chantant et en dan-

sant ; en communiquant leur bonne humeur à un public aux anges, en présence d’un invité de marque, Rabah Driassa en l’occurrence. Ce dernier n’a pas d’ailleurs essayé de dissimuler son admiration devant la prestation des chanteurs, des choristes et de l’Orchestre national dirigé par le maestro Farid Ouameur. Des tours de chants magiques et un spectacle de grande classe que le public présent dans la grande salle Ahmed Bey ne va pas oublier de sitôt ! On a chanté l’amour, la conscience, l’histoire, la vie, le pardon et l’Algérie. Tous les chanteurs qui se sont succédé sur scène ont dégagé une énorme énergie et un grand engouement pour l’art qui forcent le respect. Ils ont choisi d’aimer, car ils ne savent pas haïr, de vivre car ils ne craignent pas la mort et de résister car ils ne connaissent pas la peur. Ils savaient que la puissance de leurs voix et l’authenticité de leurs paroles vont atteindre un public qui a saisi au vol le message de « Ana Djazaïri », une chanson culte et interprétée par tous les chanteurs à la gloire de l’Algérie plurielle et en hommage à Rabah Driassa ému jusqu’aux larmes. Ikram Ghioua

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SOUAD ASLA

Gracieuse et enchanteresse

Auteur compositeur et interprète, Souad Asla fait partie de cette nouvelle génération d’artistes issus du Sahara qui se sont engagés courageusement dans la préservation et la revalorisation du patrimoine musical et poétique propre à cette vaste région.

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our de nombreux algériens, elle ne constitue plus une révélation, mais la confirmation d’un talent immense mis au service de la tradition Gnawa, des us imposés par El Ferda et de la rituelle Hadra. Originaire de Béchar qui est un lieu de brassage de multiples influences afro-amazigh, elle est porteuse d’un style à travers lequel on décèle toute la panoplie des rythmes recrées par Alla le Foundou, le maitre incontesté du luth et Hasna, l’une des rares algériennes à « apprivoiser » la guitare électrique. Digne héritière d’un riche répertoire, cette « algérienne de l’Afrique », comme elle se définit elle-même, doit sa réussite dans la revitalisation et la mise à jour d’une production folklorique unique en son genre, à sa formation théâtrale. Et ça se voit dans ses expressions vocales et corporelles. Son passage remarqué sur la scène de la grande salle de spectacles Ahmed Bey a ébloui. Superbe avec son look au charme exotique prononcé ; généreuse dans son étalage d’énergie, Souad Asla a conquis la foule en moins de deux mouvements exécutés les pieds nus. L’échange entre elle et le public a eu lieu dans l’allégresse. Et pourtant, il n’y a pas si longtemps, elle doutait encore de ses capacités.

« Si ma musique continue de s’enrichir, si j’ai réussi ce métissage c’est grâce à la diva Hasna. Ma rencontre avec elle eut lieu à Paris, et c’est elle qui m’a motivé et encouragé à aller vers ma propre découverte. Je n’ai jamais cru en moi, l’essentiel était le théâtre, mais elle a tellement insisté, surtout après m’avoir écouté, que j’ai fini par me jeter dans le bain », reconnait-elle lors du petit entretien qu’elle nous a accordé. Sensible à tout ce qui touche à la condition humaine, elle n’hésite pas à interpréter les multiples tragédies africaines. « C’est très important, de se rappeler d’où on vient ; qui sommes nous, d’évoquer nos joies, mais aussi nos chagrins. C’est même une obligation et un devoir envers l’histoire. Je suis de ceux qui tiennent à leurs racines et à leur identité », nous confie-t-elle avec une spontanéité déroutante. Mais pour le moment, elle est concentrée sur un projet qui lui tient énormément à cœur : organiser en octobre prochain, un spectacle animé exclusivement par des femmes. « Je tiens à ce spectacle plus que tout, il faut imposer une relève c’est indispensable, pour notre identité et notre mémoire », rappelle-t-elle. Ikram Ghioua

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Rythmes AUX SOURCES DU HIP-HOP

Massari-Azzou : Deux genres du rap dynamique Massari de son vrai nom Sari Aboud, le rappeur canadien d’origine libanaise est un grand admirateur de Khaled le roi du Raï qu’il considère comme un artiste unique. Il ne l’a pas révélé dans les coulisses, mais en public, au beau milieu de la scène de la grande salle de spectacles Ahmed Bey, entre deux tours de chant magiques.

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on spectacle a été éblouissant de bout en bout, au grand ravissement d’un public qui sait surfer sur les vagues du Rap et du R&B. Mondialement connu à travers une dizaine de singles dont Smile for me, Be easy et Real love, le rappeur était aussi apprécié par les jeunes algériens. D’ailleurs, une partie du public a bien repris ses chansons. Très content de se produire en Algérie pour la seconde fois, il a tenu à l’exprimer de fort belle manière, en scandant One, two, three, viva l’Algérie, suscitant la joie du public. Impressionné par le parcours révolutionnaire de l’Algérie, il l’a vivement exprimé en portant le drapeau algérien sur les épaules. Pour lui, « l’Algérie est un exemple de combat dans le monde, un exemple à suivre». Il a apporté, non seulement un, mais des plus à cette soirée ou il accordera à ses fans, une exclusivité et une première en leur offrant en live un tube qu’il a enregistré en duo avec le Libanais Ragheb Alama. Il a su séduire en rendant hommage à Cheb Khaled qu’il considère comme son idole. Sa musique originale a fait le reste incitant le

public à prêter une oreille intéressée à ses textes engagés. Il n’est pas du genre à jouer sur les fantasmes. Lui, ce sont les blessures de Gaza et la souffrance des Libanais qui le préoccupent en premier lieu. Très sensible, portant un amour particulier à ses parents et à son pays, Il sait aussi exprimer sa révolte face à l’injustice. Tout le temps à la recherche du meilleur et de la qualité, il est demeuré luimême, simple et accessible à son public. « J’ai une grande responsabilité envers mon public et je n’ai pas le droit de le décevoir ». Sa relation avec le public respire l’amitié et la sincérité accompagnées de roses offertes à un groupe d’admiratrices. Inoubliable soirée inaugurée par Azzou, un Algérien à l’immense talent qui monte dans le milieu du Rap. Azzou n’a jamais revendiqué le titre d’enfant terrible du Rap algérien, mais il ne se prive pas de créer des morceaux corrosifs. En même temps, il entretient des positions patriotiques quand il s’agit des grands défis que rencontre l’Algérie. Il a chanté en l’honneur de l’ANP avec conviction et assurance. Il a chanté Ghardaïa. Il a été très professionnel. Ikram Ghioua


NAÏMA DZIRIA

Photo Lamine Hamida

El Maqnine ezzine survole les youyous

Ahellil, la magie des ancètres

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e public constantinois ne s’est pas trompé en prenant d’assaut la grande salle de spectacles Ahmed Bey, le 13 juillet dernier. On était loin du record d’affluence, mais les centaines de personnes qui ont assisté à la soirée musicale animée par une troupe venue de Timimoun et dédiée à Ahellil, ont été ravies de faire la connaissance avec un genre musical qu’ils découvrent, du moins en ce qui concerne beaucoup d’entre eux, pour la première fois. Ce fut une ambiance de fête au rythme d’un chant mondialement connu que la troupe de Timimoun a recréée à l’intention d’un public « ramadhanesque » composé de familles et de jeunes qui commence à s’intéresser au Sahara et à tout ce qui provient de ces lointaines contrée mystérieuses et mystiques. Puisant son verbe et ses sonorités d’un patrimoine amazigh et arabe où l’on détecte aussi quelques influences africaines, Ahellil subjugue et fascine grâce à son tempo saccadé et ses voix qui savent transformer le tumulte en une musique vocale pleine de vibrations.

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Répertorié et classé au patrimoine immatériel mondial depuis 2005, grâce aux efforts soutenus de nombreux musiciens et chercheurs en musicologie, Ahellil constitue aujourd’hui une richesse culturelle précieuse que les Algériens sont en devoir de protéger et de préserver, en exploitant intelligemment les opportunités qu’offre actuellement la technologie. Il est à noter que dans ce domaine, une prise de conscience est en train de naître parmi les universitaires et une partie d’un public avisé. Que ce soit pour le spirituel ou pour le romantisme, Ahellil possède un répertoire inépuisable en paroles et en tonalités que les artistes peuvent consulter et s’y inspirer. Invité à découvrir ce genre musical, le public constantinois a été à la hauteur de sa réputation de grand connaisseur. Il a apprécié le jeu de la chorale et le lyrisme émanant de ses complaintes « majeures ». Ikram Ghioua

aïma Dziria, une des meilleures voix féminines, les plus inventives et les plus percutantes de sa génération, a animé, à quelques jours de l’Aïd, une soirée abritée par la grande salle de spectacles Ahmed Bey. Raffinée jusqu’au bout des ongles, elle n’a pas fait moins que d’offrir un plateau de choix à un public connaisseur qui n’a pas manqué, à son tour, de rendre la politesse à cette artiste accomplie. Elle a été longuement applaudie ; ses mélodies ont eu leur part de youyous et ses rythmes ont fait danser. Elle a été tout simplement fabuleuse ! Il faut reconnaitre que son coup de cœur a porté. Les spectateurs ont partagé avec elle des moments inoubliables. El maqnine ezzine, chanté de la manière la plus rustique et la plus austère par Mohamed El Badji, taillé comme un diamant par Guerouabi et rafraichi par Amar Zahi, est repris majestueusement par une chanteuse au large registre vocal. Cette chanson culte qui a permis à la musique chaâbi de pénétrer des territoires insoupçonnables opte pour un parfum féminin nommé Naïma Dziria. Cette chanson que seuls les ténors du Chaâbi ont pu maîtriser est passée au mode « Elle » avec une belle réussite. Artiste de tempérament paisible, Naïma a toujours réussi ses passages avec brio, lors des galas qu’elle a animés depuis le début de sa carrière. A Constantine, son 21 tour de chant a enchanté. I. G.


Rythmes FESTIVAL DE LA MUSIQUE ANDALOUSE

Constantine s’empare du podium

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Photos Walid Hamida

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e musicien Mohamed-Cherif Nasri et son ensemble ont remporté le 1er prix de la 9ème édition du Festival national du malouf qui vient de se dérouler du 24 au 28 juillet dernier. Le second prix a été décroché par l’association Maqam quant au 3ème prix, il a été décerné à la troupe d’Amine Chanti. Les trois formations constantinoises vont représenter la ville des Ponts et l’Algérie au prochain Festival international du malouf du mois d’octobre. Concernant les distinctions individuelles, Hamza Benkadri a été élu meilleure voix masculine, alors que Zakia Benhacine, Sabrina et Chahra Bestandji ont été sélectionnées au titre des meilleures voix féminines. Le festival a été marqué par le vibrant hommage rendu à titre posthume à des ténors du malouf constantinois, à l’instar de Tahar Benkartoussa, Larbi Belamri, Abdelkader Toumi, Omar Chakleb et Mostéfa Bachkhaznadji. associé exceptionnellement à la manifestation Constantine, capitale de la culture arabe 2015, le festival a vu la participation d’une dizaine de formations provenant de Skikda, Mila, Tlemcen, Sétif et Souk-Ahras. I. G.


MOUACHAHATE ASWAT A LA NOUBA

Le savoir au service de la musique

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Alep au premier maqam Photo Walid Hamida

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a y’est, c’est fait. La troupe Chouyoukh salatine Al arab a réussi magistralement son baptême constantinois, dans une ambiance chaleureuse et conviviale. Originaire d’Alep, l’ensemble qui s’est déjà taillé une réputation à la mesure de son art à travers les pays du Moyen-Orient s’est produit auparavant à Alger, et y a laissé une très bonne impression. Auteurs d’un parcours riche orienté vers la récupération et la promotion du patrimoine musical arabe, les Syriens sont considérés aujourd’hui comme les meilleurs interprètes des mouachahate. Et c’est en cette qualité, incontestable d’ailleurs, qu’ils se sont produits à Constantine dans le cadre d’une manifestation dédiée à la Nouba, organisé par le département du patrimoine immatériel et des arts vivants, dépendant du commissariat chargé de la manifestation Constantine, capitale de la culture arabe 2015. Dommage que le public n’est pas venu nombreux, car le spectacle valait vraiment la peine. Ceux qui

y ont assisté ont été fascinés, emportés par les voix célestes d’un quatuor en or massif et la musique « distillée » par un orchestre inspiré. Il y’ avait de l’émotion dans l’air et les Constantinois n’ont pas manqué d’exprimer leur joie, et en même temps leur solidarité à l’endroit d’un pays meurtri, qui refuse de se laisser abattre. Chouyoukh salatine Al arab leur ont offert gracieusement une belle soirée omeyade. C’était beau, c’était fabuleux. Alep, cette cité millénaire où, selon une légende racontée en Syrie, un maqam avait été érigé à la gloire d’un passage du prophète Ibrahim, doit continuer à vivre et à espérer. C’est en quelque sorte, ce message que la troupe a transmis délicatement à une assistance ravie et pleine de reconnaissance. Touchés dans leur âme par une tragédie à grande échelle, les membres de la troupe Choyoukh salatine Al arab continuent d’exalter les charmes d’une patrie profondément enracinée dans l’histoire de l’humanité. M. M.

rganisées dans le cadre de l’exposition intitulée «Aswat à la Nouba » et sous l’égide du département du patrimoine immatériel et des arts vivants, dépendant du Commissariat chargé de la manifestation Constantine, capitale de la culture arabe 2015, les deux conférences assurées par Anas Ghrab, un universitaire tunisien et Manuela Cortès Garcia, une académicienne espagnole, n’ont pas manqué d’intérêt. Supervisées avec beaucoup de tact par un Abdallah Hammadi, érudit et très communicatif, les interventions des deux spécialistes en musicologie ainsi que le débat qui a vu la participation d’éminents chercheurs et de musiciens ont réussi à apporter un nouvel éclairage sur l’histoire de la musique en général. Le professeur tunisien, enseignant à l’université de Sousse et ancien directeur d’un centre spécialisé dans l’étude de la musique arabe et méditerranéenne, a fait un exposé à propos de l’influence de la civilisation gréco-romaine et son impact sur la culture arabe. Quant à l’universitaire espagnole, enseignante à l’université de Grenade, a mis en relief l’apport grandiose de la civilisation musulmane qui a permis à la musique andalouse d’atteindre les cimes de la perfection. Tout en notant l’absence d’archives, Manuela Cortès Garcia a appelé les spécialistes maghrébins et espagnols à plus de coopération dans le but de constituer une banque de données qui pourrait devenir un élément important dans la préservation de ce patrimoine qu’est la musique andalouse sous ses formes maghrébines. M. M.

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Expression ASSOCIATION EL BELLIRI

Une vie dans le théâtre L’appellation El Belliri désigne le narcisse qui est une fleur populaire, simple, humble, avec une senteur très agréable … « Les qualificatifs de cette fleur en font le symbole de l’âme qui anime notre troupe caractérisée par la popularité, la simplicité et la modestie» affirme Wahid, un des membres fondateurs de la troupe théâtrale portant le même patronyme. C’est Khaled Belhadj, un autre pionnier qui a eu l’idée de cette dénomination.

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uand on évoque le théâtre à Constantine, on pense tout de suite aux ténors du TRC qui nous ont fait rire aux éclats dans Rih samsar, Nas El houma ou Hada yjib hada. On se rappelle alors de Bouberioua Hacène, Benzerari Hacène, Hellal Antar et Zermani Allaoua. Et on ose même des rétrospectives pour parler du rôle joué par Redha Houhou et des contributions de l’actuel ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi.

Lorsqu’on cite le théâtre de Constantine, on déroule forcément le film de ses scènes et on finit indubitablement à une rencontre avec l’association El Belliri. Parler de cette association et de sa création, c’est dévoiler le vécu d’un groupe exceptionnel né du croisement de quatre destins « dévorés » par l’amour du théâtre. Tout a commencé au début des années 1980, quand le sort a ramassé Achour Wahid, Hamza Mohamed Foudil dit Hamoudi, Hichem Daoudi et Khaled Belhadj dans le même panier. A cette époque, Achour Wahid, à peine âgé de 13ans, mais possédant déjà quelques connaissances sur le jeu théâtral, était 24 considéré par ses amis et son entourage comme un jeune comédien talentueux.

Ainsi apprécié, il est alors sollicité par un de ses amis, qui n’est autre qu’un certain Hamza Mohamed Foudil, plus connu sous le prénom de Hamoudi, afin d’évaluer un « semblant » de scénario d’une pièce de théâtre, écrit par ce dernier. En réalité, Wahid fut surpris par ce qu’il venait de lire. Il nous déclare à ce propos : « Le soit disant semblant de scénario était en fait une production digne d’intérêt».

Le génie et la générosité Le duo fut par la suite rejoint par Daoudi Hichem, et à trois ils apportèrent quelques modifications et quelques arrangements au texte proposé, ce qui a permis la création d’une représentation intitulée Al liqaa, (les retrouvailles). L’aboutissement de ce travail collectif est à l’origine de la naissance d’El Belliri. Quelques mois après la réussite phénoménale d’Al liqaa, un certain Khaled Belhadj, qui venait de rentrer de France avec un bagage artistique assez riche, (ayant fait du

théâtre professionnel au conservatoire de Lille), a été « accroché » par le génie, la générosité dans le jeu, la facilité à monter une pièce, mais aussi comment gérer les obstacles. C’était ce que Khaled n’avait pas trouvé ailleurs. Ce dernier, de par sa compétence et son expérience, constituait le maillon qui manquait à la troupe. Son intégration a renforcé davantage l’homogénéité de l’équipe. A quatre, il fallait bien trouver un endroit décent pour pouvoir répéter, ils se sont alors approchés de Salim Merabia, directeur du Théâtre régional de Constantine de l’époque qui a mis à leur disposition un local pour abriter les activités de la troupe qui portera désormais le nom de « Masrah El-Madrassa » ou « Théâtre-école » dont l’objectif était de former de jeunes comédiens pour assurer la relève. Le temps passe et les activités du théâtre-école se multiplient et les disciples formés qui disposaient d’un niveau appréciable faisaient l’objet d’une forte demande des différents théâtres du pays. Pour assurer à ces jeunes, formés sur le tas, un statut digne leur permettant d’exercer dans un cadre organisé, une association venait de naître.

Ranida-Yasmine Meraz


LA SYMPHONIE DE CONSTANTINE

Une poésie qui dévoile les autres facettes du Rocher L’association «El Belliri» a présenté, le soir du 8 juillet au TRC, la générale de sa pièce « La symphonie de Constantine », une production mise en scène par Wahid Achour et écrite par Chafika Loussif dans le cadre de Constantine Capitale de la Culture Arabe.

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a pièce transforme les planches en un musée, mais un musée pas comme les autres, puisque ses objets sont animés et vivants. Ils nous font visiter les ruelles de la ville d’antan, ses anciennes habitudes et nous content, avec un accent bien constantinois, ses vieilles histoires d’amour, de trahison, de haine, de bravoure, de courage et bien d’autres aussi intéressantes, le tout accompagné d’un chant de Aissaoua. Cette production a pour but de faire revivre l’antique Cirta et dévoiler, ou plutôt rappeler, les faces oubliées de la ville. «Constantine ne se limite pas au malouf et aux ponts, mais elle est bien plus que çà, c’est le message que je tiens à véhiculer à travers cette pièce» nous déclare Wahid. Par ailleurs, le réalisateur nous fait part des difficultés rencontrées lors de la mise en scène de cette symphonie dédiée à la Ville, et la difficulté principale était de pouvoir adapter le texte à une pièce théâtrale, vu qu’au début c’était un poème destiné à un monologue. « Il n’était pas facile de faire passer d’un style narratif à un autre dramatique et transformer un monologue en une pièce in-

terprétée par pas moins de 11 comédiens », ajoute notre interlocuteur. Le spectacle a été joué durant trois soirées successives, et à dire vrai, les planches du TRC n’ont pas connu un tel show depuis l’inauguration du programme du département Théâtre de la manifestation. La salle était comble à chaque représentation et le torrent d’applaudissement en disait long sur l’appréciation du public. Enfin, le réalisateur précise: «L’ensemble des acteurs sont des disciples d’El Belliri et 7 d’entre eux assument pour la première fois un rôle devant un public. Nous citerons à titre d’exemple les jeunes Naziha Filali et Mohamed Ayoub, âgés d’à peine 11ans et 14ans ». Un autre succès s’ajoute au parcours d’El Belliri, et une fois de plus l’association réussit haut la main sa mission d’honorer la ville. Et en attendant que les efforts de Wahid et sa troupe soient honorablement reconnus, nous espérons de notre coté que l’association sera de plus en plus sollicitée et impliquée dans les activités artistiques, notamment théâtrales, de la ville vu le plus qu’elle pourra apporter.

R-Y.M

Tableau de bord Depuis sa naissance, El Belliri a crée ou adapté une trentaine de pièces théâtrales. Nous citerons entre plusieurs travaux, El Morstane en 1996, Cirta ma maison en 1998, Des artistes mais... également en 1998, Bourzima en 1999, Sanhadji en 2000, Djouha en 2007, la liste est encore longue Tabib en 2013 et La symphonie de Constantine produite et mise en scène dans le cadre de Constantine Capitale de la Culture Arabe 2015 . L’association capitalise aujourd’hui une bonne expérience scénique et enregistre plus d’une dizaine de distinctions à son tableau de bord. Ces prix ont récompensé la meilleure mise en scène, le meilleur spectacle, la meilleure interprétation, le meilleur monologue ou encore la meilleure pantomime. La notoriété de l’association vient d’être traduite par une participation au Festival international expérimental d’Egypte et au Festival international de Carthage.

Al Liqaa La pièce traite de l’histoire de trois amis qui, emportés par les préoccupations de la vie, se sont perdus de vue. Le premier était garçon de café « Qahwadji », le second, journaliste et le troisième, sans emploi. Après des années de séparation, ils ont fini par se retrouver et se mettre à raconter chacun ce qui lui est arrivé durant la période de rupture. La pièce a connu un franc succès auprès du public qui a apprécié la mise en scène de sujets d’actualité de grande teneur, notamment la situation politique et sécuritaire du pays durant 25 les années 90.


Invitation TIMIMOUN

L’oasis rouge telle que Boudjedra ne l’a pas racontée Si Malek Haddad a encensé Constantine dans plusieurs de ses œuvres, et si Mohamed Dib a réussi à immortaliser La grande maison à travers un décor tlemcénien en noir et blanc, Il a fallu que Timimoun attende Rachid Boudjedra pour que son nom soit enfin répertorié sur le registre de la littérature majeure. Par Ikram Ghioua

P

eut-on vraiment décrire une ville où la magie a épousé la nature ? Si Mouloud Mammeri était encore parmi nous, il aurait sans doute répondu à cette question, lui a connu et aimé Timimoun. Mais qui oserait transcrire en mots la beauté de cette cité enlacée par les dunes ? Qui pourrait parler de cette contrée du Gourara et de cette terre nourricière irriguée par les Foggaras millénaires, et bénie par la clémence divine, sans ressentir cette crainte de ne pas trouver les termes appropriés à la beauté d’un site séculaire sculpté par des mains savantes et habiles, et habité par des âmes vastes et chastes qui ne connaissent aucune limite à la bonté ? Rachid Boudjedra a tenté l’expérience, en entreprenant un long voyage dans une extravagance nommée Timimoun. Il s’en est sorti indemne grâce à son savoir illimité

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en narration rétrospective et en diagonal. Mais, est-ce qu’il a tout dit ? Absolument pas ! Des bribes et des monceaux de destins enchevêtrés. Et le reste ; tout le reste. Il reste à découvrir, car l’Oasis rouge et ses ksour clairsemés dans l’erg sont un véritable musée à ciel ouvert, sauf qu’entre le Tinerkouk et Ouled Saïd, des milliers de vies cultivent la vie et animent ce musée, en perpétuant des traditions et des modes

Photos Lamine Hamida


de penser puisés d’un riche fonds culturel. Située entre le Grand erg occidental, au nord, et le plateau du Tademaït, au sud, Timimoun donne l’impression de fuir la modernité. Ce n’est qu’une allusion. La ville a relativement préservé son calme, sa quiétude et sa beauté saharienne. Elle change, mais garde toujours la même couleur ocre qui va si bien à Bab Essoudane, la Porte du Soudan, situé aujourd’hui au cœur de la ville, cet arc construit dans un style soudanais ouvrait autrefois le passage aux caravanes vers le grand Sahel que certains continuent d’appeler le Soudan.

Ahellil, le chant langoureux des temps lointains Qui osera raconter Timimoun l’ensorceleuse et son mystérieux charme qui a fait succomber Perez de Cuellar, alors secrétaire général des Nations-Unies, et Chadli Bendjedid, alors président de la République algérienne ? On va oser, rien que pour le

geste, en effleurant son argile rouge, ses pailles et ses troncs de palmiers. Quand à sa splendeur, elle se déguste sur place et en grandeur nature. Timimoun est une ville qui sait séduire et elle le fait avec un art consommé. Sa Casbah, son vieux port asséché surplombant un fleuve fossilisé et ses lopins de terre verdoyants la dotent d’un panorama unique en son genre. Quand la nuit s’installe et lorsque Ahellil, ce chant mystique ramené du fond des âges, amplit le ciel, Timimoun se pare de ses plus beaux habits et part en transe dans un mouvement de foule fascinant, à la gloire du prophète Mohamed, et à l’occasion du « Sbou », le septième jour du Mouloud. C’est en ces moments qu’elle dévoile aux visiteurs son patrimoine culturel aux origines diverses. A Timimoun, la culture amazighe et l’arabité portée par un Islam ouvert et humain font bon ménage et se complètent pour imprimer à la ville son cachet si particulier. A Timimoun, les louanges à Allah se mêlent facilement aux palabres zénètes sans que cela ne fasse l’objet d’un quelconque procès. A Timimoun, tous les éléments du sentiment national émancipé sont réunis. C’est peut-être pour cette raison que Rachid Boudjedra a jeté son dévolu sur cette parcelle algérienne chère à Aïcha Labgaâ, la diva locale. I. G.

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à l’affiche AGENCE ALGÉRIENNE POUR LE RAYONNEMENT CULTUREL

Du cinéma en plein air à travers 35 villes

L’Agence Algérienne pour le Rayonnement Culturel (AARC), en partenariat avec l’Établissement national de télévision (ENTV) et l’Entreprise nationale de radiodiffusion sonore (ENRS), à entamer le 20 juillet dernier une série de projections en plein air dans le cadre de Ciné Madina et Ciné plage.

Ciné Madina animera simultanément plusieurs wilayas des régions Sud, Est et Ouest du pays, avec des séances cinéma étalées sur 4 jours et accessibles à tout public puisque l’initiative comprend des films d’animation, le documentaire Algérie vue du ciel de Yann Arthus Bertrand, Abdelkader, une réalisation de Salem Brahimi qui retrace l’histoire de l’émir Abdelkader, Harraga Blues et Parfums d’Alger seront également au programme. Les projections se feront en plein air, en centre-ville et débuteront à 21h 30. Les villes côtières ne manqueront pas à l’appel et auront également un programme spécifique durant le mois d’août avec cette fois des projections en bord de mer qui dureront 7 jours à raison d’un film par soir pour plusieurs villes. Avec pas moins de 35 wilayas concernées, l’AARC entend bien sillonner l’Algérie jusqu’au 6 septembre prochain.

26éme FESTIVAL INTERNATIONAL DE CINÉMA DE MARSEILLE

Le premier Prix pour « Dans ma tête un rond-point » Le réalisateur algérien Hassen Ferhani a décroché, début juillet, le premier Prix du 26éme Festival international de Cinéma de Marseille (France) pour son dernier film « Dans ma tête un rond-point ». Le jury de la 26éme édition du Festival a été séduit par cette plongée dans les abattoirs d’Alger, les plus vieux abattoirs d’Afrique encore en activité. Ce premier long métrage de Hassen Ferhani se déroule dans des lieux que les algérois croient connaître et que le réalisateur invite 28 à redécouvrir tout en s’intéressant

aux différents parcours et aspirations d’ouvriers qui vivent sur place. D’une durée de 100 mn, « Dans ma tête un rond-point », produit par la cinéaste algérienne Narimane Mari, a été présenté en avant première mondiale à Marseille. Hassen Ferhani a fait ses premiers pas dans le cinéma en réalisant un court métrage en 2006 « Les baies d’Alger », qui sera suivi en 2010 par « Afric hotel » coréalisé avec Nabil Djedouani. En 2013 il réalise le court métrage « Tarzan, Don Quichotte et nous ».

FESTIVAL DE DURBAN

Fadhma N’soumer de Belkacem Hadjadj en compétition Le long métrage de fiction « Fadhma N’soumer » du réalisateur Belkacem Hadjadj sera projeté en compétition officielle du 36e Festival international du film de Durban (DIFF), en Afrique du Sud. « Printemps tunisien » de la tunisienne Raja Amari et « Fièvres » du marocain Hicham Ayouch, entre autres, comptent parmi les films en compétition. Sorti en 2015, « Fadhma N’soumer » est consacré à Fadhma Si Ahmed Ouméziane, grande figure de la résistance populaire en Kabylie au début de la colonisation française de l’Algérie, ainsi qu’à Cherif Boubaghla, autre figure marquante et principal organisateur d’un mouvement insurrectionnel contre l’occupant au début du 19e siècle dans la même région. « Fadhma N’soumer » avait remporté en mars dernier l’Etalon d’argent de la Yennenga au 24e Festival panafricain du cinéma d’Ouagadougou (Burkina Faso) ainsi que les prix du meilleur scénario, du meilleur montage et du meilleur son.


FÊTE DU BIJOU TRADITIONNEL D’ATH YENNI

OFFICE NATIONAL DES DROITS D’AUTEUR ET DROITS VOISINS

Le bijou d’Ath Yenni, un art et une économie

Versement des droits pour nos auteurs et artistes

CONCERT DE TAKFARINAS FÊTE DE L’INDÉPENDANCE ET DE LA JEUNESSE

« Vive l’Algérie, vive la jeunesse » Le chanteur de renommée internationale et star de la musique algérienne d’expression Kabyle, Takfarinas, a animé le 5 juillet à Alger, un concert grandiose dans le cadre des festivités marquant le 53éme anniversaire de l’Indépendance et de la fête nationale de la jeunesse. Organisé par le ministère de la Jeunesse et des sports, ce méga concert tenu à l’esplanade Riadh El Feth, monument historique très évocateur, était un rendez-vous pour Takfarinas qui a retrouvé son public avec lequel il a célébré dans l’émotion la Fête nationale. Il s’est dit heureux de retrouver le public algérien en cette occasion marquant la célébration du double anniversaire de l’Indépendance et de la jeunesse, en scandant « Vive l’Algérie, vive la jeunesse ». Témoignant son respect à la mémoire des martyrs de la Révolution, Takfarinas dit qu’il était un « devoir moral » de marquer une minute de silence envers les symboles de la liberté.

Mise en place par le Comité communal des fêtes d’Ath Yanni, la traditionnelle fête du bijou d’Ath Yenni est de retour pour sa 12éme édition. Cette région de Tizi Ouzou organise, du 30 juillet au 7 août, une expo-vente autour de la joaillerie, activité ancestrale du village. Les festivités auront pour thème cette année « Le bijou d’Ath Yenni, un art et une économie » et regrouperont plusieurs artisans bijoutiers locaux venus de plusieurs wilayas d’Algérie mais aussi des artisans de métiers tels que la broderie, la tapisserie, la vannerie et la poterie. Ne se limitant pas à l’expo-vente de ses bijoux kabyles traditionnels, Ath Yenni prévoit aussi des conférences autour du bijou traditionnel et des émissions radiophoniques en direct avec la participation d’artisans bijoutiers.

Sous le haut patronage de son excellence Monsieur le Premier ministre Abdelmalek Sellal et sous l’égide de monsieur le Ministre de la Culture monsieur Azzedine Mihoubi, l’Office national des droits d’auteur et droits voisins (ONDA), à organisé le 15 juillet dernier, au niveau du salon d’honneur du Palais de la culture Moufdi Zakaria, une cérémonie de versement des droits au profit des auteurs, artistes et producteurs de phonogrammes et vidéogrammes nationaux. Pour les répartitions de droit de l’exercice 2014, l’ONDA a versé un montant global de 600 millions de dinars, soit 60 milliards de centimes, au profit de 3 127 titulaires de droit d’auteur et droit voisins, dont 357 millions de dinars au profit de 1767 auteurs d’œuvres, 156 millions de dinars au profit de 150 producteurs de phonogramme et de vidéogramme et 84 millions de dinars au profit de 1210 artistes interprètes. Le reliquat des répartitions de droits d’auteur au titre de la radiodiffusion des œuvres sera versé à partir du début du mois de septembre en raison de la transmission tardive des programmes radio.

CONSERVATION DU PATRIMOINE CULTUREL

L’Algérie va postuler au Prix d’architecture de la Fondation Aga Khan Le ministre de la Culture Mr Azzedine Mihoubi a reçu ce dimanche 19 juillet 2015, Mr Farrokh Derakhshni le directeur du Prix d’Architecture de la Fondation Aga Khan. Au cours de cette audience, les deux parties ont évoqué les opportunités de la coopération dans les domaines de la restauration et conservation du patrimoine culturel. Mr Farrokh Derakhshni a exposé les différentes actions que mène la fondation Aga

Khan à travers le monde, notamment celles relatives au Prix d’architecture auquel l’Algérie va postuler. Le Ministère de la Culture et la Fondation Aga Khan ont également convenu dans le cadre des échanges d’organiser les 5 et 6 décembre 2015 un Colloque international de haut niveau sur la conservation et le développement architectural ainsi qu’une exposition sur le Prix Aga Khan d’architecture.

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Patrimoine PRATIQUES LUDIQUES EN ALGÉRIE ET DANS LES PAYS DU MAGHREB ET DU SAHEL

Chercheurs et anthropologues lancent un projet de sauvegarde Pour la diversité et la richesse de son patrimoine culturel, tant matériel qu’immatériel, l’antique Cirta, la Cité du savoir, a eu l’insigne privilège d’accueillir un panel de chercheurs de haut niveau.

C

hargé par le ministère de la Culture de réunir régulièrement les chercheurs et les spécialistes pour la mise en œuvre d’une politique de préservation et de promotion du patrimoine culturel immatériel algérien, le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH) associé au département du patrimoine culturel immatériel et des arts vivants de la manifestation Constantine capitale de la culture arabe 2015, ont conjointement organisé deux journées d’étude, le 22 et 23 juillet derniers, sous l’intitulé thématique « Les jeux traditionnels en Algérie et dans les pays du Maghreb et du Sahel ». Ainsi, pour la diversité et la richesse de son patrimoine culturel, tant matériel qu’immatériel, l’antique Cirta, la Cité du savoir, a eu l’insigne privilège d’accueillir un panel de chercheurs de haut niveau, venus de Mauritanie, du Maroc et de Tunisie, pour entreprendre avec leurs collègues algériens le lancement d’un projet permettant la constitution de la bibliographie du patrimoine lu30 dique, depuis 1800 à nos jours, aussi bien en Algérie qu’au Maghreb.

Cette rencontre scientifique portait également sur la réalisation d’un thesaurus commun des jeux traditionnels en Algérie et au Maghreb. Ce glossaire commun, une fois constitué, servira d’outil méthodologique pour l’identification et la mise en inventaire des jeux dans les différents territoires du Grand Maghreb. Par ailleurs, cet instrument scientifique constituera également un support numérique interactif permettant la mise à jour régulière des inventaires et représentera une plateforme idéale pour l’intégration, au titre d’une réhabilitation répondant aux intentions stratégiques, de certains de ces jeux dans le système éducatif et dans les pratiques ludiques actuelles. Devant un parterre scientifique averti et engagé dans le processus de concrétisation de cette démarche, celle d’asseoir une méthodologie d’identification et de recensement de ces pratiques ludiques en vue de la constitution d’une banque de données commune, les anthropologues et chercheurs ont convenus dans leurs recommandations, la mise en place d’un groupe de chercheurs pour l’encadrement de ce projet.

A ce titre, Ahmed Hafdi, chercheur venu du Maroc et directeur de La revue des arts et de l’oralité, préconisera, lors de son intervention concernant l’élaboration d’une fiche unifiée de l’inventaire des jeux traditionnels, de centrer la réflexion sur l’interaction et l’interrelation de tous les acteurs (chercheurs, institutions, communautés, ONG….) impliqués dans la mise en œuvre du processus de sauvegarde du patrimoine ludique. Dj. B.


Rhythms AHELLIL

The fascinating Gourara singing

T

he big display hall Ahmed Bey was full packed with people of all ages, especially the young , on July the thirteenth, all come to enjoy listening to the singing of Gourara. A musical group came from Timimoun to give an evening performance of the singing of Gourara. The audience was greatly excited for the musical rhythm that was pretty new for many of them . The singing was running sweet on their ears and they listened to it with enthusiasm. The young people never heard of it before and were visibly amazed with the discovered wonder. Up to that moment, they were ignorant of the mere existence of such music and singing. They were more surprised to find out that that enjoyable music was from Sahara, the Algerian sahara. The Gourara singing was the first ‘’ product ‘’ they ever happened to see coming to them from the remote, mysterious and mysthical land called Sahara. As the performers were in full swing , the audience got in a festive mood and the social gathering became like a family party celebrating a great event in a lovely atmosphere. The audience enthusiasm was so

Photo Lamine Hamida

real and great that the happy evening was felt by all as a Ramadan feast. And it was all dedicated to Ahellil. The Gourara singing draws its lyrics and sonorities from an amazigh as well as and Arab heritage with some african imprints in it. Ahellil singing subjugates and fascinates due to its staccato tempo and voices that transform the commotion and hoo-ha into a vocal music full of vibrations. Ahellil has been itemized, listed onto The world immaterial heritage in 2005 thanks to sustained efforts made by musicians and researchers in musicology. Ahellil is today a precious cultural treasure Algerians ought to protect and preserve using the cutting edge technologies available to them. It is an inexhaustible source of words, lyrics, keys and tonalities for all the artists to draw their inspiration from. In the end, the cheerful upbeat was struck by the constantinian public who lived up to their good reputation to have besides an ear for music a witty musical mind. Written by Ikram Ghioua Translated by Mohamed Bouhabila

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Celebration MIRIAM MAKEBA, THE FEMALE VOICE OF THE REVOLUTION

Ana horra fi El jazaïr I enjoy freedom in Algeria , I am free in Algeria Written by Ikram Ghioua Translated by Mohamed Bouhabila

That’s how Miriam expressed her feelings loudly and proudly on the stage in Algiers when her people in South Africa were enduring all kinds of sufferings under the brutal and oppressive rule of Apartheid regime.

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Makeba’s life has been a continuous and implacable fight against injustice and despotism and her struggle was not pleasant to the producers though. But her proven talent forced them to accept her as she was. Nevertheless, they tried hard to limit her audience and reduce her influence on the black people.


Algerians feel a wave of nostalgia for great, glorious and happy times. The generation of Algerians who got the chance to attend her galas animated in Algiers and listen to her singing live still remember that unforgettable day of the 1969 Panafrican festival in Algiers. It was more than a festival. It was markedly a jamboree.

N

on-conformist to the bones as she was by nature, she decided to wed Stokely Carmichael, the big boss of Black panthers and as a result she was deprived of her US residence permit immediately after her marriage and it has been denied to her ever since. Shortly afterwards, she was granted the status of ‘’ Citizen of Honor ‘’ by ten African countries including Algeria. Algeria was her eternal pride, as she herself put it, so much so that the then Algerian president Houari Boumedienne declared her Algerian citizen.

Miriam, a true african love Miriam’s songs were on purpose about the grief, soreness, distress and pain of her people and about their rebelliousness as well. She jubilated love and glory. Not only she transcended her kindred but also attracted millions of fans due to her real art and her vocal power and was able to lead them onto what freedom’s meaning is. She was for sure the beauty of African rhythm and her skills remain without a doubt unmatched till today. Miriam was the female voice of the revolution, the voice of the truth and the artistic expression of Apartheid’s dismantlement. Miriam Makeba was and still is the African dream’s ambassador to the world and the African aspiration to justice, freedom and dignity and the African good will too. The voice of the great South African singer Miriam Makeba disappeared on November the ninth, 2008 . She – bless her soul - was aged 76. Her voice can hardly be heard today among a mixture of a multitude of African rhythms and sonorities. But the mere name of Miriam still makes thousands if not millions of

At that time Algiers was really and truly the home of the brave and the Mecca for the free. Miriam enjoyed her repeated stays in Algiers and never missed out an opportunity to come to Algeria following the footsteps of her hero, Nelson Mandela, the leader and the symbol of Africans’ struggle for freedom and dignity. In 1963, the great Mandela went on a pilgrimage to the land of Algeria newly liberated from the French cruel and savage colonial occupation. When Mandela first visited Algeria , his people were under the oppressive rule of Apartheid regime and the international climate was then anti-imperialism and at that junction Algeria was doing a lot to help African peoples get free from their oppressors , particularly from the french colonialism. That Mandela’s visit to Algeria stayed etched in the memory of Algerian people and Miriam came to visit Algeria to highlight Mandela’s fight for freedom and she did it in the best manner possible when she let her soul cry out: ‘’ Ana horra fi El Djazair ‘’ while she was performing her legendary hit- song:

IFRIKYA …. AFRIQUE …..AFRICA

in three languages and that was a resounding declaration of true love for Africa and its peoples. The famous song was performed very well by Miriam who shared it with the mythical ex RTA chorus. Makeba was deprived of her basic rights as human being in her own country that was under the rule of greedy oligarchs who came from Britain and the Netherlands and occupied the country and exerted on the indigenous population a savage domination so cruel that people were herded like brainless aminals in Bantustans with no right at all. With this idea of oppression and domination in mind, Makeba found in Algeria a warm welcoming asylum land ‘‘promised ‘’ to all the oppressed persons on Earth.

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and her appearance in the movie “” Come back Africa ‘’ was fateful for her although the filmmaker Lionel Rogosin was American native citizen. She was severely punished and forced to go into exile for a long period. Worse, she was not allowed to attend the funeral and the burial of her mother who died in 1960. Miriam must then have felt the sheer bitterness of the worst human injustice beyond imagination.

Her exile in three decades

Zenzi. That’s how everybody liked to call Miriam who was born on March the fourth, 1932 in Johannesburg, South Africa. When she was twenty years old, she started singing and nurturing her voice that was already powerful at that time. Because of her poor living conditions, she had to work hard in order to win the wherewith buy food for her daughter and her sick mother. It was not easy for her to alone bring her daughter up and take care of her mother. The throes of life, injustices and segregation aroused her political consciousness quite early. The segregation was worse than racism; it was race hatred, a denial to be human with black skin. She worked with Cuban Brothers for a while then she teamed up with Manhattan Brothers Group as a choir member with a new stage name: Miriam.

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As an artist, she was able to denounce Apartheid regime and inform people against it and about its atrocities and abominable crimes. In 1956, she came up with her hit-song ‘’ Pata, pata ‘’ and started touring the world singing ‘’Pata, pata ‘’ that had tourned out to be her greatest success ever. She was politically engaged against Apartheid regime and against US imperialism

Makeba was able to return to her native country only after Mandela was freed from Apartheid prison. She started singing Mandela’s cause in zoulou, xhosa, tswana, swahili and in arabic, Makeba had espoused Mandela’s cause from the very start and made it her own cause. ‘’ Ana horra fi el djazair ‘’ was sung once again in Algiers in 1978 on the occasion of the Panafrican games in Algeria. Algeria, the country Makeba viewed and loved as hers, also suffered from the occupation and oppression under France brutal rule for nearly a century and a half. That’s why Makeba was feeling at home in Algeria. Makeba’s melodies expressing tolerance and peace were broadcast without limitation or restriction on all channels that were operating by then. All Makeba’s songs conveyed the strong expression of dignity of African people and because of that Makeba became the living symbol of the struggle against Apartheid regime. A while before she retired in 2005, she published her autobiography under the title of: Makeba ‘’ My story ‘’. The diva was dreaming of a strong and united Africa, making an appeal for pardon and forgiveness. Makeba originated the famous expression: ‘’ Let us grow up, White and Black people must come to know each other and learn how to live together ‘’ The great Makeba breathed her last in Italy on November the ninth, 2008. She was 76. Bless her soul! Makeba and her voice passed away leaving behind a legendary combat for freedom and dignity for the new generations to learn from Written by Ikram Ghioua Translated by Mohamed Bouhabila


lemqam

Photo Walid Hamida

Lisez et faites lire Maqam


Constantine Capitale de la Culture Arabe 2015

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Photo Lamine Hamida

www.qasantina2015.org


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